Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 2 - Témoignages du 4 mars 2009
OTTAWA, le mercredi 4 mars 2009
Le Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 16 h 15, pour étudier le projet de loi C-60, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale (cour martiale).
Le sénateur Joan Fraser (présidente) occupe le fauteuil.
[English]
La présidente : Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
Aujourd'hui, nous entreprenons notre étude des dispositions du projet de loi C-60, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale (cour martiale), qui a été adopté au mois de juin 2008, de façon assez rapide.
[Translation]
On avait décidé que le Parlement ferait adopter rapidement cette loi, parce que la Cour d'appel de la cour martiale du Canada avait statué, dans l'affaire Trépanier, que certains éléments de l'ancien système de cours martiales étaient anticonstitutionnels. L'absence d'une nouvelle loi aurait fini par immobiliser les cours martiales dans le cadre du système judiciaire militaire.
Avec l'accord de tous les partis, il a été décidé que le projet de loi serait adopté rapidement. Des préoccupations ont toutefois été soulevées, particulièrement au Sénat, au sujet du fait que nous n'étions pas en mesure d'étudier de manière approfondie les incidences possibles du projet de loi.
Le ministre de la Défense nationale, l'honorable Peter MacKay, a demandé au comité d'étudier les dispositions et le fonctionnement du projet de loi C-60 une fois que celui-ci serait entré en vigueur et de lui présenter ses constatations et ses recommandations. Notre étude en cours représente les efforts de notre comité pour répondre à cette demande.
Avant de souhaiter la bienvenue à nos témoins, j'aimerais signaler que c'est un privilège de nous réunir dans la salle 257 de l'édifice de l'Est, une pièce particulièrement belle. Elle a été rénovée tout spécialement pour le Sommet économique du G7, qui a eu lieu en juillet 1982. Les ministres et présidents se sont réunis ici même, autour de cette table. La salle a conservé son aspect pour rappeler cet événement historique, et on l'appelle la salle du Sommet. Nous avons la chance d'y tenir nos réunions, qui n'en seront que plus plaisantes.
Nous sommes ravis d'accueillir deux témoins pour lancer l'étude de ce projet de loi. D'abord, du Bureau du juge- avocat général, le colonel B.B. Cathcart, C.D., juge-avocat général adjoint, Secteur de la justice militaire et du droit administratif et le lieutenant-colonel Jill Wry, directrice juridique, Secteur de la justice militaire, politique et recherche. Vous connaissez vraiment le sujet dont nous sommes saisis.
Vous pouvez nous présenter un exposé, puis nous vous poserons des questions. Avez-vous des copies de votre discours?
Col B.B. Cathcart, C.D., juge-avocat général adjoint/Justice militaire et droit administratif, Cabinet du Juge-avocat général : Non. Malheureusement, il n'a pu être traduit au complet, mais nous pouvons vous en donner rapidement une copie, après la réunion. Je ne sais pas très bien comment procéder.
La présidente : Cela vous convient-il, sénateur Joyal? Le problème, c'est que ces représentants du gouvernement fédéral n'ont pas encore d'exposé dans les deux langues. Si leur texte est distribué, ce ne sera que dans une langue.
Le sénateur Joyal : Manquez-vous de personnel pour la traduction?
Col Cathcart : Franchement, oui, étant donné le court préavis que nous avons eu pour nous préparer. Notre discours est bilingue, mais il n'est pas traduit complètement.
La présidente : C'est en raison du court préavis. Vous vous souviendrez, sénateurs, qu'il régnait une certaine confusion quant aux témoins que nous recevrions aujourd'hui. Au départ, nous étions censés recevoir le ministre, mais il n'était pas disponible. Il viendra à notre prochaine séance, mercredi. Nous sommes donc reconnaissants à nos témoins d'aujourd'hui de s'être libérés.
Le sénateur Joyal : Nos témoins connaissent déjà la procédure; nous fonctionnons dans les deux langues officielles. Nous voulons avoir le texte dans les deux langues.
La présidente : Nous aurons le texte dans les deux langues.
Le sénateur Joyal : Ils devraient le savoir, surtout à titre de membres du personnel du ministère de la Défense nationale, dont le rendement est évalué annuellement par le commissaire aux langues officielles. Je pense qu'ils doivent se comporter en conséquence.
Col Cathcart : C'est noté, sénateur. Nous connaissons nos obligations et je ne peux fournir d'autres explications que celles du manque de temps et de ressources.
La présidente : Vous pouvez toutefois en prendre bonne note. Il ne faut pas y penser après coup, c'est important.
Col Cathcart : Oui, nous comprenons.
Bon après-midi. Comme l'a dit la présidente, je suis le colonel Blaise Cathcart, juge-avocat général adjoint responsable de la justice militaire et du droit administratif. Voici le lieutenant-colonel Jill Wry, directrice responsable de la justice militaire, politique et recherche.
Pour commencer, je vous remercie de cette occasion de comparaître devant le comité. Le lieutenant-colonel Wry et moi-même avons participé à l'élaboration du projet de loi C-60 et à la mise en place du personnel nécessaire, ainsi qu'à l'élaboration des modifications réglementaires corollaires. Nous sommes ravis de pouvoir aider le comité dans son examen.
Je vais commencer par parler de la genèse du projet de loi, ce qui devrait, je l'espère, aider tout le monde. Je sais que certains sénateurs ont participé au débat en comité plénier. J'aimerais toutefois vous raconter comment a été déposé le projet de loi C-60 et comment s'est déroulé sa mise en œuvre, depuis la sanction royale.
[English]
Comme vous le savez, le 24 avril 2008, dans l'affaire R. c. Trépanier, la Cour d'appel de la cour martiale a déclaré que le pouvoir exclusif du directeur des poursuites militaires de déterminer le type de cour martiale viole les droits constitutionnels de l'accusé prévus à la Charte.
La cour a aussi déclaré inopérante la disposition qui permet à l'administrateur de la cour martiale de convoquer les cours martiales. La convocation d'une cour martiale est une étape indispensable en vue de mener une affaire à un procès. De façon plus significative, la cour a déclaré ces dispositions de la Loi sur la Défense nationale inopérantes. La cour n'était pas disposée à suspendre les effets de sa décision.
[Translation]
Parlons maintenant des effets de la décision. Après la décision Trépanier, les cours martiales déjà établies et celles qui avaient déjà été convoquées pouvaient travailler, mais on ne pouvait pas créer de nouvelles cours martiales. Si le problème n'était pas réglé, l'impossibilité de mettre sur pied des cours martiales aurait eu un effet négatif sur l'administration de la justice militaire, la discipline, l'efficacité et le moral dont dépend l'efficacité opérationnelle des Forces canadiennes.
En outre, des intérêts sociaux importants étaient compromis. Des accusés ne pourraient subir leur procès dans des délais raisonnables. L'impossibilité de convoquer une cour martiale pourrait permettre que des crimes graves soient commis en toute impunité, sans que justice soit faite pour les victimes comme pour la société.
En réaction à la décision Trépanier et à ses répercussions, deux démarches ont été entreprises : la Cour suprême du Canada a été saisie d'une demande d'autorisation d'appel et de sursis à l'exécution, et des modifications législatives ont été proposées pour que des cours martiales puissent de nouveau être convoquées.
Ces deux démarches résultaient des mêmes circonstances, mais avaient un objectif différent. L'autorisation d'interjeter appel a été demandée pour contester la constitutionnalité des conclusions formulées par le Cour d'appel de la cour martiale du Canada. Il incombe aux tribunaux de se pencher sur les questions constitutionnelles capitales soulevées dans l'affaire Trépanier. Nous étions toutefois conscients du fait qu'un appel ne donnerait pas de réponse opportune et certaine aux contestations soulevées à l'égard du processus de la cour martiale.
Des modifications législatives, à savoir le projet de loi C-60, ont donc été proposées pour contrer les effets de la décision Trépanier, afin d'assurer une certaine stabilité et de donner quelque certitude à l'appareil judiciaire militaire, et rapidement. En bref, sans traiter de l'aspect constitutionnel, des modifications à la Loi sur la défense nationale étaient nécessaires pour répondre aux préoccupations soulevées par la Cour d'appel de la cour martiale du Canada, afin que des cours martiales puissent de nouveau être convoquées.
Comme vous le savez, le 25 septembre 2008, la Cour suprême du Canada nous a refusé l'autorisation d'interjeter appel. Grâce à l'appui des députés et des sénateurs, au moment où cette décision a été rendue, les modifications législatives avaient heureusement déjà été adoptées et le système de cours martiales pouvait continuer de fonctionner.
En gros, le projet de loi C-60 a simplifié la structure des cours martiales, a créé un cadre global pour la sélection des types de cours martiales saisies du dossier d'un accusé et a amélioré l'efficacité et la fiabilité du processus décisionnel. Plus précisément, on a fait passer le nombre de types de cours martiales de quatre à deux et on a donné aux deux types de cours martiales qui restaient la même compétence pour ce qui est des accusés et des infractions.
[English]
En ce qui a trait au type de cour martiale devant juger un accusé, le projet de loi a prévu les infractions de nature grave qui doivent être jugées par la cour martiale générale et prescrit les cas où les infractions relativement mineures doivent être jugées par la cour martiale permanente. Dans tous les autres cas, il a permis à l'accusé de choisir entre un procès devant juge seul ou devant un comité de la cour martiale.
En ce qui concerne le processus décisionnel de la cour martiale, le projet de loi a accordé aux juges militaires le pouvoir de décider des questions préliminaires au procès à un stade qui survient plus tôt dans le processus, et a renforci la sûreté des verdicts en exigeant du comité de la cour martiale générale l'unanimité des verdicts tels que ceux de culpabilité et d'acquittement.
[Translation]
Conformément à l'objectif d'assurer la clarté du système, le projet de loi C-60 était aussi l'occasion de clarifier certaines dispositions de la loi sur la défense nationale, par suite du jugement de la Cour d'appel de la cour martiale du Canada dans l'affaire R. c. Grant. À la différence de la décision Trépanier, celle de l'affaire Grant ne constatait pas une infraction à la Charte des droits et libertés, mais statuait qu'une question dont devait être saisie une cour martiale en vertu de la loi devait, en raison de délais excessifs, faire l'objet d'un procès sommaire.
Le tribunal signalait que sa décision était adaptée aux faits et aux circonstances de l'affaire. Il reste que le fait qu'un nouveau procès, un procès sommaire, soit ordonné au lieu d'une cour martiale avait créé une incertitude quant aux droits de choisir de l'accusé et quant à la capacité d'un commandant de renvoyer une affaire à une cour martiale, avant ou pendant un procès sommaire.
Le projet de loi C-60 donnait réponse aux questions soulevées dans l'affaire Grant.
Je vais maintenant parler de la mise en œuvre du projet de loi C-60. Vous savez qu'il a reçu la sanction royale le 18 juin 2008 et qu'il est entré en vigueur le 18 juillet 2008. Une fois donnée la sanction royale, il a fallu préparer les modifications à la réglementation qui découlaient des modifications apportées par le projet de loi C-60.
Il s'agissait en grande majorité de modifications corrélatives. La principale portait sur la procédure suivie par l'administrateur de la cour martiale pour notifier l'accusé du droit de choisir le type de cour martiale et pour recevoir cette décision.
Entre l'entrée en vigueur du projet de loi C-60 et le 26 février 2009, 39 cours martiales ont été convoquées. Dans tous les cas, c'est le cadre législatif du projet de loi C-60 qui a servi à déterminer le type de cour martiale.
D'après les renseignements fournis par l'administrateur de la cour martiale, nous avons constaté que des 39 dossiers, cinq s'adressaient à une cour martiale générale, avec convocations automatiques. Autrement dit, étant donné la nature des accusations, la cour martiale générale en a été saisie directement. Rappelons que les cours martiales générales sont composées d'un juge militaire et de cinq membres des Forces canadiennes. Une cour martiale générale a été convoquée parce que c'était le choix qu'avait fait l'accusé; cinq cours martiales permanentes, composées d'un juge militaire seul, ont été convoquées automatiquement et 28 cours martiales permanentes ont été convoquées selon le choix de l'accusé.
Signalons que pour l'une des cours martiales générales convoquées automatiquement, il y a eu ultérieurement un transfert à une cour martiale permanente, à la demande de l'accusé et avec le consentement du directeur des poursuites militaires. Tout cela s'est fait conformément aux nouvelles dispositions apportées par le projet de loi C-60.
