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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Droits de la personne

Fascicule 12 - Témoignages


OTTAWA, le lundi 21 mars 2011

Le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se réunit aujourd'hui, à 16 h 10, afin de surveiller l'évolution des diverses questions ayant trait aux droits de la personne et d'examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne (sujet : programmes fédéraux de soutien aux activités sportives et récréatives pour enfants et adolescents handicapés).

Le sénateur Nancy Ruth (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Nous formons le Comité sénatorial permanent des droits de la personne et nous examinons les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales. Plus particulièrement, nous nous penchons sur les programmes fédéraux de soutien aux activités sportives et récréatives pour enfants et adolescents handicapés.

Cet après-midi, nous allons entendre des représentants de Natation Canada, d'Athlétisme Canada et de l'Association canadienne des sports pour aveugles.

Pour votre information, chers collègues sénateurs, quand nous en aurons terminé avec nos témoins, nous allons poursuivre nos délibérations à huis clos pour examiner le rapport sur l'exploitation sexuelle.

Mark Hahto, chef des opérations, Natation Canada : Merci et bon après-midi à tous.

J'occupe le poste de chef des opérations à Natation Canada depuis environ quatre ans. Auparavant, j'ai travaillé à l'administration provinciale du sport pour la Colombie-Britannique, mais j'ai d'abord été entraîneur de carrière pendant 25 ans. J'ai eu la chance de travailler avec beaucoup de nageurs handicapés pendant ma carrière d'entraîneur. Depuis sept ans, une grande partie de mon rôle administratif consiste à gérer la complexité des programmes et des services que nous offrons à nos athlètes handicapés.

C'est avec beaucoup de plaisir que je viens vous parler de la paranatation. Il y a quelques années, nous avons commencé à utiliser le terme « nageurs handicapés » plutôt que « paranatation ». Natation Canada est extrêmement fière des programmes qu'elle offre à nos para-athlètes. J'en parle avec énormément d'enthousiasme et de plaisir, puisque je sais exactement qui sont les personnes qu'ils visent : les entraîneurs, les athlètes, les arbitres et les bénévoles, qui jouent tous un rôle essentiel à leur succès.

La vision de Natation Canada est Nager pour gagner; gagner pour la vie! Elle reflète bien notre conviction que les médailles comptent. Il est important pour la culture de la natation canadienne que nous obtenions des médailles aux Jeux paralympiques, aux Mondiaux de para-athlétisme, aux Jeux olympiques et aux championnats juniors mondiaux. Notre plan stratégique illustre bien que la performance est très importante et que les médailles comptent.

Nous croyons aussi que notre vision Nager pour gagner; gagner pour la vie renvoie à l'excellence personnelle et qu'elle se veut une valeur fondamentale que nous voulons transmettre à nos jeunes, à nos athlètes, pour qu'ils les portent en eux toute leur vie. Tous nos membres et tous nos collaborateurs adhèrent à 100 p. 100 à cette vision.

En 2009, nous avons eu la fierté de célébrer notre 100e anniversaire. Nous en sommes maintenant à notre 102e année, et il ne fait aucun doute que nous serons encore là dans 100 ans. Nous avons de superbes icônes de la natation non handicapée comme Alex Baumann, Ryan Cochrane et Mark Tewksbury, ainsi que des para-athlètes phénoménaux comme Michael Edgson, Benoit Huot, Liz Walker et Jessica Sloan. Nous avons connu de grands succès. Ces personnes ont fait naître un rêve chez beaucoup de jeunes nageurs qui ont décidé de s'investir dans notre sport. Ils insufflent un potentiel de réalisation incroyable grâce à leurs propres résultats.

Natation Canada est une grande organisation qui regroupe près de 40 000 nageurs de moins de 25 ans. Nous avons environ 38 000 membres, et je m'attends à ce que nous dépassions le cap des 40 000 cette année. Nous avons plus de 15 000 maîtres nageurs. Un maître nageur est un nageur de plus de 25 ans, et je pense que notre maître nageur le plus vieux a environ 100 ans. Nous avons des programmes « du berceau à la tombe ». Nous regroupons 3 000 entraîneurs professionnels, 30 000 bénévoles et 425 clubs de natation à l'échelle du Canada. Nous sommes très fiers des 400 athlètes handicapés qui participent à notre programme.

La paranatation est issue de plusieurs mouvements qui ont vu le jour dans les années 1940 et 1950, et qui ont finalement donné naissance à l'âge moderne du mouvement paralympique. Natation Canada a été la première organisation sportive nationale intégrée au Canada, et c'est une chose qui nous tient encore très à cœur aujourd'hui. L'intégration est fondamentale dans le sport au Canada. La paranatation et la natation pour personnes non handicapées sont intégrées, comme je vais vous l'expliquer dans un instant.

Les quatre piliers de notre vision de la natation pour les personnes handicapées sont les suivants : premièrement, ils doivent être en sécurité dans l'eau, nous faisons tout ce que nous pouvons pour assurer la sécurité de tous les participants. Deuxièmement, c'est la philosophie selon laquelle la personne est avant tout un athlète. Tous les nageurs handicapés inscrits à notre programme sont d'abord et avant tout des athlètes. Chaque nageur doit être traité comme n'importe quel autre nageur, comme une personne et finalement, comme une personne handicapée. Quand un para- athlète adhère à notre programme, nous le voyons comme n'importe quelle autre personne, comme un athlète. Nous croyons à l'autonomie, nous croyons aux valeurs que nous leur insufflons et nous croyons qu'il en résultera un mode de vie grandement amélioré pour nos athlètes.

L'un des grands atouts de notre programme, et nous en sommes très fiers, c'est que nous pouvons offrir à nos nageurs handicapés la possibilité de compétitionner dans un environnement adapté à leurs besoins. Beaucoup de nos paranageurs participent à pratiquement tous les aspects de notre programme et sont totalement intégrés aux groupes de nageurs non handicapés. Nous avons aussi quelques programmes particuliers en raison des limites que leurs handicaps posent à certains athlètes.

Nous sommes très fiers qu'en 2008, Natation Canada ait accueilli les premiers essais combinés olympiques et paralympiques. Cela a donné une visibilité exceptionnelle à tous nos athlètes, et c'est une chose très importante pour nous.

La natation est reconnue comme faisant partie des trois sports de base. Le ski de M. Sawicki est le deuxième et la gymnastique, le troisième. C'est ce qui se dégage des documents produits par le mouvement Au Canada, le sport c'est pour la vie, sur le développement à long terme de l'athlète. Nous sommes d'ailleurs en train de réévaluer exactement ce que nous faisons pour le développement à long terme de l'athlète.

En avril, nous allons rassembler tous les acteurs du sport aquatique, les groupes de personnes handicapées, avec qui nous avons un partenariat très fructueux, ainsi que toutes les associations provinciales et diverses associations connexes. Nous allons nous pencher sur notre modèle de développement à long terme de l'athlète pour voir s'il y a moyen d'améliorer nos programmes. Je m'attends à ce que la réponse soit positive.

Par ses partenariats avec les sections provinciales et les clubs membres, Natation Canada offre un vaste éventail de programmes et de possibilités aux personnes handicapées. Ce ne sont pas tous les clubs du pays qui participent au programme de paranatation. Si vous me le demandez, je vous dirais qu'environ 10 p. 100 de nos clubs offrent un programme de paranatation. Sur les 425 clubs existants, 40 en offrent un.

Ce n'est pas parce que nous n'avons pas envie d'en offrir la possibilité partout, mais il y a des raisons pourquoi nous ne le faisons pas. D'abord, il y a le problème de l'espace piscine. L'infrastructure est un enjeu très concret dans notre sport. Le problème n'est pas seulement le nombre de piscines, mais le nombre de piscines en décrépitude. Beaucoup existent depuis longtemps. Il y a beaucoup de piscines qui ferment au Canada, et c'est grave pour nous.

L'autre aspect connexe à celui de l'infrastructure, c'est l'accès. Parfois, nos clubs de natation n'ont qu'un accès très limité à leur piscine, ce qui nous empêche d'offrir le programme de paranatation que nous pourrions offrir si nous y avions un peu plus accès. Il y a aussi les coûts de location qui sont prohibitifs.

