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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 22 - Témoignages


OTTAWA, mercredi le 2 mai 2007

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 16 h 5 pour examiner, afin d'en faire rapport, la situation actuelle du régime financier canadien et international.

Le sénateur Jerahmiel S. Grafstein (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bienvenue. Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'accueillir le gouverneur de la Banque du Canada, M. David Dodge, qui nous présentera son document Rapport sur la politique monétaire et Mise à jour : Janvier 2007. Il est accompagné aujourd'hui par le premier sous-gouverneur, M. Paul Jenkins. Grâce à la chaîne CPAC, les délibérations de la réunion seront retransmises à tous les Canadiens d'un océan à l'autre, et seront également disponibles sur tous les marchés financiers du monde par l'entremise d'Internet.

Je veux rappeler à nos auditeurs et téléspectateurs que, conformément à la Loi sur la Banque du Canada, la Banque du Canada a pour vocation de réglementer le crédit et le cours de notre monnaie dans l'intérêt de la vie économique de notre nation, de contrôler et de protéger la valeur de la monnaie nationale sur les marchés internationaux; d'atténuer, autant que possible par l'action monétaire, les fluctuations du niveau général de la production, du commerce, des prix et de l'emploi, et de favoriser la prospérité économique et financière économique et financier du Canada.

D'une manière concrète, la Banque du Canada intervient sur le plan monétaire en rectifiant la cible du taux de financement à un jour, ce qui entraîne souvent des répercussions sur le taux préférentiel des banques ainsi que sur les taux hypothécaires et des obligations, choses importantes pour tous les consommateurs.

Monsieur Dodge, il nous tarde de vous entendre partager avec nous vos idées sur des sujets aussi pertinents que l'appréciation très récente du dollar canadien par rapport aux autres devises, la remontée du prix de l'essence et l'incidence éventuelle de cela sur les prochains taux d'intérêt que vous nous annoncerez plus tard ce mois-ci. Nous attendons aussi impatiemment vos propos sur les fonds de couverture, sujet dont nous nous sommes saisis à votre instigation, et par rapport à cela, votre bilan de la situation présente des marchés financiers, tant à l'échelle nationale qu'internationale. Les honorables sénateurs tiennent enfin à connaître vos idées sur la réglementation et la surveillance du secteur des fonds de couverture et sur d'autres sujets encore.

Monsieur Dodge, il y a quelques jours, nous apprenions avec regret que vous allez quitter votre poste de gouverneur de la Banque du Canada. Vous allez nous manquer, mais nous sommes tout de même ravis de savoir que vous demeurez en poste pendant encore neuf mois. C'est donc l'avant-dernière fois que vous témoignez devant notre comité. Nous sommes toujours captivés et impressionnés par vos propos et vous souhaitons donc la bienvenue, ainsi qu'à M. Jenkins.

Avant de commencer, je vais présenter les sénateurs ici présents : mon distingué collègue et vice-président, le sénateur Angus, de Montréal; le sénateur Johnson, du Manitoba; le sénateur Moore de la Nouvelle-Écosse et le sénateur Biron, du Québec. D'autres sénateurs viendront se joindre à nous très bientôt.

David A. Dodge, gouverneur de la Banque du Canada, Banque du Canada : Merci beaucoup, monsieur le président et bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs. Comme toujours, c'est avec grand plaisir que nous sommes parmi vous. Nous apprécions la possibilité que nous avons de vous rencontrer, habituellement deux fois l'an, à la suite de la parution du Rapport sur la politique monétaire de la Mise à jour sur la politique monétaire. Nous espérons que ces séances nous aideront à bien renseigner les sénateurs, et par votre entremise, tous les Canadiens, au sujet de notre point de vue sur l'économie, de l'objectif de la politique monétaire et des mesures que nous prenons pour l'atteindre.

[Français]

Lorsque M. Jenkins et moi sommes venus vous rencontrer en octobre dernier, nous vous avons mentionné que la Banque du Canada avait revu légèrement à la baisse son scénario de référence concernant l'économie canadienne par rapport à sa projection antérieure.

Dans la plus récente livraison de notre rapport sur la politique monétaire, que nous avons publié jeudi dernier, nous indiquons que la croissance économique au Canada a bel et bien ralenti, mais que dernièrement, l'inflation a été plus élevée que prévu.

Après avoir examiné l'éventail complet des indicateurs, la Banque considère maintenant que l'économie canadienne tenait à un niveau tout juste supérieur à son plein potentiel au premier trimestre de cette année. Nous prévoyons qu'au cours de la période de projection, la demande intérieure restera le principal moteur de l'expansion au Canada.

Comme on s'attend maintenant à ce que le ralentissement aux États-Unis dure un peu plus longtemps qu'on ne l'avait d'abord prévu, les exportations nettes devraient freiner un peu plus la croissance, en 2007.

La Banque estime que l'économie canadienne progressera de 2,2 p. 100 en 2007, et de 2,7 p. 100 en 2008 et en 2009. L'économie retournera à son potentiel dans la deuxième moitié de cette année et y restera tout au long de 2008 et 2009.

[Traduction]

L'inflation mesurée par l'indice de référence devrait demeurer un peu au-dessus de 2 p. 100 au cours des prochains mois, étant donné les pressions sur la capacité de production et l'incidence de l'augmentation des prix des aliments inclus dans l'indice. Toutefois, puisque l'économie devrait retourner à son potentiel au second semestre de cette année et que les pressions dues aux prix des logements devraient s'atténuer davantage, on s'attend à ce que la pression à la hausse sur l'inflation mesurée par l'indice de référence diminue et à ce que celle-ci redescende à 2 p. 100 d'ici la fin de 2007.

L'inflation mesurée par l'IPC global, quant à elle, devrait monter au-dessus de la cible de 2 p. 100 au second semestre de 2007 et culminer sous les 3 p. 100 vers la fin de l'année, avant de revenir à la cible d'ici le milieu de 2008.

La Banque considère encore que les risques qui entourent sa projection au sujet de l'inflation sont relativement équilibrés, quoique les risques à la hausse soient désormais légèrement prépondérants. Mardi dernier, la Banque a décidé de maintenir son taux directeur à 4,25 p. 100. La Banque juge, à l'heure actuelle, que le taux cible du financement à un jour se trouve à un niveau compatible avec la réalisation de la cible d'inflation à moyen terme.

Monsieur le président, c'est avec plaisir que M. Jenkins et moi répondrons à vos questions.

Le président : Monsieur le gouverneur, je vous remercie beaucoup. Je vais ouvrir la période des questions en donnant la parole à notre distingué vice-président, le sénateur Angus, du Québec. Monsieur Dodge, la liste de ceux et celles qui souhaitent intervenir est longue, et je n'ignore pas que vous devez nous quitter d'ici quelque 75 minutes. Je vais donc presser les sénateurs de poser des questions précises et claires, et vous demandez aussi à vous, monsieur Dodge, de répondre de la même manière. Nous sommes tout à fait favorables à la réciprocité.

Le sénateur Angus : Monsieur le gouverneur et monsieur le premier sous-gouverneur, soyez les bienvenus parmi nous. Moi aussi, je me réjouis toujours de participer aux réunions auxquelles vous êtes invités au moins deux fois par année. J'en tire toujours énormément profit et je sais que ce sera de nouveau le cas aujourd'hui.

