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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 4 - Témoignages du 21 avril 2010


OTTAWA, le mercredi 21 avril 2010

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 45, pour examiner les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis et d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada (sujet : questions concernant l'éducation des Premières nations).

Le sénateur Gerry St. Germain (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonsoir. Je voudrais souhaiter la bienvenue à tous les honorables sénateurs, aux membres du public et à tous les téléspectateurs du pays qui écoutent ces délibérations du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur la chaîne CPAC ou peut-être sur Internet.

Je suis le sénateur St. Germain de la Colombie-Britannique. J'ai l'honneur et le privilège de diriger les travaux de ce comité.

Notre mandat est d'examiner les mesures législatives et les questions liées d'une façon générale aux peuples autochtones du Canada. Nous avons donc la possibilité d'examiner toutes sortes de sujets intéressant les Premières nations, les Métis et les Inuits.

Le comité entreprend une étude de l'enseignement primaire et secondaire que reçoivent les enfants des Premières nations dans les réserves. Pour mieux vous familiariser avec cette question, nous avons invité, comme témoins, des représentants du Conseil canadien sur l'apprentissage ou CCA, organisme indépendant sans but lucratif qui a pour mission de renseigner les Canadiens sur la situation de l'apprentissage continu au Canada.

Après sa création en 2004, le CCA a établi un Centre du savoir sur l'apprentissage chez les Autochtones, consortium d'organisations autochtones d'apprentissage et d'autres organismes représentatifs coiffé par un comité de direction. Le centre constitue un forum national de collaboration visant à appuyer la recherche de solutions efficaces aux difficultés que connaissent les apprenants parmi les Premières nations, les Métis et les Inuits.

Son travail, axé sur l'apprentissage continu, s'étend à tous les aspects du développement — spirituel, physique, social, émotif et cognitif — selon la perception autochtone du monde. Le centre cherche en outre à tenir compte de la perspective très particulière et des différents moyens d'apprentissage des apprenants autochtones. Nous avons hâte d'en savoir davantage sur cette approche intéressante.

[Français]

Avant d'entendre nos témoins, permettez-moi de vous présenter les membres du comité qui sont présents.

[Traduction]

J'ai, à ma gauche, madame le sénateur Dyck de la Saskatchewan, qui est la vice-présidente du comité, ainsi que madame le sénateur Lovelace Nicholas du Nouveau-Brunswick, madame le sénateur Hubley de l'Île-du-Prince-Édouard et le sénateur Campbell de la Colombie-Britannique. Vous pouvez voir, à ma gauche, madame le sénateur Nancy Raine de la Colombie-Britannique, le sénateur Patterson du Nunavut, madame le sénateur Stewart Olsen du Nouveau-Brunswick, le sénateur Brazeau du Québec et madame le sénateur Poirier du Nouveau-Brunswick.

Membres du comité, je vous prie de vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue aux représentants du Conseil canadien sur l'apprentissage, M. Paul Cappon, président-directeur-général, et M. Jarrett Laughlin, analyste principal à la recherche et chef d'équipe. Monsieur Cappon, veuillez présenter votre exposé, qui sera suivi par une période de questions, si nous en avons le temps. J'espère bien que ce sera le cas. J'espère aussi que votre programme vous permettra de rester avec nous le temps nécessaire.

[Français]

Paul Cappon, président-directeur général, Conseil canadien sur l'apprentissage : Je ferai ma présentation en langue anglaise, mais comme d'habitude, je suis toujours prêt à répondre à toute question en français.

Mon collègue, que l'on vient de vous présenter, est l'expert concernant tous les aspects de l'éducation pour les Autochtones.

[Traduction]

Je suis moi-même un généraliste. Jarrett Laughlin est l'expert. Je compterai bien sûr sur lui pour m'aider à répondre à vos questions. Comme on nous l'a demandé, nous limiterons cet exposé à 15 minutes, en espérant avoir ensuite une bonne discussion avec vous.

J'aborderai trois points dans mon exposé. Le premier concerne le niveau actuel d'instruction des Autochtones. Je sais que vous vous intéressez surtout aux membres des Premières nations vivant dans les réserves, mais il importe d'aller un peu plus loin. Quelle est la situation actuelle? Où en sont les résultats scolaires des Autochtones? Je vais faire le point sur la situation parce qu'elle n'est pas nécessairement conforme à celle que nous présentent les médias. J'y reviendrai dans quelques instants.

Le second point concerne la façon de déterminer s'il y a ou non des progrès dans l'éducation des Autochtones et des Premières nations. Je parlerai des moyens que nous mettons en oeuvre pour suivre les progrès et des méthodes qu'il serait bon, à notre avis, d'utiliser à l'avenir.

Mon troisième point portera sur d'éventuelles mesures législatives ayant trait à l'éducation des Premières nations. Quelles sont les recommandations liées à la mise en oeuvre de telles mesures législatives?

Ce sont les trois dimensions que j'aborderai brièvement dans cet exposé.

Premièrement, de quels renseignements disposons-nous sur la situation actuelle de l'éducation des Autochtones et, en particulier, des Premières nations? La situation n'est ni aussi mauvaise que le suggèrent certaines manchettes ni assez bonne pour être acceptable pour les Premières nations, les Inuits et les Métis ou pour le reste du Canada. Je vais vous présenter quelques données qui rétablissent l'équilibre entre le bon et le mauvais en ce qui concerne les apprenants des Premières nations. Ensuite, nous examinerons les détails.

Nous préférons toujours commencer par les aspects positifs lorsque nous présentons nos rapports aux Canadiens. La principale fonction du Conseil canadien sur l'apprentissage est de suivre la situation et de renseigner les Canadiens avec transparence et indépendance sur la situation réelle par rapport à ce que nous espérons réaliser.

Parmi les aspects positifs, il faut considérer en premier l'abondance de l'apprentissage informel, surtout dans les collectivités des Premières nations. Ainsi, les jeunes des Premières nations qui participent à des activités parascolaires — clubs sociaux, sports, groupes de musique — obtiennent des notes égales ou supérieures à celles de l'ensemble des jeunes du Canada. Cela est important car, lorsque nous mesurons chaque année l'apprentissage dans les différentes collectivités du pays à l'aide de notre indice composite de l'apprentissage, qui sera publié pour la cinquième année consécutive le 20 mai 2010, nous tenons compte non seulement de l'apprentissage en classe et de l'éducation institutionnelle, mais aussi de l'apprentissage informel. Les gens apprennent beaucoup en faisant du bénévolat, en pratiquant des sports et en participant à des activités communautaires. À ce chapitre, les jeunes des Premières nations ont des résultats légèrement supérieurs ou au moins égaux à ceux des autres jeunes du pays.

Deuxièmement, dans les collectivités des Premières nations, les relations sociales semblent être naturellement cultivées, devenant ainsi la pierre angulaire de l'apprentissage intergénérationnel. Pour nous, cette forme d'apprentissage constitue un important élément du suivi et de la compréhension quantitative des progrès de l'éducation des Autochtones.

Le troisième aspect positif, c'est que les membres des Premières nations qui vivent dans les réserves manifestent un grand esprit communautaire en participant à des activités telles que le bénévolat. Nous avons établi, dans le cadre de notre indice composite de l'apprentissage, que le bénévolat constitue un puissant moteur de l'apprentissage dans la collectivité.

Examinons maintenant les résultats des Autochtones au chapitre de l'éducation institutionnelle. En 2006, 41 p. 100 des Autochtones avaient un certificat ou un diplôme postsecondaire. Ce chiffre concerne l'ensemble des Autochtones, mais, en ce qui concerne les membres des Premières nations vivant dans les réserves, les taux de réussite les plus élevés au niveau postsecondaire s'élèvent à 14 p. 100 dans le cas des études collégiales et à 13 p. 100 dans le cas des écoles de métiers. Toutefois, il est également vrai que le taux de réussite des Autochtones dans les collèges communautaires est égal à celui des non-Autochtones, ce qui constitue un autre élément positif.

De plus, lorsque des membres des Premières nations vivant dans les réserves obtiennent un diplôme universitaire, ils ont autant de chances d'avoir un emploi que les non-Autochtones dans la même situation.

Le dernier élément positif est que les membres des Premières nations semblent bien optimiser les occasions de se familiariser avec leur culture et leurs traditions. Par exemple, les enfants des Premières nations participent régulièrement à des cérémonies et des rencontres culturelles. Parmi les jeunes des Premières nations, quatre sur dix ont des contacts hebdomadaires réguliers avec les aînés. Ces contacts constituent une très importante source d'apprentissage de la culture et des traditions. De plus, la moitié des membres des Premières nations participent à des activités traditionnelles telles que la chasse, la pêche et le piégeage, sources essentielles de ce que nous appelons l'acquis expérientiel. Toutes ces choses contribuent aux conditions d'apprentissage d'une société.

J'en viens maintenant aux écarts systémiques qui persistent entre apprenants des Premières nations et apprenants non autochtones. Premièrement, et c'est probablement le facteur le plus important, les jeunes non autochtones du Canada sont cinq fois plus susceptibles d'obtenir un diplôme secondaire que les jeunes des Premières nations qui vivent dans les réserves. Même s'il est vrai que les étudiants autochtones espèrent en majorité faire des études postsecondaires complètes, seuls 41 p. 100 d'entre eux le font.

Il y a un énorme écart au chapitre des études universitaires. Encore une fois, les non-Autochtones sont cinq fois plus susceptibles de terminer un programme universitaire que les membres des Premières nations qui vivent dans les réserves. C'est un premier aspect.

Deuxièmement, même si beaucoup de membres des Premières nations pratiquent l'apprentissage à distance, seules 17 p. 100 des collectivités des Premières nations ont accès à des services de transmission à large bande, services qui constituent, pour nous, un élément essentiel de tout système d'éducation du XXIe siècle. En fait, dans notre indice composite de l'apprentissage, la connectivité est l'un des facteurs dont nous tenons compte pour évaluer les conditions d'apprentissage d'une collectivité particulière. Comme je viens de le dire, seules 17 p. 100 des collectivités des Premières nations ont accès à des services Internet à grande vitesse, par rapport à 64 p. 100 des grandes et petites collectivités non autochtones du Canada. Il existe donc un énorme écart à ce chapitre.

À part ces indicateurs de l'éducation et de l'apprentissage, il y a des difficultés sociales et économiques persistantes — ce sont les facteurs non liés à l'apprentissage — qui continuent à réduire les chances de réussite dans les études. Par exemple, seulement un tiers des jeunes enfants des réserves des Premières nations se font lire des histoires tous les jours, à comparer aux deux tiers des jeunes enfants canadiens. Ce fait a son importance : pour un jeune enfant, être exposé à la lecture joue un rôle considérable dans l'alphabétisation future et dans l'intérêt porté aux études. Ce facteur est presque aussi puissant que la classe sociale ou le revenu pour ce qui est de l'impulsion donnée à un jeune apprenant.

Parmi les membres des Premières nations vivant dans les réserves, un jeune sur cinq a un parent qui a été dans un pensionnat indien, ce qui a des répercussions psychosociales. De plus, 34 p. 100 de ces jeunes appartiennent à une famille monoparentale, ce qui représente près du double de la proportion parmi les jeunes non autochtones. Encore une fois, c'est là un facteur environnemental qui influe sur l'éducation et l'apprentissage.

Si nous considérons l'indicateur du bien-être de la communauté, qui a une incidence considérable sur l'apprentissage, nous constatons que, parmi les 100 premières collectivités du Canada, on ne trouve qu'une seule collectivité des Premières nations, tandis que 96 de ces collectivités se retrouvent dans les 100 dernières du Canada. Cela revient à dire que le bien- être général de la communauté est très bas par rapport aux collectivités non autochtones.

Voilà où nous en sommes actuellement.

La question suivante est de mesurer les progrès réalisés au chapitre de l'éducation des Autochtones et d'en faire rapport. Plus particulièrement, comment peut-on le faire sans s'appuyer sur un modèle d'insuffisance, c'est-à-dire en commençant non par les faiblesses, mais par les points forts? Car il y a de toute évidence des points forts dans les collectivités des Premières nations comme dans les collectivités inuites et métisses.

