Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 11 - Témoignages du 30 novembre 2010


OTTAWA, le mardi 30 novembre 2010

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 18 h 18 pour étudier l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier au Canada.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je vous souhaite tous la bienvenue, honorables sénateurs, messieurs et mesdames les témoins, à la réunion du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts.

[Traduction]

Je m'appelle Percy Mockler, je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick et je suis président du comité.

Honorables sénateurs, mesdames et messieurs les témoins, notre séance se déroulera en deux temps. Nous entendrons un premier groupe de témoins pendant la première heure, puis un autre groupe pendant la deuxième heure. Notre premier groupe est formé de représentants de trois organisations distinctes.

Avant de présenter les témoins, j'aimerais leur dire, à titre de président et au nom des membres du comité, que nous sommes désolés de notre retard. Le Sénat siégeait. Merci de votre patience.

Cela dit, accueillons maintenant Sean Dolter, directeur général de la Forêt modèle de Terre-Neuve-et-Labrador, et Earl Freeborn, trésorier de la Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur.

[Français]

Mme Claire Lauzière, directrice générale de la forêt des communautés.

[Traduction]

Nous entendrons aussi, par vidéoconférence, Mme Kathi Zimmerman, directrice générale de l'Association Ressources-Nord. Je remercie les témoins. Merci, madame Zimmerman, d'avoir accepté de participer par vidéoconférence.

Le comité poursuit son étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir du secteur forestier au Canada. Nous nous penchons plus particulièrement sur les forêts communautaires.

Avant de demander aux témoins de nous présenter leurs déclarations, je voudrais d'abord prier les honorables sénateurs de se présenter. Commençons à ma gauche.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de l'Ontario.

Le sénateur Callbeck : Catherine Callbeck, de l'Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Eaton : Nicole Eaton, de l'Ontario.

[Français]

Le président : Merci, honorables sénateurs. J'aimerais tout d'abord remercier nos témoins d'avoir accepté notre invitation à comparaître.

[Traduction]

Nous allons maintenant écouter vos déclarations. La greffière du comité a informé le président que nous allions commencer par M. Freeborn, puis nous entendrons Mme Lauzière, M. Dolter et Mme Zimmerman, dans cet ordre.

Earl Freeborn, trésorier, Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur : Honorables sénateurs, chers collègues et membres du public, je suis maire de la petite collectivité forestière de Chapleau, dans le Nord-Est ontarien. C'est un privilège pour moi d'être ici aujourd'hui et de représenter non seulement ma collectivité, mais aussi nos partenaires régionaux qui font face aux défis créés par la crise économique dans le secteur forestier.

Avant de vous présenter la Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur, je veux vous parler de notre programme, le Programme des collectivités forestières. Ce programme a été annoncé en 2007 et constitue un outil précieux pour des collectivités comme la nôtre. Il a une enveloppe de financement de cinq ans, allouée par Ressources naturelles Canada, et il aide les collectivités tributaires de la forêt à s'adapter à l'évolution dans le secteur forestier.

Il y a au pays 11 collectivités forestières qui ont un mandat identique, en quatre volets : ouvrir de nouveaux débouchés axés sur la forêt; faciliter le renforcement de la capacité et la mobilisation des collectivités; promouvoir des méthodes intégrées et multisectorielles de gestion des forêts; partager les pratiques exemplaires et l'information avec les collectivités forestières du monde entier. Ce sont de nobles objectifs, mais à notre époque, en particulier, alors que nos collectivités forestières se débattent dans les difficultés, ces objectifs sont vraiment essentiels.

Chaque région du Canada s'attaque à ces défis de façon différente, et nous faisons un superbe travail. Nous prenons le temps d'apprendre les uns des autres, de travailler ensemble et de partager nos réussites d'est en ouest, dans toutes les régions.

Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir invités à comparaître, et j'aimerais vous présenter Clare Lauzière, directrice générale de la Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur, qui vous exposera brièvement ce que nous sommes et ce que nous faisons dans le Nord-Est de l'Ontario.

Clare Lauzière, directrice générale, Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur : Ma tâche, aujourd'hui, consiste à vous expliquer un peu ce qu'est la Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur et à vous parler des partenaires qui nous appuient dans ce que nous avons entrepris dans notre petit coin du monde. Dans la trousse que nous avons fait parvenir, il y a une présentation qui vous est destinée. Vous pouvez l'utiliser pour suivre ma présentation.

Nous avons une carte qui montre les 12 collectivités principales que nous desservons. Nous avons six collectivités et six réserves des Premières nations dans notre région. Nous avons environ six millions d'hectares de terres. Nous nous trouvons à quelque deux heures de route à l'Ouest de Timmins et à environ deux heures au Nord de Sault-Sainte- Marie. Nous sommes donc sur la côte du lac Supérieur. C'est une grande région.

Nous avons une population de 15 000 habitants, ce qui donne une densité de population d'environ deux centièmes de personne par hectare dans la région. Nous avons un vaste territoire, mais une population modeste, ce qui complique encore les choses.

Notre région a été très durement touchée par le ralentissement économique. Nous avons, comme je l'ai dit, une population de 15 000 habitants, dont 23 p. 100 sont membres des Premières nations. Cinq de nos scieries ont fermé dans la région, ce qui a provoqué 1 145 pertes d'emploi direct et 1 700 pertes d'emploi indirect. Plus de 2 800 travailleurs ont été déplacés. Pour une population régionale de 15 000 habitants, c'est énorme.

Malheureusement, dans les petites régions comme la nôtre, il y a souvent des villes à industrie unique. Il y a peut-être une petite industrie des transports, avec le CP ou le CN, ou une mine qui ouvre de temps à autre, mais pas d'activité aussi régulière que ce que le secteur forestier offrait autrefois. Lorsque survient un important ralentissement économique dans nos collectivités, les taux de chômage n'augmentent pas considérablement comme ils le font dans les grands centres. Vous assistez plutôt à un déclin de la population.

Nous avons perdu 30 p. 100 de notre population pendant cette période. Ce phénomène a une énorme incidence sur la capacité des collectivités de répondre aux besoins de leurs habitants, d'assurer l'assiette fiscale et d'offrir aux habitants des services acceptables.

J'ai pensé vous parler aujourd'hui — maintenant que je vous ai décrit le contexte dans lequel nous travaillons — de l'orientation de nos efforts et de certaines de nos réussites. Premièrement, j'aimerais parler de l'établissement de relations. Dans notre région, pour réussir, il était essentiel de nouer des relations solides non seulement avec les intervenants de l'industrie, mais aussi avec les collectivités des Premières nations. Notre conseil s'appuie sur six partenaires communautaires qui sont membres du Programme des collectivités forestières. Nous sommes un cas particulier. Nous sommes le seul site dont l'élan provient de municipalités qui veulent collaborer dans le cadre de partenariats.

Ces six municipalités travaillent en collaboration pratiquement depuis le début de la décennie. Nous avons mis l'accent sur la mobilisation des collectivités des Premières nations pour les amener à la table et discuter avec elles, et lorsque nous prenons des décisions qui touchent les ressources naturelles, ce sont les partenaires des municipalités et des Premières nations qui les prennent, ce qui permet d'éviter plus tard l'érection de barricades et d'autres difficultés.

C'était un immense défi, et je suis certaine que vous le comprenez. Il est déjà difficile d'amener les Premières nations à la table, mais de mobiliser les municipalités avec ces partenaires pour vraiment prendre des décisions susceptibles de promouvoir la création d'emplois, cela a été difficile, mais extrêmement encourageant.

Pour la deuxième fois maintenant, nous avons organisé des réunions des maires et des chefs des Premières nations. Nous établissons un plan de travail conjoint dans lequel la stratégie de la prochaine année et les types d'initiatives que nous voulons mener à bien sont définis en collaboration. Nous travaillons constamment en partenariat. Nous mettons toutes nos cartes sur la table.

On parle beaucoup, au pays, des possibilités qu'offrent les produits forestiers non ligneux. C'est un des secteurs auxquels notre organisation s'intéresse. Les produits forestiers non ligneux, selon nous, pourraient véritablement améliorer la situation d'une région — en particulier la nôtre —, qu'il s'agisse de baies, de sève de bouleau, d'huile de cèdre ou de produits forestiers à valeur ajoutée. Il existe énormément de possibilités. Nous avons besoin d'esprit d'innovation et d'entreprise dans la région, pour exploiter ces possibilités.

L'une de nos plus belles réussites a été obtenue avec l'appui d'Industrie Canada et du Fonds d'adaptation des collectivités, l'an dernier. Nous avons pu réunir assez d'argent pour contribuer au lancement de Level Plains Enterprises Inc. Level Plains est la première plantation de bleuets sauvages du Nord-Est du lac Supérieur.

Nous espérions mettre 55 acres en culture et en production. Nous espérions faire notre première récolte en août 2012. Nous sommes ravis de pouvoir dire que nous avons 220 acres en production et que notre première récolte est prévue pour août 2011. Nous sommes en avance d'un an sur notre calendrier et nous avons réalisé cinq fois plus que prévu. C'est grâce à l'appui de divers programmes de financement que nous avons réussi à attirer ce genre de partenariats.

Notre organisation s'intéresse aussi au transfert de connaissances. Nous avons vraiment profité de notre participation au Programme de forêts modèles ou au Programme des collectivités forestières, le PCF, comme on l'appelle maintenant. Nous avons bénéficié d'un réseau national de personnes qui ont un savoir-faire dans des domaines que nous connaissons parfois mal. Plutôt que de commencer à zéro et d'apprendre par nous-mêmes ce que d'autres savent peut-être déjà, nous avons pris le temps d'établir des relations dans tout le pays pour partager les connaissances.

Nous le faisons aussi dans la région. Nous pensons qu'il est important d'enseigner à nos jeunes la valeur de la forêt. Au fil des ans, cela semble s'être perdu. Nous essayons donc de voir comment les jeunes qui ont des idées nouvelles et innovatrices peuvent faire porter leurs efforts sur le secteur forestier. Il importe aussi de déterminer comment nous pouvons encourager l'esprit d'entreprise chez les jeunes pour pouvoir investir dans notre propre région plutôt que d'attendre que d'autres viennent et règlent tous nos problèmes économiques.

Les gens nous demandent toujours comment nous nous y prenons. Nous allons chercher de nombreux appuis. Nous avons dans notre région un leadership politique qui a adopté cette formule comme modèle. Nous croyons que les produits forestiers non ligneux et les produits du bois à valeur ajoutée offrent des perspectives. Nous croyons aussi dans la valeur de nos scieries traditionnelles. Nous ne voulons pas que d'autres scieries ferment leurs portes. Nous voulons trouver des moyens pour que tous puissent travailler de façon rentable dans l'économie forestière et veiller à ce que tous les habitants aient un emploi valorisant. Nous insistons sur la collaboration, pas sur la concurrence.

Le soutien financier est le secret. Ces types de projets nécessitent toujours de l'argent. Nous avons eu un énorme succès et nous avons reçu l'appui de nombreux organismes de financement privés et publics. Nous avons investi 325 000 $ et nous les avons multipliés par six chaque année. Avec nos partenaires des Premières nations, nous multiplions cet argent par six pour atteindre quelque deux millions de dollars annuellement.

Nous avons l'appui de la région, et c'est là qu'intervient le partenariat. Une seule organisation ne peut suffire à la tâche. Une partie de notre mandat consiste à en attirer d'autres; et plus nous rallierons de gens à notre cause et plus il sera facile d'accomplir nos tâches et de montrer à notre région, à nos collectivités et à notre population que nous faisons un travail utile. Nous avons plus de 75 partenaires qui contribuent à notre organisation. C'est vraiment important pour nous, parce que nous existons depuis seulement trois ans. Nous avons été l'un des nouveaux sites qui ont été admis dans le Programme des collectivités forestières en 2007.

Finalement, nous avons l'esprit d'entreprise. Certains de nos collègues au pays ne seront peut-être pas d'accord, mais je ne pense pas qu'il y ait ailleurs au pays autant d'esprit d'entreprise que dans le Nord-Est ontarien. Nous avons des gens prêts à investir malgré les temps difficiles que nous traversons. Nous avons des gens qui nous proposent d'excellents modèles, qui nous amènent des partenaires désireux de créer par eux-mêmes des installations de bioénergie ou des plantations de bleuets et prêts à travailler après les heures s'il le faut. Nous explorons de nouvelles activités et de nouveaux partenariats. Nous cherchons à rentabiliser nos activités, et nous nous sommes contentés de faciliter le processus. Nous avons pu réunir les morceaux du casse-tête, faciliter l'accès au financement et aux ressources et montrer que nous pouvons avoir un effet vraiment positif sur la région si nous travaillons ensemble et si nous utilisons une approche stratégique.

C'est essentiellement ce que je voulais vous dire aujourd'hui.

Le président : Merci beaucoup. Je demande maintenant à M. Dolter de faire son exposé.

Sean Dolter, directeur général, Forêt modèle de Terre-Neuve-et-Labrador : Merci de nous avoir invités aujourd'hui. Pour lancer la discussion, je vais vous parler un peu de la Forêt modèle de Terre-Neuve-et-Labrador. Elle existe depuis 1992, d'abord au sein du Programme de forêts modèles, puis maintenant comme un élément important du Programme des collectivités forestières.

Vous le voyez à l'écran et vous avez aussi en main les notes de mon exposé. Nous sommes fiers d'être l'une des 50 forêts modèles qui existent dans le monde. Les forêts modèles forment des réseaux régionaux, et nous appartenons au Réseau canadien de forêts modèles.

Notre forêt est membre du PCF, le Programme des collectivités forestières, et elle représente l'île de Terre-Neuve-et- Labrador ainsi que, en raison de nos liens avec la nation innue, sa partie continentale, le Labrador.

