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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 4 - Témoignages du 15 avril 2010


OTTAWA, le jeudi 15 avril 2010

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui, à 10 h 30, pour étudier la mesure dans laquelle les Canadiens recourent à des comptes d'épargne libre d'impôt et à des régimes enregistrés d'épargne-retraite.

Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Comme nous avons le quorum et qu'il est passé 10 h 30, nous allons débuter.

[Français]

Ce matin, nous continuons notre enquête sur les systèmes de pension au Canada. Les piliers du système de pension canadien sont les suivants : la sécurité de la vieillesse, les pensions publiques et les pensions privées, et l'épargne personnelle.

Nous nous concentrerons sur les incitations fiscales fournies dans le cadre de l'épargne personnelle désignée pour la retraite.

[Traduction]

Conformément à notre ordre de renvoi, nous allons examiner dans quelle mesure les Canadiens ont recours aux Comptes d'épargne libres d'impôt et aux Régimes enregistrés d'épargne-retraite, ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour accroître l'utilisation de ces instruments d'épargne, ainsi que l'incidence fiscale de l'augmentation de leur utilisation et les façons d'assurer la protection des capitaux versés dans ces instruments.

C'est avec plaisir que nous accueillons aujourd'hui M. Jamie Golombek, directeur gestionnaire, Planification fiscale et successorale, pour Gestion privée du patrimoine CIBC. Il témoignera directement de Saskatoon grâce au miracle de la vidéoconférence, une technologie qui s'est bien améliorée au fil des ans. Bienvenue et merci d'être des nôtres.

Nous accueillons également le président de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, M. Frank Swedlove, qui fera une déclaration préliminaire; M. Rick Rausch, vice-président principal, Retraite et investissement individuel, La Great-West compagnie d'assurance-vie; M. Frank Laferriere, directeur des opérations, Placements Manuvie assurances Inc.; et M. Kevin Strain, vice-président principal, Assurances et placements individuels, Financière Sun Life.

Merci à vous tous, messieurs, pour votre participation. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de venir nous aider dans la réalisation de notre étude. Nous allons d'abord écouter les exposés de nos deux groupes de témoins après quoi, si les choses vont rondement, ils pourront répondre aux questions des sénateurs. Monsieur Golombek, nous vous écoutons.

Jamie Golombek, directeur gestionnaire, Planification fiscale et successorale, Gestion privée du patrimoine CIBC : Je vous remercie tous de m'avoir permis de comparaître devant votre estimé comité ce matin pour traiter de l'important sujet de l'épargne-retraite. Je commencerai par vous donner un aperçu de mes antécédents avant d'aborder le sujet à l'étude.

Comme il a été dit, je m'appelle Jamie Golombek. Vous avez peut-être vu ce nom en tête de ma chronique hebdomadaire sur les questions fiscales qui paraît le samedi dans le National Post ainsi que dans divers autres journaux de Canwest, dont l'Ottawa Citizen. Mon vrai emploi, c'est celui d'administrateur délégué de la planification fiscale et successorale au Service de gestion privée du patrimoine de CIBC, à Toronto. Comme vous le savez sans doute, CIBC a beaucoup fait la promotion des comptes d'épargne libres d'impôt au moyen de campagnes dans les journaux, à la télévision et dans différents médias.

En tant que comptable et planificateur financier agréé, mon rôle à la CIBC consiste à fournir à nos clients, directement ou par l'entremise de conseillers financiers, les meilleurs conseils possible en matière de planification financière, fiscale et successorale ainsi que de planification de la retraite afin qu'ils puissent atteindre leurs objectifs et vivre confortablement tant maintenant qu'à leur retraite.

Une grande partie de mon travail consiste à donner de l'information financière, soit par l'entremise des médias, soit dans le cadre du cours sur les finances personnelles que je donne aux étudiants à la maîtrise en administration des affaires de la Schulich School of Business de l'Université York, à Toronto, ou soit au moyen des nombreux séminaires que j'anime au nom de la CIBC, d'un bout à l'autre du Canada. En fait, si je suis incapable d'être des vôtres à Ottawa aujourd'hui, c'est que je suis actuellement à Saskatoon où j'ai animé hier soir un séminaire pour plus d'une centaine de clients sur diverses questions fiscales. J'en animerai un autre cet après-midi pour des conseillers financiers de Saskatoon afin qu'ils puissent mieux informer leurs clients au sujet des stratégies liées à l'impôt et à l'épargne-retraite.

Au séminaire d'hier soir, j'ai passé pas mal de temps à rappeler aux personnes présentes les diverses options d'épargne- retraite qui s'offrent à elles, dont les régimes enregistrés d'épargne-retraite (REER) qui servent à mettre de l'argent de côté pour la retraite; les régimes enregistrés d'épargne-études (REEE) qui incitent les Canadiens à épargner pour l'éducation postsecondaire de leurs enfants; les régimes enregistrés d'épargne-invalidité (REEI) qui visent, en conjonction avec les généreux bons et subventions pour l'épargne-invalidité, à promouvoir l'épargne à long terme pour un être cher qui souffre d'une grave invalidité; sans oublier, bien sûr, le dernier-né des programmes canadiens, le compte d'épargne libre d'impôt, qui vise à promouvoir l'épargne pour à peu près tout.

Je crois savoir que le comité a déjà entendu le témoignage de plusieurs de mes estimés collègues du secteur qui vous ont communiqué diverses statistiques sur les économies que chacun des régimes permet de réaliser et le coût de ces mesures fiscales. Je m'emploierai donc, dans le peu de temps à ma disposition, à présenter au comité un certain nombre de mesures fédérales qui pourraient être prises pour accroître le recours aux REER et aux CELI.

Ces propositions et recommandations me viennent directement de simples contribuables qui réagissent à mes chroniques fiscales ou qui me posent des questions à l'occasion des séminaires que j'anime, aussi bien que des conseillers financiers avec lesquels je traite quotidiennement.

Je commencerai par quelques mesures visant à améliorer les REER. Nombre de ces mesures sont tirées du mémoire prébudgétaire de l'Institut des fonds d'investissement du Canada (IFIC), à la rédaction duquel j'ai participé en tant que dernier ex-président du Groupe de travail sur les questions fiscales.

Premièrement, on devrait modifier la Loi de l'impôt sur le revenu pour abaisser de 65 à 55 ans l'âge minimal pour le fractionnement du revenu de retraite avec un conjoint ou un partenaire dans le cadre d'un REER, conformément aux règles régissant les régimes de pension. Cette discrimination fondée sur l'âge et le genre de régime est à l'origine d'une forte perception d'iniquité chez bien des personnes âgées qui n'ont pas profité d'un régime parrainé par leur employeur et qui ont choisi une retraite anticipée.

Deuxièmement, comme vous le savez, en vertu des règles en vigueur, les REER doivent être convertis en rentes ou en Fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) à la fin de l'année où le rentier atteint l'âge de 71 ans. À partir de l'année suivante, il doit retirer un montant minimal du régime tous les ans. Le gouvernement devrait réduire les valeurs de retrait minimales afin de tenir compte du vieillissement de la population, de l'allongement de l'espérance de vie et du bas niveau des taux d'intérêt. Le dernier rajustement des taux de retrait minimal d'un FERR remonte à 1992. L'Institut C.D. Howe a souscrit à cette recommandation dans sa publication de 2008 intitulée A Better RRIF on Retirement : The case for Lower Minimum Withdrawals from Registered Retirement Income Funds.

Troisièmement, dans la même veine, le montant de revenu de pension de 2 000 $ devrait être accordé aux titulaires de FERR prenant une retraite anticipée, disons à l'âge de 55 ans, plutôt qu'à l'âge habituel de 65 ans, afin de mettre sur un même pied les titulaires de REER et de FERR à titre de bénéficiaires de rentes de régimes enregistrés de pension qui, s'ils optent pour une retraite anticipée avant l'âge de 65 ans, pourraient demander leur crédit pour revenu de pension immédiatement.

En outre, soulignons qu'il semble n'y avoir aucune raison logique — outre le coût, bien sûr — justifiant le fait que le montant de revenu de pension ne soit pas indexé à l'inflation comme le sont presque tous les autres crédits d'impôt non remboursables fédéraux.

Quatrièmement, d'autres témoins vous ont certes déjà parlé du montant maximal de cotisation à un REER non encore utilisé au Canada et du nombre de Canadiens qui sont loin d'avoir versé chaque année leur cotisation maximale, mais il y a toujours le problème des contribuables canadiens à revenu élevé qui sont incapables d'épargner suffisamment pour leur retraite en raison des limites actuelles des plafonds de cotisation à un REER. L'Institut C.D. Howe s'est penché également sur cette question récemment et a recommandé cette année que l'on relève le plafond de cotisation à un REER, le faisant passer de 18 à 34 p. 100 du revenu gagné, ainsi que le montant maximal en dollars de façon proportionnelle pour qu'il corresponde au montant de référence du régime de la fonction publique.

En ce qui concerne les CELI, il est évident que les contribuables canadiens connaissent bien cette formule, mais les statistiques révèlent qu'un seul Canadien sur trois a ouvert un tel compte. De plus, il semble qu'une bonne partie des fonds versés dans les CELI sont placés dans des titres à faible taux d'intérêt au lieu d'être investis à long terme.

Pourquoi? Je pense qu'il y a plusieurs raisons, mais la principale est sans doute que le contribuable moyen ignore peut- être encore qu'à l'instar des REER, un CELI peut être constitué de nombreux véhicules de placement, dont des actions, des obligations, et des fonds communs de placement et ne pas servir simplement de compte d'épargne. On peut sans doute blâmer partiellement son nom même, Compte d'épargne libre d'impôt, pour cette méprise.

