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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 14 - Témoignages du 30 juin 2010


OTTAWA, le mercredi 30 juin 2010

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales, auquel a été renvoyé le projet de loi C-9, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 4 mars 2010 et mettant en œuvre d'autres mesures, se réunit aujourd'hui, à 9 h 7, pour étudier le projet de loi (sujet : parties 3, 5, 22 et 24).

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des finances nationales. Honorables sénateurs, c'est notre 16e réunion au sujet du projet de loi C-9, projet de loi d'exécution du budget de 2010. Le sénateur Neufeld souhaite dire à tous qu'il s'agit d'un document de 900 pages qui comporte 24 parties. Nous allons traiter de l'une d'elles ce matin.

Au cours de nos réunions précédentes, le comité a entendu les témoignages de responsables ministériels, du ministre des Finances ainsi que d'intervenants de l'extérieur qui sont soit intéressés ou, touchés ou qui seront touchés par cette mesure législative si elle vient à être adoptée.

Ce matin, nous allons continuer d'entendre des intervenants de l'extérieur. Au cours de cette réunion, nous allons traiter de quatre parties du projet de loi, plus précisément les parties 3, 5, 22 et 24.

La partie 22 traite de paiements à certaines entités. Il s'agit de transferts du gouvernement à certaines entités et mes collègues se souviendront que cette partie prévoyait des paiements maximums à quatre différents organismes, notamment la Fondation canadienne des jeunes entrepreneurs, Génome Canada, Passeport pour ma réussite Canada ainsi que la Fondation Rick Hansen.

De ces quatre, Génome Canada est l'organisme qui reçoit le plus d'argent, et nous sommes heureux d'accueillir M. Dale Patterson, chef de la direction intérimaire et vice-président, Relations externes, ainsi que Cindy Bell, vice-présidente exécutive, Développement corporatif, Génome Canada, et M. Guy D'Aloisio, directeur financier.

Dale Patterson, chef de la direction intérimaire et vice-président, Relations externes, Génome Canada : Merci beaucoup. Bonjour. Je suis heureux d'être ici ce matin devant votre comité.

Comme bon nombre de vous le savent, Génome Canada est une société sans but lucratif dont le mandat principal est de financer et de servir de ressource d'informations à la recherche en génomique au Canada, selon un modèle unique de collaboration fédérale-provinciale. Génome Canada a adopté une approche dynamique et systématique, ciblant ses activités exclusivement dans le domaine de la recherche en génomique axée sur l'obtention de résultats tangibles et mesurables. Cette approche a permis au Canada d'occuper une place de choix parmi les chefs de file mondiaux de la recherche en génomique dans les secteurs d'activités suivants : la santé humaine, l'agriculture, l'environnement, la foresterie, les pêches et le développement de nouvelles technologies.

De plus, Génome Canada continue de jouer un rôle de premier plan dans ce que nous appelons GE3LS, c'est-à-dire les aspects éthiques, environnementaux, économiques, légaux et sociaux de la recherche en génomique.

L'une des forces de Génome Canada est son réseau de centres régionaux en génomique dispersés au pays; six ont été mis sur pied depuis 2000. Ces centres sont incorporés de manière indépendante et agissent à titre de point central pour l'expertise et les intérêts locaux en facilitant l'accès à des centres d'innovation de science et de technologie de haut niveau. Ces centres fournissent aux chercheurs l'expertise et la technologie nécessaires pour entreprendre des recherches en génomique, comme le séquençage de l'ADN. Ils appuient également les chercheurs dans leurs projets de développement, de gestion et de collecte de fonds.

Ces centres à vocation régionale permettent de fournir des services en matière de collecte de fonds, de relations gouvernementales, d'activités de sensibilisation et d'activités éducatives taillées sur mesure pour les besoins et les priorités régionales. Les centres et les scientifiques travaillent également ensemble pour assurer le cofinancement de chaque projet dans une proportion d'au moins 50 p. 100 des coûts totaux de chaque projet. L'annexe A du document que nous avons distribué traite des centres de génomique et des centres d'innovation de science et de technologie du Canada.

Nous sommes fiers de notre bilan. Nous sommes confiants dans l'avenir et dans la capacité de Génome Canada de consolider les trois éléments clés de la stratégie du gouvernement en matière de science et de technologie soit l'avantage du savoir, l'avantage humain et l'avantage entrepreneurial. À cette fin, le dernier budget fédéral a octroyé un financement additionnel de 75 millions de dollars à Génome Canada, et nous en sommes très reconnaissants.

Lors de notre réunion au mois de mars 2010, le conseil d'administration de Génome Canada a agi rapidement pour veiller à ce que ces nouveaux fonds soient investis dans les secteurs qui sont importants pour les Canadiens. Premièrement, nous avons annoncé que 15 millions de dollars seraient investis dans un concours qui viserait à appuyer les centres d'innovation de science et de technologie. Il s'agit d'une somme additionnelle aux 9 millions de dollars déjà existants, ce qui donne un financement total de 24 millions de dollars pour offrir aux chercheurs en génétique et en génomique l'accès aux technologies de pointe ainsi qu'aux services d'experts pendant les deux prochaines années.

Deuxièmement, jusqu'à 60 millions de dollars seront destinés à un concours ciblé et multisectoriel combiné pour projets à grande échelle qui mettra l'accent sur les rendements économiques d'importance. Au moins 30 millions de dollars seront investis dans la recherche dans les secteurs de la foresterie et de l'environnement, et jusqu'à 30 millions de dollars viendront appuyer les autres secteurs de recherche importants et stratégiques de Génome Canada, soit l'agriculture, les pêches et la santé humaine.

Afin que les chercheurs aient rapidement accès à ces fonds, tout en nous assurant que nous finançons la crème de la crème, nous avons amélioré notre processus d'examen et accéléré le lancement de ces deux concours. Le concours pour les projets à grande échelle a été lancé au mois de mai, et celui pour les centres d'innovation de science et de technologie, au mois de juin.

Pour vous offrir les renseignements les plus récents, voici certaines statistiques qui ont été recueillies dans les formulaires d'inscription présentés à Génome Canada relativement au concours pour les projets à grande échelle. Nous avons reçu un total de 183 inscriptions, dont 56 sont ciblées et 128 sont multisectorielles. La ventilation par région est la suivante : 37 de la Colombie-Britannique, 20 de l'Alberta, 19 des Prairies, 62 de l'Ontario, 31 du Québec et 14 du Canada atlantique.

L'excellence est le seul critère qui compte pour Génome Canada et le seul qu'elle financera. C'est pourquoi chaque projet doit tout d'abord être examiné par un comité international d'experts pour veiller à ce que les meilleures recherches du Canada soient les meilleures recherches au monde, et qu'elles puissent éventuellement produire des applications pertinentes par le transfert de connaissances et le développement des technologies.

Génome Canada reconnaît également ses obligations en matière de responsabilité en ce qui a trait au financement qu'elle reçoit du gouvernement fédéral. C'est pourquoi ses opérations ont été à maintes reprises examinées par des tierces parties au cours des cinq dernières années. Nous avons notamment fait l'objet d'une vérification de la conformité par Industrie Canada, d'une évaluation sommative par des vérificateurs externes ainsi que d'une vérification de gestion. Les résultats sont affichés sur le site web de Génome Canada. Des vérifications sur les bénéficiaires des centres régionaux en génomique sont également effectuées pour les projets financés afin d'assurer la conformité aux conditions générales de financement. Cela s'ajoute aux conditions de l'entente de financement avec Industrie Canada.

Depuis la création de Génome Canada, ses chercheurs ont défrayé la manchette : ils ont établi la cartographie des variations du génome humain, découvert les différences clés dans l'ADN de personnes atteintes d'autisme, déterminé les facteurs de risque du diabète de type 2, procédé au séquençage du virus du SRAS, fait une percée majeure dans le traitement du cancer du sein, créé de nouveaux outils pour diagnostiquer les rejets de greffes d'organes, conçu de nouvelles biotechnologies qui minimisent les impacts environnementaux de la production de sables bitumineux, conçu des variétés de blé plus résistantes aux changements climatiques ainsi qu'amélioré la sélection des saumons de l'Atlantique pour les marchés commerciaux importants à l'aide de leurs études en génomique. Tout ceci a été possible grâce au soutien des parlementaires ainsi que d'un grand nombre de sénateurs ici aujourd'hui. Certaines de ces réussites sont également jointes au document que vous recevez ce matin.

Finalement, Génome Canada procède à un certain nombre de modifications à l'interne afin de préparer l'organisme aux cinq prochaines années.

Génome Canada est dirigé par un conseil d'administration dont les membres servent un mandat de deux ans. Une de nos priorités est le renouvellement du conseil. Lors de notre dernière réunion, nous avons entériné l'ajout de six nouveaux administrateurs, qui possèdent l'expertise, le talent et les compétences qui nous aideront à guider l'organisme au cours des cinq prochaines années.

À la suite du départ de notre président fondateur et PDG en octobre 2009, nous avons retenu les services d'une agence de recrutement de cadres pour nous aider à trouver son remplaçant. Nous devrions être en mesure d'avoir un successeur d'ici le début de l'automne.

Le Comité consultatif science et industrie procède également au renouvellement de ses membres avec comme objectif de s'investir dans l'élaboration du plan stratégique scientifique. Il aura également un rôle plus important dans la coordination de la génomique aux niveaux national et international.

Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions concernant Génome Canada. Manifestement, nous encourageons l'adoption de ce projet de loi.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Patterson. Quelle est la taille de votre conseil et avez-vous des règles qui régissent la représentation régionale?

M. Patterson : Notre conseil est composé de 16 membres. Quatorze d'entre eux sont nommés. Les règles définissent la représentation régionale. Chaque région du pays doit être représentée. Il y a en ce moment deux vacances qui seront comblées à l'automne et qui concernent les régions de l'Ouest et du Canada atlantique. Nous avons également des représentants internationaux. Certains de nos membres sont des États-Unis. C'est un milieu d'envergure internationale, nous ne cherchons donc pas uniquement à représenter chaque coin du pays mais également à attirer des experts internationaux.

Nous avons établi une matrice très détaillée des caractéristiques dont nous avons besoin. C'est un processus perpétuel pour nous.

Le Comité consultatif science et industrie est une autre entité internationale au sein de laquelle nous cherchons à attirer des experts du monde entier afin d'améliorer notre travail.

Le président : Est-ce que le groupe consultatif et scientifique reçoit un tarif journalier pour se réunir ou comment procédez-vous?

M. Patterson : Les membres de ce comité reçoivent une commission annuelle et aussi une commission par réunion. Ce type de rémunération fait partie des choses que nous tentons de renouveler. Ils se sont réunis trois fois par année jusqu'à présent, mais nous aimerions que ce groupe soit beaucoup plus impliqué, non seulement pour formuler des conseils, mais également pour collaborer avec le conseil et notre personnel, en formulant des avis sur les processus d'inscription et de concours.

Le président : Et finalement, en matière de gouvernance, y a-t-il des sièges à ce conseil qui sont réservés pour le gouvernement ou pour un secteur en particulier?

M. Patterson : Au sein du conseil, nous avons des membres d'office qui représentent les conseils subventionnaires. Nous avons également un poste d'observateur pour un représentant d'Industrie Canada. Industrie Canada participe à toutes nos réunions.

Le président : Est-ce que c'est un poste votant d'office?

M. Patterson : Non.

Le président : Ce n'est qu'un poste d'observateur?

M. Patterson : C'est exact.

Le président : Est-ce que la vérificatrice générale a le droit de vérifier Génome Canada?

Guy D'Aloisio, CMA, vice-président, Finances, Génome Canada : Notre accord de financement stipule que la vérificatrice générale peut procéder à une vérification.

Le président : Avez-vous subi une vérification de la vérificatrice générale?

Guy D'Aloisio : Non.

Le président : Toutes ces informations sur le contexte sont très utiles et je vous remercie de nous avoir renseignés.

Le sénateur Mitchell : Nous sommes tous conscients de la grande renommée nationale et internationale de Génome Canada. C'est un privilège de vous avoir ici.

Dans le passé, vous faisiez des recherches sur les cellules souches. J'ai écouté et j'ai lu, et je ne vois aucune mention de recherche sur les cellules souches. Poursuivez-vous ces recherches? C'était une part importante de vos travaux.

Cindy Bell, vice-présidente exécutive, Développement corporatif, Génome Canada : Nos travaux dans le domaine des recherches sur les cellules souches en ce moment se concentrent sur les cellules souches cancéreuses, qui sont des cellules initiatrices du cancer. Ce sont des cellules souches adultes que l'on croit être à l'origine des causes du cancer. Il ne s'agit pas de cellules souches embryonnaires humaines. Si nous devions financer des recherches dans un autre secteur que les cellules souches adultes, nous respecterions toutes les règles, protocoles et examens imposés par les Instituts de recherche en santé du Canada.

Le sénateur Mitchell : Je ne suis pas autant préoccupé par le fait que vous fassiez ces recherches, mais plutôt par le fait que vous pourriez ne pas les faire. Ce sont des recherches primordiales, de ce que j'en comprends. Ce qui me préoccupe est qu'un gouvernement qui ne soutient pas ce type de recherche puisse vous décourager. Il y a deux ans, lorsque j'ai appris que votre financement avait été réduit de façon dramatique, je me suis demandé si cela n'avait pas un lien avec vos recherches sur les cellules souches.

Faisiez-vous des recherches sur les cellules souches embryonnaires? À quel moment avez-vous décidé d'arrêter et de concentrer vos recherches sur les cellules souches cancéreuses?

Mme Bell : Nous n'avons pas décidé d'exclure un quelconque type de recherche sur les cellules souches. Tout dépend des demandes que nous recevons et de leur niveau d'excellence. Nous n'avons, en aucun cas, été découragés de financer ces recherches. Comme je l'ai dit, toutes les recherches que nous finançons doivent passer par le processus d'approbation éthique. Si cette recherche satisfait aux normes, et qu'elle atteint le niveau d'excellence, alors nous la financerons.

Le sénateur Mitchell : De quel ordre ont été les coupures que vous avez subies il y a deux ans, avez-vous récupéré ces sommes aujourd'hui?

M. D'Aloisio : Je ne sais pas si on peut à proprement parler de coupures. Nous recevons des subventions uniques. Nous avons reçu 100 millions de dollars dans le budget 2007, 140 millions de dollars dans le budget 2008, en 2009 nous n'avons rien reçu, et dans le budget 2010 nous avons eu 75 millions de dollars. Ces fonds nous permettent de couvrir nos opérations jusqu'en 2012-2013, et nous donnent également l'argent pour financer nos recherches. Il est plus exact de dire que pendant une année nous n'avons pas reçu de financement, que de dire que nous avons été « coupés ». Je ne suis pas certain que ce soit le terme juste.

Le sénateur Mitchell : Ou vous pourriez dire qu'en deux ans, vous avez reçu 240 millions de dollars et que pour les deux années suivantes vous avez reçu 75 millions de dollars.

M. D'Aloisio : C'est exact.

Le sénateur Mitchell : Avant l'année zéro, est-ce qu'au cours des 10 ou 15 années précédentes il y a eu une année où vous n'avez reçu aucun financement?

M. D'Aloisio : Il y a eu une année où aucun financement n'a été annoncé, c'est exact.

Le sénateur Mitchell : J'ai remarqué avec grand plaisir que vous avez deux projets qui sont mentionnés dans votre exposé — et j'aime bien les titres : Plants Get Stressed Out, Too et Seeing the Forest and Saving the Trees — qui se penchent sur les changements climatiques. Est-ce que les changements climatiques sont un sujet qui préoccupe plus particulièrement votre organisme?

Mme Bell : Génome Canada soutient cinq secteurs primaires. L'un d'eux est l'environnement, l'autre les forêts. Au cours des années, un certain nombre de nos projets ont relié ces deux secteurs. Alors que les changements climatiques sont une question de plus en plus importante, nous avons reçu des projets qui traitent de cette question. En 2008, nous avons tenu un concours qui s'intéressait aux cultures et aux bioproduits. Les projets concernant le secteur des bioproduits traitaient de l'impact des changements climatiques sur l'énergie, examinaient les différents types de biocarburants, s'intéressaient aux façons de rendre les sables bitumineux plus verts et sur les façons de soustraire le pétrole de la terre en produisant moins de sous-produits et en utilisant moins d'eau.

Dans le concours qui se déroule en ce moment, une enveloppe a été créée pour soutenir les projets de recherche dans les secteurs de l'environnement et des forêts.

Le sénateur Mitchell : Ces projets semblent s'intéresser beaucoup à l'adaptation. Vous produisez du blé qui s'adapte au changement climatique.

Mme Bell : Oui.

Le sénateur Mitchell : Vous travaillez sur l'utilisation de l'eau, il s'agit donc plus d'adaptation que de mesures d'atténuation dans le sens de réduire des émissions ou de traiter différemment avec les émissions. Prévoyez-vous vous investir dans ce type de recherche également?

Mme Bell : Je crois que nous allons recevoir de tels projets dans le cadre du concours actuel. Cela fait très certainement partie de la portée du concours et ce secteur a été désigné comme étant admissible au financement dans le cadre du concours actuel relatif à l'environnement.

Le sénateur Mitchell : Bien. Merci.

Le sénateur Gerstein : J'aimerais revenir aux observations que vous avez faites au début relativement à la gouvernance. J'aimerais informer tous les membres du comité que j'ai eu le grand honneur de présider le conseil du Mount Sinai Hospital de Toronto, un chef de file en matière de recherche et d'enseignement. Je suis toujours directeur honoraire, mais je crois que, au cours des années, Mount Sinai a bien dû présenter des demandes de financement à Génome Canada. Je voulais simplement qu'il soit clair que je n'ai plus d'intérêt dans la situation en ce moment.

Le président : Merci. Il est important de faire ces déclarations.

Monsieur D'Aloisio, j'aimerais clarifier quelque chose. Alors que vous sortiez des chiffres rapidement, j'ai noté qu'en 2008 vous avez reçu 140 millions de dollars.

M. D'Aloisio : Oui.

Le président : En 2009, rien.

M. D'Aloisio : C'est exact.

Le président : Est-ce qu'on pourrait dire qu'en 2008 il s'agissait de 140 millions de dollars pour deux ans?

M. D'Aloisio : Ces 140 millions de dollars comprenaient le financement des opérations de Genome Canada pendant trois ans, jusqu'en 2012-2013. La grande part était pour financer nos secteurs de recherche. Ils sont financés sur plusieurs années aussi, si vous comprenez ce que je veux dire. Nous autorisons les projets, mais nous ne déboursons pas tout d'un coup. Nous finançons au fur et à mesure que les besoins sont ressentis au cours du projet.

Le président : En 2007, vous avez reçu 100 millions de dollars.

M. D'Aloisio : Oui, c'est cela.

Le président : En 2005, c'était 165 millions de dollars.

M. D'Aloisio : C'est probablement vrai. C'était avant mon temps, mais je crois que c'est exact.

Le président : Il n'y a rien eu en 2006. Peut-on supposer que la subvention précédente aidait aux coûts d'opérations, et cetera?

M. D'Aloisio : Oui, en fait il y a deux composantes. Nous sommes financés pour l'éclairage, le chauffage et l'eau nécessaires à nos programmes jusqu'en 2012-2013. Tout cela est couvert par les 140 millions de dollars de 2008. Rien des 75 millions de dollars n'a été alloué aux opérations.

Le président : Avez-vous dit 2012-2013?

M. D'Aloisio : C'est exact.

Le président : C'est couvert par les 140 millions de dollars de 2008.

M. D'Aloisio : C'est exact.

Le président : Et c'est donc pour l'exercice financier de 2012-2013. En 2009, vous n'avez rien reçu d'autre.

M. D'Aloisio : Non.

Le président : Cette année, vous avez reçu 75 millions de dollars pour cinq ans?

M. D'Aloisio : Quand vous dites « pour cinq ans », en fait nous estimons que pour nos projets — et nous prévoyons des projets de trois ou quatre ans — nous débourserons jusqu'en 2014-2015. Nous versons de l'argent au fur et à mesure qu'il est demandé pour chaque projet.

Le président : Les responsables du gouvernement nous ont dit plus tôt que 75 millions de dollars avaient été versés pour les cinq prochaines années.

M. D'Aloisio : Oui.

Le président : Et vous ne vous sentez pas limités, si vous voulez en dépenser 70 millions de dollars cette année, vous avez l'impression que vous pouvez le faire.

M. D'Aloisio : Quand vous dites « dépenser », c'est-à-dire que nous engageons des fonds dans deux concours comme l'a dit Mme Bell. La totalité des 75 millions de dollars seront engagés. Lorsque nous paierons réellement des sous, ce sera tout au long de la durée du projet, mais l'argent est complètement engagé.

Le président : Est-ce que ces deux projets ont une durée prévue de cinq ans?

Mme Bell : Les projets de recherche pour ce concours auront une durée de trois ans.

M. Patterson : Pour clarifier un petit peu plus la question, si vous nous demandez si nous allons revenir l'année prochaine pour avoir d'autre argent, la réponse est oui, c'est un exercice annuel. Il ne faut pas confondre l'allocation dans un budget avec les paiements ou le flux d'argent, parce que ces fonds sont engagés. Nous prévoyons engager d'autres fonds dans le prochain budget. Nous travaillons étroitement avec Industrie Canada et Finances Canada alors que nous irons de l'avant cet automne avec notre plan de match et nos priorités relativement à ce que nous voulons faire. Nous allons retourner dans les ministères faire notre tournée à l'automne et au cours de la nouvelle année, mais nous allons revenir.

Cette année, nous espérons que notre demande inclura un aspect pluriannuel. Ce sera la première fois que nous procéderons année après année. Afin d'entrevoir un peu de certitude et de planifier les prochaines années, nous croyons qu'il est essentiel qu'un financement pluriannuel soit établi. Nous allons revenir et le demander pour la prochaine année.

Le président : Quand je vais parler de fonctionnement, ça voudra dire le fonctionnement interne, et par là je veux dire ce que coûte l'exploitation des machines. Quels sont vos besoins à cet effet chaque année?

M. D'Aloisio : Vous demandez combien il nous faut pour exercer nos activités.

Le président : Oui.

M. D'Aloisio : Au cours des cinq dernières années, Industrie Canada nous a accordé 9 millions de dollars par année. Cependant, pendant les deux premières années, nous n'avons pas dépensé les 18 millions de dollars que nous avions; nous avons économisé environ 3,5 millions de dollars. Au cours des trois dernières années — ce qui représente 27 millions de dollars sur trois ans —, nous avons demandé à Industrie Canada si notre entente de financement pouvait être modifiée afin qu'elle puisse être réduite de 3 millions de dollars, qui seraient consacrés à la recherche. Notre demande a été acceptée. Au cours des trois prochaines années, nous nous sommes engagés à exercer nos activités en fonction d'un budget total de 24 millions de dollars sur trois ans, soit de 8 millions de dollars par année en moyenne.

Le président : Cet argent provient-il des montants que nous examinons, par exemple, les 75 millions de dollars?

M. D'Aloisio : Non, il s'agit de montants distincts.

Le président : Les sommes proviennent chaque année de l'allocation et des crédits d'Industrie Canada.

M. D'Aloisio : Oui, elles font partie de notre subvention. Nous sommes l'un des détenteurs d'une subvention d'Industrie Canada.

Le président : C'est utile.

Le sénateur Callbeck : Vous avez six centres partout au pays. Où sont-ils situés?

M. Patterson : Nous avons des centres à Vancouver, Calgary, Saskatoon, Winnipeg, Toronto, Montréal et Halifax.

Le sénateur Callbeck : Où sont situés les six centres d'innovation de science et de technologie?

Mme Bell : Pour ce qui est de nos six centres d'innovation de science et de technologie, de l'ouest à l'est, nous avons notre centre de protéomique de Génome Colombie-Britannique et de l'Université de Victoria. À Vancouver, nous avons le Genome Sciences Center, qui se consacre au séquençage de l'ADN, au génotypage, et cetera, et qui comprend également une installation de biopuces. À Calgary, nous avons notre plateforme de bioinformatique ou centre d'innovation; à Toronto, nous avons le TCAG, c'est-à-dire un centre multitechnologie axé surtout sur le séquençage et un peu sur la protéomique et la cytogénomique. À Montréal, nous avons également une plateforme, un centre d'innovation, qui concentre surtout ses activités sur le séquençage et le génotypage, et un peu sur la protéomique.

Le sénateur Callbeck : Des 12 centres, y en a-t-il seulement un au Canada atlantique?

Mme Bell : Les centres régionaux de génomique sont des organisations de gestion qui imitent Génome Canada, mais qui sont situés en région. Ils ont pour rôle de travailler au sein de leur région pour obtenir un cofinancement. Pour chaque dollar provenant du gouvernement fédéral que nous investissons, nous devons aller chercher un autre dollar. Ils travaillent avec leurs industries et scientifiques régionaux et les aident à développer et à suivre les applications de Génome Canada. Il nous faut un centre dans chaque région, et il y en a un à Halifax pour couvrir la région de l'Atlantique.

