Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule no 97 - Témoignages du 6 juin 2019
OTTAWA, le jeudi 6 juin 2019
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 13 h 31, pour étudier la teneur complète du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures.
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je m’appelle Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick et président du Comité sénatorial permanent des finances nationales.
[Français]
J’aimerais souhaiter la bienvenue à tous ceux et celles qui sont présents ici dans la salle, et à tous les Canadiens et Canadiennes qui nous regardent à la télévision ou en ligne.
[Traduction]
De plus, je rappelle à nos auditeurs que les audiences du comité sont publiques et accessibles en ligne sur sencanada.ca.
Je voudrais maintenant demander aux sénateurs de se présenter.
Le sénateur Klyne : Marty Klyne, de la Saskatchewan.
[Français]
Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Duncan : Pat Duncan, du Yukon.
La sénatrice Andreychuk : Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.
Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique.
La sénatrice Eaton : Nicky Eaton, de l’Ontario.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, de l’Ontario.
[Français]
J’aimerais également vous présenter la greffière du comité, Mme Gaëtane Lemay, et nos deux analystes, Alex Smith et Shaowei Pu qui, ensemble, appuient les travaux du comité.
[Traduction]
Mesdames et messieurs, il y a une nouvelle personne parmi nous, Kalina Waltos. C’est une greffière législative en formation. Je lui souhaite donc aussi la bienvenue à la réunion.
Je précise aux sénateurs et aux membres du public qui nous regardent que nous poursuivons aujourd’hui notre étude de la teneur du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures. Cette étude préalable du projet de loi a été renvoyée au comité par le Sénat du Canada le 2 mai 2019.
Mesdames et messieurs, durant la première heure, nous allons étudier la partie 1n). Comme on peut le voir dans le sommaire du projet de loi, cette partie porte sur les mesures de soutien à l’intention des employés qui doivent rembourser un trop-payé de salaire. Pour abréger, appelons cela la « Mesure Phénix ».
Durant la deuxième partie de notre réunion, nous nous pencherons sur la partie 4, section 4, plus précisément sur l’important paiement prévu pour la Fédération canadienne des municipalités.
Pour commencer, mesdames et messieurs, nous accueillons, pour discuter de la mesure Phénix, M. Stéphane Aubry, vice-président de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada, et M. Simon Coakeley, chef de la direction de l’Association nationale des retraités fédéraux.
J’ai été informé par la greffière en formation que M. Aubry présentera son exposé en premier, suivi de M. Coakeley. Nous passerons ensuite aux questions des sénateurs.
[Français]
Cela dit, monsieur Aubry, la parole est à vous.
[Traduction]
Stéphane Aubry, vice-président, Institut professionnel de la fonction publique du Canada :
Bonjour, je m’appelle Stéphane Aubry. Je suis vice-président de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada, le syndicat qui représente plus de 60 000 fonctionnaires partout au pays, la plupart œuvrant pour le gouvernement fédéral.
[Français]
Je suis honoré d’être avec vous aujourd’hui.
[Traduction]
Je suis accompagné de M. Ryan Campbell, notre économiste, qui pourra aussi répondre aux questions.
Nos membres apportent une contribution vitale au Canada et aux Canadiens chaque jour. L’Institut représente des spécialistes des technologies de l’information, des chercheurs, du personnel infirmier et des vérificateurs de l’impôt en plus de toute une gamme d’autres professionnels. Nous sommes le plus grand syndicat de professionnels du pays.
[Français]
Nous vous remercions de nous avoir invités aujourd’hui pour vous faire part de nos commentaires sur le système de paie Phénix et de la façon dont on peut soutenir les employés qui doivent rembourser un trop-payé de salaire à leur employeur en raison d’une erreur administrative, de système ou d’écriture.
[Traduction]
J’aimerais commencer par rappeler le terrible impact que ce système de paie déficient a eu sur des dizaines de milliers des personnes que nous représentons. Au cours des trois dernières années, ces dernières ont dû composer avec un système de paie incapable de les payer à temps, adéquatement et correctement. Elles reçoivent trop d’argent ou pas assez; parfois, elles ne sont tout simplement pas payées. Bon nombre n’ont pas eu accès à leurs prestations de santé et à leurs prestations dentaires ou à leur indemnité de départ en raison de problèmes dans le système.
[Français]
Le fiasco Phénix fait subir énormément de stress et de préjudices aux employés fédéraux, qui ont du mal notamment à payer leurs factures, leur loyer et leur hypothèque. Leurs familles souffrent aussi de la situation, ce qui en a poussé certains à chercher du travail ailleurs et à démissionner de la fonction publique.
[Traduction]
Nos membres sont frustrés et en colère et ils n’arrivent tout simplement pas à comprendre pourquoi la situation dure depuis aussi longtemps. Mais ils continuent tout de même de se présenter au travail. Pourquoi? Parce qu’ils sont des fonctionnaires dévoués et des professionnels. Ils méritent que leur employeur, le gouvernement fédéral, prenne toutes les mesures nécessaires pour leur éviter les conséquences de l’incroyable échec qu’est le système Phénix.
C’est la raison pour laquelle l’IPFPC a été heureux de formuler des commentaires dans le cadre de la consultation publique du ministère des Finances du Canada à la Chambre des communes plus tôt cette année relativement aux ébauches de propositions législatives liées aux trop-payés. C’est ce que nous appelons le problème de remboursement concernant « le montant net par rapport au montant brut ». Même si la loi s’appliquait aussi aux employeurs autres que le gouvernement fédéral, nous avons bien sûr concentré nos commentaires sur l’effet que la mesure peut avoir sur les employés fédéraux. Nous avons évalué si les changements proposés aideraient nos membres qui sont confrontés aux conséquences fiscales négatives découlant des trop-payés provoqués par les systèmes Phénix et la mesure dans laquelle les mesures seraient bénéfiques.
[Français]
De manière générale, nous estimons que les changements proposés permettront effectivement aux membres de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada de surmonter le fardeau fiscal subi en raison de trop-payés. Cela dit, nous avons quelques préoccupations.
[Traduction]
Premièrement, les conditions établies dans le paragraphe 153(3.1) du projet de loi précisant que les trop-payés découlent « d’une erreur d’écriture, administrative ou systémique » doivent être précisées afin que toutes les erreurs liées au système Phénix soient visées par cette définition.
Deuxièmement, le sous-alinéa 153(3.1)c)(i) exige que l’employeur fasse un choix selon les modalités prescrites pour que le paragraphe 153(3.1) s’applique à la somme excédentaire.
Cette disposition exige un geste unilatéral de l’employeur, sans lequel l’employé pourrait ne pas pouvoir se prévaloir du recours et avoir à rembourser le montant brut à l’employeur, pour ensuite récupérer les déductions liées aux trop-payés auprès de l’Agence du revenu du Canada.
Dans un même ordre d’idées, la période de trois ans exigera des employés qu’ils négocient des arrangements de remboursement avec leurs employeurs en respectant ce délai, ce qui peut exercer des pressions sur certaines personnes et donner indirectement un avantage à l’employeur.
Même si elles sont conformes aux règles actuelles de la LIR et aux politiques de l’ARC, ces deux conditions ne correspondent pas au recours à l’approche en matière de remboursement la plus souple possible demandée par le Conseil du Trésor. Le projet de loi actuel fait en sorte que l’employeur a un pouvoir discrétionnaire et qu’il pourrait refuser de coopérer de façon déraisonnable. Dans un tel contexte, l’Institut estime que l’employeur devrait être obligé d’appliquer le paragraphe 153(3.1) lorsqu’un employé le demande.
