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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 3 - Témoignages du 20 avril 2010


OTTAWA, le mardi 20 avril 2010

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 17 h 30 pour étudier l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier au Canada.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je vois que nous avons le quorum. Je déclare la séance ouverte.

[Traduction]

Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Le but de la réunion d'aujourd'hui est d'informer et d'instruire les membres au sujet de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux.

[Français]

Nous accueillons, aujourd'hui, les représentants de deux ministères : du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, M. Don Stephenson, sous-ministre adjoint, Politique et négociations commerciales.

[Traduction]

Nous accueillons aussi Colin Bird, directeur de la Division du bois d'œuvre. De Ressources naturelles Canada, nous accueillons Jim Farrell, sous-ministre adjoint, Service canadien des forêts.

[Français]

Et du ministère des Ressources naturelles Canada, M. Bob Jones, directeur, Industrie et Commerce, Direction de la politique, de l'économie et de l'industrie, Service canadien des forêts.

[Traduction]

Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Je suis le sénateur Percy Mockler. Je viens du Nouveau- Brunswick, et je suis le président du comité.

J'invite maintenant les témoins à présenter leur exposé, puis suivra une période de questions et de réponses. On me dit que nous allons commencer par M. Stephenson.

Don Stephenson, sous-ministre adjoint, Politique et négociations commerciales, Affaires étrangères et Commerce international Canada : Nous nous réjouissons de cette occasion d'informer le comité au sujet de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux et sur le commerce du bois d'œuvre entre le Canada et les États-Unis. Je vais vous parler du différend historique entre les deux pays et du régime commercial actuel.

Mon premier point, c'est que tant l'industrie que les provinces sont très favorables à l'Accord sur le bois d'œuvre résineux dans sa forme actuelle. En fait, elles ne l'ont jamais été autant depuis qu'il est en vigueur. Des représentants des provinces et de l'industrie ont tous affirmé que l'Accord offrait un certain degré de stabilité au sein d'un marché particulièrement incertain.

Comme vous le savez, le bois d'œuvre est un des dossiers les plus difficiles du Canada dans le commerce bilatéral avec les États-Unis. Il y avait déjà des frictions commerciales dans ce secteur avant la Confédération, mais la phase moderne du différend remonte à 1982, année où les États-Unis ont entrepris leur première procédure en recours commercial contre le bois d'œuvre canadien.

Quelle est la source du différend? Nous avons préparé une série de diapositives. Nous sommes à la page 2 du document. Les différences qui existent en matière de propriété foncière constituent l'une des principales sources de tension entre les deux pays. Cette propriété est principalement publique au Canada et privée aux États-Unis. Nettement plus de 90 p. 100 des forêts canadiennes sont des terres publiques, et les provinces gèrent 70 p. 100 de ces ressources. Elles les gèrent en concluant des ententes ou d'autres arrangements avec des entreprises privées qui exploitent le bois et effectuent une gestion durable des forêts.

Les États-Unis, en revanche, ont vendu l'immense majorité de leurs terres forestières publiques il y a plus de 100 ans, sans que cela ne rapporte beaucoup. Environ 70 p. 100 de leurs forêts sont des propriétés privées. Aux États-Unis, la gestion forestière, qui est contrôlée par le secteur privé, ne permet pas l'approche commune de la gestion des forêts que permet le régime canadien.

Au Canada, le prix facturé pour exploiter le bois, que l'on appelle le droit de coupe, est généralement fixé par rapport aux indicateurs du marché. La principale revendication de l'industrie américaine concerne le fait que l'établissement des prix par les provinces aboutit à des droits de coupe subventionnés, ce qui constitue, en fait, des pratiques commerciales déloyales.

Les personnes ayant des intérêts dans le bois d'œuvre américain se servent, depuis près de 30 ans, des différences de gestion des forêts entre le Canada et les États-Unis et des prétendues subventions canadiennes pour justifier une limitation des importations de bois d'œuvre canadien en faisant appliquer les lois américaines sur les recours commerciaux.

[Français]

Depuis 1982, le gouvernement américain a répondu aux pressions de l'industrie en menant quatre enquêtes en vue de l'imposition de droit compensatoire, et une enquête antidumping. Lorsque ces enquêtes ont abouté à l'imposition de droit, le Canada a utilisé toutes les contestations judiciaires possibles.

Dans les premiers différends, le Canada a demandé la constitution de groupes spéciaux en vertu du GATT et de l'entente de libre échange Canada-États-Unis.

Dans le différend qui a duré de 2001 à 2006, il a recouru de multiples fois à l'OMC et à des procédures de l'ALÉNA et aux tribunaux américains.

Le Canada a toujours connu beaucoup de succès dans ces litiges. Mais les droits américains restent en vigueur pendant les contestations judiciaires. De plus, le fait que le Canada remporte un litige dans une série de procédures en recours commercial n'empêche pas l'industrie américaine de déposer de nouvelles plaintes et de commencer un nouveau cycle de procédure en recours commercial. Malheureusement, l'industrie américaine du bois d'œuvre bénéficie de la protection de ces mesures de recours commercial pendant ce temps. En outre, même si les mesures sont en bout de ligne jugées illégales, le cycle peut recommencer avec de nouvelles allégations de commerce déloyal de l'industrie américaine, c'est-à-dire que même quand ils perdent, ils gagnent.

Étant donné cette réalité, le Canada a décidé de gérer le différend par des accords. Le marché dans ces accords est fondamentalement que nous limitons nos exportations en contrepartie d'un engagement des États-Unis de ne pas entamer de recours commerciaux.

Le Canada a conclu trois accords de ce type au cours des 25 dernières années, à savoir le protocole d'entente entre le Canada et les États-Unis de 1986, en vigueur jusqu'en 1991; l'Accord sur le bois d'œuvre résineux de 1996, en vigueur jusqu'en 2001; et l'Accord sur le bois d'œuvre résineux de 2006, actuellement en vigueur.

La diapositive no 3 présente les grandes lignes de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux, signé le 12 septembre 2006 et entré en vigueur le 12 octobre de la même année.

Les États-Unis ont convenu de révoquer les ordonnances américaines constituant les droits et de ne prendre aucune autre mesure commerciale, et de rembourser plus de cinq milliards de dollars en droits et intérêts.

Le Canada a convenu de mettre fin au litige commercial contre les États-Unis, verser un milliard de dollars américains à des intérêts américains, y compris des organisations caritatives comme Habitat for Humanity, et imposer des droits et des contingences à l'exportation dont les recettes sont transférées aux provinces.

Le comité mixte du bois d'œuvre résineux gère l'accord et le conseil binational de l'industrie encourage l'industrie à coopérer. Le Canada a nommé des chefs de délégation pour consulter les provinces et un comité consultatif pour consulter l'industrie. Par ailleurs, le Canada a accepté de ne pas fournir à son industrie de subventions ou d'autres avantages qui compenseraient directement ou indirectement les droits à l'exportation ou les limites de volume.

Des interprétations divergentes de cette obligation ont conduit à l'un des deux arbitrages rendus en vertu de l'accord dont je parlerai tantôt.

[Traduction]

À la diapositive 5, nous avons un résumé d'un des éléments clés de l'Accord, à savoir les mesures à l'exportation. Les exportateurs paient des droits à l'exportation quand les prix du bois d'œuvre sont inférieurs à 355 $ US les mille pieds- planche. Les provinces ont le choix entre deux options : l'option A, qui consiste en des droits à l'exportation qui varient selon le prix, ou l'option B, qui consiste en des droits à l'exportation assortis d'une limitation du volume, l'un et l'autre variant selon le prix.

La Colombie-Britannique et l'Alberta ont choisi l'option A, tandis que la Saskatchewan, le Manitoba, l'Ontario et le Québec ont choisi l'option B. Les recettes provenant des droits à l'exportation sont transférées aux provinces, contrairement aux droits perçus par les États-Unis, qui sont recueillis par l'État. À ce jour, 907 millions de dollars provenant des recettes des droits à l'exportation ont été transférés aux provinces.

Je vais maintenant parler de l'arbitrage en vertu de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux. L'ABR prévoit un arbitrage obligatoire pour régler les différends relatifs à toute question soulevée dans le cadre de l'Accord.

Depuis l'entrée en vigueur de l'Accord, les États-Unis ont demandé deux arbitrages. Les deux diapositives qui suivent portent sur ces arbitrages. Le premier arbitrage concernait l'application d'un « facteur d'ajustement », disposition technique qui a une incidence sur le fonctionnement des mesures à l'exportation. En mars 2008, il a été conclu que le Canada avait enfreint l'ABR relativement aux provinces ayant choisi l'option B parce qu'il n'a pas appliqué le facteur d'ajustement de janvier à juillet 2007. Les États-Unis ont rejeté la proposition canadienne de règlement en espèces et ont imposé des droits de douane de 10 p. 100 sur les importations en provenance des provinces ayant choisi l'option B. En septembre 2009, le tribunal a conclu que l'offre du Canada n'avait pas « remédié au manquement » et a déclaré que le Canada devait imposer un ajustement aux droits à l'exportation pour remplacer les droits américains. Il a demandé aux deux parties d'agir de bonne foi dans la transition entre la collecte des droits américains et canadiens.

