Aller au contenu
 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 17 - Annexe 5900-2.40/L1-C-15, 17 « 4 »


Annexe 5900-2.40/L1-C-15, 17 « 4 »

The Criminal Justice Policy Foundation

8730 Georgia Avenue, bureau 400
Silver Spring, MD 20910-3649
Tél. : (301) 589-6020, téléc. : (301) 589-5056
www.cjpf.org

Eric E. Sterling, président

SOMMAIRE DU MÉMOIRE DE

ERIC E. STERLING
PRÉSIDENT DE LA CRIMINAL JUSTICE POLICY FOUNDATION

PRÉSENTÉ AU

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES
SÉNAT DU CANADA

L’HON. JOAN FRASER, PRÉSIDENTE

CONCERNANT LE

PROJET DE LOI C-15, LOI MODIFIANT LA LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES

LE 28 OCTOBRE 2009

A. Les peines minimales obligatoires :

1. Sont dénigrantes pour les juges du Canada et les poursuivants.

2. Mènent à des peines injustes.

3. Ont mené à de pharamineuses dépenses imprévues pour l’incarcération aux États-Unis.

4. Sont inefficaces aux plans de la réduction de l’offre de stupéfiants et de la protection des jeunes.

5. Sont contre-productives quant aux changements qu’elles induisent dans le comportement des trafiquants.

B. Les tribunaux de traitement de la toxicomanie :

1. Ces tribunaux sont efficaces, mais ils sont très coûteux et inefficients.

2. Ces tribunaux ne peuvent jamais constituer une méthode modulable de contrôle de la consommation de stupéfiants chez les délinquants.

3. Les délinquants violents ne devraient pas être exclus de ces tribunaux.

4. Il ne devrait pas être du ressort du poursuivant de déterminer qui peut avoir accès ou non au tribunal de traitement de la toxicomanie.

5. Une solution de rechange moins onéreuse et modulable est le programme H.O.P.E. à Honolulu (Hawaii).

6. L’extension des tribunaux de traitement de la toxicomanie ne devrait pas remplacer l’extension des traitements offerts aux indigents.

C. Pourquoi augmenter les peines punissant les infractions liées au cannabis?

1. Le cannabis ne semble pas être une drogue d’introduction au Canada.

2. La consommation de cannabis ne semble pas causer beaucoup de dommages sociaux au Canada.

3. Le cannabis est beaucoup moins accoutumant que bon nombre d’autres stupéfiants.

4. Les principes qui justifient que l’État punisse les comportements répréhensibles ne justifient pas de punir la consommation de cannabis.

D. Protéger la sécurité publique plutôt que de céder aux craintes de la population.

1. La population a le droit de vivre sans avoir à craindre la criminalité.

2. Nos cultures sont obsédées par la criminalité, et les médias d’information exagèrent la fréquence de la criminalité.

3. Il arrive que les médias d’information exagèrent les ratés du système de justice.

4. Le Parlement ne devrait pas prendre des mesures purement symboliques, mais devrait plutôt appuyer des stratégies efficaces de lutte contre la criminalité.

 

The Criminal Justice Policy Foundation

8730 Georgia Avenue, bureau 400
Silver Spring, MD 20910-3649
Tél. : (301) 589-6020, téléc. : (301) 589-5056
www.cjpf.org

Eric E. Sterling, président esterling@cjpf.org, cellulaire : (202) 365-2420

MÉMOIRE DE

ERIC E. STERLING
PRÉSIDENT DE LA CRIMINAL JUSTICE POLICY FOUNDATION

PRÉSENTÉ AU

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES
SÉNAT DU CANADA

HON. JOAN FRASER, PRÉSIDENTE

CONCERNANT LE

PROJET DE LOI C-15, LOI MODIFIANT LA LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES

LE 28 OCTOBRE 2009

 

Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de me donner la possibilité de témoigner au sujet du projet de loi C-15. Je m’appelle Eric E. Sterling; je suis le président de la Criminal Justice Policy Foundation, de Silver Spring, au Maryland.

Le présent mémoire traite des peines minimales obligatoires, des tribunaux de traitement de la toxicomanie, de la poursuite d’infractions reliées au cannabis et de la dynamique politique de la criminalité.

 

A. LES PEINES MINIMALES OBLIGATOIRES

Les peines minimales obligatoires ont un air de déjà-vu

Le Comité examine aujourd’hui un projet de loi qui vise à créer des peines minimales obligatoires pour diverses infractions aux lois canadiennes en matière de drogues et à étendre le programme judiciaire de traitement de la toxicomanie.

Tout cela a pour moi un petit air de déjà-vu. En 1986, j’étais avocat auprès du Sous-comité de la criminalité, du Comité des affaires judiciaires de la Chambre des représentants des États-Unis. Au cours des six années précédentes, j’avais été chargé de surveiller l’application des lois fédérales en matière de drogues ainsi que les questions connexes pour le Comité des affaires judiciaires de la Chambre. Au cours de l’été de 1986, le Congrès des États-Unis a adopté à la hâte une loi sur les peines minimales obligatoires que j’avais aidé à rédiger, et cette loi est devenue une des lois du Congrès les plus honnies ces dernières années.

Votre travail diffère profondément de cette expérience sur deux aspects importants, et je tiens à vous en féliciter. Premièrement, je vous félicite d’examiner très soigneusement ce projet de loi. En 1986, nous avons agi avec beaucoup de hâte, et nous n’avons tenu aucune audience. Nous n’avons pas entendu de représentants du gouvernement, de la magistrature, ni de parties intéressées ou d’experts en matière de justice pénale. Nous avons rédigé le projet de loi en trois jours dans une atmosphère politique un peu frénétique. Deux principales raisons ont poussé à l’adoption de cette loi antidrogue : premièrement, il fallait faire quelque chose à la suite de la mort d’un athlète extrêmement connu, Len Bias, l’étoile du basketball du Maryland, qui avait eu une attaque après avoir prisé de la cocaïne le soir où il avait été recruté par contrat par l’équipe de basketball professionnelle qui avait gagné le championnat, les Celtics de Boston. Cette mort avait profondément choqué la population. Deuxièmement, la direction du Parti démocratique pensait qu’une initiative antidrogue de la part du Parti démocratique lui permettrait de gagner les élections du mois de novembre, soit quelques mois plus tard. Notre élaboration hâtive de peines minimales obligatoires dans les affaires de drogue était le résultat d’une manœuvre du Parti républicain au cours des derniers jours précédant l’ajournement visant à embarrasser les démocrates en les faisant paraître trop indulgents. Les peines minimales obligatoires dans les affaires de drogue de compétence fédérale aux États-Unis n’ont été le résultat d’aucun examen soigneux ni d’aucune conclusion concernant la nocivité de différentes drogues, les effets dissuasifs de différentes peines ou la peine que méritent les infractions liées à la drogue.

En 1988, encore une fois à la fin d’une session et dans le cadre d’un échéancier serré, le Congrès a tenté de restaurer le climat politique et de tirer à nouveau avantagede l’adoption flamboyante de mesures législatives contre la menace que représentait la drogue. J’avais été satisfait pendant une bonne part de mes neuf années de travailler comme conseiller du Comité des affaires judiciaires de la Chambre des représentants sur des questions complexes comme le contrôle des armes à feu, la pornographie, le blanchiment d’argent, le crime organisé, les incendies criminels et l’aide militaire à l’exécution de la loi et à la lutte contre le trafic de stupéfiants. Mais cette satisfaction a cédé le pas à ma déception devant la manière de plus en plus cavalière, voire téméraire, avec laquelle le Congrès légiférait. Au cours des vingt dernières années, j’ai eu l’occasion d’enseigner, d’écrire et de conseiller la population au sujet de questions liées à la criminalité et à la justice, et surtout concernant la lutte contre le trafic de stupéfiants. Je suis honoré que le Comité permanent des Affaires juridiques et constitutionnelles m’ait invité à témoigner devant lui aujourd’hui dans le cadre d’un examen très soigneux de ce projet de loi.

