Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 4 - Témoignages du 14 juin 2010


OTTAWA, le lundi 14 juin 2010

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne auquel a été déféré le projet de loi S-4, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situés dans ces réserves, se réunit aujourd'hui, à 16 heures, pour en faire l'examen article par article.

Le sénateur Janis G. Johnson (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Nous poursuivons l'étude article par article du projet de loi S-4.

Nous reprenons à l'article 21, dont nous avons reporté l'étude à aujourd'hui. Le sénateur Jaffer proposera un amendement.

Le sénateur Jaffer : Je propose un amendement, dont le texte a circulé, pour remplacer la ligne 30 comme suit :

conjoint de fait, qu'il soit ou non membre d'une première nation ou Indien, le juge désigné de la province où est situé le foyer familial peut, aux [...]

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Le sénateur Nancy Ruth : Non.

La présidente : La motion est rejetée.

Le sénateur Nancy Ruth proposera un deuxième amendement.

Le sénateur Nancy Ruth : À l'article 21? N'y touchez pas. Que me demandez-vous?

La présidente : Quatre amendements sont reportés de la semaine dernière. Ils concernent l'article 21, aux pages 12, 13 et 14.

Le sénateur Nancy Ruth : Je propose un amendement à l'article 21, page 12, ligne 30, comme suit :

conjoint de fait, le juge désigné de la province où est situé le foyer familial peut, aux

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : La motion est adoptée.

Le sénateur Jaffer proposera un troisième amendement.

Le sénateur Jaffer : Également à l'article 21, je propose un autre amendement, à la page 12, qui consiste à substituer aux lignes 32 et 33 ce qui suit :

— dont la durée maximale est de cent quatre-vingts jours — qui contient une ou plusieurs des

Pour le remplacement de 90 jours par 180 jours, j'aimerais que le comité tienne compte de l'endroit où peuvent vivre ces personnes et des difficultés que peut représenter pour elles le fait de se présenter à nouveau devant le tribunal. Le juge conserve son pouvoir discrétionnaire, mais la durée maximale de l'ordonnance pourrait être de 180 jours.

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Le sénateur Andreychuk : Non.

La présidente : La motion est rejetée.

Le sénateur Nancy Ruth proposera un quatrième amendement.

Le sénateur Nancy Ruth : L'article 21 est modifié à la page 13, par remplacement de la ligne 14 par ce qui suit :

désigné accordée conformément aux règlements

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : La motion est adoptée.

Le sénateur Nancy Ruth proposera un cinquième amendement.

Le sénateur Nancy Ruth : Je propose de modifier l'article 21, page 13, par ajout, après la ligne 34, de ce qui suit :

e.1) la période pendant laquelle le demandeur a habituellement résidé dans la réserve;

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : Le sénateur Nancy Ruth proposera un sixième amendement.

Le sénateur Nancy Ruth : Je propose de modifier l'article 21 par substitution à la ligne 44, page 14, de ce qui suit :

graphe (6) soit directement, soit, si le tribunal de la province où le juge désigné a compétence l'autorise, par signification indirecte dans les circonstances, de la manière et aux conditions prévues par règlement; dès qu'il fait la signification, il en

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Le sénateur Jaffer : Je la conteste. Si vous vous rappelez, j'ai demandé à voir le texte du règlement. Dans cette motion, on renvoie au règlement. Nous n'en avons pas vu le texte. Si je comprends bien, on ne nous le communiquera pas. Nous avons reçu une note selon laquelle il ne sera pas divulgué. Nous devons nous prononcer sans même connaître la teneur du règlement.

Line Paré, directrice générale, Direction générale des relations extérieures et problématiques hommes-femmes, Affaires indiennes et du Nord Canada : Nous avons communiqué le projet de règlement au comité.

La présidente : En effet.

Le sénateur Jaffer : La note que j'ai reçue mentionnait que le règlement ne pouvait pas être communiqué parce qu'on ne l'avait pas encore montré au peuple autochtone avec qui vous discutez.

Je n'ai pas vu le règlement. Puis-je en avoir un exemplaire?

Mme Paré : Oui, nous sommes heureux de vous en remettre des exemplaires. Le comité nous a demandé si nous avions un projet de règlement. Nous avons été heureux de le lui communiquer.

Nous voulons le communiquer aux provinces, demander leurs impressions, puis contacter les organismes autochtones.

