Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 2 - Témoignages du 22 avril 2009
OTTAWA, le mercredi 22 avril 2009
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 18 h 31 pour étudier les enjeux émergents liés à son mandat dans le domaine des communications et faire rapport sur le secteur du sans-fil, notamment sur l'accès Internet à haute vitesse, la fourniture de largeur de bande, le rôle d'édification de la nation du sans-fil, le rythme d'adoption des innovations, les aspects financiers liés aux changements possibles du secteur ainsi que le développement du secteur au Canada comparativement à ce qui se fait ailleurs dans le monde.
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Avant de donner la parole à nos témoins, je voudrais passer en revue notre programme de la semaine prochaine. Mardi matin, nous étudierons le projet de loi S-220, Loi concernant les messages électroniques commerciaux. Il s'agit du projet de loi anti-pourriel du sénateur Goldstein, qui devrait comparaître devant le comité mardi matin.
Mercredi, on me dit que beaucoup de sénateurs libéraux seront partis pour assister à leur congrès. Si les honorables sénateurs sont d'accord, je crois que le comité ne se réunira pas le mercredi. Nous ferons la même chose pour l'autre côté.
Nous espérons recevoir le projet de loi C-9, au sujet duquel le sénateur Mercer prononcera un discours. S'il n'y a pas d'autres orateurs, le Sénat nous renverra le projet de loi. Nous verrons alors s'il y a des témoins qui souhaitent comparaître devant le comité à ce sujet. Nous procéderons ensuite à l'étude article par article du projet de loi. Le ministre Baird comparaîtra aussi.
En mai et juin, nous poursuivrons nos audiences sur le secteur du sans-fil. J'ai comparu devant le sous-comité des budgets cet après-midi. Nous ne savons pas encore s'il nous sera possible de faire notre voyage au Royaume-Uni et en France. Nous le saurons une fois que nous aurons une réponse au sujet de notre budget. Je ne m'attends pas à ce que cette réponse tarde. Nous prendrons donc des dispositions en vue du voyage. Nous devrions commencer par la France, puis nous rendre ensuite au Royaume-Uni.
Après cela, nous pourrions poursuivre l'étude du projet de loi S-220, mais nous aurons toujours à nous occuper des projets de loi du gouvernement. Nous pourrions recevoir le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques. Le projet de loi C-7, Loi modifiant la Loi sur la responsabilité en matière maritime, la Loi sur les Cours fédérales et d'autres lois en conséquence, est encore à l'étude à l'autre endroit. Nous recevrons ces projets de loi dans les prochaines semaines. Le rapport concernant le projet de loi C-3 a été présenté à la Chambre des communes le 3 avril. Il ne nous a pas encore été transmis. Pour ce qui est du projet de loi C-7, une réunion a eu lieu hier avec un fonctionnaire, après quoi le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités. Nous ne le recevrons probablement pas avant quelque temps parce qu'il doit encore revenir à la Chambre avant de nous être transmis.
Pour aujourd'hui, le comité doit étudier les enjeux émergents liés à notre mandat relatif aux communications et faire rapport sur le secteur du sans-fil, notamment sur l'accès Internet à haute vitesse, la fourniture de largeur de bande, le rôle d'édification de la nation du sans-fil, le rythme d'adoption des innovations, les aspects financiers liés aux changements possibles du secteur ainsi que le développement du secteur au Canada comparativement à ce qui se fait ailleurs dans le monde.
Nos témoins représentent le conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes ou CRTC. Sont présents aujourd'hui John Traversy, directeur exécutif, Télécommunications, Michel Murray, directeur par intérim, Décisions et opérations, Télécommunications, Bill Mason, gestionnaire, Mise en œuvre de la concurrence et technologie, et Steve Malowany, gestionnaire, Rapports financiers et techniques, Analyse de l'industrie. Messieurs, je vous souhaite la bienvenue au comité. Je crois que nous avons eu des difficultés avec les pages 2 et 3 de votre exposé, mais quelqu'un s'en occupe actuellement.
Je vous prie de présenter votre exposé.
John Traversy, directeur exécutif, Télécommunications, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes : Merci et bonsoir. Je vous remercie de nous avoir invités à contribuer à votre étude de l'industrie canadienne des télécommunications sans fil.
Comme la présidente l'a mentionné, je suis accompagné aujourd'hui d'autres cadres du CRTC : Bill Mason, gestionnaire responsable de la Concurrence, de la mise en œuvre et de la technologie, Michel Murray, directeur par intérim, Décisions et Opérations, Télécommunications, et, à ma droite, Steve Malowany, gestionnaire, Rapports financiers et techniques, Analyse de l'industrie.
[Français]
Le CRTC est un organisme public indépendant chargé de réglementer et de superviser les industries de la radiodiffusion et de la télécommunication canadiennes. Nous surveillons plus de 1 000 fournisseurs de service de télécommunication au Canada, notamment les entreprises de téléphonie avec fil et sans fil.
Depuis 2006, notre façon d'aborder la règlementation de l'industrie des télécommunications s'harmonise avec les orientations stratégiques du gouvernement. Ces orientations nous demandent de s'appuyer le plus possible sur les forces du marché.
[Traduction]
En conséquence, nous intervenons seulement dans les cas où les forces du marché ne suffisent pas pour atteindre les objectifs de la Loi sur les télécommunications.
Aujourd'hui, j'aimerais me concentrer sur les deux secteurs de l'industrie des télécommunications qui sont les plus dynamiques : les services de télécommunications sans fil et les services Internet à large bande. Je crois savoir que, plus tôt ce mois-ci, le directeur général du Secteur des télécommunications d'Industrie Canada, M. Len St-Aubin, est venu vous présenter diverses données et statistiques. Je ferai de mon mieux pour éviter de répéter la même information. Toutefois, c'est avec plaisir que nous vous fournirons toute donnée qui pourrait vous intéresser, après cet exposé.