Notre troisième commentaire concerne la durée d’un arrangement de remboursement. Un employé doit avoir remboursé ce qu’il doit ou avoir conclu un arrangement relativement à un tel remboursement avant la fin de la troisième année suivant l’année civile où le trop-payé a eu lieu. Le sous-alinéa 153(3.1)c)(iii) prévoit qu’un employé doit avoir remboursé ou pris des arrangements pour rembourser l’excédent du paiement excédentaire total sur la somme excédentaire.
L’Institut veut obtenir une précision quant à son interprétation de la condition selon laquelle le calendrier de remboursement en tant que tel doit être établi durant une période de trois ans, mais que le calendrier de remboursement peut, quant à lui, s’échelonner sur une plus longue période.
On tiendrait ainsi compte des membres qui ont plusieurs trop-payés ou des trop-payés élevés à rembourser. Un tel traitement serait conforme à la directive du Conseil du Trésor selon laquelle l’employeur doit prendre les arrangements les plus souples possible avec les membres et les employés touchés.
Enfin, nous soulignons aussi que le ministre peut établir des critères supplémentaires par règlement, ce qui pourrait réduire encore plus la portée d’application du paragraphe 153(3.1).
[Français]
Nous sommes reconnaissants aux représentants du ministère des Finances qui ont communiqué avec nous à propos des commentaires que nous avons faits à la Chambre des communes.
[Traduction]
On nous a informés que l’Agence du revenu du Canada publiera des lignes directrices supplémentaires prochainement pour aider les employeurs à mettre en œuvre les modifications proposées.
Même si cela est assurément utile, nous ne saurons trop insister sur l’importance pour le gouvernement de s’assurer que tous ses ministères et organismes connaissent la politique sur les trop-payés concernant le montant net par rapport au montant brut et qu’ils l’appliquent correctement dans les dossiers de nos membres.
Il y a des situations précises auxquelles l’employeur doit porter une attention particulière, comme les situations où des personnes ont déjà commencé le remboursement en fonction du montant brut ou se sont engagées relativement à un plan connexe. Ces personnes peuvent-elles changer de procédure ou tout simplement rembourser le montant net?
Une autre situation concerne les employés qui avaient des problèmes de paie avant l’adoption du système Phénix. Sont-ils liés par le délai de trois ans relativement à l’établissement d’un plan de remboursement?
Nous sommes aussi préoccupés par les employés qui travaillent au Québec et qui peuvent avoir à composer avec deux agences de revenu distinctes relativement à ces enjeux.
Ce sont les exemples des genres de choses que le gouvernement doit bien faire s’il veut vraiment aider les employés à régler leurs problèmes de remboursement avec un minimum de frustration. Nos membres ont souffert assez en raison du système Phénix. Assurons-nous qu’ils sont traités adéquatement et efficacement lorsqu’il est question de rembourser les trop-payés qui se sont produits sans que ce soit de leur faute.
[Français]
Merci beaucoup, encore une fois, de nous avoir donné l’occasion de présenter notre position au comité.
Le président : Merci, monsieur Aubry.
[Traduction]
Simon Coakeley, chef de la direction, Association nationale des retraités fédéraux : Bonjour mesdames et messieurs les sénateurs. Je suis accompagné aujourd’hui de Patrick Imbeau, l’un de nos agents des programmes de la défense des intérêts. J’aimerais remercier le Comité sénatorial permanent des finances nationales d’avoir invité notre association à parler du projet de loi C-97, Loi no 1 d’exécution du budget de 2019.
Retraités fédéraux est le plus important organisme national de défense des membres actifs et retraités de la fonction publique fédérale, des Forces armées canadiennes et la GRC ainsi que des juges de nomination fédérale à la retraite, de leurs partenaires et de leurs survivants.
L’organisation est fière de ses 56 ans d’histoire en matière de défense des intérêts de ses membres et de tous les retraités. En collaboration avec nos bénévoles et 176 000 membres de partout au pays, nous poursuivons notre tradition de campagnes de défense des intérêts vigoureuses et intelligentes qui visent à protéger les pensions et les prestations durement gagnées de nos membres contre les changements qui les menacent et appuient les politiques valables et qui améliorent la vie de tous les Canadiens à la retraite.
On nous a demandé de parler de la partie 1n) du projet de loi C-97. Cette partie du projet de loi décrit le traitement accordé aux employés qui sont tenus de rembourser un versement de salaire excédentaire à leur employeur en raison d’une erreur d’écriture, administrative ou systémique. Essentiellement, elle permettra à l’employé de rembourser à son employeur seulement le montant net du paiement en trop, ce qui est particulièrement pertinent pour les employés retraités du secteur public fédéral à l’heure actuelle, et l’article de la loi proposée constitue un pas dans la bonne direction.
[Français]
Depuis le début de 2016, les fonctionnaires fédéraux, y compris les retraités, ont été touchés par de nombreuses défaillances du système de paie Phénix. Ces défaillances comprennent l’obligation de rembourser les sommes brutes qui ont été payées en trop, par opposition aux sommes nettes. Cela signifie que, même si le retraité ou l’employé mettait de côté les fonds supplémentaires qu’il a reçus sans que ce soit de sa faute, il serait alors forcé de rembourser les sommes qui lui avaient été versées en son nom à l’ARC, au RPC et aux primes de l’AE. Il lui incomberait alors de chercher à recouvrer les fonds manquants auprès de ces mêmes organismes.
Les retraités et les employés n’étaient pas responsables des salaires ou d’autres paiements en trop. Ils ne devraient pas avoir à porter le fardeau des remboursements bruts et des années marquées par la confusion, les difficultés fiscales, l’incertitude et les difficultés financières, en raison d’un système de paie défaillant.
Les modifications législatives proposées aideront à alléger une partie du fardeau imposé aux retraités et aux employés du secteur public fédéral. Toutefois, ce n’est qu’un palliatif. Il faut s’attaquer à la source même de ces problèmes : le système de paie Phénix doit être réparé.
[Traduction]
Pour nos membres, le système de paie Phénix a été une source constante de stress. Dans un sondage mené auprès de 3 000 de nos membres récemment retraités, 42 p. 100 ont déclaré avoir un problème de versement lié à Phénix, qu’il s’agisse de paiements qui n’ont pas cessé d’être versés après la retraite ou des milliers de dollars encore dus à des retraités pour des indemnités de fin d’emploi ou de congé annuel. Un grand nombre de nos membres ont connu des difficultés financières et un stress psychologique en raison des défaillances de Phénix, souvent en raison de l’obligation de rembourser des montants bruts imposants.
Retraités fédéraux souligne l’urgence de cette question. Certains employés retraités fédéraux vivent dans l’ombre de Phénix et des pressions financières qu’il entraîne depuis plus de trois ans. Le gouvernement du Canada doit veiller à ce que les employés et les retraités puissent se prévaloir immédiatement du traitement proposé à la partie 1n) du projet de loi C-97.
De plus, il incombe au gouvernement de communiquer de façon proactive avec les retraités et les employés touchés par le système Phénix qui peuvent bénéficier du nouveau cadre. Nous attendons avec impatience d’autres nouvelles positives à ce sujet et nous avons hâte d’aider et d’appuyer les ministères compétents du gouvernement du Canada qui assureront une mise en œuvre solide des changements proposés à l’égard des retraités et des employés qui ont été touchés par le système de paie Phénix.
Ensemble, nous pouvons donner aux retraités fédéraux et à leurs priorités la considération dont ils ont besoin et qu’ils méritent.
Merci beaucoup, je serai heureux de répondre à vos questions.