Pour faire une utilisation efficace des CELI dans le cadre de leur régime de retraite, les contribuables canadiens doivent être mieux renseignés à propos de ces options de placement dans les CELI, qui pourraient mieux convenir à une stratégie d'épargne-retraite à long terme, plutôt qu'à un simple mode d'épargne à court terme pour les urgences.

Enfin, j'estime que lorsque les Canadiens auront compris pleinement la véritable utilité du CELI et la flexibilité qu'il procure, c'est-à-dire la possibilité qu'il offre de retirer des fonds et d'en verser de nouveau durant une année ultérieure, le CELI remplacera le REER comme mode d'épargne-retraite préféré d'une majorité de Canadiens.

La principale question que l'on me pose lors des séminaires vise à savoir si l'on devrait cotiser d'abord à un CELI ou à un REER. Si, sur le plan théorique, les deux formules sont conçues pour donner le même montant après impôt, cela n'est vrai que si le taux d'imposition de l'année où on verse la cotisation est le même que celui où on retire les fonds. Cependant, pour la plupart des contribuables canadiens, cela n'est tout simplement pas le cas.

Dans une recherche de l'Institut C.D. Howe effectuée récemment, M. Laurin, qui a comparu devant le comité le mois dernier, a traité du taux marginal d'imposition effectif, qui tient compte de l'effet de la récupération du Supplément de revenu garanti et de la Sécurité de la vieillesse, ou même de la réduction du crédit d'impôt pour l'âge, à mesure que le revenu augmente. L'auteur de cette recherche conclut que le taux marginal d'imposition effectif de la plupart des Canadiens est en fait plus élevé au moment de la retraite que lorsqu'ils travaillaient, ce qui nous amène à conclure de manière non nécessairement intuitive que les Canadiens devraient peut-être verser plus d'argent dans les CELI, plutôt que dans les REER. Ce message doit être communiqué aux Canadiens.

En conclusion, le gouvernement devrait soutenir l'épargne-retraite au moyen des CELI en relevant le plafond de cotisation annuelle à un CELI, au-delà de la formule d'indexation actuellement prévue par la loi, en fonction des dépenses budgétaires et en investissant dans un programme de sensibilisation global grâce auquel tous les contribuables seraient conscients de l'ensemble des options de placement dans un CELI qui s'offrent à eux.

Je vous remercie et c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Golombek. Je suis persuadé que l'on vous demandera si vous préconisez un plafond cumulatif des cotisations, plutôt qu'une limite annuelle pour les REER.

Nous y reviendrons. Je ne veux pas couper l'herbe sous le pied de mes collègues. Je vais d'ailleurs pouvoir vous les présenter, maintenant qu'ils sont tous arrivés. Ils sont nombreux à assister à la réunion d'aujourd'hui, ce qui témoigne bien de leur intérêt pour l'expertise de nos invités.

Permettez-moi de vous présenter d'abord et avant tout la vice-présidente du comité, le sénateur Hervieux-Payette, du Québec. À sa droite, il y a le sénateur Gerstein, de l'Ontario; le sénateur Mockler, du Nouveau-Brunswick; le sénateur Dickson, de la Nouvelle-Écosse; le sénateur Greene, de la Nouvelle-Écosse; et le sénateur Massicotte, du Québec. À partir de mon extrême gauche, je vous présente le sénateur Kochhar, de l'Ontario; le sénateur Moore, de la Nouvelle-Écosse; le sénateur Ringuette, du Nouveau-Brunswick; et le sénateur Harb, de l'Ontario. Je suis le sénateur Meighen et j'ai l'honneur d'assumer la présidence de ce comité.

Monsieur Swedlove, la parole est à vous. Nous allons écouter votre exposé, après quoi tous les témoins pourront répondre à nos questions.

Frank Swedlove, président, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes : Merci. Je suis très heureux de me présenter devant vous aujourd'hui au nom de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes (ACCAP).

L'ACCAP est une association à adhésion libre dont les membres représentent 99 p. 100 du marché canadien des assurances de personnes. Nos membres administrent plus des deux tiers des régimes de retraite au Canada, principalement des régimes à cotisations définies, et plus de 8,5 millions de dispositifs de retraite pour le compte de particuliers canadiens.

[Français]

L'industrie canadienne des assurances de personnes se réjouit de l'intérêt que le comité porte aux mécanismes de retraite et à la sécurité du revenu de retraite. Ces questions nous tiennent aussi très à cœur. Elles ont énormément d'importance pour nos 26 millions de clients qui comptent sur nous pour assurer leur sécurité financière au moyen des divers produits d'assurances de personnes et de revenu viager que nous offrons, comme des régimes de retraite, des contrats de rente, des REER et des FERR.

Le système de retraite du Canada est reconnu partout dans le monde comme étant parmi les meilleurs. Selon le publié récemment, seuls trois autres pays, soit l'Australie, les Pays-Bas et la Suède, ont des systèmes qui se comparent aux nôtres.

[Traduction]

Il existe toujours des écarts en matière d'épargne-retraite pour les travailleurs à revenu moyen, et des aménagements doivent être apportés au système de retraite privé et à d'autres mécanismes d'épargne afin de remédier aux insuffisances.

Le 31 mars, l'ACCAP a publié un énoncé de position sur l'épargne-retraite. Je crois que vous en avez d'ailleurs reçu un exemplaire. Ce document renferme un certain nombre de propositions, et je vous invite à en prendre connaissance. Je vais résumer certaines de nos recommandations qui sont pertinentes au mandat du comité.

Nous croyons qu'il est possible de rendre les REER plus souples afin de multiplier les possibilités d'épargne en vue de la retraite et de faciliter plus tard la gestion du revenu de retraite. Par exemple, si on faisait passer de 71 à 73 ans l'âge auquel les Canadiens doivent commencer à tirer un revenu de leurs REER, on permettrait à ceux qui sont encore sur le marché du travail de continuer d'épargner en vue de la retraite. Certains pays sont allés encore plus loin. Au Royaume- Uni, par exemple, on peut repousser le moment de toucher son revenu de retraite jusqu'à 75 ans.

Toujours au Royaume-Uni, on a institué un plafond de cotisation viager — pour faire suite à ce que le président vient tout juste de mentionner — au lieu d'un plafond de cotisation annuelle comme celui qui est imposé chez nous pour les REER. Adopter une mesure semblable ici donnerait une plus grande latitude aux personnes qui quittent le marché du travail, par exemple pour reprendre leurs études, ou dont le revenu fluctue considérablement au fil des ans.

Les cotisations aux REER et aux régimes de retraite devraient refléter la même définition de revenu gagné, ce qui élargirait l'assiette de revenu d'emploi actuellement utilisée pour les pensions de retraite. Le revenu gagné pourrait inclure les redevances et le revenu locatif, ainsi que les autres revenus d'un particulier tirés de son entreprise, de sa fonction ou de ses biens, et non seulement son salaire. Cette mesure créerait de nouvelles possibilités d'épargne, notamment pour les travailleurs indépendants. Les gouvernements devraient envisager d'élargir davantage cette assiette.

Les lois sur l'impôt et sur les retraites devraient être modifiées pour permettre l'adoption de régimes de retraite interentreprises à cotisations définies. Nous recommandons que tout employeur ayant 20 travailleurs ou plus soit tenu d'offrir un REER collectif, ou un régime de retraite interentreprises à cotisations définies ou un dispositif semblable. On assurerait ainsi l'accès à des régimes d'épargne économiquement efficients à quelque 80 p. 100 des travailleurs canadiens. Les normes d'emploi devraient faciliter l'adhésion automatique à des régimes de retraite au travail ainsi que l'augmentation automatique des cotisations salariales, avec droit de refus, pour inciter à des stratégies d'épargne judicieuses.

Pour bon nombre d'employeurs, les REER collectifs sont une solution de rechange efficace aux régimes de retraite professionnels. Cependant, les cotisations patronales aux REER collectifs peuvent être retirées en tout temps par les travailleurs. Les employeurs sont davantage enclins à offrir de tels régimes si les cotisations sont immobilisées, gage qu'elles serviront comme prévu à procurer un revenu de retraite. Nous recommandons que l'immobilisation des cotisations soit expressément exigée par la Loi sur l'impôt.

Enfin, nous recommandons de permettre l'application des droits inutilisés de cotisation au titre d'un REER à un régime de retraite à cotisation définie, afin de mieux cibler l'épargne en cause sur le revenu de retraite.

[Français]

Le compte d'épargne libre d'impôt, ou CELI, est un outil d'épargne souple offert aux Canadiens. Bien que le CELI ne vise pas spécifiquement l'épargne retraite, des sondages montrent que beaucoup de consommateurs l'utilisent à cette fin. Il existe un aspect des CELI qui pourrait être grandement amélioré de sorte à maximiser le revenu de retraite.

En vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, le CELI doit pouvoir être transféré sur demande d'un établissement financier à un autre. Mais cette transférabilité ne joue pas nécessairement en faveur des consommateurs. Par exemple, si une personne souhaitait appliquer ses droits de cotisation inutilisés à un CELI pour investir dans des produits à long terme, une société d'assurances pourrait lui garantir un revenu viager considérablement plus élevé que celui que permet une sortie en capital. En renoncent au droit de transférer le régime entre établissements financiers et au droit d'un survivant à tout paiement résiduel, l'intéressé pourrait voir ses prestations viagères garanties s'accroître jusqu'à 35 p. 100, ce qui est considérable.

