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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 12 - Témoignages du 28 octobre 2010


OTTAWA, le jeudi 28 octobre 2010

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 8 h 13, pour étudier l'état actuel et futur du secteur de l'énergie du Canada, y compris les énergies de remplacement. (Sujet : Exploration et forage pétrolier et gazier en mer canadienne et état actuel des opérations compte tenu des règlements qui s'appliquent).

Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour. J'ouvre la séance du Comité permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous avons le privilège d'avoir parmi nous ce matin le président et premier dirigeant de l'Office national de l'énergie du Canada, M. Gaétan Caron, et son collègue, M. Bharat Dixit. Je ferai les présentations dans un moment.

Nous poursuivons notre étude du système énergétique canadien et de la stratégie ou de la recherche d'une stratégie pour élaborer un cadre de travail visant à assurer de manière durable l'avenir énergétique de notre pays.

Je souhaite la bienvenue à tout le monde ce matin, y compris les téléspectateurs de la chaîne parlementaire, de la diffusion Web et de notre nouveau site web spécialisé qui, j'ai le plaisir de l'annoncer, se trouve à l'adresse www.canadianenergyfuture.ca. La version française du site est disponible à l'adresse www.avenirenergiecanadienne.ca. Nous avons lancé ce nouveau site web mardi dernier, et je suis ravi de dire qu'il a été accueilli avec enthousiasme; les gens manifestent beaucoup d'intérêt à son égard. C'est un site interactif, et nous encourageons tous les téléspectateurs et les autres personnes à entamer avec nous un dialogue animé et à discuter de questions d'une extrême importance liées à l'avenir énergétique du Canada.

Notre rapport sur l'industrie du forage en mer que nous avons étudié au printemps dernier, au cours des mois d'avril, de mai et de juin, a été publié cet été, le 18 août, et a été déposé au Sénat. Il s'intitule Les faits ne justifient pas l'interdiction des opérations actuelles de forage en mer : étude sénatoriale au lendemain de l'incident de la plate-forme Deepwater Horizon de BP.

Il contient un certain nombre de recommandations. Une fois que le rapport a été achevé et distribué, d'autres développements se sont produits qui ont poussé le comité directeur à envisager la réouverture possible des audiences. Nous sommes parvenus à la conclusion que nous n'aurions rien à gagner en reprenant complètement les audiences. Toutefois, un certain nombre de questions que nous nous posons concernent l'Office national de l'énergie du Canada, son mandat actuel ainsi que son mandat futur qui sera peut-être modifié. C'est pourquoi j'ai cru bon inviter M. Caron à se joindre à nous aujourd'hui.

M. Caron a comparu devant nous à plusieurs reprises dans le passé et en particulier le 27 avril dans le cadre de notre étude. Il a témoigné de nouveau le 22 juin. Nous sommes heureux, monsieur, de vous avoir parmi nous. Comme j'en ai l'habitude, j'aimerais présenter rapidement les gens assis à la table.

Je suis le sénateur David Angus de Montréal, au Québec. Je préside le comité. Assis immédiatement à ma droite, il y a le sénateur Grant Mitchell de l'Alberta. À sa droite, se trouvent nos très talentueux analystes et assistants de la Bibliothèque du Parlement, Marc LeBlanc et Sam Banks. À leur droite, il y a le sénateur Rob Peterson de la belle province de la Saskatchewan — qui ne fait pas du tout les manchettes. Puis, il y a le sénateur Linda Frum de Toronto et, à sa droite, le sénateur Daniel Lang du Yukon.

À ma gauche, se trouve Lynn Gordon, notre greffière, que vous connaissez, je crois. À sa gauche, il y a le sénateur Richard Neufeld de la Colombie-Britannique, le sénateur Judith Seidman de Montréal et le sénateur Fred Dickson de Halifax, en Nouvelle-Écosse. Le sénateur Dickson a amené un invité ce matin qui, je pense, représente le sénateur Tommy Banks. Le remplacer ne sera pas une mince tâche, mais nous accueillons le sénateur Willie Moore de Halifax. C'est un plaisir de vous avoir parmi nous. À sa gauche, se trouvent le sénateur Paul Massicotte du Québec et le sénateur Bert Brown de l'Alberta.

Sans plus tarder, monsieur Caron, je tiens simplement à vous remercier encore une fois de nous avoir guidés à travers le labyrinthe des compétences et de nous avoir aidés à comprendre certaines des autres questions liées à l'exploration et à la production, si vous voulez, de nos ressources naturelles au large de nos côtes.

Je n'ai pas besoin de vous rappeler que le sénateur Massicotte avait certaines questions précises à vous poser au cours de la dernière séance. Je sais que vous êtes bien préparé à y répondre aujourd'hui. Voici, une petite mise en garde pour vous, sénateur Massicotte. M. Caron tient particulièrement à s'assurer que vous êtes satisfait de ses réponses.

Je devrais ajouter que M. Caron est également en ville pour témoigner devant les membres du comité de la Chambre des communes qui le harcèlent. Comme vous le savez, monsieur, cela ne se produit pas au sein de notre comité. Nous sommes très heureux de votre visite, et nous savons que vous n'êtes pas ici pour induire en erreur les parlementaires, mais pour les édifier. La parole est à vous, monsieur.

Gaétan Caron, président et premier dirigeant, Office national de l'énergie du Canada : Bonjour, honorables sénateurs. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui et d'être accompagné par M. Bharat Dixit, notre chef d'équipe responsable des activités pétrolières et gazières que l'Office national de l'énergie réglemente.

Je me réjouis à la perspective de parler des récents développements dans la revue du dossier Arctique par l'ONE, ainsi que d'autres nouvelles questions comme celle du golfe du Saint-Laurent.

[Français]

Le 11 mai, quelques semaines à peine après l'éruption incontrôlée dans le golfe du Mexique, l'Office national de l'énergie a pris l'engagement de passer en revue les exigences en matière de sécurité et d'environnement pour les forages extracôtiers dans l'Arctique canadien.

L'objet de cette revue du dossier arctique est d'examiner la meilleure information disponible sur les dangers et les risques associés aux activités de forage extracôtier dans l'Arctique canadien, et aussi sur les mesures d'atténuation visant tant à prévenir les accidents et les défaillances qu'à intervenir au besoin.

[Traduction]

Depuis ma dernière visite, vers la fin du mois de juin, plus de 115 groupes et organismes distincts se sont inscrits afin de prendre part à cette revue, dont des collectivités du Nord, des groupes autochtones, des organisations non gouvernementales de l'environnement, d'autres organismes de réglementation et des représentants de l'industrie elle-même.

Le 20 septembre, l'Office national de l'énergie a annoncé que la revue du dossier Arctique se ferait en trois étapes. La première étape, qui est en cours en ce moment, vise à rassembler les meilleures connaissances disponibles sur les forages extracôtiers dans un milieu arctique. Les participants ont été invités à présenter des mémoires à l'ONE sur les 11 sujets énumérés dans la portée de la revue.

De manière à élargir encore plus son champ de connaissances, l'ONE a également, par la voie d'un appel public le 30 septembre, invité quiconque possédant des compétences ou de l'information pertinente à lui communiquer. L'Office examinera en outre les recommandations de la National Commission on the BP Deepwater Horizon Oil Spill and Offshore Drilling du gouvernement américain. Selon nous, la première étape de la revue ne pourra être achevée qu'une fois ces recommandations connues, soit vers le début de 2011.

La deuxième étape de la revue du dossier Arctique donnera aux participants l'occasion de se pencher sur l'information recueillie, de se poser mutuellement des questions et de faire part de leurs commentaires de manière à mettre en commun les différents points de vue sur les éléments étudiés.

Au terme de la deuxième étape, l'office produira un rapport public après avoir pris en considération tous les renseignements à sa disposition ainsi que l'ensemble des commentaires et des suggestions des participants. L'office se servira du rapport au moment de l'examen de futures demandes de forage extracôtier dans l'Arctique canadien.

[Français]

La revue de ce dossier sera publique; il s'agira d'un processus transparent. Les personnes préoccupées par ces questions auront l'occasion d'y prendre part.

[Traduction]

Des réunions avec des collectivités du Nord sont déjà prévues pour discuter de la revue du dossier Arctique. Le 24 novembre, nous serons à Inuvik afin de rencontrer les membres du conseil d'administration de l'Inuvialuit Regional Corporation. Au début décembre, nous rencontrerons aussi des membres du Conseil inuvialuit de gestion du gibier et du Conseil consultatif de la gestion de la faune. Ce sont seulement quelques exemples des gens que nous rencontrerons, et nous avons l'intention de nous rendre dans un grand nombre de collectivités du Nord, notamment au Nunavut, pour prendre connaissance des préoccupations qui prévalent à ces endroits.

Je tiens à souligner que l'ONE a à cœur de rencontrer ces collectivités et de les écouter. Ce sont leurs habitants qui seront les plus touchés par les décisions prises à l'égard du forage extracôtier dans l'Arctique canadien.

Un des éléments qui sera examiné par l'ONE à l'occasion de la revue du dossier Arctique a trait aux puits de secours. Dans votre rapport du mois d'août sur le forage en mer, la recommandation 3 stipulait ce qui suit :

Le comité recommande la tenue de discussions approfondies entre les organismes de réglementation et l'industrie au sujet des circonstances où il faudrait exiger le forage de puits de secours.

La politique officielle de l'ONE est très claire à ce sujet. L'office exige que des puits de secours soient creusés dans tous les cas et que ceux-ci soient en mesure de stopper l'éruption d'un puits hors contrôle pendant la même période de forage. Nous avons énoncé très clairement cette politique, et elle s'applique toujours. Notre récent appel public comporte des questions sur l'efficacité et la fiabilité des solutions visant à reprendre la maîtrise d'un puits, y compris les puits de secours. Nous étudierons à fond cette question afin de disposer de renseignements clairs et d'être prêts à recevoir des demandes de forage en mer.

En cas de déversement ou d'incident du ressort de l'ONE, celui-ci est alors l'organisme fédéral responsable. En cette qualité, c'est à nous qu'il incombe de responsabiliser l'exploitant lorsqu'il s'agit de prévoir, d'atténuer et de gérer les accidents et les déversements de pétrole, peu importe leur ampleur et leur durée.

Pour en revenir à votre rapport sur le forage en mer, la recommandation 4 est la suivante :

Le comité recommande une collaboration plus poussée entre tous ceux qui sont chargés d'intervenir en cas de déversement pétrolier sur les plans du développement, de la préparation et des exercices avant que des incidents ne se produisent.

Nous adhérons de tout cœur à cette recommandation. L'ONE dispose d'un programme exclusif de gestion des interventions en cas d'urgence, et des membres de son personnel ont pris part à six exercices d'intervention uniquement au cours des six derniers mois, et à un nombre encore plus élevé si l'on recule davantage dans le temps. De plus, ils participeront à de nombreux autres exercices dans les années à venir.

L'ONE n'a reçu aucune demande d'autorisation relevant de lui pour des travaux d'exploration dans le golfe du Saint-Laurent. Habituellement, les travaux d'exploration commencent par des levés sismiques, au moyen desquels des ondes sonores permettent de se faire une bonne idée des formations géologiques présentes sous les fonds marins. Un bruit est produit en surface et le mouvement des ondes sonores ensuite réfléchies par les rochers en dessous est enregistré.

Vous avez pu lire récemment dans les médias différentes choses au sujet de la zone d'intérêt Old Harry, située à 75 kilomètres des côtes du sud-ouest de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, à 85 kilomètres des îles de la Madeleine et à environ 460 mètres de profondeur.

Cette zone d'intérêt couvre une superficie estimée à 20 000 acres, et elle chevauche à la fois les territoires de compétence de l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers, l'OCTNHE, et de l'ONE. La zone en question est du ressort de l'ONE dans une proportion de quelque 60 p. 100. Le reste se trouve dans le secteur du golfe réglementé par l'OCTNHE, qui a délivré un permis d'exploration à Corridor.

L'OCTNHE a récemment donné son aval à la demande de Corridor pour mener les travaux requis afin de cerner les géorisques éventuels dans les eaux du golfe du Saint-Laurent qui sont de sa compétence. Nous croyons comprendre que ces travaux, d'une durée approximative de six jours, comprennent des levés sismiques de faible intensité répartis sur quatre jours.

Le président : Peut-être pourrais-je vous interrompre ici, monsieur, car c'est l'une des raisons pour lesquelles nous étions inquiets. Un certain nombre de groupes, en particulier en Nouvelle-Écosse, ont communiqué avec nous et nous ont laissé entendre que ce permis autorisait l'entreprise à procéder à des activités de forage et d'autres activités plutôt invasives qui ne relèvent pas nécessairement de votre compétence, mais qui sont du ressort de l'office de Terre-Neuve-et-Labrador. Pouvez-vous en ce moment nous en dire davantage à ce sujet? Cela cadre avec ce que vous étiez en train de dire.

