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Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 9 - Témoignages du 15 novembre 2010


OTTAWA, le lundi 15 novembre 2010

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 16 h pour examiner une motion visant à faire changer l'appellation officielle de la Marine canadienne.

Le sénateur Roméo Antonius Dallaire (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Honorables sénateurs, mesdames et messieurs, membres du personnel, témoins et invités, bonjour. Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense qui examine une motion qui a été proposée par le sénateur Bill Rompkey au Sénat, appuyée par le sénateur Fraser, et qui touche l'appellation de la Marine canadienne. Je vais lire la motion pour que nous sachions tous ce qu'elle dit au sujet de notre étude de cet après-midi :

Que le Sénat du Canada encourage le ministre de la Défense nationale, considérant les longues années de service, les sacrifices et le courage du personnel et des membres des Forces navales canadiennes, à désigner les Forces navales canadiennes sous l'appellation officielle de « Marine canadienne » au lieu de « Commandement maritime » à compter de cette année, à l'occasion du centenaire de la Marine canadienne, et que cette appellation soit utilisée dès que possible dans tous les documents officiels et opérationnels, dans les deux langues officielles.

« Encourage » est un verbe qui joue un rôle important dans notre étude.

Voilà la motion. Ce n'est pas un geste dépourvu de signification si nous pensons à l'effet qu'ont la terminologie, la tradition et les valeurs des membres des Forces armées en général, et dans ce cas particulier, de la marine.

Aujourd'hui, notre étude concerne la marine. Je tiens à vous avertir que je me demande si je devrais présider cette séance étant donné que j'ai deux enfants dans la réserve navale. J'ai toutefois un fils dans l'infanterie, ce qui devrait égaliser les choses.

Si vous me le permettez, amiral Mifflin, je vais donner un résumé de vos antécédents en matière de commandement dans la marine. Vous avez été, un moment donné, commandant adjoint de la Marine au milieu des années 1980. Vous avez ensuite pris une décision importante et êtes devenu député de Bona Vista—Trinity—Conception en 1988. Vous avez ensuite occupé divers postes ministériels, y compris celui de ministre des Pêches et des Océans, ministre des Anciens Combattants et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique.

Il n'y a pas beaucoup d'officiers de haut rang qui ont eu du succès en politique, et c'est un plaisir de vous rencontrer, monsieur, ici aujourd'hui, après votre longue carrière dans ces domaines. Voulez-vous faire une déclaration préliminaire avant que nous passions aux questions?

L'honorable contre-amiral (à la retraite) Fred Mifflin, C.P., président honoraire (ancien commandant adjoint du Commandement maritime) : Oui, je vais décrire un peu le contexte, aussi brièvement que possible. Je sais que nous voulons passer à la discussion.

[Français]

Il me fait plaisir d'être parmi vous cet après-midi. Si vous le permettez, je parlerai en anglais. Ensuite, je répondrai à vos questions en anglais ou en français.

[Traduction]

Dans sa motion du 27 mai, le sénateur Rompkey a très bien décrit l'histoire de la Marine royale du Canada, de la Marine canadienne, et du Service naval du Canada auparavant. Je ne vais pas reprendre les chiffres ou les éléments qui figurent dans sa motion.

Il me faut, je crois, souligner certaines parties de cette histoire, parce que j'estime qu'elle touche directement la motion. Je sais que les sénateurs veulent s'en tenir à la motion, parce que c'est la raison pour laquelle nous sommes tous ici.

Il est important de savoir qu'en fait, la Marine est issue de la Direction de la protection des pêches de ce qu'on appelait le Service naval du Canada avant 1910. Mais à cause de ce qui se passait en Europe et de la perspective d'avoir peut-être un jour à défendre notre pays avec autre chose que quelques petits canons et un bateau de pêche, le gouvernement au pouvoir a décidé que nous aurions une marine indépendante. En mai 1910, le Service naval du Canada a été constitué avec quelques navires et quelques officiers qui étaient chargés de protéger le Canada contre notre ennemi au cours de la Première Guerre mondiale.

La marine de cette époque a connu une période difficile, parce qu'en 1911, le gouvernement a changé, principalement à cause de la marine et en tant qu'amiral et homme politique, je comprends tout à fait les difficultés que tout cela a causées.

La marine a connu de nombreux succès au cours des années suivantes et rencontré beaucoup de difficultés. Après la Première Guerre mondiale, il a été difficile de préserver des forces permanentes, comme c'est encore le cas aujourd'hui.

En 1911, la marine a été appelée « royale », comme l'avaient décidé le Roi George V, et l'amiral Walter Hose, le capitaine du premier croiseur de la Marine royale du Canada, 1914-1915, est devenu le chef du Service naval. Il a compris que peu de gens étaient prêts à appuyer une marine permanente et il a eu l'idée — dont on parle encore dans l'histoire navale du Canada — de prendre la moitié du budget de la marine de l'époque et de ne pas s'en servir pour acheter des bateaux, mais pour mettre sur pied 18 divisions de réserve dans les différentes régions du Canada. C'était une mesure surprenante et vous pouvez imaginer toutes les critiques dont il a fait l'objet de la part de ses collègues à cause de cette décision. Il a pris cette mesure et il a invité l'industrie des chantiers navals du Canada, aussi bien sur la côte Est que sur la côte Ouest qu'entre les deux, à se préparer à construire des navires. C'est pourquoi, en 1939, la Marine avait 13 navires de taille décente et environ 2 500 officiers et marins, et qu'elle est devenue, à la fin de la guerre, la troisième marine des Forces alliées en importance — 100 000 personnes et près de 375 navires. Cela représente une multiplication par 50, chose incroyable lorsqu'on y réfléchit.

Après la guerre, bien sûr, il est devenu difficile de conserver une marine, une armée de terre et une force aérienne permanentes, et la marine a démobilisé une partie de son personnel. Il y a eu une flambée d'intérêt pendant la guerre de Corée, au cours de laquelle trois destroyers ont été postés en permanence dans cette région. La marine a ensuite commencé à voir le nombre de son personnel diminuer encore une fois, parce qu'il n'y avait pas de forces permanentes.

En 1964, la marine comprenait les bâtiments suivants : un porte-avions, une trentaine de navires de bonne taille, 10 dragueurs de mines et de nombreux navires auxiliaires. Ce n'était pas une grande marine, mais ce n'était pas non plus une petite marine.

En 1966, les Forces canadiennes ont été intégrées, en partie parce qu'on pensait, comme l'avait indiqué un rapport antérieur, que cette intégration pouvait entraîner des économies d'échelle. Cette décision a suscité une certaine controverse, mais elle a été mise en œuvre.

Avec l'intégration et l'unification des forces canadiennes, les bases ont été rebaptisées. Au lieu de l'expression « Navire canadien de Sa Majesté », pour ce qui est de la marine, elles sont devenues des « bases des Forces canadiennes ». Ce changement a été un peu difficile à avaler, mais il a finalement passé.

En février 1968, l'unification est arrivée, ce qui a énormément changé la situation. La Marine royale du Canada, l'Aviation royale du Canada et l'Armée canadienne ont disparu. Nous sommes devenus les Forces canadiennes. L'uniforme a changé, la structure des grades était celle de l'armée et une bonne partie des coutumes et des traditions ont été mises en suspens. Je dis « en suspens », parce que la plupart des gens qui se trouvent dans la salle savent que ces coutumes et ces traditions avaient une raison d'être. Il n'y a personne qui décide un jour d'adopter telle coutume ou telle tradition. Il y a une raison qui explique ces coutumes et ces traditions, cela est bien connu. Nous pouvons essayer de les faire disparaître, et nous allons réussir pendant un certain temps, mais elles reviennent, parce que ce sont des éléments naturels. Je compare toujours cela à l'eau qui cherche toujours à rejoindre son niveau; on peut s'en débarrasser, mais elle revient d'une autre façon.

Je commandais le NCSM Skeena en qualité de lieutenant-colonel dans un uniforme vert. Je faisais partie de la force navale permanente. Le vice-amiral Buck, qui se trouve derrière moi, faisait également partie de la force navale permanente. J'étais membre des Forces canadiennes et j'étais lieutenant-colonel. Toutefois, les 10 autres capitaines des navires dont j'étais responsable ne m'appelaient pas lieutenant-colonel; ils m'appelaient commandant. Ils ne disaient pas que j'étais membre des Forces canadiennes (Commandement maritime). Ils disaient que je faisais partie de la Marine canadienne, ce qui me convenait parfaitement; je n'avais rien contre cette appellation.

Je parle des coutumes, des traditions et de l'eau qui cherche toujours à rejoindre son niveau, mais je ne suis pas venu ici pour critiquer l'unification. L'intégration a été une excellente chose. L'unification n'a pas été aussi réussie. Je pense que l'objectif était bon, mais la rigueur avec laquelle elle a été mise en œuvre en a fait une expérience difficile et a laissé un goût très amer. Je ne vais pas en parler en détail, parce qu'il existe déjà suffisamment de témoignages officiels sur ce point.

L'abandon de l'unification qui a suivi un certain nombre de rapports et le retour des coutumes et des traditions comportent néanmoins des éléments intéressants. En 1971, le ministre de l'époque a changé la couleur des uniformes de la marine en les faisant passer de vert fusil à bleu foncé ou noir — une couleur assez proche pour le gouvernement. Nous en avons été très heureux. Au lieu de huit boutons, il y en avait six.

Excusez-moi. En 1971, c'est le système des grades de la marine qui a été rétabli. Il a fallu attendre 1985 pour que l'uniforme soit rétabli, sous une forme quelque peu modifiée par rapport à l'uniforme traditionnel de la Marine royale. La plupart des gens étaient très heureux de retrouver un uniforme bleu. Il y avait toutefois une grande différence : les marins ne portaient pas ce qu'on appelle le béret de marin, qui est un béret rond. Tout le monde portait le même béret carré — avec boutons, un col et une casquette à visière comme uniforme d'apparat.

L'abandon de l'unification et le retour des coutumes et des traditions concernant les uniformes comportent un élément intéressant : je pense que personne, qu'il s'agisse d'un lieutenant ou d'un contre-amiral, ne s'est jamais adressé à moi en tant que membre des Forces canadiennes (Commandement maritime). J'ai toujours considéré que je faisais partie de la Marine canadienne.

Je suis ravi qu'avec l'arrivée du 100e anniversaire de la Marine, le sénateur Rompkey ait jugé bon de proposer cette motion. Il demande en fait de légitimer la situation actuelle. Je ne parlerai pas de la force aérienne et de l'armée, parce qu'elles ont leurs propres défenseurs, mais je crois qu'elles vont suivre cette initiative si la motion est adoptée.

En tant qu'ancien officier d'active, il me paraît essentiel de faire une autre remarque. Ces traditions et ces coutumes sont une excellente chose, mais je me souviens d'avoir déjà posé à un marin qui se plaignait de son uniforme vert, la question suivante : « Quel genre d'uniforme aimeriez-vous? » Nous avons eu une bonne discussion et il a fini par dire : « Monsieur, dans de bonnes conditions, je serais prêt à partir en mer en costume d'Adam. » Sa réponse en disait long.

Je ne suis pas ici pour parler au nom du vice-amiral McFadden, le chef de l'état-major de la Force maritime. Je peux dire toutefois que n'importe quel commandant en activité, comme le comprend le président, souhaiterait en tout premier lieu — s'il avait la lampe d'Aladin — avoir une force entraînée et autonome qui puisse être envoyée n'importe où dans le monde contre la plupart de nos ennemis pour défendre la souveraineté du Canada. Ce serait son premier souhait.

La « Marine canadienne » est une bonne chose et cela devrait se faire, le plus tôt possible.

Le sénateur Plett : Je vais vous poser une question très directe : Préférez-vous « Marine royale du Canada » plutôt que « Marine canadienne »?

Cam Mifflin : Pourquoi suis-je surpris d'entendre cette question?

Le sénateur Plett : Je suis surpris d'être le premier à qui on ait permis de la poser, mais j'ai réussi à le faire.

Cam Mifflin : Mon fils a été dans la marine. Il travaille maintenant pour General Electric au Connecticut. Je lui ai demandé, il y a quelques semaines, ce qu'il pensait de cette question. Il a dit que ce n'était pas très important et que « Marine canadienne » était très bien. Par contre, il n'a jamais servi dans la Marine royale du Canada.

J'ai servi dans la Marine royale du Canada, et qu'est-ce que j'en pense? J'aimerais bien que nous en revenions au pavillon blanc et à toutes ces choses, mais cela ne se fera pas.

Examinons pourquoi il y a eu la « Marine royale du Canada ». En 1911, nous étions encore un dominion. La bataille de Vimy n'a eu lieu que quelques années plus tard. Le Statut de Westminster a été adopté en décembre 1931. Cependant, jusqu'en 1949, nous étions encore obligés d'aller devant le Comité judiciaire du Conseil privé de la Grande- Bretagne, qui était la juridiction de dernier ressort après la Cour suprême. Je pense que c'est en 1949 et non pas en 1931 que les choses ont vraiment changé et que nous sommes devenus un pays indépendant — nous étions un pays. Cela s'est consolidé en 1982.

J'ai demandé à beaucoup de gens ce qu'ils pensaient de cette motion. Ils l'aiment tous beaucoup. Je n'ai rencontré personne qui n'aimait pas l'expression « Marine canadienne », mais je n'ai rencontré personne qui voulait que l'on rajoute le mot « royale ».

Le sénateur Plett : Est-ce bien vrai?

Cam Mifflin : J'ai été moi-même surpris.

Le sénateur Plett : Lorsque vous dites que vous n'avez rencontré personne qui voulait ajouter le mot « royale », vous en avez maintenant rencontré un. Je préfère la « Marine royale du Canada ».

Cam Mifflin : Personnellement, cela ne me déplairait pas, mais je ne dois pas me mêler de cela.

Le sénateur Plett : Je le comprends, mais vous seriez satisfait si nous choisissions « Marine royale du Canada », est- ce bien exact?

Cam Mifflin : En fait, non. Dans mes rêves, j'aime ce titre, mais lorsque je regarde nos jeunes marins et nos jeunes soldats d'aujourd'hui, je me dis qu'il est temps qu'ils soient canadiens.

Le sénateur Plett : J'aimerais en savoir davantage sur les raisons pour lesquelles vous ne préférez pas « Marine royale du Canada ».

Cam Mifflin : C'est parce que le mot « royale » n'existe plus. Nous avons les Navires canadiens de Sa Majesté, ce qui m'indique qu'ils sont associés à la Reine et au pays, mais je ne pense pas que nous ayons besoin du mot « royale », parce que nous nous sommes éloignés des traditions de la Marine royale. Nous avons nos propres traditions, qui découlent des traditions de la Marine royale, mais qui sont les nôtres.

Le sénateur Plett : Je sais que nous avons nos propres traditions. Le Royaume-Uni a la Marine royale. Il y a aussi la Marine royale de l'Australie, la Marine royale de la Nouvelle-Zélande, la Marine royale de la Malaisie, la Marine royale des Pays-Bas, et cetera. Je pense qu'en refusant l'adjectif « royale », nous nous plaçons dans une minorité. Je n'aimerais toutefois pas lancer un débat sur cette question, parce que ce n'est pas pour cela que nous sommes ici.

Cam Mifflin : Je vais faire un commentaire. Il est intéressant que la Marine royale australienne veuille se faire appeler la Marine royale australienne alors que les Australiens veulent se débarrasser de la Reine. C'est une combinaison étrange.

Le sénateur Plett : Je comprends cela. Je pense que cela va au-delà de la monarchie et qu'il y a un certain stigmate qui est attaché à l'adjectif « royale ». Pour moi, c'est simplement parce que nous voulons préserver la Reine au Canada; je crois que c'est un beau nom.

Cam Mifflin : J'apprécie beaucoup vos commentaires.

[Français]

Le sénateur Pépin : Si on changeait le nom de la marine canadienne, est-ce que vous ne croyez pas que, à ce moment- là, il y aurait des personnes qui voudraient changer le nom des deux autres forces, l'armée et l'aviation?

Cam Mifflin : Oui, certainement.

Le sénateur Pépin : Qu'est-ce que vous en pensez?

[Traduction]

Cam Mifflin : Je ne connais pas aussi bien l'histoire de l'aviation ou de l'armée de terre que celle de la Marine. Je me souviens toutefois que l'Aviation royale du Canada est issue de la Royal Air Force. Pendant la Première Guerre mondiale, nous avions 20 000 Canadiens qui servaient dans la Royal Air Force, ou le Royal Flying Corps, comme il s'appelait. Je crois. L'Aviation royale du Canada a été créée en 1923, avec le titre d'Aviation royale du Canada, à partir de l'Aviation canadienne. Comme la marine, ce service a accepté la structure des grades de la Royal Air Force; il a même repris le tourteau sur son drapeau, comme l'Aviation royale du Canada. C'était une tradition qui reflétait une progression logique.