Cette procédure visant le choix par l'accusé du type de cour martiale, selon certaines circonstances, est semblable à celle du système judiciaire civil. D'après tout ce qu'on nous dit, ces nouvelles procédures de choix fonctionnent bien.
En conclusion, le projet de loi C-60 a été adopté à un moment crucial pour le système de cours martiales, en réaction aux répercussions de la décision Trépanier. Le projet de loi C-60 a non seulement rétabli la clarté, la certitude et la stabilité nécessaires pour le système de cour martiale, mais il a aussi rendu le système judiciaire militaire plus équitable dans l'ensemble, pour les accusés comme pour la société canadienne. En rétablissant une disposition législative autorisant la convocation de cours martiales, le projet de loi a fait en sorte que la justice puisse continuer d'être rendue aussi bien pour les accusés que pour les victimes.
Les modifications proposées dans le projet de loi C-60 ont été intégralement mises en œuvre et constituent le fondement de toutes les décisions rendues par les cours martiales.
Merci de m'avoir permis de m'adresser au comité. Le lieutenant-colonel Jill Wry et moi-même serons heureux de répondre aux questions du comité.
[English]
Je vous remercie. Il me fera plaisir de répondre à toutes vos questions.
La présidente : Merci, colonel Cathcart. Je suis certaine que tous les membres du comité auront apprécié votre présentation simple, claire et facilement compréhensible, ce qui rend encore un petit peu plus étonnant qu'il n'ait pas été possible de fournir une traduction.
Deux choses avant de procéder à la période des questions.
D'abord, je vais vous demander de voir à ce que le comité reçoive, d'ici 24 heures, une traduction complète et fidèle de vos remarques. Ensuite, je vous informe que j'écrirai au juge-avocat général pour lui rappeler que témoigner devant un comité parlementaire, c'est une affaire sérieuse et que les ressources fournies par les témoins ou futurs témoins, d'autant plus qu'ils représentent le gouvernement fédéral, doivent nécessairement être présentées dans les deux langues officielles du Canada.
Le sénateur Nolin : Je vous remercie tous les deux de vous être déplacés.
Je ne veux pas refaire le procès du projet de loi C-60, mais je pense qu'il serait opportun d'en replacer le contexte. Mes collègues voudront sûrement poser des questions, surtout à la lumière du rapport du regretté juge en chef Lamer qui, en 2003, a recommandé — vous a recommandé — d'apporter des modifications, entre autres spécifiquement sur ce dont traitait le projet de loi C-60.
Pourquoi avoir tardé et presque — j'oserais dire — titillé, excité la Cour d'appel de la cour martiale, au point où elle a dû rendre une telle décision dans l'affaire Trépanier? Pourquoi avoir attendu si longtemps pour finalement adopter ce qui, pour bien des citoyens, semble normal?
[Translation]
Évidemment, vous pouvez répondre en anglais.
Col Cathcart : Je vous remercie de cette question. Comme cela a été expliqué au moment de la comparution du ministre et du juge-avocat général, plusieurs des recommandations figurant dans le rapport Lamer avaient été mises en œuvre, le plus souvent par des changements dans la réglementation ou dans les politiques. Évidemment, nous n'avons aucun moyen d'agir sur la mise en accusation, la procédure suivie en cour martiale et, éventuellement, devant la Cour d'appel. Par conséquent, les cours martiales continuent à fonctionner et des accusations sont portées pendant que nous sommes en train d'étudier les recommandations du rapport Lamer — et ce ne sont pas uniquement des considérations juridiques; le gouvernement doit les aborder dans une perspective de réorienter des politiques. Un tribunal, qu'il s'agisse d'une cour martiale ou d'une cour d'appel, a toujours la possibilité de manifester son désaccord par rapport au système actuel, si je peux l'exprimer ainsi.
Par ailleurs, comme vous le savez sans doute depuis notre dernière comparution, la démarche de mise en œuvre des changements proposés dans le rapport Lamer a essentiellement pris la forme du projet de loi C-45. Cette démarche se déroulait à la Chambre des communes au moment où l'arrêt Trépanier a été rendu.
D'un côté, il faut considérer le système tel qu'il existait et qui permettait de rendre des décisions conformes, sur le plan juridique et sur celui des politiques, aux exigences de la justice militaire; mais par ailleurs, il convient de reconnaître que des changements s'imposaient et qu'ils devaient passer par le processus législatif normal. Malheureusement, les recommandations du rapport Lamer ont d'abord pris la forme du projet de loi C-7, qui est mort au Feuilleton, puis du projet de loi C-45, lui aussi mort au Feuilleton. C'est arrivé deux fois au mauvais moment.
Il n'est pas forcément vrai de dire que nous avons détecté un problème sérieux à partir du rapport du juge Lamer, car nous avions déjà accepté, tant du point de vue juridique que du point de vue des politiques, de mettre en œuvre ce qui a plus tard été affirmé dans l'arrêt Trépanier, rendu par la Cour d'appel de la cour martiale.
[English]
Le sénateur Nolin : À la suite d'une décision politique — et je ne vous demande pas de la commenter —, le projet de loi C-45 n'a pas été amendé mais plutôt remplacé par un projet de loi spécifique, le projet de loi C-60; d'ailleurs, il s'avère que ce fut une bonne décision puisque le projet de loi C-45 est mort au Feuilleton alors que le projet de loi C-60 fait maintenant partie de la loi martiale.
Avant d'aborder les conséquences du projet de loi C-60, est-ce que vos services s'affairent à nous préparer une nouvelle version améliorée du projet de loi C-45? Et quand sera déposé cette nouvelle série d'amendements qui devrait, on l'espère, donner vie aux recommandations du juge Lamer?
[Translation]
Col Cathcart : De notre point de vue, nous avons fait nos recommandations au ministre et je crois savoir qu'il doit comparaître ici même la semaine prochaine. Je lui laisse le choix de vous répondre quant à la décision du gouvernement et à la possibilité qu'il présente de nouveau le projet de loi. Je crois savoir que des efforts sont faits en ce sens, mais c'est auprès du ministre que vous devrez en obtenir des détails.
Le sénateur Milne : Colonel, si je vous comprends bien, le nouveau règlement — ou en fait le nouveau système — n'est en place que depuis quelques jours.
Col Cathcart : Non.
Le sénateur Milne : Depuis le 26 février?
Col Cathcart : Non. La sanction royale date du 18 juin 2008.
Le sénateur Milne : Je sais. Vous dites qu'il a fallu attendre le 26 février 2009 pour voir le règlement.
Col Cathcart : Excusez-moi si je vous ai induite en erreur. Le règlement était prêt 30 jours après la sanction royale, soit le 18 juillet 2008. Ce que j'ai dit, c'est entre la sanction royale et le 26 février 2009, 39 cours martiales ont siégé en se fondant sur la nouvelle loi et sur le nouveau règlement.
Le sénateur Milne : Je vois.
Col Cathcart : Excusez-moi de vous avoir induite en erreur.
Le sénateur Milne : C'est bien; l'explication figurera clairement au compte rendu.
Si je comprends bien, quand nous avons adopté le projet de loi pour la première fois, il y avait un arriéré d'une cinquantaine de poursuites au moment de la sanction royale. Si vous n'en n'avez réglé que 39 depuis lors, qu'est-il advenu des autres? Je suis sûr que d'autres dossiers vous ont été soumis dans l'intervalle.
Col Cathcart : C'est une très bonne question. À l'époque, je crois qu'il y avait 45 affaires en instance, chacune avec un statut différent au sein du système.
Elles ont toutes été traitées essentiellement en vertu des règles existantes. Par exemple, les cours martiales qui avaient été constituées ont poursuivi leurs travaux; celles qui avaient présenté un acte d'accusation mais ne s'étaient pas encore constituées se sont retirées, la poursuite continuant alors l'étude du dossier. Lorsqu'il y a eu retrait, c'est parce que les cours martiales chargées du dossier ont indiqué que dans la plupart des cas, elles étaient sur le point de suspendre leur délibération et de renvoyer le dossier à la poursuite.
C'est essentiellement ce qui s'est produit pendant l'intervalle entre le 24 avril, date de l'arrêt Trépanier et la sanction royale : 45 dossiers étaient encore en instance. Ensuite, les 39 sont de nouveaux dossiers traités depuis l'entrée en vigueur du règlement et de la loi.
Le sénateur Milne : Dans ce cas, l'information sur l'arriéré de 45 dossiers était inexacte. Les affaires étaient déjà en instance.
Lieutenant-colonel Jill Wry, directrice juridique/Justice militaire politique et recherche, Cabinet du Juge-avocat général : C'est assez confus, car nous parlons ici de deux périodes différentes. Après le 24 avril, nous étions dans une situation où certaines cours martiales s'étaient constituées et fonctionnaient déjà, tandis que d'autres avaient seulement présenté un acte d'accusation et ne s'étaient pas encore constituées; dans d'autres cas encore, la poursuite procédait à un examen du dossier alors que l'acte d'accusation n'avait pas encore été présenté. On était à différentes étapes de la procédure.
Le défi présenté par l'arrêt Trépanier, c'est qu'à partir de ce moment, on ne pouvait plus constituer de nouvelles cours martiales. Les cinq qui fonctionnaient déjà ont pu continuer; nous avons pu constituer, je crois, 17 cours martiales, mais les autres dossiers se sont trouvés bloqués.
Le sénateur Milne : On m'a dit qu'ils étaient dans les limbes.
Lcol Wry : Exactement. Ils étaient dans les limbes. Les cinq cours martiales qui avaient déjà entamé leurs travaux les ont poursuivis et celles qui avaient été constituées ont continué à siéger. Dans tous ces cas, l'accusé a eu l'occasion soit d'accepter le type de cour martiale qui s'était constituée, soit d'élever une objection.
Dans certains cas, l'accusé a contesté le type de cour martiale proposé, et les juges ont alors décidé soit de surseoir aux accusations, soit d'y mettre fin. Dans 11 cas environ, l'accusé a accepté le type de cour martiale qui s'était constituée, et celle-ci a pu siéger.
Venons-en maintenant au 18 juillet. Lorsque la sanction royale a été prononcée et que le nouveau système est entré en vigueur, tous les dossiers dans lesquels l'acte d'accusation avait été présenté sans que la cour martiale se soit constituée — il y en avait environ 24 — ont été renvoyés immédiatement à l'administrateur des cours martiales pour qu'un acte d'accusation soit présenté en vertu du nouveau système.
Dans le cas des cours martiales qui ont décidé de surseoir aux accusations ou d'y mettre fin, la poursuite a repris l'étude du dossier et, en fonction du retard accumulé et de la nature de l'affaire, elle a décidé s'il y avait lieu de présenter un nouvel acte d'accusation et de confier l'affaire à une cour martiale dont elle demandait la constitution dans le cadre du nouveau système. Dans certains cas, un nouvel acte d'accusation a été présenté mais dans d'autres, les accusations ont été retirées sans qu'un autre acte d'accusation soit présenté.
Certaines des cours martiales qui se sont constituées depuis cette époque ont fait partie de l'arriéré en question. D'autres affaires sont nouvelles et il est difficile de vous donner un chiffre exact. Vous allez voir, j'en suis sûre, que certaines affaires entamées après le 18 juillet sont toujours en instance. Certaines ont été jugées, les cours martiales ont siégé, tandis que d'autres sont encore en instance, à cause des ajournements, et cetera.
Le sénateur Milne : Normalement, quelle est la durée d'un procès devant ces deux catégories de cours martiales?
Lcol Wry : Pour choisir le type de cour martiale?
Le sénateur Milne : Une fois que l'acte d'accusation a été présenté, combien de temps dure le procès en moyenne?
Lcol Wry : Tout dépend de l'affaire. Je ne veux pas spéculer ni vous donner un chiffre trop bas ou trop élevé.
Le sénateur Milne : Le système est plus simple avec deux types de cours martiales.
Col Cathcart : Oui, évidemment, pour ceux qui connaissent mieux la justice civile, parce que nous n'avons pas de structure permanente. Les cours doivent se constituer dans certaines régions du pays ou à l'étranger. Il y a différentes formules, mais dans la version la plus rapide, il faut trois, quatre ou cinq mois pour réunir tous les intervenants, l'accusé, la défense et pour que le procès puisse commencer.
