Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 10 - Témoignages du 4 juin 2009
OTTAWA, le jeudi 4 juin 2009
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 10 h 49, pour faire l'étude, article par article, du projet de loi S-4, Loi modifiant le Code criminel (vol d'identité et inconduites connexes) ainsi que du projet de loi S-205, Loi modifiant le Code criminel (attentats suicides).
Le sénateur Joan Fraser (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Bonjour à tous, nous procédons aujourd'hui à l'étude article par article du projet de loi S-4, mais il nous a semblé potentiellement utile d'inviter des fonctionnaires du ministère de la Justice à se rendre disponibles d'abord, pour que nous puissions poser des questions si nous en avons. Pour ma part j'aurai des questions à leur poser et je pense que le sénateur Nolin et sans doute d'autres en auront aussi.
[Traduction]
Je vais essayer de m'assurer que les questions posées aux fonctionnaires restent le plus près du sujet possible, après quoi nous passerons au débat sur le projet de loi. Je crois que seront proposés des amendements qui nécessiteront un débat.
Le sénateur Nolin : Madame Klineberg, hier, des représentants de l'Association du Barreau canadien ont comparu devant le comité. Ils ont recommandé l'élimination des deux exemptions. Veuillez expliquer pourquoi ces deux exemptions devraient être maintenues dans le projet de loi, sans faire intervenir l'exemption plus générale qui existe dans le Code criminel, aux articles 25.1 à 25.3.
Joanne Klineberg, avocate, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : Marke Kilkie pourra répondre à ces questions.
Marke D. Kilkie, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice Canada : Sénateur, vous avez bien posé le problème en vous reportant au cadre général de la justification fondée sur l'application de la loi. Il est question de la latitude laissée à la police ainsi que de la responsabilisation et de la surveillance à l'égard d'actes qui seraient par ailleurs des infractions. Ces actes ne sont pas définis dans le projet de loi. On s'en remet aux agents, qui sont guidés par les critères du régime général et notamment le critère voulant que l'acte soit raisonnable et adapté aux circonstances de l'enquête précise qui justifient l'acte.
Dans le cas de l'identité cachée, il s'agit d'une infraction distincte. Je fais une analogie avec le fait que la police jouit d'une exemption pour le port d'armes courtes, qui serait normalement une infraction. Au lieu de laisser la police exercer son pouvoir discrétionnaire et appliquer le genre de critère qui se trouve à l'article 25.1 du Code criminel pour le port quotidien des armes courtes dont ils se servent pour s'acquitter de leurs devoirs, nous prévoyons une exemption à l'égard de ce qui, pour le reste d'entre nous, constitue une infraction.
Je fais l'analogie avec les agents secrets : l'identité cachée est indispensable à leur travail. Le Parlement peut tenir compte de ce facteur au départ dans les paramètres de l'infraction et décider qu'il est dans l'intérêt public de les laisser commettre cet acte en connaissant les limites à respecter. Selon moi, cela se rapproche de la question des armes à feu; il y a lieu de prévoir dans la loi une exemption précise et encadrée, plutôt que de s'en remettre au pouvoir discrétionnaire.
Le sénateur Nolin : Est-ce que sont exclues de l'application de ces exemptions les dispositions existantes du Code criminel voulant que les autorités fassent rapport de l'exercice de ces exemptions par les policiers?
M. Kilkie : Le régime de justification par les activités d'application de la loi exige ces rapports. L'exemption prévue ici ne l'exigerait pas, comme dans le cas de l'exemption à l'égard des armes à feu ou de la possession de pornographie juvénile ou encore d'autres exemptions où le Parlement a jugé bon d'exclure, dans la disposition sur l'infraction, la conduite de bonne foi de la police. Il n'y a pas de rapport dans ces cas-là. Les exigences de rapport de l'article 25.1 ne s'appliqueraient pas parce qu'il s'agit d'une exemption à part.
Le sénateur Nolin : Merci.
Le sénateur Baker : Bien sûr, cela donne à la police le pouvoir, dans la conduite d'activités secrètes, de violer les articles 366 à 368.1 du Code criminel. L'article 366 porte sur la création d'une fausse identité. L'article permettrait à la police, dans des activités secrètes, de prendre l'identité d'une personne, comme on peut le voir des articles 366 à 368.1. Dans l'exercice de ses fonctions, la police peut violer la Charte.
Cela me dérange. Il y a 10 ans, nous avons adopté l'article 487.01 du Code criminel, qui permettait à la police d'utiliser n'importe quelle technique dans une enquête. On en est venu à faire des perquisitions secrètes ressemblant à de vraies entrées par effraction et à utiliser des techniques d'enquête qui violent la Charte. Cette disposition est maintenant remise en question. Je ne croyais pas, lorsque nous l'avons adoptée, que nous en arriverions là. Il me semblait que c'était un ajout plutôt simple aux exigences existantes, étant donné que l'électronique évoluait et que, à cause de la nouvelle technologie, la police avait besoin de nouvelles techniques d'enquête. Le Code criminel parle d'activités secrètes, tout comme le projet de loi, et il y a lieu de s'interroger. Je n'ai pas vérifié récemment, mais on peut s'interroger sur la constitutionnalité. Convenez-vous que la question fait l'objet de beaucoup de discussions en jurisprudence?
Ce qui me préoccupe, c'est que presque tous les mandats sont décernés en vertu de l'article 487.01 du Code criminel parce que cela permet de faire n'importe quoi. C'est ce que dit le texte. Dans le projet de loi à l'étude, nous faisons la même chose et employons les mêmes mots : activités secrètes. Nous exemptons la police de ce qui serait normalement une violation de la Charte.
M. Kilkie : Dans un moment, je vais demander à ma collègue de donner des détails au sujet de ce qui est possible aux termes des modifications, en ce qui concerne l'identité d'une autre personne. D'après les renseignements reçus de la police, dans le cas des identités cachées, on utilise le nom d'une personne fictive plutôt que d'une personne existante.
À propos du mandat général, vous dites que les activités secrètes, les perquisitions secrètes, et cetera. englobent n'importe quoi. Cela n'est pas laissé à l'entière discrétion de la police. Le mandat suppose une autorisation judiciaire. Il s'agit d'une technique précise. Je le dis en songeant à l'application de la Charte.
Le sénateur Baker : Bien sûr. Toutefois, le juge suit simplement la loi, où il est question de « tout acte ». C'est le texte que nous avons adopté à l'article 487.01. Et les perquisitions secrètes sont l'activité préférée : on peut aller fureter autant de fois qu'on veut chez n'importe qui. C'est légal, au Canada, à cause de l'article 487.01. Le projet de loi S-4, à l'article 7, n'impose aucune restriction au vol d'identité.
Mme Klineberg : L'exemption prévue à l'article 368.2 est étroite et d'application limitée. Elle ne vise que les infractions prévues aux articles 366 à 368.1. L'article ne prévoit ni exemption ni défense pour une inculpation d'usurpation d'identité, par exemple. Si un agent se fait passer pour une autre personne et se rend coupable d'usurpation d'identité, rien, dans cet article, ne lui donne un moyen de défense contre l'inculpation d'usurpation d'identité.
Le sénateur Baker : Vraiment?
Mme Klineberg : Vraiment. Il n'y a exemption que pour les infractions relatives aux faux documents. L'article ne procure aucune protection supplémentaire à l'égard de quelque infraction qui n'y est pas précisée.
Un acte peut échapper aux dispositions sur les faux, mais l'agent en cause pourrait être reconnu coupable d'autres infractions qu'il aurait commises.
La présidente : D'accord.
Le sénateur Baker : Non, madame la présidente, ce n'est pas d'accord. Je ne le crois pas, mais je vais laisser passer. Je connais la réponse.
La présidente : Je ne présumais pas de votre conclusion, sénateur Baker. J'ai dit « d'accord » parce que je pensais que la réponse de Mme Klineberg était terminée.
Le sénateur Baker : Les réponses ont été excellentes.
La présidente : D'autres sénateurs ont des questions?
Le sénateur Joyal : Je comprends les articles 7 et 9 du projet de loi S-4 dans le cas d'un fonctionnaire public. Ils ne s'appliquent pas au policier qui sait qu'il s'est procuré de faux papiers d'identité et s'en sert. Aux termes de l'autre disposition du Code criminel, le policier ne pourrait être inculpé d'infraction pénale.
M. Kilkie : Une précision : votre question porte-t-elle sur la simple possession de faux papiers d'identité?
Le sénateur Joyal : Oui, la possession et l'utilisation de faux papiers d'identité. Si nous exemptons le fonctionnaire qui fournit de l'information pour constituer une fausse identité, comme il est proposé à l'article 368.2, nous l'exonérons de toute culpabilité d'infraction. L'article 368.2 dit ceci :
Le fonctionnaire public, au sens du paragraphe 25.1(1), ne peut être reconnu coupable d'une infraction prévue à l'un des articles 366 à 368.1 si les actes qui constitueraient l'infraction ont été accomplis dans le seul but d'établir ou de préserver une identité cachée pour son utilisation dans le cadre de ses fonctions ou de son emploi.
Autrement dit, un fonctionnaire serait innocent, mais c'est le policier qui utiliserait les faux papiers pour son activité secrète. Où dit-on que le policier est innocent même s'il commet un acte répréhensible, un acte criminel?
Vous interprétez ainsi l'article 368.2 :
[Français]
Le fonctionnaire public, au sens du paragraphe 25.1(1), ne peut être reconnu coupable d'une infraction prévue à l'un des articles 366 à 368.1 si les actes qui constitueraient l'infraction ont été accomplis dans le seul but d'établir ou de prévenir une identité cachée [...]
[Traduction]
M. Kilkie : D'après ce que je comprends, vous avez des questions au sujet de l'expression « fonctionnaire public ». Pour cette expression, nous avons utilisé la même définition qu'à l'article 25.1, et elle englobe les agents de police. Dans cet article, l'expression désigne tout fonctionnaire public disposant des pouvoirs d'un agent de la paix.
Si nous avons utilisé cette définition — et je comprends que cela puisse porter à confusion, car il y a d'autres définitions de « fonctionnaire public » dans le Code criminel —, c'est pour limiter la catégorie de personnes qui peuvent se prévaloir de cette exemption, de façon à ne pas élargir l'utilisation de l'identité cachée au cours d'une enquête à une catégorie plus large que celle des personnes qui pourraient se prévaloir de l'article 25.1. C'est la même définition, et elle englobe certainement la police.
Le sénateur Joyal : Est-ce qu'elle englobe également le fonctionnaire qui établirait le faux certificat de naissance, la fausse carte d'assurance et d'autres faux documents?