Nous sommes en train d'établir un cadre d'évaluation des progrès de l'apprentissage dans les collectivités autochtones. Nous en avons apporté un exemplaire en anglais et un autre en français, mais il est possible de le télécharger sur notre site web. Ce cadre a ceci de particulier qu'il se fonde à la fois sur des modèles d'évaluation occidentaux, comme les taux d'obtention de diplômes et les résultats des examens normalisés administrés en classe, et sur une définition autochtone de la réussite. Nous essayons de fusionner les deux pour en arriver à une matrice complexe et réaliste qui permet, selon nous, d'évaluer les progrès de l'apprentissage et qu'à notre avis, le Canada devrait adopter. Bien entendu, nous travaillerons ensuite sur les faiblesses, tout en faisant valoir les points forts.

Nous croyons que l'absence antérieure d'une approche d'ensemble — que nous appelons approche holistique — pour mesurer l'éducation des Autochtones a créé des problèmes parce qu'elle peut aboutir à des renseignements qui ne s'appliquent pas aux collectivités autochtones ou qui n'aident pas à formuler une politique sociale efficace. La déclaration des faiblesses et des lacunes ne mène pas nécessairement à des améliorations. Si, dans le cadre d'une évaluation, on présente un rapport contenant des chiffres, on le fait pour influencer la politique. Autrement, les chiffres ne sont pas très utiles.

Nous avons donc besoin, pour mesurer l'apprentissage chez les Autochtones, d'un cadre général qui n'existait pas dans le passé. Comme je l'ai dit, l'un des éléments de la documentation que nous présentons au comité est notre rapport 2009 intitulé État de l'apprentissage chez les Autochtones au Canada : Une approche holistique de l'évaluation de la réussite, qui présente ce cadre. Il s'agit d'une approche novatrice qui sert pour la première fois à mesurer l'éducation des Autochtones au Canada. Nous serons heureux de répondre aux questions à ce sujet. Très brièvement, le cadre se fonde sur les trois modèles d'apprentissage holistique que nous avons développés en partenariat avec des experts autochtones de tous les coins du Canada, représentant séparément les Premières nations, les Métis et les Inuits.

Si une loi sur l'éducation des Premières nations était adoptée, le CCA serait heureux de travailler de concert avec ses partenaires des organisations et des collectivités autochtones, de même qu'avec le gouvernement et la société civile, pour suivre les progrès de l'apprentissage chez les Autochtones et en faire rapport, étant entendu qu'il s'agit d'un cadre holistique et non d'un modèle occidental défini dans des limites étroites.

Mon troisième et dernier point concerne ce que nous aurions à dire en cas de dépôt d'une mesure législative sur l'éducation des Premières nations. En fait, nous n'avons rien à dire en ce moment au sujet du processus d'élaboration d'une telle mesure. Cela ne fait pas partie de notre domaine de compétence. Nous n'avons rien à dire non plus sur les questions de gouvernance et de financement, mais l'expérience considérable que nous avons acquise en matière d'éducation des Autochtones nous amène à présenter quelques conclusions et recommandations touchant la mise en oeuvre, les objectifs et, dans une certaine mesure, la gouvernance.

Nous aurions six recommandations à formuler si un projet de loi était envisagé.

Premièrement, vous avez besoin d'objectifs clairs liés à chacune des phases de l'éducation et de l'apprentissage qui seraient couvertes par la mesure législative et son application. Ces objectifs devraient comprendre des buts à long terme et des points de repère à court terme. À cette fin, il vous faudrait des indicateurs établis et acceptés, qui ne peuvent pas consister en simples intrants. Ils ne peuvent pas se limiter aux montants dépensés ou au nombre de participants. Les indicateurs devraient être axés sur les résultats. Atteignons-nous ou non les objectifs? Les objectifs doivent être définis d'avance, et non après coup. Il serait beaucoup trop facile de le faire en rétrospective. Dans ce cas, on se fonde trop souvent sur les intrants — montants dépensés et processus — plutôt que sur les réalisations concrètes obtenues grâce au temps, à l'effort et à l'argent investis.

Deuxièmement, il faudrait procéder à une évaluation indépendante et continue du degré de réalisation des objectifs définis à l'aide d'indicateurs convenus. Vous ne serez probablement pas surpris de m'entendre dire cela, puisque c'est justement ce que fait le CCA. Vous devez tout d'abord convenir des indicateurs, puis demander à un organisme extérieur au système d'évaluer en permanence le degré d'atteinte des objectifs et, si les objectifs ne sont pas atteints, d'en déterminer les raisons.

La troisième recommandation porte sur les indicateurs eux-mêmes. Elle est liée à ce que j'ai dit au sujet du cadre d'évaluation. Les indicateurs choisis devraient représenter à la fois les points de vue autochtones traditionnels sur la réussite et les mesures occidentales conventionnelles. Il est nécessaire de combiner les deux, comme nous essayons de le faire au CCA, pour aboutir à quelque chose qui assure la transparence et l'honnêteté des rapports tout en respectant les valeurs et les perspectives des apprenants autochtones.

La quatrième recommandation traite de la nécessité de normes pancanadiennes. Nous avons besoin de résultats d'apprentissage communs ou partagés, qui devraient être établis à l'échelle nationale pour chaque âge et chaque année d'études. Autrement dit, pour chaque grande discipline — français, anglais, mathématiques, sciences, citoyenneté, et cetera —, le niveau à atteindre devrait être le même indépendamment de la province ou du territoire où l'étudiant vit et étudie. Les attentes devraient être les mêmes. Les résultats devraient se situer au même niveau et non à des niveaux différents.

Cinquièmement, nous recommandons que les attentes concernant les réalisations des étudiants des écoles des Premières nations soient équivalentes à celles des écoles publiques provinciales. Nous ne pouvons pas avoir deux ensembles de normes ayant trait aux résultats. Les processus peuvent être différents, mais cela ne doit réduire en rien les attentes. Nous avons pu constater que lorsque les attentes sont assez élevées, c'est-à-dire quand les normes de l'éducation sont généralement assez hautes, on obtient de meilleurs résultats que dans le cas contraire.

Notre sixième et dernière recommandation, c'est que même si les résultats de l'apprentissage doivent être élevés, même si les attentes sont également élevées et partagées partout dans le pays, le programme d'études conçu pour satisfaire à ces normes peut et doit varier d'une région à l'autre, en fonction des conditions, des traditions et des cultures locales. Il y a différents moyens de parvenir à de bons résultats en éducation.

Nous ne favorisons pas pour autant un programme d'études national. Nous ne favorisons même pas un programme d'études commun pour toutes les Premières nations du pays. Nous voulons simplement que les résultats soient les mêmes, avec des moyens différents. Les programmes d'études varieraient donc d'une région à l'autre du pays.

J'ai fait vraiment très vite pour passer en revue des questions assez complexes en 15 minutes, mais j'espère avoir suffisamment couvert le sujet.

Le président : Vous l'avez fait, monsieur. Je voudrais donc vous remercier tout de suite pour votre exposé.

J'ai une petite question à vous poser. De quelle façon mesurez-vous le bien-être de la communauté?

M. Cappon : La Fondation Atkinson calcule l'indice canadien de bien-être, qui se compose d'un certain nombre d'indicateurs du bien-être. En fait, la mesure du bien-être des collectivités constitue aujourd'hui une tâche extrêmement importante à l'échelle internationale. L'Organisation pour la coopération et le développement économiques, l'OCDE, a organisé l'année dernière une conférence en Corée du Sud, à laquelle j'ai assisté, sur les méthodes de mesure du bien- être. Ce fut la plus grande conférence que l'OCDE ait jamais organisée. L'idée est que le bien-être n'est pas simplement représenté par le produit intérieur brut ou le revenu. C'est un indicateur plus vaste de la situation des gens, y compris les divergences de revenu et les dimensions sociales. C'est un ensemble d'indicateurs qui mesurent le bien-être d'une société ou d'une collectivité particulière.

Le président : Avez-vous bien dit qu'il n'y a qu'une seule collectivité des Premières nations dans les 100 premières du Canada?

M. Cappon : C'est bien cela. Cela nous donne une idée des conditions qui existent.

Le président : Le comité a eu la chance de rendre visite à la nation navaho, il y a près de deux ans, et de prendre connaissance de son système d'éducation à Window Rock, qui est le siège de la nation. Il y avait une école qui avait un programme d'immersion en langue navaho et qui avait d'excellents résultats. La composante culturelle et linguistique en faisait partie. Les parents des étudiants fréquentaient également l'école pour apprendre le navaho, qu'ils n'avaient pas pu apprendre dans leur enfance. Tout cela semblait créer une atmosphère positive.

Le CCA a-t-il fait du travail dans ce domaine en ce qui concerne les Premières nations du Canada?

M. Cappon : Je vais demander à M. Laughlin dans un instant de nous dire s'il y a des études sur l'immersion en langues autochtones, mais je voudrais d'abord aborder deux questions générales.

Le CCA s'est beaucoup intéressé à la question de l'immersion. C'était surtout dans le contexte de l'immersion en français, mais nous souhaitions déterminer si les processus d'immersion sont efficaces, si les gens risquent de moins bien maîtriser leur langue maternelle en s'inscrivant à des programmes d'immersion et quels sont leurs résultats par rapport à ceux des gens qui ne sont pas en immersion. Nous avons publié notre étude portant sur l'immersion en français. Elle a abouti à la conclusion que les étudiants des programmes d'immersion ont de meilleurs résultats que les autres, y compris dans leur langue maternelle.

Vous savez sans doute que l'immersion en français est très connue à l'étranger et constitue un modèle au sujet duquel d'autres pays me posent constamment des questions parce qu'il est considéré comme un grand succès. Rien ne nous permet de croire que l'immersion dans une langue autochtone peut entraver la maîtrise de l'anglais.

Votre second point concernait la participation des parents. En éducation publique, le modèle de l'avenir est celui de l'école comme centre de l'activité communautaire.

Au Canada, les étudiants autochtones constituent l'exception à la règle : la population autochtone rajeunit tandis que la population canadienne vieillit. Nous constaterons qu'à moins que les adultes ne profitent aussi des écoles, l'investissement dans l'éducation publique ne ralliera pas beaucoup d'appuis à mesure que la société avancera en âge. Les modèles qui marchent bien dans le monde sont ceux des écoles où les parents apprennent en même temps que les enfants. Ce centre d'activité dispense alors un service communautaire permanent d'apprentissage.

Lorsque les parents participent avec les étudiants, comme dans le modèle que vous avez mentionné, les résultats sont très bons aussi bien parmi les Autochtones que dans d'autres sociétés.

Jarrett Laughlin, analyste principal à la recherche et chef d'équipe, Conseil canadien sur l'apprentissage : Je vais simplement reprendre les deux points mentionnés par M. Cappon, mais dans le contexte de notre travail auprès des Autochtones.

Au cours des cinq dernières années, nous avons collaboré avec le Conseil de l'alphabétisation du Nunavut pour déterminer l'importance des programmes bilingues et des programmes d'immersion en fonction des résultats obtenus. Nous avons travaillé de concert avec un groupe inuit de Nunavik, dans le nord du Québec. Nous avons examiné une étude de 15 ans sur les résultats des programmes d'immersion. Comme dans le cas mentionné par M. Cappon, nous avons constaté que les enfants inuits inscrits à des programmes d'immersion ont de meilleurs résultats au chapitre de la littératie, non seulement dans leur langue ancestrale, mais aussi en anglais ou en français, quelle que soit la langue seconde étudiée.

Je voudrais moi aussi insister sur l'importance de la famille et des parents. Lorsque nous essayons de mesurer la réussite de concert avec les collectivités des Premières nations et les collectivités inuites et métisses du pays, il est important d'avoir le bon cadre. Dans le modèle d'apprentissage holistique, les collectivités, les organisations et les experts autochtones du Canada ont souligné l'importance de la langue et de la culture dans la réussite scolaire, de même que le rôle de la famille, des parents, des aînés et de la collectivité.

Le sénateur Hubley : Je crois que vous avez commencé à définir la réussite. Vous parlez, dans votre rapport de décembre 2009, de la nécessité d'une définition globale de la réussite en apprentissage dans le cas des Autochtones et d'un moyen culturellement adapté de mesurer cette réussite. Comment le CCA définit-il la réussite des apprenants autochtones dans ce contexte et comment a-t-il abouti à cette définition?