Le sénateur Jaffer : On ne nous l'a pas remis. Je vous assure que nous ne l'avons pas reçu. C'est la première fois que je le vois. Je connais bien le dossier. La note que j'ai reçue — je la cherche — disait que nous ne pouvions pas en prendre connaissance.

Karl Jacques, avocat-conseil, ministère de la Justice Canada : Voici un exemplaire montrant la traduction en regard. C'est le mien. Les exemplaires fournis étaient unilingues.

La présidente : D'après ce que j'ai compris, on peut habituellement mettre la main sur ces règlements après avoir terminé son travail?

Le sénateur Andreychuk : Dans beaucoup de comités, nous en faisons souvent la demande et, si c'est possible, on nous les communique. Sinon, il y a le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation. Nous avons souvent demandé, de façon officieuse, que les ministères nous tiennent informés de leurs règlements pour que nous puissions les commenter et participer plus activement à leur élaboration.

Je pensais que c'est ce que nous ferions dans le cas qui nous occupe. Nous savons que des consultations doivent avoir lieu. Nous avons vu les premières ébauches, et nous continuerons de le surveiller très étroitement.

La présidente : C'est l'information que je possède également.

Le sénateur Jaffer : Concernant ma demande d'un exemplaire de l'ébauche de règlement, la réponse que j'ai reçue était que le projet de règlement n'avait pas été communiqué aux Premières nations ni aux provinces. Aucun règlement n'est annexé à cette note. C'est ce que j'ai reçu.

Mme Paré : Il est mentionné comme annexe à la note.

Le sénateur Jaffer : L'annexe n'était pas la version intégrale du règlement. Nous ne l'avons pas reçu. De toute manière, poursuivons.

La présidente : Sénateur Jaffer, d'autres membres ont reçu le projet de règlement. C'est malheureux pour vous. Nous l'avons reçu dans un dossier distinct.

Êtes-vous d'accord pour adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 21 modifié est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : Reprenons les discussions sur l'article 26.

Le sénateur Nancy Ruth : Je propose que l'article 26 soit modifié par substitution, à la ligne 8, page 21, de ce qui suit :

d) les droits collectifs des membres des premières nations sur leurs terres de réserve et les observations que le conseil de la

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : Article 26. Sénateur Jaffer, avez-vous un amendement à proposer?

Le sénateur Jaffer : J'ai un amendement pour l'article 26, page 20. Je propose de substituer aux lignes 30 à 32 ce qui suit :

« 26. (1) Sur demande du survivant membre de la première nation dans la réserve de laquelle est situé le foyer familial, le tribunal peut, par ordonnance, lui ».

Cet amendement vise à empêcher un non-Autochtone d'obtenir un intérêt sur la réserve. C'est sa raison d'être.

Le sénateur Andreychuk : Pourriez-vous lire le passage ainsi modifié?

Le sénateur Jaffer : Bien sûr. C'est au début de l'article 26 :

Sur demande du survivant membre de la première nation dans la réserve de laquelle est situé le foyer familial, le tribunal peut, par ordonnance, lui.

On supprime donc le passage « qu'il soit ou non membre d'une première nation ou Indien », qui instituerait des droits sur les réserves pour les non-Autochtones. Bien respectueusement, je prétends que ce n'est pas l'objectif que nous visons. C'est pourquoi je propose cet amendement.

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion? Voulez-vous en discuter davantage?

Le sénateur Nancy Ruth : J'aimerais qu'on me l'explique.

M. Jacques : Cet amendement modifie ce que dit le projet de loi. Il accorde aux survivants, qu'ils soient ou non membres d'une Première nation la possibilité de demander le droit exclusif d'occuper le foyer familial. La différence est que l'article 25 porte sur les ordonnances en réponse à une demande consécutive à la dissolution du mariage, tandis que l'article 26 vise l'ordonnance en cas de décès. On établirait cette distinction.

Le président : Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord avec la motion?

Des voix : Non.

La présidente : La motion est rejetée. L'article 26 modifié est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 27 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 28 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 29 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 30 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Nancy Ruth : Je propose un amendement pour l'article 31, page 23, aux lignes 35 à 37. Il se lit comme suit :

époux, conjoint de fait survivant qui n'est pas partie au bail visant le foyer familial, cet époux, conjoint de fait ou survivant est lié par le bail pendant la

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 31 modifié est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 32 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 33 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 34 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 35 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 36 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 37 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 38 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 39 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 40 est-il adopté?

Le sénateur Jaffer : Puis-je proposer l'adoption des articles 40 à 50?

