Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 4 - Témoignages du 10 juin 2009
OTTAWA, le mercredi 10 juin 2009
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, auquel a été déféré le projet de loiC-7, Loi modifiant la Loi sur la responsabilité en matière maritime, la Loi sur les Cours fédérales et d'autres lois en conséquence, se réunit aujourd'hui à 18 h32 pour en faire l'examen.
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Nous recevons aujourd'hui le ministre. Je vous souhaite de nouveau la bienvenue, monsieur Baird, à la présente réunion portant sur le projet de loiC-7, Loi modifiant la Loi sur la responsabilité en matière maritime, la Loi sur les cours fédérales et d'autres lois en conséquence.
Nous accueillons également Tim Meisner, directeur général, Politique maritime, Transports Canada; M.Jerry Rysanek, directeur, Politique maritime internationale, Transports Canada; et M.Mark Gauthier, avocat général, Droit maritime, Transports Canada. Je crois que M.Brian Jean se joindra à nous sous peu.
Monsieur le ministre, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous allons commencer par écouter votre déclaration préliminaire, et nous vous poserons ensuite des questions. La parole est à vous.
[Français]
L'honorable John Baird, C.P., député, ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités: Merci beaucoup, madame la présidente. C'est bien sûr un grand plaisir pour moi de vous rencontrer pour cette importante occasion.
[Traduction]
Je suis heureux d'être ici pour examiner le projet de loiC-7, Loi modifiant la Loi sur la responsabilité en matière maritime, la Loi sur les cours fédérales et d'autres lois en conséquence. Au Canada, comme c'est le cas dans toutes les principales puissances économiques, le commerce est un moteur important de l'économie.
La présidente: Parlez plus lentement, s'il vous plaît — les sténographes doivent transcrire votre discours.
M.Baird: Au Canada, comme dans toutes les grandes puissances économiques, le commerce est un moteur important de l'économie. Il n'est guère surprenant, compte tenu de notre géographie, que le transport maritime joue un rôle de premier plan dans notre système commercial en général. À l'heure actuelle, les navires transportent 20p.100 du volume des exportations canadiennes à destination des États-Unis et 95p.100 de la valeur des exportations du Canada vers d'autres pays.
Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui, le projet de loiC-7, modernisera la Loi sur la responsabilité en matière maritime de façon à protéger notre environnement des risques liés au transport maritime. Le projet de loi accomplira cette tâche en protégeant davantage les contribuables contre les conséquences financières d'un déversement d'hydrocarbures, qui peut être particulièrement dévastateur; en exigeant que les armateurs souscrivent une assurance pour protéger les intérêts des passagers pendant qu'ils sont à bord de navires canadiens; en supprimant les dispositions astreignantes qui menacent la viabilité du secteur du tourisme d'aventure maritime; enfin, en mettant les entreprises canadiennes qui offrent des biens et des services à crédit aux armateurs sur un pied d'égalité avec leurs concurrents américains en ce qui a trait au remboursement de ce crédit.
Ces modifications sont importantes. Même si notre gouvernement a fait progresser la sécurité du transport maritime en appliquant les modifications nécessaires aux règlements de sécurité en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, ces mesures ne peuvent à elles seules éliminer tous les risques liés au transport maritime. Lorsque les choses tournent mal et que des accidents se produisent, les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement s'assure que leurs intérêts sont protégés par des mesures législatives modernes prévoyant notamment une indemnisation appropriée. Les Canadiens croient que les pollueurs devraient payer pour les dommages causés par un navire ou sa cargaison, et leur gouvernement est du même avis.
Depuis 2005, Transports Canada a consulté les intervenants des secteurs de l'industrie maritime, du droit maritime, de l'assurance maritime et du tourisme maritime. Ces intervenants appuient les modifications contenues dans le projet de loiC-7. Ils reconnaissent l'importance de moderniser la Loi sur la responsabilité en matière maritime de manière à pouvoir faire face aux réalités d'aujourd'hui. Ils comprennent que la Loi doit continuer à protéger les Canadiens, et ils sont conscients de la nécessité d'harmoniser la Loi canadienne avec les diverses conventions internationales. Le gouvernement a pris acte de ces préoccupations et a pris des mesures pour y remédier.
Le projet de loiC-7 apporte cinq changements majeurs. Tout d'abord, les modifications proposées protégeront les Canadiens contre les conséquences financières des déversements provenant de pétroliers. Personne n'ignore que les déversements d'hydrocarbures peuvent être dévastateurs, autant pour l'environnement que pour l'économie. Même si le Canada n'a pas subi d'accident majeur de l'ampleur du désastre de l'Exxon Valdez, les modifications proposées garantiront une indemnisation suffisante aux personnes touchées par les déversements. Cela se traduirait par une augmentation de l'indemnisation versée aux pêcheurs dont la pêche est fermée ou aux collectivités côtières dont l'économie et les entreprises locales sont compromises en raison d'un déversement d'hydrocarbures. Et surtout, ces modifications font en sorte que cette indemnisation serait versée non pas par les contribuables, mais par les pollueurs.
Dans sa version actuelle, la Loi sur la responsabilité en matière maritime prévoit une indemnisation d'environ 500 millions de dollars pour les victimes d'un déversement d'hydrocarbures, y compris une indemnisation du Fonds international d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, le FIPOL. Nous proposons également des modifications afin de protéger les Canadiens contre les conséquences financières des rejets d'hydrocarbures de soute. À l'heure actuelle, la Loi sur la responsabilité en matière maritime oblige seulement les pétroliers à souscrire une assurance pour couvrir leur responsabilité pour les déversements d'hydrocarbures. Toutefois, la plupart des navires transportent, pour des fins de propulsion, de grandes quantités d'hydrocarbures de soute qui peuvent provoquer des dommages considérables. Le projet de loiC-7 permettra la mise en œuvre de la Convention sur les hydrocarbures de soute et l'adhésion du Canada à celle-ci, ce qui fera en sorte que les populations côtières du Canada bénéficieront du même niveau de protection financière contre les déversements d'hydrocarbures de soute que les populations côtières d'autres pays.
