Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 12 - Témoignages du 29 septembre 2010
OTTAWA, le mercredi 29 septembre 2010
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui à 16 h 16 pour étudier l'utilisation d'un dispositif d'assistance électronique au vote conçu pour aider les électeurs ayant une déficience ainsi que pour en faire rapport.
Le sénateur Joan Fraser (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue après la pause de l'été qui, je l'espère, aura été magnifique pour tous. Nous nous apprêtons à entamer un automne qui nous tiendra occupés.
Vous n'êtes pas sans savoir que nous accueillons aujourd'hui avec beaucoup de plaisir, M. Marc Mayrand.
[Français]
M. Marc Mayrand est directeur général des élections du Canada, M. Stéphane Perrault est avocat général principal et directeur principal, M. Michel Roussel est directeur principal, préparation et gestion des scrutins en région. Un peu plus tard, nous aurons Mme Lyne Morin, directrice, méthodes de vote alternatives. Nous avons aussi avec nous des représentants de Dominion Voting Systems.
[Traduction]
Ils nous feront une démonstration dans quelques instants.
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles examinera avec intérêt aujourd'hui le recours possible à un dispositif d'assistance électronique au vote conçu pour aider les électeurs ayant une déficience, ce qui explique la présence de M. Mayrand parmi nous.
[Français]
Bienvenue chez nous, nous sommes toujours ravis de vous recevoir. Je crois que vous avez une présentation.
Marc Mayrand, directeur général des élections, Élections Canada : Merci, madame la présidente, permettez-moi de vous remercier de nous accueillir aussitôt après la reprise de vos travaux pour étudier notre demande d'approuver la mise à l'essai d'un dispositif d'assistance électronique au vote.
Cette mise à l'essai aura lieu lors d'une élection partielle, qui doit d'ailleurs être déclenchée d'ici le 27 octobre prochain dans la circonscription de Winnipeg-Nord. Lors de cette élection, des dispositifs électroniques seraient mis à la disposition des électeurs au bureau du directeur de scrutin ainsi qu'aux bureaux de vote par anticipation et peut-être dans d'autres lieux de vote qui restent à déterminer.
Comme vous le savez, l'article 18.1 de la Loi électorale du Canada me permet et je cite :
[...] de mettre à l'essai un processus de vote électronique pour usage à une élection générale ou partielle ultérieure.
Cet article, adopté en 2000 avec la Loi électorale actuelle, exige que j'obtienne préalablement l'autorisation des comités du Sénat et de la Chambre des communes, qui traitent des questions électorales.
Ce projet de loi pilote constitue une étape importante dans le développement d'un processus de vote qui donnerait aux personnes ayant une déficience visuelle ainsi qu'aux personnes ayant une déficience de mobilité, une plus grande autonomie au moment de marquer leur bulletin de vote. Selon les données de Statistique Canada de 2006, plus de 2,9 millions de Canadiens ont une mobilité réduite et près de 800 000 ont une déficience visuelle.
La loi actuelle contient déjà un certain nombre de dispositions destinées à faciliter le vote pour ces personnes. Entre autres, ces dispositions assurent la présence, dans chaque bureau de scrutin, d'un gabarit à l'aide duquel les personnes ayant une déficience visuelle peuvent marquer elles même leur bulletin de vote après que le fonctionnaire électoral leur a indiqué la position des différents candidats sur le bulletin, permettre à un parent, à un ami ou à un fonctionnaire électoral de marquer le bulletin de vote pour un électeur ayant une déficience et permettre enfin le vote par bulletin spécial.
Cependant notre expérience auprès des milieux concernés révèlent qu'un nombre important d'électeurs ayant une déficience visuelle ou autre font valoir leur droit de voter de manière autonome tout en préservant le secret de leur vote, ce que ne permet pas toujours la loi actuelle. Dans la mesure où la technologie le permet, nous devons tenter de vérifier si elle peut répondre utilement aux électeurs et être en mesure de leur offrir un meilleur service.
Par ailleurs, des dispositifs électroniques similaires sont de plus en plus utilisés dans le cadre d'élections provinciales, notamment en Ontario, et un peu plus tôt cette semaine, au Nouveau-Brunswick, ainsi que dans plusieurs municipalités.
[Traduction]
Bien que la technologie ait été éprouvée ailleurs, je considère qu'il est essentiel de mettre ce processus à l'essai dans le contexte fédéral. Cela permettra de bien démontrer à tous les intervenants — autant nous, à Élections Canada, que les administrateurs électoraux dans les régions, les électeurs, les candidats et les parlementaires — que le nouveau dispositif électronique peut constituer un outil qui s'intègre bien au régime établi par la Loi électorale du Canada.
Par exemple, une mise à l'essai permettra de vérifier que le calendrier électoral fédéral permet la programmation et la vérification du dispositif électronique avant son déploiement dans les bureaux de vote par anticipation, compte tenu du délai entre la date de clôture des candidatures et le premier jour du vote par anticipation; que les effectifs aux bureaux de scrutin sont adéquats pour assurer le bon déroulement du vote; qu'une stratégie de communication adéquate est mise en place pour que les électeurs ciblés soient informés de la possibilité de voter de cette façon; que le secret du vote est préservé, notamment en ce qui concerne la marque aléatoire laissée par le dispositif et la procédure de manutention du bulletin de vote utilisée par le fonctionnaire électoral qui manie le dispositif; et, finalement, que le processus de vote répond aux besoins des électeurs.
L'article 18.1 de la loi donne la possibilité de mettre à l'essai un processus de vote électronique et, dans les circonstances actuelles, je crois qu'il est essentiel de s'en prévaloir. Cela permettra de restaurer la confiance de tous les participants en ce nouveau processus de vote.
Madame la présidente, je vous ai écrit récemment pour vous donner les grandes lignes du processus de vote qui serait utilisé lors de ce projet pilote.
Je pense que cette information a été transmise aux membres du comité. Je n'entrerai donc pas dans les détails, mais une démonstration vous sera faite sous peu de l'utilisation du dispositif d'assistance électronique au vote. Comme vous le verrez, le dispositif en question comporte plusieurs caractéristiques intéressantes conçues pour permettre à divers usagers de voter de façon autonome.
Sous réserve de l'agrément préalable des comités parlementaires, le projet pilote serait mis en œuvre à l'occasion du prochain scrutin dans la circonscription de Winnipeg-Nord. Si cette élection partielle devait être annulée par le déclenchement d'une élection générale, le dispositif d'assistance électronique serait quand même mis à l'essai dans cette circonscription.
Après le scrutin, une évaluation serait faite de nos services et de nos processus, notamment en ce qui concerne l'information des électeurs, le déploiement du dispositif, la formation des fonctionnaires électoraux et le bon déroulement de l'élection.
Par ailleurs, cette évaluation permettra de jauger la satisfaction des électeurs ciblés et des groupes qui les représentent, et de vérifier le maintien du niveau de confiance dans l'intégrité du processus électoral.
D'ici l'automne 2011, Élections Canada effectuerait une analyse coûts-avantages afin d'évaluer la faisabilité d'une mise en œuvre à grande échelle dans le cadre d'une élection générale ultérieure. Cette analyse pourrait aussi prendre en compte la mise en œuvre du projet d'assistance électronique au vote en Ontario, qui aura lieu lors de l'élection générale provinciale en 2011. Il faudra consulter tous les intervenants dans le processus électoral afin de comparer l'effet de cette technologie sur l'objectif d'accroître l'accessibilité, par opposition à d'autres initiatives, comme par exemple, le vote par Internet.
Honorables sénateurs, puisque la mise en œuvre permanente de ce processus exigerait certaines modifications relativement mineures à la loi, je ferais des recommandations formelles à ce sujet, si l'expérience du projet pilote s'avérait fructueuse et si l'analyse coûts-avantages se révélait avantageuse. Avant de pouvoir offrir ce service à l'échelle nationale, il est probable qu'une période supplémentaire de 12 mois serait requise afin de compléter le processus d'approvisionnement ainsi que pour mettre à jour nos procédures et nos outils de formation.
Mes collègues et moi serons à votre disposition pour répondre à vos questions, après la démonstration du dispositif d'assistance électronique au vote. Nous espérons par la suite recevoir votre agrément pour la mise à l'essai de ce processus lors de l'élection partielle dans la circonscription de Winnipeg-Nord.
[Français]
La présidente : Merci beaucoup, monsieur Mayrand. Tel que prévu, nous allons suspendre la partie formelle de cette audience pour que les sénateurs puissent se déplacer vers la machine.