M. Cappon : Pour qu'une définition de la réussite soit adéquate, elle doit être acceptée aussi bien par les Autochtones que par les autres. Elle doit également être mesurable. Elle ne peut pas consister en vagues notions parce qu'elle ne serait alors pas transparente. Nous devons avoir des chiffres. Nous aimons les chiffres au CCA. La définition ne peut pas consister en mesures exclusivement qualitatives.

Il nous manque beaucoup de données, particulièrement au niveau national. C'est une tâche énorme de bâtir des indices combinant le modèle occidental conventionnel, comme les taux d'obtention de diplômes et les résultats d'examens, et des indicateurs tels que la transmission intergénérationnelle des connaissances. Nous en avons parlé il y a quelques instants dans le cas des Navahos. Cela est important pour les Premières nations.

C'est ce que nous entendons par un modèle holistique. Un tel modèle ne tient pas compte uniquement de l'éducation institutionnelle en classe. Nous sommes le Conseil canadien sur l'apprentissage et non le Conseil canadien de l'éducation. En effet, beaucoup de choses importantes se produisent hors de la salle de classe.

Il est intéressant de noter que notre modèle d'apprentissage holistique autochtone est grandement apprécié dans d'autres pays, surtout ceux qui sont en plein essor économique, mais qui ne sont pas aussi développés que le Canada. L'apprentissage informel hors de la classe est également important dans ces sociétés. Elles comprennent bien ce dont nous parlons.

M. Laughlin : Lorsque nous avons commencé à examiner la situation de l'apprentissage parmi les Autochtones en 2007, nous sommes partis du principe que nous ne savions pas ce qu'il en était parce que nous n'avions pas posé les bonnes questions. Nous devions reculer d'un pas pour être en mesure d'avancer de nouveau.

Nous avons donc fait marche arrière pour travailler de concert avec les experts de l'apprentissage, les organisations, les gouvernements et les collectivités autochtones afin de définir la réussite. Nous ne voulions pas imposer une définition. Dans les 30 dernières années, les organisations d'apprentissage, les collectivités et les gouvernements autochtones ont fait beaucoup de recherche en vue de développer la notion de réussite. Notre travail a consisté à passer en revue cette recherche et à réunir les personnes qu'il fallait pour redéfinir la façon de mesurer la réussite dans les collectivités des Premières nations et les collectivités inuites et métisses.

Les discussions tenues en 2007 ont abouti aux modèles holistiques d'apprentissage continu que M. Cappon a mentionnés. De bien des façons, ces modèles tiennent compte de l'apprentissage en classe, mais aussi à la maison, dans la collectivité, à l'école, au travail et sur la terre. Ce sont ces notions de réussite que les experts, de concert avec le CCA, ont présenté comme modèles pour progresser.

Le sénateur Hubley : Vous avez décrit ce que vous avez fait pour définir ce cadre. Je crois pouvoir faire le lien avec chaque enfant que je connais dans l'Île-du-Prince-Édouard. Les enfants de ma province ont un programme d'enseignement institutionnel, mais ils ont aussi un programme d'apprentissage informel que nous appelons la vie.

Le but ultime de l'éducation est de former des jeunes qui réussiront plus tard à faire ce qu'ils veulent dans le monde où ils vivent. Est-ce également là le but du système d'enseignement des enfants autochtones?

M. Cappon : Parlez-vous du but actuel du système?

Le sénateur Hubley : Oui.

M. Cappon : Il n'y a pas de doute que le but devrait être de préparer les enfants à la vie, comme c'est le cas pour tous les enfants non autochtones de l'Île-du-Prince-Édouard. Voilà pourquoi nous utilisons ce modèle général. J'ai mentionné dans mon exposé l'exemple de la lecture aux petits enfants d'âge préscolaire. Comme nous le savons, cette lecture est très importante. Pourtant, la plupart des systèmes d'évaluation de l'éducation n'en tiennent pas compte.

Nous avons également élaboré ce modèle pour les Autochtones parce que nous n'avions pas suffisamment de données pour inclure certaines collectivités du Canada dans notre indice composite de l'apprentissage, qui représente un autre moyen de mesurer l'apprentissage dans une collectivité. Notre indice annuel paraîtra en mai de cette année. Nous avons des cotes quantifiant les conditions d'apprentissage de chacune des 4 200 collectivités du Canada, mais nous n'en avons pas pour le Nord et certaines collectivités autochtones. Nous ne disposions pas d'un moyen de définir les conditions d'apprentissage. C'est une autre façon de le faire dans le cas des Autochtones en particulier.

Le sénateur Lovelace Nicholas : Aviez-vous des experts des Premières nations dans votre équipe?

M. Laughlin : Dès le départ, nous avons toujours travaillé en partenariat avec les Premières nations, les Inuits et les Métis du pays. Nous précisons que les modèles d'apprentissage holistique ont été élaborés de concert avec les collectivités des Premières nations et les collectivités inuites et métisses. Nous n'avons pas d'employés autochtones à notre siège social. Toutefois, comme le président l'a mentionné au début de la réunion, ce travail a été effectué en partenariat avec le Centre du savoir sur l'apprentissage chez les Autochtones, que le Conseil canadien sur l'apprentissage a créé en 2005. Il était dirigé par deux chefs de file autochtones de l'éducation, Mme Marie Battiste, de l'Université de la Saskatchewan, et Mme Vivian Ayoungman, du First Nations Adult & Higher Education Consortium de l'Alberta. Elles ont considérablement influencé ce travail auquel elles ont consacré énormément d'efforts et d'énergie.

Le sénateur Lovelace Nicholas : Le gouvernement fédéral a-t-il eu des contacts ou a-t-il tenu des consultations avec le Centre du savoir sur l'apprentissage chez les Autochtones lors de l'élaboration de ce programme?

M. Cappon : Non. Il est important de faire la distinction entre notre Conseil et le gouvernement fédéral. Nous ne sommes absolument pas liés au gouvernement fédéral. Il est vrai qu'Ottawa nous finance, mais nous sommes indépendants. En toute franchise, cela fait notre force. Si nous avions fait partie du gouvernement fédéral, il aurait été bien plus difficile pour nous de faire ce travail que cela n'a été le cas lorsque nous avons agi à titre d'organisme indépendant. Vous pouvez peut-être vous en rendre compte.

Au cours de la conférence de presse que nous avons tenue en décembre pour parler de ces modèles, les chefs de cinq organisations nationales autochtones, y compris les chefs de l'Assemblée des Premières nations, du Ralliement national des Métis et de l'organisation nationale des Inuits, étaient là pour appuyer notre travail. La situation n'aurait pas été la même si nous avions fait partie du gouvernement. Cela aurait été plus difficile. Nous avons réussi à gagner la confiance des organisations autochtones grâce aux processus que nous avons mis en place. Nous n'avons jamais permis que des considérations politiques quelconques interviennent dans notre travail. Le travail en partenariat ne signifie pas pour autant que tout le monde s'entend sur tout.

L'établissement du Centre du savoir sur l'apprentissage chez les Autochtones n'a pas été une sinécure, comme vous pouvez l'imaginer, parce que c'est un seul centre et non trois. Il a donc fallu réunir des gens des collectivités des Premières nations et des collectivités inuites et métisses comme cela ne s'était jamais fait auparavant. Ces gens avaient beaucoup en commun. Nous avions trois modèles d'apprentissage holistique, un pour chaque population, mais il y avait beaucoup d'éléments communs. Voilà pourquoi le Centre du savoir constitue une initiative commune.

Le sénateur Dyck : Je vous remercie de votre exposé. Je crois que le CCA a fait un travail extraordinaire de génération de données. Les rapports ont été très utiles. Je les ai consultés à plusieurs occasions.

Il semble toujours y avoir des difficultés quand il faut obtenir des chiffres sur le succès des étudiants, en particulier entre la maternelle et la 12e année. Pouvez-vous recommander de meilleurs moyens de trouver des chiffres concernant les élèves de la maternelle à la 12e année? Comment pouvons-nous mieux les suivre et mesurer leur succès d'une manière quantitative?

M. Cappon : J'aime bien votre question parce qu'elle me permet de dire que les gens ne devraient pas produire des données et des nombres pour le simple plaisir de le faire. Les données doivent servir à atteindre un but. Statistique Canada est l'un des meilleurs organismes de statistique du monde, mais ses employés ne sont pas des experts en éducation et en apprentissage. Il faut leur dire quelles données recueillir et pourquoi. Lorsqu'on collecte des données ou de l'information, on doit le faire en fonction d'un besoin stratégique. On doit savoir pourquoi ces données sont nécessaires.

J'ai parlé plus tôt des méthodes de mesure des progrès. On doit d'abord décider des objectifs à atteindre, puis déterminer les indicateurs à utiliser, puis aller expliquer à Statistique Canada les données à recueillir et les indicateurs à calculer. Le Canada n'a jamais procédé ainsi, ni dans le cas de l'éducation des Autochtones ni dans le cas de l'éducation en général. Nous sommes le pire pays de l'OCDE au chapitre des données nationales sur l'éducation. C'est vraiment embarrassant. Ce problème ne se limite pas à l'éducation des Autochtones. Nous n'avons pas défini des objectifs nationaux et, à défaut de le faire, nous ne saurons pas où nous en sommes parce que nous ne recueillerons pas l'information dont nous avons besoin pour déterminer l'étape suivante à aborder.

Le sénateur Dyck : Je suis fascinée par les chiffres. J'ai donc examiné les rapports de Statistique Canada et les vôtres ainsi que les écarts entre les sexes aux différents niveaux d'instruction. Connaissez-vous les raisons pour lesquelles, parmi les Autochtones, les Premières nations et les Inuits, les femmes réussissent mieux que les hommes à décrocher des diplômes universitaires? Je parle uniquement de ces catégories. Les données concernant les inscriptions dans les écoles de métiers montrent en outre que parmi les Autochtones et les Premières nations, les hommes sont d'assez loin les plus nombreux. À votre avis, quelles en sont les raisons?

M. Cappon : Votre question concerne-t-elle aussi les écarts entre les sexes?

Le sénateur Dyck : Oui.

M. Cappon : L'écart entre les sexes reflète en fait l'ensemble de la population. À l'heure actuelle, au Canada, 39 p. 100 des diplômés sont de sexe masculin et 61 p. 100, de sexe féminin. Ces chiffres s'appliquent à toutes les ethnies du pays. Il y a aussi un autre facteur. Les membres des Premières nations ont davantage tendance à aller dans les écoles de métiers que dans les universités. L'avantage, c'est qu'il y a énormément de débouchés et qu'ils peuvent bien réussir dans les métiers. Vous vous intéressez sans doute aux obstacles à l'inscription à l'université. M. Laughlin pourra probablement vous en dire davantage à ce sujet.

M. Laughlin : Au chapitre des écarts entre les sexes, les schémas sont les mêmes dans les collectivités autochtones et l'ensemble de la société. Plus de femmes que d'hommes autochtones vont à l'université, et c'est l'inverse dans les métiers. Nous n'avons pas encore examiné les causes de ce phénomène. Parmi les raisons possibles, il y a le financement particulier du système d'éducation postsecondaire et la façon dont les fonds sont répartis dans les collectivités autochtones.

Nous ne sommes pas encore très avancés dans le travail de base lié aux questions de suivi. Nous espérons commencer dès maintenant à y consacrer plus d'efforts. L'essentiel du travail que nous avons fait jusqu'ici visait à définir les outils et les cadres de base pouvant nous permettre de poser les bonnes questions lorsque nous mesurons les progrès.

M. Cappon : Il y a en outre un problème qui se pose aussi bien pour les Autochtones que pour les non-Autochtones. C'est la tendance à s'orienter vers les métiers après la fin des études secondaires. Dans beaucoup de pays, l'apprentissage d'un métier commence au niveau secondaire. Or les hommes tendent à décrocher en plus grand nombre que les femmes parce qu'ils n'ont souvent pas l'impression que les études sont vraiment utiles. Si nous pouvions établir, au niveau secondaire, un système d'apprentissage ou de certification de la compétence professionnelle, comme l'ont fait d'autres pays, nous pourrions considérablement réduire le taux de décrochage. Cela n'empêcherait d'ailleurs pas les étudiants d'aller à l'université s'ils le souhaitent. En Norvège, on peut apprendre un métier à l'école secondaire, puis aller à l'université. Nous n'avons rien de semblable au Canada.

