Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 13 - Témoignages du 26 octobre 2009 - Séance du matin


OTTAWA, le lundi 26 octobre 2009

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui à 10 heures pour surveiller l'évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne (sujet : résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité).

Le sénateur A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Chers collègues, le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui pour surveiller l'évolution de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne.

À l'intérieur de ce vaste mandat, nous avons décidé de nous pencher plus particulièrement sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité. C'est dans cette optique que nous étudierons les résolutions subséquentes des Nations Unies et du Conseil de sécurité.

Nous accueillons avec plaisir les intervenants d'aujourd'hui, qui témoigneront par vidéoconférence. D'autres sénateurs devraient se joindre à nous, mais je vous présente déjà ceux qui sont arrivés : je suis le sénateur Raynell Andreychuk, présidente du Comité des droits de la personne, et voici le sénateur Jaffer, vice-présidente du comité, ainsi que les sénateurs Munson et Brazeau.

Pour les besoins de la vidéoconférence, je demanderai à tous les sénateurs de commencer par s'identifier lorsque viendra le temps des questions.

Nous accueillons aujourd'hui, des Nations Unies, le chef du Groupe des pratiques optimales de maintien de la paix, du Département des opérations de maintien de la paix, M. David Haeri. Il est accompagné de Fernanda Tavares, conseillère principale en genre.

Nous commençons habituellement par les exposés préliminaires de nos témoins, suivis des questions des sénateurs.

Je cède donc la parole à David Haeri.

David Haeri, chef, Groupe des pratiques optimales de maintien de la paix, Département des opérations de maintien de la paix, Nations Unies : Le sujet d'aujourd'hui nous est bien connu, à moi et à Mme Tavares. Je vais commencer par un bref exposé, mais si jamais, à la fin, Fernanda souhaite m'interrompre pour me rappeler un point important que j'aurais pu oublier, ce serait une bonne façon de procéder en tandem. C'est cependant moi qui vais commencer.

Pour illustrer la manière dont est mise en œuvre la résolution 1325 du Conseil de sécurité, je parlerai brièvement de ce que le Département des opérations de maintien de la paix a fait à ce jour, du partenariat avec les pays contributeurs de troupes et de policiers, peut-être aussi des partenariats avec les différents organismes régionaux, puis des enjeux entourant la participation des femmes aux processus de paix ayant lieu dans leur pays. Je tenterai d'être bref et de vous brosser un portrait sommaire de la situation.

Sur le plan des politiques, des directives et des cadres de responsabilisation, sachez que le Département des opérations de maintien de la paix s'est déjà doté d'un cadre stratégique. Nous avons également adopté, en 2006, une politique sur l'égalité des sexes, que nous avons assortie de lignes directrices et d'outils sur lesquels les missions de maintien de la paix peuvent s'appuyer pour faciliter sa mise en œuvre. Nous avons par exemple des lignes directrices sur l'égalité des sexes dans les corps policiers, dans le cadre d'élections, dans la sphère politique, et cetera, et la liste continue de s'allonger.

Les quartiers généraux de la plupart des missions se sont également dotés d'un plan d'action, et la plupart de celles-ci peuvent compter sur un groupe de travail sur l'égalité des sexes, lequel, à titre de mécanisme de mise en œuvre et de surveillance, peut faire le suivi des progrès par rapport à la résolution 1325 et souligner les bons coups. Le mécanisme de surveillance dont je parle réunit en fait plusieurs éléments de la mission, de sorte que la responsabilité ne repose pas uniquement sur une seule unité, mais aussi sur les responsables du désarmement, de la démobilisation, des élections, des affaires politiques, des militaires, et cetera. Ce qu'il faut retenir, c'est que la portée de la résolution 1325 est très large et qu'elle touche la quasi-totalité des aspects de la mission multidimensionnelle.

Nous avons également décidé de revoir et de mettre à jour l'essentiel de la documentation normalement distribuée aux pays contributeurs de troupes et de policiers et aux civils avant un déploiement. Pour le moment, elle se trouve sur la page consacrée à la formation du site Web du Département des opérations de maintien de la paix. Le vocabulaire utilisé tient maintenant compte des grands principes relatifs aux droits de la personne, au droit international humanitaire, à l'égalité des sexes, aux résolutions 1325 et 1820 et à la violence fondée sur le sexe.

De la formation est également offerte sur les lieux des différentes missions. Nos centres de coordination se concentrent surtout sur les formateurs, qui peuvent ensuite, une fois le déploiement terminé, former les autres groupes, qu'il s'agisse des militaires, des civils ou des policiers.

À propos du partenariat avec les pays contributeurs de troupes et de policiers, sachez qu'au cours des trois dernières années, nous avons mené une série de discussions stratégiques avec ces derniers afin de les convaincre d'augmenter la proportion de femmes en uniforme dans les opérations de maintien de la paix et de mettre en commun les pratiques qui les ont le plus aidés à recruter et à garder des femmes. C'est ainsi qu'en 2006, nous avons réalisé une enquête de référence sur la participation des femmes aux forces militaires et policières dans les pays contributeurs de troupes et de policiers.

Nous élaborons actuellement des lignes directrices sur l'égalité des sexes à l'intention du personnel militaire des missions de maintien de la paix. Ces lignes directrices seront également remises aux pays contributeurs de troupes, qui pourront alors s'en servir pour leurs propres processus de planification préalable aux déploiements.

Il y a beaucoup à dire concernant les partenariats avec les différents organismes régionaux. Encore tout récemment, en avril 2009, nous avons organisé un atelier d'une journée en collaboration l'Académie Folke Bernadotte, afin de créer un cadre de coopération systématique sur la mise en œuvre des résolutions 1325 et 1820 entre le Département des opérations de maintien de la paix et les différents organismes régionaux. C'était la première fois que des spécialistes de l'égalité entre les sexes de notre département, des missions de maintien de la paix, de l'Union européenne, de l'Union africaine, de l'Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe et de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, l'OTAN, ont pu mettre leurs expériences en commun et explorer diverses avenues de collaboration.

Ce processus nous aura finalement permis de dégager trois éléments concrets propices à la coopération et à la collaboration avec les organismes régionaux : l'harmonisation des normes de formation, les approches relatives à l'égalité des sexes dans les opérations de maintien de la paix, ce qui se traduirait dans les faits par une communauté virtuelle d'expertise permettant aux conseillers en égalité des sexes du Département des opérations de maintien de la paix et à leurs homologues des organismes régionaux de mettre en commun (et en temps réel) leurs connaissances et les renseignements en leur possession, et la rédaction de lignes directrices sur l'égalité des sexes à l'intention du personnel militaire des opérations de maintien de la paix. Notre département planche d'ailleurs actuellement sur leur rédaction.

Dans l'intervalle, nous avons pris des mesures concrètes pour accroître le nombre de femmes dans les opérations de maintien de la paix, notamment dans les postes de haut rang. Le Département des opérations de maintien de la paix, et son cousin, le Département de soutien aux opérations de maintien de la paix, à qui incombe tout ce qui touche le personnel et le recrutement, ont créé un groupe chargé des nominations de haut rang. Ce dernier doit notamment faire le suivi des postes à combler et tenir une base de données sur les femmes occupant des postes de direction.

Madame la présidente sait probablement déjà que le secrétaire général lui-même a fait de la nomination des femmes aux postes de direction des opérations de maintien de la paix une exigence et une priorité, et qu'il a demandé qu'au moins un des trois noms figurant sur les listes de candidats retenus en sélection finale qui lui sont soumises soit celui d'une femme.

Nous avons également lancé une étude sur la promotion d'un milieu de travail propice afin qu'un nombre accru de femmes compétentes et qualifiées décident de poursuivre leur carrière dans les opérations de maintien de la paix.

Un bref mot sur notre expérience avec les services de police étrangers : vous savez peut-être que le Libéria peut compter sur une équipe complète de policières. Eh bien, j'ai récemment parcouru quelques-uns de nos principaux pays contributeurs de troupes d'Asie du Sud, à savoir le Bangladesh, le Pakistan et l'Inde, et les responsables de ces pays nous ont tous dit qu'ils étaient tout à fait ouverts à l'idée de se doter eux aussi d'équipes semblables. L'expérience libérienne a été un succès remarquable, car elle nous a permis d'envoyer un signal fort dans l'ensemble de la mission — je dirais même plus dans l'ensemble du pays — sur le rôle que les femmes peuvent jouer parmi les Casques bleus.

Un mot maintenant sur les processus qui, au Département des opérations de maintien de la paix, nous permettent de faire valoir l'égalité des sexes dans nos milieux de travail et de donner de la formation sur le sujet, ainsi que sur les répercussions que ces processus peuvent avoir sur le terrain et dans les pays touchés.

Nous avons tout mis en œuvre afin que les programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration mis en œuvre au Libéria, au Soudan et au Burundi ne créent pas d'iniquités entre les sexes, que les femmes aient voix au chapitre et qu'elles fassent partie intégrante de ces programmes. Nous avons favorisé la participation des femmes aux processus de réforme du secteur de la sécurité du Libéria, du Timor-Leste et du Kosovo. Au Timor-Leste, beaucoup de femmes ont joint les rangs de la police nationale, de la fonction publique et de l'armée.

Nous avons également offert du soutien technique aux ministères responsables de la condition féminine et de l'égalité des sexes de la République démocratique du Congo et du Libéria concernant les questions touchant la violence fondée sur le sexe et la mise en œuvre de la résolution 1325, et les avons aidés à renforcer leurs capacités en la matière.

Je vais m'arrêter ici. Je vous rappellerai seulement qu'il ne s'agit que de quelques exemples parmi bien d'autres. Comme vous le savez sans doute, nos opérations de maintien de la paix sont multidimensionnelles, ce qui signifie que leurs mandats vont de la sécurité pure et simple à la réforme du secteur de la sécurité en passant par la gouvernance, la transition politique, les processus électoraux, la mise sur pied de nouvelles structures d'administration publique, le redressement rapide et la consolidation de la paix.

Notre objectif consiste évidemment à faire en sorte que les femmes soient prises en considération, qu'elles participent à tous ces processus et, pourquoi pas, qu'elles les dirigent et deviennent des leaders nationaux. J'ai tenté aujourd'hui de vous donner une petite idée de quelque chose de très vaste. Je ne sais pas si Fernanda Tavares veut ajouter quelque chose.

Madame la présidente, souhaitez-vous que nous parlions aussi de la résolution 1820? Pour le moment, j'ai surtout parlé de la résolution 1325.

La présidente : Bien sûr, la résolution 1820 relève aussi de notre mandat. Nous avons commencé par la première résolution historique sur le sujet, mais les résolutions subséquentes nous intéressent tout autant.

Fernanda Tavares, conseillère principale en genre, Groupe des pratiques optimales de maintien de la paix, Département des opérations de maintien de la paix, Nations Unies : Après l'adoption de la résolution 1820, on a demandé au Département des opérations de maintien de la paix de rédiger le rapport du secrétaire général sur le sujet. Le rapport en question, déposé le 13 juin 2008, a donné lieu à un débat en séance publique. La première version a été rédigée à partir des commentaires des missions politiques et de maintien de la paix, des départements et agences des Nations Unies, des États membres et des organismes non gouvernementaux.

Le rapport du secrétaire général reposait sur plusieurs grands piliers : il proposait notamment d'abolir l'impunité pour violence sexuelle en ciblant davantage les auteurs de crimes sexuels, d'améliorer les interventions en cas de violence sexuelle, de mieux protéger les personnes vulnérables et de surveiller la mise en œuvre complémentaire des résolutions 1820 et 1325.

Le rapport a fait l'objet d'un débat en séance publique, le 7 août, après quoi nous avons élaboré la résolution 1888. Nous procédons actuellement à l'analyse des tendances et des façons de faire sur le terrain, ce qui nous permettra de mieux guider les opérations de maintien de la paix et de les aider à appliquer les résolutions complémentaires à la résolution 1325, à savoir les résolutions 1820, 1888 et 1889. Il va sans dire que nous n'avons pas attendu ce rapport pour agir : nous avons en effet intégré la formation sur la violence sexuelle et fondée sur le sexe aux autres volets des missions car, comme on le dit si bien, la violence sexuelle va bien au-delà de l'égalité entre les sexes. Les autres volets se sont également attaqués de front à la question de la violence sexuelle. Les responsables des droits de la personne, de la primauté du droit et des services policiers ont toujours travaillé main dans la main avec les groupes de défense des droits des femmes, des enfants et des séropositifs afin d'aider les missions à s'orienter et à bien comprendre les tendances associées à la violence sexuelle et fondée sur le sexe, le tout dans le but d'aider les gouvernements à prendre des mesures concrètes et à renforcer les capacités des juges, des services correctionnels et de la police. Nous avons même créé des modules de formation sur le sujet à l'école de police.

Aujourd'hui, c'est-à-dire maintenant que la résolution 1888 vient d'être adoptée, nous sommes déjà sur le terrain au Tchad et au Darfour, comme nos collègues en République démocratique du Congo. Nous sommes à élaborer une approche normalisée qui permettra d'aider les gens sur le terrain à mettre cette résolution en œuvre au quotidien.

M. Haeri : Je tiens également à signaler que le secrétaire général fait tout ce qu'il peut pour que le bureau du représentant spécial du secrétaire général proposé dans la résolution 1888 soit mis sur pied rapidement, tout comme les éléments opérationnels qui s'y rapportent. Je vous dirais que le dossier progresse assez rapidement. Il va sans dire que les nominations de ce genre-là prennent un peu de temps, mais le secrétaire général en a fait une priorité absolue.

La présidente : La résolution 1888 a aussi le désavantage d'être très générale. Le secrétaire général devra bien la définir s'il souhaite la mettre en œuvre, parce que, pour le moment, elle ratisse très large et pose beaucoup de questions, mais donne peu de réponses.

M. Haeri, vous avez d'abord parlé des mesures prises par les Nations Unies. Dans certains cas, vous avez dit que l'on s'apprêtait à instaurer des lignes directrices, dans d'autres, qu'elles étaient déjà instaurées et que dans d'autres encore, on était en trait de les réviser. Où peut-on s'adresser pour savoir exactement ce qu'il advient de la résolution 1325?