Les centres d'innovation sont des plateformes de services technologiques et ils sont situés partout au Canada grâce, encore une fois, à un processus d'inscription qui a commencé lors de notre tout premier concours. À l'origine, il y avait une plateforme de séquençage à Halifax et lorsqu'on a procédé à un examen au terme des cinq premières années, on a déterminé qu'il n'était pas nécessaire d'assurer une plateforme de séquençage à cet endroit. Comme il n'y avait pas suffisamment de demandes et d'utilisateurs, nous avons fermé ce centre.

Cependant, les scientifiques d'un bout à l'autre du Canada et à l'étranger ont accès à tous nos centres d'innovation et technologies. En raison de la nature de l'approche globale envers la recherche, il est plutôt approprié pour eux d'avoir accès aux centres situés dans d'autres provinces.

Le sénateur Callbeck : S'agit-il de centres constitués en personne morale et dirigés par un conseil d'administration?

Mme Bell : Oui.

Le sénateur Callbeck : Le centre situé à Halifax est-il représenté par toutes les provinces atlantiques?

Mme Bell : Oui, mais j'aimerais que M. Patterson le confirme.

M. Patterson : Oui, je crois bien que c'est le cas. Nous communiquerons plus de détails à ce sujet, mais je crois bien que c'est le cas.

Le sénateur Callbeck : J'aimerais avoir cette information.

M. Patterson : Il me fera plaisir de fournir cette information au comité.

Le sénateur Callbeck : Vous dites que le financement doit être égalé à 50 p. 100. Les gens ont-ils de la difficulté au Canada atlantique à obtenir ce 50 p. 100?

Mme Bell : Jusqu'à maintenant, je crois qu'ils ont satisfait aux exigences et qu'ils nous ont fourni le cofinancement pour les projets sur lesquels nous nous sommes penchés et que nous avons approuvés. Je suis certaine que les centres régionaux travaillent fort au sein des régions pour obtenir ce financement, mais l'excellence de la science que nous appuyons les aide certainement à ce chapitre.

Le sénateur Callbeck : Cependant, vous tenez vraiment aux 50 p. 100, n'est-ce pas? Il n'y a pas de liberté d'action.

M. D'Aloisio : Oui.

Le sénateur Callbeck : Des sommes totales que vous avez dépensées ou allouées pour des projets au cours des cinq dernières années, quel pourcentage a été alloué au Canada atlantique?

M. D'Aloisio : Lorsque vous dites « alloué », rappelez-vous qu'on ne fait pas un effort conscient d'allouer des fonds selon les régions.

Le sénateur Callbeck : Oui.

M. D'Aloisio : En Ontario, c'est 34 p. 100; en Colombie-Britannique, 19 p. 100; en Alberta, 6,5 p. 100; au Québec, 27 p. 100; dans les Prairies, 6,2 p. 100; dans les provinces de l'Atlantique, 6,6 p. 100.

Le sénateur Callbeck : Monsieur Patterson, dans votre déclaration d'ouverture vous dites avoir fait l'objet d'une vérification à plusieurs reprises. À quelle fréquence procède-t-on à une vérification de la conformité? Rendez-vous plutôt des comptes à Industrie Canada? Il vous donne l'argent, n'est-ce pas?

M. Patterson : Oui.

Le sénateur Callbeck : Comment en assure-t-il la surveillance?

M. D'Aloisio : Tout d'abord, nous communiquons souvent avec le ministère dans le cours normal des activités. Il est représenté au conseil. Il participe à absolument toutes les réunions du conseil. Nous sommes tenus de publier un rapport annuel en fonction des particularités énoncées dans l'entente de financement. Nous devons nous soumettre à des vérifications du rendement, comme le précise l'entente. Tous les cinq ans au moins, nous devons nous soumettre à une évaluation conformément à l'entente. De plus, le ministère a le droit de procéder en tout temps à une vérification.

Le sénateur Marshall : J'aimerais parler des 75 millions de dollars et de la façon dont l'argent circule. Vous n'avez pas encore reçu les 75 millions de dollars et ces fonds dépendent du budget. Qu'est-ce qui motive vos dépenses? Lorsque vous concluez une entente avec l'organisation choisie, est-ce que le flux de trésorerie est énoncé dans votre contrat ou s'il y a quelque chose qui déclenche le flux de trésorerie, comme un projet de loi sur les progrès, par exemple?

M. D'Aloisio : À une certaine époque, lorsqu'une subvention était annoncée et approuvée au moyen du processus législatif, on recevait un chèque; dans ce cas-ci, il serait de 75 millions de dollars. Mais ce n'est plus le cas. Nous avons une entente de 75 millions de dollars avec Industrie Canada. Nous devons lui fournir un relevé annuel de flux de trésorerie faisant état de notre meilleure estimation des sommes dont nous aurons besoin cette année-là. Dans ce cas-ci, ce sera sur une période de trois ans parce que nous ne les distribuons pas. Nous les distribuerons sur trois ans.

Le sénateur Marshall : Lorsque le budget est approuvé, vous recevez les fonds.

M. D'Aloisio : Nous les distribuons à nos projets par l'entremise des autres centres régionaux de génomique, selon le même principe. Nous avons un processus de demande trimestriel selon lequel les centres nous disent quels projets dans leur région ont besoin de financement pour le trimestre suivant. Nous faisons preuve de diligence raisonnable pour examiner la demande et nous distribuons nos fonds tous les trois mois.

Mme Bell : Le montant est basé sur le budget relatif à un projet que nous avons approuvé et il correspond aux recherches que les responsables du projet proposent d'entreprendre. Nous faisons preuve de diligence raisonnable pour nous assurer que les coûts sont admissibles et qu'ils correspondent à ce qui a été demandé. C'est le jalon dans le sol à partir duquel nous travaillons ensuite, comme l'a dit M. D'Aloisio, pour déterminer l'argent auquel ils ont droit chaque trois mois. L'argent se fonde sur ce budget.

Le sénateur Marshall : De quelle façon le flux de trésorerie est-il géré? Vous recevez l'argent et vous l'avez en votre possession pendant une assez longue période avant de la distribuer. Vous devez avoir des politiques en matière d'investissement, car il s'agit de sommes considérables.

M. D'Aloisio : Le conseil comprend un comité de l'investissement. Nous avons un gestionnaire de l'investissement. Ce n'est pas aussi important maintenant que ça l'était auparavant, lorsque nous avions l'habitude de recevoir de grosses sommes d'argent. Maintenant, l'argent est utilisé relativement rapidement. Néanmoins, notre politique en matière d'investissement est précisée dans notre entente de financement avec Industrie Canada; elle est assez conservatrice et se fonde surtout sur la protection du principe.

Le sénateur Marshall : Y a-t-il un comité de vérification au conseil?

M. D'Aloisio : Oui, il y a un comité de vérification au conseil.

Le sénateur Ringuette : Vous faites beaucoup de campagnes de financement pour vos projets. Quelle est la contribution provinciale, selon l'endroit où s'effectuent les recherches, et quelle est la contribution du secteur privé?

M. Patterson : Tous nos projets sont cofinancés et nous les gérons par l'entremise des centres. Chaque centre doit aller chercher un cofinancement, alors les gens qui remportent un concours doivent obtenir des sommes correspondantes. Nous en recevons également du gouvernement provincial. Je ne suis pas certain du pourcentage. Il y a un pourcentage provenant du secteur privé que nous surveillons constamment, que nous essayons d'encourager et de faire croître.

M. D'Aloisio : Nos chiffres les plus récents indiquent que 46 p. 100 du financement provient du gouvernement fédéral par l'entremise de Génome Canada, que 5 p. 100 provient d'autres ministères fédéraux comme l'APECA et la FCI — le financement de la FCI est important —, 8,3 p. 100 provient de l'industrie, 19,4 p. 100 des provinces et 17,7 p. 100 de l'étranger.

Le sénateur Ringuette : De gouvernements étrangers ou du secteur privé à l'étranger?

M. D'Aloisio : Une bonne partie de ce financement provient du Wellcome Trust, grâce à l'un de nos projets d'envergure.

Mme Bell : Le Wellcome Trust est un organisme de financement à but non lucratif situé à Londres, en Angleterre. Nous avons noué le dialogue avec cet organisme ainsi qu'avec d'autres organismes de financement canadiens, des organismes de financement suédois et trois grandes entreprises pharmaceutiques afin d'appuyer un projet mené à Toronto appelé le Consortium de génomique structurel. La valeur totale du projet pour les sept dernières années est d'environ 215 millions de dollars.

Le projet a pour but de déterminer la structure des protéines humaines et de créer les cristaux de ces structures. Les cristaux relèvent du domaine public, ce qui signifie que tous les scientifiques et toutes les entreprises pharmaceutiques peuvent y avoir accès, et ils sont utilisés dans le développement de médicaments. Ce consortium important a réuni du financement provenant de nombreuses sources pour appuyer des projets internationaux d'envergure menés par le Canada à Oxford ainsi qu'au Karolinska Institute, en Suède.

Le sénateur Ringuette : À mon avis, l'une des caractéristiques qui est absente chez les Canadiens en général, c'est la capacité de commercialiser nos produits, nos recherches et nos connaissances. De tous les projets auxquels vous avez participé depuis 2000, combien se sont traduits par la commercialisation de cette recherche et ont généré un revenu grâce aux recherches réalisées?

M. Patterson : Si on examine les statistiques que M. D'Aloisio vient tout juste d'exposer, nous sommes à la recherche de partenariats internationaux pour obtenir du financement.

Pour ce qui est du volet commercialisation, ce n'est pas un domaine où nous avons aussi bien réussi que nous l'aurions souhaité, bien que nous ayons entrepris une initiative très importante avec la BDC au cours de la dernière année. Nous avons signé un protocole d'entente avec la BDC en vue de travailler en partenariat avec la banque et d'être en mesure d'offrir un grand nombre de possibilités par l'entremise de nos centres et d'obtenir du capital de risque. Nous avons plusieurs possibilités qui sont sur le point d'être prêtes pour cette étape. Dans d'autres présentations au gouvernement, nous nous sommes également penchés sur la possibilité d'obtenir un certain financement pour nous aider à ce chapitre.

On fait référence à cette « vallée de la mort », soit l'endroit où la recherche s'arrête et où le capital de risque est prêt. Nous essayons de trouver des façons d'éviter cette vallée de la mort, et nous pensons que si nous pouvions prolonger un peu nos projets et demander à la BDC de nous aider plus tôt, cela réduirait l'aide dont nous avons besoin.

Nous sommes constamment en discussion avec la banque. Nous avons signé un protocole d'entente. Nous sommes sur le point de présenter tous nos centres à la BDC et d'examiner ses critères et les possibilités qui pourraient s'offrir à nous. Nous croyons qu'il y a probablement deux ou trois possibilités par région, mais nous sommes vraiment le catalyseur pour nos centres.

Des activités régionales ont lieu dans chacun des centres, dans chacune des provinces. Nous les présenterons à la BDC pour voir de quelle manière nos entreprises peuvent être prêtes pour la BDC. Si elles ne sont pas prêtes, nous voulons savoir quels sont les critères que la BDC recherche et ce qui peut être fait au cours des prochains mois, tout en gardant en tête l'objectif final.

Le sénateur Ringuette : Qui possède les brevets relatifs à vos recherches? En êtes-vous les propriétaires? Vos centres les possèdent-ils? Le secteur privé les possède-t-il? Si c'est le cas, il représente 8 p. 100 du financement.

Mme Bell : Outre ce dont parlait M. Patterson, nous comptons au moins 20 entreprises dérivées qui ont été créées à partir des projets que nous avons financés; nous avons créé certaines entreprises et nous en avons aidé d'autres à développer un produit. Le développement le plus récent concerne un spectromètre de masse qui nous permettra de détecter et d'identifier les cellules à un niveau cellulaire, à un taux auquel nous n'avons jamais été en mesure d'arriver auparavant. L'entreprise a développé l'instrument, qui est maintenant sur le marché, et elle l'a vendu.

De plus, nous avons appuyé un projet à Terre-Neuve et dans le reste de la région de l'Atlantique. Ce projet porte sur une maladie du cœur fatale qui touche les jeunes hommes de Terre-Neuve, habituellement âgés de moins de 50 ans. Ils meurent, tout simplement; leur cœur cesse de battre. Notre équipe a été en mesure d'identifier le gène responsable de cette défaillance cardiaque. Il existe maintenant un diagnostic. On a pu identifier les personnes touchées et des défibrillateurs sont maintenant implantés dans leur poitrine pour éviter qu'elles meurent. Les résultats seront commercialisés bientôt à l'étranger.

Nous avons des exemples, mais nous essayons de procéder d'une façon plus systématique, et nous essayons également d'aider les projets qui avaient l'habitude d'être commercialisés par eux-mêmes.

Le sénateur Ringuette : Je pose ces questions parce que je crois que nous n'avons pas les compétences nécessaires pour commercialiser nos recherches. Je n'ai nullement l'intention de laisser entendre que votre mandat de recherche devrait comprendre la commercialisation, mais j'y serais favorable dans certaines situations.

Mme Bell : Je crois que de meilleures possibilités se présenteront. Si nous pouvons arriver à résoudre le problème de la vallée de la mort au Canada et la transformer en Silicon Valley, je crois que les Canadiens s'en tireraient bien.

Le sénateur Ringuette : C'est notre faiblesse la plus importante.

M. Patterson : À titre de précision, en ce qui concerne l'histoire de Génome Canada, nous avons formé des entreprises grâce à notre financement. Il y en a eu une dizaine en Ontario, deux au Québec, quatre en Colombie-Britannique et deux en Alberta. Les choses bougent, mais il est clair que nous en voulons davantage.

Le sénateur Ringuette : Vos recherches exigent du temps. Parfois on obtient des résultats positifs au bout du compte, et parfois non. C'est le risque à la fin, mais globalement dans ce nouveau domaine, l'investissement vaut la peine.

Je suis très navrée que les Canadiens aient investi en recherche et développement dans une technologie et un brevet dont le Canada était propriétaire, appelés le réacteur CANDU, qui est maintenant à vendre. Je devais me vider le cœur.

Le sénateur Gerstein : À l'exception du dernier petit commentaire formulé par le sénateur Ringuette, j'étais sur le point de la complimenter parce que je crois qu'elle a abordé un sujet très important. J'aimerais poursuivre sur cette question de commercialisation.

Génome Canada entretient-il des rapports avec MaRS, le projet de médecine et des sciences connexes, qui porte principalement sur la commercialisation de la recherche au Canada? Qu'adviendrait-il s'il existait des rapports avec le projet MaRS à Toronto?

M. Patterson : L'OGI, l'Ontario Genomics Institute, est notre centre basé physiquement à MaRS, mais nous entretenons d'excellents rapports avec tous les joueurs de MaRS, qu'il s'agisse de la Toronto Region Research Alliance, TRRA, de MaRS ou d'autres organismes.

Le président : Pour les personnes qui ne sont pas originaires de Toronto, pourriez-vous nous expliquer en quoi consiste le MaRS?

M. Patterson : Le MaRS est situé au cœur du Discovery District à Toronto, au coin de la rue College et de l'avenue University. Il s'agit d'un centre de coopération, d'un incubateur qui rassemble tout ce qu'il faut pour un ensemble complet, de la recherche scientifique à la commercialisation. Lorsqu'on se promène dans les corridors du MaRS, on croise des avocats, des comptables, des scientifiques, des techniciens en laboratoire, des investisseurs de capital-risque, et cetera. L'objectif, c'est de faire cheminer les idées par le MaRS afin qu'elles soient mises en marché.

Nous avons l'occasion de le faire grâce à nos relations avec l'OGI, en plus des liens que nous avons déjà avec des personnes qui travaillent au MaRS.

Le sénateur Gerstein : J'aimerais souligner les efforts de John Evans ainsi que le financement offert par le ministre des Finances de l'époque, John Manley, qui ont contribué à ce grand succès pour le Canada.

Le sénateur Runciman : La plupart de mes questions concernent aussi la commercialisation. Vous avez participé à des projets fascinants, peut-être pourriez-vous nous mettre à jour au sujet de deux d'entre eux. J'aimerais en savoir plus sur le projet de sables bitumineux verts et sur le projet « Small is beautiful », qui concernent les diagnostics de cancer et d'autres maladies qui peuvent être réalisés en seulement deux heures pour 10 $. Vous avez parlé d'un prototype, mais pourriez-vous nous présenter une petite mise à jour sur ces deux projets?

Mme Bell : « Small is beautiful » est un projet que nous avons financé dans le cadre d'un concours qui visait le développement des technologies. La génomique, la protéomique, la métabolomique, la transcriptomique, et cetera, sont utilisées de concert avec la technologie pour répondre à une question scientifique. Nous avons été très impressionnés par l'étendue des compétences des scientifiques canadiens dans ce domaine.

Ce projet particulier est dirigé à partir de Toronto. Shana Kelley a fait des apparitions à la télévision et a été une porte-parole formidable. Elle a décrit les raisons de sa participation à cette recherche, elle a dit pourquoi elle avait créé cette technologie ainsi que ses applications potentielles. Nous en ferons le suivi par l'entremise du financement. Je pense qu'il reste encore un an au projet, et il sera admissible à un financement additionnel si on en a besoin pour terminer le prototype. La possibilité de réaliser un certain nombre d'études sur une petite quantité de cellules et de tissus jouera un rôle important dans l'avancement du dossier. C'est le type de programme clé pour nous.

Le projet des sables bitumineux a été financé à l'aide de notre concours sur les semences et les bioproduits, et il consiste à utiliser des microbes dans les exploitations. Je ne suis pas certaine de comprendre complètement comment fonctionne la technologie, mais il s'agit d'utiliser ces microbes pour faciliter l'extraction du pétrole et réduire les émissions dérivées de méthane. La quantité d'eau nécessaire pour extraire le pétrole est un grave problème et la proposition viserait à réduire la quantité d'eau nécessaire. Je pense que le projet a été lancé il n'y a que 18 mois et il devra bientôt subir un examen intermédiaire, où nous ferons une évaluation rigoureuse et étudierons la progression du projet. Une fois cet examen réalisé, je pourrai vous envoyer un rapport sur la progression. C'est un projet stimulant et nous espérions qu'il soit sélectionné.

Le sénateur Runciman : Vous faites un examen intermédiaire. À quelle fréquence, en terme d'occurrence ou de pourcentage, avez-vous stoppé un projet en cours de route?

Mme Bell : Tous les projets que nous finançons doivent subir un tel examen intermédiaire, généralement 18 mois après le lancement du projet. C'est un examen extrêmement rigoureux effectué par un groupe international. Nos projets comportent des étapes et lorsqu'on présente une demande et qu'elle est acceptée, on doit réussir ces étapes et atteindre les résultats attendus. Les projets sont évalués en fonction de ces étapes et de ces attentes en tenant compte, bien entendu, des changements scientifiques depuis que la demande a été rédigée.

En règle générale, nous considérons que les projets vont très bien. Quelques-uns de ces projets ont besoin d'améliorations, de réductions, et nous avons apporté les changements nécessaires; d'autres ont besoin d'être réalignés en suivant les conseils de notre communauté internationale, et je pense qu'au fil des ans, nous avons probablement cessé le financement d'une poignée de projets que nous ne voulions pas poursuivre parce qu'ils n'avaient pas réussi les étapes.

Le président : Je pense que vous pourriez mieux informer les parlementaires de vos succès. Vous n'avez parlé que de deux de vos réussites, c'est quelque chose qui nous intéresse tous.

Le sénateur Murray : Monsieur le président, ma question est d'ordre beaucoup plus général que les articles que nous étudions. Monsieur Patterson, si vous ne souhaitez pas commenter, je comprendrai. Cela concerne la recherche en général.

Je contreviens à ma propre règle parce que je ne pense pas que ce soit une bonne idée de fonder une question sur quelque chose qu'on a vue dans les médias la veille. Cependant, il y avait un article dans les médias concernant ce nouveau traitement contre la sclérose en plaques qui ne serait pas encore éprouvé. Ma question ne porte pas là-dessus. Dans l'article, diverses personnes, qui semblaient au courant et qui se montraient inquiètes, disaient que le financement de la recherche de la part du gouvernement est trop souvent influencé par des groupes de défense ou par le sujet de l'heure dans les médias, plutôt que par des critères objectifs. Bien entendu, on a suggéré, comme d'habitude, qu'il y ait un pouvoir central qui prendrait toutes les décisions. Je suis méfiant des pouvoirs centraux en général et de la nomination de mandarins qui décident de tout, que ce soit en matière de sécurité nationale ou de recherche médicale.

Avez-vous des commentaires généraux sur le fonctionnement du financement de la recherche médicale par le gouvernement? Le processus est-il ce qu'il devrait être?

M. Patterson : Je vais laisser Mme Bell répondre de manière plus exhaustive, mais en général, un des points forts de Génome Canada est son processus de concours et l'examen par des pairs à l'échelle internationale. Tous nos projets y passent. Nous invitons des experts de partout dans le monde pour examiner les demandes et cet examen est fondé sur la science pure. Les concours viennent de nos centres et leurs partenaires et ils sont examinés rigoureusement par des experts sur le terrain.

Le sénateur Murray : Croyez-vous que c'est une formule que les autres organismes subventionnaires devraient adopter?

M. Patterson : Ça peut sembler prétentieux, mais oui, absolument.

Mme Bell : Bien sûr, nous examinons également les bénéfices dont pourrait tirer le Canada et tenter de faire l'équilibre avec l'excellence scientifique. Un projet doit justifier ces éléments, les bénéfices ne sont pas prédéterminés. Ils devront montrer qu'il y aura des bénéfices.

Vous avez parlé de mandarins. Ce qu'il y a de bien avec les mouvements qui se produisent à Ottawa, c'est que les organismes de financement collaborent de plus en plus étroitement, comme c'est le cas pour les ministères fédéraux et les laboratoires. À Génome Canada, nous avions un processus que nous appelions le processus de l'énoncé de principe, qui rassemblait l'industrie, les utilisateurs, les scientifiques, les ministères fédéraux et les autres organismes de financement en vue de déterminer quels étaient les domaines importants, mais il est encore possible de se concentrer uniquement sur l'excellence scientifique. En travaillant ensemble, les organismes règleront les inquiétudes que vous avez soulevées.

Le sénateur Murray : Bien. Merci.

Le sénateur Neufeld : Merci pour votre présence. Vous êtes bien connus dans mon coin de pays, en Colombie-Britannique, et nous apprécions beaucoup le travail que vous faites.

La partie qui traite du passage de la recherche à la commercialisation constituera toujours un défi. Peut-être que dans 10 ans, les gens s'assoiront autour de cette table et parleront de ces choses, comme on l'a fait par le passé.

Monsieur Patterson, vous avez parlé de quelques-uns de ces projets et vous en avez mentionné quelques-uns qui avaient cours dans différentes provinces. J'aimerais que vous parliez d'un de ces projets en demeurant conscient que nous n'avons pas beaucoup de temps. Pourriez-vous donner au greffier une description des projets que vous avez réalisés à l'échelle du pays, dans le cadre desquels on a fait de la recherche et de la commercialisation?

Lorsque j'étais en Colombie-Britannique, le gouvernement provincial avait lancé un fonds sur les énergies propres et novatrices, le ICE Fund, qui devait servir à conquérir tout l'espace compris entre la recherche et la commercialisation.

Nous avions mis sur pied une taxe qui visait tous les utilisateurs du gaz naturel et de l'électricité et nous l'avions confiée à un conseil externe, chargé de prendre les décisions, plutôt qu'au gouvernement. Avec EACL, nous avons dépensé environ 23 milliards de dollars en 50 ans, mais nous n'avons conclu aucune vente depuis 13 ans. Le gouvernement ne peut pas tout faire, mais il existe un moyen d'engager des gens de l'extérieur dans le processus de prise de décisions. Ils peuvent prendre des décisions qui ne sont pas fondées sur la politique.

Peut-être pourriez-vous nous expliquer un ou deux de ces succès et envoyer le reste par écrit au greffier.

Le président : Ce serait utile. Malheureusement, nous n'avons plus de temps. Nous avons des gens de la Colombie-Britannique qui attendent en téléconférence.

Monsieur Dale Patterson, madame Cindy Bell et monsieur Guy D'Aloisio, nous vous remercions d'être venus ici et de nous avoir parlé de votre excellent travail, et nous espérons que vous pourrez poursuivre dans cette voie.

Pour cette deuxième partie de la séance, nous nous tournerons vers la partie 3 du projet de loi, qui porte sur des modifications à la Loi sur le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien.

Nous accueillons, de l'Association du transport aérien du Canada, M. John McKenna, président et chef des opérations, ainsi que M. Michael Skrobica, vice-président aux affaires monétaires de l'industrie.