Le sénateur Dyck : Vous avez parlé d'activités parascolaires telles que les sports et la fréquentation des clubs de service social. Je connais quelques hommes des Premières nations qui ont fait des études supérieures et pour qui le sport a joué un rôle important. Avez-vous remarqué, dans vos études, des différences attribuables à la présence d'activités ou de centres sportifs dans les écoles des réserves?

M. Cappon : Nous avons des données portant sur les non-Autochtones parce que cela s'inscrit dans notre indice composite de l'apprentissage.

M. Laughlin : Nous avons d'importantes lacunes dans nos données concernant les membres des Premières nations vivant dans les réserves. De récents travaux de Statistique Canada sur les membres des Premières nations vivant hors réserve révèlent des taux de participation très élevés aux activités parascolaires, y compris les sports, comme M. Cappon l'a mentionné dans son exposé préliminaire.

Il faut tenir compte du fait que ces occasions ou ces ressources n'existent pas dans le cas des membres des Premières nations, des Inuits et des Métis qui vivent hors réserve. On constate cependant, dans leur cas, que même s'ils sont insatisfaits de l'absence de ces occasions ou ressources, ils participent aux activités parascolaires autant sinon plus que les non-Autochtones.

Le sénateur Raine : Je trouve cela fascinant. Quelques questions me sont venues à l'esprit quand vous avez parlé d'immersion linguistique. Dans le cas du Nunavut, parlez-vous d'enfants qui étudient en inuktitut, puis qui vont en immersion en anglais, ou bien est-ce l'inverse? Si leur langue maternelle est l'inuktitut et qu'ils doivent parler l'anglais en 1re année, je suppose qu'ils sont tous en immersion.

M. Laughlin : L'é7tude que j'ai mentionnée a été réalisée à Nunavik, dans le Nord du Québec, à la commission scolaire de Kativik. La commission a un programme d'immersion entièrement en inuktitut allant de la maternelle à la 3e année. Les enfants sont en immersion en inuktitut de la maternelle jusqu'à la 3e année.

L'étude à long terme à laquelle nous sommes plus ou moins associés a permis de suivre les résultats de ces enfants après leur passage d'un programme d'immersion entièrement en inuktitut au programme d'enseignement ordinaire en anglais ou en français, puis de comparer ces résultats à ceux des enfants qui ont suivi non le programme d'immersion, mais le programme d'enseignement ordinaire en anglais ou en français.

L'étude a établi que les enfants inscrits au programme d'immersion avaient des résultats équivalents sinon supérieurs à ceux des autres, sur le plan de la littératie tant en inuktitut qu'en anglais ou en français.

Le sénateur Raine : J'ai beaucoup de difficulté à saisir car, pour moi, suivre un programme d'immersion, c'est apprendre dans une langue qui n'est pas la sienne. Or ces enfants étudient dans leur langue maternelle à l'école primaire, ce que je trouve parfaitement sensé. Nous ne faisons peut-être pas cela dans beaucoup de collectivités des Premières nations du pays, sans doute par manque d'enseignants ou pour je ne sais quelle raison. Si les recherches tendent à prouver que les études dans la langue maternelle n'empêchent pas les enfants de passer facilement au programme d'enseignement ordinaire, il serait alors beaucoup plus facile pour eux de garder leur langue.

M. Cappon : Nous commençons à peine à réunir des données au Canada, mais en Amérique latine, où les populations autochtones sont nombreuses, les renseignements recueillis tendent à prouver que l'immersion dans la langue ancestrale est utile non seulement pour cette langue, mais aussi pour la maîtrise de l'espagnol. C'est ce que les données établissent.

Quant à savoir pourquoi nous ne l'avons pas fait davantage, l'une des raisons est la pénurie d'enseignants. L'augmentation de la population des jeunes, surtout dans le Nord, est assez importante. Il est donc difficile de répondre à la demande.

Le sénateur Raine : S'il y a une pénurie d'enseignants et que nous ayons dans ces collectivités des gens sans emploi, nous avons peut-être sur place des enseignants en herbe à qui il nous suffirait d'inculquer les compétences nécessaires pour enseigner aux enfants.

Vous avez dit qu'un tiers seulement des enfants des Premières nations se font lire des histoires par rapport à deux tiers des enfants non autochtones. Si on ne leur lit pas des histoires, est-ce qu'on leur en raconte? La lecture ne faisait pas partie de leur culture, mais la narration et la transmission orale de l'histoire et de la culture en faisaient sûrement partie. Considérez-vous la narration comme un équivalent de la lecture?

M. Cappon : Non. Monsieur Laughlin, corrigez-moi si je me trompe. Nous considérons la narration comme un autre genre d'indicateur, une autre facette ou dimension de l'apprentissage. Ce que j'ai dit plus tôt, c'est que les recherches menées dans de nombreux pays ont montré que les enfants de moins de cinq ans à qui on fait la lecture tendent à lire eux- mêmes plus tard et à être plus instruits. Cela n'enlève rien à la valeur des contes et de la narration, que nous prenons en considération d'une autre manière.

M. Laughlin : Oui. En fait, nous venons de mentionner dans ce cadre l'indicateur relatif à la lecture, mais il y en a un autre lié à la narration, pour lequel les données ne sont malheureusement recueillies que pour les Autochtones vivant hors réserve. Dans ce cas, nous avons relevé des taux d'environ 80 p. 100. Autrement dit, 80 p. 100 des enfants entendent des histoires et communiquent verbalement avec la famille et les aînés de la collectivité sur une base régulière.

M. Cappon : Cet exemple illustre ce que j'ai dit tout à l'heure. Plus nous avons de données, plus le mélange est riche. Si nous pouvons combiner l'approche occidentale conventionnelle, qui consiste à lire aux enfants, et l'approche autochtone ou des Premières nations, qui consiste à leur raconter des histoires, nous pouvons mesurer les deux et en tenir compte conjointement. Nous avons alors la possibilité de donner une description plus riche des résultats de l'apprentissage que si nous n'avions qu'une seule approche ou si nous tentions de tout expliquer à l'aide d'un seul indicateur. Voilà pourquoi nous tenons tellement à ce cadre qui combine tous les éléments ayant une importance réelle pour les gens et qui permet de présenter une image exacte de la situation.

Le sénateur Campbell : Tout cela est vraiment fascinant. J'ai deux questions à poser. Premièrement, je n'ai jamais envisagé cette idée de l'école comme centre d'activité de la collectivité. Je suppose que c'est parce que je suis vieux. En réalité, l'école a toujours été le centre de l'activité communautaire. Je m'en suis rendu compte quand j'y ai pensé car nous n'avions pas alors des centres communautaires ou d'autres endroits spécialisés. On allait à l'école. À la fin des cours, toutes nos activités étaient centrées là, qu'il s'agisse d'études officielles ou de sport. Comment revenir à cette situation, non seulement dans les collectivités autochtones, mais partout ailleurs? Est-ce que cette tradition s'est perdue? Croyez-vous qu'il soit possible de la retrouver?

M. Cappon : Je crois qu'il est possible de la retrouver, mais il faudra beaucoup d'efforts. En un sens, cela pourrait être plus facile dans les réserves qu'hors réserve, dans les collectivités non autochtones, car il y a dans les villes énormément d'obstacles matériels qui doivent faire l'objet de négociations avec différents préposés, avec les syndicats d'enseignants, et cetera. Ces difficultés ne sont pas insurmontables, mais elles font qu'il est difficile, sur le plan de l'organisation, de maintenir une école ouverte 14 heures par jour, comme on pourrait le souhaiter. J'insiste beaucoup sur ce que j'ai dit plus tôt : si nous ne le faisons pas, l'appui du public à l'éducation baissera dans le pays, ce qui fera baisser la qualité. En effet, étant donné l'évolution démographique du pays, les gens n'accordent pas autant d'intérêt à l'école quand ils n'ont plus d'enfants d'âge scolaire.

La plupart des provinces du Canada ont des modèles d'école qui sont devenus des centres d'activité, des centres d'apprentissage communautaire et des lieux d'éducation des jeunes, conformément à ce que nous souhaitons. La raison pour laquelle cette transition sera plus facile pour les Premières nations, c'est qu'elles éprouvent déjà des sentiments de ce genre de toute façon, parce qu'elles ont l'habitude de l'apprentissage informel et qu'elles ne sont pas aussi attachées aux anciennes structures que les collectivités non autochtones. Elles sont donc susceptibles de faire plus facilement la transition.

Dans le cas des collectivités non autochtones, j'insiste sur le fait que si nous ne le faisons pas, nous aurons des ennuis dans le domaine de l'éducation publique.

M. Laughlin : Je vais vous donner un exemple de la façon dont nous avons appliqué ces outils de base, les modèles d'apprentissage holistique, pour examiner la notion des communautés d'apprentissage. Nous avons travaillé en partenariat avec l'Assemblée des Premières Nations, notre Centre du savoir sur l'apprentissage chez les Autochtones et trois groupes des Premières nations — à Onion Lake, en Saskatchewan, dans la Première nation Nipissing de l'Ontario et auprès du Conseil des Premières nations du Yukon — pour appliquer ces modèles comme cadre d'examen de l'apprentissage dans une vaste optique communautaire. Cette initiative a amené non seulement les enseignants, les directeurs d'école et les étudiants, mais aussi les parents, les travailleurs sociaux et les responsables des programmes de loisirs à poser la question suivante : si cela représente le succès de l'apprentissage, que faisons-nous dans notre collectivité pour promouvoir cette façon de procéder dans chacun des aspects du modèle d'apprentissage?

Ils ont pratiquement fait un bilan dans le cadre duquel ils ont examiné leurs points forts et leurs faiblesses afin d'utiliser ce modèle ou cet outil pour mettre au point un plan communautaire d'apprentissage qu'ils ont ensuite soumis aux administrateurs de leur conseil scolaire. Ce fut un exercice extraordinaire qui a vraiment concrétisé la notion que l'école est le vrai centre de l'activité communautaire.

Le sénateur Campbell : En ce qui concerne l'éducation et Statistique Canada, est-il possible que le manque de données soit dû au fait que l'éducation relève de la compétence provinciale et que différentes administrations sont en cause, ou bien est-il attribuable à l'indifférence des citoyens et des politiciens qui n'ont pas exigé l'information dont ils ont réellement besoin et qui se sont contentés des renseignements qu'on a recueillis pour eux? Je suis troublé par le fait que la qualité de nos statistiques nous place en dernière position parmi les pays de l'OCDE. Nous avons toujours été fiers de Statistique Canada et avons toujours cru que nous étions parmi les premiers.

M. Cappon : Les responsables de Statistique Canada sont très bons, très indépendants et font un excellent travail. Le problème tient à la façon dont nous gérons le pays.

Le Canada est le seul pays du monde qui n'ait pas un ministère de l'Éducation nationale. Aucun autre pays n'est semblable au Canada à cet égard. Toutefois, même en l'absence d'un ministère de l'Éducation nationale, nous pouvons quand même recueillir les données dont nous avons besoin à condition d'avoir des objectifs nationaux.

Mon modèle favori est celui de l'Europe car, par définition, tous les pays européens sont souverains en matière d'éducation. Ils ont cependant des indicateurs et des objectifs qui sont communs à tous les membres de l'Union européenne. L'euro ne se porte peut-être pas très bien en ce moment, mais les Européens ont d'excellents résultats en éducation et en formation parce qu'ils ont des points de repère, des buts et des objectifs qui sont définis tous les ans, de même que sur une base quinquennale et décennale. Chaque pays membre de l'UE doit atteindre les objectifs, qui font l'objet de rapports publiés partout en Europe. Les politiciens et la fonction publique de ces pays sont donc soumis à de fortes pressions qui les incitent à atteindre les objectifs.

La définition d'objectifs est tellement importante car, même s'ils ne sont pas inscrits dans la loi — ce qu'il est impossible de faire en l'absence d'un ministère national —, ils ont quand de puissants effets. Par exemple, si on définissait l'objectif national pour l'éducation des Autochtones de l'Ontario, le ministre ontarien aurait la responsabilité de l'atteindre, à défaut de quoi, il serait très mal considéré. Cela est donc faisable.