Depuis 1992, nous sommes un intervenant très important du secteur forestier, surtout pour renforcer les capacités et mobiliser les collectivités rurales tributaires de la forêt, le secteur industriel et tous les ordres de gouvernement. Nous avons contribué au règlement de conflits entre des secteurs qui s'entendent généralement mal dans notre province. Nous avons pu les amener à négocier de façon constructive pour commencer à former des partenariats. Nous avons fait la même chose auprès de la population, pour lui expliquer divers aspects de la gestion durable des forêts.

Nous avons également réussi à accroître les connaissances, l'ensemble de compétences de la collectivité et de l'industrie, et nous avons réuni des ressources financières pour qu'aucune entité n'assume seule les risques liés à une nouvelle pratique innovatrice dans le secteur forestier.

Il s'agit d'étudier et d'intégrer tous les aspects de l'exploitation des forêts. Nous nous concentrons principalement sur l'amélioration de la foresterie traditionnelle, la production des scieries et des usines de pâtes et papiers. Depuis 2007, toutefois, avec le nouveau Programme des collectivités forestières, nous nous sommes intéressés de près aux produits forestiers non ligneux et en particulier à la mise au point de produits basés sur les déchets des scieries.

Nous apportons aussi au système d'éducation ce que le secteur forestier a à offrir en ce qui concerne la viabilité des ressources. Nos systèmes d'éducation véhiculent de nombreuses images négatives au sujet du rôle de nos futurs forestiers. Nous croyons avoir réussi à intégrer nos connaissances locales dans certains programmes scolaires pour les transmettre à nos jeunes dans le système d'éducation.

Nous avons créé de nouveaux débouchés économiques dans l'espace forestier en travaillant avec les collectivités locales. Nous collaborons avec 26 collectivités. Nous envisageons aussi de faire partager ces programmes et ces réussites dans tout le pays par l'entremise du Réseau canadien de forêts modèles, et à l'étranger, par l'entremise du Secrétariat du Réseau international de forêts modèles. Nous voulons aider nos partenaires et être pertinents, et nous y parvenons au moyen de la gestion de projet et de la multiplication des ressources.

C'est ce que nous visons à Terre-Neuve. Nous avons un secteur d'essai — notre laboratoire, en quelque sorte —, la pointe Nord-Ouest de Terre-Neuve. Depuis 1992, notre conseil d'administration rassemble tous les grands gestionnaires fonciers pour que les décisions puissent être prises au niveau du conseil. Toutefois, nous avons aussi un groupe de gestion formé de simples intervenants qui s'opposent parfois au réaménagement de l'utilisation des ressources naturelles. Nous pouvons alors les amener à la table pour qu'ils puissent travailler à former des partenariats.

Depuis 2007, par l'entremise du Programme des collectivités forestières, nous expérimentons aussi pour mobiliser 26 collectivités distinctes. Nous oeuvrons au niveau communautaire, pas seulement au niveau du conseil, grâce à nos tables de l'industrie et du gouvernement. Nous en avons deux, notamment celle de la péninsule Northern, où il y a 21 intervenants à consulter. Nous développons leur capacité de saisir diverses possibilités économiques qu'offre la forêt. Nous utilisons aussi un modèle municipal à White Bay South, où les maires et les représentants des collectivités dialoguent. Nous faisons la même chose, mais à l'intérieur d'une structure différente, pour renforcer les capacités.

Actuellement, nos intérêts, dans le cadre du Programme des collectivités forestières, sont la R-D dans le domaine des produits forestiers non ligneux, un secteur d'activité relativement nouveau à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous parlons maintenant au nom d'un grand nombre d'organisations différentes qui sont des agents catalyseurs dans ce domaine particulier, mais nous explorons aussi les possibilités des champignons sauvages et de la production de couronnes. La production de miel est également un nouveau secteur d'activité dans lequel nous nous lançons. Nous faisons aussi de la sève et du sirop de bouleau.

Nombre de nos collectivités ne peuvent pas assumer les risques liés à l'ouverture de nouvelles entreprises parce que leurs membres hésitent à courir des risques. C'est là que nous intervenons, nous leur « tenons la main » en quelque sorte et, essentiellement, nous les convainquons qu'elles devraient investir et devenir des entrepreneurs dans la région.

Nous mobilisons aussi l'industrie, surtout l'industrie de la bioénergie, et nous aidons nos partenaires industriels locaux à obtenir une certification et à créer une demande dans la province, en particulier les installations de production de granulés. Il y a deux partenaires dans le Programme de forêts modèles. Nous convertissons aussi certaines installations pour utiliser la bioénergie et la biomasse de nos forêts.

Nous négocions actuellement avec la Première nation Miawpukek, à Conne River, et nous l'aidons à envisager différentes utilisations de la forêt. Nous travaillons aussi avec la Corner Brook Pulp and Paper, l'un de nos solides partenaires, sur l'utilisation des résidus ligneux broyés.

Nous avons entre 40 000 et 50 000 poêles dans nos maisons, à Terre-Neuve-et-Labrador, et le marché noir du bois de chauffage commercial est terrible. C'est pourquoi nous préparons actuellement une analyse de rentabilisation que les collectivités locales pourront utiliser pour convaincre les habitants des centres urbains d'utiliser le bois de chauffage qu'elles produisent.

Nous mobilisons aussi l'industrie agricole. Comme nous sommes au nord, nous essayons de convaincre les gens qu'il existe une énergie de remplacement pour chauffer les serres, et c'est la biomasse.

En ce qui concerne les améliorations des scieries, nous travaillons avec notre partenaire local, la Burton's Cove Logging & Lumber, pour adopter du nouveau matériel et essayer d'ajouter de la valeur à certains des produits de cette entreprise de bois d'œuvre.

Une grande partie de notre activité porte sur le règlement de différends, que ce soit lié au broutage des orignaux dans le parc national de Gros Morne ou à l'établissement de zones protégées. Nous sommes un intermédiaire impartial. Essentiellement, nous ne prenons pas parti; nous ne sommes pas partisans. Nous aidons les ministères gouvernementaux à se parler et nous aidons l'industrie à parler au public.

L'éducation est un élément important de notre programme. Nous avons un spécialiste qui nous aide à définir le programme scolaire, qui rencontre le ministère de l'Éducation et examine des moyens d'intégrer la foresterie au programme en respectant les directives pédagogiques du ministère.

Nous offrons aussi des services de communication au secteur forestier. Les forestiers ne sont pas de bons communicateurs, mais grâce au Programme de forêts modèles nous avons pu élaborer quelques stratégies de communication importantes.

Ici, vous voyez ce que nous faisons à White Bay South. C'est une région qui a été victime d'importantes fermetures d'usines de transformation de crevettes et de poisson. Dans cette région, les maires sont membres d'un réseau forestier, et nous nous préparons à la création de la première forêt communautaire qui produira des revenus pour la collectivité à Terre-Neuve. Nous envisageons aussi des stratégies touristiques, la production de paillis horticole à partir des rebuts des scieries et la création de coopératives de couronnes.

Cela n'aurait pas pu se faire si nous n'avions pas été là pour les encourager et leur montrer ce que les stratégies commerciales peuvent faire pour les habitants de ces collectivités. Il leur faut de la formation et des séminaires et aussi du microcrédit — il faut même leur montrer comment rédiger des propositions.

Nous sommes en outre actifs au niveau international. Depuis 1997, par l'entremise du CCFM — le Conseil canadien des ministres des forêts —, avec ses critères et ses indicateurs de programme, la forêt modèle a dû examiner les indicateurs au niveau local, les moyens de mesurer notre effet sur les ressources forestières. En conséquence, le Canada a maintenant le taux le plus élevé de certification parce que les indicateurs au niveau local alimentent la certification de notre base, que ce soit en vertu du programme de l'Association canadienne de normalisation ou de celui du FSC, le Forest Stewardship Council.

Nous avons pris cette expérience, nous l'avons formalisée et nous l'offrons maintenant à l'Argentine. Par l'entremise de notre représentant et avec l'aide du Service canadien des forêts, nous rencontrons les Argentins depuis trois ans et nous leur expliquons l'expérience canadienne de surveillance des effets sur les ressources forestières. Nous pouvons les préparer, nous l'espérons, à la certification de leur territoire.

En février, nous avons eu l'occasion de former des formateurs, de voir de quelle façon les étudiants argentins que nous avons formés, les praticiens de la foresterie, communiqueront le message que nous leur avons transmis et l'expliqueront à d'autres pays d'Amérique latine.

Je ne vais pas vous lire tout cela, mais je veux vous montrer ce qui se passe au-delà du PCF. Grâce à l'investissement fédéral, nous sommes également en mesure de renforcer les capacités de notre secteur de la faune — le ministère des Ressources naturelles, par l'entremise du gouvernement provincial, Parcs Canada, le Service canadien des forêts aussi, et la division des parcs et des zones naturelles — certains de nos principaux partenaires.

En ce qui concerne le rendement de l'investissement, j'ai voulu présenter cette diapositive pour illustrer qu'avec l'investissement du gouvernement fédéral dans notre programme, nous pouvons déjà trouver près des trois quarts de notre revenu annuel auprès de nos partenaires, pas du gouvernement fédéral. Cette année, nos estimations sont en hausse. Avec la contribution de nos partenaires, elles atteignent 1,1 million de dollars pour notre programme, contre les 325 000 $ investis par le gouvernement fédéral.

Pour les contributions en nature, nous avons maintenant des partenaires qui prennent les investissements du Programme de forêts modèles et qui les utilisent. Ce n'est plus nous qui prenons ces investissements pour gérer les projets. Cela est très positif. Nos partenaires peuvent maintenant être autonomes et exécuter des programmes comme nous le faisons depuis 1993.

En 2012 et par la suite, nous aimerions conserver un rôle de chef de file dans le domaine de la gestion des forêts au niveau communautaire. Nous avons une identité nationale dans ce domaine, et elle est respectée dans le monde. Nous voulons aussi être un mécanisme d'exécution. Nous le sommes déjà pour notre gouvernement provincial, mais nous voudrions aussi le faire pour la politique fédérale. Si quelque chose est innovateur, nous pouvons contribuer à renforcer cette capacité dans les collectivités.

Nous nous voyons aussi maintenant et pour l'avenir comme un mentor mondial dans le domaine de la gestion durable des forêts. Le Canada a amorcé cette évolution en 1992, dans le cadre du Plan vert, et nous la poursuivons dans 27 pays différents. Il faut s'adapter aux besoins des collectivités tributaires de la forêt au Canada et à notre secteur forestier.

Merci de nous avoir permis de vous communiquer notre message. Je termine en disant qu'il est important pour nous d'utiliser judicieusement les investissements dans notre programme, de nous adapter aux besoins de notre secteur et de mériter le respect de nos collectivités et de la population en général.

Le président : Merci, monsieur Dolter. Écoutons, maintenant, de Prince George, en Colombie-Britannique, Mme Zimmerman. Je crois que vous avez entendu la conversation et les exposés, et vous avez maintenant la parole.

Kathi Zimmerman, directrice générale, Association Ressources-Nord : Merci. J'ai distribué des versions imprimées de mon exposé et j'espère que vous en avez tous des exemplaires, mais je vais couvrir toute l'information qui s'y trouve, à l'intention de ceux qui n'en auraient pas.

J'aimerais commencer par profiter de l'occasion pour remercier le comité sénatorial de nous avoir invités aujourd'hui et d'accepter mon témoignage par vidéoconférence. Cela est très commode.

J'aimerais prendre les 10 prochaines minutes pour vous expliquer notre organisation et vous présenter quelques exemples de la façon dont nous comblons le fossé entre les collectivités, l'industrie et l'environnement.

Sur la première diapositive, je donne le plan de mon exposé. Je discuterai de notre organisation, des problèmes qu'éprouvent nos régions, des solutions locales que nous avons contribué à définir pour contrer la crise dans le secteur forestier ainsi que des partenariats locaux et nationaux et des collaborations qui rendent notre travail possible. Finalement, je parlerai de la participation des collectivités à la gestion des forêts et j'expliquerai en quoi cela renforce les fonctions économique, écologique et sociale des forêts du Canada, ce qui correspond au thème dont vous nous avez invités à discuter avec vous aujourd'hui.

L'Association Ressources-Nord est un organisme sans but lucratif dirigé par un conseil d'administration dont la mission consiste à établir des stratégies coopératives de gestion des ressources ainsi que de stabilité et de prospérité communautaires. Notre association est le fruit du partenariat de deux organisations, l'Association de la forêt modèle de McGregor et l'Integrated Resource Management Business Group, IRMBG.

La Forêt modèle de McGregor était financée aux termes de l'ancien Programme canadien de forêts modèles. De sa création, en 1992, jusqu'en 2007, elle a bien fonctionné pendant 15 ans. Le groupe s'est associé au IRM Business Group et a reconnu la nécessité de commencer à gérer les ressources de façon intégrée, en réunissant divers secteurs et en les encourageant à collaborer et à travailler les uns avec les autres.

Notre financement de base vient du Programme des collectivités forestières. Nous en recevons 325 000 $ par année et nous trouvons du financement de projet externe à hauteur d'environ 800 000 ou 900 000 $ par année.

Je veux insister sur le fait que cette association repose sur un modèle de partenariat qui compte plus de 50 membres, dont des gouvernements, des industries, des collectivités, des Premières nations et des universitaires. Nous avons des représentants de chacun de ces secteurs qui siègent au conseil.

Notre domaine d'intérêt se situe dans le centre et le Nord de la Colombie-Britannique. Notre siège social se trouve à Prince George. Notre région couvre une superficie d'environ 25 millions d'hectares ou 250 000 kilomètres carrés. Pour vous donner une idée, c'est presque aussi grand que le Labrador.

Dans notre région, nous avons 25 villes et 30 Premières nations, avec une population d'environ 125 000 habitants. Nous nous trouvons surtout dans la forêt subboréale. En traversant les Rocheuses vers le Nord-Est, vous vous trouvez à longer les forêts boréales.