Personnellement, j'ai beaucoup de mal, et je crois que c'est le cas de tous les membres du comité, à savoir ce qui a été fait à propos de la résolution 1325. C'est une excellente résolution, mais c'est très difficile de savoir si elle a été mise en œuvre, et comment.

Pouvez-vous nous aider?

M. Haeri : Mme Tavares pourra certainement vous en dire plus que moi. Mais je ne nie pas, comme vous l'avez dit vous-même, que la résolution 1325 ratisse large. Il va donc sans dire que le travail est éparpillé parmi les nombreux volets de nos missions. La difficulté consiste à réunir le tout en un ensemble cohérent, précisément à cause de la vaste portée de la résolution. Lorsque nous faisons rapport sur un processus électoral auquel nous avons participé, sur un programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration, sur une initiative liée aux droits de la personne ou sur une mission de rétablissement rapide et de consolidation de la paix, la résolution 1325 devrait se retrouver dans chacun de ces éléments. Nous faisons constamment rapport sur le travail effectué dans le cadre de nos missions, et il faut admettre que ça donne une grande quantité de données.

La question des lignes directrices est plus simple. Nous avons créé un site Web où se retrouve l'ensemble des documents relatifs à la formation et à l'orientation. C'est donc là que vous pourriez trouver les renseignements que vous cherchez. Nous informons toujours les missions permanentes, la vôtre comme toutes les autres présentes à New York, dès que de nouveaux documents de formation sont prêts.

En ce qui concerne le suivi des mesures se rapportant à la résolution 1325 dans son ensemble, je dois convenir avec vous que le suivi n'est peut-être pas aussi concis qu'on pourrait le souhaiter.

Fernanda, souhaitez-vous ajouter quelque chose sur la manière dont nous faisons rapport sur la résolution 1325 et sur la manière dont le suivi se fait surtout par l'entremise des rapports des différentes missions au lieu d'être regroupé dans un seul et unique rapport?

Mme Tavares : La résolution 1325 a beaucoup contribué à l'égalité des sexes dans le cadre même des missions sur le terrain. Nous pouvons maintenant compter sur 12 conseillers et conseillères à l'égalité des sexes répartis dans l'ensemble des missions de maintien de la paix, et sur des centres de coordination dans les autres missions. Il fut un temps où le poste de « conseiller en genre » n'existait même pas. Maintenant, nous avons des conseillers et des ressources à plein temps dans chacune de nos missions de maintien de la paix.

La formation sur l'égalité des sexes est obligatoire, autant avant les déploiements que pendant l'entraînement préalable aux missions. Les ressources sont là, mais comme ce sont surtout des conseillers, elles ne prennent pas part aux opérations en tant que telles. Nous devrions cependant renforcer la capacité qu'ont les missions de promouvoir l'égalité des sexes et intégrer la question à l'ensemble de leur mandat. Nous intégrons l'égalité des sexes aux programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration, à la réforme du secteur de la sécurité, aux activités policières, à la primauté du droit; bref, à tous les volets des missions. Toutes les formations liées aux programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration parlent d'égalité des sexes. Nous procédons actuellement à la révision de la directive stratégique sur l'égalité des sexes et les activités adoptée en 2006 afin d'y inclure une disposition sur les résolutions 1820 et 1888, qui viennent d'être adoptées.

Nos lignes directrices et nos outils découlent de la politique, mais nous sommes obligés de traduire celle-ci en termes pratiques parce que nous faisons face à un roulement élevé du personnel, aussi bien du personnel civil que du personnel en uniforme. Nous devons toujours transposer la politique et la lier aux mandats sur le terrain.

Nous avons des lignes directrices opérationnelles pour la police, et nous en sommes à la dernière étape d'élaboration de lignes directrices pour les militaires. Nous avons entrepris ce travail en étroite consultation avec les pays qui envoient des troupes et avec les États membres. Au cours des prochains mois, nous aurons la validation ici, à New York. Toutefois, nous appliquons sur le terrain, de façon active et continue, les lignes directrices sur l'égalité des sexes pour la police et les agents de DDR; nous avons également deux trousses d'information pour la réforme du secteur de la sécurité, le RSS. À cela s'ajoutent nos lignes directrices sur l'égalité des sexes dans le contexte des élections, et tous les fonctionnaires électoraux savent comment s'y prendre pour inclure l'égalité des sexes dans la campagne de promotion, l'inscription électorale et la campagne civique afin de couvrir tous les aspects, même l'équilibre entre hommes et femmes aux bureaux de vote.

De plus, la haute direction a pris des moyens plus proactifs et clairs pour ce qui est de donner suite aux préoccupations liées à l'égalité des sexes dans les missions.

Depuis l'adoption de la résolution, beaucoup de progrès ont été réalisés dans les missions de maintien de la paix. Au chapitre de l'obligation de faire rapport, les missions doivent produire des rapports trimestriels sur la mise en œuvre des résolutions, rapports qui sont présentés au siège de l'ONU. Mentionnons aussi le rapport annuel présenté au Conseil de sécurité par le Bureau de la conseillère spéciale du secrétaire général pour la parité entre les sexes et la promotion de la femme. Le bureau communique l'information et prépare le rapport en étroite consultation avec notre département.

M. Haeri : Madame la présidente, votre question portait sur l'obligation de faire rapport. Madame Tavares, diriez-vous qu'on trouve toute l'information consolidée dans le rapport de la conseillère spéciale?

Mme Tavares : Le DOMP publie son rapport d'étape tous les ans et, conformément à notre pratique communautaire, nous communiquons tous les résultats sur le terrain. Beaucoup a été fait, sauf en ce qui concerne le processus de médiation, où nous devons faire plus pour mettre en œuvre l'aspect qui encourage la participation des femmes aux processus de maintien de la paix et de négociation.

À ce titre, nous travaillons avec le Département des affaires politiques des Nations Unies, le DAP. En juin dernier, nous avons organisé un important colloque et, à l'instar du Fonds de développement des Nations Unies pour la femme, l'UNIFEM, nous avons tous abordé la question, et tout le monde est arrivé à la conclusion qu'il est nécessaire d'améliorer la participation des femmes aux négociations de paix et aux processus de paix.

Le sénateur Jaffer : Merci beaucoup; vous nous avez fourni beaucoup d'informations.

Je vais commencer par la résolution 1820. Vous avez dit que le secrétaire général envisage de nommer une personne. Avez-vous un échéancier pour la nomination? Quand pouvons-nous l'espérer?

M. Haeri : Je ne peux rien ajouter de plus à ce que j'ai déjà dit, à savoir que le secrétaire général considère cette nomination une priorité, et je sais qu'il mène actuellement des consultations de haut niveau sur des candidats possibles qui méritent d'être pris en considération. Je sais qu'il reçoit ce genre d'informations, mais pour ce qui est de l'échéancier, c'est vraiment à sa discrétion, et j'ignore honnêtement à quel moment on pourrait espérer que la nomination soit faite; tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il s'agit d'une haute priorité. Comparativement à d'autres nominations de ce genre, je m'attends à ce que cela se fasse rapidement. Nous recevons de nombreuses demandes au niveau de l'effectif pour fournir un apport et préparer des points de discussion à l'intention du secrétaire général en prévision de réunions sur le sujet. Dans les tranchées où nous travaillons, cette question semble susciter beaucoup d'attention.

Le sénateur Jaffer : Je respecte absolument les mesures prises par le secrétaire général, mais quand vous avez dit qu'il nommerait quelqu'un sous peu, j'ai cru que vous aviez fixé une date limite.

Je m'intéresse particulièrement au volet formation. Vous avez dit avoir des modules de formation. Pouvez-vous nous dire combien vous en avez? Fait plus important, quelle sorte de formation offrez-vous, avant et pendant le déploiement des troupes, sur les questions relatives à la résolution 1325 et à la résolution 1820, surtout en ce qui concerne les questions de violence sexuelle?

M. Haeri : Le Département des opérations de maintien de la paix compte une section appelée le « service intégré de formation ». C'est intégré parce qu'il rassemble la formation destinée au personnel civil, aux militaires et à la police.

Comme vous le savez peut-être, à l'heure actuelle, nous avons quelque 115 000 membres du personnel sur le terrain. Pour ce qui est de l'effectif militaire et policier, il y a une rotation tous les six mois; ainsi, dans une année donnée, on compte près de 200 000 Casques bleus qui se préparent soit à se rendre à une opération de maintien de la paix, soit à en quitter une.

Je ne connais pas les chiffres exacts, mais je pense que notre service intégré de formation emploie environ 35 à 40 personnes. Je signale ces chiffres pour montrer que, de toute évidence, notre service de formation n'offre pas de la formation aux 200 000 personnes. En ce qui a trait à la formation préalable au déploiement, nous fournissons du matériel de base en ligne qui couvre une vaste gamme de questions, allant du type de tâches que les soldats et les policiers doivent s'attendre à exécuter jusqu'à l'environnement dans lequel ils doivent s'attendre à travailler.

Une troisième unité porte sur les questions qu'il faut garder à l'esprit pour bien s'acquitter du mandat attribué. Cette troisième unité englobe les droits de la personne, le droit international et humanitaire et les questions d'égalité des sexes. Les questions d'égalité des sexes sont présentées dans le contexte des résolutions 1325 et 1820. Bien entendu, comme la résolution 1888 est récente, nous devrons envisager de mettre à jour l'unité. Celle-ci est disponible pour une formation préalable au déploiement. Ce sont les États membres qui sont chargés d'offrir la formation préalable au déploiement. Notre service de formation assure une liaison avec eux pour faire en sorte qu'ils aient ce dont ils ont besoin.

Par ailleurs, nous assurons une liaison étroite avec les centres de formation pour le maintien de la paix partout dans le monde, parmi lesquels certains offrent de la formation et d'autres appuient la formation; à ce titre, nous avons travaillé étroitement avec l'institut du Canada. Avant la réunion, Mme Tavares m'a parlé de la formation à laquelle elle participe pour appuyer les Casques bleus en Afrique de l'Ouest.

Mis à part l'établissement des normes et la prestation des modules, nous ne sommes pas en mesure d'offrir, par nous-mêmes, de la formation avant le déploiement. En ce qui concerne la phase de postdéploiement, c'est-à-dire quand le personnel en uniforme arrive, nos missions ont un centre intégré de formation qui rassemble les points focaux en matière de formation pour les militaires, les policiers, le personnel civil et les questions d'égalité des sexes. Les formateurs veillent à ce qu'une formation de suivi soit offerte dans le cadre de la mission. Ils forment des formateurs. Par exemple, si un contingent provient d'un pays qui contribue à l'effort militaire des troupes, le pays est censé affecter un formateur qui peut ensuite être formé par le centre intégré de formation de mission afin d'offrir de la formation aux troupes, au besoin, dans le cadre de la mission. Évidemment, la langue pose parfois problème, et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons besoin d'un modèle de formation. La formation après le déploiement comprend une formation sur les résolutions particulières relatives aux questions d'égalité des sexes dont nous avons discuté; bien sûr, cette formation peut fournir un peu plus de renseignements sur l'environnement local que ce qui peut être fourni durant la formation préalable au déploiement.

Mme Tavares pourrait également ajouter quelque chose, étant donné qu'elle a rempli une telle fonction tant au siège de l'ONU que sur le terrain, en Côte d'Ivoire.

Le sénateur Jaffer : Je voudrais vous poser une question bien précise. Je respecte le travail que vous accomplissez, malgré vos défis et votre personnel réduit. Je ne m'attends pas à ce que vous formiez 200 000 personnes. Dans le cas de la formation des formateurs, j'aimerais savoir, madame Tavares, comment vous faites pour vous assurer qu'une telle formation a bel et bien été fournie? Je ne m'attends pas à ce que vous offriez la formation, mais quand les troupes sont formées, quelqu'un vous en informe-t-il? Comment vous y prenez-vous pour savoir si les troupes ont été formées?

Mme Tavares : En fait, nous offrons une formation, parce que nous n'avons pas la capacité de le faire sur le terrain. C'est nous qui créons cette capacité. Les gens reçoivent une formation préalable à leur affectation mais, une fois sur les lieux, nous ne leur donnons pas une formation portant uniquement sur la résolution 1325. Nous leur enseignons la notion d'égalité des sexes et les normes des Nations Unies. Ces personnes qui sont postées pendant six mois n'ont pas l'expérience de l'ONU. C'est une des difficultés auxquelles nous sommes confrontés. Les gens qui sont affectés à ces postes ont leur propre culture et leurs propres perceptions. C'est pourquoi nous devons mieux les renseigner et présenter l'information de sorte qu'ils sachent ce qu'on attend d'eux sur le plan opérationnel et ce que la population attend de nous tous sur le terrain en tant qu'agents des Nations Unies.

Nous les formons, mais formons-nous les formateurs en ce qui concerne les contingents? C'est nous qui formons les agents, le service militaire et les officiers supérieurs de la police et de l'armée. Nous formons également les civils mais, lorsque nous le pouvons, nous formons des formateurs qui sont affectés aux cellules de formation intégrée des missions. Ces cellules peuvent continuer de suivre l'évolution de la formation et de donner des cours dans tous les districts des pays où nous sommes postés. L'unité responsable de l'égalité des sexes doit fournir la compétence et la capacité nécessaire pour surveiller la façon dont la formation est donnée, pour évaluer les écarts et pour tenter de les combler.

En ce qui concerne les contingents, nous éprouvons encore plus de difficultés en raison des barrières linguistiques. Celles-ci représentent un véritable défi pour la plupart des pays qui contribuent aux troupes. Cependant, nous suivons les formateurs pendant leur séjour au sein de la cellule de formation intégrée de la mission.

Nous organisons également de la formation sur le terrain sur le thème de l'égalité des sexes à l'intention du personnel de DDR et lors d'élections. Lorsque des élections sont tenues, il est important que tous les types d'employés postés sur le terrain reçoivent une formation sur l'égalité des sexes leur permettant d'atteindre le degré de compétence que nous devons leur fournir. Nous travaillons étroitement avec eux.