Pour réussir, il s'agit de réunir les autorités de l'apprentissage, non seulement dans le domaine de l'éducation, mais aussi dans l'industrie, la formation, et cetera, pour définir les objectifs. Tout le reste suivra automatiquement une fois qu'on aura convenu des indicateurs.

Voilà pourquoi j'insiste tant sur la définition d'indicateurs nationaux pour l'éducation des Autochtones. Je sais que cela aboutira à des résultats. Si on a des indicateurs, il faut disposer de données qui permettent de déterminer si on a réussi ou non. Nous naviguons dans des eaux inconnues, nous nageons dans l'obscurité parce que nous n'avons jamais expliqué à Statistique Canada ce dont nous avons besoin.

Statistique Canada reçoit à différents moments des demandes relatives à des données différentes provenant de six provinces différentes. Il lui est impossible de les satisfaire parce que les provinces ne s'entendent pas pour utiliser la même information en Saskatchewan qu'au Nouveau-Brunswick. Le Canada est le seul pays qui n'agisse pas comme les autres. Nous avons donc un sérieux problème.

Le sénateur Stewart Olsen : Je vous remercie d'avoir comparu devant le comité aujourd'hui. Je vous prie de m'excuser. Comme je ne m'y connais pas beaucoup en recherche pure, une grande partie de votre terminologie me déroute un peu.

J'aimerais savoir quels résultats vous mesurez. En fait, mesurez-vous des résultats quelconques? Vous limitez-vous à établir des programmes? Que pouvez-vous m'apprendre précisément? J'ai passé en revue votre documentation, mais je n'ai pas pu déterminer ce que vous mesurez. Ce n'est peut-être pas votre rôle.

M. Cappon : Oui, c'est notre rôle de mesurer. Nous n'établissons pas nécessairement les indicateurs, c'est-à-dire ce qu'il faut mesurer, quoi que nous le fassions parfois quand personne d'autre ne s'en occupe. Nous l'avons fait dans le cas de l'éducation postsecondaire au Canada.

Je vais faire une petite digression ici. Parce que le Canada est le seul pays du monde à ne pas avoir d'objectifs nationaux pour l'éducation postsecondaire, nous avons défini ce qui constitue à notre avis des objectifs raisonnables, mais nous ne pouvons pas du tout dire qu'ils ont fait l'objet d'un consensus national. Nous ne sommes qu'une seule organisation qui dit qu'il devrait y avoir des objectifs et que ceux-ci devraient donner lieu à des indicateurs.

Noms n'élaborons pas nous-mêmes des programmes. Nous ne nous occupons ni de programmes ni de politiques. C'est le rôle des gouvernements, des collectivités, des entreprises, des syndicats, et cetera. Par contre, nous nous intéressons énormément aux indicateurs.

Monsieur Laughlin, voulez-vous parler de quelques-uns des indicateurs?

M. Laughlin : Oui. Pour revenir à un point que nous avons abordé tout à l'heure, je dirais que lorsqu'on entreprend un processus de mesure comme nous l'avons fait auprès des Autochtones du Canada, afin de mesurer le succès et l'apprentissage, il est essentiel de s'assurer qu'on mesure les éléments qui ont vraiment de l'importance. Je crois que c'est le problème que nous avions dans le passé. Nous ne posions pas les bonnes questions et n'avions pas des cadres appropriés. Le rôle que nous avons essayé de jouer dans les quatre ou cinq dernières années consiste à élaborer des cadres plus adaptés dans lesquels nous pouvons poser les bonnes questions et nous assurer d'avoir les bons indicateurs.

Le sénateur Stewart Olsen : J'aimerais bien avoir des exemples, s'il vous plaît.

M. Laughlin : Des exemples d'indicateurs?

Le sénateur Stewart Olsen : Oui.

M. Laughlin : Nous avons parlé tout à l'heure de quelques-unes des mesures conventionnelles, comme les taux d'achèvement des études secondaires et postsecondaires, l'apprentissage chez les adultes, les taux d'alphabétisation des adultes et l'apprentissage au travail. Il y a également le succès dans le domaine de la langue et de la culture et l'apprentissage informel qui se produit à la maison, dans la collectivité, en faisant du sport et en fréquentant des clubs et des musées.

Il nous manque encore beaucoup de données, mais, comme nous l'avons mentionné dans notre étude, c'est le premier cadre complet jamais établi dans lequel on puisse adopter une approche holistique s'étendant sur toute la vie pour mesurer le succès. Le rapport sur la situation de l'apprentissage chez les Autochtones, que nous avons distribué au Sénat et qu'il est possible de trouver en ligne, présente une trentaine d'indicateurs qui font actuellement partie de ce cadre.

M. Cappon : Quelques-uns de ces 30 indicateurs représentent des mesures occidentales conventionnelles et d'autres, des mesures autochtones.

Le sénateur Stewart Olsen : Oui, j'ai vu cela. Des indicateurs comme l'achèvement des études secondaires et autres. J'aime bien l'approche holistique. Je crois que c'est très bon. Cela peut probablement servir de modèle à tout le monde.

M. Laughlin : Absolument.

Le sénateur Stewart Olsen : Comment vos rapports ont-ils été accueillis?

M. Cappon : Comme je l'ai dit, l'accueil a été enthousiaste. Les collectivités autochtones sont tout à fait d'accord. C'est la raison pour laquelle les chefs des cinq organisations nationales sont venus à la conférence de presse que nous avons donnée en décembre pour parler de notre cadre. Nous n'avons aucune difficulté de ce coté. L'accueil a été très bon dans les collectivités et à l'étranger aussi. On en a parlé en Amérique latine en particulier, où vivent de nombreux Autochtones.

Nous avons par ailleurs deux difficultés. La première est de trouver les données pour calculer les indicateurs. Autrement dit, nous manquons de données et n'avons pas les moyens de les recueillir nous-mêmes. Nous devons compter sur les provinces et Statistique Canada. C'est notre première difficulté.

La seconde, c'est que nous sommes une petite organisation. Pour faire connaître notre travail, M. Laughlin se rendra peut-être à Onion Lake, mais il ne pourra pas le faire toutes les deux semaines. Nous ne pouvons pas visiter toutes les collectivités du pays. Nous devons trouver des moyens efficaces de faire connaître notre travail afin que les gens puissent s'en servir pour mesurer le succès. Nous espérons qu'ils le feront. Nous ne le faisons pas actuellement et ne pourrons jamais le faire nous-mêmes. Voilà nos deux difficultés. Elles concernent la méthodologie, la diffusion des résultats et, pour être franc, le manque de ressources.

Le sénateur Poirier : Je vous remercie de votre exposé. J'ai une observation à faire au sujet de ce qui s'est dit tout à l'heure des écoles communautaires. Je ne sais pas si c'est parce que nous avons de petites municipalités et collectivités, mais au Nouveau-Brunswick, la notion de l'école communautaire a du succès depuis quelques années et s'étend de plus en plus. C'est en fait très intéressant. Ce qui se fait dans la province est probablement semblable à ce qui se fait dans les collectivités des Premières nations, où les écoles s'ouvrent de plus en plus au public, de sorte que certaines activités s'y déroulent très tard la nuit, jusqu'à 22 ou 23 heures. Il peut s'agir d'activités sportives au gymnase, que les adultes et les enfants peuvent utiliser, ou de spectacles, de pièces, de concerts et d'autres manifestations données à l'auditorium par des organisations communautaires. Les écoles sont très actives, même s'il y a parfois aussi des centres communautaires. Je crois que toutes les provinces du Canada devraient examiner cet exemple parce que c'est un excellent modèle. Je voulais juste faire cette observation.

J'ai noté quelques chiffres pendant que vous présentiez votre exposé. Vous avez dit que 46 p. 100 des Autochtones finissent l'école secondaire. Vous avez mentionné un écart. Vous avez dit que 17 p. 100 des collectivités des Premières nations ont accès à des services Internet à grande vitesse, par rapport à 64 p. 100 dans le reste du Canada. Vous avez dit qu'environ un tiers des collectivités des Premières nations font la lecture à leurs enfants, par rapport à deux tiers ailleurs. Vous avez mentionné qu'environ 34 p. 100 des jeunes des Premières nations vivent dans des familles monoparentales, ce qui représente le double du reste du Canada.

Est-ce que ces nombres et ces pourcentages s'appliquent aux Premières nations seulement ou bien englobent-ils les collectivités métisses et inuites?

M. Cappon : Parlons-nous des Autochtones?

M. Laughlin : Il s'agit essentiellement des Premières nations. C'est surtout les membres des Premières nations qui vivent dans les réserves. Nous avons cru comprendre que le comité s'intéresse particulièrement à ce groupe.

Le sénateur Poirier : D'accord.

M. Laughlin : Nous avons cependant d'importantes difficultés relatives aux données. Certains des chiffres s'appliquent exclusivement aux membres des Premières nations qui vivent hors réserve. Certains autres concernent l'ensemble des Autochtones. Toutefois, c'est cela dans la majorité des cas. Si les catégories n'étaient pas explicites dans notre exposé, elles le sont dans notre rapport.

Le sénateur Poirier : J'ai posé la question parce que je voulais savoir si les trois catégories ont été combinées dans ces données. Si c'est le cas, est-ce que les chiffres nous donnent une bonne idée de la situation des Premières nations? Les chiffres combinés sont-ils plus élevés ou moins élevés que ceux des Premières nations?

M. Laughlin : Pour la plupart, les chiffres concernent les membres des Premières nations vivant dans les réserves, mais il faut se rendre compte d'une chose importante quand on parle des taux d'achèvement des études secondaires. Ces taux s'appliquent particulièrement aux membres des Premières nations vivant dans les réserves. Nous avons parlé de 60 p. 100, mais il ne faut pas perdre de vue que c'est une moyenne. Le taux d'abandon des études secondaires est de 38 p. 100 à l'Île-du-Prince-Édouard, mais il s'élève à 72 p. 100 au Manitoba. Oui, 72 p. 100 des jeunes de 20 à 24 ans dans les réserves manitobaines des Premières nations n'ont pas fini l'école secondaire.

Lorsqu'on examine ces chiffres, on doit se souvenir, comme vous l'avez dit, que ce sont des moyennes et qu'il y a des extrêmes de part et d'autre. Il y a du succès, mais il y a aussi de grands défis, non seulement à l'échelle des provinces, mais aussi au niveau des collectivités très isolées ou très éloignées, par rapport aux collectivités proches des centres urbains.

Le sénateur Patterson : Je voudrais vous remercier pour ce fascinant exposé. J'ai trouvé extrêmement intéressant le fait que votre description de la réussite au moyen d'indicateurs plus généraux que l'achèvement d'études secondaires ou universitaires a abouti à un tableau plus positif. C'est vraiment très intéressant.

Nous venons tout juste d'entreprendre notre étude. Nous avons examiné cette question de la réussite et avons beaucoup parlé des écarts. Nous avons examiné de près quelques différences choquantes, comme le fait que les étudiants autochtones ont cinq fois moins de chances de réussir à l'école secondaire et de finir leurs études universitaires. Si j'ai bien compris, vous avez dit qu'il ne faut pas définir la réussite en éducation en fonction de critères étroits et que nous devons adopter des indicateurs plus généraux.

Il n'en reste pas moins que notre société veut savoir si une personne a un diplôme secondaire ou un diplôme universitaire. Notre société tend à s'intéresser aux mesures conventionnelles de la réussite. J'ai donc des difficultés dès les premiers stades de notre étude. Diriez-vous que nous ne devrions pas nous appuyer sur ces indicateurs? Le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada a fait une étude sur l'éducation des Autochtones que vous connaissez sûrement. Cette étude a également abordé la question de l'élimination des écarts.

Vous nous dites qu'en insistant sur ces critères étroits, nous n'utilisons pas un outil de mesure adéquat et avons donc besoin d'un outil plus large. Disposez-vous d'un tel outil? Ne vous ai-je pas entendu dire que vous avez des difficultés à définir tous les indicateurs?

M. Cappon : Je vous remercie de cette très bonne question. Nous commençons à mettre au point des outils plus généraux. Nous avons parlé de la trentaine d'indicateurs que nous avons maintenant.

