Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 6 - Témoignages du 24 novembre 2010
OTTAWA, le mercredi 24 novembre 2010
Le Comité permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 18 h 49 dans le cadre de son étude sur les nouveaux enjeux qui sont ceux du secteur canadien du transport aérien.
Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Honorables sénateurs, je déclare ouverte cette séance du Comité sénatorial permanent des transports et des communications et je vous remercie d'être présents. Ce soir nous poursuivons notre étude sur les nouveaux enjeux du secteur canadien du transport aérien.
[Traduction]
Nous accueillons aujourd'hui des représentants de l'Association de l'industrie touristique du Canada, à savoir David Goldstein, président-directeur général; Kevin Desjardins, directeur, Communications et relations publiques; et Catherine Sadler, gestionnaire, Recherche.
[Français]
Le président : Monsieur Goldstein, la parole est à vous. Nous passerons ensuite à la période des questions.
David Goldstein, président-directeur général, Association de l'industrie touristique du Canada : Monsieur le président et membres du comité, je tiens à vous remercier de l'opportunité de comparaître devant votre comité. Je vous remercie également d'avoir entamé cette importante étude.
Je suis David Goldstein, président-directeur général de l'Association de l'industrie touristique du Canada.
[Traduction]
Je suis accompagné de Kevin Desjardins, directeur des communications, et de Catherine Sadler, gestionnaire de la recherche.
En guise d'introduction, je dirai que l'AITC, l'Association de l'industrie touristique du Canada, est le seul organisme national qui représente tous les secteurs des industries touristiques et du voyage au Canada. Nos membres incluent des entreprises directement impliquées dans le secteur de l'aviation, comme les compagnies aériennes et les aéroports, qui ont d'ores et déjà témoigné dans le cadre de cette étude.
Même si nous avons contribué au livre blanc sur l'aviation qui a été déposé devant votre comité, notre perspective s'étend au-delà des facteurs économiques rattachés spécifiquement au domaine de l'aviation au Canada, pour prendre aussi en considération son impact sur l'économie canadienne dans son ensemble. En effet, nous représentons plus de 8 000 membres directs et affiliés, d'un océan à l'autre, pour qui travaillent plus de 1,6 million de Canadiens, dont l'emploi dépend de l'activité économique générée par les secteurs du tourisme et du voyage.
Je suis convaincu que vous êtes conscients de l'impact croissant du secteur de l'aviation sur l'industrie touristique, ce qui justifie notre présence ici aujourd'hui. Permettez-moi cependant de souligner un point important : dans le contexte actuel, le Canada n'est plus un endroit où l'on se rend en voiture, mais plutôt une destination longue distance, la majorité des visiteurs arrivant par avion. À l'appui d'un tel constat, les données les plus récentes de Statistique Canada révèlent qu'au cours des neuf premiers mois de cette année, 6,5 millions de visiteurs sont arrivés au Canada par voie aérienne, tandis que 5,6 millions de visiteurs sont arrivés en voiture, pour y passer au moins une nuit.
Si nous voulons encourager un nouvel essor de l'industrie touristique canadienne, nous allons devoir nous tourner vers de nouveaux marchés émergents. Ainsi, il va absolument falloir, si nous voulons rester concurrentiels sur la scène internationale, assurer aux voyageurs internationaux à destination du Canada un transport aérien à la fois sécuritaire, efficace et rentable.
Permettez-moi ici de brosser un tableau du contexte global. Le tourisme est l'un des secteurs économiques qui connaissent le taux de croissance le plus important à l'échelle de la planète, ce taux étant supérieur à celui de l'économie mondiale. En tant qu'industrie d'exportation, le tourisme se situe mondialement au quatrième rang, après le pétrole, les produits chimiques et les produits automobiles. Selon l'Organisation mondiale du tourisme des Nations Unies, les arrivées internationales devraient enregistrer un taux de croissance de 3 à 4 p. 100 en 2010, pour atteindre plus de 1,6 milliard d'ici à 2020. Mais si le marché touristique s'élargit, la part du Canada, elle, devient de plus en plus petite.
En 2002, le Canada se plaçait au 7e rang mondial pour les arrivées internationales, mais le pays a reculé à la 15e place l'an dernier, derrière des pays comme la Turquie, la Malaisie et l'Ukraine. Pendant la même période, le déficit commercial de notre secteur touristique s'est creusé de façon spectaculaire, passant de 1,2 milliard de dollars en 2002 à plus de 12,2 milliards l'an dernier. Pourquoi cela doit-il nous préoccuper?
Cela nous préoccupe, nous, parce que nous faisons face à des enjeux de nature structurelle, qui sapent notre compétitivité et affectent la confiance des investisseurs, et qui nous empêchent de participer pleinement à la forte croissance que l'on observe dans ce secteur d'exportation à l'échelle mondiale. Et cela devrait vous préoccuper, vous, en tant que représentants de l'État, parce que l'érosion de notre compétitivité a un impact négatif sur le trésor fédéral, comme l'indique une étude récemment publiée par Statistique Canada. Cette étude, qui porte sur les revenus du gouvernement provenant du secteur touristique, indique une diminution de 3,7 p. 100 pour tous les ordres de gouvernement, et de 5 p. 100 pour le gouvernement fédéral. C'est la première fois depuis 2003 que les revenus du gouvernement provenant du tourisme accusent une baisse, et, selon Statistique Canada, cette baisse est attribuable à une diminution du nombre de visiteurs étrangers.
Comme nous l'indiquons dans notre étude, le recul du Canada de la 7e à la 15e position du classement des arrivées internationales n'est pas uniquement une question de part de marché. Il y a aussi la perte de près de 5 millions d'arrivées internationales qui, si nous les avions conservées, se seraient traduites par une entrée de plus de 5 milliards de dollars dans notre économie, près de 50 000 emplois de plus pour les Canadiens, plus de 466 millions de dollars dans les coffres du gouvernement fédéral, et plus de 727 millions de dollars de revenus supplémentaires pour tous les ordres de gouvernement.
Même s'il est tentant de jeter le blâme sur la hausse de la devise canadienne, il faut reconnaître que la faiblesse de notre dollar n'a servi dans le passé qu'à camoufler certains des problèmes de nature structurelle qui affectent notre pays en tant que destination voyage. Autrement dit, si les Canadiens voyageant au Canada demeurent un groupe important, il est clair que ce sont les mêmes dollars qui circulent à l'intérieur de notre économie. Or, si l'on veut s'attaquer sérieusement au déficit dans le secteur des voyages, il faut viser un accroissement des arrivées internationales, car c'est ça qui stimule les investissements, la création d'emplois et les rentrées d'argent pour l'État.
Comment y parvenir? Comment exploiter un tel potentiel économique? D'abord, il faut se pencher sur la question des coûts. Le rapport du Forum économique mondial sur la compétitivité dans le secteur du voyage et du tourisme classe le Canada au 106e rang du palmarès mondial de la compétitivité en ce qui a trait aux prix. La raison? Nos taxes, ainsi que les droits et redevances imposés par le gouvernement sur les tarifs aériens. Nous devons d'abord mettre en place un régime de taxation équitable qui n'entrave pas le développement économique de notre industrie. Cela signifie notamment l'adoption d'un système plus équitable en ce qui concerne les loyers des aéroports. Nous devons ensuite être en mesure de lutter à armes égales avec notre principal concurrent dans le secteur touristique, à savoir les États- Unis. Cela signifie notamment l'adoption d'une formule plus équitable en ce qui a trait au droit pour la sécurité des passagers du transport aérien. Enfin, nous devons envisager diverses politiques qui permettront d'accroître la compétitivité du Canada sur le marché mondial du tourisme et des voyages. Il faudrait prévoir un financement à la fois stable et concurrentiel pour les activités de marketing et de promotion du Canada à l'étranger, principalement par l'entremise de la Commission canadienne du tourisme.