Le projet de loiC-7 prévoit également la souscription obligatoire d'une assurance pour la protection des passagers. Actuellement, toutes les compagnies aériennes doivent souscrire une assurance couvrant leur responsabilité envers les passagers. Cependant, on ne peut en dire autant des traversiers et des autres navires commerciaux qui transportent des passagers. Pourquoi les règles devraient être différentes? Les modifications que nous proposons permettent de changer cela.
Le projet de loi veillera également à ce que le secteur du tourisme d'aventure maritime, y compris les entreprises de descente en eaux vives et les activités de kayak de mer, continue d'être viable. Les activités de tourisme maritime de ce genre créent des milliers d'emplois dans certaines des régions les plus rurales du Canada et procurent un revenu à des résidents de ces régions, par exemple, non loin d'ici, à l'extérieur d'Ottawa, dans le comté de Renfrew. Dans sa version actuelle, la Loi sur la responsabilité en matière maritime traite les personnes qui participent à des activités de tourisme d'aventure maritime comme des passagers de n'importe quel autre bâtiment commercial, par exemple les gros traversiers qui transportent des personnes et des véhicules le long de nos côtes.
À mon avis, le projet de loiC-7 permet d'établir un juste équilibre. Les modifications proposées protégeront les entreprises canadiennes qui offrent des provisions aux bateaux de service. Le transport maritime est une industrie internationale, mais il peut avoir des répercussions importantes sur les entreprises locales. Cela est particulièrement vrai pour les entreprises canadiennes qui fournissent des biens et des services aux navires battant pavillon étranger qui accostent dans nos ports en provenance du monde entier. La plupart de ces biens et services sont fournis à crédit. Au moment d'obtenir le remboursement de ce crédit, les fournisseurs canadiens ne peuvent se prévaloir du privilège maritime devant un tribunal canadien, alors qu'un concurrent des États-Unis peut le faire. Souvent, le fournisseur canadien ne peut recouvrer, par l'entremise d'un tribunal canadien, la somme due, même pas la plus petite portion du coût des biens fournis à un navire, alors qu'une société américaine peut être remboursée intégralement. Nous avons écouté les préoccupations des entreprises canadiennes qui approvisionnent les navires, et nous convenons que cela est tout simplement injuste.
Tous les partis qui siègent à la Chambre des communes ont appuyé le projet de loiC-7. Le Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités a travaillé pour améliorer le projet de loi après avoir consulté de nombreux intervenants. Le projet de loiC-7 a reçu un vaste appui des intervenants, et toutes les parties intéressées sont heureuses de constater qu'il s'agit d'une priorité pour le gouvernement. Le message qu'on nous a transmis, c'est que le projet de loi permet d'établir un juste équilibre.
Je suis heureux de me présenter devant le comité et je répondrai avec plaisir à toutes les questions qui me seront posées.
La question du droit maritime est extrêmement complexe. Le ministère dispose d'experts en la matière qui ont mené des consultations et qui ont effectué un travail colossal sur le sujet. Je me réjouis de leur présence à mes côtés aujourd'hui, de même que de la présence de mon secrétaire parlementaire, M.Jean.
[Français]
La présidente: Avec le projet de loiC-7, vous créez un privilège maritime sur les navires étrangers comme garantie aux fournisseurs canadiens advenant des factures impayées. On retrouve cela à l'article12 de la loi. L'Association des armateurs canadiens appuie cette disposition, mais s'oppose à toute modification au projet de loiC-7, qui imposerait un tel privilège aux flottes canadiennes. Vous aviez l'intention de proposer des amendements pour mettre en place un privilège maritime sur les navires canadiens aussi?
[Traduction]
Jerry Rysanek, directeur, Politique maritime internationale, Transports Canada: La disposition contenue dans le projet de loi s'applique expressément aux navires battant pavillon étranger, et cela n'est pas du tout un hasard puisque le problème de factures impayées avec lequel sont aux prises les fournisseurs canadiens concerne dans une large mesure ces navires.
L'Association des armateurs canadiens, à laquelle vous faites allusion, est tout à fait au courant de cela et est très préoccupée par tout élargissement éventuel de cette disposition et de son application aux armateurs canadiens. Si le projet de loiC-7 ne prévoit pas un tel élargissement, c'est que les fournisseurs canadiens disposent d'une pléthore d'autres moyens pour faire valoir leurs droits dans les cas où le litige les oppose à un armateur canadien — il n'y a donc aucun problème de ce côté-là. C'est la raison pour laquelle la disposition du projet de loi ne vise que les armateurs étrangers — c'est le but recherché.
La présidente: Les membres du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes ont modifié le projet de loi en ajoutant les «passagers clandestins» aux catégories des personnes auxquelles la limite de responsabilité ne s'applique pas. Cela est énoncé aux articles 3 et 8.
Les passages clandestins représentent-ils un problème au Canada? Y a-t-il eu, dans le passé, quelque litige que ce soit entre les entreprises et leurs assureurs à propos de passagers clandestins?
