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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 8 - Témoignages du 28 septembre 2010


OTTAWA, le mardi 28 septembre 2010

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 17 h 6 pour étudier l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier au Canada.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je constate que nous avons le quorum, je déclare donc la séance ouverte.

Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.

[Traduction]

Je suis le sénateur Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick, et je préside le comité.

Aujourd'hui, mesdames et messieurs les sénateurs, nous recevons trois témoins. Nous accueillons tout d'abord Mme Patricia Mortimer, vice-présidente, Soutien technologique et industriel (Programme d'aide à la recherche industrielle), du Conseil national de recherches du Canada; et le Dr Roman Szumski, vice-président, Sciences de la vie (Programme national sur les bioproduits).

[Français]

À la gauche de Dr Szumski, nous avons M. Roger Gaudreault, directeur général, recherche et développement de Cascades. Bienvenue à tous.

Le comité poursuit son étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier au Canada ...

[Traduction]

... et l'avenir du secteur forestier au Canada, en nous intéressant plus particulièrement aux efforts en matière de recherche et de développement.

Avant de laisser nos témoins prononcer leur allocution, je vais demander aux sénateurs de se présenter.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Je suis le sénateur Fernand Robichaud, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Fairbairn : Joyce Fairbairn, de Lethbridge, en Alberta.

Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de Timmins, en Ontario.

Le sénateur Plett : Don Plett, de Landmark, au Manitoba.

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Eaton : Nicole Eaton, de Toronto, en Ontario.

Le président : Chers sénateurs, je vous informe que nos témoins ont remis aujourd'hui à notre greffière des copies de leur mémoire en anglais seulement. Ceci étant dit, êtes-vous d'accord pour que le document soit distribué maintenant et que la traduction nous soit envoyée dès qu'elle sera disponible?

Des voix : Oui.

[Français]

Le président : Merci, honorables sénateurs.

Chers témoins, nous tenons à vous remercier, encore une fois, d'avoir accepté notre invitation à comparaître.

[Traduction]

Je vous invite maintenant à nous livrer votre allocution. Notre greffière m'informe que ce sera le Dr Szumski qui prendra la parole en premier; lorsqu'il aura terminé, il y aura une période de questions et réponses.

Dr Roman Szumski, vice-président, Sciences de la vie (Programme national sur les bioproduits), Conseil national de recherches du Canada : Merci de m'avoir invité à témoigner devant votre comité aujourd'hui.

Le CNRC est un organisme du gouvernement du Canada dont le mandat est défini dans la Loi sur le Conseil national de recherches. En vertu de cette loi, le CNRC est responsable, entre autres choses, d'entreprendre, de soutenir et de promouvoir des recherches scientifiques et industrielles dans différents domaines d'importance pour le Canada. Le CNRC compte plus de 20 instituts de recherche et programmes nationaux touchant toutes sortes de disciplines, depuis l'aérospatiale et l'agriculture jusqu'au génie océanique et à la photonique. Le CNRC offre également à ses partenaires et à ses clients toute une gamme de services de développement technologique et de commercialisation. Plus tard dans la soirée, vous entendrez le témoignage de la vice-présidente du Soutien technologique et industriel du CNRC, Patricia Mortimer, qui vous parlera de notre Programme d'aide à la recherche industrielle du CNRC, le PARI, et qui vous expliquera comment il interagit avec l'industrie forestière du Canada et lui vient en aide.

Je suis ici, aujourd'hui, pour vous montrer comment les initiatives de collaboration en R-D entre l'industrie et le gouvernement peuvent créer de nouveaux débouchés pour l'industrie forestière canadienne. Je vais vous dire comment nous faisons pour favoriser les activités forestières existantes, découvrir des produits écologiques au potentiel de commercialisation rapide, favoriser la production d'énergie durable et ouvrir de nouveaux marchés au Canada et à l'étranger.

Je constate que dans votre rapport sur la première phase de l'étude, vous indiquez que le comité sénatorial examinera comment améliorer les efforts en matière de R-D dans le secteur forestier au Canada en mettant plus particulièrement l'accent sur la façon d'accélérer la commercialisation de produits qui sont le résultat d'initiatives en matière de R-D.

Je suis donc persuadé que notre expérience avec le Programme national sur les bioproduits, ou PNB, vous intéressera. Ce programme permet de travailler avec l'industrie forestière à la mise au point de produits durables et utiles, mais il vise également le transfert rapide à l'industrie, ce qui a toujours été une priorité pour ce programme de collaboration.

Le PNB est une initiative conjointe du CNRC, de Ressources naturelles Canada et d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Lancé par le CNRC en 2007, ce programme national contribue aux efforts déployés dans le cadre de deux priorités canadiennes : l'énergie durable et l'environnement. Nos projets de recherche spécifiques ont été conçus sans perdre de vue les compétences du CNRC et le contexte canadien.

Accroître la portée de nos recherches en passant des laboratoires nationaux au secteur privé est un élément essentiel du programme. Nous nous sommes fixé une cible de trois à cinq ans pour commencer à transférer ces nouvelles technologies à l'industrie canadienne. C'est la raison pour laquelle notre modèle de collaboration — avec divers partenaires, dont des ministères et des PME canadiennes novatrices — est déterminant pour la réussite du programme. La structure de ce dernier nous permet de transférer rapidement les nouvelles technologies aux utilisateurs finaux.

Le PNB dispose d'un budget global de 21 millions de dollars pour la période allant de 2008 à 2011, et nos partenaires versent des contributions à peu près égales pour le programme.

Avant de vous parler de notre projet consistant à fabriquer de nouveaux produits chimiques à partir de sous- produits forestiers, j'aimerais vous présenter les trois autres projets menés dans le cadre du PNB, qui donnent aussi des résultats mesurables.

Le PNB se compose de quatre projets; le premier étant un projet forestier.

Le projet numéro deux vise la fabrication de biomatériaux pour les industries de l'automobile, de l'aérospatiale, de la construction et des matières plastiques. Avec ce projet, on cherche à mettre au point des technologies durables et des processus en utilisant des fibres forestières et agricoles pour produire des biomatériaux légers à prix compétitifs, qui serviront à la fabrication de pièces d'autos et d'aéronefs.

Nous travaillons également à mettre au point des versions écologiques d'un groupe de produits chimiques appelé « uréthanes », qui comprennent les mousses, les adhésifs, les agents d'étanchéité et les enduits. En utilisant la biomasse générée par ce qui serait considéré autrement comme des déchets agricoles de filatures de lin, par exemple, on crée des biomatériaux dans le but de remplacer les produits dérivés du pétrole pour les entreprises des secteurs de l'automobile, de l'aérospatiale et de la construction.

Le projet numéro trois vise la création d'énergie propre et de produits chimiques fins à partir des sites d'enfouissement; nous travaillons de la même manière, à transformer les déchets des décharges municipales en sources d'énergie durable, ce qui inclut les biogaz et les produits chimiques contenus dans les plastiques et d'autres matériaux.

Le projet numéro quatre du PNB consiste à fabriquer du biocarburant à partir d'algues. Vous constatez peut-être une tendance dans ces projets : ils cherchent tous à valoriser les déchets. La fabrication de biocarburants à partir d'algues ne fait pas exception. Les algues sont comme les plantes, car elles séquestrent le dioxyde de carbone et utilisent la lumière du soleil. Grâce à un processus que l'on appelle la photosynthèse, elles produisent des huiles, des protéines et d'autres composantes utiles que l'on peut raffiner pour créer du carburant pour les automobiles, et même pour l'aviation. L'avantage de ce projet, c'est qu'il n'empiète pas sur la chaîne alimentaire des êtres humains et ne requiert pas de terres arables. Le dioxyde de carbone, ou CO2, nécessaire pour faire pousser les algues peut provenir d'usines émettrices de CO2 ou d'autres processus industriels.

Vous pouvez donc voir que nous cherchons à valoriser chaque étape du processus de production. À l'aide d'un système comme celui-ci, rien ne peut être qualifié de « déchet ».

C'est exactement ce que nous faisons avec notre premier projet du PNB, en cherchant de nouveaux moyens de valoriser la biomasse forestière canadienne. Dans le cadre de ce projet, nous travaillons à la fabrication de matières lignocellulosiques dérivées du secteur forestier, ainsi qu'avec Agriculture et Agroalimentaire Canada et FP Innovations. D'autres témoins vous ont peut-être déjà parlé de la biomasse lignocellulosique, probablement dans le contexte de la production d'éthanol. Cette expression scientifique désigne les sous-produits non dérivés du bois, comme les copeaux de bois. Ces sous-produits peuvent être utilisés pour fabriquer des produits utiles autres que l'éthanol.

Nous travaillons en collaboration avec FPInnovations pour utiliser de la lignine dérivée de l'exploitation forestière des usines de pâte kraft pour remplacer le phénol issu du pétrole dans certains types de résines appelées « résines phénol- formaldéhydes ». Sur le plan technique, l'objectif consiste à remplacer par la lignine 50 p. 100 du phénol dans les résines pour le contreplaqué et les panneaux de lamelles orientées, tout en maintenant la cohésion des fibres requise pour la norme de la CSA relative à l'adhésif de contreplaqué.

Les travaux consisteront également à intégrer des résines modifiées par nanotubes de carbone en produits du bois et à en faire l'essai. Je tiens à faire remarquer que l'application des nanotubes de carbone à l'industrie forestière se trouve vraiment aux frontières de la science : l'utilisation de nanotubes améliore les propriétés mécaniques et physiques des panneaux de lamelles orientées. Il s'agit-là d'une innovation très intéressante, puisque nous sommes les premiers à recourir aux nanotubes de carbone en foresterie, et une demande de brevet conjointe entre FPInnovations et les États- Unis a été déposée.