En ce qui concerne les services de télécommunications sans fil, le rythme des changements a considérablement augmenté au sein de l'industrie des télécommunications ces dernières années. L'évolution des cellulaires compte parmi les plus intéressantes : dans les années 1980, il s'agissait de gros appareils coûteux alors qu'aujourd'hui, ce sont de petits appareils intelligents et évolués. Le sans-fil est aujourd'hui l'un des principaux moteurs de l'industrie. Le nombre d'abonnés a beaucoup augmenté : entre 2003 et 2007, il est passé de 11,3 à 20,3 millions, et la croissance annuelle moyenne a été légèrement supérieure à 11 p. 100. Nous nous attendons à ce que cette tendance se maintienne à l'avenir, mais il est probable que le taux de croissance fléchira à mesure que le marché atteindra son niveau de plein développement.
Sous l'effet de la croissance du nombre d'abonnés et de l'arrivée de dispositifs mobiles offrant de nouvelles caractéristiques, les télécommunications sans fil ont rapporté en 2007 des recettes de 14,4 milliards de dollars aux fournisseurs de services de télécommunications. Par rapport aux autres secteurs de l'industrie, le sans-fil a été, et de loin, le secteur le plus important de l'industrie, représentant 38 p. 100 de l'ensemble des recettes, contre 25 p. 100 en 2003.
D'après nos données les plus récentes, les trois principaux fournisseurs de services détiennent environ 92 p. 100 du marché. Toutefois, l'arrivée de nouveaux joueurs pourrait entraîner d'importants changements dans l'industrie. Après la vente aux enchères de spectre organisée par le gouvernement, jusqu'à sept nouveaux fournisseurs de services pourraient bientôt faire leur entrée sur le marché.
Comme nous l'avons mentionné dans notre Rapport de surveillance des communications de 2008, les taux de pénétration des télécommunications sans fil au Canada sont inférieurs à ceux de nombreux pays de l'OCDE. Nous sommes cependant persuadés que les nouveaux joueurs élargiront le marché et iront chercher de nouveaux abonnés.
Bien entendu, la situation économique actuelle est l'un des grands obstacles que les nouveaux joueurs devront surmonter. La semaine dernière, Telus a annoncé les résultats du premier trimestre de 2009. Par rapport à l'année précédente, il y a eu une baisse du nombre de nouveaux abonnés aux services de télécommunications sans fil ainsi qu'une diminution des recettes provenant des abonnés actuels, ce qui permet de croire que les clients et les entreprises commencent à réduire leur utilisation des services sans fil. En même temps, nous avons été heureux d'apprendre que Telus compte toujours faire une importante mise à niveau de son réseau sans fil dans le cadre d'un projet conjoint avec Bell Canada. Cela a été annoncé au début de l'année.
Quelques-uns des nouveaux venus, comme Globalive et Vidéotron, ont annoncé qu'ils comptaient offrir des services à partir de la fin 2009 ou du début 2010. Pour y arriver, ils devront faire d'importants investissements afin de construire leurs réseaux et d'embaucher du personnel, ce qui contribuera à la relance de l'économie.
Nous suivrons de près la situation pour déterminer les effets qu'auront ces nouveaux venus sur l'industrie. Nous espérons que les consommateurs en sortiront gagnants, avec un accès accru aux technologies de nouvelle génération qui donneront plus de choix aux Canadiens.
Comme vous le savez peut-être, le CRTC ne réglemente pas les tarifs des télécommunications sans fil au Canada. En fait, nous ne l'avons pas fait depuis plus de 10 ans. En 1996, le conseil a déterminé qu'il était raisonnable de s'attendre à ce que les forces du marché permettent aux consommateurs de profiter de prix et de forfaits de service concurrentiels.
Il y a lieu de noter que de nombreux fournisseurs offrent actuellement des forfaits comportant un nombre élevé de minutes. C'est une des raisons pour lesquelles le revenu moyen par minute provenant des appels locaux et interurbains au Canada compte actuellement parmi les plus bas de tous les pays de l'OCDE. Toutefois, nous avons constaté que les tarifs des consommateurs qui utilisent relativement peu de minutes sont plus élevés au Canada que dans les autres pays, à l'exception des États-Unis. Ces renseignements sont principalement tirés de notre Rapport de surveillance des communications de 2008, que j'ai mentionné il y a quelques instants et dont je crois que vous avez des exemplaires. Le rapport peut être consulté sur notre site web.
Même si les fournisseurs de services sont libres de fixer les tarifs à leur convenance, le conseil réglemente quelques aspects importants du secteur des télécommunications sans fil. Par exemple, nous avons exigé des fournisseurs de services qu'ils autorisent le transfert des numéros de téléphone sans fil, ce qui est beaucoup plus commode pour les consommateurs. Depuis mars 2007, les consommateurs peuvent garder le même nunéro lorsqu'ils changent de fournisseur. Ils peuvent aussi conserver leurs numéros s'ils passent d'un fournisseur de services de télécommunications par fil à un fournisseur de services sans fil, et vice-versa. Beaucoup de Canadiens, surtout parmi les jeunes, commencent à utiliser exclusivement leur appareil sans fil pour leurs communications téléphoniques.
Le service 911 constitue un autre sujet de préoccupation pour le conseil. Plus tôt cette année, nous avons ordonné aux fournisseurs de services sans fil de mettre à niveau leur service 911 d'ici au 1er février 2010. Il est arrivé que les services d'urgence aient du mal à localiser une personne composant le 911 à partir d'un appareil sans fil, notamment dans les situations d'urgence où l'abonné ne pouvait pas parler ou donner des indications précises sur l'endroit où il se trouvait. C'est parce que les services d'urgence 911 ne permettent actuellement de localiser que le secteur couvert par la tour de téléphonie cellulaire la plus proche.
Nous avons demandé aux représentants de l'industrie de collaborer avec les autorités provinciales et municipales afin de trouver une solution. Dans les prochains mois, des fonctionnalités 911 améliorées seront mises en place et mettront à profit des technologies spécialisées, comme le système de localisation GPS, en vue d'améliorer la sécurité du public. Ainsi, les services d'urgence pourront en général localiser l'endroit d'où vient un appel dans un rayon allant de 10 à 300 mètres, ce qui constituerait une amélioration considérable. Tous les fournisseurs de services sans fil qui feront leur entrée sur le marché canadien après le 1er février 2010 devront pouvoir offrir ces fonctionnalités améliorées.