Revenons au projet de loi sur l'unification. La principale chose qui soit survenue, à part ce qui est arrivé aux coutumes et aux traditions, qui était loin d'être négligeable, était que la marine, l'armée et l'aviation avaient leur propre service logistique, étaient indépendantes et sont devenues des commandements structurels ou fonctionnels. La marine est plus ou moins devenue le Commandement maritime et l'armée est devenue ce que l'on appelait alors la Force mobile.

L'aviation n'a pas pris la forme d'une entité appelée le Commandement aérien; cela s'est fait quelques années plus tard. Si je me souviens bien, elle a été intégrée au Commandement du transport aérien et au commandement de la défense aérienne. Il y a eu par la suite le commandement matériel, le Commandement de l'instruction et, quelques années plus tard, le commandement des communications. En fait, l'aviation ne s'en est pas très bien sortie, parce qu'il n'y avait pas de commandement aérien en 1968. C'est plus tard que les gens se sont mis à réfléchir et qu'ils se sont dit qu'ils avaient besoin d'un centre pour regrouper les gens qui faisaient voler les avions et les entretenaient. Le Commandement aérien a été créé quelques années après le projet de loi d'unification. Je ne me souviens pas de la date exacte, mais le greffier pourrait la retrouver.

C'est une progression logique que de passer du « Commandement maritime » à la « Marine canadienne ». Je pense que l'aviation voudrait sans doute devenir l'« Aviation canadienne » même si je ne sais pas si elle voudrait utiliser le mot « royale ». Le commentaire du sénateur Plett est tout à fait pertinent, mais étrangement, ce n'est pas un aspect auquel les membres en activité s'intéressent énormément. La réponse est que je n'en serais pas surpris.

Le président pourrait probablement parler des forces terrestres mieux que moi, mais si l'armée canadienne a disparu, tous les régiments n'ont pas disparu. Le Princess Patricia's Canadian Light Infantry existe toujours, tout comme le Royal Canadian Horse Artillery et de nombreux autres régiments royaux.

Le sénateur Plett : Il y a aussi le Royal Canadian Armed Corps.

Cam Mifflin : Pour en revenir au mot « royal », je viens de Terre-Neuve, une province qui possède un des meilleurs corps policiers au monde. Cela ne fait que quelques années que les policiers ont commencé à porter des armes. C'est le dernier corps policier canadien à porter des armes de poing.

Ce corps a été créé en 1871, mais n'a pas accepté le terme « royal » avant 1979, je crois, lorsqu'ils sont devenus le Royal Newfoundland Constabulary, l'inverse de ce dont nous parlons au sujet de la marine.

Le sénateur Segal : J'aimerais poser une question sur la réalité opérationnelle.

Amiral, vous avez servi, commandé et dirigé. Nous avons un excellent groupe de jeunes hommes et jeunes femmes dans la marine, d'origines diverses, francophones et anglophones. J'ai retiré de mes contacts avec les unités de la Force régulière et de réserve dans les différentes régions du pays, qu'ils sont très fiers d'être dans la Marine canadienne. Ils affirment qu'ils sont davantage interopérationnels avec la marine américaine qu'avec la marine britannique. Ils disent qu'il n'y a pas d'autre marine au monde qui soit aussi interopérationnelle avec la marine américaine que la nôtre. De plus, ils prennent le drapeau unifolié très au sérieux et ils sont heureux de voir que c'est un symbole important sur tous nos navires. Je ne sais pas trop pourquoi, mais quand j'étais enfant, je n'étais pas favorable à l'unifolié, mais je n'avais que 14 ans à l'époque, je m'empresse de le préciser.

Je crains que malgré toutes ces bonnes intentions, en choisissant le mot « royal », comme certains l'ont proposé avec d'excellentes intentions, parce qu'ils croient fermement dans la tradition que souligne ce lien, nous risquerions de susciter une controverse dans les rangs entre ceux qui se considèrent comme des matelots brevetés canadiens et tous les autres, les officiers de la Marine canadienne, et ceux qui ont une certaine affinité pour l'adjectif « royale ».

J'aimerais savoir ce que vous en pensez du point de vue opérationnel. Les commandants des navires assument leur commandement et sont capables de gérer les controverses, mais il ne faudrait pas que le Parlement en crée de nouvelles. Je retiens de votre témoignage que l'appellation « Marine canadienne » ne suscitera aucune controverse, que tous les membres de la marine seront très satisfaits de cette appellation, mais que l'expression « Marine royale canadienne » pourrait susciter quelques réactions. J'aimerai savoir ce que vous pourriez nous dire au sujet de ces réactions.

Cam Mifflin : Je suis d'accord avec tout ce que vous avez dit, sénateur Segal.

J'ai dit qu'il y avait le retour des coutumes et des traditions, mais elles reviennent sous une forme différente. J'ai parlé de l'uniforme bleu de la Marine. Cela a toujours été une question grave, en tout cas pour moi, mais que peut-on faire lorsqu'on n'est pas en mesure de modifier la situation? D'une façon générale, on peut dire que le retour à l'uniforme bleu a grandement amélioré le moral de la marine. Il n'était toutefois pas bleu, il était noir, mais cela était assez proche. Il n'y avait pas huit boutons, mais six. Je ne pense pas que qui que ce soit s'en soit plaint.

Ils se sont plaints d'une chose toutefois. Il est drôle de constater que les petites choses sont parfois très importantes. La structure des grades de la Marine n'utilisait pas la boucle d'officier. C'est un peu comme si on faisait partie du Commandement maritime au lieu de la Marine canadienne. Celui qui porte une boucle d'officier sait qu'il fait partie de la marine de son pays et qu'il est là pour le protéger. Sans boucle, les gens qui vous voient dans un aéroport ne sont pas sûrs si vous êtes un pilote d'avion ou un conducteur d'autobus. C'était souvent gênant.

Le sénateur Segal : Ou le Corps canadien des commissionnaires.

Cam Mifflin : Oui, même si je ne m'y serais pas opposé.

Ce n'est que cette année que le gouvernement a, dans sa sagesse, réinstauré la boucle d'officier. Aucun amiral n'a pris sa retraite ou a été révoqué à cause de la boucle d'officier, mais c'était un petit détail qui trottait toujours dans la tête des gens. La boucle navale était tout à fait acceptable. Lorsque vous commandez un navire en mer, cette boucle montre à vos collègues, aux autres Canadiens et aux étrangers que vous êtes le capitaine d'un navire, un officier de haut grade ou un amiral, selon le cas. Comme je l'ai dit, en 1972, j'étais dans la Marine canadienne, et pas dans la Marine royale du Canada.

Pour revenir au mot « marine », il légitime ce que nous faisons maintenant. Comme je l'ai dit, je n'ai jamais rencontré de membres en activité, d'officier ou d'engagé, qui seraient à l'aise avec le terme « royal ».

Sur le plan opérationnel, nous sommes des Canadiens et je peux fonctionner avec la « Marine canadienne ». Je peux fonctionner avec la « Gendarmerie royale du Canada » parce que le mot « royale » est là pour une autre raison. Je peux fonctionner avec l'« Artillerie royale canadienne » parce que c'est un régiment qui existe depuis longtemps. Sur le plan opérationnel, il serait bon de légitimer ce qui se passe actuellement.

Le sénateur Manning : Je souhaite la bienvenue à mon collègue de Terre-Neuve-et-Labrador. Je ne vais pas critiquer votre version de l'histoire de la Marine royale du Canada. Je vous ai entendu parler de l'état dans lequel se trouvait la marine en 1964, qui est l'année de ma naissance, je ne peux donc rien vous reprocher à ce sujet.

En tant que résident de Terre-Neuve-et-Labrador, je sais que les coutumes et traditions sont importantes. Nous avons toujours été fiers des nôtres. Personne n'ayant encore réussi à me convaincre du contraire, j'appuie l'utilisation du qualificatif « royal », pas tant parce qu'il fait référence à la monarchie et que je viens d'une famille irlandaise de Terre-Neuve, mais parce que j'ai connu plusieurs anciens combattants, dont un bon nombre sont décédés maintenant, qui étaient fiers de dire qu'ils avaient servi dans la Marine royale du Canada. Deux d'entre eux étaient mes oncles et ils étaient très fiers de porter leur uniforme.

Ce qui me préoccupe, c'est l'effet que peut avoir une modification du nom. Le sénateur Segal vient d'aborder ce sujet. Lorsqu'on a décidé de parler de « Commandement maritime », avec l'unification et le reste, comment cela a-t-il affecté le moral des matelots?

Cam Mifflin : Je vais répondre à votre question d'un autre point de vue. C'est plutôt la structure des grades et l'uniforme qui ont fait problème. Je dois mentionner encore une fois cet aspect. Ce n'est pas une rengaine. Cela fait longtemps que la coutume veut qu'un navire doit battre un pavillon approprié. C'est à peu près au même moment que l'on a abandonné le pavillon blanc. J'ai parlé à beaucoup d'organismes d'anciens combattants. Ils battent toujours le pavillon blanc, ce que je trouve très bien.

Beaucoup de choses ont changé, mais je pense que ce qui a le moins touché les marins était le nom de Commandement maritime, parce qu'ils se trouvaient toujours dans des navires, en mer, dans la marine. Il n'était pas possible d'utiliser un autre mot que la « marine », parce que, lorsqu'on va en mer sur des navires, on est dans la marine. C'était le Commandement maritime, d'accord, mais c'était toujours la marine. Cela se passait en 1968. Depuis, cela a toujours été la marine, et ce sera pour l'éternité la marine. Il serait bon qu'elle reprenne ce nom.

Le sénateur Manning : Quelle que soit la décision du Parlement, ce sera toujours la marine.

Cam Mifflin : Oui.

Le sénateur Manning : Lorsqu'on grandit, on entend souvent parler des jeunes qui font partie du programme des Cadets de la Marine royale canadienne, par exemple. Ils progressent éventuellement et j'en connais quelques-uns qui sont diplômés du Collège militaire royal du Canada. Il se pourrait qu'ils fassent partie de la Légion royale canadienne ou de la Gendarmerie royale du Canada. Cela semble faire une différence. À part les forces armées, il y a la Royal St. John's Regatta, l'événement sportif le plus ancien d'Amérique du Nord, parce qu'il a débuté il y a 180 ans. Il y a quelque chose dans le mot « royal » qui fait une différence.

J'ai écouté le sénateur Segal parler de ce qui se faisait avec la marine des États-Unis. Vous avez mentionné les matelots actuels. Vous avez affirmé que vous n'avez entendu personne parler favorablement du mot « royal », mais comme nous le disons chez nous, les gens qui sont en faveur de quelque chose n'en parlent pas beaucoup habituellement. C'est lorsque vous êtes contre que vous réagissez. Pensez-vous vraiment que ce serait la réaction des personnes qui servent dans la marine de nos jours? Pensez-vous qu'il y aurait des gens qui n'aimeraient pas que l'on parle d'eux comme des membres de la « Marine royale du Canada » et non simplement de la « Marine canadienne »?

Cam Mifflin : Avant de répondre — et je crois que c'est là une question clé, une question très importante — j'aimerais revenir aux traditions. J'aimerais recommander au greffier et au comité, si vous pouvez vous en procurer un exemplaire, le rapport Mainguy de 1949. Entre 1945 et 1949, il y avait des craintes au sein de la Marine royale du Canada pour plusieurs raisons, mais principalement parce que nos officiers canadiens étaient formés en Grande-Bretagne. La plupart d'entre eux avaient servi dans la Marine royale pendant la guerre, avant la guerre et après la guerre. Les Canadiens parlaient avec ce que l'on appelait un accent mi-atlantique, et la communication entre les officiers et les marins ne répondait pas aux attentes des jeunes Canadiens qui s'engageaient dans la marine.

Il y a eu trois mutineries, chose tout à fait inconnue au Canada. Cela a entraîné la constitution d'un groupe de trois personnes, présidé par le contre-amiral Rollo Mainguy. Le rapport Mainguy a pour l'essentiel fait de la Marine royale du Canada une Marine canadienne. Croyez-le ou non, jamais jusque-là les officiers canadiens ne portaient pas le mot « Canada » sur leurs épaulettes, ce qui était un grave sujet de préoccupation pour les marins. Ils estimaient que leurs officiers devraient le faire. Cela se faisait dans les régiments du Canada, l'Aviation royale du Canada l'avait, alors pourquoi les officiers de marine ne portaient pas le mot « Canada »?

Le thème du rapport est que notre marine était issue de la Marine royale et que nous avions utilisé la Marine royale pour nous aider et nous former. En fait, c'est avec leurs bateaux que nous avons commencé notre marine. Mais nous sommes maintenant la Marine canadienne. Les auteurs du rapport ne l'ont pas formulé ainsi, mais c'est essentiellement ce que disait le rapport.

Je pense que l'expression « Marine royale du Canada » causerait beaucoup plus de difficultés que l'expression « Marine canadienne ». Le nom de « Marine canadienne » serait très facilement accepté. Il y en a qui disent que cela se passerait bien, comme le sénateur et moi, jusqu'à un certain point. Certains diraient peut-être « Oui, ils ont choisir l'appellation `Marine royale du Canada', ce n'est pas grave, mais nous préférons quand même « Marine canadienne ». Je vous le dis et je vous le garantis.

Le sénateur Manning : Vous avez parlé de 1949 et des grands changements qui sont survenus à cette époque et vous avez parlé des accents. Nous avons connu beaucoup de changements en 1949 quand le Canada a décidé de se joindre à Terre-Neuve, et notre accent a été régulièrement mentionné depuis.

Avez-vous des suggestions à faire sur la façon dont nous pourrions sonder les hommes et les femmes qui servent aujourd'hui dans la marine sur le sujet que nous étudions?

Cam Mifflin : Oui. Vous parlez à quelqu'un qui a pris sa retraite en 1988. Je vous suggère d'appeler des adjudants- chefs du Commandement, et que vous parliez à un, deux ou trois d'entre eux — l'adjudant-chef du Commandement maritime, l'adjudant-chef des Forces canadiennes. Ces gars-là connaissent peut-être beaucoup mieux le quotidien du fonctionnement des Forces canadiennes que les gens qui s'occupent davantage de naviguer sur des navires et d'autres choses. C'est une suggestion concrète que le comité voudra peut-être examiner.

Le sénateur Mitchell : Je suis emporté par la nostalgie qui se dégage de cette discussion. Je pense que c'est le cas de tous les participants. Sans vouloir être partisan, je dirais que les personnes conservatrices sont plus sensibles à la nostalgie.

Nous avons de bons souvenirs de l'époque de la Marine royale du Canada — et il y a toutes sortes de raisons qui l'expliquent — mais nous oublions que le mot « royal » fait référence à une époque où le Canada était un des Dominions de l'Empire britannique et n'était pas aussi indépendant qu'il l'est aujourd'hui. Je ne voudrais pas diminuer le moindrement la marine, mais je ne la connais pas aussi bien que l'armée, parce que mon père en a fait partie et que nous ne parlions pas de la marine. La bataille de Vimy est un exemple classique. Avec ce qu'ont accompli les Canadiens, quelque chose qu'aucune armée nationale n'aurait fait, nous avons obtenu beaucoup plus d'indépendance sur la scène mondiale et par rapport à la Grande-Bretagne. Je ne voudrais pas utiliser un terme comme « royal » qui est associé à la dépendance et au colonialisme de cette époque. En fait, lorsque nous parlons de « Marine royale du Canada », nous diluons la pureté de la marque canadienne de notre marine. Pourriez-vous réagir à cela?

Cam Mifflin : Je pense que vous avez tout à fait raison. C'est tout à fait conforme à mon sentiment sur cette question.

Je me trouvais à Oshawa en mai dernier pour célébrer le 100e anniversaire de la Marine canadienne. C'était vraiment étonnant. Il y avait près de 300 personnes au défilé d'Oshawa, une ville avec une forte tradition navale. Je suis sûr que la plupart des anciens combattants de cette ville seraient très heureux de revenir à l'expression « Marine royale du Canada ». De nombreux anciens combattants, comme l'a mentionné le sénateur Manning, aimeraient beaucoup revenir à cette appellation. Je n'ai rien contre elle. Elle ne me cause aucun problème. Nous sommes toutefois réunis ici pour rendre les conditions plus acceptables à ceux qui servent aujourd'hui dans la marine. Nous allons éventuellement quitter ce comité et faire autre chose. Les gens qui porteront ce nom le porteront très longtemps.

Le sénateur Mitchell : Bien dit.

