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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule n° 17 - Témoignages du 2 novembre 2016


OTTAWA, le mercredi 2 novembre 2016

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 12 h 5, pour étudier la teneur du projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu.

Le sénateur Larry Smith (président) occupe le fauteuil.

Le président : Bonjour à tous. Bienvenue au Comité sénatorial permanent des finances nationales. Chers collègues et téléspectateurs, le Comité est ravi d'accueillir aujourd'hui le ministre des Finances, l'honorable Bill Morneau, pour discuter du projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu.

Je m'appelle Larry Smith; je suis sénateur du Québec et président du comité. Permettez-moi de prendre un instant pour présenter les autres membres du comité. À ma gauche, nous avons la sénatrice Raynell Andreychuk, le sénateur Richard Neufeld, le sénateur Percy Mockler, la sénatrice Elizabeth Marshall et la sénatrice Nicole Eaton.

À ma droite, nous retrouvons le sénateur Joseph Day, la sénatrice Diane Bellemare et le sénateur André Pratte.

Monsieur le ministre, nous vous remercions énormément de comparaître aujourd'hui devant le comité. Nous savons que vous avez un emploi du temps chargé, tout comme les gens qui vous accompagnent.

[Français]

Aujourd'hui, nous continuons notre étude du projet de loi C-2. Nous avons déjà tenu trois réunions sur le sujet et nous avons entendu sept témoins.

[Traduction]

Monsieur le ministre, nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à dire au sujet du projet de loi C-2. Nous sommes conscients que vous ferez probablement un survol de vos prévisions économiques dans votre exposé, et je crois comprendre que deux de vos cadres supérieurs resteront avec nous pour discuter plus en détail du projet de loi C-2. Monsieur, vous avez la parole.

[Français]

L'honorable Bill Morneau, C.P., député, ministre des Finances : Honorables sénateurs, je vous remercie de me donner l'occasion d'être ici aujourd'hui. Je suis heureux d'être présent pour répondre à vos questions concernant le projet de loi C-2.

Comme vous le savez, notre gouvernement est arrivé à Ottawa il y a un an à peine avec un plan audacieux visant à renforcer la classe moyenne et à aider ceux qui travaillent fort pour en faire partie. C'est ce que nous avons fait en sachant que, lorsque l'économie est à l'œuvre pour la classe moyenne, le pays est à l'œuvre pour l'ensemble de la population.

[Traduction]

Le projet de loi C-2 contribue à atteindre cet objectif en proposant une réduction d'impôt pour la classe moyenne et une augmentation d'impôt pour le 1 p. 100 des Canadiens les plus riches pour contribuer à financer la réduction d'impôt.

Le projet de loi propose en particulier de réduire le taux d'imposition du revenu des particuliers de 22 à 20,5 p. 100.

Pour contribuer à financer cette réduction d'impôt pour la classe moyenne, le projet de loi propose également d'établir un nouveau taux d'imposition du revenu des particuliers de 33 p. 100 qui s'appliquerait au revenu imposable des particuliers supérieur à 200 000 $. Le projet de loi C-2 modifie aussi bon nombre d'autres dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu pour refléter le nouveau taux d'imposition de 33 p. 100 et réduire le plafond annuel des droits de cotisation à un compte d'épargne libre d'impôt de 10 000 à 5 500 $.

Le rétablissement à 5 500 $ du plafond annuel des droits de cotisation à un CELI est conséquent avec l'objectif du gouvernement de rendre équitable le régime fiscal et d'aider ceux qui en ont le plus besoin. Toutes ces modifications entreraient en vigueur le 1er janvier 2016.

[Français]

Honorables sénateurs, la baisse d'impôt pour la classe moyenne proposée dans ce projet de loi permettra à 9 millions de Canadiens et de Canadiennes de disposer de plus d'argent pour dépenser, investir et assurer la croissance de l'économie. Dans notre premier budget, nous sommes allés encore plus loin en assurant la nouvelle Allocation canadienne pour enfants. Même si l'allocation fait l'objet de notre projet de loi, je tiens tout de même à en parler, puisqu'il s'agit d'une composante essentielle de notre approche qui consiste à aider la classe moyenne et ceux qui travaillent fort pour en faire partie.

[Traduction]

Grâce à la nouvelle Allocation canadienne pour enfants, 9 familles canadiennes avec enfants sur 10 recevront des prestations encore plus élevées pour leurs enfants. En moyenne, elles recevront 2 300 $ de plus pour l'exercice 2016- 2017. Je dois dire que cette mesure est avantageuse. Cela permettrait à des centaines de milliers d'enfants de sortir de la pauvreté. Cela pourrait vouloir dire que des familles auront plus d'argent pour acheter des patins cet hiver. Cela permettrait à d'autres de rembourser une dette ou d'en mettre un peu plus de côté.

Dans la Loi no 2 d'exécution du budget de 2016, nous avons inclus des mesures pour nous assurer que les prestations de la nouvelle Allocation canadienne pour enfants augmentent au rythme de l'inflation à compter du 1er juillet 2020 afin que sa valeur réelle ne soit pas érodée à long terme. En indexant ces prestations au rythme de l'inflation, nous avons l'occasion de protéger les gains réalisés par les Canadiens grâce à l'Allocation canadienne pour enfants et d'investir dans un Canada meilleur pour les années et les décennies à venir.

Si le budget de 2016 était une mise de fonds pour notre plan pour rendre plus forte la classe moyenne, notre énoncé économique de l'automne, que j'ai eu l'honneur de déposer hier à la Chambre des communes, est la prochaine grande étape en vue d'améliorer la situation de la classe moyenne. Dans un contexte de croissance lente au pays et partout dans le monde, notre plan est plus important que jamais. Étant donné qu'il est question de défis et de possibilités à long terme, j'ai déposé hier des mesures qui se traduiront par des investissements supplémentaires sur une plus longue période afin de nous permettre de créer de bons emplois dès maintenant et de placer nos travailleurs, nos entreprises et nos collectivités sur la voie de la réussite.

Au cours des 11 prochaines années, le gouvernement du Canada investira un montant supplémentaire de 81 milliards de dollars dans l'infrastructure, comme le transport en commun, les villes intelligentes, l'infrastructure verte, les transports et l'infrastructure sociale en appui au commerce et à la croissance. Ces investissements comprennent aussi de soutenir les collectivités rurales et nordiques du Canada et de favoriser leur essor. Les besoins uniques des collectivités rurales nécessitent une approche plus ciblée; nous investirons 2 milliards de dollars de notre plan afin d'aider ces collectivités à avoir du succès et à participer à la réussite globale du Canada.

En tenant compte des fonds existants, nous investirons au total plus de 180 milliards de dollars au cours des 11 prochaines années au profit de nos villages, de nos villes et des corridors commerciaux afin d'assainir l'air, d'améliorer la qualité de l'eau, de rendre les quartiers plus accueillants pour nos enfants et de favoriser des collectivités plus intelligentes et mieux connectées.

En vue de mettre davantage à profit la construction d'infrastructure en nous appuyant sur la croissance intelligente, le gouvernement établit une nouvelle banque de l'infrastructure du Canada, qui injectera au moins 35 milliards de dollars pour nous aider à entreprendre des projets de transformation qui pourraient autrement ne pas se concrétiser.

Ces investissements sont sans précédent dans l'histoire du Canada, et ils arrivent à un moment où les besoins sont considérables. Nous avons heureusement ce qu'il faut pour répondre à ces besoins et d'autres. Nous avons ce qu'il faut pour connaître du succès. Le Canada jouit de ressources dont peuvent seulement rêver d'autres pays, y compris notre plus importante ressource : une population hautement qualifiée et très instruite. Nous avons une situation financière enviable, et nous nous engageons à la maintenir parmi les meilleures dans le monde. Nous avons annoncé hier la création d'une nouvelle institution, Investir au Canada, pour nous assurer que le monde en est bien conscient.

Nous avons besoin de partenariats solides à l'échelle internationale pour créer de bons emplois canadiens. Notre stratégie en matière de compétences mondiales soutiendra davantage les entreprises canadiennes en veillant à ce qu'elles puissent attirer les personnes les plus talentueuses et aient accès en temps opportun aux compétences et à l'expertise internationale particulières qui leur permettront de prendre de l'expansion et de prospérer ici même au pays.

