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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 11 - Témoignages - Séance du matin


EDMONTON, le jeudi 7 octobre 2010

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 9 h 2 pour étudier les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis ainsi que d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada (sujet : questions concernant l'éducation des Premières nations).

Le sénateur Gerry St. Germain (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : La séance est ouverte. Bienvenue à tous les sénateurs et au public.

Nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de tenir notre réunion d'aujourd'hui à Edmonton. Bien que, pour des considérations financières, il faille faire venir la plupart de nos témoins à Ottawa, nous constatons toujours que nous profitons d'une communion particulière avec les provinces et les territoires lorsque nous pouvons les rencontrer sur leur propre terrain. Nous arrivons d'une mission d'enquête en Saskatchewan, qui nous a beaucoup instruits, et il n'y a pas lieu de douter que la séance d'aujourd'hui sera tout simplement aussi productive.

Je suis Gerry St. Germain et j'ai l'honneur de présider le comité. Je suis originaire de l'Ouest, plus particulièrement du Manitoba, mais je suis maintenant établi en Colombie-Britannique, que je représente à titre de sénateur.

Notre comité est venu ici pour rassembler des renseignements pour l'étude qu'il a entreprise sur l'éducation primaire et secondaire des Premières nations. Nous espérons examiner d'éventuelles stratégies de réforme visant l'amélioration des résultats. Entre autres choses, notre étude se concentrera sur les sujets suivants : les accords et les partenariats tripartites dans le domaine de l'éducation, les structures de gouvernance et de prestation de services et, si nécessaire, les éventuels cadres législatifs. Jusqu'ici, nous avons tenu 10 réunions sur la question à Ottawa et, comme je l'ai dit, nous sommes très heureux de tenir la onzième, ici, en Alberta.

Ce matin, nous avons le bonheur d'accueillir deux groupes de témoins accomplis, qui connaissent très bien l'objet de notre étude. De 9 heures à 10 h 30, nous entendrons le Bureau du commissaire aux traités et la Federation of Saskatchewan Indian Nations. De 10 h 45 à 12 h 15, nos invités seront les Premières nations de l'Alberta signataires du Traité no 8, la Confédération des Premières nations signataires du Traité no 6, la Société de gestion du Traité no 7 et, à titre personnel, Mme Vivian Ayoungman.

Avant de passer aux témoignages, permettez-moi de présenter les membres du comité ici présents. À partir de ma gauche immédiate, se trouvent la vice-présidente du comité, le sénateur Lillian Dyck, de la Saskatchewan; le sénateur Elizabeth Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard; le sénateur Poirier, du Nouveau-Brunswick. À partir de ma droite, se trouvent le sénateur Nick Sibbeston, puis le sénateur Nancy Greene Raine de la Colombie-Britannique.

Chers membres du comité, accueillons ensemble notre premier groupe de témoins : l'honorable Bill McKnight, du Bureau du commissaire aux traités, et le chef Guy Lonechild de la Federation of Saskatchewan Indian Nations.

Messieurs les témoins, je vous demande de limiter le plus rigoureusement possible la durée de vos exposés à cinq à sept minutes, ce qui, je sais, est presque impossible. Nous aurons ainsi le temps d'échanger entre nous à loisir, et les sénateurs ainsi que les membres pourront vous poser des questions pendant la période réservée à cette fin.

Je demande également aux sénateurs de ne pas diluer leurs questions, de les faire aboutir, parce que nous avons beaucoup d'information à absorber aujourd'hui.

Comme je devrais être le premier à suivre ces conseils et à savoir se taire, je cède, sans plus de cérémonie, la parole à l'honorable Bill McKnight.

L'honorable Bill McKnight, C.P., commissaire aux traités, Bureau du commissaire aux traités de la Saskatchewan : Merci, monsieur le président. Mesdames et messieurs les sénateurs, bonjour. J'ai eu l'occasion de visiter certains d'entre vous, à titre privé, en Saskatchewan. J'en connais d'autres parmi vous depuis plusieurs années, plus que je ne le reconnaîtrai publiquement, monsieur le président. Je suis accompagné de Harry Lafond, directeur du Bureau du commissaire aux traités de la Saskatchewan.

Nous sommes très heureux de votre invitation et de l'occasion que vous nous accordez. Nous avons hâte de participer au dialogue qui suivra. Nous sommes également pleinement conscients du programme très chargé. Ma déclaration liminaire sera donc brève. Nous devrions donc avoir le temps de dialoguer ensuite.

D'entrée de jeu, je tiens à préciser que je m'exprime uniquement au nom du Bureau du commissaire aux traités, organisme indépendant et neutre créé par la Federation of Saskatchewan Indian Nations (ou FSIN) et le gouvernement du Canada. Son mandat est de faciliter les discussions sur la mise en œuvre des traités.

L'éducation est un droit important conféré par traité, et nous avons entrepris une recherche et un dialogue approfondis avec la FSIN, avec le Canada et avec la Saskatchewan afin d'améliorer l'efficacité du système d'éducation pour les enfants des Premières nations. M. Lafond et ses collègues qui travaillent sur ce dossier possèdent une vaste expérience à tous les niveaux de l'éducation provinciale et de l'éducation donnée aux enfants des Premières nations en Saskatchewan.

Nos idées maîtresses sont comme suit : collectivement, nous connaissons notre devoir, mais nous ne l'accomplissons pas. Notre tâche collective est de collaborer ensemble en vue d'un changement systémique. À cette fin, toutes les parties, les Premières nations, le Canada et la Saskatchewan, doivent se concerter.

Le Canada ne devrait pas s'imaginer qu'il peut trouver, mettre en œuvre ou appuyer seul les changements. Ce serait revenir à un passé paternaliste, que nous nous efforçons, assez bien d'ailleurs, d'oublier.

En Saskatchewan du moins, les acteurs que je viens de nommer sont présents à la table de concertation sur les traités du Bureau du commissaire aux traités. Nous avons besoin de votre appui pour que la concertation se poursuive.

Ce forum d'action collective découle d'un traité. L'action collective doit se concentrer sur un changement systémique en éducation. Nous ne prétendons pas parler au nom de tout le Canada et, de fait, nous recommandons différentes approches pour différentes régions. La totalité du territoire de la Saskatchewan est visée par des traités. Ce n'est pas le cas d'autres régions du pays. Différentes solutions exigent des occasions différentes et une reconnaissance des différentes régions tout comme, dans d'autres domaines, le gouvernement du Canada reconnaît l'existence de différentes régions.

Dans notre mémoire, nous formulons neuf recommandations. La première consiste à miser sur les forces qui existent. Il s'agit notamment du rôle privilégié que nous accordons aux aînés; la naissance et l'importance des programmes axés sur la langue et la culture; la collaboration et la participation de plus en plus poussées entre les autorités scolaires des Premières nations, telles que les conseils tribaux, à la prestation de services améliorés de soutien; les échanges entre ces mêmes autorités et le système provincial.

La deuxième recommandation vise à améliorer les pratiques fédérales en vue du changement systémique, y compris : plus d'aide pour la capacité institutionnelles et son renforcement au-delà du niveau scolaire individuel; le recours accru aux subventions globales — c'est-à-dire la réduction du financement par projet; la mise sur pied de systèmes de reddition de comptes aux Premières nations; la mise en place de compétences dans la bureaucratie du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC).

La troisième recommandation vise à favoriser la construction identitaire dans les collectivités et les écoles des Premières nations. Pour cela, on ferait appel aux aînés, on appuierait le développement de la langue et de la culture et on organiserait des cérémonies traditionnelles.

La quatrième recommandation consiste à renforcer le développement du leadership en éducation, grâce à l'établissement de programmes à cette fin.

La cinquième recommandation vise à définir et à appliquer les caractéristiques de la bonne gouvernance fondées sur les cinq critères suivants : institutions et politiques stables; mécanisme équitable et efficace de résolution des différends; séparation de la politique et de la gestion; développement d'une bureaucratie compétence; concordance culturelle.

Sixième recommandation : dans la prestation de services, on devrait appuyer l'adoption d'une approche équilibrée à l'égard de la langue et de la culture dans le secteur de l'éducation, et on devrait appliquer aux écoles des Premières nations les constatations publiées par les chercheurs en éducation concernant l'efficacité des écoles et l'amélioration des résultats scolaires.

En vertu de la septième recommandation, sur la réforme législative, il faudrait accepter l'appel public de l'Assemblée des Premières Nations visant à mettre en place un processus destiné à remplacer la Loi sur les Indiens. L'éducation serait un bon endroit par où commencer.

La huitième recommandation est de chercher à conclure des accords tripartites, mais ces accords ne devraient pas être une exigence pour obtenir des fonds.

Enfin, la neuvième recommandation est que la Couronne et les Premières nations entament des discussions à la table de concertation sur les traités, en Saskatchewan, visant à élaborer, collectivement, un plan d'action stratégique, pour faire place au changement systémique dans l'éducation des Premières nations en Saskatchewan.

Je sais que nous avons débordé les grandes questions que le comité a demandé d'examiner en ce qui concerne les lois s'appliquant à la prestation des services et les accords tripartites. Nous espérons que vous trouverez du bon dans nos observations. Nous sommes convaincus que seule une action collective soutenue, tendant vers un changement systémique dans l'éducation des enfants et des jeunes des Premières nations, permettra les transformations dont ont besoin les Premières nations et à tous les Canadiens.

Je vous remercie de l'occasion que vous m'avez donnée. J'ai hâte de pouvoir dialoguer ensuite avec vous. Je confirai à M. Harry Lafond, le directeur de mon bureau, le soin de répondre aux questions difficiles.

Le président : Très bien. Merci.

Chef Lonechild, vous ferez-nous le plaisir de nous présenter M. Hurton?

Guy Lonechild, chef, Federation of Saskatchewan Indian Nations : Bien sûr.

Merci, monsieur le président et merci à tous les sénateurs ici présents. Je suis très heureux de vous rencontrer.

Aujourd'hui, je suis accompagné par Gerry Hurton, directeur de nos services d'éducation à la FSIN.

En ma qualité de chef de la FSIN, je représente 74 Premières nations de la Saskatchewan. Nous avons un Sénat qui ressemble beaucoup à celui du Canada, un secrétariat à la condition féminine, un conseil de la jeunesse, un conseil des aînés et, bien sûr, beaucoup de chefs estimés, partout dans la province, qui se réunissent régulièrement dans la province.

D'abord, j'aimerais vous saluer et exprimer ma reconnaissance au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Je pense qu'il est absolument nécessaire que vous examiniez des stratégies pour la réforme des réseaux d'écoles primaires et secondaires des Premières nations, à la grandeur du pays. Depuis longtemps, le statu quo est néfaste à nos élèves, dans les réserves comme à l'extérieur.

Dans un mémoire adressé à votre comité, la FSIN a déclaré que, en Saskatchewan, les Premières nations travaillent à la réforme de leur système d'éducation, de la maternelle à la 12e année, presque depuis la signature des traités. Nous avons fait l'inventaire des problèmes non encore résolus et nous vous l'avons présenté en 1970, puis, de nouveau, en 1972, dans la déclaration de principe intitulée La maîtrise indienne de l'éducation indienne.

Revenons à toute vitesse dans le présent. Peu de choses ont changé. Quarante ans plus tard, moins d'élèves des Premières nations terminent leur 12e année que les autres Canadiens, toutes proportions gardées. Pourquoi? Quels sont les obstacles? De quelles réussites pouvons-nous nous servir? C'est la question du jour.

Nous avons besoin d'un changement véritable, qui transforme, d'une maîtrise réelle de l'éducation des Premières nations par les Premières nations et non pas qu'on nous cède le contrôle administratif de l'éducation de nos élèves selon la vision de quelqu'un d'autre.

Le premier obstacle se situe au niveau de la langue et de la culture. Nous devons instiller la langue et la culture des Premières nations dans le climat d'apprentissage; c'est indispensable pour retenir nos élèves, mobiliser nos collectivités.

Quand nos ancêtres ont signé les traités, on ne leur a pas dit que nos valeurs, notre savoir et notre langue ne feraient pas partie de ce qui s'enseignerait à l'école. Leur vision n'était pas de remplacer leur langue et leur culture par les voies de la connaissance de l'Europe occidentale. Pour eux, l'éducation avait un double objectif : l'enseignement de la lecture et de l'écriture à leurs enfants; le maintien de leurs propres connaissances traditionnelles. Ils pensaient gagner sur les deux tableaux. Je pense que c'est ce que nos enfants méritent.

Aujourd'hui, cela signifie développer et assurer le financement du programme d'études de langue, depuis la maternelle jusqu'à la 12e année. Les écoles francophones ont, vis-à-vis des élèves, à peu près le même mandat que les nôtres dans la promotion de leur identité culturelle et du sens de leur appartenance à la communauté canadienne française, le renforcement de leur fierté d'être francophones, l'aide à leur donner pour qu'ils se définissent comme membres d'un groupe dynamique et diversifié et leur développement en les préparant à vivre dans un monde interdépendant et en constante évolution.

Le modèle et le niveau de financement des écoles francophones sont considérablement supérieurs à ceux que l'on accorde à celles des Premières nations.

Nous devons également faire entrer les aînés des Premières nations dans les classes. Cela signifie mettre au programme l'étude des traités. Cela signifie également concevoir un système d'éducation fondé sur ce qui avait été envisagé dans les traités.

Nous pourrions nous inspirer du programme linguistique des Premières nations Onion Lake et du Lac La Ronge, en raison de leur grand succès, également du programme d'études mis sur pied par l'entremise du programme Gift of Language, dont le financement a tari. Nous avons besoin de l'aide financière et de la volonté politique qui produiront le déclic.

La langue et la culture butent sur une deuxième difficulté : le financement comparable des écoles des Premières nations. En moyenne, ces écoles ont reçu 40 p. 100 de moins de financement que les écoles de la province. Nos écoles ont besoin de financement pour appliquer le programme d'études et le programme de langues améliorés. Elles ont besoin d'un financement supplémentaire uniquement pour l'achat des manuels permettant de livrer le programme d'études provincial dans leurs classes.

Pour les années intermédiaires, la province a lancé un nouveau programme d'études scientifique. Le ministère et les Premières nations se sont efforcés d'y intégrer les connaissances et les voies de la connaissance des Premières nations. Nous avons totalisé les coûts des nouveaux textes et de la formation des enseignants en cours d'emploi et nous les avons présentés au MAINC. Le ministère nous a répondu qu'il n'avait pas d'argent.

En Saskatchewan, le salaire des enseignants ne cesse d'augmenter, et la connexion avec Internet est de piètre qualité. Pour vraiment améliorer l'éducation sur les réserves, les écoles des Premières nations devraient au moins bénéficier d'un traitement équitable par rapport à celles de la province, ce qui signifie recevoir un financement comparable. Faisons sauter le plafond arbitraire de 2 p. 100 imposé à l'éducation, dans les Premières nations, en 1996, soit il y a près de 15 ans.

Un troisième obstacle, c'est que nos écoles ont besoin de la prestation de services convenables de second niveau, et nous devons pouvoir fournir des services de soutien à nos écoles. Par exemple, le conseil tribal File Hills Qu'Appelle possède un excellent modèle de prestation de ces services, qu'on devrait imiter. Le Grand Conseil de Prince Albert possédait une organisation très réussie de gestion régionale de l'éducation spécialisée. Malheureusement, dans les deux cas, le financement instable est très inférieur à celui que reçoivent les divisions scolaires de la province.

Plus tard aujourd'hui, vous parlerez à l'un de nos fournisseurs de services de second niveau. Le Northwest Nations Education Council vous parlera de ses frustrations. Je sais que l'argent, à lui seul, ne peut pas être une solution, mais le sous-financement garantit la répétition indéfinie des échecs.

On nous conseille souvent de nous joindre au réseau provincial. Eh bien, en Saskatchewan et au Manitoba, les taux de diplomation et les résultats scolaires ne sont pas meilleurs, d'après les renseignements fournis par le MAINC. En fait, ils sont pires. Plus important encore, les Premières nations de la Saskatchewan ne partent pas de zéro. Les Premières nations de Prince Albert ont offert des services de soutien limités à leurs écoles, au début des années 1980, y compris l'évaluation des enseignants et les services de psychologues scolaires. Neuf conseils tribaux fournissent désormais des services de second niveau comme des supports pédagogiques, des supports aux programmes de mathématique et des disciplines linguistiques, des supports linguistiques ainsi que des services d'éducation spécialisée.