La sénatrice Marshall : Pouvez-vous nous donner une idée de l’expérience qu’ont vécue les personnes que vous représentez qui ont dû rembourser le montant brut et qui tentent ensuite d’obtenir les déductions? De plus, lorsque je parle des déductions, s’agit-il seulement de l’impôt sur le revenu, du RPC et des cotisations à l’assurance-chômage? Parle-t-on aussi des cotisations syndicales et des contributions santé? Y a-t-il d’autres choses à part ces déductions?
M. Aubry : Il y a eu des problèmes liés à tous les types de déductions que les employés voient sur leur paie régulière.
La sénatrice Marshall : Pas seulement l’impôt sur le revenu, le RPC et l’assurance-emploi?
M. Aubry : Non.
La sénatrice Marshall : Ils ont remboursé le montant brut, puis ils doivent se tourner vers différentes organisations, et demander un remboursement des déductions. Ça semble simple. Pouvez-vous nous donner une idée des problèmes rencontrés?
M. Aubry : Ce n’est pas simple. C’est laborieux et, au bout du compte, le processus force les fonctionnaires à devenir des spécialistes de la paie, ce qui n’est pas leur métier. Il est pénible de regarder sa paie toutes les deux semaines pour s’assurer que les calculs sont adéquats, de connaître les lois au sujet des déductions qui devraient être appliquées, de tenter de découvrir si on a reçu la bonne paie et d’essayer de joindre SPAC pour s’assurer que les responsables examinent son dossier et tentent de le corriger. Après, il faut s’adresser à l’Agence du revenu du Canada et à Revenu Québec afin de découvrir comment on peut ravoir son argent. Ce n’est pas facile, et ces démarches pèsent très lourd sur les membres qui doivent suivre ce processus.
La sénatrice Marshall : L’argent leur est-il remboursé, ou bien y a-t-il des complications liées à l’obtention des remboursements?
M. Aubry : J’affirmerais que, la plupart du temps, ils se débrouillent pour l’obtenir, mais, dans l’ensemble, les situations perdurent depuis trois ans. Beaucoup de dossiers ne sont actuellement pas réglés, alors il s’agit d’un problème continuel qui touche les fonctionnaires. Chacun doit trouver les moyens de le régler.
Ce n’est pas facile, et les fonctionnaires ne possèdent pas les compétences nécessaires pour faire ces démarches. C’est l’employeur qui a la responsabilité de payer adéquatement ses employés.
La sénatrice Marshall : Monsieur Coakeley, pouvez-vous me parler des pensions? Je pensais qu’un nouveau système de pension était en place et qu’il fonctionnait bien. Est-ce le problème qui survient juste avant que les gens prennent leur retraite?
M. Coakeley : Par souci de justice, je voudrais préciser que les responsables du système de pension font de leur mieux pour s’assurer que les gens commencent à toucher leur pension dans des délais normaux. Ils nous ont avisés que nous n’avons absolument aucune raison de douter du fait qu’ils procèdent à la vérification manuelle du dossier des personnes qui prennent leur retraite et, de façon générale, j’affirmerais que les gens déclarent qu’ils commencent à toucher leur pension de retraite dans des délais raisonnables. En ce qui concerne les pensionnés, le problème se pose si quoi que ce soit n’a pas été fait du côté de la paie. À données inexactes, résultats erronés, selon le principe des ordinateurs. Ainsi, Shédiac ne peut travailler qu’avec les renseignements que lui fournit le système de paie Phénix. Nos membres ont signalé des problèmes touchant la paie normale, la rémunération d’intérim, les heures supplémentaires, l’indemnité de départ, l’indemnité de congé annuel, les retenues à la source comme l’impôt, le calcul de la pension et les prestations d’assurance collective. En ce qui concerne les retenues à la source, je soulignerais que les cotisations au régime de pensions sont la deuxième en importance. Si le salaire est erroné, les déductions fiscales le sont aussi, tout comme la cotisation au régime de pensions.
Si je puis me permettre, nos membres signalent des situations du genre : « Mon épouse ou moi-même avons dû retourner au travail; nous avons dû changer nos plans de loisir pour la retraite. Nous avons été incapables de payer des factures ou de rembourser des prêts à temps, et des frais d’intérêt ou de retard nous ont été imposés en conséquence. Mon épouse ou moi-même avons puisé dans notre épargne personnelle pour compenser les pertes encourues et avons été incapables de subvenir aux besoins de nos enfants ou d’autres personnes à charge. » Alors, il y a eu des conséquences importantes. Je ne peux pas répondre à votre question initiale visant à savoir si tout est réglé en dernière analyse.
La sénatrice Marshall : Me reste-t-il du temps pour poser une autre question?
Le président : Dans le cadre de la deuxième série de questions, oui.
[Français]
Le sénateur Pratte : J’ai une question un peu plus large et une autre très pointue. La question un peu plus large s’adresse à vous deux. Ce point n’est pas tout à fait clair dans votre texte. Si je comprends bien, vous ne demandez pas que le projet de loi soit amendé pour régler les problèmes. Vous demandez simplement au gouvernement de vous fournir une interprétation claire des règles qui, évidemment, serait bonne pour les employés.
M. Aubry : C’est exact. Nous avons des inquiétudes quant à certains éléments du projet de loi. En général, nous sommes d’accord avec l’orientation du projet de loi. Nous craignons toutefois que le problème lié au système de paie Phénix, lorsque des membres sont surpayés, sous-payés, ou n’ont pas été payés adéquatement, ait un impact sur leurs déductions financières. C’est un problème qui comporte de multiples facettes. Cependant, nous sommes relativement favorables à l’orientation que prend le projet de loi.
M. Coakeley : Pour notre part, la préoccupation principale est à savoir comment le gouvernement va communiquer avec les retraités. Ces personnes ne sont plus en poste. Elles n’ont plus accès aux données, comme c’était le cas lorsqu’elles étaient au bureau. Nous nous attendons à ce que le gouvernement travaille avec nous et avec d’autres organisations pour communiquer avec les retraités une fois le projet de loi adopté et la loi modifiée.
Nous partageons les inquiétudes de l’institut quant à savoir ce qui va se passer avec les retraités qui demeurent au Québec et qui doivent faire affaire avec l’Agence du revenu du Québec, puisque ce projet de loi ne concerne que le gouvernement fédéral.
Le sénateur Pratte : Monsieur Aubry, je comprends très bien trois des quatre points que vous avez expliqués dans votre déclaration. J’ai de la difficulté avec le deuxième point, tout simplement parce que je ne m’y connais pas assez dans le domaine. Pourriez-vous me l’expliquer en des termes plus clairs? Je comprends que l’employeur pourrait faire un choix. Que demandez-vous exactement sur ce point?
M. Aubry : Effectivement, le texte, tel que libellé, permet à l’employeur de décider de l’orientation et de l’application du paragraphe 153(3.1). Nous préférerions un texte plutôt axé sur la demande de l’employé. C’est lui qui est touché par les problèmes de paie. C’est lui qui est le plus apte à décider de quelle façon il est en mesure de rembourser les montants reçus par le passé. Il faut envisager la possibilité que cet employé puisse avoir d’autres problèmes en parallèle, qui sont parfois de nature plus personnelle. Nous demandons donc plus de flexibilité en faveur de l’employé plutôt que de l’employeur.
Le sénateur Pratte : Je présume que tout ce que les employés souhaitent, c’est que le gouvernement mette en place un système qui leur permette de rembourser seulement les montants nets. Si vous donnez ce choix aux employés, ils vous diront oui.
