Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 6 - Témoignages du 7 octobre 2009
OTTAWA, le mercredi 7 octobre 2009
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 18 h 30 pour étudier les enjeux émergents liés à son mandat dans le domaine des communications et à faire rapport sur le secteur du sans-fil, notamment sur l'accès à Internet haute vitesse, la fourniture de largeur de bande, le rôle d'édification de la nation du sans-fil, le rythme d'adoption des innovations, les aspects financiers liés aux changements possibles du secteur ainsi que le développement du secteur au Canada comparativement à ce qui se fait ailleurs dans le monde.
Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.
[Translation]
Le président : C'est la huitième fois que nous nous réunissons au Comité sénatorial permanent des transports et des communications pour notre étude du secteur des communications sans fil.
Aujourd'hui, nous accueillons, du Centre pour la défense de l'intérêt public, Michael Janigan, directeur général et avocat général; de même que son associé, Michael De Santis.
[English]
Le Centre pour la défense de l'intérêt public est un organisme sans but lucratif constitué sous le régime des lois fédérales. Il s'emploie à promouvoir les intérêts de particuliers et de groupes qui sont généralement non représentés ou sous-représentés dans les dossiers d'intérêt public majeurs.
[Translation]
Bienvenue parmi nous, messieurs. Aux membres du comité qui ne sont pas au courant, je dirai que l'installation est prête pour la deuxième partie de la conférence. À ce moment-là, nous serons en conférence téléphonique avec Edmonton.
Monsieur Janigan, je vous prie de commencer.
Michael Janigan, directeur général et avocat général, Centre pour la défense de l'intérêt public : Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de l'occasion que vous nous offrez de traiter de l'état actuel du marché du sans-fil au Canada suivant le point de vue du consommateur et des défis que les décideurs et l'industrie sont appelés à relever à l'avenir, selon nous.
Nous croyons savoir que notre mémoire sur ces questions a été distribué aux membres. Dans ma déclaration liminaire, je veux souligner certains des points clés qui y sont exprimés et traiter des réformes qui pourraient être utiles à la plupart des intervenants sur le marché.
En abordant le marché du sans-fil, je pense à une pensée exprimée par mon ami Michael Shames, de l'UCAN, organisme californien de défense des consommateurs : pour qui défend les intérêts des consommateurs, la question revient souvent à savoir non pas si le verre est à moitié plein ou à moitié vide, mais plutôt s'il existe même. En vérité, la situation du marché du point de vue des utilisateurs des services sans fil n'est pas si horrible; le problème réside plutôt dans le fait que l'industrie présente un rendement dont la médiocrité fait contraste avec le côté très lucratif du service lui- même, qui compte maintenant pour quelque 40 p. 100 des recettes totales dans le domaine des télécommunications.
Notre mémoire expose certaines des réalisations plutôt modestes de l'industrie canadienne du sans-fil en ce qui concerne le prix, la pénétration du marché et la qualité du service. Toute une série d'excuses y passent pour justifier les résultats plutôt indifférents des enquêtes internationales sur le rendement du sans-fil — de l'idée que le Canada est trop vaste sur le plan géographique au fait qu'une trop grande part de notre service téléphonique conventionnel filaire serait de première qualité. Les consommateurs se trouvent dans une position semblable à celle des parents dont l'enfant obtient encore et toujours des notes décevantes à l'école. À un moment donné, ce sont des résultats et non pas des excuses qu'ils aimeraient voir.
À notre avis, pour remédier à la situation, il faut notamment adopter une approche plus rigoureuse des questions relatives à la concurrence et à la protection des consommateurs dans l'industrie du sans-fil. La concentration de l'industrie entre les mains de trois grands fournisseurs a eu une incidence sur l'offre de services en fait de prix et de service à la clientèle. L'absorption par TELUS Communications Company et Rogers Wireless Communications Inc. des premiers fournisseurs de services numériques sans fil — Clearnet Communications Inc. et Microcell Telecommunications Inc. — a sans doute fait croire à la nécessité d'encourager les nouveaux arrivants sur le marché en leur réservant des fréquences à l'occasion de la mise aux enchères du spectre l'an dernier.
Le problème actuel, c'est que les services sans fil génèrent de telles recettes que la préservation de l'homogénéité sur le marché est tenue pour un impératif commercial. Les sociétés établies livrent une lutte acharnée aux nouveaux arrivants en rapport avec des questions comme l'utilisation partagée des pylônes et d'autres questions d'interconnexion, notamment en contestant devant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC, le caractère canadien de la propriété des entreprises nouvellement arrivées sur le marché quelques mois à peine après qu'Industrie Canada y a donné son approbation d'après les mêmes critères tout à fait. À la suite de pressions intenses de la part des sociétés établies, Industrie Canada a mis au rancart l'idée prometteuse d'une calculatrice des services sans fil qui permettait de faire le lien entre les besoins des consommateurs et les divers régimes offerts. Le fait que les meilleurs prix à avoir pour les services selon la calculatrice n'étaient pas ceux des grands, de façon générale, disait-on, n'avait rien à voir avec l'opposition ainsi manifestée. Industrie Canada a capitulé et, même si le gouvernement a investi 1,4 million de dollars environ dans la conception de la calculatrice, elle ne sera pas mise en place.
D'autres données empiriques invitent à croire que la concurrence n'est pas suffisante pour régler les préoccupations persistantes des consommateurs à propos de la transparence dans l'établissement des prix, la clarté de la facturation etune conduite abusive de la part des fournisseurs. Tout de même, il ne serait pas juste d'affirmer que ces problèmes-làsont l'affaire exclusive du Canada. Dans bon nombre de ces cas, toutefois, la solution a été trouvée ailleurs, solutionqui consiste à adopter des règles universelles pour assurer une certaine équité sur le marché, du point de vue duconsommateur aussi bien que de celui des fournisseurs. Il importe particulièrement de souligner que la protection des consommateurs ne peut être ramenée à une belle petite idée que l'industrie peut adopter dans la mesure où elle a les moyens de le faire. Il ne s'agit pas simplement de demander aux fournisseurs d'avoir certaines manières sur le marché. Il s'agit de protéger la viabilité de la concurrence et l'efficience de l'industrie en éliminant des pratiques qui vont à l'encontre de l'objectif des marchés ouverts où le consommateur est renseigné et apte à se défendre.
Si nous permettons que des pratiques déloyales ou trompeuses soient florissantes, nous récompensons des fournisseurs lourdauds et inefficaces. Dans le domaine des télécommunications, malheureusement, nous sommes pris avec une loi qui a été conçue en fonction de la déréglementation de services téléphoniques monopolistiques; il s'agissait de s'assurer que la société en question se trouve sur un pied d'égalité avec les nouveaux arrivants. C'était un schéma de déréglementation et non pas un ensemble de règles universelles pour le marché, applicables à tous les fournisseurs de services.
L'orientation stratégique adoptée par le ministre de l'Industrie, Maxime Bernier, en décembre 2006 a aggravé le problème en établissant que, pour que les sociétés établies et les nouveaux arrivants aient droit au même traitement, le CRTC devait cesser de s'occuper de protection des consommateurs à de nombreux égards. Il nous faut une loi nouvelle et des règles universelles nouvelles pour établir des normes et régler rapidement les cas d'inconduite au sein de l'industrie. Dans l'intervalle, certains problèmes et cas d'abus demeurent largement répandus, et notre nouvel ombudsman des télécommunications, le commissaire aux plaintes relatives aux services de télécommunications, le CPRST, n'est pas encore vraiment en selle.
Dans l'idée d'en arriver à un marché plus transparent et plus favorable au consommateur, nous formulons les recommandations essentielles suivantes. Premièrement, la question des prix : nous n'avons pas besoin de réglementer le prix des services sans fil à proprement parler, mais il existe à cet égard certaines « zones chaudes », par exemple les frais d'itinérance, où il faut agir à la manière de l'Union européenne, qui a plafonné certains des taux que peuvent imposer les entreprises pour les services en question. De même, nous pouvons calquer sur l'Union européenne des mesures contre la facturation abusive, pour empêcher les factures dont le montant est bien au-delà de ce qui peut être attendu. Cette approche simplifie l'établissement des prix et le rend plus prévisible du point de vue des consommateurs; de plus, à notre avis, cela encouragera la croissance de la consommation des services sans fil. De même, le petit jeu des frais supplémentaires portant des noms insignifiants comme « frais d'accès au système » devrait être interdit. Le prix total des services tout compris serait exigé, sauf les taxes.
Quant aux pourriels, la Chambre des communes et le Sénat se penchent actuellement sur un projet de loi les interdisant, qui accorderait aux consommateurs la protection qui leur faut contre la fraude, les pratiques de marketing abusives et la transgression de leur droit à la vie privée. Pour les paiements par téléphone mobile, la création d'un régime comportant des normes communes encouragerait le recours à de tels paiements. Des ententes entre entreprises de télécommunications et utilisateurs de cartes de crédit serviraient à établir la commodité et la sécurité nécessaires du point de vue du consommateur, d'où un régime viable de paiement par téléphone mobile au Canada.
Quant à la publicité destinée aux enfants, le commerce mobile est une industrie naissante au Canada, mais l'expérience vécue partout ailleurs dans le monde donne à voir que les enfants pourraient devenir une cible privilégiée en ce sens. L'adoption d'une loi interdisant la plupart des formes de publicité à l'intention des jeunes de moins de 13 ans, comme c'est le cas pour la Loi sur la protection du consommateur au Québec, protégerait ces consommateurs vulnérables.
Je vais maintenant aborder la question de la sécurité des renseignements financiers. Le vol d'identité est un crime qui connaît une croissance rapide, et les réseaux sans fil ouvrent le champ aux voleurs d'identité. Il s'agirait alors d'adopter des modifications du Code criminel interdisant la possession et le commerce de renseignements financiers, de même que la technologie et le commerce mobile qui facilitent le vol d'identité.
Pour parler maintenant des droits en cas de différends relatifs au paiement, le Canada devrait reprendre le modèle sud-coréen et faire des institutions financières existantes les intermédiaires dans les opérations du commerce mobile. Le mécanisme de règlement des différends dans le cas des cartes de crédit est bien établi et est utile pour protéger les droits des consommateurs.
Pour parler maintenant de la protection de la vie privée, disons que les réseaux sans fil posent des risques nouveaux en ce qui touche la protection des renseignements personnels des utilisateurs. Les entreprises devraient s'assurer de respecter scrupuleusement les dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, la LPRPDE, pour garantir la sécurité et la protection des renseignements personnels de leurs clients. De même, nous croyons que l'arrivée d'un plus grand nombre d'entreprises sur le marché du sans-fil aura un impact. Après l'orientation établie en 2008 par Industrie Canada, soit de promouvoir la concurrence, nous sommes déçus de constater une certaine baisse de la volonté à cet égard avec le traitement des nouveaux demandeurs de licence et la décision de mettre au rancart la calculatrice des tarifs de services sans fil.
Étant donné les recettes et les ressources extraordinaires dont disposent actuellement les sociétés établies, il faut quelqu'un qui défendra âprement la notion de concurrence dans le domaine du sans-fil.
Nous serons heureux de répondre à toute question que vous voudrez poser sur notre mémoire ou sur les idées que nous avons présentées autrement aujourd'hui.
Le sénateur Johnson : Bienvenue au sein de notre comité.
Récemment, vous vous êtes opposé à l'utilisation de comptes de report au CRTC pour financer l'accès au service de large bande dans les collectivités mal loties sur ce plan. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi?
M. Janigan : Certainement. En 2002, le CRTC a établi un plafond de prix de deuxième génération pour les abonnés au service téléphonique local de tout le pays. À ce moment-là, on a déterminé que les sommes générées grâce à ce plafonnement seraient versées dans un compte de report, plutôt que d'être versées sous forme de remises au client ou encore déduites de sa facture. Les responsables de la décision voulaient éviter de faire baisser le prix des services téléphoniques, pour que les nouveaux arrivants bénéficient d'un plafond plus bas.
La somme de 1,6 milliard de dollars a été recueillie de cette façon. Environ 800 millions de dollars ont permis d'établir des réductions pour les concurrents au chapitre de l'accès aux réseaux numériques. En 2004, il restait 650 millions de dollars. Le conseil a alors tenu une audience pour discuter de la façon dont cette somme serait dépensée.
Selon nous, à l'époque où nous représentions les abonnés résidentiels du service téléphonique local, l'argent en question devait être versé sous forme de remise au client qui y avait droit à l'origine. Le conseil a décidé alors d'accorder la priorité aux opérations des sociétés établies dans les secteurs où le service ne répondait pas aux critères économiques usuels.
Si cela représentait à nos yeux un objectif national approprié, selon nous, il ne convenait pas pour autant que les abonnés résidentiels au service téléphonique local de tout le Canada étaient les seuls appelés à y contribuer. Personne d'autre n'a été appelé à faire cette contribution-là, et la contribution était liée directement au tarif du service téléphonique local. Je ne crois pas que l'abonné du téléphone à Toronto s'attende à subventionner le service de large bande de son fournisseur téléphonique à Muskoka; nous nous sommes donc opposés à cela.