[Traduction]

Les assureurs de personnes du Canada estiment que de telles rentes non rachetables devraient être permises, à la fois à titre de dispositif admissible et de placement admissible pour les CELI. Cette approche correspondrait aux règles applicables aux fonds enregistrés de revenu de retraite et donnerait aux consommateurs un moyen pouvant s'avérer précieux de maximiser leur revenu de retraite.

Ces actions mettent à la disposition des consommateurs des outils très utiles, mais les gouvernements pourraient améliorer la façon dont ils en font la promotion en mettant en relief l'importance de l'épargne-retraite, notamment auprès des jeunes Canadiens. Nous appuyons les objectifs du Groupe de travail sur la littéracie financière qui veut renforcer les compétences des Canadiens en matière de planification de leur retraite. Les gouvernements ont un important rôle de sensibilisation à jouer à cet égard.

L'industrie des assurances de personnes est d'avis que notre système d'épargne-retraite est bien structuré et qu'il jouit d'une réputation enviable sur la scène internationale. Nous devons toutefois trouver des mécanismes qui permettront à un plus grand nombre de Canadiens de profiter de ce qui est déjà en place. Les mesures que nous proposons — ouvrir le marché des REER et des CELI et rendre les régimes de retraite d'entreprise plus accessibles — constituent les meilleures façons d'atteindre ces objectifs.

Merci. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions.

Le président : Merci, monsieur Swedlove et monsieur Gollombek, pour avoir ciblé vos observations en fonction du mandat confié à notre comité par le Sénat. Nous sommes toujours reconnaissants à nos témoins de s'en tenir au sujet à l'étude.

Après ce bref commentaire, nous passons à la période de questions.

Le sénateur Massicotte : Nous essayons de déterminer si nous devrions formuler des recommandations à l'intention du gouvernement concernant ces régimes de retraite et quelle forme devraient prendre ces recommandations.

Certaines observations sont revenues très souvent dans vos déclarations et dans celles d'autres experts quant aux mesures à prendre — comment nous pourrions ajuster les REER ou les FERR pour que les investisseurs soient davantage incités à y placer leur argent. Il va de soi que toutes ces modifications entraîneront des coûts pour les contribuables, car la perception fiscale est reportée. Avant de demander aux contribuables de subventionner les épargnants dans une plus large mesure, j'aimerais mieux comprendre tous les tenants et aboutissants afin de déterminer si c'est vraiment la démarche qui s'impose.

Comme vous le savez sans doute, le ministre des Finances a publié un document de consultation. Statistique Canada a également produit des simulations de cheminements de vie. Nous avons ici une compilation des données qui, si j'ai bien compris, ont été recueillies. Je veux en vérifier l'authenticité, car elles vont nous permettre de déterminer s'il existe, ou non, un problème.

Vous parlez d'équité. Le fait qu'une conjointe ne puisse, dans certains cas, bénéficier d'un transfert constitue une iniquité. Oui, il existe des problèmes en matière d'équité. Mais voyons d'abord si les régimes d'épargne et de pension sont adéquats.

D'après ce qu'a laissé entendre le ministère des Finances, les gens qui gagnent moins de 125 000 $ par année, une fois à la retraite, tirent au moins 70 p. 100 de leur revenu de leurs REER, de leurs régimes de pension à prestations déterminées et de leurs économies. La maison n'est pas prise en compte dans le calcul. Ceux qui touchent plus de 125 000 $ par année — et je parle des Canadiens moyens — tirent au moins 50 p. 100 de leur revenu de ces mécanismes. Un témoin nous a dit, hier, qu'un taux de 50 p. 100 devrait être suffisant.

Par ailleurs, 70 p. 100 des personnes qui gagnent plus de 125 000 $ ne cotisent même pas le maximum à leurs REER. Les outils d'épargne existent, mais les gens ne s'en servent pas.

Vous avez abordé le thème de l'éducation, un point que je juge important. Or, si l'information recueillie est exacte, où se situe le problème? Il est question ici de moyennes, de projections. D'après ce que laissent entendre ces données, il y a des particuliers qui choisissent de ne pas mettre de l'argent de côté. La structure du système ou l'efficacité des régimes d'épargne n'a rien à voir avec la situation. Alors, où se situe le problème, si problème il y a? Et, le cas échéant, à quoi doit-on son existence?

M. Swedlove : Ce sujet suscite beaucoup de discussions. L'étude qu'a effectuée Jack Mintz pour le compte du gouvernement fédéral cerne très bien le problème.

Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration, et je suis certain que plusieurs personnes ont pris connaissance des conclusions du Melbourne Mercer Global Pension Index, le système canadien est bien conçu. Nous le croyons fermement. Il n'est pas nécessaire d'apporter des changements en profondeur à la structure du système. Il faut plutôt remédier aux insuffisances qui existent, en général chez les travailleurs à revenu moyen, au chapitre de l'accès à l'épargne.

Bon nombre de nos recommandations portent sur l'amélioration de l'accès aux régimes de retraite au travail, puisque c'est un endroit idéal pour encourager l'épargne chez les Canadiens, et l'assouplissement des règles qui régissent les REER — par exemple, pour les travailleurs indépendants, puisque l'application de la définition de revenu gagné ne fonctionne pas très bien dans leur cas.

Autre point : il faut tenir compte du fait que la situation a évolué, que les gens entrent sur le marché du travail à un âge plus avancé et qu'ils y restent plus longtemps. Voilà pourquoi nous proposons d'instaurer un plafond de cotisation viager et de faire passer de 71 à 73 ans l'âge auquel les Canadiens doivent commencer à tirer un revenu de leurs REER.

Ces mesures cadrent avec ce qui a été dit : il faut s'attaquer aux insuffisances qui existent.

J'aimerais ajouter un dernier commentaire. L'avenir nous inquiète. Bon nombre des données qui sont recueillies concernent les retraités actuels ou ceux qui ont pris leur retraite au cours des dix dernières années environ. Bon nombre de ces personnes ont un régime de pension à prestations déterminées, une tendance qui date des années 1970 et 1980. Aujourd'hui, la responsabilité individuelle en matière d'épargne a pris le pas sur ces régimes.

Nous nous demandons si les taux d'épargne en vue de la retraite seront les mêmes chez les jeunes. C'est pour cette raison que nous privilégions les actions à caractère éducatif. En effet, les jeunes devront s'occuper beaucoup plus de leur épargne-retraite que ne l'a fait la génération antérieure.

M. Golombek : Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, nous avons un système bien établi. Les gens mettent de l'argent de côté. Pour ce qui est des coefficients de remplacement du revenu, on se demande si celui-ci devrait être de 50, 60 ou 70 p. 100. Certains soutiennent que ce coefficient devrait être de 90 p. 100, selon vos objectifs à la retraite.

En ce qui concerne les Canadiens à revenu très élevé, et il est vrai que leur cas suscite peu de sympathie chez la population en général, mais sur le plan de l'équité, les gens qui sont très scolarisés et qui contribuent pour beaucoup à la productivité, à la société et à l'économie canadiennes sont plafonnés quant aux sommes qu'ils peuvent verser dans un régime donnant droit à une aide fiscale, comme un REER. La limite des cotisations est fixée à 22 000 $ environ.

Or, le principe qui sous-tend le REER est le suivant : il faut être en mesure de mettre une partie de son revenu de travail de côté afin que, plus tard, lorsqu'on a cessé de travailler, on puisse l'utiliser pour sa retraite. C'est pour cette raison que l'on accorde une déduction fiscale. La personne ne paie pas d'impôt aujourd'hui sur la totalité de son revenu; elle le fera plus tard, quand son revenu sera moins élevé.

Les gens qui gagnent entre 150 000 et 250 000 $ sont assujettis à des restrictions quant aux épargnes exonérées d'impôt qu'ils peuvent accumuler pour remplir leurs objectifs en matière de revenu de retraite, ces objectifs pouvant être plus ambitieux. C'est tout ce que j'ajouterais.

Le sénateur Massicotte : Je dirais, en réponse, que les statistiques montrent clairement que les personnes qui gagnent plus de 125 000 $ n'économisent peut-être pas assez en vue de leur retraite. La question qu'il faut se poser est la suivante : devrions-nous demander au gouvernement et, plus important encore, aux Canadiens de subventionner ces personnes afin de les encourager à économiser davantage? Certes, elles devraient mettre plus d'argent de côté, mais pourquoi les autres Canadiens devraient-ils leur accorder une aide fiscale? Il s'agit là d'une question d'équité fondamentale.

Monsieur Swedlove, vous êtes en faveur de l'adoption d'une loi qui oblige les employeurs à offrir des régimes de retraite interentreprises ou des régimes d'épargne. Obliger est un mot très fort. Vous proposez aussi que ces régimes soient transférables. Vous y voyez là un moyen plus efficace d'économiser de l'argent.

Ce que vous ne dites pas, mais que vous laissez entendre, c'est que les REER individuels, qui sont plus souvent investis dans des fonds mutuels, par exemple, coûtent très cher étant donné qu'ils sont assortis de frais de gestion de 2 p. 100, si vous gérez activement votre compte. C'est beaucoup quand on voit ce que paient les Américains. D'après un article publié la semaine dernière, ces frais sont très élevés quand on les compare aux frais de gestion des fonds de pension au Canada.

S'agit-il d'un problème sérieux? Serait-il possible de réaliser des économies si on obligeait, comme vous le proposez, les employeurs à offrir des régimes de retraite interentreprises?

M. Swedlove : Je présume que vous faites allusion à la recommandation selon laquelle tout employeur ayant 20 travailleurs ou plus soit tenu d'offrir un régime d'épargne quelconque aux employés.

Le sénateur Massicotte : Oui.

