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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 11 - Témoignages du 21 juin 2010 - Séance du soir


OTTAWA, le lundi 21 juin 2010

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales, à qui a été renvoyé le projet de loi C-9, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 4 mars 2010 et mettant en œuvre d'autres mesures, se réunit aujourd'hui, à 18 heures, pour examiner le projet de loi (sujet : parties 15 et 20).

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : La séance du Comité sénatorial permanent des finances nationales est ouverte. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-9, le projet de mise en œuvre du budget 2010. Au cours des huit séances précédentes, le comité a entendu le ministre des Finances et des représentants du ministère qui nous ont expliqué jusqu'ici les dispositions de 22 des 24 parties. Ce soir, nous allons entendre des représentants du ministère qui vont nous parler des deux dernières parties du projet de loi C-9.

Il avait été prévu d'étudier ces deux parties au cours de séances antérieures mais, en raison de contraintes de temps, nous avons été obligés de reporter leur étude à ce soir. Je remercie tous les représentants pour leur patience et leur compréhension.

Les parties 15 et 20 concernent respectivement la Loi sur la Société canadienne des postes et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Nous allons commencer par la partie 15. Nous accueillons de nouveau Katherine Moynihan, directrice, Gestion du portefeuille, Gouvernance de société d'État, et April Nakatsu, directrice générale, Gouvernance de société d'État, toutes deux de Transports Canada.

Les sénateurs se souviendront que nous avions déjà commencé à examiner cette partie au cours d'une séance précédente la semaine dernière, mais que nous avions manqué de temps avant de pouvoir vraiment poser toutes les questions que nous voulions. Est-ce que Mme Moynihan ou Mme Nakatsu souhaitent ajouter des commentaires sur ces parties avant de passer aux questions?

Katherine Moynihan, directrice, Gestion du portefeuille, Gouvernance de société d'État, Transports Canada : Pas pour le moment. Nous sommes heureuses de répondre à vos questions.

Le président : Il y a eu la semaine dernière une question au sujet d'une entité étrangère faisant partie d'une association internationale qui permettrait à Postes Canada de percevoir certains revenus si le courrier entrait au Canada.

Mme Moynihan : Lorsque le courrier passe d'une administration postale à une autre, un système de frais terminaux permet de transférer les paiements du pays qui distribue le courrier au pays qui a initialement chargé les frais d'affranchissement.

Le président : Est-ce prévu par une entente internationale?

Mme Moynihan : C'est prévu par l'Union postale universelle, l'UPU.

Le président : Si une société donnée n'est pas membre de l'UPU, comment Postes Canada fait-elle pour s'assurer qu'elle reçoit bien le financement prévu pour réexpédier le courrier au Canada?

Mme Moynihan : Le courrier est toujours livré par une administration postale qui reçoit les frais terminaux de l'administration postale qui a commencé à traiter le courrier. Lorsqu'il y a réexpédition, le courrier pourrait être pris au Canada, introduit, par exemple, dans le système postal du Mexique puis distribué en Italie. Le Mexique verserait des frais terminaux à l'Italie. Le Mexique aurait perçu des frais pour les timbres, et l'Italie recevrait les frais terminaux pour couvrir le coût de la distribution du courrier.

Le président : Merci. Je ne vois pas d'autre intervenant. Je vais donc céder la parole au sénateur Ringuette, qui était en train de poser des questions l'autre jour.

Le sénateur Gerstein : En fait, je crois que le sénateur Ringuette est la seule personne qui a posé des questions à la dernière séance. Elle avait préparé près de 14 questions, mais elle n'a pas eu le temps de toutes les poser. J'espère qu'il en sera tenu compte.

Le sénateur Ringuette : Je suis désolée, monsieur le président, mais j'espère que nous pourrons examiner le procès- verbal sur ce point, parce que le chiffre de 14 questions donné par le sénateur Gerstein n'est pas exact. J'en étais à ma deuxième question, qui portait sur le retour de courrier.

Le président : Vous avez présenté votre observation. Poursuivons.

Le sénateur Ringuette : Madame Moynihan, avez-vous examiné la question du retour de courrier dont nous avions parlée la semaine dernière?

April Nakatsu, directrice générale, Gouvernance de société d'État, Transports Canada : En fait, il n'y a pas de retour de courrier. Je vais expliquer en quoi consiste la réexpédition. Nous essayons de permettre aux sociétés canadiennes de prendre livraison du courrier en vrac. Le réexpéditeur l'envoie dans un autre pays et ce courrier est pris en charge par l'administration postale de ce pays. Cette administration postale distribue le courrier soit dans ce pays étranger, soit dans un autre pays si ce courrier ne doit pas revenir au Canada. S'il revient au Canada, ce serait encore illégal. Nos lois ne changent pas le fait que cela serait encore illégal. Un courrier réexpédié ne peut revenir au Canada.

Le sénateur Ringuette : Je suppose qu'il y aura toujours des envois non distribuables. Si l'adresse de l'expéditeur est au Canada, il vous est absolument impossible de savoir quel est le réexpéditeur qui doit payer Postes Canada pour distribuer ces envois non distribuables, qui représentent habituellement près de 10 p. 100.

Mme Nakatsu : Le courrier aura été traité par l'administration postale d'un autre pays et portera ses tampons. Postes Canada serait remboursée par cette administration postale.

Le sénateur Ringuette : Non. Postes Canada ne reçoit rien pour les retours de courrier. Qui est le conseiller principal de votre ministère pour les questions touchant Postes Canada? Êtes-vous toutes les deux des conseillères principales?

Mme Nakatsu : Le conseiller principal auprès d'un ministre est le sous-ministre.

Le sénateur Ringuette : J'aurais pensé que tout le monde aurait une connaissance générale des retours de courrier. Puisque ce n'est pas le cas, je vais passer à d'autres questions.

Combien y a-t-il de réexpéditeurs au Canada?

Mme Moynihan : D'après le secteur canadien des envois internationaux, il y a des centaines d'entreprises de réexpédition au Canada qui emploient des milliers de personnes.

Le sénateur Ringuette : Nous avons des centaines d'imprimeries qui ne sont pas des réexpéditeurs. Au Canada, il y a trois réexpéditeurs : il y a G3 Worldwide, c'est-à-dire Sprint, qui est une coentreprise entre SingPost, Dutch post et Royal Mail; il y en a un autre qui s'appelle DHL au Canada, et le troisième est Key Mail.

Le président : Voulez-vous faire un commentaire à ce sujet? Cela va-t-il à l'encontre de ce que vous avez dit?

Mme Moynihan : Cela va à l'encontre des renseignements que nous avons obtenus auprès de l'association qui représente les entreprises qui se décrivent comme faisant partie du secteur de la réexpédition. Ces entreprises nous ont dit qu'elles travaillaient de différentes façons. Il y a des entreprises d'impression et de conception graphique qui produisent du courrier et qui l'envoient à certaines des entreprises dont vous avez parlées pour qu'elles l'introduisent dans le courrier d'un autre pays. Il ne s'agit pas de leur seule activité dans le secteur de la réexpédition. Certaines d'entre elles envoient leurs produits de l'autre côté de la frontière et les remettent ensuite directement au United States Postal Service. Je dirais qu'il s'agit d'entreprises de réexpédition à part entière.

Le sénateur Ringuette : Pour distribuer le courrier international, il faut avoir un code postal de l'Union postale universelle. Lesquelles de ces trois entreprises de réexpédition ou de ces 100 entreprises d'impression possèdent un code de l'UPU?

Mme Moynihan : Je crois qu'aucune de ces entreprises ne distribue du courrier. Lorsqu'il y a réexpédition, le courrier en vrac est introduit dans le système postal d'un autre pays qui traite le courrier à l'intérieur de ses frontières ou qui le transfère à un autre pays pour qu'il soit distribué par l'administration postale de ce pays.

Le sénateur Ringuette : Vous avez tout à fait raison. Elles paient les frais minimaux des pays en développement pour contourner les règles de l'UPU.

À ma connaissance, l'UPU ne distribue plus de codes postaux. En moyenne chaque année au Canada, il y a environ 0,11 milliard d'articles qui sont envoyés à l'étranger. Au moins 10 p. 100 de ces articles seront retournés. Vous dites que tous ces réexpéditeurs auront une adresse de réexpédition au Canada. Cela veut donc dire que c'est Postes Canada qui en assumera le coût.

Comment allez-vous dédommager Postes Canada pour le coût de ces retours?

Mme Moynihan : Je crois savoir, selon les renseignements obtenus auprès de l'industrie, que ce n'est pas toujours le cas. Il y a un certain nombre d'entreprises d'impression et de conception graphique qui travaillent pour des sociétés situées à l'extérieur du Canada, mais qui sont concurrentielles et arrivent à obtenir ce genre de travail. Dans ces cas-là, l'adresse de l'expéditeur peut se trouver en Afrique du Sud ou au Texas.

Le sénateur Ringuette : Il semble que vous ayez consulté assez longuement les associations d'imprimeurs. Quelle a été l'ampleur des consultations que vous avez eues avec Postes Canada au sujet de ces questions?

Mme Moynihan : Nous avons parlé de ces questions avec Postes Canada. Il y a aussi le comité indépendant qui a procédé récemment à un examen de Postes Canada et qui a communiqué avec un certain nombre d'intéressés et donné des présentations sur invitation. Le comité a également obtenu le point de vue de sociétés comme Postes Canada, la Canadian International Mail Association et de nombreuses autres sur toute une gamme de questions, y compris la réexpédition.

Le sénateur Ringuette : La loi ne contient pas de mécanisme prévoyant le remboursement au Canada des frais encourus pour les retours; vous n'avez pas de mécanisme d'attribution de permis qui permet d'assurer la sécurité et l'intégrité du courrier, ce qui fait partie de la mission de l'UPU. Comment allez-vous régler cette question?

Mme Moynihan : Le projet de loi a pour but d'offrir plus de choix sur les marchés canadien et internationaux pour les services de courrier international, et de protéger les milliers d'emplois canadiens de ce secteur. Postes Canada est une société d'expérience qui a évalué les répercussions possibles de ce projet de loi et qui estime que cela représente de 0,5 à 1 p. 100 de ses revenus annuels et qu'elle est très bien équipée pour demeurer compétitive dans cette industrie, comme elle le fait depuis une vingtaine d'années.

Le sénateur Ringuette : Pour ce qui est de la déréglementation de Postes Canada, ce qui est ce dont nous parlons, ce secteur a également été déréglementé aux États-Unis. Les États-Unis ont épongé l'an dernier un déficit de quatre milliards de dollars. C'est ce qui est également arrivé avec la Royal Mail, qui est confrontée à l'heure actuelle au même genre de déficit. Toutes les administrations postales qui ont connu la déréglementation de leur secteur ont enregistré des déficits de plusieurs milliards.

Je ne pense pas que Postes Canada va connaître un déficit de plusieurs milliards, mais cette société va certainement perdre au moins 180 millions de dollars par an, dont une partie est versée aux actionnaires — les contribuables canadiens. Comment allez-vous compenser ça?

Mme Moynihan : Je dirais simplement que les réexpéditeurs exercent leurs activités au Canada depuis 20 ans, et que pendant la plupart de ces années...

Le sénateur Ringuette : Illégalement.

Mme Moynihan : ... Postes Canada a été une entreprise rentable et, la plupart du temps, elle a versé un dividende au gouvernement. Nous pouvons uniquement évaluer la perte par rapport à la possibilité de perte qui peut être associée à l'adoption de cet amendement particulier. Comme je l'ai dit, Postes Canada estime que cette perte ne sera pas supérieure à 80 millions de dollars, soit environ 1 p. 100 de ses revenus. C'est un montant bien moindre.

Le sénateur Ringuette : À combien s'est élevé le dividende l'année dernière?

Mme Moynihan : Il n'y a pas eu de dividende en 2009.

Le sénateur Ringuette : Il était de 20 millions de dollars en 2008.

Mme Moynihan : Je peux vérifier encore une fois, mais c'était de cet ordre.

Le sénateur Ringuette : Pour ce qui est de la consultation dont vous avez parlé il y a un instant, vous avez mentionné l'existence d'un comité d'examen dont j'ai lu tous les documents. En ce qui a trait aux commentaires qu'a reçus le comité d'examen, j'ai examiné l'annexe et j'ai constaté qu'il en avait reçus de près de 1 000 sources différentes, et ce, par courrier ou lors de réunion avec les conseils municipaux et les intéressés; 75 p. 100 des personnes consultées ont déclaré être contre la déréglementation de Postes Canada. C'était en 2007.

Le sénateur Runciman : J'invoque le Règlement. Le sénateur Gerstein a soulevé dès le départ la question de la rotation, et le sénateur Ringuette pose des questions depuis plus de 10 minutes. Le comité compte 12 membres, et il y a d'autres membres qui aimeraient intervenir. Quelle règle appliquez-vous pour ce qui est de la rotation?

Le président : La règle qui s'applique est la suivante : si d'autres sénateurs souhaitent participer à la discussion, ils doivent me le faire savoir et le greffier prendra leurs noms en note. Je regarde les listes que j'ai devant moi. Je pars du principe que nous voulons examiner de façon détaillée et approfondie chacune des parties de ce projet de loi. J'ai trois noms sur la liste et je vais m'assurer que chacune de ces personnes ait amplement le temps de poser toutes les questions qu'elle souhaite poser.

Le sénateur Ringuette : Sénateur, je ne vais pas soulever la question stratégique et demander à ces représentants ministériels pourquoi le projet de loi a été présenté de façon distincte en 2007, pourquoi il a été présenté de façon distincte en 2009, mais que soudainement il se trouve à l'intérieur d'un projet de loi budgétaire sans qu'il y ait eu de consultation.

La consultation a été effectuée en 2007 par le comité d'examen.

Mme Moynihan : En 2008.

Le sénateur Ringuette : Soixante-quinze pour cent des personnes consultées étaient contre la déréglementation de Postes Canada. J'ai ici les résultats d'un sondage Ipsos Reid effectué en 2008.

Le président : Voulez-vous entamer une discussion maintenant, ou cherchez-vous toujours à obtenir des renseignements?

Le sénateur Ringuette : Le témoin a soulevé la question de la consultation.

Le président : J'essaierai d'adopter l'attitude la plus progressive possible pour interpréter cette question. Allez-y.

Le sénateur Ringuette : Merci.

Après le comité d'examen, un sondage Ipsos Reid a montré que 69 p. 100 des répondants étaient opposés à la déréglementation.

Le président : Avez-vous des commentaires sur ce point?

Mme Moynihan : Non.

Le sénateur Ringuette : Est-ce votre ministère qui a commandé ce sondage Ipsos Reid?

Mme Moynihan : Je ne le pense pas. Avons-nous commandé le sondage Ipsos Reid?

Mme Nakatsu : Non.

Mme Moynihan : Je ne le pense pas.

Le président : Puis-je inscrire votre nom pour le deuxième tour et vous donner le temps de reprendre votre souffle?

Le sénateur Ringuette : Oui.

Le sénateur Gerstein : Merci aux témoins. Je dois commencer par dire — je crois que c'était la semaine dernière ou celle d'avant — que le sénateur Ringuette, ici présente, a mentionné, avec beaucoup de passion si je puis le dire, le fait qu'elle connaissait bien Postes Canada parce qu'elle avait travaillé pour cette société. Je veux simplement dire que j'éprouve cette même fierté à l'égard de l'association que j'ai eue avec Postes Canada puisque j'ai été directeur au sein de cette société pendant un certain nombre d'années ainsi que président du comité de vérification.

Le sénateur Campbell : J'ai distribué le courrier une année pour Noël.

Le sénateur Gerstein : Je crois que nous tenons quelque chose. J'utilise beaucoup les services de Postes Canada; je veux que vous le sachiez.

J'aimerais que nous recommencions du début, parce que l'idée qui a été lancée au départ est que nous sommes en train de déréglementer Postes Canada d'une manière significative. En fait, cela concerne trois lignes — cela ne fait même pas une phrase dans le projet de loi. Vous allez devoir m'aider, parce que j'ai d'abord écouté ce que disait la présidente de Postes Canada, et il me paraît utile d'examiner ce qu'elle a dit, qui était que, d'une façon générale, elle était en faveur du libre marché :

Pour nous, il s'agit d'un risque de 40 à 80 millions de dollars du revenu [...]

Ce chiffre doit être comparé au montant de 180 millions de dollars qui a été mentionné il y a un instant, et je ne sais pas donc très bien comment les rapprocher. Nous avons un sénateur qui parle de 180 millions de dollars et la présidente et directrice générale de Postes Canada parle de 40 à 80 millions de dollars.

Elle poursuit en disant :

[...] d'un risque de 40 à 80 millions de dollars de revenu, sur un revenu total de 7,3 milliards de dollars. Nous allons nous battre vigoureusement pour conserver ces activités. Le fait d'ouvrir la porte à la concurrence ne signifie pas que Postes Canada soit hors jeu. Vous n'avez qu'à regarder ce que nous avons réussi à faire dans le domaine des colis. C'est le marché le plus férocement concurrentiel au pays, et nous ne sommes certainement pas hors jeu. Nous sommes là pour nous assurer de conserver notre part de marché...

Je ne vois pas là que Postes Canada ait décidé de renoncer à ce secteur. Je ne pense pas que les réexpéditeurs vont entraîner la faillite de Postes Canada, conséquence qui a été suggérée par un honorable collègue. Toutefois, je veux préciser que le projet de loi C-9 ne retire pas un privilège exclusif. Il ne s'applique qu'à un minuscule — et j'insiste sur le mot minuscule — segment du courrier. Ce n'est pas ce que l'on pourrait appeler la déréglementation massive de Postes Canada, mais je vous laisse commenter ce point. Il ne touche qu'une minuscule sous-section du courrier, et je suis convaincue que nous pouvons réussir à mener une concurrence vigoureuse pour la conserver. Des nombreux défis que doit relever Postes Canada, les entreprises de réexpédition sont bien loin d'occuper l'un des dix premiers rangs.

C'est ce qu'a dit la présidente. Pour sa part, Joe Volpe, le critique de Postes Canada, a déclaré dans le hansard :

[...] cet amendement à la Loi sur la Société canadienne des postes vise en fait à protéger les emplois des petites entreprises qui exercent leur activité en fonction des paramètres de ladite loi, tels que ceux-ci étaient interprétés jusqu'à il y a deux ans. C'est tout.

Passons à l'ancien chef du Parti libéral du Canada, qui a écrit ceci dans une lettre adressée au président du SCFP, le Syndicat canadien de la fonction publique :

[...] il est important de noter que les réexpéditeurs internationaux exercent leurs activités au Canada depuis plusieurs dizaines d'années. Le Parti libéral ne pense pas qu'il serait dans l'intérêt des Canadiens de nuire aux propriétaires de ces petites entreprises.

Je retiens un point essentiel; il s'agit avant tout de préserver et de créer des emplois au Canada. Mme Moynihan, quel est l'aspect que je ne comprends pas?

Le président : Ça ressemblait plutôt à un discours, d'après moi, mais voulez-vous répondre à cela?