À part la transférabilité des numéros de téléphone sans fil et le service 911, le conseil a établi des règles destinées à protéger la vie privée des consommateurs, à gérer l'utilisation des numéros de téléphone, à imposer la production de factures dans des formats de substitution et à assurer le respect des exigences sur la propriété canadienne prévues dans la Loi sur les télécommunications.
Lorsque nous avons renoncé à la réglementation des tarifs dans le secteur des télécommunications sans fil, nous avons maintenu quelques dispositions importantes, notamment les articles 24 et 27(2) de la Loi sur les télécommunications, qui nous permettent de mettre en œuvre des caractéristiques semblables à celles que je viens de décrire. L'article 24 est une importante disposition qui nous donne la possibilité d'imposer aux fournisseurs de services de télécommunications toute condition que nous croyons nécessaire pour atteindre les objectifs de la loi. L'article 27(2), que nous avons également maintenu, interdit aux fournisseurs de services de faire de la discrimination ou d'accorder à quiconque une préférence indue.
Il est normal que des différends surviennent à l'occasion entre les consommateurs et leurs fournisseurs de services sans fil. Lorsque ces différends touchent un secteur non réglementé par le CRTC, les consommateurs peuvent s'adresser à un organisme indépendant relevant du commissaire aux plaintes relatives aux services de télécommunications (CPRST). En 2007, le conseil a approuvé la structure et le mandat de l'organisme, qui contribue actuellement à un règlement impartial et opportun des plaintes.
À part les services de télécommunications sans fil, le CPRST s'occupe des plaintes concernant les services interurbains, l'accès Internet, les services téléphoniques sur protocole Internet (VoIP) ainsi que les services de téléphonie locale dans les marchés que le conseil a déréglementés.
Comme il existe différents types de services Internet à large bande, je crois qu'il serait utile de commencer par une précision. Le conseil a défini le service à large bande comme étant un service qui offre un accès Internet à une vitesse minimale de 1,5 mégabit par seconde. Il est à noter qu'Industrie Canada utilise la même définition. Déjà, 93 p. 100 des foyers canadiens ont accès aux services à large bande, et la plupart d'entre eux ont le choix entre au moins deux fournisseurs, principalement par le biais des installations d'une compagnie de téléphone ou d'un câblodistributeur.
À l'extérieur des principaux centres urbains, les technologies sans fil fixes ou par satellite permettent à de nombreux consommateurs d'avoir accès à Internet. Nos recherches montrent que parmi les pays du G7, le Canada est celui qui compte le plus grand pourcentage de foyers utilisant des services à large bande. De plus en plus, l'accès Internet à grande vitesse est perçu comme un élément clé pour conserver un avantage concurrentiel dans l'économie mondiale. Beaucoup de pays, dont les États-Unis et l'Australie, projettent d'étendre l'accès Internet à large bande aux régions rurales et aux zones non desservies ou de mettre à niveau leurs infrastructures pour permettre de plus grandes vitesses de transmission.
Au Canada, les dix provinces et les trois territoires ont reconnu l'importance de l'accès à large bande pour les régions éloignées. Chaque administration élabore ses propres initiatives pour améliorer l'accès à ces services. Si vous le permettez, je mentionnerai en passant que j'ai vu aujourd'hui dans les coupures de presse que le Nouveau-Brunswick a annoncé un partenariat avec Barrett Xplore Inc., société qui offre des services sans fil fixes et par satellite partout au Canada. Le partenariat étendra l'accès à grande vitesse aux régions rurales dans l'ensemble du Nouveau-Brunswick, assurant une couverture presque complète de la province. Il s'agira surtout de services sans fil fixes, mais le partenariat aura recours aux services par satellite dans les régions que les installations fixes ne peuvent pas atteindre.
De plus, dans le dernier budget fédéral, le plan de relance du gouvernement prévoit 225 millions de dollars pour le déploiement de services à large bande. Lorsque M. St-Aubin a récemment comparu devant vous, il a expliqué qu'Industrie Canada vient d'entreprendre l'élaboration d'un programme visant à répartir ces fonds. Dans le cadre de ce processus, le conseil collabore avec Industrie Canada, Affaires indiennes et du Nord Canada ainsi qu'avec les provinces et les territoires pour déterminer précisément les endroits où les services à large bande sont disponibles et ceux où ils ne le sont pas. En mettant nos ressources en commun, nous pouvons éviter le double emploi dans les efforts et les coûts et minimiser le fardeau de l'industrie.
L'accès Internet à large bande peut offrir aux collectivités rurales et éloignées du Canada d'importantes possibilités économiques et éducatives. Nous avons hâte de connaître les détails du programme de déploiement des services à large bande du gouvernement et sommes prêts à prêter notre concours par tous les moyens possibles.
[Français]
Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
[Traduction]
La présidente : Je vous remercie de cet exposé, monsieur Traversy. Dans les grands centres urbains, comme Montréal et Toronto, il y a souvent au moins trois fournisseurs de services sans fil. Dans les régions rurales, la concurrence est moins forte. Il y a des endroits où c'est presque un monopole. Avons-nous besoin de plus de concurrence dans les régions rurales, surtout pour assurer aux abonnés des prix moindres? Le CRTC a-t-il l'intention de demander aux nouveaux joueurs de l'industrie d'offrir des services dans les régions rurales?
M. Traversy : Comme vous le savez, Industrie Canada a récemment organisé une vente aux enchères. Le ministère a fini par attribuer des licences à sept nouvelles sociétés. La plupart de celles-ci ont leur siège dans les régions, et certaines sont plus importantes que les autres. Certaines ont des activités partout dans l'ouest du Canada, tandis que d'autres sont présentes dans l'ensemble du Québec. Aucune des nouvelles sociétés n'a une envergure nationale. Elles sont toutes régionales.
Les études que j'ai vues sur les prix dans d'autres pays — ces études sont toujours intéressantes — montrent que les joueurs régionaux introduisent sur le marché beaucoup d'innovations en matière de prix. L'arrivée de ces nouvelles sociétés renforcera évidemment la concurrence. Si les choses se passent de la même façon qu'aux États-Unis, les joueurs régionaux ajouteront une certaine variété pour ce qui est du prix des services.