Le sénateur Manning et d'autres ont énuméré un certain nombre d'institutions, particulièrement vénérables, qui utilisent l'adjectif « royal » — la Légion royale canadienne et la Gendarmerie royale du Canada — je pourrais énumérer également un certain nombre d'institutions qui sont au moins aussi vénérables, voire davantage. Nous ne parlons pas du « Parlement royal du Canada ». Nous ne parlons pas du « Sénat royal du Canada » ni de la « Chambre commune royale du Canada ». Nous ne parlons pas des « Cours de justice royales canadiennes ». Nous disons « canadiennes ».

Avez-vous une idée du pourcentage des hommes et des femmes qui servent aujourd'hui dans la marine qui étaient nés à l'époque où celle-ci était qualifiée de « royale », et pour qui cette tradition veut dire quelque chose?

Cam Mifflin : Je ne peux pas vous le dire. Je peux vous dire qu'il n'y a aujourd'hui pas un seul membre de la marine qui faisait partie de la Marine royale du Canada. Le vice-amiral Buck, qui est plus à jour que moi, pourrait peut-être vous le dire.

Vice-amiral (à la retraite) Ron Buck, premier vice-président national, (ancien chef d'État major de la Force maritime), Ligue navale du Canada : Aucun. J'ai été le dernier officier général, en 2007.

Le sénateur Mitchell : Par conséquent, l'argument qui oppose la tradition à ce que souhaitent les membres actuels de la marine ne tient pas.

Cam Mifflin : Il ne tient pas.

Le sénateur Mitchell : Pourquoi vouloir diluer le contenu canadien d'une chose aussi importante que la Marine canadienne?

Cam Mifflin : Je suis né sujet britannique, mais je ne connais personne qui soit plus fier d'être Canadien que moi.

Le vice-président : Nous n'avons abordé aucun des aspects juridiques de ces termes, ni le fait que l'unification existe toujours et que nous l'avons quelque peu atténuée.

Nous avons parlé de la possibilité d'utiliser l'appellation « Marine canadienne », mais si nous voulons obtenir la sanction royale pour que cette appellation devienne la « Marine royale du Canada », nous pourrions le faire par la suite en suivant le protocole — présentation d'une demande par le gouverneur général à Sa Majesté.

Amiral, vous êtes encore président honoraire de la Ligue navale du Canada; est-ce bien exact?

Cam Mifflin : Oui, c'est exact.

Le vice-président : Ce n'est pas la « Ligue royale navale du Canada ».

Cam Mifflin : Non, mais ce sont les Cadets de la Marine royale canadienne.

Le vice-président : Merci amiral. Vous avez été très aimable de bien vouloir comparaître devant le comité.

Cam Mifflin : Merci.

Le vice-président : Notre témoin suivant est le vice-amiral (à la retraite) Ron Buck, premier vice-président national, (ancien chef d'état-major de la Force maritime), Ligue navale du Canada. Il est entré dans la marine en 1967, a commandé un certain nombre de navires et a participé à la gestion du projet de modernisation des navires, TRUMP à titre d'exemple. Il a également commandé des systèmes de formation et a participé au programme majeur de restructuration des Forces canadiennes, connu sous le sigle ERGCC, après les restrictions budgétaires massives imposées au début des années 1990.

Le vice-amiral Buck a été nommé premier commandant de la Flotte canadienne du Pacifique et nommé commandant des Forces maritimes du Pacifique en 1998. Il a été promu au poste de vice-amiral en 2001 et nommé chef d'état-major de la Force maritime, aspect dont nous parlons aujourd'hui. En septembre 2004, il a été nommé vice-chef d'état-major de la Défense. Il a pris sa retraite en 2006.

Bienvenue, amiral. Si vous avez une déclaration d'ouverture à faire, faites-le.

Vam Buck : Merci, c'est le cas effectivement.

Je vous parle à deux titres; l'un est à titre de représentant de la Ligue navale du Canada. La Ligue navale a été fondée en 1895 sans l'adjectif « royale », mais elle a joué un rôle dans la création de la marine en 1910. Je parle également à titre de commandant à la retraite du Commandement maritime, ou pour parler de façon à ce que les Canadiens comprennent, à titre de commandant de la Marine du Canada. Un des problèmes que je vais aborder est le fait que pour le public canadien, l'expression « Commandement maritime » ne veut absolument rien dire.

Je suis fier de ce que la Marine canadienne, « royale » ou non, a réalisé au cours de son premier siècle d'existence. Lorsque le Service naval a été créé en 1910, il a d'abord été appelé le « Service naval », et plus tard, en 1911, comme nous l'a dit l'amiral Mifflin, il a été rebaptisé « Marine royale du Canada ».

Il est instructif de noter que dans plusieurs documents écrits à cette époque par un certain Louis-Philippe Brodeur — le premier ministre du Service naval et ministre de la Marine et des Pêches — celui-ci parle de la « Marine canadienne », et non pas de la « Marine royale du Canada ».

Les membres du comité ont entendu l'excellent résumé qu'a présenté le contre-amiral Mifflin au sujet de l'histoire de la marine. Il est vrai que la Marine canadienne, lorsqu'elle a été créée sous le nom de MRC, et jusqu'à ce qu'elle fasse ses preuves au cours d'une bataille épique vraiment canadienne, à savoir la bataille de l'Atlantique, a été modelée sur la Marine royale et a grandement dépendu des diverses formes de soutien que celle-ci lui accordait. Elle a imité la Marine royale. Cependant, à la fin de la guerre, la MRC s'est donné un rôle uniquement canadien, qui s'est tout d'abord dessiné en Corée et qui s'est ensuite épanoui pendant la guerre froide jusqu'à aujourd'hui. Pendant la guerre froide, la Marine canadienne a été une marine spécialisée dans la guerre anti-sous-marine. De nos jours, c'est une petite marine très compétente et polyvalente, à vocation mondiale. La marine se déploie régulièrement selon les besoins pour appuyer toute une gamme de missions, qui vont des missions antiterroristes et antipiraterie à l'aide humanitaire, aux opérations de patrouille et d'affirmation de notre souveraineté dans nos eaux territoriales.

Après l'unification survenue en 1968, le Commandement maritime a été créé en tant que commandement intégré aux Forces canadiennes. La personne qui dirige la Marine canadienne aujourd'hui est à la fois un commandant et un officier d'état-major auprès du Chef d'état-major de la Défense. Les deux rôles sont essentiels et doivent être conservés quel que soit le nom retenu.

En dehors des Forces canadiennes, le titre « Commandement maritime » ne veut pratiquement rien dire parce qu'il ne décrit pas clairement ce qu'il est. L'expression « Marine canadienne » est par contre très descriptive. C'est pour cette raison que je suis en faveur d'un changement de nom de façon à clairement faire connaître aux Canadiens le nom de leur marine. C'est un aspect qui me paraît très important.

Entre parenthèses, j'ai un père et un oncle qui ont été fiers de servir dans la MRC. J'aime beaucoup la MRC, mais je suis d'accord avec l'amiral.

Je suis très fier d'avoir eu la possibilité de servir dans la MRC, mais je pense que si l'on change le nom de « Commandement maritime », il ne faudrait pas revenir à celui de « Marine royale du Canada », mais plutôt à « Marine canadienne », et en faire un élément de commandement des Forces canadiennes. Je pourrais vous en dire davantage sur ce point si vous souhaitez, sénateurs, mais c'est un aspect important. Cette structure de commandement attribue au commandant de la marine le pouvoir dont il a besoin pour développer les forces navales canadiennes. Je pense que cela reflète l'intention initiale du Canada qui recherchait sa souveraineté comme pays indépendant. Cela est conforme aux termes utilisés par Louis-Philippe Brodeur, mais surtout cela reflète l'institution uniquement canadienne qu'est la Marine canadienne d'aujourd'hui, en particulier les hommes et les femmes qui servent fièrement sous cette appellation.

Le vice-président : Merci d'avoir soulevé un aspect intéressant concernant la terminologie utilisée pour désigner le chef des Forces navales et la dimension du commandement. Lorsque le comité aura progressé dans son étude, il est possible qu'il ait besoin de certaines précisions à ce sujet.

Le sénateur Peterson : Merci pour votre exposé. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que « Commandement maritime » ne veut rien dire. Je pense que la plupart des Canadiens pensent que cela fait référence à la Marine canadienne. Lorsqu'ils liront tout ceci, ils seront peut-être troublés de constater que le nom est un peu différent. Avons-nous une idée de ce que la population canadienne pense sur cette question?

Vam Buck : Il faudrait répartir la population en deux catégories : les anciens combattants et la majorité des Canadiens. Vous savez ce que les anciens combattants souhaiteraient. Ils aimeraient l'adjectif « royal » parce que c'est sous cette appellation qu'ils ont servi et cela est tout à fait compréhensible.

Cependant, les Canadiens moyens, qui représentent à peu près 90 p. 100 de tous les Canadiens, ne connaissent pratiquement rien de la marine, ni même son nom. Je suis très en faveur de toute mesure susceptible d'appuyer les hommes et les femmes qui servent dans la marine, mais qui donnent à l'expression Marine canadienne un sens pour les Canadiens. C'est pourquoi je pense que l'expression « Marine canadienne » répond à ces critères.

Je pense également que juridiquement, sur le plan structurel, du point de vue des Forces canadiennes, cela est relativement facile à faire. Tout ce qu'il faut faire pour les documents est de changer le nom du commandement qui passera de « Commandement maritime » à « Marine canadienne » et structurer cette entité comme un élément de commandement des Forces canadiennes.

Le sénateur Peterson : Vous pensez que cela peut se faire de façon isolée, sans qu'y participent les deux autres segments des Forces canadiennes.

Vam Buck : Non. Si cette motion était approuvée, je pense que le gouvernement impliquerait les Forces canadiennes par l'intermédiaire du Chef d'état-major de la Défense. Je pense qu'il y aurait une discussion au sujet de la modification possible des trois appellations et non pas d'une seule. Je ne peux pas parler pour les Forces canadiennes, mais c'est ce à quoi je m'attendrais.

Le sénateur Lang : J'aimerais que vous fassiez des commentaires sur les aspects concrets d'un changement d'appellation. Si nous choisissions « Marine royale du Canada », il faudrait utiliser le même mécanisme et nous n'aurions pas à procéder différemment.

Vam Buck : Non, il faudrait procéder différemment.

Le sénateur Lang : Pourriez-vous expliquer cela?

Vam Buck : Si vous voulez reprendre l'adjectif « royal », le ministère de la Défense nationale ne pourrait pas effectuer un tel changement en prenant des décisions internes.

Le vice-président : Nous allons demander au greffier de vérifier tout cela, mais si je ne m'abuse, lorsque nous avons unifié les Forces et créé le Commandement maritime, l'appellation « Marine royale du Canada » n'a pas été ramenée à une force nulle. Il est possible de ramener un régiment à une force nulle, mais il existe toujours officiellement. L'appellation « Marine royale du Canada » a, en fait, été supprimée.

Vam Buck : Elle n'existe plus.

Le vice-président : Elle a été supprimée de l'ordre de bataille de l'armée canadienne. Il serait possible de rétablir l'appellation « Marine canadienne » parce que cela relève de nos pouvoirs. Il faudrait toutefois obtenir la sanction royale pour pouvoir utiliser l'adjectif « royale ». Nous ne pouvons pas revenir tout simplement à la Marine « royale », parce qu'elle a été supprimée. La Reine doit consentir à l'utilisation de l'adjectif « royale ». Bien évidemment, cela peut se faire; ce n'est pas impossible.

Le sénateur Lang : Je ne voudrais pas insister trop sur ce point, mais faudrait-il présenter un projet de loi ou est-ce que le consentement de la Reine suffirait?

Vam Buck : Non, il faudrait le consentement du gouvernement, mais pas nécessairement un projet de loi, et le consentement de la Reine.

Le sénateur Plett : Qui décide de la façon dont nos forces navales doivent être appelées? Si j'ai bien compris, le nom n'est pas défini par la loi. L'article 14 de la Loi sur la défense nationale énonce simplement :

Les Forces canadiennes sont les forces armées de Sa Majesté levées par le Canada. Elles constituent un service intégré appelé « Forces armées canadiennes ».

De plus, le ministre de la Défense nationale peut toujours prendre un arrêté ministériel pour modifier le nom. Est-ce bien exact? Est-ce que cela ne vaudrait pas également pour l'adjectif « royale »?

Le vice-président : Non.

Le sénateur Plett : Non?

Le vice-président : Non pour l'adjectif « royale ».

Vam Buck : Le ministre peut toutefois, en prenant un arrêté ministériel, créer des éléments des Forces canadiennes. Il existe un certain nombre de catégories d'éléments : unités, formations et commandements. La marine, l'armée et l'aviation sont toutes structurées aujourd'hui comme des commandements. Le ministre aurait le pouvoir, s'il souhaitait l'exercer, de modifier aujourd'hui le nom d'un commandement pour le faire passer de « Commandement maritime » à « Marine canadienne ».

Le sénateur Plett : Il ne serait donc pas nécessaire d'adopter une loi. Le ministre pourrait-il le faire seul?

Vam Buck : Cela relèverait de ses pouvoirs. Vous remarquerez que dans la loi la structure des Forces canadiennes ou les Forces armées canadiennes ne sont pas décrites.

Le sénateur Plett : Je vous remercie d'avoir soulevé ce point.

Reconnaissez-vous que les appellations utilisant l'adjectif « royale » sont la règle et non pas l'exception?

Vam Buck : Encore une fois, je pense que la Marine royale du Canada est issue de la Marine royale. Aujourd'hui, si l'on voulait comparer les marines, même pour ce qui est de la structure interne et du fonctionnement d'un navire canadien par rapport à celui d'un navire britannique, vous constateriez des différences. Notre pays compte de nombreuses institutions d'excellence. Un certain nombre d'entre elles font appel au qualificatif « royal », mais beaucoup ne le font pas.

Je pense que les hommes et les femmes qui servent aujourd'hui dans la marine, qui n'ont jamais servi dans la Marine royale du Canada, doivent se sentir à l'aise avec un changement d'appellation. Comme l'a dit le contre-amiral Mifflin, je pense qu'ils seraient très à l'aise avec l'appellation « Marine canadienne. »

La plupart d'entre elles et eux seraient-ils à l'aise avec l'appellation « Marine royale du Canada »? Probablement. Y en a-t-il un certain nombre qui ne serait pas à l'aise? Certainement, et ce changement susciterait une controverse, et pas seulement au sein de la marine. Cela créerait une controverse au sein des Forces armées, par rapport à l'armée et à l'aviation. Ce serait une controverse assez vive, je pense. Cela est regrettable, mais un tel choix susciterait également une grande controverse dans le pays et il se pourrait que des Canadiens continuent de penser que la marine n'est pas une entité uniquement canadienne.

Le sénateur Plett : J'ai déclaré plus tôt que la principale raison qui me poussait à être en faveur de l'adjectif « royale » n'était pas nécessairement mon allégeance à la Reine, mais plutôt un souci de cohérence. Les membres des Forces canadiennes prêtent un serment d'allégeance pour le monarque, n'est-ce pas?

Vam Buck : Oui.

Le sénateur Plett : Est-ce que cela n'introduirait pas un certain manque de cohérence?

Vam Buck : Non. Nous avons les Forces canadiennes. Il n'y a pas le mot « royal » dans les Forces canadiennes.

Le sénateur Plett : Pourquoi les Forces canadiennes s'y opposeraient-elles? Pourquoi n'accepteraient-elles pas que nous utilisions le mot « royale »?

Vam Buck : Cela créerait une controverse sur la marche à suivre et que faire avec les deux autres services. Il faudrait plusieurs interventions en dehors du ministère de la Défense nationale.

Est-ce faisable? Oui. J'estime toutefois que si les Forces canadiennes et le ministre décidaient que l'armée s'appellerait désormais l'« Armée canadienne », que l'aviation s'appellerait l'« Aviation canadienne », et que la marine s'appellerait la « Marine canadienne », cela pourrait se faire d'un trait de plume et les gens en seraient très heureux.

Le sénateur Plett : Pour terminer, il se pourrait que je présente par la suite une motion visant à donner à l'aviation l'appellation « Aviation royale du Canada ».

Le vice-président : Cela se discutera une autre fois.

J'aimerais aider à formuler une réponse à cette question. En 1968, nous avons créé un certain nombre de nouvelles unités, ce qui a constitué un grand changement, parce que jusque-là, nous avions uniquement supprimé de nombreuses unités. Toutes les nouvelles unités qui ont été créées n'utilisent pas l'adjectif « royal », y compris la 1re Division du Canada, qui a combattu pendant la Première Guerre mondiale et qui s'est plaint de ne pas être reconnu comme une division « royale ».

Encore une fois, je le répète : le Chef d'état-major de la Défense pourrait bien, en respectant les formes, s'adresser à notre commandant en chef et demander la sanction royale.