M. Caron : Oui. Les renseignements dont nous disposons, qui reposent sur ce qui a été rendu public, indiquent, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration, que l'office de Terre-Neuve-et-Labrador a délivré un permis autorisant des levés sismiques exploratoires. Je présume que ces travaux seront effectués prochainement, mais je n'en suis pas certain. Il se peut que M. Dixit en sache plus que moi à cet égard.

Comme vous l'avez dit, les travaux qui, à notre avis, auront lieu ne comportent pas d'activités de forage; il s'agit de levés sismiques qui consistent à générer des ondes sonores à l'aide d'un canon à air. Ces ondes qui voyagent sous l'eau sont réfléchies par les structures sous-marines, et un appareil spécialisé enregistre les signaux renvoyés. Pour des raisons que je ne peux expliquer, les géologues et les géophysiciens sont en mesure d'interpréter les signaux qu'ils lisent sur des graphiques complexes. Ces renseignements leur donnent une idée des hydrocarbures qui pourraient exister sous la mer.

Le président : Pour être en mesure d'effectuer des forages et de mener des activités plus invasives, il faudrait qu'ils obtiennent un nouveau permis, qu'ils entament un nouveau processus accompagné d'audiences, et cetera, n'est-ce pas?

M. Caron : J'ignore comment les choses fonctionnent à Terre-Neuve-et-Labrador. Je sais que, dans notre cas, chaque interaction de ce genre doit être approuvée séparément par l'ONE et faire, entre autres, l'objet d'un examen en matière de sécurité et d'une évaluation environnementale.

Le président : Honorables sénateurs, je signalerais à nos téléspectateurs que, dans les annexes du rapport que nous avons publié le 18 août et que j'ai mentionné plus tôt, il y a des listes de tous les permis octroyés, que ce soit pour des activités d'exploration, de forage ou, à la dernière étape, de pure production. Bien que notre rapport ne traite pas de la zone d'intérêt Old Harry ou du permis en question, celui-ci figure, si je peux me permettre de le dire, dans la liste qui se trouve à la page 63 de notre rapport du mois d'août. La liste mentionne le permis que Corridor Resources Inc. a obtenu pour procéder à des levés sismiques.

Rétrospectivement, je pense que nous aurions pu interroger Max Ruelokke lorsqu'il a comparu devant le comité à ce sujet, mais nous ignorions tout à fait l'existence de ce permis. Il a fait bien du bruit. Je dis cela simplement pour mettre les choses en perspective. Merci. Veuillez poursuivre, monsieur Caron.

M. Caron : Dans votre rapport du mois d'août 2010 sur le forage en mer, vous proposez ce qui suit à la sixième recommandation :

Le comité recommande un examen approfondi de la question de la responsabilité, y compris le rajustement des seuils en fonction de la réalité économique actuelle.

Afin d'apporter certains éclaircissements autour de cette très importante question, l'Office a publié, le 20 septembre, un document d'orientation intitulé Responsabilité civile et financière, qui se trouve sur son site web et qui fait partie des renseignements que nous divulguons petit à petit dans le cadre de notre revue du dossier Arctique. L'Office a par ailleurs inclus le sujet du « financement du nettoyage en cas de déversement, de la remise en état et du dédommagement pour les pertes ou les dommages » dans les questions à examiner pendant la revue. Ce sujet a été abordé sous différents angles dans notre demande d'information du 20 septembre.

Toujours dans le cadre de la revue du dossier Arctique, l'Office étudiera de très près les nouveaux règlements américains sur la sécurité adoptés vers le début d'octobre. Un premier regard m'a permis de constater avec plaisir que nombre des changements proposés aux États-Unis font déjà partie intégrante du régime de réglementation canadien.

Par exemple, les nouveaux règlements américains exigent des sociétés qu'elles obtiennent une attestation d'un tiers indépendant établissant que les plateformes peuvent être utilisées sans danger, ce qui est déjà exigé en vertu de la Loi sur les opérations pétrolières au Canada et du Règlement sur les certificats de conformité liés à l'exploitation du pétrole et du gaz au Canada.

En outre, aux termes des nouveaux règlements américains, l'industrie est tenue d'élaborer un système intégré de gestion des questions de sécurité et d'environnement. Encore une fois, au Canada, les exploitants sont déjà tenus de disposer de tels systèmes de gestion. Pour résumer, je dirais que les États-Unis tentent d'adopter un régime semblable à celui de l'Office, quelque chose qu'ils considèrent comme le modèle par excellence.

Le président : C'est ce que j'allais dire. Nous avons remarqué dans les journaux récemment que les États-Unis ont employé l'expression « modèle par excellence ». Je dois donc déduire de ce que vous dites qu'ils parlent du régime canadien?

M. Caron : Je ne crois pas. Je ne pense pas que c'était ce qu'ils voulaient dire. J'ai pesé mes mots et je n'emploie pas l'expression pour nous décrire. Les organismes de réglementation en matière de sécurité doivent toujours présumer qu'ils peuvent faire plus. C'est une attitude de base. Ces organismes doivent toujours se demander ce qu'ils peuvent faire de plus. À quoi n'ont-ils pas encore pensé? Nous appelons cela une culture de sécurité. Je serais ravi de répondre aux questions des sénateurs à ce sujet plus tard pendant la séance.

Je ne pense pas qu'ils parlent de nous lorsqu'ils emploient cette expression. Par ailleurs, je ne crois pas que je voudrais comparer l'Office à ses homologues, par crainte que les résultats nous portent à croire que nous pouvons nous détendre. Cela n'est pas vrai. Nous devons demeurer vigilants. Nous devons nous mettre constamment au défi. Que pouvons-nous faire de plus pour responsabiliser l'industrie afin d'atteindre les résultats souhaités en matière de sécurité, d'environnement et d'intervention en cas d'urgence? C'est là notre devoir, et nous comptons l'accomplir avec succès; pour ce, nous devons nous demander sans cesse ce que nous pouvons faire de plus.

Le président : Nous sommes membres d'un groupe de neuf pays qui ont une industrie de forage en mer. Je pense que vous ou d'autres nous avez dit que les Norvégiens, les Britanniques et nous comptons parmi ceux qui surveillent de plus près. Est-ce exact?

M. Caron : C'est exact. Le prochain paragraphe de ma déclaration le dit très clairement. Si vous me le permettez, je vais vous parler de l'International Regulators' Forum, connu sous l'abréviation « IRF ». Dans votre rapport du mois d'août, vous notiez que le Canada est un membre de premier plan de l'International Regulators' Forum, que je vais appeler l'IRF par souci de commodité.

L'IRF a justement tenu son plus récent congrès important à Vancouver il y a quelques jours. Plusieurs membres du personnel de l'Office ont participé à ce congrès de trois jours, y compris M. Dixit et moi. En fait, M. Dixit a travaillé activement à l'organisation du congrès et du programme; il a contribué aux préparatifs qui en ont fait un succès.

J'en ai personnellement retiré ce qui suit : les organismes de réglementation de divers pays partout dans le monde, y compris les États-Unis, la Norvège, le Danemark, le Royaume-Uni, l'Irlande, l'Australie, le Mexique, le Brésil, les Pays-Bas et le Canada, font front commun autour de la notion de promotion d'une culture qui met la sécurité à l'avant-plan lorsqu'il s'agit de forage en mer. Cela comprend le besoin de s'en remettre à des systèmes de gestion pour promouvoir une telle culture, ainsi que le rôle que doivent jouer les organismes de réglementation pour responsabiliser l'industrie afin d'atteindre les résultats souhaités en matière de sécurité, d'environnement et d'intervention en cas d'urgence. J'ai aussi appris qu'il faut mener des vérifications des systèmes de gestion voulus et qu'il faut effectuer des inspections sur le terrain, qui sont là autant d'outils clés dont nous disposons pour assurer la sécurité dans le contexte du forage en mer.

J'ai également appris que l'Office national de l'énergie est, sinon le seul organisme de réglementation dans le monde, du moins un des très rares dont le mandat lui permet de se concentrer entièrement sur la sécurité, sans oublier l'environnement, tout en étant l'organisme responsable des interventions en cas d'urgence. Autrement dit, l'Office est véritablement un organisme de réglementation présent sur la durée complète du cycle de vie en ce qui touche les forages extracôtiers. Je ne sais vraiment pas s'il existe un autre exemple dans le monde d'un mandat aussi clair en matière de sécurité et de protection de l'environnement. C'est possible, mais je n'en ai pas encore trouvé qui reflète une telle image équilibrée du cycle de vie complet.

[Français]

En terminant, je souhaite mettre l'accent sur le fait qu'il est absolument essentiel que la revue du dossier Arctique soit transparente et exclusive et que les points de vue des collectivités du Nord soient entendus et respectés. Les Canadiens du Nord, et d'ailleurs au pays, comptent sur nous pour ne pas faire d'erreurs. Je crois fermement que l'Office nationale de l'énergie est à la hauteur de cette tâche. Nous avons pris l'engagement de faire ce qu'il faut.

Je vous remercie, honorables sénateurs, de m'avoir donné l'occasion de vous expliquer où l'Office en était rendu pour la revue de l'Arctique.

[Traduction]

Monsieur le président, si vous le permettez, j'ai des nouvelles de dernière heure. Nous avons publié un communiqué hier, à 16 h 30. Il me faudrait un instant pour exposer les grandes lignes de ce que nous avons annoncé à ce moment-là. Devrais-je partager ces renseignements avec vous?

Le président : Je vous en prie.

M. Caron : Hier, à 16 h 30, nous avons publié notre dernière mise à jour au sujet des première et deuxième étapes de la revue du dossier Arctique. Nous avons précisé la méthode à suivre pour demander de nous rencontrer dans le cadre de la première étape, qui vise la recherche des faits et la collecte d'information. Nous avons demandé aux gens de communiquer avec nous avant le 31 janvier pour nous dire s'ils veulent nous rencontrer dans le but de partager leurs connaissances avec nous.

Nous avons annoncé également que nous planifions faire appel aux services de conseillers et de spécialistes, et nous avons demandé à tous les participants inscrits à la revue de nous donner des suggestions d'ici la fin novembre par rapport aux projets qui devraient être confiés à des conseillers et des spécialistes contractuels. Nous avons déjà des idées, mais nous ne voulons pas nous priver de la sagesse des participants inscrits à la revue.

Enfin, nous avions annoncé que nous réserverions 300 000 $ pour les frais de déplacement et autres afin que les gens puissent participer aux rencontres organisées dans le cadre de la deuxième étape l'an prochain, moment auquel nous inviterons les gens à se poser des questions. Nous avons aussi signalé que nous tiendrions des réunions aux fins de la deuxième étape notamment à Inuvik, Iqaluit, Yellowknife et Whitehorse; nous ajouterons des endroits au besoin.

Voilà qui termine l'addition des nouvelles de dernière heure à ma déclaration, monsieur le président. M. Dixit et moi avons hâte de discuter avec les sénateurs.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Caron.

J'aimerais commencer par deux questions, pour être certain qu'elles figurent dans le compte rendu. Nous avons beaucoup parlé, dans le cadre de nos audiences, des enquêtes sur l'affaire de la plateforme Deepwater Horizon, des causes de l'accident et de la responsabilité imputable à British Petroleum et à d'autres.

Vous m'avez dit récemment que le rapport de l'enquête doit être déposé auprès du président Obama à un moment donné et qu'il sera ensuite rendu public. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet afin que le compte rendu contienne une mention du moment auquel nous pouvons nous attendre à recevoir ces conclusions?

M. Caron : Nous avons de tout nouveaux renseignements. Lors du congrès de l'IRF tenu à Vancouver il y a quelques jours, on a précisé clairement qu'on vise maintenant janvier 2011. On croyait auparavant qu'il serait publié en décembre 2010, mais nous avons rencontré certaines personnes qui travaillent au rapport, et elles sont très sérieuses et déterminées. Je pense qu'elles sentent que le mois supplémentaire est nécessaire pour faire un bon travail. Notre hypothèse de planification actuelle est donc janvier 2011.

Le président : Normalement, on finirait par le rendre public, n'est-ce pas?

M. Caron : Absolument.

Le président : Je crois comprendre qu'on a aussi mené d'autres études, d'autres enquêtes, ou sont-elles privées?

M. Caron : En ce qui concerne la situation aux États-Unis, je suis certain qu'on prendra d'autres mesures diverses, y compris tous les travaux qui seront faits par rapport au litige, que nous ne suivons pas.

