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Débats du Sénat (Hansard)

2e Session, 43e Législature
Volume 152, Numéro 23

Le jeudi 17 décembre 2020
L’honorable Leo Housakos, Président suppléant


LE SÉNAT

Le jeudi 17 décembre 2020

La séance est ouverte à 14 heures, l’honorable Leo Housakos, Président suppléant, étant au fauteuil.

Prière.

L’honorable Leo Housakos (Son Honneur le Président suppléant) : Honorables sénateurs, les sénateurs se sont entendus pour sauter par-dessus la période des déclarations et passer directement aux affaires du gouvernement, alors pardonnez-moi d’avoir lu le nom des sénateurs qui étaient inscrits sur la liste. Si vous êtes toujours d’accord, je confirme qu’il n’y aura pas de déclarations aujourd’hui.

Je vous remercie.

[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

Le Sénat

Préavis de motion concernant la tenue de séances hybrides ou entièrement virtuelles

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je donne préavis que, plus tard aujourd’hui, je proposerai :

Que les dispositions de l’ordre du 27 octobre 2020, concernant les séances hybrides du Sénat et d’autres questions, et de l’ordre du 17 novembre 2020, concernant les réunions de comité hybrides ou tenues entièrement par vidéoconférence et d’autres questions, soient en vigueur du 1er février 2021 jusqu’à la fin de la journée le 23 juin 2021, sous réserve que les conditions suivantes s’appliquent également en ce qui concerne l’ordre du 27 octobre 2020 :

1.l’Administration du Sénat s’efforce, dans les meilleurs délais, de développer un système permettant aux sénateurs dans la salle du Sénat de voir, sur un écran, les sénateurs qui participent par vidéoconférence;

2.lorsque la séance est suspendue pour quelque raison que ce soit, les microphones des sénateurs qui participent par vidéoconférence seront mis en mode sourdine;

3.lorsqu’un vote par appel nominal est en cours, les sénateurs qui participent par vidéoconférence ont leur caméra allumée pour la durée du vote et doivent être visibles à la caméra lorsqu’ils votent;

4.les réponses écrites aux questions orales déposées électroniquement auprès du greffier du Sénat sont transmises à tous les sénateurs.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

[Français]

Affaires juridiques et constitutionnelles

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger pendant l’ajournement du Sénat et en même temps que celui-ci

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5j) du Règlement, je donne préavis que, plus tard aujourd’hui, je proposerai :

Que, en ce qui concerne son étude du projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, si le projet de loi lui est renvoyé :

1.soit autorisé, conformément à l’article 12-18(2)b)(i) du Règlement, à se réunir le lundi 1er février 2021, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d’une semaine;

2.soit autorisé, les mardi 2 février 2021 et mercredi 3 février 2021, à se réunir même si le Sénat siège à ce moment-là, les dispositions de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendues à cet égard.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

L’ajournement

Préavis de motion

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5g) du Règlement, je donne préavis que, plus tard aujourd’hui, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 2 février 2021, à 14 heures.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

[Traduction]

Affaires juridiques et constitutionnelles

Autorisation au comité de siéger pendant l’ajournement du Sénat et de tenir des réunions hybrides ou entièrement virtuelles

L’honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :

Que, pour son étude préalable sur la teneur du projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé :

a)à se réunir jusqu’au 1er février 2021, même si le Sénat est ajourné pour une période de plus qu’une semaine, conformément à l’article 12-18(2)b)i) du Règlement;

b)à tenir des réunions hybrides ou entièrement par vidéoconférence, nonobstant toute disposition du Règlement, tout ordre antérieur ou toute pratique habituelle, et à la lumière des circonstances exceptionnelles de la pandémie actuelle de COVID-19;

Que les dispositions des alinéas 7 à 10 de l’ordre adopté par le Sénat le 17 novembre 2020 concernant les réunions hybrides et les réunions tenues entièrement par vidéoconférence s’appliquent à toute réunion du comité hybride ou tenue entièrement par vidéoconférence.

Son Honneur le Président suppléant : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)


(1410)

ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : la deuxième lecture du projet de loi C-7, la troisième lecture du projet de loi S-2, les motions nos 25, 26 et 27, suivies de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

Son Honneur le Président suppléant : Y a-t-il quelqu’un qui s’oppose à la réorganisation proposée, honorables sénateurs? Elle est donc adoptée.

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Petitclerc, appuyée par l’honorable sénatrice Gagné, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir).

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Gagné, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je m’excuse de la confusion. J’aurais peut-être dû prendre la parole il y a une minute.

Je tiens seulement à préciser que nous avons conclu une entente plus tôt. Tous les sénateurs se rappelleront que la sénatrice Martin n’a pas pu terminer son discours hier soir et nous avons convenu de procéder ainsi. Nous nous sommes aussi entendus pour que son discours ainsi que les discours à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-2 soient consignés au compte rendu des délibérations.

C’est ce que je tenais à souligner, à savoir que le discours de la sénatrice Martin sera aussi consigné au compte rendu des délibérations. Merci.

La Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’honorable Mary Coyle propose que le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques, soit lu pour la troisième fois.

— Je propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté, avec dissidence.)

Des voix : Bravo!

Le Sénat

Adoption de la motion concernant la tenue de séances hybrides ou entièrement virtuelles

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné plus tôt aujourd’hui, propose :

Que les dispositions de l’ordre du 27 octobre 2020, concernant les séances hybrides du Sénat et d’autres questions, et de l’ordre du 17 novembre 2020, concernant les réunions de comité hybrides ou tenues entièrement par vidéoconférence et d’autres questions, soient en vigueur du 1er février 2021 jusqu’à la fin de la journée le 23 juin 2021, sous réserve que les conditions suivantes s’appliquent également en ce qui concerne l’ordre du 27 octobre 2020 :

1.l’Administration du Sénat s’efforce, dans les meilleurs délais, de développer un système permettant aux sénateurs dans la salle du Sénat de voir, sur un écran, les sénateurs qui participent par vidéoconférence;

2.lorsque la séance est suspendue pour quelque raison que ce soit, les microphones des sénateurs qui participent par vidéoconférence seront mis en mode sourdine;

3.lorsqu’un vote par appel nominal est en cours, les sénateurs qui participent par vidéoconférence ont leur caméra allumée pour la durée du vote et doivent être visibles à la caméra lorsqu’ils votent;

4.les réponses écrites aux questions orales déposées électroniquement auprès du greffier du Sénat sont transmises à tous les sénateurs.

— Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Affaires juridiques et constitutionnelles

Autorisation au comité de siéger pendant l’ajournement du Sénat et en même temps que celui-ci

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné plus tôt aujourd’hui, propose :

Que, en ce qui concerne son étude du projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, si le projet de loi lui est renvoyé :

1.soit autorisé, conformément à l’article 12-18(2)b)(i) du Règlement, à se réunir le lundi 1er février 2021, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d’une semaine;

2.soit autorisé, les mardi 2 février 2021 et mercredi 3 février 2021, à se réunir même si le Sénat siège à ce moment-là, les dispositions de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendues à cet égard.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

L’ajournement

Adoption de la motion

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné plus tôt aujourd’hui, propose :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 2 février 2021, à 14 heures.

 — Honorables sénateurs, je propose l’adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur le Président suppléant : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

Les travaux du Sénat

Expression de vœux pour un joyeux temps des Fêtes

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, nous avons convenu d’ajourner à la fin des affaires inscrites à l’ordre du jour. Toutefois, en cette fin de session parlementaire précédant Noël, les chefs des divers groupes représentés au Sénat m’ont demandé de leur accorder quelques minutes.

L’honorable Scott Tannas : Honorables sénateurs, au nom du Groupe des sénateurs canadiens, je vous souhaite joyeux Noël et joyeuses Fêtes. L’année 2020 a été incroyable et inoubliable. Les défis qui se sont présentés cette année ont mis en lumière certaines failles qu’il faut corriger pour le bien de notre vie nationale. Toutefois, je crois que cela a surtout confirmé la force de caractère des Canadiens.

Contre vents et marées, le Sénat du Canada a fait son travail. Nous avons de quoi être fiers. Au nom de notre groupe, je tiens à exprimer notre admiration à tous les membres du personnel et à les remercier d’avoir travaillé dans l’intérêt des Canadiens ici, dans cette enceinte. Nous sommes une famille; nous travaillons main dans la main. Cette année l’a fait ressortir avec encore plus de force.