Le gouvernement a déposé le projet de loi C-9 afin de se conformer à la décision du tribunal. Des pourparlers sont en cours avec les États-Unis pour déterminer une date de transition appropriée pour le passage des droits américains aux droits canadiens. Les représentants américains ont fait savoir que les États-Unis sont prêts à créditer au Canada les droits qu'ils ont perçus depuis le 15 avril 2009, estimés à 24,5 millions de dollars canadiens en date du 1er avril 2010.

Le deuxième arbitrage vise plusieurs programmes provinciaux ontariens et québécois. Il est encore devant un tribunal et concerne les programmes énumérés à la diapositive 7. Une autre audience pourra avoir lieu les 24 et 25 août 2010, au besoin. Le tribunal devrait rendre son jugement final à la fin de 2010.

La diapositive suivante, la diapositive 8, contient un bref aperçu d'un autre dossier chaud. Depuis 2008, l'industrie américaine du bois d'œuvre se dit inquiète de l'augmentation de grumes récoltées à des droits de coupe plus élevés fixés par la Colombie-Britannique. Il s'agit de bois de qualité médiocre appelé grumes de classe 4. Toutefois, cette augmentation est attribuable à l'épidémie de dendroctone du pin ponderosa et au déclin de la qualité des pinèdes coupées attribuable à celle-ci, et au fait que le système de fixation des prix de la Colombie-Britannique n'a pas été modifié. Les affirmations de l'industrie américaine selon lesquelles le prix du bois d'œuvre pratiqué est déloyal ne sont pas fondées. Cette pratique est autorisée dans l'Accord sur le bois d'œuvre résineux.

Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international s'efforce constamment de contrer les allégations de l'industrie américaine concernant les violations présumées de l'ABR par le Canada en maintenant de bonnes relations avec le Bureau du représentant américain au Commerce, avec le département du Commerce et avec le reste de l'administration américaine, par l'entremise de mécanismes officiels et officieux. De plus, le MAECI consulte régulièrement d'autres ministères fédéraux, notamment Ressources naturelles Canada, en ce qui concerne les programmes en place dans les collectivités qui dépendent des forêts, afin de s'assurer de leur entière conformité avec les obligations commerciales internationales, y compris l'Accord sur le bois d'œuvre résineux.

Je conclurai mes remarques en soulignant que notre industrie préfère nettement le libre-échange en ce qui a trait au bois d'œuvre. Elle reconnaît toutefois, que l'Accord sur le bois d'œuvre résineux a des retombées positives pour tous les Canadiens puisqu'il met fin à un long différend et apporte une certaine stabilité à l'industrie du bois d'œuvre.

Je répondrai volontiers à vos questions.

Le président : Merci. Je crois que nous entendrons maintenant les commentaires de M. Farrell, puis nous passerons aux questions.

Jim Farrell, sous-ministre adjoint, Service canadien des forêts, Ressources naturelles Canada : Merci beaucoup, monsieur le président. Je crois que nous avons remis à chacun des membres une copie d'un bref exposé qui traite des marchés de produits de bois canadiens. Il est assez volumineux, donc je n'aborderai que les grandes lignes, compte tenu du temps dont nous disposons. Nous avons décidé de distribuer l'exposé, essentiellement pour permettre à chaque sénateur d'obtenir de l'information plus détaillée.

Je vais rapidement passer à la diapositive 3, qui traite des exportations canadiennes. Les produits forestiers représentent tout juste un peu moins de 2 p. 100 du produit intérieur brut canadien. Le Canada est le plus important exportateur de produits forestiers au monde, puisque la valeur de ses exportations représente environ 23,6 milliards de dollars selon les données de 2009. Les exportations de produits forestiers du Canada représentent environ 10 p. 100 des exportations à l'échelle mondiale.

Comme vous pouvez le voir dans le diagramme à secteurs, les États-Unis forment l'un des principaux marchés pour les produits forestiers canadiens — et pas seulement pour le bois d'œuvre.

La diapositive qui suit traite aussi de la destination, cette fois pour le bois d'œuvre résineux dont a parlé mon collègue tout à l'heure. Encore une fois, en 2009, le marché national a représenté un peu plus de 40 p. 100, mais les États-Unis comptaient pour 44 p. 100. En 2009, nous pouvions déjà constater les effets du ralentissement sur le marché américain, ce qui signifie que, d'une certaine façon, les données de 2009 ne font pas assez ressortir l'importance du marché américain. Au cours d'une année normale, le marché est plus grand, et la part que représentent les États-Unis est aussi plus grande.

J'attire votre attention sur la portion inférieure du diagramme — celle qui représente le bois d'œuvre destiné à l'étranger, soit 15 p. 100 du bois d'œuvre. Pour donner aux membres du comité une idée de la répartition des produits forestiers à l'échelle du Canada, je dirai que, de façon générale, la majeure partie des produits du bois, surtout le bois d'œuvre, se trouve dans l'ouest du Canada. Dans l'est du Canada, on retrouve plutôt, en général, la production de pâte et papier, surtout destinée à l'industrie du papier journal. Les diverses régions du pays ne dépendent donc pas toutes également des produits forestiers, même si les données utilisées datent d'il y a déjà quelque temps et ne tiennent pas complètement compte, en quelque sorte, de ce qui s'est produit au cours des deux dernières années. Comme vous le savez sûrement, monsieur le président, si l'on observe le pourcentage du PIB, le Nouveau-Brunswick est probablement la province canadienne qui dépend le plus du secteur des produits forestiers. Cependant, en Colombie-Britannique, ce pourcentage est d'un peu plus de 3 p. 100, tandis qu'au Québec, il est d'un peu plus de 2 p. 100. Encore une fois, les industries ont évolué de diverses façons au fil du temps, et, dans l'ouest du pays, c'est l'industrie du bois massif qui s'est imposée, tandis que, dans l'est du pays, c'est plutôt l'industrie des pâtes et papiers et du papier journal qui s'est imposée.

La diapositive qui suit présente les exportations de produits de bois canadiens. Le graphique qui se trouve à gauche illustre clairement, encore une fois, ce qui est arrivé à nos exportations de produits de bois aux États-Unis depuis 2005- 2006. L'industrie canadienne des produits de bois est donc, encore une fois, l'une des premières à subir les répercussions des prêts hypothécaires à risque et de l'effondrement du secteur immobilier aux États-Unis. Aujourd'hui, si l'on prend la valeur plutôt que le volume, les marchés d'exportation, pris à titre de pourcentage des envois en général, jouent un rôle distinct de celui qu'ils ont joué par le passé.

Bien conscient de ce changement, Ressources naturelles Canada a collaboré étroitement avec les provinces et le secteur des produits forestiers depuis le début de 2002, essentiellement pour explorer les occasions d'affaires en Asie. Jusqu'au début des années 1990, le second marché en importance pour le Canada était l'Europe. Les choses ont commencé à changer à partir du milieu des années 1990, quand les marchés américains et japonais ont pris du mieux. À l'époque, le Japon a supplanté l'Union européenne à titre de deuxième marché du bois en importance. Au cours des 12 derniers mois, la Chine en est venue à remplacer le Japon à titre de second marché en importance pour l'exportation des produits de bois canadiens.

Les responsables du Programme canadien d'exportation de produits de bois de RNCan ont collaboré avec les provinces, surtout la Colombie-Britannique et le Québec, de même qu'avec les entreprises de production de bois et leurs associations professionnelles dès le début des travaux d'expansion du marché concernant les codes et les normes étant donné que la plupart de ces exportations de bois sont associées, d'une façon ou d'une autre, à la construction résidentielle ou non résidentielle. Plus récemment, à partir de 2006-2007, le ministère a mis sur pied un programme national semblable à l'échelle de l'Amérique du Nord dont l'objectif était d'explorer les façons possibles d'utiliser le bois à des fins de construction non résidentielle, par exemple pour la construction de centres communautaires, d'infrastructures municipales ou d'immeubles gouvernementaux. Un certain nombre de provinces, dont la Colombie-Britannique et le Québec, ont adopté des politiques pour élargir l'utilisation du bois. Ces politiques favoriseront les investissements publics destinés à l'utilisation du bois dans la construction non résidentielle subventionnée par l'État.

La Chine constitue un exemple intéressant; le travail d'expansion du marché a commencé en 1999 et en 2000. De bien des façons, les résultats précoces auxquels nous avons assisté depuis un an ou un peu plus ont été rendus possibles par ce qui s'est produit aux États-Unis au cours des dernières années. Il y a eu une incroyable augmentation des exportations de produits de bois vers la Chine. Les chiffres ne sont pas énormes si on les compare aux chiffres sur les exportations vers les États-Unis, mais l'augmentation de volume a été très importante et s'est faite sur une période relativement courte. À l'heure actuelle, le Canada est le principal exportateur de produits de bois vers la Chine. Cette situation est de très bon augure pour les occasions d'affaires qui pourraient se présenter en Chine.