Fait intéressant, toutefois, d'ici la fin de l'année, nous nous attendons à ce que l'Australie publie un rapport public au sujet de la perte de contrôle du puits de Montara, situation qui est survenue en août 2009. Je vais vous donner une réponse courte et je peux entrer dans le détail plus tard. La situation en Australie avait bien des points en commun avec celle du golfe du Mexique, dans le sens où les choses ne se passaient pas comme ç'aurait dû être le cas. Le rapport devrait être rendu public d'ici la fin de l'année. Ce sera un très bel ajout à la base d'information dont nous bénéficierons pour faire notre travail à la première étape et pour les questions à la deuxième étape.

Le président : L'affaire en Australie s'est-elle produite après celle du Deepwater Horizon?

M. Caron : Elle s'est produite avant, mais elle n'a pas fait les manchettes comme la situation dans le golfe du Mexique. C'est arrivé le 21 août 2009. Le nom du puits était Montara et la société qui cherchait des hydrocarbures était connue sous le nom de PTTEP. La plateforme s'appelait West Atlas et l'exploitant était Seadrill.

Dans le golfe du Mexique, la plateforme était nommée Deepwater Horizon, l'exploitant était Transocean, la société était BP et le puits s'appelait Macondo. Nous pouvons copier et coller ces détails et appeler le puits Montara, avec les renseignements que je viens de fournir pour le compte rendu. Cela fera aussi partie de notre examen. Nous allons considérer les faits et les connaissances au sujet de la sécurité et de la culture de sécurité, et nous allons étudier les raisons pour lesquelles les gens ne font pas toujours ce qu'ils devraient faire et l'équipement fonctionne mal parfois.

Le président : Vous avez mentionné deux ou trois recommandations contenues dans notre rapport. Mes collègues et moi nous demandons si nous avons bien fait. Acceptez-vous ou rejetez-vous nos recommandations, en tenant compte du fait que nous avons été obligés de mener notre étude rapidement pour rassurer les Canadiens qu'aucune menace imminente ne pesait sur nos côtes?

M. Caron : Nous n'avons rien trouvé dans le rapport qui ne concorderait pas avec ce que nous croyons en tant qu'organisme de réglementation en matière de sécurité. Nous acceptons les règlements qui nous ont été recommandés par rapport à notre mandat. Nous sommes d'avis que votre rapport permet aux Canadiens d'adopter leur propre point de vue sur ce que les institutions publiques comme l'ONE devraient faire. Je vais m'abstenir de dire aux Canadiens que penser, mais le rapport contribue à une divulgation publique et transparente des circonstances et des faits relatifs au forage dans l'Arctique. Pour ce, je remercie le comité.

Le sénateur Mitchell : Selon ce que vous dites, il est clair qu'on ne tolère aucunement les erreurs d'attitude au sein de l'industrie nucléaire. On ne peut envisager une telle chose parce que les conséquences sont trop importantes. Quelqu'un m'a dit que l'industrie pétrolière aurait intérêt à adopter la même attitude, surtout par rapport au forage en mer. On ne peut tout simplement pas faire d'erreur. Ma question est à ce sujet.

Je comprends que vous dites que nous ne sommes pas le modèle par excellence et que vous ne tenez rien pour acquis. Toutefois, j'ai trouvé une de vos affirmations intéressante. Vous déclarez que nous devons promouvoir une culture de sécurité dans le domaine du forage en mer. C'est le point sur lequel vous êtes tombés d'accord avec nombre d'entreprises, comme il est écrit à la page 8 de votre déclaration. Cela me porte à croire que vous n'en êtes pas encore au point de la tolérance zéro. Je sais que vous épousez le concept de la tolérance zéro, mais avez-vous mis en place les mécanismes nécessaires? Vous dirigez-vous dans cette direction? Si oui, quand atteindrez-vous votre but?

M. Caron : Oui, nous avons toujours cherché à réaliser cet objectif. En tant qu'organisme de réglementation, lorsque nous parlons de la sécurité des pipelines, nous disons que notre cible est de zéro rupture. Dans le cas du forage extracôtier, notre cible, c'est qu'il n'y ait pas de perte de contrôle des puits.

En même temps, bien qu'un organisme de réglementation ait cette perspective — mais je suppose que c'est la même chose pour un organisme de réglementation dans l'industrie nucléaire —, il doit toujours se remettre en question. Du point de vue technique, il fait toujours face à un événement de fréquence faible et de gravité élevée.

Dans la demande d'information que nous avons rendue publique le 20 septembre, nous abordons carrément cette question. Dans la question 1.1.2, « Système de gestion », et dans les questions de cette série au sujet de l'évaluation des dangers et des interventions en cas de danger, nous demandons aux participants de répondre aux questions suivantes : Comment sont cotés les risques associés à des événements de fréquence faible et de gravité élevée? Quels sont les critères pour déterminer si les risques sont acceptables? Le risque n'est jamais nul. En tant qu'organisme de réglementation, je ne peux pas vous promettre que rien n'ira mal. En toute conscience, je ne peux pas le faire. En ce qui concerne les événements de gravité élevée, comment évaluer la situation en rendant la probabilité d'un tel événement aussi faible qu'il soit humainement possible de le faire? Ensuite, nous combinons cela avec les conséquences si quelque chose tournait mal. Nous devons être explicites dans notre description de ce à quoi cela ressemble et si la combinaison fréquence faible/gravité élevée est acceptable du point de vue de la sécurité et de la protection de l'environnement. Cela vient éclairer notre travail en ce qui concerne la conception, la formation et l'intervention d'urgence, le puits de secours et tous les outils dont nous disposons dans notre boîte à outils en tant qu'organisme de réglementation pour être en mesure de dire que si nous nous autorisons un forage extracôtier, cela est acceptable du point de vue de l'intérêt public. Sinon, nous refusons l'autorisation de forer le puits. Ces deux options s'offrent à l'organisme de réglementation.

Le sénateur Mitchell : Vous ne pouvez pas parler au nom des deux offices extracôtiers, non plus?

M. Caron : Non. D'un point de vue juridique, je ne peux pas me fermer l'esprit sur ce que l'Office fera avec les demandes futures. Nous devons juger cela à partir de ces faits. En tant que tribunal administratif quasi judiciaire, c'est notre devoir solennel et notre obligation légale de ne pas nous fermer l'esprit et d'entendre toutes les parties avant de tirer une conclusion.

Le sénateur Mitchell : Dans le paragraphe suivant, vous affirmez que vous êtes « véritablement un organisme de réglementation présent sur la durée complète du cycle de vie ». C'est impressionnant. C'est beaucoup de travail. Avez-vous les ressources pour le faire?

M. Caron : Oui, nous les avons. Le niveau actuel d'activité extracôtière est nul. Il n'y a rien en vue pour quelques années; si nous l'approuvons, un puits pourrait être foré dans la mer de Beaufort ou quelque part dans les eaux de l'Arctique. Nos plans comprennent la préparation en vue de la possibilité de recevoir une demande pour ce forage. Si cette demande était reçue et approuvée, le requérant serait tenu responsable des conséquences. Selon notre évaluation et les partenariats qu'une entreprise peut avoir avec des ministères et organismes responsables des différents aspects de l'intervention d'urgence, nous pouvons juger que le puits peut aller de l'avant ou non.

Le sénateur Mitchell : Aussi horrible que fût le problème survenu dans le golfe du Mexique, nous pouvions au moins nous consoler en pensant que BP avait beaucoup d'argent et avait les ressources pour faire le nécessaire. L'entreprise a dépensé des milliards de dollars.

L'entreprise qui détient la plupart des licences d'exploitation dans le cas de Old Harry, Corridor Resources Inc., est décrite comme une petite entreprise de l'industrie des ressources. Si elle fait effectivement du forage et qu'elle éprouve des difficultés, a-t-elle les ressources pour corriger la situation?

M. Caron : Je ne pourrais pas le dire. Je vais répéter ce que j'ai dit au président, à savoir que le travail que ces gens prévoient faire, d'après ce que je crois comprendre, c'est du travail de prospection géosismique, à savoir envoyer des ondes sonores dans la structure pour mesurer la réponse. Le travail de prospection géosismique est différent du forage extracôtier. Il a des conséquences en matière de sécurité et d'environnement. Un organisme de réglementation se doit d'examiner ces conséquences.

Le sénateur Mitchell : Il n'est pas inconcevable que cette entreprise puisse obtenir un permis de forage. Qui vérifie leurs ressources? Autoriseriez-vous une petite entreprise à faire cela dans votre zone de compétence?

M. Caron : On exige des organismes quasi judiciaires qu'ils gardent l'esprit ouvert. Il nous faudrait examiner les faits. Comme nous le verrons plus loin dans la discussion, nous avons des exigences précises en termes de garantie financière avant que nous autorisions une entreprise à faire quoi que ce soit. La loi adoptée par le Parlement nous oblige à le faire. Le règlement est encore plus précis et la façon dont nous l'administrons fait en sorte qu'il est très clair que la garantie financière est une obligation au moment de la demande et qu'elle doit demeurer en place durant les activités. Nous avons même le pouvoir de faire cesser les opérations si la garantie financière arrive à expiration durant les activités du puits ou s'il y a une défaillance quelconque, peu importe la nature.

Le sénateur Mitchell : À combien la somme s'élève-t-elle? Lorsque vous dites « garantie financière », est-ce que cela veut dire de l'argent à la banque?

M. Caron : Elle peut prendre diverses formes, par exemple, des obligations, des instruments financiers, le bilan de l'entreprise.

Le sénateur Mitchell : Est-ce que ce serait 1 milliard de dollars?

M. Caron : Il peut s'agir de n'importe quelle somme. La loi dit clairement qu'il n'y a pas de limite.

Récemment, le Groenland a autorisé le forage de deux puits de son côté de la frontière Canada-Groenland. Selon les rapports parus dans les médias — je n'ai pas confirmé cette information indépendamment —, il aurait exigé des garanties financières de 10 milliards de dollars avant que l'entreprise puisse commencer à forer.

Le sénateur Mitchell : Est-ce que cela pourrait devenir la norme?

M. Caron : Il s'agit d'un fait dans le cas du Groenland — et cela est fondé sur des rapports publiés dans les médias; je n'ai pas vérifié cette information —; c'est quelque chose que le Groenland a décidé. À l'ONE, nous pouvons faire la même chose. Nous pouvons demander une garantie plus élevée ou moins élevée. Cela dépendra de l'examen des faits, de l'environnement qui pourrait être touché, de la solidité financière de l'entreprise, qui est un élément pertinent, et tout ce que nous pourrons juger pertinent à notre décision, en tant qu'organisme quasi judiciaire.

Le sénateur Lang : Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Je vous suis reconnaissant d'être venus et il est certainement utile pour le public d'être informé des mesures que vous prenez. Vous apportez toujours de l'information nouvelle qui est importante pour les Canadiens.

Dans votre déclaration liminaire, vous avez fait allusion au projet de forage Devon Paktoa C-60 en 2005-2006. Je pense que nous pouvons dire sans trop nous tromper que notre principale préoccupation est le forage en eau profonde dans l'Arctique. Pouvez-vous confirmer, aux fins du compte rendu, si ce puits est considéré comme un « puits en eau profonde »?

M. Caron : Je peux confirmer que cela n'en est pas un; il s'agissait d'un puits en eau peu profonde de telle manière que pour forer le puits, vous aviez un lien direct entre la plateforme et le fond marin. Il s'agissait d'une structure physique.

Le sénateur Lang : Voilà le point que je voulais faire clarifier aux fins du compte rendu. Notre véritable préoccupation ici, c'est le forage en eau profonde. Nous avons du forage en eau peu profonde depuis de nombreuses années. Des centaines de puits ont été forés avec succès dans la mer de Beaufort au cours des dernières années.

Il y a quelque chose que j'aimerais que vous notiez, si vous le voulez. À la deuxième page de votre exposé, vous faites allusion à la réunion que vous aurez le 24 novembre avec les collectivités du Nord. Vous allez rencontrer le conseil d'administration de l'Inuvialuit Regional Corporation, ce qui est évidemment la priorité, et le Conseil inuvialuit de gestion du gibier et le Conseil consultatif de la gestion de la faune. J'aimerais m'assurer que vous rencontriez également le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et le conseil municipal d'Inuvik, parce que les autres organismes ne représentent pas nécessairement les autres personnes dans la collectivité. C'est important parce qu'ils se sentent exclus et ils ont une certaine autorité juridique.

