Aller au contenu

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 19 - Témoignages du 19 octobre 2010


OTTAWA, le mardi 19 octobre 2010

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 9 h 32 afin d'examiner le Budget principal des dépenses déposé devant le Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 2011 (sujet : Rapport annuel 2009-2010).

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, la séance du Comité sénatorial permanent des finances nationales est ouverte. Je remercie tous les honorables sénateurs d'être venus ce matin pour continuer à examiner le Budget principal des dépenses, sujet qui nous occupe aujourd'hui.

[Français]

Le rapport annuel de 2009-2010 de la Commission de la fonction publique du Canada, ainsi que neuf rapports de vérification et une étude sur l'utilisation des services d'aide temporaire ont été déposés le 5 octobre au Parlement.

[Traduction]

Nous sommes très heureux d'accueillir à nouveau une personne que notre comité connaît bien, soit Maria Barrados, présidente de la Commission de la fonction publique du Canada.

Je tiens à signaler aux honorables sénateurs que nous avons tous reçu les neuf rapports de la vérificatrice générale. Les agents de recherche de la Bibliothèque du Parlement nous ont fait parvenir un résumé pour nous aider, mais le rapport annuel fait partie de ces neuf rapports de vérification.

Je tiens aussi à faire savoir aux honorables sénateurs que nous avons aujourd'hui parmi nous une délégation de la République populaire de Chine, dirigée par Zheng Silin, qui va assister à nos délibérations.

M Silin a été maire, gouverneur adjoint et gouverneur dans trois provinces différentes. Il est membre du comité des affaires étrangères du Congrès national du Peuple de Chine, soit l'équivalent de notre Parlement national. Nous nous réjouissons de la présence de cette délégation au Canada, venue nous aider à commémorer le 40e anniversaire des relations entre le Canada et la Chine. Je lui ai proposé de venir voir un peu comment nous opérions et nous aurons la possibilité de faire de même lorsque nous irons en Chine.

Mme Barrados est accompagnée par Donald Lemaire, vice-président principal, Direction générale des politiques, et Terry Hunt, directeur général, Direction générale de la vérification et des services de données. Nous avons la chance de pouvoir consacrer l'intégralité de notre séance à la présidente et à son équipe. Sans autres formalités, je vais maintenant demander à Mme Barrados de nous présenter son exposé, après quoi nous passerons à la période des questions.

[Français]

Maria Barrados, présidente, Commission de la fonction publique du Canada : Merci, monsieur le président et honorables sénateurs. M'accompagnent Donald Lemaire, vice-président principal, Direction générale des politiques, et Terry Hunt, directeur général, Direction générale de la vérification et des services de données, pour discuter du rapport annuel 2009-2010 de la Commission de la fonction publique du Canada, de même que de neuf rapports de vérification et d'une étude sur l'utilisation des services d'aide temporaire au sein de la fonction publique. Ces documents ont tous été déposé au Parlement le 5 octobre 2010.

La Commission de la fonction publique est un organisme indépendant qui relève du Parlement et qui a pour mission de protéger l'intégrité de la dotation et l'impartialité politique de la fonction publique. La CFP n'est pas dirigée par un ministre et elle détient le pouvoir exécutif de dotation. Nous faisons rapport au Parlement chaque année sur nos activités et résultats.

Le rapport annuel 2009-2010 de la Commission de la fonction publique porte sur la quatrième année d'application de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP). En date du mois de mars 2010, la CFP avait délégué son pouvoir de nomination à 84 organisations représentant plus de 216 045 personnes.

En 2009-2010, la fonction publique a continué de croître, mais à un rythme plus lent, soit à un taux de 3,4 p. 100 comparativement à 4,5 p. 100, en 2008-2009. Les activités de dotation et d'embauche ont, elles aussi, connu un ralentissement.

Selon ce qu'indiquent les activités de surveillance de la CFP en 2009-2010, des progrès importants ont été réalisés dans la mise en œuvre de la LEFP au cours des quatre dernières années. Les éléments essentiels de la LEFP sont en place, et la réalisation des objectifs visés progresse bien.

Les valeurs fondamentales que sont le mérite et l'impartialité, ainsi que les valeurs directrices que sont la justice, l'accessibilité, la transparence et la représentativité, sont généralement respectées dans l'ensemble de la fonction publique.

Toutefois, davantage d'efforts doivent être faits pour s'assurer que les gestionnaires comprennent pleinement comment appliquer les valeurs fondamentales et les valeurs directrices à leurs décisions.

En effet, la CFP a constaté que le comportement des gestionnaires laisse croire que les valeurs à appliquer et les liens qui existent entre celles-ci ne sont pas encore suffisamment compris, et que les décisions en matière de dotation ne sont pas encore suffisamment fondées sur les valeurs.

La CFP a également remarqué qu'il subsiste des incohérences au sein des organisations quant à la mise en œuvre de l'approche fondée sur les valeurs, par exemple en ce qui concerne l'utilisation de processus annoncés par opposition aux processus non annoncés, ou l'insuffisance de la documentation relativement aux décisions. Un effort concerté de la part de tous les employés de la fonction publique est requis pour veiller à l'application d'une pratique de dotation fondée sur les valeurs.

[Traduction]

Voilà qui m'amène à la question des services d'aide temporaire et à l'embauche à court terme dans la fonction publique. Ce sont là des outils pratiques pour remédier aux besoins à court terme comme les augmentations de charges temporelles. Dans le cadre de la LEFP, la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, les organisations ont consacré quelque 300 millions de dollars aux services temporaires en 2008-2009, ce qui représente un triplement de ces crédits lors de la dernière décennie, en majorité dans la région de la capitale nationale.

À la demande, en avril 2009, du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, la Commission de la fonction publique (CFP) a entrepris d'étudier le recours aux services d'aide temporaire dans la fonction publique. Notre étude a relevé des cas de mauvaise utilisation des services d'aide temporaire pour remédier à des besoins de personnel à long terme. Les directeurs ne reçoivent pas un encadrement suffisant lorsqu'il leur faut recourir à la LEFP pour engager des services d'aide temporaire. On a constaté en conséquence un détournement des objectifs de la LEFP.

Nous avons aussi relevé qu'environ une personne sur cinq engagée à titre temporaire était employée ensuite dans la fonction publique à la fin de son contrat, le plus souvent dans un poste permanent. La CFP va entreprendre des consultations avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et Travaux publics et Services gouvernementaux Canada pour remédier aux questions relevées dans cette étude et guider les sous-ministres concernant le bon usage de ce mécanisme en relation avec la LEFP.

La question des délais concernant la dotation en personnel soulève aussi des difficultés. Certes, il y a une nette réduction des délais de dotation pour l'ensemble des postes faisant l'objet d'une publicité, qui sont passés de 27,4 semaines en 2007-2008 à 24,7 semaines en 2008-2009, mais les délais moyens de dotation pour les postes permanents ou à durée indéterminée qui sont annoncés sont restés relativement stables, soit à environ 23 semaines. Il est possible de réduire de manière significative les délais de dotation en personnel dans le cadre actuel de la loi et des politiques de la LEFP sans remettre en cause les valeurs s'appliquant à la dotation. Notre recherche a montré que l'on pouvait obtenir d'autres améliorations par l'intermédiaire d'une bonne planification des RH et d'une solide gestion des projets. Nous incitons les différentes organisations à faire preuve de plus de dynamisme pour aborder la question des délais de dotation en personnel, notamment en établissant des critères de référence.

J'en viens maintenant à nos rapports de vérification. La CFP a relevé trois questions qui reviennent constamment dans ces vérifications : tout d'abord, les décisions concernant les nominations ne sont pas pleinement appuyées par des documents justificatifs; en second lieu, les raisons du recours à des mécanismes de nomination non publicisés sont mal expliquées; et enfin, il faut continuer à améliorer le contrôle de la qualité pour ce qui est des processus de nomination.

À la suite de notre vérification, nous avons imposé des conditions supplémentaires aux délégations de pouvoirs de dotation à la Commission nationale des libérations conditionnelles. La Commission nationale des libérations conditionnelles nous a communiqué un plan d'action précisant de quelle manière l'organisation entend répondre aux recommandations de la vérification. Le président de la Commission sera par ailleurs tenu de nous remettre des rapports semestriels faisant état des progrès réalisés dans le cadre de ce plan d'action.

Après avoir effectué un suivi, la CFP a supprimé les conditions qu'elle avait imposées à l'Agence spatiale canadienne lors de sa vérification de 2006. Aucune autre condition n'a été imposée aux différentes organisations vérifiées par la CFP cette année. Monsieur le président, votre comité s'intéresse plus particulièrement à la politique concernant la zone nationale de sélection. La CFP s'engage à offrir des possibilités d'emploi fédérales à l'ensemble de la population canadienne, quel que soit son lieu de résidence. Ainsi, la région de la capitale nationale a enregistré un plus grand nombre de demandes provenant de l'extérieur ainsi qu'un plus grand nombre de nominations de personnes venues de l'extérieur, tant au niveau des agents que des autres employés au sein de la RCN. Cela signifie que la politique concernant la zone nationale de sélection a des effets positifs et contribue à améliorer l'accès à des emplois dans la fonction publique pour l'ensemble des Canadiens.

J'aimerais passer à la question de l'équité dans l'emploi et des progrès réalisés dans le recrutement de quatre groupes de personnes désignées. Dans trois de ces groupes — les femmes, les minorités visibles et les Autochtones — le pourcentage de nominations au sein de la fonction publique est supérieur à la disponibilité de la main-d'œuvre correspondante. Nous continuons à enregistrer une augmentation de l'embauche des minorités visibles. Ces dernières représentent 21,2 p. 100 des nominations extérieures, contre 18,8 p. 100 l'année précédente. Le seul groupe au sein duquel le pourcentage de nominations reste inférieur à la disponibilité de la main-d'œuvre est celui des personnes handicapées.

[Français]

Lorsque nous regardons vers l'avant, nous sommes conscients du fait que la fonction publique canadienne et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP) en sont à une étape critique. Des signes précoces nous indiquent que le taux de croissance de la fonction publique diminuera davantage dans les mois à venir, tout comme le nombre d'activités de dotation.

Des plans de ressources humaines ciblés, notamment en ce qui concerne la planification de la relève et la gestion des talents, seront des outils de plus en plus précieux pour les gestionnaires qui cherchent à embaucher les bonnes personnes dans les limites des budgets alloués.

Nous avons observé des progrès dans les domaines de préoccupations importants et le système à démontré de façon uniforme qu'il pouvait évoluer, se perfectionner et s'adapter aux changements. La CFP continuera d'appuyer les ministères et organismes pour les aider à devenir plus efficaces en leur offrant des services, des technologies et des outils novateurs.

[Traduction]

Nous allons procéder par ailleurs à une évaluation préliminaire de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Nous remettrons au printemps aux parlementaires un rapport évaluant l'efficacité de la loi et recommandant les changements devant être apportés dans certains domaines. Cette évaluation fera partie de l'examen législatif de la LEFP effectué en bonne et due forme par le président du Conseil du Trésor.

Ces 100 dernières années, la CFP a joué un rôle essentiel pour créer et entretenir une fonction publique professionnelle, axée sur le mérite et non partisane. Nous avons été contactés par un certain nombre de pays qui veulent profiter de notre expérience. Je suis particulièrement fière de nos relations avec la Chine. Voilà près de 20 ans que la Commission de la fonction publique du Canada a signé des protocoles d'accord avec la Chine — tout d'abord avec le Département du personnel et actuellement avec le Département de l'organisation du Comité central du Parti communiste chinois — afin de participer à des échanges et de faciliter la coopération dans les domaines de la gestion des ressources humaines et de l'administration publique.

Le 28 septembre, la CFP a eu l'honneur de signer un protocole d'accord avec le Conseil de la fonction publique de la Mongolie pour que nous puissions nous faire part de nos expériences et nous communiquer l'information. Mon mandat prend fin en mai 2011 de même que celui des deux commissaires à temps partiel de la CFP. Je tiens à remercier les membres de votre comité de leur intérêt pour la fonction publique fédérale et pour les travaux de la Commission de la fonction publique du Canada. Je vous remercie et je suis toute disposée à répondre aux questions que vous voudrez me poser.

Le président : Merci, madame Barrados, de ce compte rendu très complet de vos différents rapports. Un certain nombre d'honorables sénateurs souhaitent engager les discussions, mais j'aimerais obtenir un éclaircissement, si vous me le permettez. Les expressions « agent du Parlement » ou « officier du Parlement » sont employées de manière assez imprécise. Vous aidez les parlementaires à comprendre et à superviser ce qui se passe dans la fonction publique. La vérificatrice générale du Canada relève elle aussi de cette catégorie de personnes chargées d'aider les parlementaires. Est-ce que vous participez au départ à l'opération d'embauche et d'engagement? Il est bien sûr exigé que les parlementaires approuvent la recommandation lorsqu'elle est finalement présentée, mais nous ne participons pas à la procédure. Qui prend part à la procédure menant à la recommandation?

Mme Barrados : Pour ce qui est des nominations du gouverneur en conseil, la Commission de la fonction publique n'y participe pas. Il en va de même pour ce qui est de la vérificatrice générale. Mon organisation ne participe pas non plus au processus de recrutement de la personne chargée de me remplacer.