Les envois effectués vers la Chine en février 2010 étaient plus importants que ce que nous avons envoyé en Chine pendant tout 2001. Un certain nombre d'entreprises ont été prises au dépourvu par le rythme de l'expansion du marché. Il y a un an et demi, l'intérêt pour la Chine était plutôt tiède. On s'occupait surtout d'élaborer des normes et des codes, mais l'intérêt est maintenant très élevé, surtout dans l'ouest du Canada. Si on prenait tous les envois effectués en Chine au cours d'une année, ils représenteraient probablement l'équivalent du bois d'œuvre produit par trois scieries de taille moyenne qui fonctionneraient 24 heures sur 24, sept jours sur sept. À mesure que le temps avance, nous pensons que le marché américain s'améliorera. Nous avons vu, récemment, un mouvement des prix, et la Chine offre des possibilités de diversification des destinations du bois, probablement davantage pour les entreprises de l'ouest que pour celles du centre ou de l'est du pays.

La Corée du Sud est un pays où le revenu disponible par habitant a beaucoup augmenté. En 2009, le revenu disponible atteignait près de 28 000 $ par année, tandis qu'il n'était que de 15 000 $ par année en 1999. Il y a de plus en plus de possibilités en Corée du Sud. Le gouvernement du Canada dispose d'un bureau de partenariat avec l'industrie canadienne sur place dont le mandat est de faire la promotion de l'utilisation du bois canadien, surtout dans la construction résidentielle. Le bureau collabore avec les administrations sur place pour éliminer les obstacles imposés par les normes et les codes et appuyer l'utilisation du bois pour la construction.

Le Canada est présent sur le marché japonais depuis 25 à 30 ans. Le Japon a connu, et continue de connaître, des difficultés économiques, ce qui fait que nos envois ont diminué au fil du temps. Cependant, même si le pourcentage que représente ce marché diminue au fil des ans, la part du marché que représente le Canada demeure constante. Elle a peut- être même augmenté légèrement. L'évolution de ce marché au cours des 10 prochaines années dépendra probablement des enjeux économiques plus importants qui touchent le Japon.

L'Europe a surtout été un marché pour l'est du Canada. Nous considérons le marché européen comme un marché ayant une valeur pour les produits spécialisés haut de gamme, ce qui est particulièrement intéressant pour l'Ontario, le Québec et les provinces de l'Atlantique. Le Royaume-Uni s'intéresse grandement aux maisons préfabriquées, plus particulièrement aux maisons à haut rendement énergétique.

En Chine, il y a cinq ans, on faisait valoir le coût et la durabilité du bois pour encourager son utilisation dans la construction résidentielle. Au cours des dernières années, toute la question du rendement énergétique a pris une place importante dans le programme de commercialisation. La demande énergétique en Chine qui est requise pour soutenir la croissance annuelle du pays est stupéfiante.

Le gouvernement chinois cherche partout au sein de son économie des façons de continuer à profiter de la croissance et de la prospérité tout en diversifiant ses sources d'énergie ou en réduisant sa dépendance envers les énergies traditionnelles. Dans certaines régions de la Chine, l'idée d'une maison de style canadien ayant un rendement énergétique semblable à celui de nos maisons au Canada, et les coûts associés à une telle maison, est une idée séduisante. Cependant, le plus grand défi pour la Chine concerne la densité dans la plupart des grandes villes, si ce n'est dans toutes les grandes villes, où l'on souhaite construire en hauteur plutôt qu'en largeur, mais la hauteur d'un immeuble construit en bois ne peut pas dépasser certaines limites. Récemment, un protocole d'entente a été signé par le Canada, la Colombie-Britannique et la Chine à Beijing concernant la construction d'un immeuble résidentiel en bois de six étages à Beijing à titre de maison de démonstration. Nous continuons à nous opposer à la tradition culturelle qui veut que le bois ne soit pas un matériau intéressant, essentiellement pour des raisons de durabilité et d'inflammabilité.

La plupart des mesures d'expansion du marché reposent sur des relations intergouvernementales au sujet de certains codes et de certaines normes techniques. À mesure que ces problèmes sont éliminés, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à pouvoir faire ce qu'elles ont à faire, c'est-à-dire aller rencontrer des gens, établir des liens et vendre des produits.

Monsieur le président, si cet exposé vous convient, j'arrêterais maintenant.

Le président : Passons maintenant aux questions et réponses.

Le sénateur Mercer : Je trouve cela intéressant mais aussi troublant. À titre d'habitant de l'est du pays, la préoccupation du Canada et de RNCan et du MAECI pour le bois d'œuvre me rend fou. Les chiffres qui sont donnés à la page 5 de la présentation révèlent que, quand on additionne les chiffres pour le marché des pâtes et papiers pour l'est du Canada — de l'Ontario vers l'est —, on obtient un total de 21,4 milliards de dollars. Si on ajoute les chiffres qui représentent le marché des pâtes et papiers dans l'Ouest, soit 8 milliards de dollars, on obtient 29,4 milliards de dollars. Si je calcule bien, on parle, pour le bois d'œuvre, d'environ 21,7 milliards de dollars. Dans l'avenir, on continuera d'utiliser le bois d'œuvre, mais on ne continuera pas d'utiliser les pâtes et papiers. Des usines ferment dans l'est du Canada et ne rouvriront pas parce que nous évitons tous d'utiliser du papier. Les usines de pâtes et papiers ferment, et c'est pourquoi cela m'inquiète un peu de voir que nous continuons à parler de la commercialisation du bois d'œuvre.

Je veux entendre dire que quelqu'un fait quelque chose pour aider l'industrie des pâtes et papiers. C'est un enjeu qui me préoccupe pour ma province d'origine — mais regardez les chiffres qui nous ont été donnés aujourd'hui pour l'est du Canada : l'industrie des pâtes et papiers représente 21,4 milliards de dollars. Ces chiffres équivalent à la totalité du marché du bois d'œuvre pour tout le Canada. Pour tous les acteurs du secteur des pâtes et papiers dans l'ouest du Canada, ce problème est plus grave que celui qui touche le bois d'œuvre. J'ai une question au sujet de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux, mais j'aimerais entendre votre point de vue sur mes préoccupations concernant les pâtes et papiers.

M. Farrell : Je vais répondre à la question et l'aborder par un angle peut-être un peu différent. L'industrie du papier journal a commencé à décliner il y a cinq ou six ans. Vous avez tout à fait raison. À bien des égards, l'industrie canadienne du papier journal dépend grandement du marché nord-américain. Nous avons assisté à une diminution constante et à long terme de l'utilisation de papier journal, ce qui a entraîné une diminution des prix et de la concurrence. Nous avons assisté à beaucoup de fermetures à cause de cette diminution, surtout en Ontario, et Québec et dans les provinces de l'Atlantique. Nous avons aussi constaté un intérêt accru pour la bioénergie. Certaines provinces ont offert des incitatifs pour que les résidus qui n'étaient plus utilisés dans les usines de pâtes et papiers soient utilisés dans le secteur de la bioénergie.

Nous avons entrepris des travaux avec l'Association des produits forestiers du Canada et avec FPInnovations pour tenter de comprendre où en étaient rendues les technologies — à quel point elles pourraient bientôt être commercialisées — et quels étaient les facteurs qui entraient véritablement en ligne de compte pour déterminer les prix des résidus. Nous avons conclu que, si le Canada était à la recherche d'une industrie des produits forestiers qui peut profiter pleinement de certains nouveaux partenariats, que ce soit dans le secteur des bioproduits ou de l'énergie, l'industrie a besoin, d'abord et avant tout, d'une industrie du bois massif rentable et concurrentielle. L'industrie du bois massif compense essentiellement pour certains coûts de livraison associés à la fibre.

Si nous partons de ce point pour examiner les types d'investissements effectués par le ministère des Ressources naturelles, par exemple dans l'écologisation des pâtes et papiers, nous constatons que le ministère a investi un milliard de dollars dans l'infrastructure de pâtes et papiers à l'échelle du pays. Nous avons aussi un programme-pilote de 40 millions de dollars, encore une fois dans l'industrie des pâtes et papiers, pour favoriser les nouvelles technologies qui permettent de produire d'autres choses que des pâtes et explorer, peut-être, des variations de la bioénergie, par exemple par la pyrolyse. Nous sommes à la recherche de projets-pilotes qui font une nouvelle utilisation des nanotechnologies, comme le développement de nanocellulose cristalline, qui est, encore une fois, un produit à grande valeur ajoutée qui peut être fabriqué à partir de la pâte, dans une sorte d'usine de pâtes remodelée, un peu comme une bioraffinerie.

Au cours des dernières années, nous nous sommes beaucoup occupés d'investir dans la recherche et le développement pour faire avancer les projets pilotes et la commercialisation et pour profiter des possibilités qui s'offrent à nous de mieux utiliser la fibre ligneuse canadienne. Ce que l'on vise, essentiellement, c'est de solidifier le secteur du bois qui s'occupe de la première transformation. La seconde transformation concerne les résidus.