M. Caron : Merci, sénateur Lang. Nous allons en prendre note et communiquer avec ces gens.

Le sénateur Lang : Le sénateur Mitchell a parlé de ce qui, je pense, est notre véritable préoccupation, à savoir la question de la sécurité et de notre capacité à faire face à la situation si quelque chose tournait mal avec le forage extracôtier. À la page 4, vous dites que votre personnel a participé à six exercices d'intervention au cours des six derniers mois. Je pense pouvoir dire sans trop me tromper qu'à la suite de nos dernières audiences sur le forage extracôtier, nous étions parfaitement convaincus que nous étions bien préparés pour faire face à une situation comme celle qui est survenue dans le golfe du Mexique.

Premièrement, est-ce que votre personnel a participé physiquement à un tel exercice dans la mer de Beaufort? Deuxièmement, a-t-il conclu que nous avions l'équipement et les ressources nécessaires pour faire face à une catastrophe? Troisièmement, est-ce que les rapports et les constatations sont rendus publics sur votre site web, pour que le public puisse savoir ce qui est arrivé et si nous avons respecté nos obligations?

Il y a une autre observation que je voudrais faire. Lorsque nous parlons d'équipement, je veux qu'il soit clair, aux fins du compte rendu, que nous parlons d'équipement qui est capable de faire face à la situation; nous ne parlons pas d'un skip de 16 pieds qui essaie tant bien que mal de faire le travail et que, de toute évidence, personne ne veut voir.

M. Caron : Ces exercices que nous avons faits, et que nous continuerons de faire, sont une combinaison d'exercices sur papier, que les gens trouvent vraiment utiles, et de certains exercices souterrains également. M. Dixit clarifiera cette question pour vous dans un moment.

Je ne peux pas spéculer pour savoir si nous avons aujourd'hui l'équipement et les installations pour faire face à une situation concernant un puits qui sera foré en 2014 ou plus tard. Je dirais que l'objectif, ce n'est pas d'être prêts maintenant, mais d'être prêts à ce moment-là. Je soupçonne que c'est sur le point d'être prêt. Je ne sais pas si nous avons reçu une demande aujourd'hui pour un puits, si une industrie est en mesure de démontrer qu'elle a tous les partenariats en place et tous les sous-marins, les hélicoptères et les navires prêts aujourd'hui pour répondre à une situation d'urgence.

Pour ce qui est de savoir si des rapports sont disponibles, il faudra que je vérifie ce que nous avons et que je réponde par écrit à la greffière du comité. S'ils ne sont pas encore du domaine public, nous allons les rendre accessibles, en tenant compte évidemment des limites habituelles liées à l'accès à l'information. C'est une bonne suggestion, sénateur. Je vais demander à M. Dixit de compléter ou d'améliorer mes réponses.

Bharat Dixit, chef d'équipe, Conservation des ressources, Office national de l'énergie du Canada : Je ne peux pas améliorer la réponse, mais je peux ajouter des renseignements.

Il incombe à l'exploitant de démontrer qu'il a une réserve de prévoyance appropriée. C'est là notre point de départ et notre attente. Dans le cadre de notre annonce récente au sujet du programme d'évaluation environnementale régionale de la mer de Beaufort, au mois d'août, une des tâches porte sur la démonstration de l'état de préparation du Canada. Par conséquent, des travaux sont en cours, en vertu de ce programme, pour répondre aux questions mêmes que vous avez posées.

La dernière observation consiste à répéter ce que M. Caron a dit : c'est une préparation pour le moment où les demandes anticipées seront reçues, lorsqu'une décision sera prise sur ces demandes, si elles doivent être autorisées et quelle est leur situation. Ce à quoi nous nous attendons, c'est de préparer le dossier et d'amener l'entreprise à démontrer à notre satisfaction qu'elle a tout le réseautage et tout l'équipement nécessaires pour faire face à ces situations.

L'Office n'est pas un répondant. Nous nous assurons que de tous les bons éléments sont en place et que les bonnes mesures sont prises lorsque les choses tournent mal.

Le sénateur Lang : Je veux dire ceci : concernant le calendrier et l'argent que nous avons, j'aimerais avoir des assurances concernant l'argent qui est attribué à cette question. Vous avez parlé de 300 000 $ et vous n'avez pas parlé de l'argent destiné à l'évaluation de la mer de Beaufort, qui se situe autour de 2 millions de dollars.

M. Dixit : C'est 22 millions de dollars.

Le sénateur Lang : Je veux qu'il soit inscrit dans le compte rendu que je tiens à ce que l'argent soit affecté de telle manière qu'il serve à réaliser les objectifs environnementaux que nous cherchons à réaliser. Nous avons eu des audiences d'une durée de cinq ans sur le pipeline du Mackenzie. Cela aurait dû prendre un an et demi et aurait dû coûter 1,4 million de dollars, mais en réalité, cela a coûté 5 millions de dollars et le calendrier des audiences a même mis en péril la poursuite du projet.

Avec une surveillance et avec vos responsabilités, pouvez-vous me donner l'assurance que cet argent, de concert avec les organismes locaux, les conseils et tous les organismes concernés, servira à réaliser les objectifs environnementaux que nous voulons réaliser?

M. Caron : Je vous assure, sénateur, que l'Office s'engage à mettre en œuvre la loi telle qu'elle a été adoptée par le Parlement. Ce que vous décrivez, c'est exactement ce qu'on nous a demandé de faire. Je pense que l'argent dont vous avez parlé fait partie du processus.

L'ONE prendra d'autres mesures pour faire en sorte que le Canada soit prêt à accepter cette demande et, si le Canada approuve le forage d'un puits dans la mer de Beaufort, pour faire en sorte que ce soit fait de la bonne manière. Si quelque chose tourne mal, la réponse sera satisfaisante et en conformité avec ce que nous avons déterminé comme étant dans l'intérêt public.

Le sénateur Neufeld : Pensez-vous que des demandes seront reçues ou approuvées avant que vous ayez terminé l'étude que vous êtes en train de faire?

M. Caron : Non, sénateur.

Le sénateur Neufeld : Bien.

Parlons des puits de secours. Vous avez dit qu'ils sont exigés dans les eaux profondes dans les régions extracôtières du Nord. Y a-t-il une zone particulière dans laquelle on fait du forage avec un puits de secours? Vous dites qu'il est foré au cours de la même saison, alors, à quelle profondeur allez-vous intercepter le puits principal? Y a-t-il une norme ou comment déterminez-vous cela?

M. Dixit : Il n'y a pas de profondeur prédéterminée où il faut forer un puits de secours. Typiquement, un puits de secours est foré lorsqu'on a perdu le contrôle du puits original. Il est rare qu'il y ait eu des difficultés là où on a planifié que le puits de secours rejoindrait le puits original.

Le puits de BP dans le golfe du Mexique était situé à environ 18 000 pieds sous le plancher océanique. Dans des puits moins profonds — le puits Paktoa C-60 sera d'une profondeur de 2 000 ou 2 500 mètres —, c'est là que le forage peut éprouver des difficultés.

Le sénateur Neufeld : Peut-être que je n'ai pas formulé ma question clairement. J'ai cru comprendre qu'un puits de secours doit être foré au cours de la même saison. Je comprends cela, mais il y a une période de gel. Je vis dans le Nord. Le puits ne sera pas nécessairement en production ou en éruption au cours d'une saison où vous pouvez forer un puits de secours. C'est ce que je veux savoir. Comment déterminez-vous d'avance à quel endroit vous allez intercepter le puits principal? Y a-t-il une norme?

M. Caron : La zone que vous devez cibler, c'est là où vous pouvez stopper le puits en éruption de libérer du pétrole dans l'environnement.

Le sénateur Neufeld : Ce qui pourrait être n'importe où entre 500 et 1 000 mètres?

M. Caron : Le géologue détermine la source de la zone de haute pression. C'est dans cette zone que vous allez avoir de la pression et des secousses, et c'est là que vous pouvez perdre le contrôle du puits.

Le sénateur Neufeld : Vous ne saurez pas où se trouve la pression principale tant que vous ne serez pas rendu à cette profondeur totale.

M. Caron : C'est exact.

Le sénateur Neufeld : Je suis encore un peu confus et plutôt que d'utiliser mon temps là-dessus, j'aimerais discuter de cette question avec vous plus tard, sur la façon dont vous déterminez à l'avance à quel endroit le puits de secours interceptera le puits principal. Je parle de la mer de Beaufort, et non du golfe du Mexique où quelqu'un peut forer 12 mois par année. Dans la mer de Beaufort, la saison de forage est limitée.

M. Caron : S'il s'agit d'un puits peu profond, comme celui que nous avions avec Devon, nous avons une capacité limitée. Par conséquent, nous avons demandé à l'exploitant de commencer immédiatement à forer un puits de secours au cours de la même saison.

Dans les îles de l'Arctique où la glace est permanente, vous avez une situation presque comparable au forage à terre. Vous forez un puits, vous avez une éruption et vous avez 12 mois dans l'année pour commencer à forer un puits de secours. Dans un délai de quelque chose comme trois mois, selon l'évaluation que nous faisons, nous reprenons le contrôle du puits.

S'il faut plus d'un an pour forer en eau profonde, c'est là qu'il y a un problème. C'est pourquoi l'industrie nous a demandé : « Que devrait être la politique, à votre avis? » Nous avons répondu : « Nous l'ignorerons; nous allons faire une étude. » Nous terminons cette étude en ce moment.

Mathématiquement, la seule façon de reprendre le contrôle, s'il faut entre deux et trois ans pour forer un puits — en eau profonde, cela peut aller jusqu'à trois ans avant d'atteindre la zone cible... Mathématiquement, l'unique manière d'avoir de la relève pendant la même saison, c'est de forer deux puis simultanément. Nous ignorons toutefois si c'est une bonne idée, car on double les risques.

Nous sommes en train de nous pencher sur la question dans le cadre de la revue du dossier Arctique, et nous entendons aller au fond des choses.

Le sénateur Neufeld : C'est intéressant de voir que cela dépend de toutes sortes de facteurs. Je comprends. Êtes-vous l'organisme responsable?

M. Caron : Oui.

Le sénateur Neufeld : Est-ce que la Garde côtière et le MAINC le savent?

M. Caron : Absolument.

Le Sénateur Neufeld : Je m'en réjouis, si c'est effectivement le cas.

M. Caron : La plupart des grands ministères participent à la revue du dossier Arctique. Les membres de la famille fédérale sont des participants inscrits.

Le sénateur Neufeld : Ma troisième question porte sur la sécurité. J'ai été surpris des nombreuses discussions au sujet des blocs obturateurs de puits, ou BOP, des défaillances techniques et autres choses du genre dans le golfe du Mexique. Dans ce que vous avez dit jusqu'à présent, il n'a nullement été question des BOP, mais je suis sûr que vous en parlerez dans l'étude. Pouvez-vous nous en donner l'assurance?

M. Caron : Oui. Vous verrez beaucoup de questions là-dessus dans notre demande d'information.

Le sénateur Neufeld : À quelle tierce partie indépendante faites-vous appel pour vérifier la sécurité?

M. Dixit : Nous avons un règlement dans lequel figure une liste de cinq ou six agences. On les appelle les autorités certificatrices. L'American Bureau of Shipping, ou ABS, et le Lloyd's Register Group en sont des exemples.

Le sénateur Neufeld : Si ma mémoire est bonne, lorsque nous avons discuté de l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador sur les hydrocarbures extracôtiers et de l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers, nous avons appris que l'équipement de sécurité était fourni par des compagnies appartenant à l'industrie. Cela m'a un peu dérangé. Est-ce que ces organismes indépendants sont liés à l'industrie, outre le fait qu'ils comprennent comment elle fonctionne? Lorsque vous parlez de « tierce partie », je ne veux pas qu'il y ait d'équivoque possible.

M. Caron : Ces organismes ont été choisis en vertu du règlement, en raison de leur indépendance. Pour s'acquitter de leur mission, ils doivent être indépendants, sinon ils font faillite.

En même temps, lorsque nous étudions la proposition que fait la compagnie, nous tenons pour acquis que l'autorité certificatrice y jettera aussi un coup d'œil. Si, à l'examen du dossier, nous voyons quelque chose de douteux, nous posons des questions.

Le sénateur Seidman : Merci beaucoup, monsieur Caron, d'être de retour parmi nous. Je vais revenir sur quelques-uns des territoires qu'a couverts le sénateur Lang, pour obtenir des éclaircissements. Par exemple, à la page 1 de votre mémoire, dans l'introduction, vous dites que depuis 19 ans, l'Office n'a autorisé qu'un seul forage extracôtier.

M. Caron : C'est vrai.

Le sénateur Seidman : J'aimerais savoir pourquoi vous n'avez autorisé qu'un seul organisme.

M. Caron : Parce que c'est le seul qui a posé sa candidature.

Le sénateur Seidman : C'est une excellente explication. Merci.