Dans d'autres cas, à cause des motions et des ajournements, l'affaire peut durer des années, ce qui n'est guère différent de la justice civile.
Le sénateur Milne : En passant de quatre types de tribunaux à deux, est-ce qu'on vous a simplifié le travail ou est-ce qu'on l'a rendu plus difficile? Et qu'en est-il pour les accusés?
Col Cathcart : Nous ne pouvons pas vous répondre directement. Le Juge-avocat général joue un rôle de surintendance et nous lui venons en aide au niveau de l'élaboration et de la surveillance du système et des politiques.
Les véritables participants, à savoir la poursuite, la défense, l'administrateur de la cour martiale et les juges, que vous allez peut-être entendre, pourraient vous donner une image plus exacte du système. De notre point de vue, il est cohérent. C'est un petit système, et nous recueillons beaucoup d'information de façon officielle ou officieuse.
Comme je l'ai dit dans mon exposé, d'après tout ce qu'on entend dire, les choses se passent bien. Il n'y a pas eu de motions ou de contestations par la défense des nouveaux articles que contenait le projet de loi C-60. Je ne peux pas parler au nom des avocats de la défense, mais cela semble indiquer de façon générale que jusqu'à maintenant, ils sont satisfaits du fonctionnement du système.
Le sénateur Angus : Tout d'abord, madame la présidente, veuillez m'excuser de mon retard. Vous participiez déjà à des discussions préliminaires lorsque je suis arrivé. Je ne peux pas mettre mon manteau ni l'enlever aussi rapidement que d'habitude. Vous me connaissez et vous savez à quel point cela me convient mal.
Je voudrais tout d'abord bien comprendre le problème. J'ai cru comprendre, en m'asseyant, que le témoin avait une déclaration liminaire en anglais mais pas en français, ce qui a occasionné un contretemps. Est-ce bien exact? C'est un document que le témoin a lu et qui était disponible en français pour ceux qui voulaient l'entendre en français, n'est-ce pas?
La présidente : Non, il n'était disponible qu'en anglais. Les gens ont pu entendre la traduction grâce aux écouteurs.
Le sénateur Angus : Je comprends.
La présidente : J'ai demandé qu'on nous fournisse le document traduit dans les 24 heures.
Le sénateur Angus : Je ne contesterais jamais votre décision. Cependant, je la trouve sévère, puisque la transcription en français sera disponible sur notre réseau.
Je comprends le principe. S'il manque de personnel, le délai de 24 heures pourrait s'avérer un peu court. J'attendrai ma copie avec impatience.
La présidente : C'est pour cette raison que j'ai attendu la déclaration préliminaire, afin d'être sûre que le document était clair et intelligible, même pour les non-initiés, afin de m'assurer qu'il ne soit pas nécessaire de rappeler la seule et unique personne capable de traduire un texte juridique hermétique d'un congé de maternité, ou quelque chose du genre.
Le sénateur Angus : Nous verrons. Il s'agit d'une traduction française d'un document qui avait été préparé par courtoisie afin d'être distribué. Les témoins ne nous donnent pas toujours une copie de leur exposé.
La présidente : Notre comité tend à établir une distinction entre les témoins ordinaires et ceux qui viennent du gouvernement fédéral. Comme vous le savez, la Loi sur les langues officielles s'applique au gouvernement du Canada, et nous prenons ces obligations très au sérieux.
Le sénateur Joyal : Nous le faisons depuis 14 ans, madame la présidente.
Le sénateur Angus : Ils ne sont pas obligés d'apporter une copie de leur exposé.
La présidente : Nous ne distribuons aucun document à moins qu'il ne soit disponible dans les deux langues officielles, et nous présumons habituellement qu'au sein du vaste appareil du gouvernement fédéral, les services nécessaires devraient être disponibles.
Le sénateur Angus : Merci de cette précision. Cela m'amène à ma prochaine question : elle porte sur mon ignorance avouée des questions de justice militaire. Je suis impatient d'en apprendre plus à ce sujet pendant cette série d'audiences.
J'ai remarqué que les problèmes, si on peut les qualifier ainsi, qui sont survenus et ont mené au projet de loi C-60 — et avant cela aux projets de loi C-7 et C-45 — étaient, en fait, une ou deux décisions de ce que l'on appelle la Cour d'appel de la cour martiale du Canada. Il s'agit peut-être d'une question assez élémentaire, mais je demanderais aux témoins de m'expliquer ce que sont ces tribunaux créés en vertu de l'article 93. S'agit-il de cours supérieures? Qu'est-ce que la Cour d'appel de la cour martiale du Canada?
Col Cathcart : Elle relève de la Cour fédérale et est composée de juges de la Cour fédérale ainsi que de juges désignés d'autres cours supérieures. Seuls des juges civils y sont nommés, contrairement aux cours martiales, qui sont composées de juges militaires. C'est l'équivalent d'une cour d'appel dans le système civil, composée de juges civils.
Le sénateur Angus : S'agit-il de juges qui sont nommés à la section d'appel? Comme vous le savez, la Cour fédérale a été scindée. Le tribunal de première instance est distinct de la Cour d'appel fédérale, qui n'est pas la même chose.
S'agit-il de juges de la Cour d'appel fédérale?
Col Cathcart : Il peut s'agit de juges de l'une ou l'autre des sections.
Le sénateur Angus : Je présume que cela s'applique à la fois aux audiences et aux appels. Disons, par exemple, qu'une audience est tenue en cour martiale. Est-telle présidée par un juge, deux juges ou plus?
Col Cathcart : Une cour martiale permanente compte un juge militaire et une cour martiale générale est composée d'un juge militaire et d'un groupe de cinq membres des Forces canadiennes.
Le sénateur Angus : C'est l'un ou l'autre.
Col Cathcart : Exactement, sénateur. Il y a deux types.
Le sénateur Angus : Merci. Je pousserai mes recherches plus loin.
Ma prochaine question s'inscrit dans la même veine que celle du sénateur Milne. Comme elle, j'ai vu 39 cas depuis le 18 juin. J'aimerais savoir si c'est un nombre élevé de cas pour une période de six mois. Avez-vous beaucoup de travail?
Col Cathcart : J'imagine que tout est relatif. Les processus occupent pleinement le système, que ce soit les enquêtes préliminaires, les accusations, les mises en accusation ou les cours martiales elles-mêmes. Le système ne se limite pas à une région ou à une province en particulier, si l'on veut. C'est un système mobile. En théorie, nous pourrions tenir une cour martiale en Afghanistan si les accusations provenaient de ce théâtre.
Le système est occupé du point de vue réel et tangible, avec la participation des avocats en cour martiale; en même temps, il faut faire un important travail administratif et logistique pour les mettre sur pied.
Le sénateur Angus : Si je demandais au juge en chef de la Cour supérieure du Québec combien de cas par année aboutissent devant la Cour supérieure en moyenne, il me donnerait un chiffre. J'aimerais savoir si 78 cas par année est une moyenne raisonnable.
Col Cathcart : Oui. La norme se situe entre 70 et 80 cas.
Le sénateur Angus : Ma prochaine question ira encore une fois dans la même veine que celle du sénateur Milne. Elle est allée au cœur du problème pour ce qui est des dossiers en instance qui ont été transférés en vertu du nouveau système. Je pense qu'elle tentait d'obtenir une réponse à la question suivante, et j'aimerais connaître cette réponse : pendant cette réorganisation, des cas ont-ils été perdus?
Vous avez parlé de cas « dans les limbes », et je pense que vous avez décrit la façon dont ceux-ci étaient réglés, selon leur nature. Toutefois, en bout de ligne, certains cas ont-ils été égarés pendant la réorganisation ou mis de côté parce qu'ils n'avaient plus leur place dans le nouveau système?
Lcol Wry : Je ne dirais pas cela. Les cours martiales ont réévalué un certain nombre de cas et ont décidé, à la lumière des délais et de toutes les circonstances, si elles souhaitaient porter de nouvelles accusations. Lorsqu'elles ne l'ont pas fait, les cas en question ont été abandonnés.
Toutefois, il ne fait aucun doute que tous les cas ont été traités d'une façon ou d'une autre, parfois sans porter d'accusation. Je pense que dans un cas, l'accusation a été retirée. Dans de nombreux autres cas, de nouvelles accusations ont été portées. Les cours martiales ont été convoquées ou sont en voie de l'être.
Le sénateur Angus : La dernière courte série de questions peut sembler élémentaire à vos yeux. Les problèmes créés par la Cour d'appel de la cour martiale du Canada dans les arrêts Trépanier et Grant sont assez considérables. Manifestement, ils ont mené à ceci. Pourquoi a-t-il fallu autant d'années? Je suis stupéfait de voir que le système a soudainement réalisé qu'il était sans effet et qu'il ne fonctionne pas. Il est ahurissant de lire et de voir cela, en plus du refus de la Cour suprême d'accorder le droit d'appel.
Je suis membre du barreau et je comprends le système civil. Le tribunal est occupé, mais il accorde généralement ce droit au sujet de questions juridiques importantes. C'est pourquoi j'ai été surpris.
Lcol Wry : Premièrement, la décision Trépanier constitue le coeur du projet de loi C-60. Lorsque la question, c'est-à- dire la contestation au sujet du rôle d'un accusé dans le choix d'un type de cour martiale, a été soulevée pour la première fois, la compétence ou la jurisprudence qui existait à l'époque comprenait une ancienne décision de la Cour d'appel de la cour martiale du Canada, rendue en 1993 : R. c. Lunn. Dans ce cas, le tribunal a confirmé que la constitution n'exigeait pas que l'accusé joue un rôle dans le choix du type de cour martiale.
Comme on l'a dit auparavant, le rapport Lamer contenait une recommandation. Dans l'avant-propos, il indiquait clairement que le système de justice militaire était très équitable, et il recommandait quelques changements, quelques améliorations. Oui, il a recommandé le recours à un mécanisme qui permettrait à l'accusé de choisir le type de cour martiale, mais rien dans ses recommandations ni dans le préambule n'indiquait qu'il s'agissait selon lui d'une nécessité du point de vue constitutionnel. Ce fait, combiné à ses observations précédentes dans le préambule du rapport complet, a influé sur l'examen des recommandations.
De plus, dans la décision Trépanier, le tribunal a fait référence à une autre décision, la décision Nystrom; je ne me souviens pas de l'année exacte de cette décision. Dans ce cas, la cour a fait référence à une remarque incidente qui avait été formulée. Une remarque incidente serait une explication non exécutoire.
Par conséquent, lorsque le juge militaire s'est penché sur l'affaire, il a constaté qu'il y avait une décision exécutoire rendue par la Cour d'appel de la cour martiale du Canada dans la décision Lunn, une remarque non exécutoire dans la décision Nystrom, de même qu'une recommandation formulée par le juge Lamer, qui était une recommandation qui ne semblait avoir aucune nécessité constitutionnelle. Par conséquent, le juge militaire dans l'affaire Trépanier a tout d'abord constaté qu'il n'y avait aucune atteinte à la Constitution. Il a formulé cette conclusion en se fondant sur la décision Lunn.
Bien entendu, la Cour d'appel de la cour martiale du Canada n'était pas d'accord, a rendu une décision et nous a donné une jurisprudence autre que celle qui existait lorsque la décision Lunn a été rendue.
Le sénateur Angus : C'est pour cette raison que je vous ai demandé qui compose la Cour d'appel de la cour martiale du Canada. D'après ce que j'ai compris, vous m'avez dit qu'il y avait cinq juges dans le système civil.
Lcol Wry : Elle est composée de trois juges civils venant principalement du niveau de la Cour fédérale.
Le sénateur Joyal : Je ne veux pas engager un débat avec le lieutenant-colonel Wry sur le contenu du rapport du juge Lamer, mais comme on dit à la Cour d'appel, ce n'est pas mon humble avis.
Selon ce que j'ai lu, le rapport Lamer contient de nombreux arguments qui ont des conséquences juridiques. Un ancien juge de la Cour suprême ne peut pas dire dans un rapport « cela va à l'encontre de l'article 5 de la Charte », et ce, pour des raisons évidentes. Il n'est plus juge et ne devrait donc pas formuler de conseils à l'intention de ses anciens collègues.
