Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 2 - Témoignages du 23 mars 2010 - Séance de l'après-midi
OTTAWA, le mardi 23 mars 2010
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 16 h 2 pour étudier le Budget des dépenses déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 2011.
Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : La séance est ouverte. Cet après-midi, nous allons continuer notre étude du Budget principal des dépenses pour l'année financière de 2010-2011 dont notre comité a été saisi.
[Traduction]
Ce matin, nous avons commencé l'examen du Budget principal des dépenses pour l'année financière 2010-2011 et nous avons reçu des fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor. Cet après-midi, nous sommes heureux d'accueillir l'honorable Stockwell Day, président du Conseil du Trésor.
M. Day occupe ce poste depuis le 19 janvier, et c'est la première occasion que nous avons de le rencontrer. Tout d'abord, monsieur le ministre, permettez-moi de vous féliciter de cette nomination. Nous rencontrons régulièrement les représentants du Secrétariat du Conseil du Trésor. Vous avez là une excellente équipe pour vous appuyer.
Chers collègues, le président du Conseil du Trésor a une heure à nous consacrer cet après-midi. Je vous demande donc de vous en tenir à des questions et commentaires concis, afin que nous ayons tous l'occasion de participer au débat.
Monsieur le ministre, avez-vous une déclaration préliminaire à nous présenter?
L'honorable Stockwell Day, P.C., député, président du Secrétariat du Conseil du Trésor : Merci, monsieur le président. Je vous remercie également de vos aimables remarques. J'apprends sans cesse — c'est une période extrêmement intéressante et pleine de défis.
[Français]
Je suis d'accord avec vos commentaires au sujet des fonctionnaires, mes collègues, qui travaillent pour le Conseil du Trésor. Ils sont très efficaces et je sais qu'ils ont une très bonne connaissance des finances de notre pays.
[Traduction]
J'ai pu constater qu'il s'agissait d'un poste exigeant, et qui le demeurera. Toutefois, comme vous-même et vos collègues le savez bien — il est bon de s'intéresser aux finances de la nation. Il est bon de savoir à peu près où en sont les affaires de l'État.
Pour commencer, je veux dire que, comme nous l'avions prédit, le budget d'aujourd'hui esquisse un plan qui se précisera et qui, je crois, aboutira finalement à un budget équilibré en 2014-2015 — la tâche ne sera pas facile à certains égards, mais à mon avis nous pouvons parfaitement y arriver. Nous avons défini trois grands secteurs qui sont tous, je le répète, tout à fait réalistes.
Comme vous le savez, pour passer d'un déficit à une situation qui nous permettrait de ne pas devoir continuer à emprunter annuellement pour satisfaire à nos besoins, nous parlons d'environ 53 milliards de dollars. Si j'arrondis, de temps à autre, un milliard ici ou là, ne croyez pas que c'est parce qu'un milliard me semble être une somme négligeable. Il s'agit d'un énorme montant d'argent. Toutefois — et j'arrondis, certaines personnes diront que 53 milliards, c'est une énorme somme. Et comment parviendrons-nous à réduire ce déficit?
Un élément à lui seul — je parle de l'ensemble de mesures de stimulation de l'économie qui se poursuivent avec un budget de 19 milliards de dollars — disparaît immédiatement à la fin de cette année. Nous avons un déficit de 50 milliards de dollars, et 40 p. 100 de ce montant s'évanouissent à la fin de l'année, simplement grâce à l'élimination de ces 19 milliards de dollars au titre des mesures de stimulation.
Ensuite, nous allons chercher à limiter les dépenses du gouvernement. L'année 2010-2011 fixera le niveau des dépenses ministérielles, et ce niveau sera maintenu pendant trois ans. Cette simple mesure nous permet d'éviter l'augmentation qui avait été projetée avant cette année. Cela représente environ 37 p. 100 du programme en termes d'élimination de ce déficit.
Pour les derniers 23 p. 100 à peu près, si je peux faire des approximations, nous prévoyons une combinaison d'examens des dépenses, que nous menons déjà et continuerons de mener, et aussi ce que nous considérons en quelque sorte comme une augmentation des recettes au cours de cette période.
Je terminerai mes commentaires en disant que certaines personnes se sont demandé si nous pouvions vraiment croire qu'il sera possible d'augmenter les recettes et si cela doit se traduire par un relèvement des impôts. Évidemment, cela ne veut pas dire que nous avons l'intention de hausser les impôts, mais quand les gens travaillent et paient des impôts, lorsqu'un plus grand nombre d'entreprises sont productives et rentables, le gouvernement voit ses recettes augmenter.
Comment pouvons-nous envisager avec confiance cette augmentation de recettes? Monsieur le président, vous et les membres du comité avez sans doute jeté un œil sur les évaluations de diverses économies modernes dans le monde. Que ce soit le Fonds monétaire international, le Forum économique mondial, l'OCDE ou l'Economist Intelligence Unit, tous citent le plan financier du Canada, qui limite dans une certaine mesure notre risque souverain en raison du traitement que nous réservons aux impôts et à la dette. Déjà, nous relevons des indicateurs qui attirent l'attention, ici et sur la scène internationale. Le dirigeant du principal portefeuille d'obligations au monde — un fonds d'un trillion de dollars, aux États-Unis — a récemment déclaré qu'il orientait de plus en plus ses investisseurs institutionnels vers le Canada. C'est un point de vue que nous avons entendu. Puis, à l'autre extrémité du spectre, si je peux me permettre cette analogie, le gouvernement russe a mentionné la semaine dernière qu'il voulait consolider ses réserves de devises en achetant des dollars canadiens.
Tout cela indique que les spécialistes de ce genre d'évaluation — les personnes qui s'efforcent de dégager les tendances et les points forts des économies — continuent de s'intéresser au Canada en raison de nos politiques financières. Je veux simplement vous communiquer ces réflexions et j'attends avec impatience non seulement vos marques d'intérêt, mais aussi les suggestions, les critiques et les conseils utiles que vous formulerez pour nous aider à mener à bien ce processus.
Le sénateur Gerstein : Merci d'être venu nous rencontrer aujourd'hui et nous présenter un tel résumé pour lancer la discussion.
Le budget 2010 expose un certain nombre de processus destinés à réduire les coûts du gouvernement et à accroître son efficience. Si je me souviens bien, il y a d'abord eu des examens stratégiques et, d'après ce que je vois dans le budget, les ministères ont reçu pour instructions — afin d'optimiser les économies — de ne pas chercher à réinvestir les fonds ailleurs, mais plutôt de les mettre de côté. Deuxièmement, le gouvernement a annoncé un examen détaillé de l'administration gouvernementale et de ses coûts indirects. Troisièmement, il y a ce que l'on appelle l'examen de la gestion des actifs du gouvernement, et si j'ai bien compris cette activité relève du ministre des Finances. Ces examens doivent nous permettre de vérifier l'efficacité des dépenses gouvernementales, et je vous félicite de ces initiatives.