De l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, nous accueillons de nouveau M. Kevin McGarr, président et chef des opérations, ainsi que M. Mario Malouin, directeur financier.

Enfin, en vidéoconférence de la Colombie-Britannique, nous accueillons Michele McKenzie, présidente et chef des opérations de la Commission canadienne du tourisme. Elle est accompagnée de Chantal Péan, vice-présidente principale, Affaires générales et secrétaire générale.

Michele McKenzie, présidente et chef de la direction, Commission canadienne du tourisme : Monsieur le président, mesdames et messieurs, bonjour. Je vous remercie d'avoir invité la Commission canadienne du tourisme aujourd'hui. Je suis accompagnée aujourd'hui par Chantal Péan, qui est vice-présidente principale aux Affaires générales et secrétaire générale. Je parlerai un peu de la Commission canadienne du tourisme, puis je serai ravie de répondre à vos questions par la suite.

La CCT, qui est une société d'État fédérale, est l'organisme national chargé de la mise en marché du tourisme au Canada. Notre siège social est situé en Colombie-Britannique et nous sommes présentement actifs dans 12 pays. Nous avons des bureaux dans neuf marchés partout sur la planète. Dans le cadre de notre engagement envers le secteur touristique du pays, la CCT collabore avec toutes les provinces et tous les territoires par l'entremise de ses comités consultatifs et ses forums semestriels avec tous les sous-ministres et les responsables provinciaux et territoriaux de la commercialisation en matière de tourisme. En établissant des liens de collaboration et de partenariat avec le secteur privé, de même qu'avec les gouvernements du Canada, des provinces et des territoires, nous travaillons avec l'ensemble du secteur touristique pour améliorer sa compétitivité et faire du Canada une destination concurrentielle unique.

Notre vision consiste à encourager le monde à explorer le Canada. Pour ce faire, nous tirons profit de la voix collective du Canada et de toute sa force de mise en marché afin d'améliorer les revenus générés par le tourisme, tant par des touristes d'ici que de l'étranger. La CCT, ses partenaires ainsi que les observateurs de l'industrie s'entendent toutefois pour dire que l'avenir du tourisme au Canada exige une augmentation du nombre de touristes étrangers.

Le conseil d'administration a approuvé les objectifs suivants pour la CCT pour la période 2011-2015 : augmenter le nombre de visiteurs au Canada, puis se concentrer sur certains marchés en utilisant une image de marque dont le rendement est optimal.

Depuis le lancement en 2007 de la nouvelle image de marque touristique du Canada, « Explorez sans fin, Canada », nous nous sommes efforcés de lier les images de nature et de grands espaces que les gens ont du Canada et les diverses expériences réelles que les voyageurs vivent au Canada sur les plans personnel et émotif.

Les succès de l'image de marque du Canada ont été cités comme une des principales raisons qui ont permis au Canada de gravir les échelons de l'indice FutureBrand Country Brand, passant de la 12e place en 2006 à la sixième en 2007, puis à la deuxième place au cours des deux dernières années.

La CCT a réussi beaucoup de choses au cours des deux premières phases de sa stratégie liée aux Jeux olympiques d'hiver de 2010. Dans bien des cas, nos efforts nous ont permis de dépasser largement les objectifs que nous nous étions fixés au départ. Nous en sommes à la dernière phase, c'est-à-dire transformer les intentions de voyage en réservations concrètes, et notre travail contribuera à l'atteinte de l'objectif ultime, qui est d'accroître les exportations touristiques pour le Canada.

Selon nos études de surveillance et nos études des taux de change administrées par des tiers, nos campagnes mesurées ont produit les résultats suivants : en 2009, nous avons généré environ 1,66 milliard de dollars en revenus touristiques pour l'économie canadienne et nous avons permis que 15 284 emplois soient conservés ou créés dans l'industrie canadienne du tourisme.

Mesdames et messieurs les sénateurs, pour ne pas monopoliser davantage de temps et pour permettre au comité de poursuivre son important travail, je termine ici ma déclaration préliminaire, et je serai heureuse de répondre à vos questions.

John McKenna, président et chef de la direction, Association du transport aérien du Canada : Bon matin, mesdames et messieurs les sénateurs. Je suis président et chef de la direction de l'Association du transport aérien du Canada, l'ATAC. Je suis accompagné de M. Michael Skrobica, vice-président, Affaires monétaires de l'industrie.

L'ATAC représente l'industrie canadienne du transport aérien depuis plus de 75 ans. Elle regroupe environ 185 membres œuvrant dans le domaine de l'aviation commerciale dans toutes les régions du Canada et desservant la grande majorité de plus de 700 aéroports canadiens.

Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui d'un aspect primordial de la sécurité aéroportuaire, c'est-à-dire le financement par l'entremise des Droits pour la sécurité des passagers du transport aérien, les DSPTA.

Nous avons de nombreuses interrogations en ce qui a trait à la sécurité. Pourquoi les droits pour la sécurité sont-ils si élevés au Canada? Qu'en est-il de la reddition de comptes par rapport aux revenus générés par les DSPTA et au financement accordé à l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, l'ACSTA? Pourquoi les revenus perçus au moyen des DSPTA sont-ils largement supérieurs au montant dépensé pour la sécurité par l'entremise de l'ACSTA? Qu'est-ce qui justifie une augmentation de plus de 50 p. 100 des DSPTA? Le ministre compte-t-il simplement augmenter les DSPTA et les crédits alloués à l'ACSTA chaque fois qu'on découvrira une brèche dans la sécurité?

[Français]

Les DSPTA sont très élevés au Canada, même avant les augmentations annoncées en février. L'ATAC a réalisé une étude, en 2008, sur les droits pour la sécurité du transport aérien exigés par les gouvernements et aéroports de 175 juridictions mondialement. Les DSPTA canadiens occupaient alors le deuxième rang au monde; seulement les Pays-Bas exigeaient des droits plus élevés. Suite à l'annonce des augmentations du mois de février dernier, nous croyons que les droits canadiens sont les plus élevés au monde, le droit pour un vol international à lui seul ayant augmenté de 52 p. 100, passant de 17 $ à 25,91 $. Aux États-Unis, les droits équivalant pour un vol international sont de 5 $.

Nous demandons donc ce qui justifie que les droits canadiens soient si élevés par rapport aux autres pays. Nous n'avons aucune félicitation à faire au gouvernement pour avoir atteint le premier rang mondial, en augmentant une taxe qui rapportait déjà un surplus.

De plus, nous sommes très préoccupés par le manque de transparence entre les revenus générés par les DSPTA et le budget accordé à l'ACSTA. Combien d'argent est récolté par les DSPTA et quel pourcentage de cette somme est versé à l'ACSTA?

[Traduction]

L'honorable John C. Major, qui a présidé la Commission d'enquête relative aux mesures d'investigation prises à la suite de l'attentat à la bombe commis contre le vol 182 d'Air India, a recommandé ce qui suit :

La perception, la garde et le versement du DSPTA doivent être assujettis à des méthodes comptables rigoureuses et transparentes. Toutes les recettes provenant de la perception du DSPTA doivent pouvoir être retracées et doivent être utilisées uniquement dans l'intérêt de la sûreté de l'aviation civile.

Il est recommandé de dresser un rapport annuel exposant les recettes liées au DSPTA ainsi que les dépenses par programme ou ministère, selon le cas.

L'ACSTA devrait être la principale bénéficiaire des fonds tirés de la perception du DSPTA.

Le dernier rapport du vérificateur général sur les DSPTA remonte à 2004-2005. Sans ces données vérifiées, nous ne pouvons qu'émettre des hypothèses sur les revenus générés par rapport aux crédits parlementaires accordés à l'ACSTA. C'est donc ce que nous avons fait. Nous avons étudié les données fournies par l'ACSTA ainsi que celles qui ont été publiées par Statistique Canada. Notre estimation est fondée sur les 48 millions de passagers contrôlés par l'ACSTA dans 89 aéroports canadiens au cours de l'exercice financier de 2008-2009. Les chiffres présentés par l'ACSTA concordent avec les données de Statistique Canada, qui établit à 108 millions le nombre de passagers embarqués ou débarqués au cours de l'année civile, dont quelque 54 millions étaient des passagers en partance, des clients de l'ACSTA. Statistique Canada nous indique que 63 p. 100 de ces passagers avaient pris un vol national, 19,3 p. 100, un vol transfrontalier, et 17,6 p. 100, un vol international. Sur la base de ces renseignements, il devient plutôt facile d'estimer les revenus générés par les DSPTA. La feuille de calcul que nous vous avons remise donne à penser que les revenus générés par les DSPTA dépassent largement les crédits accordés à l'ACSTA, même avant qu'ils ne soient augmentés. Selon le calcul des DSPTA perçus en 2008-2009, plus de 70 millions de dollars ont été versés au Trésor public, échappant ainsi à l'ACSTA.

L'exercice financier de 2009-2010 a été la seule exception. En effet, les DSPTA n'ont pas généré suffisamment d'argent cette année-là pour financer l'ACSTA, puisque le gouvernement lui avait accordé des crédits additionnels de 175 millions de dollars pour les besoins extraordinaires liés à la tenue des Jeux olympiques. Le gouvernement ne peut donc pas augmenter les DSPTA sous prétexte qu'ils ne génèrent pas suffisamment d'argent pour financer la sécurité aéroportuaire, alors qu'il impose à l'ACSTA des exigences particulières en matière de sécurité relativement aux Jeux olympiques.

Compte tenu de l'augmentation des DSPTA et du budget de 1,5 milliard de dollars accordés à l'ACSTA pour les cinq prochaines années, les revenus générés par les DSPTA produiront un excédent annuel de plus de 225 millions de dollars.

[Français]

Nous nous expliquons mal l'augmentation de plus de 50 p. 100 des DSPTA. On nous informe maintenant que les revenus générés par les DSPTA financent des projets reliés à la sécurité à Transports Canada et à la GRC, mais on refuse de nous dire combien va à chaque organisation.

Il est d'ailleurs intéressant de voir que la loi créant les DSPTA ne dit pas ce que ces fonds doivent servir à financer d'autres organismes. La loi n'indique en aucun temps à quoi doivent servir ces fonds. Ces droits ont été créés pour financer l'ACSTA et, selon nous, seulement l'ACSTA. Ils ne sont pas une source additionnelle de revenus du gouvernement pour laquelle il n'a pas à rendre de compte.

Le budget de l'ACSTA est entièrement financé par les DSPTA alors qu'aux États-Unis, les passagers du transport aérien ne financent que 30 p. 100 du budget de l'administration américaine de la sûreté du transport, la TSA. Soixante pour cent des fonds viennent du fonds consolidé des États-Unis.

Le rapport déposé par le juge Major endosse cette requête et il recommande que le financement de la sûreté de l'aviation civile soit principalement tiré de fonds de source gouvernementale.

L'allocation de crédit par le gouvernement pour l'ACSTA est de 235 millions de dollars et les 1,5 milliard de dollars additionnels, sur cinq ans, ont été annoncés par le gouvernement au mois de février.

Comment le gouvernement peut-il allouer des crédits sur cinq ans d'accès alors qu'il réagit à chaque menace en ajoutant de nouvelles mesures de sécurité?

[Traduction]

Le ministre va-t-il simplement augmenter les DSPTA et le budget de l'ACSTA chaque fois qu'on découvre une nouvelle brèche dans la sécurité? Jusqu'où faut-il aller pour que le niveau de sécurité soit suffisant? Quel niveau de sécurité avons-nous les moyens d'assurer? L'augmentation des DSPTA n'est pas la solution. Nous n'avons pas besoin d'un niveau accru de sécurité, nous avons besoin d'une meilleure sécurité. Tout ce que fait l'ACSTA, c'est de mettre en œuvre des mesures de sécurité additionnelles sans évaluer les menaces. Ce travail relève de la GRC ou du SCRS. Ces activités ne devraient-elles pas être financées à même les fonds généraux du gouvernement, comme le sont tous les autres aspects liés à la sécurité nationale? Le gouvernement a-t-il déterminé quelle était la menace réelle en matière de sécurité au Canada et y sommes-nous préparés? Nos infrastructures sont-elles adéquates, efficaces ou désuètes?

Est-ce que les mesures de sécurité vont continuer d'augmenter, ou est-ce que les autorités vont chercher à créer et à mettre en œuvre une procédure en une étape qui serait plus efficace et qui permettrait d'améliorer la sécurité et de réduire le temps et le personnel requis pour contrôler les passagers? Pour l'industrie, les zones d'inspections actuelles dans les aéroports sont inefficaces et constituent une cible évidente pour les terroristes.

Le Canada peut-il établir des normes et des procédures de contrôle conçues sur mesure en fonction de ses propres besoins pour ce qui est de la menace à la sécurité canadienne? Nous sommes aussi très préoccupés par l'efficacité de l'ACSTA. Le gouvernement a-t-il déterminé si le rendement de l'ACSTA était comparable, sur le plan économique, à celui d'autres organismes de sécurité aéroportuaire ailleurs au monde? Si c'est le cas, comment en est-il arrivé à cette conclusion? Où sont les preuves? Quels paramètres de comparaison a-t-il utilisés? Les clients de nos membres paient la note, et ils sont en droit de recevoir cette information.

Enfin, pourquoi le ministre des Transports a-t-il annoncé une mesure fiscale une semaine avant le budget? Le gouvernement croit-il vraiment que le milieu de l'aviation et les passagers sont crédules au point de ne pas se rendre compte qu'il s'agissait d'un stratagème du gouvernement pour éviter d'avoir à annoncer de nouvelles taxes?

En terminant, je tiens à souligner de nouveau que l'industrie du transport aérien commercial est tout à fait en faveur d'une sécurité efficace, mais pas d'une sécurité à tout prix.

Kevin McGarr, président et chef de la direction, Administration canadienne de la sûreté du transport aérien : Bon matin. Je suis accompagné aujourd'hui du vice-président et chef des services financiers de l'ACSTA, Mario Malouin. Nous sommes heureux d'avoir été invités à venir discuter avec vous et à répondre aux questions que vous pourriez avoir.

Lors de ma dernière comparution, il y a quelques semaines, j'ai parlé de quelques-uns des projets que nous avions entrepris, y compris un changement d'orientation vers une planification et une intervention en amont compte tenu de la capacité, de la stabilité et de l'expertise dont nous disposons maintenant pour prendre cette voie. J'ai aussi parlé du budget de 2010 et du financement à long terme de 1,5 milliard de dollars que nous allons recevoir au cours des cinq prochaines années. Ce montant englobe un financement nouveau d'environ 350 millions de dollars pour 2010-2011.

Compte tenu du financement qui nous a été accordé, nous avons élaboré un plan stratégique pour les deux prochaines années, ce qui me permet de vous donner quelques précisions supplémentaires. Ce plan couvre divers aspects, allant du maintien de nos activités principales dont nous avons été chargées jusqu'à l'amélioration de l'efficacité et de l'efficience de nos programmes en fonction de la certitude que cet investissement nous procure.

[Français]

Comme l'a mentionné le ministre d'État au transport, le 14 juin dernier, l'ACSTA sera soumis à un examen de ses dépenses, de son efficience et de sa structure afin de s'assurer qu'elle remplit efficacement son mandat. L'examen est maintenant en cours et les intervenants, le personnel de contrôle et les voyageurs aériens ont été invités à participer au processus.

Comme je l'ai déclaré lors de ma comparution devant le comité, l'ACSTA appuie entièrement l'examen. Nous recherchons constamment des façons d'améliorer l'efficience de nos opérations afin d'assurer que nous conservons un bon équilibre entre la sûreté et le service à la clientèle. Nous comprenons également que, d'après les résultats de l'examen, nous pourrions devoir modifier notre plan stratégique actuel en conséquence pour les deux prochaines années, ce que nous sommes tout à fait disposés à faire.

[Traduction]

Pendant que se déroule cet examen, nous nous préparons à la mise en œuvre des recommandations découlant de l'examen stratégique de 2009-2010. À cette fin, nous cherchons notamment des moyens de simplifier nos opérations et d'améliorer la rentabilité de nos activités.

Je devrais peut-être ajouter que nous allons agir en amont en prenant un certain nombre de mesures en plus de celles qui figurent dans l'examen stratégique; nous allons notamment chercher à gagner en efficacité en surveillant les données relatives aux délais et au débit des activités de même qu'en améliorant l'horaire du personnel chargé des contrôles.

Pour ce qui est des ressources dont nous disposons actuellement, j'aimerais parler tout d'abord de notre budget de fonctionnement. Avec ce budget, nous allons être en mesure d'assurer, au cours des deux prochaines années, un niveau de contrôle comparable à celui de 2009-2010. Nous aurons notamment la capacité de faire face aux périodes de pointe saisonnières et irrégulières, de sortir du cadre habituel de nos activités de base en utilisant nos ressources actuelles et les stocks existants de même qu'en réalisant des économies grâce à l'optimisation de l'équipement et des processus.

Parmi les autres mesures importantes que nous allons prendre en vue de réaliser des économies, mentionnons le lancement d'une demande de propositions concurrentielle en vue d'obtenir des services de contrôle dans les aéroports. Cette demande de propositions est l'occasion pour nous de renforcer notre relation avec les entrepreneurs en misant sur ce qu'ils font bien actuellement, tout en accordant une attention particulière à certains aspects à l'égard desquels les résultats pourraient être améliorés, conformément à notre philosophie fondée sur l'amélioration continue.

[Français]

Dans l'ensemble, nous cherchons à dépenser nos ressources plus efficacement, de façon continue, en n'acceptant aucun compromis relativement à la sûreté aérienne ou à l'uniformité des résistances que nous assurons. Cela correspond à notre changement organisationnel tourné vers une gestion axée sur les résultats et vers une responsabilité solide en matière de planification de fiscalité.

Pour ce qui est de notre budget d'immobilisation, les fonds que nous avons réservés dans notre plan d'entreprise nous permettront de mener à bien divers projets dans les secteurs du contrôle pré-embarquement et du contrôle des bagages enregistrés.

[Traduction]

Plus particulièrement au cours des deux prochaines années, nous allons prendre les mesures suivantes pour mener à bien les activités qui nous ont été confiées. Pour le contrôle pré-embarquement, nous prévoyons maintenir notre capacité et nos services de base au niveau actuel de 296 voies. Aussi bien pour ce qui est du contrôle pré-embarquement que du contrôle des bagages enregistrés, nous allons procéder au remplacement d'immobilisations et à la mise à niveau d'équipement vétuste et désuet. Nous allons restructurer et optimiser les systèmes, améliorer la mesure et la surveillance du rendement et mettre en place de nouvelles technologies pour favoriser notre capacité de détecter les menaces.

[Français]

En matière de contrôle des non-passagers, nous conserverons la sélection aléatoire des non-passagers au niveau exigé par la réglementation.

Pour ce qui est de notre programme de Carte d'identité pour les zones réglementées, que nous appelons le CIZR, nous entreprendrons une gestion de cycle de vie de notre équipement destiné à la CIZR. Nous mettrons en place notre application renouvelée et nous continuerons d'évaluer nos lecteurs biométriques fixes.

[Traduction]

Lors de ma dernière comparution devant vous, j'ai parlé de notre engagement à l'égard du changement, et je peux vous assurer que nous sommes en train d'apporter des changements à presque tous les niveaux. Nous sensibilisons les passagers dans le cadre de notre campagne J'y pense, par l'entremise de notre site web et au moyen d'initiatives telles que le nouveau projet des voyageurs dignes de confiance/NEXUS, qui facilitera la procédure de contrôle pour les voyageurs. En vue du processus de demande de propositions à venir, nous savons que les agents de contrôle peuvent jouer un plus grand rôle à cet égard, puisque c'est l'objet même des services de contrôle dans les aéroports.

Nous savons que nous devons collaborer plus étroitement avec nos partenaires de la communauté aéroportuaire, y compris le Conseil des aéroports du Canada, chaque aéroport de même que d'autres parties intéressées de l'industrie, comme l'Association du transport aérien du Canada, le Conseil national des lignes aériennes du Canada, Air Canada, WestJet et Porter. Notre priorité absolue, c'est d'établir le bon équilibre entre la sécurité et le service à la clientèle.

Avec l'aide de nos partenaires et des parties intéressées, nous faisons en sorte que les voyageurs qui passent dans les aéroports désignés du Canada vivent la meilleure expérience aéroportuaire possible.

Le président : Merci, monsieur McGarr.

J'aimerais avoir des précisions sur quelques points. Tout d'abord, madame McKenzie, quelles conséquences, s'il en est, une augmentation de 50 p. 100 du droit pour la sécurité des passagers aura pour le tourisme au Canada à votre avis?

Mme McKenzie : Nous n'avons pas d'information sur ce droit en particulier, mais les droits et les frais aéroportuaires nuisent de façon générale à la compétitivité du Canada sur le plan touristique. Par rapport aux normes internationales, on a déjà mentionné que nos barèmes tarifaires ont tendance à être assez élevés et à faire augmenter le coût global d'un voyage au Canada.

Le président : Monsieur McGarr, votre dernière comparution avait trait au Budget supplémentaire des dépenses (A), et vous cherchiez à obtenir 350 millions de dollars pour aider l'ACSTA. Je suis heureux de vous dire que nous avons adopté ce projet de loi. Vous disposez maintenant de ces 350 millions de dollars, qui proviennent des fonds généraux. Pouvez-vous nous dire maintenant pourquoi vous avez besoin en plus que le droit pour la sécurité des voyageurs fasse l'objet d'une augmentation de 52 p. 100 pour pouvoir réaliser ce que vous avez décrit?

M. McGarr : Monsieur le sénateur, les activités de l'ACSTA dépendent entièrement des crédits qui lui sont accordés. Nous présentons une proposition de financement au gouvernement, et toute décision prise par le gouvernement à l'égard de nos activités conduit à un crédit. L'ACSTA n'a aucun lien direct avec le Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien. Le DSPTA est entièrement géré par le ministère des Finances. Je crois comprendre que cet argent est ensuite versé dans le Fonds du revenu consolidé, dont proviennent les crédits qui nous sont accordés.

Il n'y a absolument aucun lien direct entre l'ACSTA et le Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien. Nous présentons au gouvernement une proposition de financement fondée entièrement sur l'octroi de crédits. Notre financement vient d'une décision stratégique du gouvernement.

Le président : Allez-vous être en mesure de réaliser tout ce que vous avez décrit conformément à votre plan d'activités pour la prochaine année avec ce crédit de 350 millions de dollars que nous venons tout juste d'obtenir pour vous?

M. McGarr : Le crédit de 350 millions de dollars, monsieur le sénateur, s'ajoute au montant de 234 millions de dollars qui était prévu dans le cadre financier du Budget principal des dépenses. Notre budget de fonctionnement pour l'exercice de 2010-2011 est de 587 millions de dollars.

Le président : Merci pour cette précision. J'avais oublié les 200 millions de dollars.

M. McGarr : Excusez-moi, il s'agit de 593 millions de dollars.

Le président : Merci. Vous dites que, si nous votions contre l'augmentation de 52 p. 100, cela n'aurait aucune incidence sur vos activités.

M. McGarr : Je ne peux pas parler au nom du gouvernement pour ce qui est du financement de nos programmes.

Le président : Je comprends.

M. McGarr : Nous présentons une proposition de financement au gouvernement, et le gouvernement nous accorde des crédits. La provenance des fonds qui constitue ces crédits dépasse la portée des activités de l'ACSTA.

Le sénateur Ringuette : Ma première question s'adresse à la commission du tourisme. Elle porte sur un autre aspect du projet de loi C-9, c'est-à-dire la réduction de 50 p. 100 de la taille de votre conseil d'administration. Ma préoccupation a trait au dialogue avec les parties intéressées et aux parties intéressées qui composent votre conseil d'administration. Pouvez-vous nous dire quelle sera la composition du nouveau conseil? Est-ce que le Canada atlantique sera représenté? Est-ce que le secteur de l'aviation, qui joue un rôle très important dans vos activités de marketing auprès des réseaux internationaux en vue d'attirer des touristes au Canada, va souffrir de la réduction de la taille de votre conseil d'administration?

Mme McKenzie : La principale différence qui résulterait du changement que nous proposons d'apporter à la gouvernance, c'est que le conseil d'administration de la CCT, qui est un conseil fondé sur la représentation, deviendrait un conseil fondé sur les compétences. Cela ne signifie pas que nous ne chercherions plus à représenter l'ensemble du pays, qu'il s'agisse de la représentation géographique ou de la représentation de l'industrie. Cela signifie simplement qu'il n'y aurait pas de siège désigné à cet égard.

Nous avons mené de vastes consultations à propos de ce changement, et nous avons reçu des lettres d'appui de la part des ministres responsables du tourisme dans chaque province et territoire du Canada. Nous avons reçu des lettres d'appui de l'industrie, qui reconnaît qu'il existe de nombreux mécanismes différents pour faire affaire avec la Commission canadienne du tourisme et, qui plus est, avec nos comités d'étude, dont les membres représentent toutes les régions du pays.