Ces investissements sont synonymes de progrès. Cela signifie que les Canadiens se tourneront vers l'avenir avec confiance pour profiter de tout ce que l'avenir aura à leur offrir.

[Français]

Je répondrai avec plaisir à toutes questions que vous pourriez avoir à propos de notre plan visant à assurer la progression de la classe moyenne et au sujet du projet de loi C-2.

[Traduction]

Le président : Merci, monsieur le ministre. Nous avons 30 minutes avec le ministre avant qu'il doive nous quitter.

M. Morneau : J'ai été très rapide.

Le président : Vous avez été excellent.

[Français]

J'aimerais demander à tout le monde de poser des questions précises et brèves.

[Traduction]

Essayer de ne pas prendre trop de temps pour poser vos questions. Assurez-vous de répondre directement à nos questions. Nous en avons déjà plusieurs.

La sénatrice Marshall : Monsieur le ministre, lorsque nous nous sommes rencontrés en juin, en réponse à une question, nous avons discuté de la définition de la « classe moyenne » et de l'aide à la classe moyenne. Dans votre témoignage, voici ce que vous avez dit : « Nous ciblons la tranche d'imposition de 45 000 à 90 000 $, ce qui aide clairement toute personne qui gagne plus de 45 000 $ en réduisant son taux d'imposition. »

Ce taux d'imposition a été réduit dans le projet de loi C-2. C'est une bonne chose. Cependant, lorsque nous en avons examiné les détails, nous avons découvert que les personnes ayant un revenu imposable supérieur à 140 000 $ sont celles qui en profiteront en fait le plus. Ce ne sont pas les Canadiens qui sont dans la tranche d'imposition de 45 000 à 90 000 $.

Dans le projet de loi C-2, le taux d'imposition pour les gens qui gagnent plus de 200 000 $ est augmenté de sorte qu'ils ne profiteront pas de la réduction d'impôt, et c'est parfait. Pourquoi n'avez-vous pas augmenté le taux d'imposition pour les Canadiens ayant un revenu supérieur à 120 000 ou à 140 000 $ pour rendre les changements fiscaux neutres dans leur cas et ainsi faire profiter de ces économies aux Canadiens de la tranche d'imposition inférieure et aider ceux qui ont un revenu de 45 000 à 90 000 $?

M. Morneau : C'est une question importante à laquelle nous devons répondre. La meilleure manière d'y répondre est de reconnaître que ce que nous faisons ne peut pas être examiné de manière individuelle. Nous devons tenir compte de l'ensemble des mesures que nous prenons au nom de la classe moyenne et des contribuables qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts.

Comme vous le savez, les Canadiens ressentent beaucoup les effets de nos mesures; nous avons réduit le taux d'imposition pour les contribuables qui gagnent entre 45 000 et 90 000 $. Nous sommes conscients que la réduction d'impôt profite à tous les Canadiens jusqu'à ce qu'ils atteignent le taux d'imposition le plus élevé, soit le nouveau taux de 33 p. 100. Nous avons pris de nombreuses autres mesures en même temps.

Les prestations de l'Allocation canadienne pour enfants sont maintenant fondées sur les moyens. Bref, l'élimination de la Prestation universelle pour la garde d'enfants a aussi eu de grands effets sur les Canadiens à revenu faible et moyen. Nous avons décidé que les gens dans les tranches d'imposition inférieures peuvent recevoir un avantage considérablement plus grand pendant qu'ils élèvent leurs enfants. Cette décision a eu de grands effets.

Notre décision de mettre l'accent sur les personnes âgées vivant seules et d'augmenter le Supplément de revenu garanti pour elles a aussi eu un grand effet. Donc, si nous tenons compte de l'ensemble des mesures, cela aide les Canadiens qui sont dans une situation très difficile ou qui ont une famille et un faible revenu; cela aide les familles canadiennes de la classe moyenne à en recevoir plus, en particulier s'ils ont des enfants, mais cela ne s'applique pas aux personnes à revenu élevé.

Il y a un nombre infini de manières de modifier le régime fiscal pour accomplir notre objectif. Nous avons choisi d'en faire profiter le plus les familles et d'en faire profiter aussi considérablement les Canadiens de la classe moyenne.

La sénatrice Marshall : Ce que vous dites me semble contradictoire, parce que ce sont les contribuables à faible revenu qui profitent le plus du crédit pour enfants. Cependant, en ce qui concerne les allégements fiscaux, ce sont les contribuables à revenu élevé qui en profitent le plus. Voilà ce qui me préoccupe au sujet du projet de loi.

Le président : Nous avons réalisé de nombreuses analyses en la matière pour éviter d'être pris de court, mais vous en comprenez le fonctionnement. En gros, les contribuables qui gagnent de 100 000 à 200 000 $ en sont les grands gagnants. Nous comprenons que c'est une combinaison. Le gouvernement conservateur a fait la même chose. Il avait son lot de programmes. Nous examinons la teneur et les avantages du projet de loi C-2, parce que cela entraîne un déficit de 1,8 milliard de dollars. Nous voulons nous assurer d'essayer de gérer le mieux possible notre argent pour vous en donner une idée.

Le directeur parlementaire du budget, soit le spécialiste externe en fiscalité, a réalisé les analyses à ce chapitre; c'est donc crédible.

La sénatrice Eaton : Parlant du directeur parlementaire du budget, il a confirmé que le projet de loi C-2 profitera aux 30 p. 100 des Canadiens les plus riches, tandis que 65 p. 100 de la population n'en tireront aucun avantage.

Personne n'a été en mesure de dire précisément ce que constitue la classe moyenne. Qu'est-ce qu'un revenu moyen? Les gens font allusion à la classe moyenne et parlent d'aider la classe moyenne. Qu'est-ce que la classe moyenne? Personne ne peut nous chiffrer ce concept. Merci.

M. Morneau : Me posez-vous la question?

La sénatrice Eaton : Oui. C'est une question. Selon vous, qu'est-ce que la classe moyenne?

M. Morneau : Je pourrais commencer par revenir un peu en arrière, parce que le sénateur Smith m'a remis cette page qui présente les contribuables qui profitent de nos modifications fiscales. Vous y avez aussi fait référence, sénatrice Eaton.

Nous ne pouvons pas examiner cette mesure sans tenir compte des autres. Nous avons donc éliminé la Prestation universelle pour la garde d'enfants, ce qui a des effets sur un nombre considérable de contribuables de la tranche supérieure. Nous avons aussi éliminé bon nombre de crédits d'impôt en même temps. La manière dont nous avons créé l'Allocation canadienne pour enfants influe considérablement sur les familles des tranches inférieures.

La sénatrice Eaton : Pouvez-vous l'expliquer? Est-ce que votre nouvelle Allocation canadienne pour enfants profitera aux contribuables qui gagnent de 0 à 200 000 $?

M. Morneau : Les prestations sont fondées sur les moyens; donc, c'est de 0 à 150 000 $.

La sénatrice Eaton : Ensuite, cela commence à...

M. Morneau : Non. Je crois que le processus fondé sur les moyens fait en sorte que les gens qui gagnent plus de 175 000 $ ne reçoivent rien, selon le nombre d'enfants.

La sénatrice Eaton : Quand cela disparaît-il : à 60 000 ou à 80 000 $?

M. Morneau : Non. Il y a une courbe, et les prestations diminuent, tout en tenant compte du nombre d'enfants. Je crois que les familles qui gagnent 175 000 $ n'ont pas droit à ces prestations, mis à part quelques rares exceptions pour les gens qui ont beaucoup plus d'enfants que moi. L'idée, c'est que cela diminue en fonction des moyens.

Je dirais que l'examen en vase clos de cette situation ne rend pas justice à ce que nous faisons pour les Canadiens. Nous offrons de grands avantages à 9 familles sur 10 qui ont des enfants et qui reçoivent cette allocation.

C'est important de nous attarder un instant aux chiffres. Nous sortirons 300 000 enfants canadiens de la pauvreté. Cela représente une réduction de 40 p. 100 de la pauvreté chez les enfants entre 2017 et 2014. Nous croyons que nous aurons le plus d'effets en concentrant nos efforts sur ceux qui en ont le plus besoin.