Le sénateur Plett : Sur ce point, qui est notre commandant en chef? Est-ce le gouverneur général?

Le vice-président : Oui, mais il n'est pas le gouverneur général « royal ». C'est tout à fait exact.

Le sénateur Plett : Cependant, le gouverneur général n'est-il pas le représentant de la Reine?

Le vice-président : C'est exact, et il en est fier, j'en suis sûr. Il portait très bien l'uniforme récemment, lorsqu'il a fait une visite à l'étranger.

Le sénateur Segal : Je vais abuser de l'amabilité de notre témoin et avoir recours à l'expérience qu'il a acquise au cours d'une longue carrière extrêmement distinguée, à la fois en tant que commandant de navire et d'officier commandant de la marine entière.

Si le gouvernement voulait adopter comme appellation « Marine canadienne » ou « Marine royale du Canada », puisque ce sont là les deux options que nous sommes en train d'examiner, que se passerait-il concrètement sur les navires en mer et avec les Forces régulières et de réserve? Y aurait-il une assemblée? Est-ce que le commandant du navire expliquerait les raisons d'un tel changement? Est-ce que les officiers du navire seraient invités dans le carré des officiers pour exprimer leurs opinions ou leurs préoccupations?

Si le comité recommandait une de ces deux formulations, « Marine canadienne » ou « Marine royale du Canada », il appartiendrait encore au ministre de prendre un arrêté en ce sens ou de ne pas le faire. Supposons que tout cela se produise. Que se passerait-il, d'après vous, sur les navires canadiens qui se trouvent en mer, ou sous la mer, et dans les unités de réserve des différentes régions?

Vam Buck : En pratique, le commandant de la marine distribuerait des documents d'information qui suivraient la chaîne de commandement et décriraient les raisons du changement dans toutes les unités de la Marine canadienne, jusqu'au niveau de la flotte et ensuite au niveau des unités, qui est bien sûr, ici le navire. La discussion dans le carré des officiers dont vous avez parlé se produirait très probablement.

Lorsque ce genre d'orientation est choisi, il n'y a pas de débat. Le débat doit avoir lieu avant.

Je conviens avec l'amiral Mifflin que, si vous demandiez à des officiers de marine ou à des marins ce qu'ils pensent du changement de nom, la plupart d'entre eux choisiraient « Marine canadienne ». Avec les anciens combattants, ça ne serait pas le cas.

Le sénateur Segal : Il y a souvent une différence entre le nom officiel d'une institution et la façon dont les gens désignent l'institution dans leurs activités quotidiennes. Nous pouvons désigner le Sénat comme étant la Chambre haute du Canada. Il est possible que des milliers de Canadiens utilisent un autre nom pour désigner ce que nous faisons ou un autre titre pour notre institution. Un des grands avantages d'une société libre est que les citoyens ont toute liberté de faire ce genre de chose.

Si l'on utilisait un test d'association libre de mots, si on leur demandait où ils travaillent, est-ce que la plupart de ceux qui font partie aujourd'hui du Commandement maritime parleraient de Commandement maritime ou de marine?

Vam Buck : Ils diraient la marine. La marine est la marine. C'est la marine ou la Marine canadienne.

Le sénateur Segal : À votre avis, c'est l'état d'esprit que l'on retrouve à l'heure actuelle chez les hommes et les femmes qui servent aujourd'hui dans la marine et que l'on retrouve dans leurs familles.

Vam Buck : Oui.

Le vice-président : Lorsque l'armée a été désignée comme étant la Force mobile, il était illégal d'utiliser le mot « armée » dans toute correspondance officielle et même de dire « armée » pendant plusieurs années après l'unification. Cette interdiction a bien sûr été atténuée et aujourd'hui le terme « armée » est couramment utilisé.

Merci de cette précision.

Le sénateur Mitchell : Pour répondre au point soulevé par le sénateur Plett, selon lequel si vous faites allégeance à la Reine, votre organisme devrait être appelé « royal », nous prêtons un serment d'allégeance à la Reine, mais je ne pense pas qu'il propose que nous nous appelions le « Sénat royal du Canada ».

Je ne sais pas ce que le mot « royale » évoque qui pourrait renforcer l'image, le moral ou la présence de la Marine canadienne. Comme je l'ai dit à un témoin précédent, les sommets de notre histoire militaire ont été des batailles que nous avons gagnées et qui ont démontré que nous étions une nation indépendante. La bataille de Vimy est un classique à ce sujet. Je sais que le mot « royal » évoque une époque dont les Canadiens qui vivaient à ce moment n'ont pas toujours un très bon souvenir, c'est-à-dire qu'ils avaient le sentiment d'être colonisés et d'avoir un statut inférieur à celui des autres pays. C'est ce que le mot « royal » évoque pour moi dans ce contexte.

Pourquoi l'adjectif « canadienne » n'est-il pas suffisamment puissant et identifiable pour définir la Marine? L'ajout de « royale » à cette appellation ne rend-il pas moins canadienne l'appellation de notre Marine canadienne?

Vam Buck : Je souscris à ce point de vue. Il faut remonter à 1911. Deux choses se sont produites peu après la création de la marine. La première est que le gouvernement canadien a proposé que nos navires battent un seul pavillon, un pavillon blanc avec une feuille d'érable verte. Le Royaume-Uni a refusé. Il y a eu ensuite un débat au sujet de la langue qui devait être utilisée dans la Marine et des directives ont été données pour qu'une seule langue soit utilisée.

C'est de l'histoire ancienne, mais j'estime que les hommes et les femmes qui sont dans la marine du Canada aujourd'hui ne verraient aucun avantage à l'ajout du mot « royale ». La « Marine canadienne » est la façon dont ils veulent qu'elle soit appelée.

Il y a de nombreux sites de la Marine royale qui sont désignés comme des sites de la Marine britannique. Je ne dis pas qu'ils abandonnent le mot « royale ». Ce n'est pas le cas, mais nous constatons des changements dans l'usage courant.

Je pense que « Marine canadienne » serait la solution à retenir, mais je suis tout à fait d'accord avec le vice-amiral Mifflin lorsqu'il parle d'inviter un certain nombre d'officiers de marine pour qu'ils comparaissent devant le comité, en particulier des adjudants-chefs de 1re classe, le commandant-chef de la Marine et l'adjudant-chef des Forces canadiennes, qui est, entre parenthèses, un premier-maître. Ils vous fourniraient une version non embellie de ce qu'ils pensent.

Le vice-président : La motion utilise les mots suivants : « Que le Sénat du Canada encourage le ministre de la Défense nationale [...] ». Je ne vais pas vous demander de faire des hypothèses, mais vous étiez le vice-chef d'état-major et vous étiez donc proche du sous-ministre, du ministre. Dans une situation comme celle-ci, que ferait le ministre s'il recevait notre encouragement?

Vam Buck : Il aurait certainement une discussion avec le Chef d'état-major de la Défense, ce serait une première étape. En supposant que le Chef d'état-major de la Défense appuie également ce changement, comme je pense qu'il le ferait, avec quelques nuances, je pense qu'il y aurait une discussion avec le commandant de la marine pour connaître son point de vue. Une menace serait qu'au cours de la discussion que le Chef d'état-major aurait avec le ministre, le cas de l'armée et de l'aviation serait, je pense, soulevé. Structurellement, il serait relativement facile de changer l'appellation de ces deux services. Je ne peux pas parler pour l'armée ou l'aviation, mais à mon avis, elles auraient le même point de vue que la marine.

Le vice-président : La loi sur l'unification n'a pas été abrogée et la Loi sur la défense nationale a été modifiée. Comme le sénateur Plett l'a déclaré, ils n'ont pas défini les structures à l'époque, ce qui était très sage. Cet aspect a été confié au protocole et au ministre. Cependant, s'il s'agit d'un commandement et que la marine est reconnue comme étant la « Marine canadienne », ne serait-il pas nécessaire de changer certaines règles et règlements des Forces canadiennes pour donner effet à ce changement? Faudrait-il envisager de modifier ou d'abroger la loi portant unification des Forces armées?

Vam Buck : Je ne le pense pas, parce que les pouvoirs de cette chose que j'appelle constamment un « élément des Forces canadiennes » sont définis par sa nature. Si c'est une unité, elle possède certains pouvoirs. Si c'est une formation, elle a des pouvoirs plus vastes. Si c'est un commandement, celui-ci possède encore des pouvoirs plus vastes. Cependant, en fin de compte, il n'y a qu'une personne qui administre et contrôle les Forces canadiennes, c'est le Chef d'état-major de la Défense. Tout ceci doit être approuvé par le ministre. Sur le plan structurel, il y aurait peu de changements, parce que vous limitez le pouvoir de l'institution, dans ce cas-ci celle qui est appelée la Marine canadienne, à celui que possède un commandement. Il n'y a donc pas les complications que poserait la création d'un service distinct.

Sur le plan concret, et le contre-amiral Mifflin l'a également mentionné, depuis l'unification, dans la marine, tout le monde la désigne encore sous l'appellation de Marine canadienne. C'est ce qu'elle est. La plupart des marines avec lesquelles nous travaillons nous appellent la Marine canadienne parce qu'ils ne connaissent pas d'autres façons de nous désigner. Je ne pense pas que cela serait difficile à changer.

J'aimerais revenir brièvement sur l'intégration. Je suis tout à fait en faveur de l'intégration. L'unification existe et ne disparaîtra pas. Je suis en faveur de cette intégration et en faveur d'une institution appelée les Forces canadiennes, et non pas de trois institutions appelées l'armée, la marine et l'aviation.

Une partie du problème que l'on trouve ici, qui remonte en fait à 1968, est que l'on a voulu — et vous l'avez mentionné vous-même sénateur — effacer, et je dis bien effacer, tout ce qui était marine, tout ce qui était aviation ou tout ce qui était armée. Je me souviens d'un hôpital naval à Halifax qui arborait l'emblème de la marine. Il a fallu l'effacer complètement au jet de sable. Ce genre de choses a laissé des cicatrices et des souvenirs pas faciles à oublier, mais peut-être davantage pour les gens comme moi, parce que je les ai vécus, tout comme le sénateur.

Les hommes et les femmes d'aujourd'hui savent une chose. Ils sont Canadiens. Ils sont fiers de l'être, et ils servent très bien leur pays. Je pense qu'ils accepteraient facilement de s'appeler « Marine canadienne », « Armée canadienne » ou « Aviation canadienne ».

Le vice-président : La réserve navale a des capitaines honoraires. Pensez-vous qu'ils voudraient occuper une position distincte de celle de la force régulière?

Vam Buck : Je ne le pense pas, pas les hommes et les femmes qui servent de nos jours. Pour les anciens combattants, ce serait différent.

Le vice-président : Et les honoraires?

Vam Buck : Il y a certains honoraires qui préféreraient peut-être cela? C'est sans doute vrai. Vont-ils en faire une question de principe? Absolument pas. En fin de compte, la décision de l'appellation de la Marine n'appartient pas aux honoraires. Heureusement, il y a moins de capitaine et de colonels honoraires, beaucoup moins, et il y en a d'excellents, si je peux me permettre, sénateur.

Le vice-président : Ce n'était pas vraiment utile.

Vam Buck : Je ne pense pas que cela ferait problème.

Le vice-président : Très bien.

Pour ce qui est de la Réserve navale et de son intégration à la marine, aspect qui, je crois, fait partie de cette idée, y a- t-il eu des obstacles à l'emploi à temps plein de réservistes de la marine au sein de la marine pour ce qui est des bâtiments majeurs, et est-ce là un aspect qui risque de créer des frictions au sein de la marine?

Vam Buck : Non, parce qu'il a été décidé à la fin des années 1980 d'attribuer un certain nombre de rôles précis à la réserve navale, dont l'un était de s'occuper de la surveillance maritime. Cette tâche est confiée à une classe de bâtiments que l'on appelle les navires de défense côtière. L'équipage de ces navires est, à une ou deux exceptions près, uniquement composé de réservistes de la marine. Il y a une équipe d'inspection portuaire sous-marine qui est un rôle naval particulier. La marine a dit : « Nous avons une réserve et une force régulière, nous allons donc leur attribuer des rôles complémentaires pour créer une unité. » Les réservistes de la marine ont la possibilité de s'enrôler sur les grands navires de guerre, et cela se produit encore. Mais en fait, la marine a été intégrée, tout comme l'armée l'a été, sur une échelle plus vaste, à cause de l'Afghanistan, si je peux m'exprimer ainsi.

Le vice-président : Amiral, je vous remercie de nous avoir fourni des réponses claires et concises. Nous l'apprécions beaucoup.

Mesdames et messieurs, notre témoin suivant est cet après-midi l'historien naval, Marc Milner. Il a été historien auprès de la direction de l'histoire et du patrimoine à la Défense nationale. Il est doyen du Département d'histoire de l'Université du Nouveau-Brunswick — une grande faculté — et il est membre du conseil des gouverneurs du Collège militaire royal du Canada.

Monsieur Milner, bienvenue à cette discussion. Voulez-vous faire une déclaration d'ouverture?

Marc Milner, historien naval, Université du Nouveau-Brunswick : Oui, effectivement.

J'aimerais commencer par remercier le comité de me donner la possibilité de parler de ce sujet. Comme plusieurs d'entre vous le savent, je suis passionné par la marine et son histoire, mais je ne suis pas un grand sentimental.

Il y a un an environ, lorsque le bureau du ministre de la Défense nationale m'a demandé mon avis au sujet de la restauration de la MRC et de la boucle d'officier, j'ai dit que je n'étais pas favorable à la MRC et assez peu porté à redonner à la marine la boucle d'officier, même si j'en suis très heureux maintenant. Cela donne belle allure et montre que celui qui la porte est un officier de marine et non pas un pompier. Je pense que je m'étais un peu égaré sur ce point.

Je sais que vous examinez la question de savoir s'il y a lieu de redonner le titre de « Marine » à notre marine. J'estime qu'il ne s'agit pas là seulement d'une question reliée à son centenaire. Avec l'unification des Forces armées au cours des années 1960, l'établissement de divers « commandements» était conforme à un type d'organisation qui était intéressant en théorie, mais non fonctionnel en pratique. Lorsque le Commandement maritime a été créé à l'origine comme un commandement fonctionnel, il comprenait à la fois la marine, comme nous la connaissons, ainsi que l'équipement aérien de marine, y compris l'Argus TLP — très longue portée — l'avion de patrouille des FARC et ce qui restait de la flotte des hélicoptères Sea King embarqués de la marine.

Cela n'a pas duré très longtemps. Dès le début des années 1970, l'aviation a été « réintégrée » dans la force aérienne du Commandement aérien, faisant de la marine le seul bien permanent du Commandement maritime. Même la propre flotte d'hélicoptères de la marine était maintenant contrôlée par le Commandement aérien et affectée au COMAR à des fins opérationnelles sous l'appellation Groupe aérien maritime.

J'ai soutenu dans mon ouvrage Canada's Navy : The First Century que la raison d'être de l'unification avait complètement disparu à cause des changements intervenus dans la structure des forces militaires au cours des 10 années qui ont suivi l'adoption de cette loi. D'après moi, cette raison d'être ainsi que la terminologie qui y était associée et qui perdure encore ont été érodées plus gravement encore par la transformation récente des Forces canadiennes qui a débouché sur la création d'un autre niveau de « commandements ». De l'avis général, ces commandements paraissent plus logiques. Nous avons maintenant des commandements opérationnels comme le COMFEC, le FOSCOM et Commandement Canada. Ce sont des commandements opérationnels interarmées qui fonctionnent de façon satisfaisante, d'après l'avis général, et qui sont adaptés à notre époque.

J'aurais pensé que l'introduction de ce nouveau niveau de commandements aurait été une raison suffisante pour supprimer les sobriquets orwelliens qui encombrent toujours les appellations des Forces canadiennes. Je dois vous dire qu'en vérité, étant donné que je traite souvent avec des civils, que ces appellations n'ont jamais vraiment prise et ne sont pas entrées dans la conscience de la population comme des termes utiles. Le Commandement maritime, le Commandement aérien et le Commandement mobile des Forces terrestres sont des termes qui ne veulent absolument rien dire aux Canadiens ordinaires. Mes étudiants, mes collègues, mes voisins et les messieurs avec qui je joue au hockey quelquefois par semaine parlent en termes d'armée, de marine et d'aviation. En fait, je crois que c'est ce que tous les pays font et il est temps que nous le fassions également.

Cela dit, comme je l'ai mentionné, je n'irai pas jusqu'à demander le rétablissement de l'appellation « Marine royale du Canada ». Je suis heureux de constater que la motion du Sénat demande uniquement l'adoption de l'appellation « Marine canadienne ».