Je vous lis un extrait que l'on retrouve à la page 36 du rapport, pour vous donner un exemple :
Lorsqu'on examine minutieusement les types de cours martiales, on se rend vite compte que deux personnes accusées de la même infraction ont des droits différents suivant leur grade et le pouvoir discrétionnaire du DPM.
Si vous êtes un avocat — je ne veux pas dire que vous l'êtes et que vous avez tiré la mauvaise conclusion —, mais à mes yeux, à titre d'humble avocat, pas aussi éminent que mon collègue d'en face qui vient de s'exprimer, cela touche le principe fondamental de la Charte.
Le prochain extrait vient de la page 39 :
Voir, par exemple, le document de travail 27 de la Commission de réforme de droit du Canada intitulé Le jury en droit pénal :
Certaines études empiriques sur les délibérations des jurys indiquent que, sous une règle de l'unanimité, le point de vue minoritaire a plus de chance de s'exprimer et d'être pris en considération et que le niveau des discussions est plus élevé. Ces conclusions permettent de penser que la règle de l'unanimité offre une plus grande garantie de parvenir à une décision juste.
Si la règle de l'unanimité par rapport à la règle de la majorité n'est pas un principe de droit, je ne sais pas ce qui pourrait bien l'être. C'est tout à fait juridique. C'est pour cette raison que nous avons recommandé qu'un comité de la cour martiale soit élu à l'unanimité, pour des raisons juridiques.
Je le répète, je ne veux pas entreprendre un débat, mais j'ai l'impression, d'après ce que vous avez dit, que vous tentez de minimiser l'importance du contenu du rapport, alors qu'en fait, nous nous débattons encore avec le successeur du projet de loi C-45 pour nous assurer que le système de cours martiales du ministère de la Défense nationale soit synchronisé avec cela.
Le sénateur Angus : Est-ce que « cela » signifie le rapport Lamer?
Le sénateur Joyal : Oui. Je ne veux pas que nous commencions à discuter de tout le rapport, mais j'ai tiré deux extraits du chapitre sur lequel porte le projet de loi C-60 et qui est couvert par celui-ci. Si ce que vous dites est conforme à l'opinion du MDN au sujet du rapport, je peux comprendre que vous attendiez que l'on vous dise que cela va à l'encontre des articles 7 et 11 de la Charte avant d'agir, à moins d'apporter à l'étude du rapport et à la mise en œuvre de son contenu le type de réaction que, selon moi, vous proposerait un avocat moyen pour vous éviter de vous retrouver dans une position embarrassante et d'avoir à vous présenter devant la Cour suprême, qui vous dirait alors : « Non, retournez faire vos devoirs et nous vous donnons un délai pour le faire. Faites-le maintenant. »
Pensez-vous devoir tirer des leçons de tout cela?
Lcol Wry : Merci beaucoup. Avant toute chose, je tiens à dire que le rapport dont le juge Lamer est l'auteur a été accueilli avec le plus grand sérieux. Nous l'avons examiné très longuement et, après l'examen initial, nous avons accepté 81 des 88 recommandations. Deux projets de loi ont été déposés au Parlement pour mettre en œuvre la vaste majorité de ces recommandations.
Il est indéniable que ces recommandations ont été prises tout à fait au sérieux. Loin de moi l'idée d'induire le sénateur Joyal en erreur en lui donnant l'impression que le rapport, ou une partie de ce dernier, a été ignoré ou minimisé. Lors de notre examen des dispositions, nous avons lu l'ensemble du rapport pour nous assurer que les recommandations ont été prises en compte de manière complète et sérieuse.
J'ai évoqué deux extraits de l'avant-propos de ce rapport, qui figurent aux pages 1 et 3. Sénateur Joyal, je vous demanderais de vous reporter au paragraphe intitulé «Un régime de justice militaire solide et équitable». Feu le juge Lamer dit et je cite :
Certes, le projet de loi C-25 traitait de bien des questions, mais l'un des principaux thèmes était la réforme du système de justice militaire. Je suis heureux de pouvoir dire que, par suite des modifications apportées par le projet de loi C-25, le Canada s'est doté d'un système très solide et équitable de justice militaire dans lequel les Canadiens peuvent avoir confiance.
À la page 3, évaluant les modifications proposées, notamment en ce qui concerne le Code de discipline militaire, où figure une description du régime de justice militaire, et que l'on trouve dans les dispositions de la Loi sur la défense nationale, il affirme :
J'ai recommandé que soient instaurés des changements d'ordre plutôt mineur qui traduisent la nécessité permanente de tenir la balance égale entre les normes et valeurs de la société canadienne et les besoins uniques de l'Armée en matière de discipline, d'efficacité et de transférabilité.
Je conviens que des gens avertis puissent donner des interprétations divergentes à diverses dispositions et c'est pourquoi je répondrai au sénateur que les recommandations qui font suite aux observations qui figurent dans cet avant-propos s'inspirent assurément des mots même du juge Lamer, à savoir qu'il les considère comme des changements d'ordre plutôt mineur.
Ses recommandations ont été prises tout à fait au sérieux, à telle enseigne que 81 d'entre elles ont été retenues. Il a fallu faire une évaluation de chacune d'entre elles pour déterminer l'orientation adéquate à suivre.
Nous avons examiné les recommandations 23 et 25 en 2003 et 2004, mais manifestement, la donne a été grandement modifiée à la nouvelle que l'arrêt Lunn n'avait plus cours. L'affaire Trépanier a abouti à une décision claire quant à la constitutionnalité de ces dispositions. Cela nous a amenés à revoir la situation pour adopter l'orientation la plus appropriée. C'est ce qui constitue le fondement et la décision de politique qui ont pavé la voie au projet de loi C-60 dont la Chambre des communes et le Sénat ont été saisis.
Le sénateur Nolin : Je vous ai écouté et vous avez évoqué l'affaire Nystrom, qui remonte à 2005 environ. Le rapport du juge Lamer date de 2003. Le projet de loi C-60, de 2008. Et il a fallu l'intervention du juge Letourneau qui est probablement l'auteur de l'arrêt Trépanier.
Malheureusement, c'est vous qui êtes devant nous, mais vous vous imaginez bien que nous souhaiterions vivement entendre tous les autres fonctionnaires du ministère pour savoir qui se cache derrière cette décision. Il s'agit probablement de la haute direction du ministère.
Nous sommes intrigués par le temps qu'il a fallu. Il a fallu qu'un tribunal déclare que la chose est grave et qu'il faut apporter des changements, immédiatement et sans attendre. Voilà pourquoi nous posons ces questions. Nous avons tous le même objectif — le meilleur régime possible.
Col Cathcart : Absolument, sénateur.
Le sénateur Nolin : Nous avons reçu les projets de loi C-7 et C-45. Quand allons-nous recevoir le prochain?
Col Cathcart : Comme je vous le disais, nous souhaiterions vivement vous donner une réponse ferme aujourd'hui. Malheureusement, c'est impossible. Ces décisions ne m'appartiennent pas.
Le sénateur Nolin : La question a été soulevée à l'occasion de l'affaire Nystrom et le tribunal a refusé de rendre une décision. Toutefois, la même logique s'appliquait alors dans l'affaire Trépanier.
Col Cathcart : Sénateur, je suis sûr que vous vous souviendrez que le cœur même de l'argumentation dans l'affaire Trépanier — à savoir le recours au régime de cours martiales — devait, en fait, être traité dans les projets de loi C-7 et C-45. Le processus suit son cours. Malheureusement, notre direction et notre division ne peuvent pas intervenir une fois que le processus parlementaire est enclenché.
Notre propos aujourd'hui est d'éclairer les membres du comité sur ce qui s'est produit depuis l'adoption du projet de loi C-60. Les questions des sénateurs Joyal et Nolin ne sont pas nouvelles pour moi, car ils les posaient au moment des délibérations précédant l'adoption du projet de loi. Loin de moi l'idée de prétendre que ces questions ne sont pas légitimes ni à propos. Je pense que n'importe qui poserait les mêmes questions au sujet des retards. En fin de compte, une partie de la réponse se trouve dans un éventuel nouveau projet de loi ainsi que dans le fait que nous avons le projet de loi C-60 qui a été adopté et qui fonctionne bien pour régler les questions soulevées par la Cour d'appel de la cour martiale.
Le sénateur Angus : Pouvez-vous me donner la date de l'arrêt Trépanier?
La présidente : Avril 2008.
Le sénateur Joyal : Le 24 avril.
La présidente : C'est ce qui explique pourquoi le projet de loi C-60 a dû être déposé et adopté à toute vapeur.
Le sénateur Angus : Je comprends.
Le sénateur Joyal : Vous avez dit que vous aviez modifié les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes. Pouvons-nous faire distribuer copie de ces règlements? Nous obtiendrons un exemplaire dans les deux langues officielles, bien entendu, car je souhaiterais les lire.
Col Cathcart : Absolument.
Lcol Wry : Je crois en avoir un exemplaire ici même si bien que je peux le fournir immédiatement ou une fois la séance terminée.
Le sénateur Joyal : Nous n'aurons pas terminé notre étude aujourd'hui.
Lcol Wry : Bien sûr.
Le sénateur Joyal : Comme vous le savez, le juge Lamer recommandait certaines modifications à ces règlements et j'aimerais les lire pour voir ce que cela a donné.
Lcol Wry : Absolument, sénateur. Je préciserais simplement que certaines modifications aux règlements qui sont entrées en vigueur en juillet se limitaient seulement à ce qui était nécessaire pour le projet de loi C-60.
Le sénateur Joyal : C'est ce que je déduis des renseignements que vous nous avez fournis.
Lcol Wry : En outre, comme l'a dit le colonel Cathcart, nous avons mis en œuvre certaines autres recommandations du juge Lamer, en modifiant le règlement. Voulez-vous prendre connaissance de cela également?
Le sénateur Joyal : Volontiers, si vous avez cela sous la main. Je suis sûr que mes collègues voudront également en prendre connaissance, car nous en tenons compte dans notre réflexion générale. Nous ne pouvons pas examiner un aspect du système de façon isolée. Je vous en remercie.
Dans votre rapport sur la mise en œuvre des modifications contenues dans le projet de loi C-60, vous ne dites rien des autres aspects du projet de loi qui portent sur d'autres questions. Serait-ce qu'il n'y a rien à dire à ce propos? Estimez-vous que les modifications apportées au système visaient essentiellement la composition de la cour martiale? N'avez-vous rien à ajouter quant au reste des modifications? Ne vous attendiez-vous pas à une telle question?
Lcol Wry : Non, pas du tout. L'essentiel des modifications qui figurent dans le projet de loi C-60 ont trait au processus de sélection de la cour martiale. Les autres modifications ont certes leur importance, mais il ne s'agit pas de choses concrètes que nous pouvons cerner. Le processus de sélection correspond à quelque chose de concret.
Nous avons reçu des observations concernant le processus de sélection de la cour martiale, mais nous n'avons pas entendu parler d'autres préoccupations au sujet des modifications récemment mises en œuvre.
Le sénateur Joyal : Je vais vous lire le mandat que nous avons reçu du ministre :
Toutefois, je demanderai que notre comité envisage d'étudier les dispositions et la mise en œuvre du projet de loi C-60...
Il ne s'agit pas seulement de la structure de la cour, mais bien de toute la question. Si vous pouviez examiner les autres aspects du projet de loi et voir s'il n'y a pas quelque chose que vous pourrez nous communiquer sur l'utilisation de ces autres articles, je vous en serais reconnaissant. Cela nous aiderait à exécuter notre mandat.
Col Cathcart : Volontiers, monsieur le sénateur. Ainsi que je vous l'ai déjà dit, un certain nombre de dispositions que vous connaissez étaient des modifications corrélatives qui portaient sur l'aptitude mentale de l'accusé à subir un procès; or, il n'y a tout simplement pas de données. Avec un recul d'à peine sept mois, il est difficile d'obtenir des renseignements sur la mise en œuvre de toutes les dispositions, de suivre ces dernières et d'en tirer des données statistiques. Encore une fois, dans le cadre de vos travaux, vous entendrez peut-être d'autres témoins qui font quotidiennement affaire avec le système et qui pourront probablement vous citer des cas concrets concernant la mise en œuvre de ces dispositions.