C'est globalement ce que nous essayons d'accomplir. Il est évident que les contribuables qui gagnent plus d'argent profitent des allégements fiscaux, parce qu'ils ont un revenu plus élevé et que le régime fiscal fonctionne par tranches, mais les avantages qu'ils en retireront seront moindres que les contribuables de la tranche d'imposition inférieure, qui reçoivent d'autres prestations, comme l'Allocation canadienne pour enfants.

Si vous me le permettez, votre dernière question sur la tranche d'imposition...

La sénatrice Eaton : Pourrais-je vous demander de préciser un aspect? Si je suis une femme célibataire qui gagne 45 000 ou 200 000 $, il me reste quand même plus d'argent dans les poches selon votre plan qu'une femme célibataire qui gagne 45 000 $ et qui ne reçoit pas les autres prestations, comme l'Allocation canadienne pour enfants. Est-ce exact?

M. Morneau : Si vous êtes une femme célibataire avec un enfant et que vous avez un revenu de 40 000 $...

La sénatrice Eaton : Cependant, sans enfant. Je n'ai pas d'enfants et j'ai un revenu de 200 000 ou de 45 000 $. À 200 000 $, j'en profiterais davantage, n'est-ce pas?

M. Morneau : Oui. Votre revenu est plus élevé à 200 000 $.

La sénatrice Eaton : De plus, vos allégements fiscaux seront en pourcentage plus avantageux pour moi, n'est-ce pas?

M. Morneau : Non. Ils ne seront pas en pourcentage plus avantageux.

[Français]

Le sénateur Mockler : Je remercie le ministre de sa présence pour répondre à nos questions concernant le projet de loi C-2.

Je suis très inquiet lorsque je vois que 65 p. 100 des Canadiens et des Canadiennes gagne moins de 45 000 $ de revenu par année. C'est l'information dont nous disposons. Plusieurs personnes ont différentes interprétations de la définition de la classe moyenne. Ma question est la suivante :

[Traduction]

J'aimerais parler de votre programme électoral. Vous avez sillonné le Canada d'est en ouest et du sud au nord. À la page 10 de ce que vous appelez Redonner à la classe moyenne, il est écrit que vous demanderez un peu plus d'argent aux plus riches pour le donner à la classe moyenne.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Pouvez-vous aussi nous donner la définition de ce qu'est réellement la classe moyenne? Nous avons entendu de nombreux témoins devant le comité, et ils ont de la difficulté à définir la « classe moyenne ».

M. Morneau : Il y a évidemment bien des façons de définir la classe moyenne canadienne. On peut notamment se reporter aux tranches d'imposition qui sont déjà en place. Il existe une tranche d'imposition pour les revenus de 45 000 $ à 90 000 $. La tranche suivante englobe les revenus de 90 000 $ à 140 000 $.

Loin de moi l'idée de prétendre savoir exactement quelle proportion des gens dans ces deux tranches d'imposition appartiennent à la classe moyenne, mais je pense que si on demandait l'avis des gens, la grande majorité d'entre eux seraient probablement d'accord pour dire que la classe moyenne ne vise pas ceux qui font partie des fourchettes supérieures à 140 000 $ ou des fourchettes inférieures à 45 000 $. C'est peut-être là une réponse trop générale, mais il ne s'agit pas d'une tranche d'imposition bien précise, avec une limite inférieure et une limite supérieure.

Nous reconnaissons qu'il y a beaucoup de gens au Canada qui gagnent, comme vous le dites, moins de 45 000 $. Bien entendu, certains d'entre eux sont mariés et disposent de plus d'une source de revenus dans leur famille, alors que d'autres ne le sont pas. Certains de ces gens ont des enfants, et d'autres n'en ont pas.

Nous avons concentré nos efforts sur les gens qui ont les besoins les plus criants au fil des différentes étapes de leur vie. En mettant l'accent sur l'Allocation canadienne pour enfants, nous avons tenu compte des personnes qui élèvent une famille et qui ont un revenu faible ou moyen.

L'Allocation canadienne pour enfants, qui profite à 3,2 millions de familles, vient également en aide à un nombre important de familles monoparentales. En effet, 65 p. 100 des familles visées sont des familles monoparentales. Cette mesure a donc une incidence importante sur les gens les plus défavorisés.

Nous croyons que, dans l'ensemble, nous avons eu un impact énorme sur la pauvreté des enfants et sur les familles qui se démènent à élever leurs enfants, et nous avons réussi en même temps à aider les aînés les plus défavorisés grâce au Supplément de revenu garanti. Nous avons pris des mesures qui permettent d'accroître la progressivité du régime fiscal en augmentant les impôts des contribuables dont le revenu se situe dans la tranche supérieure de 1 p. 100.

Comme je l'ai dit, il y a un nombre infini de moyens de nous y prendre. Nous estimons que notre approche offre un avantage considérable aux personnes dans le besoin, en plus de traiter efficacement les nouvelles questions liées à l'inégalité des revenus.

Le sénateur Neufeld : Monsieur le ministre, merci d'être des nôtres cet après-midi. Ma question porte sur les CELI. Plusieurs groupes de témoins nous ont expliqué que la décision de ramener le plafond de 10 000 $ à 5 000 $, montant qui est indexé à 5 500 $ cette année, causera du tort, dans bien des cas, aux aînés à faible revenu. L'augmentation des économies est essentielle, nous ont-ils dit, afin de permettre aux personnes âgées d'épargner pour leur retraite. En fait, d'autres nous ont affirmé que si une personne peut se permettre de cotiser 10 000 $ dans un CELI, alors elle n'a pas besoin d'aide.

Permettez-moi d'ouvrir une petite parenthèse. Disons qu'une personne âgée a acheté sa maison il y a 50 ans : autrement dit, cette personne est riche en biens constitués par sa maison, mais pauvre en revenu. Sa maison a une grande valeur; elle est payée au complet. La valeur de la propriété est supérieure à celle au moment de l'achat, mais la personne a toujours du mal à joindre les deux bouts. Qu'y aurait-il de mal à ce que ces gens soient en mesure d'accéder à une hypothèque inversée de sorte qu'ils puissent cotiser 10 000 $ dans un CELI pour épargner en vue de leur retraite?

Je n'arrive absolument pas à comprendre pourquoi on choisit de réduire le plafond du CELI du simple fait que ce n'est pas tout le monde qui peut cotiser 10 000 $. Vous avez dit récemment qu'à votre connaissance, plus d'un million de familles n'ont pas épargné suffisamment pour leur retraite. Alors pourquoi diable opteriez-vous pour une approche régressive en ramenant le plafond de 10 000 $ à 5 500 $?

M. Morneau : Merci de me poser la question. Il est important de ne pas perdre de vue le contexte. Rappelez-vous que la décision de faire passer le plafond de 5 500 $ à 10 000 $ a été prise dans le cadre d'une campagne électorale. C'était une mesure hâtive adoptée par le gouvernement précédent. Nous, de notre côté, avons présenté un autre plaidoyer aux Canadiens. Nous avons dit que nous voulions améliorer le régime fiscal au profit des Canadiens qui ont des enfants et de manière à accroître la progressivité.

Les Canadiens ont voté pour cette dernière option, c'est-à-dire pour l'approche que nous avons proposée. Nous avons jugé important d'expliquer pourquoi nous prenions de telles mesures. Nous avons fait valoir qu'étant donné que 6,7 p. 100 des Canadiens utilisaient le montant total qui leur était permis, cet avantage ne profitait qu'à un petit groupe de personnes.

Nous sommes d'avis que le CELI constitue un élément important de notre système. L'idée de maintenir le CELI, assorti d'un plafond indexé de 5 500 $, correspond beaucoup plus à l'objectif initial de cette mesure, qui a été lancée, je vous le rappelle, avec un plafond de 5 000 $, lequel est ensuite passé à 5 500 $ après un certain nombre d'années. À notre avis, c'est ce qui s'imposait.

Jusqu'à présent, les gens ont accumulé des droits de cotisation de 46 000 $ dans le CELI, et ce montant continuera de croître avec le temps. Selon nous, il s'agit d'une bonne approche qui nous permet d'avoir une marge de manœuvre pour prendre d'autres mesures qui auront une plus grande incidence sur un plus vaste éventail de la population canadienne. Nous sommes résolus à améliorer la vie des Canadiens de la classe moyenne, et c'est ce que veulent les gens. Nous sommes convaincus que les mesures que nous avons prises nous permettront d'y arriver.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Monsieur le ministre, depuis le début nous étudions le projet de loi C-2 en vase clos. Puisque le ministère a toutes les données, peut-il nous transmettre les études sur les effets globaux sur le budget, y compris la hausse des transferts, l'allocation pour enfants et l'abolition du fractionnement du revenu? Ce serait très utile d'obtenir des données et de connaître l'impact sur la répartition des revenus des familles canadiennes, selon qu'elles ont des enfants ou non.

