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Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 16 - Témoignages du 7 mars 2005 - Séance du matin


EDMONTON, le lundi 7 mars 2005

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 8 h 10 afin d'examiner, pour ensuite en faire rapport, la politique nationale sur la sécurité pour le Canada.

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Mesdames et messieurs, avant de débuter la séance, j'aimerais exprimer, au nom des membres du comité, nos sincères condoléances aux familles des victimes de la fusillade qui a eu lieu en Alberta, et dire aux membres de la GRC que nous pensons à eux pendant ce moment difficile.

Je vous souhaite la bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je m'appelle Colin Kenny. Je suis le président du comité. Je voudrais d'abord présenter les membres du comité.

À ma droite se trouve l'éminent sénateur Michael Forrestall de la Nouvelle-Écosse, qui est au service de la population de Dartmouth depuis 37 ans, d'abord à titre de député à la Chambre des communes, puis comme sénateur. Pendant qu'il se trouvait à la Chambre des communes, il a été critique de l'opposition officielle de 1966 à 1976. Il est également membre de notre Sous-comité des anciens combattants.

À côté de lui se trouve le sénateur Norm Atkins de l'Ontario. Il est arrivé au Sénat après une carrière de 27 ans dans le domaine des communications. Il était conseiller principal de l'ancien chef du parti conservateur fédéral Robert Stanfield, de l'ancien premier ministre William Davis de l'Ontario et de l'ancien premier ministre Brian Mulroney. Il est également membre de notre Sous-comité des anciens combattants.

Au bout de la table, il y a le sénateur Jim Munson de l'Ontario, autrefois journaliste écouté et directeur des communications de l'ancien premier ministre Jean Chrétien. Il est arrivé au Sénat en 2003. Le sénateur Munson a été mis en nomination à deux reprises pour un prix Gémeau d'excellence en journalisme.

Au bout de la table, à ma gauche, se trouve le sénateur Jane Cordy de la Nouvelle-Écosse. C'est une éducatrice accomplie qui a de nombreuses réalisations à son actif dans la collectivité; elle a entre autres été vice-présidente de la Halifax/Dartmouth Port Development Commission. Elle est présidente de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN et membre du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Notre comité est le premier comité sénatorial permanent dont le mandat est d'examiner les questions de sécurité et de défense. Le Sénat lui a demandé d'examiner la nécessité d'une politique de sécurité nationale.

Nous avons entrepris notre étude en 2002 avec la publication de trois rapports : L'état de préparation du Canada sur les plans de la sécurité et de la défense, en février, La défense de l'Amérique du Nord : Une responsabilité canadienne, en septembre, et Mise à jour sur la crise financière des Forces canadiennes : Une vue de bas en haut, en novembre.

En 2003, le comité a publié deux rapports : Le mythe de la sécurité dans les aéroports canadiens, en janvier, et Les côtes du Canada : les plus longues frontières mal défendues au monde, en octobre.

L'année suivante, soit en 2004, nous avons publié deux autres rapports : Les urgences nationales : le Canada, fragile en première ligne, en mars, et récemment Le manuel de sécurité du Canada, dont l'édition de 2005 a été publiée en décembre.

Notre comité se penche sur la politique canadienne en matière de défense. Au cours des prochains mois, le comité tiendra des audiences dans toutes les provinces, et échangera avec les Canadiens en vue de déterminer quel est leur intérêt national, quelles sont les principales menaces perçues pour le Canada et comment ils aimeraient que le gouvernement réagisse à ces menaces.

Le comité tentera de susciter un débat sur la sécurité nationale au Canada, et d'établir un consensus quant aux besoins en matière de force militaire, et au type de militaires que veulent les Canadiens.

Nous accueillons aujourd'hui le brigadier général Stuart Beare. Il est commandant du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre, qui comprend trois groupes-brigades de la réserve : le 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada, le 1er Groupe de soutien de secteur et le Centre d'instruction du secteur de l'Ouest de la BFC Suffield, en Alberta.

Le brigadier général Stuart Beare a joint les rangs des Forces canadiennes en 1978 et a commencé sa carrière à titre d'officier d'artillerie. Il a une vaste expérience du commandement et des missions à l'étranger et au cours des six dernières années, il a commandé la brigade à Edmonton, l'élément terrestre qui fournit un appui à la conférence du G8 à Kananaskis, la brigade multinationale canadienne, anglaise et hollandaise située à Banja Luka, en Bosnie- Herzégovine, et la brigade multinationale en Bosnie.

Il est diplômé du Royal Military College of Science, un collège situé en Angleterre, du Collège d'état-major de commandement des Forces canadiennes de Toronto et du Collège des Forces canadiennes. Il a pris le commandement du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre en mai 2004.

Nous accueillons également le colonel Timothy Grant, qui s'est engagé dans les Forces canadiennes en 1977 à titre de guide de troupe et d'officier d'administration. Il est diplômé du Collège d'état-major et de commandement de Toronto et il a fait des études militaires supérieures dans le domaine de la sécurité nationale.

Le colonel Timothy Grant est un officier d'expérience qui a commandé le Lord Strathcona's Horse (Royal Canadians), le Strathcona Battle Group en Bosnie et le groupe de travail sur la Bosnie-Herzégovine. Il a également occupé différents postes au quartier général de la Défense nationale. Il a pris le commandement du 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada en juillet 2003.

Nous accueillons également le colonel Paul Wynnyk. Le colonel a commencé sa carrière en 1981 dans la milice du 20e Régiment d'artillerie de campagne. Il est diplômé du Royal Roads Military College, du Collège militaire royal du Canada, du Collège de commandement et d'état-major de la Force terrestre canadienne et du Collège des Forces canadiennes, où il a fait des études militaires supérieures.

Le colonel Paul Wynnyk est ingénieur et a servi à l'étranger, à Lahr, au Cambodge et au Congo. Il a pris le commandement du 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada en juin 2004.

Nous accueillons aussi le colonel Markewicz, qui a été commandant d'une base des Forces canadiennes, soit l'Unité de soutien de secteur, Edmonton, depuis septembre 2004; je crois cependant qu'il ne présentera pas de témoignage ce matin.

Je crois, général, que vous avez une courte présentation à faire, alors allez-y.

Le brigadier général Stuart A. Beare, commandant, Secteur de l'ouest de la Force terrestre : Bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs. Je suis très heureux de pouvoir présenter un témoignage devant votre comité, à titre de commandant du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre et à titre de membre d'une équipe dont je suis fier, une équipe formée de Canadiens et de Canadiennes en uniformes.

J'ai pris connaissance de votre champ d'intérêt. Je vais fournir l'information la plus pertinente et concrète que possible et je vais présenter un bref historique, la situation actuelle et les tendances — d'un point de vue moral et du point de vue de notre organisation.

Le Secteur de l'ouest de la Force terrestre correspond à la région militaire de l'ouest du Canada. Notre équipe est constituée de militaires des forces terrestre, maritime et aérienne, de réservistes et d'employés civils et sa mission est de produire des forces armées polyvalentes et aptes au combat disponibles pour des opérations tant au pays qu'à l'étranger, en temps de paix comme en temps de guerre, aujourd'hui et demain.

Notre mission s'inscrit dans la mission des Forces canadiennes, qui est de défendre le Canada ainsi que ses intérêts et ses valeurs, tout en contribuant à la paix et à la sécurité internationales, et dans celle de l'Armée, qui est de générer des forces terrestres plurifonctionnelles afin d'appuyer les engagements du Canada en matière de défense.

Nous générons l'équipe : une équipe compétente, qualifiée et qui a confiance en ses aptitudes militaires, et qui a l'expérience du travail d'équipe. Nous pouvons nous intégrer dans un cadre opérationnel n'importe où. L'équipe est de dimensions variables, du peloton de, disons, 30 membres, jusqu'aux troupes de brigade, ou des plus grandes troupes, constituées de milliers de membres.

Nous assurons la subsistance de l'équipe : nous lui offrons une base principale à partir de laquelle nos équipes peuvent se déployer. Nous recrutons, nous formons et nous développons les personnes. Nous fournissons un appui et une base qui garantissent notre force, et nous appuyons les familles. Finalement, nous sommes le port d'attache vers lequel nos troupes reviennent.

Nos équipes effectuent des opérations au Canada et à l'étranger, qu'il s'agisse des opérations de combat à Kandahar ou des opérations de maintien de la paix et de la stabilité en Bosnie. Nous allons partout où il le faut dans l'intérêt national, selon les décisions du gouvernement.

Depuis 1996, le Secteur de l'ouest de la Force terrestre a envoyé des soldats dans neuf missions importantes à l'étranger et a effectué cinq grandes opérations d'urgence au Canada.

Nos réalisations sont impressionnantes, étant donné la taille de nos équipes et le temps dont nous disposons, mais ces équipes ne fonctionnent pas toutes seules. Elles s'intègrent aux Forces canadiennes nationales et au secteur civil, soit les municipalités, les provinces, les organisations chargées de l'application de la loi, les Affaires étrangères et l'Agence canadienne de développement international, et aux équipes multinationales comme la coalition avec les États- Unis à Kandahar en 2002 et les forces de l'OTAN en Bosnie, ainsi que d'autres intervenants internationaux comme les Nations Unies.

Nous dépendons de la grande équipe des Forces canadiennes pour nous déplacer lors des combats à l'étranger et nous utilisons diverses méthodes pour nous rendre dans les régions où nous effectuons des opérations au Canada.

La raison d'être de notre équipe est d'améliorer la sécurité dans les opérations de maintien de la paix et de combat. Nous y parvenons en utilisant la force de manière disciplinée ou en utilisant la menace du recours à la force.

Nos principales aptitudes sont axées sur le combat, non dans un contexte similaire à la guerre froide, mais plutôt dans un contexte de menaces provenant d'états défaillants ou en déroute.

Notre capacité et notre aptitude en matière de commandement, de contrôle et de logistique sont essentielles pour répondre aux désastres naturels et pour protéger la vie des Canadiens ici, au pays.

Nous devons être en mesure d'accomplir notre mission aujourd'hui et demain. Notre capacité en termes de personnes, d'équipements et de matériel doit être soutenue et, dans certains domaines, améliorée. Nos méthodes, nos outils et nos structures doivent continuer d'évoluer si nous voulons demeurer aptes à accomplir des opérations stratégiques au Canada et des opérations tactiques dans un contexte marqué par les trois visages de la guerre, le contexte de l'avenir. À chaque jour, nous mettons au point les conditions de demain.

Le Secteur de l'ouest de la Force terrestre participe à des opérations tous les jours. Nous générons la Force. Nous maintenons notre base de génération de la Force et, ce qui est encore plus important, nous maintenons notre capacité humaine afin de pouvoir former notre équipe et assurer la subsistance de nos membres. Nous régénérons notre capacité opérationnelle et nous produirons des équipes pour les missions à l'étranger de cet été et de l'année prochaine tout en demeurant disponibles pour les urgences au pays.

Enfin, nous transformons la manière dont nous allons effectuer nos opérations avec les forces terrestres, marines et aériennes et les forces spéciales dans le cadre d'opérations multinationales et interagences. Nous transformons la préparation de nos membres afin qu'ils puissent faire face aux trois visages de la guerre tant au Canada qu'à l'étranger et nous transformons les équipements et la structure de nos unités, l'élément fondamental de notre armée, afin de pouvoir répondre à tous ces besoins.

Voilà l'ensemble de notre travail. C'est notre mission quotidienne. Notre capacité, nos aptitudes et notre crédibilité qui nous permettent de créer une sécurité dans un contexte de menaces très réelles à la paix et à la stabilité sont basées sur notre mission unique : être prêts pour le combat, défendre les intérêts du Canada. C'est notre raison d'être. C'est notre contribution. Et dans le monde d'aujourd'hui, après les événements du 11 septembre, notre raison d'être est encore plus importante.

Toutes nos réalisations ont été fondées sur ces préceptes. Nos réalisations futures le seront également. Mais si nous ne pouvons maintenir la Force, la régénérer et la transformer, il n'y aura pas d'opérations.