Pour revenir aux propos du président au sujet de votre départ, tout ce que je sais, c'est que neuf mois c'est long dans la vie d'un serviteur de l'État, et de toute manière, je ne veux pas me concentrer sur votre départ. Il y a tellement de choses pertinentes dont nous pouvons discuter, et nous tenons à entendre vos idées là-dessus. Nous ne voulons donc pas parler de l'avenir, mais bien du présent.

J'ai deux brèves questions à poser en premier lieu, puis une autre qui pourrait entraîner une discussion peut-être plus longue. J'ai été très déçu de lire aujourd'hui dans la presse que l'Alberta s'est officiellement prononcée contre la création d'un seul organisme national de réglementation des valeurs mobilières. C'est le premier ministre de l'Alberta lui-même qui l'a annoncé, apparemment contre l'avis de ses conseillers financiers.

Lors de réunions antérieures, nous avons discuté des entraves à la productivité canadienne que représente l'absence d'un tel organisme. C'est une lacune dans un système de services financiers au demeurant assez bon. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Dodge : Monsieur le sénateur Angus, à mon avis, il faut se garder de tirer des conclusions trop hâtives de certains reportages et aussi de conjecturer au sujet de l'avenir. Cela dit, nous reconnaissons que la mise sur pied d'un organisme national de réglementation des valeurs mobilières constituerait un grand avantage. Il faut toutefois que nous choisissions le système approprié ainsi que les règles et règlements pertinents. Toutefois, ce qui est tout à fait primordial, c'est l'application de ces règles de manière à susciter la confiance des gens. Or, ce genre de chose serait facile à obtenir grâce à un organisme national.

La forme que pourrait prendre un tel système nous préoccupe moins à la Banque que sa capacité d'être utile tant aux petites qu'aux grandes entreprises qui cherchent à obtenir des capitaux dans notre pays et que l'application des règles afin que les investisseurs fassent confiance au fonctionnement du marché.

Le sénateur Angus : Si j'ai bien compris, nous ne devrions pas nous décourager, mais plutôt collaborer à cette fin avec le ministre des Finances.

M. Dodge : C'est bien mon avis.

Le sénateur Angus : En dépit de cette nouvelle.

Toujours au sujet d'articles de presse, dans les journaux d'aujourd'hui, j'ai lu qu'hier, après votre déclaration devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes, on vous a interrogé au sujet d'un élément du budget de 2007 qui soulève la controverse, la déductibilité des intérêts dans le cas de certaines transactions internationales.

J'aimerais savoir si je dois prêter foi à ce que j'ai lu, à savoir que toutes ces mesures sont difficiles et que, pour autant que cette initiative cherche à mettre fin à certaines échappatoires fiscales, elle est positive à vos yeux. Est-ce exact?

M. Dodge : Oui, sénateur. Cette imposition est extrêmement complexe. Elle relève de diverses parties de la loi, de règles portant sur les sociétés étrangères affiliées, des dispositions relatives à la capitalisation restreinte et de toute une liasse de règlements extrêmement complexes. J'ai cru le ministre sur parole lorsqu'il a dit vouloir retracer ceux qui réussissent à échapper à l'impôt au détriment des autres Canadiens en usant d'une planification fiscale internationale de plus en plus habile puis vouloir sévir contre eux. À mes yeux, c'est un objectif tout à fait louable bien que difficile à atteindre. J'ai aussi retenu que, malgré ces pertes de recettes fiscales, il avait aussi observé des rentrées supplémentaires de dizaines de millions de dollars, ce qui nous évitera de devoir réécrire la loi de fond en comble. J'ai pris cela pour argent comptant, et par rapport à ce dossier très complexe qu'il connaît fort bien et cherche à régler, son principal souci est, à mon avis, de favoriser le bien-être économique du Canada.

Le sénateur Angus : Je vous remercie de cette réponse, monsieur Dodge. Maintenant, pour revenir aux propos de mon collègue, le sénateur Grafstein, et pour aborder une question plus vaste, l'une de nos grandes préoccupations à l'heure actuelle est la question des fonds de couverture, ou plutôt, maintenant que nous sommes mieux renseignés, celle des fonds de couverture à levier financiers sous forme d'emprunts. Nous avons entendu divers témoins. Nous nous sommes rendus aux États-Unis pour y interroger des gens et nous y entretenir avec les législateurs afin de savoir ce qu'ils envisagent de faire, compte tenu de l'évolution rapide de ces fonds à l'échelle internationale.

La semaine dernière, on nous a dit que la valeur théorique de ces instruments financiers a atteint 350 billions de dollars. Une telle ampleur est proprement vertigineuse et ne nous laisse à peu près aucune prise.

Un Torontois, réputé pour ses connaissances, sa modération et le sérieux de ses réflexions, nous a dit être très préoccupé par la situation actuelle, tout particulièrement par ce qu'il appelle la « frénésie de prêts ».

Selon lui, les marges sont plus élevées qu'elles ne devraient l'être dans une économie saine, et, encore une fois, les investisseurs et les gens n'ont pas tenu compte des règles traditionnelles comme la gestion du risque et le caveat emptor. Il estime que notre situation est très précaire.

J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Dodge : Eh bien, gardons-nous d'utiliser trop facilement les termes « très précaire ».

Le sénateur Angus : D'accord. Précaire alors.

M. Dodge : D'abord, je me réjouis que votre comité se penche sur la question. Au cours de leur histoire, les banques centrales et les organismes de réglementation se sont inquiétés de ce recours au levier financier. Cet outil demeure cependant très avantageux pour l'économie, et les banques et les marchés peuvent à la fois en répartir et en réunir les risques de manière très favorable.

Toutefois, l'endettement externe est un instrument dangereux ou susceptible de l'être, quand le crédit n'est pas géré avec prudence. Dans le monde, en tout cas, tous les gouverneurs de banque centrale s'inquiètent un peu de l'étroitesse des écarts entre les dettes contractées sur les marchés, les TGC et d'autres produits.

Le président : Gouverneur, vu que vous vous adressez au grand public, expliquez ce que vous entendez par TGC.

M. Dodge : Je parle de l'intérêt supplémentaire exigé par rapport aux obligations gouvernementales et à d'autres titres présentant moins de risque. C'est l'intérêt supplémentaire exigé par les prêteurs sur un investissement qui pourrait être risqué. Or, ce montant d'intérêt supplémentaire est devenu minime, au point de peut-être mal représenter le véritable risque sur le marché.

Quand il y a beaucoup d'argent disponible à des écarts minimes par rapport à, mettons, des obligations du gouvernement du Canada, du Trésor américain ou de Grande-Bretagne, les gilt bonds, il y a tentation d'augmenter l'endettement externe, comme vous l'avez indiqué dans vos remarques et, peut-être, d'augmenter l'endettement externe sans tenir suffisamment compte des risques de crédit sous-jacents.

C'est un phénomène qu'on exprime de différentes façons dans divers points du globe. Certains disent : « Il y a un mur d'argent disponible. » Mondialement parlant, il est vrai que l'épargne est relativement élevée. N'empêche qu'on ne se serait pas attendu à une telle étroitesse des écarts pour des types d'investissements plus risqués.

Et ce ne sont pas seulement les écarts. Nous venons de connaître une période où, jusqu'à maintenant, les conventions d'endettement se sont assouplies. Non seulement on prête de l'argent relativement bon marché, par rapport à des titres sans risque, mais on dilue également certaines des conventions qui existent traditionnellement.