[Traduction]
Nous assisterons à une démonstration qui sera donnée par Mme Morin, que je vous ai déjà présentée et qui est accompagnée de M. John McKinstry et de M. Steve Papoulias, tous deux de Dominion Voting Systems.
Nous allons suspendre la séance pendant tout au plus, espérons-le, 15 minutes. Après coup, nous poserons toutes nos questions à M. Mayrand.
(La séance est suspendue.)
[Français]
(La séance reprend.)
La présidente : Monsieur Mayrand, tout cela est fascinant. Nous passons maintenant à la période des questions. Nous allons débuter avec le sénateur Wallace qui sera suivi par les sénateurs Carignan et Carstairs.
[Traduction]
Le sénateur Wallace : Merci, monsieur Mayrand de vos propos judicieux. Nous convenons certes qu'il est tout à fait logique de chercher à faciliter la tâche aux électeurs ayant une déficience, démarche que nous appuyons tous.
Par mes questions, je veux m'assurer que c'est là le système qui convient et que la protection qu'il offre correspond à ce que vous avez décrit. Ce système a été mis au point par Dominion Voting Systems, société qui a fait la démonstration. Est-ce une société privée ou un organisme fédéral?
M. Mayrand : C'est une société privée. J'ignore si elle est cotée en bourse, mais il s'agit bel et bien d'une entreprise commerciale.
Le sénateur Wallace : Dominion Voting Systems est-elle la seule entreprise qui ait fourni un appareil d'aide à la votation lors d'une élection au Canada?
M. Mayrand : D'autres entreprises ont fourni ce service, mais c'est cette société qui a été retenue à la suite d'un processus de lettres d'intérêt et d'appel d'offres.
Comme je l'ai signalé dans ma déclaration, il faudrait, après cet essai, mener à terme tout le processus d'approvisionnement pour que ce système soit mis en œuvre de façon permanente à l'échelle nationale.
Le sénateur Wallace : Ma question n'était pas claire. Je veux savoir si ces appareils d'aide à la votation mis au point Dominion Voting Systems ont servi lors des élections provinciales en Ontario ou au Nouveau-Brunswick ou encore lors d'élections municipales au Canada. De tels dispositifs ont-ils été utilisés en d'autres circonstances au Canada?
M. Mayrand : Je sais que d'autres entreprises offrent des produits analogues. L'une d'entre elles est de Halifax, je crois, mais j'ai oublié son nom. J'ignore dans quelle mesure les différents produits sont comparables.
Le sénateur Wallace : Des appareils d'une autre entreprise ont-ils été utilisés lors d'une élection provinciale ou municipale tenue au Canada?
M. Mayrand : Je crois que oui, mais je devrai vérifier avant de vous le confirmer. Je ne suis pas au fait des différents processus électoraux provinciaux ou municipaux, mais je vous répète qu'on a recours de plus en plus à un tel appareil, particulièrement lors des élections municipales. Dominion Voting Systems est certes l'un des principaux fournisseurs auxquels on a recours, mais je sais qu'il y en a d'autres. J'ignore cependant quelle est l'ampleur de l'utilisation de ces appareils lors des élections provinciales ou municipales.
Le sénateur Wallace : Tout cela est intéressant et semble être une percée importante. Je sais que chacun d'entre nous se demande si le système comporte des lacunes, notamment sur le plan de la protection des renseignements personnels et de son fonctionnement. Aucun de nous ne possède les compétences techniques pour le déterminer. Il vous appartient donc de nous éclairer.
Votre organisme ou un organisme analogue provincial ou municipal a-t-il évalué l'utilisation de ces dispositifs au Canada? Le cas échéant, des problèmes ont-ils été décelés? A-t-on examiné le rendement de ces appareils?
M. Mayrand : C'est relativement nouveau dans le domaine de l'administration électorale. Je sais que l'Ontario a évalué l'essai qui a été effectué lors d'une élection partielle qui s'est tenue, je crois, l'an dernier ou l'année précédente. Plusieurs problèmes ont été soulignés dans le rapport qui a alors été rédigé. En gros, c'est une technologie efficace. Des problèmes se posent à propos des difficultés liées au « calendrier » de la Loi électorale du Canada. Des modifications s'imposent à cet égard.
La sensibilisation des électeurs susceptibles d'utiliser un tel dispositif est problématique. Je vous répète que, selon les différentes données du recensement, il y aurait environ trois millions d'électeurs touchés. Le problème, c'est la sensibilisation et la formation sur le fonctionnement de cet appareil. En l'occurrence, il faut trouver un moyen d'aller vers eux pour les essais plutôt que de leur demander de venir à nous. C'est pourquoi, dans le cadre de notre projet pilote, nous envisageons d'installer le dispositif chez le directeur du scrutin, dans les bureaux de scrutin par anticipation et dans les établissements de soins prolongés. Les modalités sont légèrement différentes de celles adoptées par l'Ontario notamment.
Si les comités nous donnent leur aval, nous entamerons les pourparlers avec les différents intervenants à Winnipeg- Nord pour déterminer s'il n'y a pas d'autres endroits où nous pourrions mettre plus efficacement les électeurs au courant du système.
C'est relativement nouveau. Prenons ce qui s'est passé en Ontario. Peu d'électeurs ont utilisé ce dispositif. Peut-être n'ont-ils pas été suffisamment sensibilisés à cette nouvelle technologie? Comme vous pouvez le constater, nous devons encore apprendre à nous en servir, ce qui nécessitera peut-être un certain temps. Cependant, c'est une technologie éprouvée. Aucun problème n'a été décelé en ce qui concerne la protection des renseignements personnels ou le fonctionnement du dispositif.
Le sénateur Wallace : Si vous avez en mains des rapports rédigés par une province ou une municipalité sur l'évaluation de ce dispositif, il serait utile que vous nous les transmettiez.
M. Mayrand : Nous le ferons et, si le tout est approuvé, nous vous ferons certes part des résultats de notre évaluation après la tenue de l'élection partielle.
[Français]
Le sénateur Carignan : Bienvenue à ce comité. Je suis un fervent partisan du vote électronique. Je pense que nous sommes particulièrement en retard en ce qui concerne l'élargissement de l'accès au vote électronique pour l'ensemble de la population canadienne.
Combien de fois ce type d'appareil pourrait-il être utilisé? Lorsqu'on arrive avec une nouvelle solution, on essaie toujours de trouver le problème qu'on veut régler, et ceci afin d'en évaluer les coûts. Je cherche à comprendre quel problème nous voulons régler. J'ai compris le concept de confidentialité du vote, mais je ne suis toutefois pas certain qu'il subsiste toujours des risques que cette confidentialité soit atteinte vu la manipulation du bulletin de vote par la suite.
Lorsqu'un électeur requiert une assistance au vote et que les représentants de chacun des partis peuvent assister à l'opération, tout cela est noté dans le registre du vote. Avez-vous, en proportion, des statistiques pour compter le nombre de fois où un électeur demande de l'assistance pour un vote?
M. Mayrand : Nous avons quelques études à ce sujet qui suggèrent qu'il y aurait, au moins au niveau des déficiences visuelles, plus de 10 p. 100 des électeurs qui ont suffisamment de problèmes pour requérir une forme d'assistance.
Le sénateur Carignan : Je ne veux pas savoir les statistiques des personnes atteintes de problèmes visuels, mais je veux plutôt connaître le nombre de fois, qu'en réalité, un électeur requiert une assistance à tel point que les représentants de chacun des partis devront être à même de constater le vote de la personne, et ce même s'ils prêtent serment au niveau de la confidentialité. J'imagine que vous avez des statistiques quelque part. Je l'espère, en tout cas.
M. Mayrand : Je ne suis pas certain non plus que les représentants aient accès aux bulletins de vote. Ils peuvent observer. Ils ont accès aux instructions données. Ils sont témoins.
Le sénateur Carignan : Ils sont témoins, mais ils peuvent, dans certains cas, avoir accès aux votes dans le cas des handicapés visuels où la personne dit qu'elle veut mettre un X pour tel candidat. Les représentants des autres partis peuvent s'assurer que l'officier met le X.
M. Mayrand : Cela se fait quand même toujours derrière l'écran.
Le sénateur Carignan : C'est très rare?
M. Mayrand : On fait cela en sourdine, quand même. Cela peut arriver, mais ce n'est pas nécessairement l'objectif.
Le sénateur Carignan : Je comprends. C'est très rare. Donc, on utilise un équipement assez complexe, qui me semble assez dispendieux. Il sera difficile de l'établir dans toutes les circonscriptions pour régler un problème, qui semble se produire à une fréquence minime.