Toutefois, dans le cas de la vérificatrice générale, une entreprise de sélection de personnel a été engagée et elle m'a consultée. Dans le cadre de mon poste, j'ai de nombreuses années d'expérience auprès du Bureau du vérificateur général. J'ai par ailleurs été consultée par le Bureau du Conseil privé pour ce qui est de mon remplacement.

Le président : Est-ce que le BCP, le Bureau du Conseil privé a dirigé la procédure?

Mme Barrados : Dans les deux cas, le BCP est chargé de diriger la procédure.

Le sénateur Murray : Madame Barrados, je vais m'intéresser à votre qualité d'organisme indépendant. Nous savons qu'il existe d'autres modèles dans d'autres juridictions. Il se peut que dans certaines provinces, votre homologue soit en fait un sous-ministre et qu'il y ait un ministre de la fonction publique. Je ne sais pas si cela fonctionne bien ou mal dans ces autres juridictions, mais elles semblent s'en contenter. De temps en temps, on semble se demander s'il ne nous faudrait pas adopter ce modèle, mais nous ne l'avons pas fait. Il n'en reste pas moins que notre modèle actuel de commission indépendante, qui date du début du XXe siècle, a considérablement évolué, notamment ces dernières années, et je pense par exemple au recours aux délégations de pouvoirs.

Vous allez partir en mai 2011, je pense. Je ne sais pas si c'est un baroud d'honneur, mais je vois que vous avez l'intention de publier un rapport au printemps pour évaluer l'efficacité de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique et de recommander des changements dans certains domaines. Vous reviendrez peut-être témoigner devant notre comité avant la date de votre départ, le 20 mai 2011 je crois. On ne sait jamais ce qui peut se passer d'ici là.

Pourriez-vous nous dire quelques mots, avant la publication de votre rapport au printemps, concernant l'évolution de la situation et nous indiquer dans quelle mesure les différentes parties prenantes au niveau fédéral acceptent ce modèle et sont satisfaites de son évolution?

Mme Barrados : Je vous remercie de m'avoir posé cette question. J'espère pouvoir me présenter à nouveau avec mon rapport d'évaluation générale. Quoi qu'il advienne, un rapport sera élaboré et déposé devant le Parlement, de sorte que vous aurez une trace écrite de cette dernière analyse.

Nous avons consacré pas mal de temps à l'examen de différents modèles. Le sénateur Murray a bien raison de dire que nos provinces ont différents modèles. Le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont fait preuve d'une indépendance bien plus grande et ont fluctué en se rapprochant plus ou moins du pouvoir exécutif. Je pense que nous nous sommes placés dans une assez bonne situation. Nous avons procédé à une grande opération de modernisation en 2002-2003 et nous avons décidé que pour que le gouvernement fédéral puisse maintenir une fonction publique professionnelle et non partisane, il fallait deux conditions : premièrement, que la Commission ait le pouvoir; et deuxièmement, que ce pouvoir de la Commission s'exerce selon un modèle de délégation de pouvoirs.

Dans le cadre de ce modèle, ce sont les sous-ministres qui sont responsables. Ils disposent de tous les outils. Nous avons presque tout délégué. Il y a deux choses que nous n'avons pas déléguées, mais nous avons délégué presque tout, c'est donc un système axé sur la délégation de pouvoirs et sur la supervision.

Lorsque je suis arrivée, il y avait encore beaucoup de tensions et des discussions sur ce que devait faire effectivement la Commission et sur le rôle qu'elle devait jouer, et j'estime que nous en sommes maintenant parvenus à un point où nous pouvons travailler ensemble. Je ne constate aucune véritable remise en cause de notre action. On accepte notre rôle de supervision et nos commentaires, et les groupes de sous-ministres me demandent régulièrement mon avis.

Au niveau fédéral, le Canada s'est doté d'un bon modèle car nous assurons la protection indispensable dans la fonction publique, car on a toujours une certaine tendance à perdre le niveau d'excellence dont on dispose, mais parallèlement, nous avons insisté sur l'importance des hauts fonctionnaires qui, dans la fonction publique, doivent assumer pleinement leur rôle de gestionnaires.

Le sénateur Murray : Très bien. Concernant la délégation de pouvoirs, vous avez indiqué dans votre exposé que vous aviez imposé de nouvelles conditions à la Commission nationale des libérations conditionnelles, et je vois les commentaires concernant sa façon d'opérer. C'est en quelque sorte un secteur qualifié de catastrophique dans votre vérification. Vous avez retiré les conditions imposées jusqu'alors à l'Agence spatiale canadienne. Quels sont les autres ministères et les autres organismes opérant dans des conditions que vous leur avez imposées aux termes de leurs délégations de pouvoirs?

Mme Barrados : Il y en a d'autres qui continuent à opérer sous certaines conditions. Vous en trouverez la liste dans le rapport annuel. Je dois faire appel à ma mémoire et j'ai peur d'en oublier. L'une de ces organisations est celle des services civils de la GRC. Nous avons aussi imposé des conditions à Santé Canada et à Infrastructure Canada. La nature de ces conditions et notre mode de participation au sein de ces organisations dépend de leur capacité à opérer ces changements et de notre évaluation de leur action concernant l'adoption des changements nécessaires.

Pour ce qui est de Santé Canada et d'Infrastructure Canada, nous avons demandé un rapport supplémentaire. Dans le cas de la GRC, nous avons en fait affecté des personnes chargées de travailler dans ses services car elle n'avait tout simplement pas des effectifs suffisants pour régler toutes les questions qui se posaient dans les services civils. Nous ne sommes pas intervenus dans le secteur de la police en uniforme.

Le sénateur Murray : J'ai la transcription de votre témoignage lors de votre comparution en avril dernier et j'aimerais revoir avec vous une ou deux choses. Sur la question de la succession, étant donné que vous deviez partir exactement à la même date que vos deux commissaires à temps partiel, vous espériez que le gouvernement nomme deux autres commissaires à temps partiel afin que les mandats soient décalés. J'ai l'impression que ça ne s'est pas passé ainsi?

Mme Barrados : Malheureusement, ça ne s'est pas passé ainsi. On s'est engagé à me nommer un commissaire à temps partiel supplémentaire dès que possible, ce qui est une bonne chose. J'espère que ça se fera avant le 20 mai. Comme vous le savez, la nouvelle loi est entrée en vigueur; j'ai exercé mon mandat à titre intérimaire pendant six mois avant d'être nommé à ce poste, de même que les deux commissaires à temps partiel à ce moment-là et je me suis efforcée d'obtenir d'autres commissaires à temps partiel, mais en vain. Ce n'était pas une priorité et on ne s'intéressait pas beaucoup à la chose. On se rend compte aujourd'hui que tous les mandats prennent fin en même temps et qu'il faut qu'il y ait une continuité au sein de l'organisation.

Le sénateur Murray : Vous nous déclarez que vous allez évaluer dans votre rapport publié au printemps les progrès réalisés, les succès obtenus par la nouvelle loi, et que cela s'intégrera à l'étude législative effectuée par le président du Conseil du Trésor. Savez-vous où nous en sommes sur ce point au moment où nous nous parlons?

Mme Barrados : Nous collaborons étroitement avec les responsables. Nous nous sommes penchés sur les problèmes actuels en étudiant les différents domaines de la loi qui ne fonctionnent pas aussi bien qu'ils le devraient. La plupart des problèmes sont de nature technique, mais c'est important pour la bonne marche de la fonction publique. Nous avons fourni des données sur notre travail. Nous avons des discussions avec les responsables. Je me suis engagée à tout examiner de près et, dans la situation actuelle, tout me paraît être en bonne voie.

Il y aura ensuite une recommandation qui sera faite au Cabinet et, à ce stade, il est évident que je n'interviendrai plus. La démarche consistera à faire en sorte que le président du Conseil du Trésor publie son rapport au premier trimestre et nous emboîterons le pas. Je ne m'attends pas à ce que les recommandations nous posent de gros problèmes.

Le sénateur Murray : Est-ce que ce sera public?

Mme Barrados : Oui, le rapport sera déposé devant le Parlement parce qu'il s'agit d'un examen obligatoire, prévu par la loi. J'imagine qu'il n'y aura pas tout ce que je veux y voir.

Le sénateur Murray : En avril, nous avons évoqué la question de la limite fixée à cinq ans pour ce qui est des activités qualifiées généralement d'influences politiques s'attachant aux fonctionnaires ainsi qu'au personnel exempté lorsqu'ils ne sont plus rémunérés par l'administration. Vous estimiez que cinq ans, c'est trop long, et qu'un délai d'un an ou deux ans serait éventuellement préférable. Est-ce là un des sujets que vous allez évoquer à nouveau dans votre rapport du printemps?

Mme Barrados : C'est peu probable. Je n'ai pas changé de point de vue à ce sujet, mais notre rapport traitera précisément de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. C'était là une mesure législative présentée dans le cadre de la Loi fédérale sur la responsabilité, ce qui ne relève pas vraiment de mes attributions.

[Français]

Le sénateur Poulin : Merci, monsieur le président. Merci, madame Barrados de comparaître devant nous aujourd'hui. Votre expérience nous est très précieuse, plus particulièrement concernant le quatrième rapport annuel de la commission.

Si je ne me trompe pas, vous étiez présidente intérimaire lors de la transition de l'ancienne loi habilitante à la loi habilitante actuelle de la commission. Vous avez vécu ce que j'appelle la transition du mandat de la commission basé sur la loi habilitante.

Mme Barrados : Vous avez raison. J'ai été nommée sous la nouvelle loi, mais elle n'était pas encore en vigueur à ce moment-là. Durant les 14 premiers mois de mon mandat, j'ai travaillé sous l'ancienne loi. La première responsabilité que j'ai eue au niveau de la commission a été d'opérer la transition; avec mon équipe, je devais établir les politiques et les outils requis pour la mise en œuvre de la nouvelle loi.

Le sénateur Poulin : Pouvez-vous nous donner, selon votre expérience, les différences clés entre ce que j'appelle l'ancien système et le nouveau système?

Mme Barrados : Premièrement, le but du changement de la loi par le Parlement était d'émettre une définition du mérite spécifique. L'ancien système contenait une définition du mérite, mais elle était de plus en plus compliquée à utiliser. Ce système était très lourd et le but du changement était de doter la loi d'une définition plus simple du mérite.

Deuxièmement, le nouveau système devait modifier l'approche pour les recours afin de donner aux gestionnaires des moyens plus efficaces pour la résolution de problèmes en milieu de travail.

Troisièmement, le changement le plus important était de mettre en œuvre une nouvelle approche pour la protection de la fonction publique contre les partisaneries.

En plus, dans la nouvelle loi on a la confirmation du rôle de la Commission de la fonction publique comme organisation indépendante, et on a aussi un processus de confirmation de la nomination du président par le Parlement.

Le sénateur Poulin : Merci. Vous avez ajouté, comme quatrième point essentiel, le rôle de la Commission de la fonction publique. Quand vous étiez en discussion avec mon collègue, le sénateur Murray, vous avez parlé beaucoup de la délégation et de la protection. Comment jouez-vous ce rôle de délégation et de protection, dans la pratique, comme commission?

Mme Barrados : Pour nous, c'est un élément essentiel parce que l'approche est d'avoir vraiment la gestion au jour le jour entre les mains du sous-ministre et du gestionnaire. Nous avons aussi une approche qui consiste à donner l'information et un cadre de politique. La façon dont le travail doit être fait est très claire, mais c'est basé sur les valeurs, ce n'est pas très détaillé.

Nous avons ensuite un instrument formel de délégation. Je rencontre chaque sous-ministre, dans le processus de délégation; c'est formel, c'est signé par nous deux, et, pour ma part, je donne une explication de ce que cela comprend exactement.

Nous avons aussi un système de surveillance de la façon dont la dotation est faite dans chaque ministère. C'est basé sur l'instrument de délégation. Nous avons un rapport annuel et nous suivons aussi les chiffres et les autres indications.

Nous donnons à chaque sous-ministre un rapport, chaque année, relativement à où ils se trouvent, et le sommaire pour le gouvernement dans sa totalité est dans le rapport annuel. On peut voir au total le résultat de cette surveillance.

Suite à cela, nous avons aussi un système de vérification. Nous essayons de vérifier chaque ministère chaque cinq à sept ans; la sélection est basée vraiment sur le risque.

Enfin, nous avons un processus d'enquête par lequel nous pouvons examiner une dotation, un processus spécifique, et si nous avons eu des problèmes avec un processus spécifique, nous pouvons le corriger.

Le sénateur Poulin : Quand vous décrivez le nouveau mandat de la commission, j'ai comme l'impression d'entendre la description du rôle d'un vérificateur général, mais concernant l'emploi et la dotation. Est-ce que je me trompe?

Mme Barrados : Il y a des éléments qui sont semblables mais la grande différence entre nous, à la CFP, et le vérificateur général, c'est que, à la CFP, nous avons le pouvoir de dotation, et nous avons un pouvoir exécutif. En conséquence, nous sommes responsables de toutes les politiques, pour toutes les directions. Nous avons aussi une section de notre organisation qui donne des services, et nous avons le pouvoir de faire des changements et des corrections; nous pouvons donner des ordres, nous pouvons enlever des délégations. Le vérificateur général peut seulement faire rapport et faire des recommandations. Nous avons le pouvoir de faire les corrections nous-mêmes.