En Saskatchewan, les Premières nations ont reconnu l'importance du financement de l'éducation spécialisée bien longtemps avant qu'il n'existe un programme fédéral dans ce domaine. L'argent destiné à l'éducation spécialisée provenait des budgets consacrés aux écoles. Lorsque les dirigeants du Programme national d'éducation spécialisée ont annoncé que cet argent était définitivement affecté à l'éducation spécialisée, le financement de base des écoles des Premières nations de la Saskatchewan s'est retrouvé amputé de près de 16 millions de dollars.

Les organismes scolaires des Premières nations, qui ne se limitent pas aux conseils tribaux, cherchent à établir des partenariats avec les divisions scolaires de la province et d'autres partenaires. Les divisions scolaires de la province reçoivent un financement plus généreux, mais elles n'ont pas de surplus inemployé ni de personnel excédentaire qui pourraient servir à l'appui des écoles des Premières nations.

Nos fournisseurs de services de second niveau doivent être financés de façon équitable par rapport aux organisations de la province. Nous ne possédons pas de division scolaire, mais les Premières nations de la Saskatchewan ont longtemps connu les bienfaits du travail collectif pour améliorer l'éducation de nos enfants.

Les Premières nations de la Saskatchewan ont d'autres structures d'enseignement que vous devez connaître. Par l'entremise de la Federation of Saskatchewan Indian Nations, un comité de directeurs régionaux de l'enseignement se réunit quatre à six fois durant l'année scolaire pour discuter des défis auxquels nous sommes confrontés en matière d'éducation. Il y a aussi un comité de coordonnateurs régionaux de l'enseignement postsecondaire qui se réunit régulièrement pour soutenir le programme d'enseignement postsecondaire.

Ces comités se rapportent au secrétariat de l'éducation de la FSIN et aux chefs de la Saskatchewan par l'entremise de la Saskatchewan Indian Education and Training Commission. Les trois établissements d'enseignement des Premières nations (l'Université des Premières nations du Canada, le Saskatchewan Indian Institute of Technologies et le Collège culturel des Indiens de la Saskatchewan) ont tous vus le jour grâce à la coopération des Premières nations de la Saskatchewan.

Les Premières nations travaillent également ensemble dans le but de préserver leurs langues. L'organisation Gift of Language n'est qu'un des groupes qui se portent à la défense des langues des Premières nations. Les Premières nations Nakota, Lakota et Dakota sont un autre exemple de Premières nations qui ont uni leurs forces pour empêcher la disparition de leur langue.

Nous travaillons fort pour veiller à ce que les processus adéquats soient en place pour le système d'éducation des Premières nations. Nous avons préparé une proposition intitulée « Action Plan on Education in the Context of Treaty » (plan d'action sur l'éducation dans le contexte des traités), qui se penche sur l'élaboration d'un système d'éducation pour les Premières nations. La première étape a consisté à tenir des consultations dans cinq régions différentes auprès des aînés de chacun des groupes linguistiques, afin de recueillir leur point de vue sur ce que nous devrions faire à propos de notre système d'éducation. Pour la prochaine étape, nous mènerons des discussions avec les conseils de bande et les organismes voués à l'éducation des Premières nations, pour tenter de savoir à quoi devrait ressembler le système d'éducation des Premières nations.

Il y a quelques questions clés à se poser : quel est le rôle des Premières nations? Quel est le rôle des conseils de bande et des organismes voués à l'éducation? Quel est le rôle de la Federation of Saskatchewan Indian Nations? Il faut aussi se demander quel est le rôle du MAINC, et quel est le rôle de la province.

Nous ne pensons pas que notre système doive être le reflet exact d'un système provincial, et pourquoi devrait-il l'être? Il nous faut un système qui répond aux besoins de nos étudiants. Nous n'avons pas besoin d'un système qui correspond à l'idée que quelqu'un d'autre se fait de l'éducation. Je suis heureux de vous informer que nous travaillons actuellement à la conclusion d'ententes avec les gouvernements fédéral et provincial à cette fin.

Nous sommes sur le point de signer un protocole d'entente bilatéral avec la province de la Saskatchewan, en vue de travailler ensemble dans l'intérêt des étudiants des écoles des Premières nations et des écoles provinciales. Nous travaillons également à former un groupe de travail trilatéral qui aura le mandat de se pencher sur les questions relatives à la langue, au programme d'enseignement, à la connectivité et au financement.

Un autre élément à considérer pour encourager les étudiants à poursuivre leurs études, c'est d'offrir de la formation pratique en classe. Le faible taux de participation au marché du travail est un problème de taille pour les Premières nations en Saskatchewan. Il faut favoriser cette participation dans la salle de classe. Le programme pour les compétences et la formation des Autochtones offert à Regina produit d'excellents résultats. Prenons exemple sur ce modèle.

Nous pouvons prendre appui sur les structures et les organisations que nous avons établies. Les Premières nations ont simplement besoin de la capacité et des ressources nécessaires pour se mettre à la tâche.

Comme le temps me presse, je vais conclure ma présentation là-dessus. Nous sommes disposés à répondre à vos questions.

Le président : Merci à nos témoins pour leurs excellentes présentations.

J'ai une petite question à vous poser, chef Lonechild. Combien y a-t-il de Premières nations en Saskatchewan, et combien y a-t-il de conseils de bande, et adhèrent-ils tous aux recommandations que vous nous soumettez ce matin?

M. Lonechild : Jusqu'ici, nous avons rencontré les représentants de la commission de l'éducation et de la formation. Sur les dix conseils de bande qui ont pris part aux discussions d'hier à ce sujet, neuf ont appuyé les recommandations — un seul s'est abstenu, le Grand conseil de Prince Albert, compte tenu des nombreux problèmes auxquels il est confronté en matière d'éducation.

Nous représentons les 74 Premières nations présentes en Saskatchewan. Je m'attends à ce que nous sachions d'ici la fin du mois si tous souhaitent aller de l'avant avec l'approche proposée. Je crois que d'autres discussions seront tenues avec l'aide d'Affaires indiennes et du Nord Canada. Nous avons demandé au ministre les moyens pour le faire.

Le président : J'ai une question à poser rapidement à M. McKnight. À mon avis, vous avez été un très bon ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, et vous nous avez dit qu'il fallait perfectionner l'expertise, mais vous avez poursuivi en affirmant qu'il faudrait éliminer complètement le volet éducation du mandat du MAINC. Je ne sais pas si c'est bien ce que vous avez dit, mais c'est ce que j'ai compris.

Selon votre expérience, quelle serait la meilleure façon de procéder brièvement à l'égard du MAINC?

M. McKnight : Permettez-moi d'abord de préciser que si c'est bien ce que j'ai dit, ce n'était pas mon intention.

Le président : J'ai très probablement mal interprété vos paroles.

M. McKnight : Je crois, monsieur le président, que nous avons besoin d'une plus grande expertise au sein du MAINC, mais cela ne signifie pas pour autant qu'il faille imposer des restrictions législatives supplémentaires pour modifier la définition de « droit issu d'un traité ».

Comme vous le savez sans doute, la Loi sur les Indiens était en préparation alors qu'on signait encore des traités en Saskatchewan, et les chefs de l'époque et les conseillers qui ont accepté les traités ne le savaient pas.

Je crois que l'éducation est un bon moyen de s'éloigner de cette loi de concept européen pour régir ce que notre Constitution considère comme un droit inhérent, c'est-à-dire l'éducation. Je crois fermement que le Canada doit apporter son soutien, et le ministère doit détenir l'expertise qui permettra au Canada de travailler avec des partenaires comme la FSIN et la province de la Saskatchewan, mais je ne recommanderais pas d'adopter une loi à cette fin.

Le président : Merci. Des questions?

Le sénateur Poirier : Bonjour, et merci pour votre présentation. Je n'ai qu'une ou deux questions pour vous pour le moment. J'en aurai peut-être d'autres à vous poser au fil de la discussion.

Vous avez parlé du modèle des écoles francophones et de la façon dont elles ont pu obtenir du financement de contrepartie. Vous preniez exemple sur ce modèle. Y a-t-il des écoles francophones dans la province, et si oui, avez- vous rencontré leurs représentants pour savoir comment ils ont réussi à en arriver là? Avez-vous vérifié avec eux si des changements législatifs ont dû être apportés, et si oui, est-ce que les changements ont eu lieu au niveau provincial ou fédéral? J'imagine que ce serait plus du ressort de la province que du gouvernement fédéral. Comment est-ce arrivé? Y a-t-il des discussions en cours à ce sujet?

M. Lonechild : Les dépenses moyennes sont d'environ 17 000 $ ou presque 18 000 $ par étudiant pour le programme d'enseignement francophone. Nous estimons que nous devrions bénéficier du même type de ressources, mais à l'heure actuelle, la moyenne se situe à 4 700 $, dans certains cas, par étudiant pour les établissements des Premières nations. L'écart est très grand.

En 1986, ou à peu près, la province de la Saskatchewan a instauré des changements législatifs pour faire en sorte que les écoles francophones offrent des cours d'immersion française avec le financement reçu. Je vais laisser M. Hurton vous en parler plus en détail.

Gerry Hurton, directeur exécutif de l'enseignement, Federation of Saskatchewan Indian Nations : Tout revient à la façon dont les gens interprètent la Constitution, et la réponse que l'on obtient généralement quand on aborde la question avec les représentants provinciaux, c'est que la communauté francophone a le droit, en vertu de la Constitution, d'avoir accès à des écoles qui offrent un enseignement qui cadre avec sa langue et sa culture, mais ce concept ne semble pas s'appliquer aux Premières nations.

Nous ne sommes pas de cet avis, mais j'imagine qu'il faut se demander si les gens considèrent que l'article en question de la Constitution est exhaustif ou vide en ce qui a trait aux droits inhérents des Premières nations.

Nous savons que l'établissement de la division scolaire francophone est encore relativement récent dans la province. Nous avons eu des discussions avec le gouvernement provincial, et à un moment donné, plusieurs divisions scolaires provinciales ont fait savoir qu'il ne serait pas très difficile pour la province d'utiliser le cadre actuel pour permettre l'enseignement des langues des Premières nations dans les écoles provinciales, car il suffit qu'un nombre déterminé de parents en fassent la demande. Les divisions scolaires provinciales affirment qu'il n'y aurait pas de changements importants à faire pour permettre aux Premières nations, les Dénés, les Cris, les Saulteaux, les Dakotas ou les Lakotas, de faire de même au sein du système scolaire provincial.

Le sénateur Poirier : Que manque-t-il? Est-ce la volonté politique qui fait défaut?

M. Hurton : Oui, la volonté politique et le financement. Ce qui complique en partie les choses, c'est que nous sommes pris dans une dispute de compétence, à savoir si cela relève du gouvernement fédéral ou provincial. À notre avis, la question est effectivement de compétence fédérale, dans une certaine mesure, mais nous sommes aussi des résidents de la Saskatchewan.

Les paiements de transfert provenant du gouvernement fédéral tiennent compte de la population autochtone, mais la province décide de façon arbitraire d'arrêter son aide financière aux frontières de la réserve.

Le sénateur Poirier : Savez-vous quels sont les pourcentages d'étudiants francophones et d'étudiants des Premières nations dans la province?

M. Hurton : Je ne pourrais pas vous donner de chiffre pour les étudiants francophones, mais on compte environ 20 000 étudiants des Premières nations dans la province. Approximativement 16 000 d'entre eux fréquentent une école dans les réserves, et les quelque 4 000 autres étudient à l'extérieur de la réserve.

Le sénateur Poirier : Si le soutien financier et la volonté politique y étaient aujourd'hui, que feriez-vous en premier pour concrétiser cette approche? Faudrait-il adopter une loi ou un règlement? Si tout à coup vous aviez l'argent et l'appui politique nécessaires, que feriez-vous demain matin?

M. Hurton : La législation est un des facteurs à considérer. Il faut revoir la façon dont nous sommes gouvernés; l'article qui veut que nous suivions le programme provincial est on ne peut plus imprécis, et le MAINC en fait sa propre interprétation. Il faudrait probablement adopter une loi qui définirait clairement la structure de gouvernance que nous devrions suivre. Toutefois, il faut comprendre que la principale raison pour laquelle nous avons mis en place le plan d'action sur l'éducation dans le contexte des traités (APECT) est que nous devons décider comment sera structuré notre système. C'est donc le plan d'action qui aurait la priorité. Il nous faudrait mener à bien ce projet pour élaborer notre système, pour savoir exactement comment nous voulons procéder.

Tout le monde a eu des idées, mais nous n'avons pas eu les ressources nécessaires. Et quand on élabore, je n'oserais pas parler de système, mais quand on délègue la responsabilité de l'éducation à quelque 70 bandes, on ne peut pas se permettre de reprendre soudainement les rênes et d'imposer ce nouveau régime à tout le monde. Les bandes ont mis en place différents programmes, alors nous devons mener à bien ce processus de consultation pour connaître la direction à prendre.

M. Lonechild : L'écart se creuse de plus en plus dans les normes provinciales, et nous avons appris que le gouvernement fédéral avait financé une garderie à temps plein, c'est-à-dire des programmes de jour à temps plein pour les écoles provinciales. L'écart se creuse de plus en plus en ce qui a trait au développement des enfants.

Nous croyons qu'il est particulièrement important d'investir dans les premières années de nos enfants, alors si nous sommes continuellement désavantagés à ce niveau, nous voudrions rendre les règles du jeu équitables et offrir à nos étudiants la même expérience dont bénéficient les étudiants des écoles provinciales. C'est certainement un des fossés que nous tenterions de combler immédiatement.

Le sénateur Poirier : Encore là, si le soutien financier et la volonté politique y étaient, toutes les Premières nations seraient-elles prêtes à travailler ensemble, ou est-ce que chaque bande travaillerait seule de son côté?

M. Lonechild : Quand nous aurons entamé ce dialogue avec les conseils de bande sur le genre de services qu'ils pourraient offrir et sur la structure de gouvernance, nous serons en mesure de déterminer si les bandes sont prêtes à collaborer.

Les réalités géographiques ne sont pas les mêmes dans le nord et le sud de la Saskatchewan. Les deux modèles offrent des pratiques exemplaires, et je pense que nous pourrions miser sur un modèle d'affaires qui adhère au principe de la maîtrise indienne de l'éducation indienne, et nous pourrions discuter de l'administration et la gouvernance afin de créer des collaborations entre les écoles des Premières nations ou envisager des fusions.

Le sénateur Poirier : Selon vous, si on devait rédiger une nouvelle loi sur l'éducation, qu'est-ce que devrait faire le gouvernement du Canada pour respecter les engagements pris dans le cadre des traités?

M. Lonechild : Si nous pouvions établir nos modèles de gouvernance et bénéficier du même soutien financier que les écoles provinciales de la maternelle à la 12e année, nous pourrions nous attendre à ce que le gouvernement fédéral intervienne au niveau des enjeux clés quand cela nous paraît pertinent.

Je pense que dans l'intérêt de l'expérience scolaire, nous devons nous assurer d'avoir toutes les connexions technologiques nécessaires, Internet, l'apprentissage à distance. En Saskatchewan, nous avons Credenda, une école virtuelle qui offre des cours en ligne. Nous pourrions ainsi non seulement rattraper les normes provinciales, mais aussi faire preuve de vision face à l'éducation et au défi de taille qui nous attend. Je tiens à le mentionner.

D'ici 2016, une personne sur quatre en Saskatchewan aura entre 20 et 30 ans. D'ici 2045, 40 p. 100 ou près de 50 p. 100 de la population fera partie de ce groupe d'âge, alors nous devons faire quelque chose dès maintenant pour chaque étape du développement de nos enfants, du niveau préscolaire à l'école primaire, jusqu'à l'école secondaire.

Le sénateur Poirier : Ces statistiques ne font pas seulement référence à la population des Premières nations; vous parlez de l'ensemble de la population de la Saskatchewan, n'est-ce pas?

M. Lonechild : Oui. Je parle des prévisions démographiques pour le pourcentage de la population provinciale que représentent les Premières nations et les Métis.

Le président : M. Hurton a indiqué qu'en ce moment vos 74 bandes reçoivent pour la plupart un financement distinct de la part du MAINC pour leurs programmes d'éducation. Est-ce exact?

M. Hurton : Oui.

Le président : Et certaines ont uni leurs forces sous l'égide d'un conseil de bande pour les questions d'éducation?

M. Hurton : La plupart des écoles des Premières nations font partie d'un conseil de bande qui offre, de façon restreinte, des services de second niveau en matière d'éducation.

Le président : C'est tout un défi que vous devez relever. C'est typique du gouvernement fédéral. Quand les réserves des Premières nations ont été établies, le gouvernement a voulu créer de toutes petites entités en envoyant tout le monde chacun de son côté pour pouvoir continuer à tout contrôler à coups d'argent et de subventions, plutôt que de leur donner un coup de pouce.