Il me semble que le directeur général des élections a sûrement des priorités importantes d'investissement dans les appareils électroniques pour fournir le vote à l'ensemble de la population ou pour encourager les gens à voter. Parce que les taux de participation, actuellement, diminuent de façon vraiment importante. Il me semble que, dans le mandat du directeur général des élections, il y a beaucoup d'énergie à mettre sur des éléments qui vont apporter une plus value importante à la démocratie. J'aimerais connaître le nombre d'interventions — si vous avez ces statistiques au sujet d'élections antérieures où les électeurs vont requérir de l'aide du personnel.
M. Mayrand : À ma connaissance, nous n'avons pas ce type de statistiques.
Le sénateur Carignan : Je suis surpris que vous n'en ayez pas. Si vous avez identifié un problème de cette nature avec de telles solutions, je suis vraiment étonné que vous n'ayez pas ces statistiques.
M. Mayrand : Je peux vous donner des statistiques sur le nombre de personnes qui utilisent les règles de vote spécial, mais on ne peut pas faire nécessairement un lien direct avec la condition de ces électeurs.
Ceci étant dit, je comprends votre point et c'est quelque chose qu'on va vouloir évaluer dans Winnipeg North. Il faut aussi peut-être connaître le contexte. Il ne faut pas perdre de vue que plusieurs plaintes ont été déposées à la Commission des droits de la personne. La Loi des droits de la personne requiert que nous adaptions nos services aux besoins et aux conditions des électeurs, entre autres.
Le Canada a récemment ratifié une convention internationale qui encourage les gouvernements et les autorités électorales à faire des ajustements pour permettre aux électeurs, qui ont des déficiences, de voter de manière la plus autonome possible, en respectant leur dignité et le secret de leur vote. Cette convention internationale suggère aussi, dans une de ses dispositions, de davantage faire appel aux technologies.
Cette initiative fait suite à des représentations qu'on a reçues de groupes et de personnes qui souffraient de certaines déficiences et qui souhaitaient voter de manière indépendante. Une plainte avait été déposée à la Commission des droits de la personne dans laquelle on demandait que les bulletins de vote soient produits en braille. Lorsqu'on a fait l'analyse, on s'est aperçu que peu d'électeurs aveugles utilisaient véritablement le braille. D'une part, cela n'aurait pas répondu à toute la population, qui a besoin de ce service. D'autre part, nous avons constaté qu'au point de vue opérationnel, au Canada, aucune firme n'est en mesure de produire 25 millions de bulletins de vote en braille dans les délais prescrits par la loi. C'est à partir de ce moment que nous avons commencé à regarder d'autres solutions.
La solution que je vous soumets aujourd'hui permet un vote plus secret et plus autonome que ce qui existe présentement. À long terme, cela fera partie des considérations dans notre évaluation. Il ne faut pas perdre de vue que Élections Canada examine présentement la possibilité d'introduire le vote électronique, qui permettrait aussi une grande autonomie pour les personnes qui souffrent de déficiences variées. Dans le rapport d'évaluation qui serait soumis suite à ce projet pilote, il faudrait considérer d'autres alternatives pour répondre à ce besoin.
Le sénateur Carignan : Vous avez dit avoir étudié plusieurs autres solutions. Vous avez fait un appel d'offres avec plusieurs technologies. Avez-vous étudié d'autres possibilités que le braille sur 25 millions de bulletins de vote, ce qui, à mon avis, n'est pas nécessaire?
M. Mayrand : Ce sont des électeurs.
Le sénateur Carignan : J'imagine qu'ils ne sont pas tous aveugles.
M. Mayrand : Nous ne savons pas lesquels le sont.
Le sénateur Carignan : Il s'agit de trouver des solutions comme de modifier le bulletin de vote, que ce soit juste noircir une case, de trouver des techniques qui implique une modification du bulletin de vote, qui évite la contestation. Le fameux X est tellement contestable comme marque distinctive qu'on est obligé d'essayer d'en copier plusieurs pour ne pas que la marque soit distinctive. Ce qui est réglé dans certains systèmes de vote où on met le point beaucoup plus petit ou on ne fait que noircir une case et cela règle le problème de la marque distinctive. Cela peut, peut-être, régler d'autres problèmes sur le plan des handicapés physiques pour tracer la marque. Y a-t-il des méthodes ou des systèmes autres qu'un système de cette nature qui ont été étudiés et qui pourraient atteindre le même objectif à des coûts plus accessibles?
M. Mayrand : Il y a d'autres méthodes. Il y en a déjà qui sont prévues dans la loi que j'ai mentionnée lors de ma présentation. Il y a, entre autres, un gabarit qui est fait pour les personnes aveugles qui leur permet de marquer le bulletin de vote. Cependant, elles doivent toujours avoir l'assistance d'un tiers pour leur lire le nom des candidats.
Le sénateur Carignan : Cela garantit-il la confidentialité quand même?
M. Mayrand : Cela garantit le secret, oui. Cependant, la demande faite par les groupes et encore là. Les commissions des droits de la personne et les conventions internationales, reçoivent ces demandes où l'on mentionne : oui le secret du vote, mais aussi la dignité et l'autonomie des électeurs autant que possible. Les conventions nous demandent d'explorer la technologie, qui permet une plus grande autonomie, une plus grande individualité de ces électeurs.
La présidente : Merci, sénateur Carignan.
Le sénateur Carignan : Ma grand-mère était aveugle et je pense qu'elle aurait eu peur de la machine.
[Traduction]
Le sénateur Carstairs : C'est très intéressant pour quiconque est handicapé ou connaît quelqu'un qui l'est. En ce qui concerne la protection des renseignements personnels, la personne qui vous aide à voter saurait forcément quel a été votre choix. Le système permet le vote à bulletins secrets.
Ma question porte sur votre choix de Winnipeg-Nord. Si vous avez opté pour cette circonscription, je présume que c'est parce qu'il s'y tiendra la prochaine élection partielle. Cependant, une élection partielle pourrait aussi avoir lieu dans deux autres circonscriptions au même moment. Je signale à mes collègues que Winnipeg-Nord est une circonscription multiculturelle, dont la population est défavorisée sur le plan socioéconomique. Elle compte beaucoup de personnes handicapées parce que celles-ci ont choisi de s'y établir justement parce qu'elles appartiennent, en règle générale, à cette catégorie socioéconomique. Le choix de cette circonscription est donc fort judicieux.
Cependant, Dauphin-Swan River, qui est une circonscription très rurale, pourrait également être le théâtre d'une élection partielle au même moment. Pourriez-vous l'inclure dans votre projet pilote, de sorte que l'on aurait une circonscription urbaine et une circonscription rurale?
M. Mayrand : Nous avons envisagé l'opportunité de faire cet essai dans plusieurs circonscriptions s'il y avait plus d'une élection partielle. Toutefois, compte tenu de la conjoncture, nous estimons qu'il serait préférable de nous en tenir à une circonscription, et ce, pour les raisons que vous avez énumérées à propos de Winnipeg-Nord, notamment parce que de nombreuses personnes handicapées y vivent et y sont représentées par des organismes nationaux. Pour nous, le principal problème n'a rien à voir avec la technologie. Nous devrons plutôt chercher comment sensibiliser et mettre au courant cette catégorie d'électeurs. Nous espérons pouvoir le faire avant la tenue de l'élection partielle, peut-être au moyen d'une démonstration.
Dans un tel cadre, il semble toujours plus facile d'utiliser la technologie, mais cela peut prendre un certain temps. C'est ainsi que nous préférerions travailler. Doter les grandes circonscriptions de cette technologie nous inquiète moins. Ce qui nous préoccupe, c'est de rejoindre les électeurs susceptibles d'utiliser ce dispositif, et nous avons pensé que la circonscription de Winnipeg-Nord pouvait être tout indiquée pour ce type d'expérience.
Le sénateur Carstairs : Vous avez partiellement répondu à ma deuxième question. Au Manitoba, nous avons une association pour les personnes souffrant de déficiences, et l'Institut national canadien pour les aveugles, ou INCA, est présent dans chaque province. Peut-on offrir aux membres de ces organisations la possibilité d'utiliser ces machines avant des élections, afin de leur permettre de se familiariser avec leur fonctionnement?
M. Mayrand : Oui, c'est un dispositif que nous voudrions mettre à l'essai à l'occasion de cette élection partielle. De plus, selon les discussions que nous aurons eues avec les collectivités locales, il se peut que nous installions des machines dans des résidences pour personnes âgées. Nous pourrions les apporter quelques jours avant la tenue du scrutin pour que les résidents apprennent à s'en servir.
Si nous adoptons cette approche, nous croyons que la rétroaction des électeurs utilisant ces appareils sera de bien meilleure qualité.