Cela dit, il serait malheureux que ces trois examens, combinés, deviennent eux-mêmes un obstacle. De quelle façon est-ce que vous abordez ces examens pour qu'ils puissent se compléter les uns les autres, plutôt que de créer un problème?
M. Day : Voilà une question intéressante, sénateur Gerstein. Disons d'abord que le gouvernement a participé aux examens stratégiques de divers ministères. Chaque année, nous retenons à peu près un tiers des ministères — et de fait cela comprend aussi les conseils et les agences — et il leur demande de passer en revue leur profil de dépenses et de déterminer, pour eux comme pour nous, 5 p. 100 de leurs éléments les moins prioritaires. En principe, il s'agit d'éléments qui sont sans effet sur les services à la population et les services essentiels. Nous avons examiné ces 5 p. 100 et nous les avons appliqués à notre profil de dépenses global. Il y a deux ans, cet exercice a permis de dégager environ 287 millions de dollars. Cette année, avec ce qui s'est passé depuis et au cours de la dernière année, nous obtenons environ 1,3 milliard de dollars. À mesure que l'année progresse, nous croyons que nous atteindrons un montant encore plus élevé.
Nous n'avons pas encore divulgué de noms, mais nous vous communiquerons les noms de ces ministères et organismes qui doivent maintenant se soumettre à ce processus particulier. Le processus fait intervenir une analyse pointue, effectuée par les administrateurs et les fonctionnaires, en termes de programmes et de services offerts. Jusqu'à maintenant, cet exercice nous paraît productif et, parallèlement, il a permis de réaliser de véritables économies. Ce processus va se poursuivre, et nous allons vous faire parvenir les noms des ministères et organismes visés. Je suis convaincu que cela vous intéressera et, à mesure que l'année avance, vous aurez peut-être des commentaires qui pourront nous aider.
Quant à la gestion des actifs du gouvernement, nous croyons qu'il serait opportun de vérifier l'efficience et la nécessité de certains actifs. Je m'empresse de préciser que dans toute organisation, qu'elle soit publique ou privée, il y a des moments où il est opportun de vérifier les actifs et de se demander s'ils sont toujours nécessaires, s'ils peuvent être éliminés d'une façon quelconque ou si l'on en a encore besoin. Il y a certaines limites à ce que l'on peut vendre en termes d'actifs, et cela vaut aussi pour les biens personnels ou ceux d'une entreprise donnée, mais il est du devoir des gouvernements et de toute organisation de gestion de se demander si un actif particulier devrait pendre une autre forme. Cela sera également fait.
Nous voulons aussi instaurer un examen administratif continu des opérations gouvernementales. Ce serait un processus constant de vérification de l'efficience. Des électeurs, des gens d'affaires et des membres des milieux sans but lucratif soulèvent fréquemment la question. Parfois, c'est une clameur, parfois les choses se calment, quand nous devenons plus efficaces. Les gens nous font constamment remarquer des cas de redondance, de chevauchement et de double emploi. Dans certains secteurs, le chevauchement peut être une bonne chose, une chose nécessaire; mais dans une grande organisation comme la nôtre, il arrive qu'il y ait chevauchement et redondance et il est alors possible de réaliser des économies en améliorant notre efficience. Cette année, nous avions 414 000 fonctionnaires à l'effectif, y compris les militaires et les membres de la GRC. Tous font du bon travail dans leurs ministères respectifs.
Votre remarque, sénateur, est fort pertinente. En cherchant à mieux faire les choses, nous pourrions nous marcher un peu sur les pieds à l'occasion. Il incombe au Conseil du Trésor d'assurer la coordination. Les divers ministères ou le ministère des Finances s'efforceront de réaliser certaines économies, mais il faut espérer que nous, en bons contrôleurs aériens si l'on me passe cette comparaison, parviendrons à réduire le double emploi au minimum et à maintenir une efficacité maximale.
Les citoyens comprennent que les impôts sont nécessaires. Les gens comprennent que la réglementation est nécessaire. Toutefois, les niveaux d'imposition sont trop élevés et une réglementation excessive risque d'étouffer et de décourager. Nous voulons signaler à tous ces citoyens qui travaillent d'arrache-pied que nous examinons avec soin la façon dont nous dépensons leur argent. Nous voulons faire en sorte que cet argent soit utilisé pour le mieux.
Le sénateur Callbeck : Soyez le bienvenu, monsieur le ministre. Vous avez parlé de l'examen stratégique des ministères et des organismes. Je crois que cela a commencé en 2007. Vous avez dit que vous passiez en revue environ un tiers des ministères et organismes chaque année. À ce rythme, nous devrions déjà en avoir terminé.
Quels ministères et organismes ont été assujettis à cet examen, et quelles économies ont été repérées? Dans le cadre des travaux de notre comité, il arrive que certaines sommes soient mentionnées dans un budget et l'on nous dit que cela découle des économies définies grâce à cet examen. Les témoins ne sont toutefois jamais en mesure de nous dire exactement d'où viennent ces économies ou quels programmes ont été touchés.
Je sais que vous ne pouvez pas nous expliquer tout cela aujourd'hui, mais est-ce que vous pouvez nous donner une liste des divers ministères qui ont fait l'objet de cet examen des programmes et où des économies ont été trouvées?
M. Day : Monsieur le président, je suis en mesure de le faire, mais je n'ai pas cette liste détaillée sous les yeux ni, de fait, à l'esprit. Je peux certainement vous transmettre cette information pour que vous ayez une bonne idée des endroits où des économies ont été trouvées. Cela vous sera utile, et je m'engage à vous faire parvenir cette liste le plus tôt possible.
Le président : Je vous demande de la transmettre au greffier, qui la fera circuler dans les deux langues officielles auprès de tous nos membres.
Le sénateur Callbeck : Merci beaucoup.
À la page 5 du budget principal, nous voyons les montants des paiements de transfert. Dans le communiqué de presse du ministère des Finances, il est dit que le gouvernement du Canada appuie plus solidement que jamais les provinces et les territoires. On y trouve des chiffres relatifs au Transfert canadien en matière de santé pour cette année et l'an dernier, les mêmes chiffres qu'à la page 5, et au Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Au sujet de la péréquation, on indique que ces paiements aux provinces atteindront un total de 14,4 milliards de dollars en 2010-2011, ce qui représente une augmentation de 187 millions de dollars. D'après les chiffres, il y a eu diminution de la péréquation. Je me demande d'où viennent ces 187 millions de dollars.