Harry Lafond, directeur exécutif, Bureau du commissaire aux traités de la Saskatchewan : J'aimerais apporter quelques précisions au sujet de la question du sénateur Poirier concernant la législation.

Il est important de comprendre que toute loi sur l'éducation déposée devant le Parlement devrait permettre l'application des traités. L'ancien commissaire, le commissaire Arnot, a produit un rapport mettant de l'avant des recommandations pour l'application des traités, et ce rapport a été accepté par les deux parties.

Si c'est si important, c'est que nous sommes actuellement régis par une loi extrêmement normative, c'est-à-dire la Loi sur les Indiens, et une loi aussi normative que celle-là fait en sorte qu'Ottawa tente d'imposer des solutions à nos collectivités.

Nous avons besoin d'une loi qui permet de reconnaître les établissements en place dans nos collectivités et qui donnent l'occasion aux Premières nations de s'impliquer et de voir leur travail récompensé en ce qui concerne l'organisation du système d'éducation pour nos enfants, tant dans les réserves qu'à l'extérieur des réserves. Il est extrêmement important de porter attention au type de loi que l'on veut adopter si on souhaite apporter les changements systémiques à long terme et les transformations dont le chef a parlé. À mon avis, cela fait nécessairement partie de la réalité que nous voulons installer à long terme.

Le président : Vous vous rendrez compte que la plupart des membres de ce comité pensent qu'il est temps d'aider plutôt que d'imposer quoi que ce soit. Par le passé, la Loi sur les Indiens a fait en sorte que le gouvernement a imposé ses solutions plutôt que d'aider la population.

Le sénateur Dyck : Ma question porte en fait sur ce que vous venez de nous dire, monsieur Lafond. Selon moi, un des plus grands problèmes, c'est que bien que les Premières nations aient un droit inhérent à l'éducation, le MAINC suit la Loi sur les Indiens et ne reconnaît pas vraiment ce droit.

Ce que vous avez fait valoir, je crois, c'est que, si on avait adopté une loi visant à reconnaître les structures dont vous avez parlé, monsieur Lonechild, en faisant référence à l'APECT, ces structures seraient reconnues de la même manière que les systèmes provinciaux; elles seraient devenues des personnes morales. Est-ce que c'est ce que nous visons? Vous allez devoir pardonner mon manque de connaissances en droit et en éducation. Si elles étaient considérées sur le même pied que les entités provinciales — non pas qu'elles aient nécessairement la même structure, mais qu'elles jouissent de la même reconnaissance juridiquement contraignante et des mêmes droits légaux —, vous auriez l'autorisation légale de gérer les structures et vous disposeriez peut-être alors d'un meilleur système de gestion des fonds attribués aux Premières nations pour l'éducation.

Il semble qu'en ce moment les disparités soient attribuables au fait que les politiques sont établies par le ministère plutôt que par de nouvelles entités légalement constituées qui seraient reconnues comme étant distinctes du ministère.

M. Lafond : En ce moment, les autorités des Premières nations fonctionnent en tant qu'unités individuelles ou en tant que conseils tribaux ou encore en tant qu'organes administratifs d'un ministère fédéral, en vertu de ses politiques. Ce qu'il faut, c'est une loi habilitante qui modifierait le statut de ces entités de sorte qu'elles obtiennent une position juridique leur permettant de travailler avec la province et le gouvernement fédéral.

À l'heure actuelle, cela n'existe pas, et c'est ce qui constitue une partie du problème, une grande part du problème. Nous ne pouvons pas travailler avec la province en tant que partenaires puisque nous ne sommes pas une entité reconnue.

Le sénateur Dyck : Je me demande si quelqu'un pourrait dessiner un diagramme. Je fais partie de ces personnes qui ont toujours besoin de voir un diagramme avec des noms.

Nous pouvons envisager que ces entités administratives deviennent des organisations indépendantes légalement reconnues, qui seraient donc distinctes du ministère. Si vous étiez disposés à établir un diagramme et en mesure de le faire, vous pourriez nous le transmettre plus tard.

M. McKnight : Je croyais que nous avions un diagramme. Nous en avons présenté un au groupe de travail sur la table de négociation des traités en matière d'éducation, et je croyais l'avoir apporté, mais ce n'est pas le cas. Je suis désolé, madame le sénateur, mais je crois qu'on peut rapidement en faire parvenir une copie à la greffière qui pourra la distribuer aux honorables sénateurs.

Le président : Ce serait excellent, car, comme vous l'avez si bien fait remarquer dans votre exposé, monsieur McKnight, le comité doit se pencher sur d'autres enjeux parce que certains domaines ne sont pas visés par des traités, et cela constitue tout un défi.

Je crois que lorsque des traités existent, cela facilite les choses, et aux yeux de bien des personnes, il est clair que l'éducation constitue une obligation issue de traités. Il pourrait s'agir d'un bon point de départ pour nous, car il pourrait s'avérer un peu risqué d'essayer de tout accomplir d'un seul coup puisque cela permettrait à ceux qui veulent éviter la situation d'agir d'une manière qui va à l'encontre de ce que nous visons.

M. McKnight : Monsieur le président, si vous me le permettez, j'aimerais continuer dans cette veine. Le chef Lonechild et M. Lafond ont tous les deux expliqué ce qui pourrait être fait par voie législative. Si la loi est fondée sur un traité, le droit à l'éducation serait reconnu, à mon avis, et les pouvoirs que détient actuellement le ministère ou le gouvernement du Canada seraient attribués aux peuples qui ont ce droit à l'éducation, leur permettant ainsi de prendre des décisions en matière d'éducation, au profit de leurs propres nations, et, par conséquent, de tous les citoyens canadiens.

Le président : Pensez-vous que si cela se produisait, des critères en matière de reddition des comptes devraient être établis?

M. McKnight : Vous devriez poser la question au chef Lonechild.

M. Lonechild : Je vous remercie beaucoup. Étant donné les taux actuels de 39 p. 100 et de 44 p. 100, nous ne rendons nullement service à nos élèves si nous ne nous employons pas à accroître les taux d'obtention de diplôme. C'est pourquoi nous préconisons une reddition des comptes réciproque. Les Premières nations et les systèmes scolaires provinciaux doivent faire beaucoup mieux, mais nous savons aussi que le gouvernement fédéral a un grand rôle à jouer étant donné le manque de financement.

C'est ce que j'espère — c'est-à-dire qu'une approche fondée sur un traité garantirait des pouvoirs, des appuis législatifs, des normes et peut-être même la participation à la prise de décisions portant sur les moyens d'accroître la réussite des élèves des Premières nations des écoles de la province, en tenant compte de l'expérience en matière d'éducation dans les réserves. Il s'agit là d'un des principaux éléments, et c'est ce que nous demandons.

M. McKnight : Il y a un autre point à aborder en ce qui concerne la reddition des comptes, et je vais demander à M. Lafond de parler de notre petit bureau et du processus lié à la reddition des comptes.

Cette tâche est d'une grande ampleur pour les Premières nations, qui consacrent énormément de temps à répondre à des questions provenant du ministère, qui sont propres à un organisme qui exerce un contrôle plutôt qu'à un partenaire. M. Lafond se charge de tout cela pour moi et il accomplit un excellent travail à cet égard.

Le président : Il n'est pas encore chauve, alors ce ne doit pas être tellement difficile.

M. Lafond : Je devrais être là-bas en train d'écrire un rapport.

Cela fait partie de la relation malsaine qui existe en ce moment entre le ministère et les Premières nations, et précisément des bureaux comme le nôtre, où les gens qui reçoivent les fonds sont devenus pratiquement allergiques à la reddition des comptes et méfiants.

J'ai fait des calculs rapides hier dans le contexte de la nouvelle stratégie de mesure du rendement que le ministère va mettre en place. On voulait savoir ce qu'il en coûtera à notre bureau pour effectuer la collecte des données dont nous ferons rapport au ministère en vue de lui montrer dans quelle mesure nous réussissons à mettre en œuvre notre plan de travail. En faisant un calcul rapide, nous avons constaté que nous devrons consacrer annuellement près de 100 000 $ à la collecte des données qui seront transmises au ministère, ce qui représente près de 10 p. 100 de notre budget.

Je n'ai pas joué avec les chiffres. J'ai demandé aux personnes concernées combien de temps elles consacrent à la collecte des données que j'inclus dans mon rapport trimestriel, dans mon rapport annuel et dans mon rapport de vérification, qui font partie des exigences associées au financement attribué par le ministère. Cela vous montre que nous passons beaucoup de temps à établir des rapports et que ce temps pourrait être consacré à l'exécution de notre mandat, ce qui serait plus productif.

M. McKnight : Ce nouveau programme d'évaluation vient remplacer celui avec lequel nous travaillions encore il y a deux mois, qu'on appelait le modèle logique, qui n'était pourtant ni un modèle et ni logique. Il a donc été éliminé et remplacé par un nouveau mode d'évaluation.

Quand on pense à toutes les institutions, les administrations et les entités du milieu de l'éducation qui reçoivent des fonds de la part du ministère, on constate que beaucoup de temps est consacré à ces tâches administratives. Cela ne signifie pas que la reddition des comptes ne soit pas importante, mais dans un contexte normal, où nous serions un partenaire... J'ai déjà œuvré dans le monde des affaires, que vous connaissez bien, monsieur le président... Ce n'est pas une situation que l'on tolère quand on est assujetti à une loi et à des critères en la matière.

Le sénateur Hubley : Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie pour vos exposés.

Monsieur McKnight, vous avez dit préconiser une action collective dans le but de modifier en profondeur le système d'éducation des Premières nations. Vous avez énuméré un certain nombre de réformes précises. Selon vous, quelle réforme devrait être prioritaire?

Nous avons parlé d'une instance et je me demande s'il s'agirait de l'entité dont M. Lafond a parlé. Je veux simplement que ce soit clair. Est-ce que cette instance serait celle qui s'occuperait de l'éducation?

Est-ce que cette instance se chargerait d'une partie des rapports que chaque bande doit préparer?

M. McKnight : Pour répondre à votre première question, je dirais d'abord que, selon nous, notre responsabilité et notre mandat consistent à réconcilier les parties qui signent les traités — le Canada et les Premières nations — dans le contexte de la réalité à laquelle est confrontée la province de la Saskatchewan, qui est présente à la table de négociation en tant qu'observateur, et non pas en tant que partenaire à part entière.

Il ne nous appartient pas de déterminer quel serait le rôle de cette instance. Notre travail consiste à réconcilier les parties présentes à la table de négociation des traités.

Jusqu'en 2007, on parlait d'une table de discussion exploratoire. Depuis cette année-là, le nom a changé. Cela faisait 10 ou 12 ans que nous menions des discussions exploratoires, alors nous avons décidé qu'il s'agirait d'une table de négociation, de façon à réconcilier les partenaires.

En ce moment, les représentants du gouvernement de la Saskatchewan, de la FSIN et du gouvernement fédéral sont répartis en deux groupes de travail. Il y a un groupe de travail sur l'éducation, dont les membres sont présents à la table de négociation et l'autre... J'ai demandé aux participants à la table de négociation comment on pouvait réconcilier toutes les parties. À quoi ressemblerait l'éducation si elle était fondée sur un traité? La FSIN s'emploie en ce moment à consulter les communautés dans le cadre de l'élaboration de ce qu'on appelle l'APECT afin que la définition de la vision de l'éducation dans le contexte d'un traité s'élabore à partir de la base.

Notre vision à cet égard n'est pas définie, mais nous avons envisagé des moyens de réconcilier toutes les parties. Toutefois, nous sentons que nous essayons d'aider quelqu'un qui n'a pas demandé d'aide.

Le président : Pouvez-vous me dire ce que signifie APECT?

M. Hurton : Il s'agit de Action Plan on Education in the Context of Treaty.

Le président : Merci.

M. McKnight : Merci, monsieur le sénateur.

Le président : J'espère que tout le monde savait cela.

Le sénateur Hubley : En général, les témoins évoquent les mêmes enjeux. Il semble que l'attribution du financement constitue le principal problème. Le système actuel semble accaparer des efforts qui pourraient être consacrés à la poursuite des objectifs en matière d'éducation que les bandes se sont fixées.

Pouvez-vous vous attaquer à ce problème? S'il devient très évident que le programme de financement ne fonctionne pas à l'avantage des écoles autochtones, pouvez-vous agir à cet égard?

M. Lonechild : Je ne pense pas avoir bien compris la question.

Le sénateur Hubley : Prenons, par exemple, le fait que l'année financière du gouvernement ne correspond pas exactement à l'année scolaire. À cause de cette situation, vous obtenez des fonds pour probablement la moitié de l'année et vous devez présenter une autre demande pour en obtenir pour l'autre moitié, ce qui cause un fardeau administratif.

Si cette situation existe dans plusieurs domaines, et je suis certaine que c'est le cas, seriez-vous en mesure d'agir à cet égard; peut-être de chercher une solution?

M. Lonechild : Je le répète, je ne suis pas certain que nous soyons dans une position qui nous permette de nous prononcer là-dessus. Nous devrions nous adresser aux Premières nations elles-mêmes.

Le sénateur Hubley : Si la table de négociation est représentative du système d'éducation, n'auriez-vous pas le pouvoir ou la responsabilité d'agir?

M. McKnight : Je le répète, il y a deux parties et un observateur à la table de négociation. Le gouvernement de la Saskatchewan participe aux discussions. Toute entente qui en découlerait devrait être approuvée, même si le gouvernement du Canada donne son accord, par les dirigeants politiques de ces parties.

Si le gouvernement de la Saskatchewan donnait son accord, il faudrait d'abord qu'il ait obtenu l'appui de ses dirigeants politiques. La FSIN devrait, je suppose, obtenir le soutien des chefs par l'entremise d'une résolution ou d'une autre manière. C'est donc dire que toute entente qui serait conclue devrait d'abord avoir été approuvée par les dirigeants politiques, pour employer cette expression.

Nous nous attendons à ce que les participants à la table de négociation consultent les parties concernées, car ils ne peuvent pas conclure d'entente tant que cela n'a pas été fait.

Le sénateur Hubley : Les dirigeants politiques seraient les responsables du ministère des Affaires indiennes, n'est-ce pas?

M. McKnight : C'est exact, dans le cas du gouvernement du Canada, mais pour ce qui est de la FSIN, ce sont ses membres.

Le sénateur Hubley : D'accord, je vais m'arrêter là.

M. McKnight : Étant donné mon passé, je comprends que les représentants du gouvernement aient de la difficulté à prendre des engagements au nom de l'administration fédérale, et c'est pour cette raison que j'estime que les dirigeants politiques devraient participer à la table de négociation, c'est-à-dire le ministre des Affaires indiennes et du Nord, le chef de la Federation of Saskatchewan Indian Nations et le premier ministre de la Saskatchewan, s'ils souhaitent y prendre part, car cela signifierait que les décisions seraient prises par ceux qui ont le pouvoir de les prendre et non pas par des fonctionnaires qui ont de la difficulté à obtenir l'approbation de leurs dirigeants politiques pour saisir des occasions de susciter des changements.

M. Lonechild : J'aimerais ajouter que les trois principaux ministères de la Saskatchewan appuient le premier ministre. Le premier ministre et moi-même devrions participer à cette table de négociation et choisir des représentants de l'éducation supérieure, de l'éducation en général, des Premières nations et des Métis, pour participer activement au groupe de travail, et nous devrions déterminer quels dirigeants des Premières nations représenteront la FSIN à la table.

J'estime que la province démontre une volonté politique. Nous devons faire en sorte que le gouvernement fédéral s'engage dans les discussions.

Le président : Avez-vous dit que les Métis seraient représentés?

M. Lonechild : C'est possible. Nous ne nous sommes pas officiellement entretenus avec eux, mais nous savons qu'il y a quelques écoles, par exemple, Île-à-la-Crosse, la principale, et Green Lake... Il est possible que des représentants des Métis prennent part à la table de négociation.

Le sénateur Dyck : Y a-t-il d'autres organismes des Premières nations dans d'autres provinces qui ont entrepris le même genre de processus que la FSIN?

M. Hurton : Le chef de file dans ce domaine est sans doute le groupe des Mi'kmaq Kina'matnewey, de la Nouvelle- Écosse. Sa structure est très solide. Malgré cela et malgré l'entente tripartite et la loi dont il bénéficie, il éprouve encore des problèmes à traiter avec le gouvernement fédéral. Toutefois, ce groupe constitue probablement le meilleur modèle qui soit.