FPInnovations, notre partenaire, relie ses recherches à un centre de technologie sur la lignine, à Thunder Bay, qui a récemment été créé grâce à un financement à parts égales entre Ressources naturelles Canada et le Centre de recherche et d'innovation en bioéconomie de l'Ontario, aussi connu sous le nom de CRIBE. L'initiative englobe un projet pilote d'usine qui, d'ici janvier 2011, permettra de produire 100 kilogrammes de lignine kraft par jour.

En plus d'offrir suffisamment de lignine pour les essais commerciaux, le projet pilote permettra d'obtenir des données préliminaires et des données sur l'exploitation qui seront utilisées pour mettre la dernière main au plan de conception d'une usine de démonstration complète ayant une production de 50 tonnes par jour, qui est proposée pour l'usine d'AbitibiBowater de Thunder Bay. Le projet numéro un du PNB, qui vise à remplacer les résines PF par de la lignine pour les contreplaqués et les panneaux de lamelles orientées, est une initiative à court terme destinée à exploiter toute la lignine qui sortira de ces usines lorsqu'on aura fini de les construire et qu'elles seront prêtes à être exploitées.

On peut aussi tirer du furfural de la biomasse forestière. Le furfural est utilisé comme solvant dans le raffinage des produits pétrochimiques pour extraire les diènes, qui servent ensuite à fabriquer du caoutchouc synthétique et d'autres plastiques. Il peut également être utilisé pour produire des résines solides, qui sont employées dans les fonderies de métaux, la fabrication de fibre de verre, certaines composantes d'aéronefs et les freins d'automobiles.

Nous nous employons à améliorer le rendement global de la production de furfural à partir de forêts de feuillus. Notre travail consiste non seulement à transformer la biomasse forestière en produits chimiques ciblés, mais aussi à intégrer le processus dans l'exploitation des usines de pâtes.

Nous avons honoré notre promesse de produire des effets à court terme, puisque nous avons déjà déposé, dans le cadre de ce projet multidimensionnel du PNB qui en est maintenant à sa troisième année; deux demandes de brevet; l'une pour la préparation du furfural et l'autre pour l'application de nanotubes de carbone, dont j'ai déjà parlé, ainsi que pour les innovations que nous avons pilotées dans le cadre de l'initiative de Thunder Bay.

Pour terminer, je dirais que le Programme national sur les bioproduits montre comment les membres de la communauté scientifique, lorsqu'ils collaborent, peuvent avoir une influence sur l'industrie forestière en peu de temps. Tirer partie de la biomasse forestière canadienne existante est une approche prometteuse à adopter, car le Canada est riche en ressources naturelles, ce qui constitue pour nous un avantage compétitif naturel. Il nous incombe de renforcer cette richesse pour créer une nouvelle période de prospérité.

J'ai été ravi de vous donner un aperçu de quelques-unes des initiatives auxquelles participe le CNRC pour soutenir l'industrie forestière canadienne.

Le président : Nous allons maintenant entendre Mme Mortimer.

Patricia Mortimer, vice-présidente, Soutien technologique et industriel (Programme d'aide à la recherche industrielle), Conseil national de recherche du Canada : Comme vous l'a dit mon collègue, le CNRC compte un certain nombre d'instituts de recherche et de programmes, dont le Programme d'aide à la recherche industrielle, ou PARI. J'aimerais maintenant vous présenter un bref aperçu du PARI, vous expliquer comment il fonctionne et voir plus précisément comment il a permis de soutenir l'industrie forestière et d'interagir avec elle.

Le PARI existe depuis 60 ans. Depuis toujours, ce programme s'est concentré sur l'aide aux petites et moyennes entreprises canadiennes dans leurs projets de R-D et dans les activités qui en découlent. Près de 19 000 entreprises canadiennes font des activités de R-D, d'une manière ou d'une autre, et elles emploient moins de 500 personnes. Ces entreprises constituent notre clientèle de base.

Ce programme, qui soutient directement les entreprises, comporte deux volets. Le premier est constitué de services- conseils technologiques et d'affaires; le second offre une aide financière pour couvrir les coûts salariaux de projets relatifs à la mise au point de technologies.

Les services-conseils sont fournis par une équipe de professionnels possédant une expérience technologique et commerciale; ils sont offerts dans 135 bureaux, partout au pays. Plusieurs des 240 personnes sur le terrain font partie intégrante de regroupements technologiques ou commerciaux, comme des bureaux de transfert technologique d'universités, des incubateurs ou d'autres organisations spécialisées dans l'innovation et la R-D.

Les personnes qui fournissent ces services-conseils, aussi appelés CTI, en sont souvent à leur troisième ou quatrième carrière et possèdent de l'expérience en gestion d'entreprise ou en R-D de type entrepreneurial. Elles viennent de différents secteurs industriels, mais elles peuvent également faire appel à leurs collègues d'un peu partout au pays pour accroître l'accès des clients à des réseaux et à des expertises particulières. Les CTI travaillent directement avec les entreprises de leur territoire, créant ainsi une relation de confiance et de proximité à long terme et apportant conseils, soutien et aide financière, à l'occasion.

Le soutien financier qu'offre le PARI est sous forme d'« accord de contribution » légal. Ce type d'accord permet au PARI de gérer plus étroitement les projets de R-D des clients et de faire un suivi des produits livrables; ainsi le PARI rembourse les coûts salariaux de l'entreprise qu'après qu'ils ont été engagés et que les objectifs ont été atteints. Le montant de ces contributions varie de quelques milliers à un million de dollars, selon l'envergure et la complexité du projet de recherche.

Le financement n'est qu'une partie du coût de la recherche, et l'entreprise doit partager ce risque. Habituellement, sa part est de 60 p. 100 du coût total du projet. Cette méthode permet au PARI soit d'aider les entreprises à augmenter leur budget de R-D, soit de les encourager à faire un investissement, nouveau ou à la hausse, dans la R-D.

Avec les services votés habituels, le PARI travaille avec environ 8 500 entreprises par année. La plupart n'ont reçu que des services-conseils du PARI. Il arrive qu'un CTI travaille avec une petite entreprise pendant plusieurs années avant qu'elle soit prête à faire une demande de financement pour un projet. Pour le PARI, les services-conseils conjugués au financement font des entreprises mieux préparées et qui ont de meilleures chances d'atteindre leurs objectifs techniques ou commerciaux.

En plus de ce soutien direct, le PARI offre un soutien indirect aux entreprises grâce à des accords conclus avec des organismes qui donnent un soutien à ces entreprises plus petites au Canada.

Le PARI peut avoir déterminé avec ces organismes les services complémentaires qu'ils peuvent fournir et qui les aideront à livrer leurs produits, soit en offrant du financement, soit en donnant des services-conseils. À titre d'exemple, nous avons des arrangements et des projets en cours avec le Centre de la science et de la technologie du bois de l'Université du Nouveau-Brunswick et la Prince George Regional Forest Exhibition Society.

Que ce soit de façon directe ou indirecte, le PARI fournit des services à tous les secteurs de l'industrie et n'en cible aucun en particulier. On peut dire que le PARI est à la fois réactif et proactif dans tous les secteurs industriels. Nous sommes à l'écoute des besoins d'aujourd'hui dans la collectivité, où nous mettons nos forces et nos ressources à contribution pour changer les choses pour le mieux et, nous l'espérons, avoir une influence sur les chances futures de succès des entreprises.

Par ailleurs, les CTI restent actifs dans leur secteur et suivent de près les nouvelles tendances et les technologies en émergence qui pourront aider leurs clients dans des projets futurs. Ils peuvent ainsi faire des suggestions dans le cadre du volet conseil de leurs fonctions.

Pour ce qui est des programmes et activités du PARI qui sont axés sur le secteur forestier, sur les 240 CTI dont j'ai déjà parlé, 56 travaillent dans des collectivités disséminées d'un bout à l'autre du pays où se trouvent des entreprises forestières. Certains CTI partagent d'ailleurs des bureaux avec des organismes, notamment la division Forintek de FPInnovations à Vancouver et la Faculté de foresterie de l'Université de Moncton, au Nouveau-Brunswick.

Comme notre programme ne s'adresse pas à un secteur seulement, notre définition de l'industrie forestière peut être légèrement différente de celles que vous avez entendues jusqu'à présent. Nous englobons tous les aspects de l'activité — la chaîne de valeur dans son entier. Ainsi, nous ne nous intéressons pas seulement à la coupe et à la gestion de nos forêts, mais à ce que deviendra le produit final, à ses points de vente et à sa transformation. Nous pouvons nous intéresser aussi aux fabricants de produits qui alimentent l'industrie. Nous faisons le bilan de santé de l'entreprise elle- même et adoptons une approche globale à l'égard de sa croissance. Il peut s'agir, par exemple, de mettre en place un mécanisme de production à valeur ajoutée pour améliorer l'efficacité énergétique d'un moulin.

Depuis cinq ans, le PARI a fourni des services-conseils à 203 entreprises forestières et en a financé 109 autres, pour un total de 169 projets — il arrive que des compagnies aient plusieurs projets. Le montant total du financement de ces projets est de 10 200 000 $ sur cinq ans.

En me préparant pour l'audience d'aujourd'hui, j'ai fait comme beaucoup de nos clients. J'ai sollicité les commentaires et conseils de CTI de tout le pays, et je leur ai demandé quelles sont les grandes tendances de nos jours et quels sont les intérêts en matière de recherche. Comme nos employés de ce secteur sont très enthousiastes, j'ai reçu de nombreuses réponses. J'ai relevé plusieurs thèmes communs, qui font ressortir la similitude des enjeux d'un bout à l'autre du pays. La biomasse et les biocarburants, l'extraction chimique et les nouveaux composites à fibres, et les produits du bois dominaient. Il était aussi souvent question d'efficacité de la coupe et de la transmissibilité d'équipements adaptés au secteur. Le principal enjeu, toutefois, était bien entendu l'investissement en R-D en vue de la mise au point de projets forestiers qui rapportent plus.