M. Day : De quelle ligne parlez-vous?
Le sénateur Callbeck : Je suis à la page 5, vous voyez le Transfert canadien en matière de santé, et les chiffres sont les mêmes que dans le communiqué de presse. Et je prends la péréquation fiscale. D'après les chiffres donnés à la page 5, l'an dernier, elle était de 16,1 milliards de dollars, mais il y a eu une diminution de 1,7 milliard de dollars. Le communiqué de presse affirme pourtant, et je cite : « Les paiements de péréquation versés aux provinces pour 2010- 2011 s'élèveront à 14,4 milliards de dollars, en hausse de 187 millions. »
M. Day : Au risque d'entrer dans des détails très techniques, et je ne veux pas laisser entendre que cela soit inutile, car c'est important, dans les changements législatifs qui découlent de la Loi de mise en œuvre du budget, les fonds sont énumérés de façon différente.
Si vous le voulez, je demanderai au ministère des Finances de vous transmettre une explication détaillée des raisons pour lesquelles certains chiffres figurent dans certaines colonnes. Le programme de péréquation est conçu pour les provinces qui ont de la difficulté à maintenir certains services à un niveau moyen de capacité sur le plan fiscal. Il varie d'année en année, et il y a généralement entre 28 et 33 éléments différents qui entrent dans cette formule complexe. Dans l'ensemble, il y a eu une augmentation à ce chapitre.
Nous signalons aussi, pour le volet santé, par exemple, une augmentation de 6 p. 100, que nous nous sommes engagés à offrir. Nous n'allons pas ramener notre déficit à zéro en diminuant les transferts aux provinces. Nous en avons suffisamment parlé et déploré qu'un autre gouvernement l'ait fait; nous ne le ferons pas.
Nous allons vous communiquer une explication comptable pour vous montrer comment la Loi d'exécution du budget aborde cette question de comptabilité. C'est une approche basée sur une formule, et je me ferai un plaisir de vous l'envoyer. Lorsque vous en aurez pris connaissance, si vous la comprenez bien, appelez-moi et expliquez-la-moi. Je dis cela à la blague, bien sûr. Lorsqu'il y a un changement, nous essayons de l'indiquer. Comme vous le savez sans doute, il y a une note ici, à la page 5. Je peux vous donner quelques détails.
Le président : Je crois que le sénateur Callbeck veut savoir comment expliquer la différence entre le communiqué de presse du gouvernement, qui dit qu'il y a eu une augmentation, et la page 5 du budget principal, qui fait état d'une diminution de 10,7 p. 100.
Nous comprenons que vous n'ayez peut-être pas tous les documents avec vous ici, mais si vous pouviez nous promettre de demander au ministère de nous les faire parvenir, cela nous aiderait.
M. Day : C'est ce qu'il y a dans le budget principal comme tel; il y a aussi les budgets supplémentaires, et il existe une façon différente d'énumérer certains de ces paiements de transfert.
Je serai heureux de vous communiquer cette information qui montre que, même si cela semble contradictoire les deux énoncés sont corrects. Il y a eu une augmentation globale, et dans le budget principal vous constatez que nous indiquons ces 1,7 milliard de dollars.
Le sénateur Ringuette : Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre. Je veux donner suite à la question du sénateur Callbeck.
En lisant le communiqué de presse auquel le sénateur Callbeck faisait allusion, et si vous regardez le discours du Trône du ministre Flaherty, à la page 15, il est écrit que « Nous n'allons pas équilibrer le budget en réduisant les paiements de transfert pour la santé et l'éducation [...] ». Les budgets des services de santé et l'éducation n'ont pas été réduits, mais le programme de péréquation qui est destiné aux plus pauvres de nos provinces a été comprimé de 1,7 milliard de dollars. Cela représente 10,7 p. 100 pour cet exercice financier.
M. Day : Vous parlez de...
Le sénateur Ringuette : Je parle du programme de péréquation fiscale. Le programme de soins de santé est automatiquement augmenté de 6 p. 100 par année pour une période de 10 ans. Cela découle d'une entente contractuelle avec toutes les provinces. Vous ne pouvez pas y toucher; c'est un contrat.
Toutefois, dans le cas du programme de péréquation fiscale, comme on l'a mentionné ce matin pendant notre réunion, quelques rajustements ont été faits. En conséquence, les plus pauvres de nos provinces, en cette période de crise économique, doivent absorber une compression de 1,7 milliard de dollars, de 10,7 p. 100 du total des transferts de péréquation.
M. Day : Je ne sais pas si vous l'avez sous les yeux, mais à la rubrique Principaux transferts aux provinces et territoires — c'est la page 1 de 1, ici —, nous sommes bien précis au sujet des autres paiements, y compris le paiement de protection sur les transferts totaux de 2010-2011. Ce programme particulier est un programme de protection exceptionnel destiné à garantir qu'aucune province ne recevra moins en 2010-2011 qu'en 2009-2010 grâce à la combinaison des paiements de péréquation, du Transfert canadien en matière de santé et du Transfert canadien en matière de services sociaux. Cela comprend une protection transitoire de la péréquation de 2009-2010, y compris des paiements distincts pour l'Ontario.
Je peux vous assurer, et nous l'avons couché sur papier ici, qu'aucune province ne touche moins en 2010-2011 qu'en 2009-2010.
Le sénateur Ringuette : Oui, parce que vous regroupez tous les programmes de transfert; le budget de la santé à lui seul est bonifié de 6 p. 100 relativement à l'an dernier. Ce sont là des manœuvres politiques, monsieur le ministre, que moi, qui représente le Nouveau-Brunswick, je n'apprécie pas du tout.
M. Day : J'aimerais commenter votre remarque. Il s'agit de données objectives, statistiques, financières. Il n'y a pas d'interprétation partisane. Nous sommes très clairs quand nous disons où va l'argent et de quelle façon cela est fait.
La formule elle-même est trop compliquée. Vous savez très bien, je crois — et nous rencontrons régulièrement les représentants des autres provinces — qu'aucun premier ministre provincial n'est venu me dire que sa province avait moins reçu, que nous lui avions joué un vilain tour. Personne n'a dit cela. Je peux vous l'affirmer.
Le sénateur Ringuette : Et moi je tiens à préciser ce que nous lisons ici, dans le budget du Parlement; à la page 5. Il est indiqué que vous avez diminué les transferts de péréquation aux provinces les plus pauvres du Canada, vous les avez réduits de 1,7 milliard de dollars, de 10,7 p. 100. Ce sont les faits.