M. Swedlove : J'aimerais apporter deux ou trois précisions. Concernant les régimes de retraite interentreprises, l'employeur qui offre un tel régime pourrait réduire ses coûts par le biais des retenues à la source. Lorsqu'on supprime les frais généraux, que l'on confie la gestion d'un régime interentreprises à une institution financière, ce qui signifie qu'elle s'occupe des formalités administratives, de la responsabilité légale, ainsi de suite, on réduit grandement la paperasserie, le fardeau de l'employeur. Les entreprises pourraient offrir un régime collectif à moindre coût, ou sans coût aucun.

Elles pourraient également permettre, par exemple, aux travailleurs d'avoir accès à un REER collectif. Si nous formulons cette recommandation, c'est parce que nous pensons que le milieu de travail constitue un bon endroit où épargner en vue de la retraite. Dans le cas des retenues à la source, l'argent est prélevé automatiquement. L'employé ne s'en rend pas compte. Il s'agit là d'un outil d'épargne très efficace. Il faudrait en améliorer l'accès.

À l'heure actuelle, environ 50 p. 100 des travailleurs du secteur privé ont accès à des régimes de retraite en milieu de travail. Nous ne voyons pas pourquoi ce chiffre ne serait pas encore plus élevé.

Cela dit, nous précisons dans notre recommandation que les travailleurs devraient avoir le droit de refuser d'adhérer à un tel régime. Ils devraient pouvoir, s'ils le désirent, participer à un régime individuel conçu par un conseiller. Le facteur choix intervient pour beaucoup dans la décision d'épargner. Or, pourquoi ne pas donner à un plus grand nombre de Canadiens la possibilité de participer à un régime de retraite en milieu de travail?

Le président : Monsieur Golombek, voulez-vous parler de la question des frais?

M. Golombek : C'est un sujet qui revient sans cesse. Il est vrai que les frais de gestion qu'imposent les institutions pour administrer les fonds de pension ou autres sur une grande échelle sont inférieurs aux frais qui seraient exigés au niveau du détail.

Mon rôle ici n'est pas de défendre l'industrie dans son ensemble. Ce qui m'intéresse, ce sont les régimes de retraite. Toutefois, si l'on tient compte du coût que représente l'accès à des services professionnels pour le citoyen qui ne peut placer que 100 $ par semaine, de la complexité administrative de cette démarche, alors les fonds mutuels et les produits de détail grand public pourraient contribuer à aider les gens à épargner en vue de leur retraite. Or, ces outils, en raison des frais administratifs, des montants moins élevés qui sont investis, de la comptabilité, ainsi de suite, coûtent plus chers à gérer. Je ne vois pas ce que je pourrais ajouter d'autre.

Le sénateur Massicotte : Même pour les gros investisseurs, les frais sont beaucoup plus élevés au Canada.

M. Swedlove : Je vous demande pardon. Je ne voulais pas vous donner l'impression que nous cherchions à éviter la question des frais. Nous sommes prêts à vous exposer nos vues là-dessus, si vous voulez.

Le sénateur Massicotte : Pourquoi sont-ils plus élevés au Canada qu'aux États-Unis?

Rick Rausch, vice-président principal, Retraite et investissement individuels, la Great-West compagnie d'assurance-vie, Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes : Je pourrais peut-être dire quelques mots à ce sujet. Il faut comparer ce qui est comparable. Les statistiques provenant des États-Unis s'appuient sur une structure différente. Les frais de consultation ne sont pas pris en compte dans les frais de gestion du fonds d'investissement.

Au Canada, la plupart des frais de consultation — le conseiller fournit des conseils personnels et formule des recommandations au client — sont inclus dans les dépenses qui, elles, font l'objet d'un rapport. La situation n'est pas la même aux États-Unis où, souvent, les frais de consultation sont facturés séparément et portés au compte du particulier. C'est là que se situe la différence.

Pour ce qui est de la structure des coûts elle-même, il est vrai que les coûts au Canada sont plus élevés. Toutefois, les services personnalisés, où l'on paie pour avoir des conseils, coûtent habituellement plus cher.

Il est important d'informer les gens, de les guider dans leur retraite. Chaque personne a des besoins différents, des circonstances qui lui sont propres, ce qui suppose une planification financière individuelle. Un conseiller financier personnel peut aider les gens à comprendre leur situation financière, leurs objectifs, ce qu'ils veulent accomplir, comment ils doivent s'y prendre, les économies qu'ils doivent personnellement mettre de côté pour leurs besoins futurs en matière de revenu.

C'est ce rôle qui doit être reconnu, ce que la personne en retire. Pour revenir à ce qu'a dit M. Golombek au sujet des frais de gestion des régimes individuels et collectifs — les économies d'échelle qui sont réalisées côté administratif et préparation des rapports, —, il est vrai que les coûts seraient plus élevés.

Le sénateur Massicotte : Merci pour cette réponse bien polie.

Dans votre rapport, vous dites que les régimes de retraite à prestations définies sont délaissés en faveur des régimes à cotisations définies. Vous qualifiez cet enjeu de majeur puisque ces régimes fournissent moins de certitude aux retraités. Comment doit-on réagir? Est-ce qu'il faut modifier la loi ou le règlement? Comment renverser cette tendance?

M. Swedlove : Me demandez-vous si j'encourage l'abandon des régimes à prestations définies en faveur des régimes à cotisations définies?

Le sénateur Massicotte : Non, l'inverse.

M. Swedlove : Comme industrie, nous nous occupons à la fois des régimes de retraite à prestations définies et des régimes à cotisations définies. Nous sommes prêts à administrer les deux. Il revint aux entreprises de choisir le régime qui leur convient, qu'il s'agisse d'un régime à prestations définies ou d'un régime à cotisations définies.

Le fait est que le marché privilégie les régimes à cotisations définies et que les entreprises sont moins disposées à assumer les risques associés à ceux-ci. Les changements comptables auxquels nous allons assister au cours des deux ou trois prochaines années vont accentuer cette tendance.

M. Rausch : Le chiffre de 2,5 p. 100 que j'ai avancé englobe la TPS. La TVH va probablement ajouter 8 ou 10 points de base supplémentaires à ce pourcentage.

Le sénateur Ringuette : Sur une base annuelle, année après année, pendant 25 ou 30 ans.

Le président : Jusqu'à votre décès.

Le sénateur Ringuette : Je vois. Quand une personne investit, disons, 10 000 $ dans un REER au cours d'une année donnée, elle peut s'attendre à obtenir un allégement fiscal d'environ 15 p. 100, n'est-ce pas?

M. Rausch : Elle recevrait probablement plus. Les comptables qui m'accompagnent peuvent nous dire à combien s'élève l'allègement fiscal moyen, mais je pense que ce serait plus de 15 p. 100 dans la plupart des cas.

M. Strain : Je ne sais pas quelle est la moyenne, mais je pense que l'allègement serait plutôt de 30 p. 100.

Le sénateur Ringuette : Vous avez proposé, concernant les REER collectifs, que l'on adopte une loi pour faire en sorte que les cotisations soient immobilisées. Cela aurait de graves conséquences pour un employé, car la tendance veut qu'une personne change d'emploi quatre, cinq ou six fois au cours de sa carrière. Or si l'argent doit rester immobilisé chaque fois qu'elle change d'employeur, cela risque de compliquer les choses pour ce qui est de la gestion du régime de retraite. Ajoutons à cela la possibilité que l'employeur déclare faillite et le risque qu'il n'y ait plus suffisamment de fonds dans le régime de pension. L'employé n'aura pas accès à la totalité de la pension à laquelle il a droit pour les années travaillées.

Le président : Quel est votre avis là-dessus, monsieur Swedlove?

M. Swedlove : La recommandation vise les REER collectifs. Les régimes de pension sont déjà assortis d'une disposition d'immobilisation. Nous proposons, dans un sens, que l'on impose dans le cas des employeurs qui offrent un REER collectif une disposition semblable à celle qui existe pour les régimes de retraite, parce que ces cotisations sont essentiellement immobilisées. L'employeur sera plus enclin à cotiser à un REER collectif s'il sait que l'argent, au bout du compte, servira à financer la retraite. Les règles régissant l'utilisation des REER sont, en fait, trop souples, car l'argent peut finir par être utilisé à des fins autres que la retraite. Les gens s'en servent parfois pour autre chose. Ils vont peut-être un jour avoir besoin de leurs REER, mais ils peuvent choisir d'utiliser les fonds pour effectuer des dépenses discrétionnaires.

Les employeurs, que nous rencontrons régulièrement, nous disent qu'ils n'ont pas tellement envie d'offrir des REER collectifs parce qu'ils ne savent pas si, au bout du compte, ils vont servir à financer la retraite. Par conséquent, nous estimons que la mesure que nous proposons constitue un moyen d'encourager l'épargne en vue de la retraite.

Le sénateur Ringuette : Comme je le mentionnais, il y a la possibilité que l'employeur déclare faillite et que l'employé perde tout.

M. Swedlove : Cela ne changera pas. Dans le cas d'un REER collectif, la part de l'employeur est versée de façon immédiate et il n'y a pas de responsabilité continue. Qu'il déclare faillite ou non n'a pas d'importance.

Le président : Et qu'en est-il de la transférabilité? Ce que dit le sénateur Ringuette, c'est que les cotisations sont immobilisées. Pour moi, cela veut dire qu'elles ne peuvent être utilisées à d'autres fins. Or, qu'arrive-t-il si je passe de l'employeur A à l'employeur B? Qu'arrive-t-il à cet argent en vertu de votre proposition?

