Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 2 - Témoignages du 24 mars 2010
OTTAWA, le mercredi 24 mars 2010
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 16 h 18, pour étudier les dispositions et l'application de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques (L.C. 1998, ch. 37).
Le sénateur Joan Fraser (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Nous poursuivons notre étude des dispositions et de l'application de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, qui a été adoptée en 1998. Cette étude se fait dans le cadre d'un examen prévu par la loi.
Nous accueillons aujourd'hui avec grand plaisir des représentants de laboratoires médico-légaux : M. Amarjit Chahal, directeur principal et chef technique de la société Warnex Services PRO-ADN; M. Wayne Murray, directeur des Services d'analyse médico-légale et génétique de la société Maxxam Analytique; M. Martin Westecott, superviseur et biologiste légiste de la même société. Bienvenue, messieurs, à cette séance de notre comité et au Sénat. Merci d'être venus témoigner.
Vous connaissez peut-être déjà notre façon de procéder lorsque nous entendons des témoins. Vous faites une allocution liminaire, puis nous vous posons des questions. Nous commençons par M. Murray.
Wayne Murray, directeur, Services d'analyse médico-légale et génétique, Maxxam Analytique : Merci. Honorables sénateurs, j'aimerais d'abord vous remercier de nous donner l'occasion d'être parmi vous. Tout le plaisir est pour nous.
Permettez-moi de vous présenter la société Maxxam Analytique pour amorcer notre discussion sur les questions à l'étude. Maxxam Analytique est l'un des principaux laboratoires de services scientifiques au Canada. La science est notre spécialité. Nous offrons nos services dans l'ensemble du Canada, où nous possédons 32 laboratoires. Nous sommes un gros employeur puisque nous avons 1 800 employés au pays, dont la plupart ont une solide formation scientifique.
Nous effectuons des analyses pour une clientèle variée, dans les secteurs d'activité de notre entreprise. Nous faisons des analyses environnementales, des analyses de produits pétroliers, des analyses de la salubrité des aliments ainsi que des analyses médico-légales et génétiques. Nous occupons la première place sur le marché dans chacun de ces secteurs. Nous jouissons visiblement d'une bonne réputation pour cinq raisons : notre expertise, nos méthodes et politiques d'assurance de la qualité, nos délais d'exécution, nos prix ainsi que notre caractère de société entièrement canadienne. Nous appartenons au Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario, qui est l'une des grandes caisses de retraite au Canada.
Parmi les recettes de Maxxam Analytique, 47 millions de dollars par année proviennent directement de partenariats publics-privés et de marchés publics, notamment avec le ministère de l'Environnement, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, le Service correctionnel du Canada, le ministère de la Défense nationale et la Gendarmerie royale du Canada, pour n'en nommer que quelques-uns.
La Division des services d'analyse médico-légale et génétique, dont je suis le directeur, est composée de quatre départements distincts. Je me bornerai ici à parler d'un seul d'entre eux, soit les services d'analyse médico-légale et d'analyse génétique. J'y reviens dans un instant. Nous effectuons des tests de paternité, des analyses génétiques sur des animaux et des tests de détection de substances toxicomanogènes. Nos clients sont des organismes publics, des services de police, de producteurs de bétail, des gestionnaires de banques de données et des employeurs dans des milieux où la sécurité est primordiale.
Voici maintenant les faits saillants de nos 10 années d'existence, dans le domaine des services d'analyse médico-légale et génétique.
Notre entreprise a été fondée en 1998 et constituait certainement, à l'époque, un cas unique en son genre. Nous avons réuni, au sein de Maxxam Analytique, des gens possédant de l'expérience dans le secteur public, comme moi et mon collègue, M. Westecott, avec des gens du secteur privé, dans le but de créer un réseau unique de laboratoires pouvant effectuer des analyses biologiques médico-légales.
À l'instar de la GRC, nos laboratoires sont homologués par le Conseil canadien des normes depuis l'année 2000. L'homologation a été renouvelée environ cinq fois par la suite. Dans le but de prendre de l'expansion hors du marché canadien, sur le marché des États-Unis, nous avons également obtenu l'homologation de Forensic Quality Services, l'organisme étasunien qui certifie la conformité des laboratoires aux normes d'assurance de la qualité établies par le directeur du FBI.
Nous avons actuellement, avec la GRC, un contrat d'offre à commandes d'une durée de neuf ans, dans lequel nous fournissons des services complets d'analyse biologique médico-légale. Conformément à ce contrat, la GRC effectue une vérification annuelle pour s'assurer que nous répondons à ses besoins et à ses normes de qualité.
Nous sommes actuellement le seul laboratoire privé au Canada que la GRC autorise à verser des profils génétiques désignés dans la Banque nationale de données génétiques. Jusqu'à maintenant, dans le cadre de notre travail avec la GRC et directement avec d'autres services de police du Canada, nous avons produit plus de 2 000 rapports d'analyse médico-légale. La clientèle que nous nous sommes constituée comprend donc la GRC, des services de police canadiens, des spécialistes des questions médico-légales et même de simples citoyens.
Fait à noter en particulier, nous avons préparé 1 035 profils génétiques à verser dans le Combined DNA Index System des États-Unis et dans la Banque nationale de données génétiques. Nous avons obtenu 420 résultats positifs d'analyse reliant un profil au fichier des condamnés ou au fichier de criminalistique, ce qui constitue un taux de résultats positifs de 41 p. 100.
Je crois que notre entreprise a sa place en tant que fournisseur de services qui complètent, au Canada, le travail de la GRC, du Centre des sciences judiciaires et des laboratoires médico-légaux du Québec, notamment pour accélérer les délais d'exécution et étendre la gamme des services offerts.
Voilà qui vous donne un aperçu de notre entreprise et de nos activités. Je serai heureux de répondre à vos questions et d'en discuter avec vous.
Amarjit Chahal, directeur principal et chef technique, Warnex Services PRO-ADN : Bonjour, honorables sénateurs. Vous avez en main le texte de mon allocution, au cas où vous auriez de la difficulté à me suivre.
Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles au sujet des dispositions et de l'application de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. Je suis directeur principal et chef technique de la société Warnex Services PRO-ADN inc., filiale établie à Thunder Bay, en Ontario, de la société ouverte Warnex inc., qui œuvre dans le domaine des sciences de la vie et qui est vouée à la protection de la santé publique. Warnex inc. fournit des services d'analyse en laboratoire au secteur pharmaceutique et au secteur des soins de santé. Son personnel compte environ 200 personnes.
Je désignerai la filiale Warnex Services PRO-ADN par le nom Warnex. C'est la seule filiale qui s'occupe des analyses génétiques médico-légales. Avant juin 2009, elle s'appelait Molecular World inc. Ses locaux se trouvent à Thunder Bay, en Ontario. Elle fournit depuis six ans des services spécialisés d'analyse génétique médico-légale à des avocats de la défense et à des services de police, notamment la GRC, la Police provinciale de l'Ontario et des services de police municipaux du Canada.
Warnex est la seule entreprise privée dont les laboratoires sont homologués pour effectuer des analyses génétiques au moyen des quatre techniques existantes. Il existe trois techniques d'analyse de l'ADN nucléaire, y compris celle qui est employée pour la Banque nationale de données génétiques, et il existe aussi une technique d'analyse de l'ADN mitochondrial. Nous utilisons ces techniques sur des prélèvements modernes et anciens.
Le Conseil canadien des normes a homologué notre conformité à la norme ISO 17025, concernant les services d'analyse génétique médico-légale. Cette homologation est identique à celle que détiennent les laboratoires médico-légaux de la GRC. Des membres de notre personnel ont été appelés à témoigner devant la justice en tant qu'experts de l'identification par les empreintes génétiques, au moyen de l'ADN mitochondrial et de l'ADN nucléaire.
Warnex réalise des analyses dans des délais rapides, pour faciliter la surveillance et les enquêtes. Elle peut fournir aux enquêteurs les résultats de ses analyses dans un délai de 10 à 30 jours, ce qui permet des économies tangibles de temps et d'argent. De nombreux suspects peuvent être rapidement incriminés ou exclus. Il convient en outre, pour des motifs humanitaires et par souci de compassion, de résoudre les affaires dans les meilleurs délais grâce à des services rapides d'analyse génétique.
Actuellement, seule la technique de l'ADN nucléaire est employée dans les laboratoires appartenant à l'État pour les analyses médico-légales et pour alimenter la Banque nationale de données génétiques, dont il est question aujourd'hui. Or, un peu partout dans le monde, l'analyse de l'ADN mitochondrial a fait la preuve de son utilité, pour les services de police, comme technique médico-légale fournissant des résultats probants. Le FBI a commencé à avoir recours à l'analyse de l'ADN mitochondrial en 1996, et notre laboratoire s'est mis à offrir ce service en 2003, à Thunder Bay. De nombreuses analyses de l'ADN mitochondrial ont été retenues comme preuves valides devant les tribunaux, aux États- Unis. Au Canada, l'analyse de l'ADN mitochondrial a été retenue comme preuve, en 2006, dans l'affaire R. c. Woodcock, où Ronald Woodcock a été déclaré coupable. C'est le premier procès criminel, dans les annales judiciaires canadiennes, où l'analyse de l'ADN mitochondrial a été utilisée comme preuve.
Le sénateur Baker : L'affaire s'appelle-t-elle R. c. Woodcock?
M. Chahal : Oui.
Le sénateur Baker : Merci.
M. Chahal : Warnex a utilisé cette technologie dans de nombreuses affaires. Vous en trouverez des exemples dans la documentation qui vous a été remise. Je vais suivre l'ordre chronologique. Cette technique est plus importante parce qu'elle peut aider la justice à résoudre des affaires datant d'un certain nombre d'années.
Le premier exemple, R. c. Woodcock, date de 1994. Le deuxième est l'identification d'une personne disparue depuis 1991, Lambert Daniels. Le troisième est l'identification d'un suspect dans l'affaire Candace Derksen, à Winnipeg, en 1984. Cette jeune fille avait disparu cette année-là. Il y a environ deux ans, nos analyses ont permis de retracer un suspect. Cette technique est utile aussi pour identifier de vieux restes humains, comme des soldats de la Première Guerre mondiale. Nous avons participé à l'identification de soldats de la Première Guerre mondiale.
Bien qu'on m'ait demandé de témoigner pour répondre aux questions sur la Banque nationale de données génétiques de la GRC en tant que représentant d'une entreprise privée qui effectue des analyses génétiques, je voudrais saisir l'occasion pour vous suggérer des améliorations à apporter à cette banque. Je crois qu'on devrait y inclure un fichier des personnes disparues ainsi que des résultats d'analyse de l'ADN mitochondrial, c'est-à-dire la deuxième technique, dont je viens de vous parler.
M. Ron Fourney, qui est présent dans l'assistance, a travaillé de nombreuses années sur cette proposition et a déjà fait valoir, devant le Parlement, l'importance d'une telle base de données.
Pour vous donner un exemple, en 2000, le laboratoire du FBI a commencé à mettre en œuvre un programme national de base de données génétiques pour l'identification des personnes disparues. Le fichier ainsi constitué, dans la banque nationale de données du FBI, peut contenir des profils d'ADN mitochondrial et des profils d'ADN nucléaires.
Fait important à souligner, il n'existe aucune base de données de ce type au Canada, même s'il s'y trouve des centaines de cas de personnes portées disparues et de restes humains non identifiés, qui pourraient l'être si l'on disposait d'une base de données ou si la base de données actuelle était étoffée par l'ajout d'un fichier de personnes disparues et de profils génétiques réalisés avec la seconde technique.