Mes meilleurs vœux à chacun d’entre vous. Je vous souhaite de joyeuses Fêtes ainsi que de la santé et du bonheur en 2021. Merci.

Des voix : Bravo!

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, au nom du Groupe progressiste du Sénat, je suis heureuse de joindre ma voix à celle de mes collègues leaders pour souligner la fin de nos travaux avant la pause de la période des Fêtes. Une autre année s’achève, une année qui nous a apporté ce qui semblait être un événement déchirant après l’autre. L’expression « sans précédent » a été employée si souvent qu’elle semble avoir perdu tout son sens. En même temps, dans toute cette noirceur, nous avons vu une lueur d’espoir. Nous avons maintenant un vaccin. Partout au pays, les Canadiens s’entraident et soutiennent les propriétaires d’entreprise de leur région. Les travailleurs de première ligne du domaine de la santé continuent de travailler diligemment pour ceux que nous confions à leurs soins.

(1420)

Le Sénat aussi a subi une transformation, quoique nous espérons qu’elle n’est que temporaire. Nous nous sommes adaptés à la situation de manière à pouvoir nous acquitter de notre devoir constitutionnel sans compromettre la santé et la sécurité des sénateurs et du personnel.

Monsieur le Président Furey, vous avez contribué à guider le Sénat dans cette transition sans jamais oublier le rôle et les responsabilités du Sénat ni le bien-être de ceux qui nous appuient. Sénateur Furey, au nom du Groupe progressiste du Sénat, j’aimerais vous remercier, ainsi que votre personnel, des efforts que vous déployez dans la gestion de ces nouvelles séances en format hybride.

Je dois aussi remercier tous ceux qui ont rendu possibles les séances hybrides : les greffiers, les pages, le personnel de l’Administration du Sénat, le personnel des Services des immeubles et le personnel du Service de protection parlementaire, le personnel de nos bureaux respectifs et celui des Services d’information, sans qui aucun d’entre nous n’aurait pu participer aux séances à distance. Je suis consciente des efforts et des longues heures qu’il a fallu consacrer au fonctionnement du Sénat et je vous remercie tous de votre dévouement et de votre excellent travail. Vous formez une équipe extraordinaire et nous sommes chanceux de travailler avec vous tous.

Merci également à mes collègues leaders de leur camaraderie sans faille. Bien que nous ne soyons pas toujours sur la même longueur d’onde — ce qui est une bonne chose —, nous arrivons à unir nos efforts quand il le faut et nous nous acquittons de notre tâche comme les Canadiens s’y attendent. Je ressens la même chose pour tous mes collègues du Sénat et leurs contributions au succès de l’endroit. J’estime que l’excellent travail que nous avons accompli au cours des neuf derniers mois améliore la vie des Canadiens.

Enfin, merci à mes collègues du Groupe progressiste du Sénat. Notre petit groupe a connu une année formidable. J’apprécie votre soutien, votre ouverture, votre cordialité et votre camaraderie. Il me tarde d’entreprendre tout ce que nous allons accomplir ensemble en 2021. Notre groupe est petit, mais d’une efficacité redoutable.

Honorables sénateurs, les derniers mois ont été éprouvants pour plusieurs. J’espère que chacun d’entre nous profitera d’un repos bien mérité et qu’il reviendra en pleine forme pour continuer à travailler au service des Canadiens l’année prochaine.

Au nom du Groupe progressiste du Sénat, je souhaite à tous les sénateurs et à tout le personnel de très joyeuses Fêtes et une très bonne année. Je vous remercie.

Des voix : Bravo!

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, alors que nos séances de 2020 tirent à leur fin, j’ai eu du mal à imaginer un message qui soulignerait la fin de cette année qui me semble n’avoir jamais vraiment commencé. Je me suis rendu compte, ce matin, qu’en cette fin d’année, j’offrirais mes meilleurs vœux à d’honorables collègues auxquels je n’ai pas eu l’occasion d’en offrir au début de 2020.

Alors que cette année des plus inhabituelles s’achève, voici donc, de la part du Groupe des sénateurs indépendants, un au revoir peu orthodoxe que je dédie à tous les vaillants employés du Sénat, des greffiers aux préposés au nettoyage, des pages aux membres du Service de protection parlementaire en passant, bien sûr, par le personnel de nos bureaux respectifs.

Voici, chers collègues, avec toutes mes excuses à Clement Clarke Moore, « La semaine avant Noël ».

C’est la semaine avant Noël et à la Chambre des communes, pas un seul bruit

Pas de députés, pas même une souris.

Les projets de loi ont été soigneusement transmis au Sénat,

Dans l’espoir que le Président George Furey serait là;

Les sénateurs, coiffés de leurs écouteurs, bien au chaud,

Imaginent des amendements gravés sur la pierre d’un chapiteau;

L’huissier du bâton noir et son tricorne, les greffiers et leur foulard,

Ont préparé une longue discussion sur Zoom ce soir.

Et soudain on entend venant du canal un tel bruit,

Que je m’élance hors de la pièce pour l’explorer, pardi.

Je cours à la fenêtre comme si j’y volais,

J’ouvre la fenêtre et les volets.

La neige nouvelle, au clair de lune, brillait de mille feux,

Donnant à tout objet l’éclat du midi,

Quand apparut soudainement, devant mes yeux ébahis,

Ce projet de loi C-7 des plus épineux.

[Français]

Avec une marraine aussi vive que l’éclair,

J’ai su à l’instant même que c’était Petitclerc.

[Traduction]

Plus vite que la pause du dîner, ses courriels arrivaient.

Elle sifflait, elle criait et nous interpellait :

« Mettez la sourdine! Enlevez la sourdine! La vidéo est coupée!

Sur Zoom! Sur Teams! Plus fort, quand vous parlez!

Allons, allons, tout en haut du Feuilleton!

Ne faites pas d’obstruction, honorable opposition. »

Comme les feuilles mortes, par jour de grands vents,

Vers le ciel s’en vont tourbillonnant,

Les discours dans la Chambre volaient bien haut,

Et sur l’écran, on voyait tous nos visages, mais aussi notre déco.

Sur le toit, j’entendis résonner aussitôt

Le piaffement enjoué de chaque petit sabot.

Quand je rentrai la tête pour me retourner,

Je vis descendre... un nouveau délai de la cour par la cheminée.

Sans dire mot, nous mîmes fin à nos travaux.

Nous ramassâmes nos affaires et les rangeâmes illico.

Portables et iPad nous éteignîmes volontiers.

Au signal du Président, la séance fut levée.

Nous ruant vers les portes et interpellant nos équipes en sifflant,

Comme le duvet du chardon, nous partîmes aux quatre vents.

Nous l’entendîmes alors s’exclamer en s’éloignant :

JE SOUHAITE À TOUS UNE BONNE NUIT ET JE PROPOSE L’AJOURNEMENT!

Des voix : Bravo.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, cela aurait dû être la dernière tirade, vraiment, et nous nous serions tous envolés.

Merci, sénateur Woo, pour ces commentaires.

Votre Honneur, nous avons dû renoncer à la période des questions, mais je ne peux pas renoncer à ma question. Je sais que je pose cette question, vraiment, au nom de tous les groupes. Je pense donc, Votre Honneur — je compte sur l’indulgence de tous —, que nous allons simplement considérer cela comme la période des questions, et avant de présenter mes vœux, je vais poser au sénateur Gold une dernière question pour cette année.

Monsieur le leader, j’ai — nous avons — une question très spéciale à vous poser aujourd’hui. Comme c’est notre dernière séance de l’année et que Noël approche, j’aimerais que vous transmettiez ma liste de souhaits de Noël au premier ministre.

Pour reprendre les paroles d’Amy Grant et de sa chanson, voici ma liste de souhaits de Noël d’adulte. Ce ne sont des souhaits ni pour vous ni pour moi, mais pour un monde qui en a besoin et surtout pour le Canada.

Monsieur le leader, je voudrais qu’il y ait des vaccins pour tout le monde. Nous aimerions que nos aînés, nos travailleurs de la santé et tout le personnel de première ligne qui lutte contre la COVID soient en sécurité. J’espère que nous ne manquerons plus jamais d’équipements de protection individuelle.