Le sénateur Carstairs : J'imagine qu'on aura toujours la possibilité de ne pas utiliser ce dispositif.
M. Mayrand : Oui, bien sûr.
Le sénateur Carstairs : Est-ce qu'une personne qui le souhaite pourra encore se faire accompagner de quelqu'un pour l'aider au moment du vote?
M. Mayrand : Absolument. Cette possibilité existe toujours. C'est une option supplémentaire offerte aux électeurs.
Le sénateur Lang : Pourriez-vous nous expliquer brièvement comment fonctionne le processus actuellement? Quels sont les outils à la disposition des électeurs handicapés?
M. Mayrand : Les agents d'information demanderont à ces personnes si elles ont besoin d'aide, et si tel est le cas, cette assistance pourra leur être fournie par des amis ou des proches qui les accompagneront. Si ces personnes sont seules, c'est un fonctionnaire électoral qui les aidera. Cela dépendra aussi du type d'assistance requise. Un malvoyant pourra se faire aider par un membre du personnel électoral ou un ami qui lui lira ce qu'il y a sur le bulletin de vote. Cette personne aura à sa disposition un appareil lui permettant de savoir dans quel ordre sont inscrits les candidats et de marquer son bulletin de manière totalement secrète. C'est comme une pochette dans laquelle on glisse le bulletin de vote sur lequel sont indiqués des numéros en braille qui correspondent à l'ordre dans lequel apparaissent les noms des candidats sur le bulletin. La personne qui aide le malvoyant lira ce qu'il y a sur le bulletin, et l'électeur retrouvera le numéro du candidat de son choix sur le bulletin en glissant sa main dans cette pochette. Il pourra ainsi remplir le bulletin de vote de manière indépendante et secrète. Ça, c'est une option.
Les autres options dépendent des obstacles que l'on rencontre. Je n'en dirai pas plus au sujet des électeurs handicapés. On peut aussi offrir des services d'interprétation aux électeurs qui ont des problèmes de compréhension. Ceux qui ont des difficultés en lecture pourront se faire aider par quelqu'un qui aura accepté de leur lire ce qui est écrit sur le bulletin.
Le sénateur Lang : Que ce soit bien clair : si je comprends bien, aujourd'hui, vous n'êtes pas en mesure de nous fournir des statistiques sur le nombre de personnes, au Canada, qui ont demandé à obtenir ce type de service. Est-il exact que vous ne compilez pas ce genre de statistiques?
M. Mayrand : Oui, c'est exact.
Le sénateur Lang : Ma prochaine question concerne l'expérience au Nouveau-Brunswick. Vous dites que nous devons faire des essais pour savoir comment cela fonctionne au niveau fédéral. Je suis sûr que voter à des élections provinciales au Nouveau-Brunswick n'est pas très différent de voter à des élections fédérales.
Avez-vous obtenu un rapport du bureau électoral du Nouveau-Brunswick au sujet de l'expérience dans cette province, aussi bien lors d'élections municipales qu'à l'occasion d'élections comme celles qui ont eu lieu l'autre jour?
M. Mayrand : Nous avons eu des échanges au sujet de l'efficacité de la technologie et des problèmes que posent la formation, la mise en œuvre des procédures, et cetera. Le bureau ne recense pas le nombre d'utilisateurs; il n'y a donc pas de statistiques disponibles à ce niveau-là non plus. Nous ne saurons pas combien d'électeurs handicapés auront effectivement utilisé ce dispositif au Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Runciman : Je m'intéresse aussi à l'expérience au Nouveau-Brunswick. Je suis favorable à un projet pilote fédéral; je trouve que c'est approprié. Nous devons nous assurer que l'évaluation du projet pilote sera exhaustive. Vous avez à cœur que les gens sachent que cette technologie est disponible et vous vous inquiétez des coûts de formation qui y seront associés. Je veux être certain que tout projet pilote qui sera entrepris tiendra compte de l'ensemble de ces facteurs, afin que nous puissions déterminer, au bout du compte, si le système mérite d'être utilisé à plus grande échelle.
Ce n'est peut-être pas bien, mais j'ai obtenu les statistiques recueillies pour l'élection partielle d'Haliburton- Kawartha Lakes-Brock, en Ontario. Ils ont recensé le nombre d'électeurs ayant utilisé cette technologie là-bas. Il peut y avoir des circonstances particulières, mais cela a coûté environ 4 500 $ par personne pour remplir un bulletin de vote. Je crois que neuf électeurs ont utilisé cette technologie, pour un coût total de près de 41 000 $.
J'ai pris ici une estimation de 21 000 $ à 25 000 $. J'ignore si cette estimation est complète. Est-ce le moindre coût? Qu'est-ce que cela inclut exactement?
M. Mayrand : Cela comprend l'utilisation de l'équipement pour l'élection partielle dans Winnipeg-Nord dans les six bureaux de scrutin par anticipation, les dépenses engagées pour le directeur du scrutin et un établissement de soins de longue durée. Nous sommes actuellement en train d'explorer d'autres endroits. Encore une fois, il ne s'agit pas de tripler le nombre de lieux.
Le sénateur Runciman : Cela n'inclut pas la formation, le marketing ou le personnel.
M. Mayrand : Non, cela n'inclut pas les activités de diffusion ou de communication. Cela comprend, en revanche, les dépenses pour l'installation et l'utilisation des machines pour les quatre jours de vote, ainsi que les frais encourus pour les assistants. Les représentants de Dominion Voting Systems seront sur place pendant le déroulement du scrutin, de sorte que si des problèmes apparaissent pendant les essais de la technologie, on pourra y remédier rapidement. Cette portion du coût estimatif ne fait normalement pas partie des dépenses pendant des élections.
Le sénateur Runciman : Je ne crois pas qu'on ait mentionné le fait que cette machine permet également de compter les bulletins. Est-ce faisable?
M. Mayrand : Non, pas selon la configuration actuelle.
Le sénateur Runciman : Ce serait toutefois possible.
M. Mayrand : Effectivement. Beaucoup de municipalités utilisent des tabulatrices pour calculer les résultats. Pour l'instant, nous n'en voyons pas l'intérêt pour des élections fédérales. Lors d'élections municipales, il y a beaucoup de noms de candidats sur les bulletins de vote. C'est beaucoup plus long de compiler les résultats manuellement; il y a donc certains avantages à utiliser une tabulatrice. Toutefois, nous ne voyons pas l'utilité de nous en servir pour le moment.
Le sénateur Runciman : Je suis personnellement en faveur du projet pilote. En attendant, avant de recevoir un rapport d'évaluation, peut-être qu'on pourrait donner suite à la proposition du sénateur Carignan afin de voir quelles autres options s'offrent aux électeurs qui souffrent de handicaps. Il faudrait également s'intéresser aux technologies alternatives que le comité pourrait trouver utiles pour tirer certaines conclusions.
Le sénateur De Bané : Est-ce que le Bureau du directeur général des élections a déjà fait l'essai de ce système auprès d'un échantillon bien représentatif de personnes aux prises avec des difficultés physiques à Ottawa ou ailleurs au Canada?
M. Mayrand : Non, pas encore.
Le sénateur De Bané : Ne pensez-vous pas qu'il serait bon de le faire avant de demander aux comités de la Chambre des communes et du Sénat de l'approuver? Je sais que d'autres ordres de gouvernement l'ont fait, mais puisque vous êtes le directeur général des élections, je vous conseille respectueusement de faire votre propre évaluation auprès de personnes aux prises avec des difficultés physiques dans cette ville ou n'importe où ailleurs au Canada, et de ne pas attendre, pour ce faire, la tenue d'une élection partielle. Je vous laisse le soin d'y réfléchir.
M. Mayrand : J'ajouterais brièvement que nous ne les avons pas mis à l'essai nous-mêmes, mais que nous avons observé l'utilisation de ces dispositifs dans d'autres provinces.
Le sénateur De Bané : Si je puis me permettre, je pense que vous devriez faire votre propre échantillonnage et vos propres essais de la machine.
Selon l'article 18.1, un tel processus ne peut être utilisé pour un vote officiel sans l'agrément préalable des comités du Sénat et de la Chambre des communes.
Selon moi, quand on dit « tel processus », cela signifie que chaque fois que vous changez de processus et que vous utilisez une autre technologie, les deux Chambres doivent être consultées. Est-ce aussi comme cela que vous l'interprétez?
M. Mayrand : Oui, les comités des deux Chambres doivent être consultés.
Le sénateur De Bané : À chaque fois?