M. McKnight : Cela fait au moins 10 ans qu'il a mis sur pied des structures officielles dans le secteur de l'éducation, ce qui facilite les rapports avec les gouvernements provincial et fédéral.

Le président : Où en est le gouvernement fédéral selon vous en ce qui a trait à la mise en œuvre des traités?

Il faut bien poser ce genre de question. Si nous voulons aller au fond des choses, nous devons poser ces questions. Je suis ici pour servir les Autochtones du Canada et j'aimerais donc avoir votre point de vue, si cela ne vous met pas dans une position intenable, au sujet de la mise en application des traités pour ce qui touche à l'éducation.

M. McKnight : Puis-je vous donner un exemple? La boîte blanche que je vous ai remise, sur laquelle il est écrit Bureau du commissaire aux traités, contient un livre écrit par mon prédécesseur, le juge Arnot, intitulé Treaty Implementation : Fulfilling the Covenant. Vous y trouverez au moins une vingtaine de questions liées aux traités qui doivent être réglées.

Ce livre a été écrit en 2006 et envoyé au gouvernement du Canada. Vous pouvez le lire si vous le souhaitez. La FSIN n'a pas mis plus d'un an à proposer des solutions à ces 20 problèmes. Le gouvernement du Canada a répondu il y a environ six ou sept mois.

La seule chose qui me rassure dans la réponse qu'a donné le gouvernement fédéral, c'est qu'il ait accepté de discuter des problèmes. Il faut savoir qu'en ce qui concerne les traités et les Premières nations, le gouvernement du Canada doit consulter à peu près 12 ministères différents, en plus du Bureau du Conseil privé.

À mon avis, on pourrait faire beaucoup de progrès en ce qui concerne l'application des traités si les droits qui en sont issus étaient respectés, et ce n'est pas trop tard pour le faire. En fait, c'est probablement plus important aujourd'hui que ce l'était il y a 100 ans, car étant donné la situation démographique de ma province et l'obligation qu'ont les citoyens du Canada de mettre en œuvre les traités et de les respecter, tout le monde y gagnerait.

Il n'est pas vraiment utile que certaines instances du gouvernement du Canada prennent des mesures actives pour créer des possibilités d'emploi et d'affaires pour les Premières nations, alors même que le système d'éducation de ces populations est inadéquat et ne leur permet pas de développer les talents et les compétences nécessaires pour profiter des débouchés qui s'ouvrent.

Où se situe le Canada relativement aux traités? On ne parvient pas à établir le lien entre les traités et la réalité des choses. Je ne saurais le dire plus poliment.

Le président : Qu'en est-il des provinces? Je sais qu'il n'y a pas d'obligation légale dans leur cas, mais est-ce qu'elles reconnaissent les traités, si l'on prend l'exemple de votre province?

M. McKnight : Je ne crois pas que ce soit le cas.

M. Hurton : D'un point de vue technique, j'aimerais ajouter que les traités ne font pas partie des préoccupations principales des représentants du MAINC avec lesquels nous avons affaire. Ils s'inquiètent surtout de la saine gestion des fonds qui leur sont confiés et cela ne touche pas les traités.

La province manifeste un certain intérêt, mais je crois en toute équité que les instances provinciales estiment que les traités relèvent du gouvernement fédéral.

Le sénateur Poirier : J'ai encore une question, peut-être deux. Si j'ai bien compris, le financement actuel pour l'éducation des Premières nations est versé par le MAINC à la bande elle-même qui s'occupe de l'éducation au sein des écoles de la Première nation. En outre, certains conseils de bande, les plus solides financièrement, ajoutent eux-mêmes des fonds afin d'offrir d'autres services dans le cadre du système d'éducation.

Je crois toutefois avoir aussi entendu qu'un conseil de bande peut utiliser à d'autres fins le financement versé par le MAINC pour l'éducation s'il détermine que l'on a davantage besoin de ces fonds dans un autre secteur. Est-ce que je fais erreur?

M. McKnight : Monsieur Hurton, monsieur Lafond? Je crois que c'est le cas.

M. Lafond : Il y a essentiellement deux types d'ententes de financement qui sont signées par les Premières nations de la Saskatchewan. Il s'agit dans la majorité des cas d'ententes de financement globales, les autres étant des ententes de transfert souples.

L'entente de transfert souple est une formule s'apparentant au transfert de fonds en bloc. La Première nation signe l'entente pour recevoir les fonds et établit des budgets à l'interne. Cette formule permet de déplacer les fonds en fonction des plans de la Première nation.

Avec l'entente globale, cela n'est pas possible. Les fonds sont ciblés pour l'éducation et doivent être utilisés à cette fin. Ces ententes sont beaucoup moins flexibles que les ententes de transfert souples.

Le sénateur Poirier : Pour l'avenir, si des fonds supplémentaires se révélaient disponibles et s'il existait une volonté politique à cet égard, recommanderiez-vous fortement que ces fonds soient versés de manière à empêcher leur utilisation par ailleurs, en les ciblant sur l'éducation, pour nous assurer de régler les problèmes qui existent?

M. Lafond : Je crois que cela s'inscrit dans l'évolution qui doit se faire au chapitre de la gouvernance et de la responsabilisation. Dans l'état actuel des choses, le processus de responsabilisation repose pour ainsi dire uniquement sur le gouvernement fédéral. Toute autre forme de responsabilité qui est assumée, notamment envers les membres de la communauté des Premières nations, l'est généralement à l'initiative de la Première nation elle-même. C'est la volonté de cette dernière.

Lorsqu'il est question de changement systémique, c'est l'un des éléments que nous devons aborder en nous demandant quelle structure de responsabilisation sera conforme à la démocratie dans laquelle nous vivons.

Le régime démocratique des Cris est complètement différent de celui des Européens. J'estime que c'est l'un des facteurs les moins bien compris dans les relations entre le gouvernement et les communautés des Premières nations. Les Premières nations envisagent la responsabilisation d'une certaine manière, alors que le gouvernement fédéral la voit différemment.

Si nous souhaitons travailler au développement d'un régime de gouvernance, il nous faut reconnaître que les processus démographiques ne s'exprimeront pas de la même manière dans le cadre de ce développement. Simplement à titre d'exemple, la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan est une entité organisée qui se réunit en assemblée. Dans les faits, le pouvoir de l'organisation appartient à l'assemblée des chefs, plutôt qu'au chef élu. Ce dernier agit au nom des 74 chefs qui se réunissent en assemblée.

Ce n'est certes pas le même type de structure que l'on retrouve au sein des provinces ou du régime fédéral. J'ai parfois l'impression que cela s'apparente davantage à certaines organisations religieuses où les pouvoirs se situent à un niveau inférieur dans la structure, laquelle est plutôt aplatie, comparativement à la forme pyramidale que peut épouser le style européen.

Le sénateur Poirier : Il y a plusieurs modèles différents de gouvernance qui sont possibles.

M. Lafond : Tout à fait et j'estime absolument nécessaire que l'on aborde la question en se montrant ouvert d'esprit et capable de comprendre les différences culturelles et historiques des peuples avec lesquels nous traitons. C'est la seule manière d'agir pour que le système fonctionne bien à long terme.

Le président : J'ai une question à ce sujet. Croyez-vous que si vous instauriez ces processus pour les Premières nations, ils passeraient le test de l'opinion publique pour le Canada dans son ensemble, du point de vue de la responsabilisation? Le fait est que nous devons composer avec la réalité telle qu'elle est. Si l'on ne remplit pas le critère décisif, le problème demeure.

Dans un monde idéal, j'aimerais voir une formule qui tienne compte de la culture et des traditions des Premières nations, tout en étant acceptable pour toute la population canadienne. Nous pouvons fonctionner en vase clos dans certains secteurs, mais il y en a d'autres où notre démarche doit être nationale.

M. Lafond : Nous avons un exemple en Saskatchewan où il s'est produit un changement significatif qui ne doit rien au hasard. Par l'entremise de notre bureau, un effort concerté de relations publiques et de sensibilisation de la population au fil des 15 dernières années a permis de changer radicalement les attitudes dans la province. Des données mesurables peuvent être obtenues à l'appui de ce que j'avance.

Si nous voulons apporter quelque changement systémique que ce soit, le processus devra obligatoirement passer par l'éducation du public et la communication incessante d'informations exactes. Si nous essayons de le faire sans communiquer efficacement avec nos groupes cibles et sans que les instances décisionnelles croient vraiment dans le processus et soient capables de prendre le risque d'aller de l'avant, en affirmant que c'est la bonne façon de procéder, la démarche est vouée à l'échec. Cependant, si nous agissons intelligemment, nous nous inspirerons des réussites déjà obtenues dans notre pays à la faveur d'une communication des renseignements pertinents aux personnes concernées.

On ne veut plus entendre ces gens qui, comme en Saskatchewan, se demandent pourquoi ils n'étaient pas déjà au courant. Je parle ici de personnes âgées. « Pourquoi est-ce que je ne connaissais pas l'existence de ces pensionnats? Pourquoi est-ce que je ne savais pas que les traités n'étaient pas mis en œuvre? » Les réactions semblables sont plutôt fréquentes lors des séances de sensibilisation que nous tenons dans toute la province auprès de tous les segments de la population.

M. Hurton : J'aurais une observation à faire. Je ne voudrais pas me montrer cavalier, mais les 60 000 rapports à produire par année ne nous procurent pas le niveau de responsabilisation auquel les gens s'attendent. Il existe une certaine perception et le fait est que l'on peut ajouter tous les rapports qu'on veut, sans qu'il y ait nécessairement responsabilisation.

Dans une certaine mesure, le gouvernement fédéral aime bien nous dépeindre comme des gens incapables d'assumer leurs responsabilités. Il faudrait que nous discutions ensemble de ce que nous accomplissons dans les faits.

Les provinces sont très loin d'avoir à remplir la moitié des formulaires qui nous sont imposés, mais personne ne parle de leur responsabilité à l'égard des écoles provinciales. Cette question n'apparaît même pas sur les écrans radars. Pourtant 40 p. 100 de nos étudiants fréquentent ces écoles.

Je crois que nous pouvons en arriver à un processus de responsabilisation viable. Il sera peut-être différent de ce qu'on peut voir ailleurs, mais je pense qu'il fonctionnera. Comme l'indiquait M. Lafond, des efforts de sensibilisation sont nécessaires, mais il est difficile de faire comprendre aux gens que nous sommes capables d'assumer nos responsabilités lorsque quelqu'un à Ottawa s'acharne à affirmer le contraire.

Le président : Je comprends bien ce que vous nous dites, et je ne vais certes pas préconiser une augmentation du nombre de rapports requis; je ne crois pas qu'on en lise la moitié de toute manière car ils sont déjà trop nombreux.

Dans la poursuite de nos efforts, j'aimerais que nous puissions vraiment faire avancer les choses — et je parle de nous tous, collectivement, les membres des Premières nations comme les autres Canadiens. Je peux constater les éléments qui distinguent les modes de fonctionnement des Premières nations, et je crois que M. Lafond nous l'a expliqué...

M. Lafond : C'est ainsi que les choses se passaient.

Le président : C'était la façon de faire avant que vous interveniez.

Il nous faut une stratégie pour suivre l'évolution de la situation, car il y a beaucoup trop de gens dans ce pays qui ignorent ce qui est en train de se produire. Vous avez raison, cela ne fait aucun doute. Les gens ne savent pas que les traités ne sont pas reconnus; ils ne sont pas au courant de l'énorme fraude qui a entaché le processus d'allocation des terres aux Premières nations. C'est la raison pour laquelle nous avons des accords sur les droits fonciers issus des traités. Ils n'ont pas eu connaissance de toutes ces situations où les membres de nos Premières nations ont été vraiment floués dès le départ.

M. McKnight : Monsieur le président, pour répondre à votre question, et sans paraître désinvolte, je dirais qu'il ne devrait pas être plus difficile de convaincre la population, notre maîtresse à tous, du sens des responsabilités des Premières nations que de lui prouver que le gouvernement du Canada est capable d'être à la hauteur de ses propres responsabilités. Je ne pense pas que les gens croient vraiment que le gouvernement du Canada — et j'y ai travaillé pendant longtemps, vous le savez — utilise à bon escient les deniers public. J'estime que l'on pourrait tout aussi bien les convaincre que les Premières nations peuvent faire bon usage de ces fonds, comparativement à ce qu'en fait le gouvernement du Canada.

Le président : Vous avez soulevé ce matin un point fort intéressant au sujet de l'immersion en langue française et de la population francophone. Selon moi, plus les Canadiens apprendront de langues, mieux le pays s'en portera. En Allemagne, la plupart des gens parlent couramment l'anglais. Je ne vois pas pourquoi nous ne serions pas capables de parler deux ou trois langues.

Comment pouvons-nous y parvenir sans miner les efforts de la communauté francophone tout en l'utilisant comme base de comparaison? Voyez-vous où je veux en venir?

M. McKnight : Tout à fait.

Le président : Je crois que les peuples autochtones, du Canada comme d'ailleurs, devraient être les premiers à bénéficier de la protection de leur langue.

J'ai entendu le chef Lonechild et M. Hurton affirmer que l'on s'engageait dans une certaine mesure sur un terrain glissant, mais comment pouvons-nous agir de manière constructive en évitant de pousser les grands cris et de se servir d'un bouc émissaire?

M. Lonechild : Le Manitoba a reconnu l'an dernier les langues autochtones parlées dans la province, ce qui constitue un important pas en avant. Il faut obtenir la même reconnaissance en Saskatchewan.

Nous reconnaissons également l'existence des droits des Michif et des Métis qui sont protégés par la Constitution. Nous n'avons simplement pas consenti l'effort nécessaire pour faire en sorte que ces droits s'appliquent dans la réalité.

En définitive, je pourrais vous répondre brièvement que l'on s'inspire des normes minimales consenties à la population francophone, sans toutefois les compromettre.

Le sénateur Raine : Je trouve tout cela fort intéressant, mais cela démontre en même temps à quel point tout le système est devenu alambiqué. Nous devons composer avec la compétence fédérale, puis avec la compétence provinciale et enfin avec ces traités qui transcendent les limites provinciales et ces Premières nations que l'on retrouve dans deux provinces, comme nous avons pu le constater hier avec celle d'Onion Lake. Il devient très compliqué de s'y retrouver, mais je crois que tous souhaitent une évolution des choses et une véritable prise en compte des besoins des enfants.

Je suis également tout à fait consciente des restrictions financières que le gouvernement fédéral s'est imposées en demandant à tous ses ministères de s'en tenir à leur budget existant. Il nous faut donc dégager certaines économies au sein du portefeuille du MAINC en faisant les choses de manière plus efficiente.

À mon humble avis, il nous faut trouver une façon pour que le MAINC laisse le champ libre aux Premières nations et aux organisations vouées à l'éducation afin qu'elles puissent travailler plus facilement.

Le gouvernement au pouvoir s'était engagé à réduire les tracasseries administratives dans le cadre de son mandat. A- t-on essayé de savoir de quelles tracasseries on parlait au juste? À votre avis, quels rapports n'ont aucun intérêt à la lumière des résultats qu'ils procurent?

M. Hurton : En éducation, la tendance est à l'inverse. On a presque doublé le nombre de rapports.

Le sénateur Raine : C'est ce que j'ai entendu. Nous pourrions régler la question sans légiférer. Peut-être s'agit-il de la première étape.

M. McKnight : Pour brasser du papier, il faut des gens. Je me souviens d'une discussion que j'ai eue avec un politicien chevronné, M. Stanfield, au sujet des limites de la fonction publique. Je lui ai demandé comment il procéderait et il m'a répondu que, dans son secteur, il avait cessé de construire des bureaux pour la fonction publique.

Ceux qui examinent les rapports produits par notre bureau et par la FSIN ne sont pas des hauts fonctionnaires, ceci dit sans vouloir dénigrer le poste qu'ils occupent. Ce sont des gestionnaires intermédiaires ou des employés de niveau inférieur. Et qu'advient-il ensuite de l'information transmise? Je ne suis jamais parvenu à le savoir. Je n'étais pas au courant même quand j'étais ministre.

Tous les ministres des Affaires indiennes et du Nord devraient d'abord occuper le poste de commissaire des traités en Saskatchewan, de manière à accroître considérablement leur connaissance des dossiers.

Je ne saurais vous dire quels gains d'efficience pourraient être réalisés, mais je sais que c'est chose possible, comme dans toute grande organisation.

Le sénateur Raine : Dans le secteur privé, les gains d'efficience sont essentiels car les profits sont la seule source de financement. Nous savons que beaucoup d'argent est injecté dans le système, mais que cet argent ne va pas là où il serait le plus utile. J'aimerais voir comment nous pourrions rectifier la situation.