[Traduction]

Le sénateur Eggleton : Je vous remercie tous de votre excellent travail et de votre constance.

Je veux m'attacher tout d'abord au problème des emplois temporaires que vous relevez ici et au fait que ces emplois ont triplé au cours de la dernière décennie. Il est évident que cela vous préoccupe. Je le lis dans votre rapport.

Comment se fait-il? Pourquoi en est-il ainsi à votre avis et que doit-on faire pour changer la situation? Il y a des avantages à engager des employés temporaires. Il semble que l'on n'aime pas l'idée de les faire venir pour ensuite les engager à titre permanent. Pourtant, je suis sûr que bien des gens qui les engagent ainsi pensent que c'est là une bonne façon de les mettre à l'essai. Je sais que cela crée certaines difficultés pour l'intégrité du système que vous voulez mettre en place. Vous pourriez peut-être nous dire pourquoi les choses se passent ainsi et quelles sont les mesures qui devraient être prises selon vous.

Mme Barrados : Je ne sais pas exactement ce qui se passe. Il est évident qu'il en est ainsi parce qu'à la base les gestionnaires estiment avoir besoin de certaines personnes pour faire tel ou tel travail. Le recours à l'aide temporaire s'explique par le besoin d'engager des personnes à court terme pour répondre à des besoins et à des exigences à court terme. Je n'y vois absolument rien à redire. En fait, il me paraît important que les gestionnaires puissent bénéficier d'une certaine souplesse et soient en mesure d'engager des personnes à court terme.

On pense généralement que l'aide temporaire touche le personnel administratif et de soutien et que, par exemple, une aide administrative doit prendre un congé de maladie ou de maternité et va être remplacée pendant la période correspondante. Les choses ont cependant évolué et, à l'heure actuelle, l'aide temporaire touche quelque 37 p. 100 du personnel professionnel et technique que nous engageons. C'est davantage cette forme de soutien administratif qui est concernée.

Je vous répète que l'engagement à court terme de personnel professionnel et technique peut être une très bonne chose. Ce qui nous préoccupe ici, c'est que l'on voit s'instaurer des relations d'emploi de nature permanente. On voit des personnes engagées à titre temporaire, puis à titre occasionnel pendant un certain temps et ensuite, elles reviennent à nouveau à titre temporaire. La relation d'emploi devient permanente. Ce n'est pas ainsi que l'on devrait user de l'aide temporaire, ce n'est pas là le but recherché. C'est la raison pour laquelle nous avons la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Ces différents régimes devraient relever de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Il arrive aussi dans certains cas que l'aide temporaire s'étende sur de longues périodes. Là non plus, ce n'est pas l'objectif de l'aide temporaire. On devrait s'en remettre aux dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Qu'est-ce qui m'amène à privilégier les dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique? J'insiste là- dessus parce que nous avons un régime instauré par le Parlement qui nous donne les critères à respecter à l'embauche. Nous voulons que les principes d'engagement dans la fonction publique soient équitables, qu'ils donnent à tous les Canadiens leur chance et qu'ils assurent une représentation de l'ensemble du pays, tant au niveau des régions que de la diversité de la population.

Ce que nous constatons, avec le phénomène de l'aide temporaire, c'est qu'elle est concentrée dans la région de la capitale nationale. Cela signifie par conséquent que l'on peut entrer dans la fonction publique par le biais de l'aide temporaire et occasionnelle — une de ces personnes sur cinq trouve un emploi permanent dans la fonction publique — et que ce sont donc là des emplois auxquels n'a pas accès le reste du pays en raison de la méthode de recrutement.

Je ne vois aucun inconvénient à ce que l'on ait recours à l'aide temporaire pour des raisons temporaires. Ce qui me gêne, cependant, c'est lorsque l'aide temporaire sert de méthode de recrutement parce que cela va à l'encontre des autres principes établis par la loi.

Je pense que les gestionnaires sont devenus un peu trop laxistes, si je puis me permettre, sur le principe de la mise à l'essai. Le régime d'emploi actuel prévoit des dispositions concernant les mises à l'essai. On peut toujours engager une personne, la mettre à l'essai et, si elle ne fait pas l'affaire, ne pas la garder. Il existe des dispositions dans la Loi sur l'emploi dans la fonction publique ainsi que des politiques de l'employeur qui permettent de mettre une personne à l'essai et de la congédier si les résultats ne sont pas bons. Il m'apparaît que le mécanisme de l'aide temporaire va à l'encontre de bien des principes que nous jugeons très importants dans la Loi.

Le sénateur Eggleton : S'il est si facile, pendant la période de mise à l'essai, de renvoyer une personne, pourquoi ne le font-ils pas et ont-ils recours à cette autre solution? Il semble que nombre de responsables se servent de ce mécanisme pour voir si une personne va faire l'affaire afin de l'engager ensuite. Il est bien normal que les gestionnaires agissent ainsi. Vous nous dites que d'autres solutions s'offrent à eux mais, pour une raison ou pour une autre — les chiffres ont triplé au cours de la décennie — ils n'y ont pas recours. Comment aller au fond des choses?

Mme Barrados : Je ne pense pas qu'il faille instaurer davantage de règles et de formalités. Nous en avons déjà assez à mon avis. Il faut que les gens utilisent mieux les outils à leur disposition.

Lors de cette phase de transition visant à moderniser la fonction publique, nous avons cherché à faire en sorte que les gestionnaires assument véritablement leur rôle — qu'il s'agisse des directeurs financiers ou des directeurs des RH. Nous sommes en bonne voie. Nous avons fait bien des progrès. Je suis satisfaite des progrès que nous avons réalisés. Toutefois, il en reste encore à faire.

Lorsque je parle des principes à la base de la dotation en personnel, cela peut sembler très théorique, mais cela signifie que les gestionnaires doivent savoir se servir des outils à leur disposition et prendre leurs décisions conformément à la loi, sans recourir à des expédients. Nous avons une loi et nous devons nous en servir. Des outils sont à leur disposition. Il est possible que nous n'ayons pas fait un bon travail d'explication et, comme je vous l'ai indiqué précédemment, notre organisation a maintenu un service chargé de leur venir en aide. Nous n'avons peut-être pas suffisamment travaillé dans ce domaine. C'est le genre de discussions que j'ai avec les sous-ministres.

Il y a éventuellement deux autres facteurs qui se rapportent à votre question. Le premier, c'est que l'on a quelque peu resserré les critères s'appliquant au personnel de direction. La procédure était assez laxiste et on l'a resserrée. En second lieu, la nouvelle loi a limité la période d'emploi occasionnel. Elle est passée de 120 jours à 90 jours. Cette forte croissance découle de ces deux facteurs — un resserrement des critères s'appliquant aux échanges de personnel de direction et une limitation de la période d'emploi occasionnel.

Le sénateur Eggleton : Est-ce que ces postes temporaires sont utilisés par ailleurs pour justifier la création de postes permanents ou concernent-ils principalement des personnes mises à l'essai en vue d'un emploi permanent?

Mme Barrados : L'une des difficultés avec ce système, et c'est M Hunt qui s'est chargé de ce travail, c'est que tout se fait par contrat. La Loi sur l'emploi dans la fonction publique et la notion d'emploi se réfèrent systématiquement à des postes. Ici, il s'agit de contrats et nous éprouvons en fait bien des difficultés à régler la question. Le comité permanent de la chambre s'est demandé pourquoi nous prenions tant de temps. Il a été très difficile de faire un véritable suivi et de retrouver le nom de ces personnes, parce que tout se fait par voie de contrats. Je ne suis pas sûre que l'on se soit servi de ce mécanisme pour créer des postes. Je pars du principe qu'il y a un véritable travail à faire et que ces gens ont donc été engagés pour faire un véritable travail, mais ce n'est pas une procédure axée sur les postes.

Le sénateur Eggleton : En matière d'équité dans l'emploi, vous relevez que les personnes handicapées ne sont toujours pas représentées comme vous le voudriez. Comment cela s'explique-t-il? S'agit-il, pour commencer, aussi bien des handicapés physiques que des handicapés mentaux? Le problème est-il plus grave dans un cas que dans l'autre? Quels sont les obstacles que l'on rencontre?

Mme Barrados : Nous recueillons les chiffres lorsque ces personnes présentent leur candidature. Cette opération se fait par voie informatique. Les candidats répondent sur un écran lorsqu'on leur demande s'ils font partie de l'une des trois catégories concernées. La question du sexe masculin ou féminin relève d'une autre partie du questionnaire. On leur demande de se déclarer, c'est donc volontaire.

La première question que je me pose est alors la suivante : les gens sont-ils prêts en fait à déclarer qu'ils ont tel ou tel handicap? Ils ne le font pas toujours de leur plein gré. Cette catégorie est très large et elle englobe donc toutes sortes de handicaps. J'aimerais que les gens se déclarent. Nous avons l'obligation au gouvernement de tenir compte de leur situation dans le mécanisme de sélection. S'ils ont des difficultés auditives ou visuelles ou tout autre handicap, nous allons nous assurer que cela est pris en compte dans le mécanisme de sélection.

Le sénateur Eggleton : Savent-ils, lorsqu'on leur pose cette question, que l'objectif est de leur apporter une aide supplémentaire?

Mme Barrados : C'est l'une des conséquences. Il s'agit de voir dans quelle mesure nous respectons les dispositions de la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Nous n'avons peut-être pas été assez clairs sur cette question.

Le sénateur Eggleton : Il vous faudrait peut-être intervenir sur ce point.

Le sénateur Poulin : Puis-je poser une question supplémentaire?

Le président : Oui.

Le sénateur Poulin : S'agissant de savoir si certains hésitent éventuellement à déclarer un handicap, une étude a-t-elle été faite à ce sujet dans la fonction publique?

Mme Barrados : Non, ce n'est pas le cas. C'est une opération que nous avons entreprise. J'espère que mon successeur se chargera de la chose et en arrivera à des résultats.

Nous avons deux sortes de chiffres. Il y a l'entrée dans la fonction publique, soit le rythme auquel nous engageons des personnes, et c'est sur ce point que je dis que les pourcentages ne sont pas suffisants. Nous obtenons de très bons résultats quant aux minorités visibles. J'en suis très satisfaite. L'autre chiffre est celui de la représentation au sein de la fonction publique, et là nous avons une très bonne représentation des personnes handicapées. Elles sont peut-être mieux disposées à se déclarer. Selon ma théorie, la fonction publique comprend des personnes plus âgées et, lorsqu'on prend de l'âge, on a tendance à avoir davantage de handicaps.

Le président : Madame Barrados, pour que cela soit clair, la Loi sur l'emploi dans la fonction publique prévoit qu'un examen annuel de la loi doit être effectué par le président du Conseil du Trésor, mais il est aussi prévu d'effectuer une révision tous les cinq ans et, selon les termes de la loi, c'est le ministre désigné qui doit se charger de la mettre en œuvre. Est-ce de cette dernière révision tous les cinq ans dont vous parliez tout à l'heure?

Mme Barrados : C'est exact.

Le président : Normalement, c'est le Parlement qui procède à la révision des lois mais, dans ce cas, c'est selon vous le Conseil du Trésor qui fera cet examen?

Mme Barrados : Non, selon mon interprétation, c'est le Conseil du Trésor qui dirigera l'examen au sein du gouvernement et le rapport sera transmis au Cabinet avant d'être présenté finalement au Parlement, qui se chargera de recommander les modifications devant être apportées à la loi. Il appartiendra au Parlement de déterminer les changements devant être éventuellement apportés. Ce sera une procédure parlementaire.

Le président : En notre qualité de comité chargé de superviser le fonctionnement du gouvernement et de sa machine, et en grande partie grâce à votre aide, nous avons consacré beaucoup de temps et d'efforts à l'acquisition d'un grand nombre de connaissances concernant les opérations de la fonction publique. Nous avons étudié de près la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Les honorables sénateurs souhaiteront peut-être vous en parlez. Avant que Mme Barrados s'en aille au printemps, nous aimerions éventuellement aborder cette révision en donnant notre point de vue de parlementaires, de législateurs.

Mme Barrados : Je serais heureuse de le faire avec vous.

Le président : Je vous remercie.

Le sénateur Callbeck : Soyez la bienvenue, madame Barrados. Je vais poursuivre la série de questions posées par le sénateur Eggleton au sujet des personnes handicapées. Dans votre mémoire, vous nous dites que les personnes appartenant à trois groupes — les femmes, les minorités visibles et les Autochtones — sont aujourd'hui engagées dans une proportion supérieure à ce qu'elles représentent au sein de la main-d'œuvre disponible. Pourriez-vous nous dire ce que vous entendez exactement par là?

Mme Barrados : Le Conseil du Trésor nous communique un chiffre qui correspond à l'estimation faite par Statistique Canada et Travail Canada du nombre de personnes au sein de la main-d'œuvre qui sont des femmes, des minorités visibles, des Autochtones ou des personnes handicapées en mesure d'occuper un emploi au gouvernement. Nous examinons les types d'emplois que nous offrons. Nous considérons les disponibilités au sein de la main-d'œuvre. Nous cherchons à savoir, si vous voulez, de quel réservoir nous disposons au sein de ces groupes de personnes désignées. C'est ce qui donne le chiffre correspondant à la disponibilité au sein de la main-d'œuvre. Nous nous penchons alors sur le nombre de personnes engagées et nous le comparons à l'estimation de la disponibilité au sein de la main-d'œuvre pour voir si nous obtenons de bons résultats. Selon ces critères, je peux vous dire que nos résultats sont très bons pour ce qui est des minorités visibles, ce qui n'était pas le cas par le passé, et il y a donc de véritables progrès. Nous ne réussissons pas aussi bien en ce qui a trait aux personnes handicapées.