Je souhaite à tous paix, joie et amour. J’espère que nous allons tous pouvoir nous mettre dans l’esprit des Fêtes, même si nous avons été séparés une grande partie de l’année.

De plus, j’aimerais exprimer notre reconnaissance aux Forces armées canadiennes ainsi qu’à tous les anciens combattants pour leur travail au service des Canadiens.

Je souhaite que tous les Canadiens se sentent en sécurité, au Canada et à l’étranger, qu’ils aient accès à de l’eau potable et que tous les agriculteurs et tous les propriétaires de petites entreprises reçoivent de l’aide — monsieur le leader, je vous l’ai demandé à plusieurs reprises et je continue de le faire.

J’aimerais qu’on fournisse des appareils de chauffage à notre personnel de sécurité qui travaille dehors, dans le froid glacial.

Le prochain souhait se limite peut-être à un seul groupe de personnes, mais peut-être que d’autres sénateurs appuieront l’idée : je souhaite qu’il y ait quelques nominations de sénateurs indépendants à l’esprit conservateur, si vous voulez bien passer le message au premier ministre.

J’aimerais qu’on respecte la démocratie et que le gouvernement rende des comptes. J’aimerais qu’il réponde aux questions écrites et orales et que les demandes d’accès à l’information soient traitées plus promptement. De plus, j’aimerais qu’on nous vienne en aide pour la tenue de nos séances hybrides. Nous en avons grandement besoin.

J’aimerais aussi savoir où trouver une console PlayStation 5 — pas pour moi, mais pour mes petits-enfants —, car cet appareil ne semble pas être considéré comme un « produit essentiel » que l’on trouve sur les tablettes des magasins.

Mon dernier souhait, mais non le moindre, monsieur le leader : un budget équilibré. En fait, attendez! Je ne voudrais pas demander quelque chose de trop difficile, alors un budget me suffirait, quel qu’il soit.

Sénateur Gold, c’était la liste des cadeaux que je demande pour le Noël des grandes personnes en 2020. Pourriez-vous vous engager à la transmettre au père Noël… je veux dire au premier ministre? Je sais que nous avons tous été sages cette année, du moins la plupart d’entre nous.

Je sais que vous ne pourrez pas me donner votre réponse aujourd’hui, monsieur le leader, comme c’est souvent le cas, alors nous attendrons de recevoir des réponses différées, comme d’habitude.

Cela dit, chers collègues, j’aimerais ajouter ma voix à celles qui expriment leur reconnaissance. Je répéterai certains vœux qui ont déjà été exprimés. Je tiens à prendre un instant pour vous dire merci. Cette année a été très inhabituelle, car nous avons tous dû nous adapter à la pandémie de COVID-19 qui a frappé le pays et le monde entier. Beaucoup de travail a dû être fait en coulisse afin de permettre aux sénateurs d’être efficaces dans l’exercice leurs fonctions et responsabilités quotidiennes.

(1430)

Je tiens à remercier le personnel d’entretien. Vous vous êtes surpassés cette année. Nous ne le disons pas assez souvent, mais cette année, vous nous avez tous protégés — nous l’espérons. Je tiens à vous remercier sincèrement pour tout ce que vous faites.

Je tiens également à remercier les personnes suivantes : les autres membres du personnel de la Direction des biens et services; les pages, qui accomplissent un excellent travail et qui l’ont fait dans des moments très difficiles; l’équipe de la télédiffusion, qui s’est adaptée aux séances à distance; les services de traduction et d’interprétation; le personnel des technologies de l’information, qui a fait preuve d’une patience remarquable envers nous alors que nous faisions la transition vers les séances à distance; la Direction de la sécurité institutionnelle et les Services de protection parlementaire; le greffier du Sénat — Richard, nous vous souhaitons un Noël spécial cette année — et son personnel, y compris les greffiers au Bureau, l’huissier du bâton noir, la Direction des communications, le Bureau de la procédure et des travaux de la Chambre ainsi que la Direction des comités; le légiste et son personnel; la Direction des ressources humaines; la dirigeante principale des services corporatifs et son personnel; la Direction des Services de l’information; la Direction de la gouvernance et de la planification stratégique; la Direction des finances et de l’approvisionnement.

J’aimerais remercier tous mes collègues de la famille conservatrice et de notre caucus pour leur appui, en particulier les membres de mon équipe de leaders.

Sénateur Furey, j’espère que vous nous regardez, Votre Honneur. Nous voulons vous remercier pour votre travail et nous voulons aussi remercier votre équipe.

Chers collègues, je tiens à remercier chacun des leaders, que je vais nommer. Ce fut un réel plaisir, vraiment, de collaborer avec le sénateur Gold. Je comprends les difficultés que vous avez surmontées dans le cadre de vos fonctions de représentant du gouvernement au Sénat. Je tiens à vous assurer, comme je l’ai fait ce matin, que nous allons mettre tout en œuvre au cours de la prochaine année pour vous relever de vos fonctions et vous trouver un remplaçant, peut-être même en échangeant nos rôles.

Quant aux autres leaders, sénateur Woo et sénatrice Saint-Germain, comme il a déjà été mentionné, il n’est pas toujours facile de travailler en équipe, car nous ne sommes pas toujours sur la même longueur d’onde. Toutefois, comme je l’ai dit dans mon hommage il y a une ou deux semaines, je considère que nous accomplissons tous notre travail avec passion et que, tant que cette passion nous anime et que nous cherchons de bonne foi à servir l’intérêt des Canadiens, cela mérite que nous nous respections mutuellement. J’éprouve du respect et de la reconnaissance envers vous.

Sénateur Tannas, en Alberta, et sénatrice Cordy, ce fut un plaisir de travailler avec vous. Sénatrice Cordy, on nous a déjà aperçus en train de jouer au golf ensemble en Floride au mois de janvier. Cela ne se produira pas cette année, mais ce n’est que partie remise pour l’année prochaine.

Je veux aussi remercier mon personnel formidable. Sans notre personnel et leur aide précieuse — il nous fait bien paraître; je reçois tellement de compliments, mais aussi quelques critiques à l’occasion — pour les discours que je prononce, même si je n’en ai pas rédigé beaucoup. Je suis très reconnaissant du travail qu’il fait. Ces personnes nous rendent meilleurs.

Chers collègues, je veux vous souhaiter un joyeux Noël, une joyeuse Hanouka et une bonne année. Que chacun reste en bonne santé. Je vous remercie.

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je veux d’abord exprimer moi aussi ma profonde reconnaissance à toute la famille sénatoriale, ainsi qu’au personnel et à l’Administration du Sénat. Sénateur Plett, vous m’avez libéré de l’obligation de tous les nommer. Je tiens cependant à leur faire savoir que leur travail est très apprécié par nous tous. Je voulais leur exprimer ma reconnaissance d’abord et avant tout.

Je désire remercier les leaders avec lesquels j’ai eu le privilège et l’honneur de travailler. Chacun d’entre vous a réellement enrichi ma vie. Vous m’avez stimulé et vous m’avez soutenu.

En tant que représentant du gouvernement, je souhaite vous transmettre les remerciements du gouvernement du Canada, à vous et à tous les sénateurs, parce que nous avons travaillé ensemble durant cette période extrêmement difficile. Nous sommes passés outre à nos convictions profondes, partisanes et idéologiques afin d’unir nos efforts pour aider les Canadiens. Grâce à vous, il y a quelque chose de spécial à propos du Sénat. C’est aussi simple que cela. Nous avons réussi à nous entendre tant de fois, ainsi qu’à tenir nos engagements, pour le bien de tous les Canadiens.

Don, Pau, Raymonde, Scott, Jane, vous m’avez permis de faire de mon mieux, et je vous en remercie.

À mon équipe, je souhaite vous dire des choses que vous savez déjà. Les sénatrices Gagné et LaBoucane-Benson sont des collègues exceptionnelles. Nous travaillons en équipe. Dans les coulisses, notre incroyable personnel du bureau du représentant du gouvernement au Sénat n’est certes pas nombreux, mais il est capable d’accomplir de grandes choses. Je suis très fier et privilégié de travailler avec vous tous.