M. Day : Comme je vous l'ai expliqué, il faut aussi tenir compte des Budgets supplémentaires des dépenses. Nous parlons du budget principal, et vous savez bien qu'il y a les budgets supplémentaires qui sont déposés en cours d'exercice en raison des procédures de crédits, parce qu'un certain montant d'argent comme celui indiqué dans le budget principal n'est pas toujours suffisant. En conséquence, certains éléments qui apparaissaient peut-être dans le budget principal ont été reportés dans les budgets supplémentaires pour accélérer les choses. Il faut tenir compte de tous ces aspects.
Je ne saurais trop insister sur le fait qu'aucune province, cette année, n'a reçu moins que l'an dernier, et qu'aucun premier ministre provincial n'a laissé entendre une telle chose. Les premiers ministres aimeraient peut-être recevoir plus d'argent, et ils font des démarches en ce sens, mais aucun premier ministre ni aucun gouvernement provincial, notamment celui du Nouveau-Brunswick, n'est venu nous faire de reproches et nous dire qu'il recevait moins d'argent. Cela ne s'est pas produit parce que ce n'est pas le cas.
Le président : Je crois que nous limitons la discussion à un seul sujet. Il y a eu un engagement pour préciser ce point. Il est clair qu'il s'agit d'une réduction de 10,7 p. 100, et le ministre s'est engagé à préciser la chose pour nous. C'est tout ce que nous pouvons faire pour l'instant. Je ne crois pas que nous souhaitions assister à un débat entre vous et le ministre sur un seul sujet. Aviez-vous autre chose à dire?
Le sénateur Ringuette : Oui, je veux aussi parler de la fonction publique. S'il vous plaît, passez à la page 10-6 du budget principal, à la rubrique Programme par activités. Comme vous le voyez, pour le Secrétariat du Conseil du Trésor, le poste des fonds pangouvernementaux et des paiements en tant qu'employeur de la fonction publique est réduit de 2,8 milliards de dollars, c'est une compression de 36 p. 100. Pouvez-vous expliquer les compressions que vous nous présentez dans ce budget des dépenses?
M. Day : J'essaie de trouver la ligne à laquelle vous faites allusion.
Le sénateur Ringuette : C'est à la page 10-6; le premier poste est celui des fonds à l'échelle pangouvernementale et des paiements effectués par votre ministère en tant qu'employeur de la fonction publique. Il y a une réduction de 2,8 milliards de dollars, ici, c'est-à-dire une réduction de 36 p. 100. C'est tout un chiffre, 36 p. 100! Pourriez-vous nous dire ce que ces compressions touchent?
M. Day : Premièrement, je veux être bien clair. La fonction publique, je suis certain que vous le savez, a considérablement augmenté. Sur une période de 10 ans, depuis notre arrivée au gouvernement, la fonction publique a augmenté entre 1999 et 2009 d'un peu plus de 34 p. 100. Ce sont tout simplement les faits.
Nous avons fait augmenter la taille de la fonction publique essentiellement pour accroître les effectifs de la Force régulière, au sein des Forces armées, et aussi ceux de la GRC. Ce sont deux éléments de politique. En conséquence, la taille de la fonction publique a nettement augmenté au cours de cette période.
Pour ce qui est de la question que vous soulevez, en terme de fonctionnement, je vais demander à mes fonctionnaires de mentionner quelques éléments concrets. Toutefois, je peux vous assurer que le coût global — pas simplement la taille, mais le coût global — de la fonction publique continue d'augmenter, comme on peut s'y attendre vu l'augmentation du nombre d'employés.
Chaque année, environ 13 000 personnes quittent la fonction publique; la plupart partent à la retraite et certains réorientent leur carrière. Cela est compensé par l'embauche. Il y a toujours du changement, une circulation en termes de paiements et d'avantages divers.
Nous ne pensons pas qu'il soit possible d'arriver à zéro, de laisser partir 13 000 personnes sans en remplacer aucune. Je ne crois pas que cela se produira. C'est une question que nous avons laissé aux ministères le soin de régler, parce que, comme vous le savez, à compter de 2010-2011 un plafond est imposé à toutes les dépenses de fonctionnement. Ce plafond sera maintenu pendant les deux années suivantes.
Nous avons demandé que l'on manifeste une certaine créativité pour y parvenir et nous croyons que cela se fera. Si vous vous inquiétez des prestations, d'une réduction des avantages sociaux des employés, je peux vous assurer que cela ne se produira pas. Les salaires ont augmenté. Nous appuyons l'ensemble global des avantages sociaux et nous ne projetons aucune réduction dans ce domaine.
Le sénateur Ringuette : Monsieur le ministre, je sais que la taille de la fonction publique a augmenté au cours des trois dernières années. Je sais aussi qu'il y a eu une très forte hausse de l'impartition des postes de la fonction publique, ce qui entraîne une réduction des coûts de prestation des services. Vous avez peut-être toutefois d'autres renseignements que vos fonctionnaires pourraient nous transmettre au sujet de ces compressions de 36 p. 100.
M. Day : Cela revient à la question précédente. Lorsque certains changements surviennent d'une année à l'autre en termes de rapport sur les budgets et les dépenses, des éléments passent d'un crédit à un autre. Il peut sembler y avoir eu une réduction, mais le déplacement d'un article entre deux crédits ne signifie pas toujours qu'il y a eu une réduction.
Si vous regardez dans le Budget principal des dépenses le point que vous avez soulevé et si vous faites la comparaison avec le budget de 2009-2010, c'est ce à quoi vous faisiez allusion, je crois... Le Secrétariat du Conseil du Trésor devra absorber une réduction qui représente au total 2,8 milliards de dollars. Une bonne partie de cette somme s'explique du fait que la mise en œuvre du Plan d'action économique du Canada est maintenant terminée. Je n'ai pas la page ici, mais si vous regardez le crédit 35, vous constaterez que des éléments ont été éliminés du crédit 35.
Ces responsabilités ont été transférées à divers ministères qui approuvaient les projets. Ici, vous avez la responsabilité du Conseil du Trésor relativement au Plan d'action économique dans certains secteurs, et cela était reflété dans le budget précédent. Il y a donc un poste qui montrait le montant que cela représentait. Ce crédit a ensuite été intégré au crédit 35, et les dépenses ont été réparties entre les ministères en fonction des responsabilités de chacun.
On verrait une réduction dans un ministère, mais tout est proportionnel, et le total s'obtient par l'examen de chaque ministère, pour voir quelles sont ses responsabilités.
Il nous faudra un peu de temps, mais nous pouvons vous trouver cette information concernant la répartition de chacun de ces postes. Vous verriez alors qu'il n'y a pas de réduction globale du budget, mais bien une nouvelle répartition des responsabilités entre les ministères.