Quand on développe un panier d'indicateurs, un indice composite tel que l'indice des prix à la consommation ou l'indice canadien de bien-être, plus on dispose de mesures, plus l'indice est riche et complexe. Toutefois, l'indice est plus riche parce qu'il en dit davantage sur l'aspect mesuré. C'est un peu comme une peinture qui a plus ou moins de détails. Nous voulons un tableau aussi complet que possible de la situation.

Nous ne disposons actuellement que d'une partie de ce tableau, mais nous sommes d'avis qu'il ne faut pas attendre d'avoir le tout avant d'utiliser ce qui est disponible. Nous pouvons nous en servir aujourd'hui. Nous avons développé ce cadre pour une bonne raison. Ce n'était pas un exercice théorique. Nous voulons que les gens s'en servent parce que nous pensons qu'il est utilisable dans sa forme actuelle. Si vous attendez que toutes les données soient parfaites, vous ne ferez jamais rien. C'est une partie de la réponse.

Pour revenir à la première partie de votre question, vous avez parfaitement raison de dire que nous avons jusqu'ici utilisé un modèle d'insuffisance axé sur les faiblesses. Il n'est pas du tout question de négliger ces faiblesses, mais nous disons que nous l'avons fait pendant 100 ans. Est-ce que ce modèle a donné des résultats, ou bien y a-t-il autre chose à utiliser? Est-ce que ce modèle a jamais donné des résultats dans une société quelconque? Nous ne croyons pas que ce soit le cas. Les gens qui avancent sont ceux qui agissent collectivement en faisant fond sur leurs points forts sans faire abstraction de leurs faiblesses. En insistant sur les faiblesses des gens, on peut difficilement s'attendre à ce qu'ils veuillent progresser collectivement. Nous l'avons aussi constaté dans d'autres pays.

Nous devons également nous souvenir que nous ne parlons pas seulement d'éducation. C'est pour une bonne raison que nous avons choisi d'appeler notre organisme Conseil canadien sur l'apprentissage : l'éducation n'est qu'une toute petite partie de l'apprentissage. L'apprentissage qu'on fait dans la collectivité et à la maison est extrêmement important, qu'il s'agisse de sport, de bénévolat ou autre. On apprend beaucoup en faisant ce genre de choses.

Dans le monde d'aujourd'hui, tout dépend des compétences et des qualifications. L'endroit où on a appris et la façon d'acquérir les connaissances importent peu. L'important est de savoir si une personne est capable de faire quelque chose. Les pays qui réussissent au chapitre du système d'éducation — en fonction des données que nous avons recueillies jusqu'ici, je ne pense pas que le Canada compte parmi eux — sont ceux qui ont élaboré des cadres de qualification tenant compte non du nombre de diplômes qu'on a obtenus, mais de ce qu'on sait faire, des compétences qu'on a acquises et dont on peut faire la preuve.

Bien sûr, dans cette optique, une personne n'a aucune compétence sérieuse avant d'avoir fini l'école secondaire. C'est un fait, mais au-delà, tout est possible. Même avant d'obtenir un diplôme secondaire, si une personne a vécu dans un environnement d'apprentissage approprié, si on lui a fait la lecture ou si on lui a raconté des histoires dans son enfance, ces choses ont une grande influence sur la façon dont elle perçoit le monde. Si on lui offre la possibilité de commencer à apprendre un métier avant la fin des études secondaires, cela peut agir sur son niveau de motivation.

Nous disons qu'il est important de tenir compte de ces choses. Ne faisons pas abstraction des faiblesses, car elles existent, mais adoptons un système mixte pour évaluer la situation. Le résultat sera alors utile. Je dois dire que nous en avons eu la preuve d'après l'expérience d'autres pays et d'autres sociétés.

Le sénateur Patterson : Nous dépensons beaucoup d'argent. On nous dit constamment que ce n'est pas assez, mais le gouvernement fédéral consacre des sommes énormes, par l'entremise d'Affaires indiennes et du Nord Canada, à l'éducation des Autochtones. Les résultats ne sont pas évidents. Les critères sont peut-être trop étroits et, comme vous le dites, nous devrions sans doute considérer la réussite dans les métiers et dans les études collégiales.

Je comprends que nous devrions avoir des mesures plus générales de la réussite et un cadre politique pour mesurer le succès. C'est un conseil utile au moment où nous entreprenons notre étude. Maintenant que nous avons compris cela, de quelle façon votre cadre nous aide-t-il à déterminer les changements à recommander pour mieux utiliser l'argent? Pouvez-vous préciser la façon dont nous pouvons nous servir de cette approche holistique pour trouver des moyens plus efficaces de dépenser les fonds disponibles?

M. Cappon : Voilà une autre très bonne question. Comme je l'ai dit plus tôt, on élabore des ensembles de données dans le but d'améliorer la situation. Ce n'est pas un concept abstrait.

Je suis heureux que vous en soyez encore aux premiers stades de votre étude. Si vous vous intéressez à notre approche, qui se distingue de ce que disent à ce sujet la CBC et AINC, comme nous l'avons expliqué, cela pourrait être très utile. Par ailleurs, si vous examinez l'apprentissage chez les Autochtones de la même façon qu'on l'a fait au Canada dans les 40 dernières années, il n'y aura pas grand-chose qui changera. Les faits l'ont prouvé.

Pour déterminer ce que vous pouvez faire d'utile — cela nous ramène à la question de savoir comment dépenser les fonds disponibles —, vous devriez vous inspirer des recommandations que j'ai présentées à la fin de mon exposé. Qu'il y ait ou non une loi sur l'éducation des Autochtones, vous pouvez définir des objectifs basés sur ce que vous voulez réaliser. C'est toujours la première chose à faire. Il faut définir des objectifs génériques pour le long terme et des objectifs plus précis pour le court terme.

Par exemple, nous savons dans quelle mesure les membres des Premières nations obtiennent des diplômes à l'heure actuelle. Quel taux souhaitons-nous atteindre dans cinq ans? Quel est l'objectif? Il ne suffit pas de dire que nous visons un taux supérieur à celui de cette année. Combien de membres des Premières nations maîtrisent actuellement la langue de leurs ancêtres? Combien devrait-il y en avoir dans cinq ans?

Vous pouvez ensuite passer aux ressources. Vous devrez choisir parce que les ressources ne sont pas illimitées. Vous aurez à choisir parmi les différents critères et paramètres ceux qui sont les plus importants. Dans notre modèle, cela est plus facile à faire parce qu'on accepte au départ les choses qui sont importantes pour les Autochtones. Cela est implicite dans notre modèle. Toutefois, on ne peut pas tout réaliser d'un coup. Il faut s'entendre avec ceux qui utiliseront ces systèmes sur la répartition des ressources qui aura la plus grande influence sur les résultats, puis dépenser l'argent de la façon convenue et faire un suivi.

Inévitablement, comme je l'ai dit, vous aurez à prendre des décisions difficiles sur la façon de dépenser l'argent pour atteindre les objectifs. Il est probable que vous ne réussirez pas à réaliser certains d'entre eux, mais il faudra le reconnaître publiquement et réviser les dépenses par la suite. C'est ainsi qu'il faut procéder en s'appuyant sur les objectifs et en utilisant l'argent de la façon convenue.

M. Laughlin : En adoptant une approche plus générale et plus holistique, il est possible de déterminer tant les points forts que les faiblesses des collectivités. Dans le passé, les organismes politiques et d'autres qui cherchaient des solutions avaient tendance à s'appuyer sur un modèle d'insuffisance, comme M. Cappon l'a mentionné. Ce faisant, ils réagissaient aux faiblesses, concevaient des solutions dans cette optique et dépensaient l'argent sur cette base au lieu de reconnaître les points forts et de les prendre pour fondement afin d'avancer.

Le surpeuplement des logements est un exemple clair de facteur non directement lié à l'apprentissage. On peut juger que c'est un facteur négatif ou positif. Il est souvent considéré comme négatif dans les modèles d'insuffisance, mais dans le cadre d'une approche holistique, où les liens sociaux et les connaissances transmises entre les générations jouent un rôle important dans l'apprentissage, ce facteur peut être positif parce que les liens sociaux ont un effet direct sur l'apprenant. C'est ainsi que nous pouvons modifier la façon d'élaborer les politiques et de trouver des solutions.

M. Cappon : Je vais vous donner un autre exemple. Le Canada consacre chaque année 34 milliards de dollars à l'éducation postsecondaire. Nous n'avons pourtant pas un seul objectif. Si vous posez la question au président de l'Association des universités et collèges du Canada, il vous dira que nous cherchons à faire mieux, à avoir plus d'étudiants et plus de publications. En réalité, nous n'avons aucun objectif. Comment alors déterminer si les 34 milliards de dollars produisent les résultats voulus?

Si vous voulez faire des dépenses utiles dans le domaine de l'éducation des Autochtones, vous devez savoir ce à quoi elles doivent servir et prendre des décisions difficiles en faisant passer certains objectifs avant d'autres parce qu'il est impossible de les atteindre tous en même temps.

Au chapitre de l'éducation postsecondaire, je dirais que le pays a besoin d'objectifs en matière de recherche- développement et d'apprentissage en classe et doit prendre des décisions réfléchies pour concentrer ses ressources sur un domaine plutôt qu'un autre en fonction d'objectifs définis. J'estime qu'il faut faire la même chose dans le cas de l'éducation des Autochtones.

Le sénateur Brazeau : Je vous remercie tous deux de votre présence ce soir. Il est clair que vous nous avez présenté des renseignements vraiment fascinants. Il y a deux jours, je bavardais avec des amis sur Facebook, comme le sénateur Campbell est enclin à le faire, au sujet de l'éducation des Autochtones. Nous avions une discussion parce que j'avais mentionné la possibilité que le comité réalise une étude sur l'éducation. J'ai reçu beaucoup de commentaires négatifs. En particulier, de nombreux Autochtones ont dit : « Voilà que ça repart encore une fois. Une autre étude, d'autres collectes de données et encore d'autres définitions de problèmes. » Beaucoup de ces gens disaient essentiellement qu'ils connaissaient la nature des problèmes et soulevaient des questions de gouvernance liées à l'éducation, aux responsabilités et aux interventions intempestives — réelles ou perçues — d'AINC. Ils parlaient aussi du plafond de financement de 2 p. 100 et de l'absence de normes provinciales en matière d'éducation des Premières nations.

Comment répondriez-vous à ces critiques et, en particulier, à celles venant des Autochtones qui veulent savoir à quoi serviront d'autres données et d'autres recherches et de quelle utilité elles seront dans l'optique d'une meilleure éducation, indépendamment de l'ampleur relative des déterminants considérés?

M. Cappon : Des dizaines d'années d'expérience nous ont montré qu'il y a eu une foule d'études et de données sans rapport avec ces critiques. Si les Autochtones n'ont pas l'impression que ce que vous faites est intéressant pour eux, votre nouvelle étude aura probablement le même impact et le même sort que les autres.

M. Laughlin : C'est exactement le point de vue à partir duquel nous sommes nous-mêmes partis en 2007 : nous avons commencé par prendre du recul pour être mieux à même d'avancer et par reconnaître que beaucoup d'études et de recherches avaient déjà été faites sur le sujet, aussi bien par des Autochtones que par des non-Autochtones. Notre première étape a consisté à ramasser tous ces volumes de recherches et de rapports, à les épousseter et à en faire la synthèse sous forme d'un modèle holistique d'apprentissage pouvant nous permettre de mieux comprendre ce que signifie la réussite et, partant, de trouver des moyens de la mesurer.

Notre travail a consisté à faire fond sur toute cette recherche. Il s'agissait non d'ajouter d'autres études, mais de transposer les résultats obtenus dans la pratique en créant des outils dont les collectivités et les organisations pouvaient se servir.

Le sénateur Brazeau : Je suis bien d'accord avec vous sur l'importance de considérer tant les normes, critères ou indicateurs occidentaux de réussite que les indicateurs traditionnels et le modèle holistique dont vous avez parlé.

Premièrement, avez-vous soumis vos conclusions au Conseil de la fédération et, si oui, quelle a été la réponse?