La présidente : Au paragraphe 25.1(1) du Code criminel, la définition est la suivante :
« fonctionnaire public » Agent de la paix ou fonctionnaire public disposant des pouvoirs d'un agent de la paix au titre d'une loi fédérale.
Le sénateur Baker : La définition de « fonctionnaire public » proposée à l'article 2 du Code criminel est très large.
La présidente : Ce n'est pas celle que nous utilisons.
Le sénateur Baker : Oui, parce que le fonctionnaire public est agent de la paix.
Mme Klineberg : Je ne suis pas sûre de comprendre la question non plus, mais je crois, sénateur Joyal, que votre question portait sur les fonctionnaires qui produisent les documents. Il en est question dans l'exemption qui figure à l'article 7 du projet de loi. Il y a une exemption distincte pour ceux qui travaillent dans un bureau d'immatriculation, par exemple, ou à l'état civil provincial, ceux qui produisent les documents.
Il y a une exemption encore plus étroite pour ces personnes. Elle ne vise que la fabrication de faux. Elles ne sont pas exonérées des infractions relatives à l'utilisation de faux documents. Elles ne sont exemptées que de l'article 366, et même là, seulement si elles agissent de bonne foi à la demande d'un organisme gouvernemental ou d'un ministère.
Ceux qui fabriquent les documents sont protégés par l'exemption prévue à l'article 7. L'exemption au titre de l'application de la loi, qui est une question distincte et qui est préoccupante à cause de son rapport avec l'article 25.1, est celle qui est prévue à l'article 9. Les deux exemptions sont présentées séparément parce que les éléments qui les justifient sont différents.
Le sénateur Joyal : Le point signalé par le sénateur Nolin reste donc entier. Il y a des actes criminels dont la police doit faire rapport pour qu'il y ait un contrepoids dans le système et pour éviter que la police ne s'emballe et ne fasse toutes sortes de choses à son idée. Si elle doit faire rapport, il y a un contrepoids à la perpétration d'infractions.
Dans ce cas-ci, nous donnons carte blanche à la police, qui peut faire n'importe quoi en ce qui concerne les faux documents. Il n'y a dans le système aucune exigence de rapports qui serve de frein comme il en existe pour les autres crimes que nous l'avons autorisée à commettre.
M. Kilkie : Pour l'essentiel, c'est exact, en ce qui concerne les fausses identités et leur utilisation. Quant à l'usurpation d'identité, dont il a été question, si la police s'avançait jusque-là et usurpait l'identité de quelqu'un, ce comportement serait visé par l'article 25.1.
Ce serait une infraction non visée par ces exemptions. Elle irait donc au-delà du point de référence, des moyens nécessaires à l'exécution d'activités secrètes. Au-delà de la possession et l'utilisation des moyens nécessaires à la création d'une identité, il faudrait faire intervenir l'article 25.1. Je ne dirais pas que tout est permis en ce qui concerne l'utilisation de documents pour des activités secrètes. S'il s'agit d'infractions relatives au vol d'identité, il faudrait toujours faire intervenir l'article 25.1.
Le sénateur Nolin : Je ne partage pas cet avis. Si vous lisez l'article 368 du Code criminel, visé par l'exemption, vous constaterez qu'il fait exactement ce que dit le sénateur Joyal. Lisons-le ensemble.
Quiconque, sachant qu'un document est contrefait, selon le cas :
a) s'en sert, le traite, ou agit à son égard;
b) fait, ou tente de faire, accomplir l'un des actes visés à l'alinéa a), comme si le document était authentique, est coupable :
c) soit d'un acte criminel [...]
Il y a donc exemption.
M. Kilkie : Je suis d'accord.
Le sénateur Nolin : C'est notre problème. Nous comprenons qu'on veuille faciliter la tâche de la police, mais il y a là un principe que vous nous avez demandé d'adopter il y a 10 ans. Nous avons précisé ce principe. Nous avons maintenant les articles 25.1 à 25.3, et nous ne sommes toujours pas convaincus qu'il faut contourner des dispositions au lieu de nous y conformer.
Je comprends que nous l'avons fait par le passé. Telle a été votre réponse, il y a deux ou trois semaines. Vous dites que nous l'avons déjà fait pour d'autres éléments, comme l'utilisation d'armes.
À ce moment-là, nous aurions peut-être dû être plus scrupuleux. Nous ne l'avons pas été et aujourd'hui, nous avons des préoccupations. Voilà le problème que nous avons. Nous pourrions peut-être adopter la mesure par un vote et laisser au Sénat le soin de prendre une décision.
La présidente : Ce serait peut-être une façon intéressante de nous y prendre.
Le sénateur Joyal : Pour ma part, je n'ai pas d'objection à ce que la police se serve de faux documents pour des activités secrètes. Personne n'a d'objections, sans doute. Toutefois, ce qui nous inquiétait il y a dix ans et nous inquiète toujours, c'est l'absence de contrepoids dans le système qui permettrait de se prémunir contre les abus de cette pratique.
La police ne devrait pas avoir une très large capacité d'utilisation de toutes sortes de faux documents d'identité sans contrepoids dans le système, sans avoir à en faire rapport comme par le passé. Voilà ce qui nous préoccupe. Plus nous prévoyons de nouvelles infractions criminelles et plus nous accordons des exemptions à la police, sans freins ni contrepoids, plus nous nous engageons dans une voie répréhensible, il me semble.
La présidente : Les fonctionnaires nous ont sans doute donné les réponses qu'ils doivent nous donner, et il est maintenant temps que les sénateurs concluent en décidant ce qu'ils veulent faire.
J'ai un point à souligner qui concerne non pas le fond du projet de loi, mais son libellé. Tout au long du projet de loi, à de nombreux endroits, des modifications sont apportées au Code criminel pour ajouter des erreurs grammaticales dans la version anglaise. Les rédacteurs cherchent sans doute à respecter ce qu'on appelle parfois la rectitude politique. Je tiens à ce qu'on sache que je suis une fervente féministe et que je préconise l'emploi d'une langue neutre, mais je n'accepte pas les inexactitudes grammaticales.
La construction à laquelle je pense est l'emploi de pronoms au pluriel, suivis du terme « everyone ». Par exemple : « Everyone commits an offence who, knowing that they are committing an offence... »
Cette pratique généralisée me semble profondément choquante. Toutefois, il y a dans le projet de loi une disposition où elle ne peut vraiment pas être tolérée. Il s'agit de l'article 2 dont le libellé est une reformulation de l'article 130 du Code criminel :
Everyone commits an offence who
(a) falsely represents themselves to be a peace officer [...]
Puis, nous aurions le paragraphe (b) qui dit :
[...] uses a badge or article of uniform or equipment in a manner that is likely to cause persons to believe that they are a peace officer [...]
Si on fait une analyse sérieuse de cette phrase, on s'aperçoit qu'elle dit en fait ceci : Commet une infraction quiconque incite les membres du public à croire qu'eux-mêmes sont « agents de la paix ». Je ne crois pas que nous puissions tolérer cette formulation.
Lorsque nous en serons là, je vais faire quelque chose de très rare pour la présidence d'un comité en proposant un amendement à cette disposition, à moins qu'on ne puisse me convaincre qu'il faut agir autrement.
Le sénateur Nolin : En français, on emploie le singulier.
[Français]
La présidente : En français, ça va; en français on n'est pas obnubilé par ces questions qui nous induisent dans des contorsions extraordinaires.
[Traduction]
Le sénateur Nolin : Une seule personne fait une chose.
Mme Klineberg : Comme les sénateurs le savent, c'est le genre de modification que les rédacteurs apportent dans les mesures législatives lorsque nous travaillons avec eux pour traduire la politique en texte législatif.
Je vais me faire un plaisir de transmettre vos observations et vos préoccupations, avec une transcription des délibérations d'aujourd'hui, au service des lois et au ministère pour qu'ils y réfléchissent.
La présidente : Vous avez même pu remarquer des hochements approbateurs lorsque j'ai fait mes observations pas très gentilles.
Le sénateur Joyal : Avant de passer à l'étude du projet de loi article par article, je voudrais rappeler une question qui a été soulevée hier, si vous vous souvenez bien. Il s'agit de la traduction de « reasonable inference » par « conclure raisonnablement » et de « reckless » par « sans se soucier ».
Dans la mesure où j'ai quelque connaissance du français, si je devais commenter ces deux phrases, je signalerais qu'ils ont une portée différente.
Avez-vous eu le temps d'étudier la question et de voir comment on peut mieux faire correspondre les deux textes afin d'éviter l'incertitude dans l'interprétation du Code criminel?
Mme Klineberg : C'est une autre de ces situations regrettables qui se produisent lorsque nous réformons le Code criminel à la pièce. Ce genre de problème surgit lorsque nous rédigeons de nouvelles dispositions. Nous rédigeons simultanément les textes anglais et français, comme les sénateurs le savent certainement, et nous travaillons ensemble, bien entendu, pour coordonner les nouvelles dispositions. Parallèlement, nous devons tenir compte du reste du texte du Code criminel dans lequel les modifications vont s'insérer. Il doit y avoir cohérence entre le nouveau texte d'un projet de loi et les dispositions semblables du Code criminel, et il faut assurer la même cohérence en français. C'est une tâche très délicate. Faut-il, verticalement, essayer de mieux faire correspondre les textes anglais et français du projet de loi si cela fait surgir une divergence avec la façon dont les dispositions en français sont interprétées en regard de dispositions existantes du Code criminel?
Nous avons tendance à pécher par excès de cohérence dans l'axe vertical. Ce que nous rédigeons maintenant en anglais doit être cohérent avec le reste du texte anglais du Code criminel, et vous faisons la même chose en français. Est-ce la bonne décision dans tel ou tel projet de loi? Difficile à dire, mais vous pouvez peut-être comprendre notre objectif. Si nous utilisons dans un nouveau texte des expressions qui existent déjà dans le Code criminel, nous estimons qu'il est préférable de préserver la cohérence de la phraséologie existante, dans chacune des langues, quitte à accepter que telle ou telle traduction ne soit pas parfaite. Voilà la meilleure réponse que je peux donner à cette question.
Le sénateur Joyal : Je comprends l'explication, mais il risque d'arriver, si une personne est accusée en vertu d'un de ces deux articles, que l'avocat opte pour l'interprétation la plus favorable à son client. C'est en tout cas ce que je ferais. Comme avocate, feriez-vous la même chose? Probablement. Je constate que le sénateur Dickson hoche la tête. Nous devrions essayer d'éviter autant que possible, dans le Code criminel [...]