M.Rysanek: Je ne pense pas que les passagers clandestins représentent un problème grave. La modification avait pour but de prévenir toute éventuelle interprétation erronée du projet de loi, qui prévoyait un traitement semblable pour les passagers clandestins et les autres passagers. Ces derniers ont manifestement le droit d'être traités d'une façon très précise. Dans le secteur de l'aviation, comme le ministre l'a mentionné, cela est le cas depuis longtemps, et il existe à présent un régime particulier de responsabilité envers les passagers. Par contre, la Loi sur la responsabilité en matière maritime était muette en ce qui a trait aux intrus et aux passagers clandestins. Pour faire en sorte que les passagers clandestins ne soient pas considérés comme des passagers et qu'ils n'aient donc pas le droit, à l'instar de ces derniers, de recevoir une indemnisation, à présent, la Loi énonce clairement que l'indemnisation à laquelle ont droit les passagers clandestins est très limitée et qu'ils n'ont pas qualité de passagers parce qu'ils sont montés illégalement à bord du navire.
La présidente: Les assureurs ont-ils déjà eu un quelconque problème en raison des passagers clandestins?
M.Rysanek: Non, les mesures que nous avons prises visent non pas à répondre à un problème précis, mais seulement à prévenir tout problème qui pourrait découler de l'absence d'une disposition claire sur cette question.
Brian Jean, Secrétaire parlementaire du ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités: Il s'agissait d'apporter une clarification pour donner suite à une préoccupation qui avait été soulevée.
[Français]
La présidente: Des articles du projet de loiC-7 entreront en vigueur 90 jours après la sanction royale; on parle des articles 1, 10, 12, 14, 16 et 18. D'autres auront besoin de décrets pour être actifs; on pense aux articles 11, 13, 17, 19 et 23, et l'entrée en vigueur à l'article24. Quand pensez-vous mettre en vigueur les autres articles, entre autres, ceux qui touchent la caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causés par les navires? Parce que c'est cela le problème.
M.Baird: Notre priorité est d'agir aussi vite que possible, mais c'est bien sûr essentiel que le travail nécessaire ait été fait. M.Rysanek peut donner les détails précis.
La présidente: Avez-vous des dates précises?
[Traduction]
M.Rysanek: Pour faire suite aux propos du ministre, je tiens à souligner que la date dépend en grande partie du déroulement du processus de ratification des conventions internationales. C'est la raison pour laquelle ces dispositions ont été proposées. Je ne peux pas vous indiquer une date précise, mais nous ferons en sorte que le processus avance le plus rapidement possible.
Le sénateur Johnson: Quelles seront les répercussions de la modification de la Loi sur la responsabilité en matière maritime à l'échelle internationale?
M.Rysanek: Elles seront très positives. Les modifications touchant la pollution, particulièrement la pollution attribuable aux pétroliers, constituent le cœur du projet de loi, comme j'ai l'habitude de le dire, dans la mesure où elles entraîneront l'entrée en vigueur au Canada d'une nouvelle convention internationale, qui se veut une amélioration du régime existant auquel le Canada est déjà partie. Le Canada a pris du retard par rapport à la communauté internationale, et les modifications en question nous permettront de le combler. En outre, grâce à ces modifications, le niveau d'indemnisation passera d'environ 500 millions de dollars par incident à environ 1,5 milliard de dollars si l'incident survient en eaux canadiennes. Ces modifications sont très positives.
M.Jean: En fait, le projet de loi valide deux conventions internationales.
Le sénateur Johnson: Y a-t-il chevauchement dans l'application de la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques et la Loi sur la responsabilité en matière maritime? Quelles autres lois ont pour objet de protéger les eaux canadiennes des dégâts occasionnés par la pollution?
M.Rysanek: Il n'y a aucun chevauchement au chapitre de la responsabilité à l'égard d'un quelconque incident de pollution, qu'il survienne au nord ou au sud du 60e parallèle. En d'autres termes, la Loi sur la responsabilité en matière maritime s'applique uniformément à toutes les eaux canadiennes — dans cette mesure, il n'y a donc aucun chevauchement.
Quant à la prévention de la pollution, il existe diverses lois qui traitent de la sécurité des navires, plus particulièrement la Loi sur la marine marchande du Canada. Cependant, la Loi dont nous parlons ne traite pas de cet aspect. Cela dit, la responsabilité incite à la sécurité.
M.Baird: Nous nous conformons au droit international et nous agissons de concert avec nos principaux partenaires commerciaux, tandis que le projet de loi modifiant la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques, qui recevra la sanction royale sous peu, si j'ai bien compris, traite de l'application au Nord des lois intérieures.
Le sénateur Johnson: Comment le gouvernement gère-t-il les divers fonds d'indemnisation?
M.Rysanek: Deux fonds sont concernés par ces mesures législatives. Le Canada est déjà membre du Fonds international et, en adoptant la nouvelle convention, il deviendra membre du fonds de niveau supérieur. Nous disposons également d'un fonds national, la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, qui existe depuis bon nombre d'années. Ces deux fonds fonctionnent conjointement pour offrir une indemnisation en cas d'incident.
M.Baird: Le premier n'est pas administré par le gouvernement. Le deuxième est géré par le gouvernement, mais dans un compte distinct. Il ne fait pas partie du Trésor. Comme vous pouvez le deviner, cette situation ne plaît pas vraiment au ministère des Finances, mais il s'agit d'un fonds important parce qu'il ne fait pas partie du Trésor. Nous devons pouvoir avoir accès à ce fonds en cas d'urgence. Il ne faut pas que l'argent des contribuables soit mêlé avec l'argent de ce fonds — il s'agit là, je crois, de la clé de voûte du principe du pollueur-payeur.
M.Jean: L'indemnisation maximale s'élève à 1,5 milliard de dollars, et doit être versée d'abord par l'armateur, le Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, et enfin par un fonds supplémentaire.
Le sénateur Mercer: Au Sénat, je me suis prononcé en faveur du projet de loi dont nous parlons, et les représentants de votre ministère m'ont dispensé une excellente séance d'information, et je leur en suis reconnaissant.