Deuxièmement, s'il nous est possible plus tard d'élaborer un cadre combinant les notions occidentale et holistique des indicateurs de réussite, quelles seraient les conséquences sur les coûts? Soyons réalistes. Les provinces ont la responsabilité de l'éducation, sauf évidemment ce qui concerne les Premières nations. Il y a donc des conflits de compétence. S'il n'y a pas d'entente entre les provinces, le gouvernement fédéral et les groupes autochtones, est-il envisageable d'appliquer 600 cadres différents d'éducation? Nous avons plus de 600 collectivités des Premières nations au Canada, et je ne sais combien de collectivités métisses. Pouvons-nous avoir plus de 600 modèles d'éducation différents?

M. Cappon : Nous ne pouvons pas en avoir autant en pratique. Je ne sais pas ce que cela coûterait, mais je dirais que beaucoup des problèmes qui se posent sont moins liés aux montants dépensés qu'à la mesure dans laquelle les dépenses sont judicieuses.

Je vais vous donner un exemple. Parmi les pays de l'OCDE, le Canada se classe deuxième en fonction des dépenses consacrées à l'éducation postsecondaire, mais il est très loin d'être deuxième sur le plan des résultats. Le plus souvent, la façon de dépenser l'argent compte beaucoup plus que le montant dépensé. De même, le Canada consacre énormément d'argent à l'éducation dans d'autres domaines, mais c'est la façon de s'organiser qui fait toute la différence.

Il est bien possible qu'en adoptant le modèle que je propose, c'est-à-dire en définissant des objectifs de portée nationale, vous puissiez réduire les dépenses dans certains domaines et les augmenter dans d'autres. Que le total soit supérieur ou inférieur ne me concerne pas vraiment. Je veux simplement que les dépenses soient faites à bon escient et conformément aux objectifs définis en consultation avec les collectivités.

Il serait impossible de consulter 600 collectivités. Vous pourriez peut-être agir sur une base nationale en vous servant de notre cadre. Vous conviendriez des objectifs liés à chacun des 30 indicateurs que nous avons définis pour les cinq prochaines années. Ces objectifs seraient acceptés partout dans le pays. Leur réalisation peut et doit se faire de manières différentes dans les différentes collectivités parce que les cultures ne sont pas les mêmes, mais les objectifs seraient quand même communs. Pour moi, voilà en quoi consiste la responsabilité. Il s'agit non de dépenser plus ou moins d'argent, mais d'atteindre les objectifs fixés avec les ressources dont on dispose.

Quant à la façon de travailler et à l'équilibre à maintenir entre les modèles occidentaux conventionnels et les modèles modernes que nous utilisons, je tiens à souligner que nous ne voulons nullement écarter les modèles conventionnels. Nous rejetons nous-mêmes toute attitude « réjectionniste ». Nous ne rejetons pas les modèles occidentaux, qui sont très importants. Nous sommes opposés aux impulsions de rejet du genre que vous avez probablement pu constater avec certains de vos correspondants : Si c'est Blanc, c'est mauvais et nous n'en voulons pas. C'est ce que j'entends par attitude « réjectionniste ». Il y a des mesures utiles et d'autres qui le sont moins que les normes conventionnelles. L'essentiel est de choisir ce qui est utile et d'écarter le reste.

L'aspect politique est pour nous le plus difficile. Nous n'avons pas pris contact avec le Conseil de la fédération. Nous avions l'intention de le faire, mais comme nous avons perdu, il y a deux semaines, le financement que nous accordait le gouvernement fédéral, nous avons moins de ressources qu'auparavant. Par conséquent, notre capacité d'aller de l'avant dans ce travail détaillé est considérablement réduite parce que les fonds fédéraux que nous recevions représentaient 90 p. 100 de notre budget. Nous aimerions bien travailler avec le Conseil de la fédération, mais c'est peu probable dans un proche avenir.

Le sénateur Brazeau : Je suppose qu'une participation de cinq organisations autochtones nationales les amènerait à appuyer votre travail si elles avaient un siège au conseil une fois par an.

Nous menons une étude sur l'éducation, de la maternelle à la 12e année, dans les Premières nations. En fonction de l'expérience que vous avez acquise, est-ce que le Conseil canadien sur l'apprentissage croit que les Premières nations devraient assumer le contrôle, l'administration et la supervision de l'éducation dans leurs collectivités au Canada?

M. Cappon : C'est probablement la seule question à laquelle je n'ai pas de réponse à donner ce soir. Je ne le sais pas. Notre conseil n'a pas un point de vue à ce sujet. Cette question concerne la gouvernance dans le sens propre du mot. Tout ce que je peux dire c'est que si les objectifs ne sont pas définis en collaboration avec les Premières nations, ils ne serviront pas à grand-chose. Je suppose que vous pouvez interpréter cela de la manière que vous voulez, mais la définition des objectifs et l'attribution des ressources correspondantes doivent être le fruit d'une collaboration. Autrement, rien ne marchera, quel que soit le modèle de gouvernance adopté.

Le président : Au cours de nos déplacements aux États-Unis, nous avons visité une école secondaire et avons été vraiment inspirés de voir ces enfants autochtones américains du groupe des Pueblos. C'était tellement positif. Nous avons assisté à une réunion dans le gymnase. J'ai demandé au grand chef des Pueblos ce qu'il faisait pour maintenir un tel niveau d'enthousiasme et un tel taux de succès dans ses écoles secondaires. Il a dit que les autorités scolaires essayaient de voir les choses avec les yeux des enfants plutôt qu'avec des yeux d'adultes. Pour lui, c'était l'une des raisons du succès. Les sénateurs qui m'accompagnaient dans ce voyage s'en souviendront.

Vous avez mentionné plus tôt qu'un étudiant autochtone sur cinq a eu des parents ou des grands-parents qui sont allés dans les pensionnats indiens et que cela a des effets négatifs sur les résultats scolaires actuels des enfants des Premières nations.

Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Disposez-vous de données prouvant l'existence de cet effet intergénérationnel? À votre avis, quelle est l'importance de ce facteur?

M. Cappon : Je demanderai à M. Laughlin de parler de la question des données dans un instant.

Je sais, à cause de mes antécédents médicaux, que l'environnement dans lequel les gens travaillent les affecte psychologiquement de toutes sortes de façons. Toute expérience éducative pouvant être considérée comme traumatisante pour un parent tend à se transmettre aux enfants.

Permettez-moi de vous donner un exemple tiré des recherches que nous avons faites, bien qu'il ne soit pas lié à l'éducation des Autochtones. Nous avons constaté que les parents qui ont eux-mêmes eu des difficultés à faire leurs devoirs lorsqu'ils étaient à l'école tendent à être plus anxieux au sujet des devoirs de leurs enfants que les parents qui n'ont pas eu la même expérience. Les facteurs psychologiques de ce genre peuvent avoir de puissants effets.

M. Laughlin : Les effets intergénérationnels constituent un élément clé du modèle structurel ou du cadre que les Premières nations en particulier ont défini. En fait, elles ont mentionné, dans le modèle, ce processus d'apprentissage continu qui commence dans les premières années de la vie et s'étend jusqu'à l'âge adulte et y ont inclus les sept générations de l'apprentissage intergénérationnel. Le fait qu'un jeune sur cinq parmi les membres des Premières nations vivant actuellement dans les réserves ait des parents — pas seulement des grands-parents — qui ont été dans un pensionnat indien a des effets sensibles, et pas seulement du point de vue des communautés d'apprentissage ou des communautés en tant que centres d'activité. En fait, certains de ces parents emmènent leurs enfants au pensionnat indien qu'ils ont fréquenté. Comme nous pouvons tous l'imaginer, les conséquences peuvent être désastreuses. Les effets sont importants, surtout si on tient compte de l'apprentissage intergénérationnel transmis par les aînés, les parents et les collectivités dans le cadre de ce processus d'apprentissage continu.

Le sénateur Raine : Mesurez-vous l'éducation physique, dans le cadre de vos indicateurs, parallèlement à l'éducation traditionnelle? Je sais que le mauvais état général de santé, l'obésité et le diabète sont plus fréquents dans les réserves qu'hors réserve. Avez-vous envisagé, dans vos entretiens avec les membres des Premières nations, de calculer également ce genre d'indicateurs?

M. Cappon : Je vais demander à M. Laughlin de répondre à cette question précise dans un instant. Nous disposons de données assez concluantes établissant que, dans les pays ayant un processus national d'écoles saines — je ne parle pas ici de cours sur la santé, mais d'écoles ayant un environnement psychologique et physique sain ainsi que des cours d'éducation physique —, comme c'est le cas au Royaume-Uni, le rendement scolaire des étudiants est nettement meilleur que dans les écoles qui n'ont pas une initiative de ce genre. Le Canada, pour les raisons que nous avons déjà mentionnées, dont la désorganisation politique ici, n'a aucune initiative nationale sur les écoles saines. Cela nous désavantage d'une façon générale, particulièrement dans les écoles des Premières nations.

M. Laughlin : Malheureusement, les seules données que nous ayons sur l'éducation et l'activité physique portent sur les activités parascolaires. Nous avons d'importantes lacunes dans nos données. Nous n'avons que très peu de renseignements sur l'importance des programmes d'éducation physique dans les écoles et les collectivités des Premières nations, malgré les problèmes de santé et les taux d'obésité et de diabète qui sont nettement supérieurs dans ces collectivités. Nous n'avons pas de données sur les programmes d'écoles saines qui existent au Canada.

M. Cappon : Si le comité songe aux indicateurs et aux objectifs qu'il souhaiterait voir adopter au Canada, ce serait là un élément important à cause des problèmes de santé, de diabète et d'obésité qui se manifestent.

À part le fait d'ajouter cette mesure, comme nous le faisons dans le cadre de l'indice composite de l'apprentissage, nous pourrions déterminer les effets de ce facteur, en pourcentage, sur les conditions générales d'apprentissage de la collectivité. Comme nous le faisons déjà dans le cas de l'indice composite de l'apprentissage, nous pourrions le faire pour ce processus également. Si on veut connaître l'importance de l'éducation physique, il est possible de faire le travail nécessaire pour la mesurer.

Si vous vous interrogez sur l'opportunité de recueillir ces données, je vous signalerai que nous avons d'énormes lacunes et que ce domaine représente l'un des indicateurs les plus évidents à ajouter.

Le sénateur Lovelace Nicholas : Avez-vous pu constater, au cours de vos recherches, que le racisme et la pauvreté font partie des problèmes que connaissent les membres des Premières nations?

M. Cappon : Oui. Bien sûr, ces problèmes ne touchent pas seulement les membres des Premières nations. Tous les indicateurs de bien-être des gens sont liés au niveau de revenu. Par exemple, il y a une relation linéaire entre le revenu et la santé. C'est également le cas de l'éducation, du moins dans une certaine mesure. Là où la pauvreté sévit, on trouve des niveaux d'instruction et des résultats scolaires inférieurs. C'est un facteur extérieur qui a des effets très considérables.

M. Laughlin : D'une façon plus générale, comme vous pourrez le voir dans le rapport, le cadre que nous avons établi est lié à de nombreux facteurs de bien-être de la communauté. Ce n'est pas seulement l'importance de l'apprentissage et des indicateurs correspondants, mais aussi l'importance de l'apprentissage dans ses liens avec le bien-être de la communauté.

Nous avons examiné dans le rapport les effets du racisme sur l'apprentissage. Malheureusement, les données citées portent uniquement sur les Autochtones vivant hors réserve, mais une enquête réalisée en 2006 a établi que 42 p. 100 de ces Autochtones hors réserve ont dit avoir été en butte à du racisme ou à de la discrimination dans les deux années précédentes. Le racisme et la discrimination sont répandus. Je crois que le comité en est bien conscient.

Le Centre du savoir sur l'apprentissage chez les Autochtones a récemment mené une étude sur l'importance des connaissances transmises par les enseignants autochtones, sur ce qu'ils peuvent apporter à leurs étudiants et sur certaines des difficultés qu'ils doivent affronter par suite du racisme systémique, aussi bien dans les réserves qu'hors réserve.

Le sénateur Lovelace Nicholas : J'ai posé la question parce que je ne crois pas que les gens soient tous conscients de ce problème au Canada.

Le sénateur Hubley : Ma question porte sur la seule école autochtone ou des Premières nations qui s'inscrivait parmi les 100 meilleures du Canada. Pouvez-vous nous dire quel est son nom et où elle se trouve?