M. Stephenson : Pour ce qui est de la politique commerciale, il serait juste de dire que nous avons consacré beaucoup de temps à l'Accord sur le bois d'œuvre résineux. C'est notre bête noire, mais on ne peut pas dire que nous avons négligé les autres enjeux intéressants, à part le secteur des pâtes et papiers. L'an dernier, il y a eu les subventions aux liqueurs noires aux États-Unis. Les sociétés de pâtes et papiers ont obtenu ces énormes subventions qui visaient à promouvoir l'utilisation de sources d'énergie de remplacement aux États-Unis.

Le sénateur Mercer : Nous connaissons bien ces subventions.

M. Stephenson : Les subventions ont suscité beaucoup de controverse pour le ministre du Commerce international et le premier ministre. Maintenant, les liqueurs noires ne sont plus admissibles à ces subventions.

Le sénateur Mercer : Nous avons discuté ici des liqueurs noires. J'ai toujours dit que la liqueur noire que je connais bien, c'est le rhum, et on y ajoute habituellement du Coke.

Chaque fois que nous rencontrons des représentants du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et du ministère des Ressources naturelles du Canada, chaque fois qu'il y a un projet-pilote ou une mission commerciale, nous parlons du bois d'œuvre. Le bois d'œuvre continuera d'être utilisé en Amérique du Nord, et, quand l'économie reviendra à la normale, nos voisins devront se tourner vers nous, et nous retrouverons ce marché. Cependant, des emplois disparaissent dans le secteur des pâtes et papiers, et ils ne reviendront pas. Nous avons besoin de projets pour prouver aux Canadiens qui ont perdu leur emploi à Liverpool, à Pictou ou à Port Hawkesbury, en Nouvelle-Écosse, que nous agissons.

Je vais tout de même parler un moment du bois d'œuvre. Le sujet que j'aime le moins en ce qui concerne le bois d'œuvre, c'est le remboursement de cinq milliards de dollars en droits et intérêts. Tout le monde pense que c'est un montant extraordinaire, jusqu'à ce qu'on lise la ligne qui suit. Nous avons laissé un milliard de dollars sur la table. Dans votre exposé, vous avez dit que le Canada avait accepté de verser un milliard de dollars américains à des intérêts américains.

Est-ce que les personnes qui défendent ces intérêts vont de nouveau intervenir et lancer une autre contestation dans le cadre de l'accord de libre-échange sur le bois d'œuvre résineux? Est-ce que l'enjeu suivra un cycle, ce qui fait que nous nous retrouverons à payer des avocats qui vont intervenir de nouveau et essayer de nous ramener dans la même situation, où des droits sont imposés? Est-ce qu'un gouvernement, dans l'avenir, conclura une entente en vertu de laquelle nous obtiendrons un remboursement de six milliards de dollars mais nous devrons laisser deux milliards de dollars sur la table?

M. Stephenson : Le versement de un milliard de dollars n'a pas profité à des entreprises américaines en particulier — je veux dire, à des concurrents. L'argent a été distribué à un certain nombre d'organismes qui s'acquittent de divers types de mandats honorables au sein de l'industrie, dont un nouvel organisme créé dans le cadre de l'accord, le Conseil binational du bois d'œuvre résineux. Ce conseil, qui compte des représentants des industries canadienne et américaine, favorise le type de projets qui permettent, ensemble, d'élargir les marchés tiers, des marchés étrangers, pour les produits de bois provenant des deux pays, et explore des façons novatrices d'utiliser le bois résineux, essentiellement en créant de nouveaux marchés.

Je répondrai donc que, de façon directe, c'est non; de façon indirecte, je répondrai peut-être pour les deux côtés.

Colin Bird, directeur, Division du bois d'œuvre, Affaires étrangères et Commerce international Canada : Du milliard de dollars qui est resté derrière, 500 millions de dollars sont allés à la Coalition for Fair Lumber Imports, une association de l'industrie aux États-Unis qui a pris part à tous les litiges commerciaux à ce jour. Il y a un milliard de dollars qui a été laissé derrière nous, mais si nous maintenons le cycle de litiges pour une autre année, la variation de la valeur de la monnaie canadienne pendant cette période viendra essentiellement éponger ce montant. Si nous avions réussi à obtenir le plein remboursement, la variation dans la valeur de notre monnaie aurait épongé tout écart.

Le sénateur Mercer : C'est du passé, mais les 500 millions de dollars finiront quand même par venir nous hanter.

J'aimerais parler du Bureau du bois de sciage des Maritimes et de l'exemption qui existe sur le bois d'œuvre résineux dans les provinces de l'Atlantique. Y a-t-il des indices qui donnent à penser que nos voisins du Sud souhaitent apporter des modifications à cet accord? C'est un accord qui existe depuis déjà un certain temps.

C'est une énorme industrie. L'industrie forestière n'est pas si grosse que cela dans les provinces de l'Atlantique, mais il y a certaines usines qui sont efficientes et productives, surtout dans le nord du Nouveau-Brunswick, et qui exportent vers les États-Unis.

M. Stephenson : La coalition américaine surveille de près tout ce qui se passe dans cette industrie au nord de la frontière, y compris quand le gouvernement verse des subventions à l'industrie, que ce soit de façon directe ou indirecte. Elle a formulé des commentaires au sujet des subventions versées aux provinces de l'Atlantique, mais l'administration américaine n'a pas donné d'indices selon lesquels elle serait préoccupée à ce sujet ou elle souhaiterait contester l'exemption offerte aux provinces de l'Atlantique dans le cadre de l'Accord.

Le sénateur Eaton : Je n'ai jamais compris l'Accord sur le bois d'œuvre résineux. Cependant, après avoir lu tous les documents qu'on m'a fournis, je me sens plus à l'aise à ce sujet.

Au cours de la dernière année, plusieurs témoins nous ont dit : « Nous ne pouvons pas faire ceci ou cela à cause du bois d'œuvre résineux. » Comme vous le savez, notre comité souhaite trouver des façons, pour l'industrie forestière du Canada, de se réinventer de façon à moins dépendre des pâtes et papiers et des produits rudimentaires comme les deux par quatre. Nous nous sommes penchés sur des produits de bois à valeur ajoutée, comme le lamellé-croisé et le lamellé- collé.

Quand nous avons abordé la question des maisons préfabriquées, il me semble que l'un des témoins est rapidement intervenu pour dire que nous ne pouvions pas aller dans cette voie à cause de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux. Y a-t-il quelque chose qui nous empêche de remplir notre panier de produits à valeur ajoutée utilisés pour diverses formes de construction? Ces produits risquent-ils d'être visés par l'Accord sur le bois d'œuvre résineux?

M. Bird : La portée de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux est décrite en détail. Un certain nombre de projets à valeur ajoutée ou de deuxième transformation sont visés par l'Accord tandis que d'autres ne le sont pas. Quand nous nous penchons sur les répercussions commerciales du soutien offert à une entreprise ou à un produit en particulier, on se préoccupe grandement de savoir s'il est visé par l'Accord ou non. Cela peut vouloir dire que le produit doit être présenté au MAECI et évalué en fonction de la portée de l'Accord.

Le sénateur Eaton : Pouvez-vous me donner des exemples de produits dont la valeur est inférieure à celle que nous avons le droit d'exporter, si ces produits sont fabriqués au Canada, des produits qui sont visés par les lignes directrices qui déterminent ce que nous avons le droit d'exporter?

M. Bird : À l'annexe 1A, paragraphe 4, de l'Accord, on trouve une liste d'un certain nombre d'articles exclus du champ d'application de l'Accord. La liste inclut les « traverses (composants de palettes utilisés pour les patins de palettes) », les « ensembles pour cadres de sommiers à ressorts »...

Le sénateur Eaton : Excusez-moi. Quand vous parlez d'ensembles pour cadres, s'agit-il d'un article utilisé dans la préfabrication de maisons ou de logements?

M. Bird : Il y a une exclusion pour les ensembles ou les empaquetages de résidences unifamiliales.

Le sénateur Eaton : Est-ce que des choses comme le lamellé-croisé font l'objet d'une exclusion?

M. Bird : Je préférerais qu'on ne me cite pas à ce sujet, mais je crois que cet article fait partie du champ d'application de l'Accord; toutefois, je dois vérifier.

Le sénateur Eaton : Cet article fait partie du champ d'application de l'Accord?

M. Bird : Oui.

Le sénateur Eaton : Nous avons un accord sur le bois d'œuvre résineux seulement avec les États-Unis. Ce que nous exportons vers la Chine ou le Japon n'a aucune incidence sur notre Accord sur le bois d'œuvre résineux avec les États- Unis, n'est-ce pas?

M. Stephenson : Oui, c'est juste.

Le sénateur Eaton : Alors, nous devrions penser à exporter vers d'autres pays.

M. Stephenson : C'est une autre des raisons pour lesquelles nous pourrions vouloir exporter dans d'autres pays : l'effondrement du marché de la construction de maisons

Le sénateur Eaton : Tout à fait.