M. Mayrand : Oui.
Le sénateur De Bané : Comme vous le savez, nous sommes dans un domaine où la technologie évolue à un rythme rapide. La télévision change tous les trois mois. C'est la même chose pour le logiciel de traitement de texte que j'utilisais il y a 20 ans; il y a tellement eu d'améliorations substantielles depuis les premières versions. Je me réjouis de voir que vous et moi interprétons « tel processus ne peut être utilisé » de la façon suivante : toutes les fois que le processus changera, vous reviendrez nous consulter.
M. Mayrand : Oui, ce sera le cas.
Le sénateur De Bané : C'est une excellente nouvelle.
Avez-vous une idée du coût que cela représentera pour les prochaines élections générales et des dépenses supplémentaires prévues pour aider les personnes aux prises avec des difficultés physiques? Combien cela représente-t-il en général et à combien estime-t-on le coût additionnel de ce système? À mon avis, nous sommes en avance par rapport à de nombreux pays occidentaux pour ce qui est de l'aide aux personnes aux prises avec des difficultés physiques, même s'il y a encore place à de l'amélioration.
M. Mayrand : Les dernières élections générales, qui remontent à 2008, ont coûté 278 millions de dollars. De ce montant, près de 50 millions sont allés aux partis politiques et aux candidats. Par conséquent, le coût réel de l'organisation des élections a tourné autour de 226 millions pour l'administration, auxquels s'ajoutent environ 50 millions de dollars de remboursement aux candidats.
Le sénateur De Bané : Laissons de côté les partis politiques. Cela tournait donc autour de 225 millions de dollars, n'est-ce pas?
M. Mayrand : Oui, à peu près.
Le sénateur De Bané : Et combien coûteront les prochaines élections?
M. Mayrand : Nous n'avons pas vu le budget récemment, même si cela aurait dû être le cas, parce que nous avons un gouvernement minoritaire. Je vais m'en occuper dans les prochaines semaines. Je m'attends à une légère augmentation.
Le sénateur De Bané : Si on utilisait cette technologie dans l'ensemble du pays, quels coûts supplémentaires cela représenterait-il, environ?
M. Mayrand : Il est prématuré, pour moi, de répondre à cette question tant que nous n'aurons pas fait les essais et une analyse complète de la situation. Je ne sais toujours pas comment nous allons déployer ce système dans des élections générales. Nous devons faire pas mal d'analyses complémentaires avant.
Le sénateur De Bané : Pouvez-vous me donner une fourchette?
M. Mayrand : J'ignore ce que sera le marché. Je vais vous donner un chiffre très artificiel. Je pourrais me tromper et le regretter ensuite. Disons que cela coûte 500 $ pour déployer un appareil et les services connexes pendant des élections. D'après le projet pilote, nous équiperions les directeurs de scrutin, les directeurs adjoints de scrutin et les bureaux de vote par anticipation. Actuellement, cela représente 3 500 bureaux, et nous n'avons pas couvert tous les bureaux de vote; je n'ai pas non plus inclus les centres de soins de longue durée et autres endroits du genre. Il y en a plus de 1 000 dans tout le pays. Cela monte vite. C'est la raison pour laquelle nous devons faire une analyse approfondie de la question. C'est pourquoi il nous faut voir, au moyen d'essais, comment promouvoir l'utilisation de ces appareils auprès de ceux qui en ont besoin. Si la demande ne se concrétise pas, nous devrons envisager d'autres options.
Le sénateur De Bané : Est-ce que vous allez faire les essais vous-mêmes?
M. Mayrand : Oui.
Le sénateur De Bané : Est-ce que ce sera avant l'élection partielle?
M. Mayrand : Non, ce sera pendant l'élection partielle.
Le sénateur Angus : Les autres sénateurs ont posé la plupart des questions que j'avais en tête, mais il m'en reste d'autres.
J'ai été étonné de vous entendre dire que vous ignorez le nombre de personnes handicapées qui ont utilisé le système lundi soir, au Nouveau-Brunswick.
Monsieur McKinstry, est-ce que vous et votre collègue le savez?
John McKinstry, représentant, Dominion Voting Systems : Non. Je ne sais pas si Élections Nouveau-Brunswick a conservé les données.
Le sénateur Angus : Je trouve cette nouvelle technologie incroyable.
Je suis du même avis que le sénateur Carstairs : plus nous pourrons inciter les personnes handicapées à participer au vote de façon tout à fait secrète et leur donner les moyens de le faire, mieux ce sera. Cette initiative vise-t-elle, selon vous, à compléter ou à remplacer le système actuel, ou bien à inciter plus de personnes handicapées à venir voter? Quelles sont les statistiques à cet égard?
M. Mayrand : Nous visons certes à compléter, mais pas à remplacer le système actuel; nous voulons offrir un autre moyen à ces électeurs de marquer leur bulletin de vote. C'est également un reflet, encore une fois, de ce que j'ai parlé tout à l'heure, soit que près de quatre millions d'électeurs souffrent de diverses limitations.
La société canadienne est aussi très vieillissante. Je suis certain que vous êtes au courant de la tendance démographique au pays.
Le sénateur Angus : Nous en faisons partie.
M. Mayrand : Ce n'est pas ce que je voulais insinuer.
Le sénateur Angus : Nous en faisons néanmoins partie.
M. Mayrand : Les gens vivent plus longtemps, mais souffrent de graves handicaps en vieillissant. Nous ne réussirons pas à répondre à leurs besoins avec notre approche traditionnelle. Nous parlons ici d'électeurs qui ont voté toute leur vie. Nous devons faire en sorte qu'ils puissent continuer de le faire et nous devons être prêts à adapter nos services à l'évolution des besoins des électeurs.
Je ne voulais pas laisser entendre que tout à coup, des millions d'électeurs utiliseront cette nouvelle méthode. Il faudra des années pour que tout le monde connaisse cette technologie. Toutefois, à long terme, elle respecte au moins le principe du secret du vote et de l'autonomie, sur lequel bon nombre d'électeurs ne peuvent compter actuellement.
Le sénateur Angus : Vous dites qu'approximativement quatre millions d'électeurs ayant un handicap sont inscrits sur les listes électorales. Croyez-vous qu'une grande proportion d'entre eux ne votent pas à cause de leur déficience et du fait qu'ils estiment ne pas pouvoir le faire comme il se doit?
M. Mayrand : C'est difficile à dire. Je ne peux que me fonder sur les observations que nous présentent divers groupes de temps à autre. Beaucoup de ces gens ne se donneront pas la peine d'y aller en raison du secret du vote. Pour ce qui est de la proportion au sein de ce groupe d'électeurs, il faudrait demander à d'autres experts de vous fournir cette information.
Le sénateur Angus : On ne peut pas lire dans les pensées, le cœur et l'âme de chaque électeur atteint d'un handicap, mais il me semble que ce système serait intimidant. Il est mécanique. Auparavant, on se faisait accompagner d'un aidant pour marquer le bulletin de vote. J'ai moi-même accompagné beaucoup de personnes handicapées aux urnes, et tout se déroule bien. Cela pourrait devenir un cauchemar.
M. Mayrand : Oui et non; c'est pourquoi il nous faut mettre le système à l'essai. Les groupes représentant ces électeurs vous diront qu'ils connaissent très bien ce genre de technologie. Beaucoup ont des ordinateurs et des appareils conçus pour leur permettre d'utiliser leur ordinateur malgré leurs diverses incapacités. Encore une fois, c'est difficile à dire sans avoir effectué des essais. Oui, ce sera un changement, puisqu'il s'agira d'un nouveau système dans les bureaux de vote. Nous devons faire de la sensibilisation avant la mise à l'essai afin que les électeurs qui pourraient profiter de cette technologie la connaissent suffisamment avant d'aller voter.
Le sénateur Angus : Dans le cadre de cette même initiative, cela fait-il partie de votre stratégie à long terme de mettre en place, dans un second temps, un système de vote interactif?
M. Mayrand : Dans le cadre de notre plan stratégique, nous envisageons d'implanter le vote électronique, et c'est une chose dont nous espérons revenir vous parler. Nous prévoyons, avec l'accord de divers comités, mettre à l'essai le vote électronique en 2013. C'est dans quelques années, mais ce n'est pas très loin.
Le sénateur Angus : Nous vous enverrons des messages sur Twitter à ce sujet. Merci beaucoup.
Le sénateur Plett : Comme on l'a dit tout à l'heure, le désavantage de figurer au bas de la liste, c'est que la plupart des questions ont déjà été posées. Vous m'aviez presque convaincu jusqu'à ce que vous disiez qu'il pourrait s'agir d'un prélude au vote électronique. Je n'appuierais certainement pas le vote par Internet en ce moment. Cependant, nous ne discutons pas de cela, alors je vais garder ces remarques pour une autre fois.