Le sénateur Gerstein : C'était une question, monsieur le président.

Mme Moynihan : Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui soient mieux placés pour parler des répercussions du projet de loi sur Postes Canada que sa présidente.

Le président : Vous voulez peut-être corriger le compte rendu sur ce point. Le sénateur Gerstein a parlé de la présidente.

Mme Moynihan : Oui. La citation qu'a lue le sénateur correspond au compte rendu que j'ai lu. Je n'ai pas assisté à la réunion, mais c'est tout à fait conforme à ce que nous a dit Postes Canada. Cette société a l'intention de poursuivre ses activités dans ce domaine avec vigueur, comme elle le fait, je l'ai dit, depuis une vingtaine d'années.

Le président : Mme Greene n'est plus la présidente. Elle occupe un autre poste.

Mme Nakatsu : Elle sera en poste jusqu'à la mi-juillet.

Le sénateur Gerstein : Mme Greene était présidente et c'est ce qu'elle a dit.

Le président : Je ne m'y oppose pas. Je voulais simplement préciser cela pour le compte rendu.

Mme Moynihan : C'est la présidente-directrice générale sortante, et c'est ce qu'elle a dit devant ce comité à la fin du mois d'avril de cette année.

Le président : En fait, vous avez utilisé des chiffres identiques dans votre exposé — 40 à 80 millions de dollars par année sur un revenu total de 7,3 milliards de dollars.

Mme Moynihan : Je voulais fournir au comité nos estimations les plus récentes.

Le président : Nous avons obtenu les mêmes chiffres de Mme Greene il y a un mois et également de ce témoin.

Le sénateur Gerstein : Madame Moynihan, pensez-vous qu'il s'agit là de la déréglementation de Postes Canada? Est- il possible, d'après vous, de qualifier en ces termes la discussion que nous avons aujourd'hui?

Mme Moynihan : Je suis ici principalement pour expliquer l'effet qu'aura cette disposition sur le privilège exclusif dont bénéficie Postes Canada et les répercussions qu'aura cette décision.

Le sénateur Gerstein : Je le comprends et je vous en remercie.

Le sénateur Callbeck : Pour ce qui est du changement proposé dont nous parlons, pour répondre au sénateur Ringuette, vous dites qu'il y a des sociétés au Canada qui lèvent le courrier en vrac, le transportent à l'extérieur du Canada et l'envoient vers d'autres pays, mais pas vers le Canada. Comment pouvez-vous surveiller ça et être certaine que ce courrier ne revient pas au Canada?

Mme Moynihan : Il est clair que la disposition qui figure dans cet amendement précis qu'il serait illégal de renvoyer ce courrier au Canada. Je ne connais pas très bien les pratiques de Postes Canada en matière d'inspection, mais il est certain que la vérification aléatoire des adresses de réexpédition permettrait d'éviter ce genre de chose.

Le sénateur Callbeck : Vous n'êtes toutefois pas certaine à 100 p. 100 de la façon dont vous pourriez surveiller ça?

Mme Moynihan : Ce serait à Postes Canada de commenter ce point, parce que cela concerne l'aspect opérationnel. Nous avons participé à l'élaboration d'un projet de loi qui a pour but de rendre illégal ce genre de chose. On appelle souvent ce genre de réexpédition ABA. Le courrier va d'un pays A, disons le Canada, vers un deuxième pays où il est remis dans le courrier, puis il revient au Canada. Ce n'est pas autorisé par l'Union postale universelle, et ce n'est pas autorisé ailleurs dans le monde. Il est bien connu que cette façon de faire ne sera pas autorisée.

Le sénateur Callbeck : Pourriez-vous demander à Postes Canada comment elle procédera pour surveiller cet aspect, puis transmettre la réponse au greffier du comité?

Mme Moynihan : Je vais voir ce que je peux trouver comme information.

Le président : Nous allons entendre un groupe de témoins représentant les parties concernées un peu plus tard, lorsque nous aurons terminé d'entendre le côté du gouvernement.

Le sénateur Callbeck : Je viens de l'Île-du-Prince-Édouard, une province principalement rurale. Bien entendu, Postes Canada est tenue de distribuer le courrier dans des endroits où le secteur privé n'accepterait jamais de le faire. Postes Canada perdra bien sûr quelques revenus ici et je m'inquiète de l'effet qu'aura cette perte de revenus sur les services, en particulier ceux qui sont offerts dans les régions rurales du Canada.

Mme Moynihan : Je comprends votre préoccupation. Nous sommes sûrs, et Postes Canada l'est également, que cela n'aura aucune répercussion sur les services ruraux. Le gouvernement a publié le Protocole du service postal canadien en septembre 2009 qui mentionne clairement que le service postal rural fait partie intégrante de l'obligation postale universelle de Postes Canada au Canada et qui établit certaines normes précises en matière de prestation du service postal rural.

Comme je l'ai déjà dit, le risque de perte de revenus que prévoit Postes Canada représente 1 p. 100 de ses revenus. Par conséquent, on ne s'attend pas à ce que cela ait un effet sur le service offert dans les zones rurales. Tant que Postes Canada continue à être concurrentielle dans cette industrie et qu'elle cherche à exploiter d'autres marchés, elle sera en mesure d'assumer le coût de distribution du courrier dans l'ensemble du Canada, que ce soit à l'Île-du-Prince-Édouard ou ailleurs.

Le sénateur Callbeck : La question est de savoir où Postes Canada va obtenir ces fonds. Le nombre de lettres diminue et le prix de ce service est plafonné, est-ce exact?

Mme Moynihan : Non. Le plafond a été supprimé l'automne dernier, de sorte qu'à partir de janvier de cette année, il y a un barème de prix fixe qui a été établi pour cette année et les quatre prochaines. Les prix ne sont plus plafonnés. Il s'agit encore d'un prix réglementé et contrôlé par le gouverneur en conseil.

Le sénateur Callbeck : Quel est ce prix? À quoi correspond-il?

Mme Moynihan : Le prix plafond était le tarif de base des lettres; c'est essentiellement le prix de l'envoi au Canada d'une lettre standard, qui est aujourd'hui de 57 cents.

Le sénateur Callbeck : Peut-il être augmenté?

Mme Moynihan : Le prix plafond peut être augmenté par règlement adopté par Postes Canada, avec l'approbation du gouverneur en conseil. Le règlement qui est entré en vigueur en janvier de cette année, établit les tarifs pour 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014.

Le sénateur Callbeck : Est-il exact que le prix plafond ne peut être augmenté qu'avec l'approbation du gouverneur en conseil?

Mme Moynihan : Si Postes Canada prend un nouveau règlement et que le gouverneur en conseil l'approuve, alors il est possible de modifier le prix plafond. Nous prévoyons toutefois que ces prix ne changeront pas au cours des cinq prochaines années. Je crois que, lorsque ce changement a été effectué, la version antérieure de ce projet de loi, le projet de loi C-44, avait déjà été déposée à la Chambre. Par conséquent, cela a été envisagé.

Le sénateur Runciman : Au Canada, les activités de réexpédition ne sont pas un phénomène nouveau, je crois. Cela fait combien de temps que ces entreprises exercent leurs activités au Canada et font concurrence à Postes Canada, que ce projet de loi va sans doute légaliser à mon avis?

Mme Moynihan : Vingt ans environ.

Le sénateur Runciman : Avez-vous une idée du nombre de petites entreprises canadiennes qui font de la réexpédition? Existe-t-il une estimation de ce nombre?

Mme Moynihan : Il est assez difficile de connaître ce chiffre parce que le statut juridique de ce genre de travail soulève des questions. Cependant, d'après ce que dit la Canadian International Mail Association, cela représente des centaines de sociétés et des milliers d'emplois.

Le sénateur Runciman : Cela a également été mentionné devant un comité de la Chambre, c'est-à-dire que l'on risquait de perdre des milliers d'emplois si ce projet de loi n'était pas adopté. J'ai la citation de monsieur Barry Sikora, propriétaire d'une petite entreprise de la Colombie-Britannique, qui a témoigné devant le Comité des finances de la Chambre des communes, le mercredi 12 mai 2010. Il travaille dans le secteur du courrier international depuis plus de 30 ans, et emploie des gens depuis plus de 30 ans. Cela est tiré du compte rendu du comité de la Chambre. M. Sikora a déclaré :

[...] notre entreprise employait 31 personnes. Nous ne sommes pas une grande entreprise — dans l'industrie de l'impression, nous sommes une entreprise de taille moyenne. À présent, en raison de la conjoncture [...]

Il faisait référence à la contestation judiciaire. Il poursuit :

[...] notre nombre d'employés a été réduit à 17. Nous avons perdu bon nombre de nos clients... ceux-ci se sont tournés ... vers des entreprises étrangères. Cela a contraint notre industrie à mettre à pied des employés de longue date, chose peu agréable à faire.

Son entreprise avait déjà perdu une bonne partie de son chiffre d'affaires. Il espérait que les activités reprendraient, mais il craignait que si la Loi sur l'emploi et la croissance économique n'était pas adoptée, il devrait complètement cesser ses activités.

Si vous écoutez le sénateur Ringuette, vous pourriez croire que le Parti libéral du Canada s'oppose à cette initiative, mais le sénateur Gerstein a cité Stéphane Dion et Joe Volpe, ainsi que John McKay, Mario Silva, Borys Wrzesnewskyj et Marlene Jennings, qui ont rédigé un document l'an dernier pour demander que le projet de loi C-14 soit déposé de nouveau, pour faire ce dont vous parlez ce soir, en disant ceci : « Si rien ne se fait à la Chambre des communes au sujet de la présentation d'un projet de loi sur cette question, il est très probable que le tribunal n'accordera pas un autre sursis, ce qui serait dévastateur pour le secteur du courrier international. Ce secteur risque de subir un préjudice grave, voire de disparaître, à moins qu'un nouveau projet de loi C-14 ou son équivalent soit déposé et rapidement adopté. À cette époque de ralentissement économique, il est particulièrement impératif que le gouvernement canadien agisse rapidement pour protéger les emplois canadiens. La présentation du projet de loi C-14 aurait pour effet direct de protéger des milliers d'emplois dans le secteur de la réexpédition internationale ».

C'est essentiellement l'effet de cette disposition. Elle reprend, apparemment intégralement, la disposition législative qui a déjà été présentée à la Chambre. Vous avez admis ce soir, à mon avis, que si ce projet de loi n'est pas adopté, des milliers d'emplois pourraient être menacés.

Mme Moynihan : Si ce projet de loi n'est pas adopté, j'estime que le sursis qui va expirer le 31 décembre de cette année ne sera probablement pas prolongé et qu'il y aura certainement des sociétés qui mettent un terme à leurs activités.

Le président : Merci, sénateur Runciman. Le prochain sur ma liste est le sénateur Finley, dont la division sénatoriale est Ontario-Côte Sud.

Le sénateur Finley : Je ne comprends pas grand-chose au secteur de la réexpédition, mais d'après ce que j'ai entendu, il englobe plusieurs composantes. L'un est un système de distribution du courrier, et l'autre est le volet impression.

Savez-vous comment se répartissent les employés entre ces deux activités ou y en a-t-il d'autres? Sur le plan des opérations, s'agit-il des deux principaux domaines?

Mme Moynihan : J'aimerais pouvoir vous donner plus de renseignements à ce sujet. Comme je l'ai dit, nous avons eu de la difficulté à obtenir des chiffres.

La Canadian International Mail Association a annexé au mémoire qu'elle a présenté au comité d'examen indépendant une étude qu'elle avait déjà produite pour Transports Canada qui portait sur la taille de cette industrie en Colombie-Britannique uniquement. Ce document contient de nombreux avertissements qui portent sur la difficulté que l'association a rencontrée, comme elle fait partie de l'industrie, à obtenir des chiffres sûrs de la part des autres participants qui s'inquiétaient des répercussions possibles, compte tenu des questions juridiques que soulevait le statut de l'industrie.

Le sénateur Finley : Avez-vous eu connaissance des documents de planification stratégique et des plans d'activités de Postes Canada?

Mme Moynihan : Nous participons à l'élaboration de leurs plans d'entreprise et de leurs rapports annuels.

Le sénateur Finley : Quelles sont les prévisions de Postes Canada au sujet de la part de marché du détail et combien représente pour cette société la part de marché qu'elle conserverait?

Mme Moynihan : Je ne sais pas combien représente la part qu'elle conserverait. Le chiffre que nous avons sur ce point est celui qu'a donné le sénateur Gerstein, mais les pertes pourraient être plus importantes.

Le sénateur Finley : Il est possible que Postes Canada prévoie conserver de 40 à 80 millions de dollars, mais si les autres entreprises de réexpédition et Postes Canada s'y prenaient vraiment mal, elles pourraient perdre tout ça.

Si Postes Canada conserve tous les revenus qu'elle prévoit conserver, soit de 40 à 80 millions de dollars, si elle échoue au point de perdre de 40 à 80 millions de dollars contre rien, comme le pense le sénateur Ringuette — n'est-ce pas ce dont nous parlons en ce qui a trait à son plan d'activités?

Mme Moynihan : À l'heure actuelle, une certaine partie du secteur de la réexpédition est entre les mains d'entreprises privées et non pas de Postes Canada. L'adoption du projet de loi va probablement entraîner une croissance de l'industrie privée — c'est-à-dire une augmentation du nombre d'entreprises et d'emplois. M. Sikora pourra réembaucher certains de ses employés. Si cela se produit, Postes Canada pourrait perdre un autre montant de 40 à 80 millions de dollars.

Le sénateur Finley : De revenus?

Mme Moynihan : Oui, une perte de revenus. Si le projet de loi n'est pas adopté et que la loi demeure inchangée, il pourrait y avoir d'autres pertes d'emplois, comme M. Sikora l'a mentionné dans le témoignage qu'il a livré au comité de la Chambre. Nous ne sommes toutefois pas en mesure de dire avec certitude que l'ensemble ou même une grande partie de ces activités commerciales, et donc de ces emplois, reviendraient à Postes Canada, parce que nous nous attendons à ce qu'une bonne partie de ces activités soient exercées outre-mer, notamment les activités qui s'exercent actuellement de l'autre côté de la frontière et par l'entremise de USPS, United States Postal Service. S'il n'est pas légal de faire imprimer ces documents à Vancouver, alors ils seront imprimés à Seattle et ils seront remis au USPS à partir de cette ville et personne ne posera de questions.

Cela dit, le United States Postal Service accepterait très bien que ces documents soient imprimés à Washington, expédiés à Vancouver et remis à Postes Canada.

Le sénateur Finley : Savez-vous quel est le nombre de ressources, d'actifs et de personnes — il serait peut-être préférable de poser cette question à Postes Canada — que représente ce secteur de leurs activités que l'on appelle la réexpédition?

Mme Moynihan : Cela ferait partie de leur traitement global du courrier. Ils ont des installations dans toutes les régions du pays qui reçoivent le courrier international. Ce peut être les cartes de Noël que j'envoie à ma tante Nora; dans d'autres cas, ce peut être un courrier en vrac important provenant d'une société canadienne. Ces envois empruntent le système de courrier normal, de sorte qu'il s'agit des mêmes circuits de distribution, des mêmes installations et que ce sont les mêmes travailleurs qui s'occupent de votre facture de téléphone qui traitent le courrier en vrac que traite Postes Canada.

Le sénateur Finley : Vous devez avoir une certaine idée — et je pense que ces sociétés le savent — des niveaux de sensibilité et d'élasticité des différentes composantes de ce secteur, d'où elles proviennent et des montants que ces sociétés sont prêtes à y consacrer sur le plan des ressources. Si ces activités ne sont pas rentables pour ces entreprises, elles vont y mettre un terme. C'est une réaction assez habituelle de la part des sociétés.

Mme Moynihan : Vous avez tout à fait raison, sénateur. Postes Canada connaît très bien sa clientèle qui est à l'origine de ce courrier en vrac international. Elle connaît très bien ces clients. Cependant, étant donné que le courrier international représente une petite partie du courrier que traite Postes Canada, je préférerais que ce soit Postes Canada qui vous en parle. La sensibilité n'est peut-être pas aussi grande qu'on pourrait le prévoir dans une autre industrie, parce que cela représente un faible pourcentage du volume de courrier et que ce courrier est traité dans l'ensemble du pays.

Le sénateur Finley : Je pense que la présidente-directrice générale sortante de Postes Canada connaît bien tous ces plans et sensibilités. On s'attend à ce qu'elle sache de quoi elle parle. Elle possède une certaine expertise qu'aucune des personnes assises autour de cette table ne possède.

Mme Moynihan : Peut-être, oui.

Le sénateur Finley : Je tiens à vous remercier. Mon courrier arrive à temps et je suis content de voir que Postes Canada s'est rétablie après le processus embarrassant qu'elle a connu pendant le scandale des commandites.

Le président : Merci, sénateur Finley. Vous avez posé de bonnes questions. J'ai apprécié la brièveté de vos questions.

Le sénateur Banks : Je suis un intrus dans ce comité et je n'avais pas l'intention de poser des questions à ce sujet, mais je me suis intéressé très jeune à l'UPU. J'avais une collection de timbres quand j'étais enfant, c'est comme ça que j'ai beaucoup appris sur l'UPU. L'affranchissement universel d'un penny, lorsque cela a été proposé pour la première fois en Angleterre, reposait sur l'idée que les zones denses subventionneraient les zones moins denses et que cela permettrait, par conséquent, d'avoir un affranchissement universel d'un penny.

Pour éviter tout malentendu, je dois vous dire que je suis complètement opposé à cette disposition du projet de loi. Je remercie le sénateur Runciman d'avoir fait remarquer qu'il arrive que les sénateurs libéraux aient une opinion personnelle.

Ai-je bien compris que vous avez dit, madame Moynihan, que si j'étais un imprimeur de Vancouver, je ne pourrais pas imprimer quelque chose, disons une brochure, et l'exporter aux États-Unis? Je peux le faire, n'est-ce pas? J'ai des amis qui le font et je me demande s'ils violent la loi.

Mme Moynihan : Les tribunaux ont déclaré que cela n'était pas légal selon la Loi sur la Société canadienne des postes en vigueur.

Le sénateur Banks : Je veux être très précis dans ce que je vous demande. Si j'étais un imprimeur de Vancouver, je ne pourrais pas imprimer une brochure qui m'a été commandée par une entreprise de Seattle, pour prendre votre exemple, et exporter ensuite cette brochure à Seattle, est-ce bien cela?

Mme Moynihan : Pour le courrier...

Le sénateur Banks : Non, il s'agit d'imprimer une brochure.

Mme Moynihan : Honnêtement, je ne peux pas vous parler de marchandises.

Le sénateur Banks : Je ne peux pas imprimer un timbre-poste des États-Unis sur cette brochure, mais je peux imprimer la brochure et l'exporter, je crois. C'est ce que fait mon ami. La différence vient donc du fait qu'un avis de port payé aux États-Unis est imprimé sur cette brochure.