M. Stephenson : Oui.

Le sénateur Eaton : Merci. J'interviendrai de nouveau plus tard.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Monsieur Stephenson, vous avez dit que l'industrie préfère le libre échange, mais que les ententes ont apporté un peu de stabilité. Ai-je raison de dire que toute votre présentation a porté sur l'instabilité et tout le processus de contestation qui nous arrive des États-Unis?

M. Stephenson : Je maintiens ce que j'ai dit. Depuis mon arrivée au dossier, il y a environ un an et demi, il y a unanimité, même au Québec, sur la question de l'entente, c'est-à-dire que même ceux qui ne l'aimaient pas lorsqu'elle a été signée préfèrent avoir l'entente aujourd'hui que pas.

Pour ce qui est de la stabilité, il y a des arbitrages qui sont en cours depuis plus de deux ans en vertu de l'entente. Nous avons mis de côté un fonds, géré par le conseil binational, qui sert à défrayer les coûts de ces arbitrages. Il est évident que c'était prévu, mais dans l'ensemble, je dirais que cela apporte quand même une stabilité.

Le sénateur Robichaud : Une stabilité instable! Écoutez, j'accepte tout de même votre réponse.

Monsieur Farrell, pour ce qui est des marchés en Chine, en Corée du Sud et au Japon, avec qui le Canada fait-il compétition pour ses produits du bois?

[Traduction]

Bob Jones, directeur, Division de l'industrie et du commerce, Direction de la politique, de l'économie et de l'industrie, Service canadien des forêts, Ressources naturelles Canada : Le Canada est le gros joueur en ce qui concerne les produits de bois en Chine. D'autres intérêts sont aussi présents. La Nouvelle-Zélande arrive aussi sur le marché chinois. La Russie envoie beaucoup de grumes en Chine; il s'agit du principal produit de bois envoyé en Chine par la Russie. La Scandinavie joue aussi un certain rôle en Chine.

Comme l'a mentionné M. Farrell, nous avons tenté de commencer à travailler à partir de la base, soit de l'élaboration des codes de construction, qui sont bons pour le secteur du bois en général. Nous avons collaboré étroitement avec les pays comme la Chine dès les premières étapes de l'élaboration de codes communs de construction.

En Corée, les Américains étaient bien présents jusqu'à il y a quatre ou cinq ans, mais ils ont commencé à se retirer lentement du marché. Le Canada est en train de devenir l'un des plus gros joueurs en Corée. Les États-Unis demeurent un bon concurrent au Japon.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Est-ce que les autres pays qui veulent vendre leurs produits du bois en Chine, en Corée du Sud et au Japon ont des programmes semblables à ceux que le Canada a mis place pour en faire la promotion?

[Traduction]

M. Jones : Non, le Canada est, de loin, le plus grand pays exportateur dans ces marchés émergents ayant des programmes définis. Comme je l'ai mentionné, les Américains possédaient, auparavant, un bureau en Corée par l'entremise de l'une de leurs associations des produits de bois, mais, depuis, ils se sont retirés de là.

La participation des Américains a déjà été plus importante, mais ils ont mis fin à bon nombre de leurs activités en Chine. Le Canada est l'un des principaux pays à avoir des programmes au sein de ces marchés étrangers. Les Américains consacrent encore du financement aux marchés étrangers, mais pas dans la même mesure que le Canada.

Le sénateur Robichaud : Je ne peux pas m'empêcher de me demander si les 500 millions de dollars, ou quelque chose du genre, qui demeurent entre les mains des Américains servent à faire la promotion de leurs produits à l'étranger.

M. Jones : Quels 500 millions de dollars?

Le sénateur Robichaud : Quand nous nous sommes entendus avec les Américains et qu'ils ont conservé 500 millions de dollars sur le milliard de dollars, est-ce qu'une partie de cet argent a servi à concurrencer le Canada sur les marchés internationaux?

M. Jones : Pour ce qui est de nos activités sur le marché de la construction non résidentielle, le conseil binational finance aussi certaines activités des deux associations, au Canada et aux États-Unis, visant à faire croître le marché de la construction non résidentielle en Amérique du Nord. Le Conseil binational finance aussi certaines de ces activités.

Le sénateur Robichaud : Voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Bird : Parmi les autres initiatives dignes de mention financées dans le cadre de l'Accord sur le bois d'œuvre résineux, je peux mentionner l'American Forest Foundation et la U.S. Endowment for Forestry and Communities. Ces groupes s'occupent de la collaboration transfrontalière pour la gestion des forêts. C'est le Conseil binational qui fait l'essentiel du travail visant à développer un marché unifié en Amérique du Nord, et c'est lui qui a reçu 50 millions de dollars en vertu de l'Accord, dont 40 millions de dollars étaient essentiellement destinés à la commercialisation en commun.

Le sénateur Eaton : J'aimerais éclaircir quelque chose, monsieur Jones, à la suite d'une question posée par le sénateur Robichaud. Est-ce que nos exportations vers la Chine consistent principalement en des unités d'habitations préfabriquées?

M. Jones : À l'heure actuelle, nous exportons du bois de construction de dimensions courantes, des deux par quatre, principalement produit à l'intérieur de la Colombie-Britannique. Ce sont les produits les plus médiocres destinés à fabriquer des coffrages à béton, dans le secteur de la construction. Cependant, au cours des dernières années, il y a eu un élargissement du marché pour des produits de bois de meilleure qualité en Chine. Le principal produit de bois envoyé en Chine est le bois d'œuvre; des deux par quatre, des deux par six.

Le sénateur Mercer : J'aimerais revenir à une question qu'a posée le sénateur Robichaud au sujet de la Chine et à votre réponse concernant nos concurrents. Vous avez mentionné la Nouvelle-Zélande comme si de rien n'était, mais la Nouvelle-Zélande a conclu récemment un accord de libre-échange avec la Chine qui aura une incidence. De toute évidence, la Nouvelle-Zélande est impatiente de connaître sa capacité de vendre ses produits agricoles. Elle exporte surtout des produits laitiers.

Je me suis rendu en Nouvelle-Zélande en décembre et j'ai été exposé à certains renseignements à ce sujet. Est-ce que les exportations de la Nouvelle-Zélande vers la Chine deviendront un problème plus important parce que le pays a conclu un accord de libre-échange avec la Chine, ce que nous n'avons pas fait?

M. Farrell : Sénateur, je ne suis pas certain de pouvoir prédire la tournure que prendra la situation au cours des cinq prochaines années, mais, à bien des égards, la Nouvelle-Zélande fait face aux mêmes défis que le Canada, et ceux-ci concernent le fait de faire accepter un code du bâtiment, que ce soit à l'échelle municipale, provinciale ou nationale. Comme l'a fait remarquer M. Jones, nous collaborons à bien des égards sur le plan concret.

En ce qui concerne une présence, ce que nous recommandons — la province de la Colombie-Britannique et l'industrie —, c'est un personnel de 25 à 30 personnes au total. Nos activités là-bas consistent essentiellement à assurer la qualité et effectuer des contrôles de qualité, c'est-à-dire prouver que le bois peut être utilisé pour les applications prévues. C'est un rôle beaucoup plus complexe qu'un simple rôle de commercialisation. Nous avons réussi à nous tailler une réputation de joueur à long terme. Les premières années n'ont pas été faciles puisque la Chine commençait à peine à décoller. De nombreuses personnes voulaient vendre leurs produits. Le véritable avantage du Canada, c'est que nous étions présents physiquement là-bas et nous avions des spécialistes qui comprenaient la construction résidentielle et non résidentielle, le génie et le design en particulier — tout ce qu'il faut pour bâtir une structure.

Le sénateur Mercer : En Nouvelle-Zélande, le secteur de la construction ressemble un peu au nôtre, et le pays est beaucoup plus près du marché cible.

M. Farrell : Oui.

Le sénateur Duffy : Nous vous sommes reconnaissants d'avoir fait tous ces efforts. Vous vous êtes vous-même retrouvé avec ce dossier — certaines personnes disent qu'elles sont fatiguées d'en entendre parler —, pouvez-vous imaginer ce que ça fait de couvrir ce dossier depuis le premier jour? Tout ce qu'il pourrait y avoir de pire, ce serait de prendre part à ces négociations.

J'ai trois ou quatre brèves questions. J'ai une grande admiration pour le dévouement de la fonction publique quand elle doit faire face à un problème complexe et difficile à résoudre.

Monsieur Stephenson, vous avez mentionné que le MAECI fournissait de l'information aux représentants du délégué commercial général des États-Unis. À titre de personne qui s'occupe du dossier depuis environ 20 ans, comme c'est mon cas — et je sais que, pour vous, cela fait moins longtemps —, comment compareriez-vous l'attitude du délégué commercial général des États-Unis sous l'administration américaine actuelle par rapport à son attitude sous les administrations précédentes? Avez-vous dû fournir encore une fois de l'information aux nouveaux arrivants, ou s'il existe une sorte de mémoire organisationnel au sein du personnel, plutôt qu'au sein des personnes nommées?