La prospérité de notre secteur touristique dépend de notre capacité à attirer davantage de voyageurs en provenance d'autres pays, voyageurs qui viendront au Canada par avion. Dans la plupart des cas, la première décision que doit prendre le voyageur lorsqu'il planifie un voyage concerne la réservation du billet d'avion. Or, la multiplicité des droits et redevances qui s'ajoutent au coût initial d'un billet pour le Canada est un facteur de dissuasion pour bon nombre de voyageurs à une étape cruciale du processus d'achat.
La bonne nouvelle, c'est que la marque canadienne reste très solide à l'international, la célèbre société FutureBrand l'ayant placée au premier rang mondial. Notre défi consiste donc à convertir la popularité de la marque en arrivées concrètes. Si nous ne nous attaquons pas aux problèmes structurels qui affectent notre secteur aérien, les prix que nous exigeons vont tout simplement nous exclure du marché et notre secteur d'activité continuera de décliner.
Nous avons la chance de posséder les principaux atouts qui font de nous un joueur d'importance dans un secteur en croissance dans le monde entier. Nos membres ont traversé les étapes les plus difficiles de la crise économique et ils se disent prêts à investir pour accroître notre compétitivité, mais il faut leur offrir un cadre politique favorable au succès de leurs initiatives.
Je suis prêt à répondre à vos questions.
[Français]
Le président : Merci, monsieur Goldstein. Je rappelle aux membres du comité que le comité est télédiffusé. C'est pourquoi j'aimerais que les gens qui veulent poser questions me donnent leur nom le plus tôt possible.
[Traduction]
Sénateurs, je vous invite à me dire le plus rapidement possible si vous avez l'intention de prendre la parole, afin que je puisse répartir le temps dont nous disposons. Je vous demande votre collaboration, car je prête attention aux critiques qui sont faites. Je vais essayer de répartir le temps de parole de façon aussi équitable que possible, et de façon à ce que nos invités puissent répondre au maximum de questions.
Le sénateur Fox : Gardez-vous du temps pour vous.
Le président : Le président est à la disposition des membres du comité.
Le sénateur Plett : Du moment que je peux poser une question supplémentaire, ça me va.
Le président : Il faudra que les questions supplémentaires soient désormais plus brèves.
Bref, vous avez droit à deux questions chacun. Si vous voulez en poser une troisième, vous aurez droit à une question supplémentaire au second tour. Je donne maintenant la parole au sénateur Housakos.
Le sénateur Housakos : Pourriez-vous nous décrire les relations qui existent entre l'AITC, les administrations aéroportuaires et l'industrie aérienne au Canada? Dans quelle mesure vous aident-elles à communiquer notre message et à stimuler nos revenus touristiques?
On nous a souvent dit que les taxes sur les carburants, les loyers des aéroports et les droits pour la sécurité nuisent à notre compétitivité. Je vous demande donc, comme je l'ai demandé à d'autres témoins, quel pourcentage du coût moyen d'un billet d'avion tous ces frais représentent, pour les voyages à l'intérieur du Canada aussi bien que pour les voyages internationaux.
M. Goldstein : Je vous remercie de votre question, sénateur. Un grand nombre d'administrations aéroportuaires, ainsi que West Jet et Air Canada sont membres de notre association. La structure de notre association fait en sorte que nous n'avons pas un nombre disproportionné de membres. Évidemment, ce sont les exploitants indépendants qui représentent le groupe le plus important parmi nos membres, et cela comprend les hôteliers, les organismes de promotion des attractions touristiques et locales — en gros, tout l'éventail des entreprises touristiques privées au Canada.
Cela dit, ils ont aussi leurs propres organisations — l'Association des hôtels du Canada, le Conseil de l'aviation et le Conseil des aéroports du Canada — avec lesquelles nous avons préparé le livre blanc qui vous a été présenté, je crois. Nous estimons qu'il est important de coordonner nos efforts et d'avoir ce genre de discussions ici, avec le Parlement, avec les médias et avec les autres parties intéressées.
Pour ce qui est du pourcentage, nous vous communiquerons ce chiffre plus tard. Bien entendu, il varie selon le coût du billet et la destination, mais nous savons que, selon l'Organisation mondiale du tourisme des Nations Unies qui a placé le Canada au 106e rang au monde, nos coûts sont 20 p. 100 plus élevés que ceux de n'importe où au monde. En fait, cela revient à un supplément de 20 p. 100 sur la moyenne de nos vols internationaux et intérieurs.
Le sénateur Merchant : Merci. Vous ne représentez pas la Commission canadienne du tourisme? C'est donc un organisme différent?
M. Goldstein : Non, ce n'est pas le même organisme.
Le sénateur Merchant : Il y a quelque temps, j'ai lu un article qui reprenait beaucoup de vos arguments et qui citait les mêmes statistiques. Des deux points qui étaient soulevés, il était notamment question du fait que le Canada avait commencé à exiger des visas au départ de certains pays, comme le Mexique, et que de ce fait, il y a beaucoup moins de touristes mexicains au Canada. Est-ce que ça contribue au problème? Y a-t-il plusieurs pays pour lesquels on exige aujourd'hui des visas alors que ce n'était pas le cas avant?
M. Goldstein : C'est une question judicieuse, sénateur. Effectivement, l'une des choses les plus difficiles à faire comprendre aux gens, c'est que le tourisme est une industrie d'exportation comme une autre. La principale différence, c'est que les biens et les services sont consommés ici, au Canada, et que par conséquent on ne l'assimile pas à une industrie d'exportation. Ce n'est pas la même chose que d'expédier une cargaison de bois d'oeuvre dans un autre pays.
Les visas, c'est un peu comme les permis d'exportation. Ce qui est intéressant, c'est qu'une branche du gouvernement canadien, la Commission canadienne du tourisme, la CCT, a identifié avec raison un certain nombre de marchés qui seraient prometteurs pour nous. Toutefois, le ministère de l'Immigration ne prend pas de mesures parallèles pour faciliter l'émission de visas dans des pays comme le Mexique où nous n'exigions pas de visas auparavant. Ainsi, il est de plus en plus difficile de promouvoir dans ces pays le tourisme au Canada.
Une meilleure coordination entre ces deux organismes serait pour nous extrêmement utile, car, comme la plupart des industries d'exportation, nous essayons d'aller chercher de nouveaux marchés dans les pays émergents afin de diminuer notre dépendance à l'égard du marché américain. Il y a 15 ou 20 ans, les habitants des pays du BRIC, le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine, et les ressortissants d'autres pays comme le Mexique n'avaient pas les moyens ou l'autorisation de voyager. Or, aujourd'hui, ils représentent un segment de la clientèle de voyageurs qui se développe très rapidement, et nous risquons, à cause du coût des billets et des formalités de visas, d'entraver leur accès au Canada.
Le sénateur Merchant : Vous avez dit qu'il faudrait peut-être faire plus de publicité sur le Canada à l'étranger. De ce côté-là aussi je crois que nous sommes en retard. Y a-t-il des pays qui sont particulièrement dynamiques pour attirer des visiteurs chez eux? On aurait peut-être des leçons à apprendre.