Chers collègues, nous avons travaillé très fort dans des circonstances particulièrement difficiles. Comme j’aurais aimé que nous puissions être tout le temps ensemble physiquement pour traverser cette épreuve. À ceux et celles d’entre vous qui sont en ligne, vous nous manquez et nous attendons avec impatience le moment où nous pourrons revenir au Sénat en personne et faire notre travail.

Bien que nous soyons séparés en cette période de vacances, je vous invite tout simplement à chérir les personnes que vous aimez et qui vous aiment. Restez proches de vos familles. Quelles que soient les fêtes que vous célébrez, que ce soit Noël, Hanouka, Kwanzaa, ou quelle que soit la façon dont vous célébrez cette période, passez du bon temps avec vos familles et vos proches, restez en sécurité, reposez-vous bien, et que l’année 2021 marque un nouveau départ pour nous tous. Je vous remercie.

Son Honneur le Président suppléant : Honorables sénateurs, alors que le temps des Fêtes frappe à nos portes, le Président m’a demandé de transmettre ses meilleurs vœux à vous et à vos êtres chers, et je joins ma voix à la sienne. Lui et moi adressons également nos remerciements les plus chaleureux et nos meilleurs vœux à tous ceux qui appuient notre travail : notre personnel de bureau, les greffiers, les agents du Service de protection parlementaire, le personnel d’entretien, le personnel des finances et des ressources humaines, les interprètes, les sténographes, la Direction des services de l’information, le soutien technique, et j’en passe. Il y a tellement de personnes dans cette institution qui nous aident à faire notre travail.

Le Président et moi aimerions aussi remercier un homme en particulier qui est ici pour la dernière fois avec nous dans cette enceinte. Il a servi cette Chambre dans des circonstances très difficiles. Nous parlons évidemment de notre greffier intérimaire, sur qui l’on peut toujours compter. Il est ici depuis tellement longtemps que nous pourrions pratiquement dire qu’il est le greffier permanent. Il nous a soutenus tout au long de ce qui est probablement la crise la plus existentielle dans laquelle ce pays et cette institution aient été plongés. Richard Denis, alors que vous vous apprêtez à entamer une retraite bien méritée, nous vous remercions de votre soutien et de votre service.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président suppléant : J’espère que tout le monde pourra profiter du temps des Fêtes, même si vous devez vous tenir à l’écart de vos proches. J’espère que vous serez proche d’eux en pensée. Bien sûr, vous pouvez vous servir de moyens technologiques pour vous rapprocher des gens.

Cette année a été difficile pour beaucoup de Canadiens et de personnes partout dans le monde. Le Président le sait, et tous ces gens sont dans nos pensées et nos prières. Ayons espoir et confiance que nous traverserons la période difficile causée par la pandémie en 2021. Le Président vous prie, tout comme moi, de prendre soin de vous-même, de vos proches, de vos familles, de vos amis et de vos communautés. Tout cela est très important.

[Français]

Je tiens également à souligner à quel point cette année a été difficile pour le pays, de même que pour nos concitoyens et concitoyennes. J’aimerais offrir mes meilleurs vœux à tous pour la nouvelle année 2021. Surtout, je souhaite à tous les Canadiens et Canadiennes la santé, la santé et encore la santé.

Merci, chers collègues.

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : En vous souhaitant de joyeuses Fêtes, je propose que la séance soit maintenant levée.

(À 14 h 40, le Sénat s’ajourne jusqu’au mardi 2 février 2021, à 14 heures.)

ANNEXE

(Discours annexés en vertu de l’ordre du 8 février 2021.)

[Traduction]

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’honorable Yonah Martin : Honorables sénateurs, je sais qu’il est tard et que bon nombre des points que je compte soulever l’ont déjà été, mais je tiens à apporter ma contribution à ce débat sur une question complexe, délicate et difficile qui préoccupe vivement chacun d’entre nous. En tant que parlementaires, nous savons que la dernière version de ce projet de loi va littéralement déterminer quelles personnes ont le droit de mettre fin à leurs jours, quand elles peuvent le faire, qui peut les aider à cette fin et comment on s’y prendra.

Le projet de loi précédent sur l’aide médicale à mourir, le projet de loi C-14, a été l’une des mesures législatives les plus difficiles à traiter, pour moi personnellement et pour le Sénat, parce qu’il mettait en place, pour la première fois de l’histoire du pays, une loi sur l’aide médicale à mourir, ce que beaucoup d’autres pays n’ont pas encore exploré. À toutes les étapes du processus, nous avons tenu des débats rigoureux et beaucoup plus longs que maintenant, et cette Chambre a été extrêmement divisée du début à la fin.

Malgré tout, nous aurions voulu pouvoir consacrer plus de temps à une décision aussi lourde de conséquences. Nous avons demandé des opinions, des travaux de recherche, l’avis de spécialistes, de patients, de familles, de dirigeants autochtones, d’infirmiers et de soignants. Au bout du compte, nous avons tenu un vote final sur le projet de loi C-14, car la Cour suprême avait imposé un délai pour l’adoption d’une loi fédérale permettant l’aide médicale à mourir au Canada.

D’entrée de jeu, je me suis opposée au projet de loi et, jusqu’à la fin, j’avais bien l’intention de voter contre. Mais, à ce moment-là, la Cour d’appel de l’Alberta a rendu une décision qui élargissait l’accès à l’aide médicale à mourir de manière alarmante. On m’a alors signalé qu’il était préférable d’adopter une loi fédérale comprenant les mesures de sauvegarde et la disposition relative à la mort raisonnablement prévisible que nous avions réussi à inclure au moyen d’amendements que de ne pas avoir de régime fédéral.

J’ai été informée que l’administration de l’aide médicale à mourir relève des provinces et qu’elles seraient en mesure de resserrer le cadre du régime fédéral en ajoutant des mesures de sauvegarde supplémentaires, au besoin. Toutefois, dans ma province, la Colombie-Britannique, c’est le contraire qui s’est produit après l’élection d’un nouveau gouvernement. Au lieu d’un renforcement et d’un resserrement du régime d’aide médicale à mourir, plusieurs développements inquiétants sont survenus. D’ailleurs, en juillet dernier, la demande d’aide médicale à mourir d’Alan Nichols, un résident de Chilliwack, en Colombie-Britannique, qui luttait contre la dépression et qui ne donnait aucun signe d’une mort imminente prévisible, a été approuvée par des professionnels de la santé, malgré les plaidoyers de sa famille, qui estimait qu’il ne répondait pas aux critères d’admissibilité à l’aide médicale à mourir établis par le gouvernement dans le projet de loi C-14. Par conséquent, je participe au débat sur le projet de loi C-7 avec une inquiétude accrue.

Honorables sénateurs, ce dont je veux parler aujourd’hui, c’est la préoccupation que j’ai, à l’instar de nombreux concitoyens de partout au Canada qui ont communiqué avec mon bureau. Si le projet de loi C-7 est adopté sans amendement, il aura des conséquences imprévues sur des Canadiens vulnérables qui traversent une période où ils ont grandement besoin de soins.

En novembre dernier, à titre de membre d’office du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, j’ai participé à l’étude préalable du projet de loi C-7. Nous avons siégé cinq jours d’affilée et entendu un large éventail de témoins, qui ont raconté leurs histoires personnelles, apporté leur expertise et formulé des recommandations pour améliorer le projet de loi C-7. Les témoins nous ont fourni beaucoup d’information, et l’écrasante majorité d’entre eux se sont dits opposés au projet de loi, ce qui m’a permis de comprendre très clairement que le projet de loi comporte des lacunes et des problèmes importants qu’il faut corriger. Nous ne pouvons pas précipiter son adoption. La mort est irréversible. Quand on met fin à la vie, c’est la fin, un point c’est tout.

Par rapport au projet de loi C-14, le projet de loi C-7 élargit l’accès à l’aide médicale à mourir aux personnes qui vivent avec un handicap, mais dont la mort n’est pas imminente. Cependant, il exclut les personnes ayant des problèmes de santé mentale. Ce choix entraîne un débat d’importance, à savoir si cette mesure législative implique que certaines vies ne valent pas la peine d’être vécues. On se demande aussi si elle camoufle un problème de société plus profond en offrant une solution de fin de vie pour pallier la négligence, au lieu de combler les lacunes du système de santé partout au Canada.