Le Secteur de l'ouest de la Force terrestre est une équipe constituée de 10 000 soldats — des soldats réguliers et des membres de la réserve — et de 1 200 membres civils, ainsi que de nos familles. Nous faisons partie d'une Armée dont le travail consiste à être prête à défendre les intérêts du Canada et des Canadiens et à faire la promotion de la paix et de la sécurité à l'étranger. Nous sommes tous d'abord des soldats, et c'est notre crédibilité, notre compétence et notre confiance en tant que combattants qui nous permet d'accomplir tout cela.

Le président : Merci, général Beare.

Le colonel Timothy J. Grant, commandant, 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada, ministère de la Défense nationale : Bonjour mesdames et messieurs les sénateurs. Je connais très bien les questions qui touchent le 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada depuis que j'ai pris le commandement du Lord Strathcona's Horse (Royal Canadians) en juin 1995. J'ai déménagé le Strathcona's à titre de brigade d'avant-garde de Calgary à Edmonton en 1996 et j'ai été déployé avec eux ainsi qu'avec une grande partie de la 1re brigade en Bosnie en 1997.

Pendant deux ans, à titre de chef d'état-major du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre, j'ai assisté à l'entraînement de la brigade et au déploiement d'opérations. À titre de commandant de l'équipe d'intervention en Bosnie, de juillet 2000 à avril 2001, j'ai eu l'honneur de commander des groupes de combat générés par le 2e et le 3ebataillons de la Princess Patricia's Canadian Light Infantry, la PPLCI.

Ensuite, à titre de directeur des opérations internationales au quartier général de la Défense nationale, j'ai participé au déploiement du 3e bataillon Princess Patricia's Canadian Light Infantry à Kandahar, en Afghanistan, dans le cadre de l'opération Apollo.

Depuis deux ans, j'ai commandé la brigade qui, selon moi, est la meilleure formation de combat des Forces canadiennes. Par conséquent, je pense que je suis bien placé pour parler de l'état de la brigade et des défis que nous devons relever.

Le 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada a été très occupé depuis 1996. Les soldats du 1er Groupe ont participé à diverses opérations internationales et ont été bien souvent à l'avant-garde des engagements du Canada, notamment lors de rotations multiples en Bosnie et en Afghanistan et lors d'opérations au Canada (inondations, tempêtes de verglas et incendies de forêt).

Environ 500 soldats appartenant à ma brigade sont retournés récemment à Kaboul, en Afghanistan, dans le cadre de la 2e rotation de l'opération Athena.

La brigade génère actuellement trois forces spéciales d'unités ainsi qu'un quartier général de brigades et un escadron des transmissions pour les opérations internationales des 6 à 18 prochains mois.

Le mécanisme qui fait fonctionner les forces opérationnelles est le Système de disponibilité opérationnelle gérée de l'Armée. La disponibilité opérationnelle gérée permet à la majorité des soldats d'avoir une idée claire de l'endroit où ils seront et de ce qu'ils feront au cours des prochaines années.

De plus, il faut souligner l'importance des mises sur pied communes et durables pour déployer des forces spéciales. La mise sur pied de la disponibilité opérationnelle gérée est une étape importante pour l'Armée.

En plus de générer des forces pour les opérations, le 1er Groupe-brigade participe activement aux initiatives de transformation de l'Armée. Bien que toutes les initiatives de transformation de l'Armée ont un impact sur le 1er Groupe-brigade, les trois plus importantes sont la Gestion de l'ensemble de la flotte, l'Examen du soutien de l'Armée et la mise sur pied de l'Unité du système de tir direct moyen. Ces activités sont importantes, car elles permettront à l'Armée d'être renouvelable et apte au combat.

L'importance du changement continu et la nécessité d'avoir des Forces prêtes et déployables sont des demandes très exigeantes pour tous les membres du 1er Groupe-brigade. L'équipe de commandement du 1er Groupe-brigade, qui comprend notamment les commandants d'unités et les sergents-majors de régiments, travaille à équilibrer les défis du jour avec les besoins de nos familles afin que tous les objectifs soient atteints tout en maintenant l'incidence des absences à un niveau acceptable. C'est une tâche difficile qui nécessite une attention particulière et constante.

La brigade est unique dans l'Armée canadienne, car nous avons des unités qui sont séparées géographiquement et qui sont situées à Edmonton et à Shilo; nous essayons de surpasser les effets de l'éloignement géographique. Cependant, nous avons la chance de bénéficier de l'appui inégalé des collectivités où nous vivons, soit à Edmonton et à Brandon.

En général, nous arrivons à bien gérer les incidences d'absence. Les plus grands défis résident aux niveaux des caporaux-chefs et des sergents. La pénurie de personnel formé et la quantité importante de personnes qui ont des missions dans des établissements de formation ont un effet important sur les membres de ces niveaux. Il en résulte des pénuries importantes de chefs dans les unités, alors même que nous accueillons beaucoup de nouveaux soldats.

Les optimistes diront que c'est une occasion unique pour les jeunes chefs qui sont restés dans les unités et que cela leur permet d'assumer plus de responsabilités, mais en réalité, il manque beaucoup de chefs expérimentés dans certaines unités et ce sont ces chefs qui peuvent former les jeunes soldats.

La brigade a prospéré depuis le déménagement de la majorité des unités à Edmonton à la fin des années 1990. Nous avons survécu à la forte demande opérationnelle qui nous a été imposée jusqu'à l'année dernière et nous nous dirigeons maintenant vers une méthode gérée de production de capacité de combat.

Toutes les initiatives de transformation de l'Armée nous permettront d'améliorer la manière dont nous travaillons et ces initiatives sont nécessaires si nous voulons accomplir des missions et être renouvelables à long terme.

Les pénuries de personnel et les tâches de haut niveau dans les rangs critiques continueront d'être problématiques, particulièrement au sein des bataillons de l'infanterie et dans les métiers d'appui de services de combats clés.

En dépit de toutes les demandes auxquelles doit faire face le 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada, les soldats de cette formation sont de vrais professionnels et continuent d'offrir des niveaux élevés d'aptitudes au combat pour le gouvernement du Canada. Tous les Canadiens peuvent être fiers du travail que nos soldats effectuent, tant ici au Canada qu'à l'étranger.

Le président : Merci, colonel.

Le colonel P.F. Wynnyk, commandant, Unité de soutien de secteur, Défense nationale : Bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs. Je vous remercie de me permettre de présenter un témoignage.

En tant que commandant du 1er Groupe de soutien de secteur, je voudrais vous donner un bref aperçu du rôle, des tâches et des responsabilités de la formation avant d'aborder les questions des infrastructures, du soutien aux familles et de la transformation.

Sur le plan de la structure et des responsabilités, les quatre groupes de soutien de secteur au sein de l'armée diffèrent considérablement les uns des autres. Pour ce qui est de la taille, du nombre d'unités et de la zone géographique, le 1er Groupe de soutien de secteur est le plus important des quatre et il comprend la plus grande partie des ressources de soutien logistique assignées au Secteur de l'ouest de la Force terrestre. Il offre du soutien depuis la tête des Grands Lacs jusqu'à la côte Ouest ainsi qu'au Secteur du Nord des Forces canadiennes.

Basé ici à Edmonton, le 1er Groupe de soutien de secteur se compose de 11 unités, y compris deux bases importantes soit celles d'Edmonton et de Shilo, et de deux plus petites unités de soutien de secteur situées à Chilliwack et Calgary.

Le commandant de l'une des plus importantes unités du 1er Groupe de soutien de secteur, c'est-à-dire l'Unité de soutien de secteur de la Base des Forces canadiennes d'Edmonton, est ici aujourd'hui. Le lieutenant-colonel Alan Markewicz sera heureux de répondre aux questions qui portent sur la base d'Edmonton.

Le 1er Groupe de soutien de secteur s'occupe de la mise sur pied, de la protection et du maintien en puissance des forces. Il assure le soutien logistique aux troupes sur le terrain lors des opérations de déploiement locales, nationales et internationales. Il fournit également des services déployables, des capacités de transmissions et des bases fixes où les militaires peuvent vivre et s'entraîner. Enfin, la formation offre au Secteur de l'Ouest de la Force terrestre une vaste gamme de services fixes, allant de l'approvisionnement aux services financiers, en passant par le soutien d'un aumônier et à la résolution de conflits. À l'heure actuelle, le 1er Groupe de soutien de secteur compte environ 2 100 membres, dont près de 600 sont des civils.

Dans l'Ouest canadien, comme dans le reste du pays, l'infrastructure militaire comprend un éventail de structures, depuis des manèges militaires construits dans les années 1900 — qui sont aujourd'hui des lieux historiques et nationaux — jusqu'à des installations à la fine pointe de la technologie moderne.

En ce qui concerne les manèges militaires, du temps, des sommes et des efforts considérables sont investis pour satisfaire aux lois fédérales et aux besoins actuels et futurs des unités de la Force de réserve au sein du Secteur de l'ouest de la Force terrestre. Parmi les divers projets entrepris, figurent le renforcement des structures des manèges contre les tremblements de terre dans la partie continentale de la Colombie-Britannique et l'obtention relativement récente de nouvelles installations destinées aux réservistes, ici à Edmonton.

Par suite du regroupement, au milieu des années 1990, de la plupart des unités du 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada ici à Edmonton et de celui plus récent des Forces terrestres régulières à Shilo, des améliorations considérables ont été apportées à l'infrastructure de ces bases, notamment par la réalisation d'importants projets de construction et la rénovation d'installations existantes.

Sur le plan des infrastructures, c'est Wainwright, qui abrite le Centre canadien d'entraînement aux manœuvres, qui constitue pour le Secteur de l'ouest de la Force terrestre le plus grand défi au cours des prochaines années. Compte tenu que le nombre de militaires et la quantité de matériel sur cette base va plus que doubler d'ici quelques années, il faudra construire de nouvelles installations et en rénover d'autres qui ont, pour la plupart, été bâties pendant et peu après la Deuxième Guerre mondiale.

Dans le cadre du programme de transformation de l'armée, les échéanciers sont serrés et dans certains cas il faudra trouver des solutions qui prévoient des infrastructures temporaires. Mon personnel de génie travaille d'arrache-pied pour suivre le rythme, mais le manque d'effectif tant chez les militaires que chez les civils pose des problèmes.

En tant que composante institutionnelle du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre, le 1er Groupe de soutien de secteur accorde une grande importance aux services et au soutien pour les familles. Toutes les bases et les unités de soutien de secteur sont dotées d'un Centre de ressources pour les familles des militaires qui vise à répondre à une vaste gamme de besoins. Ces centres, qui sont financés par le gouvernement fédéral, sont chargés de proposer diverses activités comme des services d'emploi et d'éducation, des ateliers de perfectionnement pour l'effectif, un soutien aux parents et des services de consultation d'urgence.

Lors des missions à l'étranger, les centres travaillent en étroite collaboration avec les détachements arrière des unités pour offrir aux familles et aux proches des militaires une autre façon d'obtenir les renseignements, l'aide et les conseils dont ils ont besoin.

Selon l'endroit et la demande, les Centres de ressources pour les familles des militaires peuvent aussi, moyennant des frais, offrir des services de garderies, de centres de jeunes et de centres préscolaires. Pour limiter les frais, les CRFM doivent organiser des activités de financement au niveau local et s'employer à entretenir de bons rapports avec les commanditaires et les donateurs.

Comme l'ont souligné le brigadier-général Beare et le colonel Grant, les questions qui ont trait à la transformation de l'armée ont une incidence considérable sur le Secteur de l'Ouest de la Force terrestre, et le 1er Groupe de soutien de secteur ne fait pas exception à la règle. En plus des changements requis à la base de Wainwright et qui prévoient, notamment, la mise sur pied d'une nouvelle unité de soutien de secteur, le 1er Groupe de soutien de secteur participe activement à l'examen du soutien de l'armée, à la gestion de l'ensemble du parc de véhicules, au soutien des infrastructures de l'Unité de tir direct moyen du 1er GBMC et à la constitution d'une nouvelle garnison de la Compagnie de police militaire.