J'en profite aussi pour vous poser la question suivante : pouvez-vous nous rappeler la raison pour laquelle le projet de loi n'a pas été déposé dans le cadre de la mise en œuvre du budget? En fait, pourquoi le projet de loi n'est-il pas étudié dans le cadre du budget?

M. Morneau : Je vous remercie de cette question. Nous avons beaucoup d'informations et nous pourrons vous les transmettre. Nous avons mené des études pour nous assurer que nous pouvions aider les familles canadiennes, la classe moyenne, avec toutes ces mesures.

Cela signifie que 300 000 enfants qui vivaient dans la pauvreté seront dans une meilleure situation après l'arrivée de l'Allocation canadienne pour enfants. Nous savons que nos réductions d'impôt aideront 9 millions de Canadiens qui auront davantage d'argent dans leur poche. Nous savons qu'en moyenne, ces réductions d'impôt représentent 330 $ pour une personne seule et 540 $ pour une famille.

Nous avons les chiffres et nous vous tiendrons au courant des résultats à la suite de ces changements. Quant à la question de savoir pourquoi nous l'avons à l'extérieur du budget, la raison est simple. C'est parce qu'il est nécessaire pour les gens de comprendre leur situation avant le début de l'année. Pour les impôts, c'est préférable de commencer avant le premier janvier, parce que c'est le début de l'exercice financier. C'est pour cette raison que nous avons fait cette annonce à l'avance pour les familles et pour les individus. De cette façon, ils sont en mesure de mieux comprendre leur situation.

[Traduction]

Le sénateur Pratte : Pour en revenir au point soulevé par la sénatrice Bellemare, il serait très utile — j'insiste là- dessus — d'avoir des données sur différentes catégories de familles et de contribuables ainsi que sur l'effet conjugué de toutes ces modifications, parce que cela nous permettrait de voir l'impact de l'ensemble de ces mesures sur des types précis de familles et de contribuables.

Comme vous l'avez peut-être constaté, il y a un chiffre qui a impressionné de nombreux sénateurs, moi y compris : 65 p. 100 des contribuables ne profiteraient pas des modifications prévues dans le projet de loi C-2. Cela comprendrait, évidemment, les 35 p. 100 de personnes qui ne versent actuellement aucun impôt et qui ne seront pas touchées par ces changements ainsi que les personnes qui gagnent moins de 45 000 $. En tout cas, le pourcentage de 65 p. 100 a étonné beaucoup de sénateurs, même à la Chambre haute.

Serait-il possible d'obtenir le nombre équivalent de personnes qui profiteraient de tous les changements que vous avez apportés, notamment l'Allocation canadienne pour enfants et les changements au Supplément de revenu garanti? Quel pourcentage de Canadiens profiteront de ces changements? Nous pouvons en déduire que ce pourcentage est supérieur à 35 p. 100. Je serais curieux de savoir s'il est possible de faire ces calculs et d'envoyer l'information au comité.

M. Morneau : Nous vous fournirons des exemples. Je viens de m'enquérir des chiffres auprès d'Andrew, qui, comme j'ai fini par l'apprendre, semble connaître à peu près tout ce qu'il faut sur les impôts et les chiffres. Il souligne que le pourcentage de 35 p. 100 représente, comme vous l'avez dit, les Canadiens qui ne produisent pas de déclaration d'impôt, et 31 p. 100 d'entre eux se situent dans la tranche d'imposition inférieure.

Bien entendu, mes quatre enfants font partie de ces 31 p. 100 de Canadiens : deux d'entre eux sont à l'université et les deux autres, au secondaire. Ils ont chacun gagné de l'argent l'année dernière, mais pas assez pour payer des impôts. Il y a un grand nombre de Canadiens que nous ne ciblons pas, comme vous pouvez le comprendre.

Nous donnerons des exemples concrets de familles qui ont été touchées et nous préciserons de quelle façon elles l'ont été, en plus d'indiquer le nombre total de personnes qui paieront moins d'impôt cette année et les effets cumulés de l'Allocation canadienne pour enfants par rapport à ceux des crédits d'impôt modifiés qui s'inscrivaient dans l'approche du gouvernement précédent.

Ayant vu ces chiffres, je peux vous dire que dans le cas des 9 familles sur 10 qui bénéficient de l'Allocation canadienne pour enfants, et nous tenons également compte des familles qui ne touchent pas de prestations en fonction de leurs moyens — ainsi, je ne fais pas partie des 9 familles sur 10 —, elles se trouvent en meilleure situation financière avec en moyenne 2 300 $ de plus, à la suite de toutes les modifications. Cela comprend la suppression des crédits d'impôt parce que nous avons constaté qu'ils ne profitaient pas à tout le monde de façon égale, et nous avons voulu prendre des mesures plus simples qui ont une incidence sur un plus grand nombre de personnes. Nous vous fournirons les chiffres, mais j'aimerais rassurer le comité que nous les avons passés en revue pour évaluer les répercussions.

La sénatrice Andreychuk : Votre campagne électorale reposait sur la prémisse que vous aviez une vision différente de celle du parti au pouvoir. Je dirais que la plupart des gens qui se considèrent comme appartenant à la classe moyenne ont souscrit à votre objectif d'assurer la croissance de la classe moyenne dans l'espoir que leur situation s'améliorerait.

Je suis plutôt vexée, à l'instar des autres sénateurs, parce que je n'ai aucun moyen de définir la « classe moyenne », ce qui m'empêche d'évaluer s'il y a effectivement une croissance. J'ai besoin de cette information pour savoir si de nouveaux emplois sont créés, à qui ils sont accordés et à quels types d'emplois nous avons affaire. C'est ce qui permettra de déterminer si nous nous portons mieux.

Certains citoyens viennent me demander : « Pouvez-vous m'expliquer comment je vais m'en tirer mieux quand je n'arrive pas à trouver un emploi ou quand je n'ai qu'un emploi à temps partiel? » Pour pouvoir déclarer que 9 familles sur 10 seront en meilleure situation, nous avons besoin de quelques chiffres calculables afin de déterminer, sur papier, du moins, si nous avons réalisé des progrès sur le plan de la croissance de la classe moyenne. Nous vous demandons donc de définir cette notion, en tenant compte de ce que le sénateur Pratte a dit. Nous avons besoin de ces chiffres pour prendre part au dialogue.

M. Morneau : Nous vous fournirons des chiffres pour montrer comment les Canadiens s'en tirent mieux grâce aux modifications fiscales que nous avons apportées, pour indiquer combien d'entre eux se portent mieux grâce à l'Allocation canadienne pour enfants et pour mettre en évidence l'effet cumulé de ces modifications.

Je m'attendrais ensuite à ce que vous nous obligiez à rendre compte des investissements que nous effectuerons à long terme pour stimuler notre économie, car c'est ce qui s'impose pour accroître les possibilités d'emploi et créer des avantages pour les Canadiens partout au pays. Et c'est certainement ce que nous sommes déterminés à faire.

Le président : Merci, monsieur.

Le sénateur Day : Monsieur le ministre, beaucoup de témoins nous ont dit qu'un de vos objectifs devrait être de simplifier la Loi de l'impôt sur le revenu, qui est devenue de plus en plus volumineuse au fil des ans. La première étape que je vous propose, c'est de supprimer les crédits d'impôt non remboursables — des sommes dérisoires — qui ont été légués par le gouvernement précédent et que vous avez laissés dans la loi. Pouvez-vous nous donner l'assurance que ce n'est pas la fin de la réforme fiscale et que vous présenterez un plan pour simplifier cette loi de sorte que les gens puissent produire eux-mêmes leur déclaration d'impôt sur le revenu?