Le problème dans notre région vient de la crise forestière, et le Sénat a discuté en profondeur des divers facteurs qui ont contribué à cette crise.

Les fermetures permanentes ou temporaires de scieries constituent l'un des grands problèmes qui touchent notre région. Dans le rapport du Sénat, j'ai vu qu'il y avait eu 48 fermetures permanentes ou temporaires entre 2003 et 2005. Cette tendance s'est maintenue au cours des dernières années.

La Colombie-Britannique se distingue par le fait que certaines conditions écologiques aggravent la situation. Nous avons eu une épidémie de dendroctone du pin qui a dévasté nos forêts et qui aura sans doute des effets beaucoup plus importants et durables que le ralentissement actuellement dû à la conjoncture économique.

Nombre d'entre vous savent bien que le facteur principal qui a permis à l'invasion du dendroctone de prendre des proportions épidémiques est le climat — une longue succession d'hivers doux et d'étés très secs. Le fait que nous replantons depuis longtemps nos forêts en monocultures de pin est un autre facteur contributif qui a permis à la population de dendroctones d'exploser et d'atteindre des niveaux épidémiques.

Pour ce qui est des conditions sociales, nous avons perdu ces dernières années plus de 3 000 emplois. Pour une petite population, cela est très grave. Le taux de chômage est élevé, la population décline et la pauvreté et la criminalité augmentent. Au cours des cinq dernières années, le Sénat a déterminé qu'il y avait plus de 10 000 pertes d'emploi et mises à pied, le plus fort taux au Canada.

En outre, nous connaissons aussi une croissance rapide dans les secteurs émergents — le pétrole et le gaz, les transports, l'exploitation minière, l'énergie et le tourisme prennent tous pied dans notre région et se développent. Il n'a jamais été aussi nécessaire d'examiner les effets cumulatifs de l'expansion de tous ces secteurs sur un même territoire.

Quant aux mesures, comme Mme Lauzière l'a mentionné, nous mettons l'accent sur le mandat défini dans le Programme des collectivités forestières, le premier élément de ce mandat étant de créer plus de possibilités économiques axées sur la forêt.

Que faites-vous lorsque la forêt dont vous êtes tributaire pour toute l'activité économique est morte et représente un énorme risque d'incendie? Est-ce qu'il y a des occasions dans cette forêt? Nous avons aidé notre région à examiner les possibilités dans les domaines de l'agroforesterie et de la bioénergie, deux secteurs en croissance qui peuvent contribuer à atténuer les effets.

L'agroforesterie nous permet de convertir les forêts mortes en sites fertiles avec des cultures forestières de rechange, des arbres et des produits agricoles. On peut aussi combiner la foresterie et la production en parcours naturel.

La bioénergie est un secteur en rapide expansion, car les pins morts constituent une importante source de matières premières biologiques. La Colombie-Britannique exporte actuellement de 80 à 90 p. 100 de ses granulés de bois vers l'Europe. Nous serions certainement en mesure d'alimenter en matière première des installations locales et nous avons l'espace pour bâtir ces installations. C'est une nouvelle occasion que nous voulons tenter d'exploiter.

Ressources-Nord a organisé deux ateliers l'an dernier pour promouvoir le développement de ces deux secteurs dans le centre et le Nord de la Colombie-Britannique. Les conférenciers ont communiqué aux participants de l'information sur la façon d'ouvrir de nouvelles entreprises et de diversifier les possibilités qu'offre la forêt.

Des comités directeurs ont été créés avec de 8 à 12 partenaires et ils ont donné une orientation stratégique à ces activités. Nous avons élaboré un atelier sur la bioénergie, mais nous avons aussi mis à jour le guide produit par la Colombie-Britannique pour exploiter les possibilités offertes par la bioénergie et les technologies dans la province. Cette version révisée a permis de diffuser dans notre région de l'information récente sur les technologies, les possibilités et les sources de financement.

Preuve du succès de ces ateliers et de ces activités, une Première nation locale, les Saik'uz, nous a demandé comment elle pourrait construire une installation de bioénergie pour le bureau de la bande et les bâtiments connexes. Le partenariat que nous avons formé avec notre comité directeur et les nombreuses personnes qui sont venues nous aider à mener ces activités nous a permis de mettre la collectivité en relation avec la Green Heat Initiative, qui a pu aller sur place réaliser une évaluation de la collectivité pour déterminer la faisabilité d'une installation de bioénergie.

La deuxième mesure dont je veux parler est l'activité qui vise à renforcer les capacités et à mobiliser les collectivités. Deux projets en ce sens ont été lancés. La bioénergie attire énormément l'attention dans notre région, et l'énergie éolienne est de plus en plus importante. Nous envisageons de promouvoir l'ajout d'énergies de remplacement, y compris l'énergie solaire, l'hydroélectricité, les piles à hydrogène et l'énergie géothermique. Nous travaillons en partenariat avec Omineca Beetle Action Coalition, un regroupement de maires et de conseillers de la région qui a été créé pour lutter contre le problème du dendroctone du pin ponderosa.

Nous essayons de créer un centre d'énergie de rechange où les collectivités, les organisations et les sociétés pourront tenter de déterminer quelles sont les meilleures options pour elles en termes d'énergie renouvelable. Nous en sommes encore tout au début, et jusqu'à maintenant une grande partie du travail a porté sur le volet bioénergie, qui a eu le plus de succès.

Nous avons aussi créé un réseau du changement climatique dans le Nord pour examiner les effets du changement climatique sur les collectivités et leur adaptation à ce changement. Ce projet réunit de nombreux intervenants du domaine du changement climatique et s'intéresse plus au volet adaptation — qu'est-ce qu'il faut faire pour s'adapter au changement climatique et quels sont les facteurs en jeu, par exemple, le dendroctone du pin ponderosa — qu'au volet atténuation — par exemple la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous travaillons pour faire connaître à la population les nouveaux renseignements, les projets, les outils et les ressources d'adaptation pour tenter de minimiser les effets du changement climatique dans nos collectivités.

La troisième mesure consiste à promouvoir et à partager des approches multisectorielles intégrées de la gestion des forêts. C'est là que Ressources-Nord concentre vraiment ses efforts. La gestion intégrée des ressources et les effets cumulatifs sont l'un des grands défis de nos collectivités, en particulier pour les Premières nations qui, en vertu de la loi, doivent être consultées au sujet de toute exploitation éventuelle sur leurs terres traditionnelles.

Comment une collectivité peut-elle déterminer ou décider quels effets aura une mine ouverte à côté d'un pipeline, à côté d'un bloc de coupe? Comment peut-elle s'assurer que les valeurs environnementales, culturelles et économiques qui lui importent sont équilibrées?

Nous travaillons actuellement avec les Premières nations de Saulteau, qui se trouvent à 250 kilomètres au Nord de Prince George et dans le district du Mackenzie, pour examiner ces questions et collaborer à la réalisation d'une évaluation des effets cumulatifs.

Nous appuyons aussi divers partenaires qui prennent des mesures pour assurer le rétablissement du caribou des bois et de l'esturgeon blanc de la Nechako. Nous soutenons également notre partenaire, le Council of Forest Industries, relativement aux programmes d'éducation, de gestion des ressources naturelles et d'orientation pédagogique des jeunes qu'il exécute dans cinq collectivités du secteur.

Finalement, les activités de notre conseil sont un vecteur essentiel pour permettre à divers intervenants de nous communiquer une orientation et des conseils. À la table, il y a 16 administrateurs qui représentent le gouvernement provincial, des municipalités, des Premières nations, des universités, des entreprises et des associations industrielles des secteurs de la foresterie, des mines, du tourisme et du pétrole et du gaz. Chaque projet est examiné en fonction de ces diverses optiques, et l'on tient compte de tous les aspects pour parvenir à un équilibre optimal.

La quatrième et dernière mesure est la mise en commun des pratiques exemplaires et de l'information avec les collectivités forestières du Canada et du monde. Nous collaborons actuellement avec Ressources naturelles Canada pour peaufiner un guide intitulé Pathways to climate resilience : A guidebook for forest-based communities. Au Canada, ce projet sera piloté dans quatre provinces auprès de 15 forêts modèles du pays, constituées collectivement comme le Réseau canadien de forêts modèles. Nous pouvons aborder les questions de façon coordonnée au niveau national.

La Russie s'intéresse également à la forêt modèle et pourrait piloter ce projet, peut-être par l'entremise du Réseau international de forêts modèles dont M. Dolter a indiqué que nous étions membres.

Au Canada, il y a cinq forêts modèles où nous avons combiné et coordonné les activités liées à la gestion du caribou dans l'Ouest canadien. Nous avons réuni des chercheurs et des gestionnaires de quatre provinces de l'Ouest pour échanger de l'information concernant le travail en cours, et des études sont en cours. Nous avons cerné diverses occasions de collaboration et d'échange d'information et discuté de solutions que le réseau pourrait proposer.

À l'heure actuelle, nous élaborons une proposition en vue de renforcer un processus de participation locale à l'élaboration et à la mise en œuvre de plans de rétablissement qui réuniraient l'industrie, les collectivités, les Premières nations et les intervenants locaux.

Pour terminer, j'aimerais exposer quelques expériences que nous avons vécues, ici, en Colombie-Britannique. Parce que nous subissons les effets du dendroctone du pin ponderosa, nous savons que les crises écologiques peuvent être encore plus graves que les crises économiques et qu'il faut accorder une considération adéquate à ces facteurs et à leur influence sur les collectivités forestières. La réflexion, la planification et l'adaptation à long terme sont absolument essentielles dans ce contexte.

La diversification dans le secteur forestier et dans d'autres secteurs est nécessaire à la stabilité communautaire. Il est parfaitement logique de partager l'information et les connaissances dans l'ensemble du pays, et le forum que nous avons avec le réseau nous permet de le faire. En ce sens, je veux inviter tous les membres du comité sénatorial à venir nous visiter ici, à Prince George. Nous espérons pouvoir vous accueillir et vous montrer certaines des activités auxquelles nous participons. Vous pourriez voir un caribou et peut-être même un esturgeon. Sinon, nous pourrons certainement vous montrer de nombreux pins morts.

Finalement, je tiens à souligner que la collaboration est une nécessité absolue. Le Programme des collectivités forestières est utile à nos collectivités parce que c'est une plate-forme neutre, un carré de sable où les gens peuvent se réunir pour s'efforcer de trouver des solutions sans idées préconçues. Il nous permet de jeter des ponts pour que le secteur forestier puisse collaborer avec les collectivités et avec d'autres secteurs.

La collaboration est la clé du succès si nous voulons atteindre ces objectifs, et le programme est inégalé en ce qu'il permet à ces partenariats d'exister. Ensemble, nous sommes certainement plus forts. Je vous laisse sur cette dernière diapositive, qui montre nos partenaires à la table avec nous. Merci de votre attention.

Le président : Merci, madame Zimmerman, et merci à nos témoins de l'information que vous avez fournie au comité. C'était très intéressant. Nous allons maintenant passer aux questions.

Le sénateur Eaton : Merci. Tout cela est très intéressant. Madame Lauzière, j'ai bien aimé votre exposé parce que nous avons beaucoup entendu parler de ce que vous faites. C'est très intéressant et vous l'expliquez très bien.

Vous avez parlé de bleuets et de champignons, mais aussi de produits forestiers à valeur ajoutée. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?

Mme Lauzière : C'est une partie de notre programme qui est menée par nos partenaires des Premières nations. Nous cherchons à créer un modèle de grappe pour utiliser tous les produits forestiers que nous avons; tous les rebuts de bois, tous les morceaux d'arbre qui ne sont pas utilisés doivent trouver une utilisation.

Nous avons en outre un problème dans la région à cause des peupliers, des panneaux OSB, les panneaux de particules orientées, et des scieries qui sont fermées. Il n'y a pas que les scieries qui sont fermées, les usines de panneaux OSB le sont aussi, parce qu'il n'y a pas de marché pour le peuplier. Cela se répercute sur nos scieries. Tout à coup, elles ont un produit qu'elles ne peuvent plus récolter dans la région, alors leur bilan en souffre.

Nous envisageons un programme précis à valeur ajoutée : la torréfaction du bois.

Le sénateur Eaton : Qu'est-ce que c'est?

Mme Lauzière : Nous utilisons des essences qui sont généralement sous-utilisées, par exemple le peuplier, et nous les soumettons à un processus de chauffage intense qui renforce le bois qui devient alors extrêmement dur, aussi dur que le bois de feuillus, et qui pourrait avoir des utilisations différentes. Ce type de programmes et ces technologies existent.

Parfois, vous voyez au large de la côte Ouest du Canada des bateaux qui prennent ces produits, de nouvelles technologies sont appliquées et elles ajoutent de la valeur au peuplier. Nous devons vraiment trouver quelque chose à faire avec le peuplier. Il serait utile pour nos scieries et pour notre industrie en général, alors nous essayons de créer un modèle de grappe. Cela permettrait à nos scieries de transformer le peuplier en bois dur qui pourrait ensuite être utilisé.

Nous avons une nouvelle usine de thuya, qui a été ouverte dans la région après la création de la Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur. Je crois que cela a commencé en 2008, et elle produit notamment des bardeaux de cèdre et des copeaux pour le jardinage. Elle peut produire du platelage. Elle fait toutes sortes de produits.

En termes d'élaboration de nouvelles technologies, c'est vraiment la torréfaction qui nous intéresse, mais nous aidons nos autres industries à trouver des utilisations pour leurs produits.

Le sénateur Eaton : Est-ce que vous entretenez des relations avec des projets de recherche dans les universités pour mettre au point de nouveaux produits, par exemple l'Université de Guelph? Est-ce que l'on vous sollicite?