Une grande partie de ma carrière professionnelle a été consacrée à retracer l'histoire de notre service naval. Pendant les premières années, à une époque où l'association à la fois avec l'empire et à ce qui était la plus grande marine au monde fournissait une légitimité bien nécessaire à un service très jeune qui essayait de faire sa place, ce lien était utile et nécessaire. Nous avons pris notre place dans l'alliance occidentale en remplissant notre mission qui consistait à défendre les convois dans l'Atlantique Nord et à faire la guerre anti-sous-marine pendant la Seconde Guerre mondiale. La vieille MRC est devenue un chef de file mondial dans ces deux missions pendant la guerre froide. Elle en est venue à s'identifier peut-être un peu trop à la confrérie internationale de la puissance maritime anglo-américaine plutôt qu'à se considérer comme un élément clé de la défense nationale du Canada. La MRC, qui à mon avis, s'est un peu écartée de son rôle au début des années 1960, a chèrement payé le fait de ne pas avoir été en phase avec le Canada et avec les politiciens canadien en 1968, année où elle a disparu avec l'unification.

Au cours des 42 années qui ont suivi, la marine a appris à être fière de ce qu'elle était et de son rôle. Elle a fait sienne la tradition canadienne d'excellence tant en mer qu'à terre. Elle a toujours servi le Canada avec professionnalisme et fierté. Elle n'a pas oublié ses racines, mais il n'est plus nécessaire qu'elle soit identifiée, définie et légitimée par une association avec une autre entité.

Pour toutes ces raisons, j'appuie sans réserve la motion du Sénat et espère que des mesures seront prises pour qu'elle soit adoptée par la Chambre et devienne loi avant la fin de l'année.

Le vice-président : Je vous remercie. Voici une note d'optimisme favorable à l'adoption de notre motion.

Le sénateur Segal : En tant qu'historien amateur, je tiens à exprimer ma profonde admiration pour le travail que M. Milner a fait dans la discipline qu'est l'histoire en général, l'histoire militaire en particulier et plus précisément, celle de la Marine canadienne. Il ne se fait pas suffisamment de travail dans ce domaine et c'est un honneur pour nous de vous entendre aujourd'hui.

M. Milner : Merci.

Le sénateur Segal : Vous êtes historien et j'aimerais que vous nous aidiez à saisir le moment où, d'après vous, notre marine est devenue la « Marine canadienne » et non plus la « Marine royale du Canada ». On a beaucoup parlé de Paul Hellyer et de l'unification, une réalité concrète.

L'autre réalité, d'après ce que me disent des officiers de marine d'expérience, est que nous avons mis au point nous- mêmes des façons d'exécuter les tâches navales et maritimes. Nous avons élaboré notre propre protocole et nos appareils de génie. Par exemple, nous avons mis au point un mécanisme qui permet d'arrimer un hélicoptère avant qu'il atterrisse et nous avons conçu un sonar à antenne remorqué, des dispositifs qui sont exclusivement canadiens.

Néanmoins, nombreux sont nos collègues pour qui le lien royal est important, et pour les bonnes raisons et qui ne voient rien de négatif à l'ajout de l'adjectif « royale » à l'expression « Marine canadienne ». Je pense qu'un tel ajout aurait peut-être des répercussions négatives, mais je préfère m'en remettre à l'opinion d'un expert pour savoir à quel moment nous sommes passés d'une marine « royale canadienne » à une marine « canadienne » et pour expliquer ce que signifie ce passage en terme d'attitude et par rapport au contexte historique moderne de la Marine.

M. Milner : C'est une question difficile et complexe. Le passage ne s'est pas fait de façon subite. On peut parler de « chemin de Damas », c'est un processus. Je dirais que le moment auquel la transition est devenue plus nette correspond probablement aux années de disette, si l'on peut les appeler ainsi — à l'époque où la marine est passée à l'uniforme vert en tant que Commandement maritime au cours des années 1970.

Cela dit, le processus qui a défini une approche spécialement canadienne à la guerre navale et l'expertise que nous avons acquise en tant que marine de lutte anti-sous-marine de classe mondiale ainsi que le renouvellement de cette marine ont vraiment commencé au cours des années 1940. À la fin des années 1950 et au début des années 1960, la Marine royale du Canada était profondément engagée dans un processus de définition de son rôle comme service naval national ayant un lien à définir avec les grandes marines anglo-américaines. D'une certaine façon, tout le débat qu'a suscité l'unification a porté en partie sur la définition de la nature de la Marine canadienne.

Ceux d'entre vous qui connaissent bien l'histoire savent que lorsque M. Hellyer s'est rendu à Halifax pour passer en revue la marine, il a trouvé qu'elle était trop britannique, trop royale, trop ancien monde, trop liée par les traditions et trop européenne. Si vous parlez aux gens qui ont vécu ces années-là, vous obtenez deux points de vue très différents sur ce qui s'est passé.

Quoi qu'il en soit, on s'entend pour dire qu'à la fin des années 1950, la Marine canadienne avait commencé à se définir comme étant différente et véritablement canadienne. Il y avait bien sûr un peu de résistance de la part de la vieille garde — certains amiraux âgés et certains officiers — qui avait connu l'ancien système de formation dans la Marine royale.

Au cours des années 1950, la Marine canadienne a rapatrié la plus grande partie de ses services de formation. La flotte était suffisamment forte pour se le permettre. Certains officiers britanniques qui s'étaient engagés dans la Marine canadienne dans les années 1950 avaient même constaté qu'elle était dans une phase de transformation et qu'elle s'affirmait principalement comme étant canadienne. On peut évidemment se demander comment ce processus aurait évolué s'il n'y avait pas eu le choc de l'unification.

Une chose est sûre : la marine a été envoyée dans une sorte de purgatoire au cours des années 1970 et cela a amené à beaucoup réfléchir. Ce processus a été très douloureux. De mon point de vue, la marine qui est sortie de l'expérience terrible qu'a été l'unification à la fin des années 1970, était politiquement plus avisée, plus consciente et plus canadienne.

Il faut parler de processus et non pas d'événement unique. Il a fallu près de 25 ans pour que cela se fasse. Lorsque la marine est redevenue bleue dans les années 1980, elle savait qui elle était et était à l'aise dans sn nouvel état. Il a fallu à peu près une génération pour arriver là.

Le vice-président : Vous avez parlé de l'unification de 1968 et de son impact, y compris, des décisions d'un certain nombre d'officiers généraux d'ancienneté au sujet de ce qui s'est passé là-bas. Vous pourriez peut-être nous en dire quelques mots.

Cette même année, il y a eu un nouveau navire canadien-français, à cause du bilinguisme. Quel a été l'effet des unités françaises et du bilinguisme sur l'atmosphère qui régnait au sein de la Marine canadienne? Est-ce que cela a eu un effet sur son identité canadienne?

M. Milner : L'effet a été profond. Je ne sais pas s'il y a quelqu'un qui a fait une recherche détaillée sur tout ceci, mais lorsque j'ai travaillé sur mon livre, j'ai constaté que les travaux antérieurs étaient assez superficiels.

La création d'un service naval national avec la Marine canadienne fait partie de la mise en œuvre du bilinguisme et du biculturalisme. Le quartier général de la réserve navale a été établi à Québec. Je me trompe peut-être, mais je crois qu'il n'y a, à l'heure actuelle, aucune unité désignée de langue anglaise dans la Marine canadienne. Il existe des unités bilingues et des unités francophones, mais pas d'unités exclusivement anglophones; cela indique assez clairement comment la marine a évolué.

Il y a aujourd'hui, ce qui n'existait pas auparavant, un certain nombre d'officiers supérieurs d'origine canadienne- française. La marine a été considérée au Québec comme un service dans lequel les gens peuvent s'engager, plutôt qu'une mesure disciplinaire consistant à être envoyée dans une institution principalement anglophone qui pratique uniquement le Book of Common Prayer anglican, avec tout le respect qui est dû aux personnes de cette confession.

Ce processus a énormément profité à la marine et au Canada. Même si la marine éprouve encore de la difficulté à être fonctionnellement bilingue lorsqu'elle veut l'être, elle est maintenant profondément différente.

Je suis allé en mer à bord d'une frégate canadienne le printemps dernier pour la première fois en 30 ans. Je n'avais pas été en mer depuis 1980. C'est une marine très différente, moderne, canadienne, consciente de sa force avec une présence canadienne-française relativement importante.

Nous avons un lien avec la tradition. Nous avons encore les navires canadiens de Sa Majesté. Ce lien demeure. La boucle d'officier a été restaurée, ce qui fait ressortir le lien de la marine avec toutes les autres marines du monde. C'est une excellente chose, mais la marine n'a pas besoin de rechercher une légitimité ou une conscience de soi supplémentaire en remontant plus loin dans son histoire. Je pense qu'elle est très bien comme elle est.

Le vice-président : Pourriez-vous dire quelques mots des amiraux et de l'unification?

M. Milner : Comme vous le savez, ce sont probablement les amiraux qui ont le plus lutté contre la réunification. La marine a estimé que M. Hellyer, lorsqu'il était ministre de la Défense nationale, n'avait pas respecté la promesse qu'avait faite Lester Pearson de préserver les grandes traditions. Ils se sont rendus à Ottawa et ont fait tout ce qu'ils ont pu pour conserver ce qu'ils avaient, et je pense qu'ils avaient en partie raison. Nous sommes revenus au bleu marine et à la boucle d'officier. Si la marine avait pu demeurer la « Marine » dans l'unification de 1968, il n'y aurait pratiquement pas eu d'opposition. Vous vous souvenez peut-être qu'on a même pensé un moment donné adopter les grades de l'armée et faire commander les navires par des lieutenants-colonels, des stupidités de ce genre.

Il est vrai que la marine n'était peut-être pas aussi avisée politiquement et bien connectée dans les années 1960 qu'elle aurait sans doute dû l'être. Elle a fait certaines choses qui, avec le recul, auraient pu être faites différemment. On pourrait se demander si ce service n'était pas un peu dépassé et déphasé. Je pense qu'il n'était pas conscient de ce qui se passait au Canada sur le plan social, dans les années 1960, sur le plan politique avec la Révolution tranquille, par le biais du bilinguisme et du biculturalisme. La marine a essayé coûte que coûte de garder le cap et c'est ce qui a entraîné sa perte. Cependant, le résultat global est une marine qui est uniquement canadienne et très à l'aise avec ce qu'elle est.

Le sénateur Mitchell : Monsieur Milner, je suis ce que vous dites. Les membres du comité abordent cette question avec un esprit très ouvert, mais je suis définitivement en faveur de « Marine canadienne ».

Je ne voudrais pas vous faire dire quoi que ce soit, mais il me semble que vous avez laissé entendre que si l'on plaçait le mot « royale » dans l'appellation « Marine canadienne », l'appellation serait nettement moins canadienne.

M. Milner : À mon avis, ce serait bien le cas. Je ne pense pas que cela soit une bonne chose.

Je suis le fils de deux anciens combattants d'une petite communauté anglophone du Nouveau-Brunswick où tous les Red Ensigns ont flotté à mi-mât et à l'envers lorsque le nouveau drapeau canadien est arrivé. Pour vous dire la vérité, je devais rapidement être accepté dans la Black Watch et je n'ai jamais compris pourquoi ils m'avaient attrapé. J'ai voulu ensuite m'engager dans la Marine royale du Canada, mais je n'ai pas pu le faire parce que ses membres portaient un uniforme vert.

J'ai été traumatisé par toute cette affaire de l'unification et de la dissolution des liens que nous avions avec l'empire et la Couronne. Cela ne me dérange plus. J'ai consacré toute ma carrière professionnelle à essayer de comprendre les rapports qui ont existé entre les Forces armées canadiennes et principalement celles de la Grande-Bretagne au cours des deux guerres mondiales et après la guerre. Cet héritage nous a apporté d'excellentes choses que nous pouvons chérir. Il se trouve simplement que j'estime qu'il s'agit là d'une mesure rétrograde qui n'est pas nécessaire.

Je ne sais pas jusqu'où il est possible d'aller lorsqu'on exprime ses opinions personnelles. Je ne pense pas que nous soyons aussi républicains que les Australiens; je ne pense pas que nous allons nous engager dans cette voie, mais il sera intéressant de voir si, lorsque Sa Majesté obtiendra sa récompense finale, il y aura un Roi Charles au Canada.

Je n'irais pas dans cette direction. Je pense que l'appellation « Marine canadienne » est bonne, et je m'en tiendrais là.

Le sénateur Mitchell : Au sujet de votre intérêt pour la Black Watch, je peux vous dire que mon père en a fait partie pendant plus de 30 ans, je partage donc avec vous une partie de cette tradition.

M. Milner : C'était l'unité maritime. Si quelqu'un voulait aller dans l'armée, il fallait faire partie de la Black Watch. Je voulais m'engager dans la marine, parce que je voulais ressembler à un marin, mais M. Hellyer a mis tout le monde en vert. Cela m'a traumatisé et c'est la raison pour laquelle je suis devenu un historien naval.

Le sénateur Plett : Le vice-amiral Buck a déclaré plus tôt qu'il était fier de notre Marine canadienne. Je crois que j'en suis également fier et je serai fier de notre Marine canadienne qu'on l'appelle « Marine canadienne » ou « Marine royale du Canada ». Je pense que tous les membres du comité s'entendent sur la nécessité de modifier cette appellation parce que l'appellation actuelle n'est pas acceptable.

Le sénateur Mitchell a déclaré plus tôt que la nostalgie était associée au fait d'être conservateur. Il est possible que ceux d'entre nous qui sont plus âgés soient plus nostalgiques; je n'en sais rien.

La question de l'appellation de la force navale canadienne ne concerne pas la monarchie. Je suis tout à fait en faveur de l'appellation « Marine royale du Canada », mais pour moi, il s'agit en fait d'accorder aux forces navales du Canada le respect qu'elles méritent. Je crois que nous sommes tous du même avis, mais nos opinions divergent sur la question de savoir comment y parvenir. Pour moi, rétablir un nom historique serait une façon d'honorer nos marins. De nombreux anciens combattants préféreraient « royale », même si certains nouveaux membres de la marine ne seraient pas de cet avis. Nombreux sont ceux qui ont lutté et qui sont morts sous ce nom historique qui inspire toujours la fierté et le respect. C'est pour cette raison qu'il n'y a pas moins de 17 marines dans le monde qui sont fières de leur appellation de « royale ». Il ne s'agit pas ici de monarchie, mais plutôt de rétablir l'histoire.

Je ne pense pas que nous devrions tenter de déprécier l'appellation « royale ». Comme je l'ai dit, je serai heureux si, à la fin de ces audiences et de cette étude, nous décidons d'appeler notre marine la « Marine canadienne ». Je serai tout aussi fier de notre marine si nous l'appelons, comme je l'espère, la « Marine royale du Canada ».

Voilà mon commentaire. J'aimerais beaucoup connaître votre réaction, monsieur.

M. Milner : D'une certaine façon, mon sentiment est exactement semblable au vôtre, même s'il y a une petite voix dans ma tête qui me dit qu'il n'est pas nécessaire de parler de « Marine royale du Canada ». La marine a été désignée autrement pendant 42 ans, ce qui représente une bonne partie de son siècle d'existence. Elle avait un autre nom auparavant. Elle a été le Service naval du Canada pendant sa première année d'existence. Elle n'a acquis le nom de Marine royale du Canada qu'en février 1911.

J'ai été en mer au printemps dernier pendant une semaine environ, à bord du NCSM Fredericton. Je n'ai senti aucune envie de revenir à la « Marine royale du Canada » chez qui que ce soit, ni chez les premiers maîtres ni chez les officiers de pont inférieur. Ils sont tous pas mal plus jeunes que moi. Ils préservent les traditions que nous chérissons et qui nous paraissent importantes, mais ils écrivent l'histoire avec les frégates de patrouille canadiennes et ils le font depuis 20 ans. Ils patrouillent les eaux de l'Asie et du Pacifique Sud, participent à toutes sortes d'opérations qui, pour eux, sont extrêmement importantes et ils créent une nouvelle tradition associée à une marine efficace, de taille moyenne et qui peut être déployée dans le monde entier. La plus grande partie de ce qu'ils font n'a pratiquement rien à voir avec l'Atlantique Nord, avec les convois, avec la guerre sous-marine, avec le genre de choses qui ont défini les premiers moments de la marine de la guerre froide. Je trouve très bien de créer de nouvelles traditions en s'appuyant sur les anciennes. Depuis 40 ans, la Marine canadienne a élaboré ses propres traditions, en s'appuyant sur les forces acquises après la guerre et sur l'expérience.