Comme l’a si bien dit le professeur adjoint Jonas-Sébastien Beaudry dans le magazine Options politiques, il ne s’agit pas de la capacité des gens à juger par eux-mêmes du moment où leur vie ne vaut plus la peine d’être vécue, ce qui ne serait qu’une question juridique ou éthique. La question est plutôt politique et sociale pour la raison suivante : « Le projet de loi C-7 ouvre un espace normatif où divers acteurs sociaux, y compris des experts médicaux et l’État lui-même, peuvent discuter de ce que sont des “vies qui ne valent pas la peine d’être vécues”. »

Nicolas M. Rouleau, avocat en droit constitutionnel, a représenté Inclusion Canada et le Conseil des Canadiens avec déficiences dans l’affaire Truchon. Il a fait valoir que le fait d’étendre l’aide médicale à mourir uniquement aux personnes handicapées et non à d’autres Canadiens qui ne sont pas en fin de vie est discriminatoire. Il a affirmé ceci : « On isole un groupe de Canadiens en situation de handicap et on leur dit que c’est seulement eux qui pourront avoir ce droit. On accepte le stéréotype selon lequel leur vie est peut-être pire que celle des autres. » Le fait que les personnes handicapées sont déjà vulnérables a été affirmé sans détour par la ministre Carla Qualtrough, qui a déclaré au Comité que « la dure réalité, c’est que bon nombre de Canadiens et de Canadiennes qui ont un handicap ne vivent pas dans la dignité, en ce sens qu’ils ne disposent pas du soutien approprié, sont confrontés à des obstacles à l’inclusion et sont régulièrement victimes de discrimination. »

Une autre chose qui me préoccupe à propos du cadre actuel de surveillance et de reddition de comptes, c’est qu’il n’est pas bien conçu et qu’il s’appuie sur la déclaration volontaire des fournisseurs de l’aide médicale à mourir. Les familles n’ont donc aucun moyen de percer le secret professionnel du médecin si elles soupçonnent des écarts de conduite. Nos collègues à la Chambre des communes ont souligné la nécessité de pouvoir compter sur un solide système fédéral normalisé de surveillance et de collecte de données sur l’aide médicale à mourir. Ils ont aussi indiqué qu’il nous faut des données nationales fiables pour comprendre qui a recours à l’aide médicale à mourir et pour quelles raisons.

La Dre Leonie Herx a ajouté qu’il n’existe aucun système de surveillance distinct de celui à Santé Canada, dans lequel les cas d’administration de l’aide médicale à mourir et les problèmes de conformité peuvent être examinés au niveau provincial et les provinces lui fournissent des rapports plus complets. À l’heure actuelle, seules les provinces du Québec et de l’Ontario se sont dotées d’un tel système.

Non seulement il nous manque des données claires et précises, mais il n’existe pas de norme reconnue pour l’administration de l’aide médicale à mourir, et la formation des médecins et des fournisseurs de l’aide médicale à mourir est insuffisante. La Dre Mona Gupta, en réponse à une question, a déclaré ceci : « La communauté clinique réclame depuis longtemps plus de formation sur l’aide médicale à mourir, les soins de fin de vie et un éventail de domaines... »

Sans la collecte de données précises, un examen parlementaire du projet de loi C-14 et l’établissement de normes nationales de formation et d’administration pour l’aide médicale à mourir, je trouve profondément inquiétantes les modifications proposées dans le projet de loi C-7. Celles-ci réduisent les mesures de sauvegarde pour les personnes en fin de vie et prévoient de faibles mesures de sauvegarde pour les personnes dont la mort naturelle n’est pas raisonnablement prévisible, mais qui satisfont aux autres critères pour recevoir l’aide médicale à mourir. Comme il a été souligné, le projet de loi C-7 va au-delà de l’arrêt Truchon.

J’ai entendu dire que la période de réflexion de 10 jours entre le jour où le patient a signé la demande écrite et le jour où l’aide médicale à mourir est fournie n’a pas rempli son objectif initial et n’a fait que prolonger la douleur des patients qui devaient être admissibles à cette pratique. Cependant, selon le rapport de Santé Canada sur l’aide médicale à mourir publié en 2019, 263 personnes ont retiré leur demande parce qu’elles avaient changé d’avis. Parmi ces personnes, une sur cinq l’a fait juste avant que l’aide médicale à mourir ne soit administrée.

La loi en vigueur permet de réduire la durée de la période de réflexion si le décès ou la perte de la capacité à fournir un consentement éclairé est imminent. C’est ce qui fait que le retrait de la période de 10 jours est dangereux dans le cas des patients qui signent la demande le matin et reçoivent l’aide médicale à mourir le soir même, sans avoir l’occasion d’y réfléchir.

D’ailleurs, ce qui me trouble le plus est le libellé de la disposition sur la précision concernant le consentement préalable à l’aide médicale à mourir, selon lequel « des paroles, des sons ou des gestes involontaires en réponse à un contact ne constituent pas une manifestation de refus ou de résistance » à l’aide médicale à mourir. À l’heure actuelle, dès qu’un patient manifeste une résistance, le professionnel de la santé ne peut plus lui administrer l’aide médicale à mourir. Comment peut-on nous demander, en tant que législateurs, d’accepter une telle disposition concernant ce qui constitue une manifestation claire de résistance involontaire?

M. Trudo Lemmens, professeur et titulaire de la chaire Scholl en droit et politique de la santé à la Faculté de droit de l’Université de Toronto, a effectué beaucoup de recherches sur les pratiques et le droit en matière d’aide médicale à mourir au Canada et ailleurs dans le monde. Dans son témoignage au Comité des affaires juridiques, il a dit que cette disposition « enfreint la Convention relative aux droits des personnes handicapées, suivant laquelle la perte de la capacité n’entraîne pas une perte des droits, y compris celui d’exprimer, le moment venu et d’une manière quelconque, une résistance à l’égard d’un geste ou un changement d’idée ».

M. Harvey Max Chochinov, professeur distingué de l’Université du Manitoba, a présenté au comité des données montrant que le désir de mourir fluctue. Dans le cadre d’une étude réalisée en Belgique, la psychiatre Thienpont s’est penchée sur le cas de 100 patients qui avaient demandé l’euthanasie pour des troubles mentaux qui étaient les seuls problèmes médicaux invoqués. Parmi ces 100 patients, 38 ont fini par retirer leur demande, et de ce nombre, 11 avaient déjà vu leur demande acceptée. En Oregon, entre 20 et 40 % des personnes qui se donnent la peine de demander des doses létales de médicaments ne les prennent jamais au bout du compte. Selon M. Chochinov, l’idée selon laquelle une personne prend sa décision aujourd’hui et n’en démord plus n’est pas corroborée par les faits.

Lorsque la ministre Patty Hajdu est venue témoigner devant le comité sénatorial, j’ai eu l’occasion de lui poser des questions sur les mécanismes d’arrêt en place une fois que le processus de l’aide médicale à mourir est enclenché. Elle n’a pas répondu en donnant des explications précises ou en garantissant que des mécanismes d’arrêt sont en place, mais ce que j’ai entendu de la part de professionnels de la santé, c’est que jusqu’au jour du consentement final, il n’y a pas de vérification obligatoire pour savoir si le patient a changé d’idée. Selon un article écrit par les Drs Leonie Herx, Margaret Cottle et John Scott dans le World Medical Journal, il n’existe pas de contrôle ou de mécanisme direct permettant d’arrêter la prestation de l’aide médicale à mourir en temps réel, même si le patient semble indiquer que ce soit son souhait. Ils indiquent que « les exigences en matière de contrôle ne comprennent que des informations démographiques de base et elles ne sont examinées que rétrospectivement. » Cela signifie qu’il n’y a pas de mécanisme qui arrête le processus d’aide médicale à mourir et qui permet à un professionnel de la santé de vérifier si un patient a reçu des soins adéquats avant de poursuivre le processus d’aide médicale à mourir. Ce n’est qu’en examinant les rapports une fois les personnes décédées que l’on constate qu’un certain pourcentage de patients n’a pas eu accès à des soins palliatifs, par exemple.