Comment les sociétés de traversiers, comme Marine Atlantique et BCFerries, les deux plus importantes sociétés de traversiers du Canada, recouvreront-elles les coûts liés à l'assurance qu'on leur demande de souscrire? Je m'inquiète particulièrement pour Marine Atlantique puisque je viens de la Nouvelle-Écosse.
Est-ce que les coûts seront refilés aux utilisateurs de ces services, plus particulièrement dans la province du sénateur Cochrane, qui est si fortement tributaire des produits provenant de Terre-Neuve-et-Labrador transportés par Marine Atlantique?
M.Baird: Depuis l'incident faisant intervenir un traversier de la Colombie-Britannique sur le Pacifique, nous savons à quel point les assurances sont importantes.
M.Rysanek: Il convient de prendre acte de l'effet des mesures législatives que nous examinons en ce moment. Elles n'ont pas pour effet de modifier le risque ou la responsabilité des armateurs déjà prévu dans la loi. La vaste majorité des armateurs ont déjà souscrit une assurance pour couvrir cette responsabilité, comme tout armateur prudent devrait le faire. Pour eux, le présent projet de loi n'apporte rien de nouveau. Depuis longtemps, ils sont assujettis à des montants précis — ils sont bien couverts et ils ont déjà acquitté les frais d'assurance exigés.
Le projet de loiC-7 réglera un problème qui ne touche qu'une petite minorité d'armateurs, à savoir ceux qui n'ont peut-être pas souscrit d'assurance parce que celle-ci n'est pas obligatoire et qui économisent sur les primes d'assurance parce qu'ils ne pourraient peut-être pas bénéficier d'une couverture complète. Les présentes mesures législatives auront une certaine incidence sur eux — ils devront prendre en charge les frais d'assurance exigés. C'est comme ça que fonctionne un régime d'assurance obligatoire.
Le sénateur Mercer: Je ne suis pas un grand admirateur des compagnies d'assurance. À mon avis, leurs pratiques s'apparentent parfois à de l'extorsion autorisée par la loi. Toutefois, dans l'éventualité où nous obligeons les gens qui ne sont pas couverts à l'heure actuelle à souscrire une assurance, comment ferons-nous pour les protéger contre les compagnies d'assurance qui profiteront de ce caractère obligatoire pour gonfler leurs frais?
M.Baird: Selon que l'armateur est visé par la réglementation provinciale ou fédérale et en fonction du type de flotte qui doit être assurée, le surintendant des institutions financières pertinent assure une certaine protection des consommateurs. Nous estimons que les mesures de protection des consommateurs qui sont en place à l'heure actuelle sont relativement convenables.
M.Rysanek: Je suis d'accord avec cela. Cette obligation est déjà en vigueur dans le secteur de l'aviation — elle s'applique à toutes les compagnies aériennes, les petites comme les grandes. Le marché de l'assurance est passablement concurrentiel, et la concurrence fera son œuvre. Il n'y a pas de doute là-dessus. Pour exploiter votre entreprise, vous devez souscrire une assurance — c'est ce qu'il faut entendre par «assurance obligatoire».
Le sénateur Mercer: Mon commentaire concerne la protection des fournisseurs — il s'agit d'une excellente disposition. Dans ma ville natale, il y a d'importants fournisseurs de biens et de services aux chargeurs. Pour eux, il s'agit d'une excellente protection, et nous sommes heureux que cette disposition fasse partie du projet de loi.
J'aimerais revenir à la question posée par la présidente à propos des passagers clandestins et d'un éventuel problème à cet égard au Canada. Cette question est demeurée sans réponse. Vous avez fourni une réponse à propos d'un autre aspect technique, mais vous n'avez pas répondu à la question de savoir s'il existe un problème en ce qui a trait aux passagers clandestins. Je sais que cela arrive parfois — à Halifax, ma ville natale, nous avons déjà eu ce problème. En général, le ministère considère-t-il qu'il s'agit là d'un problème permanent?
M.Baird: Selon nous, il ne s'agit pas d'un énorme problème. La question des passagers clandestins a été soulevée par un témoin devant un comité. Je pense que le comité permanent de la Chambre a donc décidé de tirer la question au clair dans le cadre des modifications. Il s'agit d'une modification qui a été proposée par le gouvernement. Je ne sais pas si nous tenons des statistiques quant au nombre de passagers clandestins. Nous pouvons examiner cela et vous fournir une réponse ultérieurement.
Cette disposition particulière porte davantage sur la responsabilité des passagers que sur les passagers clandestins, et il n'est pas inutile d'apporter une modification pour faire la lumière sur la question de savoir qui est considéré comme un passager et qui ne l'est pas. De toute évidence, la présence d'un passager clandestin pose des problèmes aux transporteurs.
Le sénateur Mercer: Je comprends cela. Je posais la question simplement à titre informatif.
M.Baird: Nous fournirons une réponse au comité.
Le sénateur Cochrane: Dans ma province, Terre-Neuve-et-Labrador, le tourisme maritime d'aventure est une industrie florissante. L'observation des baleines, le kayak de mer et les excursions en bateau sont des activités qui attirent beaucoup le public, particulièrement pendant l'été.
Quelle sera l'incidence de ces mesures législatives sur cette industrie? Quelle sera leur incidence sur les gens qui font partie de cette industrie? Je pense aux propriétaires et aux exploitants d'entreprises, et également aux clients.
M.Baird: Dans les trois activités que vous avez mentionnées, il existe probablement une différence fondamentale entre, disons, un participant et, à défaut d'un meilleur mot, un passager. Dans le cas de l'observation des baleines ou d'une excursion en bateau, les personnes qui prennent part à ces activités sont des passagers, mais dans le cas du kayak, le troisième exemple que vous avez évoqué, de même que dans le cas d'une descente en eaux vives, dont j'ai parlé plus tôt, la personne a davantage qualité de participante — il ne s'agit pas tout à fait d'un employé ni d'un passager, mais de quelque chose entre les deux. Ces activités sont extrêmement populaires, non seulement à Terre-Neuve, mais également dans l'est de l'Ontario, d'où je viens, et il s'agit d'une importante source de préoccupations.