L'inclusion des deux types d'analyse génétique dans une base de données des personnes portées disparues au Canada comporterait les avantages suivants. Premièrement, des familles de personne disparue cesseraient de souffrir de l'incertitude et y trouveraient un soulagement. Deuxièmement, des familles de personne disparue seraient réconfortées de savoir que leurs empreintes génétiques tirées des analyses de l'ADN mitochondrial et de l'ADN nucléaire ont été consignées dans la base de données des personnes disparues et que les forces de l'ordre s'activent pour identifier la personne disparue. Troisièmement, il serait rassurant de savoir que les profils d'ADN mitochondrial et nucléaire réalisés à partir des effets personnels de la personne disparue et de prélèvements sur des membres de sa famille ont été consignés avant le décès de ceux-ci. En effet, si tous les membres de la famille sont décédés au moment où les restes de la personne disparue sont retrouvés, ces restes ne peuvent plus être identifiés. Quatrièmement, les restes partiels peuvent être remis aux familles une fois qu'ils ont été identifiés, c'est-à-dire une fois que le profil génétique a été consigné. Si d'autres restes de la même personne sont retrouvés plus tard, il n'y aura pas de confusion. À l'inverse, si des restes partiels sont remis à la famille sans que le profil génétique soit consigné, les autres restes qui seront retrouvés par la suite ne pourront jamais être identifiés. Voilà qui démontre bien l'importance d'ajouter un fichier des personnes disparues à la base de données actuelle.
Étant donné que notre laboratoire ne prépare pas actuellement des profils génétiques à verser dans la base de données, je me suis dit que ma suggestion devait porter surtout sur la façon de s'y prendre pour l'étoffer.
En 2005, un document de consultation ayant été publié faisait un tour d'horizon sur les problèmes à résoudre en vue de créer une base de données génétiques permettant de faire des liens entre les personnes portées disparues et les restes humains non identifiés. Ce document s'inspirait du travail réalisé précédemment par un groupe de travail fédéral- provincial-territorial. La création d'un fichier de données génétiques sur les personnes disparues nous permettrait d'utiliser des techniques existantes pour déterminer si des restes humains non identifiés sont ceux d'une personne disparue, ce qui serait une source de soulagement pour la famille.
La présidente : Merci beaucoup à tous les deux. Nous passons maintenant aux questions.
Le sénateur Wallace : Merci pour ces exposés très intéressants. Comme vous le savez peut-être, on nous a beaucoup parlé des laboratoires médico-légaux appartenant à l'État. Il est intéressant de savoir que le secteur privé a aussi un rôle à jouer.
J'aimerais personnellement en savoir davantage sur les capacités des laboratoires médico-légaux du secteur privé comparativement aux laboratoires appartenant à l'État. Si je vous ai bien compris, vos laboratoires ont reçu la même homologation que les laboratoires de la GRC et les laboratoires provinciaux en Ontario et au Québec.
Pourriez-vous nous confirmer que c'est bien le cas et que vos techniques et vos pratiques ne souffrent pas de limites qui feraient que vos laboratoires ne seraient pas tout à fait comparables à ceux qui appartiennent à l'État ou qui sont exploités par lui?
En fin de compte, comment peut-on utiliser en complémentarité les techniques et les pratiques du secteur privé avec celles des laboratoires de l'État? J'aimerais vous entendre tous les deux à ce sujet.
M. Chahal : Notre homologation concerne un domaine seulement, soit les analyses biologiques et génétiques. Les laboratoires de la GRC sont homologués pour toutes les analyses médico-légales, qu'il s'agisse de documents, d'empreintes digitales, d'armes à feu ou d'autre chose. C'est la principale différence. Pour les analyses génétiques, nous utilisons des techniques identiques ou semblables. La conformité des laboratoires est établie par rapport à la même norme parce que le Conseil canadien des normes applique une norme distincte pour les analyses biologiques et génétiques. Les laboratoires de la GRC et les laboratoires privés sont homologués selon la même norme.
M. Murray : Les laboratoires de Maxxam Analytique sont homologués par le Conseil canadien des normes selon la même norme relative aux analyses que les laboratoires de la GRC. Le Centre des sciences judiciaires reçoit son homologation de la commission d'homologation des laboratoires de l'American Society of Crime Laboratory Directors. C'est la même norme qui est appliquée, mais l'homologation se fait par un organisme différent, et les mesures diffèrent quelque peu. Je suis au courant parce j'étais un employé du Centre des sciences judiciaires lorsque Doug Lucas, le directeur à l'époque, a fait les démarches pour obtenir l'homologation. Les exigences sont les mêmes, mais l'organisme d'homologation est différent. Ce n'est pas le même organisme non plus dans le cas du laboratoire provincial au Québec.
Pour répondre à votre question directement, je vous dirais que les laboratoires de Maxxam répondent à la même norme que ceux de la GRC. Les mêmes personnes sont susceptibles de faire les vérifications dans les deux cas. La GRC vérifie nos laboratoires, mais c'est dans le cadre de notre offre à commandes, et non de notre homologation.
En ce qui concerne la dernière partie de votre question, concernant l'équipement et les techniques, il existe à la GRC un groupe de recherche et développement sous la direction de M. Fourney. Je dirais que ce groupe est plus au courant que nos entreprises privées des avancées technologiques les plus récentes et des utilisations potentielles de ces avancées dans les laboratoires.
Le sénateur Wallace : Monsieur Murray, dans votre exposé, vous avez indiqué que votre laboratoire avait comme rôle, selon vous, de fournir des services complémentaires à la GRC et aux laboratoires provinciaux du Québec et de l'Ontario, n'est-ce pas?
M. Murray : Oui.
Le sénateur Wallace : Que voulez-vous dire par là?
M. Murray : Rendons à César ce qui est à César. Il y a neuf ans, la GRC a eu la prévoyance de s'apercevoir qu'à l'avenir, elle risquait d'avoir des besoins dépassant sa capacité à fournir certains services avec son propre personnel, qu'elle ne pouvait pas facilement augmenter. Elle a donc fait un appel d'offres à commandes, auquel un certain nombre d'entreprises ont répondu, et a mis sur pied un système lui permettant d'avoir recours à une telle offre lorsque ses laboratoires seraient surchargés de travail. Le domaine des analyses biologiques médico-légales étant soumis à des périodes de pointe imprévisibles, par exemple lorsque se produit une affaire comme les meurtres Pickton, auxquels la GRC a dû consacrer beaucoup de ressources, elle a dû trouver une solution pour qu'en pareil cas, on puisse continuer d'effectuer les analyses médico-légales routinières. La GRC et Maxxam ont conclu un partenariat public-privé qui est à l'avantage de tous et qui nous permet de continuer de fournir des services pour les affaires routinières ou ordinaires tout en absorbant le travail intense associé aux meurtres Pickton. C'est ainsi que nos services sont complémentaires.
La complémentarité se manifeste également d'une deuxième façon. Comme nous travaillons avec la GRC depuis neuf ans, nous nous sommes fait connaître des services de police du Canada. Nous avons envoyé des rapports d'analyse à 350 services de police. Même lorsque c'est avec la GRC que nous travaillons, nous savons que les autres services de police voient en nous une entreprise qui s'assure de respecter les normes et de posséder les compétences nécessaires. Nos rapports d'analyse sont rédigés sur du papier à en-tête Maxxam. Les policiers ont pu constater que Maxxam fournissait des services de qualité.
Par conséquent, les autres services de police se sont mis à regarder du côté de Maxxam lorsque la GRC n'était pas en mesure de leur fournir ce dont ils avaient besoin, au moment voulu. Maxxam trouve désormais parmi eux des clients qui s'adressent directement à elle pour répondre à divers besoins, par exemple s'il leur faut un service rapide dans un dossier particulier. Il peut arriver aussi qu'un substitut du procureur général ou un service de police ait besoin de pousser une analyse plus loin par rapport à l'analyse initiale. Nous répondons à ce genre de besoins.
Le sénateur Wallace : Certains ont des réserves au sujet du respect de la confidentialité lorsqu'on fait appel à des laboratoires privés pour les analyses génétiques. On craint pour la confidentialité de l'information sur les personnes dont vous analysez l'ADN. En outre, comme les résultats de vos analyses sont susceptibles de se retrouver souvent comme preuves dans une procédure judiciaire, il est crucial de s'assurer de la protection et du contrôle des éléments de la preuve.
Qu'auriez-vous à dire, tous les deux, à propos du respect de la vie privée, de la confidentialité des résultats ainsi que de la protection et du contrôle des éléments de la preuve? Les services qu'ont fournis vos laboratoires privés, en particulier à la GRC, ont-ils été jugés satisfaisants à ces égards?
M. Chahal : Warnex fournit ces services depuis six ans et n'a jamais eu de problème de respect de la confidentialité. Nous savons que nous devons fournir des services confidentiels à nos clients, qui sont pour la plupart des services de police, et non des avocats de la défense. Nous nous sommes dotés de politiques et de méthodes de travail semblables à celles de toute entreprise ou tout organisme public chargé de fournir des services confidentiels d'analyses génétiques médico-légales.
Le sénateur Wallace : Je suis certain que vous devez signer des accords de confidentialité.
M. Chahal : Oui. On nous demande de ne pas parler du tout de certaines affaires parce qu'elles ont été résolues au moyen des analyses effectuées dans le laboratoire de la GRC. Ces dossiers restent confidentiels. Nous aurions peut-être avantage à parler des affaires très médiatisées, pour faire connaître les réalisations de notre entreprise, mais nous n'en disons pas un mot.
Je n'ai jamais rencontré de problème à cet égard. Les politiques sont les mêmes dans les laboratoires privés et les laboratoires de l'État. La conformité aux règles de confidentialité est vérifiée dans le cadre de l'homologation.
M. Murray : Je vais répondre à vos questions en commençant par la dernière. La protection et le contrôle des éléments de la preuve sont une pratique courante à laquelle sont habitués les biologistes chargés des analyses médico- légales. C'est l'une des premières choses que l'on enseigne à ceux qui doivent témoigner devant la justice, y compris à nos collègues de la GRC. C'est aussi une question importante pour l'homologation de notre entreprise et pour la vérification à laquelle nous soumet la GRC. Cela fait partie de notre travail. Nous devons être capables de protéger et de contrôler les éléments de la preuve. En fin de compte, ce sont les procédures judiciaires qui déterminent si les éléments de la preuve ont été bien protégés et contrôlés. Si nous manquions à notre obligation, on nous le ferait certainement savoir.
Nous devons respecter la confidentialité dans les services fournis à la GRC, conformément à l'offre à commandes, et dans les services fournis aux autres services de police, mais nous devons également respecter ce principe avec l'ensemble de nos clients. Comme je l'ai dit à de nombreux services de police, je suis très heureux de me voir confier une première analyse, mais je suis beaucoup plus heureux de m'en voir confier une cent unième. Si je ne respecte pas la confidentialité à un moment ou un autre, je détruis ma propre entreprise. La garantie de confidentialité est, pour moi, une question vitale.
La confidentialité importe dans tout ce que fait Maxxam. Nous n'avons pas le temps aujourd'hui que je vous parle de nos autres secteurs d'activité, mais la confidentialité est une question centrale chez Maxxam, dans tout ce que nous faisons, y compris les analyses génétiques et les autres analyses biologiques médico-légales. En outre, pour pouvoir faire des tests de paternité en Colombie-Britannique et en Alberta, conformément au contrat que nous détenons, nous devons être au courant des règles de protection de la vie privée dans ces deux provinces. Nous puisons notre savoir non seulement dans le secteur des analyses médico-légales, mais aussi dans les autres secteurs où œuvre Maxxam.
Le sénateur Wallace : Merci beaucoup. C'est très utile.
[Français]
Le sénateur Carignan : Suivant vos présentations, il semble y avoir une différence entre le lien que chacun de vos laboratoires entretient avec la GRC. Pouvez-vous nous expliquer s'il y a une différence et, si oui, laquelle?
J'ai l'impression qu'un laboratoire en particulier — celui de M. Murray — effectue l'analyse, mais a aussi la possibilité d'effectuer la comparaison ou de consulter la banque pour effectuer la comparaison, mais que ce n'est pas le cas de celui de M. Chahal. Est-ce bien le cas ou est-ce que je fais erreur?