Avec le récent ralentissement économique, notre secteur des services-conseils tout comme celui du financement ont entrepris d'accroître l'efficacité des activités traditionnelles tout en réduisant les coûts. Le PARI a offert à plusieurs compagnies des conseils en matière de production à valeur ajoutée et l'appui de consultants pour passer en revue leurs activités.

Le PARI aide aussi les entreprises forestières à accéder au savoir mondial. Ainsi, nous avons fourni un soutien à des entreprises pour envoyer leurs représentants à des foires internationales ou suivre une formation. Ainsi, elles pouvaient élargir leur réseau et créer des liens utiles, ou découvrir de nouvelles technologies susceptibles d'accroître leur productivité.

Le Canada a encore des PME d'envergure dans le secteur forestier. Nexterra, un client du PARI sur la liste de 2010 de Deloitte des 50 entreprises du Canada qui affichent la croissance la plus rapide, est considéré comme un chef de file dans le domaine des systèmes électriques et de chauffage à la biomasse. Xylon Biotechnologies, de la Colombie- Britannique, a beaucoup de succès dans le domaine de l'extraction d'éléments chimiques aux fins d'application commerciale dans les produits pharmaceutiques, les cosmétiques et la fabrication de répulsifs pour les animaux nuisibles. Un autre exemple est celui d'Équipement Comact, une entreprise de Chicoutimi qui fait des machines pour la fabrication de granules grâce à un projet de transfert de technologie mené avec la France. Ce projet, qui se poursuit, produit déjà des ventes.

Sur le plan financier, le budget de base du PARI, pour le financement des entreprises, avoisine les 86 millions de dollars. Actuellement toutefois, ce budget a plus que doublé, grâce à des fonds supplémentaires obtenus dans le cadre du Plan d'action économique du Canada. Le PARI collabore aussi depuis deux ans avec FedDev Ontario pour fournir un financement additionnel aux communautés éprouvées du Sud de l'Ontario. Vous trouverez dans le dossier que je vous ai préparé les détails de notre budget pour le présent exercice et les données comparatives des dernières années.

Le Canada a de grandes forces et de vastes possibilités, et soyez assurés que le PARI reste résolu à collaborer autant que possible avec les PME du secteur forestier.

Pour terminer, je tiens à remercier le comité de m'avoir permis d'exposer les perspectives du PARI-CNRC. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.

[Français]

Le président : Je demanderais maintenant à M. Roger Gaudreault de la compagnie Cascades de faire sa présentation et par la suite, nous procéderons à la période des questions.

Roger Gaudreault, directeur général, recherche et développement, Cascades : Monsieur le président, durant les premières minutes de ma présentation, je parlerai de Cascades et par la suite, je ferai quelques recommandations.

La vision stratégique de Cascades est de promouvoir la culture d'entrepreneuriat et d'innovation et poursuivre l'intégration en amont des secteurs de la récupération et de la transformation. Cascades est née en 1964 et sur cette photo vous pouvez voir les trois frères Lemaire lors de l'inauguration du Bixi de Montréal et aussi, lors de l'inauguration de Tissus Cascades, lancée en 2005.

Actuellement, Cascades compte 12 500 employés répartis dans une centaine d'unités d'exploitation à travers le monde. Dans le secteur de l'emballage; il y a le carton plat, les cartons-caisses, les produits spécialisés et le papier-tissu. De plus, on est dans l'énergie avec Boralex.

Cascades est une pionnière en développement durable et en environnement. Voici quelques statistiques à l'appui : 2,1 millions de tonnes de fibres sont recyclées et 73 p. 100 de notre matière première est à base de produits recyclés.

Cascades utilise 9.7 m3 d'eau par tonne métrique de papier et, c'est six fois moins que la moyenne canadienne qui est de 60 m3 d'eau par tonne et ce, en incluant l'eau de refroidissement.

Concernant le profil des ventes et la rentabilité, Cascades a des ventes de quatre milliards de dollars depuis environ cinq ans, et peut-être un peu plus. Vous avez les différents secteurs dans lesquels on œuvre. Quant aux bénéfices d'exploitation avant amortissement (BEAA), ils s'élèvent à 465 millions en 2009. Cascades a donc démontré qu'elle a été une compagnie très rentable ces dernières années, malgré les difficultés dans le secteur des pâtes et papiers.

Sur le plan de la R-D, il y a environ 45 employés localisés à Kingsey Falls. Cascades possède le seul centre de recherche privé en pâtes et papiers au Canada, tous les autres ont été fermés au cours des deux dernières décennies. Il y a FPInnovations — Paprican qui n'est pas privé, mais c'est un centre de recherche qui dessert l'ensemble de l'industrie canadienne. On est le seul à avoir toujours grandi au cours des 20 dernières années.

Depuis 2006, on dépense pour la R-D entre 35 et 47 millions de dollars, donc en moyenne 40 millions de dollars par année. En termes de positionnement sur les tops 100 au Canada, on se situe entre 50 et 55, toutes formes d'industries confondues.

Chez Cascades, on a développé un système de gestion de l'innovation. On a d'abord défini ce qu'était l'innovation. Pour Cascades, c'est un nouveau produit, nouveau procédé ou nouvelles méthodes marketing, opérationnelles et financières qui apportent un avantage compétitif à Cascades. Pour nous, l'innovation, doit être une première dans un pays, dans un continent ou à l'échelle mondiale. Il faut faire la distinction entre une invention, qui est un succès technique et une innovation qui est un succès commercial.

Ici, vous avez le système de gestion de l'innovation qu'on a développé. C'est un système qui a été bien reçu par les employés et par la direction Cascades. En 2008, un an après le lancement de notre système de gestion de l'innovation, on a inclus le filtre du développement durable, qui est un filtre conceptuel pour s'assurer que nos innovations sont durables.

Il y a 60 bonnes idées, pour sept bons projets pour une innovation. Cela veut dire qu'il faut développer beaucoup d'idées pour être capable d'innover.

Chez Cascades, on fait l'inventaire de nos innovations. Vous avez le graphique sur les innovations de Cascades, lesquelles respectent la définition que j'ai donnée plus tôt. Ce sont uniquement les innovations de marketing et de produits. Ce n'est pas une liste complète. Ce graphique démontre qu'au cours des dernières décennies, Cascades a augmenté de façon exponentielle sa capacité à innover.

Je vais maintenant mentionner quelques exemples d'innovations durables. D'abord, les barrières fonctionnelles. Depuis 1994, on a une innovation sur une barrière à l'humidité pour l'emballage des rouleaux de papiers. Et en 2009, on a lancé le NorShield, une boîte sans cire, la cire étant un contaminant pour les pâtes et papiers. On a aussi une innovation sur le plan du marketing pour notre famille de papiers tissus et une innovation pour le papier fin, qui est fait de 100 p. 100 recyclé. Un logo intéressant, celui de Biogaz; les biogaz qu'on prend à 13 kilomètres de l'usine. Actuellement, 85 p. 100 de l'énergie utilisée à notre usine de Saint-Jérôme provient du biogaz.

On a lancé un nouveau produit cette année, soit notre papier intelligent. Pour l'instant, on le considère comme une invention parce qu'il faut des ventes soutenues pendant plusieurs mois pour le considérer comme une innovation.

Vous retrouverez ici une citation qui démontre que notre système de gestion et d'innovation est loin devant dans les industries des pâtes et papiers en Amérique du Nord. Vous pouvez également voir les reconnaissances qu'on a obtenues pour nos innovations.

Par rapport aux recommandations que Cascades veut faire, un constat s'impose. Alors qu'il y a un consensus selon lequel l'avenir passe par la R-D et l'innovation, malheureusement les compagnies publiques comme Cascades sont évaluées sur les résultats à court terme qu'elles peuvent produire. Un organisme comme le Sénat peut venir corriger cette incohérence en rendant plus attrayantes les activités de R-D menant à de nouveaux produits et/ou innovations.

Chez Cascades, c'est parce qu'on y croit qu'on est capable de continuer à investir environ 40 millions de dollars par année à court terme, par exemple en ne recevant que 8 millions de dollars de crédits d'impôt en 2009, soit 6,3 millions du gouvernement fédéral et 1,9 million du gouvernement provincial et ce, dans le cadre d'un programme qu'on considère insuffisant pour inciter à l'innovation. Notre recommandation serait de renchérir les programmes existants qui sont à la fois appréciés et dont les mécanismes sont éprouvés.

C'est l'envergure qui n'est pas suffisante pour réellement stimuler la R-D et l'innovation. On recommande donc de rajouter deux paliers d'incitation en fonction des caractéristiques des projets ciblés. C'est-à-dire que les dépenses usuelles de R-D devraient dorénavant donner accès à 35 p. 100 de crédits d'impôt — ce qui est le cas pour les PME, mais pas pour les grandes entreprises. C'est donc notre première recommandation.

La deuxième concerne les dépenses des projets qu'on pourrait considérer à haut niveau de technologie. Elles devraient donner droit à 50 p. 100 de crédits d'impôt. Quant aux dépenses de projets de R-D et d'innovation durable, elles devraient donner droit à 75 p. 100 des crédits d'impôt. Pourquoi 75 p. 100 pour les innovations durables? Notre recommandation est justifiée par le fait que même si la technologie assure une compétitivité à court terme, elle n'est pas une fin en soi. Cependant, la pérennité d'une entreprise, laquelle est conséquente au développement durable, doit être priorisée et davantage bonifiée.