M. Aubry : Oui, parce que lorsque ces employés ont reçu leur paie avec un montant excédentaire, cette somme versée à leur compte de banque était un montant net. Le fait que l’Agence du revenu et le gouvernement leur demandent de rembourser le montant brut pose problème, car ils n’ont jamais eu cet argent entre les mains.
Le sénateur Pratte : Je comprends.
M. Aubry : Nous tentons donc d’éliminer cette lacune.
Le sénateur Pratte : Merci.
[Traduction]
La sénatrice Eaton : Est-ce que l’un de vous deux connaît l’ampleur de ce problème? Autrement dit, combien d’employés ou de retraités profiteront de cette mesure, et combien d’argent est en cause?
M. Coakeley : Dans le cas des retraités, ce serait une hypothèse. Même si un grand nombre ont été trop payés, bien d’autres ont été sous-payés. Alors cette mesure n’aurait évidemment pas d’incidence sur le sous-paiement, et je ne connais pas les détails concernant les sommes.
La sénatrice Eaton : Ne pensez-vous pas que les gens qui ont rédigé le projet de loi en avaient une idée? Ces personnes devaient avoir une idée des chiffres auxquels ils avaient affaire, non?
M. Coakeley : Si vous me permettez de faire un peu de sarcasme, le gouvernement a eu tellement de problèmes avec Phénix que je ne suis pas certain qu’il connaît exactement l’ampleur du problème.
M. Aubry : Le dernier sondage mené par le gouvernement auprès des fonctionnaires, en 2018, contenait des questions au sujet de Phénix, et l’une d’entre elles était : « Avez-vous été touché par des paiements en trop? » Selon les résultats, de 31 à 37 p. 100 des fonctionnaires ont reçu des trop-payés, ce qui correspond à une centaine de milliers de fonctionnaires.
La sénatrice Eaton : Mais ni vous ni nous n’avons reçu d’indication de la part du gouvernement de ce que cette mesure pourrait lui coûter dans le budget?
M. Aubry : Non.
La sénatrice Eaton : J’ai une dernière question à poser. En ce qui concerne le RPC, savez-vous si le gouvernement fédéral a commencé les négociations avec la province? Je crois savoir que le RPC est un régime conjoint du gouvernement fédéral et des provinces. Il devra amener les provinces à accepter de rendre l’argent.
M. Aubry : Je ne connais pas les détails à ce sujet. Je pourrais m’informer et vous revenir là-dessus.
La sénatrice Eaton : Monsieur Coakeley, avez-vous entendu dire quoi que ce soit à ce sujet?
M. Coakeley : Non. Qu’on me corrige si je me trompe, mais je crois comprendre que le gouvernement fédéral perçoit les cotisations au RPC au nom de toutes les provinces, à l’exception du Québec. Les négociations entre les provinces et le gouvernement fédéral sont liées à la structure du programme du RPC, mais l’administration quotidienne du régime — à ce que je crois comprendre — relève du gouvernement fédéral. Alors, dans la mesure où il s’agit d’un exercice de tenue de documents mené au sein du gouvernement fédéral, mon hypothèse serait que les provinces n’ont pas besoin d’être mobilisées à l’égard de ce problème, mais, encore une fois, je me trompe peut-être.
La sénatrice Eaton : Je ne dispose que des informations inscrites dans le document gouvernemental que j’ai sous les yeux, selon lequel la mesure ne sera pas mise en œuvre sans le consentement des provinces. Merci beaucoup.
Le sénateur Klyne : J’ai deux questions à poser.
J’ai beaucoup entendu parler des trop-payés, des moins-payés et des paiements non versés. Le dialogue ici porte davantage sur les trop-payés. En ce qui concerne les modifications qu’on propose d’apporter à la Loi de l’impôt sur le revenu, a-t-on consulté l’une ou l’autre de vos organisations précisément? En outre, qu’on vous ait consulté ou pas, de votre point de vue, quels sont les bons aspects de ces modifications? Qu’est-ce qui devrait être fait autrement, et qu’est-ce qui manque?
M. Coakeley : Nous avons présenté un document dans le cadre des consultations prébudgétaires. On ne nous pas consultés directement au sujet de l’idée.
Je pense que nous partageons certaines des préoccupations de mon collègue ici présent de l’institut au sujet de la précision et de certaines des lacunes à combler. Notre préoccupation primordiale tient au fait que nous voulons voir le plan de communications qu’a établi le gouvernement, afin de savoir comment il prévoit outiller les retraités en leur communiquant les renseignements dont ils ont besoin pour prendre chacune des décisions qu’ils devront prendre.
Dès qu’on quitte le gouvernement fédéral, toute l’information à laquelle on avait accès — par exemple l’application web de rémunération à laquelle les employés fédéraux ont accès — devient inaccessible, comme elle se trouve derrière le pare-feu. Si un retraité dispose de ses propres dossiers bien tenus, il pourra contre-vérifier les renseignements qui lui sont fournis. Mais aucun d’entre nous n’est probablement aussi bon qu’il devrait l’être pour tenir des documents.
Il importe de souligner que de nombreux fonctionnaires, même ceux qui touchent une pleine pension, ne touchent des prestations fondées que sur un salaire de 30 000 $ par année, en moyenne. Alors, la capacité n’est pas excellente sur ce plan.
Le sénateur Klyne : Vous avez répondu partiellement à la deuxième question que je voulais poser précisément. Nous y reviendrons. Monsieur Aubry, pourriez-vous formuler un commentaire?
M. Aubry : Notre seule contribution s’est faite par la présentation d’un document au sujet de nos commentaires avant l’établissement du projet de loi.
Le sénateur Klyne : Était-ce sans qu’on vous le demande, ou bien vous a-t-on demandé vos documents?
M. Aubry : Je n’ai pas les détails à ce sujet.
Le sénateur Klyne : Avez-vous obtenu une rétroaction sur vos documents?
M. Aubry : L’Agence du revenu du Canada a communiqué avec nous au sujet de certains détails, et certaines de nos questions portaient sur comment mieux sensibiliser les gens du côté de l’employeur relativement aux façons d’appliquer ces changements possibles. Voilà la rétroaction limitée que nous avons reçue.
M. Coakeley : Dans notre cas, nous avons été invités à la séance d’information à huis clos sur le budget.
Le sénateur Klyne : Il est possible que la lacune soit énorme en ce qui concerne les communications. Je le constate. Que proposent les représentants du gouvernement afin de combler cette lacune, ou bien que recommandez-vous?
M. Coakeley : Je ne sais pas ce qu’ils proposent pour l’instant. Je présume qu’ils attendront probablement que le projet de loi soit approuvé avant de commencer à communiquer certains détails.
Évidemment, au Centre des pensions de Shédiac, on a les coordonnées de tous les bénéficiaires de pensions. Ce n’est pas qu’on ne sait pas qui joindre; c’est plutôt une question de savoir quels renseignements sont fournis en temps opportun. Nous voudrions être en mesure de travailler avec ces responsables et d’utiliser nos propres documents et moyens de communication pour communiquer avec nos membres.
Le sénateur Klyne : Pensez-vous qu’ils vous tendront la main ou que vous aurez à le faire?
M. Coakeley : Nous allons tendre la main de concert.
La sénatrice M. Deacon : Il est certain que cela continue d’être un problème complexe. Nous avons tous hâte au jour où nous n’en parlerons plus. C’est un travail de longue haleine.
Je lis les rapports et j’écoute les témoignages, et je me penche sur ces domaines de consultation, l’ampleur du problème, qui a déjà fait l’objet de questions, le volet des communications, qui faisait encore l’objet d’un certain mystère, et la solution qui conviendrait le mieux.