M. Morneau : Oui, tout à fait. Permettez-moi tout d'abord de dire qu'il ne s'agit pas là, selon moi, d'une question partisane. Ce n'est pas seulement le gouvernement précédent qui a compliqué le régime fiscal. Le code fiscal a gagné en complexité sur une longue période, et c'est quelque chose qui exige une attention constante. Sachez que nous avons établi un groupe consultatif qui nous aide actuellement à examiner le régime fiscal. Nous pensons avoir déployé des efforts de simplification dans le budget de 2016, mais nous savons qu'il reste du travail à faire à cet égard; ainsi, nous devons examiner les mesures qui n'ont plus les effets escomptés pour nous assurer que le régime fiscal est toujours juste et, surtout, pour reconnaître que la simplicité est un objectif en soi puisque les gens doivent comprendre le régime fiscal pour que celui-ci produise les résultats souhaités.

Nous poursuivons nos efforts en ce sens. Nous espérons obtenir des résultats concrets cette année, et ce sera un de nos thèmes récurrents.

Le président : Un des principaux thèmes qui ressortent de tous les témoignages que nous avons entendus, c'est peut- être que nous reconnaissons les avantages de la prestation fiscale canadienne pour enfants, qui est le prolongement d'une mesure instaurée par le gouvernement précédent, mais il s'agit d'une approche différente, l'objectif étant d'uniformiser les règles du jeu. Or, nous ajoutons environ 3,4 milliards de dollars au déficit pour financer ce programme. Je crois que tout le monde ici présent serait d'avis qu'il s'agit d'une bonne mesure parce que nous donnons un coup de pouce aux familles et nous aidons à sortir les enfants de la pauvreté.

Selon moi, là où le bât blesse — et il ne s'agit pas d'une question partisane —, c'est que le directeur parlementaire du budget et d'autres spécialistes ayant effectué des analyses pour nous ont affirmé que cette mesure nous coûtera 1,8 milliard de dollars par année. Si l'on prend le cas d'une personne qui gagne 60 000 $ à titre de particulier, elle obtiendra un crédit d'impôt de 2,6 p. 100 parce que le redressement fiscal de la tranche d'imposition est de 7 p. 100. Il ne s'agit donc pas d'une réduction d'impôt de 7 p. 100, mais d'un redressement de la tranche d'imposition.

Un montant de 261 $ permet de payer l'épicerie pour trois personnes pendant une semaine ou, si l'on se serre la ceinture, peut-être pendant deux semaines. Un couple marié recevra un crédit de 500 $. Si le groupe que nous ciblons touche des revenus se situant entre 45 000 $ et 90 000 $, les contribuables de la tranche supérieure recevront 696 $, ce qui représente un crédit de 4,2 p. 100; dans le cas d'un couple dont un des conjoints gagne un revenu dans cette fourchette, le crédit sera d'environ 1 200 $, si je comprends bien. Par contre, si votre conjoint gagne 85 000 $ et que le revenu du ménage passe du coup à 180 000 $, vous obtiendrez 820 $; à 150 000 $, vous toucherez 766 $.

Le problème, c'est que nous prenons l'argent des hauts salariés qui gagnent plus de 200 000 $ — ils sont au nombre d'environ 330 000 —, et nous sommes censés cibler un groupe précis que nous appelons la classe moyenne, qui est, en réalité, très difficile à cerner. Nous devrions peut-être l'appeler le revenu moyen.

La question avec laquelle nous nous débattons toujours est la suivante : le projet de loi permet-il d'aider les gens visés? Il y a beaucoup de confusion à cet égard.

J'ai travaillé dans le domaine de la vente toute ma vie, et je sais que vous voulez vendre un ensemble de mesures, composées de toutes sortes d'éléments, mais si on calcule 1,9 ou 1,8 milliard de dollars par année sur quatre ans, on obtient 8,9 milliards de dollars.

J'ai une question simple à vous poser : le montant de 1,7 ou 1,8 milliard de dollars est-il prévu dans le déficit de cette année?

M. Morneau : Permettez-moi de répéter qu'il ne s'agit pas d'une simple affaire de vente. Nous avons pris un certain nombre de mesures qui, nous le savons, ont des répercussions sur les Canadiens qui se trouvent dans différentes situations. Nous avons essayé notamment de nous y prendre de la manière la plus simple, c'est-à-dire en nous concentrant sur une tranche d'imposition qui aurait une grande incidence; ainsi, nous avons simplifié les prestations pour enfants en regroupant trois programmes en un seul afin d'obtenir de meilleurs résultats.

Nous faisons donc des efforts considérables en matière de simplification pour aider les gens à mieux comprendre leur situation financière. Nous nous sommes également efforcés d'accroître la progressivité du régime fiscal. Force est de constater que les Canadiens de la classe moyenne sont très inquiets du manque de possibilités, et nous travaillons à remédier à la situation.

Notre objectif, comme vous le savez, est d'investir dans l'avenir. À mesure que vous examinerez nos investissements, vous nous demanderez des comptes, j'en suis sûr, afin de garantir que nous effectuons des investissements qui auront la plus grande incidence sur l'économie.

Hier, nous avons annoncé non seulement d'importants investissements en infrastructure, mais aussi des idées sur la façon dont nous pouvons simplifier ces investissements de sorte qu'ils aient les plus grandes répercussions sur l'économie : il s'agit, par exemple, de miser sur le financement du secteur privé par l'entremise de fonds de pension et d'investisseurs institutionnels et de trouver un moyen de promouvoir notre pays à l'échelle internationale afin de créer des emplois ici.

Comme je l'ai dit, les gens pourront proposer bien des façons potentielles de procéder pour atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé. Nous avons choisi une façon qui, selon nous, est simple et facile à comprendre et qui a une incidence vraiment importante sur les familles qui élèvent leurs enfants dans la tranche de revenu inférieure jusqu'aux tranches de revenu beaucoup plus élevées alors que nous avons décidé de hausser pour eux le niveau de progressivité.

Nous pensons que c'est ce qu'il faut faire, que c'est ce pour quoi les Canadiens ont voté, et nous restons engagés à travailler en vue de faire en sorte que les Canadiens qui travaillent fort pour élever leurs familles bénéficient de retombées avantageuses.

Le président : Pour votre information, le Comité des finances a accompli du très bon travail jusqu'à présent pour ce qui est d'examiner l'infrastructure. Notre rapport initial sera probablement publié d'ici la fin de novembre, ce qui est toujours tôt dans le processus, car nous l'envisageons comme un processus en deux étapes. Nous avons entendu des maires de grandes, de moyennes et de petites villes; nous avons entendu des représentants d'associations, de groupes de soutien et de groupes d'intérêt; et nous essayons vraiment de trouver des façons d'aider le gouvernement à le faire de façon un peu plus efficace que ce qui a été fait à ce jour, étant donné, comme vous l'avez dit, que vous avez un plan à long terme, et qu'il est essentiel que vous le mettiez en œuvre et que vous obteniez des résultats aussi rapidement que possible pour pouvoir créer des emplois et les retombées dont vous parlez, car la patience des gens a des limites, et il est important que nous soyons en mesure de faire quelque chose qui contribue à améliorer le système.

Il s'agit d'une question non partisane, et nous avons obtenu un soutien extraordinaire de tous les côtés — les indépendants, les libéraux, les conservateurs — et nous essayons vraiment de nous assurer que nous pouvons appuyer une orientation à l'avenir.

Nous vous savons gré du temps que vous nous avez accordé, monsieur.

Ensuite, nous passerons en revue le projet de loi C-2 avec le personnel du ministre.

[Français]

Nous recevons maintenant deux représentants du ministère des Finances qui nous expliqueront les composantes du projet de loi C-2.

[Traduction]

Peu de sénateurs ont assisté à la première séance d'information.

Notre objectif est de passer cela en revue avec nos représentants du ministère des Finances, et nous avons environ 20 minutes tout au plus pour ce faire. Alors commençons. Nos collègues ont-ils des questions sur la façon dont nous voulons participer ou avancer dans cette situation? Sommes-nous prêts?

Commençons par le commencement et reconnaissons que nous avons des limites de temps. Nous allons essayer de poser des questions tout en gardant à l'esprit le fait que les gens sont occupés. Merci, monsieur McGowan.

Trevor McGowan, chef, Division de la législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances Canada : Peut-être qu'une bonne façon de procéder serait d'éplucher le projet de loi article par article, d'arrêter à chaque sujet pour poser des questions et de laisser, en quelque sorte, tomber le survol pour faire un peu plus court.