Mme Klineberg : J'ajouterais que, le plus souvent, des questions comme celle-là surgissent lorsqu'il est question de notions fondamentales de droit pénal, comme l'imprudence, la connaissance, l'intention, et cetera. Comme ces notions sont fondamentales dans tout le droit pénal et sont plutôt bien comprises dans l'ensemble du droit pénal, nous sommes rassurés dans une certaine mesure du fait qu'il existe une abondante jurisprudence qui définit le sens de la notion d'imprudence. Si, dans l'ensemble du Code criminel, le terme « recklessness » est rendu par « sans se soucier », on peut avoir une plus grande assurance que les interprétations seront identiques, même si, à considérer les mots seulement, on risque d'en arriver à une conclusion légèrement différente.
Le sénateur Wallace : Avant de poser ma question, je signale qu'un ou deux points que je soulève concernent des témoignages que nous avons entendus au cours des dernières séances et qu'il faudra sans doute les aborder au stade de l'étude article par article. Selon la façon dont vous voulez procéder, je peux discuter de ces points dès maintenant avec Mme Klineberg ou, si vous préférez, lorsque nous ferons l'étude article par article, quitte à faire appel au témoin à ce moment-là. Que préférez-vous?
La présidente : Normalement, à l'étape de l'étude article par article, nous essayons d'éviter le débat pour le débat. Nous discutons des amendements proposés, s'il y en a.
Le sénateur Wallace : Oui.
La présidente : S'il n'y en a pas, nous poursuivons. Nous présumons qu'il y a eu d'amples discussions pendant les délibérations. Du reste, le débat peut se poursuivre au Sénat si le projet de loi est adopté et lui est renvoyé.
Comme je ne vois pas exactement si vous voulez parler d'un débat général ou du texte précis d'un amendement, je ne sais pas trop ce qui vous semble convenir en ce moment.
Le sénateur Wallace : Je m'explique. Il s'agit de quelque chose de précis. Par exemple, il y a la notion d'imprudence, dont il a été un peu question.
La présidente : Avez-vous un amendement à proposer?
Le sénateur Wallace : J'ai une opinion. Je voudrais connaître le point de vue de Mme Klineberg.
La présidente : Je croyais qu'elle venait d'en parler.
Le sénateur Wallace : J'ai une question complémentaire.
La présidente : Vous posez cette question rapidement et nous allons ensuite passer à l'étude du projet de loi article par article.
Le sénateur Wallace : Je vais laisser tomber. Mon autre question concernait l'utilisation de l'expression « carte de crédit ».
La présidente : Vous voulez parler d'un amendement?
Le sénateur Wallace : Oui.
La présidente : Allez-vous proposer un amendement?
Le sénateur Wallace : Je ne propose pas d'amendement, mais, compte tenu des témoignages que nous avons entendus, je me demande ce que Mme Klineberg pense de l'utilisation de ce terme dans le projet de loi.
La présidente : S'agit-il de modifier la définition qui figure à l'article 321 du Code criminel?
Le sénateur Wallace : Oui.
Mme Klineberg : Il y a une réflexion dont je voudrais faire part au comité d'après les témoignages que j'ai entendus, notamment ceux de Visa et de MasterCard. Il y a eu passablement d'échanges au comité, qui a manifesté un vif intérêt. Il s'agissait de s'assurer que la notion de « carte de crédit » englobe les technologies émergentes. Ce que je voudrais signaler au comité, c'est que la définition de « carte de crédit » ne se trouve pas dans le projet de loi. Elle figure bien dans le Code criminel, mais cela est hors de la portée du projet de loi. Elle se trouve à l'article 321 du Code.
À mon avis, la définition donne déjà une bonne latitude, étant donné son libellé actuel. Par exemple, « carte de crédit » désigne « les cartes, plaquettes ou coupons ». Et la définition anglaise ajoute : « or other device issued or otherwise distributed ».
Ce sont des éléments comme ceux-là qui, à mon avis, permettent de couvrir les technologies émergentes. Je suis heureuse d'avoir pu vous le signaler.
La présidente : Sénateurs, est-ce d'accord pour que le comité passe à l'étude article par article du projet de loi S-4, Loi modifiant le Code criminel (vol d'identité et inconduites connexes)?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le titre est-il reporté?
Des voix : D'accord.
La présidente : D'accord.
L'article 1 est-il adopté? Y a-t-il un amendement?
Le sénateur Joyal : L'amendement porte sur la définition de « pièce d'identité », à l'article 1, qui propose d'ajouter au Code criminel le paragraphe 56.1(3). La définition commence au bas de la page 1 et se poursuit à la page 2.
L'amendement vise à ajouter « certificat de décès » après « certificat de naissance ». La première ligne de la page 2 commence par « d'assurance-maladie ».
Au cours de notre audience avec audition de témoins, il a été reconnu qu'un certificat de décès délivré par l'État contient des renseignements personnels qui peuvent servir à recréer l'existence d'une personne décédée. Ce document est aussi important que le certificat de naissance.
Le premier amendement ajouterait donc « du certificat de décès » à la page 2, après les mots « du certificat de naissance ». Voilà en quoi consiste le premier amendement.
La présidente : Nous avons sous les yeux une proposition présentée comme un seul amendement. Avant que vous ne le lisiez, en en faisant la proposition, peut-être pourriez-vous parler des deux éléments.
Le sénateur Joyal : Le deuxième amendement qui porte sur les pièces d'identité concerne « la carte d'identité portant la photographie et la signature du titulaire ».
Ce qui est important, c'est que, dans cette définition, nous englobons la carte d'assurance-maladie. Cette carte comprend normalement la photo et la signature du titulaire, qui peut la présenter à l'hôpital ou à un médecin. La même chose vaut pour la carte d'identité de l'employé, carte qui a également la photographie et la signature du titulaire. Cette pièce d'identité pourrait donner accès à de nombreux éléments délicats de l'activité gouvernementale.
La proposition consiste à ajouter aux lignes 6 et 7, au haut de la page 2, après les mots « statut d'Indien » les mots « ou de la carte d'identité d'employé portant la photographie et la signature du titulaire ». Nous savons tous que je pourrais vous montrer ma carte de sénateur; le légiste du Sénat pourrait vous montrer sa carte d'identité, qui lui donne accès à des éléments très délicats de l'activité gouvernementale. Il ne fait pas de doute que quelqu'un qui voudrait utiliser l'identité de quelqu'un d'autre pourrait le faire avec toutes sortes d'intentions malveillantes.
Il s'agit donc d'un document important, et nous proposons de l'ajouter à la liste des pièces d'identité.
La présidente : Je vous invite maintenant à lire votre motion à haute voix. Nous pourrons ensuite donner la parole aux sénateurs qui veulent en discuter.
Le sénateur Joyal : Je propose :
QUE le projet de loi S-4 soit modifié à l'article 1, à la page 2 :
a) par substitution, à la page 2, de ce qui suit :
« du certificat de décès, du passeport au sens du paragraphe 5(5), de »;
b) par substitution, aux lignes 6 et 7, de ce qui suit :
« tion au Canada, du certificat du statut d'Indien ou de la carte d'identité d'employé portant la photographie et la signature du titulaire, délivré ou paraissant délivré par un ».
[Français]
La présidente : Et en français, on tient pour acquis?
Le sénateur Joyal : En français, il est proposé :
QUE le projet de loi S-4 soit modifié à l'article 1, à la page 2 :
a) par substitution, à la ligne 2, de ce qui suit :
« du certificat de décès, du passeport au sens du paragraphe 57(5), de »;
b) par substitution, aux lignes 6 et 7, de ce qui suit :
« tion au Canada, du certificat du statut d'Indien ou de la carte d'identité d'employé portant la photographie et la signature du titulaire, délivré ou paraissant délivré par un ».
[Traduction]
La présidente : Le sénateur Watt souhaite participer au débat.
Le sénateur Watt : Je voudrais une explication. Qu'est-ce que le certificat du statut d'Indien? Pourquoi en est-il question ici?
La présidente : Je crois que les Indiens inscrits ont des cartes qui attestent leur statut. N'est-ce pas, madame Klineberg?
Mme Klineberg : Oui. Cette pièce d'identité est actuellement indiquée dans le projet de loi.
Le sénateur Watt : Je le sais bien.
La présidente : Elle figure dans la longue liste des pièces d'identité délivrées par le gouvernement.
Le sénateur Baker : Il existe un certificat de statut d'Indien, n'est-ce pas? C'est la question que le sénateur Watt pose.
Mme Klineberg : Je le crois, oui.
Le sénateur Watt : Qu'est-ce que cela veut dire?
La présidente : Cet article indique que le certificat du statut d'Indien est l'une des pièces dont il est interdit de faire un faux ou de les posséder illégalement.
Le sénateur Watt : J'ignorais que ces certificats existaient. Voilà pourquoi je pose la question. Le témoin hoche la tête.
Mme Klineberg : Nous avons dressé cette liste en consultant une foule d'autres ministères fédéraux. Le ministère de la Justice, où je travaille, n'a la responsabilité d'aucun de ces documents. Nous avons donc travaillé avec d'autres ministères pour cerner les documents délivrés par le gouvernement fédéral qui devraient figurer dans cette liste. Malheureusement, je peux dire seulement que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien nous a signalé que ce certificat devrait figurer dans la liste parce qu'il sert de pièce d'identité.
D'après mes renseignements, ce certificat existe, mais, malheureusement, je suis incapable de vous donner les détails.
Le sénateur Watt : Cela ne dissipe pas mes inquiétudes, mais c'est d'accord. On parle de carte de membre, pas de certificat de statut. Si tel est le cas, et si vous inscrivez ce document dans la liste, pourquoi ne pas le faire pour les Inuits?
La présidente : Si le libellé laisse à désirer d'une façon ou d'une autre, nous ne sommes pas en mesure de le décider ce matin. Même si le projet franchit l'étape du comité avec ce texte inchangé, le projet de loi sera étudié au Sénat, et il sera possible de l'y amender s'il est établi qu'il doit l'être.
Le sénateur Watt : Très bien. Je laisse tomber.
Le sénateur Wallace : Sénateur Joyal, je vais dire un mot de votre proposition d'ajout du certificat de décès. À première vue, elle semble raisonnable, car il s'agit d'un certificat délivré par le gouvernement, mais il a ceci de différent, par rapport à tous les autres documents, que la ou les personnes qui seraient en possession de ce certificat seraient autres que la personne nommée, pour des raisons évidentes. Tous les autres documents seraient en la possession du titulaire.
Étant donné ce fait, on pourrait sans doute soutenir que, en toute rigueur, l'infraction a été commise, puisque ce certificat serait toujours en possession de quelqu'un d'autre. Je proposerais de ne pas ajouter le certificat de décès parce qu'il est foncièrement différent des autres documents. Sa nature est différente.