À titre d'exemple, un tel programme inciterait Cascades à :

Développer de nouveaux procédés et produits biotechnologiques;

Favoriser les applications dans le domaine des matériaux en utilisant les cartons recyclés pour faire, par exemple, des meubles et des panneaux publicitaires renouvelables — il y a beaucoup d'opportunités de ce côté;

Développer des procédés de recyclage plus efficaces et robustes, que ce soit en termes de récupération, de blanchiment, de nettoyage, et cetera, qui permettent de développer des produits dont les caractéristiques sont adéquates et stables, et ceci dans un contexte où la matière première est de plus en plus variable et complexe;

Développer des emballages pour les aliments à base de papiers recyclés — on le fait déjà, mais il faut accentuer davantage la plate-forme;

Adresser les problématiques associées à la migration potentielle des nanomolécules et des nanoparticules dans les aliments — autrement dit, les nanotechnologies, c'est vraiment une voie d'avenir, mais il y a très peu de consensus et beaucoup d'inquiétudes par rapport à la migration de ces molécules vers les aliments. Il y a énormément de questions auxquelles on n'a pas répondu à ce sujet;

Développer des nouvelles technologies qui permettraient de réduire la consommation d'eau des papetières — Cascades est en avance sur les autres compagnies, avec six fois moins que la moyenne canadienne et américaine, mais il est clair qu'on va continuer à progresser en ce sens parce que des économies d'énergie y sont associées; et

Mettre en place des programmes de formation pour développer certaines compétences telles que l'idéation et l'innovation radicale, de façon à assurer une véritable compétitivité sur le plan international.

Pour nous, l'innovation égale profitabilité, mais innovation durable égale profitabilité durable.

[Traduction]

Le sénateur Eaton : Je vous remercie de vos exposés.

Nous nous intéressons beaucoup aux innovations, dans ce rapport, et nous voudrions savoir ce que nous pouvons faire pour aider le secteur forestier du Canada à se réinventer et à trouver une autre vocation que les pâtes et papiers.

Pendant que nous préparions notre rapport, nous avons entendu des témoins de bon nombre d'universités. Quels sont vos liens avec les universités, sur le plan de la recherche? Je pense par exemple à l'Université de Guelph, qui fait beaucoup de recherche.

Dr Szumski : L'université de Thunder Bay participe au projet dont je vous ai parlé. Quand nous entreprenons des projets, nous établissons des liens avec les universités. Avec ce programme national, nous essayons de créer des sujets de recherche qui font le lien entre les travaux qui pourraient être réalisés dans une université et ce que fait le gouvernement, et en définitive qui relient une source de biomasse avec les utilisateurs finaux. Nous travaillons aussi avec le secteur de la construction, par exemple, ou ceux de l'automobile et de l'aérospatiale, pour dès le départ avoir les spécifications techniques en tête et nous assurer que le sujet de recherche est le bon et relie l'éventuelle chaîne de valeur entre le producteur de biomasse et l'utilisateur final. Il y a beaucoup de collaboration. Je n'en ai pas vraiment parlé, mais la collaboration avec les universités est un trait commun de tous nos programmes.

Le sénateur Eaton : Vous rendez-vous activement dans les universités où vous savez qu'on effectue de la recherche, ou vient-on vous voir pour obtenir des bourses, du soutien et une assistance?

Dr Szumski : Nous ne fournissons pas de subventions. Nous sommes un organisme de R-D, qui mène des activités de R-D, alors nous nous rejoignons en tant que collaborateurs. Les membres des réseaux scientifiques tendent à savoir qui sont les experts et où ils travaillent, de même qu'à se regrouper naturellement autour d'un projet. Il y a une autre occasion d'établir des liens lorsqu'un programme — par exemple le PNB du CNRC — est connu de la communauté universitaire parce qu'il est pertinent pour elle. Le milieu de la recherche universitaire sera au courant de ce programme et établira les liens avec lui.

Le sénateur Eaton : Y a-t-il un délai d'exécution selon lequel les réseaux scientifiques universitaires et vous-mêmes commencerez à travailler ensemble — je pense à la courbe en forme de bâton de hockey —, au moment de passer de la R- D à la commercialisation? Est-ce trop demander? Les délais sont-ils à ce point différents pour chaque produit que vous ne pouvez les préciser, ou y a-t-il un délai moyen?

Dr Szumski : Le délai dépend de la technologie et de l'industrie. Comme vous le savez, il faut environ 15 ans à l'industrie du développement des médicaments pour passer de la recherche à un produit commercial. La biotechnologie agricole et les nouvelles variétés de plantes nécessitent de 10 à 11 ans. Et pour les technologies dont nous parlons ici, nous nous attendons à un délai de l'ordre de trois à cinq ans depuis la recherche jusqu'au point où la technologie est prête à être transférée à l'industrie. Évidemment, la commercialisation a lieu à l'étape de l'industrie. L'industrie se charge de la mise à l'échelle, de l'entrée accélérée sur le marché et du marketing, et tous les éléments qui appartiennent à l'innovation sont distincts de l'invention. Toutefois, selon le domaine technologique, les délais les plus courts sont d'une année, et les délais les plus longs, selon l'industrie, peuvent aller jusqu'à 15 ans.

Mme Mortimer : Le programme PARI fait en bonne partie appel aux chercheurs universitaires en tant que conseillers et sources de technologie pour les petites entreprises. Nous avons connaissance de la technologie grâce à nos CTI qui sont présents dans les bureaux de transfert de la technologie des universités, ce qui nous permet d'être au courant de ce qu'on y trouve. Étant donné que les CTI sont également reliés par un réseau, vous n'avez pas à vous limiter à la recherche qui s'effectue au Nouveau-Brunswick, disons. Vous aurez accès aux travaux de recherche réalisés dans d'autres universités qui portent sur le même domaine d'intérêt. Par conséquent, le PARI est bien plus proche du marché. Il est question ici des entreprises qui tentent de mettre au point des produits. Dans ce cas, la recherche est à très brève échéance et il s'agit parfois de recherches à contrat, par opposition aux recherches dans le cadre du programme biotechnologique, dont l'échéance est un peu plus éloignée.

Le sénateur Mercer : Merci de vos exposés.

Monsieur Gaudreault, je vous félicite pour la qualité de votre allocution. J'ai quelques questions simples à vous poser.

Il y a la page de votre mémoire où vous montrez votre équipe de R-D; puis à la page suivante, vous parlez des chiffres, des montants d'argent dépensés en R-D, et des 100 plus importants investisseurs privés en R-D au Canada. Je suis intrigué par cette dernière partie de la diapositive où l'on indique un montant de zéro dollar pour l'année 2009.

M. Gaudreault : C'est simplement que le chiffre n'a pas encore été publié; mais il tourne autour de 35 millions de dollars.

Le sénateur Mercer : Cela constitue une baisse par rapport à 55 millions de dollars en 2008.

M. Gaudreault : Nous avions 47,2 millions en 2006.

Je suis navré. Sur ce graphique, vous voyez le classement. La légende indique qu'entre 2006 et 2009, nous avons dépensé 40 millions de dollars par année en moyenne. C'est clair. Autrement dit, nous nous situons entre les 50e et 55e rangs par rapport aux 100 principaux investisseurs canadiens en matière de R-D.

Oui, dans un sens, nous avons eu moins de dépenses. Le chiffre pour 2006 est de 47,2 millions, alors qu'il est de 44,5 millions pour 2007 et de 37,6 millions pour 2008. En ce qui concerne 2009, nous ne connaissons pas encore le montant exact, mais il est d'environ 35 millions de dollars. J'attends le chiffre définitif.

Le sénateur Mercer : Pouvons-nous supposer que cette diminution reflète la situation économique actuelle? Est-elle due au fait que nous sommes en période de ralentissement économique ou de récession? Est-ce la raison pour laquelle le chiffre n'est pas aussi élevé qu'il l'était?

M. Gaudreault : Oui. Nous avons fermé quelques usines, mais 2008 a également été une année plus difficile. Même si, comme vous l'avez constaté, Cascades a été en mesure d'obtenir de bons résultats, l'année 2008 et les suivantes ont en effet été difficiles.

Le sénateur Mercer : Cela m'amène à ma dernière question. Ainsi donc, vous avez fermé une usine?

M. Gaudreault : Quelques-unes.

Le sénateur Mercer : Où ces usines étaient-elles situées? Vous pourrez nous faire part de cette information plus tard.

M. Gaudreault : Oui.

Le sénateur Mercer : En fonction des activités courantes de votre entreprise, combien d'employés Cascades compte- elle en tout au Canada?

M. Gaudreault : Au Canada, nous avons 8 000 employés.

Le sénateur Mercer : Ne faites-vous pas des affaires en Amérique du Sud?

M. Gaudreault : En Amérique du Sud? Non, pas nous.

Le sénateur Segal : J'ai une brève question qui s'adresse à chacun de nos témoins.

En ce qui concerne le Programme national sur les bioproduits, je n'ai pas bien compris les chiffres, monsieur Szumski. D'après votre document et votre déclaration, 21 millions de dollars étaient attribués à ce programme. Il y avait des partenaires, c'est-à-dire Ressources naturelles Canada et Agriculture et Agroalimentaire Canada, qui ont contribué à parts égales. Cela veut-il dire que chacun a contribué pour 7millions, ou pour 21 millions de dollars?

Dr Szumski : Ces investissements se font au niveau des projets; et si l'on tient compte de la contribution des autres ministères, de l'industrie ou des universités qui sont nos partenaires, cela double à peu près l'investissement effectué par le CNRC.

Le sénateur Segal : Vingt-et-un millions deviennent quarante-deux millions, si j'ai bien compris. J'essaie d'avoir une idée des sommes.

Dr Szumski : C'est exact.

Le sénateur Segal : Voilà qui est utile.

[Français]

Le sénateur Segal : Monsieur Gaudreault, une de vos recommandations serait une augmentation de crédits d'impôt. À votre avis, si un jour le gouvernement accepte vos propositions, est-ce que cela augmentera les investissements que Cascades et les autres compagnies pourront faire? J'imagine que les décisions prises maintenant pour investir sont dirigées par vos propres besoins économiques d'un point de vue de la compagnie : profitable, important, vos actionnaires, et cetera.