En ce qui a trait au DDR, avant de commencer à analyser les antécédents des anciens combattants appartenant aux divers groupes de compatriotes, nous collaborons étroitement avec les agents de DDR afin qu'ils fassent respecter les aspects relatifs aux femmes associées aux unités de combat. Pour ce qui est de la réforme du secteur de la sécurité, nous donnons aux agents une formation dans chaque domaine de compétence afin qu'ils veillent au respect des aspects relatifs aux femmes qui suivent : le genre de structures que nous cherchons à établir pour la police de chaque pays; la façon dont nous évaluons la violence sexuelle; la manière dont nous formons les gens qui s'occupent des victimes; et la façon dont nous mettons sur pied des unités fonctionnelles qui règlent les questions d'égalité des sexes. Nous offrons cette formation pendant toute la période où nous participons à la mission, mais simultanément nous donnons de la formation générale : une séance d'orientation initiale, une formation initiale et une formation générale obligatoire sur l'égalité des sexes à l'intention de tous les civils et de tous les membres de la police militaire.

Le sénateur Jaffer : Je n'ai pas l'intention de vous interrompre. Je peux trouver sur votre site Web le genre de formation que vous offrez. Je veux plutôt savoir combien d'heures de formation vous offrez lorsque les troupes sont sur le terrain. Tenez-vous un compte précis des heures de formation que vous donnez avant que les troupes soient déployées? Je veux savoir comment vous suivez l'évolution de la formation donnée relativement à la résolution 1325, la résolution 1888 et la résolution 1820.

Mme Tavares : Nous offrons une heure de formation dans le cadre de la séance d'orientation initiale.

M. Haeri : Pour répondre à votre question, si je l'ai bien comprise, sénateur, nous savons que les pays qui fournissent les troupes s'occupent de la majeure partie de la formation offerte au personnel en uniforme avant son déploiement. Nous ne sommes évidemment pas présents. Vous voulez savoir comment nous sommes certains qu'elle a lieu. Comme je l'ai mentionné, nous avons une section jumelle, une section de formation intégrée. Je préférerais qu'elle vous fournisse ce genre de détails. Je vous ferai donc parvenir par courrier électronique une réponse comportant tous les renseignements nécessaires.

En ce qui concerne mon degré de participation, la plupart des grands pays qui contribuent aux troupes possèdent un centre de formation national ou régional ou ont recours à l'un d'eux. Bon nombre de pays nous ont demandé de valider leurs exercices de formation, et c'est l'une des façons dont nous pouvons tirer parti de notre petit service de formation pour assurer la normalisation. Lorsque nous sommes en mesure de le faire, nous visitons leurs centres de formation pendant deux ou trois jours; nous observons la formation initiale que reçoivent les gens et nous la validons. Nous leur disons qu'elle semble respecter la norme. C'est l'un des moyens de garantir la normalisation de toutes les formations offertes par un éventail diversifié de contributeurs.

À Sydney, en novembre, tous les centres de formation des forces internationales de maintien de la paix se réuniront, et nous serons là accompagnés de notre section de formation et de mon directeur, Izumi Nakamitsu. Nous leur parlerons précisément de ce genre de questions. Tirer parti de notre relation avec les centres de formation est probablement la meilleure façon de procéder.

Pour ce qui est de la surveillance suivant la formation, je me hasarderai à faire une hypothèse, mais je vous donnerai ensuite une réponse plus détaillée. Il nous est difficile d'entreprendre un suivi étroit de la formation à cette échelle. Pour être honnête, assurer un suivi rigoureux de la formation est un défi de taille même pour les militaires permanents qui jouissent d'un public captif qu'ils peuvent observer tout au long de leur mandat, parce que l'incidence d'une formation est une chose qu'on doit mesurer encore et encore.

Si vous le souhaitez, je vous fournirai une réponse plus détaillée quant aux autres mécanismes de surveillance dont nous disposons.

Le sénateur Jaffer : J'ai bien d'autres questions, mais je les poserai pendant la deuxième série de questions.

La présidente : Je rappelle à nos témoins et aux sénateurs que notre temps est limité. J'espère que les questions et les réponses peuvent être abrégées. S'il y a d'autres détails à ajouter, vous pouvez faire un suivi par écrit, ce qui nous sera utile.

Le sénateur Nancy Ruth : Parlez-nous, alors, de la surveillance que vous exercez sur le terrain. Lorsqu'on vous renvoie des rapports écrits, comment les évaluez-vous? Comment arrivez-vous même à déterminer les pratiques exemplaires?

J'aimerais entendre une histoire à propos des pays où les Nations Unies sont intervenues et ont eu un effet bénéfique, en dehors du Libéria et de la section de police féminine — ou y compris cet exemple —, à propos des endroits où cela n'a pas fonctionné et, peut-être, des endroits où cela a fonctionné à moitié. Finalement, l'important, c'est ce qui se passe sur le terrain.

M. Haeri : En ce qui concerne nos rapports, la plupart de nos missions font rapport au moins annuellement, et la plupart de nos missions complexes et multidimensionnelles, comme celles dont nous parlons ici, le font tous les six mois, ou même dans un délai moindre. Elles envoient des rapports écrits au moins une fois par année. Le Conseil de sécurité reçoit nos rapports tous les mois ou même tous les trois mois.

Le sénateur Nancy Ruth : Puis-je vous interrompre pour vous demander qui « ils » sont? Sont-ils les experts en matière d'égalité des sexes? Qui sont ces gens qui établissent des rapports?

M. Haeri : Je faisais allusion aux rapports que nous devons faire au Conseil de sécurité à propos d'une certaine mission. Prenons, par exemple, le Darfour. Il y aura une séance d'information sur le Darfour. L'année dernière, nous faisions rapport tous les mois. Ce rapport sera présenté ici, au siège social, par le sous-secrétaire général ou le secrétaire général adjoint, ou, si le représentant spécial est en visite, par un coreprésentant spécial. Ces rapports sont transmis à l'échelon supérieur. Ils réunissent toutes les facettes du mandat à rapporter.

En outre, le rapport annuel sur la mission, le rapport écrit, traite habituellement des questions d'égalité des sexes et des droits de la personne. Le Conseil de sécurité des Nations Unies mettra les missions à l'ordre du jour, et nous serons tenus de faire rapport sur elles.

Ensuite, l'unité sur l'égalité entre les sexes fournit des rapports trimestriels aux quartiers généraux du DOMP, puis nous intégrons ces documents dans notre rapport général au Conseil de sécurité et à l'Assemblée générale de l'ONU.

J'ai parlé des comptes rendus présentés au Conseil au sujet de la mise en œuvre du mandat. L'Assemblée générale plénière, évidemment, s'intéresse également à ces questions et fait appel à notre unité sur l'égalité entre les sexes, par exemple, pour être mise au courant. Le Comité spécial sur les opérations de maintien de la paix, le C-34, relève de l'Assemblée générale. Le Canada est représenté là-bas, comme tous nos autres pays fournisseurs de troupes. Ce comité spécial tiendra également des séances au sujet de la mise en œuvre de mesures relatives à l'égalité entre les sexes.

Vous avez également demandé comment nous savions en quoi consistaient les pratiques exemplaires. Ce sont le Groupe des pratiques optimales et l'unité sur l'égalité entre les sexes qui sont chargées de regrouper les meilleures pratiques. Les missions comportent aussi bien des agents de programme des meilleures pratiques que des points focaux en matière d'égalité entre les sexes. Le travail de ces agents consiste en partie à préparer des analyses après action en lien avec une activité majeure d'une mission ayant des répercussions importantes sur les sexes, et à préparer un rapport sur les leçons apprises. Lorsque nous voyons une question sur laquelle nous voulons nous concentrer afin de mettre sur pied quelques missions et de préparer une analyse, nous pouvons le faire également en plus de communiquer des leçons apprises. Nous aurons alors des documents d'orientation traitant de toutes les leçons retenues à la disposition de toutes les missions. Nous avons également une communauté de pratique, dont je crois avoir déjà fait mention, de sorte que d'une mission à l'autre, les points focaux permettront de partager les expériences en temps réel.

Vous avez aussi demandé qu'on vous parle d'une bonne expérience. Je vais vous raconter une anecdote, à titre d'exemple. Au Timor-Leste, vous vous souviendrez peut-être que l'ONU avait été chargée d'agir en tant qu'administration de transition pour aider ce pays, dont la population avait réclamé l'indépendance, à passer du stade du référendum au stade de l'indépendance. Au cours de cette période, nous avons mis sur pied un gouvernement et des institutions publiques embryonnaires, dont la fonction publique.

Lorsque nous avons constitué la fonction publique, nous avons fait paraître une annonce où l'on demandait aux personnes ayant de l'expérience ou les qualifications nécessaires de déposer leur candidature, puis nous avons commencé à recruter. Le temps pressait, comme c'est toujours le cas dans ces situations. Nous nous sommes aperçus que c'était principalement des hommes qui répondaient à ces annonces. À mi-chemin de notre processus d'embauche, nous avions moins de 5 p. 100 de femmes parmi nos candidats.

Nous avons compris que nous devions atteindre les femmes d'une manière qui leur donnerait les moyens de se présenter et de se porter candidates à des postes dans l'administration civile et la fonction publique. Au cours de ce processus de recrutement, nous sommes allés dans les églises et dans les communautés locales, nous avons pris contact avec des ONG pour femmes, entre autres, et nous nous sommes rendus sur place pour encourager les femmes à faire une demande d'emploi. Nous avons dû veiller à ce qu'elles aient l'impression qu'il y avait aussi bien un encouragement de la part de la mission qu'un soutien de la société pour ce qui est de poser leur candidature pour un poste.

Alors qu'il nous restait seulement la moitié de l'effectif de la fonction publique à recruter, nous sommes arrivés à faire grimper à environ 25 ou 30 p. 100 la représentation globale au Timor-Leste. La petite République démocratique du Timor-Leste a connu une augmentation au chapitre de la présence des femmes dans sa fonction publique; j'ignore jusqu'à quel niveau, mais j'imagine qu'il se situe bien au-dessus du point médian pour la totalité des pays.

Mme Tavares : Le taux de représentativité des femmes est de 26 p. 100; et dans les régions, il est de 12 p. 100.

M. Haeri : Cette proportion est établie à 26 p. 100, alors que dans la région comparative, la fonction publique compte 12 p. 100 de femmes. Au départ, l'unité sur l'égalité entre les sexes de la mission n'a pas participé à cet exercice concernant la fonction publique. Je ne crois pas qu'il y ait eu là une quelconque mauvaise volonté. J'estime que les personnes concernées s'empressaient simplement de faire le meilleur travail possible. Toutefois, c'est l'unité sur l'égalité entre les sexes qui a établi le contact avec ses homologues au sein des ONG vouées aux femmes, et qui a entrepris de répondre à la question suivante : de quelle manière réalise-t-on cet exercice au Timor-Oriental pour que les choses marchent?

Il s'agit là d'un exemple. Évidemment, il y en a bien d'autres. Vous nous avez demandé un exemple où la mission n'avait pas bien fonctionné. Peut-être Mme Tavares pourrait-elle intervenir à son tour à ce sujet.

Mme Tavares : Je vais vous parler de l'exemple du Burundi. Nous éprouvons toutes sortes de problèmes, mais nous avons des femmes qui participent aux négociations de paix à Arusha. Ensuite, nous sommes arrivés à faire intégrer dans la constitution un système de quotas concernant la représentation des femmes, et nous avons révisé le droit électoral en tenant compte des préoccupations sexospécifiques, surtout en ce qui a trait à la législation électorale.

Pour ce qui est du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration, nous avons pu remédier à des préoccupations liées au genre sur le plan de la démobilisation en plaçant des femmes dans les forces policières, principalement, et aussi dans l'armée. Pour ce qui est de la réforme du secteur de la sécurité, nous avons instauré dès le départ des procédures opérationnelles normalisées concernant la violence à caractère sexuel ou basée sur les sexes.

Le Burundi, pour la période allant de 2004 à 2006, est un exemple d'une bonne mission où l'on s'est attaqué à des préoccupations liées au sexe. Je ne dirais pas que le fait qu'elle ait été dirigée par une femme a eu des effets sur les résultats, mais du point de vue sexospécifique, cela a certainement eu une incidence. Cette mission a été dirigée par Carolyn McAskie à l'époque.

Le sénateur Nancy Ruth : Nous sommes fiers de Mme McAskie.

Le sénateur Munson : Je m'interroge sur les moyens que vous employez pour joindre le geste à la parole, lorsqu'on tient compte du fait qu'en septembre 2009, seulement 2 022 des 83 853 militaires déployés par l'ONU étaient des femmes. Avec tous ces programmes, vous attendez-vous à accroître le niveau de participation des femmes au sein du premier effectif militaire qui partira pour ces missions et qui aura reçu une formation?

M. Haeri : C'est assurément notre objectif. Évidemment, en ce sens, nous sommes un demandeur. Nous ne fournissons pas les troupes, alors le niveau de participation dépend des armées qui enverront des soldats. J'ignore si l'on peut dire qu'il s'agit d'une généralisation, mais je parierais que le nombre de femmes que comptent les forces armées de nos principaux fournisseurs de troupes est sans doute peu élevé; il est de 2 p. 100. C'est avec cette situation que nous devons composer.

Nous tentons de réaliser quelques initiatives spéciales, dont j'ai glissé mot tout à l'heure, comme les unités de police formées uniquement de femmes. Cette initiative a connu beaucoup de succès au Libéria en plus de créer un certain précédent. Comme je l'ai dit, on a également proposé cette même initiative récemment, alors que nous étions au Bangladesh et au Pakistan, par exemple.

Nous tentons de promouvoir cette idée. Nous avons discuté avec nos conseillers militaires et policiers qui sont ici. Toutes les missions permanentes — ce qui inclut le Canada, bien sûr — sont représentées par des conseillers militaires et policiers à New York, où l'on parle de la manière de recruter davantage de femmes. En ce qui touche le personnel en uniforme, une partie du problème est lié à nos pays fournisseurs et à leurs taux de représentativité relativement faibles. Du côté des forces policières, la moyenne est établie à 8 p. 100 de femmes chez nos pays fournisseurs de troupes.