Il est particulièrement important de se pencher sur les chiffres à l'entrée, parce que les fonctionnaires ont tendance à entrer au bas de l'échelle et à faire toute leur carrière dans l'administration. Ces chiffres à l'entrée nous donnent une idée de ce que sera la fonction publique dans deux générations.

Le sénateur Callbeck : Vous nous dites que vous obtenez de bons résultats pour ce qui est des minorités visibles, et vous nous donnez des pourcentages. J'en déduis que les chiffres effectifs sont à la hausse. Qu'en est-il pour les femmes et les Autochtones?

Mme Barrados : Dans ces deux catégories, là encore, nous dépassons le pourcentage disponible au sein de la main- d'œuvre, donc le rythme des embauches est bon. J'ai déjà évoqué auparavant la question des femmes, je crois que c'était devant votre comité, et je ne m'attendais pas à éveiller autant d'intérêt. Dans la fonction publique, je ne pense pas qu'il nous faille prendre davantage de mesures particulières en faveur des femmes. Les femmes sont très bien représentées dans la fonction publique de même qu'au plus haut niveau de l'administration. Ce n'est pas le cas pour les femmes qui travaillent dans d'autres secteurs, mais c'est vrai pour la fonction publique.

Quant à savoir si nos résultats d'ensemble sont bons, ce que donnent ces embauches, il est bien difficile d'en juger pour les autres catégories étant donné que nos statistiques laissent à désirer. C'est une chose dont nous avons déjà parlé. Les chiffres ne sont pas très bons et nous pouvons voir que les minorités visibles restent sous-représentées.

Nous sommes à peu près au niveau pour les Autochtones, mais il reste quelque problème particulier en termes de concentration, de lieu de travail, et pour ce qui est des obligations du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien aux termes d'un accord de règlement.

Le sénateur Callbeck : Les chiffres effectifs pour ce qui est des femmes, des minorités visibles et des Autochtones sont à la hausse, n'est-ce pas?

Mme Barrados : Oui, à l'entrée.

Le sénateur Callbeck : Qu'en est-il pour les handicapés — la fonction publique envisage-t-elle de mettre en œuvre certains projets? Vous avez indiqué que la définition était trop large.

Mme Barrados : Pour l'instant, j'ai évoqué ce problème dans mon rapport. Je dis que c'est pour moi un sujet de préoccupation. Nous devons étudier davantage la question et élaborer des plans pour que cette catégorie soit mieux représentée.

Le sénateur Callbeck : J'aimerais maintenant parler des étudiants.

Le Programme fédéral d'expérience de travail étudiant s'adresse aux étudiants des collèges et des universités, et je vois ici à tout l'enseignement postsecondaire. Est-ce que les élèves des écoles secondaires y sont englobés?

Mme Barrados : Ils peuvent bénéficier de ce programme.

Le sénateur Callbeck : Quelle publicité fait-on à ce programme? Je prends le cas d'une école secondaire dans une zone rurale. Est-ce que ses élèves connaissent aussi bien ce programme que ceux d'une école secondaire d'Ottawa?

Mme Barrados : La publicité est faite sur le site Internet jobs.gc.ca. La seule restriction, c'est qu'il faut avoir accès à Internet. Ce programme soulève un grand intérêt. L'année dernière, 79 000 candidats ont demandé à bénéficier de ce programme. Il a tendance à s'adresser avant tout aux étudiants du postsecondaire, mais certains élèves du secondaire en bénéficient aussi.

Le sénateur Callbeck : C'est la seule forme de publicité que l'on fait, c'est bien ça?

Mme Barrados : C'est exact.

Le sénateur Callbeck : Avez-vous des chiffres en ce qui le concerne?

Mme Barrados : Concernant le nombre de candidats? Oui, effectivement.

Le sénateur Callbeck : À quelle page trouve-t-on ces chiffres?

Terry Hunt, directeur général, Services de données et de l'analyse, Commission de la fonction publique du Canada : C'est à la page 126.

Mme Barrados : Il y a eu 60 000 candidats. J'ai la répartition des chiffres. Vous pouvez voir, à la page 165, que 4 000 élèves du secondaire, 9 800 étudiants des collèges et 46 500 étudiants de l'université ont demandé à bénéficier de ce programme. Il y a la répartition par province d'origine des candidats.

Le sénateur Callbeck : Lorsqu'on considère l'Ontario et la région de la capitale nationale, cela fait toute une différence.

Mme Barrados : Oui. On a tendance à enregistrer une concentration dans la région de la capitale nationale parce que c'est là que se trouve l'administration centrale. Là encore, cela me ramène à ma préoccupation, qui est de faire en sorte que notre fonction publique attire des candidats provenant de l'ensemble du pays. Ailleurs, les pourcentages ont tendance à être proportionnels aux populations.

Le sénateur Callbeck : Je n'en suis pas si sûre.

Mme Barrados : Nous pourrons faire les calculs et vous les communiquer.

Le sénateur Callbeck : Très bien.

Je relève à la page 126 de ce programme que le nombre de candidats engagés l'année dernière a en fait baissé.

Mme Barrados : Oui, et cela s'explique parce que le gouvernement, dans le cadre du Plan d'action économique, a injecté davantage de crédits dans les programmes pour étudiants, mais que ces derniers ont pu tirer des fonds aussi bien du programme qui nous occupe — le PFETE, soit le Programme fédéral d'expérience de travail étudiant — mais aussi des programmes d'alternance. Lorsqu'on ajoute les programmes d'alternance à ce programme, on voit que les chiffres ont en fait augmenté.

Le sénateur Callbeck : À la page 164, vous nous donnez le nombre et la répartition des candidats à ce programme, dans le cadre de la campagne de recrutement des étudiants du postsecondaire, mais vous ne nous précisez pas le nombre de candidats engagés dans chaque province — ou du moins je ne le vois pas ici.

Mme Barrados : Il ne s'y trouve pas, mais je peux vous le fournir.

Le sénateur Callbeck : Très bien, je serais heureuse de l'avoir.

Toujours sur la question du recrutement, comment les étudiants apprennent l'existence de ce programme?

Mme Barrados : Nous faisons un certain nombre de choses. Nous faisons largement appel à Internet dans ce cas. C'est un programme que les gens ont tendance à connaître. Nous faisons effectivement des tournées dans les écoles; nous organisons des forums de recrutement dans les établissements postsecondaires. Nous tirons parti de nombreuses possibilités, à la Commission de la fonction publique et aux ministères, pour fournir un maximum de renseignements sur ces emplois.

Le sénateur Callbeck : Vous dites que vous avez fait la tournée des universités. Est-ce que c'est dans tout le Canada? Ainsi, dans l'Île-du-Prince-Édouard, est-ce que vous avez rendu visite à l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard?

Mme Barrados : Oui, nous y sommes allés. Il faudrait que je vous recontacte pour vous préciser la date. Il y a une forte concentration de fonctionnaires d'Anciens Combattants Canada à l'Île-du-Prince-Édouard, la question soulève beaucoup d'intérêt dans cette île et il se passe plus de choses là-bas en raison de la présence de ce ministère. Là où c'est plus difficile, c'est lorsqu'il n'y a pas de nombreux ministères fédéraux ou d'activités fédérales, mais nous vous recontacterons pour vous donner des précisions.

Le sénateur Callbeck : J'aimerais le savoir.

Le sénateur Marshall : Soyez la bienvenue, vous et vos fonctionnaires. Nous avons beaucoup appris ce matin.

On a discuté des services d'aide temporaire et j'apprécie vos commentaires à ce sujet, mais j'aimerais aussi évoquer la question des employés occasionnels, que vous avez étudiée. Certaines statistiques que vous nous fournissez dans votre rapport sont assez inquiétantes car elles indiquent que le recours aux employés occasionnels augmente en pourcentage ainsi qu'en chiffres absolus. Ce que je peux voir dans le rapport, et il est possible que je lise entre les lignes, c'est que c'est devenu un moyen de tourner la loi et que de nombreuses personnes employées à titre occasionnel finissent par devenir des employés permanents au sein de la fonction publique.

Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est et nous indiquer par ailleurs de quelle façon il est possible de remédier à ce problème étant donné que les chiffres sont en augmentation? Je vois dans l'un des rapports que vous nous avez fournis — à l'annexe 1 du rapport intitulé L'emploi occasionnel : Sources et pratiques — que l'on indique à la page 19 le nombre total de nouveaux employés à durée indéterminée ayant été auparavant des employés occasionnels. Les chiffres sont alarmants car ils indiquent qu'au cours des neuf dernières années des dizaines de milliers de personnes sont entrées dans la fonction publique après avoir été au départ des employés occasionnels.

Pourriez-vous nous dire ce qu'il en est, car il semble que ce soit un gros problème, en nous précisant par ailleurs comment l'on pourrait remédier à cette tendance?

Mme Barrados : C'est un problème. Le principe des employés occasionnels est bon. Il faut que les gestionnaires de la fonction publique puissent être en mesure d'engager des personnes à court terme et pour leurs besoins immédiats, et c'est donc une bonne chose. Des événements inhabituels peuvent se produire et il y a toujours de l'imprévu. La limitation fixée par la loi porte sur le fait qu'il est possible d'engager des employés occasionnels et qu'aucune formalité n'est prévue pendant 90 jours au plus, mais seulement au sein d'un même ministère. On peut toujours aller dans un autre ministère pendant 90 jours.

J'ai deux choses à dire à ce sujet. Tout d'abord, on s'est montré très strict, peut-être trop strict. Il n'y a aucun moyen d'assouplir les choses, et je vais vous donner un exemple. Lorsque nous avons eu le H1N1, l'ASPC, l'Agence de la santé publique du Canada, a dû recourir aux employés occasionnels pour traverser la crise, mais n'a pu le faire que pendant 90 jours, après quoi elle ne pouvait plus les garder. Elle n'avait aucun moyen de garder ses employés occasionnels. C'est une distinction importante étant donné la façon dont opèrent les prestations, les avantages sociaux et les droits. Au bout du compte, j'ai déclaré à la direction de l'ASPC que j'allais engager ce personnel à la Commission parce que les conditions étaient trop strictes. Nous avons ce problème, qui est indépendant de votre question.

L'idée était bonne parce que c'est une bonne chose d'avoir des emplois occasionnels. Toutefois, je suis très préoccupée par le fait que c'est devenu un mode de recrutement, ce qui renvoie plus précisément à la question posée par le sénateur Eggleton au sujet de l'aide temporaire. C'est une grosse préoccupation. Quel est le mode de fonctionnement? Comment opère-t-il? On a tendance à connaître les gens de son milieu et ceux qui vivent autour de nous. On les fait venir parce qu'on a besoin de gens pour les faire travailler. Ils ont alors la possibilité de connaître tous les rouages du gouvernement et son mode de fonctionnement — c'est un lieu bien particulier. J'aime y travailler, mais il y a beaucoup à apprendre concernant les modes opératoires. Lorsqu'un concours est ensuite organisé, on peut imaginer qui tient la corde. C'est la personne qui a eu la possibilité de faire cet apprentissage.

La question est alors de savoir comment remédier à la chose. Tout d'abord, je souhaite vraiment que les gens fassent un meilleur travail de planification et prévoient leurs effectifs. De combien d'employés occasionnels pensez-vous avoir besoin? Il faut laisser savoir aux gens qu'ils sont engagés, mais simplement à titre occasionnel et que ce n'est pas une voie qui mène à un emploi permanent. Il faut que les gens sachent qu'ils vont être employés à court terme et qu'ils partiront ensuite. Voilà quelle est la situation. Certains ministères font très bien ce travail, connaissent leurs besoins saisonniers et font en sorte d'engager du personnel le temps qu'il faut.

Si l'on prévoit de se servir du programme des employés occasionnels pour recruter, il faut alors s'inspirer davantage du programme pour les étudiants en disant que l'on engage un certain nombre d'employés occasionnels qui auront ensuite la possibilité d'entrer dans la fonction publique. On aura besoin d'un certain mécanisme prévoyant la création d'un bassin d'employés pour élargir cette possibilité; sinon, ce n'est pas juste. Selon les derniers chiffres, environ 50 p. 100 d'entre eux finissent par entrer dans la fonction publique. C'est avant tout un phénomène qui concerne Ottawa.

Le sénateur Marshall : Ce qui est intéressant dans votre rapport, c'est que vous effectuez un suivi au fil des années et que vous vous intéressez à l'évolution au sein de la fonction publique. Vous nous dites qu'entre 1995 et 2005, en moyenne 41 p. 100 des nouveaux employés occasionnels ont fini par entrer dans la fonction publique, alors qu'ils étaient près de 50 p. 100 entre 2001 et 2008. Je suis originaire de la province de Terre-Neuve-et-Labrador. Vous avez évoqué précédemment les services d'aide temporaire. Est-ce que l'une des conséquences est la tendance à engager des gens provenant de la région de la capitale nationale?