M.Jean: Je peux signaler au comité que nous avons entendu des témoignages sur cette question particulière selon lesquels les exploitants de ce type d'entreprise seraient incapables de poursuivre leurs activités si cette disposition continue de s'appliquer à eux. Nous avons entendu dire que cette disposition aurait un effet absolument dévastateur sur l'industrie du tourisme.
M.Baird: Un participant devrait avoir à assumer une responsabilité beaucoup plus élevée qu'un passager. C'est pourquoi nous employons l'expression «tourisme d'aventure» — en d'autres termes, il s'agit de tourisme extrême. Monter à bord d'un avion et faire du saut en chute libre, ce n'est pas du tout la même chose. Être passager sur un bateau d'excursion et participer à une activité de kayak, ce n'est pas du tout la même chose. Nous souhaitons que les intervenants de ce secteur comprendront que leur viabilité à long terme se verra renforcée.
À mes yeux, nous n'accordons pas suffisamment d'attention au tourisme. Nous avons énormément de potentiel à cet égard, que ce soit à Terre-Neuve, dans l'est de l'Ontario ou à Nahanni, où nous venons tout juste d'agrandir le parc. Nous avons un potentiel énorme, et il est à souhaiter que ces mesures dissiperont certaines des craintes légitimes exprimées par les différents acteurs de l'industrie.
Le sénateur Cochrane: Avez-vous discuté avec les exploitants et les propriétaires d'entreprises du secteur du tourisme?
M.Baird: Oui. À cet égard, les exploitants et les propriétaires semblaient satisfaits, et ils ont appuyé cette section du projet de loi. Je serais malhonnête si je ne vous disais pas qu'ils ont fait part d'un bon nombre d'autres préoccupations à Transports Canada, mais en ce qui a trait aux questions relatives à la responsabilité, des modifications ont été apportées il y a environ huit ans, pour régler certains problèmes.
Le sénateur Cochrane: Qu'avez-vous à dire en ce qui concerne les déversements d'hydrocarbures? Dans ma région, au fil des ans, nous avons eu notre lot de problèmes à cet égard. Les déversements d'hydrocarbures tuent des oiseaux — ils occasionnent toutes sortes de dégâts. Je pense que personne n'admet être à l'origine de tels déversements. Peu d'efforts ont été déployés pour éviter que ce type d'incident ne se produise.
M.Rysanek: Il existe une responsabilité civile pour ce qui est des déversements d'hydrocarbures, et les dispositions législatives canadiennes en la matière ne sont pas nouvelles. Ces dispositions sont en place depuis un bon moment.
Les modifications ont pour effet d'élever le niveau d'indemnisation lié à tout déversement d'hydrocarbures, y compris les coûts liés aux dommages environnementaux. Ainsi, dans ce sens, il y aura plus d'argent. Cependant, il ne s'agit pas de mesures législatives en matière de sécurité — il s'agit de mesures législatives en matière de responsabilité.
M.Baird: Ce que je souhaite, c'est que les coûts soient directement proportionnels à la responsabilité, de sorte que plus la responsabilité est grande, plus les coûts directs ou les frais d'assurance de l'entreprise sont élevés. Les coûts doivent refléter le risque. J'espère que nous envoyons un message clair en ce qui concerne la responsabilité en élevant le montant de l'indemnisation pouvant être réclamé. Aucune somme d'argent ne peut réparer les dégâts environnementaux. Nous faisons simplement de notre mieux pour tenter de faire face aux problèmes.
Le sénateur Cochrane: N'êtes-vous pas d'avis qu'il devrait y avoir davantage de surveillance?
M.Baird: Tout à fait.
M.Jean: Il y a plusieurs années, j'ai eu l'occasion de me rendre en Nouvelle-Écosse et de visiter l'une des bases navales de cette province pour voir exactement quelle technologie était disponible. Ce que j'ai cru comprendre à ce moment-là, et ce que j'ai appris dans le cadre de mes travaux au sein du comité, c'est que la technologie évolue rapidement en ce qui a trait à la capacité du Canada de détecter les déversements d'hydrocarbures. Ils peuvent être localisés par satellite ou par d'autres types d'aéronefs, et en plus, il est possible d'échanger ces informations avec les États-Unis. La technologie à la disposition de la marine évolue rapidement.
Le sénateur Cochrane: Dans ces conditions, la loi est-elle davantage appliquée?
M.Jean: La capacité d'observation est renforcée et, grâce aux investissements de notre gouvernement, il y aura davantage d'hélicoptères dans les airs et de navires sur les eaux pour patrouiller la région et mettre la main sur les personnes qui sont à l'origine de ces problèmes.
Le sénateur Cochrane: Êtes-vous en train de nous dire que ces activités de surveillance sont déjà en cours?
M.Jean: Ce que je dis, c'est que la technologie évolue. La technologie est là — j'ai pu moi-même le constater dans une base navale. Nous avons investi dans l'achat de frégates et d'hélicoptères dans le Nord et dans d'autres régions du Canada pour pouvoir surveiller les eaux et mettre la main sur les responsables des déversements d'hydrocarbures. Dans le passé, cela était une des lacunes: même si un déversement était constaté, on était incapable de remonter la piste jusqu'aux responsables.
Le sénateur Cochrane: Je vais me tenir au courant de cela. Merci.
Le sénateur Wallace: Nous sommes heureux de votre présence ici, monsieur Baird. Vous êtes devenu un habitué — vous êtes ici chaque semaine. C'est toujours un plaisir de vous voir.