Sans une collecte adéquate d’informations, comment l’aide médicale à mourir peut-elle être administrée avec précision et dans le respect de tous les règlements? Dans un article publié dans le Canadian Journal of Bioethics, le professeur Jaro Kotalik indique que l’aide médicale à mourir était déjà offerte depuis deux ans et quatre mois quand le Règlement sur la surveillance de l’aide médicale à mourir élaboré par le ministère fédéral est entré en vigueur. Selon l’une des données les plus inquiétantes qu’il présente, « à la fin de décembre 2019, plus de 13 000 Canadiens avaient reçu une aide médicale à mourir. Pour près de 10 000 d’entre eux, nous ne disposons d’aucune donnée publique confirmant que les critères d’admissibilité et les mesures de sauvegarde prévus par la loi ont été respectés. » Les provinces, les territoires et les établissements de santé doivent travailler de concert et échanger des renseignements, ce qui permettra de recueillir et de bien analyser plus de données sur les personnes qui reçoivent l’aide médicale à mourir et sur les vulnérabilités connues associées au statut socio-économique des demandeurs, s’il y en a.

Par ailleurs, qu’en est-il des soins palliatifs? De nombreux honorables sénateurs ont fait valoir qu’il faut des soins palliatifs de meilleure qualité et plus accessibles partout au pays. Quand j’ai pris part au vote difficile sur le projet de loi C-14, le gouvernement affirmait qu’il se pencherait sur les soins palliatifs. En raison de la COVID, cet examen n’a pas encore eu lieu, mais on nous demande tout de même de mettre aux voix un projet de loi qui élargit les critères d’admissibilité à l’aide médicale à mourir.

Les soins palliatifs doivent faire partie de la gamme de soins. Ils doivent être offerts et rendus disponibles au patient avant d’entamer des conversations sur l’aide médicale à mourir. Ils ne doivent pas être présentés comme une possibilité équivalente à l’aide médicale à mourir. D’ailleurs, je crois que l’aide médicale à mourir doit seulement être offerte à la fin de la vie, lorsque tous les autres services et soutiens appropriés ont été offerts et rendus disponibles.

Enfin, le projet de loi C-7 dans sa forme actuelle ne protège pas adéquatement la liberté de conscience des médecins qui préfèrent aiguiller un patient qui demande l’aide médicale à mourir lorsqu’il est contraire à leurs convictions de l’administrer eux-mêmes. On nous a assurés que le projet de loi C-14 établit le droit à la liberté de conscience. Cependant, le régime de l’aide médicale à mourir est encore relativement jeune, et la Cour suprême du Canada n’a pas eu à se prononcer sur l’obligation qu’ont les médecins d’aiguiller un patient qui demande l’aide médicale à mourir. La Dre Leonie Herx a déclaré qu’au Canada, on s’attend beaucoup plus des médecins qu’ils participent à l’aide médicale à mourir que dans tout autre pays où l’aide médicale à mourir est permise. Des médecins nous ont dit qu’ils souhaitent que le projet de loi C-7 soit renforcé et qu’on clarifie la disposition sur la liberté de conscience comprise dans le projet de loi C-14. Le Dr Ewan Goligher, professeur adjoint de médecine à l’Université de Toronto, a déclaré que même le fait d’aiguiller un patient rend le médecin moralement coupable.

En 2018, la Dre Diane Kelso a souligné que le ministère de la Santé de l’Ontario avait mis sur pied un service de coordination des soins grâce auquel les patients et le personnel soignant pouvaient demander directement d’être mis en contact avec un médecin ou avec un infirmier praticien pouvant fournir l’aide médicale à mourir. Or, le collège provincial exigeait toujours un aiguillage direct. C’est la même chose en Nouvelle-Écosse, où les médecins et les infirmiers praticiens doivent aiguiller les patients qui demandent l’aide médicale à mourir. Devant le comité, certains témoins ont indiqué qu’il faudrait préciser clairement dans le Code criminel si le médecin qui aiguille le patient participe aussi à l’aide médicale à mourir.

Selon le professeur Trudo Lemmens, le projet de loi C-7 « fragilise l’équilibre que la loi actuelle sur l’AMM tente d’établir entre l’intérêt de ceux qui veulent décider par eux-mêmes des circonstances et du moment de leur décès d’une part et, de l’autre, la nécessité de protéger les personnes vulnérables, la confirmation de la valeur égale qu’il faut accorder à la vie des personnes âgées, malades ou handicapées, ainsi que la prévention du suicide. Le projet de loi fait passer le droit à la liberté de certains avant le devoir de l’État de protéger la vie, et il le fait de manière discriminatoire. »

À mon avis, nous devons mettre davantage l’accent sur la prestation des meilleurs soins possible à nos patients et veiller à ce que les Canadiens les plus vulnérables aient accès à des soins de qualité. Tous devraient avoir les mêmes droits sans être stigmatisés.

Pour des raisons de principe, je ne peux appuyer le projet de loi C-7 dans sa forme actuelle. Ce n’est pas que je m’oppose au droit à l’autonomie ou à la mort dans la dignité. C’est plutôt que l’élimination d’importantes mesures de sauvegarde sans la certitude que le nécessaire est en place pour soutenir la vie, y compris l’accès à des soins palliatifs de qualité, exposera certaines des personnes les plus vulnérables au risque.

Je ne crois pas que les mesures de sauvegarde que contient le projet de loi C-7 protègent adéquatement les patients, les médecins, ni les personnes les plus vulnérables parmi nous qui pourraient se retrouver sans d’autre choix que l’aide médicale à mourir. Après avoir entendu des témoignages convaincants pendant l’étude préalable en comité, si le projet de loi C-7 devait être adopté tel quel, je ne souhaite pas que notre pays soit propulsé à l’avant-scène et compte l’un des régimes d’aide médicale à mourir les plus libéraux au monde.

Honorables sénateurs, mon vœu le plus sincère pour 2021, en cette période d’Hanouka ou de l’Avent et à l’approche de Noël, c’est que le Sénat continue de faire ce qu’il fait le mieux en tant que Chambre de second examen objectif : débattre vigoureusement du projet de loi à toutes les étapes, l’étudier et l’analyser en profondeur, puis, à la fin, que chacun et chacune d’entre nous prenne une décision dans l’intérêt supérieur des Canadiens que nous avons l’honneur de représenter et le devoir de protéger.

[Français]

La Loi de mise en oeuvre de la Convention sur les armeschimiques

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

L’honorable Mary Coyle : Honorables sénatrices et sénateurs, je suis honorée de vous parler aujourd’hui d’Antigonish, le lieu de la rencontre des cinq rivières fourchues, où les branches sont arrachées par des ours, en Mi’kma’ki, le territoire non cédé des Micmacs.

Nos débats cette semaine en ligne et dans la Chambre du Sénat sur la vie, la mort et l’atténuation des souffrances avec humanité, m’ont rappelé l’article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui dit que chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.

Honorables collègues, je suis heureuse de prendre la parole aujourd’hui à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques, une loi qui porte fondamentalement sur la vie et la sécurité des personnes ici au Canada et dans le monde entier.

Chers collègues, j’ai ouvert mon allocution à l’étape de la deuxième lecture le 5 novembre dernier en soulignant l’importance de cette mesure législative dans notre monde en constante évolution.

Hier, à la réunion du Comité des affaires étrangères, Veronica Stromsikova, directrice du Bureau des stratégies et des politiques de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, nous a rappelé à quel point il est essentiel de demeurer attentif à l’évolution de l’environnement de sécurité mondial — rapide et difficile à prévoir.

Plus que jamais, il importe d’avoir des règles, des structures et des systèmes efficaces en place pour guider les États et les entreprises dans les rouages des relations internationales.

Depuis 75 ans, les travaux de l’Organisation des Nations Unies ont aidé à solidifier un ordre international fondé sur des règles, un ensemble de normes, d’institutions, de traités et d’accords, qui constituent les règles de conduite pour gérer les intérêts nationaux divergents, faciliter la coopération internationale et promouvoir la paix.

La Convention sur les armes chimiques est l’exemple parfait de ce que le monde peut accomplir quand il conjugue ses efforts pour assurer la paix.

Adoptée en 1997, la Convention elle était le premier accord multilatéral de désarmement au monde à viser l’élimination d’une catégorie entière d’armes de destruction massive.