M. Stephenson : C'est une question intéressante puisque, en ce qui concerne la politique commerciale en général, je dirais que les Américains sont plus déterminés dans l'application des accords commerciaux existants. Étonnamment, ils appliquent actuellement l'Accord sur le bois d'œuvre résineux de façon moins énergique. Ils ne sont pas aussi déterminés à faire respecter le programme. Ils estiment que l'Accord est géré de façon raisonnablement correcte, ce qui inclut toute la transparence dont nous faisons preuve, de notre côté de la frontière, relativement aux mesures que nous prenons.

Le sénateur Duffy : C'est bien. Ils n'ont pas encore succombé à la pression exercée par l'industrie américaine.

Monsieur Farrell, nous parlons de la Chine. L'une des choses que des personnes comme des fabricants d'armoires de cuisine nous ont dites, c'est que certains produits laminés provenant de Chine ne répondent pas à nos normes. Je ne suis pas certain que nous avons des normes, mais les fabricants estiment que les armoires sont de qualité inférieure et s'inquiètent des gaz qu'elles dégagent; en fait, leur inquiétude concerne non seulement les armoires de cuisine, mais aussi, accessoirement les comptoirs de granit qui proviennent de Chine et qui pourraient constituer un danger pour la santé. Êtes-vous au courant de cette situation, et est-ce que le Canada dispose à ce jour de dispositions législatives pour la réglementer?

M. Farrell : Sénateur, je suis au courant de l'enjeu en général associé aux produits organiques. L'enjeu particulier que représentent l'importation et les émissions de gaz ne fait pas partie du domaine de compétence du ministère, mais je peux vous dire que nous nous renseignerons à ce sujet et nous verrons si nous pouvons fournir au comité l'information dont nous disposons. Je ne peux pas vous la fournir de mémoire.

Le sénateur Duffy : Est-ce que c'est un enjeu qui va plus loin que la sécurité du produit?

M. Farrell : Oui, c'est ce que je soupçonne.

Le sénateur Duffy : C'est un enjeu qui concerne la protection des consommateurs.

Pour conclure, monsieur Bird, ma collègue, le sénateur Eaton, vous a posé une question concernant un produit novateur dont nous ont parlé des représentants de l'industrie forestière; c'est le produit « house in a box », une maison dans une boîte. Je suis sûr que vous connaissez ce produit.

D'après ce que vous nous dites, il semble qu'un tel produit ne devrait pas faire face à des obstacles. Il s'agit d'un produit à valeur ajoutée : nous plaçons tous les composants requis pour construire une maison unifamiliale — pas nécessairement des trucs préfabriqués — dans un conteneur, ici, et nous l'envoyons en Alabama, où toutes les pièces sont assemblées. On pourrait penser qu'il s'agit, pour nous, d'offrir un produit à valeur ajoutée puisqu'ils n'ont pas besoin, à l'autre bout, de s'occuper du sciage, de la coupe ou du clouage.

M. Bird : Je ne prétends pas être un spécialiste des maisons construites sur mesure, mais il y a des dispositions qui s'appliquent à ces « maisons dans une boîte ». Ce qui est requis est écrit très en détail. Toutes les portes, la colle, le bois et les clous doivent être inclus avec la maison dans une boîte.

Le sénateur Duffy : Cela me fait penser à une barrière non tarifaire. C'est très instructif.

Le sénateur Mahovlich : Dans la diapositive 8 sur la Chine, on parle des projets Canada-Colombie-Britannique de reconstruction à la suite du séisme de Wenchuan. Comment s'en tire le bois dans un séisme? Certaines maisons, en Chine, semblent s'écrouler quand il y a un séisme. Chaque fois qu'on prend un journal, on lit que 2 000 personnes sont mortes dans un séisme. J'ai une remise à bateau à Muskoka, et elle subit les assauts de la glace chaque année. Elle bouge un peu, mais elle ne s'écroule pas. Elle est solide et peut supporter dix pieds de neige sur son toit sans s'écrouler. Est-ce que le bois réagit mieux qu'un mélange d'argile et de ciment en cas de séisme?

M. Jones : L'Institut canadien de recherche sur les forêts, FPInnovations, a mené un certain nombre d'études sur diverses structures. Nous avons pu prouver scientifiquement qu'une maison à ossature de bois construite adéquatement résistera mieux à un séisme qu'une maison construite avec tout autre matériau de construction. À la suite du séisme qui a eu lieu en 2008 en Chine, nous avons appris qu'un certain nombre des maisons qui s'étaient effondrées n'avaient pas été fabriquées en bois. Nous avons des photos intéressantes qui révèlent qu'il y a peu d'immeubles à ossature de bois dans cette région du pays, mais que ceux qui s'y trouvent ont survécu au séisme, tandis que les autres immeubles se sont effondrés.

Nous avons mis sur pied un programme dans la région du Sichuan et nous avons reconstruit une école qui s'était complètement effondrée, ce qui avait tué plusieurs enfants. La nouvelle école est entièrement faite de bois. Nous avons aussi quelques immeubles de démonstration, certains destinés aux aînés et d'autres qui sont des hôpitaux, tous faits de bois.

Le fait qu'on a pu prouver que les constructions à ossature de bois sont plus sûres en cas de séisme a constitué un argument de vente solide en Chine. Est-ce que votre remise à bateau est en bois?

Le sénateur Mahovlich : Oui.

Le sénateur Robichaud : Est-ce que c'est du bois du Nouveau-Brunswick?

Le sénateur Mahovlich : Non, le bois vient de Muskoka.

[Français]

Le sénateur Rivard : Est-ce qu'au sein de votre ministère vous avez calculé l'impact de la force du dollar canadien par rapport à la faiblesse du dollar américain?

La crise économique mondiale — et particulièrement celle ayant touché les Américains et qui a fait en sorte qu'on exporte beaucoup moins de bois d'œuvre — a-t-elle eu un impact aussi important que la force du dollar canadien qui était d'une valeur, à une certaine époque, à 60 cents pour un dollar américain ou, au cours des dernières années, aux alentours de 80 cents pour un dollar américain? Avez-vous des statistiques à ce sujet? Avez-vous pu établir quelle serait la valeur idéale du dollar canadien par rapport au dollar américain pour revenir à nos bonnes années d'exportation du bois d'œuvre?

[Traduction]

M. Farrell : La valeur du dollar canadien pose des problèmes à tous les exportateurs, et notamment au secteur canadien des produits forestiers, qui dépend des marchés américains. À bien des égards, comme l'ont mentionné mes collègues de l'industrie, la valeur du dollar par rapport au dollar américain constituait un problème compte tenu du taux de change et de la capacité de l'industrie de renouveler son équipement, de reconstituer son capital et de rajuster ses coûts de production en raison du taux de change. Ça a été, à bien des égards, l'une des plus importantes préoccupations de l'industrie. Je ne sais pas exactement ce que d'autres témoins de l'industrie ont pu dire à ce sujet devant le comité, mais une chose est sûre, c'est que la plus grande partie de l'industrie canadienne s'est bâtie à l'époque où le dollar canadien valait aussi peu que 65 cents américains. L'industrie tente actuellement de demeurer concurrentielle dans un contexte où le dollar canadien est presque à parité avec le dollar américain. Les règles du jeu sont complètement différentes, et c'est très difficile.

Le sénateur Eaton : Nous avons parlé de la Chine et de l'Asie. Revenons aux produits à valeur ajoutée; certaines personnes avaient envisagé la possibilité d'envoyer des maisons au Chili à la suite du séisme. Y a-t-il un commerce du bois avec l'Amérique du Sud, ou si c'est le Brésil qui possède ce marché?

M. Farrell : Par le passé, l'Amérique du Sud n'a jamais été un marché important pour les produits de bois canadien. En fait, les pays de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud sont des concurrents sur le marché de la pâte commerciale. Ils ont la capacité de produire du bois de sciage, qui est principalement utilisé à l'échelle nationale. Si l'on veut revenir à ce sujet, mon collègue, M. Jones, a parlé du séisme au Sichuan et de la réaction du Canada. Les choses ont bien fonctionné à bien des égards en raison du climat de la région immédiate du Sichuan et de la volonté des administrations provinciales et nationales chinoises de réagir rapidement pour mettre en place l'infrastructure requise, comme les égouts ou l'approvisionnement en eau et en électricité, pour que la construction puisse commencer. Les administrations chinoises ont réagi très rapidement et concrètement, ce qui a permis au Canada d'entreprendre la construction.

Nous avons eu des discussions avec nos collègues d'organismes gouvernementaux, comme l'Agence canadienne de développement international, à propos d'Haïti et du Chili et de ce que pensent ces pays des investissements canadiens. Si vous voulez connaître les détails de ces discussions, je vous renverrais à l'ACDI. Je peux toutefois vous dire que, par le passé, bon nombre des priorités étaient fixées par les pays qui reçoivent l'aide.