Mme Nakatsu : Non, il y a également comme différence le fait que ces brochures sont remises dans le système postal sans qu'aucune autre opération soit effectuée aux États-Unis. Si l'imprimeur au Canada ne fait que livrer ces brochures à un bureau aux États-Unis, qui va ensuite les distribuer à l'intérieur de ce bureau, c'est très bien. Cependant, si ce bureau se contente de placer un tampon avec ses propres machines, pour ensuite envoyer les brochures par la poste, alors cela serait considéré comme une réexpédition et serait illégal.

Le sénateur Banks : J'ai beaucoup d'amis qui violent la loi, tout comme les réexpéditeurs le font depuis 20 ans.

Mme Nakatsu : Oui.

Le sénateur Banks : Si nous disions que nous pourrions conserver de nombreux emplois en légalisant le commerce qui est à l'heure actuelle illégal, par exemple celui des cigarettes dans la région des Grands Lacs, cela préserverait beaucoup d'emplois. C'est toutefois une activité illégale et nous poursuivons ces personnes.

J'ai compris que vous avez dit que l'année dernière, Postes Canada n'avait pas versé de dividende, mais qu'en 2008, le dividende s'élevait à près de 20 millions de dollars. Est-ce exact? Dans le meilleur des cas, si, d'après la présidente de Postes Canada, la société perd 40 millions de dollars en revenus à cause de la légalisation des activités des réexpéditeurs, est-ce que cela n'éviterait pas d'avoir à verser un dividende?

Mme Moynihan : Tout dépend de ce qui arrive aux autres revenus. Postes Canada a fait savoir qu'elle examinerait d'autres possibilités de revenus.

Le sénateur Banks : En 2008, si cette disposition avait été adoptée et qu'elle avait entraîné une réduction de 40 millions de dollars des revenus, il est possible de penser que cela aurait eu un effet sur le dividende versé.

Mme Moynihan : Oui. Cela ne l'aurait pas ramené à zéro, mais cela aurait eu un effet si cela n'avait pas été compensé ailleurs.

Le sénateur Banks : Les Canadiens se sont habitués à l'idée d'associer une certaine intégrité à que ce qu'on appelait la Poste royale. Si nous adoptons cette modification à la loi, est-ce que les personnes qui fournissent ces services de réexpédition vont être visées par une réglementation, ou seront-elles libres de faire ce qu'elles veulent — si elles ne peuvent retourner le courrier ni le distribuer, elles ne peuvent pas le faire? Existe-t-il un règlement qui s'appliquerait à celles-ci qui serait adapté à cette légalisation?

Ils seront reconnus légalement et feront concurrence à Postes Canada. La société est assujettie à une réglementation et à des contraintes juridiques. Est-ce qu'une réglementation semblable sera imposée en conséquence aux entreprises de repostage?

Mme Moynihan : Cet amendement n'établit aucune réglementation de ce genre. Leur situation sera essentiellement la même que celle des entreprises de messagerie. Nous n'avons pas réglementé l'industrie des services de messagerie au Canada. Les clients font leur choix en fonction de ce qu'ils savent sur les entreprises avec lesquelles ils font affaire. Postes Canada a su tirer son épingle du jeu et faire concurrence à ces marchés.

Le sénateur Ringuette : Le sénateur Gerstein a rapporté les propos tenus par la présidente-directrice générale de Postes Canada devant ce comité, à la fin d'avril je crois. C'était Moya Greene et vous avez mentionné qu'elle est l'ex- PDG.

Mme Moynihan : La PDG sortante.

Le sénateur Ringuette : Où s'en va Mme Greene?

Mme Moynihan : Il me semble qu'elle a été nommée PDG de Royal Mail au Royaume-Uni.

Le sénateur Ringuette : La société Royal Mail n'est-elle pas partenaire d'une entreprise de repostage canadienne?

Mme Moynihan : Oui, je crois.

Le sénateur Ringuette : Selon les résultats de votre consultation, combien d'emplois seront perdus à Postes Canada?

Mme Moynihan : Aucun. Nous ne prévoyons aucune perte d'emploi à Postes Canada. Comme beaucoup d'entre vous le savent, la grande majorité des employés de Postes Canada sont syndiqués et leur convention collective comporte de solides dispositions sur la sécurité d'emploi. C'est également une vaste société, qui peut facilement replacer les employés dont les postes pourraient être abolis en raison de la réduction des activités dans leur domaine. C'est pourquoi nous ne prévoyons aucune perte d'emploi à Postes Canada.

Le sénateur Ringuette : Les emplois laissés vacants en raison des départs naturels, pour la plupart, ne seront pas comblés par de nouveaux employés.

Mme Moynihan : Les départs naturels nous aideront certainement. Il y aura de plus en plus de départs à la retraite au cours des prochaines années. Cependant, la société est très vaste et les postes sont nombreux. En raison des dispositions relatives à la sécurité d'emploi dans la convention collective, la procédure est assez complexe; si un poste n'est plus nécessaire, on entame une procédure pour s'assurer que l'employé obtiendra un poste en priorité dans sa région.

Le sénateur Ringuette : Chaque année, 200 000 nouveaux destinataires s'ajoutent à la liste de distribution du courrier de Postes Canada. Dans son dernier rapport, la société a analysé les méthodes de livraison — porte-à-porte, livraison centralisée, boîtes multiples, et cetera — et il lui en coûte en moyenne 156 $ de plus par nouveau destinataire, par année. Cela fait 156 $ multipliés par 200 000; comment payerez-vous ce montant si vous privez la société de certains revenus?

Mme Moynihan : Je crois toujours que ce sont deux dossiers distincts. Postes Canada a une vision globale de son plan d'activités. La société a fait ses estimations et je suis convaincue qu'elle connaît bien ses activités et ses possibilités. Elle a toujours été très engagée, y compris au cours des dernières semaines, dans la poursuite de nouvelles activités visant à générer des revenus.

Selon la Loi sur la Société canadienne des postes, la société a le mandat — et cet amendement n'y changera rien — d'assurer la prestation de services universels et de le faire de façon à s'autofinancer. Elle a su démontrer sa capacité à le faire pendant plus de 10 ans.

Le sénateur Ringuette : Dans vos consultations avec les entreprises de repostage — les imprimeurs dont vous avez parlé tout à l'heure —, combien d'entre elles ont mentionné qu'elles empiétaient déjà sur le privilège exclusif à Postes Canada de transmettre le courrier à l'échelle nationale, sans parler de son privilège exclusif d'expédition à l'étranger, qu'elles se sont approprié progressivement au cours des 20 dernières années?

Mme Nakatsu : Toutes nos consultations ont été menées auprès de l'association et non auprès d'imprimeurs en particulier. L'association a fait appel à certains imprimeurs à l'occasion, et ils ont tous déclaré très clairement qu'ils ne toucheraient pas au privilège exclusif de Postes Canada au pays; ils ont tous admis qu'il appartenait à Postes Canada et qu'ils ne lui enlèveraient pas.

Le sénateur Ringuette : Avez-vous consulté Postes Canada à ce sujet?

Mme Nakatsu : Oui.

Le sénateur Ringuette : Quelle a été sa réponse?

Mme Nakatsu : Elle est du même avis : si elle prend quiconque à violer ce privilège, elle intentera des poursuites.

Le sénateur Ringuette : Exactement.

Je crois qu'il y a notamment eu deux poursuites en lien avec ça.

Mme Moynihan, il y a quelques minutes, vous avez mentionné au sujet des retours, qu'il y a des dispositions dans la loi qui les interdisent. Pourriez-vous donner des précisions?

Mme Moynihan : Je vais revenir à l'amendement étudié par ce comité. Le privilège exclusif ne s'appliquerait pas aux lettres à livrer à un destinataire à l'étranger. Mais il continuerait de s'appliquer à toutes les lettres à livrer à un destinataire au Canada.

Le sénateur Ringuette : Cela n'a rien à voir avec les retours.

Mme Moynihan : J'ai peut-être mal compris quand vous avez fait référence à mes propos de tout à l'heure.

Le sénateur Ringuette : Vous avez parlé des retours. Nous avons abordé ce sujet parce que les entreprises de repostage ont l'habitude d'utiliser une enveloppe avec une adresse de retour au Canada. Comment géreront-elles le courrier non livrable qui est retourné au Canada?

Mme Moynihan : Je crois que ma remarque de tout à l'heure portait sur le fait que cette disposition ne permettrait pas le repostage de type ABA, c'est-à-dire l'envoi de courrier à l'étranger pour qu'il soit ensuite retourné au Canada.

Le sénateur Ringuette : Ça revient à la question que je vous ai posée tout à l'heure; il y a déjà violation du privilège exclusif au Canada. Ce sera probablement l'objet de vos prochaines pressions politiques.

Je veux tout de même revenir sur les retours. Si vous n'imposez pas à ces entreprises de repostage la responsabilité des coûts du courrier non livrable qui sera retourné à Postes Canada, ce sont tous les contribuables canadiens qui devront assumer ces coûts, parce que ce sont les actionnaires de Postes Canada.

Il y a actuellement trois entreprises de repostage au Canada, et aucune n'a été fondée ni n'est administrée au Canada. Ce sont Dutch post, Royal Mail et SingPost. Les groupes de pression opposés à Postes Canada ont été très forts.

Le président : Sénateur Ringuette, avez-vous terminé?

Le sénateur Ringuette : Je tiens à redire que, malgré cela, la loi est incomplète parce qu'elle ne contient aucune disposition sur l'accréditation ni sur le coût des retours pour ces entreprises de repostage. Les contribuables devront payer la note.

Le président : Nous nous lançons dans un débat.

Le sénateur Ringuette : Je sais. C'est pourquoi j'ai dit que je ne devrais pas dire « vous ».

Le président : Aimeriez-vous répondre quelque chose à cela? Je vous invite à le faire, si vous le souhaitez.

Mme Moynihan : Non, ça va.

Le président : Je voudrais vous remercier, madame Moynihan, ainsi que vous, madame Nakatsu, de votre présence et de votre contribution à notre étude de la partie 15 du projet de loi C-9. Merci beaucoup.

Nous reprenons les travaux et nous nous attaquons à la partie 20, sur l'évaluation environnementale, qui se trouve à la page 704 du projet de loi C-9. J'aimerais accueillir deux représentants de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, John D. Smith, directeur, Affaires législatives et réglementaires, ainsi que Steve Mongrain, conseiller principal en politiques.

M. Smith fera un bref tour d'horizon. Il serait préférable que vous nous indiquiez le plus possible à quelles dispositions du projet de loi vous faites référence; cela nous aidera beaucoup à mieux comprendre les objectifs visés par les diverses dispositions.

John D. Smith, directeur, Affaires législatives et réglementaires, Agence canadienne d'évaluation environnementale : Je suis heureux d'être ici ce soir. Je crois que vous avez en main une courte présentation que nous avons préparée. L'objectif principal de cette présentation est de vous fournir un exposé sommaire des changements proposés dans le projet de loi C-9.

Si vous me permettez, les deux premières pages de la présentation, après la page de titre, vous expliquent brièvement en quoi consiste le processus fédéral d'évaluation environnementale, afin de replacer les changements dans leur contexte.

Permettez-moi de commencer par cette section.

La page 2 indique que le processus d'évaluation environnementale, en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, est ce qu'on appelle un processus d'autoévaluation. Selon ce processus, les autorités fédérales, soit les divers ministères, organismes, conseils, et cetera, doivent réaliser une évaluation environnementale des projets qu'elles autorisent et prendre certaines décisions concernant ces projets. Les types de décisions sont énumérés. Si un ministère est promoteur d'un projet, s'il le finance ou en administre les terres ou encore s'il doit en approuver certains éléments, il doit effectuer une évaluation environnementale du projet. J'aimerais faire remarquer que ce processus se distingue de ceux mis en place par les gouvernements provinciaux, selon lesquels une seule entité est responsable de l'évaluation environnementale. Au niveau fédéral, cette responsabilité est répartie à l'ensemble du gouvernement.

Une autre caractéristique du système, c'est que tous les projets nécessitent une évaluation environnementale, sauf s'ils font l'objet d'une exclusion; par conséquent, la notion d'exclusion est fondamentale à notre système et s'avère importante pour son fonctionnement.

Quatre types d'évaluations environnementales sont énoncés au bas de la diapositive. Le premier est l'examen préalable. Cette expression n'est pas tout à fait appropriée. Il s'agit d'une véritable évaluation environnementale. Ce type d'évaluation ne s'apparente en rien à un triage. Ces évaluations représentent plus de 99 p. 100 des évaluations qui sont faites. Des études approfondies sont réalisées à l'égard de projets plus importants, comme les mines ou les gazoducs. En règle générale, quelque 30 à 35 études sont réalisées de front. Les commissions d'examen sont des commissions indépendantes nommées par le gouvernement pour procéder à l'évaluation environnementale des projets les plus importants et les plus controversés. Le quatrième type, à savoir la médiation, est un processus prévu par la loi, mais qui n'a jamais été appliqué.

Comme vous pourrez le voir sur cette prochaine diapositive, compte tenu de ce système, environ 50 autorités fédérales réalisent autour de 6 000 évaluations environnementales chaque année. Parmi celles-ci figurent de nombreux petits projets dont les effets sont peu importants. Pour les grands projets, nous constatons qu'il arrive souvent que plusieurs ministères soient responsables d'une même évaluation environnementale. Par exemple, un projet minier peut nécessiter l'obtention de permis auprès du ministère des Pêches et des Océans, MPO, de Transports Canada et de Ressources naturelles Canada, RNCan. En vertu de ce régime, ils sont tous individuellement responsables de réaliser une évaluation environnementale du projet, de décider du moment auquel entreprendre l'évaluation, de déterminer ce qu'il convient d'examiner et ainsi de suite.

En partie pour cette raison, le processus fédéral connaît souvent des retards, qui finissent par donner lieu à un recoupement des processus provinciaux, souvent amorcés plus tôt. Par exemple, on met parfois jusqu'à six mois pour décider si une évaluation environnementale est nécessaire et déterminer quel type d'évaluation environnementale il convient de mener du côté fédéral. Entre-temps, la province a entrepris sa démarche et abattu du travail; il lui arrive parfois de terminer avant même que le processus fédéral ne soit amorcé. Lorsque le gouvernement fédéral s'y met enfin, il refait une partie du travail déjà accompli par la province.

Trois principaux articles retiennent notre attention pour ce qui est des amendements proposés dans le projet de loi C-9. Il s'agit d'amendements qui visent notre loi en particulier.

Le premier amendement, prévu à l'article 2153 et à l'annexe 3, traite des exclusions pour les projets d'infrastructure. L'article 2153 se trouve à la page 705, et le renvoi à l'annexe 3 figure à l'article 2161, à la page 710. Enfin, l'annexe en question débute à la page 877.

J'ai dit que les exclusions n'étaient pas rares. Les exclusions existent depuis l'entrée en vigueur de la loi. En fait, elles sont nécessaires pour nous éviter d'avoir à réaliser des évaluations environnementales pour la plupart des petits projets courants. L'an dernier, des exclusions temporaires ont été prévues par règlement afin d'exclure quelque 14 ou 15 catégories de projets d'infrastructure financés en vertu d'un certain nombre de programmes fédéraux. Ces exclusions étaient prévues dans une disposition de réexamen dont la date butoir est fixée en mars 2011; toutefois, les amendements proposés dans le projet de loi C-9 feraient en sorte de rendre ces exclusions permanentes, en éliminant la disposition de réexamen.

En outre, de nouveaux pouvoirs seraient conférés au ministre de l'Environnement afin de lui permettre d'exiger qu'un projet exclu fasse l'objet d'une évaluation environnementale s'il estime que des problèmes environnementaux imprévus le justifient. La loi actuelle ne prévoit aucune disposition du genre qui permette au ministre d'exiger que des projets autrement exclus soient soumis à une évaluation environnementale.

Le président : Où se trouve cet amendement? Est-ce à l'article 2161?

M. Smith : À la page 707. Il s'agit du paragraphe 7.1(3) de l'article 2153.

Le prochain amendement proposé traite de la détermination de la portée. Il s'agit d'un processus mené dès les premières étapes de l'évaluation environnementale, qui renvoie aux décisions qui établissent les limites d'une évaluation environnementale. En d'autres mots, il s'agit de déterminer sur quoi portera précisément l'évaluation. Les décisions liées à la détermination de la portée sont rattachées aux éléments visés par l'évaluation. Il ne s'agit pas de décider s'il y aura ou non une évaluation. L'amendement proposé ferait en sorte de conférer au ministre de l'Environnement le pouvoir d'établir la portée d'un projet, et ce pouvoir comprend celui de soumettre à l'évaluation seulement certaines composantes du projet. Ces pouvoirs ne vont pas jusqu'à permettre au ministre de soustraire complètement un projet à l'évaluation. Cette décision est assujettie à des conditions établies et rendues publiques par le ministre. Si j'ai oublié de le dire, cet amendement est prévu à l'article 2155.

Enfin, la dernière diapositive traite des amendements proposés au processus d'étude approfondie. Comme je l'ai dit, le processus d'étude approfondie s'applique aux grands projets. C'est un processus qui cause souvent des retards, parce que de nombreux ministères y participent. Il y a un processus en deux étapes, dont la première consiste à déterminer le type d'évaluation environnementale à réaliser. Les amendements traiteraient de cette question de deux façons. Je dois vous dire qu'on parle ici des articles 2152, 2154 et 2156 à 2160. Lorsque j'aurai terminé de décrire cette diapositive, je peux vous expliquer en détail ces amendements, si vous voulez.

La principale modification ferait en sorte de conférer à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale la responsabilité de réaliser ces études approfondies. À titre d'exemple, on cite ici les grands barrages hydroélectriques, les mines de métaux et les projets d'exploitation de sables bitumineux. L'agence ne serait pas responsable des projets réglementés par la Commission canadienne de sûreté nucléaire, la CCSN, ou par l'Office national de l'énergie, l'ONE. La loi oblige déjà chacun de ces organismes à réaliser des évaluations environnementales; les amendements prévus au projet de loi C-9 ne leur accorderaient aucun nouveau pouvoir. En fait, les amendements confèrent de nouveaux pouvoirs à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale. Ce serait la première fois que la loi désignerait l'agence en tant qu'autorité directement responsable de la réalisation des évaluations environnementales.

Je devrais préciser que les documents budgétaires — non pas le projet de loi d'exécution du budget mais les documents eux-mêmes — renvoient à la question de la délégation des évaluations environnementales. Je pense que cette situation a engendré une certaine confusion. La phraséologie n'est peut-être pas claire. Il n'était pas question de modifications à la loi, mais plutôt de recours aux autorités existantes pour mettre à profit le processus public d'audience de l'ONE et de la CCSN. Nous pouvons approfondir cette question si vous voulez.

Les modifications budgétaires qui font en sorte de conférer à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale la responsabilité des études approfondies exigent que ce processus soit amorcé plus tôt à l'étape de planification d'un projet. Ceci permettra grandement de renforcer la coordination et la collaboration avec les autorités provinciales responsables des évaluations. Les amendements continuent de prévoir des possibilités de participation du public au processus, mais elles font en sorte d'éliminer ce qu'on appelle l'étape de la décision sur la voie à suivre, c'est-à-dire le processus auquel nous aurions recours pour déterminer quel type d'évaluation environnementale il convient d'effectuer.