Le sénateur Munson : Les États membres paient-ils leur juste part? Je vous demande cela en tenant compte du coût de ces activités. Aurait-on besoin d'un soutien accru, tant sur le plan financier que sur celui de la formation, de la part des États membres? Nous avons entendu dire récemment, en ce qui concerne le portrait d'ensemble de l'ONU, que seulement 15 ou 20 pays payaient leur juste part à cet organisme. Dans ce contexte particulier, les États membres assument-ils leur part des coûts de la formation, et ainsi de suite?

M. Haeri : La manière dont nous déterminons le soutien financier que nous recevrons comporte deux éléments. Premièrement, on procède à une évaluation qui s'appuie sur tous les États membres. À cet égard, évidemment, certains pays ont des comptes en souffrance, alors que ce n'est pas le cas pour d'autres. De manière générale, le portrait d'ensemble est bon, étant donné qu'un pays qui avait d'importants arriérés de paiement a réglé tout son dû dernièrement.

Ce budget évalué couvre les frais de la mission en tant que telle : le personnel, l'équipement et le déploiement. Une bonne partie des responsabilités en matière de formation, comme nous l'avons dit tout à l'heure, correspondent à la phase du prédéploiement. C'est un aspect qui est principalement la responsabilité du pays qui envoie les troupes. Les pays demandent souvent un soutien à la formation.

Nous avons dit plus tôt que le Centre Pearson pour le maintien de la paix avait contribué à offrir un soutien à la formation aux pays fournisseurs de policiers et de troupes. Il y aurait lieu d'accorder une aide plus importante à cet égard, pour des raisons de pure nécessité. Avec un déploiement de cette échelle, c'est-à-dire 115 000 militaires déployés, nous faisons appel à de nouveaux pays fournisseurs de troupes et de policiers, et un grand nombre d'entre eux n'ont pas beaucoup d'expérience. Les normes de formation et d'équipement, bien souvent, ne sont pas au niveau que nous souhaiterions.

Dans le cadre de notre programme de réforme plus vaste — nous avons surtout traité des questions liées au genre, ici — le Département des opérations de maintien de la paix a proposé une forme de programme plus élargie dans un document intitulé Nouvel Horizon, où l'on traite d'un certain nombre de défis auxquels sont confrontées les opérations de maintien de la paix. L'un d'eux consiste à accroître l'attention accordée au rendement : non pas en ce qui a trait seulement aux chiffres dont nous avons parlé ni à la formation en soi, mais en ce qui touche les résultats en matière de rendement; non pas en ce qui concerne ce à quoi une unité devrait ressembler, mais ce qu'elle devrait être capable de faire.

Sur ce plan, pour être honnêtes, nous constatons des lacunes en matière de rendement sur le terrain. Une partie du problème, dans une certaine mesure, est due au fait qu'à ce niveau de déploiement, nous utilisons au maximum les ressources disponibles dans le monde.

Pour les États membres qui en ont les moyens, fournir une aide à la formation est important, particulièrement pour les pays qui sont moins en mesure de former leurs troupes. Dans ces États, j'ajouterais qu'il y a un problème sur le plan de la durabilité de la formation. C'est-à-dire que les ateliers ponctuels sont une bonne chose, mais les pays assurent une formation à un petit nombre de personnes, et il n'y a pas nécessairement de suivi. Sans vouloir recourir à une expression paternaliste comme le parrainage ou le marrainage, je dirais qu'un certain type de relation à long terme est nécessaire entre les États membres pouvant disposer des ressources voulues mais n'assurant pas un déploiement direct de troupes dans le cadre des Casques bleus, et ceux qui déploient des troupes directement à titre de Casques bleus, mais qui ont moins de ressources. Ce genre de chose pourrait être très utile. Il y a des lacunes dans ce domaine.

La présidente : Je sais que votre prochaine question sera brève. Puis-je demander aux témoins de donner de courtes réponses également, pour que tous les sénateurs aient la chance de poser des questions?

Le sénateur Munson : J'aimerais avoir une idée des activités qui ont lieu dans le cadre des opérations de maintien de la paix. Le Canada avait une excellente réputation de gardien de la paix, et ces programmes sont louables en ce qui a trait à la formation sur les genres.

Les temps ont changé, et j'aimerais connaître votre point de vue sur la situation actuelle dans la sphère du maintien de la paix. On dirait que nous nous sommes quelque peu égarés dans un autre domaine où l'idée est de faire la guerre, et non d'assurer la paix.

M. Haeri : Il sera difficile de répondre à cette question brièvement. Je vous recommande de lire le document Nouvel Horizon. Il précise quels sont les défis et les lacunes à cet égard.

En cinq phrases environ, je vous dirais que c'est une question d'échelle et de complexité. Nous administrons 15 opérations de maintien de la paix, et deux autres faisant appel à des civils, notamment en Afghanistan. Un tel nombre met à rude épreuve le système de maintien de la paix.

On doit aussi tenir compte de questions importantes, même en ce qui concerne le maintien de la paix, où le recours à la force devient davantage un problème relativement à la protection des civils et des femmes, ou encore le maintien de la paix robuste, et cetera.

Je dirais qu'il y a un problème à l'ONU actuellement car, alors que les opérations de maintien de la paix deviennent plus exigeantes, puisqu'elles sont davantage complexes et à plus grande échelle, et alors que les nations hôtes nous donnent de moins en moins leur consentement et que les missions deviennent plus dangereuses, cette dualité au sein du système des Nations Unies crée une tension, dans le contexte où certains pays fournissent des troupes, et quelques pays assurent un mandat et peut-être une politique, de la formation et autres choses.

Les pays qui fournissent des troupes ne sont pas nécessairement mus par un intérêt stratégique national. Pour n'en nommer que quelques-uns, le Bangladesh, le Pakistan et l'Inde n'ont pas nécessairement un intérêt stratégique national à participer aux opérations au Congo. Si l'ONU est une organisation basée sur une réponse collective à une menace de sécurité collective, et que seuls certains pays envoient des troupes alors que d'autres ne le font pas, cette situation crée naturellement des tensions, comme ce serait le cas dans n'importe quel organisme voué à une intervention collective. Cette dualité est un problème.

En même temps, on accorde davantage d'attention et de soutien au maintien de la paix et, en général, au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, les États membres se montrent plus résolus à voir les choses fonctionner. On a aussi des raisons d'être optimistes et d'entrevoir des possibilités.

Un intense dialogue a lieu au sein du Conseil de sécurité. Dans ce dialogue, le Canada a joué un rôle de leader. Il collabore avec nous pour organiser des séminaires sur différentes questions directement en lien avec les défis qu'on doit relever en matière de maintien de la paix ici, à New York.

Le sénateur Mitchell : Merci de nous consacrer cette période de temps. C'est utile.

Le Canada, comme ma collègue l'a dit, a joué un rôle important dans le domaine du maintien de la paix et pour ce qui est d'autres missions au fil des ans. Nous sommes fiers de nos forces armées, et particulièrement en ce moment, pour le travail qu'elles accomplissent en Afghanistan.

Toutefois, certains d'entre nous estimons que nos forces ne comptent pas autant de femmes que nous le souhaiterions. Il y a lieu de se demander si nous cherchons réellement à créer une compréhension opérationnelle à l'égard de la résolution 1325 et d'autres résolutions.

Pourriez-vous me dire si, lorsque vous avez commencé à vous occuper des centres de formation à l'étape du prédéploiement — je pense que c'est ce que je vous ai entendu dire —, vous avez pris part d'une quelconque manière à la formation préalable au déploiement au Canada? Le gouvernement canadien vous a-t-il consulté? À votre connaissance, avons-nous utilisé vos modules au Canada? Avez-vous envoyé des personnes ici pour nous aider?

Je pense que vous avez également dit avoir des opérations intégrées relativement à la formation de mission. Ces opérations s'appliquent-elles à nos forces armées en Afghanistan?

M. Haeri : En ce qui concerne votre deuxième question, tout d'abord, les opérations de formation ne se seraient pas appliquées aux Forces armées canadiennes en Afghanistan car, bien que votre mission soit visée par un mandat du Conseil de sécurité des Nations Unies, vous n'êtes pas sous le commandement et le contrôle des Casques bleus. Il s'agit d'une question relevant de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord.

Nous avons une mission civile — la Mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan, ou MANUA — qui est axée sur les politiques et sur la coordination entre les donateurs.

Pour ce qui est d'un suivi de la formation, pour pouvoir bien répondre à votre question, il me faudrait interroger mes collègues qui s'occupent de formation au quotidien. Je sais que nous collaborons très étroitement avec le Centre Pearson pour une vaste gamme d'initiatives de soutien à la formation. Mme Tavares a mentionné la formation que nous avions offerte en Afrique de l'Ouest. Ces missions sont pour nous des occasions de prendre une part active — avec le Centre Pearson, du moins —, en ce qui concerne notamment la question des modules, que nous préparons pour les Casques bleus en général.

Quant à savoir si vos forces armées utilisent nos modules dans le cadre de leur formation, je ne suis pas en mesure de répondre directement à cette question. Je puis vérifier si mes collègues le savent, mais je suppose que le mieux serait de demander à vos responsables de la formation.

Le sénateur Mitchell : Je voulais connaître vos impressions et savoir si vous aviez collaboré avec nos Forces armées.

Vous avez fait allusion à la possibilité que des États parrains, des États qui ne sont pas nécessairement présents à un endroit ni investis d'un mandat de l'ONU pour une mission donnée, puissent peut-être appuyer ailleurs cette formation liée à la resolution 1325.

De façon plus générale, y a-t-il des nations que vous pourriez tout de suite citer en tant que championnes de la Résolution 1325 dans le monde — c'est-à-dire qu'elles en font la promotion, la défendent et la mettent de l'avant — et nous préciser s'il y a des nations dont vous attendez un certain leadership aux Nations Unies pour ce qui est de réaliser des progrès à l'égard de la résolution 1325? Le Canada est-il l'une de ces nations?

M. Haeri : On pourrait dire que le Canada s'est consacré sans réserve à la cause. Ici, à la mission, nous assistons en général pleinement les diplomates canadiens sur les questions de maintien de la paix. Selon moi, le Canada est certainement, en matière de politique, un chef de file du maintien de la paix, ici à New York et partout dans le monde.

J'ai fait un peu allusion — je ne vise pas le Canada, mais je parle de façon générale — à une situation qui se présente dans les opérations de maintien de la paix où les pays gros fournisseurs de troupes sont les seuls sur le terrain, alors que d'autres pays sont engagés sur le front de la politique. Comme, sur le terrain, les dangers se multiplient, la tension dont nous parlons se manifeste.

Des pays tels que le Pakistan, l'Inde, le Bangladesh et d'autres veulent faire partie des décideurs. D'après moi, c'est bien. Je ne crois pas que les deux rôles s'excluent mutuellement. Il s'agit, d'après moi, de réunir le Conseil de sécurité, les pays fournisseurs de troupes et les autres pays intéressés pour les faire participer plus tôt à la planification des missions, afin de régler ces problèmes et de s'assurer que chacun a le sentiment d'être traité comme les autres. Manifestement, certains pays ont plus de capacités (en ce qui concerne les instituts de formation, l'utilisation des médias, et cetera) que beaucoup de pays fournisseurs de troupes. C'est un sujet de réflexion à l'ONU et dans les organisations qui lui sont reliées.

Sur ces questions, le Canada est indéniablement un chef de file, et nous sommes reconnaissants de la coordination et de la coopération dont nous jouissons avec votre mission ici. Comme je l'ai mentionné, dans le cadre de notre examen de l'effort du Conseil de sécurité et du maintien de la paix, pour cette année, cette instance a tenu trois réunions thématiques sur le maintien de la paix proprement dit. Le Canada a animé un certain nombre de séminaires et d'ateliers, qui ont réuni à des niveaux élevés les ambassadeurs de l'ONU dans un effort de réflexion sur les véritables défis du maintien de la paix. Cette activité, en soi, dénote leur engagement. Ils y consacrent beaucoup de temps et d'énergie.

Le sénateur Mitchell : On parle sûrement de la résolution 1325 à ces tables rondes, n'est-ce pas?

M. Haeri : Absolument.

Le sénateur Brazeau : Je vous remercie tous les deux de votre contribution à notre étude et des renseignements que vous nous avez donnés.

Ma question est similaire à celle du sénateur Mitchell. D'après vous, comment la contribution du Canada à l'ONU se compare-t-elle à celle des autres pays pour la promotion et la mise en œuvre de la résolution 1325? Peut-on distinguer, objectivement ou subjectivement, son travail et celui des autres pays, par exemple?

Mme Tavares : Je ne saurais répondre précisément sur l'ONU, mais nous avons été en contact très suivi avec le Canada au sujet de la résolution 1325. Nous recevons beaucoup d'appuis. Je reviens sans cesse sur le Centre pour le maintien de la paix Pearson, parce qu'il a reçu des fonds du Canada à l'appui du déploiement de francophones. L'un de nos problèmes est le manque de francophones pour nos missions importantes dans les pays francophones. Le Canada nous a beaucoup aidés à le résoudre de même qu'à résoudre celui des déploiements de police. En ce qui concerne la contribution globale du Canada à l'ONU, je ne saurais dire, mais, sur la question de l'égalité des sexes, nous comptons beaucoup sur elle.

M. Haeri : Vous nous avez demandé si nous percevions une différence. Dans notre domaine, la question se pose davantage en matière de politique, d'élaboration de normes, de construction d'un cadre de connaissances qui sont nécessaires à la réussite des opérations de maintien de la paix. À cet égard, le Canada est indéniablement un chef de file.