Deuxièmement, je vous félicite pour la durée modeste de vos peines minimales obligatoires. Aux États-Unis, nos peines minimales obligatoires sont des peines d’emprisonnement incompressibles de 5, 10, 15, 20 ans ou plus. Vos peines minimales obligatoires d’un, deux ou trois ans ne sont pas aussi déraisonnables que les nôtres.

J’invite néanmoins le Comité à résister à la tentation d’adopter des peines minimales obligatoires et d’adopter une attitude de sévérité à l’égard du problème de la toxicomanie et des crimes liés à la drogue.

Il convient de noter que le Congrès américain semble maintenant délaisser les peines minimales obligatoires sévères et disparates relativement aux infractions liées au crack. Le projet de loi H.R.3245 de la Chambre des représentants intitulé Fairness in Sentencing Act (loi sur l’équité en matière de détermination de la peine) a fait l’objet d’un rapport favorable de la part du Sous-comité de la Chambre sur la criminalité le 29 juillet 2009. Ce mois-ci, le sénateur Richard Durbin (D-Ill.), qui est aussi whip au Sénat, a présenté le projet de loi S.1789 du Sénat, qui vise à restaurer l’équité dans le domaine des peines infligées en rapport avec le crack.

Le « message » qu’envoient les peines obligatoires

Vous avez peut-être entendu des gens soutenir qu’il fallait « envoyer un message ». Peut-être que, dans les débats parlementaires, d’aucuns affirment : « Nous envoyons un message de sévérité » en adoptant cette mesure. Peut-être affirme-t-on : « Cette mesure envoie un message de sévérité propre à dissuader nos jeunes. » Or, ces messages, même s’ils sont exprimés clairement au cours des débats qui se tiennent au Sénat et à la Chambre des communes, sont rarement entendus par les criminels et les criminels potentiels. Les criminels ne lisent pas les comptes rendus de vos débats. Très peu d’entre eux lisent les résumés de vos débats qui sont publiés dans les journaux. Ils écoutent rarement les nouvelles politiques.

Les jeunes, qui pour la plupart étudient, ne lisent pas non plus vos discours ni ne suivent vos débats. Les jeunes qui s’intéressent aux débats parlementaires ne sont certainement pas des jeunes qui risquent de devenir des trafiquants de drogue.

La plupart des criminels savent qu’ils risquent d’aller en prison à cause de ce qu’ils font. Cependant, cette possibilité ne les dissuade pas parce qu’ils ne pensent pas qu’ils se feront prendre.

La plupart des contrevenants ne sont pas des planificateurs à long terme. Ce ne sont pas des analystes prudents du risque. Ils ne calculent pas la différence qu’il peut y avoir entre une peine d’un an, de trois ans ou de 10 ans lorsqu’ils cèdent aux pulsions qui les amènent à commettre des crimes. En règle générale, ils ne pensent pas qu’ils se feront prendre. Ils ne sont peut-être pas très réalistes sur ce point, mais les idées irréalistes font partie de la psychologie des contrevenants. Un bon nombre d’entre eux ont des troubles d’apprentissage, ont un quotient intellectuel peu élevé, ont des troubles émotifs, et sont dépendants des drogues. Ils sont souvent intoxiqués ou veulent désespérément éviter de se sentir malades s’ils doivent se sevrer. Je ne dis pas que les récidivistes ne connaissent pas la procédure pénale, mais le risque de se voir imposer une peine minimale obligatoire n’a pas d’effet dissuasif sur eux.

Il s’agit d’une population qui ne prête pas beaucoup d’attention à vos « messages » et qui ne prête pas attention à la teneur précise de vos lois. En règle générale, ces personnes ne sont pas capables de tirer les conclusions que devrait tirer selon vous une personne raisonnable, et elles ne sont guère capables d’adapter leur comportement à pareil bon jugement. C’est pourquoi vous ne devriez pas perdre votre temps à réfléchir à l’effet que ce message législatif peut avoir sur les consommateurs et les trafiquants de drogue. N’allez pas croire que vous envoyez un message aux criminels.

Soit dit en passant, les criminels à qui vous souhaitez envoyer un message ont appris, dans bien des cas, à faire fi de la loi. Bien souvent, leurs expériences passées du système de justice pénale leur ont appris que les actes répréhensibles ne sont pas sanctionnés. Lorsqu’ils sont mis en probation, par exemple, on ferme souvent les yeux sur le fait qu’ils continuent à consommer de la drogue – même lorsque des analyses d’urine le prouvent. Ils font fi des rendez-vous avec des agents de probation auxquels il leur a été ordonné de se présenter. Lorsque leur probation est ensuite annulée, plusieurs mois après leurs transgressions, ils se sentent victimes d’une injustice aléatoire et arbitraire. Après tout, si l’on a fermé les yeux sur leur consommation de drogue et leurs tests de dépistage de drogues positifs, qu’y a-t-il de juste à leur infliger maintenant une peine sévère? Plus loin, à la page 13, je développerai des arguments en faveur d’une méthode de rechange, appelée H.O.P.E., pour contrôler les contrevenants consommateurs de drogue, qui est plus efficace et beaucoup moins coûteuse que les peines minimales obligatoires.

 

Le message qui est envoyé aux juges canadiens

Réfléchissez un moment au message qu’envoie aux juges canadiens l’adoption de peines minimales obligatoires. Essentiellement, une peine minimale obligatoire imposée par un organisme législatif constitue un vote de « non-confiance » au sujet de l’intelligence et du sens du devoir des juges.

L’adoption de peines minimales obligatoires revient à leur dire ceci :

« Mesdames et Messieurs les juges du Canada, nous estimons que nous ne pouvons pas compter sur vous pour imposer une peine appropriée au criminel que vous venez de déclarer coupable. Mesdames et Messieurs les juges du Canada, nous estimons que nous ne pouvons pas compter sur vous pour apprécier convenablement les éléments de preuve relatifs à la gravité du crime et le casier judiciaire du condamné et pour imposer une peine qui tienne convenablement compte de la gravité de l’infraction et du degré de culpabilité du délinquant qui se trouve devant vous. Mesdames et Messieurs les juges du Canada, nous estimons que nous ne pouvons pas compter sur vous pour tenir compte des impératifs de la sécurité publique lorsque vous imposez une peine. »

Voilà un message particulièrement accablant que le Parlement et la population canadienne enverraient aux juges du Canada; et je pense que vous devriez être bien sûrs que vous voulez envoyer ce message.

Et quel est le message corollaire que l’adoption d’une loi comme celle-ci envoie à la collectivité, aux avocats qui exercent leur profession devant vos tribunaux, aux entreprises qui s’en remettent à vos tribunaux pour résoudre leurs différends, aux policiers qui témoignent devant vos tribunaux et à vos jeunes? N’est-ce pas le message suivant : « Dans le cadre de certaines affaires ordinaires, nous croyons que nos juges n’ont pas assez de jugement pour exercer convenablement le pouvoir discrétionnaire traditionnel des tribunaux afin de parvenir à des résultats justes dans les affaires dont ils sont saisis »? Il s’agit là d’un message terrible à envoyer à la société.