Comme je l'ai dit, lorsqu'on traite d'amendements à des lois existantes, il n'est pas toujours facile de toutes les distinguer. Si vous voulez, je peux vous expliquer les articles en question.

Le président : Je pense que cette information serait utile. Vous avez parlé ici de plusieurs choses, et il serait utile de comprendre comment tout cela est établi.

Pendant que vous y êtes, lorsqu'on parle à la page 708 du pouvoir du ministre de fixer la portée des projets en limitant l'évaluation à un ou à plusieurs éléments du projet, est-ce que l'expression « éléments du projet » est définie au sens de la loi?

M. Smith : Non, mais du point de vue de l'ensemble du projet, le ministre pourrait décider que l'évaluation ne devrait s'en tenir qu'à certains aspects du projet plutôt qu'à l'ensemble.

Le président : Est-ce que l'expression « certains aspects » et le mot « éléments » sont synonymes?

M. Smith : Le terme « éléments » n'est pas défini dans la loi.

Le président : Voilà le genre de question qui nous intéresse. Je crois que cette question soulèvera des litiges à un moment ou un autre du processus. Certaines personnes pourraient vouloir définir ce terme.

M. Smith : Peut-être. Si vous voulez, je peux vous expliquer très brièvement ces choses, article par article, et vous indiquer où les trouver.

Le président : Merci. Cela peut se faire rapidement et serait très utile.

M. Smith : À l'article 2152, on trouve les définitions modifiées des termes « étude approfondie » et « liste d'étude approfondie ». Cet article a pour but d'harmoniser ces définitions avec les amendements apportés ailleurs. Comme je l'ai dit, l'article 2153 est celui qui traite des exclusions pour les projets d'infrastructure. Les définitions introduisent dans la loi certains des termes déjà définis dans la réglementation.

Le paragraphe 7.1(2) du projet de loi énonce les programmes précis en vertu desquels les projets d'infrastructure bénéficient de financement; les exclusions ne s'appliquent qu'aux projets dont le financement provient de ces programmes. Le paragraphe 7.1(3) du projet de loi est celui dont j'ai parlé et qui confère au ministre le pouvoir de soumettre un projet à l'évaluation même s'il apparaît sur la liste d'exclusion.

L'article 2154 porte sur le processus des études approfondies. Cet article habilite l'Agence canadienne d'évaluation environnementale à procéder aux études approfondies, en lui conférant les attributions des ministères qui seraient autrement responsables de ces études. Vers le milieu de cet article, on indique que si un projet doit faire l'objet d'une évaluation environnementale, l'agence commence cette évaluation; c'est en vertu de cette disposition que nous amorçons rapidement le processus.

L'article 2155 concerne la portée; nous en parlions il y a quelques instants. L'article 2156 est le premier d'une série d'articles qui portent sur les études approfondies. Il modifie les articles 21 et 21.2 de la loi, en remplaçant le processus de décision sur la voie à suivre — qui faisait parfois en sorte qu'il fallait des mois pour déterminer le type d'évaluation approprié — par l'exigence pure et simple de procéder à une étude approfondie et de produire un rapport. Ainsi, cette modification vise essentiellement ce qui est actuellement prévu dans la loi, mais qui n'est pas répété ici.

Le président : L'étude approfondie remplace l'étape de la décision sur la voie à suivre, comme vous l'avez indiqué, mais ce n'est pas une étude environnementale, n'est-ce pas?

M. Smith : En fait, l'étude approfondie est un type d'évaluation environnementale. Le processus de décision sur la voie à suivre a été mis en place par amendement de la loi, en 2003. Son objectif était d'éviter qu'on se retrouve dans des situations où des projets auraient fait l'objet d'une étude approfondie, où ce processus aurait été mené à terme, et où le dossier aurait ensuite été renvoyé à une commission d'examen, qui aurait recommencé l'évaluation. Cette éventualité inquiétait les promoteurs, et avec raison. Mais en réalité, cela ne s'est jamais produit.

L'objectif du processus de décision sur la voie à suivre était que le ministre de l'Environnement décide dès le départ, en s'appuyant sur des consultations et sur les recommandations du ministère responsable, si un projet devait faire l'objet d'une étude approfondie, ou si on le soumettrait à l'examen d'une commission. Cette décision était définitive, et elle devait donc constituer une garantie.

Malheureusement, cela a donné lieu aux longs délais dont j'ai parlé. Cela peut prendre de 12 à 16 mois pour exécuter tout ce processus, et quand on l'a achevé, l'évaluation environnementale n'est pas encore commencée. On a simplement déterminé de quelle manière on procéderait.

J'ai souvent répété que nous avons créé un problème réel pour régler un problème éventuel. Une partie des amendements proposés vise donc à nous débarrasser de ce processus de décision, qui ne s'est pas révélé utile et qui a occasionné des délais.

Le président : Les différents types d'évaluation environnementale sont énumérés à la page 2 de votre diaporama. Selon le projet de loi, est-ce que les examens préalables, la médiation et les examens par une commission seraient abolis?

M. Smith : Non. Aucun de ces types d'évaluation ne serait modifié. Le processus de décision sur la voie à suivre s'inscrivait dans le cadre de l'étude approfondie, et son objectif était de déterminer rapidement s'il convenait de poursuivre l'étude approfondie ou de renvoyer le dossier à une commission d'examen. Tous les types d'évaluation environnementale resteraient en place. Le changement ne toucherait qu'une étape du processus d'étude approfondie.

Steve Mongrain, conseiller principal en politiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale : J'aimerais ajouter quelques mots sur cette question. Le processus d'étude approfondie vise exclusivement les projets d'envergure, les projets à grande échelle. Le ministre de l'Environnement doit déterminer si ces projets sont susceptibles d'avoir des impacts négatifs considérables. Il y a une liste; c'est dans la réglementation. Des consultations obligatoires auprès du public sont prévues, de même que des programmes de suivi obligatoires. La participation du public est financée, dans une faible mesure, par les parties intéressées.

L'objectif principal des amendements proposés dans le projet de loi C-9 est de rendre notre agence responsable des études approfondies, ce qui n'est pas le cas actuellement — il y a de nombreux ministères fédéraux, des agences, des conseils —, excepté dans les cas qui relèvent de l'Office national de l'énergie ou de la Commission canadienne de sûreté nucléaire.

Le président : Merci. Monsieur Smith aviez-vous terminé, ou vous ai-je interrompu?

M. Smith : Il y a encore quelques articles, mais ceux dont je vous ai parlé représentent l'essentiel des amendements proposés.

L'article 2157 modifie le libellé de certaines dispositions. Il s'agit essentiellement d'harmoniser les articles visés avec le nouveau processus. L'article 2158 autorise l'agence à mettre fin à une étude approfondie s'il apparaît qu'aucune décision relevant du fédéral ne doit être prise. Les articles 2159 et 2160 concernent un registre public des évaluations environnementales, qui est accessible sur Internet. Il s'agit encore d'amendements apportés afin que les articles visés soient harmonisés avec les autres articles modifiés.

Comme je l'ai déjà dit, l'article 2161 concerne l'annexe des exclusions. Les articles 2162 et 2163 sont des dispositions transitoires, et il y a ensuite toute une série de dispositions — les articles 2164 à 2171 — qui abrogent des parties du règlement sur les exclusions ainsi qu'un règlement adopté le printemps dernier.

Le président : Je vous remercie. Les explications que vous nous avez données sont importantes. Nous vous sommes reconnaissants.

Le sénateur Finley : Nos témoins ont répondu à certaines questions que je me posais. Ces mesures législatives m'intéressent beaucoup, et je suis revenu en arrière pour vérifier les positions adoptées par les gouvernements dans le passé. J'ai remarqué que, dans le discours du Trône de 2004, le gouvernement libéral de l'époque avait déclaré qu'il mettrait de l'ordre dans ses propres affaires, qu'il unifierait les évaluations environnementales fédérales, et qu'il collaborerait avec les provinces et les territoires afin de mettre en œuvre, au Canada, un processus d'évaluation harmonisé et plus efficace, et ce, avant 2006.

Cela ne s'est manifestement pas produit. Serait-il exact d'affirmer que c'est un des problèmes que nous essayons de régler avec ce projet de loi?

M. Smith : Oui.

Le sénateur Finley : Le rapport du commissaire produit à l'automne 2009, qui contient une sorte de vérification générale en matière d'environnement, va dans le même sens. Ce document indique clairement que, dans le cas des projets pour lesquels il y a plus d'une autorité responsable, des désaccords peuvent survenir relativement à la portée des projets. Cela peut occasionner des délais considérables dans les processus d'évaluation environnementale, ce qui se répercute sur la mise en oeuvre des projets. Il est ensuite indiqué que l'Agence canadienne de l'évaluation environnementale a collaboré, dans le passé, avec différentes parties intéressées afin de résoudre de tels désaccords, mais que les résultats ont été décevants. Croyez-vous que le projet de loi rendrait ces situations moins probables?

M. Smith : Oui, ce serait certainement le cas lorsque les études approfondies relèveraient de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, c'est-à-dire lorsque l'agence serait responsable des évaluations, qu'elle pourrait prendre toutes les décisions préalables et toutes les décisions sur la manière de mener ces évaluations. Nous ne souhaitons pas nous isoler et travailler en vase clos. Nous collaborerons étroitement avec nos collègues et nous nous appuierons sur les avis formulés par les ministères spécialisés, mais, en dernier ressort, quand il faudra prendre une décision, l'agence aura autorité pour la prendre et pour la mettre en oeuvre.

Le sénateur Finley : Je vais peut-être vous donner l'impression de me répéter quelque peu, mais dans leur programme de 2006, les libéraux indiquaient que, même s'ils reconnaissaient que les provinces étaient propriétaires des ressources du point de vue juridictionnel, le gouvernement devait assurer la compétitivité des ressources énergétiques dans les autres secteurs. On mentionne ensuite, dans ce document, la réduction des chevauchements et des exigences réglementaires disparates, c'est-à-dire qu'on se propose d'optimiser le processus et de le rendre régulier et plus efficace, sans pour autant compromettre les objectifs sociaux et environnementaux. En outre, le 23 novembre 2005, l'honorable Stéphane Dion a présenté clairement un plan d'action visant à unifier les processus d'évaluation environnementale fédéraux.

J'ai l'impression que le parti au pouvoir et l'opposition, et probablement tous les partis qui siègent à la Chambre, souhaitent que ce problème soit réglé. Diriez-vous que, pour en arriver au processus que vous avez élaboré, vous avez pris en considération, en procédant à une consultation quelconque, le fait que ce projet de loi correspond en réalité à ce que les deux côtés de la Chambre ont prétendu souhaiter, à un moment ou un autre?

M. Smith : Je ne peux pas dire ce que pensent les députés, mais on parle depuis longtemps du flou qui entoure la responsabilité en matière d'évaluation environnementale. C'est un sujet qui a été abordé à plusieurs reprises. Il existe par exemple des rapports, en plus de certains des textes qui ont été lus. En 2004, le Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente a procédé à un examen approfondi de la question des évaluations environnementales, et il a formulé ses observations sur les problèmes qui découlent de la responsabilité diffuse.

Les gouvernements provinciaux ont relevé les mêmes problèmes. L'année dernière, les membres du Conseil canadien des ministres de l'environnement se sont entendus sur ce qu'il fallait faire pour améliorer la coordination des évaluations environnementales fédérales et provinciales. Ils ont examiné tout un éventail de problèmes, et ils se sont notamment penchés sur la question de la responsabilité diffuse au sein du gouvernement — je ne me rappelle pas les termes exacts qu'ils ont employés. Les problèmes qui découlent de la situation perdurent depuis longtemps, et un grand nombre d'intervenants se sont exprimés à ce sujet.

Le sénateur Finley : Merci.

Le sénateur Neufeld : Vous avez parlé du Conseil canadien des ministres de l'environnement. Le Conseil de la fédération et les premiers ministres des différentes provinces ont également signalé aux différents premiers ministres fédéraux que ces problèmes devaient être réglés. Vous avez reconnu cela, mais seriez-vous d'accord pour dire que...

M. Smith : Ce ne sont pas les seuls. Beaucoup de groupes de défense de l'intérêt public ont également recommandé que l'autorité de l'agence soit renforcée. Beaucoup de groupes, dont les perspectives sont différentes, se sont penchés sur la question de la responsabilité diffuse, pour diverses raisons, et ils ont conclu que la situation posait problème.

Le sénateur Neufeld : Je parle des premiers ministres des différentes juridictions du Canada; les territoires et les provinces.

M. Smith : Oui.

Le sénateur McCoy : Je vous remercie de me permettre de siéger au comité pour cette étude. Comme vous le savez, j'ai suivi ce débat quand je travaillais pour le secteur privé, quand je m'occupais de ce genre de choses.

En quelle année la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, la LCEE, a-t-elle été adoptée?

M. Mongrain : Le projet de loi initial a été présenté en 1990, et l'essentiel de la loi est entré en vigueur en janvier 1995.

Le sénateur McCoy : Si je me souviens bien, à l'époque, un grand nombre d'entre nous avons milité énergiquement afin que l'agence, votre agence, fasse office de coordinatrice en matière d'environnement. En d'autres mots, l'agence aurait joué un rôle de régulateur et elle aurait fait en sorte que les choses progressent au sein du gouvernement fédéral. Est-ce que mon souvenir est exact?

M. Mongrain : Cela remonte à quelque temps avant mon arrivée à l'agence, mais cela correspond à ce que M. Smith et moi-même nous sommes fait raconter par des employés qui y étaient alors. C'est une des questions fondamentales dont on débattait à l'époque relativement à cette nouvelle loi, qui était révolutionnaire.

La question a été soulevée à nouveau à l'occasion de notre examen quinquennal de 1999 et 2000, et les amendements qui en ont découlé, en 2003, représentaient en quelque sorte une demi-solution. Vous avez parlé d'un rôle de coordination; l'agence est devenue un coordonnateur fédéral pour certains projets d'envergure.

Les amendements que propose le projet de loi C-9 nous conféreraient la responsabilité légale pour l'exécution des études approfondies.

Le sénateur McCoy : Le projet de loi vous confère la responsabilité, mais il ne vous accorde pas nécessairement le pouvoir. À quel endroit définit-il le pouvoir que vous pouvez exercer sur les autres ministères et relativement aux 6 000 évaluations environnementales? Ou à la trentaine qui sont effectuées chaque année, si je ne me trompe pas?

M. Smith : J'allais dire que cela ne concerne que les études approfondies, comme vous l'avez mentionné.

Notre pouvoir est défini à l'article dont j'ai parlé, l'article 2154, qui ajoute un nouvel article à la loi : l'article 11.01. Le passage pertinent est le suivant : « l'Agence commence l'étude approfondie du projet et exerce à l'égard de celui-ci les attributions qui incombent [...] à l'autorité responsable ». Cela s'applique à la période qui va du début du projet au moment où l'étude approfondie est achevée.

Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, une évaluation environnementale est entreprise lorsqu'un ministère doit prendre une décision concernant la cession de terres, l'attribution de fonds ou la délivrance de permis. Aux termes de la loi, un ministère ne peut prendre ces décisions avant qu'une évaluation environnementale n'ait été effectuée et qu'il ait déterminé si les impacts seraient importants.

À la fin du processus, cette responsabilité leur incomberait toujours. Mais en amont, pour l'évaluation environnementale et la production du rapport, cet article nous confère tous leurs pouvoirs, c'est-à-dire que nous avons le pouvoir de prendre toutes les décisions à leur place. Il ne s'agit pas tant de les obliger à faire certaines choses, que d'assumer la responsabilité et de faire les choses nous-mêmes.

Le sénateur McCoy : Cela me semble être un changement d'orientation important dans la façon dont le gouvernement fédéral cherchera à s'acquitter de certaines de ses responsabilités environnementales, et j'imagine que c'est l'une des raisons pour lesquelles nous pensons tous que ce projet de loi ne devrait pas faire partie du budget et que nous devrions disposer de plus de temps pour l'étudier.

Je ne vois pas comment vous allez savoir quand vous allez recevoir les renseignements. Je ne vois pas quel processus vous permettra de recueillir les renseignements dans l'ensemble du pays, d'un océan à l'autre, auprès de tous ces ministères, et de savoir quand vous êtes susceptible d'être appelé à exercer votre pouvoir.

M. Smith : La réponse à cette question comporte deux volets. Tout d'abord, le paragraphe (4) qu'il est proposé d'ajouter à l'article 2154 impose une obligation aux ministères fédéraux. Ce paragraphe dit que, lorsqu'un ministère reçoit des renseignements d'un promoteur à propos d'un projet qui pourrait faire l'objet d'une étude approfondie, il doit en faire part à l'agence. C'est une façon de le faire.

L'autre façon de procéder n'est pas décrite dans le projet de loi. En fait, de façon générale, la loi n'impose pas d'obligations directes aux promoteurs de projets du secteur privé. La loi repose sur les décisions du gouvernement fédéral; lorsqu'une décision est requise, le ministère doit veiller à ce qu'une évaluation environnementale soit réalisée au préalable. C'est de là que découle la nécessité de recueillir des renseignements sur le projet.

Sachant que l'Agence canadienne d'évaluation environnementale occuperait le siège du conducteur pour la réalisation de ces projets, bien qu'elle n'y soit pas obligée, nous nous attendons à ce que les promoteurs viennent à nous directement. S'ils savent que leur projet va devoir faire l'objet d'une évaluation environnementale et qu'ils vont devoir se soumettre à cette évaluation avant d'obtenir du financement, un terrain ou un permis, ils vont vouloir que le processus se déroule rapidement et ils vont venir à nous directement.

L'autre façon de le faire, c'est par l'entremise des gouvernements provinciaux. Actuellement, c'est souvent de cette façon que le gouvernement fédéral entend parler des projets. La province amorce son évaluation environnementale, et comme il devient évident qu'une décision doit être prise par le gouvernement fédéral, elle vient nous voir.

Le sénateur McCoy : C'est donc encore un peu obscur. Nous y allons toujours un peu à coup de « mon Dieu » et de « il faudrait ». Nous n'avons pas vraiment encore établi de processus bien défini.

M. Smith : Le processus ne s'inscrit pas dans le cadre des obligations actuelles.

Le sénateur McCoy : C'est ce que nous disons depuis 20 ans. Vous vouliez ajouter quelque chose, monsieur Mongrain.

M. Mongrain : Oui. L'agence est petite, mais nous avons des bureaux régionaux partout au pays, et notre relation de travail avec nos homologues provinciaux est excellente. La communication d'information, si on veut, à propos des projets éventuels qui pourraient nécessiter une évaluation est en fait l'un de ses points forts. Ce qui achoppe, c'est que la loi exige une certaine quantité de renseignements, dans certains cas, pour certaines décisions de réglementation qui pourraient donner lieu à l'obligation de procéder à une évaluation environnementale. Permettez-moi d'utiliser un exemple pour illustrer ma pensée.