Dans l'intervalle, les entreprises de télécommunications ont présenté chacune leur plan de développement de la large bande, dont 60 p. 100 environ ont été approuvés. Le reste de l'argent a été versé aux consommateurs sous forme de remise.
Il y a deux semaines de cela, la Cour suprême du Canada a déterminé que le CRTC avait rendu une décision appropriée en ce qui concerne la large bande et les remises. Nous avons perdu sur ces points-là, de même que les entreprises téléphoniques ont perdu, et il y aura des réductions à cet égard.
Le sénateur Johnson : Vous dirigez un centre, et vous voulez vous assurer de défendre l'intérêt public. Croyez-vous que le CRTC travaille dans l'intérêt public dans les affaires auxquelles vous travaillez?
M. Janigan : Oui, dans les limites du mandat qui est le sien. Comme je l'ai dit, le problème réside dans le fait que nous travaillons sous la coupe d'une loi et d'une orientation stratégique qui accorde la priorité à la déréglementation, plutôt qu'à l'idée d'avoir partout au Canada un service accessible, abordable et constant.
Nous croyons qu'une réforme législative permettrait de régler certains de ces problèmes. Nous croyons aussi qu'il faut adopter certaines mesures pour garantir que les règles de protection des consommateurs s'appliquent à tous les fournisseurs et que la loi ne vise pas d'abord et avant tout une société monopolistique établie; la loi doit viser tout le monde.
Le sénateur Johnson : Parlons pendant un instant des systèmes sans fil 3G. Je crois que le CRTC l'a dit récemment : l'accès au système sans fil a augmenté de 75 p. 100, et, dans le cas du système 2G, on en est à plus de 98 p. 100. Aux États-Unis, est-ce qu'on n'entre pas maintenant dans l'ère du système 4G?
M. Janigan : Je crois qu'il y a eu des progrès importants sur ce front en Europe aussi.
Le sénateur Johnson : Où se situe le Canada par rapport aux autres pays à cet égard?
M. Janigan : Pour reprendre les observations que j'ai faites au début, nous sommes médiocres. La situation n'est pas désespérante, mais nous ne sommes pas des chefs de file du domaine non plus. Nous devons déterminer les raisons pour lesquelles nous ne sommes pas des chefs de file.
Le sénateur Johnson : Quelles politiques gouvernementales recommanderiez-vous pour favoriser l'expansion du 3G, pour que le marché soit plus concurrentiel?
M. Janigan : Je me soucie de la protection des consommateurs, mais le premier souci d'une politique doit toujours être celui de la concurrence, dans le sens où il faut essayer de voir s'il y a suffisamment de concurrence et si les entreprises établies et les nouveaux fournisseurs de services seraient encouragés à offrir tel type de couverture et de service sur un marché concurrentiel très vigoureux.
Ensuite, je dirais que nous sommes au Canada; il faut donc comprendre qu'il y a des cas où, pour nous assurer que tous les Canadiens ont accès au service, il nous faudra peut-être quelque chose comme un fonds pour le service en région éloignée, financé grâce aux recettes fiscales ou à une taxe quelconque qui serait juste pour tous.
Le sénateur Johnson : Le fonds pour le service en région éloignée est une bonne proposition.
M. Janigan : Il y a une analogie à faire ici avec le service téléphonique. Nous subventionnons bel et bien le service téléphonique dans l'ensemble du Canada, surtout dans les régions plus au nord, et notamment avec Northwestel Inc. C'une une chose qui pourrait se faire.
Nous avons évité de faire cela dans le domaine de la large bande, étant un peu incertains de la façon dont le service allait être développé. L'idée avait toujours été de confier cela au secteur privé. Cependant, on a toujours admis en même temps que l'intérêt public entrait en jeu.
Nous approchons du point où l'accès à la large bande équivaut presque à l'accès au service téléphonique qu'il y avait il y a 20 ans de cela; voilà une chose importante qui découle du fait d'être citoyen du Canada. Il faut être branché, et cela fait intervenir toute une série d'occasions et d'intérêts d'un point de vue culturel, économique et je ne sais quoi encore. Je ne crois pas que nous puissions rester indifférents et dire qu'importe que nous soyons branchés ou non, être branchés à la bibliothèque locale suffira.
Le sénateur Mercer : Vous faites des propositions intéressantes. En parlant du service dans les régions rurales et éloignées du Canada, nous faisons ressortir, semble-t-il, le fait que nos problèmes ne sont pas ceux des autres pays du monde, étant donné que notre pays est si vaste et que sa population est si faible.
À votre avis, ne serait-il pas plus facile de faire du service aux régions rurales et éloignées du Canada un élément intrinsèque de la licence de télécommunications émise par le CRCT : vous n'aurez pas votre licence ou votre licence ne sera pas renouvelée si vous ne vous engagez pas à fournir certains services dans certains secteurs ruraux et éloignés?
M. Janigan : D'une façon ou d'une autre, cela soulève la question des répercussions financières. Si cela devient une exigence pour qui veut obtenir une licence, effectivement, vous verrez que les coûts associés à cette mesure se répercuteront sur l'ensemble des abonnés. Dans certains cas, ça ne suffira pas à garantir que les gens de la région en question ont bel et bien accès à un service.
Une meilleure solution consisterait peut-être à créer un fonds national dont on pourrait se prévaloir dans certaines conditions et qui serait soumis au principe de la concurrence. Par exemple, si c'est le service dans une région éloignée donnée qui est exigé, on peut demander à ceux qui sont en mesure de le faire de soumissionner, plutôt que de remettre l'affaire en bloc entre les mains de celui qui se trouve là.
Le sénateur Mercer : Il semblerait que le fait de laisser 650 millions de dollars dans un fonds, puis de laisser à la Cour suprême du Canada le soin d'entériner la décision du CRTC équivaut à fonctionner à l'envers. Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le CRTC joue maintenant le rôle de législateur, plutôt que d'appliquer simplement la réglementation?
M. Janigan : À la suite de cette décision-là, nous avons fait remarquer que, malencontreusement, le législateur a rédigé la Loi sur les télécommunications de telle sorte que le CRTC est investi de pouvoirs très larges qu'il applique maintenant aux objectifs des réseaux de télécommunications partout au Canada. Si vous lisez le texte de la décision récente de la Cour suprême du Canada, il semble que, tant et aussi longtemps que le CRTC respecte les objectifs qui sont les siens, sa capacité d'agir à la manière d'un gouvernement semble illimitée.
Le sénateur Mercer : Notre prochaine étude nous permettra peut-être de régler directement ce problème-là, étant donné qu'elle porte sur le CRTC.
Vous avez fait une remarque intéressante à propos des frais d'itinérance. Nous croyons tous que les frais d'itinérance sont exorbitants. La plupart des gens qui se trouvent autour de cette table voyagent beaucoup, au Canada comme à l'étranger. Lorsque nous recevons notre facture à la fin du mois, nous voyons ce que cela coûte.
Vous dites que l'Union européenne a une politique heureuse. Pourriez-vous nous décrire la politique de l'Union européenne telle que vous la voyez?
M. Janigan : Dans notre mémoire, nous décrivons certaines des mesures de l'Union européenne en rapport avec cette question. Ça se trouve aux pages 12 et 13. Au départ, l'Union européenne n'avait adopté qu'une règle modeste à l'encontre des frais d'itinérance. Ensuite, elle s'est attaquée à d'autres questions dans des situations où le consommateur est vulnérable. Elle a ainsi fixé un plafond aux frais d'itinérance : 0,43 euro pour faire un appel, 0,19 pour en recevoir un. De même, elle a traité du cas où un message texte est transmis d'un pays à l'autre, en fixant là aussi des plafonds. Elle a aussi réduit le coût de la navigation, particulièrement entre les pays.
En regardant le tableau dans son ensemble, on constate que les consommateurs se trouvent dans une situation où ils ne sont pas vraiment en mesure de négocier à armes égales pour obtenir un meilleur prix. Ils sont pris avec le fournisseur, qui est vraiment en mesure de les exploiter.
L'Union européenne a effectivement dit à tous : vous ne pouvez pas demander plus que ce maximum. Les gens ont grommelé au début, mais la règle est maintenant acceptée.
Le sénateur Banks : Merci aux témoins d'être là. Je pose toujours la question aux représentants de groupe de défense d'intérêts : qui vous finance?
M. Janigan : Notre groupe se finance plutôt à la manière des entrepreneurs, à certains égards. Notre argent provient des dépens attribués par les tribunaux dans des causes où nous représentons d'autres groupes de consommateurs, par exemple devant le CRTC et la Commission de l'énergie du Yukon. Nous préparons également des rapports d'orientation pour les ministères et, parfois, pour d'autres établissements et organismes dans les secteurs particuliers où nous œuvrons.
Nos membres proviennent en vérité d'autres groupes et organismes de tout le Canada. Nous nous attachons d'abord et avant tout aux services publics importants offerts principalement dans le secteur privé.
Nous fonctionnons donc un peu à la manière d'une boutique et prenons notre financement de diverses sources. Nous sommes là depuis 1976. Nous ne nous occupons pas de plaintes individuelles des consommateurs. De fait, parfois, nous le faisons, étant donné que c'est un problème endémique. Au début, nous ressemblions à un centre de droit d'intérêt public à vocation nationale; nous sommes devenus un service qui s'occupe de questions liées à la consommation en ce qui concerne les services publics importants dont j'ai parlé.
Le sénateur Banks : Vous dites avoir accès à diverses sources de revenu et vous avez cité notamment à cet égard le produit de vos actions en justice et les frais de service.
M. Janigan : Oui.
Le sénateur Banks : Y en a-t-il d'autres?
M. Janigan : Nous recevons de l'argent pour les rapports de recherche que produit le personnel. De temps à autre, nous recevons de petits dons, mais ce n'est pas la source principale de fonds de notre organisme.
Le sénateur Banks : Les dons compteraient donc pour moins que les frais de service dans vos revenus?
M. Janigan : Oui.
Le sénateur Banks : De vive voix et dans votre mémoire aussi, vous avez affirmé que l'application de frais d'accès au système représentait une forme d'exploitation, à laquelle se livrent tous les fournisseurs, je crois. En quoi consistent les frais en question au juste? Est-ce qu'ils sont inventés ou non?
M. Janigan : Je crois que ce sont les restes de frais qui existaient au tout début des services mobiles, époque à laquelle cela correspondait à une certaine somme facturée. La raison d'être des frais en question a disparu, mais les frais, eux, demeurent.
La difficulté tient au fait que, dans le passé, les frais ont été présentés à tort comme une charge approuvée par le CRTC. De plus, cela occulte la nature véritable de l'opération; c'est-à-dire que, de fait, ce n'est qu'une autre méthode employée par le fournisseur pour couvrir ses frais d'exploitation.
Le sénateur Banks : A-t-on adopté ailleurs des mesures de protection qui limiteraient ce type de pratique?
M. Janigan : L'Union européenne applique certaines règles en matière de prix. Pour ce qui touche la publicité des comp agnies aériennes, la Federal Aviation Administration, la FAA, aux États-Unis, applique des règles qui interdisent d'ajouter un supplément pour le carburant, entre autres. Diverses administrations se sont donné certaines règles à cet égard, par exemple le Québec avec la Loi sur la protection du consommateur.
Le sénateur Banks : Dans votre mémoire, vous dites :
Le Canada fait piètre figure dans ce classement de l'OCDE : il occupe la 20e place pour la faible utilisation, la 28e place pour l'utilisation moyenne et la 18e place pour l'utilisation élevée. Ce retard est d'autant plus inquiétant que le taux de pénétration du sans-fil au Canada (62 %) est le plus faible des 30 États de l'OCDE.
Le critère que vous employez là pour qualifier le service semble être son degré de succès sur le marché. Est-ce la meilleure façon de mesurer les services fournis aux Canadiens? Pourquoi cela revient-il à une mesure du succès? Et si les Canadiens n'en voulaient tout simplement pas, qu'ils n'y avaient pas accès ou encore qu'ils ne s'en servaient pas autant simplement par habitude?
M. Janigan : Certes, il faut tenir compte aussi de l'accès à d'autres formes de services, par exemple le service filaire. Dire que le Canada possède des services filaires de bonne qualité par rapport au reste du monde revient à affirmer un point légitime.
Le taux de pénétration et d'adoption, particulièrement pour ce qui touche les services comme le sans-fil, qui est, globalement, assimilé à l'avant-plan des services de télécommunication, indique dans une certaine mesure le rythme auquel nous progressons en fait de connectivité et d'intégration des télécommunications dans la société dans son ensemble.
Tout de même, ce n'est pas parfait. Vous avez raison de le faire remarquer.
Le sénateur Banks : Ce n'est pas forcément du critère dont je veux parler. Certains parmi nous voudraient que le téléphone cellulaire serve moins à certains endroits.
M. Janigan : Je comprends cela.
Le sénateur Banks : C'est un fait bien établi : les gros qui avaient jadis le monopole d'un type quelconque de services publics s'y opposent toujours, c'est bien normal, lorsqu'ils apprennent qu'ils doivent partager leurs tuyaux ou leurs fils ou je ne sais quoi encore avec un autre. Les entreprises téléphoniques ont été les premières à vivre l'expérience. Leur réaction : vous êtes en train de dire que nous devons permettre à ce type de faire passer ses appels par nos fils et nos poteaux? La réponse : oui, vous devez le faire. C'est devenu une pratique normale. Je crois vous avoir entendu dire que les gros, dans ce cas, s'efforcent de faire en sorte que les petits n'ont pas accès à l'autoroute.