Le message qui est envoyé aux poursuivants

Lorsque vous créez des peines minimales obligatoires qui sont fonction de quantités ou de situations factuelles très générales, vous interpellez un autre auditoire, à qui vous envoyez un autre message. Vous dites aux poursuivants canadiens que vous estimez que vous ne pouvez pas compter sur eux pour convaincre les tribunaux qu’il y a lieu d’imposer une peine plus longue dans tel ou tel cas mais non dans tel ou tel autre. Vous dites aux poursuivants que vous estimez que vous ne pouvez pas compter sur eux pour exercer leur pouvoir discrétionnaire afin de choisir judicieusement les dossiers sur lesquels ils vont concentrer leurs efforts. Vous leur dites que vous estimez que vous ne pouvez pas compter sur eux pour présenter les faits de façon convaincante – c’est-à-dire, qu’ils sont incapables de plaider les causes qu’ils ont été embauchés pour plaider.

Une conséquence probable d’une telle mesure est que dans leur travail quotidien, le défi des poursuivants consistera à faire en sorte que les délinquants visés se voient infliger une peine plus sévère que la peine minimale obligatoire. En fin de compte, cela distraira les poursuivants et les amènera à ne pas consacrer tous les efforts qu’ils devraient à faire condamner à des peines plus sévères les auteurs des crimes plus graves. Cela a été une des pires conséquences de l’expérience dans nos cours fédérales. Dans notre système, les auteurs des crimes les plus graves ont historiquement été jugés par les cours fédérales. Les tribunaux de nos états traitent des millions d’affaires pénales, et plus de 1,5 million d’affaires de drogue chaque année. Les cours fédérales ont traité environ 25 000 affaires de drogue au cours de l’année financière 2008.

Aux États-Unis, les peines minimales obligatoires ont entraîné une grave distorsion dans les priorités en matière d’application de la loi dans les cours fédérales. Les quantités minimales sont devenues les cibles.

Prenez l’application des lois relatives à la cocaïne. D’après le rapport de la Commission de la détermination des peines des États-Unis remis au Congrès en mai 2007, en 2005, 57,1 p. 100 de toutes les poursuites fédérales relatives à la cocaïne concernaient des délinquants de petite envergure et seulement 10,7 p. 100 des criminels endurcis. Ce problème est la principale critique qu'a fait Asa Hutchinson, administrateur de la Drug Enforcement Administration des États-Unis de 2001 à 2003, dans le témoignage qu’il a livré le 29 avril 2009 au Sous-comité de la criminalité et des drogues du Comité sénatorial des affaires judiciaires des États-Unis en plaidant pour une réforme des peines minimales obligatoires reliées au crack.

http://judiciary.senate.gov/pdf/09-047-29HutchinsonTestimony.pdf

Les peines minimales obligatoires envoient le mauvais message.

L’illogisme des peines proposées

La structure de ces peines paraît illogique. D’une part, ces infractions entraînent des peines extrêmement longues – dans bien des cas jusqu’à l’emprisonnement à perpétuité – les plus longues peines prévues par notre droit. D’autre part, la partie minimale obligatoire des peines est relativement brève – des emprisonnements obligatoires d’un, deux ou trois ans. Cette très vaste fourchette de peines pour la même infraction n’est-elle pas plutôt absurde?

Les peines minimales obligatoires sont une mauvaise politique

Injustice

Les peines minimales obligatoires empêchent les juges de tenir compte de tous les faits de l’affaire et les empêchent d’imposer les peines appropriées aux contrevenants de petite envergure, malgré la quantité de drogue en cause. Cela constitue une renonciation à l’individualisation de la justice. Les tribunaux n’ont pas besoin de peines minimales obligatoires pour inciter les toxicomanes à se faire soigner – pratiquement n’importe quelle menace d’incarcération y suffit.

Je ne connais pas l’opinion collective des juges canadiens concernant les peines minimales obligatoires, mais je vous invite à vous renseigner. Aux États-Unis, nos juges s’opposent vivement aux peines minimales obligatoires : Je cite la résolution des juges de district du cinquième circuit des États-Unis (Texas, Louisiane et Mississippi), adoptée à leur conférence de la magistrature du 6 mai 1991, [traduction] « La prolifération des peines obligatoires sape les principes [du système de détermination de la peine] parce que ces peines s’appliquent quel que soit le rôle qu’a joué l’accusé dans la perpétration de l’infraction et sans égard à d’autres facteurs traditionnellement considérés comme pertinents au stade de la détermination de la peine. Ces dispositions pénales débouchent donc souvent sur l’imposition de peines qui sont manifestement injustes. » (non souligné dans l’original)

Les juges du Conseil de la magistrature du septième circuit des États-Unis ont conclu que [traduction] « les peines minimales obligatoires, quelle que soit la façon dont elles sont formulées, ne font pas avancer la cause de la justice et de l’équité. » Les juges ont proposé à l’unanimité d’inviter le Congrès à [traduction] « abroger toutes les lois qui obligent le juge de première instance à imposer une peine minimale obligatoire. » (Cité dans Special Report to Congress: Mandatory Minimum Penalties in the Federal Criminal Justice System, (Rapport spécial au Congrès : les peines minimales obligatoires dans le système de justice pénale fédérale), août 1991, Commission de détermination de la peine des États-Unis, p. G-19).

Que pensent les juges?

Tous les conseils de la magistrature fédéraux ont adopté une résolution demandant au Congrès de revoir les lois sur les peines minimales obligatoires qui ont été adoptées.

J’invite vivement ce Comité à se renseigner sur ce que pensent les juges canadiens du projet de loi C-15 et des peines minimales obligatoires avant l’adoption du projet de loi.

Coût

Les peines minimales obligatoires ont pour but d’imposer des peines plus longues que celles qui sont imposées actuellement. Nous avons complètement sous-estimé les coûts supplémentaires qu’elles entraîneraient. Aux États-Unis, la population carcérale fédérale était de 36 000 détenus lorsque nous avons adopté nos peines minimales obligatoires. Le Bureau du budget du Congrès a examiné le projet de loi, H.R.5394, de la Chambre des représentants et a fait rapport de son évaluation des coûts le 2 septembre 1986,

[traduction] « Le Bureau estime que le projet de loi H.R. 5394 [Narcotics Penalties and Enforcement Act] (Loi sur l’application de la loi relative aux stupéfiants et les pénalités) n’entraînerait pas une augmentation importante du coût des enquêtes et des poursuites du Département de la justice… Ce projet de loi entraînerait une augmentation des coûts assumés par le gouvernement fédéral pour l’incarcération des détenus en raison des dispositions du projet de loi relatives aux peines obligatoires. Le Bureau estime que ces coûts augmenteraient de 1,2 million de dollars pour l’exercice financier 1987, de 3,3 millions de dollars pour l’exercice financier 1988, de 7,3 millions de dollars pour l’exercice financier 1989, de 15,7 millions de dollars pour l’exercice financier 1990 et de 27,7 millions de dollars pour l’exercice financier 1991. Ces coûts continueraient d’augmenter au cours des années suivantes. » (H.Rept. 99-845, Partie 1, p. 24).

En fait, les dépenses correctionnelles fédérales ont rapidement augmenté bien au-delà des montants prévus. Ce qui suit est un état des dépenses correctionnelles réelles du gouvernement fédéral.

Exercice financier Dépenses correctionnelles

1986 862 000 000 $

1987 994 000 000

1988 1 258 000 000

1989 1 418 000 000

1990 1 734 000 000

1991 2 122 000 000

1992 2 646 000 000

1993 2 690 000 000

(Sourcebook of Criminal Justice Statistics, 1996, p. 3)

2010 6 077 000 000 $ (montant demandé)

Nos analystes ont sous-estimé les coûts additionnels de plusieurs milliards de dollars sur quatre ans.