Mme Lauzière : Cela ne s'est pas fait spécifiquement pour le bois à valeur ajoutée. Divers programmes de recherche universitaire communiquent avec nous tous les deux ou trois mois, à peu près. Nous sommes actuellement en contact avec certains chercheurs qui étaient autrefois à l'Université de Waterloo et qui sont maintenant en Saskatchewan. Il y a aussi un programme de recherche à l'Université de Toronto, mais il s'intéresse plutôt à la gestion des bassins versants.

Nous n'avons pas encore commencé cela pour les produits de bois à valeur ajoutée. Il faut espérer qu'un jour, c'est le genre de relations que nous pourrons établir.

Le sénateur Eaton : Merci. Ils font un travail très intéressant sur les nanoproduits. Cela serait intéressant. Est-ce que je peux poser une petite question?

Le président : Certainement.

Le sénateur Eaton : Vous parliez des dangers de la monoculture forestière, parce qu'il est très facile pour le dendroctone du pin d'envahir ces forêts et de tout détruire, n'est-ce pas? Ou est-ce que j'ai mal compris?

Mme Zimmerman : C'est un facteur qui contribue.

Le sénateur Eaton : Est-ce que vous essayez de planter trop d'arbres lorsque vous faites de la reforestation? Est-ce que c'est aussi un élément, et le sol n'arrive pas à supporter tous ces arbres?

Mme Zimmerman : Est-ce que vous voulez parler de la densité d'arbres?

Le sénateur Eaton : Oui. Je m'exprime mal. L'un de nos témoins, récemment, nous a parlé de surpeuplement. La forêt devient trop dense et le système immunitaire des arbres est affaibli.

Mme Zimmerman : Ce qui est vraiment intéressant, au sujet du pin tordu latifolié, c'est que c'est une espèce pionnière. Naturellement, il s'installe parmi les premiers pour coloniser le territoire. Il colonise souvent très densément et il a un processus d'éclaircissage naturel, alors je crois que ce n'est pas un problème. Cette préoccupation n'a certainement pas été soulevée dans notre région.

C'était un problème dans le cas du dendroctone du pin ponderosa, parce que des peuplements qui auraient pu traditionnellement comprendre du pin et de l'épinette et peut-être aussi du sapin subalpin ont été transformés en monoculture de pin tordu. Le pin tordu est généralement planté parce qu'il pousse très vite; c'est une essence pionnière. C'était la pratique en foresterie en Colombie-Britannique pendant des années, avant qu'on s'aperçoive qu'il était préférable d'avoir une diversité d'essences.

Le sénateur Eaton : Est-ce que vous diffusez de l'information et essayez de convaincre les gens de planter diverses essences?

Mme Zimmerman : Heureusement, nous en avons pris conscience au cours des 10 dernières années. Pendant les 20 années précédentes, nous avons créé des peuplements de monoculture de pin un peu partout. De nombreuses initiatives ont été inspirées du code de pratiques forestières de la Colombie-Britannique, qui encourage la biodiversité et la plantation de peuplements diversifiés, pour essayer de prévenir le genre de problèmes que nous connaissons maintenant, quand le dendroctone peut envahir toute une région et laisser derrière lui des réserves illimitées de pin mort.

Le sénateur Mercer : Merci à nos témoins d'être venus. Madame Lauzière, vous avez parlé d'environ 220 acres de bleuets à feuilles étroites. C'est considérable, même si je viens de la Nouvelle-Écosse où nous nous considérons comme la capitale du bleuet au Canada. Est-ce que vous avez choisi un type particulier de bleuet à feuilles étroites et où avez-vous trouvé cette espèce?

Mme Lauzière : Nous avons déjà fait de la culture; nous n'avons pas choisi un plant de bleuets particulier. Dans notre région, dans le Nord-Est ontarien, compte tenu des types de forêt et de sol, le bleuet se propage naturellement. Il n'est pas nécessaire de le planter. De fait, nous avons procédé à des tests et nous avons mis à l'essai diverses espèces de bleuet, et il faut plus de travail pour les cultiver que lorsqu'on les laisse simplement pousser. Il faut des années et des années.

Nous avons donc pris ces 220 acres sur la côte Nord-Est du lac Supérieur pour commencer. Je dois ajouter que nous avons 2 000 hectares qui seront en production dans la région de Chapleau, alors la Nouvelle-Écosse n'a qu'à bien se tenir : son titre est menacé. C'est ce que j'espère.

Nous utilisons le bleuet sauvage à feuilles étroites qui pousse naturellement dans le Nord-Est ontarien. Les baies sont peut-être plus petites que celles du bleuet en corymbe, mais elles n'ont pas de graines. Elles ont meilleur goût.

Le sénateur Mercer : Le bleuet à feuilles étroites a toujours été plus savoureux. Vous aurez de la difficulté à battre la qualité des bleuets de la Nouvelle-Écosse, mais là n'est pas la question.

Monsieur Dolter, vous avez parlé de « résidu ligneux broyé » dans votre exposé, et je ne connais pas bien ce résidu. Pourriez-vous m'expliquer ce que c'est?

M. Dolter : C'est un bois broyé produit avec des essences de faible valeur. De nos jours, quand on récolte du bois dans la forêt, on crée plusieurs piles. La première pile est faite de billes pour les pâtes; la deuxième est destinée à la scierie; la troisième sera enlevée par un entrepreneur, c'est du bois pour produire de l'énergie. Il y a aussi du bois qui ne peut pas être utilisé, pour une raison ou une autre. C'est peut-être du bois mort ou qui a un fort taux de rejet, ce qui signifie qu'une partie de la grume est morte. Ce bois est amené dans une cour centrale qui appartient à l'un de nos partenaires et il est broyé. On l'utilise dans les chaudières de l'usine de pâtes et papiers de Corner Brook, pour remplacer le mazout C.

Le sénateur Mercer : Dans votre exposé, vous avez dit qu'au-delà du PCF il y avait le service à notre partenariat. Dans votre division de la faune, vous montrez une étude d'impact pour le projet sur la partie inférieure du fleuve Churchill. Je viens de la Nouvelle-Écosse, et nous nous intéressons tout particulièrement au cours inférieur du fleuve Churchill depuis la conclusion récente d'une entente entre la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador pour le transport de l'électricité produite sur le cours inférieur du Churchill. Qu'est-ce que cette étude révèle?

M. Dolter : Elle a été réalisée principalement par le promoteur, qui est un de nos partenaires : la Division de la faune, au ministère de l'Environnement et de la Conservation de Terre-Neuve. Nous avons collaboré avec elle pour étudier la flore et la faune, cela fait partie du processus d'évaluation environnementale du ministère. Ce rapport a été intégré au processus d'évaluation environnementale.

J'aimerais qu'un représentant du ministère soit ici pour vous exposer les résultats de cette étude, mais il n'y avait rien qui puisse nuire aux espèces étudiées. C'était simplement un de ces cas qui nous permettent de prendre les ressources de nos partenaires et d'embaucher des personnes pour réaliser les évaluations. Je serai heureux de vous faire parvenir le rapport après ces consultations.

Le sénateur Mercer : Je vous en serais reconnaissant. Vous pouvez l'envoyer à la greffière.

Madame Zimmerman, nous sommes allés en Colombie-Britannique. J'y suis allé à maintes reprises dans le cadre de diverses activités du comité. Nous avons vu la dévastation causée par le dendroctone. Cet été, nous avons vu les résultats de certains des incendies de forêt.

Est-ce que le processus de reforestation qui est en cours est très vaste? Jusqu'où avez-vous pu aller vers le Nord? La région que vous montrez sur la carte commence au Sud, à Prince George, et va jusqu'au Nord de Fort St. John.

Mme Zimmerman : C'est une excellente question. Les efforts de reforestation ne peuvent pas suivre le rythme des activités de déforestation. Actuellement, ce que nous avons appelé un bref intervalle de prospérité est sur le point de se terminer. Vu la grande quantité de bois mort encore debout dans nos forêts, une augmentation annuelle des coupes a été autorisée afin de régler le problème, en particulier par souci de la sécurité des collectivités voisines. Nous avons déployé des efforts importants pour éliminer ces arbres et prévenir les incendies qui pourraient menacer les villes.

La récolte a été considérable, au fil des ans, et nous arrivons à la fin d'une période de prospérité. Malheureusement, cela signifie que nous entrons dans une période de dépression où nous n'aurons pas autant de bois à couper qu'auparavant. Il nous faudra du temps pour récupérer.

Pour ce qui est de votre question sur la reforestation, parce que cela est considéré comme une récolte de récupération nous n'obtenons pas le même prix que pour une coupe normale. La valeur du bois sur pied est inférieure, et il n'y a pas autant de ressources pour replanter.

Le gouvernement provincial a aussi effectué des compressions importantes, comme cela s'est fait partout au pays. Des programmes de replantation, par exemple, ont été nettement limités. Nous n'arrivons pas à replanter les secteurs où nous récoltons.

Vous me demandez jusqu'où nous replantons vers le Nord, et j'ai bien peur de ne pouvoir vous répondre. Je sais que les efforts de replantation sont répartis dans toute la province. Cela dépend des entreprises et des organisations qui récoltent dans ces secteurs.

Le sénateur Mercer : Vous avez dit que la déforestation progressait maintenant beaucoup plus rapidement que la reforestation. Est-ce que c'est en raison du dendroctone ou des activités de récolte?

Mme Zimmerman : C'est en raison de la récolte dans les forêts touchées par le dendroctone. Une forêt de bois mort debout restera dans cet état pendant des années. Il n'est pas nécessaire de replanter tant que ces arbres n'ont pas été abattus.

Le sénateur Callbeck : Merci de votre exposé. C'était bien présenté et bien documenté. Je ne siège pas régulièrement au comité, alors je dois reconnaître que je ne sais pas grand-chose de ce Programme des collectivités forestières. Toutefois, il me semble, d'après vos exposés, qu'il a connu beaucoup de succès.

Je remarque qu'il se termine en 2012. S'il est renouvelé — et j'espère certainement qu'il le sera —, est-ce que vous voudriez y voir des changements?

M. Dolter : Je dois dire que lorsque nous avons été informés du premier changement, en 2007, qui nous donnait le mandat de bâtir de solides collectivités rurales, ce n'était pas un changement important, mais il était quand même nécessaire. Je crois que le gouvernement fédéral a bien fait de concentrer nos efforts et de réorienter notre réseau, qui évoluait, depuis 15 ans, en fonction des collectivités. Je ne voudrais pas que l'orientation ni les objectifs du programme soient modifiés.

Nous pourrions peut-être revoir les secteurs dans lesquels nous investissons et resserrer un peu nos liens avec le Service canadien des forêts dans nos régions, envisager de façon un peu plus stratégique des solutions innovatrices qui répondront aux exigences des collectivités tributaires de la forêt. Ce sont des aspects qui seraient bien accueillis par nombre de sites du PCF.

Mme Lauzière : Pour ce qui est du renouvellement du programme, je crois que je suis du même avis que M. Dolter. Le programme est parfait en termes de mandat et de rôle.

J'ai une formation en développement économique. Je travaille comme spécialiste du développement économique depuis plus de 10 ans maintenant. Au cours de cette période, j'ai vu très peu de programmes comme celui-là, qui donnent à une organisation la possibilité de distribuer des capitaux d'amorçage, des fonds pour les opérations de base et grâce auxquels vous pouvez avoir du personnel, agir de façon cohérente et vous dire que vous avez cinq ans de financement et que vous pouvez faire quelque chose et avoir du personnel pendant ces cinq ans.

Nous ne pouvons pas offrir d'emplois à temps plein ou pour la vie. C'était peut-être courant il y a 10 ans ou 20 ans, mais ça ne l'est plus. L'octroi d'un financement pluriannuel nous permet de trouver les compétences dont nous avons besoin. Je pense que le programme offre une certaine souplesse, qu'il permet au site de fonctionner et que cela devrait être maintenu.

Il serait bien que le programme améliore la collaboration nationale. Nous préparons actuellement une stratégie nationale du caribou pour tous les sites de la forêt boréale qui ont des problèmes touchant le caribou. Moi-même, Mme Zimmerman, la Forêt modèle du Manitoba, le Foothills Research Institute et Susan Carr, de la Forêt modèle de Prince Albert, nous avons tous les mêmes problèmes. Nous les traitons un peu différemment, mais il y a des leçons à tirer d'une relation cohérente.

Les secteurs mettent l'accent sur différentes choses. J'espère que nous pourrons, grâce à ce programme, établir des réseaux régionaux — peut-être au niveau du paysage, quel que soit le niveau —, des partenariats naturels. Nous sommes très favorables aux partenariats dans la Collectivité forestière du Nord-Est du lac Supérieur, mais nous ne croyons pas qu'il faut les imposer. Nous pensons que les partenariats doivent se former naturellement, et la forêt boréale est un lien qui unit une grande partie du pays. Cela nous donne l'occasion de nous positionner comme chefs de file mondiaux en termes de gestion de la forêt boréale.

Ce sont les seuls changements qui, selon moi, seraient utiles dans un programme renouvelé.

Mme Zimmerman : J'appuie tout ce que Mme Lauzière et M. Dolter ont dit.

Évidemment, ce serait merveilleux que le problème soit élargi. Dans notre réseau, 11 d'entre nous sont financés par le Programme des collectivités forestières, mais il y en a quatre autres qui travaillent pour atteindre les mêmes buts et les mêmes objectifs et qui ne le sont pas. Ce serait bien de pouvoir mettre de nouveaux fonds fédéraux sur leur table, pour faciliter notre travail aux niveaux national et international.

Le sénateur Callbeck : Il y a une question qui m'intéresse, et c'est celle des jeunes entrepreneurs. Vous avez dit que dans le Nord-Est ontarien vous aviez le meilleur esprit d'entreprise. Pourquoi?

Mme Lauzière : Dans le Nord de l'Ontario, nous avons vraiment l'appui du gouvernement pour stimuler l'esprit d'entreprise des jeunes. Il existe un programme appelé Fonds du patrimoine du Nord de l'Ontario. C'est un programme réservé aux jeunes entrepreneurs et qui distribue des subventions — des contributions non remboursables — aux jeunes qui veulent se lancer en affaires. Selon nous, c'est vraiment le secret.