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

La présidente : Le sénateur Nancy Ruth propose l'adoption d'un nouvel article.

Le sénateur Nancy Ruth : Après l'article 50, à la page 40, je propose d'ajouter après la ligne 12, l'article 50.1, qui comporte deux paragraphes. Cet article se lit comme suit :

(1) Toute ordonnance rendue en vertu de la présente loi dans le cadre d'une action en divorce au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur le divorce est réputée, pour l'application de l'article 21 de cette loi, être une ordonnance rendue en application de cette loi.

(2) Il peut être interjeté appel de toute autre ordonnance rendue en vertu de la présente loi — exception faite des articles 21 à 24 — devant le tribunal qui connaît des appels formés contre les décisions du tribunal ayant rendu l'ordonnance.

Cette disposition concerne le droit d'appel dans le cadre d'une action en divorce.

Le sénateur Kochhar : S'agit-il de l'ajout d'un paragraphe?

Le sénateur Nancy Ruth : C'est l'ajout de tout un article.

Le sénateur Kochhar : Aux alinéas 50a) et 50b)?

Le sénateur Nancy Ruth : Il s'agit des paragraphes 50.1(1) et 50.1(20).

Le sénateur Kochhar : Les paragraphes 50(1) et 50(2) existent déjà.

Le sénateur Nancy Ruth : Il s'agit du paragraphe 50.1(1).

Le sénateur Jaffer : Je ne comprends pas. Peut-on m'expliquer pourquoi le droit d'appel ne s'applique pas aux articles énumérés?

M. Jacques : Habituellement, il faut mentionner le droit d'appel. C'était donc une précision à apporter. D'après l'amendement, lorsqu'une ordonnance est rendue dans le cadre d'une action en divorce, on peut interjeter appel en vertu de la Loi sur le divorce, comme si on faisait appel du divorce. C'est l'objet du paragraphe 1. D'après le paragraphe (2), on peut, dans tout autre cas où il n'y a pas d'action en divorce, interjeter appel des ordonnances devant un tribunal compétent.

La présidente : Merci, monsieur Jacques. Honorables sénateurs, voulez-vous adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 51 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 52 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 53?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 54?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 55?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 56?

Des voix : D'accord.

La présidente : Nous avons un amendement pour l'article 57.

Le sénateur Nancy Ruth : Je propose de modifier l'article 57, à la page 43, par substitution, à la ligne 6, de ce qui suit :

présente loi et en vue de prendre toute mesure d'ordre réglementaire prévue par celle-ci.

C'est à la fin du paragraphe.

Le sénateur Andreychuk : Est-ce une modification au paragraphe 57(1) ou au paragraphe 57(2) ou bien, encore, est-ce un ajout à l'un de ces paragraphes?

Le sénateur Nancy Ruth : J'ajoute la modification à la fin du paragraphe 57(1).

La présidente : Vous remplacez la ligne 6 de la page 43?

Le sénateur Nancy Ruth : J'ajoute le texte à la fin.

La présidente : Est-ce que les membres sont d'accord pour adopter la motion?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 57 modifié est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : Article 58. Y sommes-nous? Est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : Articles 59 et 60? Le sénateur Jaffer propose un amendement.

Le sénateur Jaffer : J'ai un amendement pour l'article 60, à la page 44, qui consiste à substituer aux lignes 31 à 34 ce qui suit :

60. La présente loi entre en vigueur trois ans après la date de sa sanction.

Cet amendement a été demandé par le sénateur Dyck, qui, malheureusement, assiste à une réunion du Comité des affaires sociales.

Elle estime — et je suis d'accord avec elle — que la plupart des lois de ce type sont assorties de cette période de transition. Cette période serait utile, car beaucoup de dispositions ne sont pas prêtes à être appliquées. Par exemple, les ressources destinées au centre ne sont pas en place. C'est pourquoi nous proposons cette transition de trois ans.

La présidente : Y a-t-il d'autres observations? Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Le sénateur Brazeau : Non.

La présidente : La motion est rejetée.

Sénateur Jaffer, vous avez un nouvel article à proposer.

Le sénateur Jaffer : Oui, en effet. C'est une disposition de non-dérogation, souvent utilisée dans ce type de loi. J'aimerais ajouter à l'article 2, page 5, après la ligne 18, ce qui suit :

2.1 Il est entendu que la présente loi ne porte pas atteinte aux droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada visés à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

J'aimerais ajouter cette disposition de dérogation.