Ma question au sujet de la solution la mieux adaptée concerne la modification de la Loi de l’impôt sur le revenu. D’après votre expérience et celle des membres de votre personnel, si nous en parlions aux employés — les personnes touchées, et les retraités, bien entendu, les employés actuels et passés —, croiraient-ils qu’il s’agit de la meilleure façon d’y arriver? Y a-t-il une cible évidente que nous ratons, une solution qui serait optimale ou parallèle au projet de loi? Quand vous tenez cette conversation, vous dit-on : « Oui, faisons-le », ou bien y a-t-il certains aspects dont nous pourrions avoir besoin d’entendre parler aujourd’hui?
M. Coakeley : Je pense que, dans le cas des retraités, ils seraient nombreux à plaider pour le retour au statu quo, ce qui ne constitue pas une solution viable. Nous comprenons cela.
Dans le cas des employés ou des retraités dont la pension n’est pas ce qu’elle devrait être parce que le revenu n’a pas été versé en totalité ou n’a pas fait l’objet d’un suivi adéquat, ces personnes affirmeraient qu’elles ne se soucient pas de remboursements. Elles se soucient des sommes qui leur sont dues. Nous comprenons cela. Ces mesures n’ont aucun effet.
Dans le cas des personnes qui doivent rembourser de l’argent au gouvernement, cela signifie qu’une personne qui est maintenant retraitée, dont la pension ne correspond pas au salaire qu’elle touchait, pourra plus facilement envisager d’effectuer le paiement qu’elle doit effectuer et qu’elle pourra le faire sans fouiller afin de découvrir le montant total. Cela comprend le Régime de pensions du Canada, l’assurance-emploi, l’impôt sur le revenu ainsi que les cotisations au régime de pensions qu’il faut payer deux fois.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : Merci à vous deux d’être ici.
Depuis mon arrivée au Sénat, et même depuis un bon moment avant mon arrivée, je sais que le gouvernement a versé plusieurs enveloppes pour essayer de corriger les problèmes engendrés par Phénix. Est-ce qu’une partie des sommes qui ont été versées a servi d’une façon quelconque à rembourser les sous-payés ou encore à soulager les employés qui auraient des montants bruts à payer alors qu’ils n’avaient mis de côté que le montant net?
M. Aubry : Il n’y a pas de ressources qui ont été versées directement dans les mains des employés. L’employeur a mis énormément de ressources à mieux s’organiser pour aborder les problèmes depuis 2016, à mettre en place des équipes, à engager du personnel, des conseillers à la paie, pour examiner les dossiers et trouver des solutions.
Les situations de trop-payés, de sous-payés et autres figurent parmi plus de 300 000 transactions en attente d’être traitées et qui doivent être traitées une par une. Des sommes ont été consacrées pour mettre en place une meilleure structure et plus de personnel pour tenter de corriger et d’améliorer le système informatique, mais pas sous la forme de prêts directs aux employés qui sont dans le besoin. Certains petits montants ont été avancés aux employés qui ressentent le besoin de faire appel à un comptable pour réviser leur situation. Le fardeau a été mis sur les épaules des employés, qui doivent tenter de comprendre quels sont leurs problèmes, de déchiffrer leurs talons de paie, qui sont cryptiques, et de devenir des spécialistes de leur propre paie. L’argent a aidé à mettre en place une organisation, mais les problèmes se règlent à la pièce.
M. Coakeley : Dans le cas des retraités, non, il n’y a pas eu de versement direct aux retraités. Le Centre des pensions de Shediac a absorbé une certaine partie de la charge de travail en faisant des vérifications manuelles de tous les dossiers. Je ne le sais pas, mais j’imagine que le Centre des pensions a obtenu des ressources supplémentaires, soit pour prévoir des heures supplémentaires, soit pour engager d’autres employés pour faire ces vérifications. Dans le cas de versements directs à des retraités, non, il n’y en a pas eu à notre connaissance.
La sénatrice Forest-Niesing : Merci. Est-ce que vous pouvez nous donner une idée des montants maximaux des trop-payés dans les cas extrêmes dont vous avez eu connaissance?
M. Aubry : Cela varie de quelques dollars à chaque paie depuis trois ans jusqu’à plusieurs milliers de dollars; il y a des totaux qui peuvent atteindre des dizaines de milliers de dollars dans certains cas. Parfois, des ententes sont établies pour le remboursement. Dans certains cas, le remboursement total est reporté à la prochaine paie. Les montants varient beaucoup. C’est du cas par cas, et ça dépend de l’élément déclencheur.
La sénatrice Forest-Niesing : Auriez-vous calculé une moyenne, par exemple?
M. Aubry : Nous ne nous sommes pas lancés dans cet exercice.
La sénatrice Forest-Niesing : Cette mesure va s’appliquer aux fonctionnaires en poste et aux retraités, mais dans le cas de ceux qui ont quitté la fonction publique, peuvent-ils en profiter directement ou doivent-ils passer par un autre chemin?
M. Coakeley : Vous voulez dire quelqu’un qui quitte la fonction publique sans prendre sa retraite? Je ne sais pas.
M. Aubry : Moi non plus, je n’ai pas examiné si cela s’appliquait. Je peux supposer que, lorsque les problèmes de trop-payés seront vérifiés, l’employeur va tenter de joindre la personne pour récupérer les sommes perçues en trop. Je ne sais pas à quel point ce changement s’appliquerait à eux.
La sénatrice Forest-Niesing : Vous ne savez pas si c’est l’employeur qui va entamer la communication ou si ce sera à l’employé qui a quitté son poste d’entrer en communication avec lui.
M. Aubry : Dans le meilleur des cas, l’employé aura remarqué le trop-payé. Ce n’est pas toujours le cas, mais il l’aurait signalé par des demandes de correction à sa paie. Ce sera plutôt l’employeur qui va amorcer les procédures.
[Traduction]
La sénatrice Duncan : Un certain nombre de facteurs qui viennent compliquer les choses ont été mentionnés en ce qui a trait à la réception de la paie et aux calculs, y compris la rémunération d’intérim, le congé non payé et la retraite. Ce qui manquait à cette liste, c’est l’indemnité de service septentrional ou les sommes spéciales versées aux fonctionnaires fédéraux qui travaillent au nord du 60e parallèle, et je crois comprendre qu’il peut s’agir d’un facteur très compliqué. Certaines personnes l’ont touchée, d’autres pas.
Je crois que c’est M. Coakeley qui a mentionné que 42 p. 100 des retraités récents ou des personnes qui ont pris leur retraite au cours des trois dernières années ont connu des problèmes liés au système de paie. Quelqu’un a-t-il une répartition géographique des personnes touchées?
M. Coakeley : Oui, je l’ai. Je dois seulement retrouver mon tableau. Je l’avais il y a une seconde.
La grande majorité, soit le groupe le plus important, est dans l’Est de l’Ontario où le code postal commence par la lettre K. Le deuxième groupe en importance se situerait en Colombie-Britannique, où le code postal commence par la lettre V; il y a ensuite l’Ouest du Québec, la lettre J, c’est-à-dire ici, dans la région de Gatineau. Le groupe de Montréal est en fait beaucoup plus petit. Pardon : pour l’Ouest du Québec, la lettre J et l’Est du Québec, la lettre G, les groupes sont beaucoup plus grands que celui de la région métropolitaine de Montréal. Le groupe du Manitoba est assez important; ensuite vient celui de l’Alberta. Nous avons actuellement très peu de retraités dans le Nord. Il y en a, dans le Nord, mais très peu. Ils sont peu nombreux.