Disons qu'un promoteur présente une description de projet visant l'établissement d'une grande mine métallifère. Pour qu'un ministère comme Pêches et Océans puisse déterminer de façon concluante qu'une évaluation environnementale est requise, il doit disposer de renseignements détaillés en matière d'ingénierie et conception pour pouvoir décider s'il convient d'autoriser la destruction de l'habitat du poisson. Cela peut se produire bien des mois après le début du processus, une fois que les évaluations environnementales provinciales ont débuté. Ils sont déjà loin devant, et nous essayons continuellement de les rattraper.

À l'article 2154, nous avons légèrement modifié cette obligation. Le projet de loi propose que, lorsque ces renseignements sont fournis sous la forme d'une description de projet, lorsque le projet est visé par le Règlement sur la liste d'étude approfondie et lorsqu'il est raisonnable de conclure qu'une évaluation environnementale fédérale pourrait être requise, alors l'Agence canadienne d'évaluation environnementale devrait commencer cette évaluation. Cela nous permet de débuter en même temps que nos homologues provinciaux et d'harmoniser nos efforts grâce à un processus unique qui répond aux exigences juridiques du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial, qui pourrait lui aussi devoir effectuer une évaluation environnementale.

Pour ce qui est du premier élément de votre question, c'est dans l'intérêt des promoteurs de fournir l'information aux parties intéressées le plus tôt possible. Cela englobe l'ACEE, les provinces, les représentants de Ressources naturelles Canada, le Bureau de gestion de grands projets, qui a témoigné devant le comité vendredi dernier, et d'autres ministères fédéraux.

Le sénateur McCoy : Comme le temps file, je passe sur certains points. Il y a beaucoup plus d'aspects à approfondir dans ce que vous aviez à dire.

D'après mon expérience, il y avait une seule personne dans votre bureau de l'Alberta qui s'occupait de ce dossier pour toute la province. Votre responsabilité est maintenant beaucoup plus grande, et vous dites que vous avez hâte de vous y mettre. Avez-vous augmenté nos fonds de fonctionnement? Combien de personnes supplémentaires pouvons-nous nous attendre à voir en Alberta?

M. Mongrain : Nous avons reçu des fonds dans le cadre du budget de 2007, ce qui représente une augmentation de 60 p. 100. Nous comptons environ 235 équivalents temps plein dans l'ensemble du pays. Notre bureau de l'Alberta est l'un des plus actifs, suivi de celui de la Colombie-Britannique, qui est le plus grand de nos bureaux régionaux. Les fonds prévus dans le budget de 2007 ont permis la création du Bureau de gestion de grands projets et, sur le plan administratif, nous ont donné davantage de responsabilités pour ce qui est d'accomplir du travail au nom des autorités responsables fédérales. Nous assumions déjà une fonction de coordination au titre de la loi. À ce moment-là, le Cabinet a émis une directive selon laquelle l'agence devait mener davantage d'activités administratives et assumer une plus grande part de la rédaction de rapports et de documents pour aider à faire avancer le processus. Nous nous sommes lancés dans ce genre de travail. La directive n'allait pas aussi loin que de nous confier la responsabilité juridique relative à ces évaluations environnementales. Malheureusement, cela n'a pas permis de résoudre les problèmes de retard et de chevauchement d'activités que nous avons vus au cours des 10 à 15 dernières années.

Le sénateur McCoy : Avez-vous plus d'argent maintenant parce que vous allez résoudre le problème? Vous avez dit que vous n'aviez pas été en mesure de le résoudre au cours des trois dernières années, malgré les meilleures intentions du monde. Allez-vous avoir plus de gens? Comme vous le savez, il faut des dizaines de personnes pour procéder à une étude approfondie. Allez-vous avoir la main-d'œuvre et les fonds de fonctionnement nécessaires?

M. Mongrain : Nous faisons déjà une bonne partie de ce travail au nom de l'autorité responsable. Nous croyons fermement que nous avons la main-d'œuvre et l'argent nécessaires. Ce qui nous manquait, c'était l'autorisation légale de le faire.

Le sénateur McCoy : Voulez-vous dire l'autorisation légale de dire aux autres ministères ce qu'ils doivent faire?

M. Mongrain : Il s'agit plutôt de leur dire de le faire.

Le sénateur McCoy : Vous avez parlé d'exclusions, qui ont toujours fait partie de ce régime législatif, bien qu'elles aient été secondaires. Les projets visés par ces exclusions étaient de très petite envergure. Dans le projet de loi C-9, les exclusions comprennent les autoroutes, l'élargissement à quatre voies des autoroutes, de même que les grandes installations récréatives et Dieu sait quoi d'autre. Je peux répéter tous les éléments de la liste des mesures de relance. Tous ces grands projets valent des milliards de dollars qui s'additionnent et constituent un changement d'orientation assez considérable. Ce n'est pas une simple addition, c'est un bond de géant.

M. Smith : Comme vous l'avez mentionné, certaines exclusions existent depuis le début. Il y a eu plusieurs séries d'amendements touchant le règlement relatif aux exclusions. On en a ajouté à plusieurs reprises au fil des ans, surtout en 2007.

L'une des tendances observées depuis que le gouvernement fédéral participe de plus en plus au financement de projets d'infrastructure, c'est que des projets qui n'étaient pas visés par le processus fédéral d'évaluation environnementale avant la mise en place de l'ACEE le sont maintenant. C'est l'une des raisons pour lesquelles on s'intéresse aux exclusions.

Le projet de loi propose une gamme d'exclusions, dont certaines s'appliquent à l'ensemble du projet et d'autres s'appliquent à certains aspects du projet. Vous avez parlé des autoroutes, de celles qui existent déjà, mais il n'est pas question d'élargissement à quatre voies. On prévoit plutôt l'élargissement des autoroutes à au plus deux voies. On y trouve diverses autres limites pour ce qui est des travaux réalisés dans des corridors de transport ou d'utilités publiques, ou à proximité, de même que certaines conditions liées aux zones écosensibles. À ces diverses exclusions s'ajoutent des limites qui restreignent l'application des exclusions.

Le sénateur McCoy : Nous n'avons pas le temps d'approfondir cet aspect. C'est une question qui touche l'environnement, non pas les finances. On dirait qu'il pourrait y avoir un conflit. À un endroit dans la nouvelle loi, malgré ce que dit le projet de loi, notamment pour ce qui est des exclusions, on peut lire qu'une étude approfondie est requise. J'ai essayé de faire des recoupements. L'exclusion vise un projet réalisé à 300 mètres ou moins d'une emprise existante ou sur un terrain dont le zonage permet un usage industriel, ou quelque chose dans ce sens, tandis que la liste d'étude approfondie fait allusion à une autoroute qui se trouve sur une nouvelle emprise.

Je peux comprendre qu'une nouvelle emprise puisse être nécessaire sur une autoroute. Je perçois un conflit, et je suis curieuse de savoir comment vous allez régler cette situation.

M. Smith : Il se pourrait que j'aie à consulter la LCEE et le règlement. Je croyais que, pour ce qui est des autoroutes, les exigences relatives aux études approfondies avaient trait aux nouvelles autoroutes et aux nouvelles emprises d'une certaine longueur. Cette exclusion s'applique à l'élargissement d'une autoroute existante. L'élargissement d'une autoroute existante qui ne fait pas partie de la liste des exclusions n'entraîne pas la nécessité de procéder à une étude approfondie. Nous veillons à ce qu'aucun projet qui nécessiterait une étude approfondie ne soit exclu. En fait, aucun projet de ce genre n'est exclu au titre du règlement. Il n'y a aucune nouvelle exclusion qui n'existait pas il y a un an. Les projets proposés avant l'entrée en vigueur de ces exclusions devaient faire l'objet d'une évaluation environnementale préalable, mais pas d'une étude approfondie.

Le sénateur McCoy : Nous n'avons pas le temps d'aller plus à fond, et d'autres personnes sont impatientes de poser leurs questions, comme nous le sommes tous.

Le sénateur Gerstein : Merci à tous les témoins.

Devant un miroir, on demande : « Miroir, miroir, dis-moi quelle province canadienne est la plus verte de toutes? » Le miroir, qui ne veut offenser personne, répond : « Je ne sais pas, mais vous devriez peut-être envisager de mettre la Colombie-Britannique sur cette liste. »

Cela dit, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt l'éditorial du Vancouver Sun du 27 mai 2010. Ce qui a attiré mon attention, c'est que le titre disait, et je traduis :

Ajouter du bon sens au processus d'examen environnemental.

Chaque fois qu'on voit les mots « bon sens » dans un éditorial, cela vaut toujours la peine de s'y attarder. Vous vous souvenez de la révolution du bon sens.

Permettez-moi de vous traduire ce que l'auteur disait :

Comme peut en témoigner quiconque travaille à la réalisation de projets d'infrastructure au Canada, plus particulièrement dans le secteur des ressources, le processus d'examen environnemental actuel peut entraîner des années de retard dans l'exécution des projets et augmenter de façon radicale les coûts qui y sont associés.

La cause de cette situation malheureuse est que [...] les autorités fédérales répètent inutilement des travaux déjà accomplis rigoureusement et efficacement par leurs homologues provinciaux.

L'éditorial se poursuit ainsi :

Le projet de loi C-9 vise à corriger ces lacunes en confiant la responsabilité au ministre de l'Environnement [...]. Cela ne signifie pas que le processus est affaibli. Au contraire, même les projets courants d'infrastructure publique qui sont soustraits à l'examen pourraient faire l'objet d'une évaluation environnementale si le ministre estime qu'il risque d'y avoir des conséquences néfastes.

L'auteur termine en déclarant ceci :

L'inclusion du bon sens dans le processus d'examen environnemental sera favorable aussi bien pour l'économie que pour l'environnement.

Êtes-vous d'accord pour dire que la partie 20 contient beaucoup de bon sens — ce qu'aucun de nous n'utilise assez souvent?

M. Smith : Je reprendrais simplement ce que j'ai dit plus tôt, c'est-à-dire que les dispositions prévues traitent d'éléments qui existent depuis longtemps, dont bien des gens ont discuté et que nous connaissons depuis longtemps.

Le sénateur Gerstein : Rien de ce qui est dit ne vous met mal à l'aise?

M. Smith : Non.

Le président : S'ils existent depuis longtemps, comment cela se fait-il qu'ils figurent dans ce projet de loi d'exécution du budget?

Le sénateur Gerstein : Il fallait un gouvernement courageux pour aller de l'avant.

M. Smith : Il y a eu une évolution. M. Mongrain en a parlé lorsqu'il a donné en exemple le processus d'étude approfondie. Il y a eu une évolution au fil du temps pour essayer de s'attaquer aux problèmes de différentes façons et aussi une évolution dans les pouvoirs accordés à l'agence. M. Mongrain a parlé des dispositions relatives au coordonnateur fédéral de l'évaluation environnementale ajoutées en 2003 dans le but de mieux coordonner les participants. Grâce à l'initiative sur les grands projets, nous avons obtenu plus de ressources et, là encore, plus de pouvoirs administratifs pour les gérer. C'est la pensée qui a évolué.

Nous nous attendons à ce que le nombre d'études approfondies augmente considérablement au cours des prochaines années. Cela a donc permis de voir les problèmes existants sous un jour meilleur. L'augmentation éventuelle du nombre d'études approfondies rend les problèmes existants d'autant plus importants.

[Français]

Le sénateur Poulin : Vous avez dit dès le début que la question de responsabilisation de l'évaluation environnementale a toujours été nébuleuse. Si ma mémoire est bonne, cette responsabilité constitutionnelle n'est pas clairement définie entre le fédéral et le provincial.

En examinant les amendements du projet de loi d'un point de vue global, je me demande comment les changements proposés à la législation actuelle vont contribuer à clarifier la responsabilisation, tant fédérale que provinciale.

M. Smith : Effectivement, les changements proposés ne touchent pas directement la responsabilisation de l'évaluation environnementale. Un des changements qui se rapporte le plus à cette question, c'est la capacité de l'agence de commencer l'évaluation environnementale plus tôt dans le processus et sa capacité d'intégrer les deux processus. Mais, en effet, rien dans ce projet de loi ne change ou clarifie les responsabilités fédérales et provinciales.

Le sénateur Poulin : Je partage la frustration du sénateur McCoy parce que cette question aurait mérité davantage de discussion entre les sénateurs et encore plus au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles où sont nos spécialistes de toutes les questions environnementales.

Je représente le Nord de l'Ontario au Sénat depuis 15 ans et cette question me préoccupe beaucoup. Je dois vous avouer que j'ai reçu plusieurs plaintes de délais. On sait que les délais représentent des coûts pour nos entreprises privées qui vont de l'avant avec des projets. Que ce soit au fédéral ou au provincial, les délais sont causés par tout le processus imposé aux entreprises privées.

C'est un processus avec lequel je suis d'accord parce que l'environnement représente une question importante. Lorsque vous avez dit qu'il n'y aurait plus d'obligation d'évaluation environnementale pour les projets financés par le fédéral, je n'ai pas compris pourquoi.

M. Smith : Les exclusions sont spécifiques aux 14 classes de projets et ne touchent pas tous les projets d'infrastructure. Ce sont les projets inclus dans l'annexe de la loi, qui ont fait l'objet d'une exclusion l'année passée par voie de réglementation. Ce ne sont pas tous les projets financés par le gouvernement, c'est seulement les types spécifiques de projets qui sont financés par les fonds qui sont inclus dans la loi.

Le sénateur Poulin : J'aimerais poser une troisième et dernière question. Lorsque je constate l'accroissement des responsabilités de l'agence, je me dis qu'il y aura des impacts sur ses opérations si les objectifs visés par le projet de loi C-9 sont atteints. Vous avez répondu au sénateur McCoy qu'il n'y aurait pas de coûts additionnels. Cela me surprend énormément dans le cas où vous atteignez les objectifs du projet de loi C-9.

M. Smith : J'ai parlé de l'évolution de l'agence. Il y a trois ans, nous avons reçu une augmentation du budget de l'ordre de 60 p. 100 pour l'implantation d'initiatives concernant les grands projets et ces fonds nous permettent d'appliquer les nouvelles obligations de la loi.

Le sénateur Poulin : Je sais que vous avez des bureaux régionaux.

M. Smith : Oui.

Le sénateur Poulin : Étant donné que l'Ontario est une vaste province et que dans le nord de l'Ontario il y a énormément de demandes de révision environnementale, est-ce qu'il va y avoir un bureau dédié à tout le Nord de l'Ontario?

M. Smith : Actuellement le bureau régional de l'Ontario est situé à Toronto et ce bureau couvre toute la province. Nous n'avons pas reçu un budget pour la création d'un autre bureau régional.

Le sénateur Poulin : Vous devriez peut-être y songer. Je vais maintenant laisser la chance à mes collègues de poser d'autres questions.

[Traduction]

Le sénateur Murray : Le projet de loi confère au ministre de l'Environnement le pouvoir d'établir la portée et les limites d'une évaluation environnementale. Qui le fait aujourd'hui?

M. Smith : À l'heure actuelle, la responsabilité incombe aux organisations chargées de mener l'évaluation environnementale, c'est-à-dire tous les ministères, les organismes, les commissions, entre autres. Cette nouvelle disposition permettrait au ministre de déterminer si l'évaluation peut ne porter que sur une partie d'un projet.

Le sénateur Murray : C'est ce que je constate. Qu'est-ce qui justifie le changement?

M. Smith : Jusqu'au début de cette année, les ministères qui procédaient à une évaluation environnementale pouvaient déterminer qu'elle ne viserait que certaines parties d'un projet et, dans certains cas, cette façon de faire est devenue monnaie courante.

En janvier de cette année, la Cour suprême a rendu une décision selon laquelle, en vertu de la loi actuelle, ils avaient le pouvoir discrétionnaire de déterminer la portée d'un projet, mais que le projet minimal assujetti à l'évaluation serait celui qui est proposé par le promoteur. Autrement dit, le tribunal a statué que les lois, telles qu'elles sont rédigées, ne permettent pas d'étudier seulement certaines parties d'un projet.

Dans bien des milieux, la décision de la Cour suprême est considérée comme positive dans l'ensemble. Dans notre évaluation de cette décision, nous avons dit qu'elle permettrait entre autres d'éliminer certains délais, parce que les ministères ne passeraient pas beaucoup de temps à établir la portée du projet. Par contre, elle met de côté les situations où la chose sensée à faire est de se pencher seulement sur certaines parties d'un projet, ce qui n'est maintenant plus possible.

Les amendements ne constituent pas un retour en arrière. Ils ne prévoient pas que tous les ministères puissent décider d'axer la portée sur certains éléments. Ils confèrent la responsabilité exclusive au ministre de l'Environnement.

Le sénateur Murray : Les organismes de réglementation tels que le vôtre, l'ONE ou qui que ce soit d'autre, ne seraient-ils pas compétents pour délimiter la portée?

M. Smith : Ce n'est pas une question de compétence. La loi, comme l'a établi la Cour suprême, énonce qu'il est impossible de restreindre la portée plus que ne le propose le promoteur.

Le sénateur Murray : Je comprends bien. Le changement fera en sorte que les ministères ne joueront plus ce rôle; il reviendra plutôt au ministre. Je vous demande ceci : pourquoi le ministre? Pourquoi pas l'organisme compétent, l'Office national de l'énergie ou quiconque tiendra les audiences?

M. Smith : Il ne s'agissait pas de revenir à la situation telle qu'elle était avant la décision de la Cour suprême, où tous les ministères pouvaient choisir de n'étudier qu'une partie d'un projet. Il s'agissait plutôt de faire en sorte que ce soit le ministre de l'Environnement qui puisse prendre une telle décision.

Le sénateur Murray : Pourquoi le ministre? Voilà ma question. Je vais peut-être la lui poser.

Le président : Nous sommes à la page 708, à l'article 2155. Le sénateur Murray parlait de l'article proposé 15.1. Le paragraphe (2) proposé énonce « Les conditions visées au paragraphe 35(1) [...] » Cette disposition se rapporte aux éléments à intégrer dans la portée. Il n'est toutefois fait aucune mention de quelconque échéance de publication. Y voyez- vous une porte ouverte à des retards?

M. Smith : Je ne crois pas. Je crois que les conditions seraient rendues publiques en temps voulu, et je n'envisage donc pas de retard dans les décisions.

Le président : Êtes-vous sûr qu'« en temps voulu » est ce qu'on comprendra, même si ce n'est pas clairement indiqué?

M. Smith : Dans la pratique.

Le sénateur Marshall : Monsieur Smith, il y a dans la loi un article en particulier dont j'aimerais que vous nous parliez. Lorsque j'ai pris connaissance de la loi, je ne comprenais pas pourquoi nous reculions autant.

Dans l'article 2153, qui se trouve aux pages 706 et 707, il est question de faire une évaluation environnementale pour certains projets, mais pas pour d'autres. Il est fait mention de différents mécanismes de financement fédéraux, tels que le Fonds sur l'infrastructure municipale, annoncé dans le budget 2003. Cela fait déjà sept ans. Alors pourquoi en est-il question maintenant? Y a-t-il encore des projets qui sont en cours aux termes de cette entente?