La présidente : Lorsque le sénateur Joyal a fait cette proposition, ma première réaction a été semblable à la vôtre, mais je me suis ensuite ravisée : ce qui est en cause ici, c'est la possession à des fins illégales. Or, on peut utiliser un certificat de décès pour réclamer une succession ou les biens de quelqu'un d'autre en alléguant que son grand-père est mort, alors qu'il ne l'est pas.
Le sénateur Wallace : Les renseignements qui figurent sur un certificat de décès correspondent à la définition que le projet de loi donne des renseignements identificateurs. Et effectivement, ces renseignements peuvent être utilisés, et s'ils le sont à des fins frauduleuses, le projet de loi s'appliquerait.
Mme Klineberg : Pour cette infraction en particulier, à la différence des autres, il n'est pas nécessaire de prouver l'intention illégale.
La présidente : [...] sans excuse légitime.
Mme Klineberg : C'est vrai, mais il n'est pas nécessaire de prouver l'intention illégale.
Le sénateur Joyal : Il me semble que, pour celui qui veut créer une identité en se servant des renseignements identificateurs de quelqu'un d'autre, le certificat de décès est un excellent document à utiliser. Si quelqu'un veut constituer l'identité d'une personne qui n'a jamais existé, créer ainsi une nouvelle personne, les renseignements qui figurent sur le certificat de décès peuvent être une excellente source, justement parce que la personne est décédée. Ce document présente un intérêt particulier pour quiconque veut créer l'identité d'une nouvelle personne ou prendre celle d'une personne décédée. Nous savons tous que, pendant les élections, les premières substitutions se sont faites au moyen du nom de personnes décédées. Bien évidemment, je ne vois pas pourquoi nous devrions omettre ce document de la liste.
Le sénateur Wallace : Je dois réaffirmer que, par sa nature, le certificat de décès est différent de tous les autres documents énumérés au paragraphe 56(3).
Le sénateur Joyal : Je suis d'accord, mais il s'agit tout de même d'un document délivré par le gouvernement, ce qui est l'élément important. Il contient des renseignements délicats pour quiconque voudrait reprendre l'identité de quelqu'un d'autre ou créer l'identité d'une nouvelle personne. C'est pourquoi il s'agit d'un document important.
La présidente : D'autres participations au débat?
Le sénateur Nolin : Sénateur, au Québec, le notaire demande ce document pour régler la succession d'une personne décédée. C'est un document important.
Le sénateur Joyal : Au Québec, il faut présenter le certificat de décès au directeur de salon funéraire avant que les préparatifs ne puissent commencer. Les salons funéraires sont contraints par la réglementation québécoise d'obtenir ce certificat avant toute chose pour s'assurer que la personne est vraiment décédée.
Le sénateur Wallace : Sénateur, votre autre amendement porte sur la carte d'identité d'employé. Où cet ajout se ferait-il? Je veux avoir l'assurance de bien comprendre. Ce serait à l'alinéa 56(1)3)? Après quels mots?
Le sénateur Joyal : Êtes-vous à la page 2?
Le sénateur Wallace : Oui.
Le sénateur Joyal : Aux lignes 6 et 7, qui débutent par :
« tion au Canada ou du certificat du statut d'Indien, »
je propose que les mots
« ou de la carte d'identité d'employé »
suivent immédiatement après.
Le sénateur Wallace : Il n'est pas précisé que la carte d'identité est délivrée par un ministère ou un organisme et non par un employeur du secteur privé.
Le sénateur Joyal : Absolument, oui. On ajoute tout de suite après :
« délivré ou paraissant délivré par un ministère ou un organisme public fédéral ou provincial... »
Il s'agit seulement d'une pièce d'identité publique délivrée par un organisme gouvernemental, provincial ou fédéral, à un employé sous forme de carte avec photo et signature. Normalement, le titulaire est un employé à part entière qui s'est soumis aux formalités administratives et a un contrat avec le gouvernement.
La présidente : Sommes-nous prêts à passer au vote sur l'amendement? Il est proposé par le sénateur Joyal que le projet de loi S-4 soit modifié à l'article 1, à la page 2... Dois-je poursuivre?
Des voix : Inutile.
[Français]
La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion en amendement?
Des voix : D'accord.
[Traduction]
La présidente : Adopté.
Le sénateur Joyal : J'ai un autre amendement à proposer à l'article 1, qui porte aussi sur les pièces d'identité.
À la ligne 7 de la définition, au haut de la page 2, l'amendement vise à ajouter les mots suivants :
[...] tout autre document semblable délivré ou paraissant délivré par un ministère ou organisme public fédéral.
La présidente : Sénateur Joyal, comme nous venons de modifier les lignes 6 et 7, puis-je proposer que vous amendiez votre formulation avant de proposer l'amendement? Au lieu de parler de substitution aux lignes 6 et 7, on parlerait des lignes 7 et 8 :
[...] tout autre document semblable délivré ou paraissant délivré [...]
Le sénateur Joyal : C'est exact. Il faut effectivement corriger la numérotation des lignes, puisque nous avons adopté des amendements qui ont pour effet de la modifier. Essentiellement, le fond de l'amendement, c'est l'ajout des mots :
[...] tout autre document semblable [...]
C'est-à-dire des documents des gouvernements fédéral et provinciaux délivrés par des ministères ou organismes.
Lorsque je dis « tout document semblable », je veux dire que, dans les années à venir, les gouvernements délivreront des documents différents qui contiendront des renseignements identificateurs. Nous savons qu'il s'agit de documents d'identité et qu'ils contiennent des renseignements délicats dont pourrait se servir quiconque veut usurper l'identité de quelqu'un d'autre. Voilà pour l'essentiel la raison d'être de l'amendement.
La présidente : Puis, aux lignes 9 à 11, vous supprimeriez les mots « ou tout document semblable »?
Le sénateur Watt : J'essaie de comprendre — « tion au Canada, ou du certificat du statut d'Indien ou tout document semblable...» Lorsque vous proposez « tout document semblable », il s'agit de remplacer et non d'insérer. C'est bien ce que vous dites?
La présidente : Non. Ce que j'ai proposé et ce que le sénateur Joyal a accepté, c'est que, au lieu de modifier de nouveau les lignes 6 et 7, ce qui finira par devenir très compliqué, nous modifiions les lignes 7 et 8; ou que le sénateur propose un amendement aux lignes 7 et 8 pour que l'amendement que nous venons d'apporter aux lignes 6 et 7, qui comprennent la mention du certificat du statut d'Indien, demeure.
Le sénateur Watt : Vous avez également dit « tout document semblable ». Cette notion serait probablement une réponse à mes préoccupations de tout à l'heure. Je tiens cependant à ce que les choses soient claires : nous avons des cartes de membre qui attestent de notre statut d'Inuit.
La présidente : Sont-elles délivrées par un gouvernement?
Le sénateur Watt : Nous avons commencé à mettre beaucoup d'information sur ces petites cartes. Tout concerne la vie du titulaire : identité, activité, prestations, et cetera. C'est plein d'information. Cette nouvelle technologie va s'implanter. En sera-t-il tenu compte si on emploie les termes « tout autre document semblable »?
Le sénateur Joyal : Oui, sénateur Watt, si c'est un ministère ou un organisme gouvernemental qui délivre ces documents. Il faut qu'ils soient délivrés par un ministère ou organisme gouvernemental ou encore par un gouvernement provincial. Si une bande ou une Première nation délivrait une pièce d'identité, elle ne serait pas englobée dans la définition parce qu'il ne s'agit pas d'un document gouvernemental. Pour ce qui est de l'appartenance à une nation, de la reconnaissance par une nation, la délivrance du document est la prérogative de la nation; mais aux fins de l'application du Code criminel, ce document ne serait pas visé. Il est très clairement indiqué que les documents doivent être délivrés par un ministère ou organisme du gouvernement fédéral ou d'un gouvernement provincial.
Le sénateur Watt : L'information d'ordre médical et les éléments de cette nature — les affaires bancaires, immobilières ou peu importe — cela intéresse le gouvernement, n'est-ce pas?
Le sénateur Joyal : Effectivement, mais il ne s'agit pas à proprement parler d'un document gouvernemental parce qu'il n'est pas délivré par un organisme gouvernemental. Si le document est délivré par le ministère des Affaires indiennes, il s'agit d'un document gouvernemental au sens de l'article.
Le sénateur Watt : Pour le moment, je vais courir le risque de me fier à l'expression « tout autre document semblable ».
Le sénateur Wallace : Pour en revenir à l'objet du projet de loi et à la nouvelle infraction qu'il prévoit, il faut dire qu'il y a de sérieuses conséquences pour quiconque est en possession de pièces d'identité ou de renseignements identificateurs, tels qu'ils sont définis plus loin. J'ai l'impression que les rédacteurs du projet de loi ont pris grand soin de préciser clairement le contenu de la définition de « pièce d'identité ». Il est donc certain que la définition est très limitative. À dessein, je dirais, ils ont évité les mentions générales qui engloberaient tout ce qui est de nature semblable. Je sais que, s'ils l'ont fait, c'est pour éviter toute ambiguïté au sujet de ce qui constitue un document d'identité parce qu'une personne qui est en possession de ce type de document est passible de très graves conséquences pénales.
Je comprends où vous voulez en venir, sénateur Joyal et je reconnais que c'est souvent un choix judicieux de ménager une certaine latitude en prévision de ce qui peut survenir par la suite. Dans ce cas, à cause de la nature particulière de l'infraction, nous, parlementaires, défrichons un nouveau territoire, si toutefois le projet de loi est adopté, en créant cette infraction qu'est le vol d'identité. Je suis fermement convaincu que nous devrions nous limiter aux pièces d'identité identifiées pour éviter de créer de l'ambiguïté.
Votre proposition part d'une bonne intention, et je comprends pourquoi vous la faites. Toutefois, si nous employons l'expression « ou tout autre document semblable », comme les témoins nous l'ont dit hier, les avocats vont s'en donner à cœur joie. Selon moi, il est important de faire adopter ce projet de loi, peut-être avec quelques amendements, et de le faire le plus rapidement possible. Il faut toutefois agir de façon mesurée et éviter les ambiguïtés.
Le sénateur Banks : J'espère que je ne vais pas trop brouiller les cartes. D'abord, en ce qui concerne l'amendement à l'étude, sénateur Joyal, est-ce que le mot « provincial » englobe « territorial » par définition?
Le sénateur Joyal : Aux termes de la Loi d'interprétation, oui.