J’aimerais revenir sur votre autre point. J’ai autrefois été responsable des ressources humaines pour le Service correctionnel, et nous avions ce qu’on appelait à l’époque l’indemnité de facteur pénologique, qui était versée si vous occupiez certains postes dans un établissement; si vous quittiez l’établissement, vous n’étiez plus censés la recevoir. Il va sans dire que, dans bien des cas, les gens continuaient à la recevoir même s’ils n’y avaient plus droit ou ne la recevaient pas quand ils étaient censés la recevoir, et j’aurais tendance à croire que c’est la même chose pour les indemnités de service septentrional. Soit elles n’ont pas commencé à être versées quand elles devaient l’être, soit elles n’ont pas cessé d’être versées quand elles devaient l’être. On aurait donc des moins-payés dans certains cas et des trop-payés dans d’autres, mais je dois dire que ce serait de la pure spéculation de ma part.
La sénatrice Duncan : En ce qui concerne la répartition géographique, les chiffres sont parfois si petits que l’on ne pourrait pas les représenter en X pourcentage. Je serais simplement curieuse de savoir si vous aviez établi la répartition géographique. Je vous serai reconnaissante si vous pouviez fournir ce document à la greffière.
J’aimerais ajouter, en ce qui concerne les remboursements, que j’ai rencontré un certain nombre de gens qui ont eu de la difficulté à rembourser le montant demandé et qui ont exprimé de nombreuses préoccupations à cet égard. L’une de ces personnes faisait partie d’un programme d’emplois d’été pour étudiants. C’est particulièrement préoccupant.
Pourriez-vous prendre quelques instants pour nous suggérer des façons de travailler avec les gens qui sont touchés?
M. Aubry : Je n’ai pas grand-chose à dire sur la façon dont le remboursement est fait, puisqu’il est fait par employeur ou par ministère et que ce sont eux qui communiquent avec les employés ou les étudiants qui ont reçu un trop-payé. Ils vont alors instaurer un plan de paiement ou déduire le montant directement de la paye suivante. Ces paiements doivent normalement être versés au receveur général du Canada, et ces transactions se perdent parfois dans le système. Je n’ai pas davantage de détails sur le processus complet.
La sénatrice Duncan : Je crois que vous avez recommandé au gouvernement de joindre ces personnes. Auriez-vous une recommandation à nous faire sur la façon dont nous pourrions tenir le gouvernement responsable à cet égard?
M. Aubry : Au bout du compte, ces situations sont difficiles à comprendre pour les employés qui veulent s’assurer que le montant réclamé par l’employeur comme étant un trop-payé est exact. L’employeur pourrait avoir de la difficulté à donner des détails; nous sommes des fonctionnaires, pas des experts en rémunération. Une solution serait de mettre en place un processus de vérification complète de chaque paye, de façon que chaque transaction soit examinée, mais ce serait coûteux ou techniquement difficile à faire, compte tenu du nombre de fonctionnaires. Nous ne sommes pas convaincus par les données qui nous ont été présentées, et les employeurs disent également ne pas avoir de données impartiales.
En prévision du prochain système, un grand processus d’épuration des données est en cours, mais actuellement, les données sont corrompues par le système Phénix.
Le sénateur Boehm : Merci à vous deux de vos commentaires d’aujourd’hui. Ils sont vraiment utiles. J’étais sous-ministre quand le système Phénix est entré en vigueur. Nous sautions tous de joie à l’époque, car nous pensions que c’était une très bonne chose.
La sénatrice Andreychuk : C’est pour cette raison que vous avez fini au Sénat.
Le sénateur Boehm : Ce n’est pas pour cette raison que j’ai fini au Sénat. J’ai continué même quand nous avions constaté que le bateau était en train de couler. Pendant les réunions hebdomadaires des sous-ministres le mercredi matin, la question du système Phénix a toujours été un point à l’ordre du jour. Je me rappelle que ma collègue Marie Lemay venait d’entrer en fonction et qu’elle avait la responsabilité de régler le problème.
Nous avions mis en place des centres de triage dans les différents ministères et centres de responsabilité. Nous avons d’abord donné la priorité à ceux qui n’avaient pas été payés ou qui avaient en quelque sorte été sous-payés, et nous nous sommes ensuite occupés de ceux qui avaient été trop payés.
C’est devenu un mélange de mesures et d’activités, et les ministères ont procédé chacun à leur manière. Les intentions ont toujours été bonnes, mais la mise en œuvre n’était pas nécessairement optimale. On a également suggéré d’embaucher davantage de vérificateurs, mais étions-nous en mesure de les payer? Seraient-ils réellement payés? Mme Duncan a mentionné que les étudiants ne sont pas des syndiqués, mais ils sont l’avenir de la fonction publique; ils ne seraient pas payés pour tout un trimestre de travail d’été. Quel genre de message cela envoie-t-il?
Dans tout ce dossier, pensez-vous que l’on a assez fait? Si c’est le cas, a-t-on continué à assurer les fonctions de triage? Je sais que les retraités sont un cas spécial, car il est un peu difficile de communiquer avec eux. De plus, dans le cas de Miramichi, centre particulièrement surchargé sur le plan de la rémunération, nous devons nous demander si suffisamment de mesures ont été prises pour fournir le soutien nécessaire.
M. Aubry : La tâche est colossale. Oui, SPAC et les divers ministères ont fait de leur mieux pour régler les problèmes au fur et à mesure. Mais au bout du compte, trois ans plus tard, nous avons encore un grand nombre de membres qui sont touchés par ce système et qui se débattent avec ce problème et les préoccupations qui y sont liées.
Les ressources que nous remettons en place — réembaucher les conseillers en rémunération et instaurer de nouvelles façons de travailler dans chaque ministère — ont contribué à nous mettre en bonne voie de résoudre ces problèmes. Je remercie tous les gens de Miramichi de l’excellent travail qu’ils continuent à faire malgré le stress et je souligne tout le travail qui a été fait dans le ministère, mais en même temps, nous voudrions que tous ces problèmes soient rapidement réglés, car il y a encore des membres qui sont en difficulté.
M. Coakeley : Monsieur, comme je l’ai indiqué, j’ai été un certain temps responsable des ressources humaines pour le Service correctionnel et, à l’exception de la Garde côtière, c’est probablement le scénario de paye le plus compliqué, puisque le Service correctionnel a des opérations ininterrompues. Si un agent correctionnel est affecté à un autre poste pour plus de 15 minutes, la rémunération d’intérim est déclenchée.
Dans mon dernier emploi, j’étais secrétaire général de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Nous avons été l’un des premiers ministères à transférer nos dossiers de paye à Miramichi avant l’arrivée du système Phénix. Nous espérions honnêtement que, au bout de quatre ou cinq ans, tout le monde dirait : « Pourquoi ne les avons-nous pas transférés à Miramichi il y a 20 ans? ». C’est ce que nous disions aujourd’hui des services de pension de Shediac.
Je pense, pour ce que ça vaut, que le problème avec Phénix, est qu’il était trop ambitieux et qu’on lui confiait beaucoup trop de choses à la fois, mais je n’ai participé à aucune de ces discussions, je ne sais donc pas vraiment ce qu’il en est.
En ce qui concerne ce qui a été fait pour les retraités, nous sommes vraiment satisfaits du service qui est fourni à Shediac. Les employés font de leur mieux pour s’assurer, en se fondant sur l’information fournie par le Centre des services de paye, leur système Phénix, que les retraités reçoivent leur pension le plus tôt possible et que le montant soit le plus exact possible. J’aimerais les féliciter pour les efforts déployés.