J'aimerais faire des commentaires concernant les modifications proposées de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, plus particulièrement sur les deux conventions internationales sur la responsabilité et l'indemnisation pour les dommages en mer attribuables à la pollution par des hydrocarbures. J'aimerais connaître votre opinion à cet égard.
Tout d'abord, la première convention, le protocole de 2003 portant création d'un fonds complémentaire, fera passer le niveau d'indemnisation actuel pour les dommages dus à la pollution par des hydrocarbures occasionnée par des pétroliers au Canada de 405 millions de dollars à 1,5 milliard de dollars. Comme je suis originaire des provinces de l'Atlantique, plus précisément de Saint John, au Nouveau-Brunswick, dans la baie de Fundy, cette question revêt une signification et une importance particulières à mes yeux. La plus grande raffinerie de pétrole du pays se trouve à Saint John, et toutes les personnes qui y travaillent arrivent par bateau, sur des pétroliers. Un bon nombre de pétroliers se rendent également à Terre-Neuve en raison des plates-formes de forage sous-marin qui se trouvent dans cette région.
À mon avis, il s'agit d'une disposition extrêmement pertinente, et je vous félicite d'avoir apporté cette modification. Nous sommes tous conscients des problèmes qui peuvent découler de la pollution par les hydrocarbures. Il est absolument essentiel de disposer d'une protection adéquate.
Si je comprends bien, en ratifiant cette convention, nous comblerons l'écart qui nous sépare des autres pays en ce qui a trait à la mise en place de mécanismes de financement adéquats en matière d'indemnisation.
C'est ce que j'avais à dire à ce sujet. Je me demandais si vous aviez quoi que ce soit à ajouter.
M.Baird: À coup sûr, l'ajout de 985 millions de dollars en assurance obligatoire de responsabilité représente une mesure positive. À l'heure actuelle, il s'agit d'une mesure importante pour Saint John. Une nouvelle raffinerie est en construction dans cette région, ce qui rend cette mesure d'autant plus essentielle.
Le sénateur Wallace: Oui. Je pense que de nombreuses entreprises ont souscrit une assurance de cette valeur ou à peu près, mais pour celles qui ne l'ont pas encore fait, cela est très important.
M.Baird: Pour ce qui est des dommages environnementaux, vous pouvez toujours essayer de les chiffrer, mais dans bien des cas, cela est impossible. Une rupture de l'oléoduc est survenue à Burrard Inlet, à Burnaby, en Colombie- Britannique. Si vous avez visité les lieux du désastre en compagnie des membres d'un organisme de protection de la faune et que vous avez vu un canard englué de pétrole, vous comprenez que les dégâts environnementaux ne peuvent être chiffrés. De tels dégâts sont inacceptables, sans mentionner les dommages causés sur les rivages et dans l'habitat des poissons.
Le sénateur Wallace: Le fait d'augmenter à 1,5 milliard de dollars la limite de responsabilité constitue assurément un très grand pas dans la bonne direction.
M.Baird: Cela place la barre plus haut.
Le sénateur Wallace: L'autre convention que j'aimerais commenter traite de la pollution pouvant être occasionnée par les hydrocarbures de soute se trouvant à bord des navires. En vertu de cette convention, les armateurs sont tenus de souscrire une assurance assortie d'une couverture en cas de déversements d'hydrocarbures de soute. Je pense à ce que vous avez dit devant le comité, il y a deux semaines, à propos de l'expansion des frontières des milieux marins arctiques et du réchauffement climatique. Il ne fait aucun doute que, avec le temps, il y aura de plus en plus de navires-citernes dans l'Arctique, non pas des pétroliers, mais des navires-citernes et des navires, et que ceux-ci ne seront probablement pas seulement plus nombreux, mais également plus gros. Sans aucun doute, les navires transportent des quantités énormes de combustible de soute. Ce qui me frappe, c'est que cette disposition s'intègre très bien à cette loi et qu'elle permet de protéger l'ensemble des eaux canadiennes, plus particulièrement celles de l'Arctique.
M.Baird: Cela nous ramène aux commentaires formulés par le sénateur Cochrane. Un déversement d'hydrocarbures a des répercussions gigantesques puisqu'il s'agit du produit transporté par le pétrolier. Évidemment, les combustibles de soute sont susceptibles de poser un problème encore plus grand. Cela est lié aux préoccupations soulevées par le sénateur Cochrane. Il est à souhaiter que les 100 millions de dollars supplémentaires enverront un message clair, à savoir que la limite de responsabilité civile sera plus élevée et que les membres de l'industrie maritime doivent assumer cette responsabilité en souscrivant une assurance.
Le sénateur Wallace: Les temps changent, et il faut s'adapter. De toute évidence, c'est ce que cette disposition exige.
M.Baird: Cela ne nous dispense pas de poursuivre nos efforts en matière de prévention.
Le sénateur Fox: Quelques changements ont été apportés en ce qui concerne la gouvernance de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires. J'aimerais savoir de quelle façon sont fixées les cotisations à ce fonds et si la valeur actuelle de ce fonds vous convient. À l'heure où le papier commercial adossé à des actifs fait les manchettes, vous ne serez guère surpris que je vous pose la question suivante: à ce jour, est-ce que les actifs de la Caisse ont été bien administrés?
M.Rysanek: La Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires a été créée il y a longtemps, en 1973, juste avant que le Canada n'adhère à la convention internationale. D'emblée, il a été convenu que le financement proviendrait non pas des contribuables, mais des sociétés pétrolières, et les capitaux d'amorçage ont été obtenus par l'imposition d'une redevance sur le pétrole importé ou reçu dans les ports canadiens. Cette redevance était versée par toutes les sociétés qui importaient du pétrole.