Ensuite, il y a parfois un fossé remarquable entre notre premier point de contact et la transition de certains athlètes vers le modèle du club de natation. Mme Blaine et moi en avons discuté à maintes reprises. La transition afin d'intégrer les athlètes ou personnes handicapées au modèle du club de natation fait l'objet de beaucoup d'efforts avec nos partenaires, mais il y a parfois tout un fossé entre la réalité de départ et l'objectif, et nous devons trouver une solution.

L'enseignement à une personne handicapée et son entraînement peuvent présenter des défis. Cependant, le défi vient peut-être seulement du fait que les entraîneurs et les instructeurs n'ont pas reçu la formation qu'il faut pour comprendre les nuances de certains handicaps. L'un des enjeux auxquels nous accordons beaucoup d'attention dans notre sport, c'est l'absolue nécessité d'améliorer notre programme de certification des entraîneurs et d'investir davantage de ressources afin que tous comprennent ces nuances.

Nous avons de la chance à Natation Canada, parce que nous tirons environ 65 p. 100 de notre financement du public. Nous ne pourrions pas faire tout ce que nous faisons sans Sport Canada et le programme À nous le podium. Nous nous sentons privilégiés d'être visés par le sport olympique et paralympique au Canada, et je crois que cela nous permet d'atteindre d'excellents résultats.

Le mouvement de la paranatation va continuer de croître au Canada pendant de longues années. Nous allons améliorer notre efficacité grâce à la force de nos partenariats avec des organismes comme Olympiques spéciaux Canada, le Comité paralympique canadien, l'Association des sports pour aveugles et tous ceux qui offrent des cours de natation, comme la Croix-Rouge, Je Nage, la Société de sauvetage du Canada et les YMCA. Grâce au renforcement de ces partenariats et à l'intégration de nouveaux membres au programme de Natation Canada, ces personnes auront la chance de se développer comme athlètes.

Il est essentiel aussi pour nous de trouver de nouveaux partenaires. L'Association médicale canadienne nous vient immédiatement à l'esprit. Imaginez la puissance du message si les médecins disaient aux jeunes handicapés : « Tu dois faire du sport. » Je ne sais pas si cela se fait en ce moment, mais je présume que nous pourrions tous faire notre petite part pour améliorer les choses.

Il y a beaucoup d'obstacles qui nous empêchent de réaliser notre plein potentiel. En ce moment, le milieu du sport et des loisirs est un peu fragmenté. Il y a beaucoup de chevauchements et de dédoublements. Si nous éliminions certains de ces dédoublements, nous pourrions accroître notre efficacité, combler bien des lacunes et améliorer les volets sensibilisation et éducation.

Il faut aussi réfléchir à la stratégie systémique à adopter pour éduquer le public. Si nous ne concertons pas nos efforts, le nombre de nageurs n'augmentera pas beaucoup. Je dirais que la grande majorité des quelque 400 participants au programme de Natation Canada ne sont là que parce que leur parent ou leur tuteur a eu le souci de les inscrire, mais il n'y a pas eu de sensibilisation de la part des enseignants, des moniteurs de natation ni même des médecins.

Par ailleurs, je m'en voudrais de ne pas mentionner le Comité paralympique canadien. Il semble avoir tourné une nouvelle page dernièrement, et je crois qu'il a un rôle très pondérant à jouer sur le plan du leadership, pour répondre aux besoins dont je viens de faire état.

La natation est une activité idéale pour une personne handicapée. L'activité dans l'eau permet à la personne handicapée de mouvoir son corps d'une façon complètement différente de hors de l'eau. Les personnes en fauteuil roulant, en béquilles ou qui se déplacent avec d'autres appareils peuvent se débarrasser de tout leur attirail et bouger librement. Dans l'eau, elles peuvent marcher et bouger leurs membres. C'est fascinant, tout ce qu'elles peuvent faire dans l'eau. La natation améliore énormément le style de vie. Elle améliore la forme physique des personnes, leur permet de bouger plus facilement et du coup, de ressentir un incroyable sens de bien-être et d'accomplissement. La natation leur ouvre la porte à beaucoup d'autres sports avec Natation Canada ou d'autres organisations comme les Jeux olympiques spéciaux et Athlétisme Canada.

Cela vient clore mon bref exposé. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

Ozzie Sawicki, entraîneur-chef du para-athlétisme, Athlétisme Canada : D'abord et avant tout, je souhaite vous remercier de nous accueillir cet après-midi. Je viens du milieu de la science et de la géologie, et c'est ce qui m'a amené au sport. Quand j'ai décidé de faire du sport, j'ai adopté le ski alpin. J'ai été entraîneur de ski alpin pendant plus de 20 ans et j'ai été entraîneur-chef du programme de l'équipe nationale pendant quatre ans. Il y a un an et demi, j'ai été recruté par Athlétisme Canada afin de restructurer le programme du para-athlétisme.

Je ne parlerai pas du volet pour les non-handicapés, je vais plutôt mettre l'accent sur l'avantage pour le para- athlétisme d'être intégré au système et sur la croissance nécessaire pour qu'il continue de s'améliorer. Nous nous sommes demandé comment le programme de para-athlétisme transparaît dans divers domaines, comme les soins de santé, la réhabilitation et l'éducation.

Ce que je constate dans l'athlétisme et dans beaucoup d'autres sports dont mes collègues font la promotion, c'est que nos athlètes sont relativement vieux. Le comité parle des personnes de moins de 25 ans, mais beaucoup de nos athlètes séniors sont plus vieux que moi, qui suis leur entraîneur-chef. Cela m'inquiète parfois. Nous consacrons bien des efforts afin de toucher les jeunes que nous aimerions convaincre de faire non seulement du sport de compétition, mais aussi du sport de loisir et du sport thérapeutique dans le simple but d'être actif pour la vie.

Les enfants handicapés ont les mêmes problèmes que les enfants non handicapés : ils sont de plus en plus obèses et de moins en moins actifs. Les mêmes réalités s'observent dans les deux groupes, donc aussi chez les handicapés. Comment pouvons-nous aller chercher ces jeunes et réussir à mieux les informer? La solution doit en partie être de ne pas mettre l'accent sur le handicap, mais sur la sensibilisation générale à ce que l'athlétisme a à offrir si on veut être actif toute sa vie.

La beauté de l'athlétisme, c'est qu'elle met en œuvre des mouvements tout simples comme de courir, de sauter, de lancer, et dans le cas du para-athlétisme, de rouler. C'est l'idée de base. Est-ce que vous pouvez lancer un objet? Jusqu'à quelle distance pouvez-vous le lancer? Pouvez-vous le lancer plus loin que quelqu'un d'autre? Quand convient-il d'introduire l'aspect de la compétition? Quand convient-il d'introduire l'aspect du plaisir et de la possibilité de rester actif simplement pour profiter du sport? Il y a aussi l'aspect des courses. Les personnes en fauteuil roulant peuvent prendre le départ sur une piste et savourer le plaisir d'aller vite dans une course de 1 500 mètres, ce n'est pas différent pour eux que pour les autres.

Nous nous demandons comment nous pouvons sensibiliser les gens à ce que le sport a à offrir. Il y a une semaine et demie s'est terminé un sommet sur le développement du para-athlétisme. L'un des grands thèmes de ce sommet était de mettre à contribution les partenaires potentiels qui nous entourent afin de ne pas agir en vase clos dans nos décisions. Nous avons mis l'accent sur l'implication des organismes provinciaux pour les personnes handicapées, de nos organisations parallèles en athlétisme, et cetera. Il faut définir le rôle des divers partenaires dans l'athlétisme et ne pas faire cavaliers seuls dans nos efforts.