Le sénateur Gerstein : J'ai certainement vu les chiffres que vous nous lisez, sénateur Ringuette, mais je regarde aussi la ventilation des transferts du ministère des Finances. Je m'intéresse aux trois plus importants : le Transfert canadien en matière de santé à 25...
Le sénateur Ringuette : Je suis désolée, mais nous parlons de...
Le sénateur Gerstein : Je sais, mais je veux dire que dans la ventilation que nous avons ici, le total de la péréquation en 2009-2010 était de 14 000 000 185 $, ce n'était pas 16,1 milliards comme indiqué ici, et nous avons 14,372 $ pour 2010-2011.
Comme même les chiffres les plus importants sont identiques, j'aimerais bien qu'on m'explique pourquoi les chiffres ne sont pas les mêmes ici et dans la ventilation.
Le président : Le ministre s'est engagé à nous apporter des précisions. Maintenant, nous parlons d'autre chose, nous parlons des dépenses du Conseil du Trésor.
M. Day : Ce sont des questions comptables, et nous veillerons à ce que nos comptables vous les expliquent en détail.
Pour ce qui est de la dernière question soulevée, je veux toutefois souligner qu'il n'y a pas eu de réduction globale. Il s'agit d'un réaménagement des diverses responsabilités entre les ministères, mais l'argent est là, et nous allons vous fournir une ventilation.
Le sénateur Ringuette : Je vous en serais reconnaissante, parce que pour les deux dernières années du plan de relance économique et si l'on regarde le Budget principal des dépenses, le budget supplémentaire (B), le budget supplémentaire (C) et les autres budgets, je ne vois pas que 2,8 milliards de dollars ont été transférés d'autres ministères vers le Conseil du Trésor pour financer la recherche et les projets de stimulation économique.
M. Day : Nous allons ventiler les chiffres et vous montrer comment l'argent circule.
Le sénateur Ringuette : Je voudrais bien voir cette information.
Le sénateur Marshall : Merci. Soyez le bienvenu, monsieur le ministre. Je veux parler des salaires. S'il vous plaît, dites-nous quelle incidence le budget et les compressions auront sur l'enveloppe salariale. En outre, est-ce qu'il y a des conséquences en termes de négociations collectives et, si oui, quelles sont-elles?
M. Day : C'est une question clé. Nous avons indiqué que les dépenses ministérielles seront gelées aux niveaux de 2010-2011 pour les deux années qui suivront celle-ci. Essentiellement, nous les maintiendrons au même niveau pendant trois ans.
Nous ne voulons pas nous ingérer dans le processus de négociations collectives. Nous avons dit que ces questions devaient être gérées par la fonction publique. S'il y a une augmentation dans un secteur de fonctionnement — les salaires ou un autre secteur —, alors les fonctionnaires devront déterminer comment ils peuvent équilibrer les choses sans dépasser l'enveloppe globale qu'ils auront reçue.
Comme vous le savez, la Loi sur le contrôle des dépenses est en vigueur depuis quelque temps déjà. Cette année, les ministères toucheront encore une augmentation de 1,5 p. 100. Toutefois, pour les années subséquentes, il incombera aux participants aux discussions d'examiner les questions d'augmentation salariale et ce qui peut être fait sans dépasser le niveau global qui aura été accordé.
Vous savez que nous avons fait notre part, les députés, les ministres, le premier ministre, et cetera. Nous avons accepté un gel de nos propres salaires parce que nous traversons ce qui nous semble être un peu la fin de cette période de ralentissement de l'activité économique. Nous croyons que nous sommes en période de redressement. Pendant cinq des sept derniers mois, les chiffres sur l'emploi étaient en hausse. Nous considérons toutefois que la situation est encore instable, non seulement la situation de notre économie, mais aussi celle de l'économie mondiale. En conséquence, pour manifester notre sens des responsabilités, nous nous sommes imposé un gel salarial. Nous n'avons pas imposé cela aux autres. Nous l'avons adopté pour nos propres salaires.
Au cours des deux ou trois prochaines années, nous demandons à tous les ministères de limiter leurs dépenses. À l'intérieur de l'enveloppe globale qui leur est accordée, ils peuvent prendre des décisions. Toutefois, c'est là tout l'argent qui sera accordé pour les deux prochaines années qui suivront le budget.
Le sénateur Marshall : Est-ce que vous pensez que l'embauche va diminuer ou que les départs à la retraite et l'attrition dans la fonction publique auront un effet? Quel impact croyez-vous que la mesure aura sur les nouvelles recrues de la fonction publique?
M. Day : Dans l'ensemble, la taille de la fonction publique a sensiblement augmenté. Je l'ai mentionné un peu plus tôt, depuis que nous sommes au pouvoir, c'est l'un des principaux secteurs où nous constatons une augmentation supérieure à la croissance démographique. Dans une telle situation, quand l'effectif augmente plus rapidement que la population, il y a une hausse, même s'il existe de nouvelles technologies qui facilitent les processus administratifs et d'autres opérations. Il faut se demander si cette augmentation continue est nécessaire, sauf dans le cas de positions de politique claires et officielles. À cet égard, je mentionnerais la Défense nationale et la GRC. Les effectifs de la GRC sont passés de 19 000 à 23 000, avec quelque 3 000 fonctionnaires qui sont venus gonfler les rangs de l'autre côté.
Nous demandons aux ministères de tenir compte de tout cela. Nous leur demandons de reconnaître qu'il y a eu une croissance considérable de la fonction publique. Nous voulons équilibrer le budget maintenant que nous sommes en période de restrictions. Nous demandons que l'on fasse preuve de créativité; nous demandons que l'on procède à des examens administratifs. Je connais bien les fonctionnaires — je travaille avec eux depuis que j'assume des responsabilités ministérielles dans l'administration fédérale — et j'ai toute confiance en leur créativité et en leur capacité de trouver des solutions. Ils abordent leur travail avec beaucoup de sérieux car ils doivent offrir des services aux Canadiens et améliorer constamment l'efficience de leurs méthodes.
Votre préoccupation est tout à fait justifiée en ce qui concerne l'effet que cela aura sur les effectifs et les salaires, mais ce sont des questions qu'ils sont, selon moi, parfaitement en mesure de régler pour nous aider à traverser cette période particulière.
[Français]
Le sénateur Poulin : Monsieur le ministre, je vous remercie de votre présence parmi nous. Nous sommes tous conscients de votre horaire chargé. J'aimerais prendre un recul et regarder le budget 2010-2011 à vol d'oiseau.