Le projet de loi compte trois composantes principales : la première vise les modifications aux taux d'imposition du revenu des particuliers, la deuxième vise le rétablissement du plafond de cotisation du compte d'épargne libre d'impôt à son indice de base précédent, et la troisième est un certain nombre de modifications corrélatives à l'introduction du nouveau taux marginal maximal.

L'article 1 du projet de loi prévoit des modifications aux taux d'imposition du revenu des particuliers et l'instauration d'une nouvelle tranche d'imposition. Il s'agit d'une réduction de 22 p. 100 à 20,5 p. 100 de la deuxième tranche d'imposition, qui vise les revenus de 45 000 $ à environ 90 000 $. En outre, comme il en a été question plus tôt, on instaure un nouveau taux marginal maximum pour les particuliers, sur les revenus supérieurs à 200 000 $.

Il est bon de noter que les seuils en dollars dans le projet de loi sont tous mis à jour en fonction de leur valeur de 2016, bien qu'il ne s'agisse par d'un changement de fond. Tels seront les chiffres de toute façon, mais cela les uniformise pour la même année, comme le nouveau seuil de 200 000 $.

Le président : Des questions sur ce point en particulier?

La sénatrice Andreychuk : Je crois me souvenir d'un témoin qui avait dit que vos prévisions et tout le matériel que vous allez nous fournir se trouvent dans les tableaux, si bien que nous pouvons en faire le suivi. Nous ciblons les personnes qui gagnent plus de 200 000 $ dont le taux sera haussé. Cependant, nous avons aussi entendu dire que les gens savaient que cette politique serait instaurée et qu'ils ont déjà rajusté leur revenu. En a-t-on tenu compte? Autrement dit, vos prévisions nous montreront-elles la différence entre ce que les gens faisaient et ce qu'ils feront plus tard ou ce qu'ils ont déjà fait?

Pierre Leblanc, directeur, Division de l'impôt des particuliers, ministère des Finances Canada : Cette question a deux volets. Vous pouvez penser à une réponse à très court terme, comme celle que vous venez de soulever, sénatrice Andreychuk. Les gens savaient que le taux serait haussé, donc qu'il influerait sur leur revenu.

Vous en trouverez la description dans le rapport financier annuel du gouvernement. L'ampleur de cette incidence y est décrite. Les collègues de la Direction des politiques économique et budgétaire qui viennent de partir seraient mieux placés pour en discuter.

Le second volet se rapporte au comportement adopté concernant le revenu imposable. Le ministère en tient compte dans son cadre d'établissement des coûts.

Le président : Nous serait-il possible de consulter ces calculs?

M. Leblanc : Bien sûr. Si vous jetez un coup d'œil au document d'information publié le 7 décembre, il montre que la hausse de revenus estimée pour le taux de 33 p. 100 est fondée sur le comportement qui devrait être adopté. En termes techniques, il s'agit d'une élasticité du revenu imposable de 0,4, et il en est clairement question dans le document d'information. Nous avons donc clairement énoncé nos hypothèses ici.

Le président : C'est donc de notoriété publique; nous y avons accès?

M. Leblanc : Oui.

Le président : Pouvons-nous passer au point suivant?

La sénatrice Cools : Votons-nous article par article?

Le président : Non, nous ne faisons qu'obtenir des explications pour mieux comprendre les points sur lesquels nous devrons voter quand nous passerons à l'étude article par article.

Il s'agit donc d'un échange de renseignements, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Pouvons-nous passer au point suivant pour essayer de respecter l'échéancier que nous nous sommes fixé?

M. McGowan : L'article 2 instaure un nouveau crédit d'impôt pour don de bienfaisance majoré qui vise les particuliers dont le revenu est assujetti au taux marginal maximal de 33 p. 100, le nouveau taux, pour avoir droit à un crédit d'impôt pour don de bienfaisance de 33 p. 100.

Après le dépôt de ce projet de loi, tel qu'il a été annoncé dans le budget de 2016, on a peaufiné cette mesure énoncée dans le projet de loi C-15, qui a reçu la sanction royale en juin dernier. Les mesures prévues à l'article 2 ont, dans les faits, été remplacées par une version de la règle qui soit plus à jour et plus favorable aux contribuables; cette version rehausse l'application d'un crédit d'impôt pour don de bienfaisance dans le contexte des fiducies qui, comme nous le verrons plus tard, sont généralement sujettes à une imposition au tarif maximal de leur revenu total.

En conséquence, cet article 2 a effectivement été remplacé par une mesure semblable qui a reçu la sanction royale dans le cadre du projet de loi C-15, et il était prévu qu'une fois que le projet de loi C-2 aurait reçu la sanction royale, le contenu de l'article 2, quel qu'il soit, serait automatiquement remplacé par la nouvelle version plus généreuse de la règle.

Le président : Pouvez-vous nous donner un simple exemple, un simple exemple en chiffres, de la façon dont cela fonctionnerait dans les faits? Je suis un particulier; je fais un don de 1 000 $ au YMCA. Quelle sera l'incidence du nouveau rajustement apporté au don de bienfaisance, en termes simples?

M. Leblanc : Bien sûr. Sur ce don de 1 000 $, imaginons, monsieur le sénateur, que ce particulier a un revenu imposable supérieur à 200 000 $. Dans le cadre du système précédent, un taux de crédit de 29 p. 100 s'appliquait aux 800 $, taux qui se situera maintenant à 33 p. 100.

Un taux de 15 p. 100 s'appliquera toujours à la première tranche de 200 $. Partons du principe qu'il n'y a pas d'autres dons. Et maintenant, au lieu de 29 p. 100, vous aurez droit à 33 p. 100 sur 800 $.

Le président : Il est ici question de déduction.

M. Leblanc : De crédit, oui.

Le sénateur Pratte : J'apprends tellement de choses différentes tous les jours.

Alors nous allons voter sur une chose que nous savons être désuète? Alors pourquoi votons-nous sur cet article? Nous votons sur lui...

La sénatrice Cools : Parce qu'il figure dans le projet de loi, et si vous ne votez pas sur l'article, le projet de loi ne sera pas adopté.

Le président : A-t-on répondu à votre question?

Le sénateur Pratte : Oui.

Le président : L'idée ici est que nous ne votons sur rien. Nous essayons de comprendre ce que l'amendement...

Le sénateur Pratte : Cependant, nous finirons par devoir voter sur l'article 2, sachant que l'article 2 est désuet.

Le président : Nous devons voter sur chaque article pendant notre étude.

La sénatrice Cools : Cela arrive tout le temps.

Le président : Désolé, sénatrice Marshall?

La sénatrice Marshall : Pourriez-vous répéter ce que vous disiez concernant les fiducies? Avez-vous dit que tous les revenus tirés des fiducies sont imposés au nouveau taux majoré?

M. McGowan : Heureusement, peut-être, et je ne veux pas aller trop vite, mais c'est une bonne transition pour nous amener à l'article 5 du projet de loi, qui se trouve à la page 3. La plupart des fiducies, appelées fiducies non testamentaires, sont sujettes à un impôt sur le revenu retenu dans la fiducie au taux marginal le plus élevé. Auparavant, ce taux se situait à 29 p. 100, mais ce montant est haussé à 33 p. 100 dans le projet de loi C-2.

L'idée est que si le revenu dans la fiducie est imposé au taux marginal le plus élevé, les personnes qui gagnent un revenu élevé ne seront pas incitées à transférer de revenu à la fiducie.

La sénatrice Marshall : C'est là où je voulais en venir.

M. McGowan : Cela ne s'applique pas aux fonds payés à même la fiducie, qui sont imposés entre les mains des bénéficiaires. Il s'agit d'un revenu généré à partir des sommes versées dans la fiducie et conservé dans la fiducie.

La sénatrice Marshall : D'accord, conservé dans la fiducie.

M. McGowan : Il y a deux exceptions. J'ai dit que les fiducies étaient généralement sujettes au taux d'imposition marginal le plus élevé. Une exception s'applique aux fiducies admissibles pour personnes handicapées, qui sont, en gros, des fiducies pour les personnes handicapées admissibles au Crédit d'impôt pour personnes handicapées. L'autre s'applique aux soi-disant successions assujetties à l'imposition à taux progressifs, et ce sont des fiducies qui peuvent être créées par suite du décès d'une personne. Ces deux types de fiducies sont autorisés à utiliser les tranches d'imposition progressive mais, dans la plupart des cas, ils sont assujettis au taux d'imposition maximal.