Quant à l'ONU, dans un contexte plus général, le sujet dépasse un peu mes compétences. Je dirais, en ne parlant pas spécifiquement du Canada, mais de façon plus générale, que, comme vous le savez bien, à cette échelle dont il est question, les opérations de maintien de la paix ont besoin de capacités plus spécialisées ainsi que de troupes nombreuses. Le secrétaire général et le sous-secrétaire général ont lancé un appel général aux armées du monde et aux pays développés capables pour qu'ils envisagent des façons de contribuer plus directement aux opérations de maintien de la paix. Cette contribution ne signifie pas nécessairement l'envoi de bataillons sur le terrain. Elle peut cependant faire appel à des unités et à des capacités spéciales dont nous avons besoin et qui font toute la différence dans l'exécution de ces mandats difficiles. Elle fait intervenir les communications, la mobilité aérienne, le renseignement et l'analyse de l'information, le génie et les diverses autres choses que possèdent des pays comme le Canada. Cet appel général s'adresse également au Canada, car nous avons besoin, pour le maintien de la paix, que de vieux partenaires comme lui participent plus directement aux opérations des Casques bleus. Certains pays plus jeunes, d'Europe par exemple, n'ont encore jamais participé à de telles opérations. Il y a des signes positifs de cette participation. Nous avons un certain nombre de troupes européennes au Liban et au Tchad, mais je pense que c'est un domaine où l'appel au secours devrait être entendu aux niveaux les plus élevés. Manifestement, le Canada est un partenaire loyal, et sa participation à l'élaboration des politiques et à l'appui des opérations de maintien de la paix le prouve, mais nous aimerions probablement que ce message sur le maintien de la paix soit plus largement diffusé.

Le sénateur Jaffer : Le temps est écoulé, mais vous avez aimablement offert de nous communiquer vos réponses. Si vous le permettez, je vous communiquerai, par l'entremise de la présidente du comité, des questions précises sur la mise en œuvre des Résolutions 1325 et 1820. Si vous le pouvez, je vous serais reconnaissante de faire parvenir vos réponses à la présidente.

M. Haeri : Volontiers.

La présidente : La séance est terminée pour ce groupe de témoins. Je vous remercie d'avoir pris le temps de nous répondre. Manifestement, la question est complexe. Toutes ces résolutions sont bien intentionnées et elles ratissent large pour couvrir les problèmes touchant les femmes en situation de conflit, mais notre étude particulière vise à déterminer si elles ont un effet sur le terrain. Nous voulons constater des améliorations pour les femmes qui se trouvent au milieu d'un conflit et qui sont censées être les bénéficiaires de ces résolutions. Si vous voulez nous communiquer n'importe quoi d'autre sur la question, à la faveur de vos réflexions, n'hésitez pas à le faire. Je vous remercie encore de votre participation à cette vidéoconférence.

Nous poursuivons notre étude avec un autre groupe de témoins. De l'Association canadienne pour les Nations Unies, nous avons Kathryn White, directrice générale; de La Voix des femmes pour la paix, Janis Alton, présidente sortante; de Droits et Démocratie, Michael Wodzicki, vice-président des programmes, et Isabelle Solon-Helal, agente de programme des droits de la femme et coordonnatrice de la Coalition pour les droits humains des femmes en situation de conflits. Bienvenue à tous.

Je cède maintenant la parole à Mme White, étant donné que son nom figure en tête de liste. Je pense que vous avez tous déjà témoigné devant des comités sénatoriaux. Je vous demande de faire une courte déclaration préliminaire, puis nous engagerons le dialogue, et des sénateurs vous poseront des questions.

Kathryn White, directrice générale, Association canadienne pour les Nations Unies : Je vous suis reconnaissante de l'opportunité que vous m'accordez. Je suis heureuse de l'attention que vous portez à la résolution 1325. Beaucoup d'entre vous savent déjà que l'Association canadienne pour les Nations Unies, qui est une ONG canadienne ayant non seulement du personnel présent dans tout le Canada, mais, également, des divisions constituées de bénévoles d'un bout à l'autre du pays, surveille également l'opinion canadienne sur les questions telles que la participation des femmes à l'ONU et au rôle du Canada.

L'association fait également partie d'un important réseau mondial, la Fédération mondiale des associations pour les Nations Unies. Je suis honorée d'en être la présidente du conseil.

Alors que notre mandat est de sensibiliser les Canadiens et de les mobiliser dans les questions internationales qui nous intéressent tous en tant que mouvement populaire pour les Nations Unies, nous œuvrons également sur la scène internationale à la diffusion des bonnes pratiques et des leçons élaborées au Canada et à la construction de la capacité d'autres associations pour les Nations Unies.

Vous savez que, depuis le 5 août, deux autres résolutions de l'ONU concernent les femmes, la paix et la sécurité. La résolution 1325, dont le dixième anniversaire arrive rapidement, n'a peut-être pas eu l'effet que, dans notre enthousiasme, nous avions escompté il y a dix ans. Il y a maintenant la résolution 1889, qui nous encourage à élaborer des indicateurs et des mesures relatifs à cette résolution. La résolution 1889 a été proposée par le Vietnam au Conseil de sécurité. Mentionnons également la résolution 1820, qui existe depuis un certain temps, et la résolution qui y fait suite, la résolution 1888, qui concerne les violences sexuelles.

Pour vous permettre de mieux vous représenter ces deux ensembles de résolutions, il est utile, je pense, de se représenter la résolution 1325 comme ayant des vertus préventives et la résolution 1820 comme ayant des vertus curatives, pour utiliser une analogie avec le domaine médical. Je vous recommande vivement de vous rappeler que nous avons besoin de ces deux modes d'action. Je pense que le fait de se concentrer beaucoup sur la prévention est une facette importante du travail que vous accomplissez ici.

Il est temps, pour le Canada, d'augmenter son leadership et sa visibilité sur ces questions. Le Canada a un bagage solide comme champion de l'égalité des sexes dans les secteurs militaires et de la sécurité sur son territoire comme dans la communauté internationale.

Certains d'entre vous savent peut-être que j'ai participé à l'élaboration du premier cours donné au Centre Pearson pour le maintien de la paix Pearson où la doctrine concernait le partenariat et la présence des femmes dans les opérations de maintien de la paix. Je crois que ce rôle de premier plan a été quelque peu diminué malgré les qualités de nos diplomates à l'ONU qui sont ici devant nous.

Ce que le gouvernement et, bien sûr, les organismes de l'État devraient faire, c'est de donner suite aux engagements que nous avons pris. Le Canada a besoin de se doter de son propre plan national. Nous n'avons pas fait preuve de leadership en la matière, mais, si j'ai bien compris, grâce à l'initiative du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, le MAECI, on travaille actuellement à un tel plan. Je vous recommande vivement, dans le rôle que vous jouez, d'encourager et d'appuyer l'élaboration accélérée d'une version rigoureuse de plan national et l'inclusion du rôle de la société civile dans ce plan.

Avec le concours des Forces canadiennes, le gouvernement canadien doit faire connaître ses bonnes pratiques et leçons. Il me semble que, maintenant, la dure leçon de l'Afghanistan soit, nous le savons tous, d'avoir été un lieu où, particulièrement, on ne parlait des droits des hommes et des femmes que lorsqu'ils étaient violés. Nous avons recueilli des leçons, nous devrions les faire connaître à la communauté internationale.

Comment faisons-nous connaître ces leçons? Les femmes détiennent-elles des postes de direction? De quoi sommes-nous les témoins en Afghanistan?

Je n'ai pas fait valoir d'arguments en faveur de la résolution en général, et j'estime que je n'ai pas à le faire ici. Cependant, c'est une question importante : nous venons de lancer la nouvelle mouture du rapport annuel sur le développement humain. L'une des mesures les plus importantes qu'il contient est que l'engagement total des femmes rend la société plus pacifique, plus robuste et plus juste. C'est aussi vrai dans les opérations de maintien et d'établissement de la paix que n'importe où ailleurs.

Nous sommes un partenaire très respecté de l'ONU, et notre mission auprès de l'ONU consiste à parrainer le groupe de travail sur les femmes, la paix et la sécurité. Nous avons fait preuve de leadership dans ce domaine, et j'exprime notre gratitude à l'ambassadeur à l'ONU, John McNee, et à son équipe de là-bas.

Nous devons consacrer plus de ressources pour faire connaître notre leadership et notre mise en œuvre de la résolution 1325 et des résolutions qui lui sont apparentées. Nous devons faire connaître le travail entrepris par les Forces canadiennes pour retenir les femmes, à mesure qu'elles s'élèvent dans la hiérarchie. Voilà une autre question qui n'a pas été soulevée ce matin.

À l'ONU, les femmes tendent à sortir de la fonction de maintien de la paix au niveau P3, c'est-à-dire celui de cadre moyen, à l'âge d'environ 34 ans. Je ne sais pas si vous questionnez les chefs des Forces canadiennes sur ces questions quand ils se présentent devant vous, mais je sais, grâce au dialogue que j'entretiens avec eux, qu'ils n'ont pas de problème particulier pour retenir les femmes, bien qu'ils en aient un avec l'augmentation du recrutement. C'est une question importante.

De même, si nous nous comportons bien, faisons savoir au monde ce que nous faisons : comment nous avons réussi à accomplir ce travail dans des circonstances difficiles. Ensuite, assurons-nous que des femmes participent aux déploiements. Bien sûr, j'inclurais la Gendarmerie royale du Canada et le solliciteur général, parce que, de plus en plus, les opérations de paix les concernent également.

L'ONU a besoin d'une commandante pour déployer les missions, voire de deux ou de trois. Nous ne devons pas seulement parler du rôle des femmes dans la paix et la sécurité, mais le Canada peut faire preuve de leadership et faire avancer ce dossier.

Sans doute, les Forces canadiennes et le gouvernement examinent ce qui arrivera après 2011, à la fin de notre mission de combat en Afghanistan. Ce moment est exactement celui où nous devons parler du rôle accru que nous pouvons jouer au Département des opérations de maintien de la paix de l'ONU. Bien sûr, chaque Canadien — nous le savons, parce que nous sondons les Canadiens annuellement — pense que notre contribution continue de se situer au niveau le plus élevé. Or, nous sommes au 63e rang, en ce qui concerne l'engagement des troupes. Nous pourrions probablement remplir un autobus de ramassage scolaire.

Comme mes collègues, j'affirme que nos soldats sont d'importants multiplicateurs de force, ils ont aussi des qualités d'instructeurs, et cetera. Je crois que la plupart des Canadiens estiment que nous pouvons en faire davantage, et je suis d'accord avec eux.

Encore une fois, au sujet du rôle de vitrine du Centre Pearson pour le maintien de la paix sachez qu'il éprouve des problèmes de financement. Peut-être cette salle est-elle l'endroit où il convient qu'une voix indépendante comme celle de l'Association canadienne pour les Nations Unies dise que nous détenons là un joyau et que nous devons prendre des engagements pour en assurer le financement et lui demander de compter sur la vente de ses services d'instruction militaire.

Le témoin qui m'a précédée a parlé de faire donner ici aux forces leur instruction militaire. De fait, le Pakistan, comme vous le savez, et le Bangladesh sont des pays qui déploient le plus de troupes de maintien de la paix et ne donnent pas de formation interne sur les questions d'égalité des sexes, encore moins sur la résolution 1325.

Bien sûr, l'ONU examinera les codes de conduite, comme elle doit le faire; autrement dit, comment se comportent nos collaborateurs. Mais, en réalité, ces troupes ont également besoin de formation plus approfondie que ces séances d'instruction.

À propos, une façon éclatante par laquelle nous pouvons faire en sorte que des femmes servent de modèles d'identification dans ces postes de direction consiste à les faire participer pleinement et, ce qui est important, à les faire participer aux négociations de paix dans le monde. Le gouvernement canadien peut et devrait promouvoir la participation des femmes à l'ONU et dans notre propre système politique, parce que cette participation est ce qui convaincra le reste du monde.

En conclusion, je note que la présidente et la coprésidente du comité ainsi que le sénateur Nancy Ruth ont été d'extraordinaires championnes du rôle de la femme, dans les collectivités les plus modestes du Canada comme sur la scène internationale. Je tiens à vous remercier à ce titre et de m'avoir donné le privilège de témoigner devant vous.

La présidente : Peut-être pouvons-nous arrêter la séance. Merci de votre témoignage et de votre intervention. Je donne maintenant la parole à Mme Alton.

Janis Alton, présidente sortante, Voix des femmes pour la paix : Je partirai de la longue histoire d'activisme dont notre organisation de femmes bénévoles a fait preuve depuis sa fondation en 1960. Au début, nous avons réclamé la fin de la guerre — non pas des mesures pour rendre la guerre inoffensive pour les femmes — et l'inclusion légitime des femmes dans la prise de décisions à tous les niveaux sur les questions reliées à la paix et à la sécurité. C'est encore notre position.

Notre activisme innovateur s'est concentré sur l'abolition des armes nucléaires. Malheureusement, elles existent encore. Après près de 50 ans, le dossier de nos réalisations comprend une foule d'efforts déployés sur le plan de l'éducation et de la défense des droits, pour combattre la folie du système militaire et l'exclusion routinière et non démocratique des femmes de l'arène de la politique étrangère.

À mesure que nous avons mieux compris l'interconnexion des problèmes, notre sphère d'influence s'est élargie. Il n'y a pas longtemps, l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, ou UNESCO, a inventé l'expression « culture de la paix ». Nous avons alors eu une expérience « eurêka », reconnaissant dans cette expression une façon concise d'exprimer ce que nous étions devenues, grâce à une foule d'activités d'un océan à l'autre et sur la scène internationale.

Par exemple, la Voix canadienne des femmes pour la paix est affiliée aux Nations Unies depuis les années 1970 par l'entremise du Département de l'information, ainsi qu'au Conseil économique et social depuis 1996. Nous avons utilisé activement ce lien, exerçant moult pressions dans le cadre de nombreuses missions de démilitarisation des Nations Unies à New York, à Genève et à Vienne, ainsi qu'aux sièges de l'OTAN et du Pacte de Varsovie, entre autres.

Nous avons pris activement part à la préparation et à l'adoption par la société civile de la résolution 1325 du Conseil de sécurité, et continuons de nous intéresser fortement à sa mise en œuvre. Nous sommes particulièrement encouragés par le libellé ferme du préambule, où est admis le rôle important des femmes dans la prévention et la résolution des conflits et le renforcement de la paix.