M. Lafond : Je vous dirais que différentes organisations ainsi que les Premières nations se plaignent régulièrement du travail qu'on leur impose aux fins de la production de rapports. Ce qu'on n'a pas réussi à faire, et j'estime que nous devons y parvenir assez rapidement, c'est de traduire tout ce travail en financement concret. Combien en coûte-t-il aux 74 Premières nations de la Saskatchewan pour produire tous les rapports requis aux fins des projets de développement économique? Il faudrait chiffrer ces coûts pour pouvoir éventuellement agir en conséquence.

Il nous faut commencer à chiffrer les données à ce sujet, car c'est ce qui compte vraiment dans notre pays. Lorsqu'on dépense beaucoup d'argent sans obtenir de résultats, les gens réagissent. Ils posent des questions. C'est une avenue que nous n'avons pas empruntée en Saskatchewan, mais je pense que nous devons le faire afin que chacun comprenne bien que nous gaspillons énormément d'argent à produire des rapports. Il faut compter deux ou trois jours toutes les fois qu'une personne comme moi doit rédiger un rapport et les coûts ne sont pas négligeables.

Le sénateur Raine : En préparant notre travail, nous avons pu constater qu'un grand nombre d'études ont déjà été réalisées sans qu'aucun changement ne soit apporté. L'évolution est très lente, mais c'est le défi qui nous attend.

M. Lafond : J'aurais une observation en réponse à une question précédente concernant le contexte de notre travail. J'estime très important de bien comprendre qu'une évolution des mentalités doit se produire au Canada. L'attitude colonialiste que nous avons adoptée au fil des 200 dernières années a amené les gens à croire que les Premières nations n'ont pas vraiment de moyens à leur disposition et qu'il faut leur en fournir. Je m'efforce de faire comprendre à tous que nous avons des moyens qui nous sont propres et qu'il faut travailler à partir de cela.

À titre d'exemple, notre conseil de bande de Muskeg Lake rencontre ses membres deux fois par année. Le gouvernement fédéral fait de même beaucoup moins souvent avec ses propres membres, ses électeurs, et cette pratique fait partie intégrante de nos modes de fonctionnement démocratiques qui veulent que les décisions prises soient celles de la population et que le conseil agisse en fonction des directives qui lui sont ainsi fournies.

Ces systèmes existent déjà au sein des Premières nations et parfois au sein des conseils tribaux. C'est avec ces systèmes que nous devons travailler; nous ne sommes pas à court de moyens, bien au contraire. Il nous faut simplement les bonnes lois et le bon environnement pour permettre à ce potentiel de s'épanouir et de croître en Saskatchewan et au Canada.

Le président : Messieurs, sénateurs, c'est le chef Lonechild ou le commissaire McKnight qui a dit que des sommes d'argent étaient injectées un peu partout pour stimuler le développement économique et la formation professionnelle, mais que nous n'éduquions pas les gens. Nous dépensons de l'argent et pourtant, ces gens n'ont pas l'éducation nécessaire pour relever les défis qu'apporte le développement économique.

Je tiens à vous remercier tous d'avoir pris le temps d'être venus ici ce matin.

Aimeriez-vous ajouter quelque chose pour terminer, monsieur McKnight?

M. McKnight : Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de nous avoir accueillis. Je suis l'un de ceux qui croient que le Sénat du Canada existera encore un certain temps et que cette entité a la possibilité, dans la plupart des cas, et je dis dans la plupart des cas lorsqu'il est question des dossiers nationaux, de fonctionner sans partisannerie.

Nous espérons qu'à la lumière de votre étude, vous comprendrez que cette question est très importante non seulement pour les Premières nations mais aussi pour chaque Canadien, premièrement parce qu'il y a une obligation en vertu des traités, et deuxièmement parce que les traités visent justement la poursuite de la collaboration entre le gouvernement du Canda et les Premières nations. Les traités ont été conçus pour établir une relation pour que nous puissions fonctionner ensemble dans l'intérêt de tous; à l'origine, les deux parties en ont tiré des avantages. Au cours des 135 dernières années, ces avantages ont basculé. Il y a eu un déséquilibre. En tant que nouveau venu, j'ai reçu beaucoup plus que mes amis.

Nous allons travailler ensemble pour atteindre cet objectif. Nous espérons que le comité sénatorial produira un rapport qui sera concis, qui forcera le gouvernement à prendre une décision sans équivoque et qui favorisera le changement.

Je crois au processus de changement inhérent aux gouvernements. Il découle de ceux qui ont la capacité d'influencer, c'est-à-dire à la fois les électeurs et les élus. Je vous souhaite bonne chance dans vos entreprises. Je vous remercie encore une fois de vos efforts, au nom des gens de ma province, et j'attends avec impatience de lire votre rapport final.

M. Lonechild : Au début de la séance, le commissaire aux traités me disait à la blague que c'était un moment marquant dans l'histoire, parce que le commissaire aux traités et le chef de la Federation of Saskatchewan Indian Nations étaient assis l'un à côté de l'autre. Je suis inspiré par les propos tenus par le commissaire ce matin. Je peux dire en toute bonne foi que tout ce qu'il a dit est conforme au point de vue que nous faisons valoir depuis longtemps.

Je crois que le modèle de fonctionnement des années 1970, qui donne le contrôle de l'éducation autochtone aux Autochtones, est encore pertinent aujourd'hui et que sa pleine mise en œuvre sera plus profitable au Canada et à la Saskatchewan et surtout, au peuple des Premières nations, qui demande le respect qu'il mérite pleinement. Je crois que nous avons un avenir brillant devant nous, grâce à une population jeune et éduquée en Saskatchewan.

Je vous remercie de votre considération. Ce dossier est probablement le plus important dans la province. Au nom de nos chefs, je vous dis merci.

Le président : Au nom des sénateurs, nous vous remercions. Vous avez présenté un excellent témoignage, vous, M. Lafond et M. Hurton, et je ne saurais dire à quel point nous sommes ravis que vous ayez pris le temps de venir nous rencontrer ce matin. Travaillons ensemble et essayons de changer les choses.

Mesdames et messieurs les sénateurs, je répète que notre comité se réunit aujourd'hui pour recueillir des renseignements aux fins de l'étude sur l'éducation primaire et secondaire des Premières nations que nous avons entreprise, et nous espérons pouvoir examiner d'éventuelles stratégies de réforme dans le but d'améliorer les résultats.

Mesdames et messieurs les sénateurs, parmi le groupe de témoins que nous accueillons aujourd'hui se trouvent Mme Vivian Ayoungman, qui comparaît à titre personnel, et le chef Rose Laboucan, qui représente les Premières nations de l'Alberta signataires du Traité no 8. Je sais avec certitude que Mme Laboucan fait partie des Premières nations signataires du Traité no 8, de même que Eileen Lines. Nous recevons aussi Sheena Jackson, du Traité no 7, et Evelyn Good Striker, du Traité no 7 également. Merci à toutes de votre présence.

Mesdames, quelques-unes parmi vous, sinon toutes, avez peut-être un exposé à présenter. Nous vous prions d'être aussi concises que possible, de prendre de cinq à sept minutes, si c'est possible.

Je m'en voudrais de ne pas mentionner la présence du chef national de l'Assemblée des Premières Nations, l'APN, M. Shawn Atleo.

Chef Atleo, bienvenue à nos audiences. C'est un honneur de vous avoir parmi nous. Ce dossier revêt une telle importance que vous avez pris quelques précieuses minutes de votre temps pour être ici. Après ces témoins, j'aimerais vous inviter à vous approcher du microphone, si vous le voulez bien.

Poursuivons nos travaux.

Vivian Ayoungman, à titre personnel : Bonjour.

[Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]

Je suis ravie de vous accueillir sur notre territoire traditionnel pour vous entretenir des réussites et des défis de l'éducation des Premières nations.

Au nom de mes confrères éducateurs avec qui j'ai eu le privilège de travailler pendant quatre décennies, je tiens à vous remercier de nous donner l'occasion d'échanger sur le rôle important que jouent l'éducation des adultes et l'éducation postsecondaire dans ce contexte. Je sais que votre étude porte sur l'éducation de la maternelle à la douzième année, mais j'espère faire ressortir l'importance de l'éducation des adultes et de l'éducation postsecondaire.

Dans le peu de temps dont je dispose, j'aimerais parler plus précisément de certaines des mesures mentionnées dans un document que l'Assemblée des Premières Nations, l'APN, a récemment publié au sujet de l'éducation postsecondaire. Vous en avez tous reçu des copies. J'ai ici les deux versions, anglaise et française.

Je ne vais pas parcourir tout le document, mais je m'attarderai plutôt sur la section qui porte sur les établissements postsecondaires, sur le Programme d'aide aux étudiants indiens, le PAEI.

Ce document explique la nécessité de soutenir l'éducation postsecondaire et la formation axée sur les compétences chez les jeunes et les adultes, non seulement pour qu'ils puissent réaliser leurs propres aspirations sur le plan académique, mais aussi pour qu'ils puissent contribuer au renforcement des capacités et à l'édification d'une nation, deux éléments essentiels à la bonne gouvernance des Premières nations.

Le gouvernement doit approuver les mesures à prendre et les recommandations. II est essentiel que le gouvernement travaille de concert avec les Premières nations, et non de façon unilatérale. On continue de nous dire ce qui pourrait nous arriver, et c'est très déconcertant. Cela inclut le PAEI, la seule source de financement, bien qu'anémique, des établissements des Premières nations.

Le fait de travailler loin des Premières nations et de continuer à commander des rapports hors contexte ne fera que perpétuer les mythes. Jour après jour, les journaux, les médias propagent ces mythes.

Se concentrer uniquement sur l'éducation de la maternelle à la douzième année n'est pas nécessairement la solution. Lorsque j'ai commencé à enseigner il y a de cela des décennies, j'ai très vite réalisé que des milliers d'adultes dans nos communautés ont un énorme potentiel et qu'ils ont besoin de programmes et de soutien pour réaliser leurs rêves. Je l'ai vu au fil de toutes ces années.

Les collèges autochtones devraient figurer presque au haut de la liste des pratiques prometteuses, en raison du rôle important qu'ils ont joué dans les communautés qui ont eu la chance d'avoir leurs propres centres d'apprentissage.

L'un des aspects importants que ce rapport de l'APN passe sous silence, c'est que la partie du fonds d'études postsecondaires qui revient au PAEI devrait être séparée, de sorte à ne pas créer de concurrence parmi les étudiants. Ce fonds devrait être distinct, durable et adéquat, et il devrait fournir les ressources nécessaires pour poursuivre le bon travail et pour financer les communautés qui n'ont pas de centres d'apprentissage mais souhaitent en avoir un.

Je crois que le financement devrait être élargi en raison de l'énorme succès que connaissent ces établissements. Ce succès a été sous-estimé par le MAINC et mal compris par les universitaires et les autres représentants des instituts politiques qui ont rédigé des rapports pour le gouvernement.

Par exemple, le rapport Mendelson, souvent cité, mentionne qu'il y a des écarts majeurs entre le niveau de scolarisation postsecondaire des membres des Premières nations et celui des Canadiens ordinaires, et que l'écart n'est pas aussi prononcé dans les programmes d'un an et de deux ans. Toutefois, ce rapport ne mentionne pas comment les établissements autochtones contribuent à cette importante statistique. Bon nombre de ceux qui ont réussi dans ces domaines sont le produit direct de nos établissements.

Les établissements savent qu'ils ont apporté une contribution immense à leurs communautés et au-delà mais, parce que nous sommes à court de ressources, nous n'avons pas été en mesure de raconter notre histoire. Il importe d'examiner plus attentivement les impacts; la liste est longue, mais comme j'ai peu de temps, je vais en citer quelques- uns très rapidement.

Nous facilitons grandement la transition des étudiants. Les établissements ordinaires vous diront que les étudiants qu'ils accueillent et qui ont été préparés dans nos établissements ont une base solide et que tout le monde y trouve son compte. Comme les étudiants sont forts, ils ne décrochent pas. Ils maintiennent leurs excellentes moyennes. Ils poursuivent des études supérieures, et cette réussite ne devrait jamais passer inaperçue.

Il y a un renforcement des capacités dans les communautés des Premières nations. À titre d'exemple, prenons la mienne, Siksika. Vous constaterez qu'un grand nombre de personnes employées dans nos divers services ont reçu une éducation ou une formation dans notre établissement ou se sont servi du Old Sun Community College comme tremplin.

Certaines personnes ont obtenu des doctorats grâce à l'appui de notre établissement. Nous avons élaboré un programme d'études pour les enseignants. En partenariat avec les établissements ordinaires, nous avons mis au point des programmes de formation pour les enseignants. Nous orientons les enseignants avec beaucoup de succès. Nous avons fait beaucoup de recherches importantes en posant les questions selon notre point de vue. Grâce à ces recherches pertinentes, nous avons réussi à mettre au point des cours pertinents qui profitent non seulement à nos propres communautés, mais aussi à l'ensemble de la population.

Voilà une partie du travail que nous avons fait. De plus, un grand nombre de ces établissements administrent le Programme de soutien aux étudiants du niveau postsecondaire et ont donc de très nombreuses pratiques qui aident les étudiants. Ils offrent d'excellents services de soutien aux étudiants; ils offrent du tutorat. Nos collèges font partie du programme Lois Hole Campus Alberta Digital Library, financé par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Technologie de l'Alberta, ce qui leur permet d'avoir un accès direct à des millions de ressources en ligne.

Investir dans l'éducation des Premières nations ne profite pas seulement aux communautés des Premières nations; il s'agit d'un plan de stimulation à long terme et durable pour l'économie du Canada. Nous demandons au gouvernement fédéral de travailler en collaboration avec nos communautés, avec nos Premières nations, pour assurer un financement et un soutien équitables à nos étudiants de niveau postsecondaire.

Les rapports qui ont été commandés par le gouvernement recommandent que ce programme soit confié à des tierces parties. Selon nous, cette mesure serait désastreuse en raison des soutiens qui sont en place. En outre, si les gens commencent à travailler loin des étudiants, nous croyons que bien des réussites nous échapperont.

Dernière chose : Si le plafond de 2 p. 100 n'est pas éliminé, faites les calculs. Si les inscriptions régressent au niveau postsecondaire, c'est une conséquence directe des frais de scolarité plus élevés, des coûts de la vie plus élevés. Nos gens qui administrent les programmes vous diront que le nombre d'étudiants qu'ils peuvent soutenir continuera de diminuer. Si vous calculez les coûts des études postsecondaires, et je sais également qu'ils dissuadent un très grand nombre d'étudiants, la solution n'est pas de simplement confier la responsabilité à quelqu'un d'autre.

Je suis ravie d'avoir eu l'occasion de faire quelques commentaires, mais je vous prie de regarder ce document pour avoir une meilleure idée de ce dont je parle.

Le président : Merci, madame Ayoungman. Malheureusement, le temps joue contre nous en toutes choses, mais nous ne précipiterons pas cette étude comme telle parce que nous voulons formuler les recommandations qui, nous l'espérons, produiront leur effet.

Nous entendrons maintenant des porte-parole des signataires du Traité no 8, ma bonne amie Mme Rose Laboucan, ainsi que Mme Eileen Lines. Vous êtes ensemble.

Rose Laboucan, chef, Première nation Driftpile, Premières nations de l'Alberta signataires du Traité no 8 : Merci. Bonjour, tout le monde. Je remercie le Créateur de me permettre de vivre une autre belle journée, et je vous remercie également de votre temps. Je fais appel à votre compréhension et je vous demande de me prêter une oreille attentive. Je suis enseignante de formation, alors je vous demande de bien écouter.

Premièrement, les 1,4 milliard de dollars qui sont injectés dans l'éducation postsecondaire et primaire ne sont pas tous utilisés à cette fin chez les Premières nations. Beaucoup d'argent sert à payer des frais de scolarité aux écoles provinciales. Je veux que ce soit bien compris.

Il y a une autre chose que vous devez bien comprendre : le changement. Dans l'exposé précédent, il a été question de changements, et on a dit que rien n'avait changé. Eh bien, il y avait 50 000 enfants qui mouraient dans des pensionnats alors qu'en 2003, on comptait 30 000 diplômés dans l'ensemble de notre pays. Je crois que c'est là un changement et que cet argent a été bien investi. Ces gens-là ont maintenant des emplois; ils occupent des postes de direction et font de grandes choses dans notre pays. Je tiens à faire remarquer que c'est un changement.