D'autres banques centrales exprimeraient les choses autrement, peut-être, mais c'est l'essentiel du problème. Qu'il s'agisse d'un fonds de couverture ou d'un fonds de capital privé — nous parlons à présent de « bassins de capital privé » —, ce dont nous devons nous soucier, c'est de la gestion appropriée du crédit.

Notre préoccupation, en tant que banques centrales, c'est bien sûr ce qui pourrait se passer en cas de crise, si les gens se ruaient vers la sortie. Dans ce cas, les liquidités qui semblent exister actuellement, parce que la volatilité est minime et les marchés très liquides, pourraient s'assécher assez rapidement.

Depuis les réunions de Bâle, il y a environ 18 mois, nous nous efforçons constamment de mettre au jour les problèmes. Nous en avons repéré certains, dont le fonctionnement des arrière-boutiques de certains cabinets de courtage, par exemple, et y avons remédié jusqu'à un certain point.

Il y a un débordement d'argent ou — je dois peser mes mots — un apparent débordement d'argent disponible à faible taux par rapport au risque potentiel, et cela nous préoccupe. Le problème n'est pas dans le système bancaire. Nous avons effectué une étude en profondeur des risques inhérents au système bancaire international, parce que c'est là que repose au bout du compte l'effet de levier financier.

D'après ce que disent mes collègues étrangers et d'après nos propres observations, le système bancaire a fait preuve de prudence. Le problème est dans le marché élargi. Peut-être pourriez-vous demander à la surintendante son point de vue sur la question.

Le président : La surintendante a comparu devant le comité, et nous avons l'intention de lui demander de revenir. Comme l'a indiqué le sénateur Angus, nous avons entendu des témoignages préoccupants qui différaient de ce que nous avions entendu plus tôt, si bien que nous comptons la faire revenir pour lui poser précisément ces questions.

Le sénateur Moore : Je voudrais enchaîner sur la question du sénateur Angus quant à la déductibilité des frais d'intérêt pour les acquisitions à l'étranger.

Un article apparu aujourd'hui dans le National Post sous la plume de John McCallum, porte-parole des finances du Parti libéral. Voici ce qu'il écrit :

Avec la nouvelle politique stipulée par le budget fédéral, quand les sociétés canadiennes emprunteront de l'argent pour financer des acquisitions à l'étranger, elles ne pourront plus déduire de leurs impôts les intérêts de cette dette. Vu que les sociétés américaines, européennes et japonaises ont généralement le droit de faire cette déduction fiscale, les sociétés canadiennes seront contraintes de lutter avec une main liée derrière le dos... La proposition du gouvernement canadien va donc gravement désavantager toute société canadienne par rapport à presque toute société étrangère, en matière d'acquisitions à l'étranger.

Vous avez indiqué que c'était une bonne politique. Est-ce à la suite de recherches? Vu les commentaires de M. McCallum, sur quel renseignement vous appuyez-vous pour déclarer que tel est le cas?

M. Dodge : Je me suis attaché à l'intention déclarée du ministre, soit de régler la question des « personnes qui réussissent à échapper à l'impôt au détriment des autres Canadiens en usant d'une planification fiscale internationale de plus en plus habile ».

C'est ce qu'il indique comme objectif de base et je prends cela pour argent comptant. Le ministre n'a pas indiqué comment il compte s'y prendre; ce sera spécifié dans une loi très détaillée. C'est un domaine hautement complexe qui touche plusieurs parties de la loi.

Il faut faire très attention de ne pas sauter aux conclusions, tant que le ministre n'aura pas soumis son projet de loi. Parce que les règles sont compliquées et parce que, sur le plan international, il existe un certain nombre de pays avec des taux d'imposition très minimes voire nuls, nous savons qu'il est possible de contrevenir à l'esprit des règlements. C'est un problème particulièrement épineux. Ce que j'ai exprimé hier, c'est ma satisfaction de voir le gouvernement se pencher à nouveau sur le problème, afin d'essayer d'apporter une réponse à ces questions très difficiles. Le ministre a avancé comme chiffre plusieurs dizaines de millions de dollars ce qui, à mon sens, n'indique pas une intention de chambouler entièrement le système. Il me semble vraiment important d'attendre de voir comment sera rédigée cette mesure législative extraordinairement compliquée.

Le sénateur Moore : Le gouvernement a indiqué que cela coûterait entre 40 millions de dollars et un milliard de dollars aux sociétés canadiennes. Nous devrons attendre plus de détails. De prime abord, il semble que les sociétés canadiennes soient désavantagées, mais nous devrons attendre ce qui sera proposé. Peut-être les choses auraient-elles pu être résolues autrement; je l'ignore.

M. Dodge : Sénateur, c'est très compliqué. Ne prétendons pas que l'application de la loi actuelle est idéale. Il est difficile et complexe de remédier à ces problèmes comme le ministre le souhaiterait. Je suis sûr qu'il ne veut pas acculer les sociétés canadiennes à la faillite. Il va falloir attendre la parution du volet technique de la loi, parce que, quand il s'agit de la Loi sur l'impôt, tout est dans les détails.

Le sénateur Moore : Dans votre déclaration liminaire, vous avez déclaré que, dans un avenir prévisible, la demande intérieure continuerait d'être le moteur de croissance le plus important au Canada. Lors de votre dernière comparution devant le comité, nous avons évoqué brièvement l'entente économique conclue entre la Colombie-Britannique et l'Alberta. Avez-vous suivi les répercussions positives de cette entente?

M. Dodge : Non, sénateur, nous ne l'avons pas fait.

Le sénateur Moore : Il a été question que l'Ontario se joigne à cette entente. Vous êtes-vous penché sur ces chiffres afin d'évaluer ce que cela pouvait signifier comme augmentation de la productivité intérieure?

M. Dodge : Non. Toutefois, au bout du compte, ce qui compte, ce sont essentiellement les principes de base. Pour avoir plus de souplesse dans le marché, il faut éliminer les obstacles au commerce entre les provinces. On a ainsi la souplesse qui est si importante pour augmenter la productivité et atténuer les fluctuations économiques.

Le sénateur Moore : Comme l'a mentionné le sénateur Angus, le comité a entendu des témoins parler la semaine dernière de la question des fonds de couverture. La valeur de ce secteur a été chiffrée comme allant de 1,5 billion de dollars à 340 billions de dollars — un écart considérable. C'est un secteur qu'on mal cerné parce qu'il implique des bassins de capital privé. Auriez-vous des commentaires à faire sur la supervision de l'industrie des fonds de couverture ou souhaitez-vous en faire?

M. Dodge : Parler d'« industrie » est curieux. En tant qu'organisme de réglementation des banques, la Banque du Canada s'attache essentiellement aux institutions intermédiaires qui, de par leur nature, déterminent une bonne part de l'effet de levier financier. De par leur nature également, si ces institutions se heurtaient à des difficultés, cela aurait d'énormes répercussions sur tout le système. Sur le secteur exempt de réglementation, qui s'est développé, vous avez parfaitement raison, sénateur, de dire que nous disposons de bien moins de renseignements. Les ministres des finances du G7 déploient à l'heure actuelle des efforts visant en partie à obtenir des renseignements qui seraient véritablement utiles.

Le sénateur Moore : Qu'entendez-vous par « utiles »? Vous parlez de quantité ou de supervision?