M. Janigan : D'après mes sources, les négociations entre les entreprises établies et les nouveaux arrivants ont été très difficiles. La dernière vague de différends concernant la propriété canadienne au CRTC inquiète particulièrement, non pas par elle-même, mais par le fait qu'elle survient trois mois après que le gouvernement canadien a autorisé chacune des entreprises à agir, en appliquant les mêmes critères. Il me semble simplement qu'on essaie de faire le plus d'obstruction possible.
Le sénateur Banks : Veuillez excuser mon ignorance. Dans le cas de l'électricité, du gaz naturel et des services téléphoniques terrestres, c'est par décret gouvernemental que l'accès a été aménagé pour créer une concurrence aux autoroutes monopolistiques déjà établies. Ai-je raison de le dire? Si c'est le cas, y a-t-il une mesure semblable en ce qui concerne les téléphones cellulaires?
M. Janigan : En grande partie, ce que vous dites est juste. Cependant, cela demeure litigieux. Nous en sommes à la troisième tentative de définition pour déterminer si le mode DSL, c'est-à-dire les lignes d'accès numérique, représente une installation essentielle et la façon dont le service devrait être fourni. Cela demeure litigieux.
Pour ce qui touche les réseaux sans fil, je crois comprendre que c'était une condition des licences accordées à chacune des franchises, mais je pourrais me tromper.
Le sénateur Merchant : Je veux parler de ce que vous avez dit à propos du Québec, soit qu'il a interdit toute forme de publicité à l'intention des enfants. Est-ce la seule province à s'être donné une telle loi?
M. Janigan : À notre connaissance, c'est la seule loi du genre qui existe, oui.
Le sénateur Merchant : La majeure partie de la publicité qui peut être destinée aux enfants ne connaît probablement pas de frontières; je crois que ça s'applique donc seulement à la publicité qui provient du Québec lui-même. Je crois avoir lu ça dans votre mémoire.
M. Janigan : Certes, il y aurait des problèmes de compétence qui entreraient en jeu en ce qui concerne le mode de transmission ou le fait de s'appuyer sur cette loi-là pour agir au Québec et certainement ailleurs.
Le sénateur Merchant : Vous voudriez que ça devienne une interdiction à l'échelle nationale?
M. Janigan : Il faudrait que ce le soit, à mon avis. Effectivement, les enfants ouvrent leur appareil mobile et constatent qu'ils peuvent aller chercher des photos de leurs vedettes préférées en appuyant ici ou là, ce qui mène à une autre invitation et, voilà, ils sont pistés. Leurs achats sont suivis, on leur envoie d'autres offres encore. Parfois, c'est carrément malicieux; autrement, ça peut mener à des dépenses et à des problèmes pour la famille. À notre avis, c'est donc une question de bon sens : il faut tuer cela dans l'œuf.
Le sénateur Merchant : Que faire alors pour encourager le gouvernement à agir? Quelles pistes explorez-vous?
M. Janigan : D'abord et avant tout, il s'agit d'exposer la question au ministre touché, c'est-à-dire, bien entendu, le ministre d'Industrie Canada. Je crois que le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada pourrait être saisi d'autres questions. De même, je crois que le nouveau CPRST pourrait jouer un rôle aussi.
Le sénateur Banks : Mais encore, les sales types dont il est question n'iraient-ils pas simplement s'établir au Montana ou dans le Vermont?
M. Janigan : Il n'y aura jamais de système parfait, à toute épreuve. Nous pouvons seulement faire respecter les règles là où il est possible de le faire. Maintenant, par exemple, nos organismes coopèrent de plus en plus au Canada et aux États-Unis. Cependant, nous pouvons seulement appliquer les règles là où le fournisseur tombe sous la coupe des lois canadiennes ou américaines.
Le sénateur Merchant : Pour ce qui est de la publicité trompeuse, qui s'occupe des plaintes? Vers qui se tourne la personne qui souhaite porter plainte?
M. Janigan : La personne qui souhaite déposer une plainte en rapport avec une publicité trompeuse peut s'adresser à deux endroits. Je suppose que c'est la réponse classique : au Canada, les lois provinciales et fédérales régissent la chose. Au Canada, sous le régime de la Loi sur la concurrence, la publicité trompeuse peut donner lieu à des recours au civil et au criminel, selon le type de publicité dont il est question. Le Bureau de la concurrence serait le principal organisme responsable, d'un point de vue fédéral.
Le sénateur Zimmer : Pouvez-vous expliquer votre point de vue sur le recours au compte de report du CRTC pour financer l'accès aux services de large bande dans les collectivités mal loties? Quel est votre avis sur la façon de donner aux régions rurales et éloignées l'accès à la large bande?
M. Janigan : Pour récapituler, en partie, la réponse que j'ai donnée au sénateur Johnson tout à l'heure, nous voyons qu'il y a l'idée d'un fonds national pour les services à large bande — et je sais que nous avons présenté au gouvernement un mémoire où il est dit qu'il serait possible d'utiliser les sommes excédentaires recueillies pendant les enchères pour garnir un tel fonds — qui est présenté comme un mécanisme approprié. À notre avis, l'administration du fonds devrait reposer sur des règles d'ouverture et de concurrence, et non pas se rapporter en particulier à une entreprise téléphonique locale qui se trouve dans le secteur.
En rapport avec le CRTC et les comptes de report, nous avons effectivement fait valoir que les sommes d'argent en question ont été recueillies grâce à des réductions qui n'ont pas été consenties aux clients à la suite du plafonnement des prix et qu'elles appartenaient en propre aux clients. C'était un service téléphonique local et, selon le mécanisme de plafonnement des prix, les clients auraient dû obtenir la réduction en question. À nos yeux, prendre cet argent-là pour les opérations de large bande de Bell ou de TELUS, qui ne sont pas réglementées — ce qui permet effectivement de donner accès à Internet en régions rurales et éloignées — ne représentait vraiment pas un usage judicieux des sommes en question.
Le sénateur Zimmer : Selon le rapport de surveillance du CRTC, les recettes du commerce mobile demeurent la plus importante source de revenu des fournisseurs de services de télécommunication canadiens. Si tel est le cas, pourquoi les coûts sont-ils refilés aux consommateurs, par exemple sous forme de frais pour les messages texte arrivants? Par exemple, lorsqu'on va à l'hôtel par les temps qui courent, l'administration nous demande des frais de marketing pour nous vendre ses chambres. C'est incroyable.
Dans un tel cas, pourquoi les coûts comme les frais de messages texte arrivants sont-ils refilés aux consommateurs?
M. Janigan : Comme un article récent paru dans le New York Times l'a fait voir, le coût du message texte est faible par rapport à la somme facturée. La réponse est la suivante à mon avis : ils le font parce qu'ils peuvent le faire. Dans l'état actuel de la concurrence ou des règles applicables, ils sont en mesure de le faire.
Comme je l'ai dit, le problème de toute l'industrie des services mobiles, c'est que c'est si incroyablement lucratif que l'argent balaie presque toute autre considération. De fait, les joueurs en place adoptent des mesures pour faire échec à leurs rivaux et posent certains actes et exigent certains frais simplement parce qu'il y a d'énormes profits à en tirer. Il appartient aux décideurs de fixer correctement les règles qui s'imposent et de permettre aux entreprises de rivaliser avec le plus de vigueur possible. C'est ce genre de pratique abusive qu'il faut stopper.
Le sénateur Zimmer : Cet été, l'Union européenne a adopté des règles nouvelles pour régir les frais de services sans fil. Une des règles en question impose des limites aux frais imposés dans le cas de messages texte arrivants, même s'ils proviennent d'un autre pays de l'Union européenne. Croyez-vous qu'une telle réglementation serait applicable au Canada?
M. Janigan : Oui. Dans notre mémoire, nous faisons valoir que certaines des dispositions de l'Union européenne en la matière sont logiques du point de vue de la protection des consommateurs, particulièrement lorsque ceux-ci sont vulnérables à l'exploitation de la situation parce qu'il n'y a pas vraiment d'autres fournisseurs à choisir, en particulier pour les frais d'itinérance, les frais pour les messages texte ou les transferts de données entre pays.
C'est un cas où l'application d'une politique universelle comportant des règles comme un plafonnement quelconque serait utile sur le marché. Ce serait une façon d'établir des règles de base applicables à tous, sans que puissent apparaître subitement ces problèmes de prix qui font que les consommateurs se retrouvent avec une facture exorbitante.
Le sénateur Zimmer : Cela donnerait donc des règles du jeu équitables.
M. Janigan : Cela donnerait des règles du jeu équitables et universelles, valables pour tous les fournisseurs.
Le sénateur Housakos : Je m'excuse si les questions que je pose reprennent ce qui a déjà été dit, mais je suis arrivé avec quelques minutes de retard, et vous avez peut-être abordé ces questions déjà.
Vous avez critiqué les enchères qui servent actuellement à attribuer des parts du spectre. Quelles options votre association propose-t-elle pour remplacer le système actuel?
M. Janigan : L'idée même des enchères nous pose un problème du point de vue philosophique; nous croyons qu'il faudrait probablement mieux fixer les conditions que l'on souhaite en ce qui concerne les services mobiles partout au pays. Le processus à proprement parler nous pose quelque difficulté. Le simple fait de générer de grandes sommes d'argent à l'occasion d'enchères correspond-il parfaitement à l'idée de défense de l'intérêt public dans le domaine des services mobiles?
Quoi qu'il en soit, nous devons admettre le fait que les gouvernements adorent maintenant les enchères parce que, premièrement, c'est une démarche simple et que, deuxièmement, c'est une démarche qui génère beaucoup d'argent pour le Trésor. Dans ce cas, nous nous sommes dits d'accord avec le processus qui a été adopté l'an dernier dans le cas des fréquences réservées pour régler certaines difficultés perçues liées au service mobile. Cela consiste à réserver une part du spectre pour les nouveaux arrivants et à leur permettre de soumissionner là-dessus à part des gros joueurs.
Le sénateur Housakos : N'êtes-vous quand même pas d'accord pour dire que, outre le fait de générer des recettes, ce qui est sans doute le cas pour le gouvernement, que cela empêche l'industrie de devenir une sorte de Far West? Je suis d'accord avec vous; fondamentalement, j'ai de la difficulté avec certaines des choses en question, qui vont à l'encontre de la foi que je mets dans une économie de libre marché. Cependant, pouvez-vous proposer une solution de rechange à cela, qui empêchera que l'industrie devienne une sorte de Far West et qui, en même temps, procurera des avantages intéressants au marché?
M. Janigan : Cela ne fait aucun doute, ils doivent pouvoir être certains de leur droit d'obtenir ces fréquences. Il faut établir des droits de propriété sur lesquels d'autres ne peuvent empiéter. La question consiste à savoir si la montée propre aux enchères conduit vraiment au meilleur résultat possible.
J'ai aussi de la difficulté à admettre que toutes les sommes d'argent recueillies grâce à l'enchère soient simplement versées dans le Trésor, sans servir à des fins liées aux télécommunications ou au service mobile de façon générale. Si j'avais une recommandation à faire, je dirais que les produits de l'enchère elle-même ne devraient pas être versés exclusivement au Trésor; on devrait disposer de cet argent-là pour d'autres fins, pour répondre aux besoins du commerce mobile et des télécommunications en général.
Le sénateur Housakos : Entendu. Compte tenu de l'investissement très important qu'il faut faire pour entrer dans l'industrie du sans-fil, êtes-vous d'accord avec l'idée d'en permettre plus de ce point de vue? À votre avis, l'accroissement de la concurrence débouchera-t-il sur des prix mieux adaptés aux besoins du consommateur, en fonction des coûts de l'affaire?
M. Janigan : Comme nous représentons des groupes de consommateurs qui souhaitent voir une plus grande concurrence dans le domaine et que nous avons l'impression qu'il y a peu de choses à tirer des règles actuelles en matière de propriété, oui, nous sommes en faveur d'une libéralisation des règles de propriété, pour permettre une plus grande concurrence étrangère sur le marché du sans-fil. C'est une idée qu'il faut appliquer, selon nous. Nous n'y voyons pas de gros inconvénients pour les consommateurs; à l'inverse, nous croyons que l'accroissement de la concurrence étrangère pourrait être très avantageux.
Le sénateur Housakos : À votre avis, la raison d'être du CRTC, son mandat, permettra-t-elle vraiment de relever tous les besoins croissants de l'industrie du sans-fil au cours des quelques années à venir?
M. Janigan : Non, je ne le crois pas. Le CRTC a été conçu comme organisme tarifaire chargé de veiller sur un monopole. Dans la plupart des secteurs, il n'existe plus de monopole. Il y a des joueurs dominants sur le marché, mais il faut traiter d'une multiplicité de questions qui touchent le réseau de télécommunications pris globalement. L'organisme dispose peut-être bien des renseignements et d'une partie de l'expertise qu'il faut, mais il n'a pas vraiment les ressources nécessaires pour s'atteler à cette tâche.