Le sénateur Day : Monsieur McGowan, le projet de loi C-2 a d'abord été déposé l'an dernier, c'est bien cela?

M. McGowan : C'est exact. Il a été déposé en décembre 2015.

Le sénateur Day : S'il avait été traité rapidement, les deux projets de loi ne se chevaucheraient pas. Étant donné qu'il ne l'a pas été, cela fait presque un an qu'il est à l'étude, on a déposé un autre projet de loi qui reconnaît l'importance d'instaurer certains changements. En ce qui concerne le deuxième article, si le projet de loi est adopté, cette partie sera automatiquement remplacée par une autre mesure législative.

M. McGowan : C'est exact.

Le sénateur Day : Merci.

Le président : Continuons, monsieur McGowan.

M. McGowan : Les articles 3 et 4 du projet de loi contiennent aussi des amendements corrélatifs à l'instauration du nouveau taux d'imposition marginal le plus élevé. Je vais les traiter ensemble, car ils se rapportent au même impôt, soit l'impôt sur le revenu fractionné, communément appelé « l'impôt des enfants ». Il s'agit d'un impôt imposé au taux marginal le plus élevé en vue de prévenir le fractionnement du revenu, comme le nom « impôts des enfants » le suggère, avec vos enfants, qui sont vraisemblablement assujettis à un taux d'imposition beaucoup moindre; un enfant de trois ans et un autre de huit ans ne gagnent pas beaucoup d'argent.

Ces règles s'appliquent aux personnes qui ont, par exemple, une société familiale, une entreprise privée, et dont les jeunes enfants reçoivent des parts et des revenus de dividendes répartis qui iraient normalement à un parent au revenu élevé et dont le revenu serait imposé au taux marginal maximal. Cette mesure vise à prévenir le fractionnement du revenu avec les enfants ou l'évasion fiscale grâce à cette technique. Le taux, qui était de 29 p. 100, sera maintenant haussé à 33 p. 100.

Le président : Continuons.

M. McGowan : Nous avons déjà discuté de l'article 5, qui fait passer de 29 à 33 p. 100 l'impôt sur les fiducies.

Les prochains articles — 6, 7 et 8 — portent tous sur les revenus d'investissement passif gagnés par les sociétés privées. Le projet de loi contient une série de règles visant à prévenir le report potentiel de l'impôt par des personnes à revenu élevé — c'est-à-dire des personnes sujettes au taux d'imposition maximal — en gagnant certains types de revenus passifs au lieu de revenus directs — donc des dividendes de portefeuille, des intérêts, des choses du genre — dans une société, car les taux d'imposition des sociétés sont moins élevés que les taux d'imposition des particuliers, même avec ou sans la déduction accordée aux petites entreprises.

Des impôts remboursables sont imposés par ces types de revenu dans une société et ils sont remboursables lorsqu'ils sont versés aux actionnaires individuels car, dans ce cas, il n'y aurait pas d'avantages de report. Les actionnaires reçoivent le revenu sur lequel ils sont imposés.

Ces impôts servent, dans les faits, à hausser les taux d'imposition des sociétés à un niveau suffisamment élevé pour prévenir tout report de revenu pouvant être réalisé en transférant son revenu passif dans une entreprise.

Vous verrez à l'article 6 qu'il existe un impôt supplémentaire sur ce qu'on appelle le revenu de placements global d'une société privée sous contrôle canadien. Il s'agit d'un impôt remboursable de 6,33 p. 100 de plus sur le revenu d'investissement que gagne une société privée. Ce chiffre a été haussé à 30,33 p. 100 et, encore une fois, cette augmentation de 4 points de pourcentage est simplement conforme au nouveau taux d'imposition marginal plus élevé, qui a augmenté de 4 p. 100 — passant de 29 à 33 p. 100. Cette mesure a pour but de maintenir l'objectif et l'effet des règles visant à prévenir tout report d'impôt en transférant son revenu passif à une société privée.

La sénatrice Marshall : Ces règles s'appliquent aux sociétés privées sous contrôle canadien, n'est-ce pas? Combien y en a-t-il au Canada? Pourrait-il s'agir de sociétés mises sur pied par des médecins, des dentistes et des professionnels? Ces sociétés sont-elles visées?

M. McGowan : Je ne pense pas que nous ayons le nombre de sociétés privées sous contrôle canadien à portée de la main aujourd'hui. Les exemples que vous avez cités sont tous de sociétés professionnelles. Dans la mesure où les professionnels — les médecins, les avocats et les dentistes — sont autorisés à se constituer en société pour gérer leurs entreprises, ils fonderaient une société qui serait vraisemblablement une société privée sous contrôle canadien, mais il pourrait aussi s'agir d'un dépanneur ou d'un concessionnaire d'automobiles. Tout type d'entreprise peut être mené par une de ces sociétés privées. Ce ne sont donc pas seulement les professionnels qui sont visés, mais tous les types d'entreprises.

La sénatrice Marshall : Seriez-vous en mesure de nous obtenir le nombre d'entreprises en question? Nous n'avons reçu aucun témoin qui nous ait parlé de l'incidence de ces amendements.

J'ai vraiment essayé de prendre ces amendements et d'en faire le suivi dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Je pense que le sénateur Day a mentionné la simplification de la Loi de l'impôt. Après cette expérience, je suis d'accord avec lui.

Le sénateur Day : C'est amusant, n'est-ce pas?

Le président : C'est ce qui se produit, sénateur Day, lorsque vous faites affaire avec la vérificatrice générale de Terre- Neuve-et-Labrador.

La sénatrice Marshall : L'ancienne vérificatrice générale.

La sénatrice Andreychuk : Pour quelle raison de politique publique fait-on tout cela? Nous avons entendu le témoignage du ministre, et nous avons entendu pendant la période précédente que l'impôt devrait être plus équitable, que les gens aux revenus supérieurs devraient en payer davantage et que le but était d'assurer la croissance de la classe moyenne et de frapper la classe supérieure. Cependant, toutes ces fiducies et autres le font, alors avons-nous toujours la même politique publique de faire payer plus d'impôts à ce groupe?

Si nous essayons de maintenir et de favoriser l'innovation en entreprise, où se trouve l'équilibre advenant que certaines sociétés quittent le pays ou prennent une autre direction, puis trouvent un autre mécanisme? Ce genre de mesure n'aura-t-elle pas une incidence? Quelle était la politique gouvernementale? La mesure touche les PME lorsqu'il est question de ces fiducies, y compris les petits cabinets d'avocats et les autres.

M. McGowan : J'aimerais aborder deux ou trois questions. La première se rapporte à la politique générale qui sous- tend ces règles supplémentaires, ainsi que celle dont nous avons discuté précédemment, qui consiste à appliquer le taux d'imposition marginal le plus élevé aux fiducies. Cette mesure traite d'une politique fiscale fondamentale qu'on appelle l'équité. L'objectif est de s'assurer qu'une personne qui gagne 100 $ ne soit pas avantagée, peu importe si le gain est direct ou s'il provient d'une fiducie ou d'une société. Ces règles veillent à ce que les contribuables ne puissent pas être avantagés s'ils transfèrent leur revenu passif dans un autre type d'instrument de placement.

Il s'agit vraiment de la politique qui empêche tout report d'impôt inapproprié au moyen d'un simple transfert de revenu de placement passif dans l'un de ces autres types d'instruments.

La sénatrice Andreychuk : C'est inapproprié, mais légitime. Qu'entendez-vous par « inapproprié »?

M. McGowan : Comme je l'ai dit, c'est inapproprié dans le contexte du principe d'équité dont j'ai parlé tout à l'heure. En effet, une personne devrait payer le même montant en impôts, peu importe si ses gains sont directs ou s'ils proviennent d'une fiducie ou d'une société. Les charges supplémentaires qui sont imposées aux sociétés, ce qu'on appelle ici l'impôt remboursable, sont appliquées au revenu de placement et au revenu passif, et non pas au revenu des entreprises — c'est mon deuxième point. Par conséquent, le revenu d'entreprise actif d'une société privée sous contrôle canadien sera encore assujetti au taux d'imposition le moins élevé, qui était de 10,5 p. 100 au fédéral pour l'année 2016. C'est le taux d'imposition qui est appliqué à votre revenu d'entreprise actif.