J'ai soutenu dans différentes publications que c'est au cours de la Seconde Guerre mondiale que la Marine canadienne avait véritablement pris son essor. C'est là que son rôle a été défini. Après la fin de la guerre froide, ce rôle était trop limité pour nous. Comme vous le savez sans doute, même les structures de commandement ont changé dans l'Atlantique Nord et nous faisons les choses différemment depuis environ une vingtaine d'années. Si vous parlez aux jeunes hommes et aux jeunes femmes qui font partie de cette flotte, ils vous diront que c'est le présent qui les intéresse. Ils pensent à leur carrière et aux endroits où ils ont été depuis 10 ans. Je pense qu'ils ont leur mot à dire si je peux m'exprimer ainsi. Je n'ai pas constaté de consensus ni d'opinion générale en faveur d'un retour à une « Marine royale du Canada ».

Cela dit, à l'exception des détachements aériens et de certains techniciens à bord, les cadres de l'armée et certains autres, il est incontestable que la marine aimerait être la Marine, ce qui me paraît une excellente idée.

Le sénateur Plett : Je souscris tout à fait à l'idée que ces jeunes hommes et jeunes femmes qui servent si bien notre pays devraient avoir leur mot à dire sur ce point. J'espère toujours pouvoir passer un jour quelque temps sur une frégate. Si j'y parviens, je ferai peut-être un petit sondage non officiel.

Le vice-président : J'aimerais poser une question supplémentaire, si vous le permettez. Vous avez relié le nom à un recentrage opérationnel des missions de la marine, qui s'est produit en particulier depuis une vingtaine d'années, ce qui est un point de vue intéressant pour voir là une nouvelle marine, et un point de vue important. Pensez-vous que le fait d'avoir envoyé la marine plus loin dans l'Arctique et de lui avoir donné les capacités pour le faire, pourrait renforcer cet argument?

M. Milner : Je crois que oui. Pendant la plus grande partie de la guerre froide, la marine a concentré son action sur la chasse aux sous-marins dans l'Atlantique Nord et elle faisait à peu près la même chose dans le Pacifique. Comme l'historien naval, Richard Gimblett me l'a fait remarquer, depuis 20 ans, la principale zone d'opération de la marine a été l'océan Indien. Si l'on recentre sa mission sur l'Arctique, quand ces patrouilleurs de l'Arctique seront finalement construits, cela va susciter de l'enthousiasme dans une bonne partie de la marine. Je pense que ceux qui aiment la haute mer voudront toujours faire le tour du monde et faire des choses intéressantes dans des lieux lointains.

Cette marine est toutefois bien différente de celle que j'ai connue assez bien en 1980 qui, sur de nombreux points, était le sommet de la guerre froide, qui consistait à rechercher des sous-marins à propulsion et armement nucléaires dans l'Atlantique Nord, prolongeant ainsi la tradition de la guerre et du début de la guerre froide. La flotte que nous avons construite, les frégates de patrouille canadiennes, a été conçue uniquement en vue de cette mission. Le gouvernement nous a donné cette petite flotte de navires de 5 000 tonnes qui peuvent sillonner tous les océans et appuyer la politique étrangère du Canada dans le monde entier. C'est ce qu'ils font depuis 20 ans.

Une des choses qui m'a frappé lorsque j'ai écrit un nouveau chapitre pour la deuxième édition de mon livre Canada's Navy : The First Century, qui est paru il y a un an environ, est le fait que la marine, en tant qu'institution, a non seulement été exceptionnellement occupée, mais qu'elle a été retirée de la première guerre du Golfe en 1990-1991 pour remplir des missions dans un environnement opérationnel différent. Elle s'occupe toujours de GSM, mais pas autant qu'avant. Une bonne partie de ce que fait cette marine est très différente et de nature exceptionnelle.

Lorsque je suis monté à bord du NCSM Fredericton dans le port d'Istanbul, je n'ai pas été frappé par sa disponibilité opérationnelle ni par la présence de mitrailleuses de calibre 50 chargées et prêtes à tirer, tant à l'arrière qu'à l'avant; j'ai été frappé par le fait que le pont était jonché de gilets pare-éclats et de casques qui étaient accrochés un peu partout. Ces jeunes hommes et jeunes femmes ont participé à une guerre où une grenade propulsée par fusée ou une bombe humaine dans un zodiaque, ou des trafiquants de drogue ou des personnes dans un bateau rapide pouvaient leur tirer dessus avec une AK-47 ou une mitrailleuse de calibre 50; ils font ce genre de choses depuis 20 ans. Ils élaborent leur propre tradition d'excellence pour ce qui est des visites à bord, de la lutte contre les pirates et de renforcer l'ordre mondial. Ils s'identifient à une marine différente de celle à laquelle la plupart d'entre nous pensent encore.

Le vice-président : Je vous remercie. Voilà une dimension intéressante.

Le sénateur Peterson : Parmi les 17 pays qui utilisent le mot « royale », savez-vous s'ils ont déjà utilisé d'autres appellations et s'ils ont déjà parlé de la changer?

M. Milner : Une réponse brève à la première question est simplement que je n'en sais rien, monsieur. La deuxième réponse est à peu près la même.

Si la Marine royale du Canada existait encore, il est évident que nous n'aurions pas ce débat. Je me méfie toujours un peu. Il est vraiment honteux que l'on ait procédé à cette unification en 1968. C'est ce qui s'est passé à ce moment; les temps ont changé. L'appeler la « Marine » serait une excellente chose, mais je crains de ne pas savoir très bien ce qui s'est passé dans la Marine royale d'Australie et dans la Marine royale de la Nouvelle-Zélande. J'en suis désolé.

Le sénateur Manning : Monsieur Milner, j'aimerais que vous reveniez sur une chose que vous avez mentionnée dans votre déclaration d'ouverture. Vous avez recommandé de ne pas rétablir le nom de MRC, et vous n'étiez pas très chaud à l'égard de l'idée de restaurer la boucle d'officier, même si vous l'acceptez aujourd'hui.

M. Milner : Oui.

Le sénateur Manning : Premièrement, pourquoi n'étiez-vous pas très chaud pour le rétablissement de la boucle d'officier? Serait-il possible qu'un jour vous soyez satisfait de l'adjectif « royale »?

M. Milner : J'imagine que oui. Je suis un admirateur de Groucho Marx. Je peux changer d'avis rapidement. Cela dépend de la question.

Ma carrière d'historien naval a été en partie consacrée à examiner comment la Marine canadienne a essayé d'échapper à l'étreinte parfois un peu étouffante et pas toujours très agréable de la flotte impériale de la Marine royale. Les travaux que j'ai effectués sur la Marine canadienne pendant la Seconde Guerre mondiale et même pendant les années 1950, font ressortir un problème d'identité qui perdure. La Marine royale a souvent vivement critiqué notre marine au cours de la Seconde Guerre mondiale, surtout pendant les hostilités. La marine a éprouvé de la difficulté à différents moments à exercer un contrôle opérationnel sur ses propres forces et à faire les choses qu'elle devait faire avec sa propre marine dans ses propres eaux. Certains éléments de la Marine royale ont fait preuve de compréhension et lui ont donné son appui. Cette dernière se trouvait toutefois au milieu d'une grave crise ou d'une guerre et elle a eu tendance à mettre de côté les Canadiens pour s'occuper de problèmes plus vastes, et elle nous perdait un peu de vue.

Il me paraît certain qu'au cours de la Seconde Guerre mondiale, compte tenu des équipages engagés après la guerre, compte tenu des mutineries qui se sont déclenchées pendant cette période et des pressions qui s'exerçaient sur la flotte au cours des années 1950 — les marins pensaient que leur navire était avant tout la Marine canadienne. Ils n'appartenaient pas à une sorte de fraternité internationale de la mer; c'étaient des Canadiens qui servaient leur pays sur ses navires en mer. Si j'en avais le pouvoir, même si les officiers de marine réguliers ne seraient pas d'accord avec moi, je donnerais à la marine une boucle ondulée comme celle de la RVMRC pour la différencier des Américains, des Britanniques et des autres qui portent des galons droits. J'ai toutefois compris que la force navale régulière ne portera jamais cela.

J'étais un peu tendu lorsque j'ai reçu un appel du bureau du ministre au sujet du fait que je voulais trop changer les choses, en partie pour les raisons que j'ai déjà mentionnées. La marine semble tout à fait à l'aise avec ce qu'elle est et ce qu'elle a accompli et je pensais que l'idée de revenir aux insignes de la marine impériale et de marquer notre lien avec la Grande-Bretagne était inutile. Je pensais qu'une telle décision offrait plus d'inconvénients que d'avantages.

Cela dit, j'ai vu la boucle d'officier sur l'uniforme d'un officier général à Halifax, en juin, pour la première fois. À mon avis, c'était parfait. C'était la première fois de ma carrière que je voyais un officier de marine canadien qui était sans aucun doute un officier de marine. Cela aurait pu se faire de diverses façons. On aurait pu ajouter un triangle ici ou une feuille d'érable sur le revers si la Garde côtière ne l'avait pas déjà choisi. Il fallait quelque chose pour les différencier des autres marines et des autres personnes qui portent des uniformes sombres avec des galons dorés, comme les pilotes d'avion.

J'ai vécu une de mes expériences traumatisantes lorsque je me suis trouvé à bord du NCSM Annapolis, en 1980, et que ce navire s'est rendu à l'Académie navale des États-Unis à Annapolis, au Maryland, et que tous les membres de l'équipage étaient en vert. Personne à l'Académie navale des États-Unis ne savait qui ils étaient, même si le navire était à quai. Cela m'a paru traumatisant. C'était une bonne chose que de décider d'habiller à nouveau la marine en bleu et aussi de reprendre la boucle d'officier, mais je n'en suis pas certain pour ce qui est de la MRC. Désolé.

Le sénateur Manning : « Pas certain », cela veut dire qu'au moins vous y réfléchissez. Je l'apprécie.

M. Milner : Comme je l'ai dit dans mes remarques d'ouverture, je suis un vrai sentimental et un grand romantique, mais la marine doit penser à l'avenir et à l'avenir ce devrait être la « Marine canadienne », mais sur ce point, j'essaie de ne pas changer d'idée.

Le vice-président : J'étais avec les corps des marines des États-Unis en 1980, et ils m'ont dit à Quantico qu'ils pensaient que l'équipage des navires canadiens était composé de marines.

Vous avez parlé à quelques reprises des « Forces armées canadiennes » et vous avez également mentionné « les Forces canadiennes » à quelques reprises. Si je ne m'abuse, ces deux expressions sont les expressions officielles. Avez-vous des commentaires à faire sur l'une ou l'autre. Cela vous préoccupe-t-il?

M. Milner : Non, ce débat intéresse davantage peut-être les membres du gouvernement et les gens qui doivent élaborer des mesures législatives, les rédiger et les adopter. Je n'ai pas de préférence. J'ai vu les deux. J'imagine que légalement ce sont encore les « Forces armées canadiennes », mais nous parlons encore des « Forces canadiennes ».

Il y a une chose qui m'incite à être en faveur de ce projet de rétablissement du nom de la Marine, et je reviens sur un point que j'ai mentionné dans mes commentaires d'ouverture, c'est que la plupart des gens que je connais qui sont généralement favorables à l'idée d'une force armée, sont incapables de vous dire ce qu'est le Commandement maritime. La plupart des Canadiens ne se représentent pas ce genre de chose de cette façon. Nous parlons encore d'armée, de marine et d'aviation. Si nous pouvions abandonner ces héritages assez bizarres de l'unification et en revenir aux appellations fondamentales, cela permettrait aux Canadiens d'établir plus facilement un lien avec leurs forces armées et de comprendre qu'elles font du bon travail.

Je vous invite à présenter une motion visant à rétablir l'aviation — mais je vous laisse le soin de décider si nous voulons choisir l'appellation « Aviation royale du Canada » — et l'armée, et avoir un chef d'état-major de l'armée, un chef d'état- major de l'armée de terre, un chef d'état-major de l'armée de l'air et un chef d'état-major de la marine au lieu du jargon administratif que nous employons de nos jours.

Le sénateur Segal : Dans votre déclaration d'ouverture, M. Milner, vous avez été très direct et comme c'est souvent le cas à mon âge avancé, il me faut un peu de temps pour bien comprendre les choses. Vous avez eu la bonté de mentionner que le ministère de la Défense nationale vous avait invité à réfléchir à cette question en votre qualité d'historien, il y a environ un an. Pourriez-vous nous décrire le contexte dans lequel cette demande vous a été faite? Voulait-on préparer les célébrations du centenaire? Était-ce parce que le ministère examinait l'idée de changer certaines appellations? Je sais que le CEMM McFadden a déjà déclaré que « Commandement maritime » faisait penser à une compagnie d'assurance inconnue dont le siège social se trouverait quelque part près de Truro. Il était favorable à cette proposition.

Pouvez-vous nous expliquer le contexte de cette demande? Il serait bon que le comité en ait une idée; je ne voudrais pas toutefois vous amener à violer votre serment de confidentialité et toutes ces bonnes choses. Je ne sais pas si les historiens sont tenus de prêter un serment de confidentialité.

M. Milner : Nous devons agir en respectant l'éthique. Je ne sais pas si nous devons prêter un serment de confidentialité.

J'ai tout simplement reçu un appel téléphonique d'un des adjoints exécutifs du Bureau du ministre qui m'a dit « Nous nous proposons de faire deux choses. Nous proposons de redonner à la Marine la boucle d'officier dans le cadre du centenaire et de rétablir le nom `Marine royale du Canada' ».

Ma réponse a été très semblable à celle que je vous ai donnée ce soir qui est, si vous me pardonnez la comparaison, « Ne faites pas de vagues; la marine se débrouille très bien comme ça ».

J'ai été agréablement surpris — encore une fois, je suis toujours un grand romantique — de voir un officier de marine avec la boucle d'officier, et le nom Canada bien visible, ce qui était une bonne combinaison.

Je suis convaincu qu'étant donné que cela fait 40 ans que la marine ne s'appelle plus la Marine royale du Canada, et qu'au cours des 20 dernières années, elle a fait de nouvelles choses intéressantes, d'après nos normes, avec un groupe de jeunes marins visant y faire carrière, ils ne veulent absolument pas revenir à l'appellation « Marine royale du Canada ». Ils sont heureux de qui ils sont, de ce qu'ils font et de le faire en qualité de Canadiens.

Le sénateur Segal : Est-il juste de dire qu'une des choses pour lesquelles la Marine canadienne est connue de nos jours est son efficacité au cours des opérations conjointes? Il y a un bateau près d'Haïti qui fournit un appui médical, logistique et qui assure la sécurité. Cela est en train de devenir une des marques distinctives des opérations de la Marine canadienne dans le monde entier. En fait, l'adjectif « canadienne », en mettant de côté la question du mot « royale », est une marque qui désigne une certaine sorte de mission navale, qui peut être axée sur une intervention armée lorsque nécessaire, mais qui peut également faire d'autres choses pour défendre nos intérêts nationaux. Est-il juste d'affirmer que cela fait quelque temps que cette marque se renforce?

M. Milner : Elle se renforce depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et est devenue une marque canadienne distincte pendant, je crois, 13 ans, dans des uniformes d'une drôle de couleur. Cependant, en 30 ans, elle s'est beaucoup étoffée, comme vous l'avez fait remarquer, dans des missions que nous remplissons de façon très satisfaisante et les autres nations en ont pris acte. Ces opérations sont très différentes des opérations traditionnelles qu'elle menait dans l'Atlantique Nord avec de gros hélicoptères, qui visent la GSM, et la chasse au sous-marin avec un sonar à antenne remorqué. Les historiens n'ont pas encore décrit comment cette nouvelle tradition évoluera, mais les équipages de la flotte renforcent cette tradition et font l'histoire au moment où nous nous parlons.

Ce serait une mesure rétrograde que de se tourner vers le passé pour créer une nouvelle appellation. Je pense que « Marine canadienne » est une excellente marque.

Je ne sais pas vraiment ce que l'on peut en tirer, mais comme plusieurs d'entre vous le savent, ce genre de lien avec le passé, tout du moins au cours des années 1950 et 1960, a créé quelques problèmes pour les Forces canadiennes et les opérations des NU. Dans le cas de la marine, cela a permis à un navire canadien d'entrer dans un port britannique où il y avait des troubles civils, et de pacifier la ville sans qu'un marin canadien ait même à se rendre à terre, parce que les gens pensaient que c'était un navire de la Marine royale parce qu'il battait le pavillon blanc, le pavillon britannique.

Il est important de nous différencier des autres, et c'est la raison pour laquelle je m'en tiendrai à « Marine canadienne ». C'est la nôtre.

Le vice-président : Il y a un an et demi environ, un long article a paru sur la Marine canadienne et le maintien de la paix. Je pensais que vous arriviez à cet argument, sénateur Segal.

Monsieur Milner, je vous remercie pour votre éloquence et pour vos franches réponses. Je vous souhaite bonne chance à l'UNB.