M. Dodge : Je veux dire utiles pour comprendre les risques s'accumulant dans le système dans son ensemble.

Le sénateur Moore : D'après les témoignages que nous avons entendus, pour 20 p. 100, on peut s'endetter jusqu'à 80 p. 100. À quoi cela tient-il? J'ai trouvé plutôt inquiétante l'idée de transactions sur papier progressant ainsi de 30 p. 100 par an. D'ici deux ou trois ans, on nous citera sans doute des chiffres allant jusqu'aux quadrillions.

M. Dodge : Il faut être extrêmement prudent.

Le sénateur Moore : Il y a des investissements avec endettement externe qui ne sont pas nécessairement des fonds de couverture.

M. Dodge : Là encore, il faut être prudent. Il y a toujours eu des dettes à haut risque. Elles étaient généralement frappées de 1 000, 1 200 ou 1 500 points de base d'intérêts en plus, par rapport à des titres sans risque. Or, si l'on prend l'ensemble des instruments généralement considérés comme plus risqués, on constate que l'écart est aujourd'hui plutôt minime. Le coût du recours à l'endettement externe dont vous parlez est donc plutôt faible, pas seulement parce que le taux d'échange des trésors ou des banques du Canada est de 4 p. 100, mais parce que ces instruments s'échangent dans une fourchette variant de 200 points de moins à 100 points de plus. La question est inquiétante, vu qu'on ignore si ce crédit est géré comme il devrait l'être.

Le sénateur Eyton : Monsieur Dodge, je voudrais aborder la question des fiducies de revenu, qui ont fait couler beaucoup d'encre ces derniers mois. Je voudrais notamment évoquer certains de vos commentaires lors de votre comparution devant notre comité, l'automne dernier. Vous avez dit à l'époque : « D'après les travaux que nous avons faits sur le marché des capitaux, on peut dire que, probablement, dans l'ensemble, les fiducies de revenu rendent les marchés des capitaux un peu plus complets et un peu plus efficients. » Vous avez poursuivi en disant que c'était indépendant des mesures fiscales et qu'il était pertinent que les entreprises partent sur un pied d'égalité quand elles choisissent le type de structure permettant l'affectation la plus efficace du capital.

Le comité avait trouvé ces réflexions particulièrement rassurantes. Je remarque que votre nom était apparu dans une publicité d'une demi-page payée par la Coalition of Canadian Energy Trusts, qui a fait feu de tout bois.

La publicité a paru dans le Toronto Star du 12 avril. Le titre indiquait que des experts d'envergure avaient averti le gouvernement qu'il faisait erreur en imposant les fiducies. On vous citait ensuite comme ayant dit que « se constituer en fiducie de revenu peut très bien convenir aux entreprises lorsqu'elles n'ont qu'à gérer les actifs existants avec efficience ».

Il est difficile de contester cette affirmation, mais étant donné qu'elle a été utilisée dans ce contexte, croyez-vous que vos propos ont été pris hors contexte ou induisaient-ils en erreur d'une quelconque façon?

M. Dodge : Sénateur, quand je me suis enrôlé dans la marine, M. Diefenbaker était alors premier ministre. À l'époque, nous avions des crayons sur lesquels on avait imprimé « Utiliser à mauvais escient, c'est de l'abus ». La façon dont on s'est servi de mes propos dans cette publicité reflète parfaitement le message imprimé sur nos crayons à l'époque Diefenbaker.

Le sénateur Eyton : J'ai retenu deux observations que vous avez faites devant le comité de la Chambre des communes en février. La première était que les caractéristiques risque-rendement différentes peuvent ne pas venir compléter le marché si elles tiennent à des différences de traitement fiscal. La deuxième était que le problème résidait dans le fait qu'étant donné qu'on devait économiser de l'impôt, on a pris des décisions inappropriées sur le plan des affaires. Pourriez-vous nous expliquer ces deux observations?

M. Dodge : Oui, il s'agit de la première citation qu'on a faite de mes propos l'automne dernier, sénateur. Le modèle organisationnel des fiducies de revenu est tout à fait approprié dans certains contextes économiques où l'on gère un portefeuille d'actifs afin de maximiser le rendement tout au long de la vie desdits actifs.

Ce modèle organisationnel est donc approprié, absolument. Ce modèle permet à l'investisseur d'avoir confiance, de savoir que l'administrateur de ses actifs a une mesure qui l'incite à gérer les actifs de façon à maximiser le rendement sur la durée. C'est en fait ainsi que ce modèle organisationnel vient compléter le marché. C'est absolument exact.

Toutefois, le problème se pose quand le régime fiscal est conçu d'une façon telle qu'il fournit un incitatif injustifié à utiliser un modèle organisationnel plutôt qu'un autre. Le corolaire est bien compris : en marge, les gens optent pour un modèle organisationnel qui ne convient pas le mieux à leurs objectifs financiers, mais qui est peut-être le plus approprié en raison du dégrèvement dont on peut bénéficier. Le modèle est raisonnablement simple à cet égard.

Les fiducies en tant que modèle organisationnel ne posent pas problème, mais il semble néanmoins y avoir une bonne raison de croire que des décisions des sociétés sont biaisées, favorisant ce modèle organisationnel plutôt que le modèle normal.

Le sénateur Eyton : Vous avez utilisé le terme « bassin de capital privé ». D'aucun se préoccupe de la gouvernance de ces bassins et de l'utilisation qui en est faite aujourd'hui. Je trouve paradoxal que ces bassins de capital privé fassent l'objet d'un engouement ou d'un appui de la part de fonds de pensions d'envergure, dont les fonds de pensions de l'État. S'il est vrai que le gouvernement pourrait être inquiété par ce problème, n'empêche qu'on devrait, notamment, s'inquiéter des mégafonds de pensions, y compris le Régime de pensions du Canada et d'autres, lesquels régimes sont conjugués à des fonds de couverture sur une base quotidienne, ce qui permet les transactions dont nous nous préoccupons. Que pensez-vous de cela?

M. Dodge : Il est tout à fait acceptable que les fonds de pension, qu'ils soient publics ou privés, fassent des placements dans des actifs parallèles. Un gestionnaire de régime de pensions dispose d'un horizon qui est nettement plus dégagé que celui dont nous disposons vous et moi, ou la plupart des investisseurs. Il est donc tout à fait acceptable qu'on investisse dans certains de ces actifs qui pourraient avoir un rendement étalé sur une plus longue période et dont la valeur marchande pourrait subir une légère volatilité quotidienne. Un des grands avantages d'un régime de prestations défini, c'est qu'on sait que le rendement n'est pas prévu pour demain, puisqu'il peut se faire sur une durée indéterminée. La mise en commun des fonds repose sur la cotisation des employés actuels, passés et futurs.

Il y a donc des raisons valables qui poussent ces fonds à investir dans des actifs parallèles. Historiquement, on s'est contenté d'investir dans l'immobilier. Or, les fonds de couverture sont exactement le type d'actif qui rapporte à très long terme. Leur valeur peut fluctuer considérablement d'un mois à l'autre, ou d'une année à l'autre, mais ils s'échelonnent sur un horizon lointain.

On doit faire très attention de ne pas qualifier ces actifs d'inappropriés à des fins d'investissement. Le sénateur Angus a soulevé une question, et le sénateur Moore a poursuivi dans la même veine, soit savoir si le crédit est géré de façon acceptable. Les gestionnaires évaluent-ils soigneusement les caractéristiques de crédit sous-tendant ces investissements? Évaluer les titres de créance détenus par des tiers notamment exige énormément de compétences en matière de gestion, et il se trouve qu'historiquement ce sont les banques qui possèdent, pour l'essentiel, ces compétences.