M. Swedlove : L'argent peut-être transféré.

M. Rausch : La situation est la même que dans le cas du régime à cotisations définies. L'argent appartient au particulier. Il peut prendre les cotisations qui sont immobilisées dans un REER, les investir, se doter d'un régime individuel et se faire conseiller. Il peut changer d'employeur, adhérer à un autre régime de pension ou régime collectif et avoir un autre compte.

Le président : Ils ne l'abonneraient pas?

M. Rausch : Non, ils l'emporteraient. Encore une fois, on n'a pas à s'inquiéter de l'éventuelle faillite de l'employeur : l'argent est placé dans un compte à prestations déterminées, auquel, je crois, le sénateur faisait allusion. Le cotisant à ce régime de retraite à cotisation déterminée devient le propriétaire de cet argent. Son argent se trouve dans son compte, en fait, mais l'administration en est simplement collective.

Le sénateur Ringuette : Précisons : le problème provient également du fait que la partie transférable, qui accompagne l'employé, ne comprend pas, la plupart du temps, la cotisation de l'employeur pour l'employé. La plupart du temps, il faut à l'employé cinq années d'emploi continu avant d'avoir accès à la partie cotisée par l'employeur.

M. Rausch : Parfois, cette période est de deux ans, parfois, il n'y a pas de délai. Il est rare qu'il faille attendre cinq ans pour acquérir la cotisation de l'employeur. Normalement, dans beaucoup de cas, l'employé y a immédiatement droit ou, encore, dans certains cas, il doit avoir accumulé un maximum de deux années d'emploi. Cinq années, c'est rare.

Le sénateur Moore : Monsieur Swedlove, j'aimerais vous questionner sur les observations très originales que vous avez faites sur les comptes d'épargne libres d'impôt ou CELI. Vous dites que la Loi de l'impôt sur le revenu exige la transférabilité de ces comptes sur demande, entre les institutions financières. Cependant, cette transférabilité risque parfois de nuire au consommateur. Par exemple, si le consommateur souhaite se prévaloir du droit de cotiser dans son compte pour investir dans des produits à long terme, les sociétés d'assurance pourraient lui offrir un revenu viager garanti très supérieur au revenu qui pourrait lui être versé en vertu d'un contrat selon lequel le bien est liquide. Les prestations, selon votre conclusion, pourraient être supérieures de 35 p. 100.

Dans ce contexte, est-ce que « liquide » signifie que l'argent dort dans un compte?

M. Swedlove : Je pense que c'est plus général. Mais je demanderai à M. Rausch de nous donner une réponse plus complète.

M. Rausch : Pour le CELI, il faut que l'instrument d'épargne soit liquide; autrement dit, mobilisable en tout temps par le titulaire du compte. L'industrie, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. propose, entre autres choses, que ses instruments d'investissement ou ses produits permettent aux particuliers d'améliorer le revenu qu'ils retireraient effectivement des CELI s'ils s'en servaient en vue d'un revenu de retraite. Par exemple, si on voulait en tirer un revenu, il suffirait d'effectuer des retraits. Si on voulait se prémunir pour une période de 20 ans, on achèterait une rente certaine de, disons, 20 ans, qui nous procure un revenu.

Cependant, on pourrait augmenter le revenu tiré annuellement du compte d'épargne si on en plaçait l'argent dans un viager. Ce viager garantirait de fait au bénéficiaire un revenu supérieur, jusqu'à sa mort, parce que nous tenons compte de la mortalité quand nous fixons le prix de la rente. C'est là, en gros, que réside la différence de 35 p. 100 qu'apporte la rente.

Avec la rente viagère, on n'a plus accès à cet argent. On perd de la flexibilité. On a décidé de transformer l'argent en revenu viager, et cet argent est immobilisé.

Le sénateur Moore : Quand vous parlez de renoncer au droit de transférer le régime entre établissements financiers, de quels établissements s'agit-il?

M. Rausch : Ce serait d'autres établissements qui offriraient un produit de type CELI.

Le sénateur Moore : Le survivant a-t-il droit à un paiement résiduel?

M. Rausch : Tout dépend de la garantie dont serait assortie la rente viagère. Elle prévoirait le paiement d'un montant résiduel au bénéficiaire, en cas de mort prématurée du rentier. Dès aujourd'hui, on peut acheter une rente viagère, y mettre son argent et avoir une rente garantie jusqu'à sa mort. Cependant, si on meurt prématurément d'ici deux ans, il n'y a aucune valeur résiduelle pour le bénéficiaire, à moins d'une garantie de revenu sur 10 ou 20 ans.

Le sénateur Moore : Actuellement, le montant maximal du droit de cotisation est de 5 000 $ par année. Vingt ans de cotisation donnent un produit dont la valeur est estimée à 100 000 $, globalement, à moins d'avoir un compte par année?

M. Rausch : Nous proposons un instrument que nous offrons dans le secteur de l'assurance — la rente viagère — et qui n'est pas une option accessible en vertu du règlement en vigueur sur le CELI. Si le CELI ne renferme que 5 000 $, ce montant serait converti en rente de 20 ans.

Le sénateur Moore : Proposez-vous un nouveau compte chaque année?

M. Rausch : On pourrait attendre 20 ans, jusqu'à ce que l'on ait accumulé 100 000 $, et effectuer la conversion à ce moment. C'est un objectif à plus long terme, dont les particuliers tireraient avantage.

M. Swedlove : Fait intéressant, quand on demande aux gens à quoi ils destinent leurs CELI, plus de la moitié répondent que c'est pour leur retraite. S'il reste 20 ans avant la retraite, pourquoi ne pas profiter de l'occasion d'obtenir un meilleur rendement avec des produits que l'on immobilisera à cette fin pendant cette période. Nous ne parlons pas d'augmenter les limites ni rien de ce genre, mais nous pourrions augmenter la flexibilité du CELI selon l'usage qu'on entend en faire.

M. Golombek : Bien sûr, nous favorisons la flexibilité. Cela semble une bonne option. Je ne sais pas si cela limiterait la transférabilité, mais on offrirait une autre bonne option aux Canadiens en leur permettant d'investir dans des rentes.

Le sénateur Greene : Quand j'ai commencé à m'intéresser à la question, je pensais que les pensions de retraite constituaient un véritable problème au pays, presque au point de constituer un problème social. Maintenant, après avoir écouté les spécialistes, chose qu'il faudrait toujours faire, je suis convaincu que j'étais encore sous le coup de la récession mondiale qui a entraîné la débandade des régimes de pension, y compris du mien, et sous le coup de toute la médiation d'autres gros problèmes tels que Nortel, et cetera.

D'après vous, la perception de beaucoup de gens selon laquelle les régimes de retraite au pays sont devenus un problème social est-elle erronée?

M. Swedlove : Je peux uniquement vous renvoyer aux données publiées par les pouvoirs publics et d'autres sources, qui montrent clairement que pour les gagne-petit, au Canada, le taux de remplacement est assez élevé. Il n'est pas question, ici, de minimiser certaines difficultés que ces gens affrontent, mais la réalité c'est que le taux de remplacement tend à être très élevé.

Nous avons défini le problème d'accès à des choses déjà disponibles qu'éprouvent des personnes gagnant un revenu intermédiaire. Si elles n'y avaient pas accès, je dirais que c'est un problème social, mais nous croyons que nous pouvons y remédier par des changements d'orientation de notre système actuel plutôt que par un chambardement important.

Le sénateur Greene : Je pense que nous pouvons supposer que, pendant la vie d'un régime de retraite, le marché connaîtra deux ou trois corrections et même un peu plus de problèmes graves.

Avez-vous commencé à envisager des moyens ou des programmes qui permettraient d'amortir ces chocs?

M. Swedlove : Voilà une excellente question. Après vous avoir donné une réponse générale, je céderai la parole à mes collègues.

Nous pensons que nous pouvons vraiment dissiper les incertitudes qui se manifestent à l'approche de la retraite, notamment dans le cas des régimes de retraite à cotisations déterminées, en atténuant les impacts. Nous sommes dans le domaine de la réduction des risques pour les individus et, grâce à des mécanismes d'atténuation tels que les rentes, nous croyons pouvoir apaiser certaines inquiétudes concernant la faiblesse des marchés au moment du départ à la retraite.

Frank Laferriere, directeur des opérations, Placements Manuvie Assurance Inc., Association des compagnies d'assurances de personnes : En général, l'industrie s'est montrée extrêmement innovante dans le choix des produits et services permettant d'absorber les chocs du marché. Les fonds de placement garanti ou les fonds distincts sont un exemple éloquent des moyens offerts pour s'accrocher à l'appréciation des marchés en des périodes particulières. J'estime que le problème se situe réellement dans la capacité des Canadiens de recevoir des conseils nuancés ainsi que dans leur capacité de déchiffrer les données financières et d'accroître leurs connaissances financières.

Nous pourrions laisser le message suivant : la promotion des conseils en matière financière et de la littératie financière constitue une politique d'avenir. Cependant, on offre déjà un certain nombre de produits dont un conseiller chevronné et instruit peut tirer parti pour s'adapter aux tolérances et aux objectifs de ses clients.

M. Golombek : Je suis tout à fait d'accord. La prestation de conseils est importante.

Pour conclure, je vais y aller d'une courte anecdote. En plein krach, alors que les marchés étaient effondrés et que la valeur des fonds était réduite de 40 p. 100, j'ai parlé à un couple de septuagénaires à la retraite. Ils étaient terrifiés à l'idée de consulter leur conseiller, parce qu'ils avaient lu dans le journal que tout était déprécié de 40 p. 100. Or, ils n'avaient que des REER ordinaires. Leur conseiller leur a annoncé que, parce qu'ils avaient un portefeuille équilibré, ils puisaient dans leur argent. Ils ont constaté que ses conseils avaient été judicieux. La dépréciation de leur portefeuille était de 11 p. 100. Ils en étaient ravis. Il n'était pas constitué à 100 p. 100 d'actions, mais plutôt de 60 p. 100 de revenus fixes et d'argent liquide.