En novembre 2019, à la suite d’un effort important du Canada, des États-Unis et des Pays-Bas, la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques a convenu d’ajouter quatre nouvelles catégories de produits chimiques toxiques au tableau 1 de l’annexe sur les produits chimiques. Au nombre de ces nouveaux produits chimiques on compte l’agent neurotoxique de type Novitchok utilisé dans la tentative d’assassinat de Sergei et de Yulia Skripal à Salisbury, au Royaume-Uni. Une variante de ce neurotoxique a été utilisée plus tôt cette année dans la tentative d’assassinat d’Alexei Navalny.

Le terme Novitchok signifie « nouveau venu » en russe et a été appliqué à un groupe d’agents neurotoxiques avancés développés par l’Union soviétique dans les années 1970 et 1980.

Cet ajout à l’annexe de la Convention rend désuète la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques du Canada. Et c’est justement ce que le projet de loi S-2 cherche à corriger.

Comme je l’ai mentionné dans mon allocution précédente, le projet de loi S-2 est simple, mais essentiel, car il apporte les modifications requises pour harmoniser clairement notre loi avec la Convention.

Le projet de loi S-2 éliminera l’ancienne liste des produits chimiques interdits par la Convention et indiquera nettement que la liste actualisée est conservée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et qu’elle est facilement accessible sur son site Web.

En deuxième lecture, la sénatrice Ataullahjan, porte-parole du projet de loi S-2, a indiqué, qu’à son avis, personne dans cette enceinte ni aucun député ne s’opposerait à cette mesure législative. Elle nous a également avertis, que le projet de loi ne dissiperait pas à lui seul la menace mondiale des armes chimiques. Elle nous a aussi encouragés à voir par quels moyens pratiques le Canada pourrait resserrer le respect de la Convention tout en empêchant le type d’attaques récentes perpétrées par la Russie et la Syrie contre leurs propres citoyens.

À ce moment-là, la sénatrice McPhedan a également parlé en faveur du projet de loi S-2, tout en nous exhortant à encourager le Canada à également prendre position contre la prolifération des armes nucléaires par leur interdiction et en signant et ratifiant le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires des Nations Unies.

Le 2 décembre, le projet de loi a été renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, qui en a fait une étude efficace et approfondie.

Le rapport du Comité a été déposé hier par son président, le sénateur Boehm.

Pendant son étude, le Comité a convoqué quatre groupes et entendu sept témoins: des fonctionnaires principaux de la Division de la sécurité internationale et des affaires politiques d’Affaires mondiales Canada, le président du Comité d’examen du programme de défense biologique et chimique, la représentation de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et un professeur du Collège militaire royal, qui a travaillé depuis le début à la Convention sur les armes chimiques.

Le projet de loi S-2 démontre manifestement l’engagement du Canada envers la Convention et l’actualisation de la loi canadienne.

Malheureusement, le projet de loi S-2 à lui seul ne réduit pas le risque qu’un acteur étranger, comme la Fédération de Russie, utilise le Novitchok à des fins malveillantes. Il indique toutefois très clairement quels sont les produits chimiques contrôlés au Canada.

Le Canada devra néanmoins faire face aux principaux enjeux: réduire les risques de guerre ou d’attaques chimiques ciblées contre des particuliers, et exiger des responsables qu’ils répondent de leurs actes. Comme nous l’ont dit des témoins, le Canada continue d’y consacrer des ressources diplomatiques et financières importantes.

À l’instar de nos alliés, nos hauts-commissariats et nos ambassades partout dans le monde font régulièrement la promotion de l’importance de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et cherchent à obtenir un soutien général en faveur des décisions visant à renforcer la Convention sur les armes chimiques.

Il est probable que bon nombre des décisions prises au sein de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, y compris celle de créer et de financer l’équipe d’enquête sur l’utilisation d’armes chimiques en Syrie, ont été adoptées par de larges majorités grâce aux efforts du Canada.

Par ailleurs, par l’entremise du programme canadien de réduction de la menace liée aux armes de destruction massive, soit la principale contribution du Canada au Partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes qui a été lancé au Sommet du G8 à Kananaskis en 2002, le Canada a contribué plus de 230 millions de dollars à la lutte contre la propagation des armes chimiques. Cela comprend leur destruction en Russie, Syrie, Iraq et Libye. En plus, le Canada a contribué au nouveau centre de chimie et de technologie de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, renforçant du coup ses capacités d’enquête.

Honorables collègues, comme le voyez, le Canada a été un fier chef de file dans la lutte contre les armes chimiques. Nous avons été l’un des premiers pays à signer la Convention le 13 janvier 1993 et nous demeurons fidèlement engagés dans le travail de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques.

À ce jour, 98,37 % des stocks d’armes chimiques déclarés du monde ont été détruits, soit 71 123 tonnes métriques. C’est une étape importante pour la communauté internationale, mais le travail est loin d’être terminé.

Bien que 193 États aient signé la Convention, quatre ne l’ont toujours pas fait. Israël l’a signée, mais pas encore ratifiée, tandis que l’Égypte, la Corée du Nord et le Soudan du Sud n’y ont pas donné suite.

Honorables collègues, modifier la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques est un acte de bonne gouvernance, qui présente deux principaux avantages.

Premièrement, cela précise quels produits chimiques sont interdits au Canada sans autorisation explicite, et deuxièmement, cela souligne notre engagement envers la Convention et, plus largement, envers un ordre international fondé sur des règles.

J’aimerais conclure par ces réflexions. Il ne faut pas oublier les vraies personnes derrière les histoires qui retiennent brièvement les grands titres sur l’utilisation des armes chimiques dangereuses et mortelles.

On ne peut pas oublier que, derrière les nouvelles sur l’utilisation des armes chimiques dangereuses et mortelles qui occupent brièvement les manchettes, il y a de véritables personnes.

Des personnes dont les vies sont déchirées par les actions cruelles et arbitraires d’États ou d’acteurs non étatiques, qui méprisent les lois, les normes et les obligations, lesquelles ont évolué au fil du temps pour favoriser et maintenir la paix et la sécurité pour tous à l’échelle du globe. Bon nombre sont venues trouver au Canada un havre de paix et de sécurité.

C’est à elles que nous devons penser aujourd’hui en soupesant nos réponses législatives et politiques aux gestes posés.

Honorables collègues, nous sommes en cette période de l’année où des gens de confessions et de traditions culturelles différentes se réunissent pour célébrer la paix, l’amour et la collectivité.

Beaucoup le font avec des symboles de lumière, que ce soit avec les diyas d’argile des hindous, des jaïns et des sikhs qui ont servi dans leurs célébrations récentes de Diwali, les chandelles allumées par les familles juives pendant les huit jours de Hanoukka, qui se terminent demain, les chandelles d’anniversaire de la célébration musulmane des ismaéliens de Khushiali, une bougie noire allumée sur le kinara au cours de la célébration du premier jour de Kwanzaa, le 26 décembre, de l’étoile vive illuminant Bethléem pour marquer le premier Noël ou des lumières dont nous décorons nos arbres et nos maisons à cette époque de l’année.

Honorables collègues, je crois que l’effort mondial de désarmement est un phare lumineux pour une multitude de personnes dans le monde.

La Convention sur les armes chimiques est un instrument de désarmement puissant.

Appuyons le projet de loi S-2 et son adoption rapide à l’autre endroit pour que notre loi d’application de la Convention soit claire et à jour.

Ajoutons aujourd’hui notre part de lumière dans ce monde en faisant concrètement avancer l’une des importantes contributions du Canada à la paix mondiale.

Thank you, merci, wela’lioq.

[Traduction]

L’honorable Salma Ataullahjan : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui dans le débat à l’étape de la troisième lecture du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.

Comme la sénatrice Coyle l’a expliqué, ce projet de loi d’initiative ministérielle modifierait la Loi de façon à y ajouter quatre nouvelles catégories de produits chimiques réglementés, qui sont interdits par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques.

Le projet de loi ajouterait ainsi les agents neurotoxiques de type Novitchok à la liste des produits chimiques interdits.

Le terme Novitchok englobe plusieurs familles d’agents neurotoxiques que l’Union soviétique a mis au point au cours de la Guerre froide dans le cadre de son programme d’armes chimiques.