Êtes-vous en mesure de nous indiquer, si le gouvernement agit de la façon suggérée, que cela créera des conditions pour une augmentation de la part du secteur privé dans l'investissement de la recherche et développement? Si je comprends bien, ceci est votre propos.

M. Gaudreault : Oui, effectivement.

Le sénateur Segal : Vous n'avez aucune hésitation à ce sujet.

M. Gaudreault : En considérant les discussions que nous avons, il est clair que l'innovation fait partie de notre avenir, c'est une nécessité pour nous. Pour l'instant, on le fait parce qu'on y croit et on n'a pas le choix. Cependant, nous sommes sûrs que d'avoir des montants supplémentaires nous stimulera davantage et cela nous permettra de mieux développer et de développer davantage.

Certains produits deviennent de plus en plus sophistiqués. Il y a des problématiques sur le plan des nanotechnologies, qui sont beaucoup plus complexes et qui demandent beaucoup plus de recherche et de développement. Nous avons lancé un produit dernièrement. Nous sommes en train de créer les nouvelles générations et ce sont vraiment des produits de plus en plus sophistiqués, complexes et qui touchent la santé humaine, et cetera. On a besoin de plus d'argent pour en faire des innovations. Il est clair pour les gens, avec qui je discute à l'interne, que c'est quelque chose qui nous stimulerait davantage. On investit quand même déjà passablement en recherche et développement.

Le sénateur Segal : Il ne s'agit pas de dire que le montant d'investissement est maintenant limité par un niveau de crédits d'impôt? Vous n'êtes pas en mesure de nous dire cela?

M. Gaudreault : C'est-à-dire nous avons quatre milliards de ventes. On investit 40 millions de dollars en recherche et développement et nous devrions recevoir 8,2 millions de dollars pour 2009. De ces 8,2 millions de dollars, 1,9 millions de dollars proviennent du provincial. Il s'agit d'un remboursement qu'on reçoit et que l'on peut réinvestir, entres autres, en R-D. Alors qu'au fédéral, c'est un montant qui viendra réduire les impôts à payer lorsque applicable. Cascades pourrait utiliser actuellement 26 quelque millions de dollars du fédéral, si certaines conditions étaient respectées. Il ne s'agit toutefois pas de sommes disponibles pour réinvestir et être encore plus dynamique en innovation. Il y a l'ajustement du montant et aussi peut-être la formule. Au provincial, il s'agit d'une somme qu'on reçoit plus directement.

[Traduction]

Le sénateur Segal : Madame Mortimer, le premier comité où j'ai eu le privilège de siéger il y a cinq ans était le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, sous la distinguée présidence du sénateur Fairbairn. Nous avions déploré la disparition du conseiller agricole qui se rendait autrefois de ferme en ferme au nom des gouvernements provinciaux et fédéral pour poser des questions au sujet de l'application de la technologie ou autre.

Vos CTI me paraissent être une ressource remarquable, indépendamment du travail qu'ils accomplissent comme agents de soutien pour le programme PARI, ce qui est déjà assez important en soi. Ils ont un réservoir de sagesse relativement à ce qui se passe réellement dans le milieu. Vous avez eu la bonté de dire que vous les aviez consultés avant de venir nous conseiller aujourd'hui.

Les réunissez-vous en groupe? Comment les CTI s'y prennent-ils pour choisir les projets sur lesquels ils travailleront? Avez-vous en place un processus de révision par les pairs? Je ne voudrais pas vous surcharger de questions, mais j'essaie d'avoir une idée des choses, car ces personnes me paraissent être une ressource remarquable, constructive et importante. Bien des gens autour de cette table sont peut-être déjà au courant, mais je viens d'apprendre leur existence, et cela m'intéresse fortement.

Mme Mortimer : Vous avez parlé de deux aspects particuliers. L'un d'eux était la sagesse collective et la façon dont nous la rassemblons pour ensuite la mettre à profit. L'autre concernait le processus d'approbation des projets.

Les CTI eux-mêmes, lorsqu'ils travaillent avec les clients, mettent à contribution leurs collègues. Nous avons ce que nous appelons des équipes sectorielles, et dans certains domaines, nous avons officialisé cette relation. Dans toutes les provinces, on a des contacts formels avec le secteur manufacturier, le secteur de la construction. On se rencontre régulièrement. On mettra en commun des rapports et des études de marché pour le secteur visé, puis on les partagera. Nous faisons appel aux CTI comme ressources pour aider à informer le volet recherche du CNCR, en leur demandant de mettre en commun leur sagesse dans un domaine de recherche particulier. Nous avons recouru à eux dans le cadre d'ateliers en ce sens. Je fais appel à eux constamment.

Quant au choix des projets, nous ne procédons pas par appel de propositions. Souvent, les gens se présentent avec un projet pour demander du financement, et nous nous rendons compte qu'ils n'ont pas vraiment besoin de financement; ils sont loin d'en être là. C'est un service très personnalisé, mais pour que ce projet réussisse et soit financé, il doit faire l'objet d'une évaluation technologique, qui peut être effectuée par d'autres CTI. Il ne s'agit jamais uniquement d'un processus individuel, sauf dans le cas de quelque chose de très simple comme l'embauche d'un étudiant. S'il s'agit d'un projet de R-D complexe, on fera appel aux autres CTI, on formera une petite équipe et on sollicitera le concours des chercheurs des universités et du CNRC pour pouvoir évaluer le projet du point de vue de la technologie.

Cependant, nous en évaluons aussi l'aspect commercial. À nos yeux, si on ne peut pas vraiment obtenir un produit et qu'on n'a pas les reins assez solides pour le placer sur le marché, il ne sert à rien pour nous d'investir dans la recherche. Nous devons être convaincus que les responsables du projet ont la capacité de gestion, le plan d'opérations, le plan de commercialisation et les capacités et ressources nécessaires pour mettre en marché le produit. Tout cela fait partie de l'étude réalisée avant qu'un projet aille de l'avant.

Le sénateur Ogilvie : Je voudrais revenir sur la nature des questions posées par les sénateurs Eaton et Segal. J'estime qu'il est très important que nous saisissions le caractère unique du CNRC et l'énorme contribution qu'il apporte au développement industriel et économique du Canada. Si le terme « examen par les pairs » s'appliquait dans ces circonstances, on n'arriverait jamais à démarrer une entreprise au moyen du programme PARI. Nous avons là un contexte où des entreprises et des individus ayant un procédé, une idée, un concept ou un produit ont besoin d'assistance, depuis la planification des opérations à la recherche appliquée, en vue de concevoir le produit pour l'amener au point où il sera un produit efficace, de même qu'une réussite commerciale. C'est un élément fondamental du mandat du CNRC qui diffère fortement, voire même est totalement à l'inverse de ce qui se fait en milieu universitaire, là où une application est découverte en fonction de la chance, de coïncidences et d'autres types d'évolutions qui peuvent avoir lieu au cours d'un programme de recherche fondamentale.

Qui plus est, si nous prenons par exemple le domaine général des sciences de la vie, où des chercheurs s'intéressent au développement d'une recherche fondamentale, mais sous l'angle d'une occasion que les chercheurs ou l'industrie voient se profiler à l'horizon quant à la mise sur pied d'une capacité de recherche fondamentale pour le Canada, nous pouvons concrètement mettre au point des produits et diriger cette activité industrielle. Les universités sont des alliées potentielles de l'industrie lorsque la recherche fondamentale peut donner lieu à la mise en application de la recherche pour élaborer une stratégie à long terme et mettre au point des produits fondamentaux dans l'immédiat, et pour faire progresser rapidement l'entreprise.

La voix du CNRC n'est pas toujours entendue dans la discussion sur la capacité de R-D du Canada. De façon générale, nous avons tendance à penser aux universités, mais à mon avis, notre secteur et d'autres laboratoires de recherche fédéraux ont toujours été d'une importance considérable pour le développement de l'économie du Canada. Bien qu'il ait traversé une décennie de ralentissement et de sous-financement, je pense que c'est un secteur dont nous devons tenir compte et que nous devons renforcer, et j'estime que nous devons aller de l'avant avec un CNRC agissant à titre d'intervenant clé doté d'un objet et d'un mandat clairs.

Je tiens à bien faire comprendre que le milieu universitaire est un élément crucial du développement intellectuel d'une société. Néanmoins, le CNRC joue le rôle que son fondateur avait projeté pour lui et qui a évolué au fil des ans. Je crois que parfois, on sous-estime les impacts positifs de notre secteur dans la création d'entreprises axées sur la connaissance et l'innovation.

Le président : Y a-t-il des commentaires?

Dr Szumski : J'aimerais souligner l'aspect unique d'un organisme comme le CNRC. La recherche repose sur un mandat. Nous commençons souvent par poser la question suivante : qui a besoin de cette recherche? Le lien avec l'industrie s'établit souvent au début du processus de recherche, alors qu'on travaille avec un collaborateur de l'industrie pour mettre au point un programme. C'est une caractéristique unique qui n'entre vraiment pas en compétition avec le milieu universitaire; elle est complémentaire. Il est nécessaire que la production des connaissances ait lieu dans un environnement libre de contraintes où les gens pourront développer leurs intérêts, mais pour l'industrie, un organisme comme le CNRC est un outil très précieux.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Madame Mortimer, à une réponse à la question du sénateur Segal, vous avez dit que vous examinez, en fait, les capacités de l'industrie et des gens dans l'industrie, lorsqu'ils viennent vous voir, pour savoir s'ils ont une bonne gérance, les fonds nécessaires et tout ce que cela prend pour mettre un produit sur le marché. À quel point est-il difficile pour les petites entreprises de se qualifier pour ce programme? Souvent les petites entreprises n'ont pas les mêmes moyens et n'ont pas le temps qu'une moyenne, ou peut-être une grande entreprise, peut avoir pour développer un tel produit.