Personne n'aime perdre 11 p. 100 de ses biens, mais au bout du compte, grâce à leur conseiller qui veillait au grain et qui avait tenu compte de leur âge, de leur tolérance du risque, de leur longévité, et cetera, le marché les a relativement épargnés. Plus tard, quand j'ai pris de leurs nouvelles, j'ai appris qu'ils s'étaient complètement remis de leurs pertes, grâce à leur fidélité au plan établi.

Le président : L'un des sénateurs que nous avons invités aujourd'hui, le sénateur Dickson, a une petite question à poser, et nous nous contenterons d'une réponse écrite.

Le sénateur Dickson : Si j'ai bien compris, on parvient, dans l'échelle des gains, à un point où l'option préférée est le CELI plutôt que le REER. Quel produit essayez-vous de vendre aux personnes dont les revenus se situent à moins de 60 000 $, le CELI ou le REER? Pourquoi préconiseriez-vous tel produit et quels seraient les frais qui y seraient rattachés?

Le président : Puisque nous avons dépassé de 10 minutes le temps qui nous était alloué, je vous invite à rédiger la réponse et à la communiquer à notre greffière.

Merci beaucoup à tous pour vos brefs exposés.

La même chose s'applique à vous, monsieur Golombek. Je sais que la distance complique les choses, mais votre contribution a été importante. Elle nous aidera dans notre réflexion.

Notre dernier témoin aujourd'hui est M. Keith Ambachtsheer, du Rotman International Centre for Pension Management. M. Ambachtsheer est professeur adjoint de finances à la Rotman School of Management de l'Université de Toronto. Il est auteur et chercheur sur les placements et la retraite. Il a comparu devant nous il y a un peu plus de 10 ans, pendant notre étude du Conseil de placement du Régime de pensions du Canada.

Bienvenue de nouveau. Notre étude des CELI et des REER est assez pointue. Je reconnais qu'on ne peut pas isoler totalement ces sujets du contexte global des programmes de retraite et de placement; c'est néanmoins ce que l'on nous a demandé d'examiner. On nous a demandé d'essayer de formuler des recommandations, s'il y a lieu, pour leur bonification.

Nous sommes très heureux de votre présence. Il est agréable de vous revoir. Vous pouvez commencer. Nous serons suspendus à vos lèvres.

Keith M. Ambachtsheer, directeur, Rotman International Centre for Pension Management : Merci beaucoup. Pour faire une reconnaissance de ce sujet précis, permettez-moi de dégager le contexte pour les besoins de la discussion. Comme vous le savez, un débat et une discussion élargis sur la question générale de la réforme des régimes de pension sont engagés depuis cinq ans.

Nous sommes maintenant rendus aux questions de détail dans la définition des implications. Beaucoup de recherche a été effectuée, et je pense que l'on reconnaît que le Canada s'est donné un excellent système de revenu de retraite. Cependant, sur certains aspects, ce système est perfectible.

Les améliorations possibles touchent, d'après moi, trois aspects du système. Premièrement, la couverture et le caractère suffisant des prestations de retraite. Deuxièmement, et c'est peut-être l'aspect qui touche de plus près le sujet qui nous occupe, la rentabilité du système de pension, autrement dit, ce qu'il en coûte pour transformer finalement en pension de retraite un dollar d'épargne-retraite, et, entre les deux, quels sont les coûts d'intermédiation? Dans le contexte de la réforme des pensions, c'est le sujet dont on parle le moins. Pourtant, c'est peut-être le plus important dans la discussion sur le système des revenus de retraite.

Le troisième aspect, qui ne touche pas directement notre sujet de discussion, concerne la durabilité des régimes de pension à prestations déterminées. Je crois cependant que ce sujet déborde le cadre de la discussion.

Je dirais que le domaine le plus pertinent où se concentre votre discussion concerne le degré dans lequel les instruments d'épargne-retraite tels que les REER, les CELI, les Fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR), et cetera s'harmonisent avec le système de revenu de retraite. Il concerne aussi le rôle de ces instruments et la possibilité de les repositionner d'une certaine manière pour optimiser ce rôle. Je le suppose. Cependant, plutôt que de vous imposer mon rythme, je préfère être guidé par vos questions.

Le président : Cela nous amènerait à vous demander ce que vous proposez comme améliorations.

M. Ambachtsheer : Je suis heureux de vous les exposer rapidement.

Cinq millions de travailleurs canadiens ne sont malheureusement pas couverts par un régime de pension.

Il y a aussi un autre groupe de travailleurs à faibles revenus et de travailleurs à temps partiel, mais c'est là un autre sujet de discussion.

Cependant, la moitié des 10 millions de travailleurs à plein temps possèdent un régime de pension, l'autre non. Bien sûr, la question des instruments d'épargne-retraite est la question la plus pertinente pour la moitié sans pension de retraite. C'est un nombre considérable.

Le plus souvent, nous abandonnons ces gens à leur sort pour qu'ils trouvent le moyen d'économiser et de choisir des instruments à cette fin. Devraient-ils acheter des fonds communs de placement de détail? Négocier des FINB ou fonds indiciels négociables en bourse? Ce sont des décisions très importantes. La réalité c'est que la plupart de ces cinq millions de travailleurs n'ont aucune idée. La réalité c'est ensuite, comme enjeu de politique publique, d'assurer les mécanismes qui leur permettront de transformer les dollars d'épargne-retraite en prestations de retraite de la façon la plus rentable et judicieuse possible. Ce mécanisme presque indispensable manque.

Il y a quelques années, j'ai rédigé pour l'Institut C.D. Howe un article intitulé Le régime supplémentaire du Canada. J'y exprimais l'idée de créer un mécanisme qui permettrait aux cinq millions de travailleurs dont nous parlons d'économiser en permanence, en se prévalant de leurs droits à la cotisation — dans un CELI ou un REER, peu importe, puisqu'ils servent tous deux à l'épargne-retraite — et en comptant, au fond, sur un mécanisme qui rassemble ces montants d'épargne- retraite, les gère de manière experte, à peu de frais, pour les transformer, à un coût raisonnable, en prestations de retraite. Voici une règle empirique. Toute tranche annuelle supplémentaire de 1 p. 100 de frais engagés au cours de la vie d'un cotisant gruge finalement sa pension de 20 p. 100 de sa valeur.

Maintenant, voici un autre tuyau. Dans le domaine des gros régimes de pension où je travaille principalement, les frais moyens de fonctionnement s'élèvent à environ 0,4 p. 100 par année, en tout — frais de placement et d'administration confondus.

À l'autre extrême, si le cotisant se tourne, à l'instar de beaucoup de travailleurs canadiens, vers le secteur de fonds de placement communs de détail pour ses REER, il doit payer au moins 2 p. 100 de frais annuels. La différence entre 0,4 et 2 p. 100 donne 1,6 p. 100 par année. Il lui faudra donc épargner 30 p. 100 de plus pour sa retraite afin d'obtenir la même pension que le travailleur qui aura eu l'avantage de placer son argent dans un gros régime de retraite, géré de manière experte. Dans ce contexte, c'est ce qui constitue le principal enjeu de politique publique.

Le sénateur Massicotte : Votre présentation est très utile et très précise. Si je devais résumer vos recommandations — et nous ne parlons même pas de la structure fiscale —, vous dites que cinq millions de Canadiens n'épargnent pas du tout. Nous devons développer une structure qui les incitera et qui les encouragera à épargner et, si possible, trouver aussi un moyen de réduire les coûts de gestion de ces fonds qui varient entre 0,4 p. 100 et 2 p. 100. Là est la question. Vous ne proposez pas du tout d'amender ou de rafistoler l'aide fiscale à l'épargne-retraite, n'est-ce pas?

M. Ambachtsheer : Nous mettons l'accent en réalité sur cinq millions de travailleurs, dont la majorité n'approche même pas le plafond actuel. Certains pourraient profiter d'un plafond plus élevé, mais il s'agit d'un autre sujet. Il y a des recommandations intéressantes, et je suis persuadé que vous les avez entendues, autour de la notion d'un plafond viager au lieu d'un plafond annuel, par exemple. Ce sont des idées novatrices qui ont trait aux droits de cotisations disponibles dans un régime à impôt différé. Là n'est pas la question principale.

L'enjeu important est de pousser plus de travailleurs à utiliser leur report d'impôt déjà disponible et à l'utiliser de manière raisonnable et rentable pour qu'ils puissent transformer leur épargne-retraite en pension. C'est là le plus grand défi.

Le sénateur Massicotte : Cela dit, selon moi, le témoignage que nous entendons aborde là l'enjeu important, à savoir comment faire pour que les gens épargnent de manière plus rentable.

Toutefois, si on regarde en amont, le problème n'est-il pas l'éducation? Autrement dit, même ceux qui ont un revenu élevé et qui subissent peut-être un manque à gagner peuvent ne pas se rendre compte qu'ils n'épargnent pas assez. D'une manière ou d'une autre, nous devons les informer pour les encourager à accorder de l'importance à l'enjeu d'épargner de manière économique.

Sur le marché, y a-t-il déjà un mécanisme plus économique que les gens pourraient utiliser s'ils étaient plus renseignés, par exemple, les FINB, les fonds indiciels négociables en bourse, qui s'accompagnent de frais annuels variant entre 0,1 p. 100 et 0,4 p. 100? Des études démontrent aussi que les FINB ont constamment un meilleur rendement que tous les fonds sous gestion, à de rares exceptions près.