Nous sommes une organisation de marketing, alors nous avons des comités d'étude qui nous représentent et orientent les efforts que nous déployons sur le plan de la commercialisation dans différentes parties du monde. Par exemple, nous pourrions avoir un comité sur l'Asie et le Pacifique, et les intérêts, disons, de l'Île-du-Prince-Édouard y seraient certainement représentés, parce que le marché japonais intéresse beaucoup cette province. Les membres du comité voient que c'est cette région qui bénéficierait le plus de leurs initiatives.

Tout le monde reconnaît que, pour que la CCT puisse disposer de l'expertise nécessaire pour progresser, son conseil d'administration doit être davantage fondé sur les compétences que sur la représentation. Pendant des années, le conseil d'administration de la CCT n'a pas eu de comptable agréé. Nous n'avions pas la personne qu'il fallait pour présider notre comité de vérification. Le conseil représentatif n'avait pas vraiment la capacité de nous offrir un cadre de gouvernance moderne.

La représentation nous tient toujours beaucoup à cœur, et nous voulons nous assurer que notre conseil d'administration représente un bon échantillon de l'industrie et de la géographie du Canada. Je suis de l'Atlantique. Toute ma carrière, j'ai travaillé en Nouvelle-Écosse, avant de me joindre à la CCT. Je peux vous garantir que j'ai beaucoup à cœur, comme l'ensemble de notre organisation, de veiller à ce que notre conseil d'administration comprenne le pays et l'industrie.

Le sénateur Ringuette : Rien dans la loi actuelle ne garantit la représentation du Canada atlantique. Cet aspect est d'autant plus important maintenant que votre organisation est située en Colombie-Britannique. La distance est importante. Les Canadiens de l'Atlantique veulent être inclus, pas exclus. J'espère que vous tiendrez compte de mes quelques commentaires lorsque vous procéderez à la nomination des membres de votre conseil réduit.

Mme McKenzie : Merci, madame le sénateur. Nous ne sommes pas indifférents à cette préoccupation. Nous ne bénéficierions pas de l'appui de l'industrie au Canada et de nos partenaires de chaque province et territoire si nous n'étions pas en mesure d'avoir une vaste représentation au sein de notre conseil d'administration. J'apprécie vos commentaires, et nous allons en tenir compte.

Le sénateur Ringuette : Mon autre question a trait à l'augmentation de 52 p. 100 du Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien que prévoit le projet de loi budgétaire. Cette augmentation survient en pleine crise économique mondiale.

Vous avez indiqué plus tôt que votre organisation verrait sa compétitivité diminuer à l'échelle internationale alors que le Canada occupe le premier rang pour ce qui est des droits les plus élevés imposés aux passagers du transport aérien. Compte tenu de votre expertise et de vos champs d'action, vous devriez être en mesure de nous dire quelles sont les conséquences réelles d'une telle augmentation.

Si nous perdons 10 p. 100 de nos passagers aériens à cause de cette augmentation, nous allons donc perdre 10 p. 100 de 1,66 milliard de dollars en activités économiques au Canada.

Mme McKenzie : En fait, ce serait beaucoup plus, parce que le nombre de touristes provenant de l'étranger est beaucoup plus élevé que ce que nous pouvons nous attribuer directement. Les chiffres que je vous ai donnés sont des chiffres pour lesquels nous sommes directement responsables.

La stratégie de la CCT pour l'avenir repose sur notre capacité d'être concurrentiels pour attirer des passagers aériens du monde entier. C'est à cet égard que nous faisons face à la concurrence la plus féroce en tant que destination touristique. Il y a de nombreuses destinations partout dans le monde qui se disputent la même clientèle. Nous devons viser une clientèle offrant un meilleur rendement — des clients qui peuvent dépenser plus d'argent. Le Canada n'est pas une destination bon marché, alors nous devons chercher à attirer cette clientèle qui offre un rendement plus important. Je ne peux pas vous donner de commentaires précis sur l'augmentation du DSPTA, mais je peux vous dire que les structures de coût associées au tourisme au Canada constituent une préoccupation pour toute l'industrie et semblent avoir des répercussions sur l'ensemble de la compétitivité.

Le sénateur Ringuette : Il pourrait s'agir d'un montant de 1 milliard de dollars par année?

Mme McKenzie : Je n'ai pas cette information.

Le sénateur Ringuette : Je vais adresser ma question à M. McKenna. Vous êtes-vous penché sur les répercussions négatives que pourrait avoir cette augmentation sur les ventes de sièges?

M. McKenna : Je vais demander à M. Skrobica de répondre.

Michael Skrobica, vice-président, Affaires monétaires de l'industrie, Association du transport aérien du Canada : J'ai déjà travaillé comme dirigeant financier auprès de plusieurs transporteurs aériens. La règle générale que les entreprises utilisaient, c'était qu'une augmentation de 1 p. 100 du coût total d'un voyage pour un passager entraînerait une réduction de 1 p. 100 du nombre de voyageurs. C'est l'inélasticité économique fondamentale de la demande. Ce ratio augmente lorsque les voyages sont plus courts, parce que le voyageur a alors le choix de prendre sa voiture. Le ratio diminue pour ce qui est des voyages internationaux, parce que les voyageurs n'ont pas la possibilité de recourir à d'autres modes de transport.

De notre point de vue, les transporteurs aériens de partout dans le monde, ont toujours fondé leurs activités sur une marge d'environ 6 p. 100. Avec cette marge, ils doivent payer des coûts administratifs, une partie des coûts de location, entre autres. Par conséquent, leurs marges sont minces. Quand on entre dans une période de récession, comme celle qu'ont connue le Canada et la plupart des pays occidentaux au cours des dernières années, ces marges peuvent devenir négatives. Un certain nombre de transporteurs aériens transportaient des gens et perdaient de l'argent avant même d'avoir payé leurs frais administratifs. Par conséquent, une légère augmentation va accroître les pertes que subissent les transporteurs aériens canadiens.

Le sénateur Ringuette : Je comprends cela. Je comprends aussi la réaction en chaîne, non seulement pour les transporteurs aériens, mais aussi pour les voyagistes. Qu'il s'agisse d'un café, d'un gîte du passant ou d'un hôtel au Canada, il y a bel et bien une réaction en chaîne.

Selon votre règle générale, une augmentation de 1 p. 100 du coût du voyage — c'est-à-dire, du coût total du voyage — représente une diminution de 1 p. 100 du nombre de passagers. Par conséquent, une augmentation de 52 p. 100 du prix d'un billet d'avion risque d'entraîner une augmentation d'environ 5 p. 100 du coût total du voyage. Est-ce que la commission du tourisme prévoit le même genre de scénario?

Mme McKenzie : Je ne dispose pas d'une telle analyse. Cette question n'a pas fait partie des consultations de la CCT, mais nous pourrions certainement y jeter un coup d'œil.

Le sénateur Mitchell : Merci à tous. J'aimerais poursuivre sur ce que le sénateur Ringuette disait et revenir sur les statistiques de M. Skrobica. Je regarde les chiffres présentés par M. McKenna, soit 108 000 passagers embarqués et débarqués. Si on applique votre règle du 1 p. 100, cette augmentation entraînerait une diminution de près de 1,1 million de voyageurs. C'est énorme.

L'industrie touristique occupe une place importante au Canada. Je ne sais pas si elle se classe toujours au troisième rang en Alberta, mais cela a déjà été le cas. En raison de la hausse du dollar canadien, l'industrie touristique a perdu de sa compétitivité; en raison de la récession, les gens, de façon générale, ne voyagent plus autant. Et je crois qu'il y a encore, aux États-Unis, une peur rémanente du terrorisme, qui fait en sorte que les gens sont réticents à voyager. L'industrie canadienne du tourisme connaît tous ces problèmes, et voilà qu'on nous impose une hausse de taxe — je parle d'une hausse de taxe, parce que c'est bien ce dont il s'agit. Même le gouvernement vous dira que toutes les hausses de taxes nuisent à la compétitivité.

Mme McKenzie, cela ne vient-il pas en rajouter à une situation déjà difficile pour l'industrie touristique?

Mme McKenzie : Comme je l'ai dit, toute la question touchant la compétitivité est un problème de taille pour l'industrie touristique au Canada.

Pour vous donner une idée de l'importance des revenus générés par les voyageurs internationaux, le Canada reçoit des revenus d'environ 7 à 8 milliards de dollars par année grâce aux touristes américains et à peu près le même montant grâce aux autres touristes étrangers. Bien sûr, les autres touristes étrangers seraient tous des passagers aériens, de même qu'une bonne partie des touristes américains. Cela vous donne une idée de la situation.

À l'échelle internationale, nous nous disputons ces passagers. Tout ce qui entraîne une augmentation du coût de leur voyage a une incidence sur notre capacité générale de les attirer chez nous. L'OCDE produit un rapport détaillé sur la compétitivité de tous les pays en matière de tourisme, qu'elle décompose en différentes catégories. Un volet de ce rapport porte expressément sur les droits et les frais aéroportuaires. Je pense que les droits pour la sécurité en feraient partie. L'OCDE classe la compétitivité de chaque pays à l'égard de ces catégories. Dans l'ensemble, le Canada est une destination touristique concurrentielle. Par contre, pour ce qui est des droits et des frais aéroportuaires, nous sommes très loin dans la liste.

Le sénateur Mitchell : Par ailleurs, pour une famille qui voyage pour aller rendre visite aux grands-parents, par exemple, il est possible de profiter d'un solde de places, mais ces taxes sont fixes; elles ne sont jamais soldées. On réussirait peut-être à trouver une bonne affaire pour les cinq membres de la famille, mais il faudrait tout de même payer 250 $, alors qu'on paie 25 $ aux États-Unis. Est-ce exact? Je calcule 50 $ pour chaque membre d'une famille de cinq personnes, pour un aller-retour. C'est 250 $. C'est beaucoup d'argent, et cela nuit à l'industrie touristique. Vous êtes très polis de parler du Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien. Disons-le franchement, il s'agit d'une taxe pour la sécurité des passagers du transport aérien, d'autant plus que l'argent perçu est maintenant versé dans les fonds généraux du gouvernement. Comme le répète encore et encore le gouvernement, toutes les taxes sont mauvaises, à l'exception de celle-ci, j'imagine. On se demande bien pourquoi il s'acharne sur la pauvre industrie touristique. C'est purement rhétorique.

Monsieur McGarr, vous faites un travail à la fois difficile et important. Je crois comprendre que vous êtes fort bien payé pour le faire et c'est très bien ainsi. Avez-vous touché une partie en du montant de 1,1 milliard de dollars que le gouvernement a alloué au dispositif de sécurité pour le G8 et le G20?

M. McGarr : Il y avait une allocation de 400 000 $ devant couvrir une éventuelle augmentation des coûts de la sécurité lors de la tenue du G8 et du G20. Nous avons effectivement encouru des coûts marginaux en sus de nos coûts de fonctionnement courants. L'écart sera payé à même cette allocation de 400 000 $. Naturellement, tout montant non dépensé sera retourné au gouvernement.

Le sénateur Mitchell : Ce n'est pas la sécurité à l'aéroport qui a pris le plus gros des sommes supplémentaires allouées pour contrôler ce qui devait être, au dire du premier ministre, des milliers et des milliers de personnes, et qu'on présentait comme étant la raison pour laquelle il en coûterait 1,1 milliard de dollars.

M. McGarr : L'impact a pris la forme de coûts marginaux à l'égard de nos activités et il n'a pas été à ce point important. La plupart des délégations ne franchissent pas les portes des aéroports.

Le sénateur Mitchell : Je sais qu'un rapport a été déposé l'an dernier quand M. Baird et le sénateur Kenney sont allés travailler sur le terrain dans l'un des aéroports et qu'ils ont pu franchir la porte arrière qui n'était pas verrouillée. C'est très inquiétant. Je suis sûr que vous partagez cette inquiétude, comme la plupart des gens. Y a-t-il une explication à cet état de choses? Avec les 350 millions de dollars fournis à ce jour, prenez-vous des mesures pour bloquer cette porte d'entrée et régler ce problème comme l'exige la sécurité?

M. McGarr : La sécurité du périmètre des aéroports relève de l'administration de l'aéroport. Elle ne fait pas partie de notre mandat. Nous n'avons aucun rôle à jouer dans cet aspect particulier de la sécurité. C'est l'administration de l'aéroport qui s'en occupe.

Le sénateur Mitchell : Les 350 millions de dollars que vous touchez en ce moment ne seront pas affectés à cette problématique.

M. McGarr : Non, monsieur.

Le sénateur Neufeld : Madame McKenzie, vous venez de la Nouvelle-Écosse, si je ne me trompe pas. Certains sénateurs se sont inquiétés, sans doute à bon droit, de la représentation du Canada atlantique au sein du nouveau conseil. Vous nous avez bien expliqué le processus de mise en place d'un type différent de conseil d'administration, mais je suppose que le Canada atlantique est bien représenté par vous-même, qui êtes présidente-directrice générale, et j'en suis bien heureux. C'est très bien. Je suis également heureux que vous résidiez en Colombie-Britannique. Vous connaissez deux extrémités du pays et vous nous représentez bien.

Est-ce que le conseil dont vous faites partie prévoit prendre contact avec d'autres comités ou groupes ailleurs au Canada afin d'avoir l'apport d'autres régions par différents moyens? La nouvelle structure prévoit-elle ce genre de démarche? Vous pourriez peut-être nous faire un topo.

Mme McKenzie : J'ai effectivement mentionné l'existence d'un comité de travail qui remplit auprès du conseil et de l'administration des services de conseil sur nos divers programmes de marketing en fonction de chaque marché. Ce processus fait intervenir une centaine de leaders de l'industrie et de leaders provinciaux du marketing de partout au Canada.

Nous avons également un groupe formé de tous les sous-ministres responsables du tourisme au Canada; nous les rencontrons deux fois par année et nous parlons spécifiquement des problèmes qu'ils rencontrent au niveau du marketing; nous travaillons régulièrement avec les organisations de marketing de destination de tout le Canada. Ce sont des organismes tels que Tourism Vancouver, Tourism Kelowna et Tourisme Moncton, qui sont regroupés au sein d'une organisation plus vaste au Canada. Nous travaillons avec les divers chefs de file provinciaux en matière de marketing, dont, par exemple, l'association de l'industrie touristique de la Nouvelle-Écosse ou la Société du Partenariat ontarien de marketing touristique, que nous rencontrons régulièrement.

Il existe de nombreuses structures qui nous permettent de rester en contact avec l'industrie. C'est une dimension qui revêt de l'importance pour nous parce que nous devons faire du marketing à travers un partenariat. Nous ne pouvons vanter les attraits du Canada sans que ses parties travaillent en étroite collaboration avec nous. Les mécanismes nécessaires sont en place et ils sont solides. Leur bon fonctionnement est important pour nous si nous voulons maintenir l'esprit de collaboration dont nous avons besoin pour soutenir la concurrence avec succès.

En ce qui concerne la question discutée précédemment, la CCT est strictement un organisme de marketing. Je sais que beaucoup de questions ont été posées au sujet de droits à payer et de l'impact qu'ils peuvent avoir sur le tourisme. Nous pouvons en parler dans la mesure où notre recherche révèle qu'il s'agit d'une question qui touche la compétitivité, mais la CCT n'est pas un instrument de la politique touristique du Canada. C'est Industrie Canada qui donne le ton à cet égard et les fonctionnaires de ce ministère seraient mieux placés, du fait de la recherche qu'ils ont peut-être effectuée, pour dire comment réagit l'industrie touristique à l'imposition de droits.

Le sénateur Neufeld : Voilà une explication un peu plus étoffée, parce que des préoccupations fort valables ont été exprimées partout au Canada.

J'aimerais parler du droit pour la sécurité. Le sénateur Mitchell vient de dire qu'il s'agissait d'une taxe, pas d'un droit. On peut toujours ergoter. Moi, j'appellerais ça des frais de service. Quand je prends l'avion, je suis bien heureux de pouvoir me dire que toutes les mesures de sécurité possibles ont été prises. Je crois que la plupart des voyageurs aiment bien se sentir en sécurité. Il faut voir les taux en contexte. Ils passeront de 4,90 $ à 7,48 $ — je suis bien conscient qu'une augmentation de 50 ou de 52 p. 100 est considérable — pour un voyage intérieur en aller simple. Pour un aller-retour à l'intérieur du pays, ils passent de 9,80 $ à 14,96 $; pour les vols transfrontières, les frais seront portés de 8,34 $ à 12,71 $, et dans le cas des voyages internationaux, de 17 $ à 25,91 $. Pour un voyage en avion à destination de l'Europe ou de Lima, au Pérou, je n'ai pas d'objection particulière à payer des frais de 25,91 $.

Je veux faire une comparaison avec la situation initiale. Soyons précis. Sous le gouvernement libéral en 2002, les frais pour un vol intérieur aller simple étaient de 12 $, c'est-à-dire supérieurs aux 7,48 $ projetés en ce moment, soit 50 p. 100 de plus que maintenant. Le taux initial en 2002 pour un vol intérieur aller-retour était de 24 $, alors que ce qui est proposé aujourd'hui est un taux de 14,96 $. Le sénateur qui a dit qu'il s'agissait d'une taxe aurait-il dit la même chose à l'époque? J'en doute.

Le président : On dirait un début de chicane, sénateur Neufeld.

Le sénateur Neufeld : Je voulais apporter une précision, comme les autres sénateurs.

M. McGarr, entendez-vous bien des gens dire qu'ils ne veulent aucune mesure de sécurité parce qu'ils refusent de payer 14,96 $ au titre du coût d'un voyage intérieur au Canada? Est-ce que les gens disent qu'ils refuseront de voyager s'ils doivent payer 15 $ pour le faire en se sentant en sécurité au Canada?

M. McGarr : Si je puis me permettre, monsieur le sénateur, nous faisons de nombreux sondages auprès des passagers et nous obtenons des taux d'approbation très élevés tant pour la confiance dans le système que pour le niveau de service à la clientèle offert au public voyageur canadien.

Le sénateur Murray : M. McKenna, avez-vous comparu devant le comité de la Chambre des communes?

M. McKenna : Oui, monsieur.

Le sénateur Murray : Avez-vous présenté essentiellement la même argumentation que celle d'aujourd'hui?

M. McKenna : Nous l'avons rectifiée un peu après avoir pris connaissance d'informations nouvelles plus tard, mais nous avons présenté essentiellement la même argumentation.

Le sénateur Murray : Qu'est-ce qu'on vous a dit là-bas?

M. McKenna : Dire que ça a été une réunion très productive serait quelque peu exagéré.

Le sénateur Murray : Qu'attendez-vous de nous?

M. McKenna : Nous sommes nettement d'avis que notre industrie n'est pas aussi concurrentielle qu'elle pourrait l'être et que ça s'explique, et de loin, par l'existence de ces frais supplémentaires. Pour voyager aujourd'hui, il en coûte en gros la même chose, voire même moins dans bien des cas, qu'il y a 10 ou 15 ans si on s'en tient strictement à la partie transport aérien du billet. Les prix ont augmenté considérablement parce que d'autres droits ou frais ont été ajoutés : différents types de taxes, dont les taxes d'aéroport, et les frais de sécurité. Tous ces suppléments s'accumulent, font augmenter le prix du billet et le rendent moins concurrentiel. Nous soutenons que les autres moyens de transport ne sont pas affligés de tels frais. Nous sommes par conséquent désavantagés par rapport à d'autres moyens de transport et incapables de soutenir leur concurrence.

Le sénateur Murray : Votre dénonciation de cet état de choses est tout à fait compréhensible et nous vous recevons cinq sur cinq. Toutefois, en ce qui concerne le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien, vous estimez que 50 p. 100, c'est trop. Si nous avions le pouvoir de le réduire, de combien souhaiteriez-vous qu'on le réduise?

M. McKenna : Ces frais n'ont fait l'objet d'aucune vérification depuis 2004-2005, nous ne sommes donc pas en position d'affirmer quoi que ce soit à ce sujet. Ce que nous voulons surtout savoir, c'est à quoi sert cet argent et s'il est utilisé efficacement. Quand on compare les frais perçus dans d'autres pays à ceux du Canada, on se demande pourquoi ils sont tellement plus élevés ici. Voilà ce qui nous préoccupe. Quant à savoir de combien ils devraient être, nous sommes incapables de le dire parce que nous ignorons où va cet argent, à part l'ACSTA. Une partie va à Transports Canada et une autre, à la Gendarmerie royale du Canada, mais, dans les deux cas, nous ne savons pas combien. Alors impossible pour nous d'avancer un chiffre.

Visiblement, le DSPTA ne fait pas partie des préoccupations de M. McGarr. Il omet peut-être de le relier directement à son budget, mais le ministre, lui, le fait. Quand il a annoncé l'augmentation du DSPTA dans sa déclaration du 25 février, il a annoncé par la même occasion l'allocation du 1,5 milliard de dollars à l'ACSTA. Pour nous, la signification était claire. Il indiquait que le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien augmenterait à proportion des coûts de la sécurité. Et les voyageurs et l'industrie peuvent s'attendre à une augmentation de ces frais d'utilisation. Il a ensuite indiqué les critères d'utilisation. L'ACSTA affecterait ces fonds à la mise en œuvre des mesures de sécurité existantes et nouvelles. De toute évidence, le ministre fait mentalement un lien direct entre ces frais et le budget de l'ACSTA.

Le sénateur Murray : Je dois vous dire qu'il serait tout à fait inhabituel pour nous, encore que le Sénat en ait le pouvoir, d'adopter une mesure fiscale ou une mesure à l'égard des droits ayant pour objet de les réduire ou de les éliminer. Ce serait tout à fait inhabituel, parce que nous nous efforçons de respecter la primauté de la Chambre des communes dans les affaires de ce genre.

Aussi loin qu'on remonte dans l'histoire du gouvernement, il n'y a jamais eu, je crois, de frais d'utilisation quels qu'ils soient qui ne constituaient pas dans une certaine mesure une façon détournée d'aller piger dans les poches du contribuable. De nos jours, il y a des gens au ministère des Finances qui s'installent devant leur ordinateur pour, comme on dit, plumer le contribuable au maximum de façon électronique dorénavant en faisant en sorte de limiter le plus possible ses protestations.

Je ne peux qu'affirmer, au vu de l'objectif déclaré du droit, que le problème se pose : est-il approprié ou, au contraire, est-il aussi inapproprié que le laissent entendre les témoins? Il me semble que c'est une question que nous devrions soumettre formellement à l'examen du directeur parlementaire du budget, si cela n'a pas déjà été fait, avec mission de nous faire rapport.

M. McKenna : Ce que nous soutenons, c'est que l'industrie du transport aérien reçoit des coups de tous côtés depuis des années. Nous nous comparons à d'autres moyens de transport. Le transport ferroviaire, par exemple, reçoit 50 millions de dollars annuellement en subventions. Notre industrie n'obtient rien. Au contraire, nous finançons le gouvernement en lui versant des frais qui ne sont pas tous affectés aux mesures prévues pour les aéroports. Nous nous en inquiétons et nous réclamons davantage de transparence. Nous avons besoin de savoir ce qui se passe. C'est le public qui paie et nous sommes d'avis qu'il est en droit de savoir comment l'argent est utilisé.

Le sénateur Finley : Ma question s'adresse à l'ATAC. Les sociétés canadiennes de transport aérien — c'est d'abord à elles que nous nous intéressons — sont-elles auto-assurées? Achètent-elles de l'assurance ou sont-elles auto-assurées contre les risques d'accident?

M. McKenna : Naturellement qu'elles sont assurées.

Le sénateur Finley : Non, est-ce qu'elles s'auto-assurent ou achètent-elles de l'assurance?

M. Skrobica : La Loi sur les transports au Canada les oblige à être adéquatement assurées selon les critères qu'elle établit.

Le sénateur Finley : Dites-moi, alors, quel pourcentage représente généralement le montant de l'assurance sur le coût du billet, par siège-mille ou en fonction de tout autre critère? Est-ce 1 p. 100? 5 p. 100?

M. Skrobica : Je n'ai pas ces chiffres en main.

Le sénateur Finley : À votre avis, quels seraient les frais d'assurance ou le montant à payer si un Boeing 747 s'écrasait au large de la côte sud-ouest de l'Irlande?

M. Skrobica : Ce serait dans les milliards de dollars.

Le sénateur Finley : Il me semble que les quelques centaines de millions de dollars au total que doivent assumer les voyageurs canadiens représentent bien peu comme frais d'assurance par comparaison avec les milliards qu'il en coûterait en cas d'accident; n'est-ce pas votre avis, d'un point de vue strictement économique?

M. Skrobica : D'un point de vue strictement économique, il serait extrêmement difficile de faire ce genre de calcul parce qu'il faut faire l'hypothèse qu'il y aura un accident ou un incident et — eh bien non, monsieur le sénateur.