Comme M. Hahto l'a mentionné, nous devons travailler à éliminer les dédoublements dans le système. Du coup, nous pouvons créer des partenariats qui nous donneront accès à des données précieuses avec des milieux avec lesquels nous n'avons jamais vraiment approfondi nos liens. Je pense notamment au système d'éducation. Nous n'avons pas de moyen de rejoindre les enfants handicapés de la maternelle à la douzième année. Nous sommes bons pour trouver les enfants en réhabilitation de moins de six ans et pour trouver les jeunes de plus de 17 ans. Cependant, dans le milieu de l'éducation, nous avons rarement la possibilité de repérer où se trouvent ces jeunes. Par ricochet, si nous nous penchons sur le système d'éducation, nous pouvons nous demander si nous pouvons ajouter un volet de sensibilisation à l'éducation qui n'ajouterait pas au fardeau des enseignants, mais ferait partie intégrante des programmes en place. Ce ne doit pas nécessairement être dans les sports. Ce peut être en sciences, en sciences sociales ou en mathématiques. Il n'y a aucune raison pourquoi les jeunes ne pourraient pas voir la science sportive comme un domaine du sport qu'ils pourraient viser. Ils peuvent également étudier les mathématiques et la physique du sport.

Nous devons prendre garde de ne pas cibler que le domaine des sports, et avoir une approche plus holistique du concept des sports et de leur place dans les programmes d'éducation. Je sais bien que l'éducation relève des provinces, et que l'analyse des programmes qui y sont donnés dans chacune d'elle nécessite beaucoup de démarches auprès des gouvernements. Étant un partenaire de premier plan, le Comité paralympique canadien a commencé à obtenir ce genre de données. Cette information nous permet de voir plus loin que le handicap, de penser aux moyens de mobiliser les groupes ethniques et divers segments de la population et d'analyser la composition démographique d'un endroit particulier. On peut ainsi découvrir des municipalités qui ont une proportion importante de jeunes âgés de 14 à 16 ans et d'adultes âgés de 45 à 55 ans. On peut profiter de situations de ce genre pour mettre en place des programmes de mentorat, où les membres du groupe plus âgé encadrent ceux du groupe plus jeune.

Pour ce qui est de l'athlétisme, on ne peut envisager d'inviter des gens à pratiquer notre sport si on n'a nulle part où les envoyer, si on ne fournit pas l'encadrement ni les connaissances techniques nécessaires à cette fin — c'est-à-dire tant qu'on ne peut pas fournir des entraîneurs qualifiés pour les clubs. Ce n'est qu'à cette condition qu'on peut intégrer des gens d'âges divers dans des clubs, dans des milieux encadrés par des entraîneurs.

Comment pouvons-nous favoriser l'organisation d'événements sportifs? C'est bien beau de pousser les jeunes à faire un sport, mais il ne faut pas non plus en être réduit à leur dire « Nous sommes bien contents que vous fassiez de l'athlétisme, mais nous ne pouvons vous envoyer participer à aucune compétition ». Il faut montrer aux jeunes qu'ils ont des chances de participer à des événements sportifs dans leur municipalité, dans leur province et à l'échelle nationale, et qu'ils peuvent participer à tous les niveaux, que ce soit au niveau récréatif, ou encore comme athlètes débutants ou même comme athlètes de grand calibre. Il faut créer cette dynamique pour la formation des entraîneurs, et aussi les événements sportifs, et ce n'est qu'alors que le recrutement aura des chances d'être beaucoup plus efficace.

Je termine mon exposé en précisant que j'ai voulu présenter l'athlétisme en faisant ressortir la façon dont nous cherchons, dans l'ensemble, à intéresser les gens à ce sport, sans trop insister sur la participation des personnes handicapées. En d'autres mots, nous voulons sensibiliser la population en général aux activités sportives que peuvent pratiquer les personnes handicapées. Il ne s'agit pas d'essayer de convaincre les parents d'une personne handicapée de profiter de ce que nous pouvons offrir, mais plutôt de sensibiliser le Canadien ordinaire au fait que nous offrons à tous, handicapés ou non, la possibilité de pratiquer le sport.

Jane Blaine, directrice exécutive, Association canadienne des sports pour aveugles : Je vous remercie de m'avoir permis d'être des vôtres aujourd'hui.

J'évolue dans le monde des sports et de l'activité physique pour les personnes handicapées depuis plus de 30 ans. J'ai fait des études en motricité précoce et en kinésiologie. En 1986, j'ai assisté aux discussions tenues à Jasper, dont le Dr Steadward a parlé. J'ai été membre du Groupe de travail du ministre d'État (Sport) sur le sport pour les personnes handicapées, qui a publié son rapport en 2004. Si vous ne l'avez pas lu, vous pourriez le trouver intéressant.

Je suis bénévole auprès de SportAbility/Cerebral Palsy Sports of BC, de la Fédération internationale des sports pour personnes aveugles et d'IPC Swimming. Lors des Jeux paralympiques de Vancouver en 2010 et des championnats mondiaux d'IPC Swimming à Eindhoven, j'ai eu le plaisir d'assister à des compétitions et de voir des athlètes battre des records et remporter des médailles d'or. J'en ai connu certains alors qu'ils étaient tout petits ou à l'école primaire. J'ai aussi eu le plaisir de voir d'autres personnes handicapées avec qui j'ai travaillé alors participer à l'événement Au Canada, le sport c'est pour la vie, et de vivre cette expérience avec leur famille.

Je suis depuis plus de 20 ans la directrice exécutive de l'Association des sports et des loisirs pour aveugles de la Colombie-Britannique; je suis également devenue chef de la direction de l'Association canadienne des sports pour aveugles en 2004, à la suite d'une entente de partenariat conclue entre les deux organismes; j'exerce encore cette responsabilité.

Je suis heureuse de représenter l'Association canadienne des sports pour aveugles. Nous visons à faire des Canadiens aveugles des chefs de file mondiaux en goalball et à les intégrer à tous les volets du mouvement Au Canada, le sport c'est pour la vie. Le goalball est un sport spécialement conçu pour les athlètes aveugles. Nous avons pour mission d'assurer le leadership dans le goalball au Canada, d'agir comme experts des interventions auprès des aveugles et de représenter dans le réseau des sports les intérêts des Canadiens aveugles ou ayant une déficience visuelle.

Vous constaterez qu'il y a deux volets à notre mission et dans notre plan stratégique. Le premier est l'avancement du goalball et le deuxième, l'avancement des sports pour les aveugles. Le premier volet est bien financé au moyen du programme À nous le podium et de Sport Canada; le second, toutefois, l'est très peu, sinon pas du tout. Je compte vous exposer les raisons pour lesquelles le réseau des sports pour aveugles du Canada estime qu'il ne devrait pas en être ainsi.

Les organismes sportifs provinciaux qui sont membres de notre association sont très divers. Beaucoup manquent de ressources nécessaires pour offrir des occasions valables à leurs publics cibles. Leur financement varie, de même que leur développement, qui dépend parfois de l'existence d'une école pour aveugles. À titre d'information, il n'y a au Canada qu'une seule école pour aveugles, et elle est en Ontario.

Nos organismes sportifs provinciaux se sont réunis lors de la conférence sur le développement à long terme de l'athlète, le DLTA, tenue à Ottawa l'année dernière, grâce en partie au financement accordé pour le DLTA. Trois choses sont ressorties de cette conférence. On nous a dit que nous devrions insister sur la nécessité d'élaborer un modèle semblable à celui du DLTA ou du programme Au Canada, le sport c'est pour la vie, qui soit spécialement conçu pour les athlètes aveugles ou qui ont une déficience visuelle. On s'inquiète beaucoup du fait qu'une grosse part du financement sert à mettre en place des ressources pour faire participer des athlètes handicapés mais que bien peu d'informations, sinon aucune, ou encore que des informations truffées d'inexactitudes sont communiquées dans le cas des athlètes aveugles.

Nous estimons aussi que l'expertise de l'Association canadienne des sports pour aveugles auprès de cette clientèle devrait être financée.

Je remercie le comité pour l'intérêt qu'il porte à nos réflexions sur l'article 30.5 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, en ce qui concerne tout particulièrement les enfants et les jeunes âgés de moins de 25 ans. J'ai formulé mes commentaires selon les paramètres de l'article 30.5, qui s'applique aussi sous le régime de la Loi canadienne sur les droits de la personne, des codes provinciaux des droits de la personne et de la Politique canadienne du sport.