L'autre changement que je vois, qui est très lent, c'est le processus de décolonisation et la compréhension de ce processus, parce que lorsque la décolonisation sera amorcée, le changement se produira beaucoup plus rapidement. J'en ai moi-même fait l'expérience; ce que j'ai dû traverser pour me décoloniser moi-même et comprendre qu'il s'agissait d'un processus, qu'il fallait laisser les choses derrière et aller de l'avant. Ce processus prend du temps. Je pense non seulement à la guérison de ceux qui ont fréquenté les pensionnats, mais aussi à d'autres choses qui doivent se produire à la base pour aider nos gens à comprendre cela.

Il faut faire bien davantage à la base au regard de la prévention, du rôle parental et du progrès, parce qu'au bout du compte, l'éducation relève de la pédagogie, et non de la politique, et c'est sous cet angle que nous devons nous y intéresser.

Je sais aussi que nous devons combler le fossé sur le marché du travail en comblant le fossé en éducation. Il reste beaucoup à faire dans le domaine de la formation des apprentis et des corps de métier. Par exemple, je crois comprendre que d'ici 2015, il nous faudra 8 000 travailleurs ici, en Alberta. Qui comblera ces postes? Combien en coûtera-t-il au gouvernement?

Pourquoi parle-t-on toujours des coûts lorsqu'il est question des Premières nations, et non de ce que sont les facteurs de coût? Il y a des coûts aussi lorsque vous faites venir des immigrants. Je n'ai rien contre les immigrants, mais personne ne parle de ce facteur de coût. Pourquoi cibler seulement les Premières nations?

En réalité, l'éducation devrait consister à aider les gens à avancer pour devenir ce qu'ils souhaitent être. Il ne devrait y avoir aucun obstacle.

Permettez-moi de vous dire qu'au cours des quatre mandats que j'ai remplis au sein de ma communauté à titre de chef, la plus grande responsabilité que j'ai eue à assumer a été d'enseigner la responsabilité, et ce n'est pas ma faute. Ce n'est pas moi qui ai dit que quelqu'un d'autre croyait être plus intelligent que nous et qu'il devait nous dire quoi faire, comment le faire et quand le faire. Ce n'est pas ma politique.

Dans mon préambule, je dis que, pour un grand nombre d'entre nous, et malheureusement pour les techniciens, l'éducation se fait de la maternelle à la 12e année. Par conséquent, nous avons tendance à parler de l'éducation en termes d'étapes et à la confiner à des périodes spécifiques de la vie, mais nous faisons erreur.

Traditionnellement, notre communauté est centrée sur les enfants. Donc, si vous retirez les enfants de leur communauté, qui se charge de leur éducation? Ce n'est pas de ma faute si mon peuple ne sait pas comment éduquer ses enfants. On lui a retiré cette compétence, et maintenant nous nous retrouvons avec un problème multigénérationnel en matière d'éducation des enfants.

Aucun enfant ne veut aller à l'école en ayant le sentiment que personne ne s'occupe de lui. Comment vont-ils apprendre? C'est incroyable. Les enfants qui réussissent sont ceux qui bénéficient du soutien, de la présence, de l'encouragement et de l'amour de leurs parents. Les enfants qui nagent à contre-courant comme le saumon savent que quelqu'un a pris soins d'eux à un certain moment, peut-être leur grand-mère ou leur grand-père disparu, et c'est la raison pour laquelle ils persévèrent et qu'ils réussissent.

Nous avons une école administrée par la bande, et nous ne pouvons même pas offrir des programmes de qualité. C'est financièrement impossible. Les gens nous disent : « Vous recevez 10 000 $ par enfant. » Eh bien, vous savez quoi? Cet argent sert également à payer d'autres choses, comme les enseignants, l'entretien de l'édifice et la facture d'électricité.

Cette année, nous avons embauché un professeur d'éducation physique. Toutes les écoles devraient en avoir un — un professeur d'éducation physique, bon sang. Cela m'était égal d'enregistrer un déficit. Ensuite, vous nous pointerez du doigt — pas vous littéralement, je ne fais que rapporter ce qui circule dans les médias, c'est-à-dire que les chefs et les conseils de bande sont malhonnêtes, qu'ils font ceci et cela. C'est de la foutaise.

Il y en a parmi nous qui travaillent d'arrache-pied pour faire bouger les choses, et si vous voulez savoir, je gagne 45 000 $ par année. J'ai deux diplômes universitaires. J'aimerais bien vous voir travailler pour un salaire semblable.

Pour certains d'entre nous, c'est la réalité. Je ne dis pas qu'il n'y a personne de malhonnête, mais il y a des gens parmi nous qui veulent changer les choses. J'y ai consacré les huit dernières années de ma vie, car je sais qu'en fin de compte, ça n'a rien à voir avec moi, ni avec vous, et tout à voir avec l'avenir de ces enfants. Il faut leur donner l'occasion d'être eux-mêmes.

Je dois redoubler d'effort pour faire renaître notre langue. Les enfants ne veulent même pas l'apprendre. C'est vous dire à quel point ils sont assimilés. Soyons réalistes. Quand un enfant se fait dire que ce n'est pas bon, que ce n'est pas sain pour lui d'être qui il est, je dois travailler 10 fois plus fort pour m'assurer qu'il est aimé et que quelqu'un prend soin de lui. Les enfants doivent se sentir voulus, peu importe où ils vont. C'est comme ça qu'ils vont réussir.

Vous ne pouvez pas me dire que personne ne vous a aimé et que personne n'a pris soin de vous. C'est la chance que j'aimerais offrir à nos enfants.

Le plafond de 2 p. 100 qui nous a été imposé est ridicule. La vérificatrice générale ne nous a pas mis en cause. C'est le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien qu'elle a tenu responsable et à qui elle a dit de se secouer et de faire preuve de transparence. Nous ignorons où va la moitié de cet argent, ce milliard de dollars consacré aux peuples autochtones du pays. Tout ce que nous savons, c'est combien nous recevons, et nous rendons compte de ce montant.

Dans ce contexte, je parle de notre situation, parce que la vérification de nos livres s'est bien passée et de mémoire, les vérifications se sont toujours bien passées pour la Première nation Driftpile.

Ce que je vous demande, c'est de faire preuve de compréhension et de patience afin de vraiment avoir des effets positifs sur la vie de nos enfants. Nous pouvons de nouveau contribuer à la société canadienne. J'en ai assez d'être le problème social du pays. Je veux autre chose pour nos enfants.

Avec l'aide de la société dominante, nous réussirons — et les non-Autochtones le comprennent et veulent voir ce changement s'opérer. Il suffit de se secouer et de faire ce qu'il faut, et tout le monde en sortira gagnant.

Cessons de nous plaindre à propos de qui reçoit quoi. Utilisons ce que nous recevons pour offrir un meilleur avenir à nos enfants, et faisons cela correctement cette fois-ci, parce qu'il est temps que les choses changent.

Le président : Merci, chef Laboucan.

Evelyn Good Striker, recherchiste en enseignement, Société de gestion du Traité no 7 : Merci de nous avoir invités à témoigner. Bonjour et bienvenue chez nous.

Les bureaux de la Société de gestion du Traité no 7 sont situés à Calgary. Notre grand chef, Charles Weasel Head, devait être ici aujourd'hui, mais il a eu un empêchement. Il s'en excuse. Il participe à une activité communautaire à laquelle il tenait.

Dans le cadre du Traité no 7, nous servons six Premières nations, dont 2 500 étudiants dans 17 écoles. Nous tentons d'améliorer nos systèmes d'éducation et nous avons analysé l'état des choses. Nous collaborons depuis des années avec les surintendants scolaires, les administrateurs et les directeurs d'écoles. Depuis 25 ans, nous organisons une conférence annuelle sur l'éducation.

Étant donné nos faibles taux d'alphabétisation et de numératie, nous participons depuis un an au Programme de réussite scolaire des étudiants des Premières nations financé par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Ce programme nous a permis d'examiner ces taux, de recueillir des données et d'utiliser les programmes qui nous aideront à améliorer le taux de réussite de nos étudiants à ce chapitre.

Nous travaillons à l'heure actuelle avec les gouvernements fédéral et provincial afin d'améliorer les résultats de nos étudiants en Alberta.

Je cède maintenant la parole à Sheena Jackson qui a joué un rôle-clé dans la rédaction du Protocole d'entente sur l'éducation des Premières nations en Alberta.

Sheena Jackson, directrice de l'enseignement, Société de gestion du Traité no 7 : Bonjour. Je viens de la nation Piikani, et j'occupe actuellement le poste de directrice de l'enseignement pour la Société de gestion du Traité no 7.

Depuis deux ans et demi, nous travaillons avec les gouvernements fédéral et provincial afin de développer avec eux un partenariat. Nous sommes très fiers d'annoncer qu'en février 2010, sur la réserve de la nation Tsuu T'ina, nous avons signé le Protocole d'entente sur l'éducation des Premières nations en Alberta qui réunit les trois ordres de gouvernement afin qu'ensemble ils définissent les besoins des Premières nations en Alberta en matière d'éducation.

Nous avons discuté sérieusement des obstacles qui empêchent nos enfants de réussir. Parfois, la réalité était difficile à accepter. Il arrive que les gouvernements ne veuillent pas reconnaître les conséquences de leurs politiques et admettre que ces politiques nous empêchent de mieux réussir. Je crois que ces discussions sérieuses, le leadership et le soutien de gens, comme le chef Rose Laboucan et les chefs des Premières nations de l'Alberta, ainsi que leur appui envers cette initiative nous ont conduits à ce protocole d'entente.

En matière d'éducation, nous avons conclu que les deux parties doivent assumer leurs responsabilités. Je crois que vous avez une copie du protocole d'entente. Celui-ci porte principalement sur neuf engagements visant à améliorer les résultats en matière d'éducation sur une période de dix ans.

Le premier engagement, c'est de créer un centre des connaissances et de la sagesse autochtones qui se concentrera sur la cueillette de données, la responsabilisation et la présentation de rapports, l'amélioration des systèmes, l'élaboration de programmes et la mise en valeur des ressources, ainsi que la promotion des langues et des connaissances indigènes des Premières nations.

Le deuxième vise à améliorer le ressourcement. Nous examinerons le ressourcement et le soutien, l'analyse comparative du financement, les programmes et les services d'éducation, les lois, les ententes sur les frais de scolarité et les services éducatifs, puis nous élaborerons un plan stratégique à long terme.

Le troisième porte sur la responsabilité et la gestion du rendement pour mesurer et contrôler les résultats, améliorer les programmes, et assurer la compatibilité avec la législation fédérale et provinciale en matière d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels.

Le quatrième concerne l'établissement de relations stratégiques. Nous aurons des discussions stratégiques sur la façon de développer notre relation et d'atteindre nos objectifs. À l'intérieur de cela, nous avons établi un cadre de travail avec le gouvernement provincial.

Le cinquième est centré sur les enfants des Premières nations qui sont pris en charge, qui ont des besoins éducatifs spéciaux et qui ne fréquentent pas l'école. Nous espérons obtenir le soutien des organismes fédéraux et provinciaux afin d'élaborer des solutions exhaustives, coordonnées et adaptées à la culture.

Le sixième porte sur l'engagement des parents et des collectivités dans le but d'établir des stratégies qui favorisent et qui soutiennent ces groupes.

Le septième concerne le recrutement, la conservation et le perfectionnement professionnel des enseignants. Nous espérons élaborer des stratégies pour améliorer ces trois aspects, accroître le nombre d'enseignants dans les écoles des Premières nations, bonifier le perfectionnement professionnel de tous les enseignants en Alberta, et créer des partenariats avec des établissements postsecondaires.

Le huitième, celui sur la sensibilisation aux traités et à la culture, vise à aider les autorités des écoles provinciales et des écoles des Premières nations à sensibiliser les étudiants au sujet de l'histoire des Premières nations, des traités, de la culture et des traditions, et à élaborer un curriculum à cette fin.

Finalement, le neuvième engagement porte sur l'approche globale en matière d'éducation. Celui-ci vise l'apprentissage expérientiel et celui rattaché aux ressources terrestres, les programmes sport-études et art-études, les activités parascolaires, et la préparation de la prochaine génération de dirigeants.

J'ai un tableau ici qui pourrait vous aider à bien comprendre. Il s'agit d'un aperçu de ce que l'on retrouve dans le protocole d'entente.

Le président : Pourriez-vous remettre ce document à la greffière pour que l'on puisse tous en avoir une copie, s'il vous plaît?

Mme Jackson : D'accord. Ceci n'est qu'un aperçu du protocole d'entente. Si nous avions plus de temps, je pourrais y aller plus en détail. Je voulais simplement souligner six points brefs.

Le chef Charles Weasel Head voulait insister sur le fait qu'il faut d'abord un changement d'attitude envers les peuples des Premières nations, de la part du gouvernement et des autres, et que sans cela, nous ne pourrons jamais apporter les changements nécessaires en matière d'éducation. Le Canada doit vraiment reconnaître les contributions des Premières nations.

Le gouvernement du Canada doit également accepter de reconnaître les peuples indigènes du Canada afin que nous puissions être des membres de la société, des membres actifs de la société. Nous ne pouvons plus être considérés comme un fardeau économique. Nous devons plutôt être considérés comme des membres actifs de la société en général, puisque nous avons cédé notre richesse : nos terres. Voilà ce que nous avons contribué au Canada jusqu'à aujourd'hui par l'entremise des traités. Cette contribution doit être reconnue. Ces traités ont un impact sur notre vie d'aujourd'hui.

Dans le cadre de nos recherches en vue du protocole d'entente, nous avons effectué une analyse des coûts du système scolaire provincial et du système scolaire des Premières nations. Les résultats nous apprennent que ce n'est pas uniquement les Premières nations qui doivent rendre des comptes. La province doit le faire également. Pourquoi le taux d'obtention de diplôme n'est-il pas plus élevé dans les écoles provinciales que dans les écoles des Premières nations? Dans certains cas, ce taux est même inférieur. Pourquoi? Les écoles provinciales ne sont jamais tenues de justifier ces résultats.

Nous avons également examiné les ententes incohérentes sur les frais de scolarité. Certaines accordent des sommes exorbitantes, soit environ 12 000 $ par enfant, alors que nous recevons moins de 10 000 $ par enfant. Et c'est tout ce que nous recevons par l'entremise des équivalents temps plein. Il y a de nombreuses incohérences au chapitre du financement.

Il en va de même pour les taux d'obtention de diplôme. Il faut donc développer un système qui permet aux deux parties d'avoir du succès et de mettre un terme aux accusations. Nous devons tous assumer notre part de responsabilité pour la réussite de nos enfants.

Nous devons avant tout respecter le protocole d'entente que nous venons de conclure et y affecter les fonds qu'il faut pour apporter les changements nécessaires si l'on veut atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés pour 2020. Nous espérons que nos taux d'obtention de diplôme auront doublé, même triplé, dans dix ans, que nos enfants auront du succès et qu'ils seront considérés comme des membres actifs de la société.

Le MAINC doit également tenir compte de notre langue et de notre culture dans le financement de base. Nous investissons beaucoup d'argent dans les programmes d'alphabétisation pour l'enseignement de l'anglais, mais il reste que nos aînés, nos parents et nos communautés continuent de faire valoir que la langue et la culture des Premières nations constituent une priorité à laquelle il faut consacrer des ressources. Nous voulons transmettre notre héritage à nos enfants afin qu'ils savent qui ils sont vraiment et renforcer ainsi notre identité. Nous avons besoin d'argent pour y parvenir, mais à l'heure actuelle, c'est le néant. Nous n'avons pas vu la moindre aide financière. Il est impératif que le MAINC et le gouvernement provincial considèrent la langue et la culture des Premières nations comme étant essentiels à la réussite de nos enfants et qu'ils prévoient, par conséquent, des fonds à ce chapitre dans le financement de base.

Le président : Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence et de leurs excellentes déclarations.

Avant d'enchaîner avec la période des questions, j'aimerais ajouter ma voix à celle du chef Laboucan sur le fait que les pensionnats indiens sont à l'origine du dysfonctionnement de nombreuses familles autochtones.

Je m'implique beaucoup auprès des communautés des Premières nations en dehors du Sénat, et j'ai été appelé à discuter avec quelques personnes. Je me suis entretenu avec une dame, qui est à la fois mère et grand-mère, pour connaître son avis sur certaines questions.