J'aimerais faire une observation au sujet des appareils, si vous le permettez, avant de poser mes questions. C'est simplement pour faire suite à ce qu'a mentionné le sénateur Carignan lors de la démonstration. L'appareil a posé la question ou a nommé deux ou trois noms, puis la personne a inscrit le vote. Je crois vraiment que l'on ne devrait pas permettre à la personne de voter avant que tous les noms n'aient été lus. Ce pourrait être en quelque sorte une forme de manipulation. Je sais que l'on inscrit les noms sur les bulletins de vote par ordre alphabétique, alors un parti ou un autre ne serait pas favorisé, mais c'est simplement un commentaire que je tiens à formuler.
Comme le sénateur Carstairs, je suis du Manitoba. Pas de Winnipeg, mais d'une région rurale du Manitoba — et pas Dauphin-Swan River —, mais je m'intéresse beaucoup au fait que vous le ferez à Winnipeg.
On a déjà mentionné qu'il vous faut l'approbation du comité pour mettre ce système en place à l'élection générale. Ne vous faut-il pas aussi son approbation pour la mise à l'essai du projet pilote?
M. Mayrand : Oui. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui.
Le sénateur Plett : Ce projet pilote n'a pas été approuvé.
M. Mayrand : Non. C'est exactement pour cela que nous sommes ici ce soir.
Le sénateur Plett : Je suis membre substitut à ce comité, alors pardonnez-moi.
La présidente : Vous êtes tout de même le bienvenu.
Le sénateur Plett : Merci. Nous avez-vous donné une estimation des coûts pour Winnipeg-Nord? Vous en avez peut- être déjà parlé également.
M. Mayrand : Il en coûterait entre 20 000 et 25 000 $ pour la mise en place et l'utilisation du dispositif pour l'élection partielle. Cela ne comprend pas les coûts relatifs à la communication et à la sensibilisation requises à ce stade-ci, si nous obtenons l'approbation, ni d'ailleurs les coûts de l'évaluation subséquente.
Le sénateur Plett : Vous avez parlé de l'évaluation. Je trouve étrange que nous n'ayons pas vérifié les résultats obtenus par les provinces qui ont utilisé cette méthode. Il me semble que dans le cadre d'un projet pilote, il aurait été tout à fait logique qu'Élections Canada soit au Nouveau-Brunswick il y a quelques jours.
M. Mayrand : Nous y étions.
Le sénateur Plett : Pourtant, vous ne pouvez pas nous dire combien de personnes ont utilisé le système, ni si l'on a obtenu de bons résultats. Je n'ai entendu ici aucune statistique à ce sujet. C'est une observation, pas une question.
Comment déterminerez-vous le succès ou l'échec de ce système à Winnipeg-Nord? Y a-t-il un certain nombre de personnes qui ont besoin de cet appareil? Comment évaluerez-vous si cet exercice a été une réussite à Winnipeg-Nord?
M. Mayrand : L'une des choses que nous pourrons confirmer, c'est que la technologie fonctionne. Nous en sommes persuadés. Nous pourrons aussi en mesurer le succès en vérifiant de quelle façon et dans quelle mesure le système est utilisé par les électeurs. Nous déterminerons également si les électeurs étaient satisfaits de la façon de se servir de l'appareil. Voilà les trois principaux critères.
Le sénateur Plett : Déterminerez-vous le nombre de personnes qui l'ont utilisé?
M. Mayrand : Oui, certainement.
Le sénateur Plett : Mes autres questions ont déjà été posées. Je dois dire que je ne suis pas aussi enthousiaste que certains de mes collègues, mais je pense néanmoins que vous avez répondu aux questions. Merci.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : La première question que je poserais est la suivante : selon vos connaissances, est-ce que certains pays modernes, en Europe ou en Amérique du Nord, se sont déjà dirigés vers Internet pour le vote?
M. Mayrand : Pour le vote, oui, certainement.
Le sénateur Boisvenu : Lorsque je regarde Internet, je crois que c'est une technologie qui peut être très confidentielle. La personne peut voter de façon très confidentielle, même dans sa chambre à coucher. Cela m'apparaît une technologie dépassée, si on se dirigeait dans quelques années vers Internet; est-ce que c'est votre impression?
M. Mayrand : Honntement, ce sera une considération très centrale dans le « business case » qui va suivre. Est-ce que vraiment cela justifie l'investissement, qui risque d'être temporaire, si on obtient le vote électronique?
La seule chose que je vais devoir dire, et encore là, il est prématuré de le dire avant d'avoir fait toutes les analyses, bien qu'on envisage de tester le vote en ligne pour 2013, c'est que je n'envisage pas un déploiement à haute échelle du vote en ligne pour plusieurs années.
Je ne sais pas si les Canadiens et leurs représentants sont prêts à accepter le vote à domicile par Internet. Je ne sais pas si cela risque de miner un peu la confiance des citoyens. Plusieurs expériences ont été menées aux Etats-Unis et en Australie. Honnêtement, en Australie, on a abandonné.
Il y a eu des expériences en Suisse ainsi que dans différents pays d'Europe, où la technologie semble bien fonctionner et répondre aux besoins, mais il y aura toujours des enjeux de sécurité.
Une des choses fondamentales avec Internet, et cela sera probablement très important pour les candidats et les partis, c'est qu'on ne pourra plus témoigner du vote alors que quand les gens se présentent à des stations de vote, il y a des observateurs. C'est une chose qu'il faudra discuter avec les candidats à un parti.
Le sénateur Boisvenu : C'est une technologie qui m'apparaît lourde et coûteuse. Cela nécessite un support technique presqu'en permanence. À Sherbrooke, on a utilisé le vote électronique, il y a cinq ou six ans. Le système est tombé en panne durant la journée et on a dû terminer à la main. Il y donc a là un niveau de risque très élevé.
M. Mayrand : J'aimerais ajouter une précision. Cette machine, si elle tombait en panne — il y aurait un technicien — mais si elle tombait complètement en panne, les autres méthodes de votation seraient toujours disponibles. Cela ne paralyserait pas la tenue du scrutin.
Le sénateur Boisvenu : Est-ce que vous allez en appel d'offres pour avoir un fournisseur, et est-ce que le fournisseur doit être Canadien?
M. Mayrand : C'est une bonne question. Oui, on va aller en appel d'offres. D'après les règles de l'ALENA, je comprends que les appels d'offres doivent être faits au moins pour les juridictions de l'ALENA.
Le sénateur Boisvenu : Allez-vous faire une location ou un achat?
M. Mayrand : C'est ce que nous évaluerons dans notre analyse de rentabilisation.
Le sénateur Boisvenu : Si on va sur Internet dans quelques années et qu'on est pourvu d'un équipement lourd comme celui-là, cela n'a plus grand valeur.
M. Mayrand : Effectivement, c'est l'une des considérations.
Le sénateur Boisvenu : Vous reviendrez donc nous revoir si on décide que le vote se fera sur Internet?
M. Mayrand : Absolument, si on vote sur Internet. Je partagerai avec le comité, s'il approuve, les résultats du projet pilote et l'évaluation et le plan d'affaires.
Le sénateur Boisvenu : Merci beaucoup.
[Traduction]
Le sénateur Cowan : Merci beaucoup. J'aimerais revenir sur quelques sujets déjà abordés par mes collègues, notamment sur l'expérience réalisée récemment au Nouveau-Brunswick. Je peux comprendre la raison pour laquelle vous n'avez pas toutes les données si tôt après l'élection, et je suis certain que la question est délicate. Nous ne voulons pas simplement diviser les coûts par le nombre d'électeurs et faire des calculs non valables. Je pense que nous convenons tous du fait que plus nous pourrons répondre aux besoins spéciaux des gens et les encourager à voter, mieux ce sera pour nous.
Toutefois, j'ai été étonné que les résultats du Nouveau-Brunswick ne comptent pas, étant donné que vous avez prévu déterminer le nombre d'utilisateurs de l'appareil à l'élection partielle de Winnipeg. Ai-je bien compris que les résultats du Nouveau-Brunswick ne comptaient pas et que vous ne saurez pas combien de gens se sont servis de l'appareil?
M. Mayrand : C'est ce que je crois comprendre. Je dois souligner qu'au Nouveau-Brunswick, ce n'est pas seulement les électeurs handicapés qui ont utilisé l'appareil. On connaît le nombre de personnes qui l'ont utilisé, mais de ce nombre, on ignore combien étaient atteintes d'un handicap.
Le sénateur Cowan : Pouvez-vous nous donner des chiffres qui nous donneraient une idée du nombre de personnes qui ont utilisé l'appareil?