Même si les gouvernements occidentaux connaissent le programme russe et les agents neurotoxiques de type Novitchok depuis les années 1990, ils ne les ont pas fait ajouter à la liste faisant l’objet des négociations de la Convention sur les armes chimiques par crainte de compromettre des sources et des méthodes, et en raison des risques associés à la divulgation publique d’une nouvelle catégorie d’agents neurotoxiques.

C’est ce qui explique que, au moment où la convention devait être signée, en 1993, la version d’origine de l’annexe 1 ne mentionnait pas les agents neurotoxiques de type Novitchok.

Après leur utilisation patente en 2018 à Salisbury, en Angleterre, le Canada, les Pays-Bas et les États-Unis ont soumis une proposition commune visant à interdire officiellement les agents neurotoxiques de type Novitchok.

Après de longues discussions, les divers États parties ont réussi à s’entendre sur l’ajout des agents neurotoxiques de type Novitchok à la liste des produits chimiques interdits.

Ce qui est intéressant, c’est qu’un consensus s’est dégagé en ce sens. La Russie s’était d’abord opposée à l’ajout de ces agents neurotoxiques, mais elle a par la suite modifié ses propres propositions, de sorte que la proposition russe et la proposition commune du Canada, des Pays-Bas et des États-Unis ont pu être approuvées par voie de consensus.

À l’époque, certains ont dit de cette entente qu’il s’agissait d’une victoire de la diplomatie et de la coopération internationale. La version modifiée de la convention est entrée en vigueur le 7 juin 2020.

Malheureusement, toutefois, il s’agit pour une bonne part de faux-semblants. Il n’est pas sûr que tous les États signataires respecteront les dispositions de la convention.

On n’a qu’à penser au manifeste empoisonnement de l’opposant russe Alexei Navalny à ce qui semble être un agent neurotoxique Novitchok, il y a quatre mois, soit deux mois à peine après leur interdiction.

Selon moi, il faut absolument que le régime d’application de la Convention sur les armes chimiques comporte de strictes dispositions de vérification. Mais même si de telles dispositions étaient adoptées, l’adhésion de tous les États signataires n’est pas garantie.

À l’étape de la deuxième lecture, il y a quelques semaines, j’ai dit que le comité devait encore se pencher sur plusieurs questions concernant ce que le Canada comptait faire pour faire appliquer cette mesure législative :

Que faisons-nous concrètement pour prévenir d’autres agressions de ce genre?

Comment favoriserons-nous la participation de nos alliés dans ce dossier au cours des prochaines années?

Comment convaincrons-nous les autres pays, notamment la Russie, que ces produits chimiques doivent être mieux réglementés?

À quel point sommes-nous prêts à imposer des sanctions aux pays qui contreviennent à ces dispositions?

Sommes-nous prêts à sacrifier d’autres intérêts pour pouvoir atteindre les objectifs de la mesure législative dont nous sommes actuellement saisis?

Ces questions, le sénateur Ngo, moi-même et d’autres membres du Comité sénatorial des affaires étrangères les avons posées aux responsables canadiens. Les réponses qui nous ont été données confirment dans l’ensemble qu’il faudra déployer des efforts considérables pour faire appliquer la nouvelle version de la convention et exiger des comptes aux États qui y contreviennent.

À propos de la première question, j’ai demandé à M. Dan Costello, sous-ministre adjoint, Sécurité internationale et affaires politiques, d’Affaires mondiales Canada, si ces mesures permettront de prévenir de futures agressions. Sa réponse a été assez franche :

« Nous ne nous faisons pas d’illusions en nous disant que cette loi — qui vise à modifier la loi de mise en œuvre canadienne — pourra avoir un effet sur la prévention à l’échelle de la planète, parce que cela dépasse clairement ce que nous pouvons faire par le biais de nos lois nationales. »

Selon ce qu’il a dit, la mesure législative ne permettra pas d’empêcher de futures agressions, mais il espère qu’elle s’inscrira dans une série de mesures visant à bonifier les règles internationales et leurs mécanismes d’application dans le but d’inciter l’ensemble des alliés qui partagent les mêmes idées à défendre leur point de vue.

Il s’agit selon moi d’une réponse honnête, qui vaut mieux que certaines paroles creuses que nous sert parfois le gouvernement.

Par exemple, lorsqu’il a annoncé ces mesures, le ministre Champagne a déclaré que « le Canada [adoptait ainsi] une position ferme pour un monde plus sûr en contrôlant les produits chimiques dangereux ».

En réalité, la mesure dont il est question aujourd’hui est beaucoup plus modeste.

Pour atteindre notre but, il faudra aller au-delà du simple exercice de relations publiques et collaborer de façon étroite et continue avec nos alliés.

Il faudra aussi que le gouvernement détermine précisément ce que nous ferons pour exercer des pressions sur la Russie tout en l’incitant à collaborer dans ce dossier.

Il est en effet indéniable que la Russie est prête à faire taire les dissidents en ayant recours à des agents toxiques.

Elle veut ainsi envoyer le message qu’elle retrouvera les personnes qui ont trahi l’État ou qui représente une menace pour lui, et qu’elle n’hésitera pas à les éliminer.

Ce message est très inquiétant. Le recours à des agents toxiques, qu’il s’agisse de Salisbury ou de l’empoisonnement de Navalny, mais aussi le tristement célèbre meurtre par empoisonnement d’Alexander Litvinenko, ancien agent russe du renseignement à Londres, en 2006, dénote une tendance.

Par contre, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques a elle-même confirmé en 2017 que la Russie avait détruit 39 967 tonnes métriques d’armes chimiques.

Selon ce que des responsables ont dit au comité, environ 98 % des réserves mondiales d’armes chimiques, c’est-à-dire 71 000 tonnes métriques, auraient été détruites. La participation de la Russie à cette campagne est donc considérable.

Le Canada et ses alliés sont donc devant un dilemme : d’une part, il faut dénoncer les Russes — car leur comportement meurtrier est répugnant —, mais d’autre part, la question est très complexe.

Le sénateur Ngo a abordé cette question au comité lorsqu’il a demandé aux responsables si le Canada était prêt à faire pression sur la Russie jusqu’au point où elle pourrait se retirer de la convention.

M. Costello lui a répondu ceci :

« Votre question est intéressante en ce sens que vous soulignez à juste titre que, d’une part, nous voulons insister sur les conséquences de ce genre de comportement scandaleux, de violation flagrante du droit international et des relations internationales et que, d’autre part, nous voulons encourager les acteurs internationaux les plus transgressifs et les plus difficiles à contrôler à demeurer dans les limites des normes du droit international et des traités internationaux. »

Voilà l’essence même du dilemme.

Je reviens donc à ce que je disais à l’étape de la deuxième lecture.

Nous ne savons toujours pas vraiment ce que fera le gouvernement pour poursuivre concrètement les objectifs généraux du projet de loi.

Comme je l’ai dit à l’étape de la deuxième lecture, il est très facile de dire, comme le gouvernement, que le Canada adopte une « position ferme » pour un monde plus sûr. C’est tout autre chose que de mettre cette prétention à exécution.

Malheureusement, je ne peux m’empêcher de penser que c’est ce même gouvernement qui déclarait avec arrogance en 2015 que « le Canada est de retour » en force sur la scène internationale.

Depuis ce temps-là, bon nombre de relations bilatérales du Canada avec d’autres pays se sont effondrées, et dernièrement, le Canada n’a pas réussi à obtenir de siège au Conseil de sécurité des Nations unies, malgré les centaines de millions de dollars dépensés à cet effet.

Je crains que ce que la mesure législative que propose le gouvernement tombe dans la même catégorie.

C’est-à-dire un exercice — peu cher, réussi, mais finalement mineur — de relations publiques qui, au bout du compte, reviendrait à très peu de choses.

Pour que tout cela ne reste pas un vain exercice de relations publiques, le Comité sénatorial des affaires étrangères pourrait demander des comptes au gouvernement dans un an ou deux dans le but d’évaluer ce qui a concrètement été fait pour mettre en œuvre la « position ferme » qu’il a adoptée, selon le ministre Champagne.

J’appuierais assurément une telle initiative, et si le gouvernement est vraiment déterminé à agir, j’ose espérer qu’il sera impatient de faire état au comité de ce qu’il aura accompli.

Je vous remercie.

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