[Traduction]

Mme Mortimer : Je vous remercie pour votre question. Permettez-moi de préciser que notre personnel ne se borne pas à déterminer, sur le terrain, si une entreprise a un bon plan ou non. Il aide l'entreprise à bâtir son plan. Si elle a une idée, mais sans plan d'affaires, nous l'aidons à en préparer un. Si elle ne s'y connaît pas en protection de la propriété intellectuelle, nous l'aidons à trouver un agent de brevets. Nous l'aidons à réaliser des études de faisabilité et nous payons le coût des études de commercialisation.

Certaines entreprises ne sont pas seulement petites, mais très petites. Elles n'ont pas la capacité nécessaire. Nous les mettons en relation avec les ressources humaines dont elles ont besoin et nous leur fournissons les moyens financiers pour bâtir l'expertise, les compétences et la confiance dont elles ont besoin pour progresser. C'est une partie importante du mandat, et c'est ce qui explique que des gens trouvent le financement long à venir. C'est qu'ils n'étaient pas prêts. Nous les aidons à rédiger leur proposition pour l'obtention du financement. S'ils veulent du capital de risque, nous les préparons à rencontrer des détenteurs de capital de risque dès qu'ils le souhaitent. Le conseiller en technologie industrielle est à leur service et le demeure tout au long de l'existence de leur entreprise, et non uniquement le temps d'un projet. Les besoins de l'entreprise changent. Nous l'accompagnons dans sa croissance en l'aidant à se procurer les ressources nécessaires à sa réussite.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Je pose la question parce que, dans mon coin de pays, au Nouveau-Brunswick, des gens sont allés pour développer de nouvelles technologies, et, dans un cas en particulier, on a reçu des sommes qui faisaient partie d'un programme de recherche. C'était pour une machine qui, semblait-il, allait rentabiliser l'industrie, car on avait de la difficulté à trouver des travailleurs pour ce genre de travail. Il s'est avéré que la machine n'a pas produit la qualité du produit auparavant mise en marché. Les acheteurs ne voulaient pas de ce produit car ils voulaient du cru pour le marché — c'était un produit de mollusque. Néanmoins, la compagnie est maintenant coincée avec cette machine et cela a une influence sur son fonds de roulement.

Est-ce que les projets ont des provisions pour des cas comme celui-là, pour que la compagnie ne reste pas coincée avec quelque chose qui ne marche pas? Toutefois, je ne veux pas dire que tous les projets sont négatifs; la grande majorité sont bons et doivent continuer, mais, dans certains cas, on a des petites entreprises qui se trouvent mal en point.

[Traduction]

Mme Mortimer : Nos critères précisent que, pour qu'un projet soit admissible au Programme d'aide à la recherche industrielle, il doit présenter un certain risque. Si le projet consiste uniquement à fabriquer un produit, sans R-D et sans risque technologique, il ne fait pas partie de notre mandat. En pareil cas, l'entreprise peut s'adresser à une banque de développement économique. L'utilisation des technologies présente des risques. Parfois on réussit, parfois on échoue. Certaines entreprises doivent abandonner des projets à mi-parcours. Les conditions économiques évoluent.

Je ne pourrais pas dire que nous réussissons à tout coup. Néanmoins, j'ose croire que nous aidons les entreprises à améliorer leurs chances de réussite.

[Français]

Le sénateur Robichaud : À un moment donné, lorsque les autres petites entreprises, qui veulent se tourner vers les nouvelles technologies, voient cela, et ça les fait réfléchir avant d'initier de nouveaux projets.

Docteur Szumski, vous parlez du programme national de bioproduits et vous donnez quatre exemples. Ces exemples sont une coopération entre trois ministères, n'est-ce pas? Ce n'est pas initié par l'industrie comme tel.

[Traduction]

Dr Szumski : C'est un programme conjoint de trois ministères. C'est moi qui préside le comité de direction du programme. Les postes de vice-président sont occupés par le sous-ministre adjoint chargé des sciences, au ministère de l'Agriculture, et par le ministère des Ressources naturelles. Notre collaboration avec l'industrie se fait à l'échelon des projets. C'est là que nous nous associons à des partenaires industriels susceptibles de profiter de nos transferts technologiques. C'est à ce niveau que nous collaborons directement avec l'industrie.

Néanmoins, un comité consultatif se réunissant deux fois l'an participe aussi à la gestion du programme, et l'industrie est représentée au sein de ce comité. Parmi les gens qui siègent à ce comité consultatif se trouvent des personnes qui ont déjà témoigné devant votre comité, comme l'Ontario BioAuto Council, FPInnovations, les universités et d'autres acteurs majeurs de l'industrie, au pays.

[Français]

Le sénateur Robichaud : À quelle étape en êtes-vous? À un moment donné, l'industrie a besoin de nouvelles façons d'écouler les produits ou les sous-produits. Est-ce qu'on va aboutir bientôt? On entend parler de nouvelles technologies, de nanotechnologies, de nouveaux produits chimiques qu'on va extraire des fibres, où en sommes-nous? Comment se compare-t-on avec la recherche faite dans d'autres pays?

[Traduction]

Dr Szumski : Je ne dispose d'aucune évaluation solide me permettant de situer le Canada présentement par rapport aux autres pays, pour ce qui est de la recherche. Cependant, je peux vous dire que nous sommes au courant du rôle que ces technologies sont appelées à jouer. Un chemin tortueux sépare la découverte scientifique de l'invention d'un produit. L'industrie forestière et les usines de pâtes et papiers se trouvent devant des problèmes complexes. Il n'existe pas de remède technologique miracle qui leur donnerait soudainement des ailes. Lorsqu'on quitte le laboratoire pour se retrouver dans l'univers des procédés de fabrication, le travail se complique vraiment. On peut faire des merveilles dans une éprouvette, mais il est beaucoup plus difficile de les réaliser à grande échelle.

Il y a lieu d'être enthousiaste au sujet de l'exemple que je vous ai donné, soit les technologies que nous allons mettre à l'essai à l'usine pilote en construction, à Thunder Bay. En effet, il s'agit d'un transfert rapide de technologie qui donnera lieu à une application utile. En l'espace de deux ans et demi, nous allons faire passer une invention du monde microscopique de l'éprouvette au monde réel de l'usine. C'est une illustration de l'application d'une technologie dans une usine de pâtes et papiers. En fin de compte, il s'agit d'aider les usines de pâtes et papiers à concevoir des produits à valeur ajoutée dont se serviront d'autres industries canadiennes, comme des panneaux de grandes particules orientées, des panneaux de contreplaqué ou même des pièces d'automobile.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Vous dites que le processus est compliqué. N'y aurait-il pas moyen de le simplifier?

[Traduction]

Dr Szumski : Non, ce n'est pas une question simple. Elle devient complexe lorsque, dans le milieu industriel, on doit faire des gros investissements et prendre le risque d'appliquer un procédé à grande échelle. Cette démarche d'application comporte des risques importants dans le secteur des biotechnologies. Un organisme comme le CNRC est utile pour ce secteur. Nous ne nous limitons pas à des expériences de laboratoire. Nous avons aussi des centres de biotraitement où nous pouvons mettre à l'essai des procédés à l'échelle d'un litre, de 50 litres ou de 1 500 litres. Mais, à un certain point, nous devons passer le témoin à l'industrie, qui doit mettre sur pied notamment des usines pilotes et des projets témoins.

Le sénateur Robichaud : Souscririez-vous à la recommandation de crédits d'impôt de 50 p. 100 ou de 75 p. 100 faite par M. Gaudreault? L'industrie serait-elle ainsi plus prompte à mettre en application le fruit de la recherche?

Dr Szumski : Je pense que cette question ne relève pas de mes compétences.

Le sénateur Robichaud : Vous pouvez quand même essayer d'y répondre.

Dr Szumski : Il est impressionnant de voir une entreprise dépenser plus de 40 millions de dollars par année en R-D.

Le sénateur Robichaud : C'est pourquoi je vous pose la question.

Dr Szumski : J'ai l'intention d'échanger ma carte de visite avec la sienne à la fin de la présente réunion.

Le sénateur Robichaud : Alors, vous souscrivez à cette recommandation.

Monsieur Gaudreault, voudriez-vous ajouter un mot?

M. Gaudreault : Je suis désolé de ne pas avoir réagi lorsque le sénateur Mercer a parlé de cette question, mais notre entreprise a fermé deux grosses usines il y a quelques années : Red Rock, l'une de nos plus grosses usines de pâte kraft, qui fabriquait 1 200 tonnes par jour, ainsi que Fjordcell, à Jonquière, au Québec. Nous les avons fermées pendant la période où nous faisions nos dépenses. C'est ce qui explique le déclin dont le sénateur Mercer a parlé.

L'usine Domtar de Windsor s'apprête à mettre en oeuvre le procédé de cellulose nanocristalline. Il y a deux types de cellulose nanocristalline. En 2011, cette usine commencera à en produire une tonne par jour. Je ne sais pas si c'est la quantité qu'on vous a indiquée, mais j'ai déjà travaillé pour Domtar et j'ai des amis là-bas. L'usine est censée produire une tonne par jour en 2011. Le démarrage prendra quelques années. C'est un gros changement. À l'origine, ils avaient annoncé que le projet coûterait 22 millions de dollars. Ce sont les premiers chiffres que j'ai entendus, l'année dernière. Aujourd'hui, leur estimation atteint 40 millions de dollars. Selon leurs prévisions, c'est ce qu'il leur en coûtera uniquement pour ce projet, qui consiste à produire une tonne par jour en 2011. La phase de démarrage pourrait prendre quelques mois ou quelques années. Il y a beaucoup d'argent en jeu, et le projet est risqué.