La Politique canadienne du sport s'appuie sur quatre piliers. Le quatrième, l'interaction accrue, s'effrite. Mark Hahto a parlé de l'importance des partenariats. La plus grande partie du quatrième pilier n'est pas financée. Il y aurait toutefois moyen de stabiliser la situation s'il y avait plus d'interaction avec les organismes sportifs nationaux; cela nous permettrait en outre de conjuguer l'expertise que nous avons auprès des aveugles avec celle qu'ils ont dans les différents sports.

Pour ce qui est d'encourager et de promouvoir la participation des Canadiens aveugles, permettez-moi de vous expliquer quelles personnes entrent dans cette catégorie. Tout d'abord, la déficience visuelle ou la cécité est un handicap sensoriel et non un handicap physique. Nous fournissons des services à des familles, à des personnes aveugles ou qui ont une déficience visuelle, à des personnes sourdes et aveugles et à des personnes qui ont une déficience visuelle d'origine corticale. Certaines de ces personnes ont d'autres handicaps aussi. On estime qu'il y a au Canada 19 700 enfants et jeunes atteints de déficience visuelle. Il y en a qui ont d'autres handicaps, et certains de ces handicaps sont en dehors des limites établies pour le mouvement paralympique. Quoi qu'il en soit, ce chiffre englobe tous les Canadiens dont la vue limite la capacité de participer à une activité physique.

Pour ce qui est des données démographiques, nous savons que le nombre de personnes atteintes de troubles génétiques qui engendrent la cécité est stable. Il y a eu quelques améliorations pour ce qui est des troubles qui se manifestent à la fin de l'adolescence et au début de la vie adulte. Le nombre d'enfants atteints de déficience visuelle d'origine corticale, par contre, a nettement augmenté.

Vous remarquerez que les aveugles et les personnes atteintes de déficience visuelle sont peu nombreux dans les réseaux d'éducation. Bien des responsables de ces réseaux affirment que c'est une population restreinte qui a des besoins très élevés. Le premier geste que fait un bébé dans son berceau est souvent de tendre la main vers un mobile. Si ce bébé ne voit pas le mobile, son développement moteur est freiné. La vision stimule et motive le mouvement. Sans cette stimulation, l'enfant n'est pas incité à bouger.

Les autres sens ne donnent pas une vue d'ensemble. Le sens de la vue est celui qui intègre tous les autres sens. On note une grande différence dans le développement de concepts entre les enfants aveugles ou qui ont une déficience visuelle et ceux qui ont une vue normale.

Lors de la conférence sur la cécité et la déficience visuelle du Josephine L. Taylor Leadership Institute qui a eu lieu aux États-Unis la semaine dernière, les Américains ont présenté leurs objectifs nationaux et leur nouveau programme d'éducation de base. Neuf domaines ont été ajoutés, dans lesquels les enfants aveugles ou ayant une déficience visuelle devraient recevoir une éducation. L'un d'eux est le domaine récréatif et les activités de loisir, mais nous avons été nombreux, à la conférence, à constater que les huit autres domaines comportent eux aussi un élément récréatif et de loisir. La Dre Lauren Lieberman a présenté des programmes d'intervention précoce et elle a encouragé les gens à faire la promotion de ces programmes. Elle a parlé de la piètre condition physique des aveugles. On a fait remarquer qu'il faut à une personne ou à un enfant aveugle jusqu'à huit essais pour comprendre quelque chose aussi bien qu'un enfant qui ne voit qu'une fois ce dont il s'agit.

Les habiletés physiques des enfants aveugles et des enfants qui ont une vue normale se définissent, entre autres, par la capacité de discuter d'un sport et de parler d'une partie de hockey, d'une compétition de natation ou d'une rencontre d'athlétisme. La coalition nationale représentant les détenteurs de droits aveugles, sourds et aveugles et mal-voyants et d'autres segments de la population qui vivent avec une incapacité de lire les caractères imprimés poussent les bibliothèques du Canada, ainsi que celles des provinces et des collectivités, à fournir un accès équitable aux Canadiens qui ne peuvent pas lire les documents imprimés, y compris les articles et les ouvrages traitant des sports et de l'activité physique.

Les fonds sont accordés en fonction du nombre de personnes ciblées; or, c'est une faible proportion de la population qui est atteinte de cécité et de déficience visuelle, mais les besoins de cette population sont très grands et cela n'est pas pris en considération dans la répartition du financement des organismes.

Passons maintenant à la promotion du sport. Mes deux collègues ont dit qu'il faut aider à sensibiliser les Canadiens aux possibilités d'activités parasportives. L'information diffusée et la publicité moderne ne permettent pas, à la vitesse où passent les images, de renseigner les personnes qui sont aveugles, qui ont une déficience visuelle ou qui sont sourdes et aveugles.

Bien des sites web — les sites des organismes sportifs nationaux, les sites sur la nutrition, la santé et l'activité physique et aussi les sites fédéraux, comme celui de Sport Canada — ne sont pas pleinement accessibles aux Canadiens aveugles ou qui ne peuvent pas lire les caractères imprimés. Une femme du nom de Donna Jodhan a d'ailleurs intenté une poursuite judiciaire à ce sujet.

Quand nous travaillons avec les parents, nous devons les encourager et les aider à comprendre que leur enfant aura des occasions positives et enrichissantes de développer ses habiletés avec une personne qui aura reçu la formation appropriée pour travailler avec lui.

Pour ce qui est des occasions de participation pour une personne handicapée, il n'existe actuellement aucun modèle de développement à long terme des athlètes ni de modèles comme celui du programme Au Canada, le sport c'est pour la vie, pour les personnes atteintes de cécité ou de déficience visuelle, bien qu'un modèle du genre soit presque prêt pour le goalball.

Si nous voulons organiser et mettre en valeur des activités sportives et récréatives à l'intention des personnes handicapées et faciliter leur participation à ces activités, nous devrons nous assurer qu'il soit bien entendu que le handicap n'est pas générique. La surdité et la cécité sont des handicaps sensoriels et intellectuels; alors les modèles qui sont efficaces pour les personnes qui ont un handicap physique ne conviennent pas forcément aux personnes qui ont un handicap sensoriel ou intellectuel.

Pour ce qui est des ressources appropriées, nous manquons nettement d'enseignants et d'entraîneurs qui connaissent bien la situation des personnes qui sont aveugles, qui ont une déficience visuelle ou qui sont sourdes et aveugles. En parlant avec des entraîneurs locaux ou des étudiants en éducation physique sur le point de recevoir leur diplôme, nous constatons que ces personnes connaissent mal les handicaps courants et qu'elles devraient s'informer sur les troubles d'attention et d'apprentissage et les troubles intellectuels. Si vous avez un enfant aveugle dans votre classe, n'hésitez pas à nous téléphoner. La situation sera bien différente selon que cet enfant n'a jamais vu ou qu'il a perdu la vue il y a un an. La situation peut être différente également si une personne a graduellement perdu la vue ou si on pensait qu'elle avait de piètres capacités motrices, alors qu'en fait, elle n'aimait pas les activités physiques pour la seule raison qu'elle n'avait aucunement conscience de ne pas voir aussi bien que tout le monde.

Dans le système sportif, il est très difficile d'enseigner à une personne aveugle sans la toucher ou sans qu'elle vous touche. L'Association canadienne des sports pour aveugles a donc élaboré une politique en la matière pour assurer la sécurité des personnes aveugles et les protéger contre le harcèlement, tout en faisant en sorte de leur donner les moyens d'acquérir des habiletés motrices.

J'ai eu le plaisir d'entendre mes collègues mentionner nos partenariats. Ils en savent davantage que moi au sujet de la nage et de l'athlétisme, et l'Association canadienne des sports pour aveugles, quant à elle, en connaît davantage au chapitre de la cécité et des déficiences visuelles. Il s'agit donc d'un partenariat très important pour nous tous, puisque nous poursuivons un objectif similaire.