M. Mayrand : Non, je n'ai pas ces chiffres si tôt après l'élection de lundi. Cependant, je suis certain qu'ils seront disponibles tôt ou tard. J'ai parlé au directeur général des élections du Nouveau-Brunswick à ce sujet et d'après ce que je comprends, il nous sera impossible de savoir combien d'électeurs handicapés ont utilisé l'appareil.
Le sénateur Cowan : Certains électeurs non handicapés ont choisi de l'utiliser pour une raison ou une autre, n'est-ce pas?
M. Mayrand : Oui, et je crois qu'il serait juste de dire que la quasi-totalité des personnes qui l'ont fait n'étaient pas handicapées.
Le sénateur Cowan : C'est intéressant.
Savez-vous où étaient situés les appareils au Nouveau-Brunswick? De toute évidence, ils ont été utilisés par les directeurs du scrutin. Y avait-il des bureaux de scrutin spéciaux? Je ne connais pas les règles électorales du Nouveau- Brunswick. Comme les bureaux de scrutin par anticipation, les bureaux spéciaux sont-ils ouverts durant de longues périodes?
M. Mayrand : Je vais devoir m'en remettre à mon collègue. Les appareils ont été utilisés au bureau du directeur du scrutin et dans certains établissements de soins de longue durée, je crois, mais pas dans les bureaux de scrutin par anticipation.
Michel Roussel, directeur principal, Gestion et préparation des scrutins en région, Élections Canada : Les appareils ont été installés au bureau du directeur de scrutin ainsi que dans des bureaux auxiliaires à l'intérieur de chaque circonscription électorale.
Le sénateur Cowan : Je crois que toutes mes questions ont été abordées. Merci, monsieur.
La présidente : J'ai quelques questions à poser; je vais essayer d'être brève, et je vous demande de répondre de façon concise.
D'abord, serait-il raisonnable de penser qu'une grande proportion des personnes non handicapées physiquement qui ont choisi d'utiliser ce système au Nouveau-Brunswick ont pu le faire parce qu'elles sont aux prises avec des problèmes liés à l'alphabétisation?
M. Mayrand : C'est vrai pour un groupe d'électeurs. Je ne ferais pas ce postulat, mais les personnes peu alphabétisées représentent un groupe d'électeurs qui pourraient l'utiliser, en effet.
La présidente : Évidemment, c'est plus facile lorsque quelqu'un vous lit ce qui est écrit.
M. Mayrand : Oui, tout à fait.
La présidente : Parlez-nous de Dominion Voting Systems. S'agit-il d'une entreprise exclusivement canadienne ou d'une filiale d'une entreprise américaine?
M. McKinstry : Nous sommes une entreprise canadienne qui est aussi désormais présente aux États-Unis. Notre siège social est à Toronto, et nous sommes une compagnie constituée en personne morale en Ontario.
La présidente : Vous n'êtes pas la filiale d'une entreprise étrangère, n'est-ce pas?
M. McKinstry : Non; l'entreprise a vu le jour en Ontario en 2003.
La présidente : Avez-vous conçu votre propre logiciel, ou avez-vous obtenu une licence d'utilisation d'une autre entreprise?
M. McKinstry : C'est notre logiciel.
La présidente : Nous avons tous eu connaissance des rapports très controversés rendus publics aux États-Unis au sujet des difficultés éprouvées avec les dispositifs électroniques de vote, et je sais que bon nombre de ces problèmes touchaient le dépouillement des voix, ce qui n'est pas vraiment ce qui nous intéresse ici. Cette situation a tout de même soulevé des interrogations quant à la capacité d'accéder illégalement à des logiciels privés.
Exercez-vous un certain contrôle sur le logiciel utilisé pour ces systèmes? Permettez-moi de préciser que je n'accuse personne de quoi que ce soit. J'essaie simplement de m'assurer que l'on puisse préserver la foi indéfectible des Canadiens envers leur système électoral.
Monsieur Mayrand, avez-vous, en votre qualité de directeur général des élections du Canada, quelque contrôle que ce soit sur le logiciel, ou bien devez-vous l'acheter en tant que système fermé?
M. Mayrand : Nous en viendrons à programmer nous-mêmes les dispositifs utilisés pour le vote. Nous allons enregistrer les données dans ces dispositifs en prévision des élections.
Notre projet pilote permettra également de déterminer les délais à prévoir. Je ne sais pas si c'est vraiment ce que vous voulez savoir, mais nous allons contrôler les données chargées dans ces appareils. Tous ces dispositifs fonctionneront indépendamment les uns des autres; ils ne seront pas mis en réseau.
La présidente : Il n'existe pas de possibilité d'intervenir à partir d'un point central pour modifier les données; est-ce bien cela?
M. Mayrand : C'est exact. Chaque appareil est programmé individuellement.
La présidente : Comme je l'ai indiqué durant la démonstration technique, je m'inquiète un peu de ce qui risque d'arriver lorsque le bulletin est imprimé et sort de l'appareil en étant visible de tous. Je crois que vous avez dit que c'est le scrutateur qui le récupérerait.
M. Mayrand : Un fonctionnaire électoral additionnel serait désigné pour ce faire.
La présidente : C'est la personne qui prend le bulletin apparaissant du côté recto et le replie pour le placer dans la boîte. Je me demandais s'il était possible, surtout dans le cas des personnes ayant un handicap visuel, de se faire accompagner de quelqu'un d'autre que votre fonctionnaire, de manière à s'assurer que personne ne regarde ce qui est inscrit sur le bulletin avant qu'il soit replié. Il faut que les Canadiens puissent avoir la conviction que leur vote est bel et bien secret.
M. Mayrand : Oui, ce serait quelqu'un en qui ils ont confiance qui pourrait attester de cette confidentialité. C'est une possibilité que nous pourrions sans doute explorer, à moins que notre conseiller juridique soit d'un autre avis.
[Français]
Stéphane Perrault, avocat général principal et directeur principal, Élections Canada : Dans la mesure où on a l'autorisation des deux comités et qu'on nous permette de déroger à la loi, on a une certaine latitude. Je pense qu'il faut qu'on soit assez clair devant les deux comités quant à l'étendue de cette dérogation. C'est quelque chose qu'on pourrait explorer et étudier avec l'autre comité aussi.
La présidente : Merci.
[Traduction]
Vous avez indiqué, monsieur Mayrand, que la technologie utilisée semblait très simple. Cela ne m'apparaît pas aussi simple, surtout dans le cas d'une personne pouvant être un peu nerveuse ou confuse. Je vous exhorte donc de tout mettre en œuvre, non seulement pour rejoindre les gens afin de leur indiquer qu'il leur est possible de voter, mais aussi pour leur montrer comment faire. Je ne sais pas exactement quelles mesures de simplification je pourrais vous suggérer, si ce n'est d'éviter d'utiliser des termes comme « fonctionnalité » et « désélection ». Il est notamment possible que les gens aient besoin de passablement d'aide lorsqu'ils utiliseront le système pour la première fois.
M. Mayrand : C'est l'un des éléments importants que le projet pilote nous permettra d'évaluer.
Au cours des derniers week-ends, la Ville d'Ottawa a organisé des démonstrations dans différents centres commerciaux. C'est une autre façon d'informer les électeurs handicapés et leur famille. Des mesures semblables pourraient être prises.
Le sénateur Wallace : Monsieur Mayrand, je veux m'assurer de bien comprendre quelles seraient les implications si notre comité et celui de la Chambre devaient approuver le recours à cette technologie dans le cadre de votre projet pilote. Si vous concluez à l'efficacité du système et que vous souhaitez l'utiliser lors de la prochaine élection générale, auriez-vous besoin d'une approbation de notre part, ou êtes-vous autorisé à prendre cette décision vous-même?
M. Mayrand : Je peux vous assurer que nous devrions nous adresser de nouveau aux deux comités afin d'obtenir de nouvelles approbations.
À moins que l'enthousiasme soit généralisé et que l'on souhaite nous voir accélérer les choses à l'issue du projet pilote et de l'évaluation, je vais sans doute recommander des modifications favorables du point de vue législatif. Il faudrait alors qu'un projet de loi soit préparé, déposé et étudié au moyen du processus normal.
Le sénateur Wallace : En réponse à une question du sénateur Boisvenu, vous avez indiqué qu'à l'issue du projet pilote, vous allez procéder à une évaluation technique de la performance. Je crois vous avoir également entendu dire que vous allez alors déterminer si la dépense est justifiée. Je suppose que vous prendrez donc en considération le nombre d'utilisateurs de l'appareil par rapport aux coûts engagés.