Dans notre région, nous avons connu un exode de la population de 30 p. 100. Les personnes qui voulaient quitter la région l'ont fait. Celles qui restent sont déterminées à rester. Ce genre d'engagement se transmet de génération en génération.

Il s'agit d'encourager l'esprit d'entreprise. Nous organisons des concours de plans d'affaires. Nous avons modifié le concours de plan d'affaires organisé dans notre région pour mettre l'accent sur le bois et sur les jeunes qui regardent la forêt d'un autre oeil. L'auteur d'un plan d'affaires pour une plantation de bleuets a été renversé d'apprendre que quelqu'un avait déjà eu cette idée et avait mis sur pied une entreprise viable. Il ignorait tout de régions comme le Lac- Saint-Jean ou la Nouvelle-Écosse. Il s'était simplement dit, « J'ai grandi ici et j'aime le grand air. Qu'est-ce que nous avons en abondance? » C'était aussi simple que cela.

Pour bien des jeunes, c'est aussi simple que cela. Ils voient chaque jour les choses d'un œil neuf. Peut-être que nous sommes blasés, parce que nous savons ce qui n'a pas fonctionné, ce qui a été essayé, nous ne voulons pas essayer de nouveau peut-être parce que quelqu'un l'a déjà fait et a échoué. Les jeunes n'ont pas ce bagage. Ils sont plus engagés envers l'environnement que jamais auparavant, avec l'énergie verte, les solutions écologiques et la production de leurs aliments. Il y a toutes sortes de possibilités.

Grâce à notre relation étroite avec nos partenaires des Premières nations, nous exécutons des programmes de sensibilisation interculturelle pour que les jeunes qui ne sont pas membres des Premières nations puissent vraiment apprendre les croyances traditionnelles des jeunes des Premières nations. Ils constatent alors qu'ils peuvent faire leur propre thé, qu'ils peuvent construire des embarcations traditionnelles en cèdre, des oiseaux en mélèze, toutes sortes de choses. Il y a bien des possibilités.

Nous constatons que quand nous donnons aux jeunes l'occasion de réfléchir par eux-mêmes, ils sont ravis de le faire.

Le sénateur Callbeck : À combien s'élève cette subvention dont vous parlez pour les jeunes?

Mme Lauzière : Ils reçoivent 25 000 $ en argent comptant du gouvernement. Il existe d'autres programmes de financement, par exemple la Fondation canadienne des jeunes entrepreneurs qui peut accorder 15 000 $ de plus, et il y a des volets pour les jeunes entrepreneurs à Service Canada, pour payer les salaires. Il existe divers programmes que vous pouvez cumuler.

Le sénateur Callbeck : Est-ce que ces 25 000 $ viennent d'un programme provincial?

Mme Lauzière : C'est un programme provincial qui est propre au Nord de l'Ontario. La majorité des régions du Canada n'y ont pas accès. Je crois qu'elles le devraient, il est avantageux. Il y a toujours un risque. Pour chaque bonne idée d'entreprise, il y en a peut-être une autre qui ne donnera rien, mais cela permet aux jeunes de décider s'ils veulent être entrepreneur. Ce n'est pas facile et ce n'est pas pour tout le monde.

Le sénateur Callbeck : Puis-je continuer?

Le président : Oui, madame.

Le sénateur Callbeck : Monsieur Dolter, vous avez parlé d'intégrer le secteur forestier au système d'éducation. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet.

M. Dolter : Nous avons un programme que nous avons mis sur pied en collaboration avec le ministère des Ressources naturelles, le ministère provincial responsable des forêts. Nous avons étudié en détail le guide des programmes que le ministère de l'Éducation distribue aux enseignants. Nous avons examiné 32 objectifs distincts que les enseignants doivent atteindre dans leurs classes.

Nous avons distillé tout ce que notre secteur forestier peut offrir à nos jeunes en termes de formation et d'éducation dans une vidéo éducative de 45 minutes accompagnée de matériel pédagogique, de documents et de cahiers de travail que les enseignants peuvent utiliser. Nous pouvons leur offrir une formation pour les aider à présenter les réussites de notre secteur forestier.

Nous avons aussi le programme Forest in a Backpack, qui s'adresse aux élèves du primaire. Il est dans tous les bureaux de district. Ce programme donne aux praticiens de la forêt les outils nécessaires pour enseigner aux enfants.

Nous avons un problème parce que les jeunes décident très tôt de ne pas s'orienter vers le secteur forestier. Nous devons lutter contre cette tendance maintenant, au niveau primaire, mais également au secondaire. Nous avons travaillé avec les ministères compétents. Nous avons aussi travaillé avec la division de la faune et la division des parcs et des aires naturelles, pour montrer aux enfants l'aspect positif de la gestion durable des forêts et des forêts canadiennes et leur faire comprendre qu'ils peuvent y trouver des possibilités de carrière. Toutefois, il faut agir en 6e, en 7e et en 8e années et offrir des programmes qui répondent aux objectifs de l'enseignant et l'aident à remplir sa mission.

Ce programme a été lancé l'an dernier à Terre-Neuve-et-Labrador. Il a connu beaucoup de succès. Il y a eu également un programme de stages pour lequel notre forêt modèle collabore avec le ministère de l'Éducation.

Le sénateur Callbeck : Est-ce que vous essayez de promouvoir l'esprit d'entreprise là aussi?

M. Dolter : Certainement.

Le sénateur Callbeck : Ou simplement le secteur forestier?

M. Dolter : L'esprit d'entreprise. Mais nous essayons aussi de promouvoir les possibilités d'affaires. Il n'y a pas que les usines de pâtes ou les scieries. Il y a le bois à valeur ajoutée, le bois d'ingénierie. Nous pouvons tirer une foule de produits de la forêt.

Notre volet éducatif ne traite pas seulement des industries traditionnelles. Il porte aussi sur les technologies émergentes et les nouveaux produits. Nous avons une section assez importante sur les produits forestiers non ligneux.

Nous essayons d'instruire les jeunes et de leur donner une vision de l'avenir. Nous espérons ainsi encourager l'esprit d'entreprise.

Le sénateur Callbeck : Madame Zimmerman, je crois que vous avez parlé de programmes éducatifs dans les camps pour les jeunes. Pouvez-vous nous en dire plus?

Mme Zimmerman : Oui. C'est l'un des beaux programmes que notre partenaire, le Council of Forest Industries, organise. Il s'agit de camps de deux jours où les élèves de 11e et 12e années peuvent acquérir des habiletés en gestion des ressources naturelles. Ils apprennent à utiliser certains outils de la foresterie. Ils peuvent aussi s'initier à des pratiques de gestion de la faune et à des activités minières ou d'exploitation pétrolière et gazière, et cetera.

Souvent, ils acquièrent une expérience concrète et ils apprennent à conduire un VTT. Ils sortent et apprennent à mesurer les arbres et à faire les levés nécessaires en foresterie. On leur indique aussi les principes généraux et les habiletés requises ainsi que les exigences en matière de scolarité, pour qu'ils puissent suivre les cours dont ils ont besoin vers la fin de leur secondaire pour s'orienter vers un programme du secteur des ressources naturelles.

Le sénateur Callbeck : Merci beaucoup.

Le sénateur Mahovlich : Lorsque le Sénat a visité le site des Jeux olympiques, à Vancouver, nous avons été très impressionnés par l'ovale de patinage de vitesse, à Richmond. Il est construit en bois contaminé par le dendroctone du pin ponderosa. Est-ce qu'il y a une demande pour ce genre de bois? C'était très beau.

Mme Zimmerman : Certainement. Nous le commercialisons sous l'appellation de « Denim Pine ». Il a un aspect très particulier. Un champignon lui donne une teinte bleutée. Il y a une demande pour ce produit, et il est commercialisé. De nombreux produits promotionnels sont offerts. Comme vous le dites, les podiums étaient construits eux aussi de ce bois.

Il y a un marché, mais il est limité. Ce bois n'est viable que pendant une période limitée. Vous avez seulement de huit à dix ans pour récolter les arbres destinés à la production de Denim Pine avec la teinte bleutée qui le caractérise. Ensuite, le champignon détruit les fibres ligneuses du bois; le matériau n'a plus la force exigée par le code et il ne peut plus être utilisé pour les éléments structuraux.

Le sénateur Mahovlich : Nous devons donc nous presser et l'utiliser. Je me demande où se trouve la plantation de bleuets la plus réussie. Est-ce qu'il y en a une?

Le sénateur Robichaud : Au Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Mercer : Non, en Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Mahovlich : Dans la baie Georgienne.

Mme Lauzière : Vous parlez de l'industrie commerciale?

Le sénateur Mahovlich : Oui.

Mme Lauzière : Il n'y a pas d'industrie commerciale actuellement dans le Nord de l'Ontario. De fait, il n'y a pas de bleuetière commerciale qui cultive le bleuet sauvage à petites feuilles en Ontario. Tous les bleuets en Ontario sont des bleuets en corymbe à l'heure actuelle. Notre plantation est en développement, mais, en règle générale, il faut compter sept ans entre la préparation du site et la première récolte.

Nous avons réussi à accélérer le processus. Notre récolte se fera en août 2011, et le site est en développement depuis environ quatre ans. C'est ce que nous avons réalisé.

Essentiellement, nous avons un seul site sur les rives du lac Supérieur, près de Wawa. C'est le premier d'un réseau de six plantations que nous espérons créer. Avec ces six plantations, chacun des partenaires communautaires ou des Premières nations participantes pourra développer sa propre plantation et vendre sa production à une coopérative régionale. La coopérative commercialisera le produit dans le reste du monde.

D'après l'expérience du Québec, nous estimons qu'il nous faudra entre 2 000 et 3 000 hectares de plants de bleuets pour devenir un producteur mondial de bleuets.

En passant, nous sommes allés au Québec, et les Québécois sont ensuite venus voir nos terrains dans notre région. Ils nous ont immédiatement demandé : « Combien? Nous voulons investir, nous voulons participer. » Nous encourageons l'investissement, mais nous voulons aussi que notre région soit autonome. Plus nous nous engageons dans le processus de mise en valeur de ces plantations et plus notre région s'investit. S'il nous faut de l'investissement supplémentaire, alors nous pourrons en trouver.

Notre premier site, le plus producteur, sera celui de Wawa. Nous avons 400 acres au total là-bas, 220 sont déjà plantés et la première récolte est prévue pour 2011. Le reste, nous le développons actuellement. La deuxième phase est située à Chapleau, où nous avons 500 hectares, et nous pourrions en avoir jusqu'à 2 000. Nous avons consulté des gens de la Nouvelle-Écosse, une famille qui cultive le bleuet; ils sont venus voir notre terre. Il est venu l'an dernier pour voir la zone dont nous parlions. Ce sont les Sultan Flats. Il nous a dit qu'il n'avait jamais vu de terres à bleuet aussi belles que les Sultan Flats de toute sa vie.

Le sénateur Mahovlich : Vous l'avez renvoyé en Nouvelle-Écosse?

Mme Lauzière : Oui.

Le président : Merci beaucoup, honorables sénateurs. Avant de passer à notre deuxième groupe de témoins, je veux remercier ceux-ci de l'information qu'ils nous ont communiquée. Si vous me le permettez, j'ai trois questions à vous poser et je vous demande d'envoyer vos réponses par écrit à notre greffière.

Je regarde votre programme — ou vos programmes — avec les provinces. Est-ce que les provinces et territoires appuient une approche communautaire en matière de gestion des forêts et de développement économique? Si vous avez de l'information à nous communiquer à ce sujet, nous vous en serions reconnaissants.

Lorsque nous parlons de sylviculture et de plantations, il s'agit, comme l'a dit Mme Zimmerman, de monocultures. J'ignore si vous avez l'expérience d'autres essences, mais nous aimerions le savoir.

Finalement, quelles sont les relations que vous entretenez avec les pourvoyeurs, les associations de pêche et les organisations fauniques dans votre modèle de collectivités forestières?

Je remercie les témoins de notre première heure pour l'information qu'ils nous ont fournie, et je demande maintenant à notre deuxième groupe de s'approcher.

Nous accueillons maintenant le directeur général de la Forêt modèle de l'Est de l'Ontario, M. Mark Richardson.

[Français]

Nous recevons également Mme Colette Robertson, présidente de la Forêt modèle du Lac-Saint-Jean.

[Traduction]

Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation à comparaître. Nous avons un horaire serré, et j'ai promis au comité que nous allions lever la séance d'ici 20 h 30. Cela dit, j'invite les témoins à faire leurs exposés. D'après la greffière, notre premier témoin sera M. Richardson, suivi de Mme Robertson.

Monsieur Richardson, nous vous écoutons.

Mark Richardson, directeur général, Forêt modèle de l'Est de l'Ontario : Honorables sénateurs, au nom des nombreux partenaires de la Forêt modèle de l'Est de l'Ontario, je vous remercie de nous avoir invités aujourd'hui. Je peux vous dire que dans mon intervention je ne mentionnerai pas une seule fois le mot bleuet, sauf si vous posez des questions.

La Forêt modèle de l'Est de l'Ontario est un organisme communautaire sans but lucratif. Nous avons un solide conseil d'administration, et il ne se passe pas une journée sans que je remercie le ciel de son engagement dans le programme.

Nous avons une foule de comités de gestion qui traitent de divers aspects scientifiques et des programmes. Nous avons aussi des conseillers spéciaux et nous fonctionnons avec cinq employés permanents et quelques employés saisonniers, selon les programmes de financement. Nous sommes en outre fortement tributaires de l'appui de nos nombreux bénévoles et de nos partenaires.