[Traduction]
M. Chahal : Vous avez raison. Notre laboratoire ne fournit pas de profils génétiques à enregistrer dans la banque de données. Nous fournissons des services complémentaires parce que nous sommes le seul laboratoire privé à être homologué pour les analyses d'ADN mitochondrial. Le laboratoire de la GRC n'est pas en mesure d'effectuer ces analyses. Si une affaire nécessite une analyse des deux types d'ADN, l'enquêteur envoie un prélèvement au laboratoire de la GRC, où l'analyse de l'ADN nucléaire sera effectuée, et nous envoie un prélèvement pour que nous puissions faire l'analyse de l'ADN mitochondrial, avec la technique médico-légale spécialisée que nous possédons. Puis, la police peut combiner les deux résultats. À l'heure actuelle, nous ne versons pas les résultats de nos analyses directement dans la banque de données, car il n'existe pas de fichier pour enregistrer les analyses d'ADN mitochondrial, c'est-à-dire les analyses faites avec la deuxième technique. Nos analyses portent seulement sur les suspects trouvés par les enquêteurs. Nous faisons l'analyse d'un prélèvement constituant un élément de preuve, dont nous tirons un profil d'ADN mitochondrial, puis la police nous envoie un prélèvement pour chaque suspect, car les analyses d'ADN mitochondrial ne sont versées dans aucune banque de données.
[Français]
Le sénateur Carignan : Ceci pour être en mesure d'interroger la banque par la suite; vous ne faites donc pas l'interrogation de la banque comme le laboratoire de M. Murray peut le faire?
La présidente : Je ne pense pas que ce soit tout à fait exact.
[Traduction]
Monsieur Murray, vous pouvez verser les résultats de vos analyses dans la banque de données génétiques, mais vous ne pouvez pas faire des recherches dans cette banque, n'est-ce pas?
M. Murray : C'est exact. Permettez-moi de vous expliquer. Nous n'avons pas accès directement à la Banque nationale de données génétiques. C'est la GRC qui, dans le cadre de notre offre à commandes, approuve ou non l'enregistrement, dans la banque, des données que nous lui fournissons. Par exemple, lorsque nous recevons une demande d'analyse de la GRC et que nous nous chargeons du dossier du début à la fin, nous lui remettons un profil génétique. Puis, si nous pensons que ce profil devrait être versé dans la Banque nationale de données génétiques, nous devons suivre la procédure et la politique établies. C'est à nous de remplir un formulaire, de le vérifier et de le soumettre à la GRC, avec toute l'information pertinente. Il revient à la GRC de déterminer par la suite s'il y a lieu de verser le profil dans la Banque nationale de données génétiques. Nous n'avons pas un accès direct, et c'est ce mode de fonctionnement qui est prévu dans l'offre à commandes.
J'ajouterais simplement à cela que nous collaborons bien avec la GRC. Je sais que Peter Henschel est venu témoigner devant vous. Il a fait circuler une note de service indiquant que, pour le moment, Maxxam Analytique est le seul laboratoire auquel les services de police peuvent faire appel parce que nous avons été soumis à une vérification de la GRC ou de l'État. Si nous produisons des profils génétiques en réponse à des demandes de service de la police, auxquelles nous répondons directement, sans passer par le contrat d'offre à commandes avec la GRC, ces profils peuvent quand même être versés dans la banque de données. Permettez-moi de souligner encore les sages décisions prises par la GRC. Nous en avons souvent discuté pendant nos neuf années de collaboration, et ce fut une mesure judicieuse de sa part de permettre une utilisation optimale des données produites par les analyses. Que les données proviennent de la GRC ou de Maxxam, elles peuvent être versées dans la banque de données pour qu'on puisse les utiliser comme il se doit, c'est-à-dire comme un instrument pour assurer la sécurité publique. Nous pouvons trouver un lien entre un crime et un délinquant déjà condamné auparavant ou un lien entre deux crimes, de manière à aider la police dans ses enquêtes.
[Français]
La présidente : Je pense que le sénateur Joyal a une question supplémentaire; nous pourrons ensuite revenir au sénateur Carignan.
Le sénateur Carignan : Si vous permettez, je pourrais terminer car il s'agit de ma dernière question.
Vous créez donc une certaine banque d'informations et vous possédez vos propres dossiers avec vos propres profils. Je comprends que vous êtes tenus à des engagements de confidentialité, mais en cas de faillite ou de transfert d'entreprise, cela peut quand même causer des difficultés. Est-ce que dans le contrat intervenu avec la GRC, en cas de faillite ou de vente d'entreprise, vous transférez automatiquement ces informations à la GRC ou si vous les conservez?
[Traduction]
M. Murray : Je vais répondre aux questions l'une après l'autre. Premièrement, notre entreprise n'a pas de banque de données.
C'est la GRC qui conserve les dossiers et les profils. Voici comment nous procédons. Nous renvoyons les pièces à conviction au service de police qui nous les a transmises. Les échantillons et les sous-échantillons tirés de ces pièces sont renvoyés dans un lieu où sont conservées les substances prélevées parce qu'ils ne m'appartiennent pas. Ils appartiennent au service de police qui fait enquête. Des dossiers sont renvoyés régulièrement à la GRC, conformément au contrat d'offre à commandes, pour la simple et bonne raison que ces dossiers sont le résultat de son travail et lui appartiennent.
En cas de faillite ou de vente de l'entreprise, tout le matériel en notre possession sera remis à la GRC, car il lui appartient. Elle y a accès en tout temps. Nous lui envoyons régulièrement ce qu'elle demande. Nous ne conservons rien. En vertu de mon contrat, je ne garde rien et je considère qu'aucun matériel ne m'appartient en raison de la responsabilité de la GRC et pour éviter des erreurs judiciaires. Je ne crois pas que ceci soit un problème.
Si jamais la GRC n'était plus à l'aise de collaborer avec Maxxam, elle pourrait avoir recours à une clause de retrait et ainsi mettre fin à la relation d'affaires en peu de temps. Il nous suffirait de compléter et de clore les dossiers, puis de retourner le matériel. La situation était similaire lorsque je suis parti du Centre des sciences judiciaires, un organisme public, pour aller dans le secteur privé. Par la suite, j'ai dû maintenir mes obligations en ce qui a trait aux dossiers sur lesquels j'avais alors travaillé, tout comme Maxxam ou ses employés devraient le faire. Si un jour je suis convoqué en qualité de témoin, je dois me présenter au tribunal, apporter mon aide et témoigner avec l'objectivité d'un scientifique, point final. C'est la loi.
Le sénateur Joyal : Je vais revenir sur un point soulevé par le sénateur Carignan, mais avant tout, je crois qu'il serait bien que vous nous expliquiez la distinction entre l'analyse de l'ADN nucléaire et l'analyse de l'ADN mitochondrial. Je ne suis pas biologiste. Quelle est la différence fondamentale entre les deux types d'analyses? Nous semblons comprendre ce que vous dites, mais je suis certain que bon nombre d'entre nous ont des questions à ce propos.
Le président : Pourriez-vous répondre tout de suite à la question par égard pour tous ceux ici qui ne sont pas biologistes?
M. Chahal : Avez-vous devant vous le document PowerPoint qui vous a été distribué?
Le président : Oui, celui-ci.
M. Chahal : Allez à la 3e diapositive de la page 1. Le cercle qui s'y trouve représente une cellule humaine. La partie qu'on appelle le noyau de la cellule se trouve au milieu du cercle. C'est de là que provient l'ADN nucléaire, dont la moitié est héritée de la mère et l'autre moitié, du père. Une cellule possède seulement deux exemplaires de cet ADN. Je vous ai dit que nous sommes autorisés à employer quatre techniques d'analyse génétique. Trois d'entre elles utilisent le noyau, soit le centre de la cellule. Elles permettent d'analyser l'ADN nucléaire.
Sur le schéma, vous pouvez voir un grand nombre de points à l'extérieur du noyau. C'est là que se trouve l'ADN mitochondrial. Ces points sont des organites cellulaires qui jouent un rôle dans le fonctionnement de nos cellules. En plus, ils possèdent un ADN hérité exclusivement de la mère. Par exemple, mon ADN mitochondrial est le même que celui de mon frère, de ma sœur et de ma mère. L'ADN de ma mère est le même que celui de sa mère. Il est transmis par la ligne maternelle.
L'avantage de l'ADN mitochondrial est que chaque cellule en contient des centaines d'exemplaires, et non pas deux. C'est grâce à ce type d'ADN que nous avons été en mesure d'identifier des soldats de la Deuxième Guerre mondiale et des membres de l'équipage d'un bombardier Halifax. Il est petit, et il peut en rester pendant de nombreuses années puisqu'il existe en grande quantité. Chaque cellule n'a pas seulement deux exemplaires de cet ADN. Comme tous les squelettes humains en renferment, il joue un rôle dans l'identification de restes humains dont j'ai parlé. C'est la raison pour laquelle ce type d'ADN revêt une si grande importance.
Ceci étant dit, on n'utilise pas systématiquement cette technique pour tous les échantillons, car elle présente aussi des points faibles. Elle comporte des avantages dans certains cas, mais des inconvénients dans d'autres. Bien que la technique d'analyse génétique ordinaire qu'utilise le laboratoire de la GRC soit encore la méthode de référence, elle ne convient pas dans toutes les situations. Par exemple, lors d'agressions sexuelles, on trouve toujours des cheveux sur les lieux du crime et sur les vêtements des victimes. Or, les cheveux ne possèdent pas d'ADN ordinaire; ils ne portent que l'ADN mitochondrial. Dans la toute première affaire judiciaire sur laquelle nous avons travaillé, on avait trouvé des cheveux dans une voiture volée qui avait été utilisée lors d'un vol d'armes à feu au cours duquel le suspect avait tué le propriétaire du véhicule en question puis le propriétaire du magasin. Comme les cheveux que nous avons reçus avaient été prélevés dans la voiture, nous ne pouvions donc pas utiliser la technique d'analyse génétique ordinaire, et les cheveux constituaient le seul élément de preuve. Nous avons alors procédé à l'analyse de leur ADN mitochondrial. La plupart d'entre eux appartenaient bien entendu au propriétaire de la voiture et quelques-uns à sa femme. Seuls trois cheveux provenaient du suspect, qui devait aussi se trouver dans la voiture. C'est là que réside l'utilité de cette technique d'analyse génétique.
Ce type d'ADN a pour inconvénient de ne pas toujours permettre de distinguer les individus parce que chaque personne a le même mitotype que sa mère, ses frères et ses sœurs.
Le président : La question que je vais poser dénote ma profonde ignorance du sujet. Si tout le monde a un ADN différent, comment mon ADN mitochondrial peut-il être le même que celui de ma mère? Est-ce parce qu'il est assez semblable de génération en génération?
M. Chahal : En théorie, votre ADN mitochondrial est identique à celui de votre mère, car ce type d'ADN ne peut changer qu'après de nombreuses générations.
Le président : Comment pouvez-vous savoir si c'est moi ou ma mère — qu'elle repose en paix — qui a commis un meurtre?
M. Chahal : On ne peut pas le savoir. C'est l'enquêteur qui doit analyser les éléments de preuve à caractère non génétique pour exclure tous les proches ayant un lien maternel.
Le président : Je vous l'avais bien dit, c'était une question qui procède de ma grande ignorance et de ma mauvaise compréhension. Sénateur Runciman, je m'excuse de ne pas vous avoir donné la parole tout à l'heure. Vous êtes sur la liste, et vous aurez assurément votre tour.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : La question posée par le sénateur Joyal m'intéressait aussi. De façon plus spécifique, le processus scientifique des deux méthodes pour déterminer l'ADN est-il le même? Le coût est-il le même? La valeur scientifique sur le plan judiciaire est-elle la même?
[Traduction]
M. Chahal : Lorsque nous analysons un élément de preuve provenant des lieux d'un crime, le processus scientifique est semblable dans les deux cas puisque nous isolons l'ADN total, c'est-à-dire les deux types d'ADN. Ensuite, c'est la méthode d'analyse des ADN qui diffère. Nous élaborons ce qui s'appelle un profil d'identification génétique tant pour l'ADN mitochondrial que pour l'ADN ordinaire. Toutefois, les deux profils sont différents.