M. Milner : Merci, général Dallaire.

Le vice-président : Mesdames et messieurs, le dernier témoin que nous allons entendre aujourd'hui est le contre-amiral Ken Summers à la retraite, actuellement vice-président des Associations des officiers de marine du Canada. Le contre-amiral Summers a commandé nos troupes pendant la première guerre du Golfe en 1990 et a également été chef d'état-major auprès du Commandant allié suprême (Atlantique). Il a occupé ce poste jusqu'à ce qu'il prenne sa retraite, beaucoup trop tôt d'ailleurs, en 2000.

Il est analyste militaire pour la CBC. Nous le voyons souvent. Il est également coprésident du projet du centenaire de la marine « Statue du Homecoming » qui a été une grande réussite.

Amiral, voulez-vous faire une déclaration d'ouverture?

Contre-amiral (à la retraite) Ken Summers, vice-président (ancien commandant de la Flotte canadienne Atlantique), Associations des officiers de marine du Canada : Oui.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité permanent, bonsoir. C'est un privilège et un plaisir pour moi de comparaître devant le comité. J'ai toujours pensé que le comité était un des comités les plus productifs, actifs et non partisans du Parlement — et un comité qui n'a pas peur de s'attaquer à des questions difficiles. Ses antécédents montrent qu'il ne craint pas de dire ce qu'il pense lorsqu'il prépare un rapport. Cet aspect est d'autant plus important pour moi que votre domaine est celui de la sécurité et de la défense, qui représente la responsabilité essentielle du gouvernement envers les citoyens.

Vous avez entendu ce que j'ai fait.

Pour ce qui est de la motion à l'étude, mon père était officier marinier dans la Marine royale du Canada. Il a servi pendant la Seconde Guerre mondiale, à bord de ces fameuses corvettes, durant la bataille de l'Atlantique, de Halifax à St. John's à Londonderry et jusqu'à Mourmansk avec toute cette glace. Il est décédé en 1975 et il y avait un pavillon blanc sur son cercueil. S'il était ici aujourd'hui, il s'opposerait à la motion du sénateur Rompkey et serait en faveur d'un retour à l'appellation « Marine royale du Canada ».

Mon fils est capitaine de corvette dans la marine d'aujourd'hui. Il a été fier de servir en mer et il est maintenant en punition au QGDN. Si on lui posait la question, il serait un peu troublé et perplexe devant la réponse de mon père et serait entièrement en faveur de la motion proposée et du nom « Marine canadienne », parce que pour lui, cela représente la réalité d'aujourd'hui, tant en mer qu'à terre, sur le plan national et du point de vue des autres nations.

Je fais partie d'une génération de marins qui a servi pendant une période de transition, celle qui a séparé la marine d'hier de la marine d'aujourd'hui. Je me suis engagé dans la MRC en 1963 et j'ai porté fièrement mes insignes d'aspirant de marine. Plus tard, avec la commission de la Reine, mon uniforme de marine a été complété par la boucle d'officier. Peu de temps après, avec l'intégration, j'ai endossé, avec réticence, l'uniforme vert des Forces canadiennes et les insignes avec une ancre de quelque chose que l'on appelle le Commandement maritime. J'ai subi l'intégration et l'administration et la structure des grades commune.

J'ai eu la chance de passer une bonne partie de mes 37 ans de service dans des postes de commandement : navire, escadrille, flotte canadienne et commandant des Canadiens pendant la guerre du Golfe de 1990. J'ai également servi dans les quartiers généraux : Quartier général du Commandement maritime, Quartier général de la Défense nationale, ambassade du Canada à Washington, Quartier général de l'OTAN à Norfolk (Virginie). Depuis ma retraite, je me tiens au courant des choses qui touchent la défense et la marine. Comme le président l'a mentionné, on me voit souvent sur CBC.

Tout ça pour dire que je pense bien comprendre comment la Marine a évolué et comment elle est passée de la MRC à la marine d'aujourd'hui. Élément plus important encore, je crois savoir comment la marine se perçoit elle-même ainsi que comment les autres — nos voisins du Sud, les alliés de l'OTAN et les pays du RIMPAC — considèrent nos marins et notre marine.

Nous célébrons cette année le 100e anniversaire de la création du Service naval du Canada, parce que c'est ainsi qu'il s'appelait officiellement en 1910, aux termes de la loi d'incorporation concernant le Service naval du Canada. C'est l'année suivante que le Roi a accepté de lui donner le nom de Marine royale du Canada.

Cette année, les thèmes du centenaire de la Marine sont les suivants : honore le passé, célèbre le présent et engage-toi vers l'avenir. Ils sont vraiment très bien choisis.

La Marine canadienne honore son passé. La Marine royale a été la base à partir de laquelle la Marine canadienne a été créée et à la fin de la Seconde Guerre mondiale, elle était devenue la quatrième marine mondiale et pour certains, elle se plaçait au troisième rang sur le plan de l'efficacité. Le crédit en revient à la Marine royale, qui a été directement ou indirectement responsable de la plus grande partie de notre formation et de notre expertise avant les années 1960. Ce lien historique dont nous sommes fiers a été honoré dans pratiquement tous les événements qui ont eu lieu cette année, dans les différentes parties du pays, pour célébrer notre marine.

Depuis le milieu des années 1960, la Marine canadienne a évolué et est devenue vraiment indépendante de notre « marine-mère », si vous me permettez l'expression. La Marine canadienne est passée d'une marine principalement centrée dans l'Atlantique Nord et sur la guerre anti-sous-marine à une marine plus petite, professionnelle et polyvalente capable de répondre, dans le monde entier, aux crises, à l'agression, au terrorisme, à la piraterie et aux désastres humanitaires, tout en protégeant les approches maritimes du Canada et le commerce qui joue un rôle essentiel pour l'avenir de notre pays.

Fait tout aussi important, sénateurs, nos marins ont également changé. Il n'y a pas un seul marin en uniforme aujourd'hui qui a servi dans la Marine royale du Canada. Avec le retour de l'uniforme de la marine dans les années 1980, nos marins se considèrent vraiment comme des membres de la Marine canadienne, et non pas du Commandement maritime. Cette attitude s'est reflétée de plus en plus inconsciemment, dans mon souvenir, dans les écrits qui faisaient référence à la Marine canadienne. La seule question qui se posait alors était de savoir si le « M » de « marine » était une majuscule ou non.

La motion présentée par le sénateur Bill Rompkey tient compte de l'évolution de notre service et de nos marins; elle privilégie non pas le passé, mais le présent et l'avenir et elle représente la réalité.

Cette réalité est encore renforcée lorsqu'on prend en compte la façon dont nos alliés nous considèrent. La Marine des États-Unis, nos alliés de l'OTAN et les pays du RIMPAC n'ont jamais estimé que notre marine était un Commandement maritime ou un élément des Forces canadiennes. On nous a considérés et on nous a désignés tout simplement par ce nom « Marine canadienne ». En fait, dans les quartiers généraux de l'OTAN et même ailleurs, on voyait très souvent les lettres « CN » (MC) après le nom d'un officier ou d'un matelot.

À mesure que l'année du centenaire approchait, il y a eu des discussions dans de nombreuses filiales des Associations des officiers de marine du Canada au sujet d'une résolution demandant le rétablissement de l'appellation « Marine royale du Canada » pour l'année du centenaire. Ceux qui avaient servi dans la MRC étaient favorables à cette mesure nostalgique, mais elle n'avait aucun écho chez ceux qui s'étaient engagés après l'intégration ou chez ceux qui portaient l'uniforme aujourd'hui.

Après de longues réflexions et discussions, et pour tenir compte de la devise du centenaire à savoir « honorer le passé, célébrer le présent et s'engager vers l'avenir », les AOMC ont considéré qu'une telle proposition constituerait une mesure rétrograde et non axée sur l'avenir. Je crois savoir que d'autres organisations importantes, comme la Légion royale canadienne, en sont arrivées à la même conclusion.

En cette année de la marine, nous avons honoré le passé en rétablissant la boucle d'officier de marine de notre uniforme et nous continuons à chérir le lien royal qui demeure avec les NCSM, les Navires canadiens de Sa Majesté. Nous avons célébré les réalisations de la marine actuelle et le service qu'elle a rendu au Canada au cours des conflits récents, des missions en cas de désastre humanitaire et des opérations comme la lutte contre la piraterie. Il est donc tout à fait approprié de s'engager vers l'avenir en adoptant la motion du sénateur Rompkey qui représente la réalité d'aujourd'hui avec l'adoption de l'appellation officielle « Marine canadienne » avec un « M » majuscule.

Je serai heureux de répondre à vos questions sur ce sujet ou sur tout autre sujet que vous souhaitez aborder.

Le sénateur Segal : Je pense que le contre-amiral Summers est le Canadien qui a commandé la plus grande flotte de bâtiments multinationaux depuis la Première Guerre mondiale avec la flotte de logistique dont il était responsable au cours de la première guerre du Golfe, est-ce bien exact?

Cam Summers : Pendant la première guerre du Golfe, Dusty Miller était le commandant, tandis que j'étais le commandant général. C'est le seul rôle majeur qui ait été accordé à un non-Américain pendant la guerre du Golfe — la responsabilité du soutien logistique pour tous les navires participant à la guerre du Golfe — et c'était une tâche importante.

Le sénateur Segal : Combien de navires relevaient du commandement du Canada à ce moment-là?

Cam Summers : Nous n'avions que trois navires à nous dans le Golfe, mais il y en avait au total 50 ou 60.

Le sénateur Segal : Un chiffre largement supérieur à celui des navires faisant partie de notre propre marine à l'époque?

Cam Summers : Oh, oui.

Le sénateur Segal : Pourriez-vous nous dire, si vous vous sentez à l'aise de le faire, comment se sont passées les discussions dans Les associations des officiers de marine du Canada? Il me semble que si nous voulons parler de personnes qui sont très attachées à la tradition et qui sont également fortement engagées dans la marine actuelle et celle de l'avenir, il y a très peu de groupes de discussion qui représenteraient mieux ces deux côtés que Les associations des officiers de marine. Et pourtant, ils en sont arrivés à cette conclusion. Les membres du comité souhaiteraient que vous donniez une idée du contexte de ces discussions, parce qu'il leur serait utile d'entendre vos commentaires à ce sujet.

Cam Summers : Ce débat a eu lieu dans un certain nombre de filiales, et il a été très émotif. La plupart de nos membres sont âgés. En fait, je suis un des plus jeunes. Un bon nombre d'entre eux s'identifient à la Marine royale du Canada. C'était un moment de leur vie qu'ils chérissent énormément et ils y sont très attachés. Ils pensaient que nous devrions adopter une résolution proposant ce genre de changement d'appellation. Cependant, après 1966, la plupart des marins n'avaient jamais fait partie de la Marine royale du Canada, et même si le patrimoine et l'histoire ne peuvent s'effacer, ils sentaient vraiment qu'ils ne faisaient pas partie de la MRC.

Aucun de ceux qui sont en uniforme aujourd'hui, y compris mon fils — et il me l'a très clairement dit — ne s'identifie à la MRC. Ils ne savent même pas très bien ce que c'est.

Notre organisation honore le passé. Une bonne partie de nos membres sont des membres de ce passé. Cependant, la marine reconnaît les énormes changements qui ont eu lieu pour ce qui est de notre capacité et du fait que notre marine qui était principalement axée sur le nord-atlantique est devenue une marine à vocation mondiale. Nous avons compris qu'il serait sage et prudent de ne pas regarder le passé, mais plutôt l'avenir et c'est l'orientation que nous avons choisie.

Le sénateur Segal : Je sais que cela fait quelque temps que vous ne faites plus partie de la chaîne de commandement, mais pourriez-vous nous faire une évaluation de notre statut sur le plan de l'interopérabilité? Par exemple, j'ai été amené à croire que lorsque nos navires participent à une mission des États-Unis ou de l'OTAN, nos commandants ont le même niveau de sécurité de leurs collègues américains pour ce qui est de l'accès aux données stratégiques dont ils ont besoin pour exécuter leur mission. On m'a dit que le niveau d'interopérabilité entre nous et les Américains est en fait supérieur à ce qu'il est entre nous et la Marine royale, malgré les nombreuses actions que nous avons menées avec elle, la formation qu'elle nous a donnée, en particulier dans le domaine de la guerre sous-marine.

Cam Summers : Je pourrais vous donner quelques exemples. Lorsque nous avons participé à la guerre du Golfe, j'ai eu la possibilité de m'associer avec la Marine royale. En fait, ce sont ses représentants qui m'ont demandé si nous étions disposés à former une escadrille du Commonwealth. Une des raisons pour laquelle je m'y suis opposé était leur capacité en matière d'interopérabilité. Ils utilisaient des types de communications HF au lieu des communications par satellite instantanées que nous avions. Compte tenu de la nature du danger qui existait dans le Golfe, nous avions besoin d'obtenir de l'information immédiatement et non pas de nous en remettre à la HF, une technologie qui ne fonctionne pas toujours.

L'interopérabilité a toujours été une grande préoccupation de la Marine canadienne. Certains témoins que vous avez déjà entendus savent tous les efforts que nous avons déployés pour préserver l'interopérabilité avec la Marine des États-Unis. Pendant la guerre du Golfe et par la suite, nous étions probablement le seul pays qui jouissait d'une interopérabilité parfaite avec la Marine des États-Unis. C'est la raison pour laquelle, dans un certain nombre d'opérations qui ont été lancées à partir de 1990 dans le Golfe et ailleurs, ils ont confié des postes de commandant à des Canadiens. Nous sommes les seuls à être interopérables avec les Américains et en mesure de commander les autres forces. Nous avons acquis une grande expérience dans ce domaine, ce qui est très important. Elle vient du fait que nous sommes interopérables avec tous les autres.

Le sénateur Lang : Dans le prolongement des questions qu'a posées le sénateur Segal, quelle est l'importance des Associations des officiers de marine du Canada? Combien avez-vous de membres?

Cam Summers : Nous avons environ 1 800 membres ordinaires et un certain nombre de membres associés qui ne sont pas des officiers de marine, mais qui peuvent adhérer à l'organisation.

Le sénateur Lang : Pour poursuivre sur la façon dont votre organisation en est arrivée à sa conclusion, j'aimerais savoir si cette décision a été effectivement prise par votre exécutif ou si vous avez procédé à un sondage auprès de vos membres?

Cam Summers : Les motions ont été présentées par un certain nombre d'organisations et ont fait l'objet de débats dans les filiales. Notre exécutif est composé de membres des différentes régions du pays. Nous avons discuté de cette question pendant un bon moment et nous en sommes arrivés à cette conclusion.

Le sénateur Lang : Après vos débats, diriez-vous que cette décision représentait un consensus?

Cam Summers : Absolument, c'était un consensus général. Même ceux qui avaient un point de vue nostalgique et qui favorisaient la MRC ont compris que l'organisation devait regarder vers l'avenir et non vers le passé.

Le sénateur Lang : Vous avez dit que vous pensiez que d'autres organisations de service importantes comme la Légion royale canadienne, en étaient arrivées à la même conclusion. Pourriez-vous nous en dire davantage?

Cam Summers : J'avais entendu dire que la Légion royale canadienne en était arrivée à cette conclusion, je me suis donc renseigné. Je crois qu'ils ont déclaré qu'ils avaient consulté leurs membres et en étaient arrivés à la même conclusion, à savoir qu'il fallait regarder vers l'avenir et non pas vers le passé. Cela m'a surpris. Je pensais que la Légion royale canadienne préférerait revenir à la « Marine royale du Canada » plutôt qu'à la « Marine canadienne ». En fait, je crois savoir que la Légion royale canadienne a reconnu qu'il fallait retenir l'appellation « Marine canadienne ».

Le vice-président : Les associations des officiers de marine du Canada existent, mais y a-t-il quelque chose pour les autres grades de la marine? Les autres grades ont-ils fait l'objet d'un sondage comme les officiers?

Cam Summers : Il existe un certain nombre d'organisations navales, mais en général, les membres des associations des officiers de marine du Canada sont uniquement des officiers. Il existe sur les deux côtes des associations de premiers- maîtres et d'officiers mariniers en activité. Elles sont orientées sur les services plutôt que sur la défense des intérêts des membres et les questions de défense. D'autres organisations, comme l'Association royale canadienne de la marine, la Ligue navale du Canada et les Affaires maritimes s'occupent de certaines questions. Il y a plusieurs organisations navales indépendantes qui examinent des questions liées à la défense, et les questions varient selon l'organisation concernée.

Le vice-président : Se sont-elles prononcées sur ce point pendant les festivités de cette année?