Cette résolution souligne l'importance de la participation égale — et je souligne le mot « égale » — et de l'implication pleine et entière des femmes dans tous les efforts de maintien et de promotion de la paix et de la sécurité, ainsi que le besoin d'accroître les rôles des femmes dans le processus décisionnel relatif à la prévention et à la résolution de conflits. Cette résolution est la réponse à nos attentes.

Nous remercions le Sénat d'intervenir pour favoriser la mise en œuvre de cette résolution historique. Nous considérons que la simple la mise en œuvre de l'article 1, qui demande aux États membres d'augmenter — il n'est pas question d'« égalité » ici, mais d'« augmentation » — la représentation des femmes à tous les échelons du processus décisionnel dans les mécanismes nationaux, régionaux et internationaux de prévention, de gestion et de résolution des conflits, contribuerait à décourager le viol.

La plus grande visibilité des femmes dans ce domaine contribuera à renforcer le respect à leur égard et aidera les hommes à cesser de les traiter comme des ordures.

Le Canada mérite des éloges pour le leadership dont il fait constamment preuve au sein des Amis de 1325, lequel est, vous le savez probablement fort bien, un groupe constitué d'un nombre restreint, mais croissant d'États membres des Nations Unies qui cherche à défendre les intérêts des femmes et à favoriser la sensibilisation à l'égard des sexes au sein du système des Nations Unies et de ses processus de gestion de conflits. Mais qui assure un leadership solide au Canada? Comme ma collègue, Kathryn White, je me demande ce qu'il advient de notre plan d'action national.

Nous nous réjouissons que le Canada offre un soutien financer à long terme à l'International Women's Tribune Centre de New York et, plus précisément, à son groupe de travail international sur les femmes, la paix et la sécurité. Cependant, le Canada a-t-il un bon programme de financement durable afin d'appuyer les coalitions d'ONG comme Peacebuild, dont fait partie Voix canadienne des femmes pour la paix, afin de sensibiliser la population et de défendre le droit de participation des femmes?

Nous recommandons fortement que les ONG qui luttent pour l'égalité et la paix reçoivent un financement adéquat et viable afin de favoriser la représentation égale des femmes dans tous les aspects du renforcement de la paix, de la prévention à la résolution de conflits.

Comme vous le savez probablement, le Canada entend dépenser la somme rondelette de 490 milliards de dollars dans le domaine militaire au cours des 20 prochaines années, contribuant ainsi au maintien de la culture guerrière omniprésente. Nous vous demandons de considérer si l'adoption de pratiques égalitaires dans tous les aspects du processus décisionnel en matière de paix et de sécurité et à tous les échelons devrait être volontaire. Nous avons besoin de femmes qui œuvrent en faveur de la paix et qui appuient l'égalité entre les sexes, le développement durable, la justice et l'application des droits de la personne à tous. Les voix créatives et progressistes sont légions. Nous avons à tout le moins l'obligation morale d'accélérer le rythme.

Le Canada devrait continuer d'appuyer la présence de femmes progressistes dans les groupes chargés de prendre des décisions en vue de résoudre le conflit en Afghanistan.

Je vais vous relater un fait que vous connaissez peut-être. Lorsque des femmes d'Irlande du Nord se sont adressées à George Mitchell, l'artisan de l'accord du Vendredi saint qui cherchait à ramener la paix après de nombreuses années de conflit, ce dernier leur a dit que pour faire partie des délibérations et être admissibles, elles devraient représenter un parti politique. Elles ont donc constitué le Parti des femmes et obtenu deux sièges à la table. Leur présence a eu une incidence notable, car elles ont insisté pour institutionnaliser les droits de la personne dans l'accord.

Nous devrions aller plus loin. Nous avons déjà recommandé au personnel des unités de maintien de la paix des Nations Unies de faire de la sensibilisation à la paix une partie intégrale de chaque accord de paix. Il faudrait notamment réécrire les manuels, tenir des séances de rencontre avec les éducateurs de toutes allégeances, proposer des échanges étudiants et employer d'autres méthodes créatives pour atténuer la haine et favoriser la réconciliation. Nous savons qu'en sensibilisant les intervenants aux résolutions 1325 et 1820, nous pourrions changer les choses. Nous avons recommandé de former tous les pays qui envoient des troupes de maintien de la paix dans les zones touchées par la violence. Il en a été beaucoup question ce matin, mais, selon nous, il ne faudrait pas se contenter d'offrir de la formation, mais également administrer des tests sur les résolutions 1325 et 1820. Vous savez aussi bien que moi qu'il n'est pas rare que des soldats de maintien de la paix s'adonnent à des abus sexuels. Nous avons appris ce matin qu'environ 150 000 personnes originaires de 117 pays, dont des soldats de maintien de la paix, sont déployées dans quatre continents dans le cadre de 18 opérations relevant des Nations Unies et ont ainsi un impact direct sur la vie de millions de gens, dont la moitié sont des femmes.

Nous recommandons donc de sensibiliser non seulement les militaires, mais également les conseillers et les négociateurs aux questions reliées au sexe dans les conflits afin de leur faire comprendre l'importance de la mise en œuvre des résolutions 1325 et 1820. Le témoin venu de New York a indiqué que l'on s'y emploie déjà.

Il faudrait également éduquer les autres intervenants dans les zones de conflit, comme les agents de police et le personnel gouvernemental. Il faut répondre aux besoins particuliers des filles et des femmes. Au Canada, le rapport Manley appuie ces demandes concernant l'Afghanistan.

Le Canada doit également encourager le perfectionnement et le renforcement des femmes dans les secteurs judiciaire et gouvernemental dans les États qui sortent d'un conflit. Nous recommandons que le Canada et d'autres États affectent des fonds expressément à ces approches, notamment pour le renforcement général des capacités des femmes et des filles. Je crois que c'est ce à quoi Mme White faisait référence en parlant du droit au développement.

Idéalement, tant au Canada et qu'à l'étranger, chaque loi et chaque résolution devaient être passée au crible par les législateurs de tous les échelons de gouvernance pour en évaluer l'incidence sur les femmes et voir si ces dernières participent à l'examen et à la mise en œuvre de la résolution.

Nous recommandons que le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international procède à des consultations systématiques auprès des ONG concernées. La dernière consultation non officielle remonte, je crois, à 2006. Nous recommandons la relance du processus consultatif mis en œuvre au Canada à la suite de l'adoption de la résolution du Conseil de sécurité, qui avait permis de réunir les ONG, les fonctionnaires, les députés et les sénateurs, y compris le sénateur Jaffer. Ce processus était dirigé conjointement par les députés et les sénateurs. Je ne sais pas si cette pratique de diplomatie nouvelle a été adoptée à l'instigation du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ou comment on l'a instaurée, mais elle faisait suite à une réunion des pays du G20. Cette pratique, bien éphémère, s'est éteinte par faute de financement gouvernemental.

La Voix canadienne des femmes pour la paix insiste pour que la consultation, y compris celle d'aujourd'hui, soit considérée comme un nouveau droit de la société civile. Le processus de renforcement de la paix doit, au XXIe siècle, être un outil inclusif et proactif de prévention de la guerre. De plus, ce processus doit permettre la mise en œuvre des résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité, une obligation claire en matière de droits de la personne.

Je dirai en terminant que ces résolutions sont des lois internationales. Comme Cora Weiss, à New York, que certains d'entre vous connaissent peut-être — elle a notamment été présidente de l'appel de La Haye pour la paix —, nous proposons que les organisations de femmes, dans le cadre des efforts déployés pour mettre en œuvre ces résolutions, se tournent vers les tribunaux, surtout si la table est mise pour la conclusion d'un accord de paix et qu'il ne leur reste plus qu'à s'y asseoir.

Michael Wodzicki, vice-président des programmes, Droits et Démocratie : Comme nos collègues l'ont déjà indiqué, c'est un privilège de témoigner aujourd'hui. Nous sommes encouragés par les séances que le comité a tenues sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité et les résolutions subséquentes.

Comme bon nombre d'entre vous le savez, Droits et Démocratie a été créé par une loi du Parlement du Canada il y a plus de 20 ans, en 1988, avec un mandat clair de soutien de la démocratie dans les pays en développement en assurant le respect, la protection et l'application des droits de la personne énoncés dans la Charte internationale des droits de l'homme et des mécanismes internationaux subséquents, dont les résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Les droits des femmes ont toujours été un élément fondamental des programmes que nous créons depuis une dizaine d'années, particulièrement les droits des femmes vivant au cœur de conflits, et nous nous concentrons sur la lutte contre l'impunité pour les crimes de violence sexuelle, ainsi que sur la réparation des torts causés aux victimes de ces crimes.

Un programme que nous appuyons fièrement, à ce titre, est la Coalition pour les droits des femmes en situation de conflits. Cette coalition a été fondée à la suite du génocide au Rwanda. Un groupe d'activistes, d'avocats, d'universitaires et d'agents du développement, sous la direction de Droits et Démocratie s'inquiétait que le Tribunal pénal international ne tienne pas compte de la dimension sexospécifique.

Avant de laisser ma collègue, Isabelle Solon-Helal, qui coordonne le travail de cette coalition, vous décrire les efforts de la coalition au titre de la lutte contre l'impunité pour les crimes de violence sexuelle, permettez-moi de citer brièvement une évaluation indépendante des activités de la coalition entreprises l'année dernière. C'est une évaluation quinquennale exigée par la loi de laquelle est né Droits et Démocratie. En 2007, les évaluateurs ont décidé d'examiner le travail de la coalition. Le troisième constat de l'évaluation, c'est que le travail de la coalition est unique et aucune autre organisation, à ce jour, ne s'est consacrée à pareille mission, ce qui lui assigne un créneau particulier et contribue à l'œuvre de Droits et Démocratie — et nous dirions aussi à la réputation du Canada.

Isabelle Solon-Helal, agente de programme des droits de la femme et coordonnatrice de la Coalition pour les droits humains des femmes en situation de conflits, Droits et Démocratie : Je vous remercie de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Je concentrerai ma présentation sur les aspects de la résolution qui visent à mettre un terme à l'impunité pour les crimes de violence sexuelle, et aussi sur le travail des tribunaux internationaux, en donnant des exemples des initiatives de la coalition et, en particulier, celui du procès de Jean-Paul Akayesu au Tribunal pénal international pour le Rwanda.

La coalition, comme l'a dit M. Wodzicki, a été formée à l'initiative de gens déterminés à s'assurer que les personnes ayant eu le plus haut degré de responsabilité soient poursuivies pour le rôle qu'elles ont joué lorsqu'ont été commis des actes de violence sexuelle pendant le génocide au Rwanda. À l'époque, aucun des actes d'accusation émis par le tribunal ne comportait d'accusations pour des actes de violence sexuelle en dépit de rapports faisant état de l'ampleur de ces actes pendant le génocide. L'acte d'accusation contre M. Akayesu n'était pas différent. Il était maire d'une petite communauté du Rwanda appelée Taba. Human Rights Watch, un membre de la coalition, avait été à Taba et avait documenté la violence sexuelle qui y régnait. À la lumière de cette documentation, la coalition a écrit des lettres au procureur Goldstone et, plus tard, à son successeur, Louise Arbour, les poussant à inclure ces chefs d'accusation à l'acte d'accusation.

[Français]

Pendant ce temps, le procès avait déjà commencé. Et malgré le fait que l'acte d'accusation ne contenait pas de charge de violence sexuelle, en janvier 1997, pendant son témoignage, le témoin J mentionne le viol de la fille. C'est la première fois que le viol a été évoqué devant les juges du tribunal.

Ce témoin est une femme Tutsie qui dit avoir assisté à l'assassinat des membres de sa famille par un groupe de miliciens Interahamwe envoyé par Akayesu. Suite à la demande des juges, le témoin J a affirmé pendant son témoignage qu'elle n'avait jamais été interrogée par quiconque du bureau du tribunal au sujet du viol. Deux mois plus tard, le témoin H, qui était en fait le dernier témoin pour la poursuite, a déclaré avoir à la fois été violé et été témoin de viols d'autres femmes.

Pendant le contre-interrogatoire, la défense n'a posé aucune question au sujet des viols. Cependant, les juges ont interrogé le témoin au sujet de la localisation d'Akayesu pendant les viols. En mai 1997, la coalition a déposé devant le tribunal un mémoire amicus curiae, en tant qu'ami de la cour, dans lequel on demandait au tribunal de porter des accusations de viol et d'autres crimes de violence sexuelle à l'endroit d'Akayesu. L'effet médiatique de ce mémoire dans le monde des organisations non gouvernementales, comme dans l'opinion publique, a attiré l'attention de la communauté internationale sur cet aspect du génocide rwandais et a exercé une pression importante sur le bureau du procureur et sur les enquêteurs.

En janvier 1997, le bureau du procureur, alors dirigé par Louise Arbour, a amendé l'acte d'accusation pour inclure les chefs de violence sexuelle. À la reprise du procès, les témoins furent réinvités à comparaître pour témoigner de ces crimes.

Enfin, plus d'un an plus tard, en octobre 1998, le tribunal a condamné l'ancien bourgmestre Akayesu à trois peines d'emprisonnement pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité. C'était la première fois qu'une cour internationale punissait la violence sexuelle perpétrée dans le cadre d'une guerre civile et reconnaissait le viol comme acte de génocide et de torture.

[Traduction]

Pour la coalition, le procès Akayesu n'a été qu'un début. Nous avons continué d'observer le travail du tribunal rwandais et aussi d'autres tribunaux. En dépit de cette surveillance, le jugement Akayesu est une exception plutôt que la règle pour le Tribunal pénal international pour le Rwanda. Environ 70 p. 100 des accusations de violence sexuelle au tribunal ont abouti à des acquittements ou n'ont pas donné lieu à des condamnations.