Ensuite, si l'ADN mitochondrial est utilisé pour écarter des individus, les deux types d'ADN ont la même valeur probante. Une personne exclue est tout simplement exclue. Toutefois, utiliser l'ADN mitochondrial pour identifier des personnes peut poser problème, puisqu'il ne s'agit pas d'un identificateur unique, contrairement à l'ADN ordinaire, qui est différent pour chaque personne sauf pour les vrais jumeaux. L'ADN mitochondrial de deux personnes dont le lien maternel remonte à de nombreuses générations est identique. Pour ce qui est de la valeur probante, c'est ce qui pose problème.
Lorsque c'est possible, on recommande donc d'utiliser la technique de l'ADN nucléaire puisqu'elle permet de mieux distinguer les personnes. Dans le cas contraire, on peut alors avoir recours à la technique de l'ADN mitochondrial, même si elle ne permet pas toujours d'établir une différence entre les individus. Malgré cela, elle a été utilisée dans des centaines d'enquêtes aux États-Unis depuis 1996. On l'utilise aussi au Canada.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Le coût est-il le même sur le plan des travaux en laboratoire?
[Traduction]
M. Chahal : C'est la raison pour laquelle les laboratoires d'analyse de l'ADN mitochondrial sont rares au Canada. Nous sommes le seul laboratoire privé. C'est une technique très dispendieuse. L'analyse de l'ADN mitochondrial coûte à peu près quatre fois plus cher que celle de l'ADN ordinaire.
Ceci étant dit, on n'a pas tellement besoin de cette technique dans les enquêtes courantes, car la méthode ordinaire peut être utilisée dans les cas d'agression sexuelle, par exemple. La technique de l'ADN mitochondrial sert à identifier des personnes disparues, des squelettes. On y a recours aussi si on n'a pas suffisamment d'ADN nucléaire — il n'y en a que deux exemplaires, alors que l'ADN mitochondrial est présent en centaines d'exemplaires. Dans ces situations, nous utilisons donc la technique de l'ADN mitochondrial, une méthode très dispendieuse et longue, mais qui a sa place dans les cas d'identité judiciaire.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Lorsqu'on a rencontré des représentants du Québec, M. Dufour a émis deux commentaires. Le premier commentaire consistait à une augmentation des demandes des corps policiers pour l'ADN, qui se sont multipliées par six depuis environ 2001. Avez-vous connu la même explosion en termes de demandes?
[Traduction]
M. Chahal : Notre entreprise a ouvert ses portes en 2003 et elle a été accréditée en 2004. Cette année-là, nous avons reçu très peu de demandes pour la technique de l'ADN mitochondrial. Aujourd'hui, nous travaillons probablement sur dix fois plus de cas par année, puisque cette technique relativement nouvelle gagne en popularité. Quand elle fera partie de la Banque nationale de données génétiques, elle sera encore plus utilisée, mais jamais autant que la technique de l'ADN ordinaire. Selon moi, la technique ordinaire représentera toujours plus de 95 p. 100 du travail, alors qu'on aura recours à la seconde technique dans moins de 5 p. 100 des cas.
M. Murray : À cette question, je réponds oui sans hésiter, tant pour le secteur public que privé.
Dans ce milieu de la biologie médico-légale, nous créons ou avons créé notre propre travail. J'ai fait mes débuts dans ce domaine en 1991. À l'époque, la technologie n'était pas aussi précise, et nous ne pouvions pas faire les tests que nous faisons aujourd'hui. Maintenant, nous pouvons analyser une quantité infime de sang séché ou un seul cheveu et des choses que nous n'aurions jamais pu imaginer en 1991.
Grâce à l'augmentation de la sensibilité et à l'évolution de la technologie, nous sommes capables d'analyser de plus petites particules et ce, plus rapidement. Même s'il existe un effet CSI en ce qui a trait à ce que nous pouvons faire actuellement, j'ai constaté que les demandes d'analyse de l'ADN se sont multipliées, d'abord dans le secteur public, où cette technologie a vu le jour, et maintenant dans le secteur privé. Je crois qu'il s'agit en fait de faire tout ce que nous pouvons, car c'est extrêmement important pour le maintien de l'ordre et la sécurité publique. Ces analyses sont donc devenues très en demande.
À mes débuts, personne ne connaissait les techniques d'analyse de l'ADN. L'acronyme anglais « DNA » signifiait « do not ask », parce qu'à l'époque, les gens ne comprenaient pas cette technologie. Ensuite, on s'est aperçu qu'elle représentait un réel pouvoir et que c'était un cadeau de la criminalistique comme on n'en a pas souvent. Maintenant, tout le monde veut l'utiliser.
En 2000, lorsque nous avons obtenu notre accréditation en tant que laboratoire privé, je me souviens qu'un de mes amis avait écrit un article dans le Toronto Star dans lequel il disait que cette incroyable technologie était maintenant accessible au citoyen ordinaire. Nous l'utilisons non seulement pour le maintien de l'ordre, mais également lorsqu'une personne trouve dans sa cour arrière, un beau matin, des traces de sang et qu'elle veut savoir d'où elles viennent et s'il s'agit de sang humain ou animal; elle peut alors téléphoner à un laboratoire pour obtenir de l'aide. Dans la plupart des milieux, cette technologie n'est pas offerte par le secteur public. Les médecins praticiens et les avocats, entre autres, savent maintenant à qui s'adresser. Nous travaillons pour des entreprises alimentaires et dans la reconstitution d'accidents dans le domaine de l'ingénierie légale, où les analyses de l'ADN peuvent fournir des réponses à de nombreuses questions.
Il y a une forte augmentation des demandes pour ces tests, tant dans les services policiers que dans d'autres milieux.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Lorsque vous effectuez des analyses ADN pour la cour, est-ce à titre de témoin expert? Nous avons rencontré les gens du Québec ou de la GRC qui semblaient avoir un doute quant à savoir si les tests avaient plus de valeur s'ils étaient effectués par le gouvernement que par le domaine privé en regard d'un témoignage devant la cour.
Lorsque vous effectuez un test d'ADN pour un corps policier, êtes-vous êtes appelé à témoigner comme témoin expert? Et au niveau judiciaire, cela a-t-il autant de valeur que ce soit un fonctionnaire qui le fasse?
[Traduction]
M. Murray : La réponse à cette question est oui, pour plusieurs raisons. Le sénateur ici a répondu oui sans hésiter. Je suis allé témoigner à 70 reprises devant les tribunaux, la plupart du temps en tant qu'employé du secteur public, et quelques fois du secteur privé.
Étant donné que nous avons une offre à commandes avec la GRC, mon collègue M. Westecott est maintenant appelé plus souvent que moi à témoigner. Nous ne témoignons pas aussi souvent que dans le passé, lorsque cette technologie était moins acceptée, mais nous le faisons encore.
Pour répondre à votre question, lorsque nous avons mis sur pied ce laboratoire privé, nous avons craint, parce qu'il s'agissait d'une technologie nouvelle et novatrice, que les gens se précipitent pour vérifier si nous étions efficaces, compétents et capables de soutenir le travail et de l'accomplir honorablement. C'est la raison pour laquelle nous avons d'abord demandé l'accréditation. Nous avons, ce qui était nouveau à l'époque, embauché des gens du secteur public et nous avons profité de leurs connaissances pour avancer. Je crois que cette approche, ainsi que l'accréditation que nous avons obtenue et notre collaboration de longue date avec la GRC, nous ont donné de la crédibilité, ce qui fait que nous n'avons pas à démontrer en cour que nos services sont aussi fiables que ceux du secteur public.
Nous sommes tout aussi fiables dans ce que nous faisons, et on le reconnaît.
M. Chahal : En tant que témoin expert, étant donné que je témoigne et pour la défense et pour la poursuite, on me considère davantage comme impartial. Lorsque je consulte le document de la cour après mon témoignage, je vois de bons commentaires. On dit, par exemple, que j'étais impartial ou que j'ai présenté uniquement les données scientifiques. Cela dit, le témoin expert du gouvernement fait la même chose. Ce n'est qu'une question de perception. Puisque nous travaillons pour la défense et pour la poursuite, le fait que nous présentions seulement les données scientifiques est bien vu. Nous sommes les témoins experts sur le plan scientifique dans l'affaire en question.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : J'ai une autre question sur un sujet qui m'intéresse beaucoup; il s'agit bien évidemment des disparitions. Vous avez parlé d'un fichier ADN pour les cas de disparitions. Les quatre avantages que vous apportez, je les partage entièrement pour en avoir entendu parler par des familles dont un proche est disparu.
En mai 2006, le projet de loi C-279 prévoyait l'instauration d'un tel fichier ADN concernant les disparitions. Avez- vous participé aux travaux du comité sénatorial qui, à l'époque, avait proposé l'adoption d'un tel fichier?
[Traduction]
M. Chahal : Non. C'était principalement le travail de M. Ron Fourney, qui a présenté toute la question de la création d'une base de données d'ADN mitochondrial ou d'un fichier des personnes disparues. À l'époque, notre entreprise était modeste. La plupart de mes travaux n'allaient pas aussi loin. Nous commencions tout juste à utiliser cette technologie. L'idée dominante était là, mais la plupart des travaux ont été faits par M. Ron Fourney, qui a comparu, je crois, devant le comité sur cette question. J'espère bien qu'un jour, on intégrera un fichier des personnes disparues à la Banque nationale de données génétiques, comme le font actuellement les États-Unis.
Le sénateur Boisvenu : Merci.
M. Murray : Je suis d'accord. Nous n'avons pas été consultés en ce qui concerne ce projet de loi. Toutefois, il y a environ trois ans, nous avons pris part à des discussions avec la GRC concernant un fichier des personnes disparues.
Si je me souviens bien, le document de consultation initial qui a été proposé avant la création de la Banque nationale de données génétiques avait en fait trois volets : un fichier de criminalistique, un fichier des condamnés et une disposition au sujet d'un fichier des personnes disparues.
Pour un certain nombre de raisons, le fichier des personnes disparues a été laissé de côté; on s'est concentré sur la mise en place du fichier criminalistique et du fichier des condamnés afin que les corps policiers puissent s'en servir dans le cadre de leurs enquêtes.
La création d'un fichier des personnes disparues a toujours été envisagée et nous en avons toujours discuté directement avec la GRC. En fait, je crois que même les spécialistes du domaine moléculaire ont mené des discussions sur la façon dont nous pourrions participer à sa mise en place. Si cela faisait l'objet d'une impartition, quels en seraient les coûts? Pourrait-on traiter toutes les demandes? Pourrait-on utiliser et modifier la technologie nécessaire pour le faire? Nous avons participé à des consultations à ce sujet, mais pas en ce qui concerne le projet de loi lui-même.
Le sénateur Baker : Je souhaite la bienvenue aux témoins. Vous avez tous les trois été déclarés témoins experts devant nos tribunaux inférieurs et supérieurs du pays. Dans votre cas, monsieur Murray, cela remonte au milieu des années 1990, si je me souviens bien. C'est Martin Westecott qui a pris la relève dans la jurisprudence récente. Je suppose que c'est parce qu'à l'époque, vous travailliez pour la Banque nationale de données génétiques, mais plus maintenant.
Pour ce qui est de vos compétences comparativement à celles des experts des services gouvernementaux ou de la GRC, monsieur Westecott, j'ai noté que dans l'affaire R. c. Godin, en 2007, le juge de la Cour supérieure devait déterminer si vous aviez accompli votre travail en respectant les normes de la GRC. Au paragraphe 75, on dit que vous avez utilisé une méthode quelque peu différente de celle utilisée par la GRC et que vous avez déclaré que la différence entre votre façon de procéder et celle, selon vous, de la GRC tient au fait que vous êtes allé un peu plus loin. Cela démontre l'excellence de votre travail.
Je reviens maintenant à M. Chahal. La raison pour laquelle on n'en parle pas beaucoup dans la jurisprudence, selon moi, c'est que les analyses de l'ADN mitochondrial ne faisaient pas partie de la criminalistique avant 2004 ou 2005. Je l'ai lu dans les sommaires de l'arrêt R. c. Woodcock. Auparavant, ces tests ne faisaient pas partie de la criminalistique, n'est-ce pas? Ce n'est que durant le nouveau procès que votre témoignage a été utilisé et que vous avez été déclaré le principal expert dans cette technologie.