Le Canada a cessé de percevoir cette redevance en 1976, lorsque le montant a atteint 36 millions de dollars environ. Il n'y avait aucune réclamation. Depuis, grâce aux intérêts courus, les capitaux d'amorçage — la somme de base recueillie auprès de l'industrie — ont augmenté à environ 360 millions de dollars, la réserve actuelle de la Caisse. Cela est attribuable dans une large mesure au fait que, heureusement, au fil des ans, il n'a pas été nécessaire de piger dans la réserve de la Caisse et que peu de demandes d'indemnisation ont été présentées.
L'administrateur de la Caisse est nommé par le Cabinet et rend des comptes au Parlement par le truchement du ministre des Transports. La Caisse, dont le siège social est situé à Ottawa, présente des rapports annuels au Parlement par l'entremise du ministre.
Le sénateur Fox: À ce jour, la Caisse a-t-elle été bien administrée? Y a-t-il eu quelque problème que ce soit? De nombreux autres fonds, qu'il s'agisse de fonds universitaires ou de fondations, ont connu beaucoup de problèmes. La Caisse a-t-elle été épargnée par la tourmente?
M.Rysanek: Il n'y a eu aucun problème au fil des ans. Les changements au chapitre de la gouvernance ont été jugés nécessaires — il n'y avait eu aucun changement à cet égard depuis la fondation de la Caisse, en 1973. Le projet de loiC- 7 apporte quelques améliorations, particulièrement en ce qui concerne le dépôt des rapports annuels et des états financiers, et en ce qui a trait à la vérification de ces états financiers. Les fonds de la Caisse sont placés dans un compte spécial du Trésor, et ils ne sont pas investis de quelque façon que ce soit. Ils ne sont exposés à aucun risque.
M.Baird: Nous présenterons tous les renseignements relatifs au rendement financier de la Caisse, monsieur le sénateur. Votre question est légitime.
Le sénateur Fox: J'ai pris connaissance de la réaction des membres de la Section nationale de droit maritime de l'Association du Barreau canadien. Je constate qu'ils ont proposé qu'un nouveau critère soit ajouté à l'une des sections de la loi pour que l'industrie du tourisme d'aventure soit tenue d'assurer le bon état de navigabilité des embarcations au début du voyage. Cela semble très raisonnable. Vous avez parlé plus tôt de l'industrie du tourisme. Nous voulons attirer davantage de touristes, mais il semble logique d'exiger une garantie ou un engagement en ce qui concerne l'état de navigabilité des embarcations utilisées dans le cadre du tourisme d'aventure avant que celles-ci ne soient mises à l'eau.
M.Baird: En général, les embarcations utilisées dans le cadre des activités de descente en eaux vives sont des radeaux pneumatiques, à tout le moins dans l'est de l'Ontario.
M.Jean: En fait, les membres du comité ont examiné en détail cette question précise et, en se fondant sur le témoignage présenté par le plus important exploitant du secteur du tourisme d'aventure au Canada, dont les activités se déroulent non loin de la capitale nationale, ils ont déterminé que les entreprises du secteur ne pourraient effectivement pas poursuivre leurs activités si elles ne peuvent pas prouver le bon état de navigabilité de leurs embarcations. En outre, je crois que le témoin en question a précisé qu'il serait impossible pour ces entreprises de souscrire une assurance si elles ne répondent pas aux critères relatifs à l'état de navigabilité des embarcations. En fait, ce témoin a affirmé que l'organisation qu'il représentait s'assurait que chaque exploitant du secteur du tourisme d'aventure dispose d'une flotte en bon état de navigabilité et que, en cas contraire, il ne serait pas admissible à une assurance de toute façon. En gros, c'est le témoignage que nous avons entendu.
L'autre problème tient à l'évaluation de l'état de navigabilité et à la capacité d'exécuter la loi sur ce fondement précis. Les groupes semblent s'occuper eux-mêmes de cette question. Je pourrais vous fournir de plus amples renseignements, mais je peux vous dire que nous avons passé beaucoup de temps là-dessus. Si vous le voulez, monsieur le sénateur, je peux trouver les bleus et les transmettre au comité.
Le sénateur Fox: Ma dernière question concerne la limite de responsabilité pour les passagers. Pourquoi a-t-elle été fixée à 350000$? S'agit-il d'une norme internationale? Pourquoi ne pas laisser le soin au régime canadien en matière de responsabilité civile délictuelle de fixer le montant de l'indemnisation à verser pour le décès ou les blessures attribuables à un accident survenu dans de telles circonstances?
M.Baird: L'objectif consiste probablement à établir un équilibre, un peu comme on le fait dans le secteur de l'assurance automobile, en plafonnant la responsabilité. En matière d'assurance, nous devons fixer des balises. Il faut limiter la responsabilité — autrement, il serait extrêmement difficile d'obtenir une assurance, comme c'est le cas dans le secteur de l'assurance automobile.
M.Rysanek: J'ai un bref commentaire à ajouter. Nous nous sommes inspirés du secteur de l'aviation, où la limite est la même pour tous et s'applique également à tous
Le sénateur Fox: Les limites fixées sont-elles comparables à celles de la Convention de Varsovie dans le cas du transport aérien?
M.Rysanek: Elles sont comparables, même si, dans le cas qui nous occupe, ces limites s'inspirent non pas des conventions sur le transport aérien, mais de la convention internationale sur le transport maritime. Elles sont plus ou moins comparables.
Le sénateur Fox: J'ai toujours de la difficulté à accepter la limitation de la responsabilité. Dans le cas d'un décès injustifié attribuable à une négligence grave, aucune limite ne devrait être fixée au montant que l'exploitant devrait être tenu de payer.
M.Rysanek: Il faudrait que je consulte notre conseil. Cela dit, la loi prévoit que la limite peut être dépassée dans certaines circonstances.