En ce qui concerne l'accès aux activités sportives, de loisir et de tourisme ainsi qu'aux lieux d'activités récréatives extérieures, l'accès à l'information n'est pas le même pour les aveugles. Ceux-ci ne peuvent pas utiliser les terminaux de point de vente comme les autres personnes pour payer des services. Ces terminaux leur sont inaccessibles. La communauté des aveugles continue de plaider en faveur de mesures à cet égard. L'accès physique grâce à des rampes d'accès diffère des panneaux d'affichage aux couleurs très contrastées et des panneaux en braille. Quant à l'accès à des guides voyants formés, tant sur les terrains de jeu qu'en dehors de ceux-ci, il est de plus en plus important. À cet égard, il y a une pratique exemplaire soutenue en partie par le gouvernement fédéral au moyen d'un financement bilatéral dans le cadre d'une ressource mise sur pied par la Colombie-Britannique.

Pour ce qui est des sports de haut niveau, de la compréhension de la cécité et de la déficience visuelle en ce qui a trait au contrôle antidopage et aux techniques d'entraînement, la psychologie de la collaboration avec un guide voyant laisse croire que des systèmes sportifs intégrés, ou des équipes de soutien intégrées aux systèmes sportifs, devraient peut-être inclure un spécialiste en matière de cécité et de déficience visuelle. Les chemins d'accès ne sont pas nécessairement accessibles pour les personnes aveugles ou ayant une déficience visuelle.

En ce qui concerne le système d'éducation, de nombreux liens ont été établis par la communauté aveugle. En Colombie-Britannique, nous avons une pratique exemplaire où un spécialiste du domaine des sports pour aveugles rencontre tous les enfants aveugles au moins quatre fois par année, de la maternelle à la douzième année. Ce spécialiste travaille également avec 40 p. 100 des enfants dans le cadre d'un programme d'éducation physique personnalisé, qu'il aide à mettre au point. Nous avons également de solides partenariats avec l'association Canadian Vision Teachers, ainsi qu'avec la Société canadienne d'ophtalmologie et avec les optométristes.

De par notre travail au sein du système d'éducation de la Colombie-Britannique pendant un certain nombre d'années, nous savons que les enfants arrivent à la maternelle avec des retards dans leur développement moteur. Grâce à un financement bilatéral, l'Association des sports et des loisirs pour aveugles de la Colombie-Britannique a pu créer un guide et un programme d'intervention précoce, qui vous a été envoyé par courriel dans les deux langues officielles. Nous vous avons également fait parvenir par la poste une copie d'un DVD de 20 minutes, où des parents parlent de l'importance de l'activité physique et de l'acquisition d'habiletés physiques pour leurs enfants. Si un enfant n'a jamais vu un autre enfant sauter, comment faire pour lui apprendre à sauter? Cette image vaut mille mots.

La participation à des activités physiques est très différente et spécialisée pour chaque personne qui est aveugle, atteinte de déficience visuelle ou sourde et aveugle, ou encore qui souffre d'une autre incapacité physique et peut-être de cécité corticale. Le système de développement de l'athlète à long terme accuse une lacune importante. Bien des organismes nationaux de sport veulent savoir par quoi sont passés nos futurs athlètes. Ils ont bénéficié d'une intervention précoce et de programmes en milieu scolaire.

Nous croyons que l'Association canadienne des sports pour aveugles a une contribution importante à apporter au mouvement « Au Canada, le sport c'est pour la vie » au nom des Canadiens aveugles, sourds et aveugles, atteints d'une déficience visuelle ou de cécité corticale ou d'autres incapacités physiques. Merci beaucoup de m'avoir accordé cette occasion de m'adresser à vous.

La semaine prochaine, je pars pour les jeux internationaux pour les personnes aveugles, qui rassembleront des athlètes d'aujourd'hui. Mais nous passerons les journées de vendredi et samedi dans un camp d'intervention précoce, à jouer avec neuf familles qui ont des enfants de moins de cinq ans, et qui viennent d'apprendre que leur enfant a une déficience visuelle. À l'Association canadienne des sports pour aveugles, nous tenons à ce qu'il y ait des améliorations continues dans le système sportif canadien à tous les niveaux pour nous aider à concrétiser notre vision selon laquelle les Canadiens aveugles seront des chefs de file mondiaux en goalball, et jouiront d'une pleine inclusion dans tous les aspects du programme Au Canada, le sport c'est pour la vie.

Le sénateur Jaffer : Je vous remercie tous les trois pour vos exposés. J'en ai beaucoup appris. Monsieur Hahto, j'aimerais que vous me donniez davantage de détails sur votre commentaire selon lequel Natation Canada est devenue en 1993 la première organisation de sport nationale intégrée. Y a-t-il d'autres organismes nationaux intégrés? Quelles mesures a-t-on prises pour faire de Natation Canada une organisation intégrée, et non pas une organisation appliquant une ségrégation?

M. Hahto : Oui, un certain nombre d'organismes nationaux de sport nous ont emboîté le pas, et Athlétisme Canada est probablement le meilleur exemple d'une association qui a imité notre système, et nous avons imité le sien.

Nous sommes arrivés là grâce au soutien de gens passionnés qui croyaient que les parasports devaient être intégrés aux sports pratiqués par des personnes non handicapées. Sans ces premiers leaders qui ont eu la vision de faire participer pleinement les athlètes handicapés à toutes nos activités, cela n'aurait pas eu lieu.

De façon assez intéressante, nombre de ces personnes sont encore parmi nous aujourd'hui et continuent de prendre les devants en matière de parasports. Nous devons, entre autres choses, examiner les plans de relève pour nous assurer de pouvoir compter sur la participation active de ces personnes enthousiastes et passionnées dans notre sport.

Le sénateur Jaffer : Bien sûr, pour faire une telle chose, il faut des gens passionnés. Ils ont eu la vision nécessaire. Mais qui a fourni les ressources? Y a-t-il une croissance continue des ressources? Et comment aidez-vous les autres groupes à devenir intégrés?

M. Hahto : Pour ce qui est de nos premières étapes, je ne crois pas qu'il y ait de ressources spéciales. L'une de nos premières mesures a été de conclure une entente avec Olympiques spéciaux Canada, en 1992, je crois. Nos deux organismes avaient tout simplement déterminé que, pour des raisons stratégiques, nous devions travailler ensemble.

Nous avons connu beaucoup de succès à l'échelle internationale, et certaines des médailles obtenues se sont traduites par du financement direct. Toutefois, le financement est orienté vers les programmes de sport de haut niveau. Le financement que nous obtenons pour développer les capacités et recruter de nouveaux athlètes dans notre système est limité, et doit s'inscrire dans les décisions stratégiques que nous prenons en tant qu'organisation globale pour nos 100 000 membres, et non pas seulement pour notre volet des parasports.

M. Sawicki : Un certain nombre des associations de sport se sont intégrées en raison des décisions prises par Sport Canada à la fin des années 1990 et au début des années 2000. C'est en partie la question de savoir pourquoi nous faisions fonctionner deux entités administratives distinctes alors qu'elles pourraient fonctionner sous l'égide d'une seule organisation sportive nationale qui, je crois, a motivé ce processus.

Je suis d'accord avec M. Hahto pour dire qu'un certain nombre de ces sports avaient des champions qui ont aidé à faciliter la fusion avec l'entité pour non-handicapés. Bien souvent, c'est une personne œuvrant au sein de l'entité vouée aux parasports qui initiait l'établissement d'un pont entre l'organisme pour non-handicapés et celui pour handicapés.

La différence que j'observe souvent, c'est que les champions ayant pris la tête de ce mouvement venaient d'un contexte bénévole, et pas subventionné. Dès le départ, une considération différente a été accordée au financement dans le domaine des sports pour athlètes handicapés. On s'attendait à ce que, plus souvent qu'autrement, vous soyez un entraîneur bénévole ou l'administrateur d'un programme bénévole, par opposition à un club de sport pour non- handicapés où l'entraîneur et le club sont rémunérés. Voilà quelques-unes des choses qui ont évolué au fil du temps.