Il y a en ce moment la liste des numéros de télécommunication exclus. Or, même si elle demeure plutôt minimale pour l'heure, le CRTC éprouve de la difficulté à réunir les ressources nécessaires pour traiter avec les joueurs de façon appropriée. S'attaquer à cet aspect modeste du cadre général des télécommunications est pour lui une épreuve. Il nous faut probablement un modèle nouveau; il nous faut certainement une loi nouvelle et probablement une approche nouvelle aussi.
Le sénateur Housakos : Merci beaucoup des réponses que vous nous avez données.
Le sénateur Mercer : Je m'intéresse à ce que vous avez dit à propos de la liste de numéros exclus et la relation entre le CRTC et l'administration de cette affaire. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, mais, à mon avis, le CRTC a fait le contraire tout à fait de ce que voulait le Parlement. Dans les débats devant le comité de la Chambre des communes — j'ai siégé à ce comité-là —, les quatre partis avaient le même avis sur le traitement qui devait être réservé aux œuvres de bienfaisance. Or, le CRTC essaie de trouver une façon détournée d'imposer des frais aux œuvres de bienfaisance en rapport avec la liste de numéros exclus en question.
M. Janigan : Le problème avec les œuvres de bienfaisance, c'est que la théorie justifiant l'exception se heurte à la réalité des perceptions de la clientèle sur les questions d'accessibilité. À certains égards, nous avons déterminé que les appels des œuvres de bienfaisance figurent parmi certains des plus nocifs d'après les plaintes déposées à propos du télémarketing. Nous nous retrouvons dans cette difficulté : le grand public semble éprouver une aversion réelle pour les appels.
Le sénateur Mercer : Le Parlement était au courant, tout au moins les arguments ont-ils été invoqués, mais on est quand même allé de l'avant pour de bonnes raisons, à mon avis, on a donc exempté du processus d'exclusion les œuvres de bienfaisance, les partis politiques et d'autres organismes.
M. Janigan : Le Parlement fait la loi.
Le sénateur Mercer : On le croirait.
Le sénateur Merchant : Les consommateurs — que vous représentez — se soucient toujours de sécurité, par exemple la sécurité des renseignements; et nous entendons parler de vol d'identité. Quelles seraient les mesures que l'on pourrait prendre selon vous dans le domaine du sans-fil pour protéger le consommateur?
M. Janigan : Une des recommandations que nous formulons dans notre mémoire porte sur le vol d'identité du point de vue du sans-fil. Dans notre recommandation particulière, nous nous reportons au projet de loi S-4, qui se trouve actuellement devant le Sénat et qui vise à apporter au Code criminel des modifications pour criminaliser certains comportements relatifs au vol d'identité comme la possession ou le trafic de renseignements sur des comptes de carte de crédit. Nous proposons que des dispositions particulières protégeant les clients du sans-fil contre les abus possibles y soient incluses. C'est une des mesures que nous considérons comme appropriées.
Une disposition interdisant la possession ou la distribution d'outils permettant de déjouer les mécanismes de sécurité et de chiffrement des réseaux de commerce mobile, comme l'interdiction touchant aux clés postales, représenterait peut-être aussi une protection utile.
Le sénateur Banks : Je m'excuse de poser la question à nouveau, mais je n'ai pas compris votre réponse à la deuxième partie de la question du sénateur Housakos. D'abord, il vous a demandé de confirmer le fait que vous ne prisez pas l'idée des enchères, et vous en avez donné la raison. Il vous a également demandé quelles étaient les solutions de rechange, quel ensemble de critères s'appliquerait et quel processus de règlement permettrait autrement de choisir un exploitant.
M. Janigan : C'est le processus qui s'appliquait avant qu'il n'y ait des enchères : vous fixez les conditions aux exploitants et vous étudiez les soumissions présentées en vous reportant à l'ensemble de conditions que vous avez ainsi fixées. Si vous estimez que le service dans une région éloignée en particulier doit faire partie de la franchise qui sera concédée, la personne doit alors soumissionner sur le service en question.
Le sénateur Banks : C'est comme une demande de licence d'agir.
M. Janigan : Tout à fait. Il y a un terme technique pour cela. Je me creuse les méninges pour le trouver. Je crois que c'est quelque chose comme une enchère de type Chadwick. C'est l'inverse de ce que nous disions : d'abord, vous fixez les exigences propres à l'intérêt public; ensuite, vous allez chercher le fournisseur.
Le président : Votre organisme a parlé du code de conduite de l'Association canadienne des télécommunications sans fil. Il était question de la coopération et de l'abandon des calculatrices de tarif. Pouvez-vous nous parler davantage de cet incident?
M. Janigan : Certains des principes du code de conduite du domaine du sans-fil sont bons; une bonne part de ce qui s'y trouve est bon. La question revient à savoir comment on va mettre cela en œuvre, comment on fera respecter les principes en question et comment on peut procéder pour qu'il y ait transparence et reddition de comptes. Nous n'avons pas encore tout à fait toutes les réponses à ces questions-là.
Quant à la calculatrice des tarifs du service sans fil, c'était un projet du Bureau de la consommation d'Industrie Canada. Il y a investi quelque 1,4 million de dollars. Il a procédé à certains essais, et nous avons eu le bonheur d'essayer la calculatrice en prenant pour point de départ différents besoins chez le consommateur. La calculatrice en question semblait générer des renseignements incroyablement utiles aux consommateurs, surtout qu'il y a cette prolifération de régimes et ainsi de suite.
Une fois la calculatrice « exposée » à l'industrie, le projet a fait l'objet d'une campagne de pression assez intense de la part de l'industrie, pour empêcher qu'il se concrétise. La raison officielle qu'on a donnée, c'est que le fonctionnement de la calculatrice était au-delà des capacités techniques d'Industrie Canada. J'ai de la difficulté à concevoir qu'un ministère chargé des télécommunications et de l'avenir cybernétique du Canada n'arrive pas à faire fonctionner une calculatrice de tarif des services sans fil sur son site Internet. À nos yeux, cela aurait servi à encourager la concurrence, en qualité et en quantité, dans l'intérêt des consommateurs.
Le président : Il y a un projet de loi antipourriel qui chemine actuellement à la Chambre des communes et dont l'étude relèverait de notre comité selon l'usage. Avez-vous quelques remarques utiles que vous pourriez faire à notre comité en rapport avec le déroulement de ce processus?
M. Janigan : Je ne suis pas l'avocat du Centre de défense de l'intérêt public, le CDIP, qui se charge en tout premier lieu de ce dossier-là, bien que je connaisse certaines des dispositions dont il est question. De façon générale, je dirais que c'est pour le gouvernement un effort important déployé pour protéger les consommateurs; si le projet de loi était adopté, ce serait un instrument utile pour contrer les abus. Ce ne serait pas une panacée, mais ce sera très utile aux consommateurs dans la lutte contre le pourriel, qui occupe une place relativement élevée dans le classement des plaintes des consommateurs liées à Internet et aux télécommunications en général.
Le président : C'était ma façon d'avertir le comité du fait que nous allons probablement étudier le projet de loi en question avant Noël.
Le sénateur Plett : Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe. Dans ma vie précédente, je traversais une bonne part de notre pays par affaires, surtout l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et le nord-ouest de l'Ontario, et j'ai constaté que le service était très variable à ce moment-là d'une province à l'autre.
L'autre soir, nous avons accueilli des témoins de SaskTel. Le service sans fil en Saskatchewan semble être nettement meilleur que ce qu'il est ailleurs au pays. Aujourd'hui, à la réunion du caucus, notre ministre régional responsable de ma province, le Manitoba, nous a signalé qu'il était en pourparlers avec Manitoba Telecom Services Inc., ou MTS. À mon chalet, qui se trouve à peine à deux heures de route au sud de Winnipeg, je n'ai pas de service pour le sans-fil ou le cellulaire.
Pourquoi y a-t-il une si grande différence dans les services d'une région à l'autre de notre pays? On pourrait croire qu'il existerait un service égal pour tous.
M. Janigan : Selon moi, c'est que le service sans fil a d'abord été offert par les entreprises téléphoniques établies. Au départ, c'était le complément d'un service, un service accessoire par rapport au service local classique. Dans bon nombre de cas, les fournisseurs de service téléphonique n'avaient pas prévu cela au départ. Au départ, il n'y avait pas de plan pour aménager des réseaux sans fil au Canada. Le sans-fil était une partie intégrante des activités commerciales téléphoniques.
Par voie de conséquence, l'activité a été fondée sur des modèles d'affaires qui convenaient à la téléphonie, mais pas forcément au sans-fil, de manière générale, et les difficultés liées à l'aménagement du service dans les régions rurales et éloignées ont été balayées, le temps qu'une technologie nouvelle ou meilleure, sinon des subventions publiques viennent corriger le tir. C'est la meilleure théorie que je puisse concevoir pour expliquer la qualité très variable du service. Dans une certaine mesure, le modèle d'affaires doit avoir quelque correspondance avec les services particuliers dont il est question.
Le sénateur Plett : J'apprécie la réponse que vous donnez et je comprends que vous n'êtes peut-être pas en mesure de mieux répondre à cette question-là. Si nous étions en 1902 avec le télégraphe et les chevaux pour nos déplacements, cela aurait du sens. Cependant, je croirais que le Manitoba, qui est tout juste à côté de la Saskatchewan, devrait pouvoir trouver une façon de fournir un service égal.
Le président : Merci de l'exposé que vous nous avez présenté, messieurs.
Mesdames et messieurs les sénateurs, les limites de la technologie étant ce qu'elles sont, nous n'allons pas pouvoir assister à un exposé bilingue. Nous ne pouvons pas poser de questions en français, étant donné que le système ne peut les traduire.
Ensuite, signalons que l'exposé écrit figure seulement dans la langue anglaise. Nous avons sondé officieusement les gens qui se soucient de cette question. Nous avons convenu de faire une exception aujourd'hui. Nous acceptons rarement les documents présentés dans une seule langue. Par contre, du fait de la technologie, nous ne pouvons pas poser de questions en français de toute façon; si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais accepter le document.
Le sénateur Mercer : Monsieur le président, puis-je demander que le document soit traduit?
Le président : Il est à la traduction en ce moment. Une fois traduit, il nous sera transmis.
D'Edmonton, nous accueillons Erwin Loewen, directeur de SuperNet, Services technologiques, Service Alberta. Peut-être pouvez-vous présenter la personne qui vous accompagne plus tard.
L'aménagement de SuperNet de l'Alberta visait à relier les établissements publics de toute la province à un service Internet sur large bande, pour rendre possible l'accès à Internet haute vitesse, les vidéoconférences et d'autres services encore. C'est un réseau de câbles optiques et de pylônes qui regroupe actuellement 429 localités dans toute l'Alberta.
Monsieur Loewen, nous vous souhaitons la bienvenue.
Erwin Loewen, directeur, SuperNet, Services technologiques, Service Alberta, Alberta SuperNet : Merci beaucoup. Je voudrais vous présenter Mme Michelle Chapeski, qui fait partie de l'équipe commerciale rattachée à SuperNet. Elle sera en mesure de répondre à toute question touchant le contrat à proprement parler, si j'éprouve des difficultés.
Le président : Ça nous prend quelqu'un comme ça.
M. Loewen : Encore une fois, je m'excuse. Nous aurions disposé de l'exposé en langue française aussi, mais nous avons travaillé moyennant un court préavis. Il nous a fallu faire notre possible en peu de temps.
De fait, votre introduction a servi merveilleusement à expliquer le SuperNet de l'Alberta. Je pourrais presque m'arrêter là.
Je voudrais simplement vous présenter une brève série de diapositives qui vous feront voir en quoi consiste exactement le SuperNet de l'Alberta en ce moment et comment nous nous en servons pour fournir des services au secteur public de l'Alberta aussi bien qu'aux entreprises et aux résidents; on nous a demandé de traiter en particulier des fournisseurs de services Internet.
En passant à notre programme d'action, nous sommes à la diapo 3, nous voyons qu'il sera question de la vision et de l'occasion à saisir dans ce domaine, puis de la solution de même que de l'utilisation et des avantages actuels de SuperNet en Alberta. Après, nous serons heureux de répondre à toute question et de participer à une discussion.
Premièrement, la vision de SuperNet — c'est la diapo 4 — s'apparente probablement à ce qui se fait dans bien des régions du Canada et à bien des endroits ailleurs dans le monde. Nous avons affaire à une superficie relativement grande où la population est clairsemée, soit plus de 661 000 kilomètres carrés et presque 3,5 millions de citoyens. Deux grandes villes se trouvent dans l'aire touchée, mais la population de l'Alberta, selon Statistique Canada, figure parmi les plus clairsemées qui soient au pays. Les deux tiers de notre population habitent un grand centre urbain, mais c'est un tiers, nettement, sinon plus, qui habite dans les petits centres qui se trouvent çà et là.
Comme ailleurs au Canada, il y a de la concurrence dans les centres urbains. À un moment donné, il n'y avait essentiellement pas de service dans les régions rurales. Nous avons voulu faire le pont entre les services urbains, d'une part, et les services en régions rurales et éloignées, d'autre part, en Alberta. Le terrain nous posait quelques difficultés. Il y a des montagnes, des collines, des prairies — tout cela dans un secteur. C'est le travail dans les prairies qui s'est révélé plus simple, mais il a certainement été difficile de brancher tous les segments de la province.