Vous avez demandé si le CRTC compte imposer des conditions aux nouveaux fournisseurs de services de télécommunications sans fil. Je dois vous dire que c'est Industrie Canada qui fixe les conditions des licences. Cela ne relève pas du CRTC.
La présidente : Les réseaux sans fil de la troisième génération, dits 3G, sont disponibles dans les centres urbains, tandis que les secteurs ruraux n'ont que des réseaux de la première et de la deuxième génération. Quand y aura-t-il des réseaux 3G dans les régions rurales? Trouvez-vous acceptable que la plupart des applications des téléphones intelligents conçues pour les réseaux 3G ne soient pas encore offertes aux Canadiens ruraux?
M. Traversy : Encore une fois, je reviens aux nouveaux joueurs qui établiront bien sûr leurs services sur la base des réseaux 3G. Il est à espérer que cela permettra d'étendre un peu plus ces réseaux au Canada.
Pour ce qui est de l'offre de services dans les régions rurales, il ne faut pas perdre de vue que nous avons affaire à des sociétés privées. Nous espérons que les coûts d'expansion et les investissements nécessaires pour le nouveau matériel vont baisser et que cela permettra aux sociétés en cause de juger que l'expansion est rentable. Les services sont offerts par des entreprises privées à but lucratif. Si elles ne peuvent pas réaliser un bénéfice, il est peu probable que l'expansion ira très loin.
Le sénateur Johnson : Je vous souhaite la bienvenue au comité. Pour faire suite à la question de la présidente concernant les réseaux 3G, j'aimerais avoir plus de renseignements sur la récente vente aux enchères de fréquences du spectre. Dans quelle mesure les résultats de cette vente influeront-ils sur le déploiement des services 3G au Canada?
M. Traversy : Le déploiement va actuellement très bien. Notre rapport de surveillance indique que 78 p. 100 des Canadiens ont maintenant accès aux réseaux 3G. À mon avis, il est bien possible que l'arrivée de nouveaux joueurs sur le marché stimule le développement à cet égard. Ils chercheront à innover et à ajouter des fonctionnalités pour se distinguer des autres sur le marché. Ils auront peut-être la possibilité de le faire en étendant leurs réseaux.
Le sénateur Johnson : Combien cela pourrait-il coûter?
M. Traversy : Pour déployer les services?
Le sénateur Johnson : Pour permettre à tous les Canadiens d'avoir accès aux réseaux 3G.
M. Traversy : Vous parlez des Canadiens ruraux?
Le sénateur Johnson : Je parle de tous les Canadiens.
M. Traversy : Y a-t-il quelqu'un qui ait une estimation de ce que cela coûterait? Je n'ai pas ce chiffre pour le moment. Nous pourrions vous l'envoyer plus tard. Nous nous engageons à transmettre à la greffière les meilleures données que nous pourrons trouver.
Le sénateur Johnson : Est-ce qu'une autre intervention du gouvernement pourrait favoriser l'accès de tous les Canadiens aux réseaux 3G? Y a-t-il autre chose que le gouvernement peut faire?
M. Traversy : Le gouvernement a déjà pris l'initiative en organisant une vente aux enchères pour voir si de nouveaux venus peuvent promouvoir l'innovation.
Quant au rôle d'élaboration de politiques du gouvernement, il incombe davantage à Industrie Canada qu'au CRTC.
Le sénateur Johnson : D'après le Rapport de surveillance des communications de 2008, 98 p. 100 des Canadiens ont accès aux services sans fil, mais 61 p. 100 seulement y sont abonnés. J'ai trouvé ces chiffres intéressants. Le niveau de pénétration est inférieur à celui de beaucoup de pays de l'OCDE. Qu'en pensez-vous? Comment expliquez-vous la faiblesse de ce niveau de pénétration?
M. Traversy : L'un des facteurs à considérer, c'est que le Canada a un très bon réseau de téléphonie par fil. Nous avons consacré beaucoup de temps au développement de ce réseau. Pendant assez longtemps, c'était un marché réglementé. Il l'est encore. En fait, le réseau de téléphonie par fil est à la disposition de la plupart des Canadiens à un prix raisonnable. C'est l'un des facteurs dont les Canadiens tiennent compte lorsqu'ils songent à s'abonner à un service sans fil. Si vous comparez nos prix de téléphonie par fil à ceux d'autres pays, vous constaterez que nos taux sont parmi les plus bas, sinon les plus bas du monde. C'est la présence de ce réseau très développé et très abordable qui a influencé la pénétration des services sans fil. Dans certains pays d'Europe, le service téléphonique par fil est plus coûteux que le service sans fil.
Le sénateur Johnson : Comment nous comparons-nous aux États-Unis?
M. Traversy : Les chiffres américains sont semblables aux nôtres. Les États-Unis aussi ont un réseau bien développé de téléphonie par fil.
Le sénateur Johnson : Et qu'en est-il des pays qui ont des taux de pénétration élevés, par opposition à un faible taux de pénétration? Y a-t-il quelque chose qui les distingue les uns des autres?
M. Traversy : J'ai mentionné un des facteurs en jeu. Je crois que la présence d'un réseau développé et abordable de téléphonie par fil joue un rôle important à cet égard.
Le sénateur Mercer : Je voudrais remercier les témoins d'être venus au comité aujourd'hui. Malheureusement, le sénateur Johnson et le sénateur Bacon ont déjà posé quelques-unes des questions auxquelles je pensais. Il me semble cependant que la disponibilité des services à large bande et des services 3G dans le Canada rural constitue un grand sujet de préoccupation. Nos régions rurales sont éparpillées, et nous avons beaucoup de régions isolées dans le pays. La disponibilité de services 3G et de communications à grande vitesse peut considérablement réduire les distances. J'en ai été témoin dans le Nord, où les jeunes apprennent maintenant des choses qu'ils n'auraient jamais connues autrement.
Je crois que le gouvernement a un rôle à jouer dans ce cas. Il me semblerait raisonnable de demander aux exploitants, lors de la délivrance ou du renouvellement des licences, de respecter certaines conditions et de présenter, par exemple, un plan visant à desservir les régions du Canada qui n'ont pas encore accès aux services 3G et à large bande. Est-ce que ce point de vue est conciliable avec celui du CRTC?