On parvient à relever la plupart de ces défis, mais il faut surveiller de près la fréquence de déploiement de l'effectif et les rythmes opérationnels, particulièrement dans le cas des groupes professionnels clés et des officiers d'état-major. Il s'agit de la période de changement la plus importante depuis la création, il y a presque 10 ans, du 1er Groupe de soutien de secteur.

Pour terminer, je tiens à dire que les hommes et les femmes du 1er Groupe de soutien de secteur, tant les militaires que les civils, continuent d'offrir un appui de premier ordre au Secteur de l'Ouest de la Force terrestre et à l'armée, et ce, malgré les défis supplémentaires et le surcroît de travail occasionnés par le programme de transformation de l'armée. Les Canadiens peuvent être fiers de leur esprit d'initiative, de leur dévouement et de leur désir réel de préparer l'avenir.

Le président : Merci, colonel. Vous avez parlé du Centre de ressources pour les familles des militaires. Nous l'avons visité la dernière fois que nous sommes venus dans la région. Cette question nous intéresse beaucoup; nous allons d'ailleurs en discuter ce midi lorsque nous allons rencontrer le personnel et je suis donc heureux que vous l'ayez soulevée.

Le sénateur Atkins : Je tiens d'abord à dire que le comité est très fier des membres des forces armées.

Le Secteur de l'ouest de la Force terrestre a-t-il les ressources nécessaires pour bien remplir les missions qui lui sont confiées? Qu'est-ce que vous n'avez pas été en mesure d'accomplir à cause d'un manque de financement?

Le bgén Beare : Pour ce qui est des ressources, nous avons effectué un virage. Au cours des années 1990, on considérait les ressources strictement sur le plan financier. Aujourd'hui, on parle de ressources humaines, temporelles, matérielles et financières.

Le travail que nous effectuons dans l'armée, dans le cadre de nos activités quotidiennes dans l'Ouest du pays — gérer l'effectif, entraîner les soldats, former de nouveaux chefs, s'occuper de l'infrastructure, investir ou restructurer le capital, se doter de nouveau matériel et apprendre aux soldats à l'utiliser — n'est que du travail de maintien.

Si on ajoute à cela le programme de transformation, qui prévoit notamment la création d'un centre de formation de calibre international à Wainwright, le futur Centre canadien d'entraînement aux manœuvres, la réorganisation de la base de mise sur pied des forces de notre unité dans le but de rationaliser les capacités matérielles entre les tirs indirects et les armes, les ingénieurs et les sapeurs, la transition du Lord Strathcona's Horse au système de tir direct et la création de nouvelles forces pour les opérations à l'étranger — nous manquons d'effectif en tout premier lieu. Pour ce qui est de gérer notre base de soutien ainsi que de transformer et reconstituer nos forces opérationnelles, nous ne parvenons pas toujours à accomplir tout ce que nous voulons.

Pour parler d'argent, le montant de référence pour l'armée dans l'Ouest du pays était d'environ 160 millions de dollars en 1995; il s'élève aujourd'hui à 180 millions. Si on tient compte de l'inflation au cours de ces dix années, il faudrait avoir plus de 200 millions de dollars pour disposer du même pouvoir d'achat aujourd'hui. Donc, nous n'avons pas nécessairement toujours eu l'argent qu'on aurait voulu avoir.

Je dois nuancer mes propos, car lorsque nous avons eu besoin de ressources pour exercer nos activités cruciales, c'est-à-dire constituer des forces opérationnelles capables d'effectuer le travail, nous n'en avons jamais manqué. Je peux dire sans réserves — c'était vrai par le passé et ce le sera dans l'avenir — qu'avant d'engager des soldats dans des opérations, on leur fournit le meilleur matériel dont on dispose. Ils reçoivent la meilleure formation qu'on peut leur offrir à ce moment-là et ils sont toujours bien dirigés.

On ne parvient pas à accomplir tout ce qu'on voudrait, mais on ne maintient pas le statu quo. On a fait des progrès sur tous les fronts, mais pas nécessairement aussi rapidement qu'on l'aurait voulu.

Le sénateur Atkins : Vous êtes responsable de toutes les bases dans l'Ouest canadien à partir du Manitoba. Il n'y a pas si longtemps d'ailleurs une des bases a été déménagée de Calgary à Edmonton. L'Ouest du pays compte-t-il un trop grand nombre de bases?

Le bgén Beare : Sénateur, je ne suis responsable que des bases militaires dans l'Ouest du pays. Il faut que ce soit clair.

Le sénateur Atkins : C'est pourquoi je pose la question.

Le bgén Beare : Si c'était une question d'efficience, il n'y en aurait qu'une.

Mais, compte tenu de notre réalité géographique, il ne serait pas efficace d'avoir une seule base militaire pour desservir quatre fuseaux horaires couvrant quatre provinces et demie. Il est nécessaire d'avoir une présence régionale pour nous permettre d'offrir des services d'appui aux unités déplacées et aux unités régionales comme celles de la Force de réserve ainsi qu'à la base de Shilo dont la taille a quasiment doublé au cours de la dernière année.

Je ne peux pas dire que l'ouest du pays compte un trop grand nombre de bases des Forces canadiennes. Il y a celles de Wainwright, Suffield, où se trouve l'Unité d'entraînement de l'Armée britannique, Shilo, un centre de soutien à Calgary et un autre à Chilliwack, ainsi que la garnison d'Edmonton. J'estime que ce n'est pas trop.

En réalité, comme toutes ces installations nous appartiennent, nous devons les entretenir et la rénovation de ces infrastructures est coûteuse.

Le sénateur Atkins : À combien de missions à l'étranger le Secteur de l'ouest de la Force terrestre a-t-il été affecté au cours des trois dernières années? Quelle incidence ont eu ces déploiements sur vos unités et votre effectif?

Le bgén Beare : Je vais répondre puis je vais passer la parole au colonel Grant parce que ce sont ses soldats et ceux du colonel Wynnyk qui ont été déployés.

J'ai précédé le colonel Grant dans les fonctions de commandant du 1er Groupe-brigade avant d'être envoyé en Bosnie pendant un an puis de réintégrer le Secteur de l'Ouest. À l'été 2001, j'ai joint les rangs du 1er Groupe-brigade qui était revenu d'une mission au Kosovo en 1999 — après avoir participé aux ROTO 6 et 6+ en Bosnie, une mission au cours de laquelle le contingent est passé de 1 000 à 1 400 soldats — et de la ROTO 7. Près de 3 200 soldats sur les 4 000 du 1er Groupe-brigade avaient été déployés au cours de ces deux années, soit de 1999 à 2001, et je venais à peine de prendre les commandes.

Si vous vous souvenez de l'été 2001, rien ne laissait présager le déploiement de nouvelles missions à l'étranger. Puis, les attentats du 11 septembre sont survenus. Après cette date, nous avons formé pratiquement sans préavis le groupement tactique du 3 PPCLI pour une mission au Kandahar. Nous avons dirigé les opérations du Sommet du G8. Par la suite, nous avons participé à la ROTO 11 en Bosnie, puis à la ROTO 12. Après le retour au pays de ces soldats, il y a un an et demi seulement, 600 hommes et femmes ont été déployés pour prendre part à l'opération Athena.

Au cours de cette période, nous n'étions pas en mesure de prévoir à quel endroit envoyer nos militaires en raison du Sommet du G8, de l'opération Apollo et de la récente intervention à Kaboul. Donc, nous avons dû travailler très fort pour reconstituer des éléments de mission cohésifs afin de recréer les équipes qu'on allait déployer. La mission en Bosnie ne posait pas de problème parce qu'elle était prévisible, mais les autres missions sont venues s'ajouter à tout cela.

L'incidence, comme le colonel Grant l'a dit, c'est que la fréquence de déploiement du personnel, et non le rythme opérationnel, a augmenté. Les soldats doivent recevoir une formation avant d'être déployés. La façon de procéder est la suivante : le soldat est formé; il est déployé; il revient à la maison; il retourne à ses activités militaires; on le forme de nouveau ou il donne de la formation à ses collègues. La fréquence du déploiement du personnel était intense et dépassait nos capacités.

En résumé, sénateur, nos activités allaient au-delà de nos capacités.

Le sénateur Atkins : Donc, il serait juste de dire que les ressources étaient insuffisantes.

Le bgén Beare : Nos ressources étaient nettement insuffisantes et nous n'étions pas en mesure de suivre la fréquence des déploiements et de donner suite à la transformation. Donc, maintenant que nous transformons nos procédés, il faut s'assurer de ne plus jamais utiliser nos ressources au-delà de leurs capacités.

Si vous le permettez, je vais céder la parole au colonel Grant.

Le col Grant : Sénateur, je vais vous expliquer brièvement ce qui se passe lorsqu'un militaire revient au pays après une mission à l'étranger, et je voudrais préciser que c'est aux sous-officiers supérieurs, aux caporaux-chefs et aux sergents que je faisais allusion dans mon exposé.

Le sénateur Atkins : Très bien.

Le col Grant : Lorsque les soldats reviennent au pays, ils sont protégés pendant une période d'environ 90 jours. Au fur et à mesure que les 90 jours passent, on les rend de plus en plus disponibles pour effectuer d'autres missions et déploiements loin de leur maison mère. En raison des exigences du système d'instruction, une fois la période de 90 jours terminée, bon nombre des militaires qui ont passé deux mois à se préparer pour un déploiement loin de leur famille et qui ont été déployés pendant six mois se voient ensuite confier des missions à Wainwright, Shilo et peut-être même aussi loin qu'à Gagetown.

Le problème pour ces soldats qui se rendent à un endroit comme Gagetown, loin de la maison, pour donner un cours de deux ou trois mois, c'est qu'ils n'ont droit à aucune indemnité au cours de cette période. Ils n'ont pas les avantages qu'ils auraient s'ils étaient à l'étranger; pourtant, ils sont loin de leur famille. Le défi consiste à composer avec le stress des familles pendant que les militaires sont affectés à des tâches ailleurs au pays.

Il faut veiller à ne pas déployer toujours les mêmes militaires loin de leur famille et faire en sorte de parvenir à un équilibre entre le temps que les soldats passent à la maison et celui qu'ils passent à l'extérieur de leur foyer. Il n'y a pas de doute que c'est un défi.

Le président : On nous a parlé d'un modèle selon lequel il serait raisonnable de s'attendre, au cours d'une période de 36 mois, à ce qu'un soldat soit en mission pendant six mois, qu'il reçoive ou donne de la formation pendant quatre mois et qu'il soit à la maison le reste du temps.

Croyez-vous que c'est possible, raisonnable et réalisable? Je devrais d'abord préciser que c'est le général Caron qui nous en a parlé lors de sa comparution devant le comité il y a trois semaines.

Le bgén Beare : Sénateur, vous faites allusion à la disponibilité opérationnelle gérée qui est un modèle dont on ne disposait pas dans les années 1990. Pour se préparer à une mission, on faisait deux choses.

On ne gérait pas la taille des forces. On s'engageait à participer à une mission autant qu'on le pouvait au cours d'une période. À un moment donné, 1 200 ou 1 400 soldats étaient déployés en Bosnie, un nombre qu'une armée de notre taille ne peut pas soutenir. La disponibilité opérationnelle gérée limite les forces qu'on peut déployer à l'intérieur de chaque période de six mois.

L'autre caractéristique de la disponibilité opérationnelle gérée, c'est de prévoir à quel moment au cours de cette période de trois ans chacune des 12 unités de manœuvre peut être engagée dans des opérations par opposition à ce qui se faisait par le passé et qui se limitait pratiquement à prévoir les missions en Bosnie.

Si on s'en tient au plan de disponibilité opérationnelle gérée, on obtient un certain nombre de résultats : l'un consiste à prévoir quand et où un militaire participera à des opérations. Nous ne savons pas de quelle mission il s'agit, mais nous savons qu'il faut être prêt. Cela limite la contribution de nos forces à un niveau qui est soutenable et empêche de dépasser le seuil de 1 000. Donc, pour répondre à la question, oui il est possible de faire preuve de plus de rigueur et d'avoir une vie plus organisée à la maison.