Le sénateur Eaton : Je suppose que nous essayons de conclure un accord de libre-échange avec eux aussi.

Monsieur Jones, quand nous tentons de vendre nos produits sur les marchés chilien et asiatique, est-ce que nous faisons ressortir le fait que le bois est un produit écologique?

M. Jones : Nous transmettons le message que le bois vient d'une ressource durable et, quand il y a des discussions sur l'empreinte carbonique, nous parlons des avantages environnementaux du bois. Ce message fait partie intégrante de la stratégie de marque des produits canadiens de bois.

Le sénateur Eaton : Pensez-vous qu'il y a là un marché pour la biomasse?

M. Jones : Je n'en vois pas pour l'instant, mais il y en aura peut-être un dans l'avenir. Vous avez posé une question à propos de l'Amérique du Sud. J'ai la liste des 30 principales destinations des produits de bois canadiens qui ont été exportés en 2009, et aucun pays de l'Amérique du Sud ne fait partie de ces 30 destinations.

Le sénateur Eaton : Cela répond à ma question.

M. Farrell : Revenons à la biomasse. En Colombie-Britannique, on se retrouve, à l'intérieur des terres, avec une grande quantité de débris à cause de l'infestation de dendroctone du pin ponderosa. Certaines entreprises réduisent en pastilles les pins tordus et les pins ponderosa morts et envoient les pastilles en Europe. Dans certaines régions d'Europe, on paie les pastilles de bois très cher.

Le sénateur Eaton : J'ai passé la journée d'hier à l'Université de Guelph, où se font de nombreuses expériences sur la biomasse, à l'aide de saules, d'herbe et de panic raide. On pourrait découvrir des choses intéressantes dans ce secteur au cours des cinq ou six prochaines années.

Le sénateur Plett : J'ai une brève question à poser et un commentaire à faire. Monsieur Jones, vous avez mentionné que la majeure partie du bois d'œuvre qui est vendu à la Chine est du bois de qualité inférieure, c'est-à-dire des deux par quatre et des deux par six utilisés pour le coffrage. De toute évidence, on utilise aussi beaucoup de contreplaqué pour le coffrage du béton. Est-ce que nous vendons du contreplaqué? Sinon, pourquoi?

M. Jones : Une partie du contreplaqué est envoyée en Chine. Je ne me souviens pas des chiffres exacts, mais ce n'est pas une quantité importante. À l'heure actuelle, ce que l'on envoie en Chine, c'est surtout du bois de charpente.

Le sénateur Plett : Est-ce parce que la Chine a son propre contreplaqué?

M. Jones : Oui, une partie du contreplaqué est fabriquée en Chine.

Le sénateur Plett : Dans un autre ordre d'idées, je vais répéter ce qu'a dit le sénateur Duffy précédemment. Je remercie toutes les personnes qui ont pris part aux négociations difficiles qui ont mené à l'Accord sur le bois d'œuvre résineux. Peut-être qu'on aurait pu faire une meilleure affaire si nous avions tenu le coup jusqu'à maintenant; qui sait? Mais il fallait conclure une entente. Je remercie toutes les personnes qui ont travaillé fort pour négocier cet accord au nom des Canadiens.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous n'êtes pas sans savoir que le comité est en train de regarder comment on peut faire la promotion des produits du bois, autant sur le marché domestique que sur le marché international. Si vous aviez des recommandations à nous faire, dans quelle direction devrions-nous mettre beaucoup plus d'efforts dans le marketing des produits de base? On parlait de deux par quatre et de deux par six, mais il y a aussi l'utilisation dans les poutrelles, les poutres lamellées-collées, est-ce qu'on fait des efforts dans ses domaines et le cas échéant, est-ce qu'on devrait en faire plus?

M. Stephenson : Je vais laisser répondre mes collègues parce que ce sont eux qui ont les programmes de promotion. Mais mon ministère offre tout de même la promotion des exportations du commerce. Il faudrait peut-être demander au responsable de ces programmes, le sous-ministre adjoint Ian Burney, entre autres de venir présenter les efforts du Canada de ce côté là.

[Traduction]

M. Farrell : Si je devais donner des conseils... si on observe la forêt canadienne — sa taille et sa dimension sur le plan physique —, on constate qu'elle a à peu près la même taille qu'il y a 100 ans. Ce qui a changé, c'est le contenu de la forêt : la taille des arbres, leur accessibilité et le type de restrictions, qui sont légitimes compte tenu de l'environnement. La nature même de la forêt, soit le fait qu'il y a beaucoup d'arbres au pays, est à peu près la même. C'est l'économie de la forêt par rapport au reste du monde... Les nouveaux concurrents disposent d'un financement ayant une grande envergure, en plus de ne pas faire face aux mêmes types de coûts des facteurs de production et d'obstacles environnementaux que ceux auxquels nous faisons face au Canada.

Je crois que notre avenir se situe dans la technologie et l'innovation. Dans le monde, un produit de spécialité — une marchandise — est fabriqué seulement pour une courte période, sauf si le producteur réussit à trouver son créneau de façon à avoir un avantage concurrentiel pour cinq ans, si ce n'est dix ans. Au Canada, le gouvernement fédéral, mais aussi les provinces et les entreprises, ont cherché des façons d'obtenir cet avantage il y a un certain nombre d'années en s'éloignant du type de marchandises sur lesquelles le secteur des produits forestiers en entier s'est construit.

Cela dit, je crois que les produits de bois massif, qu'il s'agisse de bois d'œuvre résineux ou d'autres produits de bois, font partie de l'avenir. Sans les produits de bois, je ne crois pas que nous pourrions constituer la chaîne de valeur qui peut lui permettre d'obtenir les résidus requis pour toute une gamme de produits variés. L'avenir consiste à utiliser la technologie et l'innovation pour créer des possibilités — pour que les entreprises aient diverses possibilités en ce qui concerne les produits qu'elles fabriqueront et les marchés au sein desquels elles les vendront. Il ne faut pas beaucoup de temps pour transformer un produit à valeur ajoutée en marchandises si le marché est inondé en une nuit ou s'il n'y a qu'une seule entreprise qui fabrique le produit parce que le marché est très petit.

Ce qu'il faut faire, c'est se demander quels sont les produits actuels qui peuvent être remplacés par des produits biologiques qui poussent dans des arbres.

Le sénateur Fairbairn : J'ai dressé l'oreille il y a à peu près une minute, quand vous avez prononcé les mots « dendroctone du pin ». Pouvez-vous nous en dire un peu plus à propos des dommages que cause encore cet insecte, et de l'endroit et du moment où on peut le trouver? Je suis du sud de l'Alberta, et, à une certaine époque, on était très inquiet que le dendroctone traverse la frontière par la Passe du Nid-de-Corbeau dans le sud de la Colombie-Britannique et dévore tous nos pins. L'insecte est bel et bien venu en Alberta, mais nos arbres ne lui ont pas plu. Il a ramassé son équipement de guerre et est parti vers le Montana, où il s'est déchaîné et a mené un long combat.

Comment pouvez-vous cerner cet insecte? Le problème est-il toujours présent? Le cas échéant, à quel point a-t-il une incidence sur les efforts que nous déployons dans d'autres pays?

M. Stephenson : Avant de laisser répondre M. Farrell, j'aimerais vous faire part d'une donnée intéressante. Quand nous avons conclu l'Accord sur le bois d'œuvre résineux qui régit la pratique de détermination d'un droit de coupe peu élevé pour les arbres morts qui ont été tués par le dendroctone du pin, la quantité de bois mort qui sortait de la forêt à l'époque, représentait moins de 10 p. 100 du bois; aujourd'hui, elle représente 40 p. 100 du bois. Ça fait beaucoup de bois. Les producteurs de bois d'œuvre se sont beaucoup améliorés et produisent au moins un ou deux pieds linéaires à partir de ces grumes. Un assez grand volume a été envoyé sur le marché américain et le marché de l'est, avec les résultats prévus.

Pour ce qui est de savoir si l'infestation est terminée, M. Farrell peut peut-être répondre à cette question.

M. Farrell : Le dendroctone du pin est ce qu'on appelle un insecte nuisible endémique. Il a toujours vécu en Amérique du Nord. L'espèce qui vit aux États-Unis est différente sur le plan génétique, mais c'est le même insecte. Il n'est pas parti du Canada pour aller s'en prendre aux États-Unis; il était déjà présent sur ce territoire. Les conditions qui ont permis à sa population de connaître une croissance explosive au Canada ont créé à peu près les mêmes difficultés aux États-Unis.

Pour la Colombie-Britannique, on prévoit que l'insecte aura dévoré à peu près tout ce qu'il a à dévorer d'ici 2014 ou 2015. Comme vous l'avez mentionné, sénateur, depuis trois ou quatre ans, nous avons constaté que l'insecte se déplace vers le nord-ouest de l'Alberta et le nord-est de la Colombie-Britannique. L'Alberta a pris des mesures très vigoureuses pour tenter de réduire la propagation, que ce soit par des récoltes ou un brûlage dirigé. Ce qui inquiète nos scientifiques, c'est la menace que cela représente pour le reste de la forêt boréale.