Le président : Donnez-nous votre réponse, s'il vous plaît.

M. Skrobica : Non, sénateur. Dans le genre de situation que vous évoquez, il faut faire l'hypothèse qu'il y aura un incident. Nous, nous agissons en fonction de l'hypothèse que nous avons déjà pris toutes les mesures de sécurité requises pour prévenir tout incident.

Outre l'assurance dont vous avez parlé, nous devons assumer des frais supplémentaires, dont, notamment, le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien. Tous ces coûts s'ajoutent aux frais d'assurance que doit supporter la société de transport aérien.

L'assurance elle-même s'appuie généralement sur les marchés en Europe, à la Lloyds, alors ce n'est pas forcément un coût que les Canadiens supportent. Ce sont les sociétés de transport canadiennes opérant depuis le Canada qui les supportent.

Le sénateur Finley : Vous ne refilez pas le montant du droit au consommateur, n'est-ce pas?

M. Skrobica : Oui, sans doute, et, malheureusement...

Le sénateur Finley : Bien sûr que vous le faites. Dites-moi ce qui vous aurait permis de prévoir qu'un type dissimulerait des explosifs dans ses sous-vêtements et monterait à bord d'un avion. Vous affirmez que cela ne peut pas arriver, et moi je vous dis que ça arrivera et que c'est déjà arrivé.

Le président : Monsieur Skrobica, souhaiteriez-vous répondre maintenant? Quatre questions ont été posées.

M. Skrobica : J'aimerais bien, oui. Vous avez soulevé un certain nombre de questions, dont la première serait de savoir s'il est possible qu'un attentat à la bombe avec des explosifs dissimulés dans les sous-vêtements arrive. Oui, c'est possible. La cause première de l'incident du 25 décembre dans l'appareil de la Delta est le formidable échec que représente le fait, pour le gouvernement des États-Unis, d'autoriser ce monsieur à monter à bord de l'avion. Les États-Unis ont mis en place un système de transport aérien sécuritaire et ils ont essuyé un formidable échec.

Le sénateur Finley : On peut présumer que l'ACSTA consacre cet argent à la prévention d'un tel scénario.

M. Skrobica : Nous ne nous opposons pas à ce que l'ACSTA dépense l'argent. Nous ne nous en prenons d'aucune manière à ce que fait l'ACSTA. Nous ne demandons que ce que tout contribuable devrait pouvoir demander : en avons-nous pour notre argent? Pour le moment, cette information n'est pas disponible.

Le sénateur Finley : Quelqu'un a demandé tout à l'heure — comment a-t-il dit déjà? — jusqu'où faut-il aller pour que le niveau de sécurité soit suffisant? Je me rappelle avoir entendu une de mes collègues d'en face dire qu'une fois, c'était une fois de trop. C'était le sénateur Carstairs, sur un sujet entièrement différent.

À quel moment vous demandez-vous à partir de quel niveau la sécurité est excessive? Pour autant que je me rappelle, il n'y a eu aucun incident tragique attribuable à des terroristes ou à des actes terroristes au Canada depuis nombre d'années. On juge l'arbre à ses fruits. Qu'est-ce qu'on fait? On baisse la garde jusqu'à ce qu'un incident survienne pour se dire ensuite qu'il valait mieux la lever de nouveau?

M. Skrobica : Monsieur le sénateur, vous dénaturez nos propos. Nous ne nous en prenons pas à l'ACSTA. Nos dollars sont-ils bien dépensés, c'est tout ce que nous voulons savoir. Comment se fait-il que d'autres pays aient des dispositifs de sécurité efficaces, mais que celui du Canada soit le plus cher de tous?

Le sénateur Finley : Le sénateur Mitchell a mentionné le fait qu'aux États-Unis, c'est de l'ordre de 25 $ environ. Puis il y a eu ce catastrophique...

Le sénateur Mitchell : Ces 25 $, ce sont nos frais, pas les leurs.

Le président : Il fait peut-être erreur, mais là n'est pas la question, sénateur Mitchell. Nous sommes ici pour examiner les faits présentés par les témoins.

Le sénateur Finley : Je ne fais pas d'erreur.

Le sénateur Callbeck : Madame McKenzie, vous avez dit que vous vouliez que le monde découvre le Canada. Pourquoi est-ce que ses propres habitants ne le découvriraient-ils pas? Dépensez-vous des sommes pour que les Canadiens puissent découvrir leur pays ou est-ce qu'elles sont toutes dépensées pour les autres pays?

Mme McKenzie : Nous affectons des sommes à des campagnes actuellement en cours au Canada. Avec les mesures de relance, nous avons affecté 10 millions de dollars l'année dernière et 10 millions cette année à une campagne que vous connaissez peut-être. Elle s'appelle « Secret d'ici ». Les médias canadiens l'ont beaucoup couverte. Elle constitue une belle occasion de promouvoir le tourisme au Canada.

La plupart des provinces et des villes font déjà de grands efforts pour promouvoir le Canada, alors nous mettons également l'accent sur le marketing à l'échelle internationale, où la concurrence est très féroce.

Le sénateur Callbeck : Prévoyez-vous poursuivre cette campagne pour faire en sorte que les Canadiens découvrent leur pays, ou bien est-ce seulement pour les deux années que vous avez mentionnées?

Mme McKenzie : Oui, c'est une campagne d'une durée de deux ans. Comme je l'ai dit, elle est financée par des mesures de relance, et nous ne savons pas si notre budget nous permettra à l'avenir de financer d'autres campagnes. Pour le moment, nous ne prévoyons pas le faire compte tenu du financement dont nous disposons.

Le sénateur Callbeck : Vous ne prévoyez pas le faire compte tenu du financement dont vous disposez en ce moment?

Mme McKenzie : Oui, pour l'avenir.

Le sénateur Callbeck : C'est une industrie d'envergure. Dans la région d'où je viens, cette industrie crée beaucoup d'emplois et injecte beaucoup d'argent dans l'économie.

Je crois que vous avez dit que nos recettes étaient de 7 à 8 milliards de dollars par année pour le tourisme en provenance des États-Unis et de 7 à 8 milliards de dollars par année pour le tourisme en provenance de l'étranger. Avez-vous fait des prévisions pour les trois prochaines années? Je sais que vous avez précisé qu'il était plus susceptible qu'Industrie Canada le fasse, mais la Commission canadienne du tourisme l'a-t-elle fait?

Mme McKenzie : Oui, nous avons de très bons renseignements sur les recettes générées par le tourisme au Canada. Les chiffres dont je parlais pour les recettes du tourisme en provenance de l'étranger représentent 20 p. 100 de nos recettes totales. Vous avez soulevé un point très important, soit que le tourisme intérieur nous rapporte la plus grande partie de nos recettes. En effet, 80 p. 100 des recettes du tourisme au Canada proviennent des voyages des Canadiens dans leur propre pays. Du point de vue du marketing, nous constatons que le marché canadien est très bien servi par les spécialistes du marketing et qu'il a connu une croissance substantielle au cours des dernières années.

Il y a une diminution du nombre de voyageurs étrangers; c'est pourquoi nous investissons davantage dans le tourisme en provenance de l'étranger pour gagner cette bataille. Les spécialistes du marketing canadiens, quant à eux, investissent massivement au Canada.

Le sénateur Callbeck : La commission a-t-elle des prévisions pour les trois prochaines années dans le domaine du tourisme?

Mme McKenzie : Nous ne faisons pas nos propres prévisions, mais le Conference Board du Canada prévoit que le tourisme ne sera pas très fort cette année et qu'il reprendra du poil de la bête à compter de 2011. Nous savons que le tourisme est l'une des industries qui connaît la croissance la plus rapide dans le monde. Nous savons que la situation s'améliorera avec la reprise de l'économie. La force de l'économie et le tourisme vont de pair, alors nous sommes très optimistes quant à l'avenir de cette industrie. Nous prévoyons que la répartition actuelle des recettes sera maintenue, c'est-à-dire qu'environ 80 p. 100 de nos recettes proviendront du tourisme intérieur et que, espérons-le, 20 p. 100 proviendront du tourisme de l'étranger.

Le président : Je suis désolé de devoir vous interrompre, sénateur Callbeck, mais nous sommes en téléconférence, et votre temps est écoulé. Le prochain groupe d'experts attend.

Le sénateur Murray voulait soulever un point. Pourquoi ne le faites-vous pas à la fin de notre séance, à 13 h 15?

Le sénateur Murray : Je ne serai plus ici.

Le président : Je voudrais remercier Mmes McKenzie et Péan, de la Commission canadienne du tourisme, de leur participation. Je sais qu'il est tôt en Colombie-Britannique. Merci de vous être levées tôt pour nous aider avec ce dossier. Bonne chance dans votre travail.

Nous remercions MM. Garr et Malouin, de l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, ou l'ACSTA, pour leur aide, et MM. McKenna et Skrobica. Nous vous remercions également d'avoir préparé un mémoire.

Mesdames et messieurs les sénateurs, notre prochain groupe d'experts étudiera la partie 5. Nous sommes toujours en vidéoconférence, cette fois pour accueillir M. Finn Poschmann, vice-président de la recherche de l'Institut C.D. Howe. Il se joint à nous de Toronto.

Monsieur Poschmann, avez-vous une déclaration préliminaire à faire? Nous étudions la partie 5 du projet de loi et nous supposons que vous connaissez un peu l'initiative qui s'y trouve.

Finn Poschmann, vice-président de la recherche, Institut C.D. Howe : Oui, je la connais un peu — on ne peut pas vraiment le dire autrement. Bonjour, monsieur le président, honorables sénateurs. C'est un plaisir de vous revoir. Je suis désolé de ne pas pouvoir être là en personne, mais je suis heureux de participer quand même à la séance.

Comme vous le savez, je parle en mon nom et pas au nom de l'institut. Ne l'oubliez pas, parce qu'il m'arrive souvent de dire des choses qui semblent un peu controversées.

Nous sommes ici pour parler du budget de 2010, en particulier de la partie 5 sur les tarifs douaniers et le plan visant à réduire ou à éliminer les tarifs douaniers sur les importations sur une vaste gamme d'intrants d'entreprise.

J'ai trois messages simples à vous communiquer à cet effet.

Premièrement, tout va bien jusqu'ici. C'est une bonne chose à faire. Je n'entrerai pas dans les détails de tous les numéros qui figurent dans ce projet de loi, puisqu'ils sont nombreux. Toutefois, l'idée maîtresse va sans conteste dans la bonne direction.

Deuxièmement, nous avons de nombreuses raisons de voir grand, alors pourquoi ne pas aller plus loin?

Troisièmement, faisons-le, mais commençons à voir grand et à penser à la libéralisation du commerce dans plus de domaines, et amorçons la discussion à ce sujet. Il est possible que cet aspect ne corresponde pas au mandat du comité, mais ça vaut la peine d'en discuter et de faire passer le message : la libéralisation du commerce est positive pour l'économie et pour la croissance. Inscrivons-le en lettres de feu dans notre mémoire.

J'ai commencé en disant : « Tout va bien jusqu'ici. » C'est absolument vrai. Les tarifs sur les intrants d'entreprise sont clairement les reliques d'une ancienne façon de penser. Nous avions l'habitude de financer les gouvernements principalement au moyen des tarifs sur les importations. De nombreux pays occidentaux, entre autres, croient qu'ils devraient éviter d'importer, c'est-à-dire qu'ils devraient fabriquer leurs propres produits et éviter de concurrencer les fournisseurs à faibles coûts, et les tarifs font partie de ce processus.

Cependant, si les tarifs étaient autrefois justifiés, ce n'est guère le cas aujourd'hui, et je crois que c'est très clair. C'est en partie dû à l'ampleur et à la portée des chaînes d'approvisionnement qui desservent maintenant les marchés mondiaux. Les entreprises canadiennes entretiennent une relation très complexe avec le marché américain; elles vendent aux États-Unis des produits dont ils se servent pour fabriquer d'autres produits, qu'ils vendent ensuite au Canada et à d'autres. Cette situation ne s'applique pas seulement aux États-Unis, mais aussi au Mexique, à la Chine, à l'Inde et à la Corée du Sud. Nous contribuons à de vastes chaînes d'approvisionnement au moyen d'investissements transfrontaliers de haut niveau avec différents pays.

Revenons aux tarifs, puisqu'ils s'interposent dans ce dossier. Respectons la logique. Je voudrais que vous imaginiez qu'il n'existe aucun cadre régissant la question. Si vous deviez étudier la politique gouvernementale, quels outils utiliseriez-vous pour favoriser la croissance, le commerce, les investissements et la création d'emplois? Décideriez-vous que le Canada doit augmenter ses coûts liés aux intrants d'entreprise? Décideriez-vous que nous avons besoin de pièces, de machines et de matériel plus coûteux? La réponse est sûrement non. Vous ne choisiriez sûrement pas d'accroître les coûts des intrants d'entreprise si les investissements, les emplois et la croissance vous intéressaient. Si vous n'aviez pas à partir de zéro pour établir les coûts, il serait probablement logique de vouloir les faire diminuer et les éliminer à la première occasion.

Pour cette raison en particulier, les mesures proposées dans le projet de loi C-9 sont de bonnes mesures, et le projet de loi devrait être adopté.

Réfléchissons un peu aux aspects économiques et logiques qui le justifient. La raison fondamentale pour la diminution des tarifs sur les intrants d'entreprise nous ramène à notre compréhension du commerce et des gains du commerce. Les gens qui ont suivi des cours d'économie reconnaîtront peut-être les mots que je vais reprendre; ils sont de David Ricardo, un des premiers grands économistes. Lorsque nous nous spécialisons dans ce que nous faisons de mieux et que nous commerçons avec d'autres personnes spécialisées elles aussi dans ce qu'elles font de mieux, nous sommes tous gagnants. C'est indiscutable en économie; il n'y a pas vraiment de débat à ce sujet. Certains formulent des objections, mais il reste que l'idée principale est toujours rattachée aux gains découlant du commerce et de la spécialisation.

Évidemment, des Canadiens s'inquiètent à cause de la concurrence à faibles coûts dans les pays en développement — au Mexique ou en Asie du Sud-Est, par exemple. Il est justifié de s'inquiéter de la perte d'emplois lorsque les habitudes de consommation et les pays fournisseurs changent. C'est tout à fait vrai que de dire que ça inquiète les gens, et ils ont parfois raison.

Toutefois, nous devrions nous rappeler — ce qui nous ramène à la question de la chaîne d'approvisionnement — que les relations commerciales sont interreliées. Nos exportations comprennent des produits énergétiques et non énergétiques, et nous exportons aussi des technologies des communications et d'autres types de technologies et de services. L'exportation de ces produits dans les marchés du monde entier représente beaucoup pour le Canada.

Notre marché le plus important est, bien sûr, celui des États-Unis. Le Royaume-Uni occupe la deuxième place. Pensez aux 10 principaux pays où le Canada exporte des produits. Aux troisième, quatrième, cinquième, septième et 10e rangs se trouvent la Chine, le Japon, le Mexique, la Corée du Sud et l'Inde. Ce sont des marchés clés pour l'exportation. Nous leur vendons des produits; ils les utilisent pour fabriquer d'autres produits qu'ils vendent ensuite au Canada et à d'autres. Nous fabriquons des produits dont ont besoin les pays en développement. Ce que nous leur vendons se retrouve en partie dans les produits qu'ils nous revendent ou qu'ils vendent à d'autres. Par conséquent, mettre du sable dans l'engrenage de ce commerce ne peut que nous appauvrir. C'est parfaitement clair.

J'en arrive à mon deuxième point. Revenons aux propos de David Ricardo : aucun argument ne justifie l'imposition de tarifs, alors pourquoi s'arrêter là? Pourquoi éliminer le fardeau seulement dans le cas de certains produits et services? Nous devrions réfléchir à cette question.

Ce qui m'amène à mon troisième point : laissez-nous voir grand dans ce dossier. Par exemple, les plus importants obstacles au commerce au Canada sont ceux qu'impose la politique fédérale, ce qui comprend les tarifs, mais aussi la gestion de l'offre, la Commission canadienne du blé et les quotas associés aux produits laitiers et de la volaille. Ces politiques sont coûteuses et destructrices. Si nous les éliminions, nous n'en serions que plus riches — nous devrions en discuter.

Si nous nous concentrons seulement sur le secteur laitier, nous pensons aux agriculteurs et à la production de lait, de beurre et de fromage. Nous considérons ces produits comme des produits consommables, mais ce sont aussi des intrants. L'industrie de la transformation agroalimentaire occupe une grande place dans le monde. Pourquoi le Canada n'y contribue-t-il pas davantage? Pourquoi augmentons-nous le coût des intrants d'entreprise, y compris de simples produits comme le lait et les protéines laitières? Pourquoi empêchons-nous les roues du commerce de tourner? Pourquoi nous appauvrissons-nous alors que rien ne nous y oblige?

Cela nous ramène aux gains généraux qui découlent de la spécialisation et de la libéralisation du commerce. Il est incontestable que ces gains sont là pour qui veut bien les prendre. Il est vrai que nous pouvons élaborer une série de mesures afin d'avoir un meilleur rendement dans tous ces secteurs.

C'est pour ces raisons que j'appuie l'orientation générale de la partie 5 du projet de loi. On devrait appuyer et féliciter le gouvernement actuel pour cette mesure. C'est la bonne chose à faire. De nombreuses personnes l'ont recommandée. Intégrons donc cette mesure à un vaste programme de libéralisation à long terme qui nous permettrait de tirer profit du commerce à l'échelle nationale. Merci. C'est ce que j'avais à dire.

Le président : Merci, monsieur Poschmann. J'apprécie vos commentaires sur cette question. Pouvez-vous nous confirmer que cette initiative coûterait environ 200 millions de dollars au gouvernement?

M. Poschmann : Ce chiffre me semble approprié. Je ne sais pas à quel point c'est précis, mais c'est cohérent avec certains autres chiffres que j'ai vus au fil des ans.

Le président : Je voudrais aussi confirmer ceci : environ 30 p. 100 des produits importés au Canada, qui sont par la suite raffinés, seront assujettis à des tarifs.

M. Poschmann : C'est vrai. Merci de le mentionner. C'est une question qui revient toujours; c'est le point que je soulevais. Si nous envisageons d'améliorer le fonctionnement global de l'économie, pourquoi nous arrêtons-nous là et nous en tenons-nous à cette liste? Remarquez, la liste n'est pas courte. Cela dit, nous devrions encourager le gouvernement à maintenir l'orientation économique globale de la libéralisation.

Le président : Merci.

Le sénateur Ringuette : Monsieur Poschmann, vos commentaires sur ces questions sont toujours les bienvenus. Je comprends la question du commerce et son importance. Je sais aussi que lorsque l'on prend part à des négociations commerciales, on doit avoir une monnaie d'échange. L'élimination des tarifs est un type de monnaie d'échange. Le projet de loi que nous étudions propose d'éliminer les tarifs, et il n'y a pas de réciprocité. Nous perdons des atouts qui pourraient nous servir dans le cadre de futures négociations commerciales. Que pensez-vous de cela?

M. Poschmann : La nécessité d'avoir des outils ne date pas d'hier chez les négociateurs commerciaux. Il faut avoir une monnaie d'échange pour négocier lorsqu'on conclut un marché. C'est un argument qu'on entend toujours. Il est souvent accompagné de ce que nous appelons la « théorie commerciale stratégique ». L'idée générale est que parfois, du moins temporairement, il peut être plus avantageux d'imposer des tarifs s'ils encouragent, en partie, la libéralisation future des activités d'autres entités. Nous devrions nous rappeler qu'il est possible que ce soit faux. Autrement dit, il est parfaitement raisonnable de concevoir plusieurs scénarios de libéralisation dans tous les secteurs ou dans un secteur donné, et il est plus avantageux de le faire même si personne d'autre ne le fait.

Les industries laitières de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie en sont un bon exemple; elles sont passées par un processus de libéralisation plutôt violent, qui a causé tout un choc au système. Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande avait extrêmement peur que le pays perde beaucoup de fermes laitières familiales, que la production diminue et que la Nouvelle-Zélande soit écrasée par les marchés extérieurs. Rien de tout ça n'est arrivé. L'industrie a gagné en importance et en force. La Nouvelle-Zélande s'est tournée vers le commerce international et la spécialisation, exactement comme ce que je disais.

Dans l'industrie laitière ou le commerce laitier, on entend souvent qu'il n'y a aucun grand marché international dans ce domaine de toute façon — mais ce n'est tout simplement pas vrai. Le fait que nous nous tenions à l'écart de ce marché en raison de la politique canadienne est quelque peu ridicule, puisque nous limitons ainsi l'investissement possible dans l'agriculture, l'agroalimentaire et la transformation au Canada. C'est un marché important, et nous pouvons en faire partie.

Le sénateur Ringuette : Ce projet de loi est un projet de loi omnibus sur le budget qui comporte plus de 1 500 tarifs différents rattachés à diverses industries. Je crois que le gouvernement perdra 300 millions de dollars en recettes, mais c'est une tout autre question, selon moi. Ce qui m'inquiète, c'est qu'il n'y a pas de réciprocité, et nous perdons 1 500 numéros tarifaires qui ne pourront plus servir à d'éventuelles négociations. Nous prévoyons des discussions commerciales importantes avec l'Union européenne, et qu'avons-nous comme atout? Nous supprimons 1 500 numéros tarifaires dans les pays de l'Union européenne aux termes de ce projet de loi d'exécution du budget. Ensuite, nous nous tournons au sud de la frontière, au sud du continent, pour traiter d'autres questions — et il n'y a aucune réciprocité pour 1 500 numéros.

Le président : Monsieur Poschmann, aimeriez-vous formuler un commentaire à cet égard, ou l'avez-vous déjà fait? C'est la deuxième fois que vous soulevez cette question.

Le sénateur Ringuette : C'est mon point de vue.

Le président : Est-il nécessaire de revenir sur le sujet?

M. Poschmann : Puis-je me permettre de vous dire, sénateur, que ma réponse est sensiblement la même. Nous ne savons pas si nous obtiendrons la réciprocité à laquelle nous pourrions nous attendre si nous conservons ces tarifs. Chose certaine, nous ignorons si notre situation empirera si nous réduisons ces tarifs et renonçons à cette réciprocité. Cependant, il serait sensé de croire que notre situation s'améliorera probablement, parce que ces tarifs s'appliquent aux intrants de nos processus opérationnels, c'est-à-dire aux matières premières des produits fabriqués au Canada. Il est insensé que ces produits coûtent plus cher pour les entreprises lorsque celles-ci veulent investir dans leur usine et leur équipement. Supposons, par exemple, que nous concevons à partir de zéro un système dans lequel il n'existe aucun tarif, et que nous nous demandons comment nous pouvons favoriser l'investissement, l'emploi et la croissance. Commencerions-nous à imposer des tarifs sur les intrants d'entreprise? Je ne pense pas.

Le sénateur Ringuette : Nous ne connaissons pas non plus l'incidence que cette mesure aura sur nos manufacturiers canadiens, qui doivent composer avec une concurrence féroce de l'étranger, ni si elle éliminera un coût pour leurs concurrents. Avez-vous analysé cette question?

M. Poschmann : Que devrait faire le Canada lorsque la concurrence sur le marché mondial augmente, lorsque d'autres personnes font preuve d'innovation ou trouvent des façons de fournir des produits et services qui répondent aux besoins des gens, et qui le font de façon efficace, rentable et concurrentielle? Comment le Canada peut-il tirer son épingle du jeu? Dans quelle mesure une politique permet-elle de simplifier les décisions d'investissement prises par les fournisseurs et les manufacturiers canadiens, ainsi que le processus d'établissement de leur entreprise, de recrutement de nouveaux employés et de formation? Que devrions-nous faire? Il m'apparaît parfaitement logique, entre autres, de réduire le coût des intrants et les taxes qui s'appliquent au coût de ces intrants, ce qui améliorera probablement la rentabilité des investissements et incitera les entreprises à prendre de l'expansion et à investir.

Le sénateur Runciman : Merci de l'exposé que vous nous avez présenté aujourd'hui. Je suis d'accord avec la plupart des points que vous avez énumérés. J'ai pensé que je pourrais faire part aux autres membres du comité d'une déclaration que vous avez faite. Après la publication du budget, le Financial Post vous a cité comme suit : « L'élimination de tous les tarifs sur les intrants est une mesure absolument brillante ». Voilà qui est bien dit.

Le président : Voulez-vous confirmer cette citation?

Le sénateur Runciman : Je pense qu'il l'a fait.

Le président : L'a-t-il fait?

Le sénateur Runciman : À maints égards.

Je ne suis pas surpris du point de vue du sénateur Ringuette sur le sujet. Certaines personnes, les noms de Michael Ignatieff et certains sénateurs libéraux me viennent immédiatement à l'esprit, désapprouvent cette approche. Nous l'avons constaté par leurs commentaires concernant l'impôt sur le capital et la TPS s'ils prennent le pouvoir.