Mais la disponibilité opérationnelle gérée ne tient pas compte de tout ce que nous faisons. Ce modèle nous dit quand les militaires prennent part à des opérations, mais ne considère pas la portée des autres activités qu'ils exercent dans leur vie.

Comme le colonel Grant l'a souligné, nous recrutons et entraînons continuellement de nouveaux soldats. Nous avons besoin de les former. Nous préparons nos propres chefs de file. C'est long. Nous sommes en transformation. Il faut du temps et des efforts pour se restructurer et se rééquiper. Tout cela exige du temps et du travail que nous tentons, dans la mesure du possible, d'effectuer depuis la base principale, mais ce ne sera pas toujours faisable.

Le président : Qu'est-ce qui m'a échappé? Le général Caron nous a dit qu'il pouvait maintenir deux groupes de 1 000 soldats indéfiniment et que ce nombre pouvait grimper à 3 000 une fois tous les deux ans, avec des affectations de six mois en situation dangereuse et une formation de quatre mois.

Êtes-vous en train de nous dire qu'il y a autre chose, en plus de la période de quatre mois, que nous n'avons pas comprise ou que le comité n'a pas saisie?

Le bgén Beare : Non, ce que j'essaie de dire, c'est que ces quatre mois d'activité ainsi que le déploiement visent une opération. Quand un militaire ne se trouve pas dans cette fenêtre, il est tout de même occupé à faire toutes ces autres choses que l'armée effectue jour après jour.

Le président : Chez lui ou au loin?

Le bgén Beare : Chez lui et en partie au loin.

Le président : C'était pourtant là l'entente : seulement quatre mois au loin et six mois en situation dangereuse.

Vous laissez entendre que les soldats sont éloignés de leur famille pour effectuer d'autres tâches, en plus de ces quatre mois.

Le bgén Beare : Si on regarde ce que nous avons fait par le passé, il a fallu choisir des chefs dans nos unités et les affecter dans nos écoles pour qu'ils forment nos soldats ou qu'ils nous forment. Si nous n'augmentons pas les ressources de nos écoles et leur capacité de formation, nous continuerons d'observer un certain taux d'absentéisme dans nos unités — je ne parle pas d'une unité dans son ensemble, mais des personnes qui doivent soutenir nos écoles. Ce sera une particularité de la vie militaire, monsieur le sénateur.

Pour devenir adjudant, un sergent doit aller à Gagetown pour suivre sa formation de deux mois et il fera un apprentissage à distance ici, à la garnison. Les militaires continueront de s'absenter à des fins de perfectionnement, d'étude et d'entraînement, mais ces absences devraient être modérées si on les intègre dans ce cycle d'état de préparation géré, de manière à ne pas envoyer un militaire à l'école, à l'entraînement et dans un théâtre d'opération puis le rappeler et l'envoyer de nouveau à l'école.

Le président : Eh bien, il faudra revoir le général Caron à ce sujet, parce que tout était inclus dans cette période de quatre mois.

Il existe une troisième option, général Beare, que vous n'avez pas mentionnée; il s'agit de ralentir la cadence des opérations. Si vous diminuez cette cadence et si vous n'avez qu'à maintenir 1 000 personnes de façon continue, vous pouvez faire beaucoup de formation et effectuer bien d'autres tâches que vous seriez incapable de faire autrement.

Le bgén Beare : Oui, et vous avez raison. Dans l'intervalle de 12 mois qui s'est écoulé entre l'été 2003 et l'été 2004, environ 6 000 de nos soldats ont été déployés en Afghanistan ou en Bosnie. Depuis l'été 2004 jusqu'à l'été 2005, ce chiffre est tombé à 2 000, ce qui nous permet de nous régénérer et de récupérer au pays.

À compter de février 2006, compte tenu de nos points forts et de toutes les autres activités que nous effectuons, nous prévoyons pouvoir maintenir deux forces opérationnelles de 1 000 hommes tous les six mois.

Je dois vous dire, sénateur, que c'est ce que veulent nos soldats; ils veulent être là.

Le président : Chaque fois que nous leur parlons et que je suggère de ralentir la cadence, ils serrent les dents et ils se disent « Encore une idée de politicien ». Je comprends très bien cela. Si vous entrez dans les forces armées, vous voulez entendre le son des canons.

Cela dit, si le nombre de soldats est insuffisant, vous devez trouver une façon de régler le problème.

Le sénateur Atkins : Colonel Grant, pouvez-vous nous parler davantage de l'expérience en Afghanistan, en commençant par la préparation de la brigade avant son déploiement, ce que vous avez constaté là-bas et les résultats obtenus depuis votre retour?

Le col Grant : Sénateur, vous parlez de la période lorsque le troisième bataillon a été déployé en 2002.

Je peux vous parler des préparatifs du point de vue du QGDN, parce que c'est là où j'étais à cette époque, puis je demanderais au général Beare de parler de l'entraînement de l'unité sur le terrain.

J'étais l'officier responsable de la planification de ce déploiement au QGDN, et il ne pouvait pas y avoir pire emplacement que l'Afghanistan. Nous cherchions à voir comment nous allions pouvoir monter une telle organisation et la déployer à l'étranger, dans un emplacement passablement austère, et c'était le pire exercice que le Collège d'état- major aurait pu imaginer.

C'était et c'est encore un endroit difficile à atteindre. Il n'y a que deux moyens d'y arriver : en survolant le Pakistan ou en traversant les pays qui se trouvent au nord. Ni l'une ni l'autre de ces façons n'est facile.

Par contre, nous avons cherché à voir quel genre de contribution le Canada pouvait apporter à la campagne contre le terrorisme à cette époque précise. Parce que les Américains s'introduisaient dans le sud de l'Afghanistan avec des forces légères, nous avons choisi une unité qui serait en mesure de travailler de concert avec la 82e Division aéroportée et la 101e Division d'assaut aérien, entre autres.

Le 3e Bataillon était non seulement l'unité qui était la plus prête, mais c'était aussi l'unité qui convenait le mieux à ce type d'opération.

Le déploiement sur le théâtre des opérations s'est très bien déroulé sur tous les plans, mais nous le devons en grande partie au bon vouloir des Américains qui ont assuré le transport aérien stratégique de nos troupes. Il n'y a aucun doute à ce sujet.

Ils ont déployé non seulement le 3e Bataillon, mais tous ses équipements, y compris les Coyote du Lord Strathcona's Horse, qui se sont avérés extrêmement utiles pour protéger le terrain d'aviation de Kandahar.

Si je compare l'Afghanistan de 2001, lorsque nous avons commencé à planifier le déploiement, à ce que le pays ressemblait lorsque j'y suis allé en novembre dernier, des changements énormes se sont produits. C'est un pays qui s'améliore de jour en jour, et j'ai été extrêmement surpris par la transformation qu'a subie ce pays par suite du travail fait par les Américains et nos alliés de l'OTAN au cours des deux dernières années.

Le sénateur Atkins : J'aimerais passer à un autre sujet maintenant.

On nous a dit que les Forces canadiennes n'avaient pas les ressources nécessaires pour former les 5 000 nouveaux membres de la force régulière et les 3 000 nouveaux réservistes qui s'ajouteront aux effectifs, comme l'a annoncé le gouvernement, et que l'armée envisage d'établir une école d'entraînement au combat dans chaque secteur. Le cas échéant, quelles seront les incidences de ces nouvelles écoles sur votre capacité à préparer des opérations à l'étranger?

Le bgén Beare : Comme je l'ai dit un peu plus tôt, nous nous concentrons actuellement sur trois grands aspects : soutenir, transformer et régénérer de nouvelles forces opérationnelles. Le commandant de l'armée est en train de planifier, au sein des FC, la croissance et l'expansion de la force, si bien qu'il y a une quatrième activité à laquelle nous, dans le secteur, avons seulement commencé à réfléchir.

Aucune planification officielle n'a encore eu lieu dans les secteurs en vue d'une telle expansion, parce que nous ne savons pas à quel rythme ni à quel endroit cette expansion aura lieu, ni quels types de soldats seront visés par une telle mesure.

Cela nous ramène à ce que le sénateur Kenny a fait valoir, c'est-à-dire que c'est une question d'effectifs et de tâches à réaliser au fil du temps. La croissance est un travail, qui exige un leadership. La croissance exige un soutien, une infrastructure, de l'équipement et du matériel. Il faut combler tous ces besoins si nous devons prendre de l'expansion au rythme qu'on nous demandera de prendre.

Nos options ne sont donc pas illimitées; nous devrons tenir compte de l'armée que nous avons à l'intérieur du cadre de l'état de préparation géré et déterminer combien de ces ressources opérationnelles doivent être consacrées au soutien de cette croissance.

Nous n'avons pas encore de données précises à ce sujet, monsieur le sénateur. Nous attendons de savoir à quel rythme et à quel endroit se fera cette croissance et quelles ressources humaines de notre armée de terre seront utilisées pour accélérer cette croissance.

Le sénateur Atkins : On nous dit qu'au cours des cinq prochaines années, la majorité des recrues seront affectées à l'armée.

J'ai deux questions. La première porte sur l'infrastructure, à savoir si vous obtiendrez une juste part du recrutement, et comment se passe le recrutement. Vous avez un programme de recrutement normal, mais vous devrez probablement accélérer les choses. Êtes-vous optimiste à cet égard?

Le bgén Beare : Sénateur, avez-vous parlé ou parlerez-vous au Groupe de recrutement des FC?

Le sénateur Atkins : Oui.

Le bgén Beare : Depuis trois ans, je crois comprendre qu'il a atteint tous ses objectifs de recrutement, et il a donc montré qu'il était capable de répondre à la demande d'aujourd'hui. Je ne sais pas s'il peut faire davantage, mais j'aime penser qu'il y a un plus grand nombre de Canadiens et de Canadiennes qui peuvent devenir des soldats, des marins ou des aviateurs.

Nous savons que la croissance vise à renforcer nos unités de campagne de manière à ce que nous puissions prendre deux compagnies pour produire deux compagnies de carabiniers à déployer, alors qu'il nous en faut trois pour pouvoir en déployer deux aujourd'hui. C'est le premier avantage que nous espérons retirer de la croissance.

Le deuxième objectif consiste à doter en personnel notre système d'instruction et toutes les institutions qui assurent le soutien de nos militaires, pour que le sergent Tremblay n'ait pas à quitter son bataillon pour aller enseigner à Gagetown. Il faut donner à nos écoles les ressources dont elles ont besoin pour assurer cette formation elles-mêmes.

Je crois que nous pouvons augmenter nos effectifs, que nous pouvons attirer un plus grand nombre de recrues. Je crois que nous avons des ressources internes qui nous permettent de réaliser cette croissance, mais il faudra délester d'autres activités. Certains membres, comme ceux des forces opérationnelles ou des réserves, devront servir nos objectifs de croissance et être affectés à la formation — essentiellement pour transformer des civils en soldats de tout grade.

Ce ne sont pas tous des carabiniers. Les métiers les plus en demande sont ceux qui sont liés au soutien logistique au combat. La formation se donne à Borden. Dans quelle mesure cette formation est offerte à temps partiel ou à temps plein, je ne pourrais le dire.

Pour ce qui est de l'infrastructure que nous avons ici, dans l'Ouest, si on me donnait 1 000 civils demain pour en faire des soldats, je trouverais bien le moyen de le faire. Je trouverais le moyen.

Le sénateur Atkins : Je suis ravi de l'entendre.

La dernière fois que nous étions ici et que nous nous sommes entretenus avec les responsables de l'infanterie, ils nous ont dit de façon catégorique qu'ils avaient besoin d'être soutenus par des chars. Cette philosophie a-t-elle dû être modifiée, et l'infanterie accepte-t-elle le nouveau rôle qu'assument maintenant le Lord Strathcona et d'autres unités?

Le bgén Beare : Je vais laisser le colonel Grant répondre à cette question, parce qu'il a porté un béret noir avant de devenir un officier général.