Cam Summers : À ma connaissance, non. Je n'en sais rien. Je peux dire que sur les deux côtes, les associations d'officiers mariniers et de second ont été actives pendant cette année du centenaire, mais leur action est davantage axée sur les services à leurs membres et sur le bien-être de ceux qui font partie de l'organisation.

Le sénateur Patterson : Amiral, votre remarque au sujet du fait que ceux d'entre nous qui estiment important de préserver ce lien avec la monarchie, comme vous l'avez si bien exprimé, n'est pas uniquement de la nostalgie m'a intriguée. Je pense que c'est une question de respect vis-à-vis de notre histoire. Vous dites en fait que ce lien avec la monarchie ou ce reflet de notre histoire peut être préservé dans la façon dont nous décrivons les navires canadiens de Sa Majesté.

Si nous adoptons l'appellation « Marine canadienne » et non « Marine royale du Canada », pensez-vous qu'il soit concevable que cela nous amène à trouver une autre façon de désigner nos navires?

Cam Summers : J'espère que non. Même ceux qui se sont engagés après la disparition de la MRC sont attachés à l'expression NCSM. Je ne pense pas que ce sigle deviendrait NC ou quelque chose du genre.

Pensez à ce qui est arrivé l'année dernière. Je reviens à la devise « Honorer le passé, célébrer le présent et s'engager vers l'avenir ». Les éléments qui nous permettent d'honorer notre passé sont importants et l'appellation NCSM est un de ces éléments.

Le vice-président : Comme le vice-amiral Buck l'a expliqué, ces éléments vont jusqu'au niveau de l'unité. Ils ont adopté leurs propres règles et coutumes. Essayer de changer le nom d'une unité n'est pas quelque chose de simple, même s'il ne s'agit pas d'un navire de la Marine canadienne. Il y a tout un monde de complexité que l'on ne retrouve pas lorsqu'on change un nom au niveau du commandement. Il serait possible de l'expliquer, mais uniquement pour faire ressortir l'importance qui vient du fait qu'il s'agit d'unités de combat. C'est comme si l'on changeait « Black Watch » pour l'appeler quelque chose d'autre, ce qui arrive, mais ce serait une mesure très rétrograde.

Excusez-moi; en tant que président, j'interviens uniquement pour fournir des informations.

Le sénateur Mitchell : Amiral, j'aimerais avoir d'autres renseignements. J'ai peut-être manqué quelque chose. Vous avez dit que la Légion royale canadienne était favorable à l'idée d'une « Marine canadienne ». Est-ce qu'une motion a été adoptée officiellement au cours d'un congrès ou était-ce une décision de l'exécutif?

Cam Summers : Je pense qu'ils ont eu une AGA, mais je ne suis pas très sûr de tout cela. Cette question a été débattue et ils ont décidé à l'époque qu'ils n'appuieraient pas un changement de nom qui consisterait à utiliser l'appellation « Marine royale du Canada ».

Le sénateur Mitchell : Je n'ai pas l'intention de poser une question aussi provocante que certains de mes collègues de l'autre côté vont l'estimer, mais nous avons entendu aujourd'hui quatre témoins qui se sont déclarés très clairement en faveur de l'idée d'une « Marine canadienne ». J'essaie en vain de chercher d'où est venue cette idée de « Marine royale du Canada », si elle ne vient pas uniquement de ce souvenir nostalgique d'une époque romantique qui était loin d'être aussi romantique que nous le pensons aujourd'hui. Y a-t-il une autre raison ou un autre argument pour cette suggestion?

Cam Summers : Parlez-vous du désir récemment exprimé de revenir à « Marine royale du Canada »?

Le sénateur Mitchell : Oui, tout à coup, sans avertissement.

Cam Summers : Je pense que c'est le centenaire. Après 1910, la marine s'est appelée le Service naval du Canada. Plutôt que d'adopter « Marine royale du Canada », je préférerais que nous l'appelions le Service naval du Canada. En réfléchissant à ce qui s'est passé au cours des 100 dernières années, nous avons été amenés à revoir toute cette question. Je pense que cela était lié un peu à la boucle d'officier. Cela n'a pas été une question d'actualité ces 10 dernières années. Il n'y a pas de pression qui s'exerce continuellement pour que l'on adopte « Marine royale du Canada », à part le souvenir nostalgique de certains de nos membres.

Le sénateur Plett : Le sénateur Mitchell a mentionné à quelques reprises que c'était là une question de nostalgie. Maintenant il parle de romance. Je suis un nostalgique; ma femme dit parfois que je suis un grand romantique.

Nous avons entendu quatre témoins aujourd'hui, et ils ont tous très bien présenté leurs points de vue. Je ne pense pas que tous les membres du comité et les quatre témoins soient très éloignés d'une entente. Je ne sais pas très bien si c'était le contre-amiral Mifflin ou le vice-amiral Buck qui a déclaré que cette question pourrait susciter des réactions dans certaines parties du pays. Je ne voudrais pas leur faire dire ce qu'ils n'ont pas dit.

Dans l'ensemble, j'ai le sentiment que la plupart des gens qui sont dans la marine à l'heure actuelle — votre fils et d'autres, par exemple, ne sont pas très en faveur de l'appellation « Marine royale du Canada », mais je n'ai pas senti que cette proposition suscitait une réaction très négative. Cela vient simplement du fait que c'est une nouvelle génération, de nouveaux marins et qu'ils ne ressentent certainement pas cette nostalgie. Ils se demandent « Avons-nous vraiment besoin de l'appellation `Marine royale du Canada' »? Je me demande s'ils s'opposeraient vraiment à cette option.

Je vais aborder d'autres points avant de vous laisser répondre. Vous avez dit que la Légion royale canadienne avait tenu une AGA. Vous ne teniez pas à ce qu'on vous cite, mais vous avez pensé que ses membres ont peut-être déclaré qu'ils n'appuieraient pas cette motion. Cela veut-il dire qu'ils s'y opposeraient? Disaient-ils simplement qu'ils n'étaient pas vraiment en faveur ou qu'ils étaient effectivement prêts à s'y opposer?

Enfin, est-ce que la Légion royale canadienne a l'intention de s'appeler désormais la « Légion canadienne », ou est-il important pour elle de conserver l'appellation « Légion royale canadienne »? Je pense que la plupart des membres de la légion s'opposeraient vivement à un tel choix.

Cam Summers : Premièrement, je trouve encourageant de constater que nos quatre témoins sont du même avis. Je viens de la côte Ouest et je n'ai pas la possibilité de m'entendre avec d'autres sur cette question. Mon opinion personnelle reflète les conversations que j'ai eues avec les membres des associations.

Quant à savoir si les marins actuels s'y opposeraient, je pense que non. Je peux vous dire qu'ils n'aimeraient pas cette solution. Sur bien des points, cela serait comme si nous revenions à « Commandement maritime ». Ce n'est pas ce qu'ils pensent être. Ils constituent la Marine canadienne.

J'ai mentionné cet aspect de façon non officielle dans mes écrits. Je me souviens avoir écrit des choses et ne pas savoir s'il fallait mettre un « M » majuscule ou minuscule. J'en suis finalement arrivé à utiliser un « m » minuscule dans mes écrits, mais je pensais en fait à un « M » majuscule. Cela a duré 20 ans parce que l'expression « Commandement maritime » ne voulait rien dire.

Oserais-je dire — et peut-être que le président pourra également intervenir à ce sujet — que lorsqu'il y a eu l'intégration, les marins pouvaient s'identifier à un navire, leur navire. Ils pouvaient même s'identifier à leur escadrille. Ils pouvaient s'identifier à la côte où ils étaient. Il leur était, par contre, très difficile de s'identifier à une chose comme les « Forces canadiennes », qui représentaient un élément trop lointain, de sorte que l'appellation n'a jamais vraiment pris. Vous étiez un élément des Forces canadiennes ou du Commandement maritime. Tout cela a été regroupé dans une chose nébuleuse. Cela n'a jamais vraiment été adopté par nos marins. Lorsque nous avons retrouvé notre uniforme bleu, comme je l'ai mentionné, nous avons senti que nous faisions partie de la Marine canadienne. À l'étranger, c'est de cette façon que nous étions considérés.

À mon quartier général de Norfolk, on désignait les Canadiens comme « un tel de la CN» (MC) parce que c'est comme ça qu'ils nous voyaient. Je l'ai mentionné à quelques reprises, mais c'était la réalité.

La motion qu'a présentée le sénateur Rompkey reflète cette réalité. Cette proposition serait extrêmement bien acceptée par la marine d'aujourd'hui et, en fait, par la marine des 40 dernières années.

Le sénateur Plett : Un des témoins a mentionné que si nous faisions un sondage auprès des anciens combattants, dont vous faites partie, tout comme en font partie les autres témoins d'aujourd'hui, il y aurait davantage d'anciens combattants qui voudraient l'appellation « Marine royale du Canada » et ce ne serait pas uniquement les membres de la Légion royale canadienne. Si l'on sondait le personnel actuel de la marine, nous obtiendrions le résultat opposé. Êtes- vous d'accord avec cela?

Cam Summers : Si vous attendez encore 10 ans pour faire ce genre de sondage, vous constaterez qu'il y aura moins de gens qui voteront pour la « Marine royale du Canada ». C'est la réalité de l'appellation « Marine royale du Canada ». Les gens qui ont servi dans la MRC vieillissent. Je ne pense pas que les gens qui portent l'uniforme aujourd'hui accepteraient de revenir au nom « Marine royale du Canada », c'est certain.

Le sénateur Plett : Vous avez parlé de nos alliés. Nous sommes tous d'accord pour dire que « Commandement maritime » n'est pas acceptable et qu'il faut prendre le mot « marine ». L'amiral Buck a déclaré que si vous demandez à n'importe qui dans la marine dans quel élément ils servent, ils vont dire « dans la marine ». Je pense que nous nous entendons sur ce point.

Vous avez toutefois déclaré qu'un bon nombre de nos alliés ne savent pas pourquoi nous nous appelons de cette façon. Je ne pense pas que vous l'ayez dit exactement, mais vous avez laissé entendre qu'ils ne comprendraient pas que nous veuillons revenir à la « Marine royale du Canada ». Je vous signale que les Britanniques appellent leur marine la Marine royale, qu'il y a la Marine royale de l'Australie, la Marine royale de la Nouvelle-Zélande, la Marine royale des Pays-Bas, la Marine royale du Danemark, la Marine royale de la Norvège et au moins 11 autres. Tous les pays ne s'opposent pas à l'utilisation de l'adjectif « royale », et je dirais que je considère certains d'entre eux comme nos alliés de l'OTAN.

Cam Summers : C'est une bonne remarque. J'en prends note, et c'est vrai, mais je dirais que nous n'avons pas connu de choses de ce genre. Il y avait le Commandement maritime, cette expression n'était pas comprise, c'est pour ça que les gens disaient « Marine canadienne ». C'est sous cette appellation qu'on nous connaît.

Le sénateur Peterson : Vous avez clairement mentionné que les membres actuels de la marine préféreraient « Marine canadienne ». Peut-être que certains anciens combattants aimeraient « Marine royale du Canada ». Quelle est la position de la hiérarchie militaire sur cette question?

Cam Summers : Je ne le sais pas. Si vous les invitiez à venir vous parler, vous pourriez certainement le leur demander. Très honnêtement, je pense qu'ils sont pris par d'autres questions, comme la construction de navires, plutôt que par la boucle d'officier, les changements d'appellation et ce genre de choses, sans vouloir diminuer en quoi que ce soit l'importance de la motion. Je ne sais pas exactement quelle est leur position, mais je pense qu'ils appuieraient probablement l'appellation « Marine canadienne ».

Il y a un autre aspect de ce débat qui n'a pas encore été abordé, à savoir les jeunes d'aujourd'hui. Un des problèmes auxquels fait face la marine concerne le recrutement, en particulier chez les gens qui viennent de l'ouest, des pays asiatiques, notamment. Ils pourraient s'identifier à une appellation nationale comme « Marine canadienne », alors que dans le cas de la « Marine royale du Canada », cette appellation n'aurait peut-être pas une connotation susceptible de les attirer, compte tenu de leur pays d'origine. En outre, une de nos provinces risquerait de réagir négativement à l'appellation « Marine royale du Canada », peut-être pour de mauvaises raisons.

Pour ce qui est de la perception et de la nécessité d'attirer des gens dans la marine, si l'on pense à l'avenir, je dirais qu'une appellation nationale serait beaucoup plus attrayante qu'une appellation qui remonte à des dizaines d'années.

Le sénateur Peterson : J'étais sur une frégate cet été comme membre des « forces parlementaires ». Je pense que le capitaine avait 38 ans et qu'ensuite, l'âge diminuait. J'étais une personne âgée. Ils sont très fiers de leur travail et ils sont très dynamiques. J'ai été très impressionné. Je peux comprendre pourquoi ils aimeraient avoir leur propre identité.

Cam Summers : Il est toujours intéressant de parler aux gens. J'étais ici il n'y a pas très longtemps et j'ai parlé avec un certain nombre de députés et de sénateurs, ainsi qu'avec le vice-amiral Buck. Les gens qui ont eu la chance d'aller en mer sur nos navires m'ont dit : « Si vous voulez régler le problème de la marine, il suffit de demander à nos jeunes marins de parler à la population de sujets comme Haïti et la lutte contre la piraterie. Vos hommes sont la meilleure publicité possible pour faire connaître ce qu'est la marine ». Si vous prenez les marins, ils constituent la Marine canadienne. Ils ne sont pas la « « Marine royale du Canada », ils sont la « Marine canadienne ». C'est la solution que nous devrions retenir.

Le vice-président : Je ne sais pas si les ingénieurs de la Marine canadienne sont encore formés au Royaume-Uni ou s'ils ont choisi l'Amérique du Nord comme l'ont fait l'armée et l'aviation. Cela a-t-il été résolu ou cela se fait-il encore?

Cam Summers : Jusqu'aux années 1960, pratiquement toute la formation de nos ingénieurs et opérateurs se faisait au Royaume-Uni. Une partie se faisait aux États-Unis, mais le gros de la formation se faisait au Royaume-Uni. En fait, les Canadiens allaient souvent à Morrisburg. Un de mes premiers officiers du Collège militaire royal du Canada parlait avec un accent britannique. J'ai appris ensuite qu'il venait de Morrisburg, mais lorsque nous nous sommes rendus là-bas, il a pris l'accent du carré des officiers. Lorsqu'il est revenu, il était plus Britannique que les Britanniques. Ce genre de formation s'est poursuivi très longtemps.

Nous avons pour l'essentiel cessé de faire ce genre de chose, mais nos hommes suivent encore des cours spécialisés là- bas, comme la formation sous-marine. Nous leur donnons également une formation aux États-Unis, des cours très précis sur les satellites, par exemple. Le monde du génie est beaucoup moins important qu'il l'était il y a des années, mais nous envoyons toujours nos hommes à l'endroit où ils recevront la meilleure formation possible.

Le vice-président : Ce n'est plus une politique; très bien.

La Légion royale canadienne n'a pas de raison de changer de nom. Nous examinons la possibilité de passer de « Commandement maritime » à « Marine canadienne », et c'est ce qui nous incite à examiner cette question sous tous les angles. Ce changement touchera également le drapeau du commandement.

Je constate que l'armée et l'aviation n'utilisent plus la Couronne, mais la marine la porte encore sur son ancre. Est- ce que cela a été conservé par hasard? Savez-vous s'il existe une raison pour cela?

Cam Summers : Non. Je dirais que ça fait partie de la tradition.

Le vice-président : C'était l'ancien pavillon et ils l'ont gardé. J'ai travaillé sur le changement du pavillon de l'armée en 1995, et c'est à ce moment-là qu'on a supprimé la Couronne.

Même s'ils sont très occupés, pensez-vous que le comité devrait demander au commandant de la Marine et à son adjudant-chef de nous transmettre leurs commentaires à titre d'officier d'active et de sous-officier?

Cam Summers : Cela vaudrait la peine. Ce sont des marins et ils savent mieux que moi ce qui se passe. Il serait bon de parler au chef de la marine et excellent aussi de le faire avec le commandant en chef. Vous pourriez également demander à un officier de commandement de comparaître. C'est quelqu'un qui se trouve avec la flotte en mer à l'heure actuelle.

Je vais revenir brièvement sur la Légion royale canadienne. Si vous examinez qui sont les membres de la légion à l'heure actuelle, vous constaterez qu'il n'est plus nécessaire d'avoir servi dans l'armée pour faire partie de la légion. Il y a, parmi les membres de la légion, toutes sortes de gens qui n'ont jamais porté l'uniforme. C'est une différence entre elle et d'autres organisations.

Le vice-président : C'est un plaisir de vous revoir. Je vous remercie de nous avoir fourni des renseignements, des commentaires et des réponses très instructives.

(La séance est levée.)


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