Comment va-t-on pouvoir aborder et régler cette question étant donné que les chiffres n'évoluent pas dans le bon sens? Nous sommes passés de 41 p. 100 à 48 p. 100. Si nous ne faisons rien, on en sera vite à plus de 50 p. 100. Il est assez inquiétant de voir l'évolution de la dotation en personnel dans la fonction publique.

Mme Barrados : Oui. Il y a principalement trois choses que l'on peut faire dans l'immédiat. Tout d'abord, il faut améliorer largement la planification de la main-d'œuvre. Il est important que les gestionnaires disposent d'un pouvoir d'appréciation au sein des organisations, mais ils doivent se conformer à l'orientation de celles-ci. La fonction publique est soumise actuellement à de nombreuses restrictions dont il leur faut tenir compte. Ils doivent respecter les compressions de leurs budgets de fonctionnement et les révisions stratégiques. L'argent provient des budgets, il faut donc en tenir compte.

En second lieu, les délais de dotation sont bien trop longs, ce qui n'est pas vraiment nécessaire.

Le sénateur Murray : Ils sont de 23 semaines, nous dit-on ici.

Mme Barrados : C'est une moyenne, ce qui est totalement inutile.

Le sénateur Murray : Et cela, depuis que la délégation de pouvoirs est devenue la norme.

Mme Barrados : En troisième lieu, je propose dans le rapport que les ministères établissent des critères de référence et opèrent en conséquence. Ce n'est pas sorcier. Cela revient à administrer ses propres projets. On établit un point de départ, on fixe les différentes étapes et les délais correspondants, et on agit. Il faut en faire une priorité.

Celui qui s'est engagé à faire partie d'un comité chargé de faire passer les entrevues doit se présenter aux entrevues. Il nous faut le faire et réduire les délais de la dotation en personnel. Dans ce cadre, nous menons d'autres initiatives au sein de la Commission en établissant des réservoirs de commis et d'aides administratifs, là où il y a le plus d'emplois. Pourquoi disposer de 600 procédures distinctes dans un tel cas? Pourquoi ne pas avoir qu'une seule façon de procéder et se doter d'un grand réservoir pour s'en servir immédiatement lorsqu'on a besoin d'un employé? Il faut que cela se fasse. Si l'on veut se servir des emplois occasionnels pour la dotation en personnel, il faut alors élargir le bassin et accepter les autres candidatures. Dans tout le pays, on saura qu'à l'image du programme pour les étudiants, il s'agit d'emplois à court terme mais qui donnent la possibilité, si l'on a les compétences nécessaires, d'entrer dans la fonction publique. C'est ainsi qu'est administré le programme pour les étudiants. Dans ce cas, je serais d'accord.

Le sénateur Marshall : J'ai relevé, lorsque j'ai examiné le compte rendu de huit ou neuf vérifications, que l'on faisait presque toujours référence à des personnes recrutées dans des postes n'ayant pas été annoncés. Je crois que dans presque tous les cas vous avez relevé de gros problèmes en ce qui concerne cette procédure.

Pouvez-vous nous dire pour quelles raisons vous offrez des postes pour lesquels on ne fait aucune publicité. Doit-on poursuivre dans cette voie? Comment remédier à ce problème?

Mme Barrados : C'est une question très intéressante étant donné que lorsqu'on a modifié la LEFP, une disposition précise a été adoptée pour ce qui est des postes annoncés ou non. On n'a marqué aucune préférence pour les postes annoncés par rapport à ceux qui ne le sont pas.

On était parti du principe que la fonction publique devait être souple et donner aux gestionnaires un pouvoir d'appréciation, la Commission se chargeant d'établir les politiques en conséquence. J'ai déclaré que je préférais que les postes offerts fassent l'objet d'une publicité et que c'est la première solution qui devait être retenue, mais il y a des cas où l'on peut avoir recours à l'ouverture de postes ne faisant l'objet d'aucune publicité.

Les gestionnaires de la fonction publique n'ont pas beaucoup apprécié que je parle ainsi, mais c'est vraiment ce que je pense. Aux termes de notre politique, on peut ne pas faire la publicité, mais il faut pour cela une bonne justification. Ainsi, il peut y avoir dans un secteur une véritable pénurie exigeant que l'on recrute des candidats ayant des qualifications bien particulières, un diplôme en médecine ou un doctorat, par exemple. Il se peut que l'on ait cherché à recruter sans succès et que l'on trouve finalement le candidat correspondant à l'emploi. À ce moment-là, il n'est pas logique de faire de la publicité pour le poste et un recrutement sans publicité est acceptable.

L'absence de publicité peut aussi être acceptable dans un autre cas. Il arrive qu'une organisation mette sur pied un concours s'adressant uniquement à un ministère mais qu'il reste d'autres candidats qualifiés une fois que l'opération est terminée. D'autres ministères pourront alors tirer parti de cette liste de candidats qualifiés. En théorie, il n'y a pas de publicité puisque ces personnes ne savaient pas que la liste allait être utilisée par d'autres ministères. Dans certaines circonstances, j'estime qu'il est logique de procéder ainsi.

Nous avons demandé à tous les ministères d'établir des politiques et des procédures pour déterminer dans quelles circonstances ils vont se passer de publicité et quelles seront leurs justifications.

Le sénateur Marshall : Chacun peut établir sa propre façon de procéder.

Mme Barrados : Il n'y aura qu'un seul corps de règles et de procédures, mais les ministères pourront établir les circonstances de leur application. Nous constatons que 28 p. 100 des personnes entrant dans la fonction publique le font dans des postes n'ayant pas fait l'objet de publicité.

Le gros inconvénient, c'est que les nominations d'employés ayant occupé pendant plus de six mois des postes intérimaires se font sans publicité dans environ 80 p. 100 des cas. Là aussi, la personne en place bénéficie d'un grand avantage étant donné que les chances de promotion, qui sont d'environ 6 p. 100, passent à 40 p. 100 lorsqu'on occupe le poste à titre intérimaire.

Le sénateur Marshall : Je pense que nous avons bien saisi les problèmes et que ce qui apporte désormais, c'est de trouver des solutions.

Le sénateur Ringuette : Madame Barrados, vous savez que j'apprécie le fait que vous teniez compte des barrières géographiques et que vous ayez pris des mesures il y a quelques années pour écarter les obstacles à l'embauche des Canadiens n'habitant pas la région de la capitale nationale.

Toutefois, au vu des deux rapports traitant précisément des employés occasionnels et de l'aide temporaire, il est évident que ces deux mécanismes servent à contrer, à tourner la politique que vous avez mise en place pour écarter les barrières géographiques. Il m'apparaît par ailleurs que le rapport sur les employés à titre temporaire nous révèle que là aussi les politiques du Conseil du Trésor sont contournées.

Par conséquent, nous constatons que votre politique ainsi que celle du Conseil du Trésor sont détournées de leur objectif en ce qui a trait à l'engagement d'employés à titre temporaire par les différents organismes. Nous voyons aussi que cela concerne plus particulièrement la région de la capitale nationale. Comment remédier à la chose? En dépit de votre politique et de celle du Conseil du Trésor, il semble que les gestionnaires font comme bon leur semble. Il n'y a aucun outil et aucun mécanisme pour les discipliner, et c'est peut-être en partie la solution qu'il nous faudrait envisager. Je considère que cette pratique consistant à engager des employés occasionnels ou à temps partiel remet en cause l'avenir de notre fonction publique, qui se veut hautement qualifiée, axée sur le mérite et représentative de l'ensemble du Canada.

C'était une longue question, j'en conviens.

Mme Barrados : La situation est intéressante parce que je ne pense pas qu'à la base les responsables cherchaient à tourner les règles. J'estime que dans chaque cas les gestionnaires cherchent à faire pour le mieux, veulent obtenir des résultats, sans avoir pleinement conscience des conséquences de leurs actions individuelles. Lorsqu'on examine les conséquences de l'ensemble des décisions, on peut voir que l'on a détourné la loi de ses objectifs. Je ne pense pas que les différents gestionnaires cherchent à mal faire les choses. Dans leur grande majorité, les fonctionnaires s'efforcent de respecter la loi dans leur action. Les répercussions sur l'ensemble du système ne sont pas bonnes, je vous le concède.

Pour ce qui est des remèdes, nous nous sommes efforcés dans un premier temps de discuter des problèmes. Nous avons des chiffres. Nous ne disposions jusque-là d'aucun chiffre, sauf en ce qui concerne les dépenses, et l'information manquait. La première étape consiste à recueillir des statistiques. Ensuite, nous allons en discuter avec les gestionnaires, nous avons déjà commencé, pour que l'on se serve des outils à notre disposition.

Il faudra ensuite assurer un contrôle. Comme dans bien des domaines, il faut gérer la chose. Dans certains secteurs, ce mécanisme peut être employé à bon escient; il y a bien des façons aussi de mal l'utiliser. Je veux que l'on contrôle et que l'on gère la chose, et en disant cela je sais bien que c'est très difficile et bien dur à obtenir compte tenu des mécanismes en place.

Le rapport me donne quelques détails sur la façon dont M Hunt et son équipe pourraient accomplir cette tâche, et ils ne pourraient s'informer qu'auprès des ministères disposant de données sur les systèmes, applications et produits (SAP) parce que seuls les systèmes financiers SAP nous permettent d'avoir les noms des personnes figurant sur les contrats. On pourrait alors faire le rapprochement avec les autres dossiers de paye et savoir ce qui s'est passé au sujet du recours aux employés occasionnels et du nombre d'entrées dans la fonction publique.

Je considère que dans un premier temps ce sont là des étapes très importantes et qu'il convient de mener des discussions et de contrôler la façon dont la chose est administrée. C'est un secteur qui a des répercussions sur la Commission de la fonction publique, mais les mécanismes en soi ne relèvent pas en fait de notre compétence. Il s'agit de la politique contractuelle.

Le sénateur Ringuette : Toutefois, même lorsque les employés sont engagés sous contrat, le Conseil du Trésor a une politique précise concernant la réforme et la durée des contrats pouvant être accordés, de sorte que c'est quand même pris en compte par le système.

Lorsque vous avez procédé à l'étude du travail temporaire, avez-vous eu accès à la banque de données du service des contrats de Travaux publics, dont ce ministère se sert pour pourvoir les postes à titre temporaire?

Mme Barrados : C'est M Hunt qui a dirigé l'équipe, et je vais donc lui demander de vous répondre.

M. Hunt : Oui, absolument tous les ministères qui ont participé, les 11 organisations, ont bien voulu nous communiquer l'information nécessaire. Comme l'a indiqué Mme Barrados, la difficulté provenait de la nécessité de recourir à différentes sources de données. Nous avons dû utiliser les données des contrats, les données financières et les données des RH. Ce n'est qu'après avoir répertorié ces trois séries de données que nous avons pu avoir une idée du nom des personnes en cause, de leur provenance et de leur emploi ultérieur dans la fonction publique.

Le Conseil du Trésor est chargé de la politique, mais les délais sont en réalité fixés par TPSGC parce que c'est lui le fournisseur, c'est sa responsabilité.

Le sénateur Ringuette : Avez-vous eu accès aux services de Travaux publics, à un site Internet, pour ce qui est de l'engagement sous contrat des employés à titre temporaire?

M. Hunt : Oui, bien sûr. Une partie de notre étude a consisté à recenser 10 ans de statistiques, soit les statistiques sur les dépenses tirées de nos comptes publics mais, par ailleurs, TPSGC dispose de données appelées « Cube des dépenses » parmi lesquels figurent toutes les statistiques sur les dépenses tirées des contrats de services d'aide temporaire ainsi que de tous les contrats de services professionnels. Ces données ne figurent pas sur le site Internet. Les responsables nous ont permis d'y accéder. On nous a donné l'accès à toutes les données dont nous avions besoin.

Le sénateur Ringuette : Très bien. Je tiens à bien comprendre. Vous me parlez des statistiques. Je vous parle du site Internet de Travaux publics et de la façon dont on y annonce ces postes de travailleurs temporaires. Avez-vous pu prendre connaissance, au moment où vous avez entrepris cette étude, de la façon dont on a annoncé ces contrats?

Mme Barrados : Nous avons eu accès à toutes les données de Travaux publics. Il y a eu une bonne collaboration et il s'agit ici de la procédure des offres permanentes. Nous n'avons pas procédé à une vérification de la façon dont ce ministère a établi sa procédure d'offres permanentes, mais nous sommes partis de là.

Le sénateur Ringuette : Où peut-on trouver ces offres permanentes?

Mme Barrados : Nous pourrons vous envoyer les liens.

Le sénateur Ringuette : J'ai consulté le système MERX de Travaux publics, et il n'y a à mon avis qu'environ 1 p. 100 de l'ensemble des contrats qui y sont annoncés qui portent véritablement sur des emplois temporaires.

Ma question est donc la suivante — où ces contrats sont-ils annoncés?

M. Hunt : Dans la pratique, il y a une offre permanente. C'est lorsque les responsables établissent l'offre permanente — c'est là que c'est annoncé. L'offre permanente reste en place quatre ou cinq jours, mais on peut la remettre en service. Il est préférable d'acheminer les détails au sujet de l'offre permanente par l'intermédiaire de TPSGC.