Le col Grant : J'ai, dans mon bureau, une photographie du tout premier char Leopard qui a été livré au Canada. J'étais chef d'équipage lorsque j'étais sous-lieutenant à Gagetown, alors je connais bien les Leopard.

Je dois dire que les Leopard n'ont jamais été déployés outre-mer. C'était un héritage de la guerre froide. Ils faisaient partie de l'armée qui devait se battre en Europe contre l'Union soviétique de jadis.

Si vous regardez les changements qui se sont produits dans le monde, notamment sur le plan de la sécurité, le char n'est pas un outil que nous utiliserions régulièrement dans le cadre des missions que nous réalisons outre-mer.

Le Lord Strathcona's Horse — que vous visiterez plus tard ce matin — tente une expérience intéressante, qui consiste à réunir des systèmes d'armes, le système de canon mobile lorsque ce dernier sera livré, un système antiblindé moderne doté d'un personnel d'infanterie et un véhicule à usages multiples qui est actuellement basé sur le système d'armes de défense aérienne que nous avons au Canada.

Est-ce que tout le monde est en faveur de ce changement? Pas du tout. Cette unité assurera-t-elle une capacité de combat unique et valable dans les années à venir? Je crois que oui. Il faudra toutefois relever un défi de taille, c'est-à- dire convaincre tout le monde que cette transformation est pertinente.

En novembre dernier, j'ai vu ces systèmes d'armes fonctionner ensemble dans le cadre d'un essai. Nous continuerons d'élaborer des tactiques et des doctrines à cette fin au cours des années à venir. Je crois que nous finirons par avoir un système formé d'un ensemble de systèmes que nous pourrons déployer régulièrement outre-mer pour assurer à l'infanterie un meilleur soutien que ce que nous pouvons lui offrir aujourd'hui.

Je suis optimiste. Je crois que certains soldats — pas tous les soldats — sont emballés par cette façon de faire, mais nous avons encore à vendre l'idée. Nous devons prouver aux soldats de l'armée que ce système les servira bien. Nous n'en sommes pas encore là.

Le sénateur Atkins : Vous avez dû avoir des discussions fort intéressantes dans le mess avec les officiers d'infanterie.

Le col Grant : Monsieur, il ne fait aucun doute que le fait d'avoir un char de 45 tonnes à côté de vous sur un champ de bataille vous donne un étrange sentiment de bien-être.

Pour dire vrai, si vous comparez le Leopard aux chars qui sont maintenant utilisés partout dans le monde, vous constatez que le Leopard n'est plus un char de combat principal. Il n'a pas le blindage, ni la résistance nécessaires pour fonctionner dans des théâtres d'opérations comme en Irak, où les Américains ont des M1 et les Britanniques ont des Challenger. Ces chars sont deux fois plus gros que le Leopard, qui n'est plus un système de combat efficace aujourd'hui. Il fallait le remplacer et je crois que nous sommes sur la bonne voie.

Le président : J'essaie seulement de comprendre une chose. Les Leopard n'ont pas été envoyés nulle part.

Ce qui rend le comité perplexe, c'est lorsque nous allons en mission et que nous travaillons avec nos alliés, qui ont des blindés lourds; comment nos soldats font-ils pour travailler avec ce matériel et que faites-vous pour combler cette lacune?

Le bgén Beare : C'est une bonne question. Sénateur, à l'heure actuelle, nous en sommes toujours à nous conditionner, à nous former et à nous préparer à mener des opérations avec des forces multinationales.

Nos systèmes de combat sont limités depuis l'époque où j'étais officier subalterne ou soldat. Nous n'avons pas d'hélicoptère d'attaque, mais nous nous entraînons pour travailler avec des hélicoptères d'attaque. Nous n'avons pas toute la puissance de nos alliés, mais nous nous entraînons pour travailler avec toutes les formes de puissance aérienne. Notre marine n'a pas de force amphibie, mais nous nous entraînons pour être en mesures de traverser une plage aux côtés de nos homologues du Corps des Marines des États-Unis.

De même, si on s'en tient uniquement à notre capacité de combat, il est clair qu'il faut avoir reçu un entraînement et avoir travaillé aux côtés de nos alliés pour être en mesure de faire ces choses.

Si vous regardez la transformation qu'a subie l'armée américaine, elle avait une force lourde, elle avait une force légère, mais rien entre les deux. Les Américains ont donc créé cette force intermédiaire, qui correspond vraiment à ce que l'armée canadienne a fait depuis des décennies, pour combler ce vide. C'est ce qui fonctionne en Irak aujourd'hui, à l'exemple de notre véhicule blindé léger.

Nous sommes en train de construire un système formé d'un ensemble de systèmes que nous pourrons déployer et soutenir, qui nous dotera d'une puissance de feu nécessaire pour soutenir les membres de notre infanterie dans les scénarios de guerre à trois volets que nous connaissons aujourd'hui et que nous connaîtrons dans l'avenir. Nous utiliserons ce système au lieu du Leopard, que nous n'avons pas utilisé, sauf au Kosovo, durant ses trois décennies de services.

Si nous avions tout l'argent et toutes les ressources imaginables, nous aurions une force lourde, légère et moyenne, mais ce n'est pas le cas. Nous aurons une force d'envergure moyenne, qui nous donnera une puissance de feu pour combattre d'autres forces d'envergure moyenne.

Le sénateur Forrestall : Ces deux messieurs ont déjà couvert beaucoup de terrain. Je peux peut-être poursuivre avec cette dernière réflexion.

Est-ce que nous effectuons des entraînements conjoints avec les Américains, en particulier dans l'utilisation de cet équipement d'envergure moyenne? Est-ce que nous nous entraînons ici, en Amérique du Nord?

Le col Grant : Sénateur, des troupes canadiennes doivent rejoindre, vendredi, une base du Corps des marines américains, en Californie, en vue de prendre part à des opérations en montagne avec un bataillon de la marine américaine. Le mois prochain, une autre compagnie va participer à des opérations en milieu urbain avec un bataillon de la marine américaine qui s'apprête à se rendre en Irak.

J'envoie régulièrement des troupes à Fort Lewis, dans l'État de Washington, où elles s'entraînent avec une équipe de combat de la brigade Stryker américaine — l'équivalent américain du 1er Groupe — brigade mécanisé. Nous nous entraînons régulièrement avec les Américains.

Au cours de la dernière année, j'ai essayé d'organiser un échange entre des petites unités qui appartiennent à ma brigade et à l'équipe de combat de la brigade Stryker, à Fort Lewis. Le problème, c'est que l'équipe de combat vient à peine d'arriver d'Irak. Ils sont en train de former la prochaine brigade qui doit s'y rendre.

Je me suis entretenu avec le commandant de la brigade américaine, et il s'est montré très enthousiaste à l'idée de s'entraîner avec le 1er Groupe-brigade. Je pense qu'au cours des prochaines années, nous allons participer à un nombre croissant d'exercices d'entraînement avec les forces moyennes équivalentes américaines.

Le sénateur Forrestall : C'est bien. C'est une excellente idée. Toutefois, est-ce que notre système se prête à ce genre de chose?

Le bgén Beare : Sénateur, cette approche n'a pas été institutionnalisée, mais plutôt intégrée au système. Il est question ici d'initiatives, de possibilités qui sont exploitées par les commandants et leurs équipes à tous les niveaux.

En tant que professionnels, nous voulons établir des liens plus étroits avec les équipes de combat de la brigade Stryker américaine, et ce, dans le but de parfaire nos connaissances et nos compétences. Malheureusement, les liens institutionnalisés qui existent entre les gouvernements canadien et américain ne se sont pas encore concrétisés à notre niveau.

Le sénateur Forrestall : Mais c'est la voie dans laquelle nous devons, à votre avis, nous engager?

Le bgén Beare : Oui. En fait, l'armée a déclaré publiquement, à plus d'une reprise, qu'elle souhaite établir des liens plus étroits avec ses homologues américains.

Il y a un groupe de travail canado-américain des états-majors de l'armée qui se réunit tous les ans. Il est présidé par un officier deux étoiles, et il s'efforce de réaliser cet objectif. Le coprésident canadien devrait être le commandant du Système de la doctrine et de l'instruction de la Force terrestre, c'est-à-dire le général Natynczyk, qui vient tout juste d'être nommé à ce poste.

Le sénateur Forrestall : Je remarque que vous avez tous les trois vos insignes ailées. Qu'en est-il de la formation des parachutistes dans les forces en général?

Franchement, la seule chose qui m'a impressionné, c'est l'enthousiasme manifesté par ceux qui participaient à l'entraînement, à Trenton.

Concernant la composition de vos effectifs, avez-vous besoin — pour avoir une force équilibrée — de parachutistes?

Le bgén Beare : Je vais vous répondre brièvement, et je vais ensuite demander au colonel Grant de vous parler du groupe de travail sur les forces légères.

Avons-nous besoin d'une capacité d'aérolargage? Oui. Nous en avons également besoin pour donner de l'assurance à nos soldats, eux qui acceptent d'être largués dans l'espace libre, de mettre leurs espoirs en Dieu, de faire confiance à celui qui prépare les parachutes. Oui, nous en avons besoin.

Pour ce qui est des autres détails, je vais demander au colonel Grant de vous dire où nous en sommes.

Le sénateur Forrestall : Est-ce que l'on assure toujours la rotation des troupes au sein des FOI, les forces opérationnelles interarmées?

Le bgén Beare : Oui. Toutefois, les FOI 2 constituent une question tout à fait distincte.

Le sénateur Forrestall : Je sais. J'en suis pleinement conscient. Je me demande tout simplement où ils vont chercher leurs troupes, s'ils regardent du côté des forces dans leur ensemble.

Le bgén Beare : Ils regardent du côté des forces dans leur ensemble, sénateur. Manifestement, les plus durs pensent qu'ils vont être les premiers à joindre les rangs, sauf que, dans les faits, ce n'est pas toujours le cas. Je vais laisser le colonel Grant vous dire où nous en sommes.

Le sénateur Forrestall : Je suis l'un de ceux qui a regretté le départ des unités, il y a quelques années de cela.

Le bgén Beare : J'étais là, sénateur.

Le président : Sénateur, le colonel Grant va vous parler de la formation des troupes aéroportées.

Le col Grant : Sénateur, vous avez posé une question au sujet des forces légères et des opérations de parachutage. L'armée est en train de former ce que nous appelons des forces légères — elles n'utilisent pas des véhicules blindés de façon régulière. Le parachutage constitue un volet important de leur rôle, mais le groupe s'affaire à évaluer les besoins de ces forces légères.

Il y a trois bataillons dans l'armée canadienne qui sont maintenant considérés comme des forces légères. Ils ne sont pas équipés de véhicules blindés, et le saut en parachute constitue l'un des moyens qui pourrait être utilisé pour les intégrer à une zone de combat. Sinon, ils pourraient se déplacer à pied, au moyen de véhicules légers de patrouille ou via hélicoptère.

Le groupe de travail essaie de doter l'armée d'une stratégie qui permettra de lui indiquer où concentrer ses efforts. La brigade que je dirige, et cela s'applique aussi bien à l'infanterie qu'aux éléments de soutien — l'artillerie, qui a pour tâche de fournir un appui-feu indirect, et les ingénieurs, qui procèdent à la reconnaissance des mines et au déminage — a droit régulièrement à des séances de formation sur les techniques de parachutage, puisque celles-ci favorisent le développement de capacités de combat qui pourraient m'être utiles.

Bien que le parachutage constitue une méthode d'entrée importante, il contribue pour beaucoup, comme l'a indiqué le général Beare, au moral et au bien-être des soldats qui considèrent cette technique comme un défi. C'est pour cette raison qu'ils s'enrôlent dans les forces. Ils veulent des défis additionnels.

Toutefois, le parachutage n'est pas la seule méthode d'entrée qui existe. Il y en a d'autres : mentionnons les hélicoptères, les véhicules légers de patrouille et, au besoin, la marche.