Dans la mesure où les gestionnaires de fonds de pension possèdent cette expertise, ils devraient être en mesure de faire du bon travail. Gérer le crédit est important et, pour revenir à l'introduction du président, c'est la capacité de bien le gérer qui rend les banques centrales et les instances de réglementation nerveuses.

Le sénateur Ringuette : Je suis un nouveau membre du comité. J'ai trouvé des plus intéressants vos propos au sujet de la gestion du crédit. Je me préoccupe des liens étroits qui existent entre notre économie et celle des États-Unis. Comme quelqu'un l'a dit tout à l'heure, aux États-Unis, il y a eu une frénésie de prêts dans le marché du logement. Toutefois, devant le déficit public américain, je me demande si cette frénésie de prêts est limitée au marché du logement américain ou s'il s'étend à l'ensemble de l'économie, étant donné le coût élevé de la guerre en Iraq et le financement du déficit par emprunts auprès de créanciers chinois.

Je regarde tous ces éléments d'information et la façon dont l'économie canadienne est liée, 80 p. 100 de nos exportations étant destinées aux États-Unis; la valeur du dollar canadien qui dépend du dollar américain; notre marché de l'exportation qui s'amenuise et notre marché de l'importation qui connaît de l'expansion. Nous pouvons certes nous pencher sur la question microéconomique des fonds de couverture, mais nous pouvons également aborder la question des fonds de couverture d'un point de vue macroéconomique, dans lequel cas l'échelle serait différente.

À l'heure actuelle, le comité examine les façons de gérer les fonds de couverture, mais ce qui me préoccupe principalement, c'est de trouver les moyens de nous prémunir contre une récession majeure aux États-Unis. Comment pouvons-nous protéger les consommateurs canadiens contre une récession américaine?

M. Dodge : C'est une excellente question, dont la réponse réside dans la question des déséquilibres mondiaux. Je vais demander à M. Jenkins d'y répondre, puisque c'est un sujet auquel il travaille.

Paul Jenkins, premier sous-gouverneur, Banque du Canada : Madame le sénateur, vous avez soulevé des questions importantes. Permettez-moi de commencer par la question des déséquilibres mondiaux. Comme vous l'avez indiqué, la réflexion porte essentiellement sur le déficit du compte courant américain, car les États-Unis sont un pays de « désépargnes », si vous me passez l'expression. Le revers de la médaille, c'est ce que nous constatons ailleurs dans le monde, surtout en Asie et en Chine. En effet, dans ces pays, l'accumulation de réserves et les surplus du compte courant nous préoccupent. Nous avons discuté de ces questions, en privé comme en public, avec des responsables partout dans le monde.

Il s'agit maintenant de souhaiter qu'il y ait une rotation de la demande. Autrement dit, on souhaite voir des pays comme la Chine et le Japon afficher une croissance qui est davantage tributaire de l'expansion de leur économie intérieure que de leurs exportations. La solution passe entre autres par une plus grande flexibilité des taux de change, ce qui nous amène à la question du régime de taux de change à adopter. Depuis un certain temps, nous affirmons avec vigueur que, pour régler les déséquilibres mondiaux, nous devons jouir d'une plus grande flexibilité du taux de change. Cela comprend la Chine, mais nous devons convaincre d'autres pays en dehors de l'Amérique du Nord de promouvoir des politiques visant à renforcer la demande intérieure. Autant de facteurs qui contribueront à s'attaquer aux déséquilibres mondiaux.

Dans notre Rapport sur la politique monétaire, nous signalons sans cesse cette question, mais nous commençons à voir des signes d'une évolution positive. En effet, nous commençons à constater une plus grande croissance en dehors de l'Amérique du Nord, une expansion affermie au Japon et une progression de la demande intérieure quelque peu plus forte en Chine également. Nous voyons donc des signes que les choses sont en train d'évoluer dans le bon sens, mais la question continuera d'être très importante.

Le deuxième volet de votre question concerne l'économie américaine. Je ne voudrais pas que vous partiez d'ici en pensant que nous sommes d'avis qu'il y aura récession aux États-Unis, parce que ce n'est pas le cas. En fait, nous escomptons un ralentissement de la croissance aux États-Unis cette année, laquelle croissance se situera entre 2 et 2,1 p. 100, avant de reprendre de l'élan en 2008-2009. Ce ralentissement s'inscrit tout à fait dans un processus d'ajustement. Le marché du logement aux États-Unis traverse une période d'ajustement, tandis que d'autres secteurs de l'économie américaine, notamment celui des services, continuent de croître. Selon notre scénario de base, l'économie américaine continuera d'afficher une expansion, tout comme l'économie mondiale, et le Canada en profitera.

Quant aux mesures que nous devons prendre pour continuer notre croissance, nous devons continuer de conduire des politiques qui font la promotion de la flexibilité, ce qui nous permettrait de nous adapter à différentes conjonctures, y compris un taux de change flexible, que nous avons évoqué plus tôt, et nous devons accorder de l'importance à la flexibilité dans le mouvement des ressources d'un secteur à l'autre. Voilà donc les orientations que nous devrons suivre à l'avenir.

Le sénateur Ringuette : Vous avez indiqué que la croissance de la demande intérieure est un facteur clé. Je peux voir que l'Asie et l'Europe occidentale affichent une croissance de la demande intérieure en raison de l'augmentation des revenus par habitant. En contrepartie, dans un pays développé comme le Canada, la croissance de la demande intérieure n'est pas aussi forte que celle de la demande au chapitre des importations. En effet, nos importations augmentent, alors que nos exportations sont à la baisse. Je sais que cela a beaucoup à voir avec l'ajustement de l'économie mondiale et les taux de rémunération, la productivité, l'efficacité et ainsi de suite. Cela étant dit, la situation m'inquiète, parce que je vois que, peut-être pas demain ni l'année prochaine, mais dans une décennie, l'indicateur de la demande intérieure deviendra un obstacle de taille à notre compétitivité mondiale.

M. Jenkins : La demande intérieure couvre la consommation, l'investissement fixe des entreprises, l'investissement dans la construction résidentielle ainsi que les dépenses publiques aux titres des biens et services. Au cours des dernières années, notre économie intérieure s'est révélée très robuste, et nous escomptons que cette croissance robuste se poursuivra au Canada. C'est, en partie, le résultat des bonnes politiques adoptées par le Canada, mais nous constatons également les avantages qui découlent d'une économie mondiale très forte. L'exemple le plus parlant est le prix très élevé des produits de base, reflet de la force de la demande mondiale. Cela génère énormément de revenus pour l'économie canadienne. Bien entendu, cela appuie également la croissance de la demande intérieure.

Nous attendons toujours la croissance des exportations. Vous avez absolument raison de dire que la croissance des importations a été très forte en raison de la force de la demande intérieure. L'équilibre entre les exportations et les importations a eu pour effet, l'année dernière, d'être un boulet limitant la croissance de l'économie. Nous prévoyons la même chose cette année, mais pas au-delà de 2008-2009. L'économie intérieure a été très forte, et nous pensons qu'elle continuera de l'être. Avec le temps, l'équilibre entre les exportations et les importations n'aura plus l'effet d'un boulet qu'il a eu ces dernières années.