M. Smith : Oui, il y en a encore, mais plus autant qu'avant. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais il y a encore quelques projets importants.

Le sénateur Marshall : Donc, même les projets annoncés, disons il y a sept ans, tomberaient sous le coup du nouveau régime?

M. Smith : Les évaluations environnementales des projets annoncés il y a sept ans seraient probablement déjà effectuées. Cette mesure s'appliquerait donc aux nouvelles annonces de financement en vertu de ces programmes.

Le sénateur Marshall : Cette entente de financement existe toujours?

M. Smith : Oui.

Le sénateur Marshall : Lorsque vous avez répondu à d'autres sénateurs, vous avez mentionné l'élan qu'il y a envers les amendements et vous avez fait référence à certains projets miniers. Il semble que certains d'entre eux aient fait l'objet d'un processus environnemental interminable. Vous avez également parlé de travaux routiers.

J'ai lu quelque part, probablement sur Internet, un article au sujet d'une mine d'or dans le Nord du Nouveau- Brunswick. Il a fallu du temps pour terminer l'évaluation du projet, tout comme ça a été le cas pour une société d'exploitation de minerai de fer au Labrador. Il y était également question de retards en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick.

Êtes-vous en mesure de nous parler de projets en particulier pour nous donner une idée de ceux qui nécessitent beaucoup de temps par rapport aux autres? Pouvez-vous être précis?

M. Mongrain : Oui. Le projet au Nouveau-Brunswick vise une mine de métal, Halfmile Lake. Mon épouse et sa famille viennent de cette région, près de Bathurst.

Le sénateur Marshall : J'ai vécu à Bathurst. C'est pourquoi je vous pose la question.

M. Mongrain : Les acteurs fédéraux responsables ont reçu une description du projet de la part du promoteur il y a quatre ou cinq mois. La province a déjà entamé son examen à partir de cette information, mais le promoteur attend toujours une décision des autorités fédérales à savoir s'il faudra ou non procéder à une évaluation environnementale.

Je crois que le promoteur a depuis remodelé le projet, de manière à ce qu'il n'y ait plus besoin d'une étude approfondie. Je ne peux rien dire au sujet de ses motifs, mais il s'agit bien d'un cas où l'on a remanié le projet pour s'adapter au processus. Nous aimons constater que des projets sont remaniés pour protéger l'environnement. En voilà un exemple au Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Marshall : Qu'en est-il du projet au Labrador? Je viens de Terre-Neuve-et-Labrador et je crois qu'il y a un problème là-bas.

M. Mongrain : Il y a un projet concernant ce qu'on appelle « minerai expédié sans traitement préalable » qui concerne les gisements de minerai de fer existants près de la frontière avec le Québec et la ville de Schefferville.

Ce projet, son promoteur l'a présenté en mai 2008. Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador a terminé son évaluation environnementale mais il n'a pas encore fait connaître sa décision; quant au processus fédéral, il n'a pas encore commencé. L'avis de lancement a été donné mais les travaux n'ont pas encore commencé. Pour le moment, les promoteurs ont mis le projet sur la glace et ils le remanieront encore un peu.

Le sénateur Marshall : Les amendements proposés répondront-ils aux problèmes qui se sont posés à la mine de Bathurst et à la question du minerai de fer du Labrador?

M. Mongrain : Dans le cas de la mine de Bathurst, il s'agissait au départ d'un projet d'étude approfondie, comme il avait été proposé. Si les amendements étaient adoptés, ils seraient de la responsabilité de notre agence. L'article 2154 obligerait l'agence à commencer ses travaux dès qu'elle recevrait une information selon laquelle le projet figure sur la liste des études approfondies, et qu'une évaluation environnementale fédérale pourrait être nécessaire, plutôt que sur réception d'un déclencheur confirmé.

Nous pourrions commencer en séquence avec nos partenaires du Nouveau-Brunswick et travailler ensemble sur les questions d'ordre environnemental reliées au projet. De même, dans le cas du projet de minerai expédié sans traitement préalable, nous pourrions procéder à une évaluation dans le cadre d'un processus harmonisé avec le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Marshall : Êtes-vous en train de dire que la leur est faite?

M. Mongrain : Elle est maintenant achevée. Si le processus avait été mis en place en 2008, nous aurions pu commencer en cadence avec le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador et mettre sur la table pour le bénéfice de tous l'expertise du gouvernement fédéral. L'éventualité qu'un promoteur doive se plier à un double processus, et éventuellement aux exigences d'une évaluation environnementale aurait été évitée.

Le sénateur Marshall : En ce qui concerne la commissaire à l'environnement et au développement durable — je pense que c'est le titre officiel de l'agent chargé des questions environnementales au Bureau du vérificateur général —, est-ce qu'elle aurait des commentaires à faire concernant le projet de loi ou réserve-t-elle son jugement pour après le fait?

M. Smith : La commissaire à l'environnement s'attachera à examiner la mise en œuvre de la loi, mais elle ne commente habituellement pas les questions de politique. Toutefois, comme il a été indiqué plus tôt lors des questions, son plus récent rapport soulignait certains aspects tels que la responsabilité diffuse, qui ont donné lieu à ces amendements.

Le sénateur Marshall : Je suppose que nous aurons de ses nouvelles à une étape ultérieure.

M. Mongrain : Aux fins du compte rendu, c'est Scott Vaughan qui est l'actuel Commissaire à l'environnement et au développement durable.

Le président : C'est un homme?

M. Mongrain : Oui, en l'occurrence.

Le sénateur Ringuette : Je voudrais poser une question qui fait suite à celle du sénateur Marshall concernant les projets de Schefferville et du nord du Nouveau-Brunswick. Qu'est-ce qui vous a empêché de commencer? Vous avez dit que vous n'aviez pas commencé; qu'est-ce qui vous en a empêché?

M. Mongrain : La décision de commencer ne relève pas de notre agence; aux termes de la loi actuelle, elle relève du ministère fédéral.

Le sénateur Ringuette : Êtes-vous en train de dire qu'un autre ministère fédéral n'entreprendrait pas de projet d'évaluation environnementale?

M. Mongrain : Si une décision est prise, le ministère fédéral serait tenu d'en faire une; la loi l'exige. Nous ne sommes aucunement en train de dire que les autorités fédérales ne se conforment pas aux exigences de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Toutefois, le mécanisme prévu par la loi qui sert de déclencheur du processus est tel que l'information nécessaire n'est en règle générale pas disponible au début de l'étape de la planification du projet. Il faut continuellement revenir demander au promoteur un complément d'information technique ou de conception afin de déterminer s'il faut procéder à une évaluation environnementale.

Le sénateur Ringuette : Vous-même seriez tenu de poser la même question pour déterminer la nécessité de procéder à une évaluation environnementale, exact?

M. Mongrain : M. Smith peut m'aider à répondre à cette question. Selon la façon dont l'article est rédigé, nous n'aurions plus besoin de renseignements aussi détaillés.

M. Smith : L'évaluation environnementale est requise, comme je l'ai mentionné, lorsqu'un ministère doit prendre une décision. Pour ce qui est des grands projets portant sur les ressources, le ministère délivre souvent un permis réglementaire. Ce que font généralement les ministères — et de leur point de vue, c'est parfaitement légitime —, c'est qu'avant de déterminer si une évaluation environnementale est nécessaire, ils veulent s'assurer avec suffisamment de certitude qu'ils auront à délivrer un permis.

Comme l'a dit M. Mongrain, ils recherchent un ensemble de renseignements assez détaillés et ne se livrent pas à l'évaluation environnementale à moins d'être certains qu'ils auront à délivrer un permis. Par conséquent, ils doivent en savoir beaucoup à propos du projet. De leur point de vue, c'est logique. Leur activité principale consiste à délivrer les permis qui pourraient être liés aux pêches, à la navigation ou aux explosifs.

La dernière fois que nous avons examiné la loi, nous avons proposé, au moyen d'une politique, ce qu'on appelle la « politique de la participation automatique à moins d'avis contraire ». Essentiellement, si on croit qu'une évaluation sera nécessaire, on commence à procéder à une évaluation. On peut toujours y mettre fin si on détermine qu'elle n'est pas nécessaire, mais on doit la commencer tôt afin de bénéficier des avantages dont nous avons parlés.

En substance, même si ce n'est pas écrit textuellement, l'article 2154 prévoit que l'agence commencera l'étude approfondie dans le cas où une évaluation environnementale sera peut-être nécessaire, et cela établit essentiellement le seuil que nous sommes obligés de respecter à un niveau inférieur que celui des ministères. Nous la commençons quand nous croyons qu'elle sera peut-être nécessaire; nous pouvons alors procéder de concert avec les provinces.

Le sénateur Ringuette : J'aimerais aller à la diapositive numéro 2. Votre premier point est le suivant : les autorités fédérales doivent réaliser une évaluation environnementale lorsqu'elles doivent prendre une décision concernant un projet à titre de promoteur, de source d'aide financière — il s'agirait probablement du gouvernement fédéral —, d'administrateur des terres ou d'organisme de réglementation. Quand vous dites « organisme de réglementation », je suppose que vous englobez les projets interprovinciaux et internationaux. Sont-ils automatiquement inclus?

M. Smith : Certains types le sont. Nous avons un règlement appelé Règlement sur les dispositions législatives et réglementaires désignées, qui énumère les divers types de permis, d'approbations, d'autorisations fédéraux qui entraînent une évaluation environnementale.

Le sénateur Ringuette : Je vais vous donner quelques exemples et vous me direz s'ils nécessiteraient une évaluation environnementale. Dans le cas d'un projet interprovincial comme un gazoduc ou une liaison ferroviaire à grande vitesse, y aurait-il lieu de procéder automatiquement à une évaluation environnementale?

M. Smith : Une pipeline interprovinciale nécessite l'autorisation de l'Office national de l'énergie, et c'est l'un des éléments déclencheurs d'évaluation environnementale. Une liaison ferroviaire interprovinciale...

M. Mongrain : Une liaison ferroviaire à grande vitesse serait régie par l'Office des transports du Canada. L'office prendrait probablement des décisions qui se traduiraient par la nécessité de procéder à une évaluation environnementale. La façon dont le processus fonctionne, c'est qu'il sert de base aux décisions fédérales. Avant de pouvoir prendre cette décision fédérale, il faut se livrer à une évaluation environnementale.

Pour un projet de liaison ferroviaire à grande vitesse, je crois que le seuil est de 200 kilomètres à l'heure. Ce n'est pas une vitesse très élevée, mais j'imagine que le Règlement sur la liste d'étude approfondie est entré en vigueur au milieu des années 1990. Le projet nécessiterait la tenue de ce que nous appelons une étude approfondie.

Le sénateur Ringuette : Que la présente loi soit adoptée ou non, l'élément déclencheur existerait toujours, n'est-ce pas?

M. Mongrain : La différence c'est la personne qui serait responsable de cette étude approfondie.

Le sénateur Ringuette : D'accord. Qu'en est-il dans le cas d'un exemple international comme le pont Detroit- Windsor?

M. Smith : Une évaluation environnementale fédérale est nécessaire.

Le sénateur Ringuette : L'évaluation environnementale dans ces cas-là prendrait-elle la forme d'une étude approfondie?

M. Smith : Ça dépend si le projet figure dans un autre règlement, le Règlement sur la liste d'étude approfondie. Il faudrait que j'examine les détails compris dans le règlement. Bon nombre de ces détails prévoient des seuils en ce qui a trait à la taille ou à la longueur dans le but de déterminer si l'évaluation doit prendre la forme d'une étude approfondie ou d'un examen préalable.

Le sénateur Ringuette : Dans le cas d'une étude approfondie, si j'ai bien compris, si une évaluation est nécessaire, le ministre établit la portée de l'évaluation et les conditions publiques.

M. Smith : Selon les amendements proposés, si une étude approfondie est nécessaire, ce serait l'Agence canadienne d'évaluation environnementale qui procéderait à l'évaluation.

Le sénateur Ringuette : Établiriez-vous la portée et les conditions publiques?

M. Smith : Nous aurions la responsabilité d'établir la portée. Cependant, s'il fallait réduire la portée et ne tenir compte que de certains aspects, ce serait au ministre de l'Environnement de faire ces changements.

Le sénateur Ringuette : Donc le ministre peut vous donner des instructions concernant la portée de toute étude approfondie, exact?

M. Smith : Oui, mais son autorité ne se limite pas uniquement aux études approfondies.

Le sénateur Ringuette : Mais il peut vous donner des instructions en ce qui concerne la portée de toute étude approfondie.

Encore une fois, pour m'assurer que tout est clair, passons à la page 705, article 2153. On y trouve toute une série de définitions, et l'avant-dernière au bas de la page parle de « plan d'eau », qui :

s'entend notamment des lacs, des canaux, des réservoirs, des océans, des rivières et leurs affluents ainsi que des terres humides — s'étendant jusqu'à la laisse ou limite annuelle des hautes eaux —, à l'exclusion des étangs de traitement des eaux usées ou des déchets, des étangs de résidus miniers ainsi que des réservoirs d'irrigation artificiels, des étangs-réservoirs et des fossés qui ne contiennent pas d'habitat du poisson...

Pourriez-vous m'expliquer les définitions qui figurent ici par rapport à l'annexe qui se trouve à la page 877?

M. Smith : Les définitions qui figurent aux pages 705 et 706 proviennent du Règlement sur la liste d'exclusion, qui est en vigueur actuellement. Ces termes sont compris de différentes manières dans les exclusions.

Le sénateur Ringuette : Vous devez comprendre que les règlements ne se retrouvent pas devant le Parlement. Ils constituent uniquement un processus interne, et ils ne sont pas assujettis à l'examen attentif du Parlement. C'est ce que j'essaie de déterminer en ce qui concerne les règlements.

Le président : Un comité parlementaire mixte examine attentivement les règlements.

Le sénateur Ringuette : Oui, mais les règlements ne sont pas examinés par l'ensemble du Parlement. Par exemple, je ne crois pas que le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a vu ces règlements.

Le président : Vous avez peut-être raison. Ils n'ont peut-être pas été examinés par ce comité, mais je ne voulais pas vous induire en erreur. Il existe un Comité mixte permanent d'examen de la réglementation, qui est un comité mixte du Parlement chargé d'examiner les règlements.

Le sénateur McCoy : Le Parlement ne les approuve pas à l'avance. Je crois que c'est ce que le sénateur veut faire valoir.

Le président : Nous faisons de la sémantique ici. Ils ne suivent pas le même processus que les lois.

Le sénateur Ringuette : Je passe au nouveau paragraphe proposé 7.1(2), projets figurant à l'annexe : « N'ont pas à faire l'objet d'une évaluation en application des articles 5 ou 8 à 10.1 [...] », et le reste. Cela fait-il référence à l'annexe qui se trouve à la page 877?

M. Smith : Oui. Si un projet correspond à un type de projet qui figure à l'annexe et qui est financé au moyen de l'un des fonds qui y sont énumérés, alors il est exclu. La référence à l'article 5 ou aux articles 8 à 10.1 de la loi concerne en fait l'article selon lequel on doit procéder à une évaluation environnementale.

Le sénateur Ringuette : Je regarde la page 877 et l'annexe 3, paragraphes proposés 5(1) et 5(2), qui touchent surtout les installations, bien qu'il y ait certains problèmes concernant les institutions. Il y a une longue liste d'installations qui pourraient être discutables. Puis il est écrit « 8 à 10 », et je présume que c'est 10 inclusivement.

M. Smith : Oui.

Le sénateur Ringuette : Il y a une liste de projets de construction, d'installation, d'exploitation, d'agrandissement ou de modification d'un passage supérieur, d'un carrefour à niveaux différents. On énumère toutes sortes de projets différents, et tant qu'ils sont financés par le gouvernement fédéral, ils sont automatiquement exclus.

M. Smith : C'est le fait de recevoir des fonds du gouvernement fédéral qui entraîne l'évaluation environnementale, alors s'ils reçoivent du financement dans le cadre de l'un des programmes de financement nommés et qu'ils figurent sur cette liste d'exclusion, alors oui, ils sont exclus.

Le sénateur Ringuette : Ils sont exclus. C'est tout un écart.

À la page 3 de vos diapositives, le deuxième point, « beaucoup de projets ordinaires aux effets environnementaux importants nécessitent des évaluations environnementales ». Encore une fois ici, je ne fais que supposer que nous devons tenir compte de ce commentaire ainsi que des commentaires à la page 2, sur les différents types d'évaluation environnementale. Vous dites que l'examen préalable représente 99 p. 100 de vos évaluations.

M. Smith : C'est exact.

Le sénateur Ringuette : Les études approfondies ne représentent que 1 p. 100.

M. Smith : Elles représentent moins de 1 p. 100, oui.

Le sénateur Ringuette : Diriez-vous que votre examen préalable a un effet négligeable?

M. Smith : La loi est structurée de façon telle que le type d'évaluation environnementale par défaut est un examen préalable. Un nombre relativement faible de projets, s'ils ont été identifiés dans le règlement comme ayant potentiellement des effets importants, sont énumérés dans le règlement, et ils font l'objet d'une étude approfondie, alors l'examen préalable se fait par défaut et il vise un large éventail de projets.

Le sénateur Ringuette : Pourriez-vous nous donner des exemples des nombreux projets ordinaires ayant des effets négligeables?

M. Mongrain : Monsieur le président, quelques exemples me viennent à l'esprit. Nous avons un registre accessible sur Internet qui comprend tous les projets faisant l'objet d'une évaluation environnementale fédérale. On nous pose cette question au sujet des projets négligeables qui nécessitent une évaluation environnementale, alors je vérifie le registre à l'occasion. La semaine dernière et cette semaine, je me suis préparé à cette séance du comité, et j'ai vérifié notre registre accessible sur Internet pour voir ce qu'il y avait de nouveau.

Pour vous donner un exemple des projets ayant des effets relativement négligeables, en ce moment, dans un lieu historique national, Parcs Canada remplace trois toilettes au propane par trois toilettes à débit d'eau restreint. La façon dont notre loi est structurée et la façon dont fonctionnent les exclusions sont une sorte de moyen radical pour mettre les choses de côté, et il a fallu procéder à une évaluation environnementale complète, sous la forme d'un examen préalable. À cela s'ajoutent beaucoup d'analyses. Je ne sous-entends pas que l'amélioration de trois toilettes à un lieu historique national ne devrait pas être faite de manière responsable et avec soin, mais à notre avis et selon notre agence, elle ne justifie pas vraiment l'application du processus prévu par cette loi.

Le sénateur McCoy : À titre de précision, il ne serait pas exclu. Il s'agirait d'un lieu historique.

M. Mongrain : C'est exact. Il n'est pas exclu. C'est un exemple de projet qui nécessite une évaluation environnementale.

Le sénateur McCoy : Il n'est pas exclu selon vos nouvelles exclusions dans le projet de loi, n'est-ce pas?