La prochaine diapositive traite de l'occasion à saisir. Essentiellement, nous avons pris pour référence les points clés suivants : éliminer le fossé numérique en Alberta en branchant les collectivités urbaines et rurales; répondre aux besoins d'accéder à une bande plus large pour permettre l'utilisation de nouvelles technologies en ce qui concerne les applications vidéo, image, voix et données; s'assurer que le réseau favorise la concurrence et le développement rural dans la province; et s'assurer que le réseau est ouvert et accessible à tous.
Le gouvernement est alors entré en scène avec une analyse justifiant l'extension des services à large bande aux localités rurales. Comme à bien des endroits ailleurs au pays, nous avions affaire à un scénario où les fournisseurs n'arrivaient pas à justifier commercialement l'établissement de services haute vitesse dans les petites collectivités rurales, vu que les coûts à engager pour construire la structure dépassaient de loin les capacités commerciales des localités, prises seules. Selon le gouvernement, si nous pouvions entrer en scène et accorder un financement qui permettrait aux localités rurales de petite taille d'assumer les dépenses d'infrastructure en question, l'activité pouvait atteindre à l'autonomie financière par la suite.
En passant à la diapo 7, je peux expliquer les principes du projet que nous avons soumis aux appels d'offres. Il fallait un réseau durable et extensible — nous étions à la recherche d'une solution « XXIe siècle » — et acheter ou louer l'infrastructure existante dans la mesure du possible. Autrement dit, nous ne voulions pas construire à l'excès en négligeant les solutions existantes. Nous voulions prendre les solutions existantes comme point de départ.
Nous voulions de l'ouverture et des chances de participation égales, c'est-à-dire, essentiellement, un prix universel et aucuns frais d'interurbain. De même, nous voulions nous assurer qu'il n'y aurait pas de pénalité appliquée à une région éloignée, par rapport à une région urbaine. Promouvoir la concurrence et le développement rural constitue un principe clé de l'affaire, tout comme garantir des services abordables et rapides dans le cas des programmes du secteur public et de la province.
Nous nous sommes penchés sur une série de modèles et d'occasions à saisir pour faire aménager un réseau à large bande dans l'ensemble de la province. Ce faisant, nous avons déterminé que le partenariat public-privé représentait la meilleure approche possible. Nous avons voulu offrir la large bande à la province dans son intégralité. Cependant, nous voulions nous assurer du fait que le gouvernement n'aurait pas à s'occuper lui-même des services pour répondre aux besoins des résidents et des entreprises.
Résultat : à partir des réponses aux appels d'offres, le gouvernement de l'Alberta a investi 193 millions de dollars dans l'aménagement d'un réseau que nous qualifions d'étendu dans la diapositive. J'expliquerai ce qu'il en est quand nous serons rendus quelques diapositives plus loin.
C'est Bell Canada qui l'a emporté, de même que Axia SuperNet Ltd. Bell a remporté le droit d'aménager le réseau de base des grandes collectivités de la province. L'entreprise souhaitait s'installer dans l'Ouest du Canada et voyait là l'occasion d'y aménager sa propre infrastructure. J'expliquerai exactement comment cela fonctionne quelques diapositives plus loin aussi.
Nous voulions également un exploitant de réseau et un gestionnaire d'accès indépendant. Autrement dit, nous souhaitions pouvoir compter sur une partie neutre et indépendante — pas un grand fournisseur de télécommunications, forcément — qui veillerait à ce que SuperNet soit accessible à tous les fournisseurs, qu'il s'agisse d'une grande entreprise de télécommunications souhaitant utiliser l'infrastructure ou un petit fournisseur Internet indépendant, sans que le coût des services ne change.
La prochaine diapositive nous amène à parler de nos partenaires. Encore une fois, ensemble, Bell Canada et Axia SuperNet Ltd. ont remporté la mise. Bell Canada a construit l'intégralité de l'infrastructure dans la province. L'entreprise est responsable en premier lieu de la construction du réseau; de fait, elle est propriétaire-exploitant de l'infrastructure dans les 27 plus grandes collectivités de la province — c'est le réseau de base.
C'est ainsi que Bell a déterminé qu'il serait rentable pour elle de se tourner vers les entreprises et les services en Alberta, qu'il était logique d'investir son argent. Dans le réseau de base, c'est elle qui fournit les services de large bande aux collectivités en question; c'est l'épine dorsale de SuperNet pour l'ensemble de la province.
Axia SuperNet Ltd. a obtenu de s'occuper de l'exploitation du réseau d'après le contrat établi. L'entreprise travaille directement auprès des clients et des fournisseurs de services à s'assurer que SuperNet repose sur un modèle d'accès ouvert. Elle veille sur le contrôle de la qualité et sur les services — elle applique les ententes sur les niveaux de service, si vous voulez, dans le réseau.
Je vais passer à la diapo 11. Nous reviendrons à la diapo 10 dans une minute.
Voyons maintenant la configuration générale de SuperNet. Comme je l'ai dit, il y a un réseau de base; Bell Canada exploite cette partie du réseau. C'est l'épine dorsale du réseau, qui relie les plus grandes collectivités.
Les deux tiers environ de la population se trouvent dans les collectivités en question. Nous avons permis à Bell Canada de construire cette partie du réseau SuperNet et de l'exploiter en tant qu'entreprise de télécommunications, en tant que fournisseur du domaine, étant donné qu'il y avait déjà de la concurrence dans les collectivités en question. Le gouvernement n'a pas accordé de financement ou construit quoi que ce soit dans les zones en question. Bell s'est chargé de la tâche et rivalise directement avec les autres services qui sont déjà offerts là.
Cependant, tous les établissements du secteur public sont reliés au réseau de Bell. Ce sont les connexions « secteur public » de SuperNet. Dans le réseau étendu, le gouvernement a financé cette partie de la construction. Nos 193 millions de dollars ont servi à brancher 402 collectivités de plus dans la province.
À l'heure actuelle, le tiers environ de la population albertaine se trouve dans cette zone-là. Les gens y ont un accès limité aux nouvelles technologies et une capacité limitée, voire inexistante, dans le cas de la large bande. Comme il était difficile de justifier commercialement la prise en charge des services de large bande dans les secteurs en question, nous avons pavé la voie, essentiellement, en construisant l'infrastructure voulue.
Les fournisseurs de services Internet peuvent se brancher directement sur SuperNet dans le réseau étendu. Nous en parlerons un peu plus au moment de traiter de la solution adoptée.
La prochaine diapo, la diapo 12, porte sur la technologie employée. C'est toujours, sans exception, le protocole Internet. C'est un réseau de fibres optiques pour la plus grande part. Nous avons posé de la fibre de verre sur 12 000 kilomètres en Alberta, sous le sol. Nous recourons au service sans fil à certains endroits, là où la fibre optique ne représentait pas une solution viable ou pratique.
Par rapport aux solutions des autres fournisseurs de services Internet, la différence principale de la solution de SuperNet réside dans le fait qu'il s'agit d'une forme différente de technologie de réseau. Nous recourons au MPLS — la commutation de labels multiprotocole —, qui est un système de labels multipaquets. C'est un terme technique. Les technologies MPLS et QOS, « qualité du service », font que SuperNet offre bien plus que de la largeur de bande Internet. C'est la possibilité pour nous de disposer d'un réseau privé à l'intérieur de SuperNet pour que des organismes indépendants — les conseils scolaires, les organismes hospitaliers, les régions « de bibliothèque », les ministères et le gouvernement de l'Alberta lui-même — puissent se donner chacun un réseau virtuel indépendant à l'intérieur de SuperNet. La capacité QOS nous permet de fournir des services en temps réel grâce à des paquets prioritaires — des vidéoconférences, par exemple — à un meilleur débit, pour nous assurer que d'autres données ne viennent pas compromettre la transmission.
Les clients du secteur public ont accès aux fonctions de SuperNet de bout en bout. Si vous travaillez dans une école, vous pouvez vous brancher dans le centre-ville d'Edmonton ou encore dans la région la plus éloignée de la province, moyennant un même prix, où que vous vous trouviez. Que vous vous trouviez à Edmonton ou dans une région éloignée, vous payez le même prix pour la même connexion.
Les clients commerciaux ont fait prendre une tournure intéressante à notre contrat. Il nous fallait répondre à quelques exigences. Bell a été notre partenaire dans l'aménagement de ce réseau. L'entreprise a construit le réseau dans les 27 grandes collectivités de la province. Le secteur commercial ne se branche pas directement à ce que nous appelons SuperNet dans le réseau de base. Il peut se tourner vers n'importe quel fournisseur commercial pour obtenir des services entre Edmonton et Calgary, Edmonton et Red Deer ou diverses autres localités de grande taille. Dans les zones du réseau étendu où le gouvernement a financé l'aménagement de SuperNet, les clients commerciaux peuvent se brancher directement sur SuperNet. Le service de liaison secondaire peut alors entrer en jeu dans les grandes collectivités, sinon entre les petites. C'est un peu compliqué de ce point de vue-là, mais nous essayons de trouver une solution pour que ça fonctionne.
Si on pouvait revenir rapidement à la diapo 10... parlons de l'accès à SuperNet.
L'appel d'offres traitait d'un réseau qui répondrait aux besoins du secteur public de la province. Les ministères, les établissements d'enseignement, notamment les écoles élémentaires et secondaires, les établissements d'enseignement postsecondaire, les organismes du domaine de la santé, les bibliothèques et les administrations municipales peuvent tous se brancher directement à SuperNet dans toutes les collectivités. Les entreprises et les résidences peuvent se connecter directement à SuperNet dans les collectivités faisant partie du réseau étendu — les 402 collectivités ayant bénéficié du financement gouvernemental.
Essentiellement, les gens ne se connectent pas directement. Ils se trouvent un fournisseur d'accès, que ce soit un fournisseur de services Internet qui branche les résidences sur SuperNet ou un autre fournisseur qui crée des connexions commerciales directes pour les entreprises rurales souhaitant se brancher sur SuperNet.
Les fournisseurs de services peuvent aussi étendre le champ d'application de SuperNet au-delà des limites que représentent nos collectivités désignées, surtout grâce à des connexions sans fil. Parmi les entreprises, par exemple, il y a les sociétés pétrolières et gazières et autres entreprises de régions éloignées qui souhaitent établir une liaison directe entre l'installation éloignée et le siège social du grand centre. Ils peuvent ainsi créer un réseau étendu point à point direct sur SuperNet.
J'espère que ce n'est pas trop déroutant. Nous pouvons rester avec vous aussi longtemps que vous le voulez pour répondre aux questions.
Nous pouvons parler de la façon dont SuperNet est déployé dans une collectivité donnée. Nous avons certainement des petits centres dans la province. La diapo 13 laisse voir ce que nous appelons un « point de présence ». C'est le centre où la fibre interurbaine arrive en ville pour ainsi dire et d'où elle part pour sa prochaine destination. Au point de présence, l'accès local au réseau à fibres optiques réunit tous les établissements du secteur public de la ville.
C'est une des solutions les plus originales qu'on ait adoptées pour offrir des services au secteur public en Alberta. Dans presque tous les cas — il y a quelques exceptions —, notre réseau de fibres optiques entre directement dans les bâtiments. Nous cherchons à établir un réseau qui aura une longue vie, qui sera durable. Les augmentations de la largeur de bande consacrée aux services sont monnaie courante, nous le savions. En reliant les écoles, les hôpitaux, les bibliothèques et les bureaux gouvernementaux sur un réseau de fibre optique, nous nous sommes donné une infrastructure qui tiendra pendant plus de 30 ans et peut-être trois fois plus longtemps même, jusqu'à 80, 90 ans. La technologie étant ce qu'elle est maintenant, il est difficile de le dire.
Depuis le point de présence en question ou d'autres encore, un fournisseur de services Internet peut se brancher sur SuperNet. Il peut alors établir une liaison secondaire avec un grand centre. Par exemple, un petit fournisseur Internet d'une petite ville en Alberta peut créer une connexion avec le point de présence de SuperNet. Cela lui permet d'obtenir ses services d'un plus gros fournisseur Internet à Edmonton, Calgary ou je ne sais où encore. En empruntant la dorsale de SuperNet, il peut obtenir autant de largeur de bande qu'il lui faut. Là, il peut recourir aux services classiques pour rejoindre les ménages et les entreprises. Il peut s'agir de DSL, de câble ou de sans-fil — ce qui convient le mieux pour offrir des solutions dans la collectivité en question.
Encore une fois, la liaison secondaire passe par SuperNet, puis il y a distribution des services classiques aux ménages et aux entreprises. Cela donne un modèle d'affaires durable pour les fournisseurs de services des localités en question, qui n'ont pas alors à « faire venir » la large bande d'une collectivité plus grande à un coût nettement plus élevé.
En même temps, les fournisseurs de services de la collectivité locale ou de toute autre collectivité connectée à SuperNet dans la province peuvent fournir les services Internet directement au secteur public aussi. Les écoles des petites localités en question ont donc accès à une largeur de bande de qualité pour se brancher sur Internet. C'est équitable dans les petites localités en question tout comme ce l'est à Edmonton, à Calgary et ailleurs.