Nous suivons déjà la situation à cet égard et continuerons de le faire, tout en demandant des renseignements sur tout ce qu'il est possible d'obtenir. Bien entendu, nous avons l'intention de fournir ces données à quiconque en fera la demande une fois que nous en disposerons. Il s'agit simplement d'examiner l'essentiel de la décision, qui réduit de quatre à deux le nombre des cours martiales et donne le choix à l'accusé.
À ce sujet, les premières données sont intéressantes, en ce sens qu'elles montrent l'évolution de ces choix depuis l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions. Lorsqu'il y avait quatre types de cours martiales, plus précisément, deux cours martiales générales et les cours martiales disciplinaires — qui étaient semblables sauf pour le nombre des membres des Forces canadiennes qui y siégeaient —, le choix de ces cours atteignait quelque 20 p. 100 avant la mise en œuvre du projet de loi C-60. Maintenant, le choix de ces cours martiales générales oscille autour de 15 p. 100, du moins d'après les statistiques dont nous disposons pour le moment. Nous ne sommes pas en mesure d'obtenir des données plus détaillées sur la question.
Cela vous donne une idée grossière de la manière dont le système fonctionne. On a peut-être pensé que la plus grande liberté de choix accordée à l'accusé entraînerait une forte hausse du recours aux cours martiales générales, or, cela ne s'est pas produit jusqu'à maintenant.
Le sénateur Joyal : Ma question demeure. Si vous pouvez nous fournir davantage de renseignements sur les autres aspects du projet de loi, je vous en serais reconnaissant. Cela nous aidera à terminer notre étude.
Le sénateur Wallace : Colonel, puisque vous nous rappelez que nous devons nous concentrer sur ce qui s'est passé depuis l'adoption du projet de loi C-60, cela me fait penser aux accusés qui étaient déjà dans la filière des tribunaux militaires immédiatement avant son entrée en vigueur. Ils auraient pu être rendus à n'importe quelle étape du processus judiciaire.
Est-ce que tous ces accusés qui étaient déjà dans le système et qui n'étaient pas justiciables des cours martiales générales obligatoires — ce qui correspond aujourd'hui à la cour martiale permanente — ont eu la possibilité de choisir?
Lcol Wry : Je le répète, toutes les causes entendues ou qui avaient débuté avant le jugement Trépanier ont suivi leur cours. Toutefois, dans chacun de ces cas, l'accusé a eu la possibilité soit de manifester son accord avec le choix déjà fait, soit de s'y opposer.
Dans les cas où il y a eu opposition, on a suspendu les inculpations ou on y a mis fin, puis le directeur/Poursuites militaires a décidé, lors de l'entrée en vigueur du nouveau régime, s'il y avait lieu de prononcer de nouveau une mise en accusation. S'il s'est prononcé pour une nouvelle mise en accusation, l'inculpé a eu le droit de choisir devant quelle cour martiale être traduit, conformément au nouveau régime.
Le sénateur Wallace : Par conséquent, les accusés déférés en justice juste avant la mise en vigueur du projet de loi C- 60 ne se sont pas estimés désavantagés de ce fait; ils ont eu toute latitude pour profiter des avantages du projet de loi C- 60, c'est bien cela?
Lcol Wry : Oui, on leur a donné cette possibilité par rapport à toute question encore en instance.
Le sénateur Wallace : Par rapport à toute question qui était en cours.
Lcol Wry : Oui.
Le sénateur Wallace : J'ai l'impression que vous vous estimez satisfait de la mise en œuvre du projet de loi C-60. Toutefois, par rapport aux 39 cas qui ont suivi depuis, je me demande s'il s'est présenté des situations qu'on n'avait peut-être pas prévues en élaborant ce texte législatif et qui justifieraient peut-être qu'on fasse encore quelques mises au point. Ou n'a-t-on observé aucun accroc? Est-ce que le nouveau système a bien fonctionné? Rien n'étant parfait, est-ce que le proche avenir pourrait nous réserver quelques problèmes que nous pourrions éviter cependant en peaufinant le projet de loi?
Col Cathcart : Pour le moment, la réponse est non. Nous nous efforçons vraiment d'être objectifs; l'issue des procès devant les cours martiales ne représente aucun avantage pour nous. Nous veillons simplement à ce que tous les intervenants disposent des ressources et des outils appropriés afin que le système de justice fonctionne rondement.
Cela dit, forts des renseignements que nous avons en main, oui, nous pouvons affirmer être satisfaits. Rien de particulier ne nous a frappés. Certes, toute période de transition connaît son lot de difficultés, pendant que l'on s'adapte au nouveau système. Toutefois, à l'instar de ce qui se passe dans les autres cours de justice, l'accusé a tout à fait le droit de formuler des objections et des motions ainsi que de s'adresser aux tribunaux d'appels. Or, nous n'avons pas observé, de la part des parties concernées, ce genre de réaction négative à l'endroit du nouveau système.
Le sénateur Wallace : Est-ce vrai même de la part des avocats de la défense? Sont-ils tout à fait satisfaits?
Col Cathcart : J'aimerais bien vous l'affirmer, mais je ne peux pas, sénateur. Ils ne feraient sans doute pas leur métier s'ils étaient toujours satisfaits.
Le sénateur Baker : J'ai une question à poser sur la lancée de cette dernière remarque. Au sujet de la cause R. c. Middlemiss, je crois me souvenir que, depuis l'adoption de la loi, divers jugements fondés sur la Charte ont été prononcés au sujet des nouvelles règles. Êtes-vous du même avis?
Col Cathcart : Des motions ont bien été soulevées, mais elles n'étaient pas...
Le sénateur Baker : On s'est prononcé sur elles.
Col Cathcart : Cependant, elles n'étaient pas directement liées aux amendements contenus dans le projet de loi C-60.
Le sénateur Baker : Parlons justement des amendements contenus dans le projet de loi C-60. Vous y avez inscrit un délai obligatoire d'un an entre l'incident et l'inculpation, je l'ai bien remarqué dans le texte. Avez-vous vu cela?
Lcol Wry : Est-ce par rapport aux procès sommaires?
Le sénateur Baker : C'est par rapport aux déclarations de culpabilité par procédure sommaire.
Col Cathcart : Par rapport aux procès sommaires.
Lcol Wry : Notre système est différent des tribunaux civils, par conséquent, il est facile de confondre les choses.
Le sénateur Baker : Oui, je le sais. Dans le Code criminel, le délai de six mois s'étend de la date de l'incident jusqu'à la mise en accusation. Vous avez inscrit un an dans le cas des infractions sommaires et des infractions relevant du Code criminel en tant que tel.
Permettez-moi de vous interroger au sujet du processus et d'une déclaration faite par le juge Lamer dans le cadre de son rapport. Au sujet du processus de sélection des membres du tribunal, il a dit, et je cite :
Le fait que le grade de l'accusé fasse partie des facteurs déterminant le type de cour martiale qui doit être convoquée est contraire aux principes modernes de l'égalité devant la loi. Il faut que ce traitement différent soit justifié par une raison militaire suffisamment importante.
Si j'ai bien compris, le chef d'état-major du juge militaire en chef décide de la composition du tribunal, c'est-à-dire du jury, et exerce même un pouvoir discrétionnaire à cet égard. Corrigez-moi si je suis dans l'erreur, mais le juge militaire en chef peut siéger comme juge au procès de l'accusé, tandis que dans le système civil, l'accusé sera jugé par son ou ses semblables et pourra intervenir lors du choix des jurés. C'est sans doute ce à quoi le juge Lamer faisait allusion. Or, le nouveau système attribuant le choix des membres du tribunal à l'administrateur de la cour martiale est certainement tout à fait contraire au système de justice civile ou des tribunaux civils.
Est-ce qu'il vous plairait de faire des remarques sur la manière dont ce système fonctionne depuis sa mise sur pied? C'est bien le chef d'état-major du Juge militaire en chef qui choisit les juges du tribunal, n'est-ce pas?
Lcol Wry : C'est l'administrateur de la cour martiale qui s'en charge.
Le sénateur Baker : Le chef d'état-major du juge militaire en chef est Mme Morrissey. Qui est l'administrateur?
Lcol Wry : Vous venez de soulever cinq choses différentes.
Le sénateur Baker : Est-ce Mme Morrissey?
Lcol Wry : Merci pour vos questions. Je vous fournirai volontiers tous les renseignements que je réussirai à trouver. En premier lieu, le poste d'administrateur de la cour martiale est présentement occupé par Mme Morrissey. Je crois que vous vous reportiez à la fois où on lui a demandé de décrire ses fonctions par rapport à cette cour précise; elle a alors dit qu'elles étaient analogues à celles d'un chef d'état-major.
Le sénateur Baker : De quelle cour s'agissait-il?
Lcol Wry : Je croyais que vous songiez à la cour martiale dans l'affaire Middlemiss.
Le sénateur Baker : C'est sans doute cela.
Lcol Wry : Décrivant ses fonctions, l'administrateur a dit qu'elles étaient semblables à celles d'un chef d'état-major. À ma connaissance cependant, elle n'occupe pas officiellement un poste de chef d'état-major. L'administrateur de la cour martiale exerce bien certaines fonctions telles que les définissent la Loi sur la défense nationale et les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes.
Avant l'adoption du projet de loi C-60, l'administrateur de la cour martiale était chargé de nommer les juges du tribunal; lorsqu'on procédait ainsi, on se servait des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes pour choisir les membres en question. Le processus n'a donc rien de nouveau. Par le passé, l'administrateur choisissait les juges ou convoquait le type de cour martiale approprié, et s'il s'agissait du tribunal avec formation de juge, il ou elle le faisait conformément au tribunal retenu par le directeur/Poursuites militaires.
Sous le nouveau système, l'administrateur de la cour martiale, lorsqu'il ou elle convoque la cour, doit se conformer au régime créé par le projet de loi C-60. Une fois qu'elle a examiné la nature de l'inculpation ou de l'infraction, ou qu'elle a été avisée du choix effectué par l'inculpé, si ce dernier a choisi d'être traduit devant la cour martiale générale, ou si la nature du procès l'exige, alors elle exerce ses fonctions en vertu des règlements et procède au choix des juges. Telles sont ses responsabilités.
Évidemment, le processus utilisé dans le système de justice militaire diffère de celui de la justice civile. Une formation de juge n'a pas été conçue pour être identique à un jury. Cette distinction est d'ailleurs reconnue jusque dans la Charte.
J'essayais de trouver la recommandation du juge Lamer concernant le rang de l'accusé traduit devant une cour martiale. J'aimerais bien régler la question pour vous, si c'est possible, car lorsque les amendements et les changements ont été apportés et qu'on est passé de quatre cours martiales à deux, on a éliminé toute différence quant aux personnes et aux affaires que ces deux cours pouvaient juger. Elles ont désormais la même juridiction sur tous les accusés, et sont investies des mêmes pouvoirs de répression et de la même juridiction sur tout type d'infraction.
Je tiens à bien faire comprendre le changement.
Le sénateur Baker : J'aimerais revenir sur la distinction que fait le juge Lamer. Il signale — et je cite pour le compte rendu — qu'il faut une justification suffisamment importante pour justifier la différence de traitement.
Lorsque l'administrateur de la cour forme le jury, il est soumis à une contrainte quant aux personnes qui ont qualité pour devenir jurés. Devant un tribunal civil, les jurés sont les pairs de l'accusé, mais dans le cas d'un jury militaire, sauf erreur de ma part, la règle veut qu'aucun juré n'ait un rang inférieur à celui de capitaine si l'accusé est officier. S'il est sous-officier, il ne peut y avoir de juré de rang inférieur à...
Lcol Wry : Adjudant.
Le sénateur Baker : Oui, adjudant. La fonction de juré est donc réservée à un groupe limité de personnes et certaines fonctions sont assumées par un employé du service, comme c'est expliqué dans le jugement. Cet employé fait la moitié de son travail pour le juge militaire en chef, qui peut lui-même entendre les accusations portées contre l'accusé et qui peut discrétionnairement choisir les jurés parmi un groupe restreint. L'accusé n'est évidemment pas jugé par ses pairs, mais le pouvoir discrétionnaire accordé à l'administrateur en vertu de la loi lui permet, je suppose, de pressentir d'éventuels jurés et de décider s'ils peuvent être choisis ou non. Est-ce bien ainsi que les choses se passent?
Lcol Wry : Actuellement, le règlement exclut automatiquement les personnes qui ne peuvent être choisies comme jurés, mais il y a aussi des exclusions discrétionnaires. Par exemple, je ne serai jamais juré d'une cour martiale parce que je suis avocate. Si j'étais le commandant de l'accusé, je serais exclue. Il y a certaines exclusions automatiques.