M. Goldstein : Mme Sadler va bientôt me donner des chiffres précis, mais croyez-moi, nous ne sommes pas de taille. J'estime que, vu les moyens dont elle dispose, la Commission canadienne du tourisme a fait un travail exceptionnel, notamment en ce qui a trait aux Olympiques, et c'est pour cela que la marque canadienne a conservé sa cote de popularité. Nous étions souvent parmi les 10 premiers, mais nous avons été propulsés au premier rang en partie à cause de l'enthousiasme suscité par les Jeux olympiques.
Comme vous le verrez dans le rapport, la ville de Las Vegas dépense plus que le Canada pour faire sa promotion à l'étranger. Les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Inde et la France sont de très grands pays, certes, mais même un pays comparable comme l'Australie dépense environ 35 p. 100 de plus que nous pour faire la promotion de sa marque nationale.
Nous aimerions que la Commission canadienne du tourisme ait un budget plus important et plus stable pour faire la promotion du Canada sur les marchés internationaux, et un budget calculé sur le long terme, car il est difficile d'obtenir des résultats concrets avec une campagne d'un an ou deux seulement. Il est donc très important de planifier les activités médiatiques à long terme.
Le sénateur Fox : C'est peut-être parce qu'il y a beaucoup d'artistes canadiens qui vont à Las Vegas.
[Français]
Monsieur Goldstein, je vous remercie d'être avec nous. J'ai trouvé votre présentation extrêmement intéressante et troublante.
Je reviens d'abord à deux statistiques que vous avez mentionnées. Vous dites que nous sommes passés de la septième position à la 15e position en termes de passagers internationaux qui arrivent au Canada, et que nous sommes rendus au 106e rang au palmarès mondial de la compétitivité au niveau des prix.
Y a-t-il une relation directe entre le fait de passer de la septième position à la 15e et le problème de la compétitivité au niveau des prix? Et si oui, y a-t-il là une tendance lourde? Et si on ne prend pas de mesures, peut-on penser que cette situation peut se détériorer davantage ou s'il y a une certaine stabilité?
[Traduction]
M. Goldstein : C'est un début. L'une des raisons pour lesquelles ce segment particulier de la clientèle de voyageurs est l'un de ceux qui se développent le plus rapidement sur le marché mondial, c'est que, comme je l'ai dit tout à l'heure, la classe moyenne de ces pays émergents est en pleine croissance, d'où l'extrême importance des conditions d'accès. Il y a donc un lien, pour répondre à votre question. Dans certains cas, ce sont les formalités d'accès, dans d'autres cas, c'est le coût du billet, mais je suis convaincu que nous pouvons renverser cette tendance. Le livre blanc en a fait sa première priorité, et notre organisation, l'AITC, s'est fixé comme objectif de ramener le Canada parmi les 10 premiers d'ici à 2017, soit pour le 150e anniversaire de notre pays.
Le sénateur Fox : Comment allons-nous nous y prendre?
M. Goldstein : Les 12 à 18 prochains mois vont être décisifs parce que les choses sont en train de changer dans le secteur du tourisme international. Par exemple, Air France avait récemment à choisir entre Seattle et Vancouver comme port d'escale pour ses liaisons internationales vers l'Est, et elle a finalement opté pour Seattle à cause de la structure de prix. C'est un exemple des changements auxquels nous assistons. Par conséquent, si nous ne réglons pas ce problème rapidement, nous risquons d'en subir les conséquences à plus long terme.
Le sénateur Fox : Autrement dit, vous attribuez notre manque de compétitivité dans ce domaine essentiellement au coût des billets d'avion, et pourtant, on a l'impression que ce sont plutôt les vols intérieurs qui coûtent très cher. Par exemple, je suis sûr que si je me rends demain à l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau, je peux me trouver un billet pour Paris à un tarif très bon marché, en tout cas moins cher que pour aller à Toronto. Dans ce cas, pourquoi dites-vous que les vols internationaux coûtent très cher?
M. Goldstein : Premièrement, ce sont les frais à l'arrivée qui sont très élevés. Pour ce qui est des Canadiens qui prennent des vols intérieurs, il est vrai que le prix des billets est élevé, mais le marché est assez saturé. Environ 80 p. 100 des revenus de l'industrie touristique proviennent de Canadiens qui voyagent au Canada, ce qui n'est pas mal du tout étant donné qu'avec nos températures hivernales, beaucoup de gens veulent aller dans le Sud.
Au risque de trop simplifier les choses, je vous dirai qu'il y a trois éléments à prendre en compte. Le premier est « M » pour marketing; le deuxième est « A » pour accès; et le troisième est « P » pour produit, et le produit est aussi important que les deux autres éléments. C'est sans doute une discussion qu'on devrait avoir dans une réunion d'un autre comité, mais je veux parler de produits comme des festivals ou des manifestations sportives. Pour vous donner un exemple de ce qui donne envie aux gens d'aller au Canada et de ce qui les décide vraiment à y aller, voyez la différence dans le nombre de touristes enregistrés à Montréal quand le Grand prix de Formule 1 y était tenu et après qu'il ait été annulé. Cette différence est considérable.
Le sénateur Fox : Voulez-vous dire que si le prix des billets d'avion était plus concurrentiel dans l'ensemble du Canada, la situation serait nettement meilleure?
M. Goldstein : Je ne le pense pas, car il va y avoir de plus en plus de concurrence dans les airs. J'ai discuté avec d'autres compagnies aériennes qui n'ont pas de difficultés à obtenir des itinéraires au Canada, mais qui n'y viennent pas pour des questions d'argent.
Le sénateur Martin : Merci, monsieur Goldstein, et merci à vos collègues d'avoir comparu devant notre comité. Je suis ravi d'apprendre que la marque canadienne est encore très populaire, surtout après les Jeux olympiques. J'habite à Vancouver. J'ai vu des publicités qui ont été faites à l'étranger et c'était très impressionnant. Nous avons d'ailleurs accueilli ici des représentants de la Commission canadienne du tourisme.
J'aimerais vous interroger au sujet de notre solide marque internationale pour savoir comment nous pourrions mieux l'exploiter au cours des 18 prochains mois. Quel genre de relation avez-vous avec la commission et avec l'industrie du transport aérien? Dans quelle mesure réussissez-vous à mutualiser ou à optimiser vos ressources pour que, en fin de compte, ce qui profite à l'industrie touristique profite également à l'industrie du transport aérien et vice versa? Là où vous avez des intérêts communs, dans quelle mesure arrivez-vous à coordonner vos efforts?
M. Goldstein : Nous avons une collaboration très étroite avec la Commission canadienne du tourisme. Je vous dirai franchement que ce n'est pas un organisme qui sait bien se vendre, et c'est pour cela que nous venons rencontrer des gens comme vous afin de nous assurer que cette commission a les ressources nécessaires pour s'acquitter de son mandat. Nous avons depuis longtemps des partenariats avec les compagnies aériennes et les conseils aéroportuaires. Il y a un lien direct. Il ne faut pas stigmatiser les aéroports. Sans vous révéler la source, je peux vous répéter ce qu'on m'a déjà dit à ce sujet, à savoir que les États-Unis traitent leurs aéroports comme des fusibles de l'économie, tandis qu'au Canada, nous les traitons comme des sources de revenus fiscaux.
Il va falloir renverser cette tendance si nous voulons que les choses changent. Le livre blanc que nous vous avons présenté est le fruit d'une coopération entre les grandes organisations nationales, et c'est ce genre de coopération qu'il faut encourager. Je crois que c'est la première fois que ces organisations nationales ont travaillé de concert.