Nous militons depuis des années en faveur d'enquêtes et de poursuites tenant compte du sexe, et d'un plus grand nombre d'actes d'accusation comportant des chefs d'accusation pour des actes de violence sexuelle et reflétant le caractère multidimensionnel de la violence sexuelle à l'égard des femmes. Nous avons aussi insisté sur la nécessité d'interroger tous les témoins relativement à la violence sexuelle, sur l'importance d'une stratégie exhaustive de poursuite relativement aux crimes fondés sur le sexe, sur l'importance d'assurer l'existence, au bureau du procureur, d'une équipe consacrée tant aux enquêtes qu'aux poursuites portant sur des actes de violence sexuelle, et que cette équipe soit dirigée par un conseiller de haut niveau en la matière. Nous avons constaté que la volonté politique est la clé des poursuites relatives aux crimes fondés sur le sexe.

Les femmes du Rwanda nous ont dit qu'il est important que la justice internationale dénonce, poursuive et condamne les auteurs d'actes de violence sexuelle, reconnaisse les crimes commis contre les femmes et mette fin au silence et aux préjugés en ce qui concerne la violence sexuelle. Les Rwandaises nous ont aussi appris qu'il est primordial que le processus de justice internationale soit respectueux de leurs expériences.

À nos yeux, pour manifester ce respect, il faut obtenir le consentement éclairé des témoins et il est important de renseigner les témoins sur le processus judiciaire afin qu'ils ou qu'elles soient suffisamment préparés. Il est aussi important de communiquer les résultats des procès aux communautés touchées; de protéger des témoins avant, pendant et après les procès; de créer un climat habilitant dans les tribunaux pour entendre les témoignages sur les actes de violence sexuelle; et de régler la question de la formation sexospécifique à tous les niveaux des organisations du tribunal international.

Enfin, et ce n'en est moins pas important, nous avons appris que la justice internationale, telle qu'elle a été perçue par les tribunaux spéciaux du conseil de sécurité, était incomplète parce qu'elle ne comportait pas de dispositions visant la réparation des torts causés aux victimes de ces crimes. Ce constat nous a amenés à organiser une réunion internationale lors de laquelle les activistes et défenseurs des droits des femmes, ainsi que les survivantes d'actes de violence sexuelle venues du monde entier, ont émis la Déclaration de Nairobi sur le droit des femmes et des filles à un recours et à réparation. Le Tribunal pénal international fait place à la réparation, et nous organisons dans quelques semaines un colloque sur le sujet à La Haye pour les juges de la cour.

Avant de terminer ma présentation, j'aimerais vous parler de la situation du témoin J, dont nous avons entendu parler un peu plus tôt aujourd'hui.

Je lui ai rendu visite en 2003, et elle m'a gracieusement accueillie chez elle. Elle vit dans une petite maison faite d'argile sans eau courante et au sol de terre battue, comme bien des maisons de la campagne au Rwanda. La maison avait grand besoin de réparations. J vit avec ses enfants et ses petits-enfants. Ils dorment à même le sol.

Elle n'a pas de revenu, et elle s'est plainte de problèmes de santé engendrés par la violence sexuelle dont elle a été victime pendant le génocide rwandais. Le Tribunal pénal international pour le Rwanda, le TPIR, fournit aux témoins qu'il a entendus un colis mensuel d'aliments et de médicaments, y compris des médicaments contre le VIH. Qu'adviendra-t-il de J une fois que le TPIR sera dissout, dans quelques années? Qui prendra sa relève?

Quand elles ont appris la situation de J, des organisations féminines lui ont récemment construit une maison de briques sur un petit bout de terrain, pour assurer sa subsistance. C'est le moins que l'on puisse faire pour des femmes dont le courage a été la source de la décision la plus importante qui ait été prise dans la jurisprudence internationale relativement à des crimes fondés sur le sexe.

Toutes ces leçons retenues doivent être intégrées au plan d'action du Canada pour assurer la mise en œuvre des résolutions 1325 et 1820 et, à notre avis, ces leçons retenues devraient éclairer notre politique sur le Tribunal pénal international, la mise en œuvre de notre propre loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre et de la réforme de la Loi sur l'immunité des États, ainsi que les allocations budgétaires connexes.

L'impunité pour les crimes de violence sexuelle dans le cadre des procès devant les tribunaux nationaux et internationaux est un élément fondamental de la prévention de ce type de crime. Le Canada doit rester un ferme supporteur et défenseur pour le Tribunal pénal international. Nous devons pousser la République démocratique du Congo et la Mission de l'Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo, la MONUC, à procéder à l'arrestation de Bosco Ntaganda. Nous devons continuer d'insister pour que le Tribunal pénal international protège les intermédiaires qui ont collaboré avec le tribunal afin que les défenseurs des droits de la personne qui sont des partenaires sur le terrain ne soient pas ciblés et tués pour avoir dit ce que je vous dis aujourd'hui.

Nous devons aussi pousser le procureur du Tribunal pénal international à respecter le Statut de Rome de la Cour pénale internationale et à nommer un conseiller permanent de haut niveau en matière de crimes sexospécifiques au sein du bureau du procureur.

Depuis l'établissement des premiers tribunaux, la justice internationale a beaucoup évolué, mais il reste encore bien du chemin à faire pour s'assurer que les crimes à caractère sexiste soient punis adéquatement et que les femmes et les filles obtiennent justice.

Le sénateur Mitchell : Merci d'avoir accepté notre invitation aujourd'hui, et merci pour tout ce que vous faites. Je suis persuadé que vous aimeriez parfois que les choses bougent plus vite, mais votre travail est essentiel. J'ai quelques questions bien précises à vous poser.

Je suis d'accord avec vous pour dire que les femmes devraient être davantage impliquées dans les missions militaires de maintien de la paix. Je fais partie, comme certains de mes collègues ici présents, du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Nous posons souvent la question, et d'autres l'ont aussi fait avant nous, et nous tentons de faire avancer le dossier, mais on nous répond invariablement qu'il est difficile de trouver des femmes qui veulent prendre part à ces missions. La GRC a reconnu, et on doit cette admission au commissaire, qu'arrivées à un certain âge, les femmes ont besoin de plus de flexibilité. Je crois que l'un d'entre vous en a d'ailleurs parlé. À la mi-trentaine, bien des femmes ont des enfants et elles doivent être revenues à la maison avant 16 h 30. Il semble que ce soit un problème à la GRC également. Le commissaire nous a affirmé que les conditions de travail à la GRC étaient plutôt rigides. Pourquoi ne pas offrir plus de souplesse si cela pourrait permettre de remédier au problème? Mais ce n'est pas aussi facile quand les femmes sont déployées dans des régions éloignées.

Cela dit, si offrir des conditions de travail plus souples est une des solutions pour garder le personnel en poste, pouvez-vous nous en suggérer d'autres? Comment pouvons-nous inciter les femmes à s'engager dans ces missions? Devrons-nous nous tourner vers les femmes qui font partie des ONG et qui occupent des rôles parallèles, par exemple?

Mme White : Puisque c'est moi qui ai soulevé ce point, je vous dirais que les personnes les mieux placées pour répondre à certaines de ces questions sont encore les dirigeants des forces armées et policières et le solliciteur général. Vous l'avez bien dit, si nous voulons que les femmes soient davantage impliquées, nous devons réaliser qu'elles vont traverser une période de procréation, et nous devons trouver un moyen de leur offrir la flexibilité dont elles ont besoin.

C'est une bonne idée d'avoir songé à faire participer la société civile aux missions de maintien de la paix, mais encore là, pour travailler avec les forces militaires et policières, il faut avoir suivi une formation particulière. À certains égards, ce sont des enjeux institutionnels qui ne peuvent pas être réglés aussi facilement qu'on ne le croit. Cela dit, il est possible de trouver des solutions. Vous vous rappellerez qu'on avait invoqué les mêmes arguments quand on soutenait que les femmes ne pouvaient pas travailler dans le milieu de la finance.

Le sénateur Mitchell : Ou au Sénat.

Mme White : Exactement. Maintenant que j'y pense, ces femmes sont probablement à la tête d'ONG. Il existe indéniablement des solutions. Nous avons d'excellents dirigeants dans les forces armées et à la GRC. Il n'en tient qu'à eux de prendre les mesures qui s'imposent pour corriger la situation.

Le sénateur Mitchell : Est-ce que votre organisation, ou des organisations semblables à la vôtre, a été invitée par des hauts gradés militaires pour discuter de ces problèmes, ou encore pour contribuer aux programmes de formation?

Mme White : J'ai souvent des discussions informelles avec eux, et je sens qu'on m'écoute. En fait, l'ACNU a tenu une séance de formation avec un représentant spécial du Secrétaire général, le RSSG; autrement dit, le commandant de la Force de maintien de la paix des Nations Unies. Ce sont des occasions comme celles-là, et que l'on doit aux ressources disponibles, qu'il faut rechercher pour obtenir la participation de femmes occupant des postes supérieurs — par exemple des militaires hauts gradées, et c'est ce que l'on souhaite —, de façon à promouvoir la place des femmes dans ces secteurs au plus haut niveau possible, avant de les envoyer en mission.

Bref, on retourne mes appels, et c'est important. Mais il faut aussi apporter des changements à l'infrastructure.

Le sénateur Mitchell : Vous nous avez parlé de cette affaire de viol au Rwanda qui n'avait pas été traitée adéquatement, même si des accusations ont finalement été portées. Pouvez-vous nous dire quelles sont, selon vous, les lacunes du système de justice internationale en ce qui a trait au viol et au viol comme arme de guerre, et que le Canada peut contribuer à combler en exerçant des pressions? Est-ce trop ambitieux? Y a-t-il trop de lacunes à combler?

Mme Solon-Helal : Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale prévoit des dispositions permettant d'intenter des poursuites dans les cas de viol et de violence. Les dispositions sont vastes. Les groupes de défense des droits de la femme et des droits de la personne ont joué un rôle clé dans l'intégration de ces dispositions dans le Statut de Rome. Je crois que tous les éléments sont en place.

Comme je l'ai mentionné, le problème se situe surtout au niveau de la volonté politique et de la façon de faire appliquer la loi pour s'assurer que ces crimes ne restent pas impunis. À ce jour, la moitié des cas amenés devant la Cour pénale internationale comportaient des accusations pour des crimes de violence sexuelle. La situation s'est améliorée, mais il y a encore beaucoup de chemin à faire. Par exemple, l'affaire Lubanga est actuellement entendue en République démocratique du Congo. Thomas Lubanga est accusé de conscription d'enfants-soldats, mais pas d'esclavage sexuel. L'accusation ne tient pas compte de la nature des crimes commis envers les jeunes filles dans cette affaire.

Le sénateur Mitchell : Ceci est peut-être un peu plus qu'un commentaire, et j'en ai d'ailleurs discuté plus tôt avec plusieurs d'entre vous, mais il est évident que tant que les femmes n'auront pas une certaine prestance dans notre société — qui se gagne principalement par le statut financier, et peut-être par l'emploi et l'éducation —, nous ne pouvons espérer faire de grands progrès sociaux ni établir la paix. De nombreuses études appuient cette hypothèse d'ailleurs. Ironiquement, il ne suffit pas de conscientiser les hommes à ces problèmes; il faut aussi globalement éduquer les femmes pour qu'elles puissent contribuer au développement social de leurs collectivités et de leur société. Je tenais simplement à faire valoir ce point.

La présidente : Je vois que certains sont d'accord avec vous; nous prenons note de votre observation.

Le sénateur Jaffer : Je tiens également à vous remercier de votre présence aujourd'hui. Vos présentations ont répondu à bien des questions que je me posais. Nous ne disposons plus de beaucoup de temps. Ce ne sera pas nécessairement possible aujourd'hui, mais si vous pouviez aider notre comité à formuler ses recommandations en ce qui a trait à la résolution 1325, ce serait grandement apprécié. Nous allons bientôt célébrer le dixième anniversaire de cette résolution. Je ne peux pas parler pour tous mes collègues du comité, mais j'aimerais certainement que nous puissions suggérer à notre pays, dans le cadre de nos recommandations, des moyens de mieux faire appliquer les résolutions 1325, 1820 et 1889. Je souhaiterais également que nous puissions trouver des façons de conscientiser la population du Canada et de collaborer avec les Nations Unies. Nous savons que le Canada fournit des ressources à la MONUC, ainsi que des ressources de formation au Darfour, mais vous pourriez peut-être nous dire quelles mesures concrètes on pourrait prendre.

Le dixième anniversaire de la résolution est pour moi l'occasion de célébrer. J'aimerais savoir ce que l'on pourrait demander à notre pays pour aider à faire la promotion des résolutions 1325 et 1820. Je ne m'attends pas à ce que vous donniez une réponse complète aujourd'hui, mais ce serait apprécié si vous pouviez envoyer vos recommandations à la présidente.

La présidente : Les recommandations devraient être envoyées au greffier du comité, qui a communiqué avec vous, alors vous avez déjà ses coordonnées.

Le sénateur Nancy Ruth : Je vous souhaite la bienvenue. Il est intéressant pour moi de constater que vous soutenez tous, enfin presque, que la volonté politique est à la base du problème. J'ai une série de questions à vous poser, alors je vous prie d'en prendre note. Je m'adresserai particulièrement à Mme Alton.

Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, comme vous le savez probablement tous, n'utilise plus la même terminologie. Par exemple, « droit humanitaire international » est devenu « droit international », et le terme « impunité » est aussi apparu.

Que pensez-vous de ces changements? Croyez-vous que cela influera sur la volonté politique à l'égard de la résolution 1325?

Je comprends, madame Alton, que Voix des femmes pour la paix dispose probablement de moins de ressources financières et qu'elle compte moins de membres que les autres groupes représentés ici aujourd'hui, alors je suis curieuse de savoir comment le contact s'effectue avec les organismes gouvernementaux.

En fait, j'aimerais que vous me disiez tous si les organismes gouvernementaux communiquent avec vous. La relation est-elle satisfaisante selon vous, ou avez-vous l'impression de vous trouver dans une impasse?

Mme Alton : Je peux vous dire comment notre organisation entre en contact avec les organismes gouvernementaux. Nous sommes extrêmement déterminés à établir des liens avec les gouvernements, et dans 99 p. 100 des cas, c'est nous qui initions les communications.