Le sénateur Forrestall : Merci de la réponse.

Puis-je passer à la souveraineté et au Nord? Organisez- vous des exercices d'entraînement dans le Nord? Sont-ils utiles? Pourriez-vous faire encore plus à ce chapitre? Quel genre de ressources vous faudrait-il pour améliorer ces exercices? Je ne fais pas allusion au degré de formation que reçoivent des troupes, mais plutôt à la présence d'une force nationale dans le Grand Nord. Cette question va devenir un enjeu majeur dans les années à venir.

Pouvez-vous répondre à cette question?

Le bgén Beare : Oui, et je vais ensuite demander au colonel Grant de vous dire ce que nous faisons avec les troupes.

Le Nord, comme nous le savons, est immense. Toute formation qui s'y installe voit sa marge de manœuvre automatiquement restreinte sur le plan tactique.

Le sénateur Forrestall : Pardon?

Le bgén Beare : Sa marge de manœuvre est restreinte sur le plan tactique. Dès que vous envoyez une compagnie de carabiniers dans une localité éloignée du Nord, elle y est fixée en permanence. Sa sphère d'influence se limite à la zone qu'elle peut parcourir à pied.

Le Nord est une région très vaste. Les Forces canadiennes doivent être en mesure de décider et de déterminer à quel moment elles peuvent envoyer des troupes sur le terrain pour y assurer une présence.

En tant que soldats, nous n'avons pas la capacité d'exercer une influence stratégique sur le Nord. Nous pouvons uniquement nous assurer que nous disposons troupes qui peuvent être déployées dans le Nord, au besoin. Une fois sur le terrain, notre sphère d'influence se limite à la zone que nous effectivement pouvons parcourir à pied.

Nous sommes tenus, périodiquement, de nous rendre dans le Nord, ou encore de prendre part à des exercices d'entraînement dans le Nord pour assurer notre présence et maintenir les compétences qui nous permettent d'opérer dans l'Arctique. Le colonel Grant va vous en dire plus à ce sujet.

Le col Grant : Sénateur, il y a deux semaines, environ 120 soldats sont revenus du Nord. Ils ont passé environ trois semaines dans l'Extrême-Arctique où ils se sont entraînés avec les Rangers canadiens présents dans le Nord.

Comme l'a indiqué le général Beare, cet entraînement a lieu régulièrement, soit une fois l'an. Nous envoyons l'équivalent d'une compagnie dans le Nord. Dans ce cas-ci, les soldats venaient du Régiment du génie et du Lord Strathcona's Horse. Ce ne sont pas seulement les membres de l'infanterie qui s'y rendent. Nous procédons à un roulement pour que tous nos soldats apprennent à opérer dans cet environnement.

Les capacités de l'armée à opérer dans le Grand Nord sont maintenues par le biais d'exercices qui ont lieu tous les ans.

Le sénateur Forrestall : Est-ce que les Halifax Rifles pourraient opérer dans le Grand Nord? Peut-être que le Lord Strathcona Horse de l'Alberta pourrait être reconstitué et envoyé dans cette région?

Le bgén Beare : Si vous possédez les compétences voulues pour opérer dans le Nord, vous pouvez y aller, mais vous devez suivre une formation pour être en mesure de fonctionner dans ce milieu.

La présence dans l'Arctique doit être assurée par l'armée. Ceux qui sont disponibles, qualifiés et prêts à partir peuvent être affectés à cette région. Toutefois, il faut, pour cela, du temps et une formation.

Le sénateur Forrestall : J'ai mentionné les Halifax Rifles parce que, à mon avis, il y a, parmi les unités de réserve qui ont été démantelées — compte tenu des collectivités où elles l'ont été — des hommes et des femmes qualifiés qui sont capables d'assumer des tâches énormes et de vous relever de certaines de vos responsabilités très importantes. L'une d'entre elles, évidemment, est la défense intérieure. Nous devrions en discuter.

Plus j'en parle, plus les gens se mettent à réfléchir à ce concept après avoir jugé l'idée ridicule. À bien y penser, on peut considérer cela comme un moyen économique de fournir une aide précieuse.

D'après la presse, certaines pièces d'équipement — les lunettes de vision de nuit, par exemple — se retrouveraient entre les mains d'entrepreneurs qui vendent du matériel usagé. Ils parviennent à mettre la main sur ce type d'articles.

Avez-vous été en mesure de régler le problème? Y a-t-il d'autres outils majeurs jugés absolument essentiels dont on soupçonne la disparition?

Le col Wynnyk : Sénateurs, je suis heureux d'avoir l'occasion de répondre à la question. L'aliénation de biens excédentaires du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre relève de ma responsabilité.

L'article que vous avez lu faisait allusion à une personne en particulier. Cette personne sous-traite avec plusieurs agences par l'entremise d'un centre de distribution des biens de la Couronne. Elle n'obtient pas uniquement des biens du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre, mais sans doute d'autres secteurs des Forces canadiennes, y compris celui de Cold Lake. Toutefois, je ne peux parler qu'au nom du Secteur de l'ouest de la Force terrestre.

Des mesures très sévères ont été mises en place lorsque le problème a été cerné il y a près d'un an. Les biens aliénés font maintenant l'objet de deux ou trois vérifications pour éviter que cette situation se produise à nouveau.

La seule pièce d'équipement qui semble poser problème dans le Secteur de l'ouest, ce sont les uniformes à dessin de camouflage canadien, les DCamC. Ces uniformes devaient être détruits, mais certains ne l'ont pas été. Depuis, la personne a laissé entendre que d'autres pièces d'équipement, comme les lunettes de vision de nuit, se retrouvaient sur le marché. Il est difficile de le confirmer, mais chaque fois qu'une telle allégation est formulée, nous menons une enquête.

Donc, en résumé, oui, des mesures sont maintenant en place et nous suivons la situation de très près.

Le sénateur Forrestall : Êtes-vous satisfait de l'équipement que nous avons? Pouvez-vous déplacer sans difficulté l'équipement de sauvetage dont vos collègues pourraient avoir besoin?

Le bgén Beare : Nos soldats sont les mieux équipés au monde.

Voici une petite anecdote qui vient de Kaboul : Nos troupes se surnommaient les « soldats du huit double A », parce que lorsqu'elles patrouillaient la nuit à Kaboul, elles étaient équipées de lunettes de vision de nuit de quatrième génération — deux double A; d'une radio — deux double A; d'une lampe stroboscopique infrarouge — deux double A. Leurs armes personnelles étaient munies d'un pointage laser, et leurs lunettes de vision de nuit, d'une lampe SureFire avec lumière blanche — deux double A et deux double A.

Au bout du compte, vous aviez un soldat qui était équipé de matériel de pointe, et cela comprenait son équipement de protection, ses vêtements adaptés en Kevlar, et son casque. Lorsque vous placez nos soldats côte à côte avec ceux d'autres pays, dans bien des cas, ils nous jalousent.

Toutefois, nous manquons d'équipement. Nous veillons à ce que les troupes déployés en aient suffisamment. Nous veillons à ce qu'elles se familiarisent avec leur équipement avant qu'elles ne soient déployées. Toutefois, nous n'avons pas suffisamment de matériel pour équiper en permanence notre personnel, de sorte que son utilisation peut devenir une seconde nature.

Le sénateur Forrestall : Ce qui m'intéresse avant tout, c'est la qualité non la quantité.

Le bgén Beare : Nous avons des ensembles formidables, sénateur, mais aussi de vieux camions.

Le sénateur Forrestall : J'ai posé la question, parce que la dernière fois que je suis allé en Bosnie — et vous y étiez aussi, monsieur le président — on nous a entassés dans des véhicules et le sergent a pris soin d'installer sur les sièges deux ou trois gilets pare-balles supplémentaires. Je ne pense pas qu'il songeait aux cahots.

Le bgén Beare : Non.

Le président : Au cours de cette visite, je portais un casque de grandeur 7 1/4 alors que je coiffe du 7 1/2 Ce n'était pas une visite extraordinaire.

Le sénateur Cordy : Général Beare, j'aimerais confirmer ce que vous avez dit au sujet des hommes et des femmes formidables que nous comptons dans les forces. Le comité a eu l'occasion de le constater lors de ses déplacements au pays. Nous avons beaucoup de chance, en tant que Canadiens, d'avoir de telles personnes qui veillent sur nous.

Colonel Grant, j'aimerais revenir au système de disponibilité opérationnelle gérée auquel vous avez fait allusion plus tôt. En quoi consiste ce système? Est-il mis en place par le QGDN et ensuite appliqué au reste de l'organisation?

Le col Grant : Le plan initial a été conçu par le QGDN. Les officiers d'état-major responsables des opérations ont cherché à mettre au point un programme qui permettrait aux unités aptes au combat d'être en position de déploiement, et de gérer en même temps — conformément au Livre blanc- deux groupements tactiques pouvant être déployés à n'importe quel moment, compte tenu des effectifs que nous avions à l'époque.

Le plan qu'ils ont élaboré prévoyait le déploiement de quatre unités par année. Toutefois, pour y arriver, il fallait limiter le nombre d'effectifs que pouvait compter chacune de ces organisations. Le général Beare a parlé de 1 000 soldats plus tôt, chiffre qui englobe les troupes de combat et les troupes de soutien.

Comme les unités devaient compter le même nombre d'effectifs, le concept général mis au point par l'état-major de l'armée et le personnel des services centraux — celui du général Beare et le mien, entre autres — a été mis à l'essai : une confrontation militaire a été simulée pour vérifier que le concept et le plan élaborés par le QGDN étaient viables et réalisables.

Donc, il y a plusieurs officiers d'état-major jeunes et brillants qui ont consacré beaucoup de temps et énergie à ce projet pour faire en sorte que le système de disponibilité opérationnelle gérée produise les résultats escomptés.

Nous en sommes, pour l'instant, au stade initial. Je suis en train de mettre sur pied les premiers groupements tactiques qui seront déployés en vertu de ce système. Notre plus grand défi est de convaincre les autorités de maintenir les plafonds imposés en matière d'effectifs. Si nous les dépassons, nous ne serons pas en mesure de maintenir le système dans les années à venir.

Le sénateur Cordy : Est-ce un plan fondé sur le meilleur des scénarios? Nous avons entendu amplement parler de la pénurie d'effectifs lors de nos déplacements au pays. Nous avons également entendu dire que vous aviez 150 personnes, mais que seulement 85 ou 90 d'entre elles pouvaient être déployées.

Cet élément est-il pris en compte dans le plan ou celui-ci prend-il pour acquis que s'il y a 150 personnes, la totalité sera déployée?

Le col Grant : Le plan est véritablement fondé sur nos capacités actuelles.

Nous nous attendons à ce que la taille des forces opérationnelles pouvant être déployées augmentera quelque peu lorsque les Forces canadiennes auront obtenu 5 000 troupes additionnelles. Fondamentalement, ce que nous appelons le tableau d'effectifs et de dotation — le « TED » —est déterminé en fonction de ce que nous pouvons déployer aujourd'hui.

Le bgén Beare : Sénateur, si vous me le permettez, vous faites allusion à des hypothèses qui pourraient influer sur la réussite du plan, et celles-ci partent du principe qu'il n'y a qu'une seule armée et que nous utilisons les réservistes pour combler jusqu'à 20 p. 100 de l'effectif.

La Force régulière n'est pas la seule composante en question. La Réserve occupe une grande place dans le maintien des capacités militaires, en particulier dans des fonctions spéciales comme la COCIM.

Une autre composante est ce que nous appelons le « taux de laissés hors de la bataille ». Il s'agit du nombre de militaires qui ne peuvent pas être déployés pour des raisons de santé physique ou autre. À l'heure actuelle, le taux est de 10p. 100 dans le plan. Sur le terrain, ce chiffre peut s'élever jusqu'à 15 ou 20 p. 100.

Le président : La COCIM et les LOB. Je pense que nous avons un bon système pour les acronymes, mais à des fins de clarté et de précision dans le compte rendu, au lieu d'avoir recours à des acronymes, pourriez-vous utiliser les termes au long; ce serait très utile.