Le président : J'ai une observation factuelle à faire concernant la question importante soulevée par le sénateur Ringuette. Selon les documents que nous avons reçus, les importations ont crû plus vite que les exportations au cours des trois dernières années. Ces informations nous ont été fournies par le ministère des Finances. En 2005-2006, la croissance réelle des importations a dépassé celle des exportations de cinq points de pourcentage. Le sénateur Ringuette a soulevé une question importante, à savoir s'il s'agit là d'un cycle inquiétant qui, à court ou à long terme, aura une incidence sur nous. Cela nuit-il à notre économie intérieure?

Je pense que la question du sénateur Ringuette sur les statistiques mérite d'être reprise.

M. Jenkins : La force de l'économie intérieure a donné une impulsion aux importations. La force de la demande intérieure se manifeste notamment par l'expansion des importations. On le voit par exemple au chapitre des investissements en capitaux fixes des entreprises, et traditionnellement, c'est un élément de l'économie qui affiche une forte expansion des importations quand les investissements en capitaux fixes sont très forts au Canada. La réponse est donc oui, c'est un facteur ayant contribué à la force des importations.

Nous voulons faire ressortir le fait que la force de la demande au chapitre des importations n'aura plus un effet de boulet comme cela a déjà été le cas, car nous escomptons que les exportations commenceront à se redresser avec la reprise de l'économie américaine.

Le sénateur Ringuette : Le dollar canadien s'apprécie également par rapport aux autres devises.

M. Jenkins : Il faut dire que l'économie américaine dans son ensemble s'est raffermie. Les prix des produits de base sont également très élevés.

Nous prévoyons que la demande intérieure continuera d'être robuste. La croissance globale de l'économie demeurera très proche de la capacité de production et la croissance des importations ne freinera pas la croissance globale comme vous semblez le dire.

Le président : Je vous remercie, sénateur Ringuette. Avez-vous autre chose à ajouter?

Le sénateur Ringuette : Bien des choses, mais je ne veux pas monopoliser les témoins.

[Français]

Le sénateur Biron : L'appréciation du dollar canadien pourrait-elle affecter vos prévisions selon lesquelles l'inflation sera relativement stable au cours des années 2007, 2008 et 2009? De quelle façon pouvez-vous contenir une modulation ou essayer de maintenir le dollar canadien entre 0,85 $ et 0,90 $?

M. Dodge : Je répondrai à la première question, qui est plus simple et laisserai la deuxième à mon collègue.

Nos projections sont basées sur une hypothèse que le dollar canadien restera entre ,0865 $ à ,0895 $. C'est une hypothèse pour notre projection. Il y a beaucoup de volatilité de jour en jour, de semaine en semaine, dans le taux de change.

En juillet, lorsque nous ferons à nouveau notre analyse complète, s'il y a un grand changement dans le taux de change, on fera de nouvelles projections et il faudra en tenir compte dans ces projections.

Mais quant à notre politique monétaire, ce qui est important, ce n'est pas seulement le taux de change lui-même, mais les raisons de ces fluctuations. Lors de notre visite, il y a deux ans, nous vous avons expliqué cela.

Je laisserai le soin à M. Jenkins de répondre à votre deuxième question.

M. Jenkins : Je pense que le point le plus important ici est notre prévision en ce qui concerne le taux d'inflation. L'inflation majorée par l'indice de référence devrait revenir à ce niveau de 2 p. 100 à la fin de 2007. Cela va se refléter sur tous les facteurs. D'abord, le fait que l'économie canadienne va être en équilibre entre le niveau de l'offre et de la demande. Vu la vigueur de l'économie mondiale, le prix des biens d'importation sera un peu plus élevé que maintenant. Ces deux facteurs réunis seront une force pour préserver un taux d'inflation à 2 p. 100 d'ici la fin de 2007.

[Traduction]

Le sénateur Tkachuk : Bienvenue, monsieur le gouverneur, et je m'excuse d'être arrivé en retard, car j'étais à une autre réunion; je n'ai donc pas pu assister à votre exposé. Cela dit, je l'ai lu. Je m'excuse également auprès des autres intervenants de ne pas avoir écouté attentivement, car j'essayais de comprendre ce qui a été dit.

Je voudrais poser une question sur le dollar canadien. Il est difficile de croire qu'en 2002, le dollar se situait autour de 62 cents, alors qu'il est aujourd'hui d'environ 91 cents. Comme vous le savez, je crois en un dollar fort et j'ai été critique à l'endroit du dollar qui valait 62 cents, et je croyais même qu'on le faisait sciemment.

M. Dodge : Je m'en rappelle, sénateur.

Le sénateur Tkachuk : En même temps, avec l'appréciation rapide du dollar, vous avez maintenu stable le taux d'intérêt, et je vous en félicite. Je ne craignais pas beaucoup un taux inflationniste; je craignais que nos manufacturiers aient de la difficulté à s'adapter à l'appréciation du dollar.

D'aucuns vous diront que le dollar s'est trop apprécié. Je ne partage pas forcément cet avis. Cela dit, d'autres estiment que cette appréciation nuit à notre capacité d'exporter.

Voudriez-vous nous dire si vous pensez que le dollar s'est trop apprécié trop vite et, le cas échéant, quelles pourraient en être les conséquences?

M. Dodge : Je ne peux répéter que ce que j'ai dit quand nous avons déposé notre rapport, monsieur le sénateur. Nous avons examiné la question de l'appréciation jusqu'au début du mois d'avril, c'est-à-dire quand nous avons livré notre rapport. Entre janvier et le début avril, l'appréciation de trois cents semblait coïncider avec la montée de toutes sortes de prix de produits de base et d'ailleurs le cours des minerais a continué de grimper, celui du pétrole aussi, sans oublier ceux des céréales et des oléagineux. Parallèlement, à mesure que les stocks se sont écoulés, le secteur automobile s'est relevé quelque peu de la situation plutôt mauvaise dans laquelle il se trouvait au dernier trimestre de l'année dernière.

D'après notre évaluation, ce mouvement tenait essentiellement compte des forces économiques réelles du marché. Notre politique, comme nous vous l'avons expliqué il y a quelques années à l'occasion d'une comparution devant vous, c'est que nous n'avons pas besoin de prendre des mesures monétaires pour contrebalancer les forces du marché.

Il y a eu énormément de volatilité ces trois ou quatre dernières semaines. Nous verrons à quel niveau les choses se stabiliseront. Quand nous referons notre analyse de la situation avant de rendre public notre rapport de juillet, nous referons une autre évaluation. Nous ne pouvons pas faire cette évaluation au jour le jour ou toutes les semaines parce que les fluctuations sont assez erratiques.

Le sénateur Tkachuk : Notre dollar s'est assez bien tenu par rapport à l'euro, mais c'est le dollar américain qui fluctue passablement par rapport au nôtre. Les taux d'intérêt américains sont considérablement plus élevés que les nôtres et pourtant notre dollar s'apprécie par rapport au dollar américain. Il me semble que, si les Américains prennent des mesures pour renforcer leur dollar, cela aura des conséquences négatives pour leur économie aussi. Je ne sais pas s'ils permettent délibérément que leur dollar baisse, mais ils croient fermement aux vertus d'un dollar fort. Je trouve la situation plutôt étrange.

M. Dodge : Je ne crois pas que cela soit particulièrement étrange, compte tenu de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Nous avons parlé il y a un instant de produits de base. Notre économie a dû faire ce même ajustement au dernier trimestre de l'an dernier afin de réaligner la production avant la fin de l'année, et l'économie a crû raisonnablement bien depuis. Les finances publiques sont bien maîtrisées, et nous avons une idée assez claire de la politique monétaire optimale et des facteurs qu'il faut prendre en compte pour arrêter cette politique.