Au 22 octobre 2009, la population carcérale fédérale s’élevait à 208 909. Le nombre de ces détenus qui purgeaient des peines relatives aux drogues était de 100 415. Soixante-et-onze pourcent des détenus fédéraux purgent des peines supérieures à cinq ans.

Je vous exhorte à obtenir une évaluation détaillée des coûts réels qu’entraînera ce projet de loi.

Inefficacité

En 1973, l’État de New York a adopté des peines minimales obligatoires pour les infractions reliées aux drogues. Le Barreau de la ville de New York et le Drug Abuse Council, Inc. ont constitué un comité mixte pour évaluer les peines minimales obligatoires. Ils ont constaté que la loi de 1973 n’avait pas vraiment dissuadé les auteurs d’actes criminels graves de commettre d’autres crimes. (THE NATION'S TOUGHEST DRUG LAW: EVALUATING THE NEW YORK EXPERIENCE, Final Report of The Joint Committee on New York Drug Law Evaluation, 1977, p. 9). Dans sa hâte, le Congrès des États-Unis n’a pas pris en compte ce rapport.

Les peines minimales obligatoires fédérales adoptées en 1986 ont-elles réussi à réduire le trafic de drogues ou à démanteler les organisations faisant le trafic de drogues? Non. Malgré une augmentation considérable du nombre des poursuites et une augmentation considérable de la durée des peines, les jeunes Américains n’ont aucune difficulté à se procurer des drogues d’après notre enquête annuelle de surveillance de la jeunesse (Monitoring the Future Survey).

http://www.drugabuse.gov/PDF/overview2008.pdf

En 2008, 83,9 p. 100 des étudiants de dernière année du secondaire ont déclaré qu’il était « relativement facile » ou « très facile » de se procurer de la marijuana. En 1979, ce chiffre était de 90,1 p. 100. En 1986, il était de 85.2 p. 100. En 1992, il était de 82,7 p. 100, un creux historique. En 1998, il était passé à 90,4 p. 100, un sommet historique. La perception de la facilité à s’en procurer a lentement, mais constamment, diminué depuis.

L’accès au LSD en 2008 était exactement le même qu’il était en 1986, soit à 28,5 p. 100.

L’accès de nos étudiants du secondaire à l’héroïne est plus facile aujourd’hui, se situant à 25,4 p. 100, qu’il ne l’était en 1986, alors que ce pourcentage était de 22,0 p. 100.

L’accès à la cocaïne est clairement plus difficile aujourd’hui, étant tombé à 42,4 p. 100 alors qu’il se situait à 51,5 p. 100 en 1986. Cependant, cela signifie seulement qu’aujourd’hui sur dix étudiants de dernière année du secondaire, quatre affirment pouvoir facilement se procurer de la cocaïne alors qu’il y en avait cinq qui le pensaient l’année où les peines minimales obligatoires ont été adoptées.

Malheureusement, les prix de la cocaïne et de l’héroïne ont sensiblement baissé et la pureté moyenne de la drogue vendue au détail est beaucoup plus élevée. Ce sont là des tendances historiques à long terme, même s’il y a eu des écarts à court terme. La DEA rapporte que le prix de la cocaïne a augmenté récemment, mais cela ne représente pas une tendance à long terme.

Les longues peines minimales obligatoires qui ont été imposées à des centaines de milliers de vendeurs de drogue n’ont eu aucun effet positif mesurable sur le marché de la drogue. Il est pratiquement aussi facile que cela l’a toujours été de se procurer les principales drogues consommées de façon abusive, mais elles sont aujourd’hui de meilleure qualité et coûtent moins cher. Sur ce point, les courbes représentants les variables qualité-prix pour ces drogues ressemblent aux courbes des variables qualité-prix pour les téléphones cellulaires, les ordinateurs personnels, les appareils photos numériques et la plupart des autres produits de consommation de haute technologie et très demandés qui caractérisent l’économie moderne. Cette résistance du marché des drogues aux objectifs déclarés des peines minimales obligatoires est un indicateur de leur inefficacité patente.

Mesure contre-productive

Certains observateurs ont déclaré que les peines minimales obligatoires adoptées par le Congrès en 1986 avaient amené les organisations faisant le trafic des drogues à faire davantage appel à des jeunes pour vendre les drogues illégales. Les trafiquants de drogue se sont adaptés, non pas en renonçant à vendre des drogues, mais en changeant leurs façons de le faire.

Les personnes qui embauchent des jeunes pour vendre des drogues risquent des peines plus fortes si elles sont prises, mais avec l’existence des peines minimales obligatoires généralisées, l’augmentation du risque est négligeable.

Les peines minimales obligatoires rendent plus avantageux le recours à des jeunes pour le responsable d’une organisation de distribution de drogues. Si de jeunes employés sont arrêtés, ils ne seront guère en mesure de fournir des renseignements utilisables pour poursuivre des criminels de haut niveau. Les jeunes contrevenants sont moins fréquemment recrutés comme informateurs, ils sont plus facilement ébranlés lorsqu’ils sont contre-interrogés en cour et ils sont moins exposés à la menace que représente la possibilité de faire l’objet d’une peine minimale obligatoire pour adultes.

Il faut soigneusement considérer la nature des conséquences imprévues lorsqu’on légifère dans ce domaine.

Les peines obligatoires sont-elles justifiées par une tendance générale des tribunaux à être trop cléments?

A-t-on fait une analyse des peines imposées par les juges pour les crimes qui vous préoccupent? Y a-t-il une perception du public selon laquelle les juges sont trop cléments? Si oui, cette perception est-elle confirmée par une analyse de ce que font les juges?

B. LES TRIBUNAUX DE TRAITEMENT DE LA TOXICOMANIE

Les tribunaux de traitement de la toxicomanie sont efficaces

Les tribunaux de traitement de la toxicomanie ont constitué une innovation très utile aux États-Unis. Ils s’attaquent au problème lié au fait que les délinquants toxicomanes qui peuvent être réadaptés ne le sont souvent pas. Ces délinquants sont souvent incarcérés à grands frais, et pourtant leur accoutumance est rarement traitée efficacement, et ils récidivent rapidement. Ou encore, ils sont remis en liberté sous surveillance dans le cadre des régimes conventionnels de probation et de libération conditionnelle, et là encore on omet de les traiter efficacement. Les tribunaux de traitement de la toxicomanie sont des systèmes intensifs de traitement et de probation sous supervision judiciaire. Le juge superviseur supervise habituellement tous les délinquants à une fréquence hebdomadaire. Les audiences hebdomadaires donnent lieu à des consultations auprès d’une équipe qui comprend le poursuivant, l’agent de probation, l’avocat de la défense, des gestionnaires de cas et des spécialistes des traitements. Des études indiquent que les contrevenants qui participent à ces programmes récidivent moins que les contrevenants en probation dans les programmes habituels.

Aux États-Unis, les tribunaux de traitement de la toxicomanie varient énormément. Leur principal aspect est qu’un juge participe directement à la surveillance du contrevenant. Les contrevenants ont accès à divers services de traitement. Le juge suit régulièrement la progression du contrevenant dans son plan de traitement. Le contrevenant sait que sa liberté risque de lui être retirée s’il ne respecte pas les conditions de son programme, parce qu’un juge y participe directement.