Depuis les 10 dernières années, surtout, nous assistons à la résolution d'une partie des difficultés, et certains des aspects positifs qui en résultent sont la capacité de gérer, au plan des sports de haut niveau, la répartition des ressources financières entre les programmes de parasports et les programmes pour les non-handicapés. Là où il y a une lacune, c'est que le système de développement n'a pas encore connu la même évolution à ce jour. Pendant bien des années, c'était une préoccupation secondaire.

Le sénateur Jaffer : Que doit-il arriver pour que le système de développement comble son retard?

M. Sawicki : Nous parlons de la nécessité d'un développement et de la raison d'être du programme de vie active, mais on n'y donne pas nécessairement autant de poids au moyen d'un soutien semblable à celui qu'on accorde aux sports de haut niveau. J'abonde dans le sens du commentaire de M. Hahto, selon lequel les médailles sont importantes. Dans une certaine mesure, nous avons tenté de mettre la charrue devant les bœufs dans le contexte des sports pour handicapés, en ce sens que nous avons placé les sports paralympiques sur un piédestal. Nous considérons des athlètes comme Lauren Woolstencroft et Chantal Petitclerc comme des modèles inspirants, mais nous n'appuyons pas nécessairement l'infrastructure des programmes en conséquence pour faire participer les jeunes. Cela ne se limite pas forcément à la composante des personnes handicapées. Nous devons axer nos efforts sur la création de programmes de formation d'entraîneurs dans les parasports ou créer des régimes équivalents dans ce domaine.

Une partie du problème tient au fait qu'il s'agit dans une certaine mesure d'une responsabilité provinciale, et pas d'une responsabilité fédérale. Comment nous y prendre pour combler ces lacunes liées à la responsabilité provinciale et nous attaquer à la structure des programmes? En Colombie-Britannique et en Ontario, nous observons actuellement une tendance des provinces à s'attendre à ce que les sports soient l'élément de tête et à ce que les organismes provinciaux de sport pour handicapés suivent, mais il nous manque les lignes directrices qui vont avec. En l'absence d'une structure ou d'une quelconque forme de lignes directrices, il est difficile de faire en sorte qu'un système opérationnel émerge de tout cela.

Le sénateur Jaffer : La raison pour laquelle nous étudions cette question a beaucoup à voir avec la passion que le sénateur Kochhar voue à ce sujet. Lorsqu'on parle de gens passionnés, c'est certainement son cas, et c'est lui qui a ouvert la voie pour que nous nous penchions sur la question.

Toutefois, pour en revenir au commentaire de Mme Blaine sur le fait de favoriser l'apprentissage du sport par les enfants, les médailles m'intéressent, bien sûr, mais nous voulons que tous les enfants en récoltent les fruits. Votre métaphore d'un pont me plaît. Comment nous y prendre pour construire un pont? Quelles recommandations devons- nous formuler pour venir en aide à cet enfant qui ne deviendra pas nécessairement un athlète canadien de pointe, mais qui veut quand même pratiquer le sport? Comment atteindre cet enfant, et quelles recommandations devrions-nous présenter dans notre rapport?

M. Sawicki : Je pense que l'un des domaines clés où nous devons vraiment intervenir est le système d'éducation, en intégrant l'information aux programmes d'enseignement existants. Il ne s'agit pas de faire un ajout à ces programmes, mais de profiter de l'occasion qui est déjà là et de trouver comment y insérer l'élément des sports pour handicapés, qui deviendra alors un élément générique du système d'éducation. De cette manière, nous mettrons en place un mécanisme de sensibilisation systématique.

Ainsi, cela ne dépendra pas du fait d'avoir ou non un champion comme le sénateur Kochhar, M. Hahto ou Mme Blaine; tout le monde pourra acquérir ces connaissances, qu'on veuille entraîner ces enfants ou les emmener en groupe pour une activité récréative à l'extérieur. Personnellement, il m'importe peu que les enfants deviennent des athlètes de haut niveau. Je veux que le plus grand nombre d'enfants possible pratiquent des activités physiques. C'est grâce à cette activité que certains deviendront un jour médaillés.

L'autre chose que nous devons faire — et c'est un changement positif auquel j'assiste en ce moment —, c'est mieux répandre l'idée qu'une personne qui n'a peut-être pas tout ce qu'il faut pour faire de l'athlétisme peut être un bon athlète de goalball. Je serais prêt à les faire passer au goalball ou à la nage. Nous prenons davantage conscience qu'un petit bassin d'athlètes se partage entre nombre croissant de sports conçus pour les handicapés.

Mme Blaine : Pour en revenir à votre question à propos de l'inclusion, le financement du gouvernement fédéral pour les sports au niveau national vise les organisations de sport pour les voyants et les non-handicapés. Comme M. Sawicki l'a dit, ce changement a eu lieu à la fin des années 1990 et au début des années 2000.

Dans bien des cas, l'une des choses qui n'ont pas été transférées à l'époque était l'expertise au sujet des incapacités. Dans le milieu des sports pour aveugles, nous n'avons certainement pas fait un très bon travail à cet égard, parce que les organisations représentant les autres incapacités avaient un modèle de classification. Dans le mouvement paralympique, on avait tenu compte des dysfonctions locomotrices s'ajoutant à la cécité, et on avait des classificateurs qui ont aidé à transmettre les connaissances sur l'incapacité aux entraîneurs et aux intervenants du système. Comme notre système de classification est différent, ce transfert des connaissances n'a pas eu lieu.

En ce qui a trait à la cécité et aux déficiences visuelles — je ne puis me prononcer au sujet des autres déficiences — l'élément important du modèle d'inclusion est qu'il y a une expertise en matière de cécité dans le contexte d'un rôle consultatif. Un bon modèle à cet égard est le système d'éducation où, dans bien des cas, on trouve un enseignant ordinaire qui enseigne à l'enfant aveugle, mais cet enfant a également un enseignant d'élèves malvoyants qui aide les enseignants en classe à comprendre les caractéristiques de leurs déficiences visuelles qui auront un effet sur leur apprentissage.

Le sénateur Kochhar : Merci, chers témoins, pour vos excellents exposés.

Aujourd'hui est le premier anniversaire de l'incroyable performance de nos athlètes paralympiques à Vancouver. La population de partout au Canada a été très fière de ce qu'ils ont accompli.

J'estime que le gouvernement actuel a fait davantage pour les sports, tant pour les athlètes handicapés que pour les non-handicapés, que n'importe quel autre gouvernement au cours de notre histoire. Toutefois, les sports et l'éducation vont ensemble, et l'éducation est une compétence provinciale.

Que peut-on faire pour amener les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral à se rendre compte qu'ils doivent travailler ensemble pour aider les Canadiens d'un bout à l'autre du pays, sans se soucier à ce point des compétences? Peut-être devraient-ils changer leur attitude pour pouvoir mieux collaborer.

M. Hahto : En ce qui a trait aux paralympiques, il nous faut un changement de culture pour comprendre que, plus il y aura d'enfants qui pratiqueront des sports, moins il y aura de pressions exercées sur notre société, grâce aux vies riches qu'ils mèneront.

Il sera plus facile de parvenir à ce résultat si nos efforts vont tous dans le même sens. Dans le cadre du modèle actuel, nous allons tous chacun de notre côté. Il faudrait qu'il y ait un organe particulier dont c'est le mandat principal. Tant que nous ne serons pas parvenus à cette étape, je doute que nous ayons un changement de culture important qui nous permettra de construire un pont entre les sports, l'éducation et la sensibilisation. Je dirais que c'est la meilleure façon de s'attaquer à ce problème.

M. Sawicki : J'ai beaucoup réfléchi à la question des possibilités de commercialisation concernant les athlètes et les sports. Les dirigeants nationaux de la communauté des sports pour personnes ayant un handicap pourraient aider à établir des ponts à l'échelle provinciale afin que davantage d'intervenants se rallient à l'idée de créer des occasions de commercialisation.