Il importe de parler de ce qui distingue un peu l'Alberta en ce qui concerne les aménagements du dernier kilomètre quand il s'agit de répondre aux besoins des ménages et des résidences sur l'ensemble du territoire et peut-être sur celui d'autres provinces encore. Pour une grande part, notre secteur public est déjà connecté à un réseau de large bande plus ou moins dans l'intégralité de la province.
D'autres provinces essaient de satisfaire aux exigences de leur secteur public en matière de large bande tout en recherchant des solutions Internet pour les ménages et résidences. Nous avons donc affaire à un modèle un peu différent, mais, essentiellement, le résultat sera le même. L'Alberta souhaite toujours s'assurer que 100 p. 100 de ses habitants ont un accès équitable à des services Internet sur large bande. Nous pouvons en parler après, en traitant notamment du degré de succès que nous avons obtenu.
La diapo 14 fait voir à quoi ressemble SuperNet aujourd'hui dans la province. Je ne sais pas très bien si vous avez reçu des exemplaires couleur ou noir et blanc du document, mais je peux vous transmettre le fichier électronique si vous le souhaitez. Les lignes rouges sur la carte ici désignent le réseau de base — c'est-à-dire les éléments construits grâce au financement de Bell; les lignes jaunes représentent les collectivités faisant partie du réseau étendu, branchées grâce à l'argent du gouvernement; et les lignes vertes, grâce aussi au financement du gouvernement, font voir les connexions sans fil qu'il a quand même fallu utiliser.
En tant que technicien, cela m'intéresse de savoir que la connexion à Fort Chipewyan, tout là-haut, dans le nord-est de la province, représentait la plus longue connexion sans fil à exister dans le monde au moment où cela a été fait en 2005, soit une connexion de plus de 121 kilomètres de point à point. Pour ceux qui ont construit cela à l'époque, l'exploit technique était source de fierté.
Regardons les statistiques encore une fois. On peut voir qu'il y a 12 000 kilomètres de fibres. Un réseau sans fil de plus de 1 800 kilomètres regroupe diverses petites localités là où la fibre ne constitue pas une solution viable. Le nombre total de sites du secteur public branchés s'élève à 4 200. Nous accroissons le nombre de connexions avec les nouveaux sites commerciaux qui arrivent. En ce moment, plus de 60 fournisseurs de services Internet ont des connexions inscrites à SuperNet de l'Alberta. Il y a les tout petits fournisseurs de services Internet aussi bien que les grands, dont TELUS, Shaw Communications Inc. et d'autres encore.
Dans le secteur public, plus de 85 p. 100 des établissements ayant le droit de se connecter à SuperNet se sont prévalus de ses services. Or, ils n'étaient pas obligés de le faire. Le gouvernement subventionne la connexion de certains secteurs à SuperNet, surtout les établissements d'enseignement et les bibliothèques; il était donc plus facile pour eux d'accepter tout de go les services offerts. Globalement, plus de 85 p. 100 des sites aménagés utilisent déjà les services actifs de SuperNet aujourd'hui.
Le dernier point de l'énumération qui se trouve sur cette diapositive — la promotion de l'innovation — renvoie essentiellement à certaines des idées dont nous espérons qu'elles vont se concrétiser avec SuperNet. Du point de vue du secteur public, nous avons remporté un franc succès. Nous avons vu décoller plusieurs idées originales. La réalisation la plus intéressante, c'est d'avoir regroupé en un réseau commun tout le secteur public de la province. La collaboration intersectorielle qui en a résulté a connu une croissance rapide. Une fois achevé l'aménagement de SuperNet en 2005, nous avons constaté rapidement que les responsables de la santé, les conseils scolaires et les bibliothèques se sont tous mis à collaborer à partir de services communs.
La vidéoconférence représente une de nos grandes victoires dans le secteur public en Alberta. Peu après avoir mis la dernière main à SuperNet, nous sommes passés d'une poignée de salles de vidéoconférence dans les conseils scolaires à plus de 700. Il y a plus de 1 700 écoles élémentaires et secondaires dans la province; voilà donc une croissance à la fois significative et rapide. Certaines des collaborations intersectorielles ont porté sur le travail de physiothérapie et d'orthophonie dirigé par les spécialistes des centres urbains au profit des étudiants des régions éloignées qui, auparavant, ne pouvaient obtenir les services que tous les trimestres; c'est-à-dire quatre fois seulement par année. Maintenant, ils ont droit à des séances hebdomadaires à distance, grâce aux vidéoconférences. Dans certains cas, la physiothérapeute a constaté que le recours à la vidéoconférence lui permettait de focaliser sur ses sujets comme elle ne pouvait pas le faire lorsque ceux-ci se trouvaient directement devant elle. Elle a pu faire un bon usage de la technologie.
Nous sommes heureux du succès remporté par SuperNet dans le secteur public. En passant à la diapo 15, nous voyons les avantages de SuperNet lui-même. Voici plusieurs champs d'action différents. Encore une fois, la réalisation principale de l'élément secteur public de SuperNet consistait à mettre en place un réseau qui était plus solide qu'un seul service Internet. Essentiellement, il s'agissait de créer un réseau privé qui nous permettrait d'avoir en commun des services et de bénéficier de ce qui est appelé la qualité de service, ou QOS, qui fait que nous pouvons nous assurer d'accorder la priorité aux données les plus importantes, par exemple les vidéoconférences et la voix sur IP et ainsi de suite. De ce point de vue-là, le projet a été un succès.
L'autre élément du succès obtenu au sein de la province consistait à instaurer un tarif universel applicable à toutes les régions. C'est la première fois que les autorités de la santé et les divisions scolaires des régions rurales en particulier pouvaient se connecter sur un réseau étendu réunissant tous leurs établissements sans être pénalisés pour autant — par rapport aux conseils scolaires et aux autorités de la santé en milieu urbain —, vu les distances importantes entre les lieux. Cela s'est aussi révélé un succès.
Quant à la souplesse des services, nous proposons diverses options pour donner aux divers types d'utilisateurs diverses occasions de profiter de SuperNet, du service à 256 kilobits/seconde au service à plus de 100 mégabits. Déjà, le service GigE, ou gigabit ethernet, est offert sur SuperNet. Le secteur public peut certainement y trouver des avantages directs.
Je vais passer rapidement sur les quelques prochaines diapositives. Il y a les solutions électroniques pour le gouvernement et les connexions pour les Albertains. Je reviendrai parler des connexions du dernier kilomètre et des fournisseurs de services Internet à la fin de l'exposé.
La possibilité des collaborations voix et vidéo est importante. Le ministère provincial de la Justice, au moyen des vidéoconférences et des connexions avec les prisons et les centres de détention provisoire, organise les audiences et mises en accusation, et les avocats peuvent communiquer avec leurs clients directement en mode vidéo, sans avoir à se déplacer chaque fois sur une longue distance. Encore une fois, comme la population albertaine est clairsemée, offrir certains de ces services-là autrement se révèle plus coûteux et plus difficile.
La prochaine diapo traite de santé, de bibliothèques et d'apprentissage par voie électronique. Il y a certainement des occasions à saisir dans chaque secteur et, comme je l'ai dit, il y a certains projets intersectoriels importants qui sont en cours en ce moment.
À nos yeux, il importait que le projet débouche sur des services aux entreprises et à la collectivité, du commerce électronique, des opérations bancaires électroniques et la possibilité, encore une fois, d'instaurer des environnements multisites pour les entreprises. Il s'agissait de créer un réseau étendu à un coût abordable dans les régions éloignées où il n'y aurait pas eu autrement, comme je l'ai dit, d'offres viables d'accès à un réseau à fibre commercial; or, il y en a maintenant.
Passons maintenant à la diapo 19. Voici où tout converge plus ou moins, c'est-à-dire voici les fournisseurs de services Internet. L'idée première de l'appel d'offres, de la demande de propositions sur SuperNet, consistait à créer un réseau à large bande pour le secteur public de l'Alberta. Cela a été un franc succès. L'idée secondaire consistait à stimuler la création de services Internet sur large bande à l'intention de la population rurale. Les résultats à cet égard ont été mitigés. Nous pouvons certainement en parler et regarder ce qui s'est passé.
D'un point de vue commercial, un élément clé à nos yeux consistait à aménager en milieu rural des services Internet comportant la fonction de liaison secondaire, soit l'idée d'offrir une grande largeur de bande à la collectivité par liaison avec un fournisseur de services Internet de plus haut niveau, afin que les petits fournisseurs des régions rurales puissent obtenir une largeur de bande à prix abordable pour rejoindre les grands centres. Voilà un impératif commercial dont il fallait absolument tenir compte pour que les services Internet soient florissants dans les petites contrées de l'Alberta. Nous avons certainement obtenu du succès à cet égard.
Nous l'avons vu, dans la moitié environ des collectivités associées à SuperNet, un niveau quelconque de services Internet sur large bande est offert aux résidents et aux entreprises. Auparavant, il y avait probablement entre 40 et 50 collectivités qui pouvaient miser sur des services sur large bande. Aujourd'hui, il y en a plus de 200, quatre ans plus tard.
On peut assimiler cela à un succès. Cependant, il y a encore quelque 200 collectivités qui n'ont pas accès à ce type de service. Le gouvernement de l'Alberta souhaite vraiment connaître les modèles d'affaires en cause, savoir ce qui se passe du côté des services Internet, ce qu'il faut pour offrir le service au reste de la province et bien analyser les mérites du projet.
Nous avons commencé à saisir ce qui s'est passé du côté de nos fournisseurs de services Internet. Lorsqu'on a affaire à des populations très clairsemées, à très peu de ménages par kilomètre carré, il s'agit de plus que de liaisons secondaires. À ce moment-là, le coût à engager pour construire les pylônes et distribuer les services devient supérieur à ce qui était prévu. Comme le reste du Canada, nous essayons de déterminer quelles seraient les meilleures façons de fournir ces services-là.
Il y a des projets intéressants et novateurs fondés sur SuperNet, dont certains sont très dynamiques. Avec Internet sur large bande ou les services sur large bande dans l'ensemble de la province grâce à SuperNet, les bibliothèques se réinventent en tant que centres d'information pour leur collectivité. Elles proposent plus que des livres. Elles peuvent offrir des services Internet, des services de vidéoconférence et des services de « collectivités ingénieuses », et ainsi de suite. Quelques-unes de nos orientations sont intéressantes. J'invite le comité à communiquer avec moi n'importe quand pour obtenir de plus amples renseignements, s'il souhaite en savoir plus.
Nous croyons satisfaire à la plupart des exigences du secteur public de l'Alberta à l'égard des services à large bande, pour avoir déployé le réseau SuperNet de l'Alberta. Nous avons réussi en partie à aménager des services Internet dans les collectivités rurales et éloignées de notre province, car il y a un réseau à large bande qui fonctionne dans l'ensemble de la province. Nous cherchons à parachever le travail pour que la population entière en profite.
Le président : Merci. Je demande aux collègues qui souhaitent poser des questions de faire preuve de discipline. Il faudra s'en tenir à un nombre minimal de questions supplémentaires.
Le sénateur Johnson : Je vous remercie d'avoir présenté un exposé exceptionnel, qui était très dense. Vous avez répondu à bon nombre de mes questions.
Que faisait l'Alberta dans ce domaine avant l'avènement de SuperNet? Comment tout cela s'est-il fait et comment est-ce devenu une si brillante affaire?
M. Loewen : C'est une longue histoire. Pendant les années 1990, bon nombre d'organismes du secteur public ont commencé à prendre conscience de l'importance d'Internet pour leurs activités. Certes, les responsables de la santé et les conseils scolaires, entre autres, souhaitaient de plus en plus bénéficier de meilleures connexions que les services par accès commuté qu'il y avait à l'époque. Ils ont donc mis de la pression sur le gouvernement pour que ce dernier trouve des solutions au problème.
Le gouvernement compte une division de la recherche appelée Alberta Science and Research Authority, qui étudiait des façons pour l'Alberta d'entrer de plain-pied dans le XXIe siècle et de réussir comme province. Fin 1998, la division en question a recommandé au gouvernement d'aménager un réseau à large bande dans l'ensemble de la province, pour répondre aux besoins des secteurs public et privé. À partir de ce moment-là, il s'agissait de se pencher sur les diverses solutions possibles. Nous avons étudié les solutions novatrices qui existaient dans le domaine des réseaux ailleurs au pays. Au Québec, le RSQ connaissait quelque succès, tout comme les réseaux de recherche Orion en Ontario et en Colombie-Britannique. Nous avons regardé ce que les gens faisaient pour mettre sur pied des réseaux destinés à répondre aux besoins de secteurs précis, d'abord et avant tout le monde de l'enseignement, les établissements postsecondaires et le secteur de la recherche commerciale. En extrapolant, nous avons essayé de savoir ce qui pourrait répondre à nos besoins à nous.
La nécessité d'étendre la large bande au-delà du milieu des réseaux de recherche universitaires à la population générale nous a amenés à penser au partenariat public-privé. Nous ne pouvions donc compter entièrement sur l'idée de services de fibres noires pour le secteur public, capacité qui aurait été intéressante. Cependant, cela limitait la possibilité de s'éloigner de l'établissement élémentaire, secondaire ou postsecondaire en pouvant toujours accéder aux services à large bande nécessaires pour faire ses devoirs, par exemple.