Le sénateur Banks : Merci. Deuxièmement, en ce qui concerne ce que le sénateur Wallace vient de dire, les documents visés dans le projet de loi sont très clairement définis au paragraphe 56.1(3). Ils sont définis de façon à exclure tout autre document. Par conséquent, les choses qui pourraient servir à l'identification personnelle et que nous ne pouvons même pas envisager parce qu'elles relèvent de la technologie de demain, dont nous ne savons rien, seront, presque par définition, exclues de la portée de la mesure à l'étude.
Hier, j'ai dit que je proposerais un amendement qui permettrait de tenir compte de moyens hypothétiques et encore inconnus d'attester l'identité. Mon chat a un document dans l'oreille. J'ignore si c'est un document, mais nous serons bientôt identifiés par des moyens qu'aucun d'entre nous ne peut encore envisager, même dans ses rêves les plus fous.
Simple rappel pour les sénateurs, je veux parler de la page 7, à l'article 402.1, de l'ajout, après le mot « type », tout au haut de la page, des mots...
La présidente : Je vous en prie, sénateur Banks, nous n'avons pas un temps illimité.
Le sénateur Banks : Toutefois, la même préoccupation concerne aussi le paragraphe 56.1(3) parce qu'il est très catégorique et exclut toute technologie future. Ce que je demande, probablement, c'est si nous pouvons revenir à cette question, même si nous donnons notre approbation maintenant, parce que j'ai les mêmes préoccupations à ce sujet.
La présidente : Le comité est maître de ses travaux, mais vous devrez demander le consentement du comité pour revenir en arrière et rouvrir l'article 1.
Le sénateur Banks : Je ferai sans doute cela une autre fois. Merci.
Le sénateur Baker : Je m'interroge sur l'emploi des mots « document semblable ». Je n'ai pas pu comprendre l'explication de Mme Klineberg à la séance précédente, car les documents ont été décrits comme précis et de nature limitée pour diverses raisons. Ce qu'on trouve dans le projet de loi, ce sont les termes « semblable » et « tout autre document semblable ». C'est ce qu'il y a dans le texte, mais on y lit aussi « délivré ou paraissant délivré par un gouvernement étranger ».
Étant donné ce libellé pour les documents délivrés par un gouvernement étranger, pourquoi le ministère répugne-t-il autant à adopter le même libellé pour les documents canadiens?
Mme Klineberg : L'expression « tout autre document semblable » a été employée à propos des documents de gouvernements étrangers pour éviter les situations où, par exemple, un gouvernement étranger considérerait le permis de conduire comme une pièce d'identité ou si le permis donnait une information légèrement différente. Cela laisse une certaine latitude pour que les documents canadiens que nous avons définis et les documents analogues délivrés par des gouvernements étrangers soient visés, même s'ils peuvent être légèrement différents.
C'est une question différente de celle de savoir si d'autres documents délivrés par le gouvernement du Canada qui ne figurent pas dans la liste devraient donner lieu à une infraction. Nous ne pouvons pas passer en revue les documents délivrés dans tous les autres pays et en dresser la liste. Il nous faut un libellé assez général pour pouvoir dire que les documents délivrés par les gouvernements au Canada sont ceux-là et que ces autres documents délivrés par des gouvernements étrangers correspondent. Il y a toujours la contrainte inhérente à la nature des observations énumérées dans l'infraction.
La proposition du sénateur Joyal consiste à dire qu'il ne faut pas se limiter à ces documents canadiens, mais englober également d'autres documents délivrés par le gouvernement du Canada. Il y a nettement une différence de portée.
Le sénateur Baker : Une seconde. On dit « tout autre document semblable délivré par un gouvernement étranger », mais non « tout document semblable délivré par un gouvernement au Canada ».
Si vous aviez ce passage « tout autre document délivré par un gouvernement étranger » strictement limité aux documents déjà énumérés, aux documents énumérés au préalable dans l'article, ce serait très bien, mais ce n'est pas ce que dit le texte. Il dit « tout autre document délivré par un gouvernement étranger », ce qui veut dire qu'il pourrait s'agir de n'importe quoi.
La présidente : Je crois que nous comprenons ce que vous dites, sénateur Baker. C'est un argument convaincant.
Mme Klineberg : Je ne suis pas en mesure de quantifier le risque, d'aucune manière, mais tout ce que je peux dire repose sur le travail juridique que nous avons fait sur cette infraction. On dit très peu sur l'élément de faute — il s'agit de la simple possession ou du transfert de ces documents —, nous croyons que, si vous élargissez la portée de la disposition pour l'étendre à des documents non identifiés pour l'instant ou inconnus pour l'instant, il y aura un risque accru du point de vue de la Charte. Quelle en sera l'importance, je ne saurais le dire, mais je vous signale que le risque serait accru.
Le sénateur Joyal : Il me semble que, si on dit « tout autre document semblable », la portée est certes plus grande, mais il doit s'agir de documents identificateurs comme ceux qui sont énumérés plus haut. Il est très clair qu'il s'agit de documents analogues à ceux qui ont déjà été énumérés. Il ne s'agit pas simplement d'une lettre de félicitations du ministère du Patrimoine. Ce genre de document ne serait pas englobé dans la définition, puisqu'il ne s'agit pas d'un document qui établit l'identité de la personne. La portée est donc élargie, mais il doit s'agir d'un document qui donne les éléments essentiels de l'identité de la personne. Voilà ce qu'on entend par « documents semblables ».
Le tribunal appelé à interpréter la disposition considérerait la nature des documents énumérés et établirait les paramètres, la vraie nature des documents, et il devrait comparer les types de documents qui établissent clairement l'identité et les documents semblables qui sont en cause ou dont il doit tenir compte.
Le sénateur Angus : Si j'étais juge, je ne considérerais que les certificats du statut d'Indien. D'après la façon dont l'amendement est rédigé, « document semblable » ne renvoie qu'au statut d'Indien.
Le sénateur Joyal : Non, ce n'est pas le cas. Nous avons réglé ce point. Il s'agit de l'autre document. Je crois que nous le comprenons.
Mme Klineberg : L'argument ne serait pas nécessairement que, maintenant, la portée est trop large. Ce serait plus probablement que, maintenant, la portée est quelque peu incertaine.
Autrement dit, vous créeriez une infraction, mais, si nous ne savons pas à l'avance si un document donné est visé ou non, une personne risque de commettre cette infraction en ayant simplement le document en sa possession, sans qu'il ait été dit clairement qu'il s'agit là d'une infraction criminelle. On ne peut pas se prononcer avec certitude à l'égard des documents qui ne sont pas énumérés.
Ce n'est pas nécessairement que la portée serait trop large. On ajouterait simplement un élément d'incertitude à l'égard d'une infraction pour laquelle il n'est pas nécessaire de prouver l'intention criminelle. Voilà le risque.
La présidente : Voulez-vous donner suite à votre amendement, sénateur Joyal?
Le sénateur Joyal : Nous voulons nous assurer que, dans le cadre de la loi, nous aurons la latitude voulue à l'égard d'innovations à venir, de sorte que l'objectif de la loi soit maintenu et que la loi ne soit pas dépassée du seul fait que les gouvernements ont proposé de nouveaux dispositifs en matière d'identité.
Nous n'arrivons même pas à concevoir quel type de document identificateur sera disponible à l'avenir. Nous devons avoir la certitude que le Code criminel ne deviendra pas un texte dépassé parce qu'il ne vise pas ces innovations en matière d'identité.
Il me semble que nous sommes dans ce type de contexte. Pour ce qui est de l'incertitude, dans la définition de la carte de crédit, lorsqu'on parle, dans la version anglaise, de « any other device », il s'agit là d'un élément très ouvert. Plus loin, nous créons une infraction pour possession de la carte de crédit de quelqu'un d'autre. Il y a une certaine latitude dans le Code criminel.
Mme Klineberg : Sénateur Joyal, ces infractions supposent un état mental très distinct. Dans le cas de l'infraction concernant la carte de crédit, on précise : « frauduleusement et sans apparence de droit ». C'est un cas concret d'état mental que le ministère public doit prouver.
Dans le cas du vol d'identité, il existe une intention d'utiliser l'information pour commettre une autre infraction. L'infraction dont il est question ici ne contient pas cet élément. C'est la seule raison pour laquelle la liste a été limitée; on est vraiment à la limite de ce qu'on peut faire en droit pénal. Lorsqu'on ajoute un élément d'incertitude, on accroît le risque. Je vous signale simplement ce fait.
La présidente : C'est un point intéressant.
Le sénateur Dickson : Sénateur Joyal, je n'ai pas votre expérience de 10 ou 15 ans comme membre du comité. Toutefois, auriez-vous l'obligeance de jeter un coup d'œil au mémoire de l'Association canadienne du Barreau, à page 2. Vous l'avez sous les yeux, sénateur.
À la rubrique Infractions relatives aux pièces d'identité, la deuxième phrase du deuxième paragraphe dit ceci : « Nous appuyons la tentative manifeste du projet de loi de limiter la portée de ces dispositions, puisqu'elle répond à des préoccupations que nous avons exprimées dans un mémoire antérieur. »
Ce mémoire antérieur portait sur un projet de loi semblable. Cette association a exprimé des préoccupations à l'époque. En proposant vos amendements, avez-vous tenu compte des points que l'Association canadienne du Barreau a soulevés dans son mémoire antérieur?
Le sénateur Joyal : Oui, j'ai tenu compte de ce qu'elle a dit. À la page 2, on propose une vaste gamme d'infractions, y compris le fait de vendre ou d'offrir en vente une pièce d'identité concernant en totalité ou en partie une autre personne. Les pièces d'identité sont définies de façon large et englobent les cartes d'assurance sociale, les permis de conduire, les cartes d'assurance-maladie, les passeports et d'autres documents qui simplifient les formalités d'entrée au Canada, ou d'autres documents semblables délivrés ou censés être délivrés par un gouvernement étranger.
L'interprétation proposée est qu'il s'agit d'un large éventail de documents. Je ne vois pas dans le mémoire que l'Association préfère limiter la liste des documents qui concernent l'identité de qui que ce soit.
Le sénateur Dickson : N'écrit-elle pas au deuxième paragraphe : « Nous appuyons la tentative manifeste du projet de loi de limiter la portée de ces dispositions »?
Le sénateur Joyal : Oui, et je suis d'accord.
Le sénateur Dickson : Elle ne veut pas allonger la liste, mais elle veut qu'on reste précis, si ma mémoire est fidèle.
Le sénateur Joyal : C'est un point qui se discute, comme vous le savez. Nous disons « documents semblables », et les documents énumérés sont d'une nature très précise par leur contenu, leurs renseignements et leur raison d'être.