Mme Barrados : Nous n'avons pas examiné la procédure concernant l'élaboration des offres permanentes et les règles qui s'y appliquent. Ce sont là d'intéressantes questions. Ce qui nous intéressait, c'était le genre de personnes qui travaillaient dans la fonction publique et nous voulions savoir, dans toute la mesure du possible, ce qu'elles faisaient et si elles opéraient comme des fonctionnaires. Nous ne sommes pas revenus sur toute la procédure des offres permanentes, sa façon d'opérer, en nous demandant si les personnes figuraient à bon droit sur les listes et si ces dernières étaient renouvelées. Nous n'avons pas fait ce genre de travail. Ce serait un bon sujet, cependant, pour la vérificatrice générale.

Le sénateur Ringuette : Il s'agit d'une procédure interne entre Travaux publics et les autres organismes de dotation dès que l'offre permanente est acceptée?

Mme Barrados : C'est exact. Il y a une procédure de concours qui permet d'établir l'offre permanente et une fois qu'elle est en place les fonctionnaires peuvent s'en servir.

Le sénateur Ringuette : Par conséquent, toutes les offres d'emploi des différents ministères du gouvernement ne peuvent être consultées par le public ni par quiconque, par aucun Canadien de notre pays à la recherche d'un emploi, à moins qu'il sache quel est l'organisme de dotation de la capitale nationale qui dispose d'une offre permanente pour tel ou tel type d'emploi, par l'entremise de tel ou tel ministère, les postes n'étant éventuellement annoncés au public que par l'intermédiaire de votre site Internet.

Mme Barrados : Certaines entreprises qui figurent dans les offres permanentes sont des entreprises nationales. Elles ne se trouvent pas toutes dans la région de la capitale nationale. Elles recrutent elles-mêmes. Elles ne recrutent pas par l'intermédiaire de notre site Internet et elles font leur propre recrutement.

Là encore, si c'est une relation contractuelle à court terme, il n'y a pas de problème. C'est seulement à partir du moment où l'on agit comme si l'on engageait des employés à plein temps aux termes de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. C'est là que ça me pose un problème.

Le sénateur Ringuette : Vous nous dites aussi dans votre rapport que dans de trop nombreux dossiers concernant ces travailleurs occasionnels ou à titre temporaire on ne relève aucune précision se rapportant au principe du mérite établi dans la loi.

Mme Barrados : Pour les employés occasionnels, il n'y a aucune exigence relative au mérite. J'imagine que l'on va faire venir quelqu'un en mesure de faire le travail. Notre système part exclusivement du principe que les responsables vont fixer les critères correspondant au mérite. Quels sont les critères devant être respectés pour cet emploi? Il faut agir en fonction d'une procédure équitable et montrer que les critères ont été respectés.

Pour les employés occasionnels, aucun critère n'est établi. Il n'y a aucun contrôle du mérite. Je suppose que les responsables vont engager quelqu'un qui leur est utile.

Dans le cas des contrats, toutefois, c'est l'entreprise qui fixe ses exigences. Elle établit ses critères concernant le type d'employés dont elle a besoin et elle s'assure ensuite que ces critères sont respectés.

Le sénateur Runciman : Je remercie les témoins.

J'aimerais vous poser une question dans un domaine quelque peu différent. Je déduis de vos commentaires sur la nature non partisane de la fonction publique — et il est possible que j'aille un peu trop loin en interprétant votre pensée — que vous êtes préoccupée par la situation. Il semble que cela implique qu'il faille éventuellement interdire aux fonctionnaires d'être candidats à des postes politiques. Ils peuvent le faire à l'heure actuelle s'ils en reçoivent l'autorisation et s'ils sont affiliés à un groupe ou membre d'une organisation ayant un programme politique réel ou perçu comme tel. Est-ce que j'interprète bien la voie dans laquelle vous semblez vous diriger?

Mme Barrados : Non. Il convient de relever à ce sujet que les dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique qui limitaient les activités politiques des fonctionnaires ont été abrogées par la Cour suprême. La Cour suprême a jugé qu'en vertu de la Charte des droits, les fonctionnaires avaient le droit d'avoir des activités politiques mais devaient agir de manière à ne pas remettre en cause la nature non partisane de la fonction publique.

La nouvelle loi mise en place confère cette tâche à la Commission de la fonction publique. Il y a deux parties à ce titre dans la loi; l'une d'entre elles concerne le régime s'appliquant aux fonctionnaires qui se portent candidat à un poste politique. Il leur faut en demander l'autorisation à la Commission de la fonction publique et nous établissons les règles s'appliquant à leur candidature.

L'année dernière, nous avons eu 90 fonctionnaires postulant à un emploi politique, la plupart au niveau municipal. Dans la plupart des cas, pour donner notre autorisation, nous examinons s'il s'agit d'un emploi à plein temps ou non. S'ils ont une obligation à plein temps au sein d'une municipalité, nous ne nous attendons pas vraiment à ce qu'ils continuent à toucher un salaire dans la fonction publique. De ce point de vue, nous disons que non, qu'il faut choisir entre l'un ou l'autre s'il s'agit d'un travail à plein temps.

Je vous avoue que là où nous éprouvons des difficultés au niveau municipal, c'est dans les petites municipalités où la présence et l'influence d'un fonctionnaire se confondent avec ses activités sur place. Il n'y a pas de véritable distinction entre les deux choses. Il nous est arrivé d'avoir des fonctionnaires exerçant des responsabilités en matière de ressources naturelles au sein de leur ministère dans de petites localités du Nord qui veulent aussi siéger au sein de leur conseil municipal sur la question des ressources naturelles. Il y a là un conflit d'intérêts et ce n'est pas acceptable.

Dans les élections fédérales et provinciales, nous cherchons par ailleurs à savoir où ces gens travaillent, quelles sont leurs relations avec le ministre et s'ils seront en mesure de revenir occuper leur emploi s'ils ne sont pas élus. De manière générale, nous fixons les conditions qui s'appliquent à leur cas. Nous leur disons qu'éventuellement il leur faudra occuper un emploi différent s'ils reviennent, mais en gros c'est nous qui leur donnons l'autorisation en leur fixant un certain nombre de conditions.

L'autre section de la loi est celle qui se réfère aux autres activités des fonctionnaires; elle concerne les pancartes sur les pelouses, les macarons et les activités politiques. Là encore, tout est fonction du niveau où se trouve le fonctionnaire et de son profil. Pour un sous-ministre, c'est bien clair, il vote et c'est tout. Le problème est différent à mesure que l'on descend l'échelle au sein de l'organisation.

Nous devons nous rappeler constamment que des problèmes peuvent se poser. C'est aujourd'hui plus difficile car il faut maintenir un certain équilibre. Il ne s'agit pas de dire « non ». C'est plutôt « oui, peut-être, dans certaines conditions ». Il s'agit pour nous de tenir compte de nombreux cas particulier.

Il y a des cas où l'on ne fait pas la part des choses entre les fonctions publiques et privées auprès des médias dans la vie civile. Il est arrivé qu'un fonctionnaire fasse fortement l'éloge du chef de l'opposition tout en occupant un poste élevé au gouvernement. Ce n'est pas acceptable. Les opinions d'un fonctionnaire doivent rester privées. Si cela reste privé, il n'y a pas de problème. À partir du moment où ça devient public, ça ne va plus. Ce sont des choses de ce genre qui nous préoccupent.

L'autre difficulté en ce qui nous concerne, c'est que la définition des « activités politiques » à l'appui d'un parti politique est assez restrictive. Il peut y avoir des enjeux en réalité très politiques, comment les traiter? Nous en avons eu un certain nombre. Il peut arriver, par exemple, qu'une personne puisse être inféodée à un parti sans pour autant travailler effectivement pour celui-ci. Que se passe-t-il alors? Nous nous préoccupons jusqu'à un certain point de l'étroitesse de la définition.

Nous nous efforçons d'agir dans l'esprit de la décision de la Cour suprême et de mettre en œuvre les dispositions de la loi. Oui, les fonctionnaires disposent de ces droits, mais ils doivent les exercer de manière à ne pas gêner la fonction publique.

Je dis toujours aux fonctionnaires que le gouvernement peut toujours changer et qu'en leur qualité de fonctionnaires, ils doivent être en mesure de servir n'importe quel gouvernement en gardant toute sa confiance et sans donner l'impression qu'ils vont agir selon des considérations partisanes.

Le sénateur Runciman : J'ai rapidement deux autres questions à vous poser. Je me félicite que vous ayez évoqué les délais de dotation en personnel et les préoccupations que cela entraîne. Je ne suis pas sûr qu'il y ait un lien direct entre le mode de recrutement des employés non permanents et les préoccupations qui sont les vôtres à ce sujet. Il m'apparaît que s'il faut près de six mois pour assurer la dotation, on peut comprendre que le délai de 90 jours ne soit tout simplement pas pratique lorsqu'on cherche à concilier les deux choses.

Vous évoquez aussi les mises à l'essai comme solution de rechange. Si vous compilez les statistiques, je ne suis pas sûr qu'il arrive fréquemment qu'on mette fin à un emploi après une période de mise à l'essai. Il m'est déjà arrivé d'avoir à mettre fin à un emploi, et humainement je trouve que c'est difficile. C'est pourquoi les grandes entreprises engagent des sociétés de l'extérieur qui se chargent de mettre fin aux emplois. Lorsqu'il s'agit simplement de renouveler un contrat avec une agence d'emploi temporaire ou une entreprise de ce genre, il est bien plus facile de renvoyer quelqu'un qui ne donne pas satisfaction. Je ne suis pas sûr que vous recueilliez ce genre de statistiques. J'imagine que ce n'est peut- être pas très facile, mais ce serait intéressant à partir du moment où l'on parle de cette solution de rechange.

Vous avez par ailleurs évoqué un délai de six mois et 40 p. 100 de chances d'obtenir un emploi permanent, mais il faut rapprocher ces six mois du délai de 90 jours lorsqu'on a la possibilité d'offrir une mise à l'essai, et c'est donc un élément qu'il faut là aussi envisager.

Vous nous avez parlé de votre étude et de ses limites. J'aimerais avoir quelques éclaircissements. Vous n'avez pu obtenir des renseignements qu'auprès des organismes dotés de systèmes SAP. Je crois que vous avez indiqué qu'il y en avait 11. Quel en est le nombre au sein du gouvernement? Quel est le total? Si vous aviez pu obtenir des renseignements auprès de toutes les sources disponibles, combien seraient-elles?

Mme Barrados : Nous avons le sentiment d'en avoir recueilli environ 50 p. 100 et, par conséquent, lorsque nous procédons aux estimations, nous extrapolons en fonction du nombre d'employés. Nous faisons alors les calculs en fonction des populations, parce que nous avons le chiffre des dépenses.

Le sénateur Runciman : Vous extrapolez ces chiffres à l'échelle du gouvernement en fonction de votre échantillon.

Mme Barrados : Oui, et 50 p. 100 c'est un assez bon chiffre.

Le sénateur Runciman : Ce n'est pas un mauvais échantillon pour juger de la validité des conclusions.

Je relève aussi une mention, qui pourrait éventuellement faire froncer quelques sourcils, au sujet du triplement des dépenses ces 10 dernières années. Vous indiquez par ailleurs que ces neuf dernières années il y a eu 37 p. 100 d'employés en plus. Nous enregistrons une augmentation de 37 p. 100 des employés de la fonction publique et il faut compter bien sûr avec l'inflation et une augmentation des salaires au cours de cette même période. Vous faites cette observation, mais je me demande si c'est justifié lorsqu'on tient compte de tous les autres facteurs ayant pu influer sur ce chiffre. C'est un chiffre global qui ne tient peut-être pas compte de tous ces autres facteurs. On pourrait penser que cela fausse l'ensemble des résultats. Je ne dis pas que c'est le cas, mais lorsqu'on présente ainsi la chose, il est possible que les chiffres soient quelque peu faussés sur cette question.

Mme Barrados : Je vais d'abord vous répondre sur le nombre de personnes que l'on renvoie après une mise à l'essai. C'est un chiffre du Conseil du Trésor. Nous le demanderons et nous le fournirons au comité. Ce n'est pas un gros chiffre, il est en fait trop petit. Je pense qu'on pourrait s'en servir davantage, étant donné la tendance à recourir à ces autres mécanismes, mais nous ferons en sorte que votre comité ait ce chiffre.

Pour ce qui est du rythme d'augmentation, nous avons un tableau à la page 23 du rapport. Il ne s'agit pas du rapport annuel, sénateur, mais de celui qui traite de l'aide temporaire. Nous avons recensé les différents rythmes de croissance des dépenses pour les différents types d'embauche. On constate que ce sont les services d'aide temporaire qui augmentent le plus à partir de 2004-2005. Les autres ont tendance à augmenter en fonction de l'ensemble. Ce sont les durées qui ont vraiment baissé lorsqu'on se réfère aux dépenses relatives, mais le nombre a augmenté et la période 2004-2005 est celle du resserrement dans la loi des dispositions s'appliquant aux échanges de personnel de direction.

Le sénateur Runciman : Vous avez évoqué tout à l'heure le fait que lorsqu'on connaît une personne en place, les portes s'ouvrent plus facilement, puis nous avons parlé des contrats passés avec des agences. Si l'on connaît quelqu'un, c'est donc quelqu'un qui travaille au sein de l'agence de services temporaires ou de l'organisme ayant passé un contrat avec le gouvernement. Il ne s'agit pas d'une personne en connaissant une autre au sein du gouvernement. Je me demande si c'est ce que vous laissiez entendre lorsque vous avez fait cette observation.