M. Chahal : Oui. Je crois que j'ai témoigné dans cette affaire durant trois jours au stade précédant le procès, ainsi que trois jours durant le procès. C'était le deuxième cas. Le premier était l'affaire R. c. Murrin, en 1999, et le travail avait été fait par le Forensic Science Service britannique. Des témoins du laboratoire du FBI avaient aussi été entendus, puisque le FBI avait également un laboratoire à l'époque.
Nous avons tardé à adopter la technologie relative à l'ADN mitochondrial parce qu'aucun laboratoire privé ou gouvernemental n'offrait le service. Il existe maintenant un laboratoire géré par une université, également à Thunder Bay, appelé le Lakehead University Paleo-DNA Laboratory. Il y a actuellement deux laboratoires au Canada qui ont reçu une accréditation dans cette technologie.
Le sénateur Baker : Vous avez fait votre doctorat à Guelph, je crois.
M. Chahal : Oui.
Le sénateur Baker : C'est là que vous avez fait vos études de premier cycle, puis vous êtes allé aux États-Unis pour travailler dans ce domaine.
M. Chahal : Je crois que l'on fait état de mes antécédents professionnels dans la transcription de l'affaire R. c. Woodcock.
Le sénateur Baker : Ma question s'adresse à vous trois. Nous sommes la Chambre du second examen objectif. Nous avons le dernier mot en ce qui concerne les mesures législatives et nous sommes en train d'examiner la Banque nationale de données génétiques. Ces derniers jours, des témoins nous ont dit que les laboratoires gérés par le gouvernement sont si débordés qu'ils ne peuvent même pas s'occuper des infractions secondaires.
Au cours des deux dernières années, nous avons adopté une loi qui prévoit la délivrance d'une ordonnance autorisant un prélèvement pour analyse génétique pour des infractions désignées, lesquelles sont définies comme étant des infractions primaires et des infractions secondaires.
Nous voyons beaucoup de causes, en particulier les affaires d'agression sexuelle avec violence, être rejetées par le tribunal en raison du délai nécessaire pour effectuer l'analyse des empreintes génétiques. L'année dernière, la Cour suprême du Canada a rendu une décision qui justifiait la suspension d'instance dans la célèbre affaire R. c. Godin. On a maintenu la suspension parce qu'il a fallu plus de neuf mois pour effectuer l'analyse des empreintes génétiques. L'alinéa 11(b) de la Charte canadienne des droits et libertés prévoit que l'on doit être jugé dans un délai raisonnable, mais ce n'est pas le résultat que l'on obtient.
Les laboratoires du gouvernement sont débordés, selon leurs responsables. Ne pourriez-vous pas vous occuper du travail qu'ils ne peuvent pas effectuer? Cela poserait-il un problème?
M. Murray : En ce qui concerne le dernier point, nous effectuons une partie de ce travail, tant dans le cadre de l'offre à commandes qu'à l'extérieur. Quant à savoir si nous en faisons assez, c'est une question de ressources, et peut-être de financement, qui transcende plusieurs frontières. Je ne crois pas que les services de police disposent de suffisamment de fonds pour conclure un contrat de 250 000 $ avec Maxxam Analytics, même si je sais qu'en situations de crise — soit pour la gestion des risques et du temps, lorsqu'un agresseur actif est en liberté —, ils dépenseront les fonds nécessaires. Il m'est arrivé de voir des agents de police utiliser leurs cartes de crédit personnelles pour payer les coûts des travaux.
Je ne pointe personne du doigt, mais compte tenu du contexte budgétaire actuel, les services de police et les laboratoires judiciaires doivent prendre des décisions difficiles au sujet de ce qui peut être fait. On nous demande constamment de faire plus dans une même affaire et dans les affaires non résolues, ainsi que de faire davantage de comparaisons de profils dans les banques de données génétiques. Il y a énormément de travail à faire.
Je crois qu'une synergie peut être atteinte entre le secteur public et le secteur privé afin de résoudre certains de ces problèmes. Les témoins précédents de la GRC et du Centre of Forensic Sciences, ou CFS, en ont donné des exemples. Dans le cadre des projets de lutte contre les crimes à volume élevé, la GRC s'efforce sans cesse d'améliorer sa technologie et sa rapidité.
Je crois que des efforts sont faits en ce sens. Des gens très brillants cherchent à favoriser des changements, mais davantage de ressources financières à plusieurs niveaux aideraient à résoudre ce problème.
Le sénateur Baker : Le vrai problème ne concerne pas seulement les cas d'agression sexuelle avec violence. Dans le jugement de la Cour suprême du Canada du 4 juin 2009, on indique dans le sommaire que le ministère public n'a jamais expliqué la raison du retard dans la communication des résultats de l'analyse génétique.
De plus, nous constatons qu'il y a de plus en plus de cas de vol qualifié avec port d'un masque et de vol qualifié avec violence, comme celui de Terre-Neuve l'année dernière, qui sont rejetés à cause de l'incapacité des services policiers d'obtenir des services de criminalistique en temps opportun. Lors de notre dernière réunion, des témoins de laboratoires du gouvernement nous ont dit qu'il est même impossible pour eux de se pencher sur les infractions secondaires.
Vous dites que le problème est peut-être lié à l'argent. Selon vous, le problème ne provient pas de vous, n'est-ce pas? Si vous disposiez de suffisamment de fonds, pourriez-vous effectuer le travail qui n'est pas accompli actuellement?
M. Murray : Je suis un grand partisan de la complémentarité et des partenariats public-privé. Nous pouvons réunir les nombreuses forces des secteurs public et privé, et travailler ensemble à la résolution des problèmes. Nous pourrions diminuer les retards, élargir la portée du service aux infractions secondaires et augmenter le pouvoir de la Banque nationale de données génétiques. Un financement à bon escient serait un premier pas, et il existe des façons dont nous pouvons travailler ensemble en ce sens.
Le sénateur Baker : Nous avons toute une liste d'infractions secondaires. Vous les connaissez. On a récemment adopté au Sénat un projet de loi en vertu duquel ces infractions secondaires constituent des infractions désignées pour lesquelles une ordonnance autorisant un prélèvement pour analyse génétique est délivrée par un juge d'une cour provinciale. Les gens qui effectuent les analyses affirment qu'il leur est impossible de le faire. Or, si l'on n'a pas de preuves, on ne peut pas poursuivre quelqu'un en justice et on ne le mérite pas, d'ailleurs, mais cela nous mènera tout droit vers une crise dans les tribunaux. Les personnes accusées d'agression sexuelle avec violence s'en tirent en vertu de l'alinéa 11b) de la Charte, comme nous le constatons dans la jurisprudence.
Selon vous, on pourrait résoudre ce problème avec la collaboration des personnes qui poursuivent les auteurs de ces infractions si l'on avait les fonds nécessaires pour accorder des contrats aux entreprises privées, qui feraient les analyses que les services gouvernementaux n'ont pas le temps de faire. Est-ce bien cela?
M. Murray : Je crois que l'entreprise privée peut contribuer à la solution, mais nous ne sommes pas l'unique solution. Cela nécessite un travail d'équipe. Nous pouvons contribuer collectivement à résoudre ce problème.
Le sénateur Baker : Je tiens à féliciter les témoins de l'excellent travail qu'ils accomplissent devant les tribunaux. J'ai lu les décisions, et ils font vraiment du bon travail.
Le président : Merci, sénateur Baker.
Le sénateur Joyal : J'aimerais revenir sur une question très importante pour nous qui a été soulevée dans le rapport de la vérificatrice générale du Canada en 2007. Je ne sais pas si vous êtes au courant que la vérificatrice générale a examiné la Banque nationale de données génétiques et qu'elle a présenté des recommandations et des conclusions. Elle a notamment conclu que le système de gestion de la qualité des laboratoires judiciaires relatif à la Banque nationale de données génétiques ne fonctionnait pas comme prévu et qu'il ne pouvait pas fournir à la haute direction une assurance de la qualité. Il s'agit d'une évaluation assez importante du fonctionnement de la banque de données. Heureusement, on nous a dit que la vérificatrice générale était revenue vérifier les améliorations apportées ou les initiatives entreprises par la banque afin d'améliorer le système de la qualité. De plus, M. Tessarolo, de la banque de données de l'Ontario, nous a confirmé la semaine dernière que le vérificateur général de l'Ontario collaborait avec le centre médico-légal de sa province afin d'examiner la procédure. Nous avons posé la même question au représentant du laboratoire du Québec.
Puisque ces trois banques de données relèvent des institutions publiques, nous pouvons compter sur un système de contrôle de la qualité et de gestion du contrôle de la qualité, mais en ce qui a trait à votre laboratoire, qui agirait à la place de la vérificatrice générale afin de veiller à ce que la gestion de la qualité de votre laboratoire vise des normes semblables à celles auxquelles sont soumises les institutions publiques?
M. Chahal : L'un des moyens de nous en assurer est un organisme d'accréditation comme le Conseil canadien des normes. C'est la même organisation qui accrédite les laboratoires privés et publics. C'est l'une des assurances qui sont en place. Il y a aussi le fait qu'avant que le contrat soit accordé, le laboratoire du gouvernement procède à une inspection du laboratoire privé afin de s'assurer que la qualité et les procédures, notamment, sont semblables. Il existe un mécanisme de freins et de contrepoids, et la vérification externe est faite par le client, en l'occurrence la GRC.
Nous croyons au mécanisme de surveillance de l'organisme gouvernemental. Aux États-Unis, par exemple, la banque de données est externalisée à des milliers de laboratoires privés, mais le laboratoire du gouvernement exerce une surveillance. Il s'agit du même système de banque de données. C'est pourquoi leur banque de données contient plus de 7 millions d'échantillons. La plus grande partie du travail, ou du moins une proportion importante, est effectuée par les entreprises privées, mais le gouvernement surveille la qualité. Il le fait notamment au moyen d'échantillons de contrôle de la qualité. Il surveille les données. Il inspecte les laboratoires privés et avant même que les données ne soient transférées, elles sont examinées.
Le sénateur Joyal : Vous dites donc qu'il revient au client, c'est-à-dire au gouvernement, de s'assurer que la gestion de la qualité est conforme aux normes auxquelles est soumise la banque gouvernementale elle-même, et qu'un examen minutieux sera également effectué par un tiers, c'est-à-dire par le bureau du vérificateur général de l'Ontario, du Québec ou du gouvernement fédéral.
M. Chahal : Dans notre cas, il s'agit de l'accréditation du Conseil canadien des normes. Étant donné que nous sommes une entreprise privée, je ne peux répondre à une question au sujet des rapports de l'entreprise privée avec le Bureau du vérificateur général.
Le sénateur Joyal : Non, non. Je comprends. De toute façon, les laboratoires sont certifiés ou accrédités. Le laboratoire de l'Ontario est accrédité; celui du Québec aussi. Le vôtre aussi. Ils sont tous accrédités. Néanmoins, la vérificatrice générale du Canada a constaté que le système de gestion de la qualité ne fonctionnait pas. Ce n'est pas parce qu'un laboratoire est certifié ou accrédité que le système de gestion de la qualité atteint ses objectifs. Saisissez- vous la nuance?
Vous me dites que si un client, c'est-à-dire un gouvernement, un service de police municipal, la GRC, la Police provinciale de l'Ontario ou n'importe quel corps de police provinciale, vient me demander d'effectuer une analyse, qu'elle soit, comme vous dites, nucléaire ou mitochondriale, ce client doit s'assurer que nous respectons les exigences du système de gestion de la qualité qui font en sorte que nos résultats seront absolument sûrs et à toute épreuve. C'est essentiellement ce que vous me dites, à moins que j'aie mal compris votre réponse.
M. Chahal : Oui, l'organisme d'accréditation est un organisme externe. Le client, c'est-à-dire la police municipale ou la GRC, s'assurera que là où il envoie les échantillons, le système de gestion de la qualité est au même niveau que celui du laboratoire gouvernemental. De plus, nous faisons déjà l'objet d'un examen minutieux dans le système judiciaire; vous avez vu mes documents à cet effet. Si nous nous trompons et que l'on s'en aperçoit au tribunal, nous devrons probablement fermer le laboratoire. Puisque nous sommes une entreprise privée, les actionnaires retireront leur argent assez vite; nous subissons donc beaucoup de pression en ce sens pour fournir des services de qualité.