M. Mongrain : Non. Un autre exemple de projets petits et négligeables qui surgissent à l'occasion, c'est un parcours de ski nautique de 250 mètres sur un lac développé au Québec. Le projet a fait l'objet d'un examen préalable. Des arbres sur une base des Forces canadiennes située près d'une station météorologique nuisaient au fonctionnement du radar météorologique, alors il a fallu procéder à une évaluation environnementale du projet avant de pouvoir enlever les arbres. Monsieur le président, bon nombre de projets sont pris en compte dans le cadre de notre processus parce que le processus prend tout en compte, à moins que le projet ne soit précisément exclu. Quand la liste d'exclusion a été élaborée au milieu des années 1990, puis modifiée en 2007 et une autre fois en 2009, personne n'a songé au projet des toilettes nécessairement, ni au projet des eaux navigables, ni au parcours de ski nautique.

Le sénateur Ringuette : J'ai une dernière question. À la page 709, selon le paragraphe proposé 21.1(1) : « Dans les dix jours suivant le versement au site Internet de l'avis du début de l'étude approfondie du proje [...] » — est-ce là le seul moyen par lequel vous annoncerez l'étude, au moyen d'un site Internet? Puis il est suivi du paragraphe proposé 21.1(2) : « L'avis précise notamment l'adresse et la date limite pour la réception des observations. »

Disons qu'un projet se trouve à l'intérieur d'une région géographique. Allez-vous continuer à annoncer dans la région que vous lancerez une étude environnementale au sujet d'un projet en particulier?

M. Smith : Plusieurs avis sont publiés tout au long du processus d'étude approfondie. Le site Internet dont il est question est celui du Registre canadien d'évaluation environnementale, qui est hébergé sur notre site web. On y trouve les avis de lancement des évaluations environnementales qui ont été entamées. C'est le principal moyen utilisé pour informer le public des évaluations environnementales qui sont en cours. Il est très utilisé, et je pense que la plupart des gens qui s'intéressent aux évaluations environnementales le connaissent.

Si une séance publique doit avoir lieu, par exemple, un avis public est émis. On publie aussi les avis de lancement sur le site Internet du registre pour informer les gens que quelque chose est en cours. Si d'autres avis de séances publiques doivent être publiés, par exemple, nous utiliserons aussi d'autres moyens de communication.

M. Mongrain : Il peut s'agir d'annonces dans les journaux ou à la radio, selon la région concernée, le type de projet et le niveau d'intérêt du public.

Le sénateur Ringuette : Le ministre prendra-t-il une décision en ce qui concerne la divulgation au public des conditions de l'évaluation? Cela fait partie de ce projet de loi.

M. Mongrain : Pas pour chaque cas, non. Le pouvoir du ministre de définir la portée du projet est un pouvoir discrétionnaire, mais nous ne nous attendons pas à ce que le ministre établisse la portée des 6 000 évaluations environnementales qui sont réalisées chaque année — ce qui, par ailleurs, lui serait impossible. C'est davantage l'exception que la règle. Ce pouvoir discrétionnaire ne serait utilisé que dans certaines circonstances particulières.

Le sénateur Neufeld : Merci d'être ici et de nous expliquer certaines de ces modifications qui, comme vous l'avez dit plus ou moins clairement, devraient nous permettre de corriger des problèmes dont nous connaissons l'existence depuis 2003 ou peut-être même plus tôt. Nous aboutissons finalement à un processus, mais sera-t-il parfait? Je ne pense pas que quoi ce soit puisse être parfait, mais ce sera beaucoup mieux que ce que nous avions auparavant.

Je viens de la Colombie-Britannique, et je milite depuis longtemps afin que le gouvernement fédéral puisse déléguer les évaluations environnementales aux provinces. En Colombie-Britannique, nous pouvons éviter de réaliser les évaluations environnementales en les confiant au gouvernement fédéral.

Le public et les gens qui investissent des milliards de dollars se demandent pourquoi nous devons réaliser deux évaluations environnementales qui, bien souvent, se recoupent. Selon votre tableau, le fait de réduire de 16 à trois mois le temps qu'il faut en moyenne pour décider de qui fera quoi est un pas important dans la bonne direction. Cela aidera l'environnement.

Je ne dis pas que tout devrait être accepté et que nous ne devrions pas effectuer d'évaluations environnementales, mais lorsque le sénateur McCoy, de l'Alberta, parle des projets qui sont en cours dans sa province — même s'il n'y en a pas autant qu'en Colombie-Britannique, soit dit en passant —, on ne peut que se féliciter des milliers d'emplois qui sont créés. En Colombie-Britannique, il est inacceptable que des investissements de plus de 100 milliards de dollars soient retardés en raison des évaluations environnementales.

Supposons que nous nous entendions tous, que le projet de loi C-9 soit adopté et que le monde soit entre vos mains, qu'arriverait-il aux projets qui viennent de commencer, par rapport aux projets à venir? Il devrait y avoir une coupure au cours de laquelle vous déciderez de ce qui devrait être inclus ou exclu.

Disons qu'un projet soit passé par le MPO, RNCan et différents organismes — pour tenter d'établir qui fera quoi. Les projets seront-ils soumis au ministre de l'Environnement, qui décidera s'ils relèvent de l'ONE ou s'ils doivent faire l'objet d'une étude approfondie? Comment déterminez-vous la voie à suivre?

M. Smith : L'article 2162 du projet de loi comporte des dispositions transitoires concernant les études approfondies qui sont en cours et pour lesquelles le ministre a déjà décidé si elles doivent se poursuivre ou si un groupe d'experts doit prendre la relève — j'ai parlé plus tôt de ce processus de prise de décision sur la voie à suivre —, ce qui élimine toutes les étapes préliminaires pour passer à l'essentiel.

Si le ministre a pris une décision ou a entamé un processus de prise de décision sur la voie à suivre, le projet continuera en suivant le processus établi dans la loi actuelle. Les autorités responsables continueront à s'en occuper.

Toute étude approfondie qui aura été entamée mais n'aura pas franchi cette étape ira à l'agence. Nous connaissons le nombre de projets touchés ainsi que leur situation. Je n'ai pas les chiffres avec moi, mais je peux les obtenir si vous voulez.

Si ce projet de loi est adopté et reçoit la sanction royale, ces modifications entreront en vigueur le jour même et l'agence prendra la relève. Toute étude approfondie qui n'aura pas fait l'objet d'une décision sur la voie à suivre deviendra la responsabilité de l'agence.

Le sénateur Neufeld : C'était ma prochaine question. Merci de le préciser.

Je pense que nous aimerions connaître le nombre de projets touchés, leur valeur monétaire et leur situation, pour savoir quelle voie ils suivront. Je crois que nous vous en saurions tous gré.

Le président : Merci, sénateur Neufeld. Je cherche les dispositions d'entrée en vigueur.

Le sénateur Murray : Elles se trouvent au paragraphe des dispositions transitoires.

Le président : Je vois les dispositions transitoires, mais les dispositions d'entrée en vigueur en font-elles partie?

M. Smith : Je pense que parmi les témoins que vous avez reçus plus tôt se trouvaient des avocats, mais aucun rédacteur de loi. Malheureusement, je ne suis ni l'un ni l'autre.

Je crois qu'à moins d'indication contraire, les dispositions entrent en vigueur le jour de la sanction royale. Par conséquent, comme la partie 20 ne comporte pas de date d'entrée en vigueur, les dispositions devraient prendre effet le jour de la sanction royale.

Les articles 2162 et 2163 présentent les dispositions transitoires. C'est l'article 2162 qui précise que toute étude approfondie doit suivre son cours comme si aucun amendement n'avait été apporté, lorsque le ministre a renvoyé le projet à l'autorité responsable afin qu'elle continue cette étude; c'est ainsi que se termine le processus de prise de décision sur la voie à suivre dont je vous ai parlé.

Les autres dispositions transitoires nous indiquent la marche à suivre en ce qui a trait aux délais des projets qui sont déjà entamés. Certains délais sont calculés en fonction de l'avis de lancement, alors nous devrions, par exemple, émettre un avis public dans les 10 jours suivant la sanction royale, que nous ayons franchi ou non cette étape.

Le président : Nous présumerons que la loi devrait entrer en vigueur le jour de la sanction royale; si notre présomption s'avérait erronée, je compte sur vous pour nous en informer.

M. Smith : Si la loi devait prendre effet un autre jour, vous verriez un article indiquant la date d'entrée en vigueur ou précisant que cette date doit être déterminée. Comme il n'y en a pas, la loi est réputée entrer en vigueur le jour de la sanction royale.

Le président : Merci. Le sénateur Dickson pourrait peut-être nous aider sur cette question.

Le sénateur Dickson : Je ne demanderai pas d'avis juridique, mais j'aimerais continuer sur la lancée du sénateur Neufeld en posant une question complémentaire.

Je crois comprendre que des ententes de coopération ont été conclues entre l'agence et les provinces et les territoires. Quels sont les provinces et les territoires qui n'ont pas signé ce type d'entente?

M. Smith : Nous n'avons pas signé d'entente de coopération avec les quatre provinces atlantiques. Cependant, nous collaborons régulièrement avec ces provinces pour conclure des ententes d'évaluation coopérative des projets sur une base ponctuelle.

Le sénateur Dickson : Avez-vous entrepris des négociations avec les provinces atlantiques pour conclure des ententes de coopération? À qui revient-il d'enclencher ce processus?

M. Smith : Ce processus peut être enclenché d'un côté ou de l'autre. Nous avons eu plusieurs discussions avec les provinces au cours des années, et l'intérêt va et vient.

M. Mongrain : Je ne crois pas que les démarches qui ont déjà été entreprises nous mènent où que ce soit. Nous avons eu des discussions avec la Nouvelle-Écosse à un certain moment, et nous avons entrepris de rédiger un projet d'accord à l'interne, mais il a été décidé qu'il valait mieux continuer à collaborer étroitement avec les gouvernements provinciaux et prendre des dispositions propres à chaque projet.

Dans le cas de Terre-Neuve-et-Labrador, un projet d'accord a été rédigé à des fins de consultation publique. Ici encore, il a été décidé de ne pas aller de l'avant. Je ne veux pas leur mettre de mots dans la bouche, mais cette situation pourrait être la même dans le cas des autres provinces atlantiques. Des représentants officiels nous ont laissé entendre que ces ententes seraient davantage susceptibles de les intéresser si l'organisme avec lequel ils signaient l'entente, c'est- à-dire le ministère de l'Environnement, était en mesure de mettre en œuvre le processus.

Le problème avec les ententes bilatérales existantes, c'est que le ministre de l'Environnement signe au nom du gouvernement du Canada, mais que cela n'oblige pas les conseils, les organismes et les ministères fédéraux à respecter la lettre et l'esprit de ces ententes.

Le sénateur Dickson : En vertu du nouvel accord, il serait profitable aux provinces atlantiques d'établir des ententes de collaboration, parce que le ministre aurait alors une certaine autorité.

M. Mongrain : Je dirais que ce serait avantageux. Si les provinces étaient du même avis, nous serions plus qu'heureux de nous asseoir avec elles. Je pense que de leur point de vue, l'entrée en vigueur des amendements du projet de loi C-9 rendrait beaucoup plus probable le respect des exigences de l'entente de coopération et des dispositions relatives au partage des renseignements.

Le sénateur Dickson : J'en conclus qu'il serait nettement dans leur avantage de signer une telle entente.

M. Smith : C'est la solution que nous privilégions.

Le sénateur Dickson : En raison de la responsabilité accrue du ministère.

Le président : C'est une conclusion que la province et son ministre devront tirer.

Le sénateur Dickson : J'aimerais revenir à l'essentiel.

Le sénateur Banks : C'est exactement ce que nous sommes supposés faire, sénateur Dickson. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici.

Je pense que M. Smith avait raison au sujet de l'entrée en vigueur, parce que lorsqu'on examine la fin de ce projet de loi, on constate que les dispositions d'entrée en vigueur portent sur des éléments qui n'ont rien à voir avec cette loi, mais aussi sur des éléments qui ne font pas partie de la loi qui est modifiée immédiatement avant l'entrée en vigueur. Ces dispositions traitent aussi d'autres lois et précisent que les articles sont « réputés » être entrés en vigueur à un autre moment, ce qui est intéressant. Il est donc probable que nos présomptions étaient justes.

Les sénateurs Finley, Gerstein et Neufeld ont raison en ce qui concerne la finalité partielle de ce projet de loi; il vise à contrebalancer les problèmes d'efficacité qui touchent le capital patient depuis de nombreuses années en raison des différents ordres de gouvernement qui ont le pouvoir d'effectuer des évaluations environnementales — et aussi parce que ces évaluations sont parfois réalisées de manière consécutive et indépendante. Cette situation peut exercer une grande pression sur le capital patient.

Nul doute qu'il faut faire quelque chose. La question est de savoir si c'est la bonne manière de le faire. Le sénateur McCoy a raison lorsqu'il soutient que nous manquons de temps pour déterminer si l'adoption d'une loi — plutôt que d'un règlement — est le moyen à privilégier.

Il est juste de dire — et je suis de cet avis — que cette série d'amendements a principalement pour effet de nous faire prendre conscience de la myriade de projets qui faisaient automatiquement l'objet d'une évaluation environnementale.

Les amendements qui sont proposés auraient comme conséquence première de dispenser nombre de ces projets des évaluations environnementales fédérales.

Aussi, le ministre disposerait d'une toute nouvelle autorité qui lui permettrait de décider des aspects sur lesquels devraient porter les évaluations environnementales. C'est ce que je retiens de ce que vous avez dit.

Ces règlements présumés temporaires et adoptés pour que les fonds destinés aux infrastructures agissent rapidement à cause de la situation économique et fiscale difficile que le Canada traversait à l'époque deviennent alors permanents. Tout le monde se souvient de l'expression « prêts à démarrer ». Nous devons émettre cet argent rapidement, mettre les gens au travail et c'est pourquoi nous allons devoir prendre quelques raccourcis. C'était la donnée initiale.

Si tout va de mieux en mieux et que le programme d'infrastructure a fonctionné, pourquoi cherchons-nous à rendre ces exclusions temporaires permanentes alors qu'elles servaient un but précis? Tout comme la Loi de l'impôt sur le revenu, par exemple.

M. Smith : Les exclusions dépendent du financement reçu par certains programmes de financement et un grand nombre de ces programmes ont une durée de vie de deux ans. Nous nous apercevons qu'ils tirent à leur fin. Certains de ces programmes de financement — notamment le plan Chantiers Canada — se prolongent au-delà de deux ans. On pourrait se retrouver avec certains projets qui en seraient à différentes étapes de planification, et peut-être même de mise en œuvre, touchés par les exclusions, qui devraient tout laisser tomber parce que les règlements se terminent au mois de mars prochain. Il faudrait tout laisser en plan pour revenir à une évaluation environnementale de ces projets qui étaient déjà en voie de planification et d'exécution.

Le sénateur Banks : Étant donné qu'il s'agit d'énoncer le type d'évaluation environnementale qui serait faite, et que nous ne les connaissons pas toutes, il serait juste de vous demander de nous renseigner au sujet des quatre types d'évaluation environnementale qui sont incluses au bas de la page 2 de votre déclaration et de nous dire si elles ont un ordre hiérarchique. Facile, ardue, plus difficile, très restrictive; pourriez-vous nous les décrire s'il vous plaît?

M. Smith : Nous ne nous exprimons pas en ces termes précis, mais c'est une hiérarchie probable. Elles ont toutes leurs différences. Des quatre que j'ai mentionnées, la médiation n'a jamais été utilisée. L'examen préalable est l'évaluation utilisée par défaut à moins qu'on ait recours à une autre.

Le sénateur Banks : Quand vous dites « par défaut », voulez-vous dire que c'est l'évaluation la moins intrusive?

M. Smith : C'est les deux. Si un projet doit subir une évaluation environnementale et que celle-ci n'est pas spécifiée, le projet subira un examen préalable.

Si, d'après le règlement, c'est un type de projet qui doit faire l'objet d'une étude approfondie, alors c'est ce que l'on fait. Les études approfondies examinent tous les facteurs d'un examen préalable, en plus d'autres facteurs additionnels, et il peut aussi y avoir la participation du public.

Pour les projets qui peuvent soulever certaines inquiétudes du public ou avoir des effets néfastes importants, le ministre de l'Environnement peut alors demander un examen par une commission. Celle-ci procède à des audiences publiques et forme une entité indépendante qui, après avoir fait l'évaluation, se rapporte au gouvernement.

M. Mongrain : Un projet qui fait l'objet d'un examen préalable peut faire ensuite l'objet d'un examen par une commission. Le ministre peut intervenir et l'exiger. Parfois, les autorités responsables suggèrent ce type d'évaluation à cause des questions environnementales et des inquiétudes du public qui sont soulevées et qui nécessitent l'examen d'experts indépendants. C'est le cas également des études approfondies qui, elles aussi, peuvent être référées à une commission. Tous les types d'évaluation peuvent monter en grade.

Le sénateur Banks : Si ce projet de loi est adopté, est-ce que ce serait encore le cas?

M. Smith : Oui. Cela ne change en rien le processus d'examen par une commission.

Le sénateur Banks : Beaucoup pourrait encore être fait pour procéder à un examen par une commission? Ceci n'est pas écarté. On pourrait en arriver là?

M. Smith : C'est exact. La seule chose qui change est ce qui a trait à la boucle, que j'ai mentionnée au début du processus d'étude approfondie, qui oblige à chaque fois de prendre une décision, à savoir si on continue avec l'étude approfondie ou si on soumet le tout à une commission. Ce processus est enlevé, mais la capacité de faire l'objet d'un examen par une commission existe toujours. Cette démarche peut être soit demandée par un représentant du ministère ou par le ministre de l'Environnement lui-même.

Le sénateur Banks : Supposons que le ministère des Pêches et des Océans demande un examen par une commission, est-ce que ce n'est pas obligatoirement ce qui va arriver?

M. Smith : En général, c'est le ministre de l'Environnement qui décide, mais si c'est une demande d'un ministère, l'examen par une commission sera accordé.

M. Mongrain : Nous n'avons jamais eu une situation dans laquelle un examen par une commission était refusé par un ministre.

Le sénateur Murray : Je suis intrigué par ce que vous avez dit concernant les examens préalables qui sont une sorte d'évaluation par défaut. J'imagine que les examens préalables sont faits très rapidement.

M. Smith : Certains examens préalables sont faits rapidement, mais d'autres peuvent être assez longs.

Le sénateur Murray : Pourquoi est-ce qu'un examen préalable n'était pas adéquat pour ces toilettes dans le parc national?

M. Mongrain : Si je peux, c'était une évaluation adéquate. D'ailleurs, elle a lieu en ce moment. L'honorable sénateur cherchait à donner quelques exemples de projets relativement insignifiants.

Le président : Il y avait un certain type d'évaluation environnementale, l'examen préalable.

Le sénateur Murray : Un examen préalable peut prendre une journée.