Nous parlons plutôt ici de placements passifs. Comme je l'ai dit, il s'agit des actions, des dividendes, des intérêts d'obligations et de ce genre de choses, qui peuvent facilement être transférés à un autre type d'instrument de placement. Il est question de ce genre de revenu de placement passif, et non pas du revenu actif d'un cabinet d'avocats, de médecins ou de dentistes, pour faire suite aux exemples de tout à l'heure. Ces revenus ne sont pas touchés par la mesure. C'est plutôt du revenu passif dont il est question.

Le président : Pouvons-nous continuer? Il nous reste trois minutes avant de devoir libérer M. McGowan et M. Leblanc.

M. McGowan : Très rapidement, les articles 7 et 8 viennent compléter le tableau de l'impôt remboursable supplémentaire.

L'article 8, qui se trouve à la page 5 du projet de loi, porte sur la taxe visée à la partie IV. L'objectif est de s'assurer que les dividendes versés entre sociétés ne puissent pas être employés à des fins de report d'impôt.

L'article 7 traite principalement du remboursement. Il faut payer ces impôts remboursables supplémentaires, et lorsque la société les verse sous forme de dividendes à ses actionnaires, elle est remboursée. Par conséquent, le report est éliminé et la société récupère les impôts payés.

Toutes ces mesures sont renforcées, et le taux d'imposition marginal le plus élevé est rehaussé pour garder le cap sur l'objectif antireport d'impôt des règles.

Le président : Votre dividende remboursable passera donc à 38 p. 100, n'est-ce pas?

M. McGowan : C'est exact.

Le président : Il était de 33 p. 100 auparavant, et le taux passe maintenant à 38 p. 100.

La sénatrice Marshall : Parlons-nous toujours de sociétés privées sous contrôle canadien? Bien. Il n'est pas question des sociétés cotées en bourse?

M. McGowan : Non. Il y a tellement d'éléments en arrière-plan.

La sénatrice Marshall : Merci.

M. McGowan : La question nécessite souvent un bon mois de réflexion et un cours sur l'impôt des sociétés, mais je vous remercie de la poser. Je sais que je parcours rapidement le projet de loi.

L'article 9 porte sur le retour du plafond CELI à sa limite précédente, qui était initialement de 5 000 $, puis qui a été indexé à l'inflation. La somme augmente par multiple de 500 $ suivant l'inflation, de sorte qu'elle s'élève à 5 500 $ en 2016. Le plafond de 10 000 $ demeure en vigueur pour l'année civile 2015, mais à l'avenir, le plafond des contributions à un CELI reviendra à ce qu'il aurait été s'il n'avait pas été augmenté jusqu'à 10 000 $. Le plafond est de 5 500 $ pour 2016, et il continuera d'augmenter au rythme de l'inflation.

Le sénateur Neufeld : Je ne suis ni comptable ni ancien vérificateur. Pour ce qui est des modifications que vous avez apportées aux fiducies de revenu et aux sociétés privées grâce à ces dispositions, pouvez-vous nous dire combien d'argent en plus a été amassé pour le gouvernement du Canada? Vous deviez avoir un comparable lorsque vous avez établi les augmentations. Quel montant total s'attend-on à récupérer auprès de tous ceux qui ont investi dans ces instruments?

M. Leblanc : Monsieur le sénateur, la réponse se trouve dans le document d'information que nous avons publié lorsque ces mesures ont été annoncées le 7 décembre de l'année dernière. Au cours du présent exercice de 2016-2017, le total s'élève à 210 millions de dollars. Pour l'exercice 2017-2018, il s'agit de 310 millions de dollars. Il y a un petit obstacle concernant la façon dont les sociétés font leurs déclarations de revenus. Puis pour les exercices 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021, le montant est d'environ 260 millions de dollars par année.

Le président : Y a-t-il d'autres questions ou commentaires?

Le sénateur Day : Le plafond du compte d'épargne libre d'impôt est passé de 10 000 à 5 500 $ par année. Je crois savoir que les dispositions précédentes reviendront en vigueur, et que le montant sera indexé de telle sorte que le plafond sera majoré lorsque la hausse atteindra 500 $. Ai-je bien compris? Ce n'était pas ainsi auparavant. Il ne s'agit pas d'une indexation annuelle. C'est cumulatif.

M. McGowan : C'est exact. Le montant basé sur le plafond initial de 5 000 $ est indexé, puis il est arrondi au plus proche multiple de 500 $. Je crois que c'est en 2013 que le plafond a franchi le seuil de 5 250 $, puis a été majoré à 5 500 $. Par la suite, les augmentations continueront à suivre ce principe.

Le sénateur Day : Avons-nous perdu une année d'indexation en raison de l'exercice où le plafond est passé à 10 000 $, ou pouvons-nous simplement oublier cette hausse?

M. McGowan : Non. Nous revenons vraiment à la procédure antérieure. En fait, le plafond non arrondi de 2016 s'élève à 5 559 $. Il est donc légèrement supérieur à 5 500 $. Il est beaucoup plus précis de suivre le cheminement que le plafond aurait suivi, ce qui signifie que le plafond pourrait éventuellement passer de 5 500 à 6 000 $.

Le sénateur Day : Tout dépend de l'inflation des prochaines années.

M. Leblanc : Le plafond pourrait atteindre 6 000 $ en 2018. C'est plus probable en 2019, mais nous verrons comment l'inflation évolue.

Le président : Nous avons une feuille d'information pour tous les membres du comité qui le souhaitent. Ce n'est qu'une petite mise à jour à propos des CELI. Il y avait 15,1 millions de comptes CELI ouverts en 2014. Ces données proviennent de l'Agence du revenu du Canada, ou ARC. De ce nombre, 7,3 millions appartiennent à des citoyens dont le revenu était inférieur à 45 000 $ en 2014. En 2013, 2,1 millions de personnes âgées ayant un revenu inférieur à 45 000 $ détenaient un compte. Au total, 3,2 millions de personnes âgées possédaient un compte en 2013. La contribution moyenne est de 2 892 $ pour l'ensemble des comptes.

À titre informatif, nous avons deux courbes, l'une pour le plafond de 5 500 $, et l'autre pour celui de 10 000 $. Il s'agit de l'ancien régime par rapport au nouveau. Si vous avez commencé à cotiser à 18 ans, lorsque vous aurez 28 ans, soit 10 ans plus tard, vos droits de cotisation seront naturellement de 55 000 $ sous le régime à 5 500 $, comparativement à 100 000 $. À l'âge de 48 ans, vous aurez droit à 165 000 $ de cotisation avec l'ancien plafond de 5 500 $, par rapport à 300 000 $ pour le régime à 10 000 $. À 68 ans, vous aurez droit à des cotisations de 275 000 $ avec le plafond de 5 500 $ par rapport à 500 000 $ avec le plafond supérieur. Voilà qui vous montre les options que vous aviez par rapport à celles que vous avez maintenant.

Voici l'une des questions qui se poseront lorsque des gens envisageront de modifier des dispositions fiscales : que devrait-on faire du CELI? Doit-on maintenir le statu quo ou passer à l'étape suivante? Et quelle est la prochaine étape?

M. Leblanc : À titre comparatif, le plafond de 5 500 $ doit être indexé.

Le sénateur Day : Oui, c'est exact, alors que celui de 10 000 $ n'était pas indexé. Vous utilisiez donc les 5 500 $ plusieurs années à l'avance.

Le président : Veuillez m'excuser, mais j'aimerais vous montrer les chiffres sous un régime, puis sous l'autre. Vous avez raison de dire que l'indexation est importante, mais il semble que vous ne rattraperez jamais le montant réel de 500 000 $. Nous devons faire le calcul pour saisir la comparaison réelle. Je voulais seulement donner à tout le monde un exemple de ce qui est possible et de ce qui ne l'est pas.

La sénatrice Marshall : J'aimerais que d'autres témoins nous parlent de l'incidence des articles 6, 7 et 8. Nous n'avons parlé à aucune personne touchée par les modifications apportées aux sociétés privées sous contrôle canadien.

Le président : Messieurs, nous vous remercions infiniment du temps que vous avez passé avec nous. C'était très productif. Puisqu'il n'y a pas d'autre question, je déclare la séance levée.

(La séance est levée.)

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