La présidente : Quelqu'un aimerait-il faire des observations?

Le sénateur Mitchell : J'appuie l'amendement. Premièrement, il en existe toutes sortes de précédents; deuxièmement, le gouvernement conservateur n'a jamais, ne serait-ce un instant, laissé entendre qu'il souhaitait abroger des droits existants. L'amendement est une formule utile qui rappelle cet engagement et qui, à tout le moins, sécurise les peuples autochtones.

Si le gouvernement est sérieux, il ne perd rien à l'accepter. Toutefois, l'amendement rassure les peuples autochtones qui, manifestement, craignent que nous ne leur imposions notre vision des droits individuels, aux dépens de leurs droits collectifs.

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour adopter la motion?

Le sénateur Andreychuk : Je suis simplement curieuse, sénateur Jaffer. Nous parlons d'intérêts matrimoniaux sur la réserve. C'est un peu comme lorsque nous, les femmes, avons commencé à nous battre pour affirmer nos droits. J'ai eu l'impression de revivre cette situation.

Une grande partie de la discussion et des arguments a concerné la préséance de l'article 35 de la Charte des droits ou des articles concernant l'égalité des sexes. Pour moi, c'était une question d'équilibre. Cette disposition équivaut à accorder la préséance à l'article 35, pour départager des droits concurrents, même dans le coutumier. Êtes-vous de cet avis?

Le sénateurJaffer : Nous instituons ici des droits pour le peuple non autochtone sur les réserves, et je tiens à m'assurer que nous n'abandonnons aucun des droits du peuple autochtone. Cet amendement que je propose vise à assurer la protection des droits dont jouit déjà tout le peuple autochtone.

Le sénateur Andreychuk : C'est pourquoi le gouvernement a proposé ses amendements, pour assurer la prise en considération des droits de propriété, en particulier, et des droits existants, en général, de la collectivité. Je crains énormément que votre amendement ne menace cet équilibre et, par conséquent, que les objectifs que se donne le projet de loi ne soient pas atteints.

Le sénateur Jaffer : Après en avoir discuté, nous avons convenu de remettre les droits collectifs dans ce projet de loi. Je crois que cette disposition assurera davantage la pérennité des droits du peuple autochtone, considéré comme un tout, parce que nous aurons créé des droits pour les non-membres sur la réserve.

Le sénateur Mitchell : Je suis bien sûr intéressé à l'argument du sénateur. N'est-ce pas qu'elle sera sensible à l'impossibilité, en dépit de tous les efforts qu'on y mettrait, de tenir pleinement compte de chacun des droits du peuple autochtone qui, dans le projet de loi, pourrait être menacé ou négligé. L'évolution du droit et de la jurisprudence ne permet pas de savoir lesquels de ces droits pourraient subir une érosion.

Si tous ces amendements visent à éviter que les droits des Autochtones soient bafoués, pourquoi ne pas franchir un pas de plus et, grâce à une disposition générale, interdire qu'ils le soient?

Le sénateur Andreychuk : Cette interdiction, ce sera aux autorités des Premières nations d'en décider, lorsqu'elles élaboreront leur plan en conséquence. Comme, toutefois, le projet de loi tient compte de la propriété matrimoniale, votre amendement en remet en question tout le sens.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais que vous m'expliquiez. Je ne vois pas.

Êtes-vous en train de dire que cet article, qui vise à protéger les droits du peuple autochtone, remet en question tout le projet de loi? N'apportez-vous pas ainsi de l'eau à notre moulin?

Le sénateur Andreychuk : Non, tout au contraire. Selon le projet de loi, les Premières nations déterminent les biens matrimoniaux d'après leurs coutumes, et cetera. Si elles ne le font pas, une formule prescriptive est prévue à titre provisoire ou autrement. C'est une assurance pour les enfants, notamment, et, actuellement, cet aspect m'inquiète davantage. Essentiellement, le projet de loi s'attaque à la violence domestique, il accorde une protection aux enfants ainsi qu'au partenaire ou au conjoint qui n'est pas l'instigateur de la violence.

Je tiens au maintien de cet aspect. Je tiens à ce que les droits collectifs restent intacts. D'où la nécessité de tous les amendements apportés aux diverses dispositions du projet de loi. Si nous avons oublié quelque chose, mettez le doigt dessus; je suis prête à proposer un autre amendement.