Si un tribunal était appelé à établir si tel document est semblable à un document de la liste, il considérerait ce document de la liste. C'est là qu'il trouverait le cadre d'interprétation. Voilà le point important. Le tribunal aurait des paramètres de référence pour établir si tel document est semblable à un document indiqué et décrit dans le projet de loi.
La présidente : Chers collègues, la discussion a montré clairement qu'il s'agit d'un débat sur une politique. Faudrait- il que ce soit une liste fermée ou une liste plus importante? Les raisons invoquées dans un sens ou dans l'autre ont été exposées. Tous les sénateurs sont libres de voter selon leur bon jugement.
Sénateur Joyal, proposez-vous votre motion?
Le sénateur Joyal : Je propose :
QUE le projet de loi S-4 soit modifié à l'article 1, à la page 2, par substitution,
a) aux lignes 6 et 7, de ce qui suit :
« tion au Canada, du certificat du statut d'Indien... »
La présidente : Non, ce n'est pas cela. Je croyais que vous aviez convenu qu'il serait plus clair de remplacer les lignes 7 et 8 par ce qui suit, et vous me dites si c'est exact : « ou de tout autre document délivré ou paraissant délivré par un ministère ».
Le sénateur Joyal : C'est bien cela. Vous m'excuserez, je n'avais pas la correction sous les yeux.
La présidente : Est-ce l'amendement que vous souhaitez proposer?
Le sénateur Joyal : Absolument. Je propose :
QUE le projet de loi S-4 soit modifié à l'article 1, à la page 2, par substitution,
a) aux lignes 6 et 7, de ce qui suit :
« ou de tout document semblable délivré ou paraissant délivré... »
b) aux lignes 9 à 11, de ce qui suit :
« provincial ou par un gouvernement étranger ».
La présidente : Tous ceux qui sont en faveur de l'amendement?
Des voix : D'accord.
Une voix : Avec dissidence.
La présidente : Adopté avec dissidence.
L'article 1 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Une voix : Avec dissidence.
La présidente : Adopté avec dissidence.
Les sénateurs se rappelleront ce que j'ai dit de l'article 2. Quelqu'un a des amendements à proposer à l'article 2? Comme il n'y a personne, je vais proposer cet amendement. Je crois avoir fait comprendre mon intention. Dans le texte anglais, à l'article 2 tel qu'il est libellé, la disposition 1a) ne fait que reformuler le texte existant pour y ajouter une erreur grammaticale. Toutefois, le paragraphe 1b) apporte des modifications.
Peut-être devrions-nous supprimer le paragraphe 1a). Je pourrais proposer que l'article 130 de la Loi soit modifié par suppression des lignes 20 à 29. L'article 2 du projet de loi serait modifié à la ligne 18 pour qu'il dise :
« L'article 130 de la même loi est remplacé par ce qui suit : »
Est-ce un libellé législatif acceptable? Nous reprendrions ensuite à la ligne 30, au paragraphe 130(2), où on lit, dans la version anglaise :
« Everyone who commits an offence under subsection (1) »
Nous éliminerions les lignes 20 à 29. Est-ce que j'arrive au résultat que je recherche?
Mme Klineberg : Malheureusement, mon exemplaire du projet de loi n'a pas la numérotation. J'ai donc du mal à suivre.
La présidente : Veuillez remettre à Mme Klineberg un exemplaire du projet de loi. Il s'agit de garder l'article 130 tel quel, mais le projet de loi propose le paragraphe 130(2), qui fait intervenir l'élément hybride et ne contient pas d'erreur grammaticale, mais d'éliminer le paragraphe 130(1), qui n'est modifié que par l'ajout d'erreurs grammaticales.
Le sénateur Nolin : Nous allons devoir amender l'introduction du paragraphe 130(1) parce qu'il s'agit d'une infraction hybride. Nous comprenons ce que la présidente veut faire, mais nous devrons prévoir quelque chose.
La présidente : Mme Klineberg a une proposition à faire. La seule idée de devoir expliquer cela à tout le Sénat sans que les sénateurs aient le texte sous les yeux a de quoi faire peur.
Le sénateur Joyal : Ce serait tout un défi à relever.
La présidente : Je crois pouvoir simplifier les choses. Je retire mon projet de motion antérieur.
Je propose :
QUE la version anglaise de l'article 2 soit modifiée, à la ligne 21, pour se lire ainsi :
(a) falsely represents himself to be a;
et à la ligne 26, pour se lire ainsi :
« persons to believe that he is a peace »
D'accord? C'est acceptable. La greffière en a bien pris note. Débat?
Le sénateur Joyal : Pourquoi ne pas employer le terme « oneself »?
La présidente : Je veux simplement reprendre le libellé original du Code criminel, qui dit « falsely represents himself ».
Le sénateur Joyal : Le mot « oneself » s'utilise pour les deux sexes.
La présidente : C'est une question de simplicité, et c'est pour faire avancer ce travail. Chers collègues vous avez été très obligeants envers moi. D'autres interventions sur cette question?
Tous sont en faveur?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 2 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 3 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 4 est-il adopté?
Le sénateur Joyal : J'ai un amendement à proposer pour donner suite à une recommandation que nous ont faite les deux témoins de Visa et de MasterCard. Selon eux, les mots « notamment un numéro d'identification personnel » sont limités. Il faudrait tenir compte de tous les renseignements identificateurs qui figurent sur la carte.
L'amendement vise à substituer ce qui suit au passage « notamment un numéro d'identification personnel » : « notamment un authentifiant personnel ».
Une précision : les mots « authentifiant personnel » sont définis comme « un numéro d'identification personnel », ce que nous avions déjà, « ou tout autre mot de passe ou renseignement électronique créé ou adopté par le titulaire d'une carte de crédit qui sert à confirmer l'identité du titulaire à l'égard de sa carte de crédit ».
Il me semble logique, pour ce qui est de cette infraction, de tenir compte d'une information beaucoup plus large qu'un simple numéro.
Mme Klineberg : Une seule réflexion. Je me demande si cela n'est pas trop étroit, en ce sens qu'il s'agit seulement d'un mot de passe ou de renseignements électroniques. Il y un type d'information qui, je crois, risque d'être utilisé bientôt, et ce sont les données biométriques, une empreinte du pouce, et cetera. Je crains que le libellé proposé n'exclue les données biométriques.
Le sénateur Joyal : Nous pourrions donc dire « tout autre mot de passe, ou renseignement électronique ou biométrique ».
Mme Klineberg : Selon moi, vous pourriez supprimer le mot « électronique » et dire simplement « mot de passe ou renseignement ».
Le sénateur Joyal : Si vous estimez que cela peut faire l'affaire, je serais d'accord.
La présidente : Sénateur Wallace, avez-vous eu la possibilité de réfléchir?
Le sénateur Wallace : Je n'ai rien à ajouter aux observations de Mme Klineberg.
Le sénateur Angus : Êtes-vous d'accord pour retirer le mot « électronique »?
La présidente : Je crois que le sénateur Joyal a donné son accord. Il va devoir lire le texte à haute voix.
[Français]
Le sénateur Joyal va lire son amendement, mais je pense qu'il a accepté la proposition de Mme Klineberg.
[Traduction]
Le sénateur Joyal : Oui, tout à fait; je crois que cela correspond à notre intention.
La présidente : Voulez-vous présenter votre motion, sénateur Joyal?
Le sénateur Joyal : Oui.
Je propose :
QUE le projet de loi S-4 soit modifié à l'article 4, à la page 3 :
a) par substitution, à la ligne 25, de ce qui suit :
« 4. (1) Le passage du paragraphe 342(3) de la »;
b) par substitution, aux lignes 31 et 32, de ce qui suit :
« une carte de crédit, notamment un authentifiant personnel, qui permettrait »;
c) par adjonction, après la ligne 36, de ce qui suit :
« (2) Le paragraphe 342(4) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
(4) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article :
« authentifiant personnel » Numéro d'identification personnel ou tout autre mot de passe ou renseignement créé ou adopté par le titulaire d'une carte de crédit qui sert à confirmer l'identité du titulaire à l'égard de sa carte de crédit.
« trafic » S'entend, relativement à une carte de crédit ou aux données afférentes, de la vente, de l'exportation du Canada, de l'importation au Canada ou de la distribution, ou de tout autre mode de disposition. ».
[Français]
La présidente : Vous plaît-il honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
La présidente : Adopté.
[Traduction]
La présidente : L'article 4 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 5 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 6 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 7 est-il adopté?
Le sénateur Joyal : Avec dissidence. Je vais être bien franc avec mes collègues. Je ne suis pas persuadé que nous devrions assujettir les agents de la paix et d'autres personnes au même système. Je songe aux personnes qui, dans le cours normal de leur travail, doivent s'occuper de questions de fausse identité et de faux documents. Je ne sais pas si nous devrions les soumettre au système que nous avons mis en place il y a quelques années lorsque nous avons examiné la question de permettre aux policiers de commettre des crimes.
Plus tard, je vais consulter à ce sujet mes collègues ici présents. Je me réserve le droit de présenter des amendements à l'étape de la troisième lecture.
La présidente : Je signale une chose avant de passer au vote. Il me semble que, lorsque je présenterai le rapport, je devrai en parler, étant donné que nous amendons le projet de loi. Je me préparais à dire dans cette intervention que les membres du comité présenteraient peut-être d'autres amendements à la lumière de nouveaux renseignements.
Nous n'avons pas entendu le point de vue de l'Association canadienne du Barreau, mais si elle nous le fait connaître et si un membre du comité le trouve convaincant, il pourra toujours proposer des amendements au moment de la troisième lecture.
C'est plutôt inhabituel de dire, en faisant rapport du projet de loi, que nous aurons peut-être d'autres amendements à présenter. Néanmoins, je crois que cela conviendrait dans ce cas-ci. Si mes collègues le souhaitent, je pourrais signaler plus expressément l'article 7, parmi ceux qui peuvent [...]
Le sénateur Nolin : Et l'article 9.
La présidente : Et l'article 9.
Le sénateur Joyal : L'article 9, bien entendu, est sujet à discussion.
La présidente : Cela dit, l'article 7 est-il adopté?
Le sénateur Joyal : Avec dissidence.
La présidente : Avec dissidence.
L'article 8 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : D'accord.
L'article 9 est-il adopté?
Le sénateur Joyal : Je réitère les observations que j'ai faites à propos de l'article 7. L'article 9 pourrait faire l'objet d'un amendement à la troisième lecture si, après consultation et une étude plus poussée, nous concluons qu'il y a lieu d'assujettir les forces policières à un régime de contrôle interne pour l'utilisation de cet article du Code criminel.
La présidente : Je répète ma question : l'article 9 est-il adopté?
Le sénateur Joyal : Avec dissidence.