Il y a de nombreuses raisons de croire que le Canada se porte plutôt bien. Certains de ces facteurs sont pris en compte, mais nous ne pouvons pas réellement nous prononcer sur les fluctuations de la devise d'un jour sur l'autre ou d'une semaine sur l'autre.

M. Jenkins : Les États-Unis doivent compter moins sur la demande intérieure et miser davantage sur leurs exportations nettes. Les fluctuations tendancielles du dollar américain reflètent ces choix macroéconomiques dont nous avons parlé plus tôt.

Le sénateur Tkachuk : Le cours des produits de base est en hausse, et les prix de l'énergie augmentent rapidement. Le Canada est un consommateur d'énergie; il fait froid ici et les distances sont grandes. Nous devons chauffer nos usines. Dans l'Ouest, cette année, il a fait 30 sous zéro. Le prix des logements augmente deux fois plus rapidement que le taux d'inflation depuis quelques années. L'inflation se situe à 2,2 p. 100. Quand je regarde les chiffres, je me demande ce qui se passe. Qu'est-ce qui explique cela et est-ce dû uniquement au poids de la Chine?

M. Dodge : Sénateur, les Canadiens posent souvent la même question. Nous croyons que Statistique Canada publie un indice des prix à la consommation qui est inégalé ailleurs dans le monde par la qualité et l'image qu'il donne du panier de biens que consomment les Canadiens. Cet indice ne sous-estime pas l'inflation. Toutefois, le prix des biens que nous achetons tous les jours augmente rapidement, notamment celui de l'essence, ce qui, dans une certaine mesure, est perçu comme le reflet de l'ensemble des prix. Nous faisons l'épicerie toutes les semaines et nous constatons que les prix de certaines denrées, surtout les fruits et légumes, varient d'une semaine sur l'autre et sont plutôt élevés à l'heure actuelle. En outre, nous voyons que les prix des aliments qui sont fortement influencés par le cours des céréales — poulets, produits laitiers ou produits de boulangerie — évoluent dans le même sens que le cours des céréales. Nous constatons tous les jours l'évolution des prix des biens que nous achetons régulièrement. Nous ne sommes pas aussi sensibles à l'évolution des prix des biens que nous achetons moins fréquemment, même si, au fil des ans, ils représentent une part plus importante de ce panier.

Quant à la question posée plus tôt, les prix des biens importés sont en baisse au Canada. Quand nous achetons des meubles, des appareils ménagers, des vêtements ou des chaussures, ce que nous faisons moins fréquemment que nous n'achetons des aliments ou de l'essence, nous ne remarquons pas que ces prix sont en baisse.

C'est normal d'avoir l'impression que les prix augmentent plus rapidement que ne semble l'indiquer le panier de biens qui sert à calculer l'indice.

Le sénateur Goldstein : Monsieur Dodge et monsieur Jenkins, j'apprends toujours beaucoup quand je vous écoute. Le sénateur Biron et le sénateur Tkachuk ont posé presque toutes les questions que j'allais poser sur le taux de change qui me préoccupe. Votre hypothèse tient compte d'un taux de change dans une fourchette de 84,5 cents à 89,5 cents par rapport au dollar américain. Aujourd'hui, c'est à environ 90 cents. Je crois comprendre que l'un des économistes prévoit que, dans un mois ou deux, ce sera à 92,5 cents. C'est une énorme différence, qui touche directement la capacité d'exporter des fabricants canadiens. Par ailleurs, cela a l'effet inverse sur notre capacité d'acheter des biens importés et sur le prix de ces importations. Vous avez tout à fait raison de dire que cela est dû à un ajustement qui frappe l'économie mondiale toute entière et que nous devons nous y adapter.

Il y a de cela de nombreuses années, la Banque du Canada intervenait régulièrement en achetant ou en vendant des dollars canadiens afin de lisser les fluctuations du dollar, ce qui est préférable aux hausses et aux basses abruptes. La Banque continue-t-elle d'acheter et de vendre des dollars?

M. Dodge : Non, depuis 1998, nous n'intervenons pas sauf dans des circonstances exceptionnelles. Depuis ce temps, il n'y a pas eu de circonstances extraordinaires qui nous auraient incités à intervenir pour stabiliser le niveau du dollar canadien.

Le sénateur Goldstein : Qu'est-ce qui constituerait une circonstance extraordinaire? Un dollar à 92,5 cents constitue- t-il une circonstance extraordinaire à vos yeux?

M. Dodge : Non, le marché de change affiche une certaine volatilité et, quand nous analysons les graphiques, nous constatons qu'il y a eu énormément de fluctuations pendant l'année en cours, tant à la hausse qu'à la baisse. Ces fluctuations semblent toujours s'amorcer le jour de la publication du rapport de la Banque du Canada ou un peu avant. Je ne sais pas s'il y a un lien de cause à effet ou si c'est une pure coïncidence. Les marchés sont relativement ordonnés. Nous avons constaté que notre intervention n'assurait pas une plus grande stabilité et nous avons donc décidé d'y mettre fin.

Le sénateur Angus : C'est d'ailleurs l'un des aspects de votre mandat comme gouverneur de la Banque du Canada qui nous a le plus plu, mandat qu'a décrit M. Corcoran sur toute une colonne dans le Financial Post du samedi 28 avril. Il a dit que le mandat du gouverneur de la Banque du Canada est assez étroit, pour ceux qui souhaitent l'interpréter de cette façon, mais a ajouté que M. Dodge s'intéresse aussi à un grand nombre d'autres domaines et il en a énuméré une longue liste. Ce sont des domaines auxquels le comité s'est intéressé après avoir lu vos commentaire sur des sujets à approfondir, dont les déséquilibres mondiaux, les fonds de couverture, les fiducies de revenu et bon nombre des questions dont nous avons discuté aujourd'hui.

Monsieur Dodge, vous ne tirez pas votre révérence ce soir et les neuf prochains mois seront intéressants dans votre domaine de spécialisation. Avez-vous arrêté les priorités qui seront les vôtres au cours des neuf prochains mois?

Le président : Cela nous aidera à mieux cibler nos propres activités.

M. Dodge : Nous avons fait état de notre grande priorité en novembre dernier dans l'accord que nous avons conclu avec le gouvernement. Nous avons eu pour politique de contenir l'inflation, et cette politique a peu changé depuis 1991 et n'a pas du tout changé depuis 1994. Quand l'accord en vigueur prendra fin en 2011, nous aurons eu la même politique pendant 20 ans. Exception faite de la Nouvelle-Zélande, nous aurons été le pays à pratiquer le plus longtemps cette politique. La Nouvelle-Zélande a dû adopter une politique différente en cours de route.

Nous avons dit croire qu'il est très important qu'au cours des deux prochaines années nos propres analystes et ceux de l'extérieur de la Banque du Canada s'attaquent sérieusement à examiner les procédures que nous avons utilisées pour établir l'indice de référence afin que nous terminions cet exercice bien avant l'échéance de l'accord en 2011. Ce sera sans doute la tâche la plus importante pour 2007 puisque nous nous sommes donné trois ans seulement pour la mener à bonne fin. Cela sera ardu, et nous devons nous assurer de mobiliser nos gens pour qu'ils effectuent les recherches nécessaires et nous devons aussi mobiliser les intervenants au Canada.