Le sénateur Joyal : Monsieur Murray?
M. Murray : Je dirais que je suis du même avis et que c'est probablement ainsi que cela se passe. La vérificatrice générale n'a pas la possibilité de venir vérifier ce qui se passe dans mon laboratoire, mais pour ce qui est des organismes d'accréditation, on parle d'indépendance et d'objectivité; divers spécialistes du domaine viennent observer nos activités tous les deux ans, qu'il s'agisse du Conseil canadien des normes ou des Forensic Quality Services. C'est la première étape du processus d'approbation qui confirme que nous sommes une organisation axée sur la qualité et que nous respectons les normes.
En ce qui me concerne, cela s'ajoute également au fait que la GRC joue pour moi le rôle de vérificateur général, car au-delà de ces vérifications, ils effectuent les leurs pour veiller à ce que je réponde à leurs besoins comme client.
Je fais aussi l'objet de vérifications du système judiciaire lorsque je comparais devant les tribunaux et que je témoigne devant les avocats de la Couronne et les juges, et je sais que la GRC surveille le témoignage que nous faisons et envoie des questionnaires du client pour s'informer de notre travail, savoir s'il a été bien fait, connaître la qualité de nos rapports et savoir s'ils sont écrits de façon claire et concise et si les conclusions sont compréhensibles.
Je dirais qu'à ce stade-ci, pour nous dans le secteur privé, la fonction du vérificateur général se compose d'une multitude de personnes ou d'organismes d'accréditation — la GRC, le système judiciaire, les clients en général, et des normes relatives à l'accréditation en particulier. Voilà comment l'on vérifie nos activités.
Le sénateur Joyal : Oui, vous faites l'objet d'une vérification égale à celle de la GRC parce qu'ils sont soumis exactement au même type d'examen.
J'essaie de comprendre s'il nous serait possible de tout transférer au secteur privé et d'en être satisfaits ou si nous devrions maintenir une institution publique ou gouvernementale qui établirait les normes de contrôle de la qualité. Nous avons un tiers, qui se trouve à être une institution appelée vérificateur général, qui peut inspecter le système de gestion de la qualité lorsque la personne ou l'institution estime qu'il y a lieu de le faire. Au bout du compte, comme vous le savez, les résultats font en sorte que des gens sont incarcérés ou non, ce qui est très sérieux, ou ils permettent d'identifier des personnes portées disparues, ce qui est aussi une question publique sérieuse. C'est l'élément de votre exposé d'aujourd'hui que je veux comprendre. Avons-nous besoin d'une banque de données nationales publique pour nous assurer que les normes sont établies et qu'elles sont respectées, comme vous l'avez dit, par le secteur privé? Le secteur privé a un rôle important à jouer. Je ne remets pas du tout cela en question. J'essaie de comprendre le rôle précis de chacun d'entre vous.
M. Chahal : La surveillance du gouvernement aura toujours sa place. Nous voyons dans les exemples au R.-U. que ce qui a commencé comme un système public est devenu un partenariat public-privé. Aux États-Unis, il s'agit également d'un partenariat public-privé. On a déjà déterminé que le système fonctionne du moment qu'il y a un organisme gouvernemental qui assure la surveillance de l'ensemble du système, car notre travail porte sur des cas médico-légaux.
Le sénateur Joyal : Merci.
Le sénateur Runciman : Pour en revenir à un commentaire que vous avez formulé tout à l'heure, monsieur Chahal, en ce qui touche la comparution devant un tribunal en tant que témoin expert, vous avez dit qu'on vous perçoit peut- être comme étant moins partial. Peut-être que je vous ai mal interprété, mais je crois vous avoir entendu le dire. Je me demande si c'est l'impression que vous avez tous les trois lorsque vous comparaissez comme témoins experts.
Je fais le lien avec l'un des comités de la Chambre qui a étudié cette question et laissé entendre que d'autres provinces et territoires devraient suivre l'exemple du Québec et de l'Ontario et faire une séparation entre la police et le travail d'analyse que vous faites. Je me demande quelle est votre impression lorsque vous comparaissez devant un tribunal. Avez-vous l'impression que c'est comme cela que l'on perçoit votre témoignage par rapport à celui d'un représentant de la GRC?
M. Chahal : Ce sont des commentaires qui n'entrent pas dans les transcriptions ou les documents judiciaires. C'est ce qui ressort lorsque les deux parties vous parlent après coup, comme « vous avez fait du bon travail » ou « vous avez fait un bon exposé ». Chaque fois que j'ai eu à témoigner pour la partie poursuivante, l'avocat de la défense est venu me voir pour me dire que j'avais fait du bon travail, que je présentais vraiment les éléments scientifiques.
Cela dit, ce n'est qu'une perception, car si une personne est un témoin expert compétent et qualifié du laboratoire gouvernemental, elle fera la même chose. Au bout du compte, nous sommes tous des scientifiques ou des biologistes moléculaires, alors nous sommes censés présenter des faits scientifiques. Ce n'est pas une question; c'est plutôt une perception. Voilà ce que j'avais à dire.
M. Murray : Comme nous avons passé du temps dans les secteurs public et privé, nous essayons de faire en sorte que notre formation et nos tâches quotidiennes soient objectives et impartiales du point de vue scientifique. Je ne sais pas si c'est le propre d'un organisme, qu'il soit public ou privé. Je crois qu'il est possible que ce soit plutôt le propre d'une personne. En général, cela ressort dans votre façon de témoigner et les mots que vous avez à dire.
Je ne crois pas qu'on soit plus partial dans le secteur privé et moins dans le secteur public, quelle que soit la direction. Selon ce que j'ai pu constater, c'est relié à la formation, à l'aisance et à l'expérience des scientifiques mêmes. Nous aspirons tous à être objectifs et à représenter la science le mieux possible. Nous essayons de sensibiliser les avocats de la Couronne, les avocats de la défense, les juges et les jurés pour qu'ils comprennent ce que nous faisons. Compte tenu de notre formation, ce n'est pas une mince affaire. Je crois que cela dépend de la personne, et je ne crois pas que quiconque tente d'être impartial.
Le sénateur Runciman : J'ai quelques commentaires rapides à formuler au sujet de la demande de privatisation du sénateur Baker. Monsieur Murray, vous avez parlé d'offrir un service complémentaire. J'en suis conscient. Nous avons été inondés de rapports au cours des 24 dernières heures, mais je fais allusion à un document en particulier, un examen des coûts et de la capacité des Services de laboratoires judiciaires en ce qui touche les analyses génétiques, qui a été préparé par les Services conseils du gouvernement (SCG) et est daté du 30 novembre 2009.
La page 17 indique que les SCG se seraient attendus à ce que les délais et l'arriéré des demandes de la GRC se soient améliorés au fur et à mesure que l'on dispose de ressources. Le scénario part du principe que la GRC a considérablement plus de fonctions automatisées que les autres laboratoires, mais il arrive seulement à avoir un rendement semblable à celui du Québec et de l'Ontario avec environ le double du nombre d'employés en Ontario. Avec la technologie dont l'on dispose, les SCG estiment que la capacité de fonctionnement actuelle est excédentaire.
Là où je veux en venir c'est à la question du rôle plus important que devrait jouer le secteur privé dans ce dossier. Je ne m'attends pas à ce que vous formuliez des commentaires sur les niveaux de rendement des opérations à la GRC, mais il est clair que c'est un domaine sur lequel le comité devrait se pencher. Je ne crois pas que la question ait déjà été pleinement évaluée à l'échelle fédérale. Je sais que nous avons reçu un document, si je comprends bien au cours des deux dernières journées, de la part du directeur du Centre des sciences judiciaires, qui porte sur les questions de privatisation qui ont été soulevées lorsqu'il a comparu. Ce document réfute les avantages réels ou perçus d'une plus grande participation dans le secteur privé.
Certains de ces commentaires semblent contraires à ce que vous dites au sujet des types de services que vous offrez, de la crédibilité que vos deux organismes ont et de l'expertise que vous être en mesure d'offrir.
Je ne suis pas certain, madame la présidente, s'il serait approprié de donner une copie de ce document aux témoins.
La présidente : Je crois que ce serait certainement approprié; c'est essentiellement un document public. Les membres du comité y ont accès. Ce serait peut-être une autre histoire de leur demander d'y donner suite immédiatement.
Nous pouvons leur remettre des copies du document en question, et si vous pouviez leur poser les questions auxquelles vous aimeriez qu'ils répondent, nous pourrions leur demander de nous fournir les réponses par écrit dans les plus brefs délais une fois qu'ils auront eu le temps de réfléchir un peu au document.
Le sénateur Runciman : Oui, je vais le faire. Merci. Lorsque je regarde ce document, je vois que cette question a fait l'objet de trois évaluations en Ontario, mais d'aucune au fédéral. Les évaluations ont, à la base, été effectuées à l'interne, à l'exception de l'examen réalisé par le juge Archie Campbell dans l'affaire Bernardo. Le juge Campbell a formulé des commentaires au sujet de la participation accrue du secteur privé auxquels votre témoignage d'aujourd'hui s'opposerait.
Voilà où je veux en venir : je crois qu'il y aurait lieu que le comité songe à demander au gouvernement d'envisager une évaluation exhaustive des avantages et des désavantages d'accroître la participation du secteur privé dans ce dossier.
Si vous prenez les recommandations du comité de la Chambre des communes quant au transfert des responsabilités à d'autres administrations, je crois que c'est très peu probable. Je crois que nous devrons probablement prendre le taureau par les cornes au fédéral si nous voulons venir à bout de cette question. Je ne crois pas que vous verrez ces autres administrations s'aventurer dans ce domaine si elles peuvent éviter de le faire.
C'est là où je veux en venir et je vais certainement en discuter avec les témoins. Il ne s'agit pas d'un document bien long, et je crois qu'ils pourraient peut-être choisir les passages auxquels ils veulent ou non répondre et nous donner leur rétroaction dans les délais qu'ils jugent appropriés.
La présidente : Avant que vous partiez, nous vous remettrons des copies du document et nous attendrons vos réponses écrites. Si vous ne voulez pas formuler de commentaires, nous aimerions que vous l'indiquiez dans une lettre. De cette façon-là, nous pourrons clore ce dossier complémentaire particulier.
M. Murray : Je vais commencer. J'ai eu l'occasion de voir les commentaires de M. Tessarolo. C'était un de mes collègues lorsque j'étais au Centre des sciences judiciaires, et une de mes demandes aurait été de recevoir le document qu'il a promis au comité. Merci d'avoir soulevé la question. Je vais assurément formuler des commentaires.
[Français]
Le sénateur Rivest : Ma question concerne la gestion, plus spécifiquement la protection de la confidentialité des échantillons. Par définition, ces mesures sont secrètes. De façon générale, quelles sont les mesures que vous prenez pour protéger la confidentialité des échantillons? Ces mesures sont-elles semblables à celles que le secteur public, les policiers, la banque et autres prennent? Avez-vous des mécanismes d'évaluation pour bien vous assurer que les mesures prises sont efficaces? Il y a manifestement une différence. Un des aspects qui peut inquiéter les gens est sur le plan du personnel. Lorsqu'on parle du secteur public et des corps policiers, ils ont prêté un serment d'office, ce que, dans le secteur privé, malgré tout le professionnalisme de votre personnel, vous n'avez pas.
Pourriez-vous donner au comité des indications d'ordre général concernant les mesures de protection que vous privilégiez pour assurer la protection de la confidentialité des échantillons?
[Traduction]
M. Chahal : Avec Warnex, nos conseillers juridiques ont rédigé ces documents, qui expliquent qu'ils travailleront avec des renseignements confidentiels. Tous les nouveaux employés sont tenus de le signer, cela fait d'ailleurs partie de leur formation. Le groupe qui traite de criminalistique est restreint; nous nous connaissons. Tout le monde comprend ce qui est important, mais un mécanisme officiel est en place. Tous les employés doivent signer une entente de confidentialité dans le cadre de leur emploi avant même d'entrer dans le laboratoire.