M.Jean: En effet, il est arrivé périodiquement à la Cour suprême du Canada de fixer une limite en se fondant sur le droit de la responsabilité civile délictuelle. Je pense que le plafond a été fixé à 250000$, moins la perte des installations, et ainsi de suite. La Cour suprême a fixé une limite de manière à éviter que notre régime se transforme en un régime de responsabilité civile délictuelle, comme celui des États-Unis.
Le sénateur Housakos: Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quelles sont les lois qui, à l'heure actuelle, contribuent à prévenir les déversements d'hydrocarbures?
M.Baird: Il existe un nombre considérable de conventions nationales et internationales. Je vais laisser M.Rysanek répondre à la question.
M.Rysanek: Le Canada est l'un des premiers pays à avoir adhéré à une très importante convention adoptée en 1990 par l'Organisation maritime internationale, à savoir la Convention internationale sur la préparation, la lutte et la coopération en matière de pollution par les hydrocarbures, la CRPO. Des centres dotés de plans d'urgence pour réagir à des incidents majeurs en matière de pollution ont été établis partout au Canada. Ces centres possèdent le matériel, le savoir-faire et l'expertise nécessaires. Le Canada est en très bonne posture pour intervenir en cas d'incident.
Bien sûr, la lutte contre la pollution suppose également l'application de la réglementation en matière de sécurité des navires, et à cet égard, nous respectons assez scrupuleusement les conventions adoptées par les organisations maritimes internationales. Mes collègues de la Sécurité publique pourraient mieux que moi répondre à cette question.
Le sénateur Housakos: Pour ce qui est du privilège maritime en faveur des fournisseurs canadiens sur les bâtiments étrangers, quelle est l'ampleur de ce problème? En outre, comment le projet de loi aidera-t-il les fournisseurs canadiens à obtenir un remboursement en temps voulu des bâtiments étrangers? Je sais qu'une loi semblable est en vigueur depuis longtemps aux États-Unis. Par exemple, si un bâtiment est saisi dans un port à Boston ou à New York et est poursuivi devant un tribunal parce qu'il n'a pas remboursé un fournisseur pour les biens et les services qui lui ont été fournis et que le navire est saisi, que se passe-t-il? De quelle façon s'appliquerait la présente loi pour protéger les Canadiens aux États-Unis ou dans d'autres administrations?
M.Rysanek: Votre question comporte un aspect juridique et un aspect relatif à la politique. Je demanderais à M.Gauthier de répondre en ce qui concerne l'aspect juridique.
Mark Gauthier, avocat général, secrétariat du droit maritime, services juridiques, Transports Canada: Merci, monsieur le sénateur. De fait, la disposition en question mettra en place une forme de réciprocité avec les États-Unis. En ce qui a trait à l'exemple que vous avez donné, en vertu de la loi actuelle, les tribunaux des États-Unis tenteraient de déterminer s'il existe un privilège applicable aux termes des lois canadiennes. Ils constateraient qu'il n'en existe actuellement aucun et, par conséquent, le fournisseur canadien serait désavantagé.
Toutefois, lorsque le projet de loiC-7 sera adopté et que le privilège maritime des fournisseurs sera reconnu, un principe de réciprocité ou d'équivalence sera établi pour ce qui est des litiges dont seront saisis les tribunaux aux États- Unis et au Canada.
M.Rysanek: Du point de vue des politiques, pourquoi avoir adopté cette mesure de protection? Depuis de nombreuses années, les fournisseurs font valoir que ce déséquilibre entre les lois américaines et canadiennes faisait en sorte que les litiges les opposant à des navires américains étaient tranchés en faveur de ces derniers devant les tribunaux canadiens. La présente disposition visait principalement à remédier à ce déséquilibre. Les pertes réelles subies par les fournisseurs canadiens varient — d'après ce que nous avons entendu, elles vont de créances relativement peu élevées à des montants de plusieurs millions de dollars dans les cas où les armateurs ont reçu des biens et des services pendant une longue période ou effectué un achat de grande envergure.
Personne n'aime révéler s'être fait plumer, pour rester poli. Assurément, le problème était important, particulièrement parce que les fournisseurs n'étaient pas traités de la même façon que leurs concurrents des États-Unis.
M.Jean: Si vous le permettez, sénateur, je tiens à souligner qu'on nous a dit que cette mesure rassurerait grandement les personnes honnêtes et les entreprises aux pratiques commerciales appropriées — quant aux autres, elles ne feront plus affaire avec le Canada. De toute façon, nous ne voulons pas faire affaire avec elles. Ces mesures apporteront donc de la sécurité au marché.
Le sénateur Housakos: Qu'arrivera-t-il aux sociétés de transport maritime et de navires à passagers dont les bâtiments accostent à un port canadien sans posséder les documents adéquats et sans être munis d'une assurance de responsabilité? Quelles répercussions subiront-elles?
M.Rysanek: En vertu de nos régimes en matière de sécurité, ces navires ne devraient pas se trouver là. Selon les dispositions relatives à la gestion du trafic maritime, les responsables du navire doivent fournir les certificats et les autres documents requis. S'il s'avère qu'ils ne sont pas munis, par exemple, d'un certificat d'assurance obligatoire, des pénalités seront imposées. M.Gauthier pourrait vous répondre de façon plus détaillée.
La présidente: Monsieur le ministre, il est 19 h 15.
M.Baird: Je remercie les sénateurs de leur attention. Je serai disponible en tout temps pour répondre à toute question précise d'un sénateur après la réunion d'aujourd'hui. Si le comité le souhaite, je reviendrai témoigner.
La présidente: Sénateurs, y a-t-il d'autres questions?
Merci, monsieur Jean, et merci aux représentants de Transports Canada.
(La séance est levée.)