Quel pourcentage du budget est dépensé pour la culture au Canada?
M. Day : Nous pouvons examiner les chiffres. Donnez-moi un instant.
Le sénateur Poulin : Je regardais le pourcentage.
M. Day : Si nous examinons les chiffres, nous pouvons voir qu'il y a des augmentations. Vous pouvez ajouter des nombres, mais nous voulons 15 millions de dollars pour les publications canadiennes; 11 millions de dollars pour les fonds pour le programme « À nous le podium », qui a été très réussi, je crois; 10,3 millions de dollars pour les négociations collectives; 8 millions de dollars pour les programmes d'appui pour les sports; presque 7 millions de dollars pour la carte pour les langues officielles; 6 millions de dollars pour bâtir les collectivités par les arts; et un autre 5 millions de dollars pour TV5, réseau qui a beaucoup d'influence dans la Francophonie.
Si on calcule vite, environ 61 millions de dollars. Il y a des augmentations et il y a aussi des réductions. Il est important de le reconnaître.
Par exemple, une diminution de 50 millions de dollars parce qu'il n'y a pas de Jeux olympiques l'an prochain. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire d'ajouter une ligne et d'en enlever une autre. C'est une réduction nette de 108 millions de dollars lorsqu'on compare avec 2009-2010.
Le sénateur Poulin : J'ai pu obtenir de la Bibliothèque du Parlement la comparaison du pourcentage dédié au Canada comparativement à 26 pays. C'est un document publié par l'OCDE. Sur 26 pays, le Canada occupe l'avant- dernier rang.
M. Day : En comparaison avec quoi?
Le sénateur Poulin : Je parle ici du pourcentage.
[Traduction]
Le sénateur Poulin : Je parle des dépenses du gouvernement dans les domaines de la récréation et de la culture, exprimées en pourcentage du PIB de 2006. On fait une comparaison avec 1997. C'est la dernière année pour laquelle l'OCDE a des chiffres permettant de comparer des pommes avec des pommes.
Nous occupons le septième avant-dernier rang sur 26...
[Français]
M. Day : Combien de pays?
[Traduction]
Le sénateur Poulin : Il y a 26 pays. Pourquoi le Canada vient-il si loin derrière? Pourquoi est-ce que nous accordons si peu d'importance à la seule chose qui reste après la disparition de toutes nos institutions culturelles, principalement la CBC et Radio-Canada?
[Français]
M. Day : Je suis certain que vous avez remarqué que Radio-Canada a reçu une augmentation et n'a pas subi une réduction. Je n'ai pas vu la comparaison faite par l'OCDE. Je peux dire que nos artistes ont reçu une augmentation cette année et j'ai expliqué la raison des différences d'une année à l'autre. C'est intéressant de voir qu'ils ont inclus seulement 26 pays dans la liste.
Le sénateur Poulin : Vingt-six pays.
M. Day : Je me demande pourquoi cette liste n'est pas constituée de 50 ou 100 pays. Je ne comprends pas. Je n'ai pas vu la liste.
Le sénateur Poulin : Monsieur Day, durant les derniers mois, Radio-Canada a été obligée de fermer sa seule station de radio française à Windsor. Cette décision, qui reflète les compressions budgétaires, est extrêmement inquiétante quand on pense au rôle crucial que joue la Société Radio-Canada au pays. C'est le seul fil conducteur qui relie les Canadiens sur une base quotidienne.
Alors disons que vous, en tant que président du Conseil du Trésor, vous aimeriez changer le pourcentage dédié à la culture en l'augmentant, par où commenceriez-vous? Quel serait le processus décisionnel? Que seriez-vous capable d'entreprendre?
M. Day : Comme je l'ai indiqué, il y a des raisons dans les cas de réduction. Radio-Canada a reçu plus d'un milliard de dollars. À mon avis, c'est beaucoup d'argent. Les revenus des secteurs privés étaient un peu faibles. Nous avons pu constater ce problème économique partout dans le monde. Il y a moins de divertissements. Il s'agit de savoir si les fonds sont suffisants ou non. C'est une question que nous allons continuer de nous poser. Nous avons accordé une augmentation à Radio-Canada. Certaines personnes croient qu'il faut en donner davantage, d'autres croient qu'il faut en donner moins. C'est difficile de trancher. Il s'agit de la décision du gouvernement qui doit jongler avec un déficit, avec une dette. Le gouvernement veut maintenir un risque souverain moindre que les pays mentionnés sur la liste. Si vous regardez notre situation économique dans la liste des 26 pays, nous occupons peut-être la première, la deuxième ou la troisième place lorsqu'on compare la dette et le PIB. Alors, la décision est importante.
Le sénateur Poulin : Quel serait le processus décisionnel à entreprendre pour changer un pourcentage?
Prenons par exemple le programme pour la Défense, le programme pour l'Immigration et l'International, les pourcentages sont de 11,2 milliards et 26 milliards de dollars par année.
Vous dites que le programme de la Société Radio-Canada d'un milliard de dollars par année, c'est beaucoup. Pour moi, l'unité du pays vaut encore plus que cela, mais je vous ferai cette argumentation en temps et lieux. Pour le moment, j'aimerais que vous nous rappeliez le processus décisionnel utilisé pour en arriver à ces changements de pourcentages.
M. Day : C'est un processus qui est considéré de concert avec les citoyens et les individus concernés par l'augmentation ou la diminution. Notre processus autour de la table est de considérer les besoins, de comprendre les pressions, par exemple.
Le processus n'est pas parfait, mais on évalue tous les besoins et toutes les pressions. Il faut décider, pour l'année, le niveau de fonds pour tel ou tel ministère. C'est un long processus, parce qu'on veut examiner toutes les préoccupations. Comme je l'ai dit, ce n'est pas un processus parfait, mais il est très important et détaillé.
Le sénateur Poulin : Pourrions-nous recevoir votre réponse par écrit? J'essaie de ne pas empiéter sur le temps de mes collègues.
M. Day : Je ne comprends pas.
[Traduction]
Le sénateur Poulin : Pourriez-vous nous fournir par écrit votre réponse au sujet du processus décisionnel?
M. Day : Je viens de vous la donner, mais nous serons heureux de l'imprimer pour vous.
Le président : Est-ce que vous nous avez fourni une réponse complète?
M. Day : Oui.
Le sénateur Poulin : Vous n'avez pas parlé du rôle du Cabinet et des comités du Cabinet.
M. Day : Quand je dis « autour de la table », cela signifie non seulement les comités du Cabinet mais aussi les comités du caucus et la contribution de l'opposition. Cette dernière est parfois limitée et parfois utile. C'est ce que je voulais dire quand j'ai parlé d'une grande table. Tous ont l'occasion de participer au processus.