Les tribunaux de traitement de la toxicomanie ne constituent pas une méthode adéquate pour prévenir le récidivisme lié à la toxicomanie à grande échelle

La principale limite des tribunaux de traitement de la toxicomanie est une question d’échelle. Le juge qui participe à ces programmes a peut-être un rôle qui comprend de 50 à 75 délinquants pendant six mois ou un an. Dans n’importe quel État, cela ne représente qu’une fraction infime du nombre de contrevenants dépendants des drogues qui sont traduits devant les tribunaux. Même si tous les tribunaux du pays désignaient un juge responsable des tribunaux de traitement de la toxicomanie, l’immense majorité des contrevenants dépendants des drogues n’auraient jamais accès à la surveillance qu’offrent ces programmes judiciaires.

La semaine dernière, le 22 octobre, j’ai assisté à la deuxième séance de graduation cette année au Tribunal de traitement de la toxicomanie pour adultes du comté de Montgomery, au Maryland, un comté d’un million d’habitants, le plus grand ressort de l’État du Maryland. Chaque graduation est une cérémonie élaborée qui se tient dans la plus grande salle d’audience. Y ont assisté plus d’une demi-douzaine de juges, le président du Barreau du comté, des membres du conseil du comté (l’assemblé législative du comté), le procureur de l’État (le procureur en chef) et plusieurs procureurs adjoints, le procureur du citoyen et plusieurs assistants, de nombreux autres fonctionnaires du système de justice pénale dont plusieurs chefs de police, tous les participants actuels du programme judiciaire de traitement de la toxicomanie, certains anciens diplômés, des membres des familles des diplômés, et d’autres.

Quatre participants ont été diplômés au cours de cette cérémonie qui, à elle seule, a monopolisé plus de 100 heures de personnel très dispendieux du système. Au cours des cinq années d’existence du programme, il y a eu moins de 60 diplômés. Le système de justice pénale local est très fier du programme, mais sa modeste envergure est sans commune mesure avec le besoin.

Les délinquants violents ne devraient pas être exclus des tribunaux de traitement de la toxicomanie

Le projet de loi C-15 réserve l’admission au programme judiciaire de traitement de la toxicomanie aux contrevenants qui n’ont pas commis d’infractions avec violence. Cette restriction est ridicule. Les époux batteurs de femmes qui ont un problème de toxicomanie ou d’abus d’alcool ou d’autres drogues devraient-ils être privés des avantages d’un tel programme? Les parents violents d’enfants qui aiment leurs parents mais détestent l’alcoolisme ou la toxicomanie de ces derniers devraient-ils être exclus? Bien sûr que non. L’on devrait vouloir que ces familles guérissent, et le tribunal de traitement de la toxicomanie pourrait s’avérer indiqué dans certains cas.

Dans le cadre du tribunal de traitement de la toxicomanie au Maryland, les personnes qui ont des antécédents de voies de fait et d’autres crimes avec violence sont admis au programme judiciaire de traitement de la toxicomanie. Les tribunaux de traitement de la toxicomanie, avec leur contrôle intensif exercé par un juge, s’avèrent en fait d’excellents programmes pour corriger le comportement des délinquants dont l’inconduite découle d’un abus d’alcool ou d’autres drogues et comporte de la violence.

Les dispositions qui excluent les personnes accusées de crimes avec violence visent à apaiser la crainte politique de ce qu’un programme ne prévoyant pas de châtiment sous forme d’emprisonnement ne soit pas considéré comme assez « sévère ». L’exclusion des auteurs d’infractions avec violence est donc intégrée pour renforcer l’idée politique que ce projet de loi « serre la vis aux criminels ». Ne devrait-on pas pourtant considérer que plus une intervention est efficace, plus il est judicieux de l’appliquer aux délinquants les plus endurcis pour les empêcher de commettre d’autres crimes? Cette restriction ne se fonde sur aucun principe de justice ou principe correctionnel, et elle devrait être éliminée.

Les poursuivants ne devraient pas déterminer qui peut avoir accès ou non au tribunal de traitement de la toxicomanie

Le projet de loi C-15 réserve l’admission à un programme judiciaire de traitement de la toxicomanie aux personnes qui ont obtenu l’approbation du poursuivant. Une telle disposition peut susciter un appui plus large de la part de la population à un programme qui peut être perçu par elle comme ne tenant pas compte de la gravité de l’infraction commise. Il pourrait être toutefois souhaitable que l’acceptation des candidats au programme de traitement de la toxicomanie s’effectue à l’extérieur du bureau des poursuivants, de façon à encourager la prise en compte des aspects psychologiques et reliés au counselling susceptibles d’augmenter les chances de succès dans le programme. Le tribunal typique de traitement de la toxicomanie est un exercice de collaboration. Si une personne est par ailleurs admissible, les poursuivants ne devraient pas disposer d’un droit de véto quant aux personnes admises par l’équipe du tribunal de traitement de la toxicomanie.

Une solution de rechange moins coûteuse et modulable au tribunal de traitement de la toxicomanie : H.O.P.E.

À Honolulu, à Hawaï, une méthode très prometteuse pour composer avec les délinquants qui abusent de l’alcool ou d’autres drogues fait actuellement l’objet d’une évaluation formelle menée par des chercheurs de l’Université de la Californie à Los Angeles. Il y a cinq ans, le juge du circuit de Hawaï Steven S. Alm a créé « Hawaii’s Opportunity Probation with Enforcement » (H.O.P.E.) pour composer avec les problèmes chroniques de violation des conditions de probation chez beaucoup de contrevenants accoutumés aux méthamphétamines à Hawaï. Lorsque M. Alm, un ancien procureur de l’État et procureur des États-Unis, est devenu juge, il a rapidement été saisi de demandes de révocation de la probation de probationnaires qui avaient commis de nombreuses violations des conditions de leur probation, du genre de celles auxquelles j’ai fait allusion plus tôt, à la page 6. Le juge Alm a reconnu que, dans les faits, on apprenait aux délinquants à ne pas se conformer. Il est insensé d’imposer des conditions si leur violation par le délinquant n’entraîne aucune conséquence.

Dans le cadre du programme novateur du juge Alm, chaque inobservation des conditions est sanctionnée sur-le-champ, mais non par la révocation de la probation. Les personnes en probation subissent souvent des tests de dépistage de drogues – souvent plusieurs fois par semaine. Les résultats des tests sont connus immédiatement, et si le résultat est positif, le délinquant est arrêté sur-le-champ. Alm a pris des dispositions avec les corps policiers pour que ceux-ci traitent comme hautement prioritaire la signification de mandats aux probationnaires qui omettent de se présenter pour subir un test de dépistage de drogues ou à d’autres rendez-vous. Les personnes placées en probations sont averties au sujet de ces règles.

Ce programme a mené à une diminution marquée des tests de dépistage de drogue positifs et d’autres inobservations. Le fait de donner effectivement suite à une menace de sanction constitue un moyen de dissuasion crédible. Ce programme est mentionné dans le numéro courant de l’Economist, 24-30 octobre 2009 (« The velvet glove », pp. 33-34) http://www.economist.com/world/unitedstates/displaystory.cfm?story_id=14699623

Voir aussi l’article du 6 septembre 2009 dans le Honolulu Star-Bulletin (« Where hope thrives ») pour de plus amples renseignements. http://www.starbulletin.com/news/20090906_Where_hope_thrives.html

Comme l’a expliqué le juge Alm à Washington (D.C.) à la conférence Rosenfeld de l’UCLA le 7 octobre 2009, ces délinquants aux nombreux antécédents savent qu’ils pourraient se débrouiller s’ils devaient purger une longue peine d’emprisonnement, mais ils ne veulent pas aller en prison maintenant, et ils ne consommeront donc pas de drogue ce soir alors qu’ils savent qu’il se pourrait qu’ils doivent subir un test de dépistage demain.

http://www.spa.ucla.edu/main2.cfm?d=xr&f=news.cfm&s=school&news_id=25443

La certitude et l’immédiateté de la sanction dissuadent de manière efficace le délinquant de consommer de la drogue. Bon nombre de toxicomanes parviennent à s’affranchir des drogues sans devoir recourir à des services de traitement. Ceux qui n’en sont pas capables sont aiguillés vers des services de traitement. Plutôt que de recourir à des évaluations coûteuses, les toxicomanes eux-mêmes, par leur propre comportement, démontrent s’ils ont besoin ou non d’un traitement. C’est ce que l’on a appelé le « triage comportemental ». Les agents de probation passent moins de temps en cour, et plus de temps à aider leurs clients à s’occuper de questions reliées au logement, à l’emploi, à l’éducation et à d’autres questions qui permettent de mener les peines de probation à terme avec succès. Ces programmes ainsi que d’autres programmes sont décrits plus en détail dans la monographie de Mark. A.R. Kleiman intitulée When Brute Force Fails (Princeton University Press, 2009).