La présidente : Avec dissidence.
Je présume que seulement un sénateur a dit « avec dissidence ». Si tout le monde le dit, nous avons un problème.
L'article 10 est-il adopté?
Le sénateur Banks : Je ne suis pas membre du comité. Je le suis aujourd'hui, mais pas normalement.
La présidente : Aujourd'hui, vous l'êtes.
Le sénateur Banks : Je serais parfaitement satisfait de faire ma proposition à la troisième lecture, si vous le préférez. Quoi qu'il en soit, l'amendement porterait sur la ligne 41, à la page 6 : « de tout renseignement — y compris [...] ». Je voudrais ajouter les mots « connu ou non », après quoi on poursuivrait : « — y compris un renseignement biologique [...] ».
À la deuxième ligne de la page suivante : « pour identifier ou pour viser à identifier une personne physique, notamment empreinte digitale ou vocale [...] » et cetera.
En plus de cela, madame la présidente, je voudrais proposer un amendement, mais je ne sais pas trop où il serait inséré. Probablement à la première page, sous la rubrique Documents officiels, parce qu'il est question de fiacres de la poste, de télex et de télégrammes. Le projet de loi devrait dire quelque part que :
[...] aux fins de la présente loi, « document » s'entend de tout instrument ou dispositif, connu ou non, délivré ou paraissant délivré par le gouvernement fédéral, un gouvernement provincial ou un gouvernement étranger aux fins d'établir ou de prouver l'identité personnelle.
La présidente : Sénateur Banks, votre utilisation de l'expression « connu ou non » nécessite peut-être des conseils juridiques. J'ignore si les fonctionnaires sont en mesure de donner ces conseils tout de suite. Sinon, je propose que vous interveniez à l'étape de la troisième lecture.
Le sénateur Banks : Je me ferai un plaisir de proposer mon amendement à la troisième lecture.
Mme Klineberg : Une réflexion me vient immédiatement à l'esprit : la loi sera interprétée le jour où elle sera appliquée. Par conséquent, la technologie devra alors être connue, même si elle nous est inconnue maintenant.
Je comprends où vous voulez en venir, mais cela semble davantage un principe qui serait énoncé en marge du projet de loi plutôt que dans son texte. Lorsqu'on applique une mesure législative, il est évident qu'on le fait à l'égard d'une technologie qui doit être connue, puisqu'il y a des poursuites à son sujet.
Il y a là une sorte de déplacement dans le temps que j'ai du mal à bien saisir, mais il me semble qu'une expression comme celle-là ne peut jamais avoir de sens parce que, le jour où la question se pose, il faut être au courant de la technologie.
Le sénateur Banks : Je vais aborder la question d'une autre manière.
Le sénateur Nolin : Nous pourrions nous servir de l'analogie avec des crimes définis au moment de l'élaboration du Code criminel, mais commis avec la technologie d'aujourd'hui.
Le sénateur Banks : Je vais régler le problème et intervenir à la troisième lecture.
La présidente : Nous en étions à l'article 10, je crois.
L'article 10 est-il adopté?
Le sénateur Banks : Dans vos observations, auriez-vous l'obligeance de signaler, comme vous l'avez déjà fait, la probabilité que [...]
Le sénateur Nolin : Avec dissidence.
La présidente : L'article est adopté avec dissidence.
L'article 11 est-il adopté?
Le sénateur Joyal : J'ai un amendement à proposer à mes collègues au sujet de cet article. Si la greffière pouvait distribuer le texte.
Pendant qu'on distribue le texte, je vais expliquer l'objet de l'amendement. Ce n'est pas une initiative nouvelle que je propose là. Je me tourne également vers le sénateur Wallace. J'espère que vous siégerez à ce comité pendant les cinq prochaines années.
La présidente : Plus de huit, nous l'espérons.
Le sénateur Wallace : Je vais en tirer pleinement parti.
Le sénateur Joyal : Essentiellement, nous définissions de nouvelles infractions dans un domaine important, où nous savons que la technologie de l'information se développe rapidement.
Il est proposé dans l'amendement de demander à un comité des Communes ou du Sénat, ou peut-être des deux, d'examiner la loi au bout de cinq ans. Comme vous le savez, c'est ce que nous sommes en train de faire dans le cas des empreintes génétiques. Nous avons pris les mêmes dispositions pour d'autres lois du Parlement dont il nous semble utile de faire un nouvel examen.
Nous pourrions profiter de l'occasion pour recommander des rajustements des articles du Code criminel en fonction de nouveaux besoins, de l'expérience acquise et des enseignements tirés par les forces policières et le ministère.
Voilà pourquoi je propose que, après cinq ans, nous réexaminions ces dispositions. Si je dis « nous », c'est pour englober l'autre endroit. Il faudrait que les deux Chambres aient la possibilité d'examiner l'application de ces articles.
La présidente : C'est le libellé habituel.
Le sénateur Joyal : Exactement. J'ajouterais simplement « Dans les cinq ans ».
La présidente : Sénateur Joyal, en toute rigueur, vous proposez un nouvel article : l'article 11.1. Puis-je proposer que nous en terminions avec l'article 11, pour nous intéresser ensuite à votre proposition de nouvel article?
Le sénateur Joyal : D'accord.
La présidente : L'article 11 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Joyal : Je propose :
QUE le projet de loi S-4 soit modifié à la page 9, par adjonction, après la ligne 19, de ce qui suit
« EXAMEN
11.1 Dans les cinq ans qui suivent la sanction de la présente loi, un examen approfondi des dispositions et de l'application de la présente loi doit être fait par le comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte, que le Parlement ou la Chambre en question, selon le cas, désigne ou constitue à cette fin. ».
La présidente : Débat?
Le sénateur Banks : Sénateur Joyal, seriez-vous satisfait que votre amendement devienne l'article 12 et que, à l'entrée en vigueur, il devienne l'article 13?
Le sénateur Joyal : Absolument pas. Ce pourrait même être plus clair dans le projet de loi. Si on fait un peu de ménage dans le Code criminel au bout de cinq ans, il serait plus facile de supprimer cet article, simplement. Comme vous le savez, les articles qui ont perdu leur raison d'être sont éliminés.
La présidente : S'agit-il d'un sous-amendement?
Le sénateur Joyal : Il pourrait devenir l'article 12.
Le sénateur Bryden : Le texte dit : « [...] l'application de la présente loi doit être fait par le comité soit du Sénat [...] ». Je crois qu'il faudrait plutôt dire : « [...] un comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte, que le Parlement ou la Chambre en question, selon le cas, désigne [...] »
La présidente : Sauf erreur, c'est le libellé habituel. Nous l'avons employé plusieurs fois.
Le sénateur Bryden : Quel est « le comité »?
Le sénateur Joyal : C'est le comité désigné...
La présidente : ... par le Sénat ou la Chambre des communes.
Le sénateur Banks : Il se pourrait que ce ne soit pas ce comité-ci. Le Comité du Règlement envisage de réaménager les comités. Il se pourrait donc que ce ne soit pas celui-ci.
Le sénateur Joyal : Il pourrait s'agir d'un comité spécial mis sur pied par la Chambre en cause pour examiner un certain nombre de dispositions du Code criminel en même temps. Voilà pourquoi il est préférable de conserver la formulation la plus ouverte possible.
M. Kilkie : Exactement le même texte a été utilisé dans le projet de loi C-24, en ce qui concerne les articles 25.1 à 25.4, et le projet de loi C-36, pour la Loi antiterroriste.
Mme Klineberg : Pour ce qui est du libellé, le projet de loi est différent du C-36 ou du C-24, car il prévoit de nouvelles infractions, qui sont l'axe principal du projet de loi, mais il y a également d'autres dispositions qui apportent des modifications de forme à des infractions déjà prévues dans le Code criminel.
Je vous invite à réfléchir à une question : voulez-vous que la question soit précisée non pas, peut-être, dans cette motion, mais lorsque le moment sera venu? Il n'est pas évident de faire un examen complet de dispositions qui ont été seulement rafistolées, si vous voyez ce que je veux dire.
La présidente : Il est plus facile, à notre point de vue, de considérer un horizon de cinq ans, et de dire que tout l'ensemble [...]
Comme le sénateur Nolin le souligne avec raison, le Sénat et la Chambre des communes peuvent limiter le mandat s'ils le souhaitent, ou le comité peut être très sélectif dans l'étude des divers éléments. Nous ne souhaiterions peut-être pas revoir le problème de grammaire que présente l'emploi des termes « anyone » et « themselves », par exemple.
Le sénateur Joyal : Comme je l'ai dit, pour définir un mandat, nous menons normalement des consultations, si nous voulons revoir d'autres dispositions du Code criminel. Il me semble simplement normal d'appliquer ce genre de définition du « mandat ».
Le sénateur Wallace : Dans les faits, lorsque je pense à cet amendement, il me semble certainement logique que rien ne reste statique et que nous réexaminions les lois pour voir si elles conviennent toujours au fur et à mesure que le temps passe.
Je me demande cependant si, dans les usages du comité, il y a des critères qui s'appliquent pour décider quand nous devons recourir à ces dispositions qui prévoient un examen. La même logique s'applique probablement à tous les projets de loi que nous adoptons au comité et au Sénat. De toute évidence, tout doit être revu à un moment où l'autre.
Sommes-nous guidés par des critères pour décider quand il faut prévoir un examen au bout d'une certaine période? Les observations de Mme Klineberg mettent certainement ce point en lumière. Il ne s'agit pas de revoir une loi de bout en bout, mais seulement une partie d'une loi. Nous proposons que cette partie soit réexaminée.
Y a-t-il des critères que nous appliquons ou devrions appliquer lorsqu'il s'agit d'ajouter des dispositions prévoyant un examen au bout d'une certaine période?
La présidente : Il appartient à chaque comité d'établir ses critères, à moins qu'on ne veuille modifier le Règlement du Sénat. Si vous voulez faire cela, sénateur Wallace, ce sera le panier de crabes.
Dans ce cas particulier, celui du projet de loi à l'étude, il vaut probablement la peine de signaler que plusieurs témoins ont dit... Hier soir encore, par exemple, l'Association des banquiers a dit : nous ne savons pas très bien comment cela se passera dans les faits, mais nous tenons à ce projet de loi, même si nous ne savons pas très bien ce qu'il donnera. Voilà qui sort de l'ordinaire. D'après mon expérience, il n'arrive pas souvent que les témoins soient aussi directs.