Le bgén Beare : Le personnel de la Coopération civilo-militaire, ou COCIM, s'occupe de coordonner notre travail auprès des organisations civiles, mais il ne se compose maintenant que de réservistes; on parle de quelque 200 employés faisant partie de la Réserve pour s'occuper de toutes ces forces opérationnelles et assurer leur maintien.

Le taux de laissés hors de la bataille, ou LOB, représente le nombre de personnes qui ne peuvent pas être déployées, à court ou à long terme; on l'estime à environ 10 p. 100 dans le plan. Lorsque c'est plus élevé — et c'est le cas à certains endroits —, nous devons modifier le plan en conséquence.

Nous devons faire un suivi de nos estimations car si celles-ci s'avèrent inexactes, le système de disponibilité opérationnelle gérée peut ne pas fonctionner, et nous en sommes conscients.

Le sénateur Cordy : À quel niveau peut-on apporter des modifications? Peuvent-elles être faites au niveau local?

Le bgén Beare : Des ajustements peuvent être faits à l'échelle locale ou nationale pour signaler qu'une force opérationnelle devra être oubliée — par exemple, parce que nous ne pourrons pas prendre d'engagement dans cet intervalle de six mois — ou, en ce qui concerne la Réserve des forces terrestres, que la force opérationnelle de recherche — comme on l'appelle dans le système de disponibilité opérationnelle gérée — pourrait ne pas être aussi importante que ce à quoi on pourrait s'attendre. Nous procédons ainsi depuis une décennie. Il faut gérer ces risques au fil du temps.

Le grand avantage du système de disponibilité opérationnelle gérée est qu'il prévoit les capacités que nous devrions avoir, dans quel domaine et quand, ce que nous ne faisions pas depuis dix ans.

Le sénateur Cordy : J'aimerais maintenant parler de vos Centres de ressources pour les familles des militaires, que nous avons visités lors de notre dernier voyage à Edmonton. Leurs programmes sont excellents, et le personnel semble exceptionnel.

Récemment, une étude sur les questions de santé qui touchent les militaires a révélé qu'il y aurait plus de problèmes de santé mentale dans les Forces armées qu'au sein du grand public. Malheureusement, je n'ai pas tous les détails car je n'ai pas avec moi une copie du rapport.

Je me demande quelle en est la cause. Est-ce le moral? Est-ce le stress sur les familles? Le syndrome de stress post- traumatique? Ou bien s'agirait-il d'un mélange de tous ces facteurs?

Le bgén Beare : Je vais laisser Alan parler du Centre de ressources pour les familles des militaires, ou, comme on l'appelle, le CRFM.

Le lieutenant-colonel Alan F. Markewicz, commandant, Unité de soutien de secteur, base des Forces canadiennes à Edmonton, Défense nationale : Les problèmes de santé mentale des soldats ne relèvent pas du Centre de ressources pour les familles des militaires. C'est plutôt la responsabilité du système de santé bien que le Centre puisse diriger les soldats vers les ressources appropriées.

Je me souviens de cette étude, et quand j'ai vu les différences de pourcentage, je n'ai pas pu m'expliquer cet écart considérable du côté des Forces armées. Je ne peux donc pas vous répondre à ce sujet.

Je sais toutefois que pour ce qui est des ressources pour les familles des militaires, des mesures permanentes sont en place. Nous procédons actuellement à l'établissement d'un programme de soutien par les pairs pour les familles victimes de stress opérationnel et vivant sur la base militaire. Ce programme s'inscrit dans nos efforts de soutien continus. C'est l'un des projets émanant d'Ottawa.

Un conseiller a été embauché. Nous sommes en voie d'installer un bureau de consultation pour toutes les familles souffrant des répercussions du stress opérationnel. Évidemment, nous avons déjà des programmes semblables en place pour les militaires en service.

Le sénateur Cordy : Vu les préjugés associés à la maladie mentale au sein de la population civile, les gens hésitent énormément à admettre qu'ils ont un problème de santé mentale.

L'effectif militaire est la tranche de la population la plus en forme physiquement. Est-il encore plus difficile pour un membre des Forces armées d'avouer qu'il a des problèmes?

Le bgén Beare : Auparavant, c'était très difficile vu la perception des gens, mais nous avons amorcé un virage au cours de la dernière décennie pour bien faire comprendre aux effectifs l'environnement dans lequel ils travaillent et quelles en sont les conséquences psychologiques possibles.

Avant, nous pensions que c'était la responsabilité de la chaîne de commandement de « tout démêler » alors que les gens n'étaient pas formés ou équipés pour le faire; maintenant, nous avons un réseau d'agences, militaires et non militaires, qui offrent un cadre pour dépister ou traiter les personnes pouvant souffrir ou non de blessures psychologiques dues au stress.

Le Système de soutien social aux victimes de stress opérationnel, ou SSVSO, est un organe civil parrainé par le MDN qui ne relève pas de la chaîne de commandement et qui coordonne et offre un programme d'entraide aux victimes de stress opérationnel. Notre organisation de soins de santé mentale existe toujours dans notre système hospitalier, qui sert de réseau institutionnel. Ces organismes ne sont ni contrôlés ni influencés par la chaîne de commandement qui pourrait dissuader ou encourager un militaire à demander des services de counselling.

Nous formons des conseillers, soldat à soldat. Voici un exemple d'une de nos grandes histoires de réussite. Avant que le troisième bataillon ne se soit envolé pour l'Afghanistan en 2002, un tiers des soldats avaient reçu de la formation en matière d'entraide pour qu'ils puissent reconnaître les symptômes de blessures psychologiques dues au stress. Ils ont appris quels étaient les indicateurs et les conditions pouvant mener à de telles blessures. Évidemment, il est toujours préférable de traiter immédiatement, plutôt que par après, une blessure liée au stress directement sur le terrain.

Il y a maintenant de nombreux moyens de repérer les victimes potentielles de stress au combat et d'agir rapidement, que ce soit au sein de l'organisation ou à l'extérieur de celle-ci.

Le colonel Markewicz a parlé de la prestation de services aux familles des militaires pour illustrer qu'une blessure liée au stress au combat ne touche pas seulement le soldat, mais aussi sa famille.

Il ne fait aucun doute qu'il nous reste encore du chemin à faire, mais on peut dire que ce type de problèmes est abordé beaucoup plus efficacement qu'avant.

Le sénateur Cordy : Ça fait du bien d'entendre parler de services d'aide entre les pairs. Initialement, je crois que les hauts dirigeants avaient la bonne attitude en ce qui a trait au traitement du syndrome de stress post-traumatique, mais cet état d'esprit n'avait pas nécessairement atteint les gens sur le terrain; c'est donc un pas dans la bonne direction.

Je suis curieuse; je me demande si vous avez les ressources nécessaires car dans la population civile, il y a une pénurie de psychiatres et de psychologues. Qu'en est-il pour les Forces armées?

Le col Grant : En décembre dernier, si je ne me trompe pas, des responsables de la santé, à Edmonton, m'ont fait part du nombre de soldats ayant consulté une clinique de santé mentale pour obtenir de l'aide, et j'ai été estomaqué d'en voir l'ampleur. Des centaines de soldats, à Edmonton, ont demandé de l'aide, et ce pour diverses raisons.

Si je me rappelle bien des chiffres, la plupart d'entre eux ont participé à une ou deux séances. En général, ces gens voulaient trouver des moyens de gérer des problèmes qu'ils avaient à la maison ou au travail, et il ne leur fallait qu'un petit coup de pouce pour les ramener sur la bonne voie. C'est rassurant, en réalité, de voir le nombre de personnes qui sont allées consulter.

J'ai posé sensiblement les mêmes questions que vous, sénateur. Beaucoup de gens vont-ils consulter? Avons-nous les capacités nécessaires? En résumé, on m'a dit qu'on avait suffisamment de ressources à Edmonton pour gérer la demande.

Je peux vous dire que cet été, lorsque le 2 PPCLI a quitté Winnipeg pour Shilo, le déplacement de l'unité a occasionné un certain stress. On craignait de ne pas avoir suffisamment de soutien à Shilo, mais ce problème a été réglé temporairement en janvier et le sera de façon permanente cet été.

Donc, lorsqu'il manque des ressources, le Groupe des Services de santé des Forces canadiennes répond rapidement pour trouver des moyens d'aider les soldats.

Le sénateur Munson : J'aimerais savoir combien il y avait de réservistes dans la dernière rotation en Afghanistan?

Le col Grant : En bref, je dirais probablement moins de 10 réservistes, mais j'aimerais vous en donner le contexte.

Les soldats de la Réserve étaient, pour la plupart, affectés à l'équipe de coopération civilo-militaire. Comme l'a dit le général Beare, cette capacité relève maintenant complètement de la Réserve; nous sommes donc allés vers eux.

Nous n'avions pas beaucoup de réservistes lors de la dernière rotation car les délais étaient beaucoup trop serrés. Par conséquent, nous n'avons pas eu le temps de recruter des réservistes et de leur faire suivre la formation nécessaire avant de pouvoir les envoyer à l'étranger.

Pendant que nous nous affairons à former les trois autres unités opérationnelles que j'ai mentionnées plus tôt pour qu'elles soient prêtes à être déployées au cours des 12 prochains mois, nous recrutons activement des réservistes pour participer à cette mission. Lorsque nous avons le temps, nous contactons des réservistes et les encourageons à participer. Pour la dernière mission en Afghanistan, nous n'avons tout simplement pas eu le temps de recruter ni de former des réservistes.

Le sénateur Munson : Lorsque des réservistes reviennent de mission, ont-ils accès au même service de counselling, s'ils en ont besoin, que celui mentionné par le sénateur Cordy?

Le col Grant : Oui, monsieur, absolument. Tous les militaires passent par le même processus de réintégration lorsqu'ils reviennent d'une mission, que ce soit sur le plan de la santé mentale ou physique. Que ces militaires appartiennent à la Réserve ou à la Force régulière, ça ne fait aucune différence; ils sont tous traités de la même façon.

Le sénateur Munson : J'aimerais aborder un autre sujet aussi. Votre commandant a mentionné récemment dans son témoignage une guerre à trois volets. Pouvez-vous m'expliquer comment vous avez modifié votre formation en fonction de cette nouvelle réalité en vue des opérations futures, évidemment?

Le bgén Beare : Jusqu'à maintenant, nous l'avons fait plus de façon ponctuelle que planifiée; nous avons réorienté la formation donnée avant le déploiement en fonction de l'environnement dans lequel se déroulera la mission, que ce soit en Bosnie, en Afghanistan ou ailleurs.

L'armée a déjà pris des mesures pour institutionnaliser cette approche. Le commandant de l'Armée de terre a demandé aux responsables de la doctrine et de la formation à revoir toutes les formations, que ce soit pour le personnel au niveau d'entrée, les hauts dirigeants et le reste de l'effectif, pour que celles-ci tiennent compte de l'environnement opérationnel d'aujourd'hui et de celui à venir.

Nous continuons de donner de la formation en techniques de combat. C'est plutôt le contexte dans lequel elles s'appliquent et la façon de s'en servir qui changent. Nous procédons déjà comme ça dans notre système de formation individuelle, et nous commencerons à intégrer ces changements dès ce printemps lors de la tenue d'un cours de commandant d'équipe de combat, à Gagetown, auprès d'une compagnie de carabiniers composée de troupes de tir d'appui directs et indirects blindés et de mécaniciens.

Ces militaires recevront de la formation sur la façon de commander cette unité de combat dans un environnement de guerre à trois volets, c'est-à-dire dans le cadre d'opérations de combat où il y a des non-combattants, des organisations internationales, des combattants conventionnels, des combattants non conventionnels, des factions extrémistes et des menaces terroristes. C'est donc ce type de formation qui sera donnée ce printemps à Gagetown.