Multiplier les occasions de traitement de la toxicomanie

L’adoption ou l’expansion des tribunaux de traitement de la toxicomanie ne devrait pas remplacer l’expansion de la capacité de traitement de la toxicomanie pour les indigents. Aux États-Unis, la capacité de traitement de la toxicomanie pour les indigents ne peut répondre qu’à une fraction infime de la demande. D’après les données réunies par l’Office of National Drug Control Policy de la Maison Blanche (ONDCP), en 2003, 15 p. 100 seulement des personnes qui avaient besoin de suivre un traitement contre la toxicomanie y avaient accès dans un établissement spécialisé et ce taux était de seulement 8,5 p. 100 chez les jeunes âgés de 12 à 17 ans.

C. POURQUOI AUGMENTER LES PEINES POUR LES INFRACTIONS LIÉES AU CANNABIS?

La mesure de la dépendance et la nocivité des drogues

Un des aspects clés du projet de loi C-15 est, si j’ai bien compris, l’augmentation des pénalités prévues pour la production et la distribution de cannabis. Le résumé législatif qui accompagne le projet de loi C-15 préparé par le Service d’information et de recherche parlementaires décrit la consommation des drogues au Canada, mais n’évoque pas d’importants dommages sociaux découlant de la consommation de cannabis. Il n’associe la consommation de cannabis à aucune pathologie sociale particulière. Au Canada, le cannabis ne semble pas être une drogue d’introduction à d’autres drogues illicites. Les constatations de l’Enquête sur les toxicomanies au Canada de 2004 étaient particulièrement frappantes : 2,6 p. 100 seulement des consommateurs de cannabis avaient utilisé une drogue autre que le cannabis au cours de l’année précédent l’enquête. (LS-634E, 23 mars 2009, p. 3). Cela semble indiquer qu’il faudrait plutôt qualifier la marijuana de « dernière drogue consommée » -- la dernière drogue illégale utilisée par l’immense majorité des consommateurs de drogues illégales.

Le risque d’abus d’une substance est habituellement relié à sa capacité d’entraîner une dépendance. Des experts ont comparé la capacité d’entraîner une dépendance de substances courantes. En 1994, le New York Times a rapporté le point de vue de deux chercheurs réputés (voir ci-dessous). Je n’ai pas trouvé d’analyses plus récentes ni d’analyses qui contestaient ces conclusions.

 

Évaluation de la capacité d’entraîner la dépendance
par le Dr Jack E. Henningfield, National Institute on Drug Abuse et
Dr Neal L. Benowitz, Université de Californie de San Francisco

1 = La plus grave
ÉVALUATION D’HENNINGFIELD

6 = La moins grave * Valeur égale

Substance

Symptôme de retrait

Renforcement

Tolérance

Dépendance

Intoxication

NICOTINE

3

4

2

1

5

HÉROÏNE

2

2

1

2

2

COCAÏNE

4

1

4

3

3

ALCOOL

1

3

3

4

1

CAFÉINE

5

6

5

5

6

MARIJUANA

6

5

6

6

4

 

ÉVALUATION DE BENOWITZ

Substance

Symptôme de retrait

Renforcement

Tolérance

Dépendance

Intoxication

NICOTINE

3*

4

4*

1

6

HÉROÏNE

2

2

2

2

2

COCAÏNE

3*

1

1

3

3

ALCOOL

1

3

4*

4

1

CAFÉINE

4

5

3

5

5

MARIJUANA

5

6

5

6

4

Les critères sont définis comme suit :

Retrait – Présence et gravité des symptômes de retrait caractéristiques.

Renforcement – Mesure de la capacité de la substance, d’après des tests faits sur des humains et des animaux, d’amener le consommateur à reprendre d’une drogue à répétition, et de préférence à d’autres substances.

Tolérance – Quantité de la substance nécessaire pour satisfaire des envies croissantes d’en consommer, et niveau de consommation stable éventuellement atteint.

Dépendance – Degré de difficulté de cesser de consommer la drogue pour l’utilisateur, pourcentage de rechute, pourcentage de personnes qui en deviennent éventuellement dépendantes, note donnée par les consommateurs correspondant à leur propre besoin de consommer une substance et mesure dans laquelle la substance continuera d’être consommée malgré la présence de preuves indiquant qu’elle est nocive.

Intoxication – Cet aspect n’est pas habituellement pris en compte pour mesurer la dépendance en elle-même, mais le niveau d’intoxication est associé à la dépendance et il aggrave les dommages personnels et sociaux qu’une substance peut causer.

(Philip J. Hilts, « Is Nicotine Addictive? It Depends on Whose Criteria You Use », The New York Times, 2 août 1994, p. C3.)

Ces données démontrent que le cannabis provoque beaucoup moins la dépendance que d’autres substances consommées couramment comme le café, la cigarette et l’alcool. De plus, comparé à des drogues dures comme la cocaïne et l’héroïne, le cannabis provoque énormément moins la dépendance.

Observations personnelles sur le cannabis

Au cours des 40 dernières années, j’ai rencontré des personnes qui semblaient consommer beaucoup de cannabis, et un certain nombre d’entre elles m’ont paru ressentir des effets nocifs de leur consommation du cannabis. Cependant, cette observation non statistique a une portée limitée parce qu’elle ne tient pas compte des facteurs qui peuvent être la cause principale de leur forte consommation de cannabis ou de leur dysfonctionnement apparent : maladie ou troubles mentaux sous-jacents, troubles d’apprentissage sous-jacents, schémas et structures familiaux, mauvais traitements émotionnels, physiques et psychologiques subis dans le passé, ou répercussions de la consommation d’autres drogues. J’ai rencontré des personnes qu’on pourrait qualifier de « poteux ». Elles semblent manquer de maturité et elles sont souvent obsédées par la marijuana.

Je connais également plusieurs personnes qui ne sont aucunement des poteux, mais qui ont été ou qui sont dépendants de la marijuana. Ils ont essayé de cesser d’en consommer, mais n’y ont pas réussi. Je ne doute pas que la marijuana puisse provoquer la dépendance chez certaines personnes et qu’il puisse être difficile de les traiter. Étant donné que les caractéristiques de la dépendance à la marijuana sont plus subtiles et beaucoup moins handicapantes que les aspects courants de la dépendance aux opiacées ou aux stimulants comme la cocaïne et les amphétamines, cette dépendance peut s’avérer beaucoup plus difficile à déceler et beaucoup moins handicapante, et il peut s’avérer plus difficile pour la personne dépendante de reconnaître la nécessité d’un traitement.