M. Ambachtsheer : Je peux donner un exemple à la fois imagé et drôle, mais qui soulève un point important. J'assistais hier à un sommet du Conference Board sur les revenus de retraite. L'un des conférenciers était un conseiller financier qui offre ses services à titre onéreux et que les entreprises engagent pour enseigner aux employés l'épargne et l'investissement. Il a décrit la situation en disant que, dans bien des cas, c'était comme « regarder des chiens qui regardent la télévision ». Ce qu'il entendait par cela, c'est qu'un chien qui regarde la télévision n'a aucune idée de ce qui se passe.

On peut aider les gens à comprendre les concepts de l'épargne et des intérêts composés, mais si on pousse le bouchon trop loin, les gens décrochent, parce que c'est techniquement trop compliqué et, honnêtement, beaucoup d'entre eux ne sont pas intéressés.

Il y a une nouvelle branche en économie et en finance appelée l'économie comportementale et la finance comportementale. Les psychologues et les économistes qui étudient cette branche nous disent que, selon leurs recherches, dans bien des cas, les gens disent que c'est trop compliqué pour eux et qu'ils ont, de toute façon, trop de soucis à court terme. Donc, lorsque quelqu'un leur dit, alors qu'ils ont 40 ans, qu'ils doivent épargner un montant d'argent pour quelque chose qui ne leur arrivera pas avant encore 25 ans, ils décrochent. C'est là la dure réalité. On ne peut pas l'enseigner.

Le sénateur Massicotte : En raison de la nature humaine, pour le dire ainsi, vous dites que nous devons museler les chiens, appliquer les lois, les forcer à épargner et mettre un régime sur pied pour les amener où ils doivent aller, même s'ils ne savent pas où ils veulent aller. Est-ce bien ce que vous dites?

M. Ambachtsheer : Il existe une merveilleuse manière intermédiaire d'arriver à ce résultat. C'est bien rendu dans le livre à succès Nudge : Improving Decision About Health, Wealth, and Happiness, cosigné par les économistes américains Richard H. Thaler et Cass R. Sunstein. Le livre traite de la notion selon laquelle il est possible de diriger les gens vers de meilleures options sans les forcer à le faire. Le lien avec les revenus de retraite réside dans l'idée de mettre sur pied un régime auquel les gens sont automatiquement inscrits, qui établit automatiquement et par défaut un taux de cotisation logique et qui établit automatiquement une politique de placement logique fondée sur l'âge. Vous dites aux gens : « Félicitations, vous êtes inscrits dans un système qui vous offrira un niveau d'épargne-retraite qui, dans bien des années, vous permettra de vivre raisonnablement bien votre retraite. Maintenant, si vous ne le voulez pas, vous pouvez vous désinscrire. »

Aux États-Unis, la recherche démontre, avec les régimes 401(k) dans lesquels l'auto-inscription est devenue une norme, que la mesure dans laquelle le service est utilisé selon le nombre de travailleurs qui s'y inscrivent passe de 50 p. 100 ou 60 p. 100 à bien au-delà de 90 p. 100. La différence entre demander aux gens d'adhérer au régime, mais seulement s'ils remplissent un tas de documents, et leur dire : « Félicitations, vous êtes inscrits, mais vous pouvez vous désinscrire si vous remplissez quelques documents », c'est que la mesure dans laquelle le service est utilisé passe de 50 p. 100 ou 60 p. 100 à 95 p. 100.

Nous pouvons mettre des systèmes en œuvre qui ne comportent pas l'obligation absolue de le faire. Nous pouvons diriger les gens vers de meilleures options.

Le sénateur Massicotte : Vous êtes le directeur du Rotman International Centre for Pension Management. J'aimerais vous entendre sur ce qui nous est rapporté au sujet des entreprises qui optent de plus en plus pour des cotisations déterminées au lieu de prestations déterminées, parce qu'ils ne veulent pas du risque lié au marché. Et pourquoi le devraient-ils?

La semaine dernière, j'ai lu une entrevue donnée par M. Lamoureux, le directeur du régime de retraite des enseignants, et par David Dodge, l'ancien gouverneur de la Banque du Canada. Ils disent que ce changement est important pour le Canada. Évidemment, cela diminue énormément le degré de certitude que les retraités obtiennent de leur caisse de retraite. Leurs épargnes augmenteront peut-être, mais notre économie risque de souffrir de ce changement structurel dans la façon dont les gens épargnent.

Êtes-vous d'accord que c'est là un changement significatif dans la structure des caisses de retraite? Si oui, que devrions-nous faire pour changer cette tendance?

M. Ambachtsheer : Nous parlons ici d'une question conceptuelle. Nous situons ce débat sur le concept des régimes de retraite en fonction des régimes à prestation déterminée (PD) ou en fonction des régimes à contribution déterminée (CD). Certains d'entre nous disent que c'est là une conception incorrecte. Dans bien des cas, tout repose sur les types de mécanismes qui permettent aux gens d'atteindre leurs objectifs à long terme. En fait, selon la recherche réalisée, un système optimal de revenu de retraite comporte aussi bien un élément dans lequel les gens ont un compte de pension personnel qu'un élément qui constitue, pour ainsi dire, une rente viagère.

Je vais vous donner plusieurs exemples. Avec la SV, le RPC ou le RRQ — le Régime de rentes du Québec —, les gens reçoivent une rente viagère. S'ils utilisent le service à sa pleine mesure à raison de 16 000 dollars par année, un couple retire 32 000 dollars. C'est une rente viagère indexée au taux d'inflation. Vous commencez avec cela. La question est de savoir ce que vous ajoutez à cela. Il s'agira peut-être bien de rentes additionnelles, mais si les gens veulent laisser un legs, s'ils ont une idée de ce qu'ils veulent faire à leur retraite et qu'il leur faut un bon montant d'argent pour le réaliser, il est logique d'avoir de l'argent dans un compte de pension personnel. Il ne s'agit pas de choisir l'un ou l'autre; il faut les deux.

Permettez-moi de vous donner un autre exemple. La TIAA-CREF est la plus grande réussite aux États-Unis en termes de gestion d'un système de revenu de retraite. Ce groupe, qui a un drôle d'acronyme, représente en gros les enseignants du niveau collégial aux États-Unis. Il compte des millions de participants et gère environ 350 milliards de dollars en actifs. Il ne s'agit pas de choisir l'un ou l'autre; c'est les deux. La partie TIAA, la Teachers Insurance and Annuity Association, une entreprise qui verse des rentes, a été fondée par Andrew Carnegie en 1917. En 1952, la branche CREF, le College Retirement Equities Fund, est aussi créée : les gens y ont des comptes de pension personnels en grande partie investis dans des actifs à risque.

Ce programme gère ces deux éléments en parallèle depuis 1952. Jusqu'à assez récemment, selon la règle, une moitié de l'argent était investie dans les rentes viagères et l'autre moitié, dans le CREF, les comptes de pension personnels. Durant des décennies, les professeurs d'universités américaines, y compris la sécurité sociale, ont généré par ce programme des taux de remplacement du revenu variant entre 65 p. 100 et 110 p. 100. Cela équivaut environ à 18 p. 100 de leur salaire de base au cours de leur vie professionnelle.

Il ne s'agit pas de choisir l'un ou l'autre; il faut les deux. Nous pouvons concevoir ces programmes si nous prenons du recul quant à ces débats quelque peu ridicules, selon moi, entre les régimes de retraite à PD et à CD et que nous nous demandons comment nous pouvons collectivement concevoir un système qui rejoindrait les marchés financiers qui évoluent et la réalité que les entreprises ne peuvent prendre les mêmes types de risques qu'elles prenaient il y a des décennies, parce que leur secteur a changé.

Dans les années 1980 et 1990, la bourse a connu une merveilleuse passe qui donnait presque des ailes aux gens, si bien qu'on pouvait devenir un génie seulement en investissant dans le marché boursier. Ce temps est révolu. Nous devons songer à la manière de redessiner les systèmes pour qu'ils soient efficaces au XXIe siècle. Nous pouvons y arriver.

Le sénateur Hervieux-Payette : Merci de vos commentaires instructifs. Je présume que nous pouvons avoir accès aux documents que vous avez produits. Selon moi, la sécurité est importante dans un régime de retraite. Je présume que leurs frais d'administration ne seraient pas trop élevés. Croyez-vous que cela pourrait être géré par ceux qui gèrent le RRQ et le RPC?

M. Ambachtsheer : Ce débat est intéressant et il s'agit d'une question importante. Si on fait le tour du Canada pour voir ce qui s'y passe en ce moment, des groupes d'activités économiques différentes font beaucoup pression pour obtenir la gestion de ce système. Hier à la conférence, par exemple, nous avons entendu de bonnes présentations de John Crocker, le chef de la direction du HOOPP, le régime de retraite de l'organisation de la santé en Ontario, et de Jim Leech, le chef de la direction du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario, au sujet du concept de leurs systèmes, qui sont en réalité des organisations de retraite indépendantes qui agissent sensiblement comme des coopératives.

Ensuite, nous avons entendu l'industrie de l'assurance-vie qui disait vouloir gérer le système, parce qu'elle sait le faire mieux que quiconque. La veille, nous avions entendu David Denison qui, sans prétendre que l'Office d'investissement du RPC devrait gérer tout l'argent, demandait aux gens d'ouvrir leur esprit à l'idée qu'il y a plusieurs moyens d'y arriver et que nous devons voir cela comme un processus en deux temps.