M. Traversy : Nous sommes bien d'accord sur les objectifs. Il est évident que l'extension des services à large bande aux régions rurales constitue un objectif que nous devrions essayer d'atteindre. Nous devons examiner différents moyens d'y parvenir, en recourant aussi bien aux réseaux par fil qu'aux réseaux sans fil.
Nous avons toujours essayé de faire en sorte que notre réglementation établisse le cadre voulu et encourage les fournisseurs — surtout les sociétés de câblodistribution et de transmission par fil — à étendre leurs réseaux aussi loin que possible.
Je crois que les statistiques prouvent que nos initiatives ont eu du succès. Du côté de la câblodistribution, vous constaterez que la majorité des Canadiens ont accès à des services par câble. Je crois que c'est le cas de 92 p. 100 des Canadiens. Pour ce qui est de la téléphonie par fil, c'est encore plus élevé, la quasi-totalité de la population y ayant accès. Par conséquent, nos encouragements et nos règlements ont porté fruit. Du côté des services sans fil, nous avons actuellement une couverture de 98 p. 100 au Canada, ce qui est vraiment très étendu.
Bien sûr, il reste encore du travail à faire et nous devons constamment essayer de progresser. Par ailleurs, les conditions de délivrance des licences pour les services sans fil sont définies par Industrie Canada et non par le CRTC.
Le sénateur Mercer : J'ai été surpris d'apprendre, en lisant le rapport d'une récente étude du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts sur la pauvreté rurale, que cette question figurait parmi les quatre premiers problèmes mentionnés dans chaque région, dans chaque coin du pays, dans chaque collectivité des dix provinces et des trois territoires. Cela m'a beaucoup surpris, mais il est évident que, même si les nombres ne sont pas très grands, la question est extrêmement importante pour les intéressés.
En 1999, le CRTC a publié une ordonnance d'exemption relative aux entreprises de radiodiffusion des nouveaux médias et, en 2007, une ordonnance d'exemption pour les entreprises de télédiffusion mobile. Le CRTC réexamine actuellement les nouveaux médias. Quels changements importants se sont produits depuis 1999 qui influent sur la politique relative aux nouveaux médias et à la radiodiffusion? Quel rôle les services sans fil 3G sont-ils appelés à jouer dans la radiodiffusion au Canada? Comment les autres pays gèrent-ils les nouveaux médias et la radiodiffusion?
M. Traversy : Comme vous le savez, le CRTC a récemment entrepris une importante étude sur les nouveaux médias. Le Conseil examine justement certaines des questions que vous avez posées.
Il est évident que le marché a connu d'importants changements. Les Canadiens ont maintenant accès à des services vidéo et à d'autres services de radiodiffusion au moyen de dispositifs, de réseaux et de plates-formes qui n'existaient pas dans le passé. Cela a occasionné une grande fragmentation du marché. Le Conseil étudie actuellement la situation.
Le sénateur Mercer : Je vais passer à un sujet légèrement différent. Il est d'ailleurs bien possible que vous n'ayez rien à voir avec cette affaire. Dans sa décision de télécom CRTC 2008-6, le conseil a fait abstraction — je ne vois pas ce que je peux dire d'autre — du témoignage de parlementaires devant le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes, lors de l'étude du projet de loi sur la liste nationale des abonnés auto-exclus. Le CRTC n'a pas tenu compte du fait que les parlementaires ont demandé expressément que les organismes de bienfaisance soient exemptés. Il a maintenant imposé à ces organismes des frais pour la gestion de la liste nationale qu'ils géraient déjà, ce qui est plutôt drôle.
Comment expliquez-vous que le CRTC qui, à mon avis, est chargé de mettre en œuvre des politiques s'occupe maintenant d'en établir?
M. Traversy : Vous parlez des exemptions de la liste nationale des abonnés auto-exclus qui s'appliquent aux organismes de bienfaisance enregistrés. Je peux vous donner l'assurance que ces exemptions sont en place et que nous en tenons compte. Lorsque nous examinons des plaintes concernant la liste, les organismes de bienfaisance sont bel et bien exemptés.
Je crois que vous pensez plutôt à notre projet de déléguer nos pouvoirs d'enquête concernant les plaintes. Les mesures législatives adoptées nous donnent le droit de le faire. Dans notre projet initial, l'une des formules de financement proposées consistait à répartir les frais d'enquête découlant de la délégation de pouvoirs entre tous ceux qui sont inscrits sur la liste nationale, ce qui comprendrait les organismes de bienfaisance.
Je peux vous dire qu'après la publication de notre appel de propositions destiné à trouver quelqu'un pour faire ce travail, nous n'avons pu trouver aucune proposition conforme à nos critères. À l'heure actuelle, le CRTC n'impose pas du tout aux organismes de bienfaisance des frais quelconques liés à la liste nationale des abonnés auto-exclus.
Le sénateur Mercer : Je veux mettre en garde le CRTC — je serai encore au Parlement pendant 14 ans — car je trouve vraiment regrettable qu'on ne tienne pas compte des recommandations expresses formulées à ce sujet par des parlementaires de tous les partis devant les deux comités. J'ai l'intention de suivre de près cette affaire.
Le sénateur Zimmer : Il y a actuellement un débat au sujet de l'abordabilité des services de télécommunications au Canada par rapport aux autres pays. Nous comparons peut-être des pommes et des oranges. Plus tôt ce mois-ci, vous avez allégé vos exigences en cessant de demander aux fournisseurs des rapports sur l'abordabilité de leurs services de télécommunications. À ma connaissance, vous devez, dans le cadre de votre mandat, veiller à la prestation de services de télécommunications fiables à des prix abordables.
Pouvez-vous me dire à quelles sources, à part les enquêtes de Statistique Canada, vous avez l'intention de recourir pour surveiller l'abordabilité des services au Canada par rapport aux autres pays?
M. Traversy : Vous faites allusion à une décision publiée au cours des deux dernières semaines. Nous avons essayé de rationaliser les exigences relatives aux rapports que le conseil impose actuellement à certains fournisseurs de services de télécommunications.