Je ne saurais trop insister sur le fait que la Forêt modèle de l'Est de l'Ontario, comme de nombreuses autres, ici — tous ceux qui ont parlé ce soir — est fondée sur le partenariat. Nous ne pourrions pas fonctionner sans nos partenaires. C'est notre principe depuis toujours.

Pour moi, cette diapositive montre la valeur ou la puissance du partenariat. Nous existons depuis 18 ans. Avec un investissement fédéral d'environ 11,4 millions de dollars depuis 1992, nous avons réussi à attirer des fonds supplémentaires à hauteur d'environ 13,7 millions de dollars ainsi qu'un soutien en nature qui est sous-évalué, mais qui représente environ 8,7 millions de dollars. Cela montre bien le pouvoir du partenariat et l'effet de quelques fonds d'amorçage peuvent avoir pour une organisation communautaire.

Croyez-le ou non, vous vous trouvez aujourd'hui dans la Forêt modèle de l'Est de l'Ontario. Je vous invite à venir nous visiter à Kemptville. Notre bureau est à 30 minutes au sud du Parlement, et nous serions ravis de vous accueillir pour vous montrer ce que nous faisons. Vous pourriez en apprendre un peu plus sur ce que nous sommes, sur notre fonctionnement et sur les programmes que nous offrons.

C'est également une nature habitée. Plus d'un million de personnes vivent dans la région, alors notre situation est très différente de ce que nombre de témoins vous ont décrit ce soir. Notre territoire couvre environ 1,5 million d'hectares, et nous faisons partie de la région forestière des Grands Lacs et du Saint-Laurent. C'est un type de forêt différent, qui nécessite des régimes de gestion distincts et des approches de participation communautaire adaptées.

Notre frontière est plutôt poreuse, et une grande partie de notre activité est axée sur l'extérieur de notre territoire proprement dit. Nous travaillons en collaboration avec tous ceux qui appuient notre vision et nos objectifs à long terme. Depuis plus de 18 ans, nous avons participé à de nombreux projets dans le Sud de l'Ontario, aux États-Unis, au Québec et dans quelques autres régions.

Le Réseau international de forêts modèles a été créé par le gouvernement du Canada en 1992. C'est une belle histoire. Nous sommes très fiers d'appartenir au Réseau international de forêts modèles, car nous sommes membres du Réseau canadien de forêts modèles. Nous sommes aussi un ambassadeur pour le PCF, le Programme des collectivités forestières.

Nombre de dignitaires et de délégations qui visitent Ottawa participent à des réunions avec le Service canadien des forêts, puis nous les amenons pour leur montrer un peu ce que sont les forêts modèles et le PCF. L'an dernier, nous avons accueilli des délégations de la Russie, deux ou trois de la Chine et une du Chili.

Le secteur forestier dans notre région présente de nombreux défis. Notre conseil a clairement établi qu'il nous fallait nous associer plus étroitement à l'industrie des scieries dans la partie amont de la vallée de l'Outaouais. Ce sont elles qui font vivre la région dans le secteur forestier. Il y a encore un certain nombre de scieries, là-bas.

Ce sont souvent des entreprises familiales, qui existent parfois depuis plus de trois générations. Lors du dernier ralentissement dans le secteur forestier, aucune de ces scieries n'a fermé; je suis heureux de pouvoir le dire, mais un bon nombre ont peine à survivre. Si nous n'inversons pas la tendance, il se pourrait que certaines soient dans l'obligation de fermer leurs portes.

Ici, à l'écran, vous voyez Lavern Heideman & Sons. Ils produisent surtout du pin rouge, mais aussi quelques autres essences. C'est une usine certifiée FSC, avec chaîne de traçabilité. Je vais vous reparler de cela dans la suite de mon exposé.

Ici, vous avez des grumes prêtes à emmener à la scierie. Je veux souligner la combinaison de produits que nous avons. Dans la région forestière des Grands Lacs et du Saint-Laurent, environ 5 p. 100 des grumes, et 20 p. 100 de la valeur de la récolte, sont des grumes pour placage, 25 p. 100 des grumes sont destinées aux scieries, et nous avons environ 70 p. 100 de ce que nous appelons de la fibre ligneuse, c'est-à-dire du bois utilisé pour la production de pâtes, le chauffage ou autre chose.

Le plus grand défi du secteur, actuellement, consiste à trouver des marchés pour ce type de bois. Dans la région, parce que nous avons surtout des forêts mixtes de feuillus, nous pouvons encore vendre des grumes de sciage, mais les principes de la gestion durable des forêts nous imposent de trouver des marchés pour cette fibre afin de pouvoir gérer durablement nos forêts. Si nous ne pouvons pas trouver de marché pour ce produit, nous retournerons aux pratiques nuisibles qui étaient en vigueur il y a des années et qui portent surtout sur les qualités supérieures. Nous perdrons nos ressources génétiques et la qualité de la forêt pour les générations futures, ce qui créera des problèmes.

Parce que nous sommes dans un milieu habité, il y a des frictions entre les propriétaires fonciers et les gouvernements fédéral et, surtout, provincial. Nombre d'organisations de propriétaires n'aiment pas voir le gouvernement s'ingérer dans ce qu'elles font. Il y a eu certains problèmes, surtout pour le gouvernement provincial, mais nous n'en avons pas souffert. Nous collaborons encore avec certains membres d'associations de propriétaires. Nous sommes perçus un peu comme un intermédiaire impartial, alors ils acceptent de nous parler et de collaborer avec nous, mais pas toujours.

Un autre grand défi est lié aux pratiques de gestion forestière inadéquates. Vous ne voulez pas vendre de grumes à ce type; c'est pour cette raison que j'ai rayé son numéro de téléphone. Nous avons fait beaucoup de travail au fil des ans en parlant avec les propriétaires. Il m'est arrivé de voir un propriétaire en train d'écrire le numéro de téléphone de ce type sur un bout de papier, alors je me suis dit qu'à partir de ce moment, j'allais carrément le rayer.

Nous expliquons aux propriétaires les principes de la gestion forestière. Une des pires erreurs que l'on puisse commettre est de commencer la récolte sans bien comprendre ce qu'il faut faire pour bien gérer la terre à bois.

Les espèces envahissantes sont un sérieux problème et constituent une menace très importante dans la région. Le longicorne asiatique, qui n'est pas encore arrivé ici, est peut-être une des histoires qui auront une fin heureuse au Canada, à l'heure actuelle. Nous avons peut-être réussi à exterminer cet insecte nuisible dans la région de Toronto.

Avant de revenir travailler dans la forêt modèle, j'ai passé deux ans à Environnement Canada, au service de la politique sur les espèces envahissantes. Je connais assez bien ces espèces et le danger qu'elles représentent. Le gouvernement du Canada fait de l'excellent travail pour empêcher ces bestioles d'arriver jusqu'ici.

Je vais parler de quelques solutions. Depuis 10 ans, la certification forestière est l'un de nos projets de prestige. La certification forestière repose sur les principes de la responsabilité économique, environnementale et sociale appliqués à la gestion de la ressource, à la gestion forestière durable. Les pratiques de gestion forestière sont vérifiées par une tierce partie et, selon moi, c'est la seule façon de procéder pour nos terres privées.

La certification permet de commercialiser la fibre. Depuis 10 ans — et surtout depuis trois ans —, nous avons commercialisé plus de six millions de pieds-planche de bois géré de façon durable. Nous nous sommes adressés, par l'entremise de ce projet de certification, à un nouveau type de propriétaires terriens. Nombre d'entre eux craignaient les programmes gouvernementaux et refusaient d'y participer. Toutefois, parce que la certification fournit une assurance de saine gestion forestière, ils peuvent maintenant participer à un programme dont ils sont fiers.

Voici quelques résultats. Vous voyez ici le chalet de la forêt de Limerick. Les grumes sont certifiées provenir de la forêt locale. La certification forestière sert à commercialiser la fibre. Il y a d'excellentes occasions tant dans l'Est ontarien que dans le reste du Canada.

Nous avons aussi établi un programme de certification de la chaîne de traçabilité pour le sirop d'érable. J'en ai apporté 12 bouteilles, prenez-les, elles sont sur le banc. Ce produit vient d'une érablière de l'Est ontarien qui a été la première productrice de sirop de toute l'Amérique du Nord à obtenir la certification de la chaîne de traçabilité forestière. La certification ne s'applique pas au sirop, elle s'applique aux pratiques de gestion forestière utilisées pour produire le sirop.

Ici, vous voyez quelques-uns des nombreux partenaires de notre programme de certification. Nous sommes une organisation qui s'appuie fermement sur les partenariats.

Je vais maintenant parler du bois utilisé comme source d'énergie, parce qu'il ouvre des perspectives très intéressantes non seulement ici, dans le Sud de l'Ontario, mais aussi dans tout le pays. La Forêt modèle de l'Est de l'Ontario collabore avec des entreprises comme la Ontario Power Generation à des activités qui doivent permettre de faciliter la transition et d'abandonner le charbon d'ici 2014. Ces entreprises ont adopté avec enthousiasme l'idée de la certification de traçabilité comme mécanisme pour se procurer de la fibre. Il y a des possibilités intéressantes. C'est un peu une transition également pour le secteur agricole, parce qu'il serait tout à fait possible de cultiver dans le Sud de l'Ontario des peupliers et des saules hybrides qui pourront servir dans des projets à valeur ajoutée et pour produire de l'énergie.

Cette bestiole d'un vert éclatant, c'est l'agrile du frêne. Nous en avons à Ottawa. C'est un insecte très nuisible. Le frêne n'est pas une espèce forestière importante pour nous, sur le plan économique, mais c'est un élément important de nos forêts et il ne semble pas, pour l'instant, que nous puissions stopper l'infestation. Je sais que les scientifiques cherchent des solutions, mais il faudra du temps. Le secret, c'est d'empêcher ces insectes nuisibles d'entrer dans notre pays. Sur cette diapositive, vous voyez l'origine de l'invasion. On l'a trouvé à côté du Lone Star, juste à l'est d'ici, il y a quelques années.

Le Regional Forest Health Network est un groupe que la forêt modèle facilite. Il est composé de municipalités, de Premières nations et d'organismes d'exécution. Son rôle consiste à prendre les travaux scientifiques et les cadres stratégiques et à les traduire concrètement. Cela est souvent très difficile pour les organisations. Parfois, il existe un décalage entre les sciences, la stratégie et l'application concrète.

L'Ontario East Wood Centre est un centre de commercialisation de produits à valeur ajoutée. Je vais faire circuler cela, si nous avons un peu de temps. Ce sont des granulés de bois exempts d'hémicellulose. C'est un produit à valeur ajoutée, et nous travaillons en partenariat avec une université à Syracuse. Nous essayons de faciliter la création d'une usine pilote qui utilisera un processus d'extraction de l'hémicellulose, une composante du bois. Cette hémicellulose peut être distillée et servir dans la fabrication de produits chimiques précieux, à valeur ajoutée. Ces granulés sont un bon combustible, mais ils sont en outre hydrophobes et ne produisent pratiquement pas de cendres. Dans le cas des granulés, la cendre, c'est important.

Nous menons actuellement un autre projet dans le domaine des biens et services environnementaux. Nous étudions des mécanismes pour mettre en valeur certains produits non traditionnels qui viennent de la forêt, par exemple la faune et l'eau. Comment peut-on dédommager un propriétaire qui produit de l'air pur, de l'eau pure ou des habitats fauniques? Il reste encore beaucoup à faire, mais nous progressons.

J'ai deux ou trois observations à formuler. La participation communautaire et les programmes comme le PCF offrent de belles occasions de mettre en œuvre les politiques et la recherche scientifique. C'est ce que nous faisons depuis 18 ans. Nous sommes très heureux qu'il existe un programme comme le PCF.

Les marchés pour la fibre de bois sont essentiels à la viabilité de nos forêts et du secteur forestier. Je le répète, si nous ne pouvons trouver de marché pour notre fibre de bois, la viabilité de nos forêts sera menacée.

L'autre aspect, c'est que tout est lié. La collaboration multisectorielle est essentielle. J'aimerais qu'il y ait plus de mouvement horizontal au sein des gouvernements, pour que l'agriculture et le SCF collaborent à des projets auxquels la collectivité participe directement. C'est une belle occasion, et je pense que c'est un secteur où nous pouvons réaliser des progrès.

Tous les partenaires, ici, veulent empêcher ce que vous voyez sur ma dernière diapositive.

Le président : Merci, monsieur Richardson.

[Français]

Colette Robertson, présidente, Forêt modèle du Lac-Saint-Jean : Monsieur le président, je vous remercie de nous recevoir. Ma présentation sera en français, mais vous trouverez la version en anglais dans la pochette que vous avez reçue.

D'entrée de jeux, je dirais que les forêts/bleuets est une expertise que nous avons chez nous. Nul besoin d'en discuter : tout le monde sait que les meilleurs bleuets sont au Lac-Saint-Jean. Il faut constater qu'il est important et heureux que l'expertise soit exportée, car c'est le fondement même des forêts modèles que de faire de l'expérimentation et de pouvoir l'exporter afin que d'autres puissent l'appliquer et la développer chez eux.

Qui sommes-nous? Nous sommes un partenariat de recherche et d'expérimentation qui regroupe des communautés forestières. On sait qu'au Lac-Saint-Jean, nos communautés dépendent de la forêt. Cela regroupe, entre autres, un partenariat entre le Conseil des Montagnais du Lac-Saint-Jean, qui est une Première nation des Innus du Québec, et les deux municipalités régionales de comtés, qui regroupent des villes environnantes.

Ce qui fait la particularité de ce partenariat, c'est que c'est la première fois que les municipalités et la Première nation des Pekuakamiulnuatsh travaillent ensemble.

Donc, nous en sommes à définir notre vision. Il faut jumeler les forces et les expertises afin de développer des outils, des connaissances, des compétences en gestion intégrée, des ressources du milieu forestier.