La faiblesse que je constate à Athlétisme Canada, c'est que nous ne considérons pas notre programme de parasports comme un produit susceptible d'être commercialisé de la même manière que nos programmes pour les athlètes non handicapés. Nous devrions insister davantage sur la possibilité de commercialiser l'élément des parasports dans son ensemble. Je conviens avec M. Hahto que nous devrions appuyer un comité paralympique canadien et travailler en partenariat avec lui pour accroître la possibilité de commercialisation du sport. On en revient à la sensibilisation, et à tout ce qui s'ensuit.

Il faut pratiquement recourir à une masse pour faire avancer le processus. Nous devons énoncer les lignes directrices et le processus et, collectivement, en tant qu'organismes nationaux de sport, fixer les lignes directrices dans le cadre desquelles les provinces devront agir avec nous. Si elles agissent avec nous, elles y gagneront sur le plan des possibilités de financement, du soutien aux cliniques au stade du développement et d'un appui aux initiatives de développement à long terme, et cetera. Si elles ne souhaitent pas se plier aux lignes directrices, elles pourraient ne pas tirer avantage de ce modèle.

Il faut parfois nous montrer fermes en nouant une relation. D'un autre côté, nous devons démontrer qu'il y a un avantage monnayable à prendre part à l'initiative.

Les organes provinciaux demandent ce qu'il y a là-dedans pour que cela vaille la peine pour elles de participer et d'améliorer le processus dont j'ai parlé.

Le sénateur Kochhar : Vous n'avez pas répondu à la question de savoir comment les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral pourront collaborer pour tirer le wagon dans la même direction.

M. Sawicki : La solution se trouve dans les lignes directrices. Il nous faut charger un comité de créer des lignes directrices pour un effort concerté en matière de sport.

Le sénateur Kochhar : Qui créerait ces lignes directrices? Toutes les organisations sont très territoriales. Elles ne veulent renoncer à rien qui pourrait affaiblir leur pouvoir et, de cette manière, elles ne s'aident pas les unes les autres. Comment trouver un leader qui pourra rassembler toutes les organisations pour mettre au point une approche unifiée et accomplir les choses?

M. Sawicki : Il nous faudrait une tierce partie impartiale dénuée d'un quelconque intérêt politique du côté fédéral ou provincial, mais qui prendrait part au processus qui doit être établi.

Pour ce qui est des leaders, je songe à des gens comme Bob Steadward et Pat Jarvis. Un certain nombre de personnes comptent de nombreuses années d'expérience dans le domaine des parasports, et beaucoup n'assument peut-être pas un rôle à leur mesure. Nous pourrions faire appel à eux en tant que canal de communication entre les intérêts fédéraux et provinciaux. De cette manière, nous ne créerions pas une entité territoriale, mais plutôt une stratégie qui profiterait tant aux intérêts des provinces qu'à ceux du fédéral.

Il faut s'intéresser de près aux dirigeants actuels qui ont une grande expérience et les compétences voulues pour dresser un plan d'affaires de qualité, pas seulement les compétences nécessaires pour établir un programme sportif. Ils doivent être en mesure de bien faire valoir les avantages de leur plan, tout en tenant compte de la réalité administrative. Ils doivent mettre en place un modèle d'établissement des coûts réaliste pour les ministères provinciaux responsables des sports, de l'éducation et de la santé. Ce modèle doit par ailleurs cadrer avec le mandat fédéral de la Politique canadienne du sport et les initiatives que le gouvernement fédéral a déjà mises en œuvre à cet égard.

Cela vous paraît sensé?

Le sénateur Kochhar : Oui, c'est logique.

Que pouvons-nous faire pour faire comprendre aux responsables des régimes provinciaux d'éducation qu'investir à la base dans les sports et l'activité physique rapportera gros pour le système de santé? Y a-t-il un organisme qui peut amorcer un tel mouvement? De tous nos athlètes, seuls 10 p. 100 présentent un handicap physique, et seulement 3 p. 100 d'entre eux prennent part à des activités, par rapport à 37 p. 100 pour les athlètes non handicapés.

Que pouvons-nous dire aux gouvernements provinciaux? Comment peuvent-ils intégrer ces politiques vouées à l'éducation et à la santé?

M. Sawicki : Je peux vous parler de quelque chose qui se passe en ce moment. J'ai siégé au Comité paralympique canadien pendant huit ans. Je me suis retiré du comité pour pouvoir travailler, par l'entremise du CPC, sur un projet visant à obtenir des données auprès des ministères provinciaux de l'éducation. Nous avons examiné le volet éducation. Nous avons rencontré les responsables du ministère de l'Éducation de la Colombie-Britannique, et nous leur avons demandé de nous fournir certaines données sur les personnes handicapées. Nous savons que les enfants sont codés de diverses façons dans chacune des provinces, mais nous n'avions pas cette information. Si le Comité paralympique canadien pouvait accéder aux données codées concernant les enfants handicapés de la maternelle à la douzième année, quand vient le temps de décider où ériger les installations sportives, offrir les services d'entraîneurs, et cetera, cette information pourrait servir d'outil de planification stratégique.

Nous ne nous attendions pas à faire beaucoup de progrès, mais, une semaine plus tard, la province nous a appris qu'elle nous fournirait avec plaisir ces données, que personne d'autre avant nous n'avait demandé à voir. D'emblée, je constate que personne n'a vraiment pris le temps d'aller chercher les renseignements stratégiques disponibles. Nous en avons beaucoup parlé, nous avons voulu trouver quelqu'un qui prendrait le dossier en main, mais nous ne sommes jamais passés à l'action.

Les gens avec qui nous travaillons en Colombie-Britannique ont parlé avec des gens de l'Ontario, qui nous ont demandé de les appeler. Nous en avons discuté avec eux, et ils se sont montrés très intéressés à travailler avec nous. Nous constatons que les provinces pensent que c'est une bonne idée, alors nous devons combler ces lacunes.

En Alberta, nous avons communiqué avec un conseil scolaire et nous lui avons parlé de toutes les possibilités sportives s'offrant aux personnes handicapées, du niveau national jusqu'au club communautaire. Le conseil scolaire nous a suggéré d'en parler à tous leurs enseignants travaillant auprès des enfants en difficulté. Un autre conseil scolaire en a entendu parler, et nous avons donc rencontré les enseignants en enfance en difficulté des deux conseils scolaires. Cela a fait boule de neige, et la province veut maintenant que nous fassions des présentations devant tous les enseignants travaillant auprès des enfants en difficulté et de tous les enseignants d'éducation physique. Nous offrons en ce moment une série d'ateliers. L'accent n'est pas vraiment mis sur les sports paralympiques, mais plutôt sur les sports offerts aux personnes handicapées, notamment aux personnes souffrant d'un handicap physique, de déficience sensorielle ou de déficience intellectuelle. Nous voulons surtout que le plus d'enseignants possible, peu importe leur domaine, sachent que des activités sont offertes pour les enfants.

C'est moi qui agis comme animateur, ou encore nous invitons un athlète à venir animer les ateliers. Nous leur parlons de la natation, de l'athlétisme, du tir à l'arc, du goalball et du jeu de boules, et nous leur disons que plusieurs choix s'offrent à eux en fait de sports et d'activités récréatives. Nous constatons que les enseignants ne sont pas au courant de ces choses. Ces derniers savaient que des jeux paralympiques, avec médaillés, étaient présentés à la télévision tous les deux ou quatre ans, mais ils n'avaient jamais entendu parler des clubs permettant de pratiquer des sports récréatifs. Ils ne savaient absolument pas que des programmes provinciaux encadraient ce genre d'activités.

C'est le genre d'initiatives qui commencent à prendre forme, et le défi maintenant consiste davantage à trouver des gens qui sont prêts à jouer ce rôle. La personne qui a amorcé ce mouvement en Colombie-Britannique et en Alberta est la coordonnatrice du programme Nouvelles perspectives, vie nouvelle en Alberta. C'est une ancienne enseignante qui a travaillé à l'élaboration de programmes d'enseignement, et c'est ce qui l'a amenée à faire ce qu'elle fait aujourd'hui.