Mme Barrados : Le fait de connaître quelqu'un se référait aux employés occasionnels. Il n'y a absolument aucune règle s'appliquant aux employés occasionnels et souvent rien n'est vraiment fixé. C'est en connaissant quelqu'un que l'on obtient un emploi occasionnel. Dans notre système actuel, en théorie on téléphone à une agence, qui nous envoie quelqu'un. En théorie, c'est ce qui devrait se passer. En réalité, nous voyons constamment réapparaître les mêmes personnes. Il s'agit d'emplois occasionnels, temporaires, et il faut donc que l'on connaisse quelqu'un sur place pour revenir constamment.

Le sénateur Runciman : Il se peut qu'elles connaissent du monde parce qu'elles font un bon travail.

Mme Barrados : C'est possible.

Le sénateur Neufeld : Merci d'être venue. J'estime que nous avons bien fait le tour des services d'aide temporaire et des emplois occasionnels. Si je ne me trompe, vous avez indiqué que pour les postes de ce type, la plupart de l'embauche se faisait dans la région de la capitale nationale. Je vais prendre l'exemple de la Saskatchewan. Si l'on a besoin d'une aide occasionnelle ou d'une personne à temps partiel pour faire un travail ayant trait à la Saskatchewan, est-ce que cela signifie que les ressortissants de la Saskatchewan auront la possibilité d'occuper cet emploi? Devront-ils se rendre à Ottawa pour faire le travail ou pourront-ils occuper cet emploi dans leur province ou leur territoire? Il est peu probable qu'un ressortissant de la Saskatchewan — je me trompe peut-être — vienne travailler pendant trois ou six mois dans la région de la capitale. Pouvez-vous nous donner quelques précisions à ce sujet?

Mme Barrados : La fonction publique se trouve à 40 p. 100 dans la Région de la capitale nationale et à 60 p. 100 à l'extérieur. C'est là que se trouvent en général les administrations centrales, à quelques exceptions près, comme celle des Anciens combattants. Les ministères chargés du développement économique sont à Ottawa, de sorte que toute la haute administration a tendance à se trouver à Ottawa. Le recours aux employés occasionnels et à l'aide temporaire est déterminé par ces différents gestionnaires et il a tendance à être local. Nous constatons qu'il n'est pas aussi fréquent dans les régions et que ces dernières ont tendance à en faire un meilleur usage. Les régions s'en servent véritablement pour des tâches temporaires, occasionnelles, qui ont un début et une fin. C'est dans la région de la capitale nationale que nous relevons avant tout l'existence de ce phénomène qui consiste à engager ces personnes à plus long terme et de manière plus régulière, ce qui mène à des emplois permanents.

Si un ressortissant d'une région veut venir à Ottawa pour essayer d'obtenir de cette manière un emploi dans la fonction publique, rien ne l'en empêche. Je ne sais pas combien l'ont fait ou sont prêts à le faire. Les jeunes sont tout à fait disposés à se déplacer lorsque des possibilités s'offrent à eux.

Le sénateur Neufeld : Vous nous dites que les responsables dans les régions utilisent mieux les mécanismes que les mauvais gestionnaires de la région de la capitale nationale, qui en font un mauvais usage, et je comprends cela jusqu'à un certain point.

Ma deuxième question porte sur le vieillissement de la main-d'œuvre et les retraites. Les employés prennent leur retraite. Dans ma province, c'est un gros problème, notamment au niveau des cadres; bien des gens prennent leur retraite. J'imagine qu'il en est de même au gouvernement fédéral. Quel rôle jouez-vous dans le cadre de cette évolution, s'agissant de planifier ce genre de transition — à condition toutefois que vous ayez effectivement une responsabilité en la matière?

Mme Barrados : Selon la procédure mise en place au gouvernement fédéral, la responsabilité en matière de planification de la main-d'œuvre — la taille et la composition de la main-d'œuvre — relève de la responsabilité de l'employeur, du gouvernement. À la Commission de la fonction publique, nous nous occupons avant tout de la façon de répondre à ces besoins.

Il y a effectivement dans la fonction publique de plus en plus de gens qui prennent leur retraite. Le pourcentage des départs tourne autour de 5 p. 100; les retraites représentent 3 p. 100 dans l'ensemble et ce pourcentage s'élève à 9 p. 100 dans la catégorie du personnel de direction. En raison de ce phénomène, le greffier du Conseil privé et ses adjoints ont fait des efforts concertés pour renouveler la fonction publique. Kevin Lynch et le greffier actuel sont très préoccupés par la question du renouvellement de la fonction publique.

Nous relevons dans notre rapport annuel qu'il y a eu de véritables réussites. Le greffier précédent, Kevin Lynch — l'orientation actuelle est quelque peu différente — a déclaré qu'il fallait se préoccuper du renouvellement de la fonction publique, engager de nouveaux employés, et sans que ça se fasse par la voie des employés occasionnels et temporaires; il fallait qu'ils soient directement embauchés. Il a doublé le nombre de personnes engagées directement dans la fonction publique dans le cadre des programmes de recrutement postsecondaire et des projets mis en place par les universités.

Il n'est pas très fréquent que l'on obtienne un tel résultat sur le terrain à partir de projets centralisés. Il voulait aussi réduire le nombre des nominations de candidats à des postes intérimaires et ce nombre a baissé, de sorte qu'il y a eu un gros effort de renouvellement.

Nous nous attendons à ce que ces départs à la retraite dans la fonction publique se poursuivent jusqu'en 2014. C'est de cette façon que le gouvernement actuel va gérer la réduction de ses effectifs. Il y aura une réduction des effectifs au moyen de la compression des budgets de fonctionnement et dans le cadre des révisions stratégiques dont je vous ai parlé. Dans le cadre de la réduction naturelle des effectifs qui a cours, nous pourrons encore engager certaines personnes, mais nous devrons le faire intelligemment.

Le sénateur Neufeld : Je peux déduire de votre réponse que vous êtes satisfaite des modalités en place pour faire face aux départs à la retraite qui s'en viennent et qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter. C'est bien ça?

Mme Barrados : La fonction publique fédérale a bien de la chance d'éveiller l'intérêt d'un certain nombre de gens prêts à y travailler. Il ne s'agit pas d'un manque d'intérêt. Nombre de gens souhaite entrer dans la fonction publique. C'est pourquoi nous jouons ce rôle et cherchons à faire preuve d'impartialité.

Le défi que doit relever la fonction publique — et c'est la préoccupation du greffier actuel — c'est qu'il nous faut assurer la succession et ce transfert de connaissances. Étant donné qu'un grand nombre de personnes partent après avoir occupé un poste pendant de nombreuses années et en ayant beaucoup d'expérience, nous avons besoin d'assurer le transfert de ces connaissances. C'est un sujet de préoccupation.

Le sénateur Gerstein : Madame Barrados, comme l'a indiqué le sénateur Murray lors de son intervention, personne ne sait vraiment autour de cette table si nous vous voyons aujourd'hui pour la dernière fois devant notre comité. Dans cette éventualité, je dois vous féliciter au nom de tous les membres de notre comité pour la qualité de votre collaboration et l'intérêt de vos analyses lors de vos comparutions.

Vous avez servi en qualité de présidente de la Commission de la fonction publique pendant près de sept ans, et j'imagine qu'en vous levant certains jours vous avez l'impression que c'était hier. Je me doute, sans vouloir être présomptueux, que certains matins vous avez le sentiment d'avoir commencé il y a des dizaines d'années. Toutefois, si vous remontez sept ans en arrière, je suppose qu'en abordant votre fonction, vous vous êtes fixés un cadre pour votre action. Aujourd'hui, alors que sept ans ont passé et que vous avez eu éventuellement la possibilité d'y réfléchir, qu'elles sont, selon vous, vos principales réalisations? Et, si vous me permettez d'en rajouter, quelles sont vos déceptions?

Mme Barrados : Je pense que vous avez bien défini la situation. J'aime mon travail, mais il y a des jours où j'aimerais mieux faire autre chose, et je vous remercie pour ces très aimables commentaires.

Pour ce qui est des succès que nous avons obtenus, je pense que nous avons réussi à mettre en place le cadre de la nouvelle loi. J'estime que nous avons répondu à de nombreuses questions touchant la nouvelle loi, par exemple quel doit être le rôle de la Commission et que doivent faire les autres intervenants. Dans ce cadre, nous avons redéfini l'orientation de la Commission de la fonction publique. Je suis très fière de cette nouvelle orientation de la Commission et du travail que j'ai réalisé avec mon équipe pour instaurer des relations de travail différentes avec le gouvernement et les sous-ministres.

J'estime que tout ce que nous avons accompli en matière de délégation de pouvoirs et de rationalisation des opérations, même s'il reste encore beaucoup à faire, nous a mis sur la bonne voie et s'inscrira dans la durée. J'en suis très heureuse et très fière.

Je suis fière par ailleurs de l'ensemble de mon équipe. Nous sommes passés d'une organisation très critiquée à une organisation qui reçoit beaucoup de louanges. Avec la mise en place de programmes comme celui du recouvrement des coûts, d'un groupe de services et de cadres de politiques, et grâce à l'instauration de vérifications alors que rien n'existait jusqu'alors, nous pouvons dire que nous avons bien travaillé et j'en suis très fière.

Quelles sont les déceptions, lorsqu'on examine les choses avec du recul? Ce n'est qu'après coup que tout paraît facile. Je ne pense pas que nous ayons consacré suffisamment de temps au départ, ou que nous ayons bien évalué la quantité de temps et d'effort qu'il fallait consacrer à la formation et aux services de soutien et d'information qu'il convenait d'instaurer. Le changement des mentalités est énorme, l'adoption de nouvelles règles n'est pas la solution et je pense que nous aurions pu en faire plus. C'est le genre de choses que nous commençons à comprendre. Si je devais recommencer, il est certain que j'en ferai davantage dans ce domaine que je ne l'ai fait par le passé.

J'ai l'impression d'avoir négligé certaines parties de mon organisation dans un premier temps. Il est probable que les autres ne le voient pas, mais je n'ai pas accordé suffisamment d'attention et de temps, en m'y prenant suffisamment tôt, à mon groupe chargé des enquêtes, parce qu'il y a là des mécanismes très différents — la procédure de vérification et celle des enquêtes individuelles impliquant des droits individuels. Je pense que nous avons ce droit, mais au départ je n'ai pas accordé suffisamment d'attention à cette question.

Je dois ajouter que pour mener à bien tous nos projets, j'ai pu compter sur deux excellents commissaires à temps partiel, qui m'ont beaucoup aidée.

Le président : Vous vous êtes exprimée avec beaucoup d'éloquence.

Le sénateur Dickson : Merci de votre excellent exposé. Je vous renvoie pour commencer au rapport annuel. Sept grandes recommandations figurent expressément dans le rapport annuel. Je vais m'en tenir à une d'entre elles en vous demandant ce que vous en pensez.

Vous nous dites que le pourcentage de ministères et d'organismes fédéraux ayant bénéficié d'une bonne évaluation de rendement pour ce qui est des priorités et des stratégies de dotation — notamment en matière de planification — est passé de 15 p. 100 en 2007-2008 à 63 p. 100 en 2009-2010. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette évolution positive. La situation s'améliore et vous faites un excellent travail.

Mme Barrados : Les choses progressent en raison de mon action et de l'intervention des sous-ministres ainsi que du greffier.

Le sénateur Ringuette se souviendra de nos discussions des premiers temps. Elle nous demandait : combien y a-t-il de plans? Ils étaient très peu nombreux et chaque année elle nous posait la même question. Finalement, tout le monde a eu un plan et aujourd'hui nous parlons de la qualité de ces plans. J'ai indiqué que nous avions fait d'excellents progrès.

Le sénateur Dickson : Est-ce que l'on revoit ces plans lors des vérifications pour s'assurer que les mesures ont bien été prises et que les critères sont bien respectés?

Mme Barrados : Oui, cela fait partie de nos vérifications. On se penche sur les plans et les cadres d'action. Nous nous sentons très mal à l'aise lorsqu'un ministère n'a pas de plan et de cadre d'action. La Commission nationale des libérations conditionnelles n'a pas de plan et de cadre d'action et cela ne laisse pas de nous inquiéter.

Le sénateur Dickson : Les résultats obtenus doivent vous satisfaire. Je relève qu'aucune condition supplémentaire n'a été imposée aux organismes lors de la procédure de vérification en cours. C'est bien ça?

Mme Barrados : C'est exact, sauf en ce qui concerne la Commission nationale des libérations conditionnelles.

Le sénateur Murray : Je vais faire une ou deux observations et vous pourrez y répondre éventuellement.

Je suis d'accord avec le sénateur Runciman pour dire qu'il y a probablement un lien entre les 23 semaines qu'il faut en moyenne pour doter un poste et le fait que les gestionnaires ont recours de plus en plus souvent au personnel occasionnel et temporaire ainsi qu'à l'engagement de consultants. Le sénateur Marshall a d'ailleurs évoqué la question des postes non annoncés. Il se trouve qu'alors qu'il faut quelque 23 semaines pour pourvoir un poste annoncé, l'opération ne prend en moyenne que 13 semaines pour les postes non annoncés. Je crois que les deux choses sont liées.