Dans le cadre de nos opérations courantes, nous examinons nos régimes et nos mesures de réglementation à la lumière des orientations stratégiques du gouvernement et des directives que nous a données le Parlement. Je veux parler d'une modification de la Loi sur les télécommunications qui nous demande d'essayer, dans la mesure du possible, de nous appuyer sur les forces du marché, s'exerçant dans un environnement compétitif, pour alléger le fardeau réglementaire actuellement imposé à certains fournisseurs de services de télécommunications.
Pour rendre la décision en question, nous avons passé en revue cinq ou six rapports différents, que nous avons examinés tour à tour, y compris le rapport sur l'abordabilité, pour déterminer si nous avions besoin de l'information fournie dans nos activités courantes ou s'il était possible d'obtenir les mêmes renseignements en puisant à d'autres sources. Par exemple, pouvons-nous accéder aux mêmes chiffres en analysant le contenu de sites web ou encore de publications ou de rapports produits par Statistique Canada?
Nous avons constaté que l'information qui nous est actuellement fournie est également transmise à Statistique Canada. Nous avons donc pensé qu'il était possible d'alléger le fardeau et d'éliminer une exigence de production de rapports parce que nous sommes certains de pouvoir obtenir les mêmes renseignements d'une autre source. Nous avons quand même précisé dans cette décision que nous nous réservons le droit, en vertu de la Loi sur les télécommunications, de demander des renseignements particuliers à n'importe quel fournisseur si nous en avons besoin à un moment donné.
Le sénateur Zimmer : Il est de plus en plus évident, dans de nombreux pays, que la popularité des services téléphoniques par fil est en perte de vitesse. La technologie est en train de supprimer beaucoup des avantages des télécommunications par fil. De nombreux consommateurs trouvent commode d'avoir un seul numéro de téléphone, ce qui avantage le téléphone cellulaire. À mesure que la fiabilité de la téléphonie cellulaire augmente, les arguments militant en faveur de la téléphonie conventionnelle s'amenuisent. En fait, beaucoup de gens comptent de plus en plus sur leur téléphone portable ou leur téléphone intelligent pour répondre à leurs besoins de communications.
Est-ce que le CRTC a constaté le même phénomène au Canada? Si oui, dans quelle mesure? Si non, quels sont les principaux facteurs qui entravent la transition?
M. Traversy : C'est un phénomène intéressant qui se manifeste dans tous les pays, y compris le Canada, particulièrement parmi les jeunes. Nous suivons les statistiques à ce sujet. Nous savons, par exemple, qu'entre 6 et 7 p. 100 des ménages canadiens utilisent exclusivement des téléphones cellulaires. Ils ont pris cette décision en fonction de différents facteurs. Certains trouvent le téléphone portable plus commode et se demandent donc s'il vaut vraiment la peine d'avoir à la fois le téléphone conventionnel et le téléphone cellulaire.
Les chiffres varient d'une région à l'autre du pays. Ils atteignent 10 p. 100 ou un peu plus à Vancouver. Parmi les jeunes qui quittent le domicile de leurs parents, beaucoup décident de ne pas s'abonner au téléphone conventionnel et d'utiliser uniquement un portable.
C'est un résultat de la maturité de l'industrie. Les gens constatent que la téléphonie cellulaire est fiable, presque aussi fiable que la téléphonie conventionnelle. La décision que prennent les Canadiens se fonde donc sur le prix ou sur les fonctionnalités souhaitées.
Le sénateur Zimmer : De quelle façon les services sans fil 3G, les appareils iPhone et les téléphones intelligents se répercutent-ils sur la représentation, la surveillance et la préservation des langues officielles du Canada?
Michel Murray, directeur par intérim, Décisions et opérations, Télécommunications, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes : Je ne peux pas répondre à cette question tout de suite. Pouvons-nous y réfléchir et vous transmettre une réponse plus tard?
Le sénateur Zimmer : C'est très bien. Je vous remercie.
Le sénateur Dawson : J'ai une question sur le même sujet. Comme vous le savez, les nouveaux appareils sont beaucoup moins des téléphones que des téléviseurs. Les gens s'en servent pour regarder la télévision et des vidéos et pour écouter de la musique. À titre francophone, je suis un peu inquiet. À cause de la transition vers cette nouvelle technologie, toutes les règles que le CRTC et le gouvernement du Canada ont établies au cours des 30 ou 40 dernières années pour réserver une place suffisante aux services de langue française sont en train de tomber à l'eau.
Vous avez dit à plusieurs reprises, monsieur Traversy, que vous n'avez plus de pouvoirs. Le CRTC a décidé de ne plus s'occuper d'Internet, ce que je peux comprendre parce que les choses vont beaucoup trop vite dans ce domaine.
Je voudrais connaître votre avis au sujet des services G4. Nous sommes en présence d'un fossé numérique avec un taux de pénétration de 98 p. 100 et un taux d'utilisation de 72 p. 100. D'après l'OCDE, le Canada est l'un des pays qui utilisent le moins les communications sans fil. Ce fossé numérique m'inquiète sur le plan linguistique et sur le plan technologique car, même si 2 et 22 p. 100 ne semblent pas constituer de trop grands pourcentages, ils se situent toujours dans les collectivités rurales. Dans ces collectivités, il est difficile d'établir de petites entreprises et des services de communication parce qu'elles ne sont pas desservies.
Dans le temps, le CRTC estimait qu'il lui incombait d'encourager l'interfinancement grâce auquel les marchés éminemment rentables de Montréal, Québec et Toronto subventionnaient l'établissement de lignes téléphoniques dans le Canada rural.
De toute évidence, ce n'est pas votre faute. Je n'essaie pas de vous blâmer, mais nous avons renoncé à cette responsabilité d'interfinancement et autorisons les entreprises à limiter leurs activités aux marchés lucratifs. Les sept nouvelles sociétés ne vont pas établir leurs réseaux dans le Canada rural. Elles cibleront les beaux marchés du centre- ville et tenteront de les pénétrer au moyen — j'en conviens avec vous — de produits originaux et de prix novateurs. Toutefois, cela ne fera que creuser le fossé numérique entre le Canada urbain et rural, ce qui aura inévitablement des répercussions sur l'emploi dans les collectivités rurales.