Malheureusement, s’ils ne reçoivent pas la bonne information du système de paye, ils ne peuvent pas l’inventer, bien sûr.
Je dirais encore une fois que malheureusement, la seule véritable solution est de continuer à affecter des ressources pour cerner les erreurs, en premier lieu; les corriger, en second lieu et, dans le cas des moins-payés, verser ces paiements aux gens le plus tôt possible. Dans le cas des retraités, cela veut probablement dire qu’il y a des retraités à qui l’on doit des payes qu’ils n’ont pas encore reçues, et cela aurait des répercussions positives sur leur pension également.
Le sénateur Boehm : Êtes-vous préoccupé par l’effet rétroactif pour ce qui est des salaires qui restent à verser aux retraités?
M. Coakeley : Oui. Ce sont quelques-uns des problèmes auxquels font face les retraités. S’ils ont pris leur retraite et, par exemple, que leur convention collective avait été négociée avec une rétroactivité de un ou deux ans, ces paiements rétroactifs ne sont pas toujours effectués ou perçus, et par conséquent, ils ne sont pas toujours pris en compte dans leur pension. Ils seront traités ultérieurement. Ils seront traités, mais cela prend du temps.
Le président : Nous allons passer à la deuxième série de questions.
La sénatrice Marshall : Pourriez-vous nous parler de la règle des trois ans? Monsieur Aubry, je sais que vous craignez que l’on n’exige pas que le remboursement soit fait dans les trois ans. Mais à part cela, ce qui m’intéresse le plus dans la règle des trois ans, c’est de savoir si elle englobera toutes les personnes qui ont eu un problème. Ou y aura-t-il des personnes qui seront laissées de côté parce que leur cas remonte à trop longtemps?
M. Aubry : D’après ce que je comprends, si le projet de loi était adopté aujourd’hui, la loi s’appliquerait aux trois dernières années, y compris toute l’année 2016, pendant laquelle les membres ont eu des problèmes liés à Phénix. Certains des problèmes datent d’avant 2016, au moment où le système était progressivement mis en œuvre.
Donc oui, la règle s’appliquerait aux transactions, aux problèmes qui se sont présentés surtout à partir de 2016, mais qui n’ont pas encore été cernés, précisés ou confirmés. Oui, elle concernerait toutes les transactions que nous voyons...
La sénatrice Marshall : Elle concernerait tout le monde en...
M. Aubry : Pendant la même période, certains membres ont entamé un processus de remboursement, et nous nous demandions si la nouvelle loi s’appliquerait à eux et leur permettrait d’effectuer le paiement total ou de payer seulement le montant net. C’est une chose que l’on devrait clarifier.
La sénatrice Marshall : Je ne sais pas. Je ne m’aventurerais pas sur ce terrain.
Vous avez tous les deux dit que vous aviez présenté des mémoires au gouvernement. Qu’y avait-il dans vos mémoires, est-ce que c’est ce qui est reflété dans le projet de loi? Y a-t-il un lien entre ce que vous avez présenté et ce qui est inclus dans le projet de loi?
M. Aubry : J’ai fourni à la greffière une copie du précédent mémoire que nous avons présenté. C’est pratiquement les mêmes préoccupations qui sont encore exprimées, à savoir mieux aider nos employés et nos membres. Non, nos propositions n’ont pas été mises en œuvre dans le projet de loi actuel.
La sénatrice Marshall : D’accord. Qu’en est-il des pensions?
M. Coakeley : Dans notre cas, les mémoires que nous avons présentés au fil des ans au comité des finances de l’autre endroit ne mettaient pas l’accent sur le système Phénix, car il y a un certain nombre d’autres questions que nous pensons être importantes pour les retraités; Phénix n’est qu’une question parmi d’autres. Notre objectif concernant Phénix a davantage été... Vous savez que vous avez un problème — nous n’avions pas besoin de le leur dire, ils le savaient —, mais vous devez trouver une manière de le régler aussi vite que possible.
La sénatrice Marshall : Merci.
[Français]
Le sénateur Pratte : J’ai une courte question à poser à M. Aubry. Les statistiques qui sont publiées chaque mois par le ministère des Services publics semblent indiquer une lente amélioration de la situation. Je regardais les données sur ce qu’on appelle le pourcentage des mouvements traités selon les normes de service. Au mois de mars 2019, c’était 53 p. 100, et en avril 2019, c’est 64 p. 100. D’autres statistiques démontrent une lente amélioration. Est-ce que, sur le terrain, cette amélioration se voit? Y a-t-il encore beaucoup de problèmes? Est-ce que cela diminue tranquillement? Est-ce que les employés sont plus à même d’obtenir de l’information qu’auparavant?
M. Aubry : Des améliorations ont été réalisées au fil des ans, comme les talons de paie plus détaillés, qui ont permis de mieux clarifier les situations. L’ensemble des problèmes s’est tranquillement calmé; il y a de moins en moins de nouveaux types de problèmes qui apparaissent, donc les données qui sont fournies sur le nombre de transactions et l’évolution des dossiers en attente s’améliorent, mais très lentement. Malheureusement, si on fait le calcul de la vitesse à laquelle la situation s’améliore par rapport au nombre actuel de dossiers en attente, nous en avons encore pour plusieurs années avant que tous les problèmes soient réglés. C’est malheureux, car les employés sont pris à vivre avec ces problèmes et ils commencent à perdre espoir que leur cas soit résolu un jour.
M. Coakeley : D’après mon expérience, à un moment donné, il faut faire quelque chose. Je ne suis plus dans le système, alors j’ignore l’ampleur des problèmes techniques liés à Phénix. Donc, je ne peux pas dire s’il serait plus simple de régler Phénix que de repartir à neuf. C’est comme une voiture. Parfois, il est possible de la réparer; parfois, il faut en acheter une nouvelle.
M. Aubry : Avant le déploiement du système, les conseillers à la paie qui participaient à la migration du système se heurtaient déjà à des problèmes. Au cours des premiers mois, les syndicats ont demandé d’être impliqués dans le processus. Des spécialistes en informatique de notre syndicat ont examiné le système et sont arrivés à la conclusion que Phénix avait été mal bâti à l’origine. Dès 2017, on a demandé que le gouvernement envisage le remplacement de Phénix. C’est l’orientation que nous préconisons, grâce à la tenue de consultations avec les personnes impliquées qui connaissent bien le système et qui pourraient en développer un qui fonctionnera et auquel on pourra faire confiance.
Le président : Merci aux témoins d’avoir accepté notre invitation et d’avoir partagé leurs opinions. Vous avez été très professionnels, et vous nous avez très bien informés.
[Traduction]
Mesdames et messieurs les sénateurs, nous allons maintenant accueillir notre prochain groupe de témoins pour parler de la partie 4, section 4 du projet de loi C-97. Nous accueillons Mme Carole Saab, directrice générale, Politiques et affaires publiques et M. Chris Boivin, directeur général, Fonds vert municipal qui représentent tous deux la Fédération canadienne des municipalités.
[Français]
J’ai été informé que Mme Saab ferait une présentation. Madame, la parole est à vous.
Carole Saab, directrice générale, Politiques et affaires publiques, Fédération canadienne des municipalités : Merci à vous tous. Nous sommes heureux d’avoir cette possibilité d’explorer avec vous le budget de 2019, particulièrement les outils qu’il accorde aux gouvernements municipaux pour les aider à bâtir une vie meilleure pour les Canadiens et les travailleurs de notre pays.
[Traduction]
Les 2 000 municipalités membres de la FCM représentent plus de 90 p. 100 des Canadiens. Il s’agit des gouvernements qui sont les plus près des gens, de leurs besoins et des défis qu’ils vivent au quotidien. Travailler directement avec le gouvernement fédéral permet aux municipalités de trouver des solutions rentables qui fonctionnent.