Nous sommes très heureux de voir que l'Institut C. D. Howe participera activement au processus.

À long terme, il est important que nous fassions cette analyse de ce qui doit être notre rôle fondamental afin que nous puissions contribuer de façon optimale au bien-être des Canadiens en évitant de viser la mauvaise cible. C'est sans doute la tâche la plus importante même s'il y a de nombreux autres sujets d'intérêt.

Nous avons parlé brièvement de notre rôle sur la scène internationale lorsque nous avons répondu antérieurement à des questions. Je vais tenter de favoriser l'adoption de réformes au FMI et d'instaurer un cadre qui permettra aux autorités nationales d'avoir un dialogue fructueux au sein du Fonds. Ce sont nos deux principales préoccupations, l'une au plan intérieur et l'autre au plan international.

Le président : Vos rapports sont toujours fascinants. Je m'intéresse toujours particulièrement au lien entre le taux d'inflation et la croissance de l'économie. Selon l'information donnée à la page 9 au sujet de la croissance réelle au Canada, celle-ci s'est établie à 2,9 p. 100 en 2005 et à 2,7 p. 100 en2006. Vous expliquez ensuite votre analyse au haut de la page 9. Vous dites que vous aviez projeté une croissance de 2,4 p. 100 pour 2007 et que vous prévoyez maintenant 2,5 p. 100 pour le premier trimestre.

Je me reporte à la page 27 du texte. Je constate que c'est bien ce que dit le narratif, mais les notes en marge contiennent, j'en suis désolé, monsieur Dodge, une coquille ou quelque chose du genre puisque la croissance du PIB serait de 2,2 p. 100. Je crois qu'on devrait lire 2,5 p. 100, n'est-ce pas?

M. Dodge : Non, sénateur, vous mettez le doigt sur un problème que nous avons toujours eu.

Le président : Je vous prie de nous l'expliquer parce que nous croyons en la limpidité dans notre comité.

M. Dodge : C'est compliqué. Il y a deux façons de calculer les taux de croissance. Une façon de le faire consiste à prendre les données pour le quatrième trimestre de 2007 et de les comparer à celles du dernier trimestre de 2006. C'est une façon de faire. C'est ce qui donne 2,5 p. 100. C'est le résultat que donne cette méthode.

L'autre méthode dont vous entendez le plus souvent parler dans les quotidiens et dont vous voyez les résultats dans le texte en marge est en quelque sorte une convention, une façon d'exprimer les taux de croissance en prenant la moyenne pour l'ensemble de 2007 et en la comparant à la moyenne pour l'ensemble de 2006. C'est ce que vous voyez à la droite de la page, en marge. C'est le calcul que l'on fait. Le chiffre est presque toujours différent.

Le président : C'est pour l'année entière.

M. Dodge : L'ensemble de l'année comparé à l'ensemble de l'année précédente, par opposition à une comparaison entre le quatrième trimestre des deux années successives.

Le président : Ainsi, si je vais directement à l'essentiel, le taux de croissance est passé de 2,9 p. 100 en 2005 à 2,5 p. 100 en 2006 et à 2,2 p. 100 en 2007. C'est bien cela? Je pense qu'il est important que le public puisse comprendre vos projections.

M. Jenkins : Si l'on compare les moyennes annuelles, en 2006, la croissance de l'économie canadienne a été de 2,7 p. 100 comme l'indique le tableau 2, tout au bas, qui se trouve à la page 28. Ensuite en 2007, il y a les 2,2 p. 100 que vous avez cités, sénateur, ce qui indique un ralentissement en 2007 par rapport à 2006, puis une reprise dont le taux de croissance sera de 2,7 p. 100 en 2008 et en 2009. M. Dodge a cité ces chiffres basés sur la moyenne annuelle.

M. Dodge : C'est un véritable problème. J'aimerais que nous nous en tenions à une seule convention.

Le président : C'est une explication utile parce que les gens lisent ces rapports. Nous les lisons certainement. Vous avez éclairé ma lanterne.

J'aimerais aborder deux autres brèves questions. Nous poursuivons l'étude que vous nous aviez recommandé d'entreprendre à l'époque au sujet des obstacles au commerce interprovincial. Aujourd'hui, je me suis entretenu avec les représentants d'un institut pour tenter de les convaincre de venir témoigner sur cette question, et mon interlocuteur m'a répondu que les obstacles au commerce interprovincial ne constituent pas réellement un problème. Quand il a lu le rapport MacDonald de 1985, il a dit que l'incidence des obstacles au commerce interprovincial représentait moins de un quart de 1 p. 100 de l'économie. Êtes-vous d'accord?

M. Dodge : Je ne peux pas vous citer un chiffre précis, mais revenons à ce que nous avons dit au départ. Le véritable enjeu, c'est la capacité d'adaptation de l'économie canadienne. Nous serons toujours touchés par des chocs d'un genre ou d'un autre qui sont imprévisibles de par leur nature même. Ce qui est extrêmement important, c'est que nous puissions nous adapter rapidement à ces chocs quand ils se présentent et cela au moindre coût possible.

Si nous avons des règles et des règlements qui entravent la mobilité de la main-d'œuvre, particulièrement de la main- d'œuvre qualifiée, de sorte qu'elle ne puisse se rendre où la demande existe, dans une autre industrie ou dans une autre province, si nous avons des règles qui imposent des coûts additionnels aux entreprises qui transportent des marchandises d'une province dans une autre, si nous avons des règles qui obligent les entreprises à conditionner différemment leurs marchandises selon la provinces de destination, cela entrave sérieusement le processus d'adaptation.

En situation d'équilibre parfait, tout fonctionnerait peut-être sans heurts. Cependant, nous ne sommes jamais en situation d'équilibre, mais toujours en période d'adaptation. L'essentiel, c'est de réduire au minimum les perturbations et de faciliter l'adaptation et ses coûts, qu'il s'agisse de personnes, de marchandises ou, plus particulièrement, de services nécessitant des déplacements au-delà d'une frontière provinciale. C'est réellement très important. Nous avons constaté que c'est un problème qui touche le commerce international tout aussi bien que le commerce interprovincial.

Le président : Monsieur Dodge, merci. Vous nous avez fait de la belle publicité pour notre étude. Nous tentons de convaincre les autorités provinciales de venir témoigner. Nous en avons convaincu une ou deux de venir nous parler, mais nous allons parcourir tout le pays pour que les provinces se sentent gênées et acceptent de nous parler des obstacles au commerce interprovincial parce qu'elles sont fortes sur les vœux pieux qui ne sont toutefois pas suivis d'effets. Notre mission sera de les inciter à mettre en pratique ces vœux pieux afin d'améliorer le rendement de l'économie puisque nous partageons vos préoccupations d'ordre stratégique et macro-économique à cet égard.

Je tiens à vous remercier d'avoir défendu l'idée d'un organisme unique de réglementation des valeurs mobilières. J'espère que nous examinerons attentivement vos arguments et que nous pourrons vous donner des nouvelles intéressantes qui vous plairont. Lisez les quotidiens la semaine prochaine.

M. Dodge : Je ne vais pas lire les journaux mais la transcription de vos délibérations sur Internet pour avoir un compte rendu exact.

Le président : Monsieur Dodge, monsieur Jenkins, merci. Monsieur Dodge, quand vous quitterez votre poste, le Canada ne vous quittera pas.

C'est terminé pour aujourd'hui.

La séance est levée.


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