Le sénateur Martin : Il va nous falloir un certain temps pour régler les problèmes d'ordre structurel dont vous avez parlé, mais en attendant, auriez-vous des stratégies à court terme à nous proposer? Un rapport sera publié et les parties intéressées pourront en prendre connaissance.
M. Goldstein : Le bilan n'est pas entièrement négatif. Les chiffres se sont améliorés vers la fin de l'année. Nous y voyons un rétablissement cyclique. Nous avons signé cette année l'Accord SDA avec la Chine, et nous en voyons déjà les retombées. Des voyages ont été organisés au Canada par des agences chinoises, et cela a été positif.
Il y a de bonnes choses qui se font à court terme. Par exemple, vous n'ignorez pas que le premier ministre a présenté, en juin 2009, le Cadre de la stratégie fédérale en matière de tourisme. Le ministre Moore devrait en annoncer la mise à jour au début de l'année prochaine.
Mais au fond, s'il est si difficile de faire quoi que ce soit dans ce domaine — comme le disait votre collègue, je crois —, c'est qu'il y a tellement de ministères fédéraux qui interviennent dans ce dossier qu'il n'y a pas d'approche concertée, malheureusement.
En imposant un visa aux voyageurs en provenance du Mexique, par exemple, vous avez voulu régler un problème légitime, mais vous avez aussi renoncé à l'apport de dizaines de millions de dollars dans l'industrie canadienne du tourisme. Et il y a d'autres exemples du même acabit.
Très franchement, s'il y a une chose que le gouvernement pourrait faire pour tirer parti de la stratégie fédérale annoncée par le premier ministre, ce serait de confier à un organisme le soin de coordonner tout cela et de jouer au contrôleur aérien, façon de parler.
Le sénateur Plett : Je vous demande de m'excuser d'être arrivé en retard, mais le sénateur Mercer et moi-même devions accueillir de sympathiques agriculteurs de la Nouvelle-Écosse et du Manitoba à Ottawa. C'est pour ça que nous avons été retardés.
Je vous remercie de comparaître devant notre comité. Je n'ai que deux questions à vous poser. Pour ce qui est de la première, je croyais que le sénateur Fox la poserait avant moi.
Dans tout ce que nous faisons, la première impression est souvent déterminante, qu'il s'agisse de l'industrie touristique ou d'un visiteur qu'on accueille dans son bureau ou chez soi.
Quand je reviens au Canada après un long voyage fatigant et que j'essaie de me frayer un chemin dans la longue file d'attente qui précède le passage à la douane, je vois sous le magnifique panneau « Bienvenue au Canada » un type dont la mine patibulaire n'a rien de bienveillant. Je me demande s'il y a beaucoup de ces merveilleux touristes qui débarquent dans notre pays qui ont la même impression que moi et qui sont tentés de remonter dans l'avion pour rentrer dans leur pays où on les traite certainement un peu mieux que nous ne le faisons lorsqu'ils arrivent chez nous.
Selon vous, quelle est l'incidence de cette situation sur notre tourisme? Peut-être que cela n'en a pas, peut-être que ce n'est pas mieux ailleurs. Pourtant, je trouve que je suis plutôt mieux accueilli quand je vais à l'étranger. Quelles répercussions ont nos services douaniers et leur manière d'accueillir les passagers sur l'industrie du tourisme?
M. Goldstein : C'est une bonne question, sénateur. En fait, en préparation des Jeux olympiques de Vancouver, on a donné aux douaniers canadiens une formation spéciale pour qu'ils soient plus accueillants à l'égard des visiteurs. Je pense que cela a fonctionné de façon isolée jusqu'à la tenue des Jeux olympiques.
Pour répondre à votre question, je dirai qu'en effet c'est la première personne que vous rencontrez, que ce soit l'agent d'accueil ou la personne au guichet, qui détermine votre première impression.
Pour en revenir à ce qu'on disait tout à l'heure, c'est une question de répartition des tâches. Les douaniers se considèrent comme des policiers. Ils estiment que leur rôle consiste à protéger les frontières du Canada. J'estime toutefois qu'avec un peu de formation, ils pourraient offrir à nos visiteurs un bien meilleur accueil.
Le sénateur Plett : Mon père est décédé il y a trois semaines et demie. Il aurait eu 86 ans après-demain. Je me souviens qu'il y a à peine quelques années, mes parents, qui n'étaient pas tout jeunes, revenaient d'un long voyage. Certes, ils rentraient chez eux, ce n'est donc pas tout à fait la même chose, mais je suis sûr qu'ils auraient traité des touristes exactement de la même façon. Une tempête de neige épouvantable s'était abattue sur la ville de Winnipeg, comme cela arrive souvent. Il faisait à peu près -40 degrés dehors. J'attendais que mes parents descendent de l'avion pour les ramener chez eux. Nous avions encore une heure de voiture à faire avant de rentrer chez nous. L'avion a débarqué tous ses passagers, c'était un gros appareil, un 767 ou quelque chose comme ça. Mes parents ont été les deux dernières personnes à sortir, car tous leurs bagages avaient été fouillés de fond en comble par les douaniers.
À l'époque, mes parents avaient 80 et 82 ans, ils marchaient avec une canne, et cetera. Je suppose que c'est à cet âge- là qu'on fait de la contrebande. Quoi qu'il en soit, les douaniers ne pourraient-ils pas faire preuve d'un peu plus de jugement? Ils ont fouillé absolument tous leurs bagages, et à la fin ils leur ont dit : « Vous pouvez maintenant refaire vos valises. » Moi, j'attendais à l'extérieur pendant que mes parents étaient complètement désemparés. Combien de visiteurs sont traités de cette façon par nos douaniers?
M. Goldstein : D'abord, j'aimerais vous présenter toutes mes condoléances pour le décès de votre père.
Le sénateur Plett : Je vous remercie, mais ce n'est pas pour cela que j'ai donné cet exemple.
M. Goldstein : Il y a certainement une façon plus efficace de faire le tri des passagers, et les douaniers font ce qu'ils peuvent.
Le sénateur Plett : Avez-vous des contacts avec eux? Une telle situation a certainement un impact sur vous et sur le tourisme.
M. Goldstein : Nous avons déjà fait des démarches auprès des responsables, mais malheureusement, ils estiment que leur rôle consiste à protéger les frontières du Canada et ils se considèrent comme des policiers. Il faudrait changer les mentalités. Il est vrai que leur responsabilité est de surveiller les frontières, mais ils sont aussi censés accueillir les Canadiens qui rentrent chez eux et les touristes qui viennent chez nous.
Je vais vous donner un exemple. Vous parliez tout à l'heure des files d'attente. Nous venons de signer, comme je le disais, un accord SDA avec la Chine. Les premiers groupes de touristes chinois sont arrivés et, bien sûr, il n'y a pas, à la douane canadienne, de file réservée aux groupes organisés. En conséquence, tous ces gens-là étaient dispersés dans la file d'attente et aucun d'entre eux ne parlait anglais. L'interprète était obligé de passer d'un poste de douane à un autre pour aider les passagers à remplir les formalités. Bien entendu, cela a ralenti considérablement toute la file d'attente, au détriment à la fois des Canadiens qui attendaient et des visiteurs qui arrivaient au Canada. La désignation d'une file réservée aux groupes organisés aurait résolu une bonne partie du problème.
Il y a beaucoup de choses qu'on pourrait faire, et nous essayons d'en discuter avec les responsables.
Le sénateur Plett : Est-ce Sécurité publique Canada qui en a la responsabilité?
M. Goldstein : Oui.
Le sénateur Plett : Merci de me le dire, car j'essaierai d'en parler à mon ami dans un jour ou deux.