À la page 3 de votre mémoire, vous dites que l'Office est l'organisme fédéral responsable. En général, vous avez expliqué ce que cela signifiait, mais j'aimerais que vous nous disiez précisément ce que cela implique, parce que le problème de savoir qui est responsable s'est posé dans le golfe. Pourriez-vous m'éclairer?

M. Caron : C'est bien que vous posiez la question, car il faut bien sûr être en mesure de dire clairement, avant l'apparition d'un problème, qui sera chargé de le régler et comment. Tous les exercices qui ont été faits vont se poursuivre, au cas où nous devrions un jour faire face à une situation bien réelle, afin que les gens n'oublient jamais qu'il existe une chaîne de commandement et quoi faire, à quel moment.

Comme l'a dit M. Dixit, nous ne sommes pas des intervenants. L'Office ne possède pas de navires, de bateaux, d'hélicoptères ou de sous-marins. Notre mission consiste à nous assurer que l'industrie prend les mesures qui s'imposent, et quand quelque chose tourne mal — pour en revenir à la question du sénateur Seidman —, qu'elle peut réagir très efficacement. Nous tenons l'industrie responsable devant la société.

Cela signifie qu'en cas de doute, il faut s'adresser à l'Office pour obtenir des directives afin de savoir quoi faire, et dans quel ordre, pour reprendre le contrôle de la situation.

Le sénateur Seidman : Est-ce à dire que vous coordonnez les opérations et que vous demandez l'envoi d'un navire sur les lieux d'un incident, par exemple?

M. Caron : C'est possible. La loi nous permet d'assurer la gestion d'une situation si nous considérons que l'exploitant ne fait pas son travail correctement.

Le sénateur Seidman : Vous pouvez donc être la solution de dernier recours, n'est-ce pas? Vous pouvez vraiment prendre le contrôle des opérations?

M. Caron : Nous y sommes autorisés en vertu de la loi.

Le sénateur Seidman : C'est très utile.

M. Caron : Effectivement.

Le sénateur Seidman : Vous dites que vous approuvez notre recommandation pour qu'il y ait davantage de collaboration entre tous les responsables afin d'intervenir en cas de fuite de pétrole. Pourriez-vous nous parler un peu de cette collaboration et nous dire où elle en est?

M. Caron : La collaboration permet de créer une culture de sécurité entre tous les participants. Les simulations et les exercices sur le terrain permettent de se connaître, de développer la confiance, de savoir où se trouvent les numéros de téléphone et les manuels de procédure. La collaboration est un processus continu. Même si nous n'aurons jamais à mettre nos connaissances en pratique, nous nous entraînons au cas où nous devrions faire face à une situation d'urgence un jour.

Nous considérons également qu'en cas de problème, s'il existe une chaîne de commandement, au moins entre les organismes gouvernementaux et au sein de l'industrie, il y a une volonté plus grande de corriger le problème le plus vite possible. Les personnes qui ont été formées pour penser à la séquence des choses à faire pour reprendre le contrôle de la situation font un travail irréprochable, à notre avis, lorsque nous avons affaire à des pipelines, par exemple. Nous n'avons pas eu de problèmes avec des forages en haute mer, mais quelques incidents avec des pipelines. Il est intéressant de voir combien les investissements portent fruit quand on fait face à une situation critique et que chacun sait comment réagir et qui est responsable. On ne s'embarrasse pas de protocole, on sait quoi faire immédiatement. C'est ainsi que cela se passe dans les situations d'urgence. C'est remarquable de voir à quel point les gens collaborent naturellement, parce qu'ils se connaissent, ont travaillé ensemble et sont bien préparés.

Le sénateur Seidman : Je m'en réjouis également. C'est rassurant de savoir qu'il y a une chaîne de commandement et des gens responsables. C'est essentiel.

J'aimerais faire un bref commentaire au sujet de votre présentation. Selon vous, les organismes de réglementation chargés de la sécurité peuvent toujours faire plus. Je dois avouer que votre absence de complaisance est extrêmement rassurante parce que, comme nous nous en sommes rendu compte, la technologie évolue. Les organismes de réglementation doivent être tournés vers l'avenir et en avance sur la technologie.

Je suis contente de voir que vous favorisez ce genre de culture à l'égard de la sécurité.

Le sénateur Frum : On est en train de négocier et de mettre en jeu les droits d'Old Harry. Vous dites que 60 p. 100 des réserves relèvent de votre compétence. Dans l'éventualité où le Québec se verrait accorder des droits exclusifs, qu'est-ce qui changerait dans la structure de supervision?

M. Caron : Cela dépendrait de l'entente. Comme vous l'avez constaté, nous ne faisons pas partie des pourparlers. Il s'agit d'une discussion politique entre les gouvernements du Canada et du Québec. Nous n'avons pas voix au chapitre puisque nous sommes un organisme indépendant de réglementation en matière de sécurité. Toutefois, il est possible que nous ne le soyons plus si on décidait, au moyen d'une loi, de définir et de créer un nouvel organisme de réglementation. Tout dépend de la teneur de l'accord.

Par exemple, depuis le transfert des responsabilités au Yukon, ce territoire est maître du développement de ses ressources énergétiques. Il a toutefois choisi de conclure un contrat de services techniques avec l'Office national de l'énergie. Dans l'exercice de ses pouvoirs, il compte sur des gens comme M. Dixit, pour le volet technique, mais il conserve le contrôle du processus décisionnel. Madame, cela dépendra de la tournure que prendront les discussions politiques et de la mesure dans laquelle la Loi sur les opérations pétrolières au Canada sera modifiée ou pas, en fin de compte.

Le sénateur Frum : Cela pourrait-il avoir une incidence sur l'harmonisation des niveaux de sécurité et des procédures entre les différentes sphères de compétences? Je pose la question en raison de tout le discours, au Québec, entourant la reconnaissance des droits sur ces gisements et la possibilité d'extraire l'équivalent de 160 milliards de dollars de ressources. Le Québec montre un très vif intérêt pour l'exploitation des réserves dans cette zone.

Pourriez-vous nous parler de l'harmonisation des normes et nous expliquer comment cela fonctionne?

M. Caron : À l'ouest d'Old Harry, nous avons affaire à un organisme de réglementation semblable à l'Office national de l'énergie, mais qui ne s'occupe pas de toute la question entourant l'émission de droits. Nous ne délivrons pas de permis d'exploration, alors que les offices des hydrocarbures extracôtiers peuvent le faire. Il y a donc des différences entre ce qui se fait à l'est et à l'ouest d'Old Harry.

Pour ce qui est du golfe Saint-Laurent, selon le régime actuel, c'est Ressources naturelles Canada qui s'occupe des politiques et décide de toutes ces choses, tout comme le MAINC est l'organe décisionnaire dans la mer de Beaufort.

Je ne sais pas si c'est assez limpide pour vous, madame, mais les régimes indiquent très clairement qui doit faire quoi. En ce qui nous concerne, nous n'intervenons pas dans l'émission de droits et les licences d'exploitation. Nous intervenons quand il y a une proposition de forage de puits pour déterminer si les règles de sécurité et de protection de l'environnement sont respectées. Tout est énoncé clairement. S'il y a un changement dans la loi, nous devons savoir en quoi il consiste, mais c'est au gouvernement et au Parlement de décider.

Le sénateur Frum : Monsieur Dixit, je suis curieuse de savoir ce qui s'est dit à la conférence des organismes de réglementation internationaux à laquelle vous avez assisté. À quelle fréquence ces organismes se réunissent-ils? Avez-vous remarqué une différence dans leur niveau de coopération? Il est à craindre que si une catastrophe devait frapper le Danemark ou le Brésil, nous en subirions aussi les effets, le climat en serait modifié. Pourriez-vous nous en parler un peu?

M. Dixit : Certainement. Comme vous l'avez remarqué, l'industrie est internationale et les organismes de réglementation doivent réagir rapidement. La réponse à votre question est que ces organismes de réglementation se rencontrent tous les ans. Quand il arrive quelque chose, comme cela a été le cas au puits Macondo, ils organisent des réunions extraordinaires. Il y en a d'ailleurs eu une cette année pour s'assurer de la convergence des connaissances, voir quelles leçons on avait tirées, et cetera.

Quant aux niveaux de coopération, je crois qu'ils sont de plus en plus élevés. En plus des réseaux personnels, il y a aussi toutes ces occasions structurées qui favorisent la collaboration et la coopération.

Un des changements qui est ressorti de la réunion de Vancouver, la semaine dernière, c'est qu'au lieu d'organiser ces conférences tous les deux ans, nous les tenions chaque année. En outre, nous n'allons pas y convier seulement neuf, mais tous les organismes de réglementation, ainsi que les représentants de l'industrie, pour qu'ils se rencontrent, échangent leurs points de vue et se mobilisent davantage.

M. Caron : Le travail que fait l'IRF pour l'établissement d'une norme conjointe destinée à vérifier les blocs obturateurs de puits est un exemple concret du niveau de coopération que l'on peut observer actuellement, madame. Nous pouvons parler des BOP, maintenant. Il se pourrait très bien que la communauté internationale dispose bientôt, grâce à l'IRF, d'un document commun expliquant comment faire la vérification des blocs obturateurs de puits. Ce serait fantastique si cela pouvait arriver, parce que nous pourrions nous en servir et continuer de le bonifier, avec tous les pays participants.

Le sénateur Frum : Ce serait bien. Merci.

Le sénateur Brown : À notre dernière séance, nous avons posé des questions au sujet des multiples blocs obturateurs de puits et des études métallographiques pour déterminer la sécurité intégrée du forage en eau profonde combinée au forage dans des formations profondes.

Monsieur Caron, est-ce que votre chef d'équipe, M. Dixit, aurait quelque chose à ajouter pour accroître les mesures de prévention dans la réglementation? Ma mère, qui est Écossaise, dit toujours qu'il vaut mieux une once de prévention qu'une once de guérison. Je crois que l'expression consacrée est : mieux vaut prévenir que guérir.

M. Caron : Nous voudrions que cela s'applique à la revue du dossier sur l'Arctique. Dans la demande d'information que nous avons publiée le 20 septembre, nous demandons expressément à l'industrie et à tous ceux qui participent à la revue de nous parler de la redondance, car c'est un concept bien ancré dans la réglementation.

De plus, l'idée de ne pas se limiter à une barrière, mais à deux ou plus est fondamentale. Nous sommes en train de vérifier cela auprès des participants et faisons une étude pour voir ce que cela impliquerait s'il fallait l'adapter à l'environnement unique de l'Arctique.

M. Dixit : Pour abonder dans le sens de la discussion que vous avez eue en juin, sénateur, je dirais qu'il convient d'insister sur les trois aspects suivants : la fiabilité, la redondance et la capacité des BOP.

Comme l'a indiqué M. Caron, c'est sur ces aspects particuliers que nous posons des questions aux sociétés réglementées, aux fabricants et aux milieux universitaires, afin de savoir si nous pouvons nous fier à la robustesse de l'équipement proposé pour les activités de forage. Nous sommes d'accord avec vous que la fiabilité, la redondance et la capacité sont essentielles.

Le sénateur Brown : Avez-vous répondu aux questions ou en avez-vous posé sur le volet métallographique? Il doit y avoir un moment où une tige de forage ne peut plus subir davantage de torsion.

M. Dixit : Merci encore de me donner l'occasion de préciser certains éléments. Oui, ces questions seront abordées dans le dossier sur l'Arctique. En plus du volet métallographique, nous nous occuperons de savoir ce qui peut fragiliser un BOP — comme pendant une éruption incontrôlée — quand la tige est repoussée. Même si les marteaux sont efficaces, ils ne le sont pas assez pour retenir quelque chose qui remonte. Ces questions feront l'objet d'une attention toute particulière dans notre dossier sur l'Arctique.

Le président : Sénateur Peterson, je n'avais pas l'intention de vous laisser prendre la parole aujourd'hui, vous savez, après votre prestation d'hier, mais je vois que ça va mieux. Le sénateur Peterson de la Saskatchewan.

Le sénateur Peterson : On a répondu déjà à la plupart de mes préoccupations, je ne vais donc pas m'éterniser. Au sujet de la solidité financière des participants, je remarque, dans ce projet particulier, que cette jeune société d'exploitation des ressources autorisée voudra probablement aussi faire un forage d'exploration. Peut-être qu'elle a les reins assez solides pour cela, même si je ne la connais pas.

Est-ce qu'une tierce partie se chargera de déterminer si une compagnie a les compétences suffisantes pour se lancer dans une telle aventure?

M. Caron : Absolument, sénateur. Je ne peux pas parler, comme je l'ai déjà mentionné, de ce qui se passe à Terre-Neuve-et-Labrador, mais leur système est semblable au nôtre, sauf qu'eux peuvent délivrer des permis et pas nous.