Quand on parle, chez nous, d'expertise collective, c'est surtout que nous avons la section Forêt modèle, qui est une petite équipe; on est avec le Programme des collectivités forestières depuis 2007. Nous sommes trois ressources permanentes à temps plein, dont la directrice générale, un adjoint administratif et un agent de communication. Et tout le personnel qui travaille sur les projets sont pris à même l'expertise collective. Ce sont donc tous les organismes du territoire.

Nous nous sommes dit que les gens ont des expertises sur l'ensemble de notre territoire pour créer cette synergie. Nous n'avons qu'à les mettre en commun afin de la faire valoir pour aller un peu plus loin. Ce sont donc les organismes qui partagent l'expertise sur notre territoire.

Quand on commence à mettre en place une organisation comme Forêt modèle et qu'on dépend exclusivement des programmes de formation, on ne veut pas devoir mettre tout le personnel à pied lorsque le programme tombe. Donc, en utilisant l'expertise du territoire au niveau des ressources qui y travaillent, cela nous permet de continuer les partenariats qui se créent dans le cadre de ce programme.

De quelles ressources disposons-nous? Je pense qu'il est important de montrer le levier financier qui vient avec le programme. Vous voyez, en vert forêt, la contribution de RNCan, et la participation des communautés forestières, donc, ce que nos communautés ont mis en commun pour réussir ce partenariat.

Il y a aussi d'autres partenaires qui contribuent financièrement. Ce qui est en rouge, ce sont les revenus de certains projets. Par exemple, entre autres, en 2008-2009, on a fait une expérience avec une machine pour la plantation, et les revenus ont été attribués au projet, parce qu'on travaillait avec un entrepreneur forestier dans cette partie.

Depuis juillet 2007, on a 34 projets de recherche et d'expérimentation. Je vais vous faire part de quelques-uns des résultats qui en sont ressortis. On a quatre projets à fort potentiel de développement économique; on a neuf outils pour le renforcement des connaissances et des compétences, dont six sont dans les nouveaux secteurs d'activité, dont la biomasse ou les sites dégradés; et on en a cinq qui sont au niveau de l'éducation ou de la sensibilisation. On a plus de 50 publications à notre actif et on participe aussi à de nombreux événements locaux, nationaux et internationaux.

Un des projets sur lequel on a travaillé, ce sont les champignons forestiers.

Dans votre pochette, vous trouverez le guide des champignons comestibles du Lac-Saint-Jean dont on a fait l'inventaire du potentiel. On est en train de développer des modèles de commercialisation collective de produits transformés. Dans les paquets que j'ai apportés, il y a des chanterelles en tube et des champignons séchés. On peut les servir comme accompagnement, soit avec des viandes ou en sauce, on peut aussi faire une crème de champignon. Non seulement vous pouvez voir ces champignons dans notre guide, mais vous pouvez aussi y goûter. Je vous laisse les découvrir.

Le sénateur Robichaud : Est-ce que ça se mange avec du sirop d'érable?

Mme Robertson : C'est autre chose. Vous pouvez toujours les essayer avec du sirop d'érable, mais pas tout seul. Dans la pochette, il y a aussi le rapport final relatif au projet de champignons qui n'a pas encore été publié. Ce projet représente un investissement de la forêt modèle d'environ 165 000 $ et c'est un projet qui comprend trois phases.

Il y l'émergence d'une nouvelle activité économique au sein des communautés, qui améliore les connaissances et l'engouement de la population. Il y a une forte demande et il y a le fait que beaucoup de gens s'intéressent à la cueillette des champignons.

Il y a eu beaucoup de formation des cueilleurs et d'adhésion des intervenants. Il y a eu de l'enrichissement sur les plans de l'offre et de la diversification des produits du terroir. Ces résultats ont mené au développement d'une politique d'aménagement du territoire qui vise à favoriser l'accès aux produits forestiers non ligneux.

Un autre projet qui nous tient à cœur est la production de sirop de bouleau. Nous en avons fait l'expérimentation il y a deux ans et l'an passé. On a commencé par la sélection des bétulaies en faisant l'entaille et la récolte. Ensuite, on a fait la transformation du sirop de bouleau.

J'en ai apporté et il y en a assez pour que tout le monde puisse y goûter. Ce qui est intéressant avec le sirop de bouleau, c'est qu'on peut le comparer avec le sirop d'érable et la mélasse. Ce sont quand même des produits qui se ressemblent mais qui ont chacun leurs particularités. Je dirais que le sirop de bouleau se situe entre le sirop d'érable et la mélasse. Pour vous permettre de bien déguster votre sirop, je vous ai apporté de la bannick, c'est un pain indien. Quand je suis partie ce matin, il était chaud, mais il est quand même encore très frais et très bon.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Nous n'avons encore rien mangé.

[Français]

Le président : On n'a pas encore soupé, ça pourrait servir d'entrée.

Mme Robertson : J'ai aussi apporté une bouteille de bière de bouleau. Elle est vide parce que j'avais peur qu'on me la saisisse à l'entrée de l'édifice. C'est fait par un entrepreneur du coin qui opère une micro-brasserie. Il a fait des expériences avec de la bière de bouleau. Évidemment, ce n'est pas une bière qui se conserve longtemps parce qu'elle ne contient pas d'agents de conservation, mais c'est la bière qui a fait fureur et qui a été produite par la microbrasserie la Chouape pour l'Ashuapmushuan. Pour l'instant, la bière de bouleau est plus une bière de saison parce qu'elle en est encore à l'étape expérimentale.

Donc vous voyez la bouteille. Et si jamais vous voulez goûter à la bière de sirop de bouleau, vous devez venir nous visiter. Il y a eu les dégustations et la diffusion des résultats qui ont nécessité des investissements de forêt modèle de 145 000 $.

Évidemment, il y a eu la diversification économique à travers l'aménagement durable des forêts, donc un accroissement des connaissances des nouveaux créneaux qui amènent des produits du terroir. Il y a également eu des stimulations des entreprises régionales au niveau provincial. Nous avons eu, entre autres, la visite de gens de la Beauce, du bas Saint- Laurent, de Lanaudière, et des régions du Québec qui s'intéressent à ces produits de transformation, particulièrement le bouleau, et qui veulent récolter la sève et n'avoir qu'un seul endroit où faire la transformation. Mais ces projets en sont encore à l'étape de l'expérimentation.

Un autre projet dont je veux parler, c'est celui de la chasse à l'orignal, qui s'est fait en deux phases. La première, c'était la délimitation des zones de territoire pour améliorer la gestion du cheptel, du troupeau d'orignaux. La deuxième, c'était le projet pilote de chasse à l'orignal avec un guide autochtone dans la réserve faunique des Ashuapmushuam, dans les aires de trappe utilisées par les Autochtones.

C'est un investissement de 48 000 $ dont les résultats ont été très concluants. Tous les chasseurs qu'on a reçus dans ce projet pilote ont vu des orignaux. Ils ne les ont pas tous tués car ce ne sont pas tous de bons chasseurs, mais ils en ont vu. Ils vont s'améliorer et ensuite ils voudront revenir chasser dans la région. Dans le fond, c'est bien qu'ils ne soient pas tous bons chasseurs parce que ça protège le cheptel.

En ce qui concerne les nouveaux produits touristiques spécialisés, nous sommes actuellement en partenariat avec la Société des établissements plein-air du Québec et avec la Sépac, qui gère la plupart des réserves fauniques. Il y a les emplois de guide de chasse pour les Autochtones et l'accroissement des revenus de chasse et pour la Première nation innue de Mashteuiatsh, il y a une harmonisation des usages du milieu forestier par la promotion des échanges culturels avec les Premières nations.

Voilà les trois projets dont je voulais vous parler qui concernent la forêt modèle du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Sur le plan international, on travaille aussi en partenariat avec le Cameroun. Nous avons organisé des ateliers avec les gens du Cameroun sur les besoins de formation sur les résidus du bois pour trouver une valeur ajoutée aux produits forestiers non ligneux. Actuellement, le Réseau africain des forêts modèles est sur le point de développer les forêts modèles dans le bassin du Congo.

Les Africains et le Réseau africain des forêts modèles ont déjà conclu une entente de contribution qui leur permettra d'opérer. Ce qu'on a fait concrètement avec ces gens, c'est un projet de stylo. Ils voulaient utiliser certains résidus du bois. J'ai ici un stylo ici confectionné en padok. Dans le partenariat, on a voulu démontrer qu'il est possible de fabriquer des stylos hybrides avec un bois du Cameroun et un bois du Québec. Il est fait d'érable et de paléloba. Là-bas les gens travaillent sur ce projet en créant des micro-entreprises. Actuellement, on est encore à élaborer le plan d'affaires et on en est à l'évaluation sur la chaîne des valeurs que peuvent représenter ces projets.

Nous visons le développement de nos communautés forestières à travers l'aménagement durable du milieu forestier et ce, dans l'optique de continuer à vivre de la forêt.

On parlait tantôt de formation et de sensibilisation auprès des jeunes pour choisir les métiers de la forêt. Chez nous, on a lancé la semaine dernière un kiosque qui s'appelle Les Accros de la forêt. C'est un kiosque multi-sensoriel qui permet aux jeunes de goûter et de toucher les métiers de la forêt à un moment où ils doivent faire leur choix de carrière.

Cela peut leur permettre de s'intéresser aux métiers de la forêt. La façon dont le kiosque fonctionne, c'est comme un genre de rencontre d'Alcooliques anonymes, dans laquelle chacun déclare sa dépendance à la forêt. Les gens déclarent qu'ils sont fiers d'en être dépendants parce qu'ils font partie de communautés qui dépendent de la forêt.

Ma conclusion par rapport à ma présentation reflète bien ce qu'on retrouve dans les forêts modèles. C'est que parfois tout seul on va plus vite, mais ensemble on va beaucoup plus loin.

Le sénateur Robichaud : Vous parlez de quelques projets que vous menez présentement. Mais quelles sont les difficultés que vous rencontrez pour la mise en marché de ces produits? Vous avez des champignons, vous avez de l'eau de bouleau et du sirop de bouleau.

Mais pour que vos produits puissent se retrouver sur les tablettes des marchés, vous devez quand même répondre à certaines conditions sanitaires, n'est-ce pas? Est-ce que cela vous cause des problèmes, de passer cette étape?

Mme Robertson : Particulièrement au niveau des champignons, ce qui cause le problème, c'est plutôt le réseau de distribution. Ce n'est pas comme quand on va aux bleuets, on les ramasse et il y a un endroit où les gens peuvent vendre et acheter. Au niveau du marché des champignons, on n'a pas ce réseau qui est établi. C'est là que Forêt modèle intervient, pour voir comment le développer. Actuellement, il y a toute la connaissance, beaucoup de gens qui ont un intérêt viennent faire les formations parce que c'est important de faire les bons choix pour la cueillette des champignons. La dernière année, ils ont créé des places où on pouvait apporter les champignons, en vendre des frais et les transformer pour les faire sécher. Donc on est dans l'expérimentation; on pourra ensuite aller sur des marchés un peu plus régionaux ou plus loin que juste le marché local.

Actuellement, pour être capable de bien expérimenter sur cette question ou pour la développer, c'est plus au niveau du marché local. On définit des heures où on peut ramasser les champignons à un endroit, pour être capable de développer le réseau de distribution.

Après cela, quand on va avoir vraiment toutes les bonnes notions concernant ces produits, il faudra faire un plan d'affaires, qui va nous permettre d'aller plus loin dans le développement de marché et de ce produit, pour que ce soit une activité économique intéressante.

Le sénateur Robichaud : Cela fait quelques témoins qui nous parlent de l'eau de bouleau. On nous disait qu'on l'importe actuellement de la Suisse. Mais est-ce que nous en sommes à une étape où on pourrait mettre l'eau de bouleau en vente ici au pays?

Mme Robertson : C'est le même problème qu'on rencontre. Quand on a identifié les zones où il y avait un beau potentiel de bouleau qu'on pouvait récolter — c'est beaucoup de travail d'aller récolter l'eau de bouleau. C'est ce qui fait que c'est peut-être un peu moins rentable lorsqu'on veut développer cet aspect. A un moment donné, nous avons organisé des portes ouvertes pour montrer aux gens comment on la transformait et ce qu'on récoltait. Ce que les gens nous disaient, c'est qu'il y a beaucoup de personnes qui ont leur petit lot de bois et qui ont des talles de bouleau; ils récoltent l'eau de bouleau et ils pourraient alimenter sans que chacun puisse en faire la transformation. C'est une étape qui s'est avérée intéressante dans les conclusions de notre expérimentation. On pourrait peut-être le faire de la même façon que les gens vont ramasser le lait, juste collecter l'eau de bouleau là où les gens la récolte et avoir un endroit où on peut faire la transformation.

Ce sont ces idées qui pourraient être mises à contribution et qui pourraient avoir un avenir un peu plus prometteur que de seulement aller recueillir l'eau de bouleau. Il y a aussi une période qu'on ne peut pas dépasser, c'est un peu comme pour l'eau d'érable — c'est un peu après — donc il faut être vraiment vigilant par rapport à cela. Il y avait un intérêt pour les gens d'alimenter une place où ils pourraient apporter l'eau de bouleau parce qu'ils n'en ont pas en assez grande quantité pour pouvoir le transformer. Ce sont des choses qu'on regarde actuellement.

Le sénateur Robichaud : C'est un peu comme au Nouveau-Brunswick, on a une sorte de coopérative où les producteurs de bleuets se rencontrent et font la mise en marché en commun. On entend dire par chez nous que cela prend juste deux ou trois bleuets du Lac-Saint-Jean pour faire une tarte, j'en doute!

Mme Robertson : C'est parce que pour le reste, ils mettent de la gelée!

Le sénateur Robichaud : J'aimerais voir la tarte!

Monsieur Richardson, vous avez fait circuler un sac de hémicellulose. Parlez-moi de cela; ce ne sont pas vraiment des granules de bois, comme on les trouve sur le marché actuellement, n'est-ce pas?