Le sénateur Ringuette : Pouvons-nous parler de l'impôt sur l'assurance-emploi?

Le président : Monsieur Poschmann, voulez-vous formuler un commentaire sur ce sujet?

Le sénateur Runciman : Je m'attendais à une question ici.

M. Poschmann : Moi aussi.

Le sénateur Runciman : Je vais vous lire une citation faite par Simon Harding, de KPMG, un cabinet très respecté :

M. Harding estime que le Canada ne devrait pas s'endormir sur ses lauriers. « Pour ne pas perdre notre pouvoir d'attraction sur les entreprises étrangères, nous devons tenir le cap et présenter une proposition de valeur clairement définie », a-t-il déclaré.

Je pense que vous avez fait allusion à cette déclaration. Selon KPMG, la situation actuelle s'explique principalement par le fait que les principaux rivaux du Canada ne sont plus les pays développés mais plutôt ceux où les coûts sont peu élevés. Vous voulez peut-être aborder ce sujet. Vous avez aussi parlé de l'incidence que cela pourrait avoir sur la productivité, un défi que le Canada a toujours dû relever. Peut-être pourriez-vous traiter de ces deux questions.

M. Poschmann : Nous avons souvent beaucoup de difficulté à faire face à la concurrence des pays où les coûts sont peu élevés. L'Ontario et le Québec, en particulier, sont actifs depuis longtemps dans le secteur manufacturier. Comme vous le savez, le secteur manufacturier de l'Ontario joue un rôle crucial dans le marché de l'automobile nord-américain. C'est d'ailleurs un bon exemple à utiliser. En 1967, nous avons signé le pacte de l'automobile qui prévoyait que le Canada participe au processus de fabrication avec les États-Unis. Selon cette entente, le Canada fabrique un très grand nombre de voitures et de pièces destinées au marché américain. Réciproquement, nous importons de nombreuses voitures et pièces des États-Unis. Il s'agit d'un processus de fabrication intégré.

Pour tirer notre épingle du jeu dans ce contexte, ou autrement dit, pour être concurrentiels sur ce marché, et nous le sommes, je pense, nous devons faire les choix d'investissement les plus judicieux possible, mobiliser adéquatement nos ressources et affecter les capitaux à bon escient. L'une des façons d'y parvenir ou de s'approcher de cet objectif, c'est de faire preuve de neutralité dans nos choix stratégiques et de réduire les coûts pour les investissements, dans la mesure du possible, afin de favoriser la rentabilité des projets individuels. C'est l'idée générale.

Nous avons des échanges commerciaux avec le Mexique, dans une certaine mesure avec la Corée du Sud, et bien évidemment avec la Chine, des pays qui disposent d'une main-d'œuvre à bon marché. L'une des raisons pour lesquelles nous avons toujours été relativement concurrentiels et bien nantis par rapport aux travailleurs de ces pays, c'est que nous avons une réserve considérable de capitaux pour soutenir nos employés. Autrement dit, nous avons fait des investissements en capitaux importants dans l'équipement manufacturier et la formation de nos employés afin qu'ils puissent utiliser cet équipement à bon escient. C'est la raison pour laquelle nos revenus sont relativement élevés.

Si nous voulons maintenir nos emplois et notre croissance et les stimuler, nous devons demeurer concurrentiels par rapport à ces pays qui dépendent davantage d'une main-d'œuvre à bon marché, mais qui commencent à avoir recours à la technologie et à accroître leur productivité. Il ne fait aucun doute que les revenus des Chinois feront un bond important au cours des prochaines décennies. Comment pouvons-nous faire face à cette situation? Nous devons limiter nos coûts et faire des choix judicieux, notamment en ce qui concerne notre politique fiscale, et nous saurons bien nous tirer d'affaire. La position du Canada n'est pas mauvaise du tout. Notre bilan en matière de libéralisation est plutôt positif. Nous pouvons toujours faire mieux, et nous devons continuer en ce sens à mesure que le monde évolue.

Le sénateur Mitchell : Monsieur Poschmann, je suis d'accord avec ce que vous dites sur le libre-échange. Je pense que la majorité des personnes assises autour de cette table appuie le libre-échange et l'argument que vous présentez sur les tarifs, mais l'association des fabricants a dit de façon explicite que, si elle avait le choix, elle préférerait le maintien de la déduction pour amortissement accéléré plutôt qu'une réduction de tarifs. Pouvez-vous nous dire quel choix stratégique vous privilégiez et pourquoi une réduction de tarifs serait préférable à une déduction pour amortissement accéléré, surtout lorsqu'il s'agit de l'option prônée par l'industrie?

M. Poschmann : C'est une très bonne question. Il faut bien faire la part des choses. C'est davantage une question de politique fiscale qu'une question de politique commerciale. Il suffit de penser à ce en quoi consiste la dépréciation accélérée : cette méthode utilise le système fiscal pour faire des investissements particuliers — et nous parlons, dans ce cas, essentiellement d'investissements manufacturiers — qui sont beaucoup moins coûteux aujourd'hui. Nous appliquons la dépréciation accélérée sur une base temporaire parce que nous voulons retirer maintenant nos capitaux d'investissement à venir. Voilà pourquoi certains gouvernements ont choisi cette méthode comme mesure de relance.

Évidemment, les entreprises apprécient aussi cette méthode. La raison est la même : l'investissement est maintenant plus facile parce que la facture fiscale qui s'y rapporte en est réduite.

Cela fait partie d'une politique fiscale plus vaste. Que souhaitons-nous à long terme? Préférons-nous un système qui impose une très faible taxe sur presque toutes les activités ou un système qui prélève des recettes en imposant une taxe plus élevée sur certaines activités et certains investissements? Quel en sera le résultat? De nombreux économistes laissent entendre que l'approche plus vaste axée sur un faible taux de taxation est celle qu'il faut adopter.

Le secteur de l'énergie, l'un des secteurs qui profitent d'un amortissement accéléré ou d'une dépression accélérée, prône cette approche et est prêt à la défendre. Les gens qui travaillent dans ce secteur s'intéressent à cette approche parce que c'est leur industrie et leurs investissements qui sont en cause. Nous pouvons tous le comprendre. La question fondamentale qu'il faut se poser, cependant, est celle de savoir si les gouvernements doivent faire preuve de neutralité concernant les activités visées, d'un point de vue stratégique. Ces activités sont importantes, mais il n'y a pas que l'investissement dans la machinerie et l'équipement qui comptent dans la vie.

Il y a tous les autres types d'investissements qui rapportent, notamment les investissements immatériels et les coûts de formation. Il y a aussi toutes les choses que les entreprises doivent acheter ou dans lesquelles elles doivent investir, comme les services financiers, qui ne bénéficient pas d'une dépréciation accélérée.

Le sénateur Mitchell : Je ne pense pas que ces activités puissent bénéficier non plus d'une réduction de tarifs, n'est-ce pas?

M. Poschmann : Elles le peuvent, pour toutes les raisons que j'ai énumérées. Cela dépend des activités que nous voulons cibler. Voulons-nous utiliser la politique fiscale pour cibler et appuyer certaines industries ou certaines activités, ou voulons-nous plutôt ratisser large et réduire pour tout le monde le taux de taxation en vigueur sur les nouveaux investissements? La réduction des tarifs fait partie de cette stratégie.

Le sénateur Mitchell : Savez-vous si ces tarifs auront une incidence différente en fonction du secteur ou de la région où ils sont appliqués? Par exemple, je viens de l'Alberta, et je me préoccupe du coût des intrants pour l'expansion des usines d'exploitation de sables bitumineux. Ces tarifs n'affecteront pas seulement le secteur manufacturier d'une région ou d'un secteur particulier, n'est-ce pas?

M. Poschmann : Il est certain que si vous payez déjà ces tarifs, votre situation s'améliorera, si vous n'avez plus à les payer. Avons-nous examiné la répartition des bénéfices entre les provinces? Je n'ai pas la réponse à cette question.

Le sénateur Mitchell : Vous voyez d'un œil très positif ce projet de loi et cet aspect du projet de loi. Vous avez présenté de bons arguments, et je vous en remercie. Vous connaissez probablement les autres aspects du projet de loi. Nous avons eu une longue discussion aujourd'hui sur l'augmentation considérable du droit pour la sécurité des passagers du transport aérien que les utilisateurs du transport aérien devront payer, ce qui nuira à la compétitivité des entreprises de transport aérien. Ce projet de loi prévoit aussi une augmentation des primes de l'assurance-emploi que les entreprises devront payer en général.

Pourriez-vous nous donner votre opinion sur ces deux taxes comparativement à la réduction des tarifs? Forcément, j'imagine que vous n'êtes pas d'accord avec ces taxes, mais je ne veux pas essayer de vous faire dire des choses.

M. Poschmann : Ma réponse à cette question devrait être assez claire. Il y a plusieurs années, l'institut pour lequel je travaille a publié un document sur l'imposition d'une taxe aux transporteurs aériens, notamment une taxe liée à la sécurité. Nous avons conclu que la prestation des services fournis par les transporteurs aériens, autrement dit la part des coûts aux fins d'impôt qui est imposée aux entreprises de transport aérien de même qu'aux passagers et aux expéditeurs est assez élevée par rapport aux autres secteurs de l'économie.

Vous n'êtes pas sans savoir, j'en suis certain, que nous désapprouvons l'idée de taxer assez lourdement un seul type d'activités. Pour un certain nombre de raisons, nous ne pouvons pas vraiment nous étendre ici sur les arguments présentés au sujet de l'industrie du transport aérien et sa viabilité. Il n'est pas très logique d'imposer des taxes spéciales sur le transport aérien dans la mesure où ces taxes représentent un avantage — autrement dit, nous profitons de la sécurité du transport aérien — cette taxe ne produit donc pas le même impact en ce qui concerne l'investissement. Autrement dit, si le coût exigé pour fournir un service dont profitent les passagers est le seul coût à payer, cela n'a pas beaucoup d'incidence sur l'industrie et n'est pas trop pénible en soi.

Il est assez difficile de voir clair dans tout cela. Au fil des ans, on s'est posé la question de savoir si le coût de prestation des services de sécurité justifiait la taxe d'aéroport imposée. Cette évaluation ne tient pas compte du niveau d'appréciation du service de sécurité dont nous bénéficions. Des questions ont été soulevées sur le lien entre le montant de la taxe et le coût de prestation du service. Je n'en sais pas davantage pour le moment.

Le sénateur Mitchell : Dans la mesure où il s'agit d'un droit versé en contrepartie d'un service, cela n'a pas autant d'incidences négatives sur les investissements qu'un paiement à d'autres fins. Aujourd'hui, nous avons entendu un témoignage selon lequel au moins 225 millions de dollars par année générés par l'augmentation de cette taxe ne serviront pas, en fait, à couvrir le service de sécurité; ce montant s'ajoutera littéralement aux recettes générales.

Merci beaucoup. Nous apprécions votre point de vue.

Le sénateur Murray : J'appuie la proposition concernant la réduction des tarifs douaniers. Cependant, monsieur Poschmann, lorsque vous avez parlé de la libéralisation du commerce en général, je n'ai pu faire autrement que me demander à quel mouvement vous faites allusion. Les dirigeants du G8 et du G20 qui se sont réunis l'autre jour n'ont pas tenté de donner un nouveau souffle aux négociations du cycle de Doha. Je pense qu'ils y ont renoncé. Cela peut s'expliquer de diverses façons — ils sont peut-être préoccupés par les problèmes financiers et économiques ou par l'incidence de ces problèmes sur la vie de leurs électeurs. Quoi qu'il en soit, les négociations semblent tourner en rond.

Hier, un article, qui présente un point de vue plutôt pessimiste et pas tellement bien argumenté, a été publié dans l'éditorial du Globe and Mail. L'auteur semble prétendre que le multiculturalisme est mort et que la seule chose qui nous reste à faire est de continuer ce que nous faisons, de prendre ce que nous pouvons, sur le plan bilatéral, régional ou autrement. Qu'en pensez-vous?

M. Poschmann : Cette analyse est probablement correcte dans la mesure où les discussions tournent en rond. En effet, nous pouvons tenir cela pour acquis pour certaines des raisons que vous avez mentionnées.

Que pouvons-nous y faire? Cela est moins évident, mais l'une des choses que nous pourrions faire c'est de répondre aux questions vraiment difficiles, de faire en sorte que le Canada se range du bon côté et de voir si nous pouvons donner un second souffle à ce débat dans les années à venir. C'est un long processus.

Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie que nous devons nous attaquer à la question commerciale liée aux produits agricoles. Nous ne nous rangeons pas du bon côté sur cette question. Nous commettons une erreur. Notre gestion de l'offre sur de nombreux fronts affaiblit notre position auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et auprès d'autres pays. Nous n'allons pas dans la bonne direction.

Les marchés publics représentent une autre question. Pour répondre aux questions difficiles à l'échelle internationale, il faut nous occuper des marchés publics; cela signifie encore une fois la libéralisation.

Cette tâche n'est pas facile. Comme vous le savez, nous avons eu quelques différends avec les États-Unis. La loi favorisant l'achat de produits américains est étroitement liée aux marchés publics. Bien que cette question semble être réglée avec nos voisins du Sud, nous n'avons pas vraiment établi la position du Canada sur cette question au pays même. Dans les secteurs de l'énergie et des infrastructures hydrauliques, nous pourrions faire appel plus souvent, dans de nombreux marchés publics, à la France et au Royaume-Uni, où il existe un nombre considérable de fournisseurs de produits de qualité qui aimeraient soumissionner dans le cadre d'un processus plus vaste, mais nous n'avons pas complètement ouvert ce processus.

Il est vrai que la perspective du multilatéralisme en matière de commerce n'est pas très rose. Nous pouvons toutefois améliorer la situation. Cela prendra du temps, mais cela signifiera que le Canada est capable de gérer l'offre, de faire affaire avec les provinces et les municipalités et d'améliorer son bilan en ce qui concerne les marchés publics.

Le président : Monsieur Poschmann, nous avons parlé ce matin de la partie 5 et des tarifs douaniers, mais il y a 23 autres parties au projet de loi C-9. Avez-vous l'intention de présenter votre point de vue sur d'autres parties du projet de loi?

M. Poschmann : Je crois que l'assurance-emploi est le prochain sujet à l'ordre du jour; il a déjà été mentionné. Je n'ai pas préparé de commentaires sur le sujet, mais je peux vous dire que le financement à long terme du régime et que la mesure dans laquelle la courbe du taux des cotisations perçues dans le cadre du régime suivra celle de l'économie ou ira à son encontre me préoccupent quelque peu. Quand on est prospère, on aime gonfler le fonds d'assurance-emploi puis, quand les choses dégringolent et le taux de chômage grimpe, on le laisse baisser. Et c'est un problème récurrent du régime d'assurance-emploi, principalement parce que nous avons assorti le régime fédéral d'une foule d'autres objectifs. Nous ne venons pas seulement en aide aux employés qui ont été licenciés ou qui ont perdu leur emploi pour des raisons d'ordre économique; nous avons aussi un éventail de politiques qui se rapportent à l'adoption, à la famille et à la maladie. Il est bien de s'occuper de ces aspects, mais ils ajoutent bien des coûts à un régime déjà complexe dont le financement est très difficile à gérer.

Est-ce la bonne façon de procéder? Je n'en suis pas sûr. Notre fonds se renfloue assez rapidement. Le mot d'ordre est le suivant : si le fonds diminue, le gouvernement devra verser environ 3 milliards de dollars l'année suivante pour le regarnir. Nous pouvons donc nous attendre à devoir parfois hausser les cotisations quand les temps sont durs, ce que le gouvernement n'a pas fait jusqu'à présent. Au cours des dernières années, le gouvernement fédéral s'est prévalu du pouvoir discrétionnaire conféré aux ministres pour limiter les hausses du taux de cotisation quand le fonds baissait. C'est très bien, mais cette façon de procéder ne nous garantit pas un régime viable qui fonctionnera bien à long terme, qui se renflouera suffisamment quand l'économie va bien et qui diminuera raisonnablement quand les temps sont difficiles. Il y a du travail à faire sur ce plan.

Le président : Merci beaucoup pour ces commentaires. Nous n'avons pas encore reçu de groupe de témoins à ce sujet, mais nous garderons très certainement vos commentaires en tête lorsque nous nous y consacrerons.

M. Poschmann, de l'Institut C.D. Howe, a témoigné aujourd'hui à titre personnel et a exprimé ses propres points de vue. Nous vous en remercions grandement. Nous serons très heureux de discuter de nouveau avec vous quand l'occasion se présentera.

Nous entamons maintenant le quatrième et dernier volet de la séance, au cours duquel nous allons examiner la partie 24, qui concerne le financement de l'assurance-emploi.

[Français]

Nous sommes très heureux d'accueillir M. Jean-Michel Laurin, vice-président, Affaires mondiales, Manufacturiers et exportateurs du Canada. Nous vous souhaitons la bienvenue.

[Traduction]

Nous accueillons également Mme Corinne Pohlmann, vice-présidente, Affaires nationales, et Ian Dawkins, analyste des politiques, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

Corinne Pohlmann, vice-présidente, Affaires nationales, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante : Je vous remercie de nous donner l'occasion de venir vous parler aujourd'hui des dispositions du projet de loi C-9 relatives à l'assurance-emploi. Mon exposé s'appuiera sur les diapositives de notre document, et M. Dawkins m'aidera ensuite à répondre à vos questions.

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la FCEI, est un organisme non partisan et à but non lucratif qui représente plus de 107 000 petites et moyennes entreprises canadiennes indépendantes. Nous sommes financés à 100 p. 100 par nos membres, et nos 11 bureaux répartis au pays traitent des enjeux qui touchent tous les ordres de gouvernement. Nous comptons des membres de toutes les régions du pays et nous représentons tous les secteurs économiques.

Il est également important de se rappeler que les petites et moyennes entreprises du Canada sont de grandes organisations. Elles comptent pour 98 p. 100 de l'ensemble des entreprises au Canada, elles emploient la majorité des Canadiens et leur production représente près de la moitié de la production nationale. Ces statistiques figurent à la troisième diapositive.

À la quatrième diapositive, vous trouverez l'indice du Baromètre des affaires de la FCEI, qui est publié tous les mois. L'indice montre les perspectives d'affaires des petites entreprises qui, de façon réciproque, permettent de prédire la situation économique dans son ensemble. Dès 2007, les propriétaires de petites entreprises ont commencé à ressentir les effets de la récession, qui nous avait entièrement submergés à la fin de 2008. Toutefois, jusqu'à la fin de 2009, la situation semblait s'améliorer et les propriétaires de petites entreprises ont commencé à prendre confiance. Néanmoins, comme le montrent les chiffres modestes entourant les perspectives d'emploi à la cinquième diapositive, ils appréhendent toujours l'avenir de l'économie; seulement 15 p. 100 des propriétaires déclarent qu'ils comptent augmenter le nombre d'employés à plein temps au cours des trois prochains mois et 12 p. 100 prévoient réduire ce nombre. Une telle situation est courante au terme d'une récession, puisque c'est souvent le marché de l'emploi qui se rétablit en dernier, mais elle indique que l'économie demeure incertaine; c'est pourquoi nous devons nous assurer de prendre des décisions qui seront bénéfiques.

Compte tenu de l'incertitude qui subsiste sur le marché de l'emploi, les propriétaires de petites entreprises s'inquiètent de plus en plus de l'avenir de l'assurance-emploi; comme le montre la sixième diapositive, ils considèrent que les charges sociales, notamment les cotisations à l'assurance-emploi, nuisent le plus à la croissance de leur entreprise parce qu'il en coûte plus cher d'embaucher des employés et de maintenir en poste leur personnel. Ils ont donc tendance à être réticents aux changements qui entourent les charges sociales. Comme certains ont récemment avancé l'idée de hausser les cotisations à l'assurance-emploi et peut-être même au Régime de pensions du Canada et à la Commission des accidents du travail dans plusieurs provinces, les propriétaires de petites entreprises se demandent bien comment ils pourront continuer d'embaucher et de maintenir en poste leur personnel. Mais tenons-nous-en à l'assurance-emploi, qui est au cœur de la partie 24 du projet de loi.

La FCEI est depuis longtemps liée à l'assurance-emploi; en fait, nous sommes parmi les premiers à avoir constaté l'excédent grandissant du fonds d'assurance-emploi qui se chiffre maintenant à 57 milliards de dollars, comme le montre la septième diapositive. La FCEI a également exhorté le gouvernement à réduire le taux de cotisation d'assurance-emploi de 1995 à 2008 alors que pour toutes les années de cette période, les recettes du gouvernement provenant de l'assurance-emploi étaient plus élevées que les dépenses. Toutefois, les cotisations d'assurance-emploi perçues en excédent étaient considérées comme des recettes générales et ont été affectées à des dépenses qui n'avaient rien à voir avec le régime d'assurance-emploi. La FCEI a également milité en faveur du gel du taux de cotisation d'assurance-emploi en 2009-2010 pour aider les petites entreprises à conserver leur personnel en période de ralentissement économique. Lorsqu'il y a des pertes d'emplois, la dernière chose à faire est de rendre la tâche encore plus difficile aux employeurs qui souhaitent maintenir en poste leurs employés. Toutefois, nous espérions que le gouvernement, dans le cadre de son plan de relance, irait puiser l'argent pour assumer les coûts du gel des taux dans les recettes générales. Il n'en a pas été ainsi, si bien que nous nous retrouvons dans la situation actuelle. Mais je parlerai de ce point plus en détail dans un instant.

Constatant l'augmentation de l'excédent pendant les années 1990, nous avons commencé, dès 1997, comme le montre la huitième diapositive, à inciter le gouvernement à créer un compte d'assurance-emploi qui serait géré indépendamment et séparé du Trésor. Au fil des ans, quelques tentatives visant à résoudre l'excédent grandissant ont été mises en œuvre, mais c'est seulement dans le budget de 2008 que le gouvernement a proposé la création d'un fonds distinct qui serait géré par un groupe indépendant — nous savons maintenant qu'il s'agit de l'Office de financement de l'assurance-emploi du Canada, l'OFAEC. Nous sommes en faveur de la création de cet organisme indépendant et d'un compte distinct, mais le moment choisi n'aurait pas pu être pire.

L'OFAEC est entré en service en janvier 2009, en plein cœur de la récession, et toutes les dettes ou les sommes créditées ont été portées au compte, si bien que les déficits se sont accumulés — une première en 15 ans. Le fonds de réserve de 2 milliards de dollars seulement versé à l'OFAEC à ses débuts — montant qui représente une fraction de l'excédent accumulé —, ne permettra pas d'éponger le déficit qui s'accumule depuis janvier 2009, qui se chiffre, selon les estimations, à un total entre 10 et 15 milliards de dollars.

Pour résorber ce déficit, une seule option s'offre au nouvel office : hausser les cotisations d'assurance-emploi du montant maximal permis à compter de 2011. Comme l'indique la neuvième diapositive, la FCEI a conclu, au terme d'une étude, que le gouvernement devra, chaque année au cours des quatre prochaines années, augmenter les taux de cotisation du montant maximal, c'est-à-dire 15 sous pour les employés et 21 sous pour les employeurs par tranche de 100 $ de salaire, ce qui équivaut à une augmentation de 35 sous au cours de cette période.

Nous croyons que c'est injuste compte tenu du fait que les employeurs et que les employés ont dû verser des cotisations trop élevées pendant plus de 15 ans. Une augmentation des taux alors que l'économie reprend de la vigueur et que le marché de l'emploi est encore fragile nuira aux petites entreprises qui souhaitent maintenir en poste leur effectif, sans parler de celles qui souhaitent embaucher de nouveaux employés. Et si en plus se concrétise le projet d'augmenter les cotisations au Régime de pensions du Canada et à la Commission des accidents du travail au pays de différentes provinces, bien des petites entreprises auront de la difficulté à recruter du personnel dans un avenir proche.

En fait, d'après une analyse postérieure menée par la FCEI, une augmentation des taux de cotisation d'assurance-emploi pourrait entraîner la perte de 170 000 emplois au Canada à court terme et la réduction des salaires de 1,2 p. 100 à long terme. Vous voyez donc pourquoi nous essayons de convaincre le gouvernement de réfléchir de nouveau à son projet d'augmenter les taux de cotisation d'assurance-emploi en 2011 et ultérieurement.

Ironiquement, comme vous pouvez le voir à la onzième diapositive, les prévisions concernant l'avenir du fonds d'assurance-emploi sont comme des montagnes russes, encore une fois; il affichera des excédents, puis atteindra ensuite l'équilibre. Comme les taux de cotisation ne peuvent pas diminuer de plus de 15 cents par an, le fonds accumulera un autre excédent au cours de la deuxième moitié de la décennie. Il peut être utile d'accumuler un léger excédent, mais il ne faut pas qu'il soit trop grand, si, dans le futur, les gouvernements venaient à vouloir mettre la main dessus. Nous avons quelques idées pour prévenir cela aussi.