Pour revenir à ma question, qu'est-ce que le CRTC pense de l'utilisation du téléphone comme récepteur de télévision? De quelle façon cela influera-t-il sur nos responsabilités vis-à-vis du bilinguisme au Canada?
Nous admettons que nous sommes toujours un peu à la traîne chaque fois que nous sommes en présence d'une nouvelle technologie. Nous disons maintenant que les services G3 ont un taux de pénétration de plus de 60 p. 100. Y a- t-il un moyen d'influencer, dans le cadre de l'attribution des licences, les premiers qui offriront des services G4? Vous avez réalisé une enquête au sujet des nouvelles lignes et avez constaté qu'il n'y a pas beaucoup de restrictions. Il y a 30 ans, quand Bell et d'autres demandaient une licence pour gagner de l'argent, le CRTC la leur accordait, mais l'assortissait de conditions. Aujourd'hui, vous vendez vos licences, mais n'imposez aucune condition.
Avec la venue de la G4, si nous anticipons une aggravation du fossé numérique, nous, à titre de législateurs, et vous, à titre d'organisme de réglementation, devrions peut-être réfléchir à l'avenir. Si nous voulons réduire l'écart qui se creuse entre ceux qui disposent de services de première catégorie, sans fil et autrement, et ceux qui n'en ont pas, nous devrions peut-être envisager d'imposer des conditions le plus tôt possible. C'est à cela que nous réfléchirons probablement dans les quelques prochains mois pour avoir la possibilité de partir du bon pied cette fois-ci. Nous pouvons imposer des conditions soit au niveau de l'interfinancement soit par voie réglementaire pour nous assurer de ne pas creuser davantage le fossé numérique.
M. Traversy : Je vous remercie de votre question. Vous avez demandé des renseignements au sujet des services 4G émergents, de leurs effets sur le fossé numérique et de la possibilité pour les Canadiens qui les utilisent d'accéder à des services de radiodiffusion. De plus, vous vous inquiétez des langues officielles.
Le sénateur Dawson : Je m'inquiète aussi du contenu canadien, pas seulement du caractère bilingue des services.
M. Traversy : Vous avez également posé une question au sujet de l'interfinancement qui s'est fait dans le passé.
Il n'y a pas de doute que les Canadiens, et particulièrement les jeunes, demandent de plus en plus de services sans fil à large bande. À mon avis, nous assisterons à une migration entre les services fixes et les applications mobiles sur Internet. Nous nous orientons vers la lecture vidéo en continu, le téléchargement de musique, la télé mobile et la téléphonie sur protocole Internet ou VoIP. Nous aurons besoin de la capacité de répondre à une demande en croissance rapide de nouveaux dispositifs sans fil de la part d'une nouvelle génération de consommateurs. Vous avez raison de dire que la tendance est à l'utilisation croissante de services vidéo sur différentes plates-formes.
Le conseil a récemment réalisé une vaste étude au sujet des effets de ce phénomène sur la radiodiffusion. Comme je l'ai dit, la question est actuellement à l'étude, ce qui m'empêche d'aller trop loin à cet égard. Nous publierons une décision dans les prochains mois. Le conseil examine soigneusement la question, qui est à l'étude depuis un an et demi, afin d'en comprendre les ramifications, notamment en ce qui concerne les langues officielles.
C'est une question de radiodiffusion. Je n'irai pas plus loin à ce sujet parce qu'elle est actuellement à l'étude. Nous sommes venus au comité pour parler plus particulièrement des télécommunications. Je sais bien qu'il y a convergence entre les deux domaines.
Au sujet de l'interfinancement, il est vrai que, lors du développement des services de téléphonie par fil, nous avions affaire à une situation de monopole dans laquelle l'interfinancement avait sa place. C'est toujours le cas. Tous les abonnés des services de télécommunications subventionnent les services offerts dans les zones à coût élevé pour qu'il soit possible aux Canadiens d'avoir accès à des services téléphoniques par fil à des taux raisonnables partout dans le pays.
Au stade du développement des réseaux, il y avait des monopoles dans chaque territoire. Nous tentions d'étendre le service téléphonique de base à tous les coins du pays. À l'arrivée des services sans fil, cet objectif était déjà atteint. Nous avions déjà un réseau perfectionné de téléphonie par fil. Il a donc été possible d'avoir un environnement concurrentiel dès le départ. C'est alors qu'a été prise la décision de laisser jouer les forces du marché.
Le sénateur Dawson : Avant d'en arriver à l'attribution de licences ou à des ventes aux enchères relativement aux services G4 — je ne sais pas si c'est ainsi que vous les appelez —, sera-t-il possible de songer à concevoir un système qui, pour le moins, ne creusera pas davantage le fossé numérique qui sépare le Canada urbain du Canada rural?
M. Traversy : Une autre vente aux enchères aura lieu. C'est la responsabilité d'Industrie Canada qui, j'en suis sûr, élabore déjà des politiques à ce sujet. Il y aura un dividende numérique lors de la transition de l'analogique au numérique. Des décisions devront être prises dans le cadre de l'organisation de cette vente aux enchères.
Le sénateur Housakos : Je voudrais reprendre la question de l'écart entre le rural et l'urbain et la disponibilité de services à large bande dans les régions rurales. J'ai l'impression que le plan d'action actuel consiste, si j'ai bien compris, à organiser encore plus de ventes aux enchères et à renforcer encore plus la concurrence. Qu'arrivera-t-il dans quelques années quand nous nous apercevrons que cela ne marche pas parce que les nouveaux arrivés veulent s'établir dans les marchés lucratifs et que, malheureusement, à cause de la dispersion de la population, le Canada rural ne rapporte pas beaucoup?
Dans quelques années, nous serons revenus à notre point de départ. Quel est le plan de secours? D'après les réponses que vous nous avez données ce soir, il semble qu'il n'y a pas de plan B.