Le sénateur Baker : Pouvez-vous produire ce règlement?
Lcol Wry : Certainement. Il y a ensuite plusieurs exceptions discrétionnaires. D'après ce que j'ai appris auprès de l'administratrice actuelle, les noms sont choisis au hasard selon la formule habituelle en vigueur au sein du ministère. On constitue une liste. Ensuite, l'administratrice peut prendre contact avec certaines personnes pour obtenir de l'information. Par exemple, les raisons pour lesquelles je devrais être automatiquement exclue peuvent ne pas être parfaitement claires, elle doit donc obtenir cette information.
En fonction de l'information recueillie, on décide si la personne relève de l'une des exclusions automatiques ou d'une catégorie qui permet à l'administrateur de la cour martiale de l'exclure. Le pouvoir discrétionnaire de l'administrateur n'est pas très vaste. Il y a, je crois, six ou sept raisons pour lesquelles l'administrateur peut décider d'exclure quelqu'un du jury.
Le sénateur Baker : Une dernière question — je sais que je vous impatiente. Comme le dit le juge Lamer, il doit y avoir une justification militaire suffisamment importante pour justifier cette différence de traitement. Il parle de la règle voulant que les jurés soient tous d'un rang supérieur à celui de capitaine, et du fait que les jurés peuvent être choisis par une personne du bureau du juge militaire en chef, laquelle personne peut se retrouver en tant que juge face à l'accusé.
La justification militaire pour ne pas aller plus loin et pour éliminer un juré éventuel — nous comprenons ce que vous dites concernant l'exclusion prévue dans la charte des tribunaux militaires — mais comme l'indique le juge Lamer, il doit y avoir une justification suffisante. Pouvez-vous nous dire quelque chose à ce sujet?
Col Cathcart : Oui; voilà encore une bonne question de la part de quelqu'un qui considère notre système par rapport à la justice civile.
Pour préciser les choses, nous parlons ici de la composition du jury militaire qui siège actuellement devant une cour martiale générale. Cela ne faisait pas partie du projet de loi C-60 ni de ce qu'on a mis en œuvre dans le projet de loi C- 60 à partir de la recommandation du juge Lamer. On a alors réduit le nombre des catégories de cours martiales en préservant le même processus de sélection des jurés, sauf pour l'élément clé, à savoir que la poursuite ne choisit plus le type de cour martiale. C'est désormais l'administrateur de la cour martiale qui le choisit, en fonction du type d'accusation ou du choix de l'accusé.
Je tiens à faire preuve de prudence; la question que vous soulevez est fondée, mais elle ne relève pas du projet de loi C-60 ni des éléments de la recommandation du juge Lamer qui n'ont pas été traités dans le projet de loi C-60. Elle pourrait éventuellement être traitée dans un projet de loi à venir, par exemple si le gouvernement présente une nouvelle version du projet de loi C-45.
Cela étant dit, les décisions de ce genre doivent toujours comporter une justification militaire ainsi qu'un certain nombre de facteurs. Tout d'abord, elles sont généralement fondées sur le point consacré par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt R. c. Généreux, à savoir la nécessité d'une justice militaire distincte. C'est essentiel pour maintenir la discipline, qui fondamentalement, distingue la sphère militaire du monde civil : c'est l'importance de la discipline et de la préservation d'une force combattante cohérente, efficace et motivée.
Au sein de cette structure militaire, l'un des aspects essentiels de la composition du jury, c'est précisément que l'on reconnaît qu'il s'agit d'une institution militaire et que les jurés ne sont pas nécessairement les pairs de l'accusé. En effet, les officiers ou les sous-officiers de haut rang qui peuvent être choisis comme jurés à cause de leur expérience ont davantage à apporter en matière d'éthique, de compréhension et de leadership militaires. C'est un facteur supplémentaire lorsqu'il s'agit de juger, alors qu'un jeune simple soldat, même s'il est intelligent et brillant, n'apportera pas nécessairement les mêmes facteurs.
Puisqu'un simple soldat peut avoir un jury composé de ses pairs, on en vient ensuite à se demander pourquoi de simples soldats ne pourraient pas juger des sergents-majors, des capitaines et des généraux. Voilà un sujet problématique.
Je ne pourrai pas y apporter de réponse complète, car la question même que vous soulevez est toujours à l'étude et n'a pas été abordée lors de la préparation du projet de loi C-60.
La présidente : Quelqu'un veut poser une question supplémentaire.
Le sénateur Joyal : Très rapidement, car je pense que c'est toujours le même sujet. Si l'accusé veut récuser l'un des jurés, le règlement l'y autorise-t-il?
Lcol Wry : Oui, il peut faire objection à la désignation d'un membre du jury. Malheureusement, je n'ai pas sous la main le règlement qui me permettrait de vous donner la référence exacte, mais je veillerai à ce que le comité en reçoive un exemplaire.
La présidente : Merci beaucoup. Avant de passer au deuxième tour, j'aimerais moi-même poser quelques questions. Tout d'abord, une simple précision.
Pour en revenir au projet de loi C-45, je crois me souvenir qu'il ne prévoyait pas le choix de la cour martiale. On y trouvait le principe de l'unanimité, mais pas la possibilité de choisir.
Col Cathcart : C'est exact.
La présidente : Deuxièmement, sur un autre sujet qui nous a préoccupés aujourd'hui, pourriez-vous me donner une brève description du régime en place pour l'individu de langue minoritaire accusé devant une cour martiale? On peut présumer qu'il s'agit d'un francophone. Est-ce qu'il a droit à un procès en français? Avez-vous le personnel nécessaire? Est-ce qu'on a recours à la traduction pour l'oral et l'écrit? Comment cela fonctionne-t-il? Je ne voudrais pas consacrer trop de temps à cette question.
Col Cathcart : Le système est censé être totalement bilingue dans la mesure où l'accusé peut demander un procès entièrement en anglais ou en français, il y en a. Le bilinguisme s'applique au juge, à la poursuite, à l'officier défenseur ou à l'avocat civil que peut retenir l'accusé, ainsi qu'au personnel de soutien.
La présidente : Est-ce également vrai pour les documents?
Col Cathcart : Oui, c'est vrai pour les documents.
La présidente : Merci.
Sénateur Wallace, voulez-vous intervenir au deuxième tour?
Le sénateur Wallace : Non, pas pour l'instant. J'interviendrais peut-être après le sénateur Baker.
Le sénateur Milne : Mes questions vont vous ramener au projet de loi C-60 et au juge en chef Lamer.
Les articles 25 et 26 du projet de loi C-60 concernent la procédure d'appel. Je sais que vous ne vous êtes pas préparé à parler de ces autres dispositions du projet de loi et si vous ne pouvez pas me répondre maintenant, j'attendrai votre réponse écrite.
Combien y a-t-il eu d'appels au cours des dix dernières années et est-ce que vous prévoyez que le nouveau régime va faire augmenter le nombre des appels? Sera-t-il plus facile ou plus difficile, pour l'accusé, de se pourvoir en appel?
Col Cathcart : Si j'ai bien compris, les articles auxquels vous faites référence concernent l'aptitude de l'accusé à subir son procès du point de vue de sa santé mentale. Je n'ai pas de statistiques qui me permettraient de vous donner une réponse précise. De façon générale, nous n'avons pas eu connaissance d'appels qui auraient été intentés pour ce motif. Heureusement, d'un certain point de vue, ce test d'aptitude mentale n'a pas encore été utilisé dans notre système.
Le sénateur Milne : Question supplémentaire : la vingt-sixième recommandation du juge Lamer...
Lcol Wry : Puis-je vous donner quelques renseignements supplémentaires concernant votre première question? Je parle en particulier de l'article 26. C'est l'un des amendements qui visaient à régler une question soulevée par l'arrêt Grant. Cet arrêt précisait que lorsque la Cour d'appel de la cour martiale du Canada demande un nouveau procès, il s'agit d'un procès sommaire, qui comporte une procédure tout à fait différente, si je peux l'exprimer ainsi.
Cet article, quant à lui, précise que lorsque la Cour d'appel de la cour martiale du Canada demande un nouveau procès, c'est devant une nouvelle cour martiale. Plusieurs dispositions évoquaient le renvoi de l'affaire pour un nouveau procès, et celle-ci précisait qu'il s'agissait d'une nouvelle cour martiale.
Le sénateur Milne : Évidemment, l'article 26 concerne un individu inapte pour raison de santé mentale.
Lcol Wry : La disposition principale est ailleurs.
Le sénateur Milne : Cependant, le juge en chef Lamer écrit, dans la recommandation no 26 figurant à la page 42 du rapport, que le règlement concernant la composition du comité d'appel devrait être modifié. Il indique en outre quelle devrait être la composition de ce comité d'appel et précise qu'il devrait vérifier les dossiers et déterminer s'il y a lieu de fournir un conseiller aux personnes qui veulent se faire représenter en appel de la décision d'une cour martiale devant la Cour d'appel de la cour martiale du Canada.
Cependant, lorsque mon assistant a parcouru le chapitre en question — je crois que c'est le chapitre 115 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes — il n'a trouvé aucune référence à un comité d'appel de cour martiale.
Le changement a-t-il été mis en œuvre et, dans la négative, pourquoi ne l'a-t-il pas été?
Lcol Wry : C'est une très bonne question. Je crois qu'il y a eu un comité d'appel à partir du début des années 2000, avant le rapport du juge en chef Lamer. Il figurait, je crois, au chapitre 101.21 des ordonnances. Je vous donne cette indication de mémoire, mais je crois que c'est le bon chiffre.
Tout d'abord, il y a un comité d'appel, qui fait partie des amendements dont j'ai parlé au sénateur Joyal, lesquels assurent une mise en œuvre partielle des recommandations. Nous avons apporté des changements au règlement en fonction des recommandations du juge en chef Lamer. Ils ne correspondent pas exactement à ce que le juge avait recommandé, mais nous avons modifié la composition du comité et adopté les autres recommandations du juge, notamment en ce qui concerne le sens du « mérite professionnel ».
Ces mesures ont donc effectivement été mises en place.
Le sénateur Milne : Parfait; je suis heureuse de l'entendre.
La présidente : Y a-t-il encore une question supplémentaire?
Sénateur Joyal, je dois vous signaler que vous êtes inscrit juste après le sénateur Nolin sur la liste du deuxième tour.
Le sénateur Joyal : Je peux attendre.
[English]
Le sénateur Nolin : J'ai une courte question et je présume que la réponse sera longue. Vous pourrez me répondre par écrit ou revenir au comité.
Nous en sommes à cette réforme depuis le projet de loi C-25, soit 12 ans. La mise en œuvre des recommandations du regretté juge en chef Lamer tarde. Il n'y a pas de doute que la succession de gouvernements minoritaires ne soit pas étrangère au fait que ces modifications tardent à être adoptées.
Je suis convaincu que vous réfléchissez à des façons d'accélérer le processus pour qu'on puisse permettre la mise à jour et le respect des droits des justiciables, qui sont appelés à comparaître selon votre processus assez particulier. Quel est le fruit de cette réflexion? Nous aurons peut-être à recommander des façons d'améliorer la célérité avec laquelle on adopte des modifications. J'aimerais vous entendre à ce sujet, si vous avez des recommandations.
Comme je vous l'ai dit, vous n'avez peut-être pas de réponse à nous offrir ce soir mais si, pendant notre étude, il vous vient des idées, il nous fera plaisir de lire ces recommandations.
La présidente : Ce sujet nous préoccupe beaucoup.
Le sénateur Nolin : Tout comme vous, nous sommes intéressés à ce que — si je me réfère aux projets de loi C-7 et C- 45 — ces deux projets de loi, du moins le premier, sinon le deuxième, voient le jour. Ce ne fut pas le cas. Que pourrions- nous faire pour améliorer le processus?
[Translation]
Col Cathcart : Encore une fois, j'aimerais pouvoir vous communiquer le détail de nos recommandations par écrit. Nous pourrions vous en donner plusieurs volumes.
Depuis le début, mon rôle et celui du lieutenant-colonel Wry auprès du juge-avocat général consiste à surveiller en permanence la justice militaire et à proposer les changements à apporter non seulement à la réglementation, mais également aux politiques. C'est ce que nous faisons quotidiennement. Nous y consacrons de longues heures.