M. Murray : La situation est semblable chez Maxxam. Tous les employés de l'entreprise, pas seulement ceux de ce domaine en particulier, doivent signer une entente de confidentialité. Nous faisons l'objet d'un examen minutieux par notre version du vérificateur général. Au-delà de cela, dans le cadre de notre offre à commandes avec la GRC, nous avons des autorisations sécuritaires pour notre installation et pour chacun des employés qui travaillent au niveau qui requiert une vérification approfondie de la fiabilité, comme l'exige la relation que nous avons avec la GRC. C'est entre autres comme cela que nous respectons les questions de confiance et de protection des renseignements personnels en ce qui touche ce type de tests.
Martin Westecott, superviseur/biologiste légiste, Maxxam Analytique : La vérification de la fiabilité est effectuée par la GRC ainsi que par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Une autre mesure que nous avons mise en place pour nos études de cas, que ce soit avec la GRC ou aux endroits où les services de police y ont accès, est que tout soit encodé et envoyé pour veiller à ce que seules les personnes qui ont le logiciel encodé puissent avoir accès à l'information. Que ce soit dans un courriel destiné à la GRC ou à un agent de police, l'envoi se fait par voie de communication protégée.
Le sénateur Patterson : Les témoins, en particulier M. Murray, ont parlé de changements rapides dans la technologie, qui sont survenus au cours des dernières années. Je sais que vous avez travaillé avec la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques depuis son entrée en vigueur en 2000. Selon ce que vous avez pu constater, la loi est-elle adéquate pour permettre à la police et aux autres personnes qui enquêtent sur des crimes de profiter pleinement de ces avancées technologiques? Fonctionne-t-elle bien ou doit-on y apporter des modifications?
M. Murray : Je crois que les modifications qui ont été apportées à la loi au cours de ses 10 années d'existence me pousseraient à répondre à votre question par l'affirmative. Nous améliorons continuellement ce que nous faisons et ce que la loi nous charge de faire, en tenant compte des préoccupations du sénateur Baker. Je crois que les données qui sont ressorties de la loi, et la Banque nationale de données génétiques en particulier, sont une réussite. Peut-on les rehausser ou peut-être les améliorer? Pourrions-nous en faire plus? C'est discutable, mais je ne crois pas que quelqu'un puisse nier que cela a été une réussite. On peut se demander si la réussite a été suffisamment rapide ou importante, mais c'est un outil important de ce point de vue là.
En tant que fournisseur de services dans le secteur privé, j'ai eu des conversations avec des services de police au sujet de leur capacité de prendre les données que nous générons lorsqu'ils font directement appel à moi sans passer par la GRC. Ils demandent continuellement — et cela a commencé il y a cinq ans — de trouver une façon pour que ces renseignements se retrouvent dans la banque de données. Les discussions que nous avons fini par avoir avec la GRC il y a près de deux ans ont fait en sorte que cela se produise. C'est un exemple du travail progressif de chacun d'entre nous, ensemble, pour continuer à améliorer la situation au-delà de ce que ferait le comité.
Je vois cela comme une réussite et comme une amélioration constante de cette réussite.
Le sénateur Patterson : Nous avons tendance à mesurer la réussite en fonction du nombre de correspondances que nous obtenons — je crois que c'est le terme qui a été utilisé.
Est-ce que le travail de ce type d'analyse joue un rôle aussi important lorsqu'il est question d'exonérer les innocents? Est-ce que l'on recueille aussi des données à ce sujet? Est-ce que cela donne également des résultats?
M. Murray : Je crois qu'il serait préférable de poser la question à M. Fourney compte tenu de son rôle et de ses responsabilités en ce qui touche la Banque nationale de données génétiques.
Si vous regardez les dispositions en vertu desquelles la banque de données a été établie, celles de relier une scène de crime à une scène de crime et une scène de crime à un condamné, l'un des points qui s'y rapportent est l'exonération des suspects. Ma réponse à votre question est oui, elle fonctionne de cette façon-là. Je n'ai pas de statistiques et de données à l'appui de mon affirmation, mais cela fait partie du mandat et du fonctionnement de la Banque nationale de données génétiques.
Le sénateur Raine : Merci beaucoup d'être ici. Je trouve ce sujet fascinant.
J'aimerais d'abord demander à M. Murray s'il est en faveur de la création d'un répertoire des personnes disparues. Je sais que M. Chahal a mentionné qu'il pensait que c'était une bonne idée. Quelles préoccupations la création de pareil répertoire soulèverait-elle? Peut-être que vous pourriez tous les deux répondre à cette question.
M. Murray : Je vais répondre à la première question et M. Chahal pourra se charger de la deuxième.
Oui, j'y suis favorable. Comme je l'ai mentionné plus tôt, il en était question dans le document de fonctionnement initial à ce sujet. Je crois que la question préoccupe les citoyens canadiens. Quelqu'un à la table a parlé du fait qu'il y a un certain nombre de personnes disparues et de restes humains non identifiés. Au cours de mes 20 années dans le domaine, pour les victimes avec qui j'ai été en contact ou auxquelles j'ai potentiellement été associé, il s'agit de clore un incident. Dans cette optique, si le répertoire sert à résoudre un deuil, je crois qu'il est valable. Il requerrait du financement, pour répondre un peu à la deuxième partie de votre question, mais c'est un autre outil valable à mettre dans votre boîte à outils qui témoigne de certaines volontés des Canadiens et de la résolution ultérieure de ces types de dossiers.
M. Chahal : Je suis très favorable à la création d'un répertoire des personnes disparues. Ce n'est pas seulement que l'introduction de la technologie des ADN mitochondriaux — ou la deuxième technologie, comme je l'appelle — est importante pour les personnes disparues, mais aussi le fait que si nous avions cette technologie dans la banque de données, elle pourrait même servir dans le contexte des scènes de crime. S'il était impossible d'analyser les dernières preuves qu'il reste au moyen de la technologie régulière, seule la deuxième technologie pourrait être utilisée. Si nous n'avions pas la deuxième technologie, il n'y aurait pas du tout d'élément de preuve provenant de l'analyse de l'ADN.
Il y a de la place pour la deuxième technique d'analyse de l'ADN dans la banque de données. Je crois fermement à cela; c'est pourquoi je vous ai remis un document, ma déclaration préliminaire. Déjà, les gens du F.B.I. ont étudié la question. Ils ont créé une banque de données de personnes disparues. Cela fonctionne là-bas.
Le sénateur Raine : Y a-t-il une différence de coûts pour déterminer les deux différents types d'ADN?
M. Chahal : C'est une question d'argent à cette étape. Les coûts peuvent être limités par le volume. Si nous sommes conscients qu'il y a plusieurs centaines de personnes disparues dont les restes sont quelque part et si nous savons qu'il y aura des fonds pour la technique d'analyse de l'ADN mitochondrial, alors le coût diminuera. Nous dépendons seulement de demandes ponctuelles : un cheveu perdu sur une scène de crime, par exemple, ou des bureaux de coroners qui traitent des dossiers de personnes disparues. Nous n'avons pas encore automatisé nos analyses. Dès que nous saurons cela, nous analyserons les échantillons prélevés sur les parents de la personne disparue, parce qu'ils doivent en fournir, et nous soumettrons les effets personnels et les restes humains non identifiés à l'analyse de l'ADN mitochondrial. Nous pourrons alors parler de volume. Son coût ne correspondra jamais à celui de l'analyse de l'ADN normal, dont le volume est supérieur, mais le coût sera considérablement réduit s'il y a des fonds pour cette technique. D'ailleurs, dès que cette technique sera utilisée, il y aura de la concurrence. Comme vous pouvez le constater aux États-Unis avec la banque de données des personnes condamnées, les prix dans les laboratoires privés sont en baisse parce que de nombreuses entreprises privées présentent une soumission pour faire le travail et analysent des milliers d'échantillons.
Le sénateur Raine : On dit qu'il est possible maintenant de faire la synthèse de l'ADN, ce qui fait craindre la possibilité que quelqu'un dépose de l'ADN sur les lieux d'un crime pour impliquer des personnes innocentes. Peut-on différencier à l'aide de tests des échantillons d'ADN naturels et artificiels?
M. Chahal : On pouvait lire dans un article du Globe and Mail que l'ADN pouvait être créé. Oui, on peut faire la synthèse de l'ADN. Nous utilisons des morceaux artificiels dans la technique actuelle pour extraire les marqueurs génétiques qui nous intéressent. On peut faire la synthèse de l'ADN, mais pourquoi quelqu'un aurait-il à le faire? Il existe des moyens plus simples de recueillir de l'ADN. On peut prendre un écouvillon buccal et le frotter sur le rebord d'un verre dans lequel quelqu'un a bu.
On peut faire la synthèse de l'ADN. Il est déjà synthétisé actuellement en petites parties et peut aussi l'être en plus grandes, mais cela ne posera pas de problème important du point de vue du travail médico-légal.
Les gens discutent de la contamination et d'autres enjeux en ce qui a trait à l'ADN, mais avec la technique actuelle d'analyse de l'ADN, il n'y a aucun moyen de créer le profil génétique de quelqu'un. Les possibilités que cela survienne sont environ d'une sur un quatrillion. De plus, si un individu a contaminé le profil génétique d'un autre, le suspect est ainsi blanchi.
Lorsque les gens connaîtront davantage la technique, ils comprendront qu'il n'y a aucun moyen de créer le profil de quelqu'un. Les possibilités que cela survienne seraient semblables aux possibilités de trouver un profil génétique qui concorde.
La présidente : Toutefois, on pourrait créer un profil imaginaire qui aurait comme effet d'innocenter le véritable criminel, non?
M. Chahal : Je suis d'accord. On peut créer un profil pour disculper une personne, mais on ne peut pas créer un profil, du point de vue d'une enquête, pour truquer des preuves. Je répondais selon ce point de vue.
Du point de vue d'un criminel, peut-il prendre l'ADN de quelqu'un ou utiliser un échantillon artificiel pour finalement blanchir une autre personne? Oui, c'est possible.
M. Murray : J'ai un commentaire d'un point de vue pratique. Il serait si onéreux d'acquérir l'équipement nécessaire que c'est suffisant pour décourager ceux qui y songeraient. On peut ramasser 20 mégots de cigarettes dans la rue et contaminer une scène de crime ainsi très rapidement, efficacement et, malheureusement, potentiellement de manière très efficiente.
À savoir si on peut différencier des échantillons d'ADN naturels et artificiels, je ne crois pas que je sois à la fine pointe des recherches en la matière. Le Dr Fourney pourrait être mieux placé que moi pour répondre. Dans mon laboratoire d'essais sur les drogues toxicomagènes, je sais qu'il y a des tests pour différencier des échantillons d'urine naturels et artificiels qui n'existaient pas il y a quelques années. Voilà la science et le progrès. Nous ne pouvons pas déjà différencier des échantillons d'ADN naturels et artificiels, mais peut-être qu'un jour nous le pourrons, si cela devient un enjeu.
La présidente : Monsieur Chahal, est-ce que Warnex Inc., votre société mère, est une entreprise canadienne?
M. Chahal : Oui, c'est une société canadienne inscrite à la Bourse de Toronto.
La présidente : Vous avez un laboratoire principal à Thunder Bay; est-ce bien le cas?
M Chahal : Nous avons un seul laboratoire d'analyse génétique à des fins médico-légales, et il est situé à Thunder Bay. Nous étions une petite entreprise appelée Molecular World. Le nom a changé en juin 2009 à la suite de notre achat par cette grande société ouverte. Nous sommes maintenant une filiale de la grosse entreprise. Nous traitons tous les dossiers médico-légaux à notre division de Thunder Bay. Notre siège social est à Laval, au Québec, où se font tous les travaux relatifs aux analyses pharmaceutiques, génétiques et médicales. Nous avons une petite division qui s'occupe d'ADN à Laval; on y effectue des tests d'identification par ADN pour déterminer la paternité et d'autres liens de parenté, mais pas d'analyses génétiques à des fins médico-légales.