C'était ma première question. Je crois que j'ai droit à deux.
Le président : Certains de vos collègues m'ont demandé de faire régner un peu plus de discipline, alors ne le prenez pas personnellement. Je vais vous inscrire pour un second tour.
Le sénateur Mercer : Je ne pensais pas aborder le sujet, mais puisque le sénateur Plett en a parlé, je vais essayer de rassembler tout ce que j'ai à dire en une seule question.
Le sénateur Plett a soulevé une question intéressante car c'est certainement un problème dont on parle beaucoup à l'aéroport international Stanfield, à Halifax. Il y a eu des plaintes de la part des voyageurs sur la façon dont ils ont été accueillis par des représentants de l'Agence des services frontaliers du Canada.
À mes heures perdues, je fais beaucoup de bénévolat pour des organisations à but non lucratif et des oeuvres de bienfaisance. L'Agence du revenu du Canada fait des efforts remarquables pour consulter les responsables de ces organismes afin de savoir ce qui pourrait simplifier leur tâche ainsi que celle des donneurs et du gouvernement pour l'administration de tout le système.
On devrait peut-être encourager l'Agence des services frontaliers du Canada à en faire autant. Ils ont tendance à se comporter comme des cow-boys. Il y a eu des plaintes à Halifax. Il y a tout le stress qu'on fait subir à des gens comme les parents du sénateur Plett, quand ils arrivent à l'aéroport de Winnipeg.
Pensez-vous que nous devrions établir un lien entre l'industrie et les instances gouvernementales qui administrent l'Agence des services frontaliers du Canada, afin qu'ils comprennent bien que, même si nous voulons qu'ils soient fermes et efficaces, nous voulons aussi qu'ils soient accueillants? Les Canadiens savent être accueillants, ils devraient être capables d'être à la fois fermes et accueillants.
M. Goldstein : Oui, il faudrait qu'il y ait des consultations, sénateur. Toutefois, ce qui est important, c'est que tous les différents secteurs du gouvernement fédéral comprennent bien qu'ils poursuivent un objectif commun, qu'il s'agisse de la promotion touristique, de la vente de billets d'avion ou de l'accueil des passagers qui débarquent au Canada. Il faudrait que les ministères fédéraux coordonnent leurs efforts, afin que les services qui s'occupent des visas, ceux qui s'occupent de la promotion touristique et ceux qui s'occupent de l'accueil des passagers comprennent qu'ils font partie de la même entreprise économique considérable qu'est l'industrie touristique. C'est ça qui manque.
La consultation est importante, mais la consultation entre les différents ministères fédéraux l'est encore plus.
Le sénateur Mercer : Je n'ai pas l'habitude d'être limité à deux questions, je vais donc essayer d'en glisser une troisième dans la deuxième. Au moins, je le dis franchement.
Il y a beaucoup de gens qui font la promotion du tourisme au Canada. La province de la Nouvelle-Écosse, d'où je viens, s'y emploie activement. Nos voisins du Nouveau-Brunswick sont aussi très dynamiques, tout comme nos amis du Québec. C'est la même chose dans les autres provinces. Le gouvernement du Canada s'occupe lui aussi de la promotion du tourisme.
Toutes ces activités de promotion sont-elles coordonnées? Nous dépensons énormément d'argent pour attirer des touristes partout au Canada. Il n'y a pas une région du pays qui ne vaille pas la peine d'être visitée. Mais en même temps, et j'essaie de glisser ma troisième question dans la deuxième, je voudrais savoir si le déménagement de la Commission canadienne du tourisme d'Ottawa à Vancouver a eu un impact, positif ou négatif.
M. Goldstein : Pour répondre à la première question, je dirai que la coordination s'améliore. Dans certaines régions, c'est la marque canadienne qui attire les touristes, alors que dans d'autres, comme ici, c'est plutôt la marque individuelle de la province ou de la ville qui l'emporte. Quand on fait de la promotion touristique dans l'État de New York, par exemple, on constate que la marque canadienne est plus importante que celle de la Nouvelle-Écosse, de l'Ontario, de Toronto, de Halifax ou de Québec.
Lors de sa révision stratégique publiée récemment, la Commission canadienne du tourisme a décidé de s'occuper davantage des grands marchés éloignés, où c'est la marque canadienne qui est la plus efficace, et de laisser les provinces et les villes exploiter les marchés plus proches. Nous sommes d'accord avec ça, car nous pensons que c'est une meilleure répartition des rôles et des responsabilités.
Pour ce qui est du déménagement de la Commission canadienne du tourisme, c'est certainement une bonne chose d'installer le siège de certaines sociétés d'État à l'extérieur d'Ottawa. Dans le cas de la commission, cela l'a amenée à focaliser davantage sur certains marchés de l'Asie-Pacifique. Elle est efficace dans tout le pays, et comme notre organisation, elle est représentée à toutes les réunions et tribunes organisées au Canada.
Pour ce qui est du principe de la décentralisation des sociétés d'État, je pense que c'est une bonne idée. Par contre, j'ignore si cela a rendu la commission plus efficace en tant qu'organisme de marketing.
Le sénateur MacDonald : Dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé de plusieurs choses, notamment du déficit touristique du Canada et des répercussions des droits et redevances aéroportuaires. Je vais donc vous poser deux questions à ce sujet.
Nous avons tous vu, entendu ou lu de superbes publicités sur le Canada, à la télévision, à la radio et dans les journaux. Personnellement, j'en ai vu beaucoup, surtout au Canada. Si vous aviez un budget fixe pour faire la promotion du Canada à l'étranger, à quoi le consacrerez-vous et où le ferez-vous?
M. Goldstein : Encore une fois, ce n'est pas nous qui nous occupons du marketing. Je suppose que la plupart des publicités que vous avez vues au Canada faisaient partie de la campagne « Secret d'ici » qui a été lancée par la CCT. Elle a été financée par le plan de relance du gouvernement du Canada, dans le but d'encourager les Canadiens à voyager au Canada et à y passer leurs vacances, et aussi de résorber le déficit touristique.
Il y a deux façons de lutter contre le déficit touristique : encourager les Canadiens à rester au Canada, ou encourager les étrangers à venir au Canada. Étant donné que le nombre de visiteurs étrangers a beaucoup diminué pendant la récession, c'était une bonne stratégie. Mais ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Cela représentait, je crois, un investissement de 10 millions de dollars, par rapport au budget de 70 millions de dollars de la CCT.
Le sénateur MacDonald : Ce n'est pas beaucoup.
M. Goldstein : En effet, mais franchement, la campagne a été bien menée et elle a été efficace, compte tenu des ressources disponibles.
Le financement des activités de promotion organisées à l'étranger vient s'ajouter à cela. Il y en a beaucoup qu'on ne voit pas. Prenons l'exemple des Jeux olympiques. Nous avons vu beaucoup de publicités pour l'Ontario et la Colombie- Britannique, mais ici au Canada, on n'a pas vu toutes les publicités qui ont été présentées dans le reste du monde.
Vous voulez savoir si je suis satisfait de la façon dont le budget est réparti? Oui. En fait, j'aimerais bien qu'on mette davantage l'accent sur certains marchés éloignés où la marque canadienne a besoin de se faire connaître davantage. Les ressources sont-elles suffisantes? Non, je ne le pense pas.
Quelle était votre deuxième question?