Autrement dit, si nous pouvons collectivement décider d'adopter ce système intermédiaire, d'adopter un mécanisme pour ces cinq millions de travailleurs sans régime de retraite, pour les stimuler, pour ainsi dire, en créant une structure, bien il s'agit là d'une décision énorme; et nous pouvons collectivement la prendre.

Ensuite, il y a la question, si nous le faisons, de la façon dont nous devrions le faire. Selon moi, nous ne devrions pas tirer de conclusions trop hâtives. D'un côté, le secteur de l'assurance dit qu'il a le meilleur système et de l'autre, le secteur des rentes dit aussi qu'il a le meilleur système; c'est un cas classique où nous pourrions former un groupe de travail, comme nous l'avons fait dans les années 1990 lorsque le Régime de rentes du Québec a été redessiné. Puis, nous devrions étudier la question de la structure. Si nous voulons nous engager dans cette direction, quelle est la meilleure manière de procéder?

Les gens ont tort de dire aujourd'hui qu'ils ont la réponse définitive quant à la manière dont cela devrait être fait. Dans ce domaine, nous pouvons collectivement, si nous sommes prêts à examiner les données et les études, avoir un débat sur la structure juridique et sur la structure de gouvernance, et arriver à une solution de renommée mondiale à laquelle personne n'a peut-être même encore songé, de la même manière que nous avons réformé dans les années 1990 le Régime de pensions du Canada et le Régime de retraite du Québec, dont les gens parlent comme d'un miracle, parce que bien peu de pays ont en fait été capables d'accomplir cela.

Le sénateur Hervieux-Payette : J'ai une question pour confirmer les propos des autres témoins. Selon vous, l'âge maximal pour cotiser aux divers régimes devrait-il demeurer à 71 ans ou, compte tenu du vieillissement de la population, faudrait-il l'augmenter?

M. Ambachtsheer : C'est une question difficile. Dans un monde de libre-choix, il n'y aurait pas du tout de limite d'âge. Pourquoi en avons-nous une? C'est lié au fait de couvrir les frais de tous ces reports d'impôt et de commencer à percevoir dans le régime fiscal les impôts sur le salaire différé. En réalité, il faut tenir compte d'un certain nombre de facteurs dans l'économie, y compris les finances publiques pour déterminer cette limite.

Pour moi, l'un des enjeux majeurs ne consiste pas à savoir si c'est 71 ou 72 ans. J'ai décidé de ne pas prendre ma retraite à 65 ans. J'ai donc un intérêt personnel à cet égard, mais ce n'est en aucun cas une pierre d'achoppement, à mon avis.

Le sénateur Hervieux-Payette : Merci pour votre réponse. Nous sommes également dans une situation de conflit d'intérêts à cet égard et nous avons donc besoin de conseils de l'extérieur.

Qu'en est-il du montant viager qui pourrait être accordé? Je songe à un héritage, par exemple. Une personne qui reçoit l'équivalent du salaire moyen au Canada, soit 44 000 $ par année, ne met pas d'argent de côté. Ce n'est pas imposable, mais si quelqu'un vend la maison de sa mère au cours de l'année où cette personne en a hérité, elle pourrait avoir quelques centaines de milliers de dollars. Cependant, elle ne peut épargner que 18 p. 100 de son salaire, qui est de 44 000 $. Or, habituellement, si cette personne gagnait plus d'argent, elle serait en mesure d'en mettre davantage de côté.

M. Ambachtsheer : C'est un aspect important de l'équité. Je suis certain qu'on vous l'a déjà dit, mais permettez-moi de le répéter. La réalité, c'est que les régimes à prestations déterminées comportent une capacité de rattrapage. Il faut passer par un programme collectif axé sur les risques. Si les risques sont contre une personne et que celle-ci est déficitaire, elle a du temps pour se rattraper.

Actuellement, cette notion n'existe pas dans le monde des comptes de pension individuels. Un groupe de travailleurs canadiens peut bénéficier de ce rattrapage étalé du report d'impôt, tandis qu'un autre groupe ne le peut pas. C'est manifestement injuste.

Le sénateur Hervieux-Payette : Puis-je conclure que vous ne vous opposeriez pas à un montant viager, selon la source des fonds? Comme je le mentionnais, les gens qui gagnent au plus 50 000 $ par année pourraient au moins mettre cet argent de côté. Peut-être n'atteindraient-ils même pas ce montant au cours de leur vie, mais ils pourraient au moins mettre une certaine somme d'argent de côté.

Admettons que j'hérite de 200 000 $. J'aimerais peut-être en affecter une moitié à mon régime de retraite et faire quelques investissements avec l'autre moitié.

M. Ambachtsheer : J'espère être bien clair à ce sujet. L'idée de remplacer le concept annuel par un concept viager est valable et il faudrait l'examiner sérieusement.

Le président : J'aimerais vous poser une question complémentaire, monsieur Ambachtsheer. Pour ce qui est des finances publiques et de la récupération de l'impôt, quels facteurs autres que la politique publique faut-il envisager pour calculer un montant viager convenable?

M. Ambachtsheer : Celui que l'on mentionne le plus souvent est la longévité, le fait que nous vivons plus longtemps et que nous pourrions avoir à travailler plus longtemps. Il faudrait que toutes ces limites d'âge soient dynamiques au lieu d'être statiques. Il serait intéressant d'explorer l'idée d'associer la limite d'âge de 71 ans à un certain indice de la longévité, par exemple.

Le président : Qu'en est-il du montant cumulatif des cotisations? Quels sont les facteurs permettant à quelqu'un de conclure qu'un montant de 300 000 $, 500 000 $ ou 100 000 $ lui convient? De quoi devons-nous tenir compte pour en arriver à un chiffre?

Il s'agit probablement d'une question prématurée. Nous devons d'abord décider si nous voulons un concept viager.

M. Ambachtsheer : Voilà un vaste débat intéressant concernant la signification du maintien d'un niveau de vie après le marché du travail. Dès qu'on se pose la question, on pense à une liste de facteurs qui définissent la manière de répondre à la question. C'est une question de santé, d'habitude d'accumulation de l'épargne et de l'envie de travailler ou non. Beaucoup de facteurs entrent en jeu.

Le niveau de revenu est très important, en ce sens que les revenus de pension d'un travailleur à revenu modeste seront principalement issus de la partie publique du système de pension. La question d'un revenu viager est alors spéculative.

Cette discussion vise davantage les travailleurs à revenu élevé. Prenons l'exemple d'un régime de la fonction publique qui, d'après les taux d'intérêt actuels, s'élève à plusieurs millions de dollars. Examinons certains niveaux d'épargne-retraite implicite qui peuvent s'y accumuler. Ensuite, nous nous retrouvons avec la question du travailleur du secteur privé qui n'est actuellement pas en mesure de se rapprocher de ce nombre cumulatif, car le système fonctionne différemment en vertu des régimes à prestations déterminées et à cotisations déterminées.

Pour toutes ces raisons, on se retrouverait avec une limite qui, pour que ce soit significatif, doit s'élever à plusieurs millions de dollars plutôt qu'un plafond qui n'arrive pas à la hauteur de l'accumulation d'épargne implicite d'un régime de la fonction publique.

Le sénateur Mockler : Monsieur, j'estime que les Canadiens sont chanceux, compte tenu de votre expérience, dont nous bénéficions aujourd'hui.

Permettez-moi de reprendre votre exemple du chien qui regarde la télévision. Sans aucun doute, vous m'amenez à l'étape suivante, celle du cheval. Nous pouvons mener un cheval vers l'eau, mais c'est lui qui choisit s'il veut boire.

Vous avez également abordé un thème important, celui des frais. Pour ces cinq millions de Canadiens, nous pouvons ordonner aux législateurs de présenter des recommandations aux gouvernements, imposer des mesures par voie législative ou instruire le public. Quel serait le procédé le moins dispendieux pour les fonds publics et pour les contribuables canadiens?

M. Ambachtsheer : Pour répéter ce que j'ai dit plus tôt, il ne faut pas surestimer le potentiel d'une campagne d'éducation financière. C'est bon d'investir dans de telles mesures; cela ne peut pas nuire. Cependant, la recherche en finance comportementale nous révèle que cela ne change pas beaucoup de choses pour la plupart des gens.

Nous sommes toujours aux prises avec la question de savoir s'il s'agit d'un chien, d'un cheval ou de tout autre animal. La question demeure quant à savoir comment amener les personnes à adopter des habitudes d'épargne-retraite à faible coût. Encore une fois, le fait est que les plus jeunes peuvent prendre plus de risques financiers que les retraités. Ce sont là quelques éléments dont il faut tenir compte dans la création du concept. J'encourage chacun d'entre nous à envisager une solution tenant compte de ces attributs.

J'ai fait un travail très particulier dans Le régime supplémentaire de retraite du Canada, document préparé par l'Institut C.D. Howe il y a quelques années, où j'ai exposé certaines mesures particulières sur la manière d'obtenir des résultats. Cependant, j'ai également ajouté une mise en garde comme quoi ce n'est pas le seul moyen d'assembler ces attributs.

Je dis à mes amis travaillant dans le secteur des assurances qu'il n'y a aucune raison de ne pas jouer un rôle dans cette solution que nous voulons créer. Il faut toutefois procéder de façon à ce que les services offerts respectent certaines normes, non seulement en ce qui concerne la qualité, mais aussi le coût.

Ce type de cadre ressemble presque au concept des services. Ainsi, pour avoir accès à un bassin de Canadiens qui n'ont pas de régime de pension — que nous avons appelé, en attendant un meilleur terme, le régime supplémentaire de retraite du Canada —, un fournisseur de services doit satisfaire certains critères de qualité et de coût du service. Si les critères sont respectés, le fournisseur peut être un participant.


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