Pour répondre à votre question, sachez que nous avons l'obligation légale, sénateur, lorsque nous recevons une demande pour creuser un puits, de vérifier que la compagnie en question a les moyens de ses ambitions, et que si les choses tournent mal, elle sera capable de faire face à la musique. Nous ne pouvons envisager d'approuver un forage sans avoir obtenu préalablement cette information. En l'absence de ces données, nous rejetons la demande.

Le sénateur Peterson : Quand vous dites « nous », vous parlez de l'Office national de l'énergie et non, disons, d'une société de cautionnement qui examinerait la situation. Je pose la question parce que je sais qu'on a écarté ce genre de sociétés du processus; des sociétés qui ne voudront certainement pas offrir un cautionnement qu'elles ne pourront pas gérer.

M. Caron : Il y a un autre niveau de protection. Si une compagnie doit se tourner vers une tierce partie pour obtenir une certaine sécurité financière avant de nous présenter une demande, il y a une évaluation. Si la compagnie n'a pas les reins assez solides, la discussion est close entre la compagnie et ses prêteurs ou créanciers. En définitive, nous devons évaluer ce que nous avons jugé acceptable. Cela fait partie des nombreux facteurs permettant de déterminer si on accepte ou si on rejette une demande de forage.

Le sénateur Moore : Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer. Quand un puits de surface devient-il un puits profond? Existe-t-il un seuil de profondeur qui ne doit pas être dépassé?

M. Dixit : Il n'y a pas de définition généralement reconnue qui dit qu'au-delà de X mètres, le puits de surface se transforme en puits profond. De manière générale, on qualifie de profond un puits de 100 mètres ou plus.

M. Caron : Dans l'océan Arctique, un puits est considéré comme étant profond s'il faut plus d'une saison de forage pour atteindre la limite de haute pression de celui-ci. Ce qui soulève des complications, comme nous l'affirmions au sénateur Neufeld, car il faut tenir compte de la capacité de forage de puits de secours au cours d'une saison. La définition n'est peut-être pas rigoureuse, mais s'il faut plus d'une saison pour forer un puits, alors on peut qualifier celui-ci de profond.

Le sénateur Moore : Quand l'International Regulators Forum a-t-il été créé?

M. Dixit : La première réunion de l'IRF a eu lieu en 1993.

Le sénateur Moore : Le Canada en est-il membre depuis le début?

M. Dixit : Nous avons été invités à en faire partie dès que l'organisme a été créé. Toutefois, comme aucune activité de forage extracôtier ne se déroulait à l'époque, nous avons accepté que les offices des hydrocarbures extracôtiers de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador agissent comme représentants du Canada. Ils participent tous deux aux travaux du groupe.

Le sénateur Moore : Est-ce que les neuf autres pays mentionnés aux pages 7 et 8 de votre mémoire font partie de l'IRF depuis 1993?

M. Dixit : Le Brésil s'est joint au groupe plus tard. Je ne sais plus au juste à quel moment. Je dois vérifier mes notes. Tous les autres pays en font partie depuis longtemps. La Norvège, les États-Unis et le Canada en sont les membres fondateurs.

Le sénateur Moore : Vous avez dit au sénateur Frum que les pays se réunissent tous les ans. M. Dixit, lui, a dit qu'ils se réunissaient tous les deux ans.

M. Dixit : Les membres se rencontrent tous les ans, et la conférence sur la sécurité des activités extracôtières a lieu tous les deux ans.

Le sénateur Moore : Quand le déversement s'est produit en Australie en août 2009, est-ce que l'IRF a tout de suite convoqué une réunion pour discuter de la situation?

M. Dixit : Je ne le sais pas. Je vous fournirai la réponse plus tard.

Le sénateur Moore : Est-ce que l'un d'entre vous agit comme représentant du Canada au sein du groupe?

M. Caron : Non.

M. Dixit : Le Canada est représenté par les deux offices extracôtiers.

Le sénateur Moore : C'est toujours le cas aujourd'hui?

M. Dixit : Oui.

M. Caron : Chaque pays membre a droit à un vote. Le Canada, lui, a droit à deux votes en raison de la présence des deux offices extracôtiers. Il serait difficile de justifier qu'il en ait trois à titre de membre de l'IRF. L'ONE ne se prononce pas sur les questions de gouvernance et n'est pas membre en tant que tel de l'IRF, mais il suit de près le travail d'organisation des conférences et communique régulièrement avec les représentants des deux offices.

Le sénateur Moore : Je me demande quelles leçons ont été tirées du déversement qui s'est produit en Australie. Vous vous êtes rencontrés. En avez-vous discuté? Quel est le mandat du groupe? Les États-Unis parlent d'instaurer une norme d'excellence. Or, on a dû se pencher sur l'incident survenu en Australie et dire, « Nous devons faire quelque chose pour éviter que cela se produise dans notre pays. » L'a-t-on fait?

M. Caron : L'Australie est en train de mener une enquête qui devrait bientôt prendre fin.

Le sénateur Moore : Je parle ici d'un point de vue international. Je veux savoir si les pays se sont rencontrés, s'ils ont examiné des scénarios, s'ils ont mis en place des mesures pour éviter les désastres écologiques de ce genre. Il n'y a personne au sein de ce groupe qui peut obliger les membres à respecter les normes établies?

M. Caron : Personne. Ils ont laissé entendre, entre autres, lors de la conférence de Vancouver qu'ils souhaitent continuer de se rencontrer sous forme de tribune. Ils ne veulent pas être structurés comme une organisation.

Le sénateur Moore : Est-ce que dans le cadre de vos études, de vos travaux sur l'établissement et la réglementation de normes de sécurité, vous vous penchez également sur la question des forages déviés?

M. Caron : Oui.

Le sénateur Moore : Pour revenir à la question du sénateur Neufeld, j'ai eu l'occasion de visiter, en juillet 2007, le champ pétrolifère de BP situé sur le versant nord de l'Alaska, soit sur l'île Endicott. On y avait percé un puits vertical sur une distance de deux milles, et un puits horizontal sur une distance de huit milles, jusqu'au réservoir. Comment arrive-t-on à réglementer un puits de huit milles? Comment fait-on pour décider de l'emplacement du puits de secours? C'est très compliqué. J'essaie de voir comment vous vous y prenez.

M. Dixit : Le procédé d'interception est le même, qu'il s'agisse d'un puits vertical ou d'un puits dévié. Habituellement, les puits extracôtiers ont tendance à être forés à la verticale, parce que la technique est plus simple. Dans ces-là, il est important d'avoir une installation sur terre pour pouvoir atteindre les réservoirs situés plus loin. Il faut effectuer le même type de forage pour intercepter le pétrole. On peut aussi utiliser une plateforme pétrolière, selon les conditions environnementales, qui est en mesure de forer à la verticale et d'intercepter le pétrole. Ce sont là des options différentes.

Le sénateur Moore : Cette procédure fait elle aussi l'objet d'un examen?

M. Dixit : Oui.

Le sénateur Lang : Je crois comprendre qu'il y a toujours eu dans les eaux canadiennes — et je veux voir si vous pouvez le confirmer —, au large de la côte de l'Alaska, une plateforme pétrolière en mesure de forer, au besoin, un puits de secours. Est-ce exact?

M. Caron : C'était le cas en 2005, avec Devon. Cela faisait partie des mêmes capacités de forage de puits de secours au cours d'une saison. Nous réglementons le résultat. Si une fuite se produit, il faut la colmater.

Le sénateur Lang : Est-ce que la situation est la même du côté de l'Alaska, sur le plan de la sécurité?

M. Dixit : Il faudrait que j'évalue leurs capacités. Nous avons très peu de contacts.

M. Caron : Nous allons essayer de trouver ces renseignements et de les fournir au greffier.

Le sénateur Dickson : Je compte surtout me concentrer, aujourd'hui, sur les pages 7 et 8 de votre mémoire. Pour revenir aux questions des sénateurs Frum et Moore concernant les leçons tirées des expériences d'organismes de réglementation d'autres pays, prévoit-on délaisser le régime de réglementation axé sur les objectifs au profit d'un cadre réglementaire plus prescriptif?

M. Caron : La tendance veut que l'on adopte une réglementation basée sur la performance. Les termes sont différents, mais la terminologie correspond à celle qui était utilisée dans le cas du régime axé sur les objectifs. Les organismes de réglementation ont des exigences qui sont très prescriptives. Je vais utiliser un exemple que je connais bien, car je m'occupe depuis longtemps de l'aspect génie des pipelines. Au Canada, pour mesurer l'épaisseur de la paroi d'un tuyau, il faut utiliser une équation linéaire du premier degré qu'un étudiant de 12e année peut calculer pour vous. Il s'agit là d'une exigence très prescriptive : la paroi doit être d'une certaine épaisseur.

Parallèlement, le Canada a lui aussi adopté — tout comme les pays énumérés aux pages 7 et 8 — des systèmes de contrôle de gestion. Les organismes de réglementation exigent que l'industrie ait recours à des techniques de forage sécuritaires, qu'elle protège l'environnement, et qu'elle dispose d'un plan d'intervention en cas d'urgence. De plus en plus, les gens dénoncent le travail mal fait. Les organismes de réglementation doivent mettre l'accent sur la culture de sûreté, ne pas se contenter uniquement de belles paroles.

Y a-t-il un système de gestion en place? Est-ce que le premier dirigeant juge ce système fiable? Les procédures sont-elles documentées? Les gens savent-ils où les trouver? Est-ce qu'ils font des dénonciations lorsqu'ils se rendent compte que la sécurité est compromise? L'entreprise qui punit les personnes qui s'inquiètent pour leur sécurité ne prône pas la culture de sûreté que nous recherchons. Tous les pays se disent en faveur de l'adoption d'une telle culture. Les États-Unis d'Amérique ont opéré le virage en octobre.

Le sénateur Dickson : Pouvez-vous nous parler des faiblesses que vous avez décelées dans les systèmes de gestion des autres pays, par suite de votre participation à la conférence? Quelles sont les principales faiblesses qui ont été cernées et quelles stratégies prévoit-on mettre en œuvre pour rectifier la situation?

M. Caron : Je pense qu'il faut regarder cela sous un autre angle. J'espère avoir bien saisi la question. La plateforme qui a coulé dans le golfe du Mexique aurait fait l'objet de quatre inspections prescriptives. Aucune lacune majeure n'aurait été décelée en matière de sécurité. La plateforme a coulé parce que l'examen n'avait pas pour but de vérifier dans quelle mesure les travailleurs accomplissaient leurs tâches comme ils étaient censés le faire. Toutefois, je n'ai peut-être pas bien compris la question.

Les membres de l'IRF affirment qu'il faut continuer de faire preuve de vigilance. Il ne faut rien tenir pour acquis. Il faut faire encore plus, adopter des règlements axés sur la performance et continuer de promouvoir, par le biais des système de gestion, la culture de sûreté.

M. Dixit : Il faut aller au-delà de la conformité, ne pas se contenter de simples vérifications. Il faut développer une culture de sûreté, comme l'a mentionné M. Caron. Comment promouvoir et encourager celle-ci? En mettant sur pied un système de gestion et en prenant toutes les mesures que vient de décrire M. Caron.

Le sénateur Dickson : Je suis heureux de voir que les offices des hydrocarbures extracôtiers du Canada, de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve participent activement, tout comme le fait l'Office national de l'énergie, aux travaux de l'IRF. Toutefois, ce qui me préoccupe avant tout, ce sont les systèmes de gestion. Il doit y avoir des entreprises qui disposent de systèmes très efficaces, et d'autres qui aspirent à atteindre la norme d'excellence. Je présume que personne ne l'a encore fait.

Quel est votre avis là-dessus? Vous ne pouvez probablement pas mentionner le nom d'entreprises particulières, mais vous pouvez nous donner une idée des faiblesses qui existent.

M. Caron : Je ne peux parler au nom des autres pays. Ils possèdent leurs propres bases de données, leurs propres mécanismes d'examen des systèmes de gestion. Je vais toutefois aborder le cas de la société Devon, au Canada. Quand nous avons examiné sa demande, en 2004, et observé les travaux de forage menés dans les eaux peu profondes de la mer de Beaufort, nous avons constaté qu'elle appliquait les principes propres à une culture de sûreté.

Toutefois, nous avons relevé des imperfections lors de l'opération. Quelques travailleurs exposés à du nitrogène ont dû être évacués. L'entreprise a immédiatement trouvé la source du problème. Les employés se sont rétablis, et l'expérience a été intégrée aux méthodes de forage sécuritaires dans la mer de Beaufort, ce qui aboutit à un système efficace de gestion de la sécurité.