Le sénateur Johnson : De ce fait, vous savez probablement que, par l'entremise d'Industrie Canada, le gouvernement du Canada applique un programme doté d'un budget de 225 millions de dollars, soit Large bande Canada : Un milieu rural branché. Croyez-vous qu'il est possible de comparer ce programme-là et celui qui aboutit à la création du réseau SuperNet de l'Alberta et d'estimer les coûts qu'il faudrait engager pour que tout le Canada se donne un programme SuperNet?
M. Loewen : Ce serait un peu difficile. Certes, je discute avec Mme De Francesco, qui essaie d'organiser cela avec Industrie Canada. Le but consiste à offrir des solutions technologiques aux régions rurales du Canada, en milieu éloigné. Essentiellement, l'idée commune au programme Large bande Canada et au programme albertain SuperNet consistait à utiliser les fonds gouvernementaux pour asseoir l'analyse de rentabilisation de tels projets pour les contrées moins peuplées du pays.
Le réseau albertain SuperNet repose sur une approche légèrement différente où nous établissons l'analyse de rentabilisation en fonction d'un budget gouvernemental conçu particulièrement pour connecter les établissements du secteur public. Ce faisant, nous espérions aménager l'infrastructure nécessaire et l'accès à cette infrastructure, ce qui a permis au secteur privé d'entrer en scène et de trouver lui-même la solution dite du dernier kilomètre. Large bande Canada est consciente du fait que le secteur privé ne peut faire cela tout seul. Il faut être en mesure d'assumer les coûts de distribution et autres pour installer cela dans les très petites collectivités.
Il serait difficile d'extrapoler le coût de SuperNet pour l'appliquer au reste du Canada, étant donné que le projet albertain constitue une solution à fibre sur large bande. Je n'en suis pas sûr, mais Large Bande Canada insiste peut-être sur la connexion du client au dernier kilomètre grâce au sans-fil surtout, plutôt que sur la fibre en liaison secondaire.
Pour répondre aux exigences du Canada en matière de services de données, il faudra investir dans les deux types d'infrastructure. On ne peut créer les connexions au dernier kilomètre dans les petites collectivités sans compter beaucoup plus sur les liaisons secondaires, qui doivent reposer sur la fibre pour qu'il s'agisse d'une infrastructure efficace et durable pour le pays.
À Singapour et en Australie, on essaie d'adopter à l'échelle nationale des programmes à large bande semblables à SuperNet. L'Australie a estimé le coût de son programme à plus de 40 milliards de dollars. Cependant, la différence clé réside dans le fait que les Australiens envisagent d'installer la fibre jusque dans les ménages. Le SuperNet albertain ne prévoit pas cela; ce n'est qu'une liaison secondaire en ce moment. Ce serait peut-être un sous-segment important du budget canadien pour les liaisons secondaires.
L'industrie des télécommunications réussit bien à répondre aux exigences d'une grande partie du pays en fait de large bande. Il s'agit donc de repérer les endroits où la rentabilisation du projet n'est pas viable pour elle en ce moment et où le financement gouvernemental permettrait probablement d'aménager la capacité nécessaire aux liaisons secondaires, ce que fait SuperNet.
Le sénateur Zimmer : Des représentants de SaskTel venus témoigner devant le comité récemment ont insisté pour dire que le coût d'aménagement d'un réseau à large bande comprend non seulement le coût initial de construction, mais aussi les coûts d'entretien et futurs coûts à assumer pour en arriver à des vitesses encore plus grandes d'accès Internet, dès que les vitesses en question deviennent la nouvelle norme. Pouvez-vous nous parler de cela s'il vous plaît?
M. Loewen : Permettez-moi de récapituler. Vous examinez les coûts, non pas seulement les coûts de construction, mais aussi les coûts d'entretien et en fonction des vitesses qui augmentent, là en particulier où les clients commencent à profiter de ces vitesses-là couramment et les exigent quand ce n'est pas des vitesses plus grandes qu'ils exigent?
Le sénateur Zimmer : Ces vitesses-là deviennent la nouvelle norme. Bien entendu, tout le monde veut le dernier modèle.
M. Loewen : D'accord. En dotant le réseau SuperNet albertain de l'infrastructure à fibre, nous nous sommes donné un réseau extensible et abordable qui permet l'ajout de largeurs de bande au fur et à mesure. Il faut encore organiser des échanges de matériel électronique tous les deux ou trois ans pour permettre de telles vitesses sur l'infrastructure à fibre en question. Nos partenaires du secteur privé en assument actuellement les coûts.
Ils répondent aux besoins d'expansion. Au fur et à mesure que les clients exigent davantage de services, tant que le prix demeure concurrentiel, nous constatons que le modèle d'affaires semble fonctionner avec le secteur privé qui s'occupe lui-même de l'expansion.
Le gouvernement n'a pas besoin d'y mettre d'autres fonds. Ça ne semble plus nécessaire, une fois la structure de départ en place. De ce point de vue-là, le secteur privé devrait pouvoir s'occuper de l'entretien si un modèle PPP, un partenariat public-privé, est employé pour aménager la structure au départ.
Le sénateur Zimmer : Quel pourcentage de la population albertaine n'a toujours pas accès à Internet haute vitesse? Prévoyez-vous étendre SuperNet pour qu'elle puisse en profiter? La technologie satellitaire peut-elle servir à fournir les services à large bande à ceux qui n'ont pas accès à SuperNet? Quels autres pays ou provinces du Canada prennent SuperNet pour modèle?
M. Loewen : Selon nos estimations, environ 25 p. 100 de la population albertaine n'a toujours pas accès aux services haute vitesse que permet SuperNet. Encore une fois, cela montre que c'est une proportion élevée de la population qui vit en milieu rural dans la province.
Le sénateur Zimmer : Prévoyez-vous étendre SuperNet pour qu'elle puisse en profiter?
M. Loewen : En ce moment, nous envisageons des solutions au problème en nous penchant sur le succès de projets comme Large bande Canada et le Fonds Chantiers Canada, de même que celui de projets provinciaux réalisés dans notre milieu de l'agriculture et du développement rural qui visent à stimuler la croissance dans les régions éloignées, pour aménager les services à large bande d'accès à Internet au-delà des premières collectivités profitant de SuperNet.
Nous n'allons peut-être pas devoir aménager SuperNet dans bien d'autres collectivités encore. Nous pouvons prendre les collectivités comme base de fonctionnement pour que les fournisseurs de services Internet sans fil puissent, grâce aux pylônes de radio des collectivités en question, offrir le service dans les régions qui restent.
Vous avez parlé de l'accès par satellite. C'est difficile de dire si nous pouvons couvrir, au moyen des services terrestres, par exemple les services terrestres sans fil ou filaires l'intégralité de la population d'une région quelconque du pays. Dans quelques situations, il faudra toujours des services satellitaires pour fournir les services à large bande dans le pays entier. De ce fait, nous croyons qu'il faudra toujours pouvoir recourir dans une certaine mesure à des services satellitaires.
Notre approche de prédilection consisterait maintenant à recourir aux services terrestres autant que possible pour assurer un service de première qualité — sans critiquer de quelque manière que ce soit les merveilleux services satellitaires offerts par nos fournisseurs en ce moment. Ces fournisseurs assurent certainement un service de bonne qualité, mais, dans certains cas, ça ne peut rivaliser avec les services terrestres sans fil ou autres.
Le sénateur Zimmer : Dernière question. Quels autres pays ou provinces du Canada prennent pour modèle SuperNet?
M. Loewen : Je sais que Singapour et l'Australie étudient SuperNet comme modèle au fur et à mesure qu'ils conçoivent leurs propres solutions à fibre. Les deux pays en question ont décidé d'aménager un réseau à fibre jusque dans les ménages, plutôt que d'opter pour les services de liaison secondaire comme nous l'avons fait. Cela a servi à accroître le coût des services particuliers en question et le champ d'action du projet.
Je crois savoir aussi que la province de Terre-Neuve-et-Labrador discute actuellement avec Axia SuperNet Ltd. et ses partenaires en vue de trouver une solution pour offrir les services à large bande là aussi. Je sais que Axia SuperNet Ltd. offre des services semblables à SuperNet dans certaines régions de la France en ce moment, de concert avec diverses entreprises de télécommunications françaises.
Le sénateur Merchant : Je suis originaire de la Saskatchewan, mais le sénateur Zimmer a couvert tout le terrain saskatchewanais. Nous savons qu'on nous envie nos services, comme le sénateur Plett a pu nous le dire.
J'ai une question à poser à propos de la sécurité. Les réseaux câblés étendus comme SuperNet soulèvent-ils de nouvelles préoccupations sur le plan de la sécurité, tant pour la sécurité du réseau lui-même que pour celle des renseignements qu'il sert à transmettre sur l'utilisateur? Le cas échéant, que fait le gouvernement de l'Alberta à cet égard?
M. Loewen : Pour ce qui est de la sécurité des renseignements transmis sur SuperNet, le gouvernement de l'Alberta est très heureux des services de sécurité qui y sont assurés. Comme je l'ai dit, le réseau repose sur une technologie établie comme norme par Cisco Systems Inc., la commutation de labels multiprotocole, version du MPLS de Cisco que nous employons sur SuperNet. C'est ce qui nous permet de créer des réseaux privés virtuels dans l'ensemble du réseau, pour chaque organisme qui recourt à ce dernier. Chaque division scolaire, bibliothèque, bureau de la santé, bureau gouvernemental et municipalité est en mesure de créer son propre réseau, qui est tout à fait prémuni contre l'extraction illicite de données.
Nous avons procédé à des évaluations de la sécurité technologique. Axia SuperNet Ltd. dispose d'une équipe de sécurité qui est au service du gouvernement. Du point de vue de ce réseautage et de la sécurité des données, nous estimons que les données transmises au sein de chaque organisme sont bien protégées. Certains des organismes qui recourent à SuperNet chiffrent les données qui circulent sur le réseau de toute façon. Cependant, ils le font en fonction de leurs propres protocoles de sécurité et non pas forcément parce que c'est une exigence dans le cas de SuperNet.
Quant à la sécurité matérielle et à la sécurité du réseau lui-même, il existe justement des protocoles de sécurité qui s'appliquent. Les gens d'Axia me feraient probablement la peau si je m'aventurais à donner trop de détails là-dessus. De fait, la sécurité est établie avec des caméras vidéo et ainsi de suite aux points de présence dans chaque collectivité, à l'intérieur et à l'extérieur, et cette surveillance-là se fait.
Quant à la fibre optique elle-même, pour la plus grande part, elle est enterrée, et cela lui procure beaucoup de résilience et de capacité.
À l'occasion, la fibre est coupée quelque part. Ça arrive. Cela donne une panne, mais nous sommes rapides pour remettre les choses sur pied.
J'ai mentionné Industrie Canada, le CRTC et d'autres organismes par le passé... lorsque nous discutons de ce qui se fait en Alberta, que nous travaillons à améliorer SuperNet lui-même en recourant à la topologie dite en anneau. Nous étendons le champ d'action de SuperNet pour que, toujours, ce ne soit pas qu'un réseau linéaire qui relie une série de collectivités, rien de plus, ce qui fait que, si vous coupez la fibre quelque part, toutes les collectivités au-delà de ce point se trouvent à être aux prises avec une panne. Nous en faisons une sorte d'anneau pour que la coupure individuelle quelque part puisse seulement réduire les services à quelques rares endroits.
Au fur et à mesure que le Canada élabore les solutions qu'il souhaite retenir pour le dernier kilomètre dans l'ensemble des collectivités, il importe qu'il s'attache également à la résilience des liaisons secondaires, à la résilience de la fibre — pour que ce soit inhérent et apte à résister aux coupures et ainsi de suite. Nous avons dépassé les seules capacités de base qui se résument à l'accès à Internet pour les collectivités rurales et éloignées en question, mais Internet, pour bien des gens, ne sert qu'à naviguer sur le web et à échanger des courriels et ainsi de suite, à aller voir YouTube. Nous arrivons au point où les fournisseurs de service Internet proposent maintenant la voix sur IP, le téléphone des gens à la maison. À mesure que nous perfectionnons nos réseaux partout au pays, nous devons en envisager la résilience, pour que nos clients et citoyens ne se retrouvent pas privés des services essentiels offerts grâce à ces solutions sur IP que nous leur fournissons.
L'Alberta essaie certes de s'assurer d'améliorer SuperNet autant que possible pour avoir cette résilience-là.
Le sénateur Mercer : Nous avons beaucoup entendu parler de votre programme en Alberta : il est très impressionnant. Mes collègues ne seraient pas étonnés d'apprendre que j'aime vraiment l'idée du prix universel, du prix qui demeure le même partout en Alberta. Il est intéressant de savoir que ce n'est pas la même chose tout juste à côté en Saskatchewan, où le réseau semblait être très bon lui aussi.
Même là où il y a un prix universel, je voudrais savoir si vous avez des statistiques qui ventilent les coûts réels des services fournis à Edmonton et à Calgary, par rapport au coût réel des services fournis dans la plupart des régions rurales de l'Alberta.