Pour répondre à votre deuxième question, les nanotechnologies sont présentes aujourd'hui en Amérique du Nord, non seulement dans le secteur des pâtes et papiers, mais aussi, entre autres, dans la fabrication de la peinture, dans l'industrie aéronautique et dans l'aérospatiale. Cependant, les Suédois développent la technologie de la cellulose nanocristalline depuis 1982. Ils ont commencé en laboratoire cette année-là, et ils font des progrès de leur côté. Toutefois, je pense que la société FPInnovations est rendue plus loin dans l'application du procédé à l'échelle industrielle. Les Suédois produisent de la cellulose nanocristalline dans le but de réutiliser les nanofibres de cellulose dans l'industrie des pâtes et papiers. C'est la différence entre le Canada et d'autres pays.

J'aimerais vous donner un exemple concernant ce dont vous parliez tout à l'heure. Il y a quelques années, nous avons dépensé 26 millions de dollars à notre usine de papier tissu pour y mettre en œuvre un procédé de fabrication de papier structuré. Après moins de quatre années, nous avons dû remplacer ce procédé parce qu'il nous coûtait trop cher. Nous consacrons actuellement entre 30 et 40 millions de dollars à une nouvelle technologie. Le projet a démarré il y a deux semaines. Nous dépensons beaucoup, mais nous sommes une grosse entreprise. Aucune entreprise de petite taille, comme dans l'exemple que vous avez donné, n'aurait les reins assez solides pour supporter un tel projet. Nous avons dû effacer ce que nous avions entrepris il y a quatre ans et repartir à zéro avec un nouveau procédé. Notre tentative initiale était une première mondiale. Dans le cas de notre projet actuel, notre usine sera la deuxième au monde à employer le procédé. La première machine de ce type a été mise en marche au Chili. Nous serons les deuxièmes. Il y a toujours un risque.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Je comprends qu'il y a des risques. Mais votre présentation nous dit ce qu'est être un leader vert. Vous nous parlez de récupération et de transformation.

M. Gaudreault : Oui.

Le sénateur Robichaud : Vous ne nous avez pas parlé des produits qu'on allait chercher en forêt, mais plutôt des résidus.

[Traduction]

M. Gaudreault : C'est une bonne question. Chez Cascades, environ 73 p. 100 de la matière première vient de produits recyclés. Les frères Lemaire ramassaient les ordures pour survivre en 1964. Ils ont commencé dans le recyclage. Ils récupéraient tout ce qu'ils pouvaient pour survivre. C'est ainsi qu'ils ont fondé leur entreprise. D'une certaine manière, on peut dire que le recyclage fait partie de notre ADN. C'est la raison pour laquelle nous recyclons.

À l'inverse, environ 65 p. 100 de nos activités impliquent la transformation de carton souple. Nous sommes aux deux extrémités du spectre. Nous récupérons le papier et recyclons les fibres, mais nous fabriquons aussi des produits avec ces fibres. C'est le genre d'entreprise qu'est Cascades. Évidemment, nous disposons de machines à papier, de machines à carton, pour le carton-pâte, et ainsi de suite. Nous sommes avant tout une entreprise de recyclage, mais nos produits sont faits à 27 p. 100 de fibres vierges. Comme je l'ai dit, nous avions deux grosses usines de pâte kraft, mais nous avons dû les fermer. Nous devons actuellement acheter des fibres vierges. C'est ainsi que nous fonctionnons.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Est-ce que vous avez de la difficulté à trouver ces matériaux qui sont récupérés? Est-ce que vous devez les transporter sur de longues distances?

[Traduction]

M. Gaudreault : Nous avons pu mettre la main sur une quantité énorme de fibres recyclées après les Jeux olympiques en Chine. Cependant, un an plus tard, les Chinois ont commencé à reprendre les fibres pour les renvoyer dans leur pays. Par conséquent, c'est de plus en plus difficile.

Nous avons quelques problèmes, mais le plus gros est la contamination. Le tri des fibres coûte environ 40 ou 50 $ ici, mais cette opération ne coûte que 50 ¢ en Chine. L'entreprise chinoise dit à ses fournisseurs : « Ne triez rien; envoyez- nous simplement les fibres. » Elle paie plus cher la matière première. Cela se traduit, en Amérique du Nord, par des licenciements. Nous nous retrouvons avec du papier de mauvaise qualité. Nous n'avons pas le choix. Notre matière première est parfois contaminée. Dans mon laboratoire de recherche, j'ai constaté qu'il y en avait jusqu'à 20 p. 100. Récemment, c'était 10 p. 100. La proportion était de 6,7 p. 100 il y a trois ans. Actuellement, elle est de 13,9 p. 100.

Compte tenu de ces problèmes, le papier contient beaucoup plus de contaminants. Nous avons besoin d'un meilleur procédé, et l'une de nos recommandations vise à accroître la recherche pour pouvoir mieux trier le papier contaminé. Nous utilisons des fibres recyclées pour fabriquer des contenants qui sont en contact avec de la nourriture. Par conséquent, nous devons prévoir une barrière très efficace contre les contaminants. Nous devons les empêcher de se mêler à la nourriture.

Depuis le mois de mars, une grosse crise sévit en Allemagne. On s'inquiète de la contamination de la nourriture avec des huiles minérales. C'est le genre de problème que nous devons résoudre; pas seulement nous, mais aussi les fabricants qui utilisent des fibres vierges.

Il est plus difficile de trouver des matières premières non contaminées, alors nous devons faire plus de recherche pour trier les matières et maintenir la qualité de nos produits. Que le produit soit fait de fibres vierges ou recyclées, le client demande la même qualité et le respect des mêmes normes.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Je vous invite à poursuivre vos efforts dans le domaine de la récupération parce que cela aide beaucoup les petites communautés.

[Traduction]

M. Gaudreault : Nous y croyons.

Le sénateur Fairbairn : Nous avons aujourd'hui une discussion fort intéressante.

Monsieur Szumski, vous avez parlé de biomasse et de déchets agricoles. Ce sont des éléments qui suscitent maintenant beaucoup d'intérêt.

Voici ce que vous écrivez à la page 7 de votre mémoire :

Par ailleurs, le projet vise à trouver des moyens de transformer des déchets ligneux (provenant des décharges, de la démolition, de la foresterie ou de l'agriculture) en produits chimiques et en carburants.

Sur lequel de ces aspects concentrez-vous vos efforts au Canada? Dans ma région, on semble travailler sur tous ces fronts. Je me demandais si cela produisait des résultats concrets. Pourriez-vous nous donner une idée de la manière dont tous ces efforts s'articulent de façon à produire un changement significatif?

Dr Szumski : Vous faites référence à l'un des volets du Programme national sur les bioproduits qui utilise comme matière première les déchets municipaux, ce qui comprend les résidus de construction et de démolition. Peut-on en tirer de l'énergie, plutôt que les laisser se perdre dans les décharges? Nous savons que cela est possible. Nous pouvons produire du gaz à partir de ces résidus et en transformer une partie en produits chimiques fins. Nous menons des recherches afin de trouver la façon la plus efficiente de procéder à cette conversion.

Nous nous intéressons notamment à un processus appelé pyrolyse qui permet de faire passer très rapidement les déchets de l'état solide à l'état gazeux. Le gaz obtenu est condensé à répétition pour finalement devenir une huile dotée d'intéressantes caractéristiques. Certains éléments peuvent en être extraits pour fournir une source de carburant. D'autres éléments peuvent être transformés en un produit chimique servant de matière première pour la production d'un plastique. Tous les projets visent des résultats semblables.

J'aimerais vous donner un exemple qui n'est pas relié directement à la foresterie. Au cours de la dernière année, nous avons, de concert avec Magna, mis sur pied une usine spécialisée dans les composites. L'un des sous-projets qui y seront réalisés vise l'utilisation de la fibre de lin. Une fois que l'agriculteur a extrait l'huile du lin, la fibre est mise au rebut. On pourrait se servir de cette fibre de lin pour la fabrication de pièces d'auto à partir de matériaux composites. Si cet essai est concluant, imaginez dans quelle mesure le Canada pourrait tirer parti de ses ressources naturelles et de toute son activité agricole qui crée des déchets réutilisables. Cette technologie pourrait permettre d'établir un lien entre la fabrication de pièces d'auto et l'agriculture dans l'Ouest du pays.

Les fabricants de pièces d'automobile s'intéressent à cette technologie, car ils sont à la recherche de matériaux plus légers et moins coûteux que ceux qu'ils utilisent actuellement. Il leur faut des matériaux moins lourds pour répondre aux normes en matière de consommation de carburant. Il est intéressant de voir à quel point les besoins de chacun s'entrecroisent.

Le sénateur Mahovlich : Les matériaux doivent aussi être plus solides.

Dr Szumski : Tout dépend de l'utilisation qu'on veut en faire. Il n'est pas facile de fabriquer un pare-choc, mais on peut certes débuter par la mousse contenue dans les sièges et les composantes du tableau de bord.

Je pense qu'il s'agit de la véritable possibilité qui s'offre au Canada. Il ne faut pas voir les sources de biomasse et nos industries plus lourdes comme des entités distinctes, mais plutôt les considérer comme étant interconnectées. Nous devrions voir dans la biomasse une matière première pour nos industries de l'aérospatiale, de l'automobile et de la construction. Il faut maintenir au Canada les activités de R-D visant à créer de tels liens. On ne peut pas les reproduire à Taïwan, car on n'y trouve pas la biomasse suffisante. Il s'agit donc d'une technologie de pointe qui a d'excellentes chances de s'implanter ici même au pays.

Mme Mortimer : Certaines petites entreprises de l'Ouest canadien s'intéressent à des dispositifs de taille réduite pouvant permettre de transformer les déchets de l'agriculture ou du bois pour produire l'énergie nécessaire à une ferme, un ranch ou une autre activité rurale. Les quantités requises ne sont pas si considérables. On ne parle pas d'une grande exploitation, mais d'un système autonome à petite échelle. Si l'on obtient les résultats souhaités, ces systèmes pourraient être vendus à des pays comme la Malaisie ou l'Indonésie où l'on a besoin d'énergie produite en autonomie à partir des matières agricoles ou forestières locales. Il y a des entreprises qui le font actuellement au Canada à très petite échelle au moyen d'une technologie très spécialisée.