J’ai aussi connu des personnes à Washington (D.C.) qui étaient dépendantes de leur travail. Leur obsession à l’égard de leur travail nuisait à leurs relations familiales et compromettait leur santé à cause du stress, d’un mauvais régime alimentaire et d’un manque d’exercice. J’ai connu des personnes qui étaient dépendantes de certaines formes de loisirs – regarder la télévision ou assister à des événements sportifs. Là encore, cette dépendance entraînait un mauvais régime alimentaire, compromettait leur santé, nuisait à leurs relations interpersonnelles, faisait qu’ils manquaient d’exercice, ou était associée à ces effets. La dépendance est une chose tragique et peut nécessiter une intervention sur le plan de la santé mentale, mais, en soi, elle n’exige pas l’intervention de la justice pénale ou que celle-ci s’y intéresse.

Je tiens toutefois à souligner qu’au cours des 40 dernières années, j’ai rencontré un nombre de personnes beaucoup plus important pour qui la consommation de marijuana ne semblait pas être plus nuisible pour eux ou leur famille que l’alcool qu’ils consommaient dans un contexte social. Cela comprend des étudiants parmi les meilleurs des universités et des facultés de droit, des rédacteurs de revue de droit, des juges, des avocats faisant des carrières brillantes, des gens d’affaires, des enseignants et des artistes. Il n’est pas contradictoire de noter que, si certaines personnes semblent avoir des problèmes à cause de la marijuana, l’immense majorité de ceux qui en consomment n’ont pas de problèmes et n’en ont jamais eu, d’après mon expérience.

Justification d’une peine imposée par l’État

Je ne suis pas Canadien, et je vous demande pardon d’avoir la témérité d’examiner les arguments suivants pour deux raisons. Premièrement, parce que les arguments que je vais vous présenter n’ont pas été sérieusement pris en compte aux États-Unis par aucune nos assemblées législatives. Et deuxièmement, parce que je n’ai pas eu l’occasion d’étudier l’historique de l’adoption de la Charte canadienne des droits et liberté, ni les opinions des tribunaux qui l’ont interprétée.

Dans le contexte de l’étude des pénalités imposées pour le trafic de cannabis, je demande respectueusement à chaque sénateur et à chaque sénatrice de se poser la question suivante : « En tant que personne qui rédige les lois, quels sont les principes que je retiens et applique pour décider quels sont les comportements qui méritent d’être punis par l’emprisonnement? » À l’égard des personnes physiques, le Parlement dispose de trois grands pouvoirs : le pouvoir de taxer diverses activités, le pouvoir de dépenser ces taxes de différentes façons et le pouvoir d’autoriser l’infliction de peines pour les comportements qui sont répréhensibles, la plus grave de ces peines étant l’incarcération – la privation générale de liberté.

Je ne suis pas Canadien, et j’ai l’audace de vous demander de vous interroger sur le sens de cette expression magnifique qu’est la « justice fondamentale » à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. Nos cultures autorisent l’État à supprimer la liberté de la personne qui a mal agi, c’est-à-dire, de la personne qui en a blessé une autre, qui risque sérieusement d’en blesser d’autres ou qui a omis de respecter une obligation universelle et importante comme celle de payer ses impôts. Ces catégories d’actes décrivent assez bien la conduite répréhensible qui sous-tend la notion de ce que la « justice fondamentale » considérerait comme des actes punissables.

J’estime que la notion de « justice fondamentale » n’impose pas au citoyen l’obligation d’être toujours sobre. Bien sûr, on ne peut pas conduire un véhicule en état d’ébriété, parce que cela fait courir aux autres citoyens un risque très grave. Mais notre conception habituelle de la liberté autorise les adultes à s’enivrer. Nous savons que l’ivresse comporte des risques et nous avons recours à divers mécanismes de contrôle sociaux pour dissuader les gens de s’enivrer fréquemment. Nos cultures ne condamnent toutefois pas les personnes qui s’enivrent au cours d’un mariage ou de funérailles, ou lors de certaines parties de baseball, dans les tavernes, chez elles ou dans bon nombre d’autres circonstances.

La consommation de cannabis est une autre forme d’ivresse. Elle n’est ouvertement intégrée à aucun rituel culturel du courant dominant, mais elle est utilisée de façon clandestine dans la plupart d’entre eux. En l’absence de dommage causé à autrui, de risque grave de causer un dommage à autrui ou d’omission d’exécuter une obligation reconnue, je me demande si, conformément à la « justice fondamentale », le Parlement a l’autorité morale de sanctionner la consommation de cannabis par une peine de prison.

J’essaie de présenter un argument différent de celui selon lequel chaque citoyen a « le droit » ou « la liberté » d’utiliser le cannabis tel que ces termes sont utilisés dans la Charte canadienne des droits et libertés. J’estime que la portée du pouvoir du Parlement de punir qui est implicite dans l’expression « justice fondamentale » vous interdit de réprimer la consommation de cannabis parce que ce comportement n’est pas répréhensible.

Il n’est pas sage de conduire sans attacher sa ceinture, mais ce n’est pas un acte répréhensible. La personne qui est impliquée dans un accident alors qu’elle ne portait pas sa ceinture peut subir des blessures beaucoup plus graves que si elle l’avait attachée; la société risque d’avoir à assumer des coûts médicaux beaucoup plus importants. Le fait d’avoir créé la possibilité de ces coûts sociaux constitue-t-il un préjudice social qui est moralement mauvais et donc punissable? Non. Si une personne ne mange pas sainement, ne fait pas d’exercice et augmente les risques de maladie ou de décès prématuré – avec les dépenses sociales qui y sont associées – cela constitue-t-il un dommage social qui pourrait être puni par l’incarcération conformément à la notion de justice fondamentale? Non. La « justice fondamentale » permettrait-elle d’emprisonner la personne qui refuserait régulièrement de porter sa ceinture en auto ou un casque de motocyclette? Non. Il est peut-être irrationnel de continuer à refuser de respecter ce genre de règlement, mais la société a-t-elle l’autorité morale de priver de liberté la personne qui se refuse à le respecter? Non.

D. ProtÉger la sÉcuritÉ publique PLUTÔT QUE DE CÉDER AUX CRAINTES de la population

La peur des criminels

Le public a peur des criminels et des crimes. Mais le public a le droit de ne pas vivre dans cette peur. Nous avons le droit de nous sentir en sécurité dans nos demeures et lorsque nous exerçons nos activités. Nous avons le droit de ne pas nous inquiéter que nos êtres chers soient toujours exposés au risque d’être victimisés.

Dans quelle mesure la peur de la criminalité au sein de la population est-elle réaliste, et dans quelle mesure est-elle exagérée? Les risques d’être victime d’un crime violent sont-ils plus grands ou moins grands, disons, que le risque d’être grièvement blessé lors d’un accident – à bord d’un avion, ou d’une voiture, ou en ski, à bicyclette, en rafting ou en canot ou en escalade; ou en jouant au soccer ou au hockey?

Nos cultures sont fascinées, voir obsédées par le crime. Nos divertissements baignent dans la criminalité : le cinéma, la télévision, les romans, les jeux vidéos.

Les crimes font vendre de la publicité et des journaux. Les nouvelles concernant les crimes attirent les téléspectateurs. Je ne sais pas si cela se fait aussi au Canada, mais aux États-Unis pendant la soirée, il y a des flashs de 15 secondes qui vous annoncent que la station fournira « des détails à 23 h » sur le dernier crime horrible commis. Aux États-Unis, la décision que prennent les chefs du service de la publicité et de la programmation des stations de télévision d’insister sur les nouvelles du crime est la principale raison pour laquelle la population a la fausse impression que les États-Unis sont de plus en plus violents et que le taux de criminalité augmente alors que ce taux diminue constamment.