M. Traversy : Le conseil n'a pas pour rôle d'élaborer des politiques visant à étendre les réseaux. J'ai dit, dans mon exposé préliminaire sur les services à large bande, que les gouvernements ont mis en place un certain nombre de programmes. Chaque province, chaque territoire a un programme. Je vous ai parlé du programme annoncé il y a quelque temps, dont la presse a parlé aujourd'hui. Le Nouveau-Brunswick a conclu un partenariat avec le secteur privé pour veiller à ce que les Canadiens ruraux aient accès aux réseaux Internet à grande vitesse partout dans la province. J'ai également dit que le gouvernement fédéral a prévu, dans le cadre de son plan de relance, 225 millions de dollars pour une stratégie destinée à étendre les services à large bande dans le Canada rural. Il y a donc des programmes destinés à améliorer la situation.
Le sénateur Housakos : Est-ce que ces fonds doivent servir au financement d'un programme particulier?
M. Traversy : Notre rôle à cet égard est de surveiller la situation pour déterminer à quels endroits ces services sont disponibles. Le conseil ne dispose pas de fonds lui permettant de réaliser des projets d'extension des réseaux à grande vitesse avec ou sans fil. D'après notre mandat, nous devons présenter des rapports sur la situation dans l'industrie et nous assurer de bien comprendre ce qui se passe.
Le sénateur Housakos : Le Canada semble avoir des tarifs de transmission de données qui comptent parmi les plus élevés du monde, surtout par rapport à certains pays européens et même par rapport aux États-Unis. Pour ce qui est de la téléphonie cellulaire, les prix des trois grands fournisseurs présentent de très importants écarts. J'aimerais connaître votre point de vue sur ces écarts. Pourquoi les services sont-ils tellement plus coûteux au Canada?
M. Traversy : Comme je l'ai dit, nous avons entrepris des études destinées à comparer les prix canadiens des services sans fil à ceux d'autres pays. Les chiffres que nous avons obtenus montrent que, dans le cas des grands utilisateurs de la téléphonie cellulaire, les Canadiens se comparent assez bien aux autres pays. Il est intéressant d'examiner les différents forfaits offerts par différents fournisseurs d'un même pays. La comparaison est difficile à faire. Il faut poser un certain nombre d'hypothèses pour en arriver à un dénominateur commun. À l'occasion, il peut être frustrant de comparer les prix des différents fournisseurs du même pays. S'il faut, en plus, faire des comparaisons internationales, c'est encore plus difficile. J'ai lu beaucoup des études réalisées et des critiques formulées, mais c'est un peu comme si on comparait des pommes et des oranges.
Le sénateur Housakos : Croyez-vous que nous devrions définir des règles précises concernant les prix, ou bien faudrait-il tout laisser tel quel?
M. Traversy : Nous avons actuellement cinq fournisseurs attitrés, dont deux sont régionaux et trois, nationaux. Nous aurons sept nouveaux joueurs qui s'ajouteront. Il sera intéressant de voir comment cela influera sur le marché. Il vaudrait la peine de suivre la situation pour comprendre les effets.
Le sénateur Merchant : Quels sont les différences les plus importantes que vous avez relevées entre le Canada et les autres pays?
M. Traversy : Le Canada a un marché intéressant qui se distingue assez nettement de celui de la plupart des pays européens. La majorité des domiciles canadiens ont l'avantage d'avoir deux systèmes de communications par fil. Nous avons un réseau très développé de câblodistribution. Pour la plupart des services de communications, les Canadiens peuvent faire un choix entre différents fournisseurs. L'existence parallèle de compagnies de téléphone et de société de câblodistribution est un phénomène nord-américain. La plupart des autres pays n'ont pas de réseau de câblodistribution. Pour renforcer la concurrence, ils comptent beaucoup plus sur la location d'éléments du réseau de la compagnie titulaire. Voilà l'une des principales différences qu'on constate entre les pays. Le fait pour la plupart des Canadiens d'avoir un second fournisseur de téléphonie par fil est vraiment unique.
Nous avons remarqué les différences et les avons mentionnées ce soir. L'utilisation des services sans fil au Canada est moins importante que dans beaucoup de pays de l'OCDE. C'est un phénomène intéressant. J'ai parlé de l'une des raisons de cet écart, mais il y en a probablement d'autres.
Il peut être très difficile dans certains cas d'essayer de comparer les prix, surtout en ce qui a trait aux services sans fil. Nous avons essayé de le faire chez nous, au CRTC, mais l'exercice peut être extrêmement frustrant.
Le sénateur Merchant : Existe-t-il, à l'échelle internationale, des pratiques exemplaires pouvant servir de modèle au Canada pour l'élaboration de la politique publique ou l'exploitation des sociétés?
M. Traversy : Nous ajouterons cette question à la liste des choses pour lesquelles nous vous fournirons des réponses plus tard. Nous transmettrons des observations à ce sujet à la greffière du comité.
Le sénateur Johnson : Avez-vous une idée de la nature et du nombre des plaintes que le conseil reçoit au sujet des services de télécommunications sans fil?
M. Traversy : Il y a un rapport annuel que j'ai lu récemment. Je sais que le CRTC est responsable de l'examen des plaintes concernant tous les services déréglementés, dont les services sans fil constituent une importante partie. Si les Canadiens ont des préoccupations ou sont en désaccord avec leur fournisseur de services sans fil, ils peuvent déposer une plainte auprès du commissaire aux plaintes relatives aux services de télécommunications. Je n'ai pas ici les chiffres concernant les plaintes, mais je peux les fournir au comité.
Le sénateur Johnson : Je voulais simplement savoir à quel point les abonnés sont satisfaits des services.
[Français]
M. Murray : Le sénateur Dawson a parlé des communautés en situation minoritaire; j'ai une anecdote à ce sujet. Je suis originaire d'un petit village de la Gaspésie. Mon village, situé près de Matane, a déjà accès aux services à larges bandes grâce à une initiative d'Industries Canada, et ce, depuis plusieurs années. Il y a deux ans déjà, durant les deux ou trois jours où j'étais en vacances dans mon village, on a reçu une carte postale d'un concurrent qui offrait des services, Barrett Xplore. Pour les communautés isolées, francophones, c'est intéressant d'avoir accès à tout ce contenu au bout des doigts. Cela peut également avoir pour effet de rapprocher les communautés.
[Traduction]
La présidente : Je vous remercie d'avoir comparu devant le comité aujourd'hui. Les renseignements complémentaires que vous transmettrez à la greffière seront distribués aux membres du comité.
(La séance est levée.)