Le sénateur MacDonald : Ma deuxième question portait sur les droits et redevances aéroportuaires. Depuis le milieu des années 1990, on a privatisé beaucoup d'aéroports au Canada. On peut dire que la qualité des grands aéroports du pays s'est nettement améliorée au cours de la dernière décennie. Un grand nombre d'entre eux sont bien plus beaux maintenant qu'ils l'étaient il y a une quinzaine d'années.
À votre avis, la privatisation des aéroports canadiens a-t-elle eu des répercussions positives, négatives ou neutres sur l'industrie?
M. Goldstein : Les répercussions sont clairement positives. Le problème, c'est que la structure de coûts qui en a résulté n'est plus en phase avec la réalité financière actuelle. En termes simples, la cession des aéroports à des administrations locales aurait dû être accompagnée d'une réduction des loyers pendant un certain temps. Une fois que l'investissement était fait, c'était presque un système de location-vente, si on veut.
Malheureusement, les loyers ont continué d'augmenter. Les administrations ont poursuivi leurs importants travaux d'amélioration, surtout dans les grands aéroports.
Même les aéroports de taille moyenne comme celui de Winnipeg ont consenti d'importants investissements, mais contrairement aux aéroports concurrents des États-Unis, les nôtres ne peuvent pas faire appel à des obligations municipales. Ils ne peuvent pas se procurer des capitaux comme leurs concurrents américains, et c'est sans doute la raison pour laquelle, en moyenne, deux millions de Canadiens traversent la frontière pour aller prendre l'avion. Ils traversent la frontière en voiture pour rejoindre un aéroport américain. C'est cet avantage concurrentiel qui manque.
Le sénateur MacDonald : On en revient toujours à une question de droits et de redevances?
M. Goldstein : Il faut reconnaître toutefois que c'est un aspect de la politique des transports qui a été conçu à une autre époque. C'était avant les attentats du 11 septembre, quand notre dollar valait 60 cents américains.
Au risque de vous ennuyer avec des notions économiques, je vous dirai que l'élasticité des prix des billets d'avion était différente car, à l'époque, avec notre devise plus faible, nos prix comportaient une ristourne automatique. Cela n'existe plus aujourd'hui, et c'est ça qui nous fait perdre notre compétitivité.
Le sénateur Frum : Pourriez-vous nous dire si la situation a évolué depuis 2006, c'est-à-dire depuis l'entrée en vigueur de la politique Ciel bleu, et si celle-ci a des conséquences sur le tourisme? Vous venez d'en parler avec le sénateur MacDonald, mais j'aimerais savoir quels secteurs il faudrait à votre avis développer davantage.
M. Goldstein : Il y a tout un débat en ce moment sur Ciel bleu, Ciel ouvert... Ce sont de mauvais slogans pour une mauvaise campagne. Notre organisation, elle, préfère s'employer à accroître la concurrence rationnelle. Je sais qu'il y a des compagnies aériennes qui pourraient être présentes au Canada et qui ne le sont pas à cause des coûts. C'est le cas par exemple de Virgin America. Elle a créé une liaison entre Los Angeles et Toronto, et la réaction immédiate d'Air Canada a été d'augmenter ses vols vers la Californie et de baisser ses tarifs. La concurrence, ça marche, et à mon avis, Virgin America serait un concurrent rationnel. Quand nous lui avons demandé si elle serait prête à augmenter le nombre de ses vols au Canada, car cela nous intéresserait, la réponse a été que c'était un problème de structure de coûts.
À l'heure actuelle, nous souffrons d'un manque de concurrence à cause de la structure irrationnelle qui a été créée. C'est ce que j'appelle un mille-feuille de redevances à payer pour faire atterrir un avion au Canada, si bien que ça devient prohibitif.
Le président : Ce que je vais dire est davantage un commentaire. Le sénateur Fox a parlé du Cirque du Soleil. Les gens sont prêts à dépenser de l'argent pour aller à Las Vegas voir des spectacles permanents du Cirque du Soleil. C'est un cirque qui est né à Québec, qui s'est développé à Montréal, et on constate aujourd'hui que, pour voir ce produit de fabrication canadienne, des gens de Toronto, de Vancouver, de Halifax et de partout ailleurs au Canada sont prêts à aller jusqu'à Las Vegas. Montréal a refusé de donner une base permanente au Cirque du Soleil. Bien souvent, ce qu'on refuse de faire chez soi finit par nous coûter cher.
Certains sujets sont plus délicats que d'autres, et nous essayons d'être le moins partisans possible dans ce comité, mais quand on pense à une décision comme Expo 2017, il faut reconnaître que le refus d'organiser une manifestation qui attire autant de visiteurs de l'étranger représente un manque à gagner sur le plan touristique. Expo 67 ou les Jeux olympiques de Vancouver ont été de magnifiques instruments de promotion du Canada à l'étranger.
Je sais que vous n'êtes pas un groupe militant et que vous n'allez pas partir en guerre contre une décision du gouvernement, mais cela n'est-il pas logique? C'est la même chose aussi au niveau municipal, lorsque Montréal a refusé d'avoir le Cirque du Soleil sur son territoire, et, aujourd'hui, lorsque le gouvernement décide que ça va coûter trop cher d'organiser Expo 2017. Dans quelle mesure ce genre de décision a-t-il un impact négatif sur le tourisme?
M. Goldstein : Je tiens à dire publiquement que nous appuyions le projet Expo 2017, mais que nous comprenons que, pour le gouvernement fédéral, cela représente un engagement financier qui n'est pas compatible avec ses autres priorités.
Ce qui intéresse davantage notre organisation, c'est de savoir quel genre de destination le Canada sera en 2017, pas seulement Edmonton mais différentes régions du pays. Quelle est l'image du Canada? Nous venons de faire une retraite stratégique, et notre conseil d'administration en a conclu que l'essentiel n'était pas d'avoir des manifestations qui attirent des touristes ici ou là, mais plutôt de résoudre les problèmes d'ordre structurel auxquels nous faisons face, afin que notre pays soit plus accessible au monde extérieur en 2017, quelles que soient les manifestations qui y sont organisées. L'objectif ne devrait pas être d'avoir une seule attraction dans une région du pays. Nous devrons faire preuve d'innovation et de créativité dans notre façon d'accueillir le monde extérieur, tout comme la ville de Québec l'a fait récemment pour son 400e anniversaire.
Le président : Je suis tout à fait d'accord pour dire que, lorsqu'on débarque au Canada et qu'on attend pour passer la douane, on a l'impression d'être dans un hangar. Il n'y a pas de décorations, il n'y a pas d'affiches invitantes comme dans beaucoup d'autres pays, les murs sont vides. Je suppose que c'est parce qu'on privilégie la sécurité par rapport à la publicité.
M. Goldstein : Je pense que c'est une question de concertation, car il faudrait que tout le monde reconnaisse vraiment que le tourisme est un moteur important de l'économie canadienne. C'est sans doute le secteur qui peut diversifier et stimuler l'économie des 308 circonscriptions du pays car il ne se limite pas à une région. C'est à la fois un petit et un grand marché, et il faut que les agences et ministères du gouvernement fédéral adoptent dans cette optique des politiques concertées.
Le sénateur Housakos : En guise de première question, j'aimerais faire un commentaire sur ce que le président a dit tout à l'heure. Il y a certainement beaucoup de villes au monde qui sont devenues de véritables plaques tournantes du tourisme et du spectacle, et le Cirque du Soleil est le parfait exemple d'une idée canadienne, québécoise en fait, qui a été mise à profit par des gens de Las Vegas, comme cela s'est également produit avec Céline Dion, qui y donné des spectacles pendant des années.