En toute franchise, je ne peux pas parler du contenu éventuel du projet de loi C-45 car notre avis a une simple valeur de recommandation. Nous avons fait des recommandations au ministre et c'est le Cabinet qui décidera s'il y a lieu de présenter un nouveau projet de loi.
Le sénateur Nolin : Ma question concerne non pas le contenu du projet de loi, mais la procédure. Que devrions-nous recommander? Nous allons faire une recommandation. Que pouvons-nous recommander?
La présidente : Pour éviter des délais de 12 ans.
Le sénateur Nolin : En vérité, ce n'est pas vraiment 12 ans.
Il y a 12 ans, nous avons entrepris dans cette même salle l'étude du projet de loi C-25, à laquelle nous nous sommes beaucoup amusés. Nous savions que dans un délai de 12 ans, quelqu'un allait faire de brillantes recommandations, et c'est ce qu'a fait le juge Lamer. Nous apprécions beaucoup les recommandations du juge Lamer, mais six années se sont écoulées depuis lors.
Que pouvons-nous recommander, à partir de votre raisonnement très intelligent, pour accélérer l'adoption de ces amendements? Qu'y a-t-il dans le projet de loi C-45 qui relève de la compétence du ministre et de votre compétence?
Col Cathcart : On dirait qu'il va bientôt y avoir un deuxième Noël cette année.
En vérité, sénateurs, j'aimerais qu'il en soit ainsi. En ce qui concerne la procédure, je dois m'en remettre aux révisions effectuées, comme, en l'occurrence, celles du juge Lamer. Il fait de bonnes recommandations. Il s'agit ensuite de se demander ce qu'il faut faire pour les concrétiser. C'est toujours un ensemble de changements à apporter dans les règlements, dans la loi et dans les politiques. En ce qui concerne les changements législatifs, il faut entamer une procédure parlementaire. J'aurais un certain nombre de commentaires personnels à faire à ce sujet, mais je vous en ferai grâce.
Mon rôle consiste à faire des recommandations sur les changements à apporter à l'avenir, et si ces changements nécessitent une modification de la Loi sur la défense nationale, nous devons alors amorcé une procédure parlementaire. Je m'en remets à votre expérience et à votre intelligence, honorables sénateurs, pour conseiller vos collègues du Sénat et de la Chambre sur la façon d'améliorer le traitement de ces modifications.
Nous savons comment les choses se passent, particulièrement quand le gouvernement est minoritaire. Je ne prétends pas que ce soit la véritable solution au problème. Je suis certain que d'autres questions se posent.
Le sénateur Nolin : Personne n'aime se faire dire par un tribunal qu'il aurait fallu faire les choses différemment.
Col Cathcart : C'est la même chose pour nous tous. Nous sommes tous d'accord.
Le sénateur Angus : Peut-être serait-il utile d'indiquer que dans sa lettre, le ministre MacKay sollicitait des commentaires comportant des propositions d'amendements qu'il pouvait proposer lui-même, conformément à nos recommandations? Je suppose que vous en êtes informés.
Col Cathcart : Oui, j'en suis parfaitement informé.
La présidente : Peut-être pourriez-vous voir, au cours des deux ou trois prochains jours, s'il est possible de nous communiquer des études individuelles ou institutionnelles qui auraient été consacrées à cette question.
Nous comprenons que le travail est en cours et n'a pas encore atteint sa conclusion finale. Mais il nous serait utile, dans le cadre de notre propre réflexion, de savoir si des études ont été réalisées sur la question au sein de votre ministère. Par exemple, vous êtes mieux placés que nous pour savoir si des changements, par ailleurs parfaitement souhaitables, se heurtent à certains obstacles.
Si de tels documents sont disponibles ou si vous avez d'autres thèmes de réflexion que vous êtes prêts à communiquer au comité, nous vous serions reconnaissants de nous en faire part.
Col Cathcart : Entendu, madame la présidente. Nous allons nous en occuper.
Le sénateur Joyal : J'aimerais poursuivre sur les principes fondamentaux qui sous-tendent le système et sur les dispositions du projet de loi C-60.
Les articles 23 et 24 du projet de loi C-60 permettaient ou exigeaient qu'un nouveau procès se tienne devant une cour martiale et supprimait la possibilité d'obtenir le nouveau procès devant une autre cour, par exemple de common law ou une cour qui n'est pas une cour martiale.
Il me semble que ce changement est important. Lorsqu'on a la possibilité d'ordonner un nouveau procès en common law ou devant une cour martiale, cela assure, à mon avis, la protection des droits de l'accusé ou de la personne trouvée coupable, puisqu'on se trouve ici au niveau de l'appel.
En vertu de quel principe a-t-on supprimé cette possibilité dans le projet de loi C-60? C'est un système exceptionnel parallèle aux articles 4 et 5 dont mon collègue le sénateur Baker parlait tout à l'heure. Sauf votre respect, vous n'avez pas répondu à l'affirmation selon laquelle l'accusation risquait de durer un an plutôt que six mois.
Autrement dit, il doit bien y avoir une raison pour laquelle vous limitez la protection accordée à l'individu trouvé coupable ou à celui qui ne devrait plus être accusé passé un délai de six mois, comme c'est le cas en common law. Pouvez-vous me donner une réponse?
Lcol Wry : Je vais essayer, sénateur Joyal. J'espère ne faire offense à personne en rappelant rapidement les deux types de tribunaux qui existent en matière de justice militaire.
Nous avons les cours martiales, comme vous le savez, et nous avons les procès sommaires. Les procès sommaires sont tenus par des militaires, le plus souvent des supérieurs hiérarchiques de l'accusé. C'est souvent le commandant, le délégué du commandant ou un supérieur du commandant qui est désigné comme commandant supérieur.
Actuellement, les procédures respectives du procès sommaire et de la cour martiale fonctionnent pour ainsi dire en vase clos. Elles se rejoignent en ce que la plupart du temps, l'accusé peut choisir d'être jugé dans un procès sommaire ou devant une cour martiale.
Une fois le choix effectué ou une fois que l'affaire a été renvoyée en cour martiale, elle est tranchée dans le vase clos où elle se trouve.
Jusqu'à l'arrêt Grant, lorsque la Cour d'appel de la cour martiale jugeait d'une affaire, cassait une conclusion ou renvoyait l'affaire en première instance, c'était toujours devant la cour martiale, puisque les deux régimes fonctionnaient en vase clos, et d'un autre point de vue, c'est toujours à cela qu'on devait s'attendre.
À notre avis, il n'est pas question de renvoyer une affaire en procès en dehors de la justice militaire. Je ne pense pas que cette possibilité n'ait jamais été envisagée. Cependant, selon l'interprétation qui a toujours prévalu à l'intérieur du système de justice militaire, lorsque la Cour d'appel ordonnait un nouveau procès, c'était devant une cour martiale.
Voilà ma réponse à votre première question, sénateur.
Le sénateur Joyal : Est-il déjà arrivé que la Cour d'appel de la cour martiale ait décidé d'ordonner un nouveau procès en dehors du système de la cour martiale?
Lcol Wry : Une telle possibilité n'existe pas. Comme vous le savez, notre système est parfaitement tranché et nous nous en tenons aux dispositions du Code de discipline militaire, dont les dispositions règlent la question.
La possibilité que certaines affaires soient jugées par un tribunal civil existe; cependant, une cour martiale n'est pas habilitée à renvoyer devant une autre juridiction l'affaire dont elle est saisie. Les autorités civiles décident discrétionnairement si elles peuvent se prononcer sur une accusation spécifique. Je crois qu'il existe un ou deux exemples où les autorités civiles sont intervenues ainsi.
J'aimerais revenir à la première partie de votre question, sénateur Joyal, qui renvoyait à un commentaire du sénateur Baker. Vous me pardonnerez de ne pas y avoir répondu plus tôt. Je m'en souviens, mais je ne l'ai pas inscrite sur ma liste.
J'ai deux choses à dire sur la période maximale d'un an concernant les procès sommaires. Tout d'abord, le régime du procès sommaire a pour objet de régler l'affaire rapidement et efficacement. Si elle ne peut pas être traitée de cette façon, il s'agit de ne pas la laisser s'éterniser du côté du procès sommaire. On veut plutôt donner à l'accusé l'occasion de se soumettre à une procédure plus officielle. La limite d'un an commence à la date des événements incriminants et s'étend jusqu'au début du procès, contrairement à ce qui prévaut devant la justice civile, où le délai s'étend de la date des événements à la date de l'accusation. C'est là une légère différence entre les deux régimes.
Deuxièmement, j'aimerais renvoyer les sénateurs à la recommandation no 43 du rapport Lamer, où l'ancien juge en chef Lamer recommande le maintien de l'actuelle limite d'un an pour les procès sommaires. C'est le délai qui existait précédemment. On s'est inquiété de la façon dont il a été interprété dans l'arrêt Grant. Pour plus de précision, on l'a établi de nouveau dans la Loi sur la défense nationale. Il a pour objet d'assurer une protection à l'accusé afin qu'il ne s'expose pas indéfiniment à une accusation si l'affaire n'est pas traitée de façon expéditive au niveau de l'unité. Si la justice militaire doit se prononcer sur l'accusation, ce sera à la cour martiale de le faire, de façon que l'affaire soit tranchée et que l'accusé puisse tourner la page.
Le sénateur Joyal : Ma dernière question concerne ce que vous dites aujourd'hui de la mise en œuvre du projet de loi C-60. À la première page, vous dites que 28 cours martiales permanentes se sont constituées conformément au choix de l'accusé. Plus loin, dans le même paragraphe, vous dites que dans six des 28 cas, lorsque l'accusé a choisi d'être jugé par une cour martiale permanente, il a fait ce choix après avoir précédemment choisi d'être jugé par une cour martiale générale, ou après avoir été réputé avoir fait un tel choix.
Sans nous donner les noms des accusés, pouvez-vous nous dire pourquoi ils ont changé d'avis?
Lcol Wry : Nous ne connaissons pas leurs motifs. Il peut y en avoir plusieurs, et je ne veux pas m'avancer à ce sujet.
Le sénateur Joyal : Non, je ne vous demande pas de vous avancer. Cela risquerait d'être dangereux.
Lcol Wry : Je ne suis pas certaine de leurs motifs.
Le sénateur Joyal : Est-ce trop vous demander que de les examiner rapidement?
Lcol Wry : La difficulté, sénateur Joyal, c'est que nous n'avons pas accès à une décision prise sur l'avis du conseiller.
Le sénateur Joyal : Elle ne figure pas au procès-verbal?
Lcol Wry : Non, elle ne figure pas au dossier. Il faut demander par écrit à l'administrateur de la cour martiale de modifier le choix initial.
Le sénateur Joyal : Autrement dit, vous ne savez pas ce qui a amené un accusé à passer d'un système à l'autre. Normalement, un accusé qui a le choix peut s'imaginer que selon les faits de l'espèce, l'option A est plus avantageuse que l'option B.
Lcol Wry : J'ai ici des renseignements qui pourraient être utiles. Selon les dispositions actuelles du projet de loi C-60, un membre des Forces canadiennes a 14 jours pour faire part de son choix à l'administrateur de la cour martiale. Passé ce délai, il est réputé avoir choisi la cour martiale générale. Ensuite, il bénéficie d'office d'un délai de 30 jours avant la date prévue pour le commencement du procès pour changer d'option.
C'est notamment une question de temps. Je ne veux pas spéculer, mais le délai de 14 jours a sans doute un rapport avec l'obtention de l'avis nécessaire à la prise d'une décision éclairée.
La présidente : Nous avons l'intention de recueillir le témoignage d'avocats de la défense. Évidemment, c'est une question qu'il faudra leur soumettre.
Je vous rappelle, chers collègues, que nous avons dépassé l'horaire prévu.
Le sénateur Baker : Nous prenons acte de vos propos sur l'arrêt Généreux qui reconnaît qu'un tribunal militaire diffère, pour des raisons précises, d'un tribunal civil. Dans l'arrêt Généreux, l'auteur du jugement affirme :
Leur formation vise à assurer qu'ils sont sensibles à la nécessité de la discipline, de l'obéissance et du sens du devoir de la part des forces armées, ainsi qu'à l'exigence d'efficacité militaire. La cour martiale traduit inévitablement, dans une certaine mesure, les préoccupations des personnes responsables de la discipline et du moral des troupes.