Ces mesures nous amènerons à déployer des forces opérationnelles en février 2006. Ces équipes recevront de la formation à Wainwright, cet automne. Pendant environ six semaines, elles suivront un entraînement en techniques de combat, mais l'environnement de formation tiendra compte des conditions auxquelles seront exposés nos soldats et du fait qu'il y aura des combattants, des non-combattants, des organisations internationales et des forces multinationales, c'est-à-dire tous les types d'intervenants que nous voyons de nos jours dans un environnement opérationnel.

Cela ne veut pas dire que nous abandonnons nos techniques de combat. Au contraire, cela veut dire que nous les appliquons de façon plus précise en mettant davantage l'accent sur les frictions qui existent de nos jours dans l'environnement opérationnel. Nous passons donc à l'action, sénateur.

Le sénateur Munson : Pour ce qui est des missions futures à l'étranger, verra-t-on des changements? Les missions à l'étranger auront probablement moins d'unités spécialisées et davantage de forces opérationnelles polyvalentes comme celles dont vous avez parlé.

Quelles seront les conséquences de tout cela sur la structure des unités traditionnelles?

Le bgén Beare : Je sais exactement ce à quoi vous voulez en venir.

On pourrait dire qu'un déploiement se composera, selon ce que nous avons aujourd'hui, de 1 000 hommes et femmes, de composantes de combat de base, de compagnies de carabiniers, d'escadrons de reconnaissance et de surveillance, de sous-unités d'appui-feu indirect, de mécaniciens, de soutien logistique du combat, de représentants des quartiers généraux, et cetera. Ces diverses composantes proviendront du bassin utilisé pour la mise sur pied d'une force, de nos bataillons et de nos régiments.

Avant de procéder au déploiement, cette force opérationnelle passera 28 jours au Centre canadien d'entraînement aux manœuvres, à Wainwright, où elle suivra un programme de formation collective rigoureux qui lui fera revoir, pleinement outillée, toutes les techniques de combat et leur application dans l'environnement opérationnel qui l'attend.

Nous injectons, sur trois ans, 600 millions de dollars dans l'infrastructure, les services et l'équipement à Wainwright pour créer ce programme de formation.

D'ici là, les composantes des forces opérationnelles auront été formées pour agir en tant que sous-unités cohésives sous un commandant d'unité, et les dirigeants auront été formés ensemble, sur ordinateur et sur le terrain, pendant les 12 mois qui précéderont l'entraînement aux manœuvres.

En réalité, on parle donc d'une période de 12 à 18 mois pour que les soldats suivent leur entraînement de base jusqu'à l'entraînement en équipe au sein d'une compagnie ou d'un escadron, ou sur l'utilisation de mortiers avec l'infanterie, jusqu'à la formation au CCEM, pour ensuite être déployés.

À la fin, on se retrouvera avec une force opérationnelle interarmes polyvalente qui a tous les outils et les capacités nécessaires pour accomplir sa mission — combat, intervention non combattante, soutien, santé et ainsi de suite — ce qui n'existe pas encore à l'heure actuelle au sein d'une seule unité. Auparavant, il fallait plusieurs unités pour obtenir une capacité opérationnelle, mais les nouvelles unités auront suivi un parcours qui leur garantira en bout de ligne le matériel et la formation de pointe nécessaires pour être prêts à partir en mission.

Désormais, ce ne sera plus toujours l'unité qui sera l'employeur des forces à l'étranger, même si un commandant d'un bataillon de carabiniers pourrait joindre à ses autres attachements deux de ses compagnies. L'unité est le port d'attache, et c'est à cette unité que vous revenez une fois la mission accomplie. La force opérationnelle est le groupe qui mène des opérations au pays ou à l'étranger.

Le sénateur Munson : Dans votre déclaration d'ouverture, vous avez mentionné la pénurie de caporaux-chefs et de sergents. Quel effet cela a-t-il sur le moral des troupes? Comment les gens se sentent-ils face à une telle pénurie? De toute évidence, je ne serais pas très à l'aise de travailler au sein d'une organisation qui vivrait ce genre de situation.

Le col Grant : Puisque c'est moi qui en ai parlé, je répondrai à la question, monsieur.

Vous avez tout à fait raison. Dans une unité normale, au sein d'un bataillon d'infanterie moyen, il y a environ 150 sergents et caporaux-chefs. À cause des différentes tâches assignées et des déploiements opérationnels, habituellement, une cinquantaine d'entre eux, en moyenne, sont disponibles quotidiennement; les 100 autres sont occupés à d'autres tâches.

Quand je vois les prévisions selon lesquelles les bataillons d'infanterie feront face à une pénurie cet été — il manquera environ 50 caporaux-chefs et sergents dans mes trois bataillons —, je réalise qu'il n'en reste plus beaucoup.

Le principe de base que nous défendons est que dans un bataillon d'infanterie chaque sergent et chaque caporal-chef a un travail à accomplir, et il ne consiste pas nécessairement à prendre soin de ses soldats. D'ailleurs, la plupart du temps, ce n'est pas le cas.

Nous devons gérer très prudemment pour nous assurer qu'ils sont disponibles lorsque nous en avons besoin pour ces exercices spécialisés d'instruction appliquée, afin qu'ils entraînent les recrues et qu'ils voient à ce que celles-ci soient prêtes pour les opérations futures.

Mais cela a-t-il un effet sur le moral? Absolument. Il n'y a rien de pire pour le moral d'un sous-officier supérieur, d'un soldat ou d'un caporal-chef qui veut être avec ses soldats que d'être envoyé dans un établissement de formation pendant deux ou trois mois. C'est difficile pour l'officier, pour le soldat et pour la famille.

Il s'agit-là probablement du plus grand défi que doivent relever les commandants en ce moment : gérer les attentes et la lourde charge de travail.

Le président : Général, ce qu'il faut comprendre des témoignages d'aujourd'hui, c'est que les gens qui sont envoyés à Kaboul, par exemple, ont tout le matériel nécessaire, ont reçu une formation complète et sont bien dirigés, alors qu'ici, c'est la pagaille. C'est le monde à l'envers, et vous êtes en pénurie de main-d'œuvre, de pièces et d'équipement. Qui plus est, vous manquez de fonds de fonctionnement et au Canada vous livrez une bataille quotidienne pour maintenir vos activités. Ai-je bien compris?

Le bgén Beare : Monsieur le sénateur, ce que vous avez entendu, c'est la description du difficile travail que nous faisons pour avoir des forces bien formées et prêtes au déploiement. La tâche ne nous est pas simplifiée par le fait que nous manquons de gens dans des postes clés et de matériel pour nous entraîner.

Cependant, nous savons bien qu'on ne forme pas les gens du jour au lendemain et que le matériel ne peut être acheté et livré la même journée; nous devons donc faire des choix et rationaliser. N'allez pas croire que nous sommes en train de nous plaindre parce que ce n'est pas le cas.

Le président : C'est moi qui ai posé la question, pas vous, vous n'êtes donc pas en train de vous plaindre. C'était ma question, personne ici n'est en train de se lamenter. Aucun d'entre vous n'a réclamé plus de ressources ou de fonds. Vous vous êtes contentés de décrire la situation telle que vous la voyez.

Le bgén Beare : Voilà ce que je peux vous dire : pour la plupart, nos soldats travaillent du lundi au vendredi. Lorsque nous nous mettons à travailler les fins de semaines à cause de trousses ou de matériel manquants, je commence à m'inquiéter. Nous redoublons d'efforts du lundi au vendredi parce que nous voulons préserver le temps libre nécessaire pour récupérer et continuer à travailler.

C'est vrai, bâtir des forces opérationnelles est une tâche ardue, sans compter que nous le faisons en même temps que nous essayons de nous développer, de recruter, de nous transformer en nous restructurant. Nous sommes donc très occupés.

La seule chose, c'est que nous devons agir avec les moyens à notre disposition, et je ne veux pas seulement parler des effectifs, mais aussi du temps nécessaire pour accomplir certains travaux.

Si je peux revenir sur l'exemple des 6 000 soldats envoyés en mission il y a deux ans et des 2 000 cette année, c'est aussi ça, agir selon nos moyens. Les forces armées canadiennes ont pu justifier le besoin de réduire le nombre de soldats qu'elles déploient afin de maintenir la cadence ici au pays, de façon à avoir la capacité d'appuyer les forces à moyen terme. Et je crois que nous allons y arriver.

Nos soldats veulent vraiment demeurer utiles, et ils sentent qu'ils le sont lorsqu'ils sont déployés, soit ici pour répondre aux urgences soit à l'étranger afin de servir le Canada ou ses intérêts.

Ce n'est pas pour servir nos intérêts que nous tentons cette réduction, mais pour assurer notre soutien, notre régénération et notre transformation, et aussi pour continuer à former ces forces opérationnelles utiles au Canada et aux Canadiens.

Est-ce qu'on a besoin de plus d'argent? Moi, pas nécessairement, mais l'institution peut-être, puisque c'est elle qui nous équipe. C'est elle qui gère notre système de formation.

Est-ce qu'on a besoin de plus d'effectifs? Oui, car en ce moment notre personnel n'est pas complet.

Est-ce qu'on a besoin de plus temps? Nous travaillons à la transformation à un rythme effréné. Le CCEM en est à l'étape cruciale de la création d'un nouveau centre de formation collectif pour l'armée. Alors oui, j'aurais besoin de plus de temps, mais nous n'en avons pas — donc, nous gérons au mieux celui dont nous disposons.

En ce qui me concerne, je dois dire que mes soldats ne travaillent pas inutilement durant les fins de semaines, que nous faisons avec les moyens du bord et que nous ne voyons pas plus grand que nature. Je crois que le message d'agir selon nos capacités, tel que je le perçois, semble avoir été entendu. Maintenant, il faut continuer dans cette voie.

Le président : Je voudrais juste clarifier quelques points : d'abord, vous avez dit que vous trouveriez le moyen de former 1 000 soldats. Parlez-vous de nouvelles recrues, est-il question de 1 000 soldats supplémentaires ou simplement du recrutement normal?

Le bgén Beare : De nouveaux soldats, sénateur.

Le président : Ensuite, vous n'avez pas parlé du retour du matériel. Le matériel qui revient est-il en excellent état et ne requiert aucun entretien?

Le bgén Beare : Sénateur, le matériel ne nous revient pas.

Le président : Il ne revient pas?

Le bgén Beare : Il ne revient pas directement à nous, mais il est retourné à l'armée canadienne. Comme vous l'a peut- être mentionné le général Caron, on garde toujours deux ensembles complets de déploiement. Ils sont conservés à Montréal, prêts à partir en cas de besoin.

Nous envoyons 350 véhicules de combat blindés ainsi que 300 véhicules motorisés à Wainwright pour la formation. Cette flotte sera maintenue et entretenue.

Nous croyons que ce sera suffisant — même si ça reste à prouver; il faut que notre garnison soit prête à se rendre à Wainwright pour faire des manœuvres avant que nos soldats soient déployés. Autrement dit, nous cesserons de nous déplacer avec nos équipements, ce qui fait partie du plan de gestion de la disponibilité opérationnelle.

Le président : Au nom des membres du comité, je souhaite vous remercier, vous et vos collègues, d'avoir témoigné.

Le sénateur Atkins a ouvert la séance sur une note qui, je crois, souligne la vocation générale du comité. Nous sommes très fiers des hommes et des femmes qui servent dans les Forces canadiennes. Nous n'avons pas souvent l'occasion de nous rendre sur le terrain et de le leur dire assez fort, assez souvent. Nous vous serions donc reconnaissants de leur transmettre ce message de la part du comité parlementaire réuni ici à Edmonton.

Nous avons très hâte de nous rendre à la base pour parler à chacun des soldats, mais nous n'aurons certainement pas l'occasion de leur dire à tous à quel point leurs sénateurs et leurs députés sont fiers d'eux. Nous apprécions leur travail ainsi que l'efficacité avec laquelle ils l'accomplissent, et nous vous serions très reconnaissants de leur transmettre ce message.

Le bgén Beare : Je le ferai avec plaisir, sénateur.

Le président : Au nom des membres du comité, je vous remercie beaucoup. Nous sommes impatients de nous rendre à la base, ce qui se fera très bientôt.

La séance est levée.


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