Au Canada, outre l'industrie du transport aérien et les aéroports, le secteur privé comprend l'industrie hôtelière, les Whistler et les Mont-Tremblant de ce monde. À votre avis, le secteur privé fait-il assez la promotion de ses produits ou attend-il que ce soit le gouvernement et les contribuables qui en assument complètement la responsabilité?
M. Goldstein : Non, sénateur. En fait, la Commission canadienne du tourisme et la plupart des autres agences de promotion signent des partenariats public-privé afin de disposer des leviers financiers nécessaires au financement de leurs campagnes de promotion. C'est ainsi qu'on peut voir, dans le New York Times, par exemple, une publicité conjointe de la Commission canadienne du tourisme, des hôtels Fairmont et d'Air Canada. Voilà le type de leviers financiers qu'ils utilisent.
Par ailleurs, c'est un peu un cercle vicieux en ce sens que nous avons un problème d'accès aux capitaux. Je sais que ce n'est pas tout à fait le mandat de votre comité, mais il n'en demeure pas moins qu'un grand nombre de nos petites et moyennes entreprises ont eu beaucoup de difficultés pendant la récession et que, maintenant, elles ont du mal à réunir des capitaux. Il y a bien sûr des institutions comme la Banque de développement du Canada et Exportation et développement Canada, qui sont censées aider les petites entreprises à s'implanter sur les marchés internationaux, mais c'est un problème qui mérite plus d'attention.
En revanche, et c'est une bonne nouvelle, notre secteur a enregistré relativement moins de faillites que les autres pendant la récession, ce qui témoigne de sa résilience. Malheureusement, je n'ai pas les chiffres avec moi.
Le sénateur Housakos : J'aimerais maintenant vous poser une question reliée à celle du sénateur Frum, à propos de « Ciel ouvert ». Nous avons signé un certain nombre d'ententes avec de nombreux pays, notamment avec l'Union européenne et États-Unis. Vous en avez déjà parlé. Y a-t-il d'autres pays qui pourraient être des viviers de touristes pour le Canada et qu'on aurait peut-être négligés en ne les intégrant pas dans « Ciel ouvert », que ce soient des marchés d'Asie ou d'ailleurs?
M. Goldstein : Je crois que des discussions se poursuivent dans ce sens, avec le Brésil, l'Inde et la Chine... En tout cas, en Chine et même en Inde, il y a déjà une capacité excédentaire qui est inutilisée. Je vous propose de vous faire parvenir une réponse écrite à cette question, car je veux être sûr d'avoir des chiffres exacts, mais ce sont des marchés importants qui nous intéressent beaucoup et qui intéressent n'importe quel exportateur mondial, car ce sont des économies en plein essor.
Le président : Je vous invite à faire parvenir votre réponse à la greffière, qui la transmettra à tous les membres du comité.
Le sénateur Fox : Comme le sénateur Plett et le sénateur Dawson ont déjà posé la question que j'avais prévue pour mon second tour, je vais vous poser la question que j'avais prévue pour le troisième tour.
Vous avez commencé par dire que la compétitivité et la structure de coûts des aéroports canadiens étaient les causes principales de la baisse du tourisme. Comment les coûts de nos aéroports se comparent-ils à ceux des aéroports étrangers?
Deuxièmement, vous disiez tout à l'heure qu'il fallait lutter à armes égales, mais comment devrions-nous nous y prendre? Parliez-vous des États-Unis ou d'un autre pays?
M. Goldstein : Je vais commencer par répondre à la deuxième question. L'industrie américaine est à la fois notre épreuve de vérité et notre concurrent le plus proche. Elle courtise la même clientèle que nous, c'est-à-dire les longues distances. Elle a aussi ses difficultés. Je parle régulièrement à mes homologues à Washington.
Pour ce qui est maintenant des différences de coûts entre les aéroports, je pourrais faire parvenir un graphique détaillé à la greffière du comité. Je peux vous dire d'ores et déjà que cette différence représente un supplément de 20 p. 100 sur le prix d'un billet d'avion pour le Canada, ce qui n'est pas rien. Pour en revenir à votre question, c'est le problème qui a retenu le plus notre attention, compte tenu du mandat de votre comité. Il y en a d'autres, bien sûr, mais à notre avis, les principaux obstacles sont les formalités d'immigration et la structure des coûts.
Le sénateur Plett : Vous y avez fait allusion plusieurs fois, mais vous n'en avez jamais exposé clairement la raison. Vous avez dit qu'Air France avait décidé de faire escale à Seattle plutôt qu'à Vancouver à cause des coûts. À plusieurs reprises, vous avez parlé de « coûts ». C'était peut-être dans votre déclaration liminaire, et si c'est le cas, je vous prie de m'en excuser. Mais pourquoi cela coûte-t-il plus cher à Air France de passer par Vancouver plutôt que par Seattle? Est- ce à cause des redevances d'atterrissage? C'est pourtant Air France qui fixe sa propre structure de prix, n'est-ce pas?
M. Goldstein : La réponse est simple : les redevances d'atterrissage. À la page 18 du rapport qui a été présenté à votre comité par nos prédécesseurs, vous trouverez toutes les explications nécessaires. Un avion qui fait escale au Canada paye un loyer foncier, mais il n'y a pas de loyer foncier dans les aéroports américains. Pour un vol d'outre-mer, ce loyer est de 25,74 $, et pour un vol transfrontalier, il est de 17,06 $.
Le sénateur Plett : C'est par passager?
M. Goldstein : Je crois que c'est par billet. Pour un vol qui passe par un aéroport américain, il n'y a pas de loyer foncier. En ce qui concerne le droit pour la sécurité des passagers aériens, il est de 33,59 $ pour un vol d'outre-mer, et de 22,26 $ pour un vol transfrontalier. Aux États-Unis, ce droit est acquitté par le gouvernement américain, de sorte que le consommateur n'a pas à le payer. Tout cela est expliqué dans le rapport.
Le sénateur Plett : Je vous en remercie. À votre avis, le renforcement des procédures de sécurité dans les aéroports, non seulement au Canada mais aux États-Unis, décourage-t-il les gens de prendre l'avion?
M. Goldstein : Non. Les gens font un choix délibéré quand ils décident de prendre l'avion. Si c'était un facteur important, on aurait enregistré une baisse du tourisme après la tragédie du 11 septembre.
Le sénateur Plett : Justement, n'y a-t-il pas eu une baisse du tourisme après le 11 septembre?
M. Goldstein : Oui, mais ça n'a pas duré, sénateur. Depuis, nous avons assisté à une croissance extraordinaire au niveau international. À mon avis, le problème n'est pas là. Un examen a été entrepris sur l'ACTSA, l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, et la question que nous posons est de savoir quel est le rôle de cette administration par rapport au trafic aérien d'un aéroport. Il est intéressant de constater qu'à chaque étape de la chaîne de valeur, à partir du moment où vous arrivez à l'aéroport jusqu'au moment où vous embarquez dans l'avion, c'est l'aéroport qui a le contrôle, sauf à l'étape des formalités ACTSA. Il faudrait donc qu'il y ait une meilleure coordination afin que l'ACTSA ait une meilleure idée du trafic. Je crois que les aéroports ont essayé d'informer l'ACTSA des programmes de vols, du nombre de vols et du nombre de passagers à prévoir dans la file d'attente, pour qu'il y ait suffisamment de douaniers au poste. Ce serait très utile.
Pour ce qui est maintenant des palpations à l'aéroport, les gens savent bien que c'est pour leur propre sécurité. Par exemple, quand je suis à l'aéroport international Ben Gourion, peu m'importent les formalités de sécurité, je veux arriver sain et sauf. Je ne pense donc pas que ce soit un gros obstacle. Ça fait partie de la réalité des voyages en avion. Il faut l'accepter.