Le sénateur Fairbairn : Merci beaucoup pour toutes ces précisions.

Le sénateur Mahovlich : La foresterie est une industrie importante dans quatre provinces : le Nouveau-Brunswick, le Québec, l'Ontario et la Colombie-Britannique. Quelle université se montre la plus novatrice pour ce qui est des produits du bois? Lorsque vous vous adressez à des universités, vers lesquelles vous tournez-vous?

M. Gaudreault : Pour l'Ouest du pays, de l'Ontario jusqu'à la Colombie-Britannique, il y a une université qui s'intéresse à la fabrication du papier et c'est celle de la Colombie-Britannique. On y trouve un excellent programme de génie. C'est assurément le point fort de cette université. J'y étais il y a deux semaines à peine comme membre d'un comité d'examen. En collaboration avec AFT, on y a conçu un nouveau rotor qui permet d'économiser 52 p. 100 de l'énergie électrique utilisée. C'est une amélioration considérable. On indique en avoir vendu entre 100 et 200 exemplaires. L'université est vraiment bien positionnée dans le secteur du génie sur la scène mondiale. Ce serait mon numéro un.

Il y a ensuite l'Université McMaster qui fait montre de beaucoup de créativité dans le secteur chimique. Je connais d'ailleurs le responsable du Sentinel Bioactive Paper Network. McGill se spécialise surtout dans la chimie, les procédés chimiques.

À l'Université du Québec à Trois-Rivières, on se concentre davantage sur le recyclage.

À l'Université de Toronto, on se spécialise dans l'impression ainsi que dans le processus de récupération de la pâte kraft.

Pour ce qui est du blanchiment, le centre de recherche Limerick de l'Université du Nouveau-Brunswick est un chef de file.

D'une certaine façon, la situation est assez claire, ce qui est sans doute préférable. Il y a plusieurs années, tous ces centres de recherche universitaires se livraient plus ou moins aux même travaux. En raison de la conjoncture actuelle et des nouveaux modes de fonctionnement de l'industrie, chacun de ces centres a désormais choisi une niche. C'est un aperçu de la situation présente. Je crois que c'est la bonne façon de procéder pour le financement de la recherche. Toutes ces universités peuvent encore se livrer concurrence tout en conservant leur niche et leur expertise scientifique.

Dr Szumski : Je sais que la liste n'est pas exhaustive, mais j'ajouterais l'Université Lakehead à Thunder Bay qui s'intéresse aux usines de pâtes à papier et à la valeur ajoutée qu'on peut en tirer.

Le sénateur Duffy : Lors de nos audiences du printemps dernier, nous avons rencontré de nombreux intervenants du secteur du bois qui s'intéressaient à la question du chauffage. Je parle ici notamment des copeaux de bois, des granulats et du panic raide. Est-ce que Cascades ou le CNR se penchent sur ces solutions de rechange? Vous avez souligné la difficulté à trouver des matières premières. Devrions-nous envisager d'autres cultures dans le sens de l'intéressante avenue qu'ouvre celle du lin? N'est-ce pas formidable de penser que l'on pourrait faire pousser la matière première pour ses propres pièces d'auto?

M. Gaudreault : C'est une excellente question. En 1996-1997, nous avons mené de nombreux travaux sur le lin, notamment dans le centre de recherche où je me trouvais à Vulcan, en Alberta. Nous y avons consacré environ 200 000 $. Nous envoyions la pulpe à notre usine pour le blanchiment, puis à Saint-Jérôme, au Québec, pour la fabrication du papier. La fibre de lin était utilisée tout au long du cycle.

Trois-Rivières utilise un processus lamellaire pour le maïs.

Toutes ces nouvelles fibres deviennent très populaires lorsque le coût des matières premières double ou triple. Toutes les fois que les coûts grimpent, on entend parler de ces fibres de substitution.

Le sénateur Duffy : Certaines de ces cultures — celle du maïs pour produire du carburant, par exemple — peuvent être très coûteuses, car les terres pourraient servir à autre chose. Les producteurs de panic raide font valoir que leurs champs ne conviennent à aucune autre forme d'agriculture lucrative, ce qui fait qu'ils ne perdent rien à les utiliser à cette fin.

M. Gaudreault : J'ai un autre exemple. En 2003-2004, nous avons travaillé sur une fibre intéressante tirée du sorgho. Les plus grands producteurs de sorgho au monde sont les États-Unis et l'Inde. C'est un peu comme la canne à sucre, mais c'est une espèce différente. Les courbes de résistance à la traction indiquent que la solidité de ces fibres se compare à celle du bois dur. C'est une fibre de qualité. Cascades a élaboré le processus de cuisson.

J'ai discuté la semaine dernière avec des gens du secteur de l'agriculture. La situation est difficile parce que quatre groupes sont concernés. Il y a le secteur de l'agriculture, celui de l'éthanol, le groupe de l'énergie et les fabricants de papier. Il s'agissait de trouver un moyen de conjuguer les quatre domaines de manière à faire le bonheur de tous. Les fibres offrent certaines possibilités. Nous poursuivons nos discussions à ce sujet avec les intervenants du secteur agricole.

J'ai entendu parler du panic raide et je suis persuadée que c'est aussi votre cas. Je n'investirais pas trop dans cette avenue, à moins que vous ne me convainquiez du contraire.

Dr Szumski : Pour ce qui est des cultures industrielles, nous participons aux travaux visant la transformation du panic raide et d'autres éléments de biomasse pour en faire des matières premières utiles et des produits chimiques fins. C'est en partenariat avec Agriculture et Agroalimentaire Canada que nous réalisons nos travaux sur le panic raide, une matière première biologique.

La caméline, ou lin bâtard, est une autre plante cultivée au Canada qui peut devenir une source intéressante pour la production de lubrifiants.

Le sénateur Duffy : Je crois qu'on l'utilise pour la fabrication de cosmétiques.

Dr Szumski : Je pense qu'elle sert à différentes fins.

Le sénateur Duffy : L'Île-du-Prince-Édouard vient tout juste de lancer un projet à cet égard.

Dr Szumski : Il arrive que ces bio-huiles ne soient pas seulement une version plus écologique des produits pétroliers, mais offrent en outre de meilleures possibilités de rendement. Par exemple, elles peuvent être plus efficaces à haute température, ce qui est intéressant pour certains types de moteurs.

Le sénateur Duffy : À l'Île-du-Prince-Édouard, nous espérons y trouver une fontaine de jouvence.

Mme Mortimer : Vous avez parlé des copeaux de bois. Je crois que vous avez demandé où nous en étions rendus avec certaines de ces énergies alternatives. Dans la trousse d'information que je vous ai fournie, il est question d'une conférence que nous avons parrainée conjointement en Colombie-Britannique il y a environ un an. Elle portait sur les solutions de rechange bioénergétiques et notamment sur l'industrie des copeaux de bois. Nous pourrions déjà en produire, mais les débouchés sont en Europe. Ce marché n'est pas vraiment développé ici au Canada. Outre la mise en commun de données technologiques, la conférence avait pour but de contribuer à l'ouverture des marchés européens pour certaines entreprises canadiennes. Si la chose vous intéresse, vous trouverez d'autres détails concernant cette conférence dans votre documentation.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Docteur Szumski, dans le quatrième projet que vous mentionnez, il est question de produire de l'énergie avec des algues. Où en est ce projet? Parce que dans certains de nos lacs, de nos rivières, certaines algues sont polluantes. Cela pourrait donc avoir une double fonction si on pouvait les utiliser pour faire quelque chose d'utile.

[Traduction]

Dr Szumski : Oui, le programme est avancé à ce point que nous nous sommes acquis dans une large mesure le soutien et l'intérêt de l'industrie, surtout pour la fabrication de carburant d'avion à partir d'algues. Cependant, nous ne recueillons pas les algues dans les rivières ou les lacs; nous les faisons pousser dans des réservoirs. Il ne s'agit pas de récolter les algues dans la nature, mais plutôt d'en produire dans un environnement industriel où les algues poussent dans un réservoir dans lequel nous faisons entrer de la lumière. Il s'agit ici d'algues microscopiques.

Le programme vise à développer une expertise canadienne pour la production de carburant à partir d'algues. Il est intéressant de constater que différentes espèces d'algues réussissent à survivre dans l'environnement canadien qui se caractérise par des eaux généralement froides qui sont gelées pendant une bonne partie de l'année. Leur croissance est rapide. L'un de nos chercheurs qui présentent des exposés à ce sujet dispose d'ailleurs d'une magnifique photo montrant un ours polaire qui rampe sur une plaque de glaces flottantes, son pelage maculé de vert en raison des algues. Nous savons qu'elles peuvent croître dans notre environnement.

À cette étape-ci du projet, l'un de nos principaux collaborateurs est le ministère américain de l'Énergie. Les Américains voient le Canada comme un partenaire d'égal à égal pour ce qui est de la spécialisation technologique et du niveau de développement atteint dans la production de carburant à partir d'algues.

L'industrie aérospatiale est tout particulièrement intéressée, car elle aura toujours besoin de carburant liquide pour effectuer ses vols; ce n'est pas demain la veille que vous verrez un avion électrique.

Le président : Y a-t-il d'autres questions?

Au nom du comité, j'aimerais remercier nos témoins d'avoir accepté notre invitation et de nous avoir présenté leurs exposés. Tout cela a été fort instructif. Il est possible que le comité vous écrive pour vous poser d'autres questions.

Monsieur Gaudreault, un grand merci pour votre présence. Dr Szumski et Mme Mortimer, merci d'avoir donné suite à notre invitation.

Chers collègues, nous n'aurons pas de réunion jeudi de cette semaine; notre prochaine séance aura lieu le mardi 5 octobre.

(La séance est levée.)


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