Avant de commencer, elle m'a confié n'avoir jamais révélé son histoire à personne. Elle m'a avoué que si elle est devenue une mère et une grand-mère aussi dysfonctionnelle et qu'elle est aux prises des problèmes de dépendance et autres, c'est parce qu'elle a été placée dans un pensionnat à l'âge de quatre ans, avec ses sœurs. On leur interdisait de se parler et de parler leur langue. Elles étaient punies lorsqu'elles le faisaient. Elle a ajouté qu'elle avait été agressée sexuellement à partir de l'âge de quatre ans et qu'elle n'en avait jamais parlé à personne. Elle s'est ensuite effondrée dans mes bras en me disant qu'elle ignorait pourquoi c'était à moi qu'elle avait raconté tout ça.

Cela renforce ce que Rose Laboucan a dit aujourd'hui. C'est une histoire d'horreur. Les gouvernements sont peut- être au courant, mais tous les Canadiens doivent l'être. Tout le monde doit savoir à quel point il est épouvantable pour ces gens de ne pas pouvoir s'occuper de leurs propres enfants ni de leurs petits-enfants à cause des sévices que les gouvernements leur ont fait subir.

Je ne veux pas que vous pensiez qu'on prend ce dossier à la légère. Nous le prenons très au sérieux. J'ai attendu longtemps avant d'en parler, étant donné que cette dame s'était confiée à moi. Tant que les Canadiens ne reconnaîtront pas l'horreur que nous avons créée, plutôt que les gouvernements précédents ont créée, je ne pense pas que nous pourrons régler le problème, et cela concerne tout le processus d'éducation.

Le sénateur Sibbeston : Dans les derniers jours, nous avons eu le privilège de nous rendre à Saskatoon, en Saskatchewan, et hier, dans la région d'Onion Lake, et nous avons vu de très bonnes écoles. Dans ces cas, ce sont les bandes et les communautés autochtones qui ont les reins assez solides pour financer les écoles et les programmes culturels et linguistiques qu'ils jugent nécessaires. C'est remarquable.

La situation dont on nous parle aujourd'hui est probablement plus représentative de ce que vivent les communautés des Premières nations, pour qui il est extrêmement difficile de maintenir l'accès à l'enseignement et pour qui l'éducation des enfants est une lutte constante.

Nous savons maintenant que la langue et la culture sont des éléments essentiels de l'éducation. On ne peut pas éduquer ou élever des enfants forts en les privant de leur langue et de leur culture, qui sont essentielles à la réalisation de soi. Autrement, on n'est qu'une personne à la peau brune qui n'a ni langue, ni culture, et il n'y a rien de pire au monde que de voir des gens ainsi déracinés de leur milieu à cause des pensionnats indiens.

Pendant que nous y sommes, nous devons savoir exactement quelles sont les mesures qui s'imposent. Selon vous, quelles sont les deux ou trois choses qui nous permettraient de jeter de solides assises sur lesquelles bâtir un programme d'éducation autochtone axé sur la langue et la culture? Je comprends que vous avez besoin d'argent, et comme le chef Laboucan l'a dit, vous devez également arriver à convaincre votre peuple.

Lorsque nous avons examiné l'intégration des langues et de la culture au programme scolaire, je me rappelle que nous avons tenu une séance publique dans le Nord, plus précisément à Fort Simpson, là où j'ai vécu au début des années 1970. Fort Simpson est composée à environ 60 p. 100 d'Autochtones, et lorsque nous avons parlé d'enseigner les langues autochtones à l'école, je me souviens que certains non-Autochtones avaient dit que si leurs enfants prononçaient un seul mot autochtone, qu'ils allaient leur laver la bouche avec du savon. Sachez que c'était le genre de réaction qu'avaient certains non-Autochtones face à l'apprentissage d'une langue autochtone.

Les Autochtones n'opposaient pas autant de résistance; n'empêche que, compte tenu des pensionnats indiens et de tous les efforts qu'ils ont déployés pour s'en sortir, beaucoup d'Autochtones ne veulent pas qu'on enseigne une langue autochtone à leurs enfants, étant donné qu'ils la parlent déjà — c'est le cas dans le Nord — et, selon eux, le but de l'éducation est d'apprendre l'anglais en vue de se trouver un emploi. Ils considèrent que c'est ce à quoi sert principalement l'enseignement.

Dans le Nord, on a plus de chance étant donné que les langues sont encore très présentes dans certaines petites communautés, mais plus au sud, je crains que les langues et la culture autochtones tendent à disparaître. Les enfants commencent l'école et n'ont aucune connaissance de leur langue autochtone.

Pourriez-vous nous faire part de deux ou trois mesures qu'il faut prendre à tout prix afin que nous puissions formuler des recommandations en conséquence dans notre rapport?

Mme Ayoungman : Puis-je répondre à cette question? Comme je l'ai dit dans ma déclaration, ce qu'on néglige le plus souvent, ce sont les établissements d'enseignement des Premières nations et tout ce qu'ils ont à offrir.

Dans ces établissements, on enseigne à nos enfants qui ils sont réellement et on s'engage activement dans un processus de décolonisation. Beaucoup d'adultes qui ont été laissés pour compte y reviennent, souvent à contre-cœur, parce que, ironiquement, bon nombre de nos établissements sont d'anciens pensionnats indiens. Ces personnes sont terrorisées à l'idée d'y mettre les pieds.

Par contre, une fois à l'intérieur, en raison de nos cours de langue et de culture, qui sont fondés sur notre histoire, les gens prennent de l'assurance et commencent à reconnaître la colonisation pour ce qu'elle est. Une fois qu'on les a décolonisés, ils deviennent des étudiants très forts et peuvent intégrer le système scolaire régulier. C'est l'une de nos grandes réussites.

Par ailleurs, il ne faut pas penser que toutes les réponses sont là, que ces établissements d'enseignement ordinaires nous comprennent et nous connaissent. J'ai parlé avec des professeurs autochtones qui travaillent dans ces établissements et, selon eux, ce que nous faisons est très insuffisant. Nous devons mettre sur pied une équipe de gens qui ont suffisamment de connaissances pour enseigner à notre peuple, et c'est ce que nous voyons prendre forme dans nos établissements. Ces établissements sont très négligés et je pense qu'il est temps qu'on y accorde une grande attention.

Mon travail avec ces gens des Premières nations et des établissements d'enseignement supérieur m'a énormément enrichie sur le plan personnel. J'enseignais avec les gens, avec nos aînés, et j'apprenais d'eux. Nous avons visité de nombreux endroits. C'est une expérience très émouvante d'apprendre d'eux et d'entendre nos étudiants dire : « Imagine cette roue ici; imagine toutes ces pierres. Un de mes ancêtres a placé cette pierre ici pour les sept prochaines générations en priant pour que je mène une bonne vie. Imagine. »

Je ne pense pas qu'on voit ce genre de choses dans le système régulier. On nous traite comme des numéros. C'est très différent.

J'ai assisté à de nombreuses cérémonies de remise de diplômes où j'ai vu des étudiants pleurer en disant : « Jamais je n'aurais pensé me rendre ici un jour. J'ai terminé mon rattrapage et j'ai été accepté au collège. Qui aurait cru que j'étudierais au collège un jour? »

Pour de très nombreuses raisons, grâce à notre soutien, des étudiants qui n'auraient jamais envisagé de s'installer en ville entreprennent des études dans leur communauté. Ils deviennent des étudiants très forts et partent ensuite poursuivre leurs études en ville. Une fois là-bas, lorsque leurs propres enfants deviennent victimes de discrimination à l'école, j'entends ces mêmes étudiants dire : « J'en suis maintenant à ma dernière année d'études, et si je ne voyais pas la lumière au bout du tunnel, je prendrais mes affaires et je retournerais chez nous. »

Le retour aux sources que nous prônons doit être reconnu. On l'a dit et répété dans d'innombrables rapports, et j'espère que vous examinerez attentivement ce document de travail sur l'enseignement postsecondaire.

Le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord de la Chambre des communes a mené des travaux sur l'enseignement postsecondaire et il a rédigé un rapport intitulé : Notre priorité la plus haute : l'éducation postsecondaire des Autochtones au Canada. Qu'en est-il advenu? Le gouvernement relègue aux oubliettes ses propres documents, même s'ils présentent de bonnes recommandations. Je prie pour que quelqu'un nous entende et agisse.

J'aimerais ajouter une dernière chose concernant les excuses qu'a présentées le gouvernement aux victimes des pensionnats indiens. Je possède trois diplômes d'études supérieures : deux maîtrises et un doctorat. J'ai obtenu des mentions; j'ai franchi toutes les étapes. Tout le monde me perçoit comme celle qui a réussi et qui s'est pleinement réalisée.

Quand j'ai entendu les excuses du gouvernement, j'ai pleuré toute la journée tellement j'étais bouleversée. On aurait dû nous dire : « Parce que nous avons complètement dépouillé les Autochtones de leur identité, nous allons leur offrir un financement considérable, de sorte qu'ils pourront planifier leur avenir et renouer avec leur langue et leur culture. » J'attends toujours. On se limite encore aux mesures de succès des autres. Dès que nous commençons à réussir, on nous coupe l'herbe sous le pied.

J'ai été co-directrice du Centre du savoir sur l'apprentissage chez les Autochtones du Conseil canadien sur l'apprentissage et, durant cette brève période, nous avons élaboré un modèle d'apprentissage holistique dont les Premières Nations peuvent s'inspirer pour leur propre système d'éducation. Nous sommes allés à Onion Lake, au Yukon, et à Nipissing, et nous avons tenu des discussions de planification avec les communautés. C'était très excitant. L'enthousiasme des gens était stupéfiant.

Durant cette très courte période, nous avons élaboré ces cadres de travail. Ce ne sont pas que des cadres rhétoriques; ce sont des cadres concrets dont peuvent se servir les gens. Cependant, on ne les a pas utilisés. Qu'arrive-t-il maintenant? Les gens s'efforcent encore de trouver des solutions alors qu'elles se trouvent juste sous leurs yeux. Il suffit de reconnaître le potentiel qu'offrent les établissements et les collèges autochtones pour l'élaboration des programmes de cours, la recherche, la consultation, la décolonisation et la formation des enseignants.

Comme vous pouvez le constater, je me passionne pour mon travail.

Le président : Il n'y a pas de doute là-dessus, madame Ayoungman.

Mme Ayoungman : Je crois en l'éducation des adultes, comme je crois en tous nos enfants, et je continuerai de défendre ma cause.

Le président : Je tiens à préciser que nous croyons, nous aussi, en l'éducation des adultes. La seule chose, c'est que cette étude constitue une première étape, et parce que nous voulons garder cette étude aussi concise, précise et ciblée que possible, nous ne nous sommes concentrés que sur l'enseignement de la maternelle à la douzième année. Peut-être que notre prochaine étape sera...

Mme Ayoungman : J'aimerais faire une dernière remarque pour conclure, après quoi je serai sage et j'écouterai.

Le président : Je dois céder la parole à Mme Laboucan.

Mme Ayoungman : D'accord. Il y a un mythe selon lequel nos centres d'apprentissage pour adultes ne représentent qu'une toute petite part du gâteau. Ces centres d'apprentissage adoptent une approche holistique et s'inscrivent dans un apprentissage continu. Ils sont étroitement liés à l'élaboration des programmes de la petite enfance, de façon à ce que les garderies répondent aux besoins des étudiants, de même qu'à la formation et à l'orientation des enseignants et à l'élaboration des programmes d'études.

Étant donné que nous adoptons une approche holistique d'apprentissage continu, nos centres sont loin de n'être qu'une petite part du gâteau. Ils font partie d'un tout.

Le président : Nous allons prendre au sérieux vos judicieux conseils.

Chef Laboucan, vous vouliez répondre au sénateur Sibbeston?

Mme Laboucan : Je pense qu'il est absolument essentiel d'élaborer un cadre de financement à long terme pour améliorer les résultats scolaires, mais en ce qui a trait à la langue et à la culture qui sont vouées à disparaître, pour l'instant, on ne voit pas le moindre financement. Pourtant, on voit beaucoup d'argent investi dans l'immersion française en Alberta, au Québec et dans le reste du Canada.

Aucun financement n'est prévu pour l'embauche des directeurs et l'élaboration des programmes de cours. Dans les nouvelles écoles bilingues, on alloue l'équivalent de 215 $ environ par enfant pour les cours de langue, alors que l'Alberta, par exemple, prévoit 2 261 $ par enfant pour un solide programme d'instruction en français.

Nous devrions nous pencher sur ce réinvestissement. Nous devrions mettre en place un processus pour la survie de la langue et de la culture, non seulement dans le système d'éducation, mais aussi dans la communauté même. J'aimerais que des cercles d'éducation soient créés, par exemple.

Nous devrions former une équipe qui, en plus d'enseigner la langue dans les écoles, ce qui permettrait de réduire le coût des cours de langue, enseignerait aussi aux parents. Nous ne pouvons pas simplement enseigner la langue aux enfants; nous devons l'enseigner également aux parents.

C'est pourquoi nous avons besoin d'un processus plus holistique et ouvert. Nous avons beau donner des cours de culture et de langue aux enfants, mais encore faut-il qu'ils puissent les mettre en pratique dans le futur.

Nous avons perdu une grande partie de nos connaissances traditionnelles. C'est ce que j'appelle le génocide du savoir traditionnel. Nous devons donc consigner ces connaissances aujourd'hui, sans quoi elles ne seront jamais transmises à nos enfants, et je pense que c'est crucial, étant donné que notre langue est profondément liée à la terre. Notre langue est liée à notre mode de vie. Elle est tellement belle.

J'aimerais pouvoir vous donner des exemples plus concrets de la façon de dire un mot autochtone gentil au moyen d'un geste de la main comme « Viens ici. » Ça fait peur. Ce sont de petits détails très anodins dans la façon dont nous nous adressons à nos enfants qui sont perdus dans le processus.

Ce ne sont que quelques-unes des observations dont je voulais vous faire part. Il y en aura d'autres plus loin dans le rapport. Je pense qu'il faut réunir une équipe de gens de partout au pays afin d'avoir une idée de la forme que cela pourrait prendre, avec certains faits et chiffres concrets, parce que vous connaissez notre réalité et la raison de notre présence. Nous voulons que ça change.

Récemment, j'ai écrit une lettre au premier ministre de ma province à propos de l'enseignement des langues qui devrait être obligatoire dans notre province, et il m'a répondu : « Encore une fois, nous vous remercions des efforts que vous déployez pour améliorer la réussite scolaire des étudiants issus des Premières Nations dans cette province. Mon gouvernement et moi avons cet objectif à cœur et nous nous réjouissons de travailler avec vous pour l'atteindre. »

Le partenariat établi dans le protocole d'entente, dont je vous ai remis une copie, est un partenariat tripartite, et nous devons le laisser tel quel. Peu importe sous quel angle on examine la situation, ce n'est pas parce qu'un enfant ne veut pas être instruit dans une école gérée par une bande qu'il ne peut pas avoir accès à ces mêmes possibilités que je pourrais lui offrir si, par exemple, je disposais d'un programme de qualité dans ma communauté.

Le président : Une fois que ces rapports auront été traduits, ils seront intégrés au compte rendu officiel du comité.

Vous parliez de l'apprentissage de la langue par les adultes. Les sénateurs Sibbeston, Hubley, Dyck et moi-même avons eu le privilège de nous rendre en Arizona, dans la nation Navajo de Window Rock. La première chose qui sautait aux yeux était la quantité de parents qui suivaient un programme d'immersion en navaho parce qu'ils avaient perdu leur langue, et ils l'apprenaient avec leurs enfants. Je pense que c'est une composante vitale. Cela ne concerne pas uniquement les jeunes enfants, mais nous tous.

Le sénateur Sibbeston : Considérez-vous que votre participation au niveau provincial ou au sein des conseils scolaires provinciaux est essentielle pour améliorer l'éducation des Premières nations?

Mme Laboucan : Oui, je pense que nous devons être impliqués, peu importe la façon d'examiner les choses. En même temps, un élément clé dont on ne parle pas, et qu'il faut résoudre à long terme et en douceur, à mon avis, c'est le racisme. C'est un élément essentiel aux résultats positifs susceptibles de faire suite à nos intentions d'accroître considérablement le nombre de nos diplômés.

Mme Jackson : C'est aussi ce que nous affirmons : il faut d'entrée de jeu un changement d'attitude. Il est malheureux que, de nos jours, si l'on se promène dans les rues de Calgary en demandant aux gens ordinaires ce qu'ils savent des peuples des Premières nations, ils penseront tout de suite à des choses négatives. Mais ces gens ignorent totalement combien il y a de Premières nations dans la seule province de l'Alberta, et ne savent pas à quoi ressemble notre mode de vie. Ils ne savent rien de nous.

Lorsqu'on est ignorant de ce genre de choses, cela perpétue le racisme; il faut s'y attaquer de façon positive.