Le président : Merci.
M. Day : Si vous me le permettez, monsieur le président, le processus commence par la contribution des citoyens. Nous voulons savoir ce que la population touchée en pense. Est-ce que ce sera un service? Est-ce que ce sera une certaine quantité de ressources? Nous prenons tout en compte. J'ai appris quelque chose au gouvernement : chaque programme, dès qu'il est annoncé, est immédiatement sollicité au-delà de sa capacité. Cela vaut également aux niveaux provincial et municipal. Dès que vous annoncez un programme, il est débordé, et il faut alors commencer à prendre des décisions.
Le président : Nous aurons une transcription de tout ce qui a été dit. Si vous jugez qu'il manque quelque chose que vous n'avez pas mentionné, vous serez en mesure de l'ajouter.
M. Day : J'ai essayé de vous donner une idée détaillée d'un processus très long, qui consomme énormément de temps et d'énergie. Il faut prendre une décision relativement à chaque poste.
Le sénateur Murray : Je n'ai évidemment pas de mémoire à présenter au sujet des politiques culturelles du gouvernement actuel, mais il faut dire que toute comparaison équitable entre le Canada et d'autres pays au sujet de la politique culturelle — et je ne parle pas de la radiodiffusion, qui relève du fédéral — devrait inclure les dépenses fédérales et provinciales. Ce sont les provinces qui assument la responsabilité principale et dans au moins un cas nous savons qu'elle revendique la responsabilité exclusive de ce domaine.
Monsieur le ministre, un de nos problèmes, et le sénateur Gerstein y a fait allusion, c'est que les choses sont présentées de différentes façons et dans différentes catégories année après année, et parfois de document en document. Vous parlez d'économies. L'énoncé économique et fiscal de novembre 2008 prévoyait pour cette année qui s'achève des économies de 2 milliards de dollars, grâce à une « gestion plus rigoureuse des ministères », quel que soit le sens que vous donnez à cette expression. Puis vous regroupez ce que vous appelez les examens stratégiques et l'examen des actifs du gouvernement — la vente ou l'aliénation des biens de la Couronne — et vous obtenez 2,3 milliards de dollars, ce qui porte le total des économies escomptées à 4,3 milliards de dollars pour l'année qui s'achève. Par ailleurs, pour l'année qui s'amorce, une « gestion plus rigoureuse des ministères » devrait produire 1,5 milliard de dollars, et les examens ministériels et des actifs du gouvernement viendront ajouter 1,1 milliard de dollars pour un total de 2,6 milliards. Est-ce que ces chiffres sont encore valables? Est-ce que c'est ce que nous espérons atteindre? Est-ce que nous les avons atteints ou sommes-nous sur le point de les atteindre?
M. Day : Je ne peux pas dire que nos calculs sont exacts à quelques dollars près dans ces cas, mais cela demeure notre cible. À mesure que l'année avance, certains impondérables peuvent survenir. Si par exemple nous avions envisagé, il y a un an, certaines dépenses liées à...
Le sénateur Murray : L'année financière se termine dans neuf jours.
M. Day : Je dis simplement que si nous avions examiné nos projections il y a un an pour notre enveloppe d'aide internationale, personne n'aurait pu prévoir le cas d'Haïti et ce qui allait s'y produire. Il peut y avoir des événements qui modifient la donne, mais c'est notre but.
Parfois, nous examinons les suggestions que présentent les ministères pour réaliser des économies dans des domaines précis. J'ai promis au sénateur Callbeck de vous fournir une de ces listes. Nous ne donnons pas nécessairement suite à toutes les suggestions qui nous sont présentées, mais cela fait partie du processus.
Le sénateur Murray : Nous allons examiner cette liste lorsque vous l'aurez terminée.
M. Day : Parfait.
Le sénateur Murray : À la fin de l'exercice financier en cours, nous pourrons déterminer dans quelle mesure vous avez réussi à réaliser ces économies.
M. Day : Nous aurons la cible et nous verrons ce que nous avons fait.
Le président : Pour le compte rendu, est-ce que vous faisiez allusion à l'énoncé économique et financier de l'automne 2009?
Le sénateur Murray : Je parlais de la mise à jour du 27 novembre 2008.
Le président : Cela fait plus d'un an?
Le sénateur Murray : Oui. Nous, les sénateurs, nous travaillons sur le long terme.
Le président : Je voulais le préciser pour le compte rendu.
Le sénateur Murray : Monsieur le ministre, aidez-moi à interpréter ce paragraphe du budget 2010. Je veux être bien certain de comprendre le message. Je lis :
En 2011-2012 et 2012-2013, les budgets de fonctionnement des ministères, tels qu'approuvés par le Parlement, seront bloqués aux niveaux de 2010-2011.
Et un peu plus loin, il est dit :
Cependant, le Budget principal des dépenses ne tient pas compte des mesures annoncées dans le budget de 2010 ou des ajustements prévus pour financer les coûts liés aux services essentiels, les paiements se rapportant aux passifs et d'autres éventualités. Une marge de manœuvre pour ces ajustements est incluse dans le cadre financier.
Si je devais terminer cette phrase, je dirais « [...] et vous sera déclaré dans le budget supplémentaire. »
M. Day : Oui.
Le sénateur Murray : Vous gelez les budgets aux niveaux de 2010-2011, tels qu'ils sont dans ce budget, plus les ajustements prévus. Est-ce exact?
M. Day : C'est l'enveloppe globale qui sera gelée, si vous ajoutez les opérations.
Le sénateur Murray : C'est un peu comme un buffet, alors?
M. Day : Le niveau global des opérations pour l'ensemble des ministères est d'environ 54 milliards de dollars. Pour toutes les activités du gouvernement, comme vous le savez, il faut aussi réserver un montant pour les imprévus. Il y a un budget, mais il faut essayer d'avoir une réserve aussi généreuse que possible. Dans le budget de cette année, elle est d'environ 450 millions de dollars. Je dis plus ou moins, avec réserve.
En termes généraux, l'enveloppe des dépenses sera gelée à environ 54 milliards de dollars pour le volet fonctionnement des ministères.
Le sénateur Murray : Est-ce que cela englobe les sommes que nous verrons dans les budgets supplémentaires?
M. Day : Oui.
Le sénateur Murray : D'accord.
On dit aussi dans le budget :
Le Conseil du Trésor fixera les dépenses de fonctionnement des ministères pour 2011-2012 et 2012-2013 aux mêmes niveaux qu'en 2010-2011, ajustés en tenant compte de l'échéance des autorisations de dépenser relatives aux budgets de fonctionnement liées à la mise en œuvre du Plan d'action économique.