M. Smith : Non. Il faut qu'il prenne plus de temps que ça. Comme je l'ai dit, le terme « examen préalable » est quelque peu inapproprié. En général, lorsque l'on parle d'examen préalable, on s'attend à ce qu'il y ait une sorte de tri avec lequel on examine ce qui a besoin d'être évalué. Un examen préalable, d'après la loi, est en fait une évaluation environnementale. Certains facteurs doivent être étudiés, comme les effets environnementaux potentiels ainsi que l'importance de ces effets et aussi les inquiétudes éventuelles du public. Il faut aussi afficher certains renseignements dans le registre, et on ne peut terminer que 14 jours après la publication de cet avis. Le terme examen préalable décrit mal ce qu'il est, en fait. Les examens préalables ne prennent pas beaucoup de temps, mais un minimum de travail doit être fait.

M. Mongrain : La loi prévoit une période minimale entre l'avis de décision du processus environnemental d'examen préalable et l'affichage de cet avis.

Le sénateur Banks : C'est peut-être moins long, mais ce n'est pas court.

Nous en arrivons à la détermination de la portée. Vous avez raison quand vous dites que le ministre n'a pas en ce moment l'autorité de commander quelque chose, et ce serait bien qu'il ou elle puisse le faire. Ce que nous tentons de faire avec cette loi est de retirer de nombreux éléments de l'évaluation automatique fédérale, et de proposer que le ministre puisse, à l'égard de ces éléments qui ont été retirés, décider s'il devrait y avoir une évaluation dans un cas particulier.

Supposons que le ministre prenne cette décision, et qu'il détermine la portée de l'évaluation, prenons par exemple une mine qui émet des effluents à quelque part, si le ministère des Pêches et des Océans dit qu'il aimerait étudier les effets sur les pêches, le ministre a la capacité, d'après cette législation, de déterminer la portée et de la limiter à une partie du projet : pourriez-vous nous décrire comment tout cela se passe? Rappelons-nous que nous ne faisons pas des politiques ni des pratiques mais que nous créons des lois.

Est-ce que le ministre a, d'après la loi modifiée, l'autorité de dire au MPO : non, nous ne tiendrons pas compte de la question des pêches, nous allons uniquement étudier les sols et les effets que le projet pourrait avoir sur l'habitat des chevêches des terriers.

M. Smith : Si je reviens un peu plus tôt au début de votre question. Vous avez dit que certains éléments étaient exclus et que le ministre pouvait les ramener et en décider la portée. Vous vous êtes servi d'une mine comme exemple. Les mines ne font pas partie de la liste des exclusions, donc le ministre ne pourrait ramener ce projet.

Le sénateur Banks : Toutefois, c'est le cas de la détermination de la portée.

M. Smith : Oui, alors la mine rentrerait en compte. Le ministre n'a pas encore statué sur l'étendue de l'autorité en matière de portée, mais il a indiqué qu'elle ne visait pas à réduire la protection environnementale.

Indépendamment de la décision du ministre concernant la portée de l'évaluation environnementale, les exigences, les obligations et les pouvoirs du ministère des Pêches et des Océans demeurent, et les autorités de réglementation continuent à exercer leur pouvoir. Si des permis étaient nécessaires en conformité à la Loi sur les pêches, ils seraient encore exigés sans égard à l'évaluation environnementale.

Cependant, si vous avez un projet qui risque d'avoir des effets importants sur les pêches, c'est alors à la discrétion du ministre, mais je serais très surpris qu'il nous dise qu'il veut lui-même déterminer la portée de l'évaluation. Je serais surpris si ça arrivait. Il a indiqué que l'exercice de ce pouvoir ne visait pas à diminuer la protection de l'environnement.

Le sénateur Banks : Si ce projet de loi devient loi, le ministre sera investi d'une autorité supplémentaire, ce qui est tout nouveau, de même que d'autres au-dessus de lui qui sont en place maintenant, est-ce exact?

M. Smith : En ce moment, le pouvoir en matière de détermination de portée prévue dans la loi repose entre les mains des autorités responsables. Avec la décision de la Cour suprême, elles ont imposé des limites quant aux décisions qu'elle pouvaient prendre, ce qui donne le pouvoir au ministre de l'Environnement, et non pas aux autres, de réduire la portée d'un projet en étudiant seulement certaines de ces composantes.

Le sénateur Banks : Toutefois, vous avez dit, il y a à peine une minute, que cela ne réduirait pas l'autorité des autres. Qu'est-ce qui est vrai, est-ce que les deux sont vrais? Le ministre a plus de pouvoir, mais il ne vient de nulle part?

M. Smith : En ce moment, les autorités responsables ne sont pas habilitées à n'examiner que certaines composantes d'un projet.

Le sénateur Banks : Laissez-moi reformuler ma question. Le ministre gagne de l'autorité. Est-ce que quelqu'un d'autre perd une partie de son autorité?

M. Smith : Non.

M. Mongrain : Peut-être que je peux clarifier la question. Cela pourrait aider à répondre à la question du sénateur Murray.

M. Smith a souligné la décision de la Cour suprême concernant Mines Alerte Canada rendue en janvier cette année. Avant cette décision, tous les responsables du ministère de n'importe quelle autorité responsable de l'application de cette loi pouvaient établir la portée d'un projet. Nous parlons de 50 autorités fédérales et de 6 000 évaluations environnementales. La loi, telle qu'elle était comprise à ce moment-là — et cela était appuyé par certaines décisions de la Cour d'appel fédérale — pouvait établir la portée.

La Cour suprême, en janvier de cette année, a déclaré que la loi permettait de déterminer la portée mais non pas de la réduire, uniquement de l'élargir, si la portée du projet est telle que comprise ou présentée par le promoteur.

Le nouveau pouvoir que confère le projet de loi est un pouvoir discrétionnaire pour le ministre de l'Environnement lui permettant de modifier la portée d'un projet si les circonstances l'exigent, et de limiter cette portée si nécessaire. Pourquoi le ministre de l'Environnement? En se fondant sur notre expérience de plus de 15 ans, nous avons remarqué qu'octroyer ce type d'autorité à tous les responsables de tous les ministères qui appliquent cette loi, menait tout droit à la catastrophe. Le commissaire à l'environnement et au développement durable l'a souligné dans son rapport et a conclu en disant que l'organisme avait tenté de résoudre ces problèmes sans succès, étant donné son manque de pouvoir.

Les problèmes sont apparus là où il y avait plus d'une autorité fédérale responsable de la même évaluation environnementale. Dans ces situations personne n'est tout à fait responsable et, à tort ou à raison, différents points de vue sont exprimés. Nous avons des exemples où un même projet a dû faire l'objet de deux différentes évaluations environnementales faites par deux autorités responsables différentes.

Le sénateur Banks : Si cette loi avait été en vigueur à l'époque, la décision de la Cour suprême aurait été différente, non? Le contexte aurait été différent?

M. Smith : Le contexte aurait été différent.

Le sénateur Banks : En ce moment, 6 000 évaluations sont faites par 50 organismes différents. J'imagine que vous avez anticipé le nombre d'évaluations fédérales qu'il y aura si ce projet de loi devient loi, comparativement aux 6 000? Quelles sont vos approximations?

M. Smith : Les chiffres ne changeront pas de manière substantielle puisque les exclusions relatives aux projets d'infrastructure étaient déjà en place depuis un an. Selon certaines estimations du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, des milliers de projets seraient exclus, mais il reste toujours 6 000 évaluations. Il y en aurait eu beaucoup plus étant donné les nouvelles dépenses d'infrastructures. Sans les exclusions, il pourrait y avoir 8 000 ou 10 000 évaluations. On ne s'attend pas à ce que les changements aient un effet important sur le nombre d'évaluations.

Le président : Nous en sommes au deuxième tour et nous apportons de petites précisions.

Le sénateur McCoy : Convoquons-nous le groupe d'experts, monsieur le président?

Le président : Nous en sommes ce soir à la fin de la première étape de notre étude. Nous entendrons un groupe d'experts dans le domaine de l'environnement; en fait, nous entendrons plus d'un groupe d'experts dans ce domaine.

Le sénateur McCoy : Je me pose deux questions. Aux termes de l'article 7.3, qui est présenté à l'article 2153 du projet de loi, on dit que le ministre peut attester qu'il s'agit d'un projet d'infrastructure. Il peut confirmer que le projet fait partie de la liste d'exclusion, mais il peut affirmer qu'il veut le soumettre à une évaluation environnementale parce que le projet aurait probablement des effets néfastes sur l'environnement — ou pourrait entraîner des effets de ce genre. Je crois que, dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé des problèmes environnementaux imprévus.

J'aimerais savoir quel processus vous utiliserez pour soumettre un projet exclu à une évaluation environnementale. Je ne comprends pas pourquoi vous n'excluriez pas certains projets d'infrastructure importants.

M. Smith : Le processus ne figure pas dans la loi, mais un ministre peut être informé d'un projet de plusieurs façons. Nous pourrions en entendre parler; comme je l'ai dit, nous avons des bureaux régionaux partout au pays. Les citoyens concernés peuvent entendre parler d'un projet et demander pourquoi il n'est pas soumis à une évaluation. Les ministères qui administrent des fonds peuvent être d'avis qu'un projet répond aux critères relatifs à la liste d'exclusion mais qu'il comporte des caractéristiques nécessitant une évaluation environnementale. Par conséquent, ils pourraient demander une évaluation environnementale. Plusieurs raisons peuvent expliquer pourquoi le ministre en entend parler et prend une décision donnée.

Le sénateur McCoy : Les raisons sont très diversifiées.

Le sénateur Banks : L'entité peut également le faire d'elle-même, sans passer par le ministre.

M. Smith : Nous n'avons pas le pouvoir de soumettre le projet à une évaluation environnementale, mais nous pouvons conseiller le ministre.

Le sénateur Banks : À l'article 2154, on dit que malgré toutes les autres dispositions de la loi, si l'entité considère qu'un projet « pourrait » être nécessaire et si les autres entités n'en sont pas responsables, elle peut le réaliser.

M. Smith : Sauf que l'article 2154 s'applique aux études approfondies, et il n'y a rien dans la liste d'exclusion qui nécessiterait une étude approfondie. Il y a une hiérarchie; le règlement précise que le gouverneur en conseil peut exclure des projets lorsqu'il est convaincu qu'ils ont des effets peu importants. Une étude approfondie est nécessaire lorsqu'il peut y avoir des effets importants, alors il n'y a aucun chevauchement.

Le sénateur McCoy : Mon autre question concerne l'article 21.1, que l'on trouve à l'article 2156. L'ancien article 21.1 a été supprimé, et le nouvel article ne concerne que l'affichage de renseignements sur Internet.

L'ancien article faisait référence au ministre, lorsqu'il recevait une recommandation de l'autorité responsable — en lien, je crois, avec une étude approfondie; le ministre devait décider s'il procédait à une étude approfondie ou s'il mettait sur pied une commission d'examen. Cela ne figure plus dans l'article.

M. Smith : C'est exact.

Le sénateur McCoy : Est-ce que ça signifie qu'il n'y a plus de commission d'examen?

M. Smith : Non, la seule chose qui n'existe plus, c'est le processus obligatoire qui s'appliquait aux études approfondies. Il fallait passer par ce processus de prise de décision. Avant qu'une évaluation environnementale soit entreprise, l'autorité responsable devait rédiger un rapport pour préciser si elle croyait que le projet devait faire l'objet d'une étude approfondie ou d'une évaluation par une commission d'examen. Elle allait voir le ministre; le ministre prenait sa décision, et c'était une décision définitive.

C'est ce processus qui ne figure plus dans l'article. Cependant, il n'y a aucun changement au pouvoir des ministères de demander une commission d'examen ou à celui du ministre de mettre sur pied, de son propre chef, une commission d'examen pour un projet qui nécessite une évaluation environnementale.

Le sénateur McCoy : C'est à l'article 29 de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, la LCEE, si j'ai bien fait mes devoirs.

M. Smith : C'est exact.

Le sénateur McCoy : Quand une commission d'examen est-elle établie? Comment cela se passe-t-il?

M. Smith : Ça peut se faire de nombreuses façons. Le plus souvent, dès le début, que l'on soit en présence d'un examen préalable ou une étude approfondie, l'autorité responsable détermine si une commission d'examen devrait être établie en fonction des précédents et des caractéristiques du projet. Maintenant, si les changements sont adoptés, dans le cas d'un processus d'étude approfondie, c'est l'entité qui déciderait qu'une commission d'examen est nécessaire.

Le sénateur McCoy : Je crois qu'une approche efficace fondée sur les risques dans le cadre de ces processus représente les meilleures intentions du monde mais, honnêtement, je ne sais pas si cette loi permet de le faire. On peut toujours faire les choses comme avant; mais maintenant il faut les faire au lieu d'avoir toutes les responsabilités.

M. Mongrain : C'est bien cela la différence. À l'avenir, une seule organisation, ayant comme unique mandat l'évaluation environnementale, aura la responsabilité de ces projets d'envergure plutôt que trois, quatre ou cinq autorités fédérales dont les mandats, les intérêts et les points de vue sont différents concernant ce qu'on devrait évaluer.

Est-ce que ce sera parfait? Bien sûr que non, mais nous ferons de notre mieux.

Le sénateur McCoy : Rendez-vous des comptes au ministre de l'Environnement?

M. Mongrain : Oui.

Le sénateur McCoy : De qui relève le Bureau de gestion des grands projets?

M. Mongrain : Du ministre des Ressources naturelles.

Le sénateur McCoy : Étant donné l'augmentation de 60 p. 100 de votre budget il y a trois ans au profit du BGGP, qui relève de RNCan, comment gérerez-vous la situation?

M. Smith : Cette augmentation du budget était rattachée à la création du Bureau de gestion des grands projets et de l'initiative globale liée à une meilleure gestion de l'évaluation environnementale et de la réglementation des grands projets. Cet argent n'a pas tout été versé au BGGP. Le BGGP a été créé de toutes pièces, si bien qu'il a obtenu du financement pour assurer son fonctionnement; mais des cinq, six ou sept ministères qui ont obtenu du financement dans le cadre de cette initiative, c'est notre agence qui a obtenu la part la plus importante.

M. Mongrain : Nous avons reçu 11 millions de dollars, et le DGGP en a reçu 4 millions. Ça représente le type de rôle que le gouvernement envisageait pour notre agence à ce moment-là. C'est un peu comme si la loi essayait de rattraper le retard pris par rapport aux ressources et aux processus administratifs mis en place au cours des trois dernières années.

Le président : Je suppose que ces fonds ont été versés dans le cadre du Budget principal des dépenses.

M. Mongrain : Oui, ils ont été versés par le biais du processus budgétaire normal.

Le président : C'est nous qui avons voté pour vous accorder ce financement. C'est bien de savoir ce pour quoi nous avons voté.

M. Mongrain : Nous vous remercions.

Le sénateur Ringuette : Dans la première partie de nos questions, vous précisiez constamment dans vos réponses qu'un règlement temporaire serait transformé en une loi permanente. Ce sujet revenait toujours sur le tapis. Toutefois, les trois quarts du temps avant la réunion, vous parliez d'une décision de la Cour suprême de janvier 2010.

M. Mongrain : Oui.

Le sénateur Ringuette : Selon cette décision, la portée devait être élargie et ne devait pas être limitée au moyen d'un point de repère. En fait, en ce qui a trait à l'établissement de la portée, cette loi va à l'encontre de la décision de la Cour suprême. Il n'y a plus de point de repère maintenant, parce que ça n'a plus d'importance que le ministre décide que la portée soit qualitative ou quantitative. Par conséquent, la décision de la Cour suprême est renversée par cette loi.

M. Smith : J'aimerais simplement mentionner encore qu'en entrée en matière, on faisait référence au fait de rendre les exclusions permanentes, et c'est différent de l'établissement de la portée.

Avant la décision de la Cour suprême, les ministères pouvaient déterminer la portée des projets. C'est toujours ce qui est indiqué dans la loi et c'est ce qui y sera indiqué si ces amendements sont adoptés. Les ministères déterminent la portée. Avant la décision de la Cour suprême, les ministères pouvaient examiner le projet dans son ensemble ou en examiner seulement certains aspects. Selon la Cour suprême, ils peuvent toujours déterminer la portée, mais la portée minimale doit être ce qui a été présenté par le promoteur, bien qu'elle puisse être élargie. C'est donc dire qu'on pouvait examiner très peu d'éléments, quelques éléments ou l'ensemble du projet. La Cour suprême a établi que le minimum devait correspondre au projet proposé par le promoteur.

Les amendements proposés ne visent pas à revenir en arrière et à permettre à tous les ministères et à tous les fonctionnaires mentionnés par M. Mongrain d'examiner quelques éléments au lieu du projet dans son ensemble. Le pouvoir de modifier la portée en ne conservant pas tout ce qui a été proposé par le promoteur n'est du ressort que du ministre de l'Environnement, alors on ne fait pas de retour en arrière.

Le sénateur Ringuette : Que vous examiniez la qualité ou la quantité, l'établissement de la portée ne relève maintenant que du ministre.

M. Smith : Si on parle du pouvoir de ne tenir compte que de quelques éléments du programme, c'est effectivement le cas.

Le président : Au nom du Comité sénatorial permanent des finances nationales, je remercie MM. Smith et Mongrain, de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, de leur présence et de leur contribution à la partie 20 du projet de loi C-9. C'était très utile, et nous vous remercions du temps que vous nous avez consacré.

Chers collègues, nous venons de terminer l'étape 1, où les fonctionnaires nous ont expliqué le projet de loi. Nous avons été très indulgents en ce qui a trait aux questions que vous avez posées pour comprendre la loi, mesdames et messieurs les sénateurs. Mais maintenant, nous passons à la deuxième étape, où nous entendrons les groupes d'experts touchés par la loi. Le temps accordé aux témoins est limité, alors nous devrons être plus vigilants en ce qui concerne les questions posées pour que tout le monde ait l'occasion de parler et de poser des questions.

Demain matin, à 9 heures, nous commencerons par les enjeux concernant Énergie atomique du Canada limitée, y compris les aspects touchant la santé, les entreprises, le réacteur CANDU et la portée générale de la législation. Nous commencerons ainsi, et différents groupes d'experts viendront discuter de ces enjeux.

Vous avez reçu un exemplaire du rapport concernant le Budget supplémentaire des dépenses (A). Je sais que vous n'avez pas encore eu le temps de l'examiner, mais si nous pouvions en discuter demain — ce serait bien que ce soit le premier point à l'ordre du jour en après-midi. Ensuite, si nous pouvions obtenir une approbation à cet effet, nous aimerions déposer le rapport et passer le temps qu'il nous reste sur le rapport. Ce soir, nous n'avons pas eu le temps d'étudier le projet de loi de crédits en fonction du Budget supplémentaire des dépenses (A), mais de l'avis de certaines personnes, il ne peut pas être adopté en entier avant l'approbation d'un rapport par le Sénat. Nous aimerions que ce soit fait. Le sénateur Gerstein et moi essaierons de trouver du temps pour en discuter. Nous devrons aussi, durant notre pause, parler des deux projets de loi de crédits. C'est tout ce que nous aurons à faire. Nous devons travailler au projet de loi C-9 et aux deux projets de loi de crédits, alors tenons-nous en à cela. Ça va très bien jusqu'à maintenant. Merci beaucoup à tous de votre présence.

(La séance est levée.)


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