[Traduction]

M. Richardson : Non. Les granulés que vous pouvez trouver sur le marché sont différents de ceux-ci. Leur composition est identique, mais un produit chimique en a été extrait. L'hémicellulose est un des glucides qui entrent dans la composition du bois. Lorsque vous l'extrayez, ces granulés vous donnent un peu plus de chaleur, moins de poussière ou de cendre et ils deviennent hydrophobes, alors ils ne peuvent pas se dissoudre dans l'eau. C'est excellent, de ce point de vue, pour ajouter de la valeur, parce que ces produits chimiques peuvent être transformés et donner d'autres produits qui sont vendus pour compenser les coûts de production.

En Ontario, nous n'avons pas d'usine de granulés, à ce que je sache. Il y en aura un jour, mais les conditions économiques ne sont pas encore tout à fait adéquates. Il se pourrait qu'avec l'extraction de produits chimiques et la vente des produits secondaires qu'on en obtiendra, une usine de granulés s'avère rentable.

Le sénateur Robichaud : Que fait-on des produits chimiques que l'on extrait? Ils sont perdus?

M. Richardson : Non, ils sont distillés pour fabriquer divers autres produits. Dans certains cas, il y a plus de valeur dans les produits chimiques extraits que dans ce qui nous reste ici.

Je peux vous envoyer le rapport rédigé aux États-Unis sur la valeur qu'on peut en tirer et sur l'utilisation des produits chimiques. C'est un mot long comme ça, mais il est prometteur, sur le plan économique. À l'heure actuelle, je sais que le Canada est un importateur net de produits qui contiennent de l'hémicellulose.

Le président : Si vous voulez communiquer cette information au comité par l'entremise de la greffière, nous vous en serions reconnaissants, monsieur Richardson.

Le sénateur Mercer : Merci à tous deux de vos exposés. Les nouvelles sont bonnes, pas seulement au sujet de ce qui se fait actuellement, mais aussi pour l'avenir.

Monsieur Richardson, vous avez parlé dans votre exposé du financement d'un programme fédéral à hauteur de 11,4 millions. Comment s'est faite la distribution? Vous avez dit que c'était sur plusieurs années.

M. Richardson : C'est le total cumulatif depuis 1992. Nous avons été l'un des premiers sites du Programme canadien de forêts modèles, alors nous avons reçu du financement du Programme de forêts modèles pendant 15 ans et nous en recevons maintenant du Programme des collectivités forestières, depuis trois ans. J'ai simplement fait le total.

Le sénateur Mercer : Est-ce que cela a augmenté avec les années?

M. Richardson : Non. De fait, le budget diminue. Nous avons commencé dans le cadre du Programme canadien de forêts modèles avec un budget d'environ un million de dollars par année, puis, pendant la phase deux, je crois que cela a été réduit de moitié. Je crois que ce financement s'est ensuite maintenu à ce niveau pendant toute la troisième phase du programme. Actuellement, comme les autres sites, nous recevons 325 000 $ par année. Cet argent, je le considère comme un fonds d'amorçage. Il aide à payer le personnel et à chauffer les locaux. Mme Lauzière en a parlé, et cela nous aide à promouvoir la forêt modèle et à maintenir les niveaux de programmes.

L'un de nos grands problèmes, actuellement, c'est qu'il y a des fonds et des programmes et que nous pouvons avoir accès à ce financement, mais il est accordé aux projets mêmes. Le défi, pour nous, consiste à trouver un financement de base qui nous permet de payer les salaires et les bureaux. Lorsque nous avons cela, nous pouvons commercialiser notre capacité et attirer des fonds d'autres sources pour exécuter les programmes.

Le sénateur Mercer : Madame Robertson, quand vous avez présenté vos projets vous avez mentionné le coût de tout cela. Pourriez-vous le ventiler? Je crois que vous avez essayé de le faire dans une des diapositives sur les sources de revenus. Vous avez parlé d'un certain nombre de projets, l'un de 165 000 $, un autre de 145 000, de 48 000, et cetera.

Quelle est votre source de financement? Est-ce que c'est la même que celle de M. Richardson et, si oui, est-ce qu'il s'agit entièrement de fonds fédéraux ou il y a aussi des fonds du Québec?

[Français]

Mme Robertson : Les fonds proviennent principalement du gouvernement provincial, par le biais du Programme des collectivités forestières. On parle d'un dollar pour un dollar. Pour chaque dollar investi nous devons trouver un dollar. Une partie vient du fonds provincial par le biais d'autres programmes. Certains fonds viennent directement des collectivités, mais sont comptabilisés dans les communautés forestières.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Alors, il n'y a pas du tout de fonds fédéraux.

[Français]

Mme Robertson : Oui, nous avons le programme des collectivités forestières. Pour chaque projet, la moitié de l'investissement vient du Programme des collectivités forestières et l'autre moitié vient des communautés forestières. Plus les communautés forestières contribuent, plus nous pouvons faire de projets.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Il semble que vous nous ayez tous deux parlé de l'élaboration de nouveaux produits, de la sève et de la bière de bouleau jusqu'aux nouveaux produits que M. Richardson nous a montrés. Toutefois, c'est la commercialisation qui nous intéresse; c'est l'étape où nous demandons aux gens d'être innovateurs, alors ils le sont. Ils proposent de nouveaux produits intéressants, qui pourraient se vendre quelque part.

Toutefois, nous n'appuyons pas les étapes suivantes, pour nous rendre jusqu'au marché. Les gouvernements n'offrent pas de programme pour faciliter cela; je ne me trompe pas?

[Français]

Mme Robertson : Les forêts modèles sont des projets d'expérimentation. À partir du moment où un produit ou un projet s'avère intéressant pour le développement, il prendra une voie différente qui s'apparente davantage à la notion de développement économique. On verra alors différents appuis pour amener la création d'un plan d'affaires.

Nous utilisons les fonds du Programme des collectivités forestières et des communautés forestières à l'étape d'expérimentation et de recherche. Nous vous montrons les projets qui ont une perspective intéressante de développement. Toutefois, il arrive que nous investissions dans des projets à potentiel restreint, que nous devons abandonner. Lorsque le potentiel d'un projet existe, nous considérons l'intervention possible d'organisations qui puissent le développer sur une base économique.

[Traduction]

M. Richardson : Vous avez raison : pour tout produit, qu'il s'agisse d'un produit forestier non ligneux, de bois de sciage ou de granulés, il est essentiel de développer un marché viable et solide pour que l'industrie prospère pendant les 15 prochaines années. Sinon, nous n'aurons que des industries très provisoires, et ce n'est pas ce que nous voulons.

Le président : Il nous reste seulement huit minutes.

Le sénateur Callbeck : Je veux poursuivre dans la même veine que le sénateur Mercer, au sujet du financement. Si j'ai bien compris, le Programme des collectivités forestières est un programme quinquennal. Les fonds viennent du gouvernement fédéral, et il y a 11 sites au Canada qui reçoivent chacun 325 000 $ par année. C'est bien cela? Vous saviez donc, en 2007, combien vous toucheriez par année pendant cinq ans, n'est-ce pas? Et qu'en est-il de la province; que fait la province?

M. Richardson : C'est une excellente question. La province, dans notre programme, a été très utile à la Forêt modèle de l'Est de l'Ontario au fil des ans. Nous en avons reçu par le passé un investissement considérable. Elle ne contribue plus autant que nous le souhaiterions actuellement, et sa participation présente des difficultés.

À l'heure actuelle, nous recevons une importante contribution en nature du gouvernement provincial, mais pas de financement, sauf aux termes de programmes spéciaux. La province n'a jamais beaucoup appuyé notre programme en termes de financement annuel. Elle l'a peut-être fait au début du Programme de forêts modèles, mais maintenant elle siège au sein de notre conseil d'administration, alors elle apporte une bonne contribution à notre programme.

Le sénateur Callbeck : Et qu'est-ce que vous pouvez nous dire des autres provinces?

M. Richardson : Rien du tout. Je ne peux pas vous en parler.

Le sénateur Callbeck : Vous étiez sans doute ici pendant la première partie de la réunion et vous m'avez entendue poser des questions au sujet du programme et s'il convenait de le maintenir ou de le modifier en 2012. Quelles sont les améliorations que vous souhaitez voir?

M. Richardson : On peut toujours bonifier le financement. Actuellement, nous avons un financement de base qui nous permet de maintenir nos niveaux de dotation et d'exécuter certains programmes.

Pour ce qui est des améliorations, le Programme des collectivités forestières pourrait être mieux harmonisé avec certains autres programmes gouvernementaux : Environnement Canada, Agriculture et Agroalimentaire Canada ainsi que Pêches et Océans, peut-être. Si ces ministères collaboraient au programme, cela nous aiderait énormément au niveau de l'exécution.

Je nous considère comme un vecteur pour les sciences et la politique; nous pouvons les répercuter au niveau de la base. Nous avons de nombreuses occasions d'agir aussi bien pour d'autres ministères que pour le SCF.

[Français]

Mme Robertson : La province nous appuie par des contributions financière dans le programme. Nous travaillons en partenariat avec deux municipalités régionales de comtés, qui ont une capacité per capita au moyen des impôts. Nous ne disposons pas d'un tel outil économique. Nous devons donc recourir à certains programmes pour obtenir le financement nécessaire à remplir notre quote-part pour le milieu. Ces collaborateurs contribuent aux résultats de nos recherches et souvent participent à la réalisation de nos travaux.

Outre l'amélioration, nous devons maintenir le programme pour nous assurer de poursuivre la recherche et le développement. Sans ce financement minimum, le travail ne peut se faire. Nous n'avons pas la capacité de trouver ce financement ailleurs. Tout bon plan d'affaires et toute bonne entreprise doit commencer avec un produit développé.

Si nous voulons rassembler les utilisateurs de la forêt, il faut mettre du temps et de l'énergie pour assurer une bonne gouvernance. Sans ce programme, je ne suis pas certaines que nous aurions pu nous asseoir avec les deux MRC et la Première nation. Ce programme a donc eu un effet de levier pour l'échange. La communication n'est pas toujours évidente. Se parler ne veut pas dire se comprendre. La synergie entre les collaborateurs et le compromis sont nécessaires. Ce programme nous a permis de réaliser cet objectif. L'échéancier de cinq ans prévu dans la tranche du programme, qui nous concerne, est une période bien courte.

Évidemment, nous pensons avoir des résultats pouvant permettre à la région de ne pas voir le bois que comme la bille de bois à exploiter, mais de le voir aussi avec toutes les richesses que le milieu forestier peut contenir. C'est cette mentalité que nous sommes en train de changer et nous en sommes encore à nos débuts dans ce changement.

[Traduction]

Le sénateur Callbeck : Il est important d'avoir ce financement de base.

Le sénateur Mahovlich : Monsieur Richardson, vous avez parlé d'un autre type d'insecte. Il y a 50 ans, nous avons été victimes de la maladie hollandaise de l'orme, transmise par un insecte venu des Pays-Bas, je crois. C'est pour cette raison que cela s'appelle la maladie hollandaise de l'orme. Est-ce que l'orme s'est rétabli depuis, dans l'Est de l'Ontario?

M. Richardson : Nous avons encore des ormes, mais l'orme ne s'est pas rétabli. Deux insectes propagent la maladie hollandaise de l'orme. L'un est un insecte envahissant. Il est arrivé, je crois, dans du matériel de pépinière, au début du siècle dernier. L'orme ne s'est pas rétabli. Nous en avons encore et nous pourrions le promouvoir, mais il n'y a pas de garantie.

Il s'est passé quelque chose de curieux après la tempête de verglas de 1998. Nombre des ormes de l'Est ontarien ont commencé à disparaître. Je ne sais pas si c'est parce qu'il y avait une souche plus virulente de la maladie ou parce que la population de scolytes était plus importante. Nombre de nos grands ormes, particulièrement sur la route 15, entre ici et Kingston, ont disparu.

Le sénateur Mahovlich : Madame Robertson, je regarde votre livre sur les champignons du Lac-Saint-Jean. Combien de types de champignons différents avez-vous?

[Français]

Mme Robertson : Je n'ai pas lu tout le livre.

[Traduction]

Le sénateur Mahovlich : Est-ce que les champignons gagnent en popularité au Canada, deviennent-ils aussi populaires qu'en Europe? Quand mon père voulait me punir, il m'amenait cueillir des champignons. C'était sa punition. En Europe, les champignons sont très prisés, dans les omelettes par exemple. Est-ce que l'on commence à les utiliser plus fréquemment ici, au Canada?

[Français]

Mme Robertson : Oui, je pense que cela devient beaucoup plus populaire. En fait, il y a aussi des variétés de champignons qui dépendent du type de forêts. L'inventaire nous a permis de voir les différentes variétés et cela dépend de beaucoup de choses. Nous avons constaté aussi que beaucoup de baby-boomers, qui sont maintenant à leur retraite et très en forme, sont des gens très adeptes de la collecte des champignons. Il y a un engouement certain chez nous qu'il n'y avait pas auparavant. C'est donc possible, avec le dynamisme de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, que cela devienne plus populaire qu'en Europe.

[Traduction]

Le président : Merci beaucoup.

Notre séance tire à sa fin, mais nous ne pouvons pas encore vous inviter à prendre une bière de bouleau ou de bleuet ni même à goûter des champignons assaisonnés au sirop de bouleau ou au sirop d'érable. C'est vrai, monsieur Richardson, j'ai mis un granulé dans mon verre d'eau et je suis convaincu qu'il contient plus de BTU, de British Thermal Units, que le granulé traditionnel.

Sur ce, nous vous remercions infiniment de l'information que vous nous avez communiquée.

[Français]

Merci beaucoup. Les bleuets du Lac-Saint-Jean sont sans doute, pour les gens du Madawaska, un très bon produit.

(La séance est levée.)


Haut de page