La mission canadienne à New York nous a aidés à cet égard. Elle nous a fourni une lettre d'introduction, que nous avons utilisée abondamment pour obtenir des rendez-vous avec plusieurs des missions que j'ai mentionnées. La seule mission qui nous a refusé un rendez-vous est celle du Cambodge, mais nous nous sommes rendus aux quatre coins de la planète, dans de nombreuses villes et de nombreux pays, pour obtenir des rendez-vous. Règle générale, nous avons été bien accueillis. La plupart des membres des missions que nous avons rencontrés nous ont demandé pourquoi nous n'étions pas venus plus tôt.

Nous sommes une organisation bénévole. Mis à part les contributions de nos membres, nous ne disposons d'aucuns fonds pour nous appuyer dans nos démarches, alors notre travail demande un effort financier considérable pour la plupart d'entre nous.

J'en profite pour apporter un deuxième point, c'est-à-dire que si le Canada pouvait fournir du financement de base de façon soutenue aux ONG qui œuvrent à la consolidation de la paix, il serait beaucoup plus facile de favoriser la participation et l'inclusion des femmes dans ces missions.

Je souligne que de nombreux groupes qui ont déjà fait partie des 700 membres du Comité canadien d'action sur le statut de la femme se sont vus retirer leur financement de base. Dans le cadre de cette organisation, environ 20 ou 22 groupes ont reçu pendant quelques années du financement de base soutenu; juste assez pour leur permettre d'avoir quelques employés. Vous savez, je présume, que ce financement a été aboli et que les ententes alors conclues avec Condition féminine Canada n'étaient pas viables pour ces groupes.

Cette merveilleuse structure qu'était le Comité canadien d'action sur le statut de la femme s'est effondrée. Aucune autre organisation ne se compare à cette forte et merveilleuse coalition largement féministe au Canada. Nous étions autrefois la fierté de la communauté internationale. Aujourd'hui, nous avons peine à subsister. Nous voulons et avons besoin d'un important soutien financier.

Mme White : J'aimerais répondre à votre question concernant la terminologie. Il a en effet été question du droit international. On a aussi demandé de remplacer la notion d'égalité entre les genres par celle de l'égalité des hommes et des femmes, des garçons et des filles. Je suis heureuse de dire que la terminologie a été modifiée pour une raison. On veut changer la substance, et changer la terminologie est une façon d'y arriver. Je crois que nos revendications ont été entendues. La communauté internationale, entre autres, pose de plus en plus de questions à ce sujet.

C'est une époque importante pour notre pays. Comme vous le savez, le Canada fait actuellement campagne pour obtenir un siège au Conseil de sécurité. Il est inquiétant de voir que l'on s'éloigne de nos idéaux de vouloir montrer l'exemple pour ce qui est du respect des droits de la personne et de l'engagement complet de la société.

J'ai le bonheur de vous dire que nous sommes revenus à la terminologie acceptée internationalement en ce qui concerne la notion d'égalité entre les genres. Je crois que cela envoie un message clair, et c'est probablement ce que l'on souhaitait faire.

Pour ce qui est de l'engagement, j'abonde dans le même sens que Mme Alton. On ne nous claque jamais la porte au nez. On retourne nos appels — ce sont surtout des fonctionnaires qui nous rappellent. Peut-être la nature du gouvernement minoritaire est-elle à blâmer, mais il est difficile d'attirer l'attention des ministres et d'obtenir d'eux qu'ils fassent les pressions nécessaires. Après tout, nous rejoignons directement quelque trois millions de Canadiens par an. Nous sondons leurs opinions chaque année. Nous continuons à frapper aux portes et à tâcher de transmettre des renseignements utiles

Toutefois, nous devons composer avec des conditions assez difficiles, notamment en ce qui a trait au financement, comme l'a signalé Mme Alton. Il y a de moins en moins d'ONG. Ces gens disposent d'un financement de base. Personne à cette table ne peut en dire de même. Il est difficile de communiquer l'information dont le gouvernement a besoin pour prendre des décisions.

Le sénateur Nancy Ruth : Quand vous avez parlé des changements apportés à la terminologie employée par le MAECI, vous ne l'avez pas dit explicitement, mais je présume qu'il y avait une intention bien précise derrière tout cela. Quelle était-elle, à votre avis?

Mme White : Comme la résolution 1325 et la notion d'égalité entre les genres alimentent les discussions, le ministère pourrait vouloir se distancier des principes internationaux acceptés d'égalité des sexes. Nous sommes d'avis que les mots utilisés pour conscientiser les Canadiens sont importants. Les droits de la personne demeurent les mêmes, qu'on soit un homme ou une femme. Il est peut-être peu judicieux d'insister pour que l'on emploie maintenant les termes « hommes et femmes » et « garçons et filles », puisqu'on pourrait ainsi donner l'impression que le régime international pour les droits de la personne manque d'égards envers les hommes. Je crois que les siècles passés à tâcher de faire respecter les droits de la personne témoignent de notre volonté de protéger les droits des hommes au même titre que ceux des femmes.

La présidente : Nous pourrions certainement en débattre, car cela n'a pas toujours été le cas d'une culture à l'autre. Dans la situation qui nous occupe, nous savons que nous devons continuer à parler des droits de la personne. Je préfère que nous évitions d'entrer dans un débat à propos des définitions.

Le sénateur Nancy Ruth : Je suis curieuse d'entendre la réponse de Mme Solon-Helal à ce sujet, puisqu'elle travaille avec cette loi.

Mme Solon-Helal : Lorsque je suis tombée sur le terme « droit international », plutôt que « droit international humanitaire », j'ai été un peu étonnée, car, comme vous le savez, le droit international régit les agissements des nations et leur comportement les unes envers les autres. Le droit international humanitaire s'applique à la conduite des hostilités en temps de guerre. C'est moins spécifique, mais le droit international humanitaire est une branche du droit international.

Je ne crois pas que les politiques aient été changées en ce sens pour le moment, alors j'ignore encore quel impact aura cette nouvelle terminologie. Je sais par contre que des projets de loi nécessitant l'appui du gouvernement seront bientôt présentés.

Par exemple, on déposera sous peu un projet de loi d'initiative parlementaire pour réformer la Loi sur l'immunité des États. Pour nous, cet amendement est crucial, car à l'heure actuelle, la Loi sur l'immunité des États ne permet pas aux Canadiens victimes de torture ou de crimes de guerre d'obtenir réparation des gouvernements étrangers, car la loi protège l'immunité des chefs d'État étrangers. Il serait préférable que la Loi sur l'immunité des États soit modifiée de façon à ce que les Canadiens victimes de torture puissent obtenir réparation à l'étranger. Je ne pense pas que la nouvelle terminologie aura des répercussions à cet égard; enfin, il est à souhaiter que ce ne sera pas le cas. J'espère que le gouvernement du Canada appuiera l'amendement en question.

Une autre piste de solution pourrait passer par l'accroissement des ressources affectées à la section qui s'occupe des crimes de guerre et par l'augmentation du nombre de poursuites ici même au Canada. Comme vous le savez, nous avons eu récemment l'arrêt Munyaneza à la suite du procès subi au Canada par un Rwandais accusé de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide. Cette cause demeure unique. Il faut espérer que cette section se verra allouer des ressources supplémentaires pour permettre de nouvelles poursuites semblables afin de démontrer que le Canada est vraiment déterminé à s'attaquer au problème.

Nous n'avons noté aucun changement de politique au Tribunal pénal international. Dans les cas de violence sexuelle, il est essentiel d'assurer la protection des personnes qui travaillent sur le terrain — par exemple, en République démocratique du Congo. Certains de nos partenaires ont fait l'objet de menaces après avoir collaboré avec la poursuite pour veiller à ce que des chefs de violence sexuelle soient inclus dans les actes d'accusation. Certains ont été ciblés et attaqués en raison de leur travail pour le Tribunal pénal international, en tant que membres d'une ONG.

Le Tribunal ne dispose d'aucune mesure de protection pour les intermédiaires; seuls les témoins sont protégés. Nous espérons donc que de nouvelles dispositions seront prises à cet effet. Il est primordial d'assurer le bon fonctionnement du Tribunal et de permettre que les auteurs de crimes sexuels soient poursuivis.

Nous espérons que le gouvernement du Canada maintiendra ses efforts en ce sens. Il ne faudrait surtout pas que le changement de terminologie nuise à ces efforts.

La présidente : Madame White, vous avez parlé de volonté politique, un élément qui a été soulevé également par d'autres témoins. S'il est particulièrement difficile de faire comprendre à la communauté internationale et aux États parties, notamment, que les viols et les crimes sexuels font partie des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et s'inscrivent dans les génocides, c'est parce que ces actes sont commis en situation de guerre depuis des temps immémoriaux.

J'ai entendu récemment qu'il ne suffisait pas de parler de la volonté politique de porter des accusations contre ceux qui commettent ces crimes en s'en servant comme arme de guerre si ces gens vivent au sein d'une société qui, en temps de paix, tolère certains de ces actes; par exemple, si l'exploitation sexuelle des enfants n'est pas considérée comme un crime ou n'est pas prise au sérieux.

Y a-t-il encore du travail à faire, non seulement au niveau de la volonté politique pour que ces questions soient prises en compte par le Tribunal pénal international, lors du procès du Rwanda et des négociations de paix, mais aussi pour faire évoluer les valeurs en profondeur de telle sorte que ces crimes ne soient plus tolérés, même en temps de paix?

Mme White : Madame la présidente, vous savez bien que je vais vous répondre par un retentissant « oui ». De fait, ce serait sans doute une bonne piste de réflexion pour nos instances politiques, militaires, policières et judiciaires pour l'après-2011 et la suite de notre engagement en Afghanistan.

Notre rôle en devient alors un d'édification d'un État doté de toutes les institutions requises. Il va de soi que nous devons assumer ce rôle dans le cadre de notre participation à une organisation multilatérale comme les Nations Unies.

Vous avez soulevé un point extrêmement important car ce rôle s'inscrit, bien évidemment, dans notre travail de consolidation de la paix. Il s'agit d'instaurer de façon durable un respect de la primauté du droit et de la démocratie dans ces pays. Il est rare que deux démocraties se fassent la guerre. C'est le concept qui est à la base de tout notre travail.

J'aimerais faire part au comité des résultats de notre plus récent sondage sur les perceptions des Canadiens à l'égard des Nations Unies. Il est intéressant de noter l'engagement bien ancré à l'égard du rôle des Nations Unies dans l'édification des États. Chose encore plus intéressante — et nous ne savons toujours pas pourquoi — cette perception est encore plus nette au Québec. Les Canadiens voient l'édification des États comme le rôle des Nations Unies et le rôle que le Canada doit jouer au sein des Nations Unies.

J'ai beaucoup appris de mes collègues ici présents ce matin. Vous avez entendu comme moi que nous avons besoin de justice, de justice sociale, d'accès et d'égalité pour les femmes dans les sociétés en général, et que nous nous passerions bien de ces douloureuses discussions au sujet de la guerre et du viol comme arme de guerre.

La présidente : Une partie du dilemme qui se pose avec les Nations Unies, plus particulièrement sous l'aspect des droits de la personne, vient du fait que nous avons surtout réussi au cours des dernières années à accroître la sensibilisation au moyen de résolutions, de conventions, de traités et de procès internationaux.

Cependant, les Nations Unies, avec leur myriade de comités et de dossiers politiques, n'ont pas été aussi efficaces sur le plan de la mise en œuvre. Que pourriez-vous nous dire au sujet de la mise en œuvre de la résolution 1325? Vous avez indiqué que le Canada devrait jouer un rôle plus soutenu ou mieux affirmé relativement à cette résolution. Nous allons célébrer bientôt son dixième anniversaire. Auriez-vous des recommandations particulières quant à un mécanisme ou une fonction qui pourrait donner plus d'impact à la résolution 1325 au sein de la structure des Nations Unies?

Si vous préférez y réfléchir, vous pourrez toujours transmettre ultérieurement votre réponse à notre greffier.

Mme Alton : J'aimerais revenir sur une ou deux idées que j'ai essayé de faire valoir précédemment. Sans vouloir s'arrêter à l'aspect sensibilisation de la résolution 1325 ou de la résolution 1820, il faut dire que le concept de sensibilisation à la paix n'est pas nouveau, mais qu'il ne reçoit pas toute l'attention qu'il mérite en raison du sous-financement de la section responsable au sein des Nations Unies. Cette section pouvait compter sur du personnel au bureau de l'UNESCO à Paris, mais ses effectifs ont fondu pour se limiter maintenant à un seul employé à temps partiel.

Tout ce concept de sensibilisation à la paix, y compris la sensibilisation aux droits de la personne, pourrait faire l'objet d'un déploiement de ressources beaucoup plus vaste à l'intérieur du système et dans le cadre des dispositions que nous pourrions prendre à l'échelle provinciale ici même au pays. Nous avons grand besoin d'un tel déploiement, mais on demeure encore, malheureusement, plutôt hésitant en la matière.

Mme Solon-Helal : Je recommanderais la création d'un poste de représentant spécial, semblable à celui de représentant spécial pour la protection des enfants en période de conflit armé. Nous pourrions ainsi avoir un représentant spécial du secrétaire général pour la protection des femmes en période de conflit armé qui s'intéresserait en priorité aux aspects pertinents des résolutions 1325 et 1820.

Dans le cadre de notre travail auprès des tribunaux internationaux, nous avons pu constater qu'en l'absence de personnes expressément désignées à cette fin, les questions relatives à l'égalité entre les sexes sont toujours négligées. Si l'on ne nomme pas de conseiller spécial en la matière pour appuyer le procureur chargé de mener les poursuites dans ces dossiers, ces questions ne sont pas réglées convenablement et la coordination fait défaut.

Les structures nécessaires doivent être mises en place pour assurer le suivi et la mise en œuvre.

La présidente : Je remercie tous nos témoins pour leur contribution à notre étude. Comme vous le savez, nous avons entrepris cette étude dans le but précis de voir en quel sens nous pourrions formuler des recommandations et des conseils pratiques à l'intention de l'ensemble des intervenants, mais aussi de notre gouvernement, quant aux mesures à prendre pour veiller à ce que la résolution 1325 soit prise au sérieux.

Nous vous remercions de nous avoir fait bénéficier de vos expériences et de vos recommandations.

(La séance est levée.)


Haut de page