Est-ce qu'on s'efforce de trouver ces personnes? Tentons-nous de trouver des gens qui ont de l'expérience dans le domaine des soins de santé, qui occupent une place prépondérante dans ce secteur et qui s'intéressent aux sports? Y a-t- il des enseignants qui connaissent bien les programmes d'enseignement et qui s'intéressent aux sports? C'est ce genre de personnes que nous devons trouver, et nous devons favoriser leur engagement au sein de la collectivité fédérale- provinciale afin d'éliminer le territorialisme, car celui-ci n'aura alors plus d'importance. Les projecteurs doivent être braqués sur les enfants. L'objectif, c'est de permettre aux enfants de participer à des activités. Que l'initiative provienne des provinces ou du gouvernement fédéral, cela importe peu. Je sais que c'est bien joli dit de cette façon, mais qu'il faut quand même aller chercher du financement et du soutien quelque part.

Si on peut justifier l'objectif à atteindre, on peut justifier son financement, plutôt que de trouver le financement pour ensuite tenter d'atteindre son but.

Le sénateur Kochhar : Il y a une solution pour chaque problème. Il n'est pas question d'un seul et unique problème qu'il est impossible de régler, mais il faut reconnaître qu'on a négligé de corriger certaines choses. Toutes les provinces ont un organisme équivalent au Comité paralympique canadien. C'est vrai en Ontario, en Colombie-Britannique et en Alberta. Au niveau national, le gouvernement fédéral se montre assez généreux, mais c'est loin d'être reluisant du côté provincial. En Ontario, l'organisme reçoit en tout 134 000 $ par année. Ce montant ne leur permet même pas de louer des locaux ou d'embaucher quelqu'un pour diriger l'organisation. Comment remédier à ces iniquités entre les gouvernements fédéral et provinciaux?

M. Sawicki : C'est une question très difficile que vous me posez.

Mme Blaine : Je peux formuler quelques commentaires, si vous me le permettez. L'ensemble des provinces et des territoires ont approuvé la Politique canadienne du sport. L'initiative de financement bilatérale, qui prévoit un financement partagé entre les provinces et le gouvernement fédéral, est fantastique. Elle a permis de mettre en place différents programmes à l'intention des personnes handicapées. Nous devons maintenant passer à l'étape suivante et faire progresser les choses à travers le pays.

Je ne crois pas que les intervenants du monde des sports adaptés soient territoriaux. Nous voulons nous assurer que les possibilités sont là. Il y a beaucoup de travail à faire au sein de notre organisation, alors si nous trouvons quelqu'un d'efficace, nous ne voulons certainement pas nous en priver pour une question de territoire.

Je me permets de vous corriger. Ce ne sont pas toutes les provinces qui ont un comité paralympique. C'est toutefois le cas pour plusieurs. Encore là, il n'y a pas de modèle universel, et ce n'est pas ce que veulent toutes les provinces non plus. Cela peut très bien fonctionner dans certains cas, mais il faut tenir compte des réalités de chacune des provinces.

Le sénateur Hubley : Dans la plupart des sports offerts aux jeunes non handicapés, il y a un programme spécifique à leur intention. Ce programme est également assorti d'objectifs repères qui font appel à la nature compétitive des jeunes enfants, les incitant à atteindre différents niveaux pour obtenir une petite récompense. En natation, par exemple, ils doivent passer par une série de badges et de médailles, peu importe le niveau qu'ils souhaitent atteindre. C'est la même chose pour le hockey.

Y a-t-il aussi ce genre de repères dans les sports adaptés? Peut-être que ce n'est pas aussi pertinent pour vous que ce ne le serait pour les athlètes non-voyants ou malentendants. Est-ce que cela existe déjà? Pensez-vous que cela pourrait encourager les jeunes à participer aux activités?

M. Sawicki : Quand il s'agit de handicaps congénitaux, nous avons des groupes d'enfants assez nombreux qui suivent à peu près la même chronologie, et c'est alors possible de reproduire certains des paliers auxquels vous faites référence dans plusieurs activités sportives. Ils peuvent acquérir des habiletés semblables et obtenir une certaine reconnaissance.

Dans le cas de handicaps acquis, particulièrement si c'est récent, il se peut qu'une personne de 25 ans se lance dans un sport au niveau auquel sont habituellement rendus les enfants de 10 ans. On parle ici de l'âge d'expérience, et on tente de déterminer l'âge d'expérience parallèle pour cette personne, alors comment établir des jalons? On renvoie encore à une norme déterminant le niveau d'habileté dans un sport donné et pour lequel on est récompensé.

À la différence des sports traditionnels, il n'y a pas nécessairement de badge pour indiquer le niveau atteint dans les sports adaptés.

Je glisse rapidement cette idée de créer une structure selon laquelle les clubs offrant des sports de haut niveau autant pour les athlètes non handicapés que pour les athlètes handicapés pourraient être désignés comme des clubs de niveau or. Si un club offre des programmes de développement à ces deux catégories d'athlètes, il obtient le titre de club de niveau argent. L'intention n'est pas de juger de la qualité du club; le but est de permettre aux parents qui cherchent un programme pour leur enfant de savoir que des activités sont offertes pour les personnes handicapées dans les clubs de niveau or, argent et bronze. C'est une solution possible. C'est une initiative qui pourrait être partagée entre les provinces et le gouvernement fédéral. On pourrait créer un insigne qui permettrait à un club de s'annoncer comme un club offrant des programmes pour les personnes handicapées.

Mme Blaine : Dans ma présentation, j'ai indiqué qu'il fallait mettre en place un modèle de développement à long terme pour les athlètes aveugles. C'est exactement ce que ferait ce modèle. Nous savons que les enfants aveugles n'ont pas le même développement que les autres enfants et que l'acquisition des habiletés motrices ne se fait pas du tout au même rythme. Rien n'est offert en ce moment, et nous avons désespérément besoin d'un tel modèle.

M. Hahto : Dans notre sport, nous avons un programme de normes assez exhaustif pour les nageurs handicapés, qui peuvent faire partie d'équipes nationales et pour lesquels on enregistre les temps records.

J'abonde dans le même sens que M. Sawicki. Dans notre sport, nous avons aussi un programme d'excellence à l'intention des clubs. Le but de ce programme est notamment d'encadrer les activités des clubs, et cela comprend les tenants et aboutissants entourant les programmes de natation pour personnes handicapées, car les clubs ont souvent peur de se lancer dans cette aventure. Les gens ne savent tout simplement pas comment procéder. Notre programme d'excellence vise à apaiser certaines de ces craintes et à faire valoir quelques-unes des meilleures pratiques.

La présidente : Vous avez parlé d'intégration et d'origines ethniques. J'aimerais que chacun d'entre vous me dise quel est le pourcentage de jeunes filles qui participent à vos activités. Aussi, quel est le pourcentage approximatif de vos participants qui ne sont pas de race blanche?

M. Hahto : Nous avons environ 55 p. 100 de nageuses pour 45 p. 100 de nageurs. Le ratio est le même chez les nageurs non handicapés et les nageurs handicapés. Quelque 90 p. 100 de nos participants sont de race blanche.

M. Sawicki : Dans le volet paralympique de notre sport, environ 20 à 25 p. 100 de nos athlètes sont de sexe féminin. La participation des groupes ethniques croît à bon rythme, probablement la croissance la plus marquée pour nous. Actuellement, notre effectif est composé de personnes de race blanche à 80 p. 100, mais cette proportion change rapidement. Notre groupe d'athlètes de la relève compte probablement 40 p. 100 de personnes qui ne sont pas de race blanche en ce moment.

Mme Blaine : Nous avons autant de participants masculins que féminins. Des études nous ont appris que l'écart est moins marqué chez les non-voyants que chez les voyants. Malheureusement, les non-voyants, autant les hommes que les femmes, affichent un très faible niveau d'activité physique.

Je n'ai pas le nombre exact de participants qui ne sont pas de race blanche, mais je peux obtenir cette information pour vous. Nous savons toutefois que l'incidence des handicaps visuels est plus élevée chez certaines populations, dont la population autochtone.

La présidente : Merci à vous tous. Vous nous avez poussés à réfléchir et vous avez réussi à nous sensibiliser à des questions qui vous tiennent à cœur.

Je souhaite bonne chance à chacun d'entre vous.

(La séance est levée.)


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