La présidente : Dr. Murray, des 32 laboratoires que compte votre entreprise, combien font des analyses génétiques?
M. Murray : Les analyses génétiques sont réunies au même endroit, à Guelph, en Ontario, et on y trouve tout ce dont nous avons besoin pour les analyses, que ce soit en matière de sécurité, d'installations ou de technologie.
La présidente : Vous avez des contrats avec la GRC. Avez-vous des ententes similaires avec les corps de police au Québec et en Ontario, où ils ont leurs propres laboratoires provinciaux?
M. Murray : Premièrement, j'aimerais corriger une chose : j'ai une convention d'offre à commandes avec la GRC.
La présidente : Ce n'est pas un contrat?
M. Murray : Ce n'est pas une charge de travail garantie. Nous n'avons pas de contrats avec d'autres organisations, corps de police ou autres. Notre travail se fait sur une base ponctuelle. C'est en fait le même travail que nous exécutons avec un certain nombre de corps de police, mais il ne fait pas l'objet de contrats.
La présidente : Merci.
Je vais avoir besoin d'aide pour cela. Vous aurez compris que le fichier des personnes disparues fait l'objet d'un intérêt soutenu dans cette étude.
Monsieur Chahal, vous m'avez convaincue que l'ADN mitochondrial serait un élément très important d'un fichier des personnes disparues. Cependant, pour le fichier de criminalistique et le fichier des condamnés, je pense aux inquiétudes qui ont été exprimées au sujet des recherches familiales par l'ADN. On craint que, dans de petites collectivités isolées d'une minorité en particulier, ce qui serait au Canada notamment de petites collectivités autochtones, les recherches familiales, que l'ADN mitochondrial me donnerait envie de faire, puissent mener à du profilage racial abusif et à de possibles erreurs judiciaires.
Pouvez-vous parler de ces enjeux quelque peu?
M. Chahal : Vous avez raison, madame la présidente, de dire que les enjeux relatifs aux recherches familiales seront présents si nous utilisons l'ADN mitochondrial sur les scènes de crime. Pour le fichier des personnes disparues, ce ne sera pas seulement la technique d'analyse de l'ADN mitochondrial qui sera utilisée, mais bien les deux techniques. Beaucoup de restes humains ne peuvent être testés qu'avec la deuxième technique, parce que l'ADN est déjà dégradé. La deuxième technique sera utile pour le fichier des personnes disparues. Nous utiliserons encore la technique normale d'analyse de l'ADN pour les personnes disparues, mais si les restes non identifiés ne contiennent pas d'ADN nucléaire ou s'il est dégradé, nous pouvons utiliser l'ADN mitochondrial.
L'autre problème, c'est que sur une scène de crime, ce sera encore plus un problème que pour les recherches familiales, parce que notre ADN nucléaire n'est pas aussi semblable. Pour ce qui est de l'ADN mitochondrial, beaucoup de personnes participeront à une recherche de particules. Voilà une des questions qui explique pourquoi personne n'a utilisé la technique d'analyse de l'ADN mitochondrial pour le fichier de criminalistique normal. Par contre, le fichier des personnes disparues serait une occasion de choix pour l'essayer.
M. Murray : J'ai un bref commentaire qui se fonde sur un autre angle. M. Chahal est le spécialiste en ADN mitochondrial; je ne vais donc pas aborder le côté scientifique, ni ce qu'il a dit.
Le document de consultation original publié avant l'établissement de la Banque nationale de données génétiques signalait des préoccupations semblables concernant l'utilisation de profils génétiques artificiels : le genre de scénario à propos d'un scientifique fou et de ce qu'il pourrait faire s'il mettait la main sur ce profil. Comment pourrait-il l'utiliser autrement? Je sais que vous avez discuté au sein du comité d'enjeux connexes de ce genre.
Compte tenu de l'expérience de M. Fourney, qui est beaucoup plus vaste que la mienne, je ne sais pas si ces craintes initiales se sont matérialisées d'une quelconque façon. Le mauvais usage est devenu un acte criminel en vertu de la loi. De bien d'autres façons, le comité, ou peu importe qui l'influence, peut régir l'utilisation de l'ADN et s'assurer qu'il est utilisé convenablement, qu'il est un outil d'enquête précieux, malgré sa portée limitée, et qu'il contribue aux dossiers des personnes disparues et à leur identification.
La présidente : Vouliez-vous ajouter quelque chose, monsieur Westecott?
M. Westecott : Non, c'est complet.
Le sénateur Wallace : Monsieur Murray, vous avez la convention d'offre à commandes de la GRC pour fournir des services médico-légaux.
M. Murray : En effet.
Le sénateur Wallace : Au cours des dernières années, le volume de services médico-légaux fournis à la GRC a-t-il augmenté? Si oui, dans quelle mesure? Je tente seulement d'évaluer dans quelle proportion le secteur privé continue de fournir de plus en plus de services au secteur public.
M. Murray : La première convention d'offre à commandes a été établie en 2001. Il y en a eu trois consécutives au cours de cette période, et nous en sommes à la troisième. Le volume a augmenté au fil du temps jusqu'à récemment. La GRC a décidé, du moins pour le moment, d'examiner sa capacité et peut-être même d'automatiser un peu pour s'aider. Nous avons ressenti une certaine baisse dans la quantité de travail fournie par la GRC. J'espère que c'est temporaire. Nous avons eu d'importantes discussions avec les gens de la GRC à ce sujet. Pour la suite des choses, je sais que l'importance que nous accordons à nos rapports est mutuelle. Compte tenu des résultats de l'examen de leurs présentes activités et de leur propre efficacité, nous continuerons d'entretenir ces liens.
Le sénateur Wallace : Je tiens seulement à m'assurer de bien comprendre cela. Travaillez-vous aussi pour les laboratoires provinciaux, en particulier pour les laboratoires québécois?
M. Murray : Je ne travaille pas pour le laboratoire québécois, ni pour le laboratoire ontarien. Dans certains cas, je travaille avec les corps de police en Ontario, mais pas au Québec pour le moment. Je répète qu'il ne s'agit pas de contrats.
Le sénateur Wallace : Y a-t-il une raison précise pour laquelle vous ne travaillez pas pour ces deux laboratoires provinciaux? Nous avons appris qu'il semblerait y avoir une importante accumulation de travail dans ces laboratoires, par exemple en raison de l'adoption des projets de loi C-13 et C-18.
M. Murray : Je crois que le Centre des sciences judiciaires et sa direction préfèrent effectuer les analyses à l'interne et ainsi superviser les travaux. La mentalité était différente à la GRC, et il en est ainsi depuis neuf ans. Je ne connais pas autant la mentalité actuelle du laboratoire québécois. Je crois que cela répond à votre question. La GRC a été plus proactive en constatant la possibilité d'obtenir l'aide du secteur privé.
La présidente : Le sénateur Carignan a une autre question, mais ce sera la dernière, parce que nous arrivons au terme de la séance.
[Français]
Le sénateur Carignan : Ce sont des questions soulevées par des éléments de vos témoignages. Vous avez parlé d'engagements de confidentialité et de cryptage sur le plan de la sécurité du transfert d'informations. Y a-t-il également des accréditations et des enquêtes de bonnes mœurs sur le personnel qui fait les tests ou qui a accès aux locaux? J'inclus les concierges, par exemple, qui pourraient avoir accès aux différents laboratoires de l'entreprise. Qui traite l'ADN et qui fait les contrats pour le gouvernement?
[Traduction]
M. Murray : Je vais laisser à M. Westecott la question du cryptage.
M. Westecott : En effet pour le cryptage, oui, vous avez raison. Nous avons mis un système sur pied qui nous permet, si nous devons envoyer des données, par exemple, à la GRC, comme un profil génétique aux fins d'examen, de leur faire parvenir un fichier chiffré de manière à ce que seulement les personnes concernées au sein de la GRC puissent l'ouvrir et en faire l'examen. Cela existe.
[Français]
Le sénateur Carignan : Je ne veux pas que vous nous divulguiez des renseignements financiers, mais comme ce sont des entreprises cotées à la bourse, qui font affaires avec des entreprises publiques, vous avez certainement des chartes de prix accessibles au public. Est-ce possible d'obtenir cette charte de prix facturés par la GRC pour un coût moyen par échantillon effectué selon le type d'analyse? Nous avons l'analyse des coûts faits par les laboratoires provinciaux et fédéraux, cela nous permettrait d'avoir une comparaison sur les avantages du secteur privé par rapport au secteur public?
[Traduction]
M. Murray : Je tiens à préciser que Maxxam Analytics n'est pas une société cotée en bourse. J'aimerais donc pouvoir demander la permission avant de dévoiler des données sur les recettes, mais j'essaierai de répondre à votre question à certains égards.
Les travaux que nous faisons directement pour les corps de police, et je vais revenir sur la GRC dans un instant, sur la façon dont les données ou les échantillons nous parviennent, le contrôle qu'ils exercent en raison des contraintes financières et l'aide que nous essayons de leur fournir à l'égard des échantillons qu'ils auraient dû analyser ou la hiérarchisation des tâches de l'analyse, 70 p. 100 des travaux que nous réalisons pour des corps de police, outre le travail qui vient de la GRC, se résument à une facture de deux mille dollars ou moins. Normalement, il y a moins d'éléments, peut-être un ou deux, parce qu'ils sont assujettis aux contraintes financières pour ces choses très probantes à leur dossier respectif.
Pour ce qui est d'une liste de prix distribuée aux clients, c'est un long document de deux pages qui dépend du genre d'analyses requises par le client, par exemple s'il veut une simple comparaison d'un prélèvement fait au moyen d'un écouvillon buccal, ou s'il s'agit d'un drap d'hôtel sur lequel il pourrait y avoir 20 échantillons de sperme différents, ce qui nécessitera des heures d'analyses. Il y a un large spectre de choses qu'on peut envisager de faire pour cette analyse.
Pour la GRC, je ne suis pas certain qu'elle souhaiterait que nous dévoilions cette information, mais je vais tenter de donner une réponse. Au début, lorsque nous avons commencé à travailler avec la GRC, nous étions payés au cas par cas. Cela a changé, et nous sommes maintenant payés en fonction du nombre d'éléments. C'est ainsi que notre accord avec la GRC fonctionne.
La présidente : Docteur Chahal, je crois que vous aviez un commentaire sur la question précédente du sénateur Carignan.
M. Chahal : Le sénateur a fait allusion au personnel de nettoyage. Dans notre laboratoire, les analystes ou les technologues nettoient eux-mêmes la section laboratoire : personne ne peut donc y aller. C'est faisable dans notre cas, parce que nous avons de petites installations. C'est ainsi que nous nous en occupons à ce stade. Ceux qui analysent en fait les échantillons nettoient aussi le laboratoire. Il n'y a que les bureaux qui sont nettoyés par du personnel externe de nettoyage.
Pour la deuxième question portant sur la liste de prix, je me trouve, moi aussi, dans la même situation. Si vous appelez notre laboratoire aujourd'hui, la personne qui va répondre au téléphone vous donnera notre liste de prix, mais pour ce qui est de vous la remettre formellement, je devrai en discuter avec la direction. Si c'est possible, nous pourrions envoyer la liste de prix en même temps que notre réponse à votre autre document.
La présidente : Le document que nous vous remettrons traite en fait à certains égards des coûts. Donc, si vous pouviez inclure tous les commentaires que vous pouvez faire à l'intérieur de vos contraintes commerciales et concurrentielles, dont nous sommes conscients, cela nous serait très utile. Bref, tout document ou toute information que vous pouvez nous donner nous seraient utiles.
Je vous remercie encore une fois. Cela a été extrêmement intéressant et utile pour nous.
Chers collègues, notre prochaine séance se tiendra demain à 10 h 30 dans cette salle. Pour la première partie de la séance, nous entendrons les représentants du ministère de la Justice et de Sécurité publique Canada qui nous donneront un aperçu du groupe de travail fédéral-provincial sur un potentiel fichier des personnes disparues.
[Français]
Deuxièmement, nous allons poursuivre à huis clos pour notre première discussion préliminaire d'un rapport éventuel.
(La séance est levée.)