En conclusion, nous sommes en faveur de la création d'un compte distinct, mais nous croyons que le moment choisi pour le créer n'aurait pas pu être pire. Le fait d'augmenter les taux de cotisation dès maintenant aura une incidence sur la croissance du marché du travail; compte tenu des excédents qu'a enregistrés le fonds d'assurance-emploi avant janvier 2009 — la seule année où il n'y a eu aucun excédent —, nous croyons fermement que le gouvernement fédéral doit geler les taux de cotisation ou réduire au minimum les augmentations futures — étant donné l'excédent de 57 milliards de dollars perçu pendant plusieurs années auprès des employeurs et des employés, le gouvernement a une obligation morale envers ces derniers.

Nous avons mis de l'avant d'autres idées qui aideraient à favoriser la formation et l'embauche, par exemple un crédit à la formation dans le cadre du régime d'assurance-emploi, que je pourrais vous expliquer plus en détail si vous le souhaitez. Nous avons aussi recommandé de mettre en réserve des fonds en vue de récessions futures, mais une fois la limite établie pour les fonds de réserve atteinte, il faudrait laisser les taux de cotisation revenir à la normale, même si cette mesure implique une réduction supérieure au montant maximal de 15 cents.

Nous avons bien d'autres idées en ce qui concerne l'assurance-emploi; si elles vous intéressent, nous serions heureux de vous en parler. Je répondrai maintenant volontiers à vos questions. Merci pour le temps que vous m'avez accordé.

Le président : Merci beaucoup, madame Pohlmann. Je cède maintenant la parole à M. Laurin.

Jean-Michel Laurin, vice-président, Affaires mondiales, Manufacturiers et exportateurs du Canada : Merci de m'avoir invité à comparaître devant le comité au nom de Manufacturiers et exportateurs du Canada pour discuter de la partie 24 du projet de loi portant exécution du budget. Comme notre association représente des secteurs qui emploient plus de deux millions de Canadiens, les changements apportés au régime d'assurance-emploi revêtent un grand intérêt aux yeux de nos membres.

Avant de commencer, j'aimerais dire quelques mots au sujet de l'association que j'ai le privilège de représenter devant vous aujourd'hui. Manufacturiers et exportateurs du Canada, MEC, est en quelque sorte le porte-parole des manufacturiers du Canada et des entrepreneurs qui mènent des activités à l'échelle mondiale; nous représentons plus de 10 000 entreprises influentes au pays. Plus de 85 p. 100 de nos membres sont des petites et moyennes entreprises des quatre coins du Canada. Nous comptons des membres dans tous les secteurs industriels et tous les secteurs d'exportation.

Comme vous le savez sans doute, le régime d'assurance-emploi du Canada revêt depuis longtemps un grand intérêt pour MEC et les employeurs. À l'heure actuelle, les taux de cotisation prévus pour 2011 et ultérieurement sont l'une de nos principales sources de préoccupation; compte tenu des coûts grandissants d'exploitation du régime et du déficit attribuable au gel des taux pendant deux ans, on s'attend à ce que les taux de cotisation à l'assurance-emploi augmentent considérablement au cours des prochaines années.

Le directeur parlementaire du budget estime que même si on augmentait le taux de cotisation de 15 cents par an — et, dans le cas des employeurs, de 21 cents —, le compte d'assurance-emploi enregistrera un déficit cumulatif de 5,7 milliards de dollars entre 2008 et 2014. Et l'incertitude qui entoure le chômage aggrave ce risque à court terme.

Nous savons qu'à compter de l'an prochain, il y aura un écart considérable à combler. On estime qu'en 2010, seulement pour être rentable il faudrait faire passer le taux de cotisation à 2,43 $, et il a été gelé à 1,73 $. Nous savons donc ce qui s'en vient : les employeurs devront débourser davantage, et ce, dès l'an prochain.

Comme Mme Pohlmann l'a mentionné, si la pilule est si difficile à avaler pour les employeurs du Canada, c'est parce qu'au cours des 15 dernières années, ils ont cotisé 57 milliards de dollars en excédent; et maintenant, qu'on se retrouve avec un déficit, on nous dit d'oublier cet argent parce qu'il n'est plus là.

Les changements prévus à la partie 24 du projet de loi, notamment la création d'un compte des opérations de l'assurance-emploi, répondent à l'une des préoccupations que nous avons depuis des années. Toutefois, le problème est toujours là; le compteur a été remis à zéro le 1er janvier de l'an dernier alors qu'il devrait rester 57 milliards de dollars dans le compte.

Un autre aspect de la partie 24 du projet de loi C-9 nous préoccupe : notre régime d'assurance-emploi est loin d'être géré comme un véritable régime d'assurance. Si nous voulons assumer les coûts liés à l'assurance-emploi, nous devons fournir les moyens aux entreprises canadiennes de créer des emplois hautement spécialisés et très bien rémunérés dont notre pays a besoin pour être concurrentiel et prospère. Pour ce faire, nous avons besoin d'une stratégie concertée qui permette de renforcer la capacité des entreprises canadiennes à investir dans les biens de production. Cette stratégie doit prévoir des mesures qui favorisent la formation en milieu de travail de façon à ce que les compétences des travailleurs soient à jour et qu'elles répondent aux besoins du marché du travail — non seulement aujourd'hui, mais aussi dans le futur.

Le gouvernement doit offrir aux employeurs un crédit d'impôt pour la formation afin de compenser l'augmentation des taux de cotisation à l'assurance-emploi. Compte tenu des taux de création d'emploi relativement faibles, il est beaucoup plus productif de maintenir les gens en poste et de mettre à jour leurs compétences au travail que d'offrir de la formation de transition aux chômeurs. Parallèlement, il est bien d'encourager les employeurs à investir de l'argent pour mettre à niveau les compétences de leur effectif — il s'agit là d'une bonne politique publique. Le crédit devrait s'appliquer aux cotisations d'assurance-emploi versées par les entreprises qui investissent dans la formation.

De plus, sur le plan fiscal, nous croyons que le gouvernement du Canada devrait avoir pour priorité d'encourager les entreprises à investir dans tous les biens de production — tant le perfectionnement des compétences en milieu de travail que la recherche, la conception de nouveaux produits, l'équipement et les technologies servant à produire des biens de valeur supérieure.

De tels investissements sont plus importants que jamais aujourd'hui, car ils permettent d'accroître considérablement la productivité, d'améliorer la compétitivité des entreprises, d'accélérer la croissance de l'emploi et de soutenir la reprise de l'économie. Au cours des prochaines années, ce seront les nouveaux produits et les nouvelles technologies introduites sur le marché par les manufacturiers qui aideront les Canadiens à relever les défis qui se poseront à la société — la population vieillissante, une sollicitation accrue de notre régime de soins de santé et la nécessité d'améliorer la gestion de l'environnement et de l'énergie. Dans la même veine, c'est en adoptant des technologies de pointe dans les domaines de la fabrication et du traitement et en acquérant de nouvelles compétences que nous permettrons à l'industrie canadienne d'améliorer la productivité; c'est ainsi que l'industrie disposera des ressources économiques et de l'assiette fiscale qui nous permettront d'avoir des finances publiques solides et, un jour, un budget équilibré.

Dans ce budget, le gouvernement a décidé d'éliminer les tarifs applicables aux pièces d'équipement et de machinerie importées et aux intrants utilisés par les manufacturiers. Je crois que vous en avez discuté plus tôt aujourd'hui. MEC était en faveur de cette mesure. À ce stade-ci, toute mesure qui offre des économies aux manufacturiers est un plus, mais nous aurions de loin préféré que le gouvernement décide de prolonger d'au moins cinq ans après 2011 — l'année où ces mesures sont censées prendre fin — la période pendant laquelle les entreprises peuvent se prévaloir de la déduction biennale des sommes investies dans la machinerie et l'équipement de fabrication et de traitement.

En conclusion, la mise sur pied d'un crédit d'impôt aux employeurs pour la formation et la déduction biennale des sommes investies dans l'équipement de fabrication et de traitement sont deux mesures qui favoriseraient les investissements que le Canada et que les entreprises canadiennes doivent faire pour ajouter de la valeur à nos ressources humaines et naturelles et contribuer à la prospérité de l'économie mondiale.

Le ministre des Finances et le gouvernement étaient bien au courant de notre position quand ils ont préparé le dernier budget fédéral, et ils ont décidé d'aller à l'encontre de notre point de vue. Cependant, il n'est pas trop tard pour que le gouvernement prenne le pouls; l'économie commence à reprendre de la vigueur et les entreprises en sont à déterminer les investissements qu'elles feront au cours des prochaines années. Je m'arrête ici. Je répondrai avec plaisir à vos questions.

Le président : Merci pour votre commentaire sur les tarifs douaniers. Vos membres ont-ils été sondés? Demandaient-ils à obtenir ce tarif? Le gouvernement a-t-il pris une décision stratégique d'aller vers l'un plutôt que l'autre?

M. Laurin : En toute honnêteté, je dois vous dire que c'était assez clair. MEC a une coalition de 40 associations sectorielles, qui représentent à peu près tous les sous-secteurs imaginables de la fabrication, et nous disons depuis un certain temps au gouvernement que cette déduction pour amortissement accéléré — qui permet aux fabricants de déduire pendant deux ans les sommes qu'ils investissent dans la machinerie et l'équipement — était de loin notre principale priorité en ce qui a trait à ce budget. Le gouvernement a lancé cette mesure il y a quelques années, et celle-ci doit venir à échéance à la fin de 2011.

Les cycles d'investissement prennent du temps, c'est pourquoi nous avons dit aux entreprises qu'il n'est pas possible d'appliquer une mesure pendant deux ans seulement; nous avons besoin d'une période de cinq ans afin que les entreprises puissent en tirer parti. Dans certains cas, il faut parfois compter jusqu'à deux ans simplement pour obtenir les permis nécessaires sur le plan environnemental.

Nous avons établi que cette mesure coûterait 469 millions de dollars sur cinq ans si elle était prolongée de 2011 à 2016. Au besoin, je peux vous fournir des données plus détaillées après cette rencontre. Le gouvernement a plutôt décidé d'éliminer les tarifs sur les intrants, la machinerie et l'équipement, ce qui est certes une étape positive. Cette mesure ne figurait évidemment pas sur la liste des choses que nous souhaitions voir faire le gouvernement, mais lorsqu'il nous a dit qu'il envisageait différents scénarios, nous avons dit que c'était assurément une mesure positive.

Nous ne pensions pas qu'il s'agissait d'un choix entre les tarifs ou l'amortissement sur deux ans; nous pensions que les deux étaient possibles. Cette mesure annoncée dans le budget coûte 300 millions de dollars par année au gouvernement, sans échéance prévue. Je ne pense pas que les tarifs réapparaissent une fois qu'ils auront été éliminés. Les 300 millions de dollars par année coûteront 1,5 milliard de dollars pour cinq ans, alors que ce que nous demandions au gouvernement lui aurait coûté beaucoup moins cher. À notre avis, cette mesure aurait contribué bien davantage à produire le genre d'investissements que nous devons amener au Canada.

Les entreprises en sont à se sortir de la récession. Il en va de même pour les petites et les moyennes entreprises de fabrication également. Actuellement, les entreprises se soucient des marchés. Il n'y a pas de croissance sur les marchés nord-américains en ce moment; cette croissance est de plus en plus l'apanage de certains des marchés émergents. Aujourd'hui, les entreprises sont mieux à même d'investir leur argent là où cela leur paraît le plus sensé. Elles font le choix des marchés qui leur conviennent, ce qui n'est pas nouveau.

Toute mesure adoptée en vue de stimuler l'économie et de rendre ces investissements attrayants d'un point de vue fiscal constitue une bonne mesure, et pas uniquement pour le présent exercice. Lorsque les fabricants investissent dans un marché, lorsqu'ils investissent dans une municipalité, cet investissement demeure généralement sur place longtemps, en raison de la nature de l'industrie de fabrication. J'espère que cela répond à votre question.

Le président : Oui. Merci beaucoup.

Le sénateur Finley : Ma question s'adresse à la FCEI. Certaines des observations formulées ne datent pas d'hier. En 1998, Garth Whyte, qui était alors vice-président de la FCEI, a déclaré dans le Times que cette petite taxe sournoise s'était transformée en une énorme ponction fiscale qui allait nuire à la création d'emplois. Cité dans le Sault Star en 2000, Whyte a dit que le milieu des affaires en avait marre que la caisse de l'assurance-emploi soit la caisse noire d'autres initiatives. En 1998, le Windsor Star rapportait que cette caisse n'existait que sur papier étant donné que le gouvernement Chrétien avait en réalité dépensé tout l'argent, et que la caisse de l'assurance-emploi avait largement contribué au budget équilibré tant prisé du ministre Martin. En 2004, le Toronto Star a ajouté que messieurs Martin et Manley avaient confisqué en entier les 44 milliards de dollars de la caisse de l'assurance-emploi, tout d'abord pour réduire le déficit budgétaire d'ensemble d'Ottawa, puis pour gonfler ses surplus budgétaires.

Cet argent aurait été là, même en théorie, pour pallier le plus récent ralentissement économique.

On a demandé au témoin qui vous a précédé, Finn Poschmann, économiste à la C.D. Howe Institute, dans quel état se trouvait la caisse de l'assurance-emploi et il a dit que celle-ci fluctuait en quelque sorte. Un des problèmes vient du fait que les choses se sont un peu éloignées de l'idée d'origine, qui était de verser des prestations régulières. Aujourd'hui, les prestations régulières ne représentent que 55 p. 100, et nous versons des prestations pour des choses spécialisées comme la pêche, la maladie, la maternité, les congés parentaux et ainsi de suite.

Il faut renflouer la caisse. Le gouvernement conservateur a créé un conseil indépendant pour gérer la caisse et, je crois, pour fixer les augmentations de taux ou de tarifs. Diriez-vous qu'il s'agit d'une mesure progressiste de la part du gouvernement? Oubliez toute la question des frais pour le moment; l'idée voulant que le gouvernement ne puisse pas toucher à cette caisse, qu'elle soit une caisse indépendante, constitue-t-elle une mesure positive?

Mme Pohlmann : Absolument. Nous sommes en faveur de la création d'une caisse distincte, isolée des recettes générales et gérée par un conseil indépendant. Nous avons toutefois des réserves quant au choix du moment. Cette mesure est entrée en vigueur en janvier 2009, soit la première année en 15 ans où nous n'avions pas de surplus. Voilà ce qui met les employeurs en colère, sans compter les employés. Cet enjeu ne touche pas que les employeurs; les travailleurs en subissent les contrecoups également.

Le sénateur Finley : N'êtes-vous pas d'accord avec moi que c'est un peu comme de déterminer à quel moment entrer dans la danse. Est-ce aujourd'hui le bon moment? Demain? Aurait-il fallu le faire il y a cinq ans? Il fallait agir à un moment ou à un autre; nous devons renflouer la caisse.

Si je me rappelle certaines des données que j'ai pu voir, vous dites qu'une réserve de quelque 15 milliards de dollars constituerait un bon filet de sécurité. Est-ce bien cela?

Mme Pohlmann : Je crois qu'il faut débattre du montant qui serait approprié, et c'est pourquoi nous n'avançons pas forcément de chiffre à l'heure actuelle. Je crois que de nombreuses personnes ont parlé d'un montant de 10 à 15 milliards de dollars.

Le sénateur Finley : Certainement pas 59 ou 60 milliards de dollars, comme on prétendait que le Canada avait en banque à une certaine époque?

Mme Pohlmann : Non. Jamais.

Le sénateur Finley : Présumons que les taux ne soient pas baissés et que les taux actuels proposés demeurent. Selon vous, question d'argumenter, combien de temps faut-il compter avant que nous ayons accumulé ces 15 milliards de dollars? À quel moment aurions-nous fini d'amasser cet argent?

Mme Pohlmann : Notre équipe d'économistes a fait des analyses, et vous avez le rapport « Assurance-emploi : Une évolution en dents de scie » devant vous. Nous avons déterminé que l'équilibre serait probablement atteint en 2014 ou en 2015. D'ici ce temps, bien entendu, les taux auront augmenté de 35 p. 100. À ce moment, on devrait avoir pallié le manque à gagner si tout le reste se passe comme prévu. Il y a beaucoup d'incertitude du côté de l'économie, à la lumière des événements d'hier encore. Nous ne savons pas où iront les choses.

Le sénateur Finley : Voilà la dernière partie de ma question. Pour en revenir à la question de déterminer à quel moment entrer dans la danse, tout indique que l'économie se trouve toujours dans un état extrêmement précaire. Rien n'indique particulièrement que les paiements d'assurance-emploi versés en ce moment — qui, je dirais, battent probablement des records — sont appelés à diminuer de façon importante à court terme. S'il ne provient pas du régime d'assurance-emploi à proprement parler, cet argent doit venir de quelque part. Où la FCEI recommanderait-elle de puiser l'argent?

Mme Pohlmann : La proposition formulée à l'origine demeure la même : cet argent aurait dû faire partie des mesures de relance du gouvernement. En fait, nous étions d'avis qu'il s'agissait de la mesure de relance idéale, en ce sens que vous vous trouvez à appuyer l'emploi pendant une période économique difficile.

Quelques personnes, y compris celles directement rattachées au régime d'assurance-emploi, ont été étonnées d'apprendre en quelque sorte après coup que ces sommes avaient été prêtées pour cette période de deux ans et qu'elles allaient maintenant devoir être remboursées. À l'origine, nous pensions que l'argent aurait pu être mieux affecté. Si on avait pris de 10 à 15 des 50 milliards de dollars prévus pour les mesures de relance économique et qu'on les avait affectés à l'emploi, de nombreuses personnes auraient approuvé d'un signe de tête autour de la table.

Le sénateur Finley : Peu de gens se sont montrés d'accord avec les dépenses réelles qui ont été effectuées avec cet argent. Comme on dit, il est impossible de satisfaire tout le monde, tout le temps.

Mme Pohlmann : Je ne le nie pas non plus, mais nous trouvions que le secteur de l'emploi était un secteur tout indiqué pour les dépenses effectuées dans le cadre des mesures de relance.

Le président : Madame Pohlmann, vous devez savoir que ce comité préconise dans un de ses comptes rendus que le gouvernement maintienne une réserve de 15 milliards de dollars dans la caisse. Nous avons longuement étudié l'assurance-emploi il y a un ou deux ans, et notre rapport indique également qu'il faut réserver ce montant dans la caisse.

Pour préciser, vous avez dit que l'équilibre serait atteint en 2014. Vos estimations tiennent-elles compte des 170 000 emplois qui seraient supprimés en raison des augmentations des taux de cotisation à l'assurance-emploi?

Mme Pohlmann : Oui. Tout cela émane de la même analyse. Nous prévoyons que l'économie pourrait avoir raison de 170 000 emplois d'ici 2014, en raison de l'augmentation des taux de l'assurance-emploi. En 2014, la caisse devrait de nouveau être à zéro. Ensuite, bien entendu, nous ne pourrons pas réduire le taux de cotisation assez rapidement et nous commencerons à engranger un nouveau surplus.

Le président : L'augmentation ou la diminution ne peuvent dépasser 15 cents par année, étant donné que ces limites sont prévues par la loi. Est-ce bien cela?

Mme Pohlmann : Oui, 15 cents pour les employés et 21 cents pour les employeurs.

Le président : Merci.

Le sénateur Mitchell : Tout d'abord, pour répondre à la question de savoir à quel moment il convient d'entrer dans la danse, j'aimerais dire que les gens le feraient en général lorsque la musique bat son plein. N'est-ce pas d'ailleurs ce que vous tentez de démontrer, que l'économie ne va pas bien et que ce n'est pas le bon moment d'instituer ou d'accroître une taxe?

Madame Pohlmann, j'aimerais vous poser une question en lien avec votre sixième diapositive, qui traite des types d'impôt qui nuisent le plus à la croissance des petites et moyennes entreprises. Ces données sont très intéressantes. Plus que les taxes de vente, l'impôt sur le revenu des particuliers, l'impôt foncier, l'impôt sur le capital et l'impôt des sociétés, ce sont les charges sociales, comme l'assurance-emploi, qui influent sur la croissance des PME. Pouvez-vous nous dire, d'une perspective économique ou de l'optique de l'entreprise, comment s'explique cette situation? Est-ce parce que l'embauche de personnel offre davantage de souplesse que les dépenses en immobilisations?

Mme Pohlmann : Toutes proportions gardées, les petites entreprises emploient autant de gens que les grandes sociétés, alors elles tendent à investir la plus grande partie de leur argent du côté des ressources humaines. Lorsque vous commencez à taxer l'embauche de personnel, il devient plus difficile pour les petites entreprises d'absorber ces coûts, et elles ont à prendre des décisions d'importance critique. Nous avons entrepris d'avertir nos membres de cette mesure imminente, pour leur dire de se préparer. Des membres nous disent au passage chaque semaine qu'ils n'auront d'autre choix que de mettre à pied des gens si ces mesures voient le jour; ils n'ont pas les moyens de payer.

Pour ce qui est de l'assurance-emploi et, par ailleurs, du RPC, l'autre préoccupation vient du fait que le taux de cotisation des employés augmente aussi, ce qui entraîne une diminution de leurs revenus d'emploi. De nombreux employeurs souhaitent compenser cette différence parce qu'ils ne veulent pas que leurs employés subissent une baisse de revenus. Le problème est double pour de nombreux employeurs, et c'est pourquoi les charges sociales influent plus que tous les autres types d'impôt sur la croissance de leurs entreprises.

Lorsque nous leur demandons où ils souhaiteraient voir une diminution, les employeurs ne pointent pas toujours du doigt l'assurance-emploi, mais ils admettent que ces coûts sont ceux qui influent le plus sur la croissance de leurs entreprises, car ils ont à prendre des décisions au titre de l'emploi qui peuvent se révéler déterminantes quant à la possibilité ou non d'expansion de leurs entreprises.

Le sénateur Mitchell : En même temps, nous nous trouvons actuellement à une croisée importante des chemins, et le sénateur Finley vient tout juste de souligner qu'il ressort des nombreuses discussions et analyses que la reprise est en ce moment très précaire. Si l'on s'en tient strictement à l'entreprise et aux répercussions sur l'entreprise, à savoir que cette dernière n'est pas en mesure d'embaucher davantage d'employés, avez-vous analysé la situation pour tenter de déterminer son incidence globale sur la trajectoire de reprise, ou n'est-il pas possible de le faire?

Mme Pohlmann : Le fait que notre analyse nous démontre que ces mesures pourraient entraîner la perte de 170 000 emplois au Canada à court terme indique que cette mesure aura d'importantes répercussions sur l'économie. Nous continuons d'examiner le modèle que nous avons créé pour pouvoir procéder à l'analyse, et nous l'avons ajusté de nouveau en juin étant donné que les données d'emploi étaient meilleures que la situation ne laissait présager. À l'origine, nos estimations se situaient à 200 000, mais nous les avons baissées à 170 000. Toutefois, ce nombre demeure très élevé et nous sommes toujours d'avis que cette situation peut tout à fait se répercuter sur notre croissance dans l'avenir.

Le sénateur Mitchell : Pouvez-vous traduire ces données en pourcentage du PIB?

Mme Pohlmann : Je ne peux pas. Je suis désolée.

Le sénateur Mitchell : Nous pourrions peut-être demander à Kevin Page de se pencher sur cette question.

Mme Pohlmann : Nous pouvons demander à notre économiste en chef de le faire.

Le sénateur Mitchell : Vous avez dit qu'une de vos recommandations serait de créer un crédit pour la formation au titre de l'assurance-emploi, afin de favoriser l'embauche.

Mme Pohlmann : M. Laurin en a parlé également. Nous militons en faveur d'une telle mesure depuis longtemps. Essentiellement, il s'agit de donner un congé d'assurance-emploi aux employeurs qui embauchent de nouveaux employés au cours d'une année donnée; cette mesure se fonde sur un programme pour l'embauche de nouveaux travailleurs lancé à la fin des années 1990 lorsque le taux de chômage se trouvait également à un niveau assez élevé. Pendant une période d'un à deux ans environ, chaque fois qu'un employeur augmentait sa masse salariale au-delà du seuil de l'année précédente, celui-ci n'avait pas à verser de cotisations à l'assurance-emploi pour ces augmentations, ce qui lui permettait d'affecter ces sommes à la formation des nouveaux employés ou peu importe. Il s'agit d'un revenu supplémentaire pour l'employeur pendant une certaine période. Nous estimons qu'il conviendrait d'adopter des mesures plus permanentes comme celles-là puisque nous croyons que la formation en milieu de travail constitue probablement le type de formation le plus efficace pour préparer les gens à l'emploi.