M. Loewen : Voilà une question intéressante. Je n'ai pas cette information-là à portée de la main. À l'origine, pour créer le modèle de prix initial de SuperNet, une moyenne des coûts à assumer pour la large bande du réseau lui-même a été calculée. Une décision a été prise globalement à cet égard pour l'ensemble de la province, puis elle a été appliquée au modèle de services de l'ensemble des sites, essentiellement.
Je n'ai pas à portée de la main les coûts réels du site d'Edmonton ou, sinon, du site d'un milieu urbain par rapport au site d'un lieu éloigné. Je présume que nous pourrons obtenir cette information-là, mais il faudrait que nous fassions les recherches nécessaires.
Les dispositions du contrat le prévoient dans le cas de SuperNet, nous devons établir les coûts moyens de services comparables en milieu urbain et essayer de nous assurer que nos coûts ne dépassent pas cela pour toutes les régions de la province. Jusqu'à maintenant, nous avons constaté que notre structure de prix n'a pas eu à être modifiée depuis sa configuration originale en 2005.
La réponse est non, essentiellement.
Le sénateur Mercer : Cela intéresserait peut-être vos clients d'Edmonton et de Calgary de savoir dans quelle mesure ils subventionnent le service dans le reste de la province.
Les responsables de la Saskatchewan ont parlé de l'idée d'aménager de la fibre optique jusqu'à un seul et unique client dans l'extrême nord de la province moyennant des frais. Vous avez dit avoir des clients qui se trouvent dans des lieux très éloignés, mais qui ont besoin de se connecter au siège social — vous n'avez pas utilisé ce terme-là, mais je le ferai moi- même — à Calgary et à Edmonton. Quand vous établissez une telle connexion, les collectivités le long du circuit peuvent- elles en profiter?
Ma dernière question n'est pas directement liée à cette question-là. C'est en réponse à une question posée par le sénateur Zimmer, qui vous a fait mentionner l'agriculture, ce qui m'a étonné. En étudiant la question de la pauvreté en milieu rural, le Comité de l'agriculture a établi que, selon ce que les gens des campagnes du Canada nous ont dit, y compris dans la campagne albertaine, et ce sont principalement les agriculteurs dont il s'agit, le manque d'accès à Internet haute vitesse figure parmi les trois choses jugées importantes. Évidemment, les gens s'en sont moins plaints en Alberta, en raison de votre programme. Vous avez parlé des entreprises en milieu rural; or, un des grands secteurs en milieu rural, en Alberta, c'est l'agriculture.
M. Loewen : C'est rigoureusement vrai. Nous avons en Alberta un ministère qui s'appelle le ministère de l'Agriculture et du Développement rural. On y prend en considération les deux aspects du développement rural dans la province. Répondre aux besoins des agriculteurs, éleveurs de bétail et autres entrepreneurs ruraux constitue certes un objectif clé du gouvernement en ce qui concerne les services Internet. Le ministère de l'Agriculture et du Développement rural a investi certaines sommes d'argent, dont une part provenait du gouvernement fédéral, pour créer des programmes de subventions pour que les collectivités — ce sont des municipalités, dans ce cas particulier — puissent créer des services à large bande au profit de partenaires privés. Le recours aux fournisseurs de service Internet sans fil combiné à la construction de pylônes pour les communications sans fil par les collectivités, par exemple, constitue une façon d'employer les subventions versées pour mener des projets pilotes fonctionnels. Voilà un concept qui présente un modèle de service public municipal pour aménager des éléments d'infrastructure, puis faire en sorte que des fournisseurs de service prennent le relais par la suite.
Le sénateur Mercer : Les services en dehors du circuit sont-ils destinés à un grand client dans le Nord? C'était ma question au départ.
M. Loewen : Oui. En concevant SuperNet, nous avons pris pour référence les établissements du secteur public pour en esquisser le parcours. De ce fait, notre fibre couvrait la majeure partie de la province, comme les cartes vous ont permis de le voir. Il y a toujours des points d'accès le long des connexions à fibre dont il est question. Dans la mesure du possible, nous permettons qu'il y ait des connexions sur les points d'accès, qui assurent un retour vers les services de SuperNet à un moment donné.
SuperNet n'est pas conçu en fonction d'une longue connexion qu'il pourrait y avoir jusqu'à un client commercial. Ce pourrait être le cas, par exemple, d'une entreprise — je dirais par exemple une société pétrolière et gazière — qui voudrait recourir à SuperNet pour relier Fort MacKay, dans le nord de l'Alberta, à Calgary. SuperNet peut aller du centre-ville de Fort MacKay jusqu'à Calgary parce que c'est un réseau intégré. Pour la connexion avec le site gazier et pétrolier, qui pourrait se trouver à 20 kilomètres de là, il faudrait que l'entreprise assume les frais de l'infrastructure nécessaire pour se relier elle-même au point de présence de SuperNet à Fort MacKay. S'il y a un point d'accès et un chemin entre son bureau et le point de présence de SuperNet, elle aura peut-être l'occasion de se connecter sur cette fibre-là à ce point-là, plutôt que de passer par le centre-ville.
Oui, le long des longs circuits de SuperNet, il peut y avoir des zones désignées où l'accès peut être fourni. Je ne suis pas certain de l'aménagement lui-même, de la part qui a été prévue pour les accès de ce genre et la part qui représentait simplement une exigence; lorsque vous installez de la fibre optique sur de longues distances, il faut prévoir un point d'arrêt tous les quelques kilomètres.
Le sénateur Plett : Je suis toujours intrigué par le fait que les autres provinces ont des services supérieurs à ceux de ma province à moi, le Manitoba, et je crois que le sénateur Johnson serait d'accord avec cela. Le sénateur Zimmer, je ne sais pas s'il vient de la Saskatchewan ou du Manitoba, mais il serait d'accord pour dire que cela n'est pas aussi bon au Manitoba qu'en Saskatchewan ou en Alberta.
Le président : Ça dépend de l'équipe qu'il y a sur le terrain.
Le sénateur Plett : Le sénateur Mercer a déjà posé une partie de la question. Je vais simplement la poser en lui donnant une tournure un peu différente. Si vous ne connaissez pas la réponse, je vous saurais gré de nous la faire parvenir, étant donné que ça s'applique à ma province. Il est louable que vous ayez des tarifs fixes et universels pour les services, que l'on se trouve à La Crete, en Alberta, ou à Calgary, en Alberta. J'aimerais savoir quelle part ou quel pourcentage de l'affaire est subventionné. Je crois que le coût effectif ne me préoccupe pas tant, mais j'aimerais savoir quel pourcentage des services offerts à La Crete ou à Beaverlodge ou à l'un de ces endroits est subventionné, par rapport à Edmonton ou à Calgary. Je ne sais pas si vous allez pouvoir répondre à cette question-là ce soir.
M. Loewen : Pour cela, il faut essayer de calculer les coûts réels à assumer pour financer ce service dans les régions éloignées par rapport aux régions urbaines. Je n'ai pas cette réponse-là aujourd'hui. Certes, nous allons faire de notre mieux pour vous faire parvenir une réponse. C'est le client qui subventionne le client, vu les prix payés pour le service. Il n'y a donc pas de subventions gouvernementales pour financer le service dans les régions éloignées davantage qu'en milieu urbain en ce qui concerne les coûts de fonctionnement.
Le sénateur Plett : Merci. Je ne sais pas si vous avez répondu à cette question plus tôt — si c'est le cas, je m'excuse —, mais vous avez parlé du fait que Bell Canada soit propriétaire de l'infrastructure. Est-ce dire que le régime d'accès libre ne s'applique pas en milieu urbain si Bell Canada y est propriétaire de l'infrastructure? Est-ce que Bell Canada jouit d'un monopole ou d'un avantage concurrentiel pour ce qui est de fournir les services Internet?
M. Loewen : Voilà une bonne question, et je crois que je peux vous éclairer. Dans ce que nous appelons le réseau de base, ce qui revient essentiellement aux services de Bell, en réalité, Bell — qui a construit et fournit sa propre infrastructure — fournit toute la largeur de bande nécessaire au secteur public sur SuperNet. Par conséquent, entre le réseau étendu, la partie que le gouvernement a financée et le réseau de base que Bell finance et exploite, il y a, du point de vue du secteur public, un réseau continu. Nous utilisons tous l'infrastructure de Bell pour nos connexions dans le secteur public.
Bon, dans le secteur commercial, pour fournir les services Internet entre les collectivités de base en question, le gouvernement s'est senti obligé de faire payer à Bell cette part du réseau, parce qu'il y avait déjà là de la concurrence. Bell a investi son argent à elle et exploite son infrastructure à elle dans ces collectivités-là, et elle affronte les autres fournisseurs de services de télécommunications dans les collectivités en question. Par conséquent, comme le gouvernement n'a pas vraiment financé cette partie du réseau, nous n'avons pas procuré à Bell quelque avantage que ce soit sur un autre fournisseur qui était déjà présent. Est-ce que c'est clair?
Le sénateur Plett : Oui, ce l'est. Merci et félicitations pour votre excellent travail.
Le sénateur Housakos : Combien de temps a-t-il fallu pour aménager l'infrastructure, poser le câble, mettre en place l'infrastructure globale du programme SuperNet du début à la fin, pour que ça devienne fonctionnel dans l'ensemble de l'Alberta?
M. Loewen : Si vous m'aviez posé la question à l'époque, j'aurais dit que c'est un travail qui prend une éternité. En réalité, c'était un programme de cinq ans. Nous avons lancé la demande de propositions en février 2000. Nous avons signé une lettre d'entente en novembre 2000, et le contrat en tant que tel n'a abouti qu'en juillet 2001. Les travaux en tant que tels ont commencé à ce moment-là, et le réseau a commencé à fonctionner en octobre 2005.
Le sénateur Housakos : Vous avez peut-être indiqué ça dans votre mémoire, mais pouvez-vous me dire quel a été l'investissement total de Bell et du gouvernement?
M. Loewen : Le gouvernement a fait un investissement ponctuel de 193 millions de dollars pour la construction et l'aménagement en tant que tel au tout début, c'est tout. Bell a pris en charge tous les coûts supplémentaires. Le contrat prévoyait l'investissement initial de Bell et faisait assumer à l'entrepreneur tous les dépassements de coûts éventuels.
Le sénateur Housakos : Le gouvernement a-t-il évalué le rendement possible de l'investissement à ce moment-là, et avez-vous atteint les objectifs ainsi fixés?
M. Loewen : Je vais peut-être devoir vous revenir là-dessus. C'est une question intéressante. On m'a fait une mise en garde à propos de l'utilisation du terme « rendement des investissements » au gouvernement. Il y a des économies et des avantages établis, mais le rendement effectif est difficile à déterminer. D'après le succès du réseau lui-même et le taux de participation — 85 p. 100 — de même que le succès du programme auprès du secteur public, j'avancerais que nous avons atteint nos cibles quant aux exigences initiales du service. Quant aux cibles établies dans l'analyse en tant que telle, je vais devoir faire des recherches parce que je ne connais pas les réponses en ce moment.
Le sénateur Housakos : Ma dernière question porte sur votre structure de prix. Que prenez-vous en considération? Vous semblez proposer des tarifs très concurrentiels, et on dirait que vous offrez aux clients un service qui vaut plus que la juste valeur marchande. Comment en êtes-vous arrivé à cette structure de prix?
M. Loewen : Quiconque se penche sur les modèles classiques de télécommunications pour les prix en viendra à une constatation importante : il y a habituellement un prix supérieur à assumer pour les services de base, étant donné le coût d'infrastructure, par exemple. Les gens veulent récupérer leur mise autant que possible. À mesure que la largeur de bande s'accroît, on voit que ces coûts peuvent être mieux répartis et être établis par mégaoctet ou je ne sais quoi encore, pour que ce soit plus concurrentiel du point de vue des clients. Quant à SuperNet, nous ne souhaitions pas nous tourner vers ce modèle-là. Nous voulions un prix concurrentiel sur tous les coûts dès le départ. Les responsables du projet ont donc calculé essentiellement, à partir des exigences en fait de coûts et de fonctionnement, un prix par période d'utilisation de la large bande, globalement, pour l'ensemble de la province. À 7 $ le mégaoctet ou quelque chose du genre, il n'y a pas de prime à la base ni de besoin de réduire sensiblement les coûts dans la couche supérieure. Nous avons établi le prix optimal dès le départ à partir de la largeur de bande la moins grande. De ce point de vue-là, la modélisation des coûts de SuperNet se distinguait du cas classique en télécommunications.
Le président : Je voudrais vous remercier au nom du groupe, monsieur Loewen. J'ai deux observations à faire avant de clore la séance. Nous avons bel et bien reçu une présentation en noir et blanc, pour répondre à la question que vous avez posée plus tôt. Nous donnerons accès à la copie en couleur par Internet.
Nous avons rencontré les gens d'Axia SuperNet Ltd., qui étaient très fiers de vous. Après avoir entendu l'exposé, nous devons dire que nous sommes d'accord avec eux. Merci beaucoup.
M. Loewen : Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, merci beaucoup. Cela a été un privilège.
Le président : C'est la fin de la séance. Nous nous revoyons mardi, dans dix jours. Merci beaucoup.
(La séance est levée.)