Évidemment, ces propos s'opposent nettement à ceux qui figurent dans le rapport de l'ancien juge en chef Lamer, et dont je vous donne lecture :
Le fait que le grade de l'accusé fasse partie des facteurs déterminant le type de cour martiale qui doit être convoquée est contraire au principe moderne de l'égalité devant la loi. Il faut que ce traitement différent soit justifié par une raison militaire...
Je veux simplement attirer votre attention sur le fait que l'explication concernant la nécessité de la différence de la justice militaire a également été donnée par l'ancien juge en chef Lamer dans l'arrêt Généreux. Cependant, en cas de revirement de jurisprudence, on retient normalement la solution la plus récente comme étant celle qui doit prévaloir. C'est pourquoi nous nous intéressons tant à l'examen de l'ancien juge en chef Lamer lorsqu'il tient des propos que l'on peut considérer contraires à ceux qu'il a tenus dans l'arrêt Généreux.
Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
Col Cathcart : La citation du rapport Lamer concerne directement les cours martiales telles qu'elles existaient à l'époque. Comme l'a dit précédemment le lieutenant-colonel Wry, la question de la différence de rang n'existe plus dans le système actuel, avec la cour martiale générale et la cour martiale permanente. En revanche, on est tout à fait fondé, comme je l'ai dit tout à l'heure, de s'interroger sur la composition du jury. Néanmoins, ce n'est pas le sujet sur lequel nous avons travaillé spécifiquement dans le contexte du projet de loi C-60.
Le sénateur Baker : Je comprends. Nous vous posons toutes ces questions et nous apprécierons toute la documentation que vous pourrez nous remettre par la suite. Nous siégeons ici en comité et nous avons vu au cours de la dernière année les trois décisions que vous avez rendues contre la reconduction du mandat des juges après cinq ans. J'ai oublié les intitulés de ces décisions, mais on en parle comme d'une trilogie. Vous souriez, vous devez les connaître. Ces décisions ont modifié le droit positif. Il y a eu ensuite les règlements du gouverneur général, adoptés en mars 2008, puis un projet de loi en juin. Dans l'intervalle, il y a eu le projet de loi C-45 ainsi qu'un autre, qui n'a jamais été promulgué. Nous en venons parfois à nous demander pourquoi on ne réunit pas tous ces changements en un seul projet de loi présenté en temps opportun, au lieu d'agir au coup par coup. J'espère que cela vous explique notre intérêt.
Col Cathcart : Tout à fait. Nous éprouvons fréquemment le même sentiment.
Le sénateur Milne : Vous devrez choisir soigneusement ce que vous souhaitez obtenir. Peut-être allez-vous bénéficier d'un autre budget.
Le sénateur Baker : Vous aurez peut-être un commentaire à faire sur ceci : j'ai écouté votre réponse au sénateur Joyal, lorsque vous disiez que les procès sommaires conviennent à des affaires qui doivent être tranchées immédiatement et qui sont sans doute plus simples par nature. Le procès devant la cour martiale conviendrait aux affaires plus sérieuses.
Je suis un lecteur passionné de jurisprudence. Parmi les trois derniers arrêts rendus par la cour martiale du Canada figure l'arrêt publié R. c. Osmond, où il était question d'une absence sans permission pour une journée passée à Toronto. Dans un autre arrêt, le soldat a dormi de 7 h 30 à 10 heures du matin et il a été accusé, comme il devait l'être. L'arrêt Middlemiss est celui qui a exigé le plus de temps. Le mois dernier, M. Middlemiss a reçu sa sentence finale et j'ai découvert que toutes ces affaires portaient sur le fait qu'il avait refusé de se rendre au dîner du mess et d'acheter un billet.
On ne peut donc pas dire que le procès sommaire sert à juger des causes urgentes et simples, tandis que la cour martiale serait réservée aux questions plus importantes. Cependant, le cas de M. Middlemiss montre que son avocat est allé jusqu'au bout pour essayer de le faire acquitter.
Dans l'affaire Middlemiss ont été rendus cinq jugements où la Charte est invoquée. Mais en définitive, il a été condamné pour ne pas avoir acheté de billet pour le dîner du mess, alors que s'il avait été à Colorado Springs, il n'aurait pas eu besoin d'acheter de billet. Ce n'est pas obligatoire. Néanmoins ici, au Canada, il faut acheter un billet, faute de quoi on commet une infraction punie par la loi.
Avez-vous un commentaire à faire à ce sujet?
Lcol Wry : J'en ai plusieurs. Vos observations sont tout à fait fondées.
Il y a deux choses importantes à faire remarquer. Tout d'abord, une affaire peut aller en cour martiale de deux façons. Premièrement, si l'officier président estime que son pouvoir de sanction est inapproprié ou que l'affaire est trop sérieuse pour être traitée de cette manière — par exemple, si l'on peut s'attendre à ce que la Charte soit invoquée — il peut renvoyer l'affaire en cour martiale.
L'autre possibilité, c'est que l'accusé choisisse la cour martiale. Pour que le système soit aussi juste que possible, nous donnons aux militaires accusés la possibilité de choisir d'être jugés par une cour martiale, de façon à bénéficier de tout ce qui accompagne un procès plus formel, comme le remboursement des frais d'avocat et toute la gamme des droits qui peuvent être invoqués.
Je ne sais pas ce qu'il en est pour les dossiers que vous avez mentionnés. Dans les deux premiers cas, la personne aurait très bien pu avoir le droit de choisir d'être jugée devant une cour martiale. Nous considérons que ce soit une bonne chose, même si nous convenons qu'il ne s'agit pas des cas les plus graves.
Je suis heureux de vous entendre évoquer l'affaire Middlemiss, parce que celle-ci était traitée conformément aux nouvelles dispositions. Comme vous vous en souviendrez, la différence entre les cas renvoyés à la cour martiale générale, ceux renvoyés à la cour martiale permanente et ceux où la personne a le choix entre les deux découle de la sanction assortie aux accusations portées.
La désobéissance à un ordre légitime est passible d'une peine maximale d'emprisonnement à perpétuité. Comme vous vous en doutez sans doute, on peut désobéir à l'ordre légitime d'acheter un billet pour le dîner militaire, ou encore refuser de prendre les armes et de tirer sur une cible militaire. On doit avoir suffisamment de marge de manœuvre pour en tenir en compte.
Étant donné les peines maximales applicables, ce genre d'infraction est automatiquement renvoyé à une cour martiale générale. C'est le genre de situation où, lorsqu'il faut trancher, la logique ne s'applique pas dans tous les cas.
Le sénateur Baker : Dans le projet de loi dont nous sommes saisis, pourquoi toutes les sanctions consistent-elles en des peines d'emprisonnement ou des amendes? À ma connaissance, dans aucun cas la sanction prévoyait les deux.
Lcol Wry : Je ne comprends pas la question, je suis désolée.
Le sénateur Nolin : Pour une infraction, selon les poursuites engagées, vous êtes emprisonné ou vous devez payer une amende, ou les deux, selon le processus appliqué.
Le sénateur Baker : En vertu du projet de loi qui nous intéresse, c'est l'un ou l'autre, jamais les deux. On ne peut pas imposer une peine emprisonnement et une amende. J'ai remarqué que dans toutes les décisions publiées au cours des deux derniers mois conformément à ce projet de loi, la sanction consistait à une réprimande sévère et une amende de 250 $, dans les cas peu graves, mais n'était pas assortie d'une peine d'emprisonnement, parce que c'est impossible en vertu de la nouvelle loi. Il faut que ce soit l'un ou l'autre.
La présidente : Sénateur Baker, je pense que vous vous êtes bien fait comprendre. Votre question était claire, grâce à la contribution du sénateur Nolin.
Lieutenant-colonel Wry, souhaitez-vous répondre maintenant, ou pouvons-nous vous demander de nous transmettre votre réponse par écrit?
Lcol Wry : Je pense que je devrais vous fournir une réponse écrite. Il me faudrait consulter la disposition en question.
La présidente : Nous le comprenons bien. Je vous remercie beaucoup. Vous vous êtes soumise à un peu plus de deux heures d'interrogation parfois pénible, et nous vous en sommes reconnaissants.
Colonel Cathcart et lieutenant-colonel Wry, nous sommes extrêmement reconnaissants et nous attendrons avec impatience le document que vous nous ferez parvenir.
Sénateurs, pour en revenir aux propos tenus plus tôt concernant les documents disponibles dans les deux langues officielles lorsqu'il est question d'un témoin autre qu'un représentant du gouvernement fédéral, ce qui comprend toutes les organisations assujetties à la Loi sur les langues officielles, ces documents peuvent être présentés dans la langue officielle de leur choix, et seront distribués aux membres du comité. Nous nous assurons de les faire traduire le plus rapidement possible, mais nous ne retarderons pas leur distribution jusqu'à l'obtention de la traduction. Je me rappelle par exemple un mémoire absolument extraordinaire présenté par le Barreau du Québec au cours de la dernière législature, qui n'était disponible qu'en français. Nous avions besoin de ce mémoire pour nos travaux, alors nous l'avons fait traduire le plus rapidement possible. C'était la pratique habituelle pour tous les témoins, sauf, comme je l'ai dit, pour les représentants d'organismes fédéraux, qui doivent respecter des normes plus élevées.
J'en ai parlé avec les membres du comité de direction, et nous avons convenu de maintenir cette politique, mais nous voulions en discuter avec vous. Ce n'est pas qu'une question purement théorique, puisque nous entendrons un témoin demain qui n'a fourni un mémoire que dans une langue.
Le sénateur Angus : Il ne représente pas le gouvernement fédéral?
La présidente : Non.
Le sénateur Angus : Je crois que c'est une bonne politique et je suis d'accord avec le comité de direction; nous devrions le maintenir.
Le sénateur Joyal : J'ai dit ce que j'avais à dire au début.
La présidente : Je considère tout à fait approprié de rappeler à toutes les organisations fédérales leurs obligations.
Ensuite, vous avez devant vous, chers collègues, des budgets. Vous vous souviendrez que j'avais expliqué que pour l'année financière en cours, qui se terminera dans un peu moins d'un mois, nous devrons nous servir d'un financement d'urgence. Le Comité de la régie interne a changé d'idée, ou du moins les consignes ont quelque peu changé.
Par conséquent, vous avez devant vous une demande d'autorisation de budget pour des études législatives effectuées pendant le reste de l'année financière, soit les quatre prochaines semaines, de même qu'une demande d'autorisation de budget pour l'étude en cours, soit les modifications à la Loi sur la défense nationale.
J'aimerais avoir des motions visant à approuver ces budgets. Le premier budget est proposé par le sénateur Angus. Tous ceux qui sont pour?
Des voix : Oui.
La présidente : Qui est contre? Qui s'abstient?
Adopté. Il s'agit du budget législatif pour l'année financière en cours.
En ce qui concerne le budget de l'étude sur les modifications à la Loi sur la défense nationale, pour l'exercice financier en cours, il est proposé par le sénateur Baker. Tous ceux qui sont pour?
Des voix : D'accord.
La présidente : Qui est contre? Adopté.
Nous avons maintenant deux budgets pour la prochaine étude, soit celle sur la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, dont nous avons discuté et que le Sénat a autorisée un peu plus tôt cette semaine.
[English]
Le sénateur Nolin : J'en fais la proposition.
La présidente : Le sénateur Nolin le propose pour l'année fiscale actuelle.
Le sénateur Nolin : Voulez-vous le mettre aux voix?
La présidente : Qui est en faveur? Qui est contre?
Des voix : D'accord.
La présidente : La motion est adoptée.
[Translation]
La présidente : Il est proposé par le sénateur Nolin que le deuxième budget pour l'exercice financier à venir et portant sur l'étude sur la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques soit adopté. Êtes-vous tous d'accord?
Des voix : Oui.
La présidente : Qui s'y oppose? Qui s'abstient?
Adopté.
Chers collègues, je vous remercie énormément.
Le sénateur Angus : Si je comprends bien, vous avez déjà distribué le plan de travail au reste du comité; je devais être absent lors de la première journée. Qu'avons-nous prévu pour le projet de loi C-60?
La présidente : Je vais lever la séance et répondre à votre question immédiatement.
(La séance est levée.)