En ce qui nous concerne, nous travaillons surtout avec les sociétés de gazoduc. Nous réglementons quelques centaines d'entreprises, et peut-être une douzaine de grandes sociétés. Des zones grises existent sur le plan de la culture de sûreté. Lorsque nous trouvons des lacunes — l'exemple classique étant le travailleur qui ne porte pas de casque protecteur ou de chaussures à embouts d'acier —, nous constatons toujours que la société est prête à souscrire à une promesse de conformité volontaire, ou PCV.

Les sociétés émettent plusieurs centaines de PCV tous les ans. Nous menons des centaines d'inspections et des douzaines de vérifications. Lorsque nous décelons des imperfections, elles n'essaient pas de les cacher. Elles disent, oui, vous avez peut-être raison. Nous allons améliorer notre système de gestion de sorte que la prochaine fois que nous ferons l'objet d'une vérification, ce problème aura été réglé.

C'est là un point très important, car si l'objectif de la réglementation est de rendre quelqu'un responsable des lacunes qui existent, nous risquons de voir apparaître une culture qui tend à cacher des faits. Ce qui veut dire moins de sécurité pour les Canadiens.

Le sénateur Dickson : Ma dernière question porte sur la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et les puits exploratoires. Les évaluations globales ne sont-elles plus nécessaires?

M. Caron : Dans le cas des forages extracôtiers et des forages en général, nous procédons toujours à une évaluation environnementale.

M. Dixit : La liste d'études approfondies a été modifiée en 2005, je crois, en vue d'éliminer l'aspect que vous venez de mentionner. Cette décision a été prise par le Parlement.

Mis à part ce qui se fait sur le plan de la réglementation et de la législation, l'Office est tenu de procéder à des évaluations environnementales sérieuses afin de s'assurer que tous les facteurs pouvant causer des dommages sont cernés. Elle analyse ensuite les mesures qui sont prises pour s'attaquer aux problèmes — dans l'intérêt, notamment, de l'environnement, de la sécurité, du public. Ce sont là des aspects importants que nous examinons avant de formuler des recommandations et de prendre des décisions.

Le sénateur Dickson : La seule chose que vous êtes tenu de faire, légalement, c'est un examen préalable, n'est-ce pas?

M. Dixit : Il faut, légalement, procéder à un examen préalable qui est quand même très approfondi. Dans le cas du projet concernant la mer de Beaufort, il faudrait consulter les organismes qui ont été mis sur pied dans le cadre de la Convention définitive des Inuvialuit.

Le sénateur Massicotte : À la page 5 de votre mémoire, vous dites que les réserves récupérées pourraient atteindre entre 1,52 milliards de barils de pétrole, ce qui représente environ 4 p. 100 de la production annuelle actuelle de brut ou de gaz naturel du Canada. Est-ce que le Canada produit environ 4,5 milliards de barils de pétrole par jour?

M. Caron : Oui.

Le sénateur Massicotte : Multiplié par 365 jours. Je ne sais toujours pas ce que cela veut dire. Je ne suis pas un expert en la matière. Cela fait combien? Je pensais que cela représentait, en gros, la production annuelle de pétrole du Canada. Or, vous dites que cela équivaut à 4 p. 100 de celle-ci. Je ne comprends pas. Je me suis peut-être trompé dans mes calculs.

M. Caron : J'en doute, sénateur, mais cela équivaut à 4 p. 100 de la production annuelle de pétrole brut.

Le sénateur Massicotte : Vous émettez des hypothèses assez importantes pour ce qui est de la production future des sables bitumineux, entre autres. J'essaie de me faire une idée de la situation. Ai-je raison de dire que cela équivaut peut-être à la production annuelle actuelle au Canada?

M. Caron : Les 2 milliards de barils de pétrole représentent, si je ne m'abuse, un peu moins de la production annuelle. Je pense que nous produisons beaucoup plus que cela sur une base annuelle. Si vous êtes d'accord, sénateur, nous allons envoyer à la greffière un tableau qui contient des chiffres précis.

Le sénateur Massicotte : Est-ce que nous produisons 4,2 milliards de barils de pétrole par jour?

M. Caron : Absolument.

Le sénateur Massicotte : Multiplié par 365, sauf si l'on tient compte des années bissextiles.

M. Dixit : J'ajouterai qu'il n'y a encore eu aucun forage dans la zone d'intérêt Old Harry. Les chiffres que vous voyez sont spéculatifs. Ils sont fournis par la société pétrolière. Ils demeureront spéculatifs jusqu'à ce que le puits soit foré et délimité.

Le sénateur Massicotte : Est-il question ici de réserves récupérables? Je crois comprendre que seulement 30 p. 100 du pétrole est récupérable aujourd'hui.

M. Caron : C'est pour cette raison que M. Dixit se montre prudent. Je compte suivre son exemple. Nous avons trouvé ce chiffre sur le site web d'une société pétrolière. Les gens qui fournissent des chiffres de ce genre à l'ONE s'appuient sur les méthodologies que nous utilisons. Si nous demandons à notre personnel de nous dire à combien pourrait s'élever les réserves de la zone d'intérêt Old Harry, il va nous répondre qu'il ne le sait pas.

Vous voulez savoir s'il a une réponse. Elle en a trouvé une et c'est le chiffre qui a été fourni. Nous ne le confirmons pas, parce que les réserves pourraient être plus élevées ou moindres. Il nous faut plus d'informations.

Le sénateur Massicotte : Vous êtes nettement plus spécialisé dans ce domaine que je ne le suis. Si nous récupérons 30 p. 100 des réserves aujourd'hui, ce qui correspond à la norme, pouvons-nous raisonnablement nous attendre à en récupérer 80 p. 100 dans 50 ans avec la technologie adéquate? Les réserves récupérables dans les puits horizontaux sont beaucoup plus élevées. Nous allons peut-être trouver des réserves 300 fois plus importantes.

M. Caron : La technologie évolue constamment, en tout cas dans le domaine du forage à terre, mais pas extracôtier. Il est question d'injecter du CO2 pour réaliser des gains environnementaux. La technologie change tous les jours.

Le chiffre de 30 p. 100 que vous mentionnez est probablement dépassé, puisque les gens souhaitent faire mieux, récupérer les réserves de manière plus économique. Une fois le puits foré, les travaux sont terminés. Vous avez accès à la ressource. Il faut procéder à des calculs économiques et scientifiques pour voir s'il est possible d'en récupérer davantage.

Je prends note de ce que vous dites. Nous allons envoyer à Mme Gordon un tableau qui contient les chiffres de production annuelle que nous avons compilés.

Le sénateur Massicotte : Les nombres multipliés par 365 nous seraient utiles.

M. Caron : Nous vous remettrons un tableau plus clair, car les calculs ne sont pas si simples. Je ne veux pas me mettre à jouer à la devinette maintenant.

Le président : Monsieur Caron, vous avez indiqué que le champ de pétrole Old Harry était à cheval sur la frontière entre le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador. Le pétrole qui se trouve du côté du Québec, c'est-à-dire la délivrance de permis d'exploitation, la surveillance et la réglementation, relève de l'Office national de l'énergie du Canada, étant donné qu'il n'y a aucun accord entre l'État fédéral et la province de Québec pour établir un office semblable aux offices de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse. Est-ce bien exact?

M. Caron : C'est ce que j'en sais pour l'avoir lu dans les médias. Nous ne participons pas aux discussions concernant les politiques. Nous avons publié depuis longtemps la carte qui montre quels endroits relèvent de nous, en tant qu'organisme de réglementation fédéral, c'est-à-dire aux endroits qui ne sont pas visés par un accord. Les zones qui sont de notre compétence comprennent la côte ouest, le Nord moins le Yukon, en raison du transfert de responsabilités, ainsi que le golfe du Saint-Laurent moins la partie visée par les accords. Elles comprennent aussi la moitié de la baie de Fundy qui ne relève pas de l'office de la Nouvelle-Écosse. En vertu de la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, la partie nord de la baie de Fundy, qui est adjacente au Nouveau-Brunswick, relève de l'Office national de l'énergie.

Le président : Mais si le Québec voulait exploiter la partie du champ de pétrole Old Harry qui est sur son territoire — et je ne dis pas qu'il veut le faire —, il lui faudrait obtenir l'autorisation de votre office. Est-ce bien exact? Le Québec pourrait-il simplement entreprendre l'exploitation sans votre autorisation?

M. Caron : Monsieur le sénateur, lorsque les personnes venant de se joindre à l'Office suivent le cours que l'on pourrait appeler « tribunaux quasi judiciaires 101 », elles commencent par apprendre où s'arrête notre compétence. En tant qu'organisme de réglementation technique, nous ne pouvons pas nous prononcer sur les questions de partage des compétences. Nous n'intervenons pas. Si des gens nous présentent une demande, nous l'étudions selon notre compétence.

Si notre compétence est contestée par quelqu'un, nous lui donnons l'occasion de faire valoir son point de vue. Comme je l'ai déjà dit, en ce qui concerne le dossier de l'Arctique, nous ne pouvons pas nous prononcer tant que nous n'avons pas vu la demande.

Nous disons aux Canadiens que nous sommes l'organisme fédéral de réglementation responsable de l'exploitation du champ de pétrole dans le golfe du Saint-Laurent, à l'ouest de la zone relevant de l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers, jusqu'à la pointe ouest de l'île d'Anticosti.

Si les gens ne sont pas d'accord, nous entendons leur point de vue à titre de tribunal quasi judiciaire et nous déterminons si l'affaire relève de notre compétence ou non.

Le président : Comme à votre habitude, vous faites preuve de beaucoup de retenue, et je vous en félicite. Néanmoins, on conjecture beaucoup dans les journaux, et le premier ministre du Canada a fait des déclarations. Nous sommes portés à croire que le Canada et le Québec sont en train de négocier un nouvel accord, qui serait semblable à ceux de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador. Je sais qu'à l'époque, l'Office national de l'énergie a pris part aux négociations.

En savez-vous davantage que ce que nous pouvons en apprendre en lisant les journaux?

M. Caron : Absolument pas. En fait, la loi sur l'office des hydrocarbures extracôtiers a été adoptée avant 1991. Nous sommes devenus l'organisme de réglementation pour ces hydrocarbures en 1991. À l'époque, le dossier relevait de l'Administration du pétrole et du gaz des terres du Canada, un organisme qui s'occupait non seulement de la réglementation, mais aussi d'accorder les droits d'exploitation, et ainsi de suite.

Nous n'en savons pas davantage que vous sur le dossier parce que nous sommes indépendants du gouvernement. Nous ne participons pas à l'élaboration des politiques. Nous ne voulons pas non plus que les élus se mêlent de nos décisions d'organisme de réglementation indépendant.

Le sénateur Moore : Je voudrais que nous parlions de nouveau du sujet ayant fait l'objet de la question du sénateur Dickson. Vous avez indiqué que la plateforme du golfe du Mexique avait été examinée et approuvée par quatre inspecteurs indépendants. Pourtant, la plateforme n'a pas seulement coulé. Elle a été détruite par une explosion et un incendie. En fin de compte, elle a coulé, mais ce n'est pas tout simplement un naufrage causé par un trou dans la coque.

Le fait de savoir que quatre groupes différents ont inspecté la plateforme ne m'avance pas à grand-chose. Ils l'ont inspectée, mais n'ont pas cherché les défauts qui pouvaient causer une explosion. Ont-ils évalué ce danger?

M. Caron : C'est bien ce que nous essayons de dire. Avec les attitudes qui découlent des systèmes de gestion, quand on fait une vérification, elle porte sur les dangers existants. On vérifie si l'entreprise est prête à faire face à ces dangers.

L'accident de la plateforme Piper Alpha, qui s'est produit dans la mer du Nord au cours des années 1980, est la catastrophe majeure qui a permis pour la première fois de réaliser des gains importants en termes de philosophie de préparation. C'est à ce moment qu'est née l'expression « dossier de sûreté ». Nous ne l'utilisons pas, au Canada, mais c'est tout comme. Le dossier de sûreté consiste à demander au principal intéressé de cerner les dangers et de démontrer à l'organisme de réglementation qu'il les comprend et que, si un danger se concrétise, il prendra les mesures nécessaires.

Je suis en train de dire que les vérifications n'étaient peut-être pas aussi rigoureuses qu'elles auraient dû l'être. C'est une supposition, et je déteste faire des suppositions. Nous préférons attendre le rapport qui sera produit en janvier pour connaître les conclusions de la commission étasunienne.

Le président : Sénateur Moore, je peux vous donner l'adresse à Washington. Je pense qu'ils ont besoin de conseils pour l'enquête. Seul vous pouvez y aller. Nous ne voulons pas envoyer le sénateur Dickson. Nous voulons qu'il reste ici.