M. Laughlin : Je ne le sais pas. L'indicateur du bien-être de la communauté mentionné dans le rapport est établi par le groupe de recherche d'AINC. Ce groupe se fonde sur un cadre international de développement humain. Il est bien possible que cette école se trouve en Colombie-Britannique. C'est tout ce que je peux vous dire.

Le sénateur Hubley : Vous pourriez peut-être vous renseigner.

M. Laughlin : Vous pouvez obtenir ce renseignement du ministère.

Le sénateur Hubley : Il serait bon de reconnaître les réalisations de cette école. Savez-vous si c'est une école secondaire ou primaire?

M. Laughlin : Je ne le sais pas de mémoire, mais j'encourage toute initiative destinée à faire fond sur les points forts plutôt que d'insister sur les faiblesses.

Le sénateur Hubley : Absolument. Vous avez parlé de ce qui arrivera dans cinq ans. Le chef de l'Assemblée des Premières nations, Shawn Atleo, dit que l'éducation est la clé du succès dans une économie moderne et veut que 65 000 membres des Premières nations obtiennent des diplômes postsecondaires dans les cinq prochaines années. J'espère que nous pourrons l'aider à cet égard.

M. Cappon : C'est un objectif.

Le sénateur Hubley : C'est exact.

Le sénateur Dyck : D'après l'étude sur les Autochtones en milieu urbain très récemment publiée par Environics, les Autochtones urbain, y compris les membres des Premières nations, les Métis et les Inuits, font l'objet de stéréotypes négatifs, c'est-à-dire de discrimination et de racisme. On retrouve la même idée dans une autre étude menée par la Fondation nationale des réalisations autochtones dans le cadre d'une enquête auprès d'étudiants du secondaire à Winnipeg. Cette étude a révélé que, parmi les étudiants qui ont décroché, environ 20 p. 100 ont dit que c'était à cause de l'intimidation. L'intimidation et le racisme semblent contribuer sensiblement au décrochage des étudiants autochtones urbains au niveau secondaire.

Comment pouvons-nous nous attaquer à ce problème? Les écoles publiques de la Saskatchewan ont décidé de modifier les programmes d'études afin d'y inclure des connaissances relatives aux traités. D'une façon générale, les programmes d'études canadiens ne contiennent pas grand-chose au sujet des Autochtones. Faudrait-il envisager des changements à cet égard?

M. Cappon : Cette question a au moins trois aspects. Premièrement, pourquoi les gens décrochent-ils? L'intimidation ou le racisme interviennent-ils dans ce phénomène? On constate, d'une façon générale, que les décrocheurs, surtout quand ils sont de sexe masculin, ne quittent pas nécessairement l'école parce qu'ils ont de mauvais résultats. Ils abandonnent les études par manque d'engagement envers le processus scolaire, ce qui pourrait être dû à l'intimidation, au racisme ou à différentes autres raisons. Je ne parle pas nécessairement des Autochtones. Il s'agit des décrocheurs en général. Par conséquent, il ne serait pas surprenant que les préjugés ou le racisme jouent un rôle. Au secondaire, la plupart des décrocheurs n'ont pas de mauvais résultats. Ils n'échouent pas nécessairement, ce qui permet de croire que ces autres facteurs sont importants. Beaucoup de gens ne s'en rendent pas compte, croyant que les enfants décrochent parce qu'ils essuient des échecs dans leurs études. En réalité, ils n'ont pas l'impression que l'école est utile ou ils manquent d'engagement.

Deuxièmement, en ce qui concerne plus particulièrement l'intimidation, le phénomène va bien au-delà des Autochtones. Il est très répandu un peu partout dans le système scolaire.

Troisièmement, la connaissance de l'histoire du Canada, y compris les traités, est un important facteur. Certaines provinces canadiennes n'ont aucun cours obligatoire d'histoire du Canada, et la plupart n'en ont qu'un seul. Aucun autre pays du monde n'a qu'un seul cours obligatoire sur l'histoire nationale.

Quand on n'a qu'un seul cours, qui est en général intégré aux études sociales et n'est pas nécessairement axé sur l'histoire du Canada, il est très difficile de tout y inclure, ce qui fait que l'étude des traités figure au bas d'une longue liste. Je soutiens que nous avons besoin d'enseigner davantage l'histoire du Canada, comme matière distincte, que nous ne le faisons actuellement dans le système scolaire.

M. Laughlin : L'initiative de la Saskatchewan que vous avez mentionnée, qui prévoit d'enseigner l'histoire des traités à tous les étudiants, fait partie du travail que le CCA a contribué à financer quand il avait les moyens de le faire.

Le sénateur Patterson : Au sujet des buts et des objectifs, des représentants d'AINC nous ont récemment présenté un exposé portant sur les objectifs de l'éducation. Le témoin a dit :

Le gouvernement veut pleinement associer les Canadiens des Premières nations à la prospérité économique du Canada. Nous croyons, même si une éducation de grande qualité ne constitue pas le seul moyen d'atteindre cet objectif, qu'elle représente le levier le plus important pour améliorer les chances de mener une meilleure vie.

Que pensez-vous de cette évaluation de l'objectif et de la valeur de l'éducation?

M. Cappon : C'est sûrement un beau discours. Nous l'entendons tous les jours. Partout dans le monde, chacun veut faire mieux sur le double plan qualitatif et quantitatif. Toutefois, pour moi, cela ne veut rien dire.

Le sénateur Patterson : Je vous remercie de votre franchise. À votre avis, quels devraient donc être les objectifs et la valeur de l'éducation?

M. Cappon : L'objectif devrait être de préparer les gens à acquérir les connaissances pratiques de base dont ils ont besoin, y compris les compétences professionnelles et toutes les autres compétences nécessaires à l'épanouissement personnel : apprendre à être, apprendre à vivre avec les autres, se développer sur le plan social, réaliser la cohésion sociale, apprendre à faire des choses, c'est-à-dire acquérir des compétences, et apprendre à apprendre, c'est-à-dire s'instruire et accumuler des connaissances. Tel devrait être l'objectif d'un système d'apprentissage. Ce sont les quatre dimensions définies par l'UNESCO que nous utilisons au CCA dans notre indice composite de l'apprentissage. Si on veut sérieusement faire quelque chose, il faut avoir des objectifs précis.

J'admets que la rhétorique a du bon. Je ne la rejette pas. Si j'ai donné l'impression de le faire, ce n'était pas mon intention. C'est simplement que j'entends si souvent ces formules. En soi, elles ne mènent nulle part à moins de s'appuyer sur des objectifs plus précis.

Le sénateur Patterson : Dois-je comprendre que les objectifs et les valeurs que vous venez de décrire sont les mêmes pour les apprenants autochtones que pour les autres Canadiens?

M. Cappon : Absolument pas. C'est la raison pour laquelle j'ai dit, au début de mon exposé, que les normes et les objectifs devraient être équivalents pour les Canadiens autochtones. Les attentes devraient être tout aussi élevées. Nous n'admettons pas des attentes moindres pour un groupe quelconque de la population canadienne.

Le sénateur Patterson : Je vous remercie.

Le président : Je voudrais vous remercier tous deux au nom du comité. Le sénateur Campbell m'a demandé tout à l'heure combien de témoins devaient comparaître. Je lui ai dit que nous n'avions qu'un seul groupe et que, selon toute probabilité, nous aurions une réunion d'une heure.

M. Cappon : Je regrette de vous décevoir.

Le président : Non, vous ne nous avez pas déçus du tout. Je trouve personnellement que vous avez fait un excellent travail. Nous avons beaucoup apprécié la franchise de vos réponses et votre excellent exposé. Je voudrais vous remercier tous deux d'avoir comparu devant le comité.

J'espère que nous serons en mesure de reprendre contact avec vous si nous tombons sur des questions que vous pouvez nous aider à comprendre. Nous vous serions donc reconnaissants de laisser vos coordonnées à la greffière. Je suppose d'ailleurs qu'elle les a déjà de toute façon. Merci pour l'excellent travail que vous avez fait.

M. Cappon : Merci à vous. Nous avons tous les deux étaient très heureux de comparaître devant le comité ce soir et de répondre aux excellentes questions que vous nous avez posées. Nous avons beaucoup apprécié cette réunion.

Le président : Collègues, nous avons à nous occuper des travaux du comité. Il s'agit des prochains témoins à convoquer. Nous envisageons de faire revenir des représentants du ministère et de Statistique Canada afin d'obtenir un tableau statistique d'ensemble des résultats de l'éducation. Ce sera un premier groupe de témoins. Nous pensons aussi à demander à la vérificatrice générale de comparaître, de même qu'à Michael Mendelson, de l'Institut Caledon, qui est un centre d'étude et de réflexion, et à John Richards, de l'Université Simon Fraser, qui nous a été recommandé par Tom Courchene.

Si personne ne s'oppose à la liste de personnes que je viens d'énumérer, nous leur enverrons des invitations et essaierons de les faire comparaître la semaine prochaine, pour qu'il nous soit possible de poursuivre notre étude.

Le sénateur Stewart Olsen : J'aime bien entendre ces universitaires de haut calibre, mais j'aimerais aussi connaître le point de vue de ceux qui enseignent aux deux niveaux que nous examinons, qu'ils aient ou non le même degré d'excellence. Je préfère avoir le son de cloche de ceux qui travaillent sur le terrain.

Le président : Nous avons l'intention d'avoir les deux sons de cloche. Nous chercherons bien sûr à apprendre de première main ce qui se passe sur le terrain, mais nous voulons terminer cette étape avant de le faire pour qu'il nous soit possible, en parlant aux gens sur le terrain, de comparer ce qu'ils disent à ce que pensent les gens qui sont aux commandes.

Le sénateur Stewart Olsen : Je serais plutôt tentée de faire l'inverse. J'aimerais bien demander à quelques-uns de ces universitaires sur quoi se base leur réflexion compte tenu de ce qui se passe réellement dans les réserves. C'est mon point de vue.

Le président : Nous essaierons de procéder ainsi, sénateur Stewart Olsen, mais nous devons prévoir le programme de la semaine prochaine, alors que nous n'avons encore reçu aucune mesure législative. Il est plus facile de faire comparaître ces gens devant le comité en ce moment. Toutefois, nous tiendrons compte de ce que vous avez dit et agirons en conséquence.

Le sénateur Stewart Olsen : D'accord.

Le président : Y a-t-il d'autres observations?

Le sénateur Dyck : Nous serait-il possible de visiter la Première nation d'Onion Lake, qui a un programme d'immersion?

Le président : Onion Lake?

Le sénateur Dyck : Oui. Les témoins ont mentionné la Première nation d'Onion Lake ce soir. Elle a un programme d'immersion en cri.

Le président : Nous devrions savoir demain quel sera notre budget. Tout déplacement en dépendra.

Le sénateur Dyck : Nous pourrions alors nous entretenir avec des enseignants sur le terrain.

Le sénateur Raine : Où se trouve Onion Lake?

Le sénateur Dyck : En Saskatchewan. Nous pourrions en fait rencontrer les enseignants qui donnent ce programme. C'est une possibilité. Nous aurions en même temps la possibilité de nous familiariser avec un programme d'immersion.

Le président : Le comité de direction s'en occupera. J'ai voulu aborder la question ce soir pour que nous puissions l'examiner et avoir des témoins la semaine prochaine. Nous éviterions ainsi de perdre la semaine. Nous tiendrons compte de votre demande ainsi que des attentes des sénateurs membres du comité.

Si vous avez des propositions, je vous prie de les transmettre à la greffière le plus tôt possible. Si vous pensez à une personne que nous devrions faire comparaître, faites-le savoir à la greffière. Ensuite, le sénateur Dyck, le sénateur Brazeau et moi-même en discuterons au comité de direction.

Il faudrait que quelqu'un propose une motion. Convenons-nous d'utiliser la liste que j'ai présentée pour convoquer des témoins la semaine prochaine?

Le sénateur Campbell : Je le propose.

Le président : Est-ce d'accord?

Des voix : D'accord.

Le président : Y en a-t-il qui s'y opposent? La motion est adoptée. S'il n'y a rien d'autre, nous nous reverrons mardi. Nous essaierons de transmettre à vos bureaux le plus tôt possible les noms des témoins qui comparaîtront.

(La séance est levée.)


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