Excusez-moi si je lis le résumé plutôt que le texte de votre rapport de vérification de 2010. Ces vérifications sont essentielles dans un monde où la délégation de pouvoirs est la norme. Il m'apparaît que vous n'en faites pas assez, probablement par manque de ressources. Je me penche sur celles que vous avez faites cette année. Deux ministères sont assez importants — Pêches et Océans Canada et Affaires indiennes et du Nord Canada — où la situation se révèle assez catastrophique puisqu'on relève des données manquantes ou inexactes dans la moitié des dossiers retenus pour la vérification. Les autres ministères et organismes sont relativement de petite taille — Bibliothèque et Archives Canada, Agence de promotion économique du Canada atlantique, Commission nationale des libérations conditionnelles, Agence spatiale canadienne, et cetera. Vous avez peut-être des observations à faire à ce sujet, mais j'estime qu'il vous faut procéder à davantage de vérifications dans un monde où la délégation de pouvoirs est la norme. Je crois me rappeler que vous nous avez dit, lors d'une précédente comparution devant notre comité, que la plupart des organismes et des ministères devaient s'attendre à être vérifiés tous les cinq à sept ans. Je me demande si cette fréquence est suffisante.

En lisant une partie de cette documentation, je me suis souvenu que lorsque l'ancien comité conjoint des langues officielles opérait au cours des années 1980, le commissaire des langues officielles de l'époque publiait son rapport annuel en répertoriant les ministères ou les organismes qui prenaient trop de temps à mettre en application la loi et pour lesquels des correctifs s'imposaient. Nous convoquions alors le ministre, ou plus généralement son sous-ministre, ainsi que les hauts fonctionnaires, pour leur demander des explications. Cela se fera bien après notre départ, le vôtre comme le mien, mais je me demande si notre comité, ou un autre, est prêt à envisager d'examiner votre rapport, d'étudier les domaines dans lesquels de nombreuses mesures doivent être prises, et faire en sorte que les ministères responsables viennent eux-mêmes rendre des comptes.

Enfin, je me joins au sénateur Gerstein pour vous remercier d'être venue aussi souvent collaborer avec notre comité et de tout le travail que vous avez accompli. Ces sept années ont été tout à fait remarquables dans l'existence de la commission. Je peux vous l'affirmer car cela fait longtemps que j'observe la situation. On va vous remplacer, je n'en doute pas, mais on aura bien du mal à trouver quelqu'un, ne disons pas meilleur, mais aussi bon que vous.

Mme Barrados : Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il y a un lien entre la durée de la dotation en personnel et le recours à l'aide temporaire et aux employés occasionnels. C'est pourquoi nous devons nous atteler à la question de la durée de la dotation.

Avons-nous suffisamment de vérifications? Nous avons un problème de capacité. Nous avons bâti une fonction de vérification à partir de rien jusqu'à disposer aujourd'hui d'un groupe de quelque 50 vérificateurs. Le sénateur Marshall n'ignore pas que ce n'est pas facile à faire. Nous avons procédé à davantage de petites vérifications, là où les risques ont tendance à être plus élevés. Nous passons maintenant aux plus grosses. Nous ne voulons pas en faire moins qu'à l'heure actuelle, mais n'oubliez pas que nous avons pris l'habitude de procéder régulièrement à des contrôles. Cela nous prend tout notre temps, d'une certaine façon.

Pour ce qui est de faire comparaître les sous-ministres devant le comité, les comités parlementaires ont toute latitude pour procéder comme ils l'entendent. Selon notre modèle d'organisation, c'est à moi, en tant que représentante de la commission, que les pouvoirs de correction sont confiés. Les questions qu'il faut se poser sont les suivantes : sommes- nous allés suffisamment loin? Avons-nous imposé les pouvoirs de correction appropriés? Si un responsable ne respecte pas les règles, nous pouvons annuler tous les pouvoirs. Si une opération de dotation se révèle complètement erronée, nous pouvons révoquer la nomination. Nous pouvons renvoyer une personne de la fonction publique. Nous disposons de ces pouvoirs de correction.

Le sénateur Murray : C'est une bombe nucléaire.

Mme Barrados : Oui, mais nous avons retiré des délégations de pouvoirs et nous avons renvoyé des gens — pas beaucoup, cependant. Il faut poser aux responsables de la commission, présents et à venir, la question suivante : que faites-vous pour exercer ces pouvoirs au nom du Parlement?

Le sénateur Ringuette : Je pense que nous comprenons tout l'intérêt de votre travail depuis que vous avez pris en charge la CFP. À la suite du rapport Barrados, nous allons entendre les fonctionnaires du Conseil du Trésor et de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, ce qui nous permettra de mieux connaître la situation.

Madame Barrados, dans une entrevue publiée par l'Ottawa Citizen, vous avez déclaré que cette tendance à l'augmentation du nombre d'employés temporaires était préoccupante et pouvait remettre en cause l'intégrité de la procédure de dotation en personnel. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?

Mme Barrados : La tendance à la hausse des employés temporaires pour des besoins temporaires ne me pose aucun problème. Nous avons cependant enregistré une augmentation du recours aux employés temporaires pour des besoins à long terme et dans le cadre de relations de travail permanentes. Il y a là un danger lorsque s'instaurent ce genre de relations, ce qui m'inquiète. C'est pourquoi j'ai dit qu'il y avait un risque.

Le sénateur Ringuette : Vous avez déclaré dans le rapport que les ministères étaient devenus si dépendants des employés temporaires que c'était devenu une « main-d'œuvre supplémentaire » au sein du gouvernement qui tourne les dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique régissant l'ensemble de la fonction publique.

Mme Barrados : C'est exact. Si vous me demandez combien de personnes travaillent à Ottawa, je vais vous fournir le nombre d'employés relevant des dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Elles sont 216 000 qui relèvent de mes responsabilités. Ce chiffre n'englobe pas les employés temporaires qui sont engagés par le biais des agences de services temporaires parce que cela se fait par la voie des contrats.

Le sénateur Ringuette : L'étude relève que 73 p. 100 des employés temporaires de votre échantillon ont fini par obtenir des emplois à durée limitée ou permanents qui auraient dû être annoncés.

Mme Barrados : Je crois que ce chiffre est d'un employé sur cinq.

Le sénateur Ringuette : L'article parle de 73 p. 100.

M. Hunt : Nous avons indiqué que c'était une erreur.

Le sénateur Ringuette : Bien. Est-ce qu'on a apporté une correction?

Mme Barrados : Nous n'avons jamais donné ce chiffre. Il est de un sur cinq, selon mes calculs.

Le sénateur Ringuette : Il est de 20 p. 100.

Vous avez déclaré que les dépenses consacrées aux agences d'emploi temporaire avaient explosé ces dernières années, qu'elles avaient triplé.

Mme Barrados : Je n'ai pas dit non plus qu'elles avaient « explosé ».

Le sénateur Ringuette : Le journaliste a parlé de dépenses qui avaient explosé.

Depuis que la politique visant à supprimer les obstacles géographiques dans le cadre de la dotation a été mise en place, le nombre de personnes se portant candidates à ces postes annoncés qui n'habitent pas la région de la capitale nationale a-t-il explosé?

Mme Barrados : Effectivement, et il y a eu aussi une forte augmentation des nominations. Ces nominations ont progressé d'environ 20 p. 100 et la nouvelle politique a véritablement eu un impact.

Le sénateur Ringuette : Bravo. Est-ce que votre système de banques de données et de consultation par Internet annonce les postes à différentes catégories de personnes?

Mme Barrados : Oui.

Le sénateur Ringuette : Pour quelle raison les ministères n'ont pas recours à cet outil précieux? Dans l'ensemble, si ma mémoire est bonne, le contribuable canadien a consacré quelque chose comme 47 ou 48 millions de dollars supplémentaires sur cinq ans à l'amélioration de la technologie au sein de la commission. Les agences de services temporaires auxquelles on s'adresse ne créent que leurs propres bassins de personnel et, par conséquent, pourquoi ne pas se servir de ce qui a déjà été payé par le contribuable, en l'occurrence votre système, pour créer ces réservoirs de main-d'œuvre et engager avec une certaine forme d'impartialité les personnes cherchant à travailler à titre temporaire dans tout le pays?

Mme Barrados : Il faut faire appel entre autres au site Internet sur les emplois, de sorte qu'il y a une ou deux choses que nous n'avons pas déléguées. Tous les ministères du gouvernement qui relèvent de nos responsabilités doivent annoncer les emplois qu'ils offrent sur ce site Internet; ils n'ont pas le choix. Ils peuvent le faire ailleurs aussi, mais là c'est obligatoire.

Vous avez bien fait de poser cette question sur les bassins de main-d'œuvre. Nous avons mis en place un certain nombre de bassins. On s'efforce d'en faire davantage. Le responsable en chef des ressources humaines fait tout son possible pour qu'on y parvienne, et vous allez donc voir à mon avis des améliorations. Je le souhaite sincèrement, mais tout indique que c'est dans cette voie que les responsables veulent s'engager.

Vous avez évoqué le problème de la technologie, et cela me donne l'occasion de vous rappeler que j'ai réussi à obtenir le financement permanent de nos services de technologie. J'ai évoqué la question à plusieurs reprises au sein de ce comité. Je dispose d'un financement permanent provenant directement des ministères qui payent pour utiliser cette technologie et nous nous doutons de cette même technologie dans le cadre de nos mécanismes internes, de sorte que nous faisons d'excellents progrès.

Le sénateur Ringuette : Travaux publics est-il au courant du fait que les contrats passés à l'extérieur et que les offres permanentes doivent transiter par votre système, qui a déjà été payé par le contribuable?

Mme Barrados : Travaux publics est intégré à notre système et j'en discute régulièrement avec le sous-ministre.

Le sénateur Callbeck : J'aimerais avoir quelques précisions sur les programmes pour les étudiants. Nous avons parlé de la campagne de recrutement. J'aimerais que vous m'indiquiez combien d'entre eux ont été effectivement engagés en me précisant les chiffres par province sur les cinq dernières années.

De même, on voit figurer à la page 165 les candidats à un autre programme, le Programme fédéral d'expérience de travail étudiant, et j'aimerais là aussi savoir combien d'entre eux ont été engagés sur cinq ans dans chaque province.

Je ne vois ici aucun tableau correspondant au Programme de stages d'enseignement coopératif et d'internat. Les chiffres figurent peut-être, mais je ne les ai pas vus, et j'aimerais avoir l'équivalent pour ce programme.

Mme Barrados : Oui, nous le ferons pour vous.

Le sénateur Callbeck : Je tiens à vous féliciter, madame Barrados, pour l'excellence et l'utilité de votre travail pendant ces sept années.

Mme Barrados : Je vous remercie.

Le président : Madame Barrados, combien d'employés avez-vous à la Commission de la fonction publique?

Mme Barrados : Un millier.

Le président : Quel est votre budget total?

Mme Barrados : Il est de 93 millions de dollars.

Le président : Merci. Nous avons dépassé le temps qui nous était imparti. Vous pouvez voir que notre comité s'intéresse à vos travaux et à quel point nous les apprécions. Je ne pourrais jamais vous dire avec autant d'éloquence que les sénateurs Gerstein, Murray et leurs collègues combien nous avons apprécié votre aide au fil des années. Il est bien possible que nous vous parlions à nouveau au printemps. Il nous reste encore du temps, et je crois qu'il nous faut examiner la question fondamentale de la délégation de pouvoirs. Vous avez réussi à faire marcher cette formule, mais ne faudrait-il pas revenir sur son principe et nous dire qu'effectivement elle marche mais qu'il nous faut nous demander s'il convient de la conserver.

Auparavant, vous procédiez à toutes les embauches et vous assuriez le contrôle du personnel au sein de votre groupe. Aujourd'hui, vous avez délégué ces pouvoirs et vous assurez la supervision. Est-ce bien efficace? L'objectif consistant à donner davantage de latitude aux sous-ministres en ce qui a trait à la gestion de leurs différents ministères, y compris en matière d'embauche, compense-t-il le manque d'efficacité qui en est la conséquence évidente? Ce sont là des questions qu'il nous faut aborder.

Mme Barrados : Si vous me le permettez, monsieur le président, je suis persuadée en fait que c'est le bon modèle parce que les sous-ministres sont responsables de très grosses organisations. Certaines d'entre elles emploient 40 000, 23 000 ou 24 000 personnes. Ce sont eux les gestionnaires et ils doivent disposer des outils pour assurer la gestion. Je le disais à l'époque où je faisais de la gestion financière et je le dis aussi pour la gestion des RH.

Le problème est de savoir comment garantir au mieux l'intégrité et les objectifs de notre loi, je pense que nous sommes dans la bonne voie, mais nous pourrions avoir de bonnes discussions à ce sujet.

Le président : Vous avez tout à fait raison et nous espérons bien avoir ce genre de discussion en attendant le mois de mai 2011. Pour aujourd'hui, au nom du Comité sénatorial permanent des finances nationales, je tiens à vous remercier, vous et vos collègues, M Lemaire et M Hunt, d'être venus nous expliquer plus en détail les tâches importantes que vous accomplissez pour nous aider à mieux faire notre travail.

La séance est levée.


Haut de page