Le sénateur Seidman : Je voudrais obtenir une précision concernant le champ de pétrole Old Harry. Vous avez dit que vous ne cherchiez pas à affirmer qu'un dossier relève de votre compétence. Je crois que c'est ce que vous avez dit. Ou encore, que vous ne vouliez pas vous prononcer dans les cas ou aucune demande ne vous est soumise. Vous ne voulez pas vous avancer et dire qu'une question relève de vous avant que la question ne vous soit posée.

M. Caron : Vous voulez que je précise cela? J'attends votre question.

Le sénateur Seidman : Je voudrais que vous me précisiez ceci. Êtes-vous en train de dire que, si, pour une raison ou une autre, aucune demande ne vous est adressée concernant le champ de pétrole Old Harry, vous ne prendrez pas part aux décisions qui seront prises dans ce dossier? Vous ne chercherez pas à intervenir. C'est ce que j'ai compris, me semble-t-il.

M. Caron : Dans ce cas, madame le sénateur, ma réponse n'a pas été aussi claire que je l'aurais voulu. Je dis que personne, à l'Office, n'est chargé d'étudier les demandes présentées à d'autres organismes de réglementation pour déterminer si elles n'auraient pas dû plutôt nous être présentées. Personne n'a comme fonction, au sein de notre personnel, de vérifier qui demande quoi, ailleurs. Je ne peux pas présumer de ce que nous ferions si des demandes étaient faites à d'autres autorités.

Nous avons l'obligation d'exercer notre compétence telle qu'elle a été définie par le Parlement.

Le président : En tant que Québécois, le sénateur Seidman et moi nous interrogeons là-dessus. Il est beaucoup question de ce dossier actuellement dans les journaux parce qu'on dit que des forages vont commencer dans le golfe du Saint-Laurent. Nous croyons — et vous ne nous avez donné aucun motif de croire le contraire — que, si quelqu'un veut faire de l'exploration, des forages et de l'exploitation dans le golfe du Saint-Laurent, à l'ouest de la zone relevant de l'office de Terre-Neuve, il doit faire une demande à l'office que vous dirigez. Nous pensons que c'est incontournable.

M. Caron : C'est ce que je pense également, monsieur le président.

Le président : Nous ne présumons pas. Nous sommes d'avis que c'est bel et bien dans votre champ de compétence.

M. Caron : Je suis d'accord.

Le président : C'est ce que vous vouliez savoir n'est-ce pas?

Le sénateur Seidman : Tout à fait.

Le sénateur Lang : Permettez-moi de vous parler maintenant de l'évolution technologique constante. Depuis le désastre de BP et depuis que le forum international de réglementation se réunit, j'aimerais savoir si les sommes d'argent consacrées à la recherche dans ce domaine ont augmenté, en particulier aux États-Unis, mais également au Canada. L'information technologique issue des travaux de recherche est-elle mise à la disposition de l'industrie? Quelles sont vos attentes à cet égard? L'Office national de l'énergie compte-t-il demander davantage d'argent et acquérir davantage d'expertise dans ce domaine pour que nous puissions réduire les facteurs de risque et nous approcher autant que possible du risque zéro?

M. Caron : Nous aurons accès à ces connaissances parce que nous l'avons demandé. De plus, nous tenons l'industrie responsable de les développer.

C'est dans notre appel public du 30 septembre destiné à élargir notre champ de connaissances. Je ne veux pas gaspiller le temps qui vous est accordé pour vos questions; je vais vous trouver la réponse précise. Nous demandons à tout participant à la revue de nous indiquer où se situent les lacunes dans les connaissances et dans les données scientifiques et comment il compte y remédier.

Il n'incombe pas à l'Office national de l'énergie lui-même d'accorder des subventions et de stimuler la recherche. Nous n'œuvrons pas dans le domaine des politiques. Nous sommes un organisme chargé d'appliquer la réglementation de sécurité. Cependant, nous avons le droit de demander et, puisque nous avons le mandat de réglementer les activités de ceux qui voudront, à l'avenir, forer des puits, nous leur demandons de nous dire quel est l'état des connaissances scientifiques, où se situent les lacunes et comment on compte y remédier. Cela fait partie de ce dont nous tenons compte lorsque nous décidons d'approuver ou de refuser une demande de forage.

Le sénateur Lang : Je comprends. Mais je veux savoir si, dans le forum international de réglementation, du point de vue des entreprises, des organismes de réglementation et des États — et peut-être que M. Dixit pourrait me répondre —, les contributions financières des entreprises augmentent pour que nous puissions accorder de l'attention à la question de la technologie. L'information est-elle généralement disponible pour l'industrie et, bien sûr, pour vous?

M. Dixit : Je peux aborder la question sous deux angles légèrement différents, ce qui me permettra, je l'espère, d'y répondre à votre satisfaction.

Premièrement, M. Bromwich, qui est directeur du Bureau of Ocean Energy Management, Regulation and Enforcement, aux États-Unis, a indiqué qu'il allait demander un financement d'environ 200 millions de dollars notamment pour engager plus de personnel et étoffer les connaissances. Cela fait partie de la contribution du gouvernement des États-Unis.

Il a également indiqué que, puisqu'ils avaient haussé les attentes, les entreprises allaient devoir en faire davantage. Un consortium de sociétés, qui comprend BP, investira environ 1 milliard de dollars dans les moyens de confinement. C'est un exemple d'investissement de la part des entreprises.

Au Canada, nous disposons de certains véhicules pour faire avancer la recherche dans ce domaine. L'un d'entre eux est le Programme de recherche et de développement énergétiques, du ministère des Ressources naturelles du Canada. Nous avons également le Fonds pour l'étude de l'environnement, qui est axé, lui aussi, sur le financement de l'industrie et l'obtention de résultats faisant en sorte qu'entreprises et organismes de réglementation puissent être bien renseignés sur les problèmes et les solutions avant que des décisions soient prises sur le plan de la réglementation.

Le sénateur Lang : Parlons maintenant de ce qui se passe plus près de chez nous, à proximité des côtes de l'Alaska. Pourriez-vous nous dire si d'autres projets sont en cours de réalisation dans le golfe de l'Alaska et la mer de Beaufort? Une demande de forage en eau profonde vous a été faite, si je ne m'abuse. Pourriez-vous nous mettre au parfum des derniers développements dans ce dossier?

M. Dixit : J'étais au courant de l'état du dossier, tel qu'il était en avril 2010. Je peux tâcher d'obtenir de l'information plus récente et la transmettre à votre greffière. Deux entreprises, ConocoPhillips et Shell, avaient prévu faire des forages dans la mer de Beaufort et la mer des Tchouktches.

M. Caron : Elles ont réduit leurs projets un peu depuis avril. Je pense que Shell, au moins, cherche encore à obtenir une autorisation. Je sais qu'elle a passablement réduit l'ampleur de son projet depuis la situation vécue dans le golfe du Mexique. M. Dixit veillera à ce que la greffière reçoive l'information la plus à jour que nous puissions obtenir de nos sources.

M. Dixit : Dans la perspective d'un accroissement des échanges de connaissances sur l'environnement physique, le forage de puits, et ainsi de suite, le Canada sera l'hôte, à la fin du mois, d'une conférence lors de laquelle des chercheurs des États-Unis et du Canada discuteront des résultats de leurs travaux de recherche sur le pétrole et le gaz. Des représentants des organismes de réglementation seront présents également.

Le sénateur Neufeld : Je voudrais revenir à la question des puits de secours. J'avais peut-être mal compris, car je croyais qu'il était obligatoire de forer un puits de secours. On m'a expliqué qu'on forait un tel puits après un incident, parce qu'il faut déterminer où la pression est élevée. C'était ma question. Comment déterminer, avant un incident, à quel endroit il faut que le puits de secours rencontre le puits principal? C'est ce que je veux comprendre. Il est évident qu'on a besoin d'un puits de secours une fois que l'incident s'est déclaré. J'espère bien qu'on en forera un. On ne devrait pas avoir besoin de le préciser dans les exigences. C'est plutôt une évidence.

Je suis peut-être le seul à ne pas comprendre, mais je ne saisis ni ce qui a été dit, ni les réponses. Je ne veux pas une longue réponse à propos du puits dans le golfe du Mexique. C'était presque à la profondeur finale, qui est déterminée par l'entreprise avec les données qu'elle recueille au moyen de relevés sismiques et de puits d'exploration. Je comprends tout cela.

Je voudrais que vous m'expliquiez ce que vous entendez lorsque vous dites que l'Office national de l'énergie exige des puits de secours.

M. Caron : Comme nous l'avons indiqué dans notre appel public pour élargir notre champ de connaissances, notre politique exige de l'exploitant qu'il nous fasse une démonstration lors de sa demande, longtemps avant que ne se produise un incident. Il doit démontrer, dans son plan d'urgence, sa capacité à forer un puits de secours pour mettre fin à une fuite dans un puits, au cours de la même saison. Au moment où le forage du puits de secours doit avoir lieu, on sait déjà à quelle profondeur il faut forer. On sait s'il faut un forage dévié ou non. On connaît le risque. On connaît la pression. L'exploitant doit nous convaincre qu'il a un plan qui se tient. Si jamais une fuite se déclare dans le puits, l'exploitant est prêt à forer un second puits, pour réduire la pression et faire cesser la fuite.

Le sénateur Neufeld : Il peut se produire un incident bien avant d'atteindre la profondeur finale. C'est un fait. Lorsque vous dites qu'il est obligatoire de disposer d'un puits de secours, vous ne proposez rien de différent, par rapport à ce qui a été fait dans le golfe du Mexique. Ils ont eu besoin de forer un puits de secours, et ils ont entrepris ce forage après l'incident. C'est exactement la solution dont vous nous parlez actuellement.

M. Caron : C'est exact.

Le sénateur Neufeld : Par conséquent, dans cette optique, nous n'avons pas à exiger qu'un puits de secours soit foré presque en même temps que le puits principal.

C'est après l'incident qu'il faut forer le puits de secours, et c'est ce qui m'apparaît problématique. J'imagine parfaitement qu'on puisse avoir, dans des conditions normales, les moyens de forer un puits de secours. Toutefois, il y a une période pendant laquelle il n'est possible ni de faire venir un navire de forage, ni de transporter l'équipement par camion, la glace étant trop mince.

Au début, j'étais content parce que je me disais que l'exploitant était obligé de forer un puits de secours. Pour moi, cela voulait dire que le puits de secours allait rencontrer le puits principal près de la surface, parce que c'est à cet endroit que la fuite se produira. Elle ne peut pas se produire ailleurs. Ce que vous m'avez expliqué sur les puits de secours ne me rassure aucunement.

M. Caron : Je n'essayais pas de vous rassurer. Néanmoins, tout en demandant à l'exploitant de nous fournir l'assurance qu'il dispose de la capacité nécessaire, nous cherchons à recueillir de l'information sur l'étendue de la fuite éventuelle de pétrole dans l'environnement. C'est la question 1.5.1 : le demandeur doit estimer pour nous quelle quantité de pétrole se répandrait, combien de temps il faudrait pour mettre fin à la fuite, quelle quantité de pétrole demeurerait dans l'environnement, quelles seraient les répercussions de ce pétrole sur le milieu et sur les populations humaines et dans quelle mesure il serait possible de récupérer le pétrole.

Le sénateur Neufeld : Il y a une énorme différence entre, d'une part, le golfe du Mexique, la côte est, la côte ouest, le Brésil et la mer du Nord et, d'autre part, la mer de Beaufort, où il y a d'autres saisons que celle où la glace est épaisse et celle où elle est absente.

M. Caron : Vous avez tout à fait raison.

Le sénateur Neufeld : Pendant certaines périodes, il n'est pas possible d'apporter de l'équipement de forage sur place.

M. Caron : Nous le savons. C'est pourquoi, dans les questions que nous avons posées le 30 septembre, vous trouverez l'expression « dans l'environnement unique de l'Arctique » environ 15 fois. Nous posons bel et bien ces questions.

Le président : Cela termine notre audience spéciale et, d'une certaine manière, supplémentaire, dans le cadre de notre étude sur l'exploitation des hydrocarbures extracôtiers.

Nous vous remercions, messieurs Caron et Dixit, d'être venus témoigner aujourd'hui et de nous avoir fourni également de l'information additionnelle. Je sais que vous aurez encore quelques éléments d'information à me remettre, de manière à faire complètement le tour de la question. Nous recommuniquerons peut-être avec vous, car nous pourrions avoir besoin d'autres précisions. Entre-temps, merci beaucoup.

(La séance est levée.)


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