En revanche, en Europe et ailleurs, c'est peut-être pour cela que le transport ferroviaire est un meilleur choix.
Le sénateur Merchant : J'ai l'impression que les voyageurs ne croient pas que tous les dispositifs qui sont mis en place accroissent leur sécurité. C'est ce que j'entends dire constamment. Ils estiment plutôt qu'ils sont désagréables. Je sais bien que vous ne représentez pas l'ACTSA. Et puis, les consignes ne sont pas les mêmes d'un aéroport à l'autre. J'étais à Toronto la semaine dernière, et le passager qui était devant moi avait quatre sachets en plastique remplis de petits contenants. Il aurait pu amalgamer les 10 petits contenants, s'il avait voulu faire des bêtises pendant le vol. Tout cela ne fait qu'ajouter à la confusion. Les palpations ne me dérangent pas, mais je refuse de passer aux rayons X. Les consignes sont très différentes d'un aéroport à l'autre.
M. Goldstein : Je ne suis pas un expert en matière de sécurité, mais j'ai mon opinion là-dessus, que je préfère garder pour moi.
Le sénateur Merchant : Les gens sont convaincus que ces mesures ne sont pas toutes efficaces.
Le sénateur Mercer : J'aimerais revenir sur ce que disait le président tout à l'heure au sujet de l'accueil des voyageurs qui débarquent au Canada. La question qu'il faut se poser est la suivante : est-ce qu'on est prêt à faire des affaires ou pas? L'aéroport international Pearson est sans doute l'un des plus efficaces au Canada, mais quand on arrive dans le terminal, les panneaux ne fonctionnent pas. Ça fait bizarre comme première impression.
J'aimerais donc savoir si l'Association de l'industrie touristique du Canada a défini des pratiques exemplaires ou des critères applicables aux aéroports canadiens.
M. Goldstein : Non, c'est au Conseil des aéroports du Canada de le faire. Par exemple, depuis les Jeux olympiques, l'aéroport de Vancouver a des panneaux en plusieurs langues. Si nous voulons attirer un nombre croissant de visiteurs d'Inde, de pays hispanophones ou de Chine, il faudrait avoir des panneaux multilingues.
C'est au Conseil des aéroports du Canada de définir les pratiques exemplaires.
Le sénateur Mercer : Dans nos aéroports, on a tendance à oublier que nous sommes un pays multiculturel, sans doute le plus multiculturel au monde, et que nous avons la capacité de servir les gens dans un nombre incroyable de langues, sans doute plus que dans n'importe quel autre pays au monde. On a l'impression que ça s'arrête à partir du moment où on met le pied dans l'aéroport, à l'exception de celui de Vancouver.
M. Goldstein : Justement, c'est sans doute l'un de nos plus grands atouts. Nos villes offrent une grande diversité; elles sont cosmopolites mais elles ont la réputation d'être sûres. C'est un atout qu'on a su mettre en valeur pour les Jeux olympiques. Dans les pays émergents, c'est quelque chose qui attire les membres de la classe moyenne qui, bien souvent, en sont à leur premier voyage à l'étranger.
Le sénateur Frum : Votre organisation a-t-elle une position sur le cabotage? Cela peut-il avoir une incidence positive sur le tourisme?
M. Goldstein : Nous ne sommes pas partisans du cabotage, mais nous sommes pour une plus grande concurrence à l'intérieur du Canada entre les transporteurs canadiens, et entre les transporteurs qui ont signé l'accord « Ciel bleu ».
Le sénateur Martin : Je n'arrive pas à détacher les yeux de votre graphique, à la page quatre de votre déclaration.
M. Goldstein : Mme Sadler a fait un excellent travail.
Le sénateur Martin : Oui, je dois vous en féliciter.
Je vois que le Canada a reculé. Savez-vous comment la Malaisie est arrivée là où elle est? La Turquie a été propulsée de je ne sais où à la septième place. Savez-vous pourquoi tous ces pays sont arrivés là où ils sont? Quels ont été les facteurs déterminants?
M. Goldstein : Il y a la publicité, il y a les formalités assouplies pour les visas... Il y a aussi la distance, quand il s'agit de pays d'Europe ou d'ailleurs dans le monde. Ce sont là des facteurs déterminants. Le dollar canadien est aussi un facteur, mais pas aussi important que certains voudraient le faire croire. En effet, si le dollar canadien était le seul facteur déterminant dans ce graphique, le tourisme britannique aurait également baissé puisque la valeur du dollar canadien a augmenté par rapport à bon nombre de ces devises. Et le nombre de touristes américains au Royaume-Uni aurait également baissé, ce qui ne s'est pas produit. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre.
Le sénateur Martin : Oui, ça va.
M. Goldstein : Il y a un ensemble de facteurs. Certains de ces pays se sont montrés particulièrement dynamiques. C'est le cas de la Turquie, par exemple. Les Turcs ont lancé des campagnes de promotion particulièrement dynamiques, et, pour reprendre l'expression du sénateur Mercer, ils ont su montrer que leur pays était prêt à faire des affaires et, en plus, prêt à accueillir des touristes.
Le sénateur Housakos : J'aimerais poser une question supplémentaire à la suite du sénateur Martin. Peut-on dire que la majorité de nos touristes viennent des États-Unis et que, si l'on en juge d'après les 10 dernières années, leur nombre augmente quand notre devise est plus faible? Quand la valeur de notre dollar augmente, on constate que le nombre de touristes américains au Canada diminue considérablement. La Turquie est un bon exemple de destination touristique populaire. Peut-on dire que c'est surtout parce que c'est une destination bon marché pour y passer des vacances?
M. Goldstein : Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, sénateur, c'était plus facile de vendre le Canada comme destination touristique lorsque notre dollar valait 40 p. 100 de moins. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas être compétitifs avec un dollar à parité. Voilà ma réponse à la première partie de votre question.
Deuxièmement, nous avons constaté que c'est surtout les Canadiens, plus que les Américains, qui sont sensibles à la valeur du dollar. Si bien que ce sont les Canadiens qui, lorsque leur devise est forte, vont vouloir aller aux États-Unis, ce qui va accroître le déficit touristique. Les Américains sont moins sensibles à la valeur de la devise canadienne. Par contre, les formalités à la frontière sont un obstacle plus important pour eux, notamment l'instauration du nouveau passeport.
D'un autre côté, ce sont les touristes qui viennent de plus loin qui nous intéressent le plus. En effet, les Américains qui traversent la frontière, même si c'est important pour les collectivités frontalières, ne dépensent pas beaucoup d'argent au Canada et ne contribuent donc pas beaucoup à l'économie canadienne. Autrement dit, les touristes qui viennent de Buffalo sont moins intéressants pour notre économie que ceux qui viennent de New York, de la Nouvelle- Orléans et de San Francisco, pour donner des exemples américains. Bref, ce sont les touristes qui viennent de loin qui nous intéressent vraiment.
Comme je le disais tout à l'heure, nous sommes de moins en moins un pays où l'on se rend en voiture, et c'est pour cela que les problèmes structurels sont importants pour nous.
Le président : Monsieur Desjardins, monsieur Goldstein et madame Sadler, je vous remercie d'être venus.
[Français]
Avant de terminer, j'aimerais rappeler aux membres du comité que mardi prochain, nous recevrons l'Association des aéroports du Canada atlantique.
Merci à tous.
(La séance est levée.)