Les « ratés » du système de justice pénale

Les médias d’information ont le devoir de faire des reportages sur les activités des services du gouvernement. Ils peuvent faire des reportages sur l’inconduite de certains policiers. Mais ce type d’inconduite n’est pas perçu comme le genre de crime dont la population a peur. Les gens auront souvent tendance à considérer que les personnes qui ont fait les frais de l’inconduite policière sont des cibles légitimes de la police, à la différence de la population générale, qui est exposée au risque de la criminalité.

En outre, les nouvelle rapportent parfois des erreurs judiciaires lorsque des juges imposent des peines qui semblent trop clémentes au regard de l’infraction. Chaque jour, des milliers de juges imposent des peines dans des dizaines de milliers d’affaires. Dans l’univers des juges, il y a toujours des juges qui manquent de jugement. Pour alimenter un chronique journalistique vouée à démontrer que les juges sont d’une indulgence insouciante, et sont hors de contrôle, il suffit de trouver une seule peine infligée par semaine, qui déroge à ce qui est généralement considéré comme une peine juste, pour provoquer un flot presque continu de commentaires de gens indignés ou furieux.

La réponse des représentants du peuple

Le Congrès, le Parlement, l’assemblée provinciale ou la législature de l’État ne peuvent pas adopter une posture « philosophique » face aux manquements des juges ou aux craintes exagérées au sujet de la criminalité. Leur rôle est d’agir! Il n’y a aucune retombée politique négative à lutter contre la criminalité, à créer de nouvelles infractions ou à augmenter les peines applicables à des infractions qui existent déjà. En 1993, un feu de friches a éclaté à Malibu, en Californie, alors que le Sénat américain débattait d’un projet de loi en matière pénale. Certains disaient que le feu était peut-être un incendie criminel. Presqu’immédiatement, le sénateur américain Bob Dole (R-KS) a pris la parole et a proposé un amendement visant à faire doubler la peine minimale obligatoire et la peine maximale pour l’incendie criminel de cinq à 10 ans d’emprisonnement. La possibilité que le feu ait été un incendie criminel n’était encore qu’une rumeur. L’ « incendie criminel » était le « crime du jour », et augmenter la peine paraissait « logique », et l’amendement a été adopté. (139 Congressional Record S15027, 4 nov. 1993).

Conclusion

Lorsque les politiciens votent en faveur des peines obligatoires, ils « font quelque chose » à un moment où la population leur demande de « faire quelque chose » au sujet de ce qui leur fait peur.

Les députés ne peuvent pas annoncer l’arrestation de criminels redoutés ou la conclusion d’une longue enquête comme le fait le chef de police accompagné du maire ou d’un procureur. Les députés ne peuvent pas annoncer à la population le dépôt d’accusations contre des criminels dangereux comme le fait le procureur général ou le procureur de la Couronne. Les députés ne peuvent pas annoncer qu’un accusé a été déclaré coupable à son procès comme le fait le juge ou faire un discours au moment de la détermination de la peine.

Il est rare que les législateurs puissent faire quelque chose contre la criminalité.

Si le gouvernement et les députés veulent prétendre qu’ils luttent contre la criminalité, ils peuvent adopter des lois qui aggravent les peines – même si ces longues peines sont inutiles, inefficaces, coûteuses, injustes et contre-productives.

En revanche, s’ils veulent faire quelque chose pour lutter contre la criminalité, il existe des moyens moins coûteux et moins radicaux. Voir Mark A.R. Kleiman, Brute Force Fails (Princeton University Press, 2009).

EXPÉRIENCE ET COMPÉTENCES
D’ERIC E. STERLING

De 1979 à 1989, j’ai été avocat auprès du comité des affaires judiciaires de la Chambre des représentants des États-Unis, principalement responsable des lois fédérales sur les substances contrôlées. En tant que membre du personnel du sous-comité de la justice pénale, et ensuite, du personnel du sous-comité des affaires criminelles (maintenant fusionné), j’ai examiné pratiquement tous les projets de loi présentés à la Chambre des représentants modifiant le Controlled Substances Act ou régissant les activités de la Drug Enforcement Administration. Du 96e au 100e Congrès, j’ai directement participé à l’élaboration de la plupart des projets de loi concernant les drogues illégales. J’ai également été responsable des lois fédérales en matière de contrôle des armes à feu, du crime organisé, du blanchiment d’argent, de la pornographie, des incendies criminels et d’autres questions. Je me suis rendu au Mexique, au Pérou, en Bolivie, en Colombie et en Jamaïque pour examiner, sur place, les programmes de lutte contre les stupéfiants. J’ai joué un rôle majeur dans la rédaction des lois suivantes : le Comprehensive Crime Control Act de 1984, le Firearms Owners Protection Act de 1986, le Anti-Drug Abuse Act de 1986 et le Anti-Drug Abuse Act de 1988. J’ai reçu des félicitations de la part de deux agences d’application de la loi des États-Unis – le Bureau of Alcohol, Tobacco and Firearms, et le Postal Inspection Service – pour ma contribution à leurmandat d’application de la loi.

Depuis 1989, je suis le président de la Criminal Justice Policy Foundation, dont le siège social est maintenant à Silver Spring, MD, à quelques milles du Capitol. Je suis régulièrement consulté par des membres du Congrès, des législateurs de différents États et des administrations locales partout aux États-Unis.

En 2002, l’ambassade du Canada à Washington m’a demandé de faire un exposé devant le Comité spécial de la Chambre des communes sur la consommation non médicale de drogues ou de médicaments au sujet de la situation aux États-Unis. Il m’a été demandé, par la suite, de faire venir des experts américains pour leur faire rencontrer les responsables de la lutte contre les drogues au Canada dans le domaine de l’application de la loi et de la santé publique.

Localement, j’ai été nommé membre du conseil consultatif sur l’alcool et la toxicomanie par le conseil exécutif du Maryland du comté de Montgomery. Le conseil est chargé de surveiller les problèmes et les tribunaux de traitement de la toxicomanie de notre comté qui comprend environ un million d’habitants. Auparavant, j’ai été membre du conseil consultatif de la toxicomanie du maire de Washington, et du groupe de travail sur les politiques en matière de drogues, du maire de Baltimore, au Maryland.

Je suis membre du barreau de la Cour suprême des États-Unis. Pendant une dizaine d’années, j’ai été membre du comité permanent de la toxicomanie de l’American Bar Association, et j’ai présidé pendant un mandat le comité du système de justice pénale de la section des droits individuels et des responsabilités de l’ABA. Je suis également membre du comité des drogues et du droit du barreau de la ville de New York.

Je suis, à l’heure actuelle, chargé de cours à temps partiel en sociologie et en justice pénale de la faculté de sociologie de l’Université George Washington. Dans les années 1980, j’ai été chargé de cours adjoint à la faculté de droit, justice et société de l'American University, de Washington, et j’ai été chargé de cours à l’Université de Colorado à Boulder chaque printemps pendant une décennie.

En 1999, j’ai obtenu le Prix du juge Gérald LeDain pour mon travail dans le domaine du droit par la Drug Policy Alliance. J’ai obtenu un diplôme de baccalauréat ès arts en 1973 du Haverford College (Pa.) avec spécialisation en religion, et mon doctorat en droit de la Villanova University School of Law (Pa.) en 1976. Pendant trois étés au début des années 1970, j’ai dirigé des excursions en canot sur les rivières St. Croix et St. John, principalement dans le Maine, mais nous avons souvent campé au Nouveau-Brunswick.


Haut de page