La première catégorie dont nous parlions va relever le plafond. J'imagine que cela sera soustrait?
M. Day : Oui, si vous avez des dépenses considérées comme exceptionnelles — cela peut durer deux ans, comme notre ensemble de mesures de stimulation —, mais lorsque vous affectez des fonds à une tâche ou à une fonction précise qui par la suite disparaît, nous disons aux ministères qu'ils vont cesser de recevoir cet argent.
Le sénateur Murray : Est-ce que les deux catégories s'annulent l'une l'autre?
M. Day : Nous utiliserons le plus important montant en ce qui concerne la somme que nous avons mise de côté pour les Jeux olympiques. Évidemment, nous n'aurons plus besoin de cet argent à la fin de l'année. Il y a de coûts liés à la fermeture. Toutefois, si un ministère parvient à éliminer dans un poste de son budget un certain montant, cet argent ne lui sera pas remis. Ce genre de dépenses exceptionnelles — si nous pouvons parler de dépenses exceptionnelles — n'entrera pas en compte par la suite.
Le sénateur Murray : Finalement, un mot au sujet de la péremption. Les fonctionnaires sont venus témoigner il y a un an, et je leur ai posé la question au sujet de la péremption et du programme de stimulation, du Plan d'action économique. Je crois qu'ils ont répondu que les fonds ne se périmeraient pas, qu'ils seraient réaffectés ou maintenus, qu'ils ne seraient pas perdus.
M. Day : Les fonds périmés retournent au Trésor. Même dans le cas des dépenses de mon ministère, si nous avons un certain montant à dépenser, nous sommes d'avis que ce n'est pas parce que nous avons cet argent que nous devons, à la fin de l'année, le dépenser. J'aime bien que nous ayons de l'argent que nous pouvons... Je ne veux pas utiliser le verbe « redonner », parce qu'il ne nous appartient pas de toute façon, mais la péremption n'est pas une mauvaise chose.
Le sénateur Murray : Je réfléchissais, en regardant les chiffres qui expliquent comment vous parviendrez à équilibrer le budget dans un certain nombre d'années, je me demandais dans quelle mesure le problème de M. Flaherty pouvait être réglé grâce à la péremption d'une somme importante allouée au Plan d'action économique, aux mesures de stimulation économique.
M. Day : Il n'y aura pas de somme périmée, nous prévoyons utiliser tous les fonds.
Le sénateur Murray : Pardon, au cours du prochain exercice?
M. Day : Le montant qui a été mis de côté, environ 19 milliards de dollars pour l'ensemble des mesures de stimulation de cette année, nous sommes convaincus qu'il sera entièrement utilisé. Je me trompe peut-être, mais je crois qu'entre l'an dernier et cette année, tout le budget a effectivement été utilisé, à l'exception de 16 millions de dollars, parce que nous avions imposé certaines exigences à cet égard, par exemple l'obligation de mettre les projets en œuvre. Les projets doivent être élaborés et réalisés au cours d'une période donnée. Vous pouvez dans une large mesure compter sur le fait que ce budget de plus de 19 milliards de dollars — et mes remarques concernant la demande excessive pour les programmes valent ici aussi... ces dollars seront dépensés. Je vous garantis que les municipalités et les provinces sont déterminées à présenter leurs demandes à temps. Il y aura peut-être certains montants non dépensés parce qu'un projet n'aura pas pu être réalisé à temps ou n'aura pas satisfait à une certaine exigence.
Le sénateur Murray : Les statistiques des dernières années au sujet de ces programmes d'infrastructure indiquent un fort taux de péremption. Je ne les ai pas sous les yeux.
M. Day : Je peux vous assurer que la participation a été dynamique et importante. Nous croyons qu'à la fin de l'année, si tous les fonds ne sont pas entièrement dépensés, le solde sera minime. En outre, il ne s'agit pas uniquement d'infrastructure. Il y a un certain nombre de programmes menés dans le Plan de stimulation économique qui ne se rapportent pas à l'infrastructure.
Le sénateur Murray : Je devrai chercher ailleurs une explication pour l'optimisme de M. Flaherty.
Le sénateur Runciman : Je sais que le ministre a un horaire chargé et je vais me contenter de dire à quel point je suis heureux de constater sa détermination, la volonté du gouvernement de ne pas équilibrer le budget au détriment des provinces. Lui et moi nous avons vécu une telle situation quand le gouvernement précédent a décidé de réduire de façon spectaculaire les transferts aux provinces et nous savons que les provinces ont éprouvé des difficultés à la suite de cette décision.
Je vous félicite et j'ai certainement des réflexions, des idées et des suggestions à vous présenter, mais je vous les ferai parvenir à une date ultérieure.
M. Day : Je vous remercie, sénateur Runciman. Les questions concernant le budget et le processus budgétaire sont souvent difficiles, et c'est bien le cas pour le budget principal et les budgets supplémentaires. Je serai heureux de prendre connaissance de votre contribution.
Je ferai parvenir au comité l'information que je lui ai promise. Un sénateur a remis en question l'optimisme de M. Flaherty. Évidemment, nous sommes optimistes, mais nous nous fondons sur des prévisions réalistes.
Je tiens à vous assurer que le budget de fonctionnement est gelé à 54 milliards de dollars. C'est notre enveloppe globale. Les budgets supplémentaires ne sont pas compris dans ces 54 milliards de dollars. Ils vous sont présentés en tant que budgets supplémentaires.
Nous croyons que nos objectifs sont tout à fait réalistes. Pour l'examen des prévisions de recettes, je puis vous assurer que nous consultons un certain nombre de sources, les soi-disant experts du domaine, et nous en recueillons tout un éventail. Nous avons un éventail d'hypothèses sur ce qu'ils prévoient pour les prix du pétrole ou du gaz et les fluctuations du dollar canadien. Nous adoptons une hypothèse moyenne. Nous ne choisissons pas les extrêmes d'optimisme ou de pessimisme. Nous adoptons une approche conservatrice. C'est la raison pour laquelle nous sommes optimistes, parce que nous savons que nous sommes réalistes.
Je vous remercie de votre contribution. Je vais vous faire parvenir tous les chiffres et les réponses que vous m'avez demandés. Je vous remercie de cette excellente discussion et des instructions que vous m'avez données.
Le président : Monsieur le ministre, merci. Au nom du Comité sénatorial permanent des finances nationales, nous vous remercions d'avoir bien voulu venir nous rencontrer et nous présenter cet aperçu. Je vous remercie personnellement de faire tant honneur à notre nom de famille. Nous serons heureux de vous rencontrer à nouveau.
(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)