Le sénateur Mitchell : Je n'oserais présumer que je pourrais ou que quelqu'un d'autre pourrait prévoir tous les cas. C'est pourquoi nous tenons à cette disposition.

Le sénateur Andreychuk : Votre disposition de non-dérogation n'a pas cet effet.

Le sénateur Mitchell : Nous aimerions nous en assurer. Vous apportez ensuite l'argument selon lequel, en quelque sorte, les peuples autochtones légiféreront. Pourquoi donc abrogeraient-ils leurs propres droits? Le fait est que c'est eux qui nous demandent ce type de disposition. Ils se méfient du projet de loi.

Le sénateur Andreychuk : J'aimerais savoir qui d'autre que nos témoins vous a demandé cette disposition. Vous liez les mains aux Premières nations, je le crains, pour qu'elles adoptent le type de système qu'elles croient le mieux correspondre aux intérêts de leurs membres.

Le sénateur Mitchell : Elles-mêmes réclament cette disposition. Elles ne doivent donc pas faire entièrement confiance au projet de loi. Elles n'ont pas subdivisé ses disposition entre celles qui concernent le rôle fédéral, son application de ce que vous appelez une disposition provisoire — qui restera en vigueur encore 100 ans parce que ces nations n'auront pas la capacité de promulguer leurs propres projets de loi — et ce que vous appelez leur obligation. Même si vous ne vous inquiétez pas, ici, pour l'obligation des peuples autochtones, leurs dirigeants et leur rôle, elles continuent de se faire nettement du souci à cause de l'autre facette du projet de loi, et je vous conseillerais d'en faire autant.

En outre, vous n'utilisez plus les mêmes arguments. Vous parlez maintenant de la protection des enfants. Dites-vous qu'il faut abroger des droits pour protéger les enfants?

Le sénateur Andreychuk : Je dis que je veux un équilibre des droits en vertu de la Charte, un point c'est tout.

Le sénateur Mitchell : D'accord. Mais une définition est nécessaire. Enfin, vous avez parlé de violence familiale. Le sénateur Nancy Ruth est d'avis que ce projet de loi n'a rien à voir avec la violence familiale, mais que la violence familiale continue de renaître. Clarifions les choses : ce projet de loi ne s'attaquera pas à la violence familiale. Il ne la réduira pas. Ce n'est pas un substitut pour les mesures et les programmes qui interviendront auprès des gens, à un niveau personnel.

Le sénateur Andreychuk : Personne ne prétend cela.

Le sénateur Mitchell : Vous en avez parlé.

Le sénateur Andreychuk : Non, je parle de familles en crise. Il existe de nombreuses définitions au mot « violence ». Vous parlez de violence familiale; je parle de violence émotive et de nombreux types de violence. Une famille en train d'éclater est aux prises, de tous côtés, avec des traumatismes. Nous devrions essayer de l'aider à résoudre rapidement ses problèmes. C'est cela la résolution des différends.

Le sénateur Brazeau : Je tiens à dire qu'il est superflu d'ajouter une disposition de non-dérogation, parce que la loi fondamentale du pays, la Constitution, à l'article 25, possède déjà la clause suprême de non-dérogation, tandis que l'article 35 de la Charte protège nos Autochtones et les droits conférés par traité. C'est de la redondance à son maximum.

La présidente : Êtes-vous d'accord pour adopter la motion?

Des voix : Avec dissidence.

La présidente : L'article 1, qui énonce le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : Oui.

La présidente : Le préambule est-il adopté?

Des voix : Oui.

La présidente : Est-ce que le titre est adopté?

Des voix : Oui.

La présidente : Le projet de loi modifié est-il adopté?

Des voix : Oui.

La présidente : Le projet de loi est adopté.

Le sénateur Jaffer : Avec dissidence.

La présidente : Êtes-vous d'accord pour que je fasse rapport du projet de loi modifié au Sénat?

Des voix : D'accord.

La présidente : C'est ainsi que se terminent nos travaux d'aujourd'hui, à moins que quelqu'un ne veuille discuter de quelque chose. Nous ferons rapport au Sénat demain, et, mercredi, les sénateurs Nancy Ruth et Jaffer commenteront le projet de loi.

Le sénateur Andreychuk : Lundi, qu'y a-t-il à l'ordre du jour?

La présidente : Vous en serez avisés.

Le sénateur Andreychuk : En temps et lieu?

La présidente : D'ici demain. Nous attendons une dernière traduction. Nous siégeons probablement lundi.

(La séance est levée.)


Haut de page