Nous savons que les plus petites entreprises en particulier investissent beaucoup dans la formation. Elles sont souvent des endroits où les gens viennent se former avant d'aller travailler pour de plus grosses entreprises ou pour le gouvernement. Elles investissement beaucoup dans la formation parce qu'elles ne sont pas toujours en mesure de concurrencer du point de vue des salaires et des avantages sociaux. Nous avons beaucoup travaillé pour calculer combien elles investissent dans la formation.

Nous estimons que le régime d'assurance-emploi est un outil vital pour favoriser la formation et l'embauche dans l'avenir. Bien que le taux de chômage augmente et que la situation sera pénible pendant quelques années encore, l'ironie de la situation, c'est qu'on manque actuellement de main-d'œuvre au Canada et qu'il nous faut trouver des façons d'accroître les possibilités de formation. Par conséquent, nous estimons que le crédit pour la formation au titre de l'assurance-emploi pourrait se révéler un moyen extrêmement utile.

M. Laurin : Nous avons un régime d'assurance. S'il s'agit bel et bien d'un régime d'assurance financé et géré isolément, nous tentons de faire valoir que les taux de cotisation devraient varier ou que les entreprises devraient pouvoir se prévaloir d'un crédit d'impôt pour compenser certaines des augmentations du taux de cotisation. Essentiellement, les employeurs investissent et forment leurs employés. En règle générale, lorsque vous embauchez des gens, vous devez leur donner une formation. La logique est la suivante : les travailleurs dotés de compétences qui correspondent aux besoins du marché profitent aux entreprises, qui s'en trouvent davantage concurrentielles; de plus, ces personnes devraient être en mesure de dénicher des emplois beaucoup plus rapidement si elles perdent leur emploi pour une raison ou pour une autre.

Si le régime est bel et bien un régime d'assurance, il conviendrait de le gérer en conséquence. Par exemple, dans les provinces dotées de régimes d'indemnisation des accidents du travail, nous avons vu que les taux peuvent varier selon le degré ou le niveau perçu de risque dans certains cas. S'il y a une volonté réelle de gérer ce régime en tant que régime d'assurance, nous tentons de faire comprendre au gouvernement qu'il faut alors prévoir des mesures incitatives pour s'assurer que les entreprises et les employés adoptent les comportements voulus pour en arriver à réduire leur niveau de risque au bout du compte. C'est un argument assez simple, mais le gouvernement nous a fait la sourde oreille jusqu'ici.

À la lumière des modifications prévues à la partie 24 du projet de loi C-9, je crois que la prochaine étape serait d'entreprendre cette discussion avec le gouvernement. Je ne dis pas par là que je souhaite jeter tout le blâme sur le gouvernement, mais le temps me semble venu pour avoir cette discussion.

Mme Pohlmann : À propos de la formation, j'aurais également voulu dire, comme l'a souligné le sénateur Finley, qu'une partie des recettes de l'assurance-emploi est affectée à de nombreuses autres choses que les prestations, dont la formation. Actuellement, plus de 2 milliards de dollars par année sont consacrés à la formation. Cet argent est transféré aux provinces et, actuellement, il n'y a pas beaucoup de suivi pour déterminer si ces sommes consacrées à la formation sont utilisées efficacement. Certaines choses indiquent tout le contraire pour une partie de ces sommes, et nous estimons que l'argent pourrait plutôt servir de source de financement pour ce type de crédit. Nous estimons que le minimum de 2 milliards de dollars déjà affectés à la formation pourrait être utilisé de façon plus efficace, sous forme d'un quelconque crédit pour la formation, afin de stimuler la formation en milieu de travail. Voilà pourquoi nous faisons valoir que cette mesure serait une autre façon d'encourager la formation.

Le sénateur Murray : Je n'ai probablement pas lu le projet de loi avec autant d'attention que j'aurais dû, mais vous l'avez fait et vous allez répondre à la question. Qu'est-ce qui empêcherait à l'avenir un gouvernement de se servir du fonds pour financer un nouveau programme ou une nouvelle initiative? Est-ce l'existence de l'office?

Mme Pohlmann : Un futur gouvernement pourrait changer tout ce qu'il veut, de sorte que nous ne le savons pas, mais je crois que la structure est semblable à celle du RPC; il y a un office de gestion, donc groupe de gestion distinct qui surveille le fonds. Pour ce qui est de l'utilisation du fonds et de l'établissement des cotisations, l'office doit respecter des paramètres très stricts, mais c'est tout ce qu'il fait. Le gouvernement est responsable d'établir les politiques et peut certainement influencer l'office de gestion au sujet de l'utilisation des fonds, de sorte que, si le gouvernement décide d'offrir une nouvelle prestation dans le cadre de l'AE, l'office n'a pas d'autre choix que d'inclure cette nouvelle prestation dans ses calculs pour établir les taux de cotisation. C'est ce que nous savons, mais il y a toujours un risque, et c'est pourquoi nous ne voulons pas que ce compte soit trop excédentaire.

Le sénateur Murray : J'ai toujours pensé que le gouvernement ne voudrait pas renoncer complètement à cette possibilité.

Mme Pohlmann : Je devrais mentionner que le gouvernement a toujours le pouvoir d'annuler les décisions de l'office. Si l'office fixe un taux de cotisation, le gouvernement a jusqu'à 30 jours, je crois, pour annuler la décision et décider de modifier le taux ou de faire autre chose.

Le président : Madame Pohlmann, pensez-vous qu'il existe un compte dans lequel sont versés tous les montants provenant des cotisations d'AE qui est distinct des autres fonds dont dispose le gouvernement?

Mme Pohlmann : C'est ce que dit cette nouvelle loi, d'après moi. C'est un compte distinct de celui des recettes générales.

Le président : Nous allons devoir préciser ce point, mais je me demande si vous pourriez l'étudier et nous le faire savoir, parce que nous pensons que c'est un compte fictif, tout comme l'était l'autre. Le gouvernement ferme un compte fictif pour en créer un autre. Si vous pouviez examiner cet aspect et nous dire ce que vous en pensez, cela permettrait de préciser ce point. Tous vos arguments sont fondés sur le fait qu'il existe un compte distinct quelque part.

Mme Pohlmann : Oui, et c'est ce que j'ai compris.

M. Laurin : Moi aussi.

Le président : Il nous serait très utile que vous examiniez cet aspect et que vous nous disiez ce que vous en pensez.

Mme Pohlmann : Certainement.

Le président : Je vous remercie.

Le sénateur Callbeck : Vous dites que l'office peut fixer les cotisations, mais que le conseil des ministres peut intervenir dans les 30 jours et que le Parlement n'a rien à dire à ce sujet?

Mme Pohlmann : D'après ce que j'ai compris, le gouvernement peut prendre un décret qui peut annuler la décision de l'office.

Le sénateur Callbeck : Ce pouvoir a été confié à l'office, mais, comme je l'ai dit, le conseil des ministres peut intervenir.

Je voulais vous poser une question au sujet des incitatifs pour les petites entreprises. Cette question a déjà été soulevée. Monsieur Laurin, vous avez parlé d'un crédit d'impôt pour les employeurs relié à la formation de la main-d'œuvre. N'existe-t-il pas, dans la Loi de l'impôt sur le revenu en vigueur, des incitatifs pour les employés qui souhaitent suivre des cours et se perfectionner?

M. Laurin : Je pense qu'il existe des incitatifs dans certaines provinces. Comme l'a mentionné Mme Pohlmann, la plupart de ces programmes et de ces cours de formation en milieu de travail sont administrés par les provinces. Je ne crois pas que nous ayons une stratégie nationale dans ce domaine. Certaines provinces offrent des incitatifs. Par exemple, le Québec a récemment adopté une mesure semblable à celle que nous préconisons qui est plafonnée à un certain niveau. Je ne connais pas les détails de ce programme. Certaines provinces ont mis sur pied des programmes destinés à encourager les employeurs et les employés à investir dans le domaine de la formation.

Cependant, lorsqu'on examine ce système, on constate qu'il repose sur des cotisations importantes de la part des employeurs et des employés. Notre argument est que l'assurance-emploi devrait être administrée comme un système d'assurance. Nous achetons tous de l'assurance. Habituellement, lorsque le risque à assurer est faible, les primes sont moins élevées. Nous proposons un système de ce genre qui récompense ou encourage les employeurs et les employés qui investissent dans la formation et dans le perfectionnement.

Le sénateur Callbeck : Pour les petites entreprises, y a-t-il moins d'incitatifs fiscaux qu'auparavant pour embaucher de nouveaux employés ou pour former le personnel?

Mme Pohlmann : Je ne suis pas sûre qu'il y ait, à l'heure actuelle, des incitatifs en matière d'embauche, en particulier au palier fédéral. Les incitatifs fiscaux destinés aux petites entreprises concernent l'impôt sur le revenu des sociétés et ce genre de choses. À ma connaissance, je ne pense pas qu'il existe des incitatifs en matière de formation destinés aux petites entreprises au niveau fédéral. Il y a peut-être des incitatifs au niveau provincial; cependant, s'il y en a, ce sont des pénalités. La taxe sur la formation au Québec est en fait une pénalité.

Le sénateur Callbeck : Si ma mémoire est bonne, il y avait un crédit dans ce domaine il y a quelques années. Il y avait une sorte d'incitatif fiscal pour embaucher un nouvel employé ou offrir de la formation.

Le président : Nous allons vous remettre un exemplaire du témoignage d'un fonctionnaire qui nous a expliqué ces différents comptes et qui a déclaré que la date d'ouverture était le 1er janvier 2009.

Le sénateur Ringuette : C'est toujours un plaisir de vous voir tous les deux ici.

Il y a trois ans, lorsque le premier nouveau compte fictif de l'AE a été introduit dans un projet de loi budgétaire, je me souviens que ce comité avait recommandé dans son rapport au Sénat — et ce rapport est transmis au gouvernement — de constituer une réserve dont le montant se situerait entre 10 et 15 milliards de dollars. Bien entendu, c'était à l'époque où les budgets du gouvernement étaient excédentaires.

Nous nous situons maintenant dans une période de trois ans et nous examinons encore une fois un projet de loi budgétaire qui met sur pied un deuxième compte d'AE fictif. La situation de l'AE est très intéressante. Mme Pohlmann parle des petites et moyennes entreprises, qui représentent la majorité de vos membres. M. Laurin parle des fabricants, qui sont des entreprises plus importantes.

Vous avez donc deux groupes de membres différents. Pour fonctionner, les petites et moyennes entreprises ont davantage recours aux ressources humaines. M. Laurin, vos membres sont des entreprises à forte intensité de capital parce qu'elles doivent assurer la production de services ou de biens. Pourtant, vous faites tous les deux la même recommandation au sujet de l'AE.

Il devrait exister un moyen de prendre en compte vos préoccupations. Je ne sais pas ce que nous pouvons faire d'autre. Nous avons présenté des recommandations, et encore une fois, avec ce projet de loi omnibus de 900 pages, nous examinons toujours des questions qui sont à l'étude depuis un bon bout de temps. Y a-t-il quelque chose que nous aurions pu faire pour faire comprendre ce point de vue?

Mme Pohlmann : Nous continuons tout simplement à nous égosiller. Nous essayons de faire autant de bruit que nous le pouvons au sujet de cette question auprès de ce gouvernement. Encore une fois, cela ne concerne pas uniquement les conservateurs ou les libéraux; ça concerne tous ceux qui ont été au pouvoir depuis 15 ans. Je ne pense pas que ce soit une question de parti.

Nous avons lancé une campagne d'envergure ce printemps. Au cours de l'été, nous allons parler de ces aspects à nos membres pour les y sensibiliser. Le problème c'est qu'ils n'ont pas vu ça venir. La plupart des propriétaires de petites entreprises se concentrent sur l'exploitation au jour le jour de leur entreprise, mais le 1er janvier va arriver et ils vont devoir appliquer toutes ces nouvelles augmentations sur les fiches de paie. Comme je l'ai dit, il n'y a pas que l'AE qui nous inquiète; il y a aussi les augmentations des cotisations de la CAT et une possibilité d'augmentation pour le RPC. Toutes ces choses s'ajoutent et vont avoir des répercussions.

Le sénateur Ringuette : Je crois que vous devriez également être inquiets de l'augmentation possible des taux des cartes de crédit, ce qui constitue une dépense accessoire.

Le président : C'est là, bien sûr, une autre question.

Le sénateur Ringuette : C'est une autre question, parce que celle des cartes de crédit n'a pas encore été résolue.

Permettez-moi d'aborder la question que vous avez soulevée au sujet des tarifs douaniers. Je ne sais pas si vous étiez dans la salle lorsque j'ai interrogé notre témoin précédent. Il y a un aspect de la situation actuelle des tarifs qui m'inquiète; les tarifs douaniers vont être réduits sur plus de 1 500 articles, dans la plupart des cas pour être ramenés à zéro et ce, pendant les 10 à 20 ans de négociations commerciales que nous allons avoir avec différents États et l'Union européenne. Je pense que le gouvernement du Canada va non seulement perdre des recettes de 300 millions de dollars par an, mais qu'il va également perdre d'importants outils de négociation pour les discussions commerciales qu'il aura avec d'autres pays en vue d'améliorer votre avenir. Votre organisation a-t-elle examiné cet aspect de la question des tarifs?

M. Laurin : C'est une très bonne question. Malheureusement, je n'étais pas là, je n'ai pas entendu ce qu'a dit le témoin précédent. Vous avez soulevé un point intéressant : sommes-nous en train de renoncer à un bon outil de négociation? Les entreprises canadiennes sont pour la plupart axées sur l'exportation. La plus grande partie de la production industrielle canadienne est vendue à l'étranger; c'est donc une question très importante pour nous.

Nous pensons que les avantages qu'apporte la suppression de ces tarifs l'emportent sur certains autres aspects qui sont difficiles à quantifier. Sommes-nous en train de renoncer à un moyen ou un pouvoir de négociation important que nous pourrions utiliser à l'avenir, que ce soit au niveau de l'OMC ou dans le cadre de négociations bilatérales? La plupart des produits pour lesquels les tarifs ont été éliminés, qu'il s'agisse d'intrants importés par les fabricants pour leur système de production, ou de machines et d'équipement, ce ne sont pas habituellement des articles sensibles dont nous discutons au cours des négociations commerciales.

Ce n'est probablement pas pour nos membres une préoccupation qui est aussi importante que vous le pensez, mais c'est tout de même une préoccupation. Par exemple, nous sommes en train de négocier avec l'Union européenne. Nous sommes très intéressés à pénétrer ce marché, mais je ne pense pas que la suppression des tarifs compromette gravement notre position ou notre capacité d'offrir un accès accru à ce marché aux exportateurs canadiens.

Comme je l'ai dit plus tôt, la suppression de ces tarifs par le gouvernement est une mesure positive. À l'heure actuelle, le Canada a un accord de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique. Nous espérons bientôt conclure un accord de libre-échange avec l'Union européenne. Cet accord pourrait vraiment renforcer la position du Canada en tant que pays de choix pour fabriquer des marchandises destinées à l'exportation dans le monde entier. Il serait possible d'importer des intrants venant du monde entier sans avoir à payer de tarif, et on aurait ainsi accès aux deux principaux marchés d'exportation les plus riches au monde sans avoir à payer de droits de douane ou de tarifs. Voilà qui offre beaucoup de possibilités. Je ne dis pas que, si le gouvernement conclut cet accord, le secteur manufacturier sera complètement satisfait, parce qu'il faut faire davantage pour attirer ces investissements au Canada, mais c'est une mesure positive qui va renforcer la position du Canada en tant qu'une des principales économies de transformation mondiales.

La suppression des tarifs n'était pas notre première priorité pour ce qui est du budget du gouvernement, mais lorsque celui-ci a fait cette annonce et que nous avons examiné les postes tarifaires auxquels s'intéressait le gouvernement, celui-ci a fait preuve de souplesse. Lorsque des producteurs canadiens se sont inquiétés de la suppression de certains tarifs parce que cela introduisait davantage de concurrence sur le marché au Canada, le gouvernement a accepté d'étaler cette suppression sur cinq ans. Dans certains cas, nous aimerions que certains de ces tarifs restent en place un peu plus longtemps, mais dans l'ensemble, c'est une bonne chose pour le secteur manufacturier du Canada.

Le sénateur Ringuette : Pensez-vous qu'une période de cinq ans sera suffisante pour ces fabricants canadiens? Cela va-t-il leur donner suffisamment de temps pour se préparer une concurrence plus importante du pays?

M. Laurin : Nous sommes déjà habitués à subir la concurrence, ces tarifs se situaient généralement entre 2 et 12 p. 100; dans la plupart des cas, ils étaient de 5, 6 ou 7 p. 100. Dans certains cas, oui, cela va changer certaines choses pour une société canadienne qui était partiellement protégée par ces tarifs sur le marché canadien. Mais pour la plupart des fabricants, cela leur permet d'acquérir des intrants à un coût moindre. La plupart de ces intrants ne sont pas fabriqués au Canada.

Dans l'ensemble, c'est une bonne mesure. Pour les fabricants dont les concurrents sont maintenant en mesure d'importer au Canada des marchandises à un prix moins élevé parce qu'ils n'ont plus à payer les tarifs, cela est un problème. Dans certains cas, effectivement, nous aimerions que le gouvernement fasse preuve de plus de souplesse. Nos membres exportent toutefois la plus grande partie de leur production à l'étranger. Le marché canadien est un marché important pour les fabricants canadiens, mais dans la plupart des cas, ce n'est qu'un marché parmi d'autres. Je dis que oui, c'est un problème pour certaines sociétés, mais d'une façon générale, si on pense à l'ensemble du secteur, cette mesure est plus positive que négative.

Le sénateur Ringuette : Selon vous, quel secteur bénéficiera le plus de cette réduction des tarifs?

M. Laurin : Je n'examine pas cette question par secteur. Je l'examine plutôt du point de vue des entreprises qui peuvent se tourner vers l'étranger pour acquérir leurs intrants, qui peuvent positionner leur entreprise dans la chaîne mondiale d'approvisionnement qui comprend non seulement des sources internes, mais également des sources provenant d'autres pays. La situation du secteur de la fabrication a beaucoup changé. Depuis que le dollar canadien a commencé à prendre de la valeur il y a quelques années, les fabricants ont dû modifier leur façon de faire des affaires. Ils recherchent de plus en plus des produits à haute valeur ajoutée. Les sociétés essaient de se différencier de leurs concurrents. La concurrence n'est plus fondée sur le prix, mais sur la qualité, l'innovation, le délai de production et l'agilité. Nos fabricants ont réussi à faire face à ces changements et à y réagir. Les sociétés qui ont réussi à trouver des fournisseurs et des partenaires commerciaux à l'extérieur du Canada profiteront le plus de cette mesure à court terme, mais à long terme, presque tous les fabricants vont en profiter.

Quand on regarde les postes tarifaires en détail, on constate qu'une bonne partie d'entre eux concerne des produits chimiques ou des produits de l'acier. Si vous me demandez quels sont les secteurs les plus touchés par cette question, je dirais que ce sont probablement les transformateurs de métaux et l'industrie chimique, parce que la plupart de ces tarifs concernent ces secteurs; mais même dans ces secteurs, si vous parlez à des responsables d'associations sectorielles, ils vous diront qu'ils sont préoccupés par les effets négatifs que subiront certains de leurs membres. Si on examine cette question en tenant compte de ce que nous faisons pour développer le secteur manufacturier au Canada et pour aider les fabricants à être davantage concurrentiels non seulement au Canada, mais également sur la scène internationale, on constate que cette mesure va permettre de régler en partie ce problème et améliorera notre compétitivité mondiale. C'est pour cette raison que nous étions tout à fait en faveur de ce que proposait le budget.

Le sénateur Ringuette : Cette mesure n'est pas aussi favorable pour l'industrie que votre première priorité, qui était l'amortissement accéléré.

M. Laurin : L'amortissement accéléré stimule beaucoup plus l'investissement dans le secteur de la fabrication, et de loin. Oui, la réduction des tarifs douaniers va diminuer dans certains cas le prix d'importation de certains intrants, machines ou équipement, mais lorsque les sociétés examinent des projets d'investissement, elles parlent habituellement de dizaine sinon de centaines de millions de dollars, voire parfois de milliards de dollars. Les sociétés recherchent la rentabilité. Lorsque vous calculez les flux de trésorerie, les premières années sont critiques. Si vous avez le droit d'amortir fiscalement votre équipement au cours des deux premières années, et certains de nos membres nous ont montré des chiffres, cela a un impact considérable. La suppression des tarifs sur certaines machines et certains équipements a un effet négligeable, parce que les machines et l'équipement constituent un coût important, mais la suppression d'un tarif de 4, 5 ou 6 p. 100 ne vise pas toutes les machines ni tous les équipements. Les tarifs ont été supprimés sur un très grand nombre d'articles d'équipement et de machinerie dans le budget précédent. Si l'on veut stimuler l'investissement dans le secteur de la fabrication, un amortissement sur deux ans est une mesure beaucoup plus ciblée et qui aura beaucoup plus d'effet pour les fabricants.

Le sénateur Marshall : Merci d'avoir comparu ce matin. Votre exposé a été très instructif.

Le projet de loi contient un article très long qui concerne le rôle de la vérificatrice générale. Je sais que Mme Pohlmann a mentionné tout à l'heure que vous êtes en faveur de la création d'un compte distinct. Le projet de loi contient une disposition très détaillée qui accorde un rôle important à la vérificatrice générale, tant pour ce qui est de vérifier le nouveau compte que les anciens, et qui lui accorde un mandat très large. Votre association a-t-elle une opinion à ce sujet? Pourriez-vous me fournir des commentaires et me dire si vous avez pris position à ce sujet, à savoir si c'est une bonne chose pour vous ou si cela devrait être renforcé autrement?

Mme Pohlmann : Je pense que chaque fois qu'un vérificateur indépendant vient vérifier la comptabilité du gouvernement, c'est une bonne chose. Nous sommes favorables à ce que la vérificatrice générale puisse continuer à surveiller le gouvernement et à veiller à ce que le fonds soit utilisé correctement. Étant donné que c'est maintenant un office indépendant qui doit gérer le fonds, cela paraît encore plus nécessaire et il paraît logique que la vérificatrice générale s'occupe également du gouvernement. Nous sommes tout à fait en faveur de cette idée et nous demandons souvent de confier à des vérificateurs indépendants la surveillance des fonds que contrôle le gouvernement.

Le sénateur Marshall : J'ai trouvé que le projet de loi était intéressant dans la mesure où les articles transitoires contenaient une disposition qui demande à la vérificatrice générale d'examiner l'ancien fonds. En fait, elle peut examiner l'année qu'elle souhaite et faire rapport à ce sujet, tout comme elle pourra présenter des rapports annuels à l'avenir. J'ai pensé que c'était là un régime de reddition de comptes assez solide pour le nouveau fonds qui est ainsi créé.

Mme Pohlmann : J'en conviens. Il est dommage qu'elle ne puisse obliger le gouvernement à remettre ce montant de 57 milliards de dollars dans le nouveau fonds.

Le sénateur Marshall : Vous disiez il y a un instant que vous étiez en faveur du nouveau fonds, mais que le problème venait du moment choisi pour le faire. Je pense qu'en fait, le problème est que des sommes ont été retirées de ce fonds.

Mme Pohlmann : Ce fonds est créé au moment où, pour la première fois depuis 15 ans, il n'y plus d'excédent.

Le président : Déduire la dette de 12 milliards de dollars que l'industrie va devoir payer sur ces 57 milliards de dollars serait également une mesure intéressante.

Mme Pohlmann : Ce serait un début.

Le président : J'ai examiné les dispositions concernant la vérificatrice générale, et certains des articles proposés attribuent à la vérificatrice générale le même pouvoir qu'elle avait auparavant en changeant tout simplement le nom du compte. La modification vise uniquement à insérer le nom du nouveau compte.

Le sénateur Marshall : J'ai trouvé intéressant que, bien qu'on utilise souvent dans ce contexte une formulation facultative, certains des articles proposés sont formulés de façon impérative, de sorte que la vérificatrice générale est désormais tenue de procéder à des vérifications, ce qui donne un régime très strict.

Le président : Merci d'avoir attiré notre attention sur ce point. Nous ne l'avions pas encore remarqué.

Honorables sénateurs, je remercie en votre nom M. Laurin et Mme Pohlmann, ainsi que M. Dawkins, d'être venus. Il n'y a qu'une question en suspens, et si vous pouviez nous envoyer une note décrivant la compréhension que vous avez de ce compte qui sera administré par un office alors qu'il n'y a pas d'argent dans le compte, parce que ce compte va être inclus dans les recettes générales, cela nous serait très utile. Il y a beaucoup de gens qui ont la même idée que vous et nous devons éclaircir tout cela. Merci d'être venus malgré un si court préavis.

Nous allons nous revoir lundi à 14 heures. La séance est levée.

(La séance est levée.)


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