Avez-vous une idée de la façon dont vous allez vous y prendre pour déterminer si la dépense est justifiée? Avez-vous déjà pensé aux corrélations à établir? Si seulement trois personnes l'utilisent, en conclurez-vous que la dépense n'est pas justifiée? Quels critères allez-vous utiliser?
M. Mayrand : Il serait injuste de s'en tenir uniquement à des considérations économiques.
Le sénateur Wallace : Je suis d'accord avec vous.
M. Mayrand : Au fil de notre évaluation, nous examinons également ce qui se passe ailleurs. Un certain nombre de municipalités vont avoir recours à cette technologie au cours des prochains mois. Nous surveillons le tout de très près, car cela va également nous éclairer dans notre évaluation.
Le plus difficile sera d'aller au-devant des électeurs en leur donnant accès aux dispositifs le plus près possible de chez eux. Si nous y parvenons, nous pourrons voir quel sera le taux d'utilisation.
Lors des essais réalisés auparavant, on s'est davantage intéressé à l'aspect technologique qu'à la nécessité de déployer les appareils à proximité des électeurs, et c'est ce que nous devrons maintenant réussir à faire. Comment pouvons-nous cibler les électeurs handicapés? Où pouvons-nous nous rendre pour optimiser les chances qu'ils participent aux rencontres, par exemple? Nous pourrons savoir si cela est possible. Nous pourrons ainsi juger de leur degré d'enthousiasme quant à l'utilisation de cette technologie.
Je ne suis pas convaincu que nous obtiendrons de très bons résultats en nous contentant d'installer ces dispositifs dans les bureaux de scrutin habituels sans déployer d'effort additionnel. Je suis persuadé que cela serait inefficace. Il est encore un peu tôt, mais certains facteurs économiques vont entrer en jeu, tout comme différentes considérations touchant les électeurs eux-mêmes. Nous allons recevoir les commentaires des électeurs et des groupes représentant les personnes handicapées. Il y en a un certain nombre dans Winnipeg-Nord et ils participeront tous à ce projet pilote.
Le sénateur Lang : Vous avez indiqué que cet appareil se trouve déjà à Winnipeg et qu'il est actuellement utilisé ou mis à l'essai. Est-ce exact?
M. Mayrand : Des appareils semblables seront utilisés.
Le sénateur Lang : Je croyais que vous aviez dit qu'ils étaient dans les centres commerciaux et qu'on les mettait à l'essai.
M. Mayrand : À Ottawa, il y a des élections municipales qui s'en viennent et l'on utilise des dispositifs similaires. On y a effectué des démonstrations dans différents centres commerciaux de la région afin de sensibiliser les gens. Nous pourrions faire un peu la même chose dans Winnipeg-Nord.
Le sénateur Lang : Est-ce que l'estimation de 21 000 $ vaut pour l'achat ou la location de l'appareil?
M. Mayrand : Je crois que c'est pour la location. Nous n'achetons pas l'appareil. Il est en service.
Le sénateur Lang : Vous voulez dire que vous le louez?
M. Mayrand : C'est un service que nous louons.
Le sénateur Lang : Je veux revenir aux observations de notre présidente concernant l'extrême importance que l'on doit accorder au caractère confidentiel du bulletin de vote et à l'assurance qu'il ne soit pas manipulé. Nous avons parlé précédemment du fait que nous devions composer avec une clientèle d'électeurs plus âgés et qu'il était notamment question des foyers d'accueil. La situation me préoccupe quelque peu, car certains de ces foyers comptent une forte population de personnes atteintes de démence. C'est une triste réalité dont il a malheureusement beaucoup été question au cours des dernières semaines.
Si l'appareil est installé dans l'un de ces foyers, comment pouvons-nous être certains que le vote n'est pas manipulé par les utilisateurs? Comment pouvons-nous nous assurer que les suffrages sont exprimés de façon appropriée? J'espère que je me fais bien comprendre. C'est un sujet que tout le monde évite, mais c'est tout de même la réalité.
La présidente : Je crois que c'est clair, mais permettez-moi, sénateur Lang, d'élargir un peu le champ de votre question en demandant si, même dans le système actuel, il existe ou devrait exister — et j'ai de forts doutes à ce sujet — des dispositions permettant d'indiquer que tel électeur est mentalement apte à voter, alors que tel autre ne l'est pas. C'est là où vous voulez en venir.
Le sénateur Lang : Non, pas du tout. Si l'on installe un appareil comme celui-ci dans un foyer d'accueil, quelqu'un sera responsable de le faire fonctionner et quelqu'un d'autre pourra l'assister. Comment pouvons-nous être assurés que l'on ne manipulera pas les votes des personnes atteintes de démence grave? C'est simplement une question.
La présidente : Monsieur Mayrand, c'est une question fort troublante.
M. Mayrand : C'est une question très délicate. Premièrement, ce sont les fonctionnaires électoraux qui se servent de ces appareils. Il s'agit de représentants d'Élections Canada, alors ce n'est pas n'importe qui. Deuxièmement, les candidats ont toujours la possibilité de se faire représenter par des observateurs au moment du scrutin. Nous avons en outre des agents de relations communautaires qui visitent les foyers avant et durant le scrutin afin d'avoir une meilleure idée de la population qui y réside et des difficultés qui peuvent se présenter. Ils parlent au dirigeant de l'établissement. Lorsque nous déléguons du personnel électoral sur place, chacun connaît la situation des résidents de ces foyers et doit s'assurer qu'ils puissent voter. Comme il s'agit de citoyens de 18 ans et plus, ils ont tous le droit de vote. C'est la possibilité que nous voulons leur offrir. Il va de soi que s'il y a des cas de démence grave, personne ne va vraiment insister. On offre toutefois à chacun la chance d'exprimer son suffrage de la manière la plus indépendante possible.
Ces appareils ne seront jamais laissés sans surveillance, si c'est que vous vouliez savoir. Des fonctionnaires d'Élections Canada en seront responsables.
Le sénateur Carstairs : Si l'appareil est installé dans un établissement de soins de longue durée, on peut présumer que celui-ci serait désigné comme bureau de scrutin. À ce titre, on y retrouverait tout le personnel prévu, ce qui veut dire non seulement les fonctionnaires d'Élections Canada, mais aussi les observateurs que chaque parti politique peut déléguer.
M. Mayrand : Dans la plupart des cas, les choses se passeraient effectivement ainsi.
La présidente : Soit dit en passant, je me souviens de ma grand-mère qui a vu son état se détériorer au fil d'une longue période. L'une des dernières choses dont elle était certaine, c'était d'être conservatrice. Je suis loin d'en être fière. Elle ne savait pas nécessairement ce qu'elle avait mangé au petit-déjeuner, mais elle savait très bien ce qu'elle voulait faire si vous lui présentiez un bulletin de vote.
Le sénateur Plett : Sénateur, mon grand-père était lui aussi conservateur, et je ne me suis jamais écarté du droit chemin.
Sauf erreur de ma part, nous avons maintenant des bureaux de scrutin mobiles. Est-ce que je me trompe?
M. Mayrand : Oui, nous avons des bureaux mobiles.
Le sénateur Plett : Ne pourrait-on pas placer ces appareils sur des chariots, les transporter dans une fourgonnette et en faire des bureaux de scrutin mobiles, plutôt que de les installer à grands frais dans des foyers pour personnes âgées? Des gens pourraient se déplacer avec ces appareils et offrir des services mobiles comme on le fait actuellement.
M. Mayrand : Comme le signalait le sénateur Carstairs, tout dépend de la taille du foyer. S'il compte suffisamment d'électeurs, nous allons y installer un bureau de scrutin. S'il n'y en a pas assez, les bureaux mobiles sont effectivement une option et nous allons examiner cette possibilité dans Winnipeg-Nord. Cependant, nous n'en sommes pas encore arrivés à une conclusion à ce sujet.
Le sénateur Plett : Vous pourriez toutefois envisager cette possibilité dans Winnipeg-Nord?
M. Mayrand : Oui, c'est une option.
[Français]
La présidente : Merci beaucoup. Cela a vraiment été une des audiences les plus intéressantes depuis belle lurette. Nous vous remercions énormément.
M. Mayrand : Cela a été très intéressant aussi de notre côté.
[Traduction]
La présidente : Je demanderais aux sénateurs de rester sur place encore quelques minutes pour que nous discutions à huis clos de nos travaux futurs. Nous sommes très reconnaissants à tous ceux qui se sont déplacés aujourd'hui pour venir nous faire la démonstration de ce dispositif nouveau et tout à fait fascinant. Nous allons interrompre la séance pendant quelques instants le temps que nos témoins quittent la salle.
(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)