Mme Ayoungman : J'ai un exemple concret en ce qui a trait au manque de connaissance de cette autre partie de la population.

Dans le cadre de notre travail conjoint entre collèges des Premières nations, nous établissons des partenariats les uns avec les autres. Nous avons également de nombreux partenariats avec des établissements de la majorité, mais nous élaborons conjointement des cours que nous espérons offrir en ligne en raison de cette même préoccupation liée au fait que les gens ne nous comprennent pas.

Nous espérons qu'ultimement, tous les étudiants de niveau postsecondaire seront tenus de suivre ces cours, qui sont propres à ce territoire, et qu'une fois qu'ils les auront suivis, ils auront acquis une meilleure compréhension.

Le sénateur Dyck : Merci à tous pour vos excellents exposés. Manifestement, non seulement vous comprenez ces questions, mais en plus, elles vous passionnent.

J'ai été tout à fait ravie d'apprendre qu'un protocole d'entente était intervenu entre les Premières nations des traités 6, 7 et 8, le gouvernement de l'Alberta et le gouvernement du Canada. J'ai deux questions là-dessus. Premièrement, les témoins de la Saskatchewan nous ont parlé tout à l'heure de l'importance des traités et du droit à l'éducation inhérent à nos traités. Comment les droits issus des traités ont-ils été intégrés à votre protocole d'entente, ou l'ont-ils même été? Cela faisait-il partie des négociations?

Deuxièmement, y a-t-il des leçons essentielles ou des trucs pour réussir dont vous voudriez faire part à d'autres organismes des Premières nations, de la Saskatchewan ou du Manitoba, disons, et qui les aideraient à faire avancer leurs protocoles d'entente plus rapidement ou plus efficacement?

Mme Jackson : Lorsque nous avons commencé à élaborer le protocole d'entente, les trois parties, les trois ordres de gouvernement ont décidé que nous traiterions de l'éducation des enfants, et dans cet objectif, nous avons dû laisser de côté... Nous devions nous concentrer sur l'éducation des enfants.

Quoi qu'il en soit, dans le préambule du document lui-même, le premier article traite de ce droit conféré par traité. On dit ce qui suit :

[Traduction] Attendu que les droits ancestraux et les droits issus de traités des Premières nations sont reconnus et confirmés à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et que les traités constituent un élément fondamental de la relation entre les Premières nations, le Canada et l'Alberta [...]

Cela est reconnu, et à l'article qui s'intitule « Portée du protocole d'entente », le premier paragraphe stipule :

[Traduction] Le présent protocole d'entente n'a pas pour effet d'abroger les droits existants autochtones ou issus des traités, tels que décrits et affirmés à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, ou d'y porter atteinte.

Le sénateur Dyck : Oui, merci. Je jugeais important de l'établir clairement aux fins du compte rendu.

Mme Laboucan : Nous ne pouvons affirmer que l'éducation est un droit issu des traités si nous ne l'exerçons pas. Ainsi, nous savons qu'en éduquant toute notre population, nous respectons les promesses faites par nos ancêtres dans le Traité no 8, au moins, ainsi que dans les traités 6 et 7.

Le président : Chers sénateurs, nous avons ici un autre témoin, M. Quintine Kootenay. Il est l'agent de liaison pour le grand chef de la Confédération des Premières nations signataires du Traité no 6. Malheureusement, notre temps est limité, mais si vous pouviez d'abord faire un bref exposé, monsieur, nous pourrions certainement ensuite poser quelques questions s'il reste du temps.

Quintine Kootenay, agent de liaison pour le grand chef, Confédération des Premières nations signataires du Traité no 6 : Bonjour à vous tous, sénateurs, chefs, chef national, spécialistes et anciens. Au nom de notre grand chef de la Confédération des Premières nations signataires du Traité no 6, je tiens à vous souhaiter la bienvenue sur notre territoire. Pardonnez-moi mon entrée. Nous pensions qu'il s'agirait d'une séance distincte.

En voyant les représentants ici présents, je suis certain qu'ils ont fait valoir non seulement les points de vue de leurs territoires visés par les traités, mais aussi ceux de l'Alberta.

À la Confédération des Premières nations signataires du Traité no 6, nous croyons que notre message est le même, et je pense que nous avons fait de nombreux efforts, à l'échelle régionale et nationale, pour nous réunir et faire front commun sur la question de l'éducation.

Le seul point que je pourrais ajouter, à ce stade-ci, c'est que les chefs des Premières nations de l'Alberta sont fermement convaincus que nous devons agir collectivement sur ce plan. Et, plus important encore, il nous faut une discussion davantage approfondie et inclusive qui tienne compte de toutes les parties concernées. Il n'est pas utile de faire avancer le dossier de l'éducation en l'absence d'une partie.

Un protocole d'entente est en cours de préparation ici, en Alberta. Et dans cet esprit et cette intention, nous, dans les régions de l'Alberta visées par les traités, nous abordons les choses ainsi : de façon collective. Alors je réitère, car j'ai entendu bien des fois ce que le chef et les spécialistes ont dit ici, que nous partageons les mêmes vues. Nous faisons également appel à ceux qui peuvent nous aider, notamment l'Assemblée des Premières Nations et nos députés fédéraux ou provinciaux, pour tirer au clair cette question. Et ce qui est encore plus important à nos yeux, c'est d'élargir cette discussion de politique pour en faire une discussion sur les droits légaux.

Que faudra-t-il pour en arriver là? Le gouvernement devra reconnaître qu'il s'agit d'un droit issu des traités, et cela devra être notre point de départ. Il ne s'agit pas de politiques d'élaboration et de mise en œuvre ou d'autres choses bureaucratiques qui font oublier la vraie question, à savoir qu'il s'agit d'un droit conféré par traité.

Le président : Merci d'avoir permis à notre comité de visiter votre territoire, et sachez que nous sommes honorés d'être là. Je vous remercie de votre allocution brève et précise.

Quelqu'un d'autre voudrait-il poser une question, maintenant?

Je vois que non. Vous avez si bien fait valoir votre cause que vous avez laissé sans voix ces sénateurs d'Ottawa. Vous l'avez fait avec tant de passion qu'ils sont craintifs — pas craintifs, mais pleins d'appréhension, je crois, car vous connaissez très bien votre sujet et avez fait de l'excellent travail dans ce domaine.

Je m'en voudrais de ne pas donner la parole à un bon ami à moi, qui est aussi un homme que j'ai appris à admirer jour après jour pour le travail qu'il accomplit pour les peuples des Premières nations. En tant que Métis, j'admire énormément le grand chef Shawn Atleo.

Chef Atleo, pourriez-vous vous approcher? J'aimerais que vous restiez tous là où vous êtes, si c'est possible, et que vous vous approchiez, chef Atleo; nous aimerions beaucoup que vous nous fassiez part de quelques réflexions. Je sais que vous devez partir à midi, mais installez-vous aux côtés du sénateur Greene Raine, si vous le voulez bien. Nous vous remercions de votre présence, monsieur.

M. Kootenay : Shawn Atleo est chef national et non grand chef.

Le président : Toutes mes excuses.

Shawn Atleo, chef national, Assemblée des Premières nations : En présence du chef Laboucan, j'ai le titre de neveu. C'est ma tante adoptive.

Nous avons entendu des propos éloquents — et je partage ce point de vue, ainsi que le vôtre, sénateur —, qui reflètent la passion du discours, la brillance et le génie dont notre peuple a toujours fait preuve, comme nous le voyons aujourd'hui.

Je ne crois pas que l'on puisse ajouter grand-chose à propos du sujet à l'étude. Je suis également très heureux d'être parmi vous sur ces territoires délimités par le Traité nº 6 avec mon collègue Guy Lonechild, chef régional de la Saskatchewan et chef de la FSIN, un homme que j'apprécie, que j'admire et que je respecte pour son leadership à la tête des Premières nations de la Saskatchewan. Il met tout en œuvre pour placer les étudiants et les apprenants à l'avant- plan, à la place qui leur revient.

Je pense au témoignage que vous venez d'entendre, à votre bienveillante attention et à votre leadership en tant que sénateurs. Nous sommes arrivés à un tournant dans ce pays. Dans le passé, un groupe a décidé d'une politique qui, durant 100 ans, a créé le genre de remous dont nous avons discuté ici brièvement et maintenant, nous en sommes à un moment où un groupe de sénateurs a choisi un secteur d'intervention, un sujet qui peut amener lui aussi d'importants changements.

Il y a eu les changements que le chef Laboucan a décrits : on est passé des dizaines de milliers de jeunes qui ne sont jamais sortis des pensionnats, des tombes anonymes et des familles laissées dans l'ignorance, à plus de 30 000 diplômés des niveaux d'études supérieurs, dont beaucoup sont ici aujourd'hui.

C'est vraiment un privilège incomparable et inattendu que de passer quelques minutes avec vous ici aujourd'hui, à mettre nos idées en commun. Nous en sommes arrivés à un moment important où ce comité doit poursuivre sur sa lancée et faire preuve de leadership pour ce pays. La tâche n'est pas facile.

Des exemples comme le protocole d'entente signé ici, en Alberta, montrent que les chefs et les grands chefs font preuve d'un grand sens du leadership afin de consolider les relations entre les pouvoirs publics, mais ils le font, comme on vient de le dire, sur une base de respect et de reconnaissance des rapports fondés sur les traités. C'est une occasion de respecter et de mettre en œuvre ce que les anciens avaient fortement recommandé.

Lors de l'installation du nouveau gouverneur général, son Excellence M. Johnston a parlé d'un livre que je suis justement en train de lire. Tout comme le chef Laboucan, M. Johnston nous enseigne. J'étais très content qu'il parle d'un livre intitulé Champlain's Dream et qu'il fasse une mise au point au sujet des relations qui existaient à l'époque dans ce pays. On a attribué la découverte de la Nouvelle-France à Champlain, et ce livre laisse entendre que les premiers rapports se sont établis dans le respect mutuel, la reconnaissance et la coexistence, mais cela n'a pas été le cas.

Je ne crois pas que l'on puisse mieux décrire la situation qu'on ne l'a fait ici, qu'il s'agisse de l'insuffisance des fonds en éducation physique ou en langues. Nous avons la possibilité de redresser les préjudices causés durant 100 ans dans les pensionnats, et vous avez l'occasion de montrer la voie à suivre.

Je crois que notre prochain défi, monsieur le président, est d'arriver ensemble à la ligne d'arrivée, là où nous entrerons dans une nouvelle ère de changements qui s'effectueront à un rythme accéléré.

Comme vous, j'ai passé du temps dans les écoles au cours des derniers jours, notamment à la Sunchild E-Learning Community; ce fut un témoignage incroyable. Il s'agit d'une école privée liée à une école de bande, une innovation. On y utilise les technologies en ligne. J'étais assis là, avec les enfants, et je pouvais voir à quel point ils étaient enthousiastes.

J'ai obtenu une maîtrise en ligne et je sais que cela permet de rester dans son milieu, à la maison, avec son peuple, sans s'en éloigner, tout en obtenant une formation de calibre mondial. Cela fonctionne pour eux.

Je constate que cette méthode connaît une expansion. Le chef régional et le chef de la FSIN m'ont dit qu'ils l'ont également adopté en Saskatchewan.

Les approches décrites ici, approches qui doivent être viables, ajoutent à l'excellent travail que l'on accomplit notamment en Alberta, grâce au protocole d'entente, et permettent à tous les pouvoirs publics de se comprendre afin que les enfants aient la possibilité de réussir sur le plan scolaire sur la base même de leur culture.

La langue est essentielle. Lorsque j'entends parler d'Onion Lake, par exemple, ou que je le vois de mes propres yeux, cela m'émeut, car je vois des enfants qui apprennent leur langue. Jusqu'en quatrième année, dans ce réseau scolaire, on offre une immersion complète.

Nous savons que les recherches universitaires semblent indiquer que l'apprentissage de plus d'une langue favorise la réussite scolaire et professionnelle à long terme. Bien sûr, nos jeunes apprendront l'anglais ou le français, puisque ce sont les langues dominantes dans ce pays; et c'est ce qu'ils doivent faire. Nous pouvons être multilingues. Cela fait partie de notre héritage. Les peuples métis ont montré qu'ils sont capables de réussir dans plus d'un milieu.

Je tiens à vous féliciter d'avoir choisi comme secteur d'intervention l'éducation des Premières nations, des Métis et des Inuits. Nous cheminerons avec vous, nous vous encouragerons dans cette voie et ensemble, nous accomplirons les changements dont nous rêvons pour nos jeunes. Après tout, c'est ce qui nous motive tous.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie beaucoup de votre important leadership.

Le président : Merci. Vous êtes un bon ami, et nous travaillerons ensemble afin de nous assurer de formuler des recommandations dont personne ne pourra faire fi dans ce pays.

J'aimerais simplement souligner une chose. J'étais très fier de vous lorsque vous avez pris la parole lors de l'installation du nouveau gouverneur général. Vous avez inspiré de la fierté à tous les Canadiens en tant qu'Autochtone, monsieur. Nous vous remercions encore de votre présence. Donnons-lui une bonne main d'applaudissements.

S'est-il présenté d'autres questions dans les dernières minutes? Il nous reste environ cinq minutes.

Le sénateur Raine : Nous avons été très impressionnés par l'école d'immersion crie à Onion Lake et à la fin de notre séjour, nous avons eu l'occasion de parler à la mère d'un des enfants, qui a exprimé une préoccupation, même si elle espérait qu'avec le temps, la situation se réglerait d'elle-même.

Il y a deux écoles élémentaires dans la réserve : l'une est une école d'immersion, l'autre non. La majorité des parents préfèrent encore envoyer leurs enfants à l'école qui n'offre pas de programme d'immersion, et il me semble qu'ils ne comprennent pas vraiment l'occasion qu'ils ratent. Plus tard, des problèmes surgissent lorsque les enfants fréquentent l'école intermédiaire, et ceux qui ont bénéficié d'une si belle éducation fondée sur leurs traditions subissent rapidement l'influence des autres, si l'on peut dire.

Je voulais simplement dire qu'à mon avis, il serait très avantageux de faire participer non seulement les enfants, mais aussi les adultes de la communauté à l'élaboration des programmes d'immersion. C'est pourquoi je suis très heureux que vous soyez ici pour parler de l'éducation postsecondaire, même si cela n'entre pas dans notre mandat dans le cadre de cette étude. L'éducation des adultes et la formation continue sont essentielles à la réussite de l'ensemble du programme; nous vous remercions donc d'être ici.

Mme Ayoungman : Je vous ai distribué un autre document, celui qui a une couverture verte; c'est la nouvelle version de l'ancien document intitulé La maîtrise indienne de l'éducation indienne, élaborée à l'initiative du comité des chefs sur l'éducation. Je tenais à dire, à propos de ce document, que les collèges des Premières nations mettent en pratique beaucoup de ce qui se trouve dans ce document et que pourtant, nous nous sentons marginalisés. Je dirais même que nous sommes traités avec dédain et mépris, si je puis me permettre.

Nous faisons l'objet de critiques; pourtant, nous travaillons à réaliser notre vision de la véritable administration locale. J'espère vraiment qu'un jour, les gens adopteront un point de vue décolonisé et comprendront de quoi nous parlons.

En ce qui a trait à l'immersion, nos collèges dirigent également beaucoup de programmes de langues pour nos communautés. Ils forment les professeurs de langues qui enseigneront dans les écoles. Nous donnons beaucoup de formation sur l'utilisation de la technologie. Nous venons tout juste de recevoir un jeu Nintendo DSi XL, et j'élabore actuellement un programme dans lequel les enfants pourront jouer au DSi XL tout en apprenant une langue.

Nous essayons d'adopter des approches novatrices, et je félicite nos frères et nos sœurs de partout dans le monde qui travaillent dans ce domaine. Il y a environ deux ans, j'ai rencontré une dame de la Nouvelle-Zélande, une Maori. Elle a commencé l'école dans un programme de renaissance de la langue. Elle a fréquenté une école d'immersion. Et elle prépare actuellement un doctorat en géophysique, en maori.

Le président : Au nom des sénateurs, je tiens à vous remercier de votre présence. Je ne peux vous dire à quel point cette séance a été instructive; je viens de me rendre compte de ce qu'il nous reste encore à apprendre. Je suppose que nous ne cesserons jamais d'apprendre.

S'il y a d'autres documents que vous souhaitez mettre à la disposition des membres du comité, vous pouvez les remettre à la greffière, Marcy Zlotnick, qui se trouve ici, à ma gauche. Sur ce, nous vous remercions encore une fois.

(La séance est levée.)


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