Le sénateur Fairbairn : Oui; c'est une menace pour le Nord.

M. Farrell : C'est exact. L'insecte ne peut pas se nourrir de pin gris en laboratoire, mais on ne sait pas s'il se développera dans la forêt boréale, où les arbres sont plus éloignés les uns des autres et les hivers sont plus froids, même avec les changements climatiques. Chaque hiver, on surveille la situation. Habituellement, une vague de froid précoce fait reculer la population. Il n'y a pas eu beaucoup de vagues de froid précoces au centre ou dans le sud de l'Alberta au cours des 12 dernières années. On effectue donc une surveillance générale. Comme l'a mentionné M. Stephenson, l'insecte a eu une incidence sur l'approvisionnement en fibre.

Il faut aussi souligner qu'il y a d'autres essences à l'intérieur des terres de la Colombie-Britannique. Dans certaines régions de la Colombie-Britannique, le pin est l'essence prédominante. On trouve toutefois aussi beaucoup d'épinettes, surtout à l'intérieur de terres, dans le Sud, puisqu'elles remplissent une partie de l'espace laissé vacant. De toute évidence, à un certain moment, les volumes vont diminuer. Je sais que la Colombie-Britannique et l'Alberta se demandent toutes deux comment faire pour que ce moment dure le moins longtemps possible.

Le sénateur Duffy : Les gens de l'industrie forestière étaient fiers de venir nous rencontrer et de nous dire qu'ils forment le plus important employeur dans, je crois, 60 000 collectivités d'un océan à l'autre. C'est un chiffre énorme.

Nous essayons de trouver des solutions à des problèmes. Cependant, si on observe la situation de l'industrie en général et ce qui s'en vient, est-ce que vous pensez que nous pourrons, un jour, revenir aux niveaux d'emploi que nous avions par le passé, ou si les gens de ces régions et la prochaine génération doivent envisager autre chose compte tenu de l'état du monde dans lequel nous vivons et travaillons?

M. Farrell : Personnellement, je suis de nature optimiste. L'une des choses que nous commençons à constater et qui devrait se poursuivre dans l'avenir, c'est une espèce de « brouillage » du secteur, comme je dis. Quand nous pensons au secteur des produits forestiers, nous pensons aux grands classiques : le bois d'œuvre, les pâtes et papiers, et ce que nous appelons les travailleurs forestiers, c'est-à-dire les conducteurs d'abatteuse-tronçonneuse, des planteurs et des camionneurs.

Le secteur commence à changer. Nous commençons à voir bouger la frontière qui sépare le secteur des produits forestiers classiques du secteur de l'énergie. Nous avons déjà constaté que les choses bougeaient, notamment dans le secteur naissant de la bioénergie partout au Canada. Comme ce secteur est de plus en plus axé sur la technologie, on devrait voir apparaître, assez rapidement, des façons de faire sortir « le jus des arbres » pour l'envoyer dans une raffinerie et en faire un combustible écologique. La technologie et la situation économique actuelle ne le permettent pas encore, mais on n'est plus aussi loin de cette situation qu'on l'était il y a tout juste quelques années.

Quelles seront les répercussions pour les petites collectivités rurales? C'est une question d'échelle. Quelle part du travail peut être effectuée à petite échelle pour ce qui est de la technologie? Quelle part du travail doit être faite à grande échelle? Il est difficile de prévoir la réponse.

Il faut aussi prendre en considération les services publics provinciaux. Nous avons constaté qu'un certain nombre de provinces prévoient des tarifs d'incitation pour accélérer le recours à l'énergie verte. C'est le cas, entre autres, de la Colombie-Britannique et de l'Ontario. Dans bien des cas, ce système commence à favoriser les investissements du côté de l'approvisionnement, et je crois que bon nombre de petites collectivités sont plus près du côté de l'approvisionnement que de celui de la fabrication. C'est peut-être de ce côté qu'on trouvera le plus grand nombre d'emplois durables.

Si je devais faire une prédiction, je dirais qu'il sera difficile, dans l'avenir, d'avoir le même type d'industrie nationale — il s'agissait véritablement d'une industrie nationale. Il sera difficile de maintenir l'industrie à l'échelle du pays. Si les résultats restent les mêmes, je crois qu'ils passeront d'une région à une autre et qu'ils dépendront des investissements, surtout dans les technologies qui nous permettent d'aller au-delà du secteur des marchandises.

Nous produirons toujours une certaine quantité de marchandises dans le pays. Cependant, dans le secteur des marchandises qui sont échangées à l'échelle mondiale, comme la pâte commercialisée, on constate que les entreprises tentent de miser sur leurs avantages naturels. Les concurrents qui se trouvent en Amérique centrale et en Amérique du Sud ont un grand avantage par rapport à nous : ils ont des arbres qui peuvent pousser en sept ou huit ans, et qui poussent à moins de 30 kilomètres de l'usine.

Nous avons une fibre concurrentielle à l'échelle mondiale qui peut être produite seulement au pays. Ce que nous devons faire, c'est fabriquer un produit qui utilise cette fibre et qui est véritablement concurrentiel, pour lequel les gens voudront payer, un produit qui présentera un avantage par rapport, par exemple, à une fibre d'eucalyptus, qui est un bois dur. Nous avons l'avantage qu'il faut, mais tout dépend des investissements dans la technologie et dans l'innovation et d'une meilleure stratification de la ressource fibreuse.

[Français]

Le sénateur Rivard : Le sénateur Fairbairn nous a entretenus sur les problèmes de la maladie du pin dans l'Ouest. Au Québec, au Nouveau-Brunswick et dans une petite partie du Nord de l'Ontario, on a subi les ravages de la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Peut-on dire aujourd'hui qu'il s'agit d'un problème qui s'est résorbé ou qui est en train de se résorber? Où en est la situation?

[Traduction]

M. Farrell : Le dendroctone qui s'attaque au pin gris et la tordeuse des bourgeons de l'épinette ont été trouvés, dans une certaine mesure, dans le centre et dans l'est du Manitoba et de la Saskatchewan. Cependant, c'est en Ontario et au Québec que le problème revient sans cesse. Dans les deux cas, le problème suit un peu un cycle, même si ce cycle semble plus prévisible dans le cas de la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Selon les prévisions actuelles, la tordeuse des bourgeons de l'épinette est à la hausse dans l'Est du Canada, surtout au Québec et en Ontario.

Cependant, contrairement à ce qui se passe avec le dendroctone, il existe des moyens de contrôle acceptés ayant une faible incidence sur l'environnement. En effet, on peut appliquer, par la voie des airs, des biopesticides utilisés activement. Je crois que la science en connaît beaucoup à ce sujet, ce qui fait qu'on dispose de moyens de limiter l'infestation. Néanmoins, les prévisions donnent à penser que la présence de la tordeuse est à la hausse.

Le président : Avant que nous nous quittions, j'ai une question, et elle concerne ce que vous avez dit à propos du marché de la construction non résidentielle et de la diminution du parti pris contre l'utilisation du bois. Pouvez-vous nous fournir une fiche de rapport sur les marchés ciblés? Pouvez-vous nous dire si le fait que nous ayons incité les marchés actuels et les marchés en émergence à utiliser le bois dans la construction non résidentielle a, ou a eu, des répercussions? Nous aimerions que vous nous fournissiez cette information à la greffière.

Dernier point à souligner, et non le moindre. J'aimerais dire aux membres du comité et aux représentants que j'ai participé, hier soir, à une rencontre sur la foresterie. De nombreuses associations étaient présentes. J'aimerais dire au comité et aux représentants qu'il y a, en ce moment même, une mission spéciale dans la navette. Vous approuvez de la tête.

Le Canada s'occupe de prouver que nous sommes les meilleurs. Nous nous intéressons à la recherche et au développement, non seulement ici, sur la Terre, mais aussi dans l'espace; la navette spatiale procède actuellement à une mission spéciale qui vise à effectuer des recherches intensives sur des semis comme ceux que nous avons plantés, mesdames et messieurs les sénateurs, quand nous étions au Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Mercer : Avez-vous vérifié comment se portent les semis?

Le président : Ils poussent.

Le sénateur Plett : Je n'ai pas reçu mes quatre sous et demi.

Le président : Quand j'ai entendu parler de la mission hier soir, j'ai dit que je me portais volontaire pour devenir planteur d'arbres dans l'espace.

En conclusion, une entreprise canadienne possède actuellement 18 semis qui se trouvent dans la navette. Des recherches spéciales seront effectuées pour comprendre les effets sur la croissance et sur la texture, et aussi pour tenter d'obtenir des semis de meilleure qualité ici.

Le sénateur Mercer : Le sénateur Plett se porte volontaire pour la récolte.

Le président : Cela dit, merci, messieurs Stephenson, Farrell, Bird et Jones, d'avoir présenté des exposés. Ils étaient très intéressants. Si nous avons d'autres questions, nous communiquerons avec vous.

(La séance est levée.)


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