Le sénateur Joyal : Si je comprends les précédents — nous sommes en régime de common law, au moins en ce qui concerne le Code criminel et le droit civil — il est normal de prévoir ce genre d'examen lorsque nous nous aventurons dans un nouveau domaine, comme nous l'avons fait pour les empreintes génétiques. C'était alors un domaine tout nouveau, et nous savions que la technologie allait évoluer. Nous savions qu'il y aurait de nouvelles découvertes qui modifieraient les perspectives en ce qui concerne les infractions que nous propositions de prendre en considération. C'est pourquoi nous avons amorcé cet examen il y a quelques mois. Cela me semble normal.
Nous formulons des recommandations pour adapter le système à de nouveaux besoins, et je crois que cela aide le gouvernement à proposer des lois qui actualisent le Code criminel au lieu d'attendre qu'il y ait des pressions, par exemple de l'opinion publique.
C'est notre rôle, selon moi, lorsque nous nous aventurons dans un domaine nouveau, de prévoir les moyens de réévaluer l'impact de ce que nous avons fait. Nous avons de bonnes intentions. Nous essayons de nous rapprocher le plus possible d'une saine politique en matière pénale, mais, au bout d'un certain temps, il est bon que le Sénat fasse ce genre d'examen. Cela fait partie de ce qu'il peut faire.
La plupart du temps, on s'aperçoit que les sénateurs qui font l'examen sont pour la plupart ceux qui ont adopté le projet de loi. En d'autres termes, il existe une mémoire institutionnelle. Il est plus facile pour nous de faire ce travail. Comme je l'ai dit, vous avez de l'avenir parmi nous, et donc...
Le sénateur Wallace : Merci. Ne vous méprenez pas sur ce que j'ai dit. Je reconnais tout à fait la nécessité de ces examens. Je voulais simplement savoir pour ma propre gouverne quels critères s'appliquaient. Ce que vous avez dit est logique, et je vous remercie.
Le sénateur Nolin : Vous constaterez que, naturellement, les avocats demandent aux tribunaux d'interpréter les dispositions. Il est donc bon de fixer une date ultérieure pour attendre que les tribunaux aient l'occasion de se prononcer. Notre examen viendra ensuite. Si tout fonctionne à merveille, tant mieux, mais nous constatons parfois que ce n'est pas le cas.
Le sénateur Joyal : Les exemples sont nombreux. Revenons rapidement à celui des empreintes génétiques. Notre collègue, le sénateur Baker, a signalé une décision de la Cour suprême de l'Ontario au sujet de la destruction des échantillons, si vous vous souvenez. Nous venions de discuter de la question. Si nous n'avons pas la possibilité de réévaluer l'interprétation judiciaire de la loi ou l'interprétation que le système fait de son rôle — dans le cas de la destruction, il s'agissait plus du système que des tribunaux en soi, car la Cour avait ordonné la destruction —, il est très utile de voir ultérieurement comment il est possible d'améliorer la loi à cet égard.
Le comité a la possibilité de se faire signaler les précédents institutionnels par les sénateurs Banks et Baker, qui suivent au quotidien les décisions judiciaires. Il est utile de garder le sénateur Baker comme membre du comité lorsque nous faisons les examens, d'autant plus qu'il est ici aujourd'hui.
La présidente : Le sénateur Baker est notre système Quicklaw à nous.
Nous sommes saisis d'un sous-amendement proposé par le sénateur Banks : que l'amendement présenté par le sénateur Joyal soit amendé de nouveau pour que le nouvel article porte le numéro 12, les articles suivants étant renumérotés en conséquence. Est-ce d'accord?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le sous-amendement est adopté. L'amendement est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Adopté. L'article 11 modifié — il s'agit maintenant de l'article 12... L'article 12 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Adopté. L'article 13 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Banks : À titre d'information — mes collègues vous diront que je pose toujours cette question sur l'entrée en vigueur —, pourquoi le projet de loi n'entrera-t-il pas en vigueur le jour de la sanction royale?
Mme Klineberg : Nous prévoyons une certaine latitude pour voir discuter avec les provinces au préalable et leur donner le temps de se préparer à la mise en vigueur de la loi.
Le sénateur Banks : Merci.
La présidente : L'article 13 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le titre est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Adopté. Le projet de moi modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Nolin : Avec dissidence.
La présidente : Avec dissidence.
Le comité souhaite-t-il examiner la possibilité d'ajouter des observations au rapport?
Le sénateur Banks : Non.
La présidente : On ne semble pas le souhaiter. Est-ce d'accord pour que je fasse rapport au Sénat du projet de loi modifié?
Des voix : D'accord.
La présidente : Merci beaucoup, chers collègues. Voilà qui termine notre étude du projet de loi S-4. Je m'engage à rendre compte de nos discussions lorsque je présenterai le rapport au Sénat.
Nous passons maintenant à l'étude article par article du projet de loi S-205, Loi modifiant le Code criminel (attentats suicides). Je crois que vous avez tous reçu la copie de la lettre, dans les deux langues officielles, du légiste et conseiller parlementaire au Sénat confirmant que ce projet de loi à l'étude est, sur le fond, identique au projet de loi S- 205 de la dernière session et au projet de loi S-210 de la deuxième session de la 39e législature. Il est identique, à l'exception des modifications nécessaires pour les numéros de session, les dates et d'autres détails analogues, au projet de loi que le comité a étudié et adopté au cours de la dernière législature.
Par conséquent, chers collègues, vous plaît-il de passer à l'étude article par article du projet de loi S-205?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le titre est-il reporté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 1 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le titre est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le projet de loi est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Une voix : Avec dissidence.
Le sénateur Banks : Avec dissidence?
La présidente : Avec dissidence.
Le sénateur Wallace : Le processus ne m'est pas familier. J'espère que je n'ai pas laissé passer l'occasion, mais j'ai deux amendements à proposer.
La présidente : Vous souhaitez rouvrir l'article 1?
Le sénateur Wallace : Effectivement.
La présidente : Plaît-il au comité de rouvrir l'article 1?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 1 est rouvert.
Le sénateur Wallace : Merci beaucoup.
La présidente : Avez-vous des copies de l'amendement à distribuer aux membres du comité?
Le sénateur Wallace : Oui, j'en ai.
Je propose une motion tendant à modifier l'article 1 du projet de loi S-205 dans sa forme actuelle pour préciser que la définition d'» activité terroriste » contenue aux alinéas 83.01(1)a) et b) du Code criminel englobe « les attentats suicides seulement lorsqu'ils sont commis dans le contexte d'une activité terroriste ».
Cet amendement rendrait plus clair le texte actuel du projet de loi S-205 et ferait en sorte qu'il ne soit ni trop général ni trop vague, mais atteigne le but visé. L'amendement proposé vise la précision maximale dans ce qui constitue un attentat suicide à englober dans la définition d'activité terroriste et il évitera que des attentats suicides non liés à l'activité terroriste ne soient englobés dans la définition.
La présidente : Discussion?
Le sénateur Banks : Pouvez-vous donner un exemple d'attentat suicide qui ne serait pas un acte terroriste?
Le sénateur Wallace : Il pourrait s'agir d'une personne qui est dans un état d'esprit tel qu'il veut simplement commettre ce genre d'acte. Ce pourrait être un acte isolé sans lien avec le terrorisme. Ce serait la conséquence de la maladie mentale.
La présidente : Vous voulez dire qu'une personne se ferait sauter avec son beau-frère, par exemple.
Le sénateur Wallace : Ce pourrait être ce genre de chose. Il faut s'assurer qu'il y a un lien avec le terrorisme.
Le sénateur Grafstein : Je n'ai pas d'objection contre l'amendement.
La présidente : Vous n'avez pas d'objection. Voilà une observation très éclairante.
Le sénateur Wallace a donc donné lecture de son amendement, je crois. Vous le faisiez lorsque je vous ai interrompu.
D'autres interventions? L'amendement est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 1 modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Wallace : J'ai également un autre amendement, si je peux me permettre.
La présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, de rouvrir l'article 1?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Wallace : Merci de votre indulgence.
La présidente : Non, cette fois, c'est moi qui me suis précipitée. Je suis désolée, sénateur Wallace.
Le sénateur Wallace : Je voudrais proposer un deuxième amendement au comité. Il s'agit cette fois de l'entrée en vigueur du projet de loi S-205. Selon le libellé actuel, le projet de loi S-205 entrera en vigueur au moment de la sanction royale. Je voudrais proposer une motion et ajouter un nouvel article 2 disant que le projet de loi entrera en vigueur à une date fixée par décret. Cet amendement donnera le maximum de latitude et ménagera une période pour prévenir les provinces avant l'entrée en vigueur du projet de loi. En outre, l'adoption de l'article 2 proposé donnerait aussi du temps pour faire participer les Canadiens à un dialogue sur le contexte qui sous-tend le projet de loi avant son entrée en vigueur.
Encore une fois, excusez-moi. J'aurais dû faire circuler le texte plus tôt.
La présidente : Pendant qu'on distribue le texte, pourriez-vous en donner lecture, s'il vous plaît?
Le sénateur Wallace : Oui.
QUE le projet de loi S-205 soit modifié par adjonction, après la ligne 9, de ce qui suit :
« 2. La présente loi entre en vigueur à la date fixée par décret. »
La présidente : Avant de lire le texte en français, je demande au comité de rouvrir l'article 1. Comme votre amendement crée un nouvel article, je vais le mettre de côté pendant que je demande au comité, une fois de plus, si l'article 1, modifié par votre premier amendement, est adopté.
Des voix : D'accord.
La présidente : Le sénateur Wallace propose que le projet de loi S-205 soit modifié par l'adjonction d'un nouvel article...
[Français]
En français :
Que le projet de loi S-205, à l'article 1, soit modifié par substitution, aux lignes 8 et 9, page 1, de ce qui suit :
est un acte visé aux alinéas a) ou b) de la définition de « « activité terroriste » », au paragraphe (1) s'il répond aux critères prévus à l'alinéa en cause.
[Traduction]
D'autres interventions?
Le sénateur Grafstein : Aucune objection. Et je tiens à remercier le gouvernement. .
La présidente : L'amendement est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le titre est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le projet de loi modifié est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le comité souhaite-t-il ajouter des observations au rapport?
Des voix : Non.
La présidente : Est-il convenu que je ferai rapport au Sénat du projet de loi modifié?
Des voix : D'accord.
La présidente : Félicitations, sénateur Grafstein.
Le sénateur Grafstein : Une demi-décennie de travail, et il est terminé en partie. Merci beaucoup. Merci beaucoup à tous de leur patience et de leur soutien.
La présidente : Chers collègues, voilà qui met fin à nos délibérations d'aujourd'hui. Notre prochaine séance aura lieu mercredi, dans cette même salle, à 16 heures ou lorsque le Sénat lèvera la séance.
(La séance est levée.)