C’est pourquoi les gouvernements fédéraux successifs ont pris des mesures pour donner aux municipalités les moyens d’en faire plus pour les Canadiens, ce qui inclut du financement pour le transport en commun fondé sur l’affectation, qui permet déjà aux villes de faire d’importants agrandissements de leur réseau. De plus, le budget de 2019 est un tournant : il fortifie notre partenariat fédéral-municipal et améliore les conditions de vie de nos concitoyens.
[Français]
Le budget de 2019 solidifie notre partenariat fédéral-municipal, car c’est le moyen le plus sûr d’améliorer les conditions de vie de nos concitoyens.
[Traduction]
Par exemple, ce budget met un accent sans précédent sur les infrastructures à large bande dans les régions rurales, mettant ainsi en œuvre la recommandation urgente de première ligne faite par la FCM et ses membres des régions rurales. J’aimerais souligner que le projet de loi C-97 promulgue des dispositions concernant la Stratégie nationale sur le logement, un engagement prioritaire générationnel pour nos collectivités.
Ce budget, cependant, s’appuie également sur le transfert du Fonds de la taxe sur l’essence, le FTE. La FCM a travaillé avec les gouvernements successifs afin de mettre en place le FTE, puis le rendre permanent et finalement l’assortir d’une progression de 2 p. 100. Il s’agit de notre outil de financement des infrastructures le plus fiable, et les municipalités peuvent réellement profiter d’un retour sur investissement. Cela signifie des routes, des ponts et des transports en commun améliorés, ainsi que de meilleurs systèmes de gestion de l’eau et des déchets et d’un meilleur système énergétique, en plus d’offrir aux citoyens un meilleur endroit où habiter, travailler et élever leur famille. Prenez l’exemple du Comté de Clearview, en Ontario. Le FTE a permis l’inauguration d’un nouveau service de transport en commun abordable, qui relie les résidents aux épiceries, aux parcs, aux maisons de retraite, aux écoles et aux cliniques médicales. Il y a également l’exemple de Granisle en Colombie-Britannique, où une nouvelle chaudière à biomasse permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’économiser de l’argent en chauffant le bureau du village, l’aréna, l’école primaire, le centre de curling, le poste d’incendie, le bureau des travaux publics et le centre de renseignements touristiques.
Le président : Madame Saab, je vous prie de ralentir un peu votre débit pour les interprètes, merci.
[Français]
Mme Saab : La Ville de Terrebonne, au Québec, aménage un sentier moderne et sécuritaire pour les piétons et les cyclistes à côté d’une rue très occupée grâce au financement prévisible à long terme de la taxe sur l’essence.
[Traduction]
Le Fonds de la taxe sur l’essence est la preuve que, lorsque vous mettez directement les outils entre les mains des administrations locales, elles seront en mesure d’améliorer les conditions de vie des Canadiens. Le point faible du FTE, c’est son ampleur. Chaque année, il laisse des projets clés non financés. Le budget de 2019 en a tenu compte et a doublé le transfert du FTE afin que l’on puisse mener plus de projets à l’échelle locale.
En somme, ce budget double la mise et travaille directement avec les municipalités afin d’atteindre des objectifs nationaux, économiques et de qualité de vie, et ce, sans retards ni obstacles. Il s’agit de financement direct pour des projets qui permettront d’améliorer les conditions de vie des Canadiens.
[Français]
Ce même principe — c’est-à-dire celui de fournir des outils directement aux Canadiens — est au cœur d’un deuxième élément du budget de 2019. Depuis deux décennies, le Fonds municipal vert (FMV) de la FCM a financé 1 250 projets locaux de développement durable. Ces projets ont permis d’éliminer 2,5 millions de tonnes d’émissions de gaz à effet de serre et ont permis aux citoyens de notre pays de jouir d’une vie plus saine et plus abordable. Il faut aussi préciser que le FMV a obtenu ces résultats tout en préservant chaque dollar de la dotation reçue du gouvernement fédéral.
[Traduction]
Le budget de 2019 augmente de façon importante la portée de la mission de la FCM pour rendre l’efficacité énergétique à moindre coût accessible partout au Canada grâce au Fonds municipal vert en plus de prolonger les programmes de la FCM qui renforcent les capacités locales de gestion d’actifs. Cela signifie des bâtiments communautaires plus écologiques et moins chers à exploiter, des logements sociaux aux bibliothèques, en passant par les arénas locaux. Cela permet aux familles de travailleurs de rénover leur maison à un coût plus abordable grâce à des programmes de financement locaux et bien pensés qui permettront également de réduire les factures d’énergie. Cela crée de bons emplois au sein des collectivités d’un océan à l’autre. Encore une fois, il s’agit de travailler directement avec les municipalités pour faire bouger les choses pour les Canadiens.
Bien entendu, nous espérons que la Loi d’exécution du budget soit adoptée afin que ce travail important soit fait, et nous souhaitons que les principes que ce budget met en œuvre continuent de guider le gouvernement fédéral du Canada. C’est le principe d’un travail en collaboration directe entre les ordres de gouvernement afin d’aider à construire des vies meilleures.
Au nom de notre nouveau président, Bill Karsten, et des 2 000 membres de la FCM, je vous remercie de nous avoir donné la possibilité de comparaître. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
La sénatrice Marshall : Il me semble que j’ai déjà posé cette question la dernière fois que la fédération a comparu : de quelle façon distribuez-vous l’argent? Est-ce que les municipalités doivent présenter une demande? Comment vous y prenez-vous pour l’attribuer?
Mme Saab : Voulez-vous parler du transfert du Fonds de la taxe sur l’essence ou bien du Fonds municipal vert?
La sénatrice Marshall : Je veux parler du Fonds municipal vert.
Chris Boivin, directeur général, Fonds municipal vert, Fédération canadienne des municipalités : Essentiellement, nous avons en place un processus de demande, qui est ouvert à l’année. Nous finançons un large éventail d’initiatives, que ce soit la panification à petite échelle...
La sénatrice Marshall : Ce sont donc les municipalités qui en font la demande, et non pas la province ou le territoire. Est-ce bien cela?
M. Boivin : En effet, les municipalités nous présentent directement leur demande pour le programme.
La sénatrice Marshall : Vous examinez alors la demande, et si elle est approuvée, vous leur donnez l’argent.
M. Boivin : Oui, c’est exact. Nous avons conclu avec les municipalités un accord de contribution qui définit les modalités.
La sénatrice Marshall : Comment vous assurez-vous qu’elles dépensent l’argent aux fins qu’elles ont énoncées?
M. Boivin : Un rapprochement des comptes est effectué pour chaque projet. Nous vérifions les frais engagés et nous nous assurons qu’ils concordent avec les projets dont le financement a été approuvé.
La sénatrice Marshall : Vous sembliez enclin à nous dire la façon dont la taxe sur l’essence est allouée. Nous en parlions entre nous hier. Si vous pouviez faire cela, ce serait utile.
Mme Saab : La taxe sur l’essence est allouée en fonction du nombre d’habitants pour les provinces, les territoires et les Premières Nations, mais prévoit un financement de base de 0,75 p. 100 du financement annuel total pour l’Île-du-Prince-Édouard et pour chacun des territoires. Pour ces derniers, la formule est un peu différente.
La sénatrice Marshall : Est-ce que les 2,2 milliards de dollars alloués cette année ont été distribués de la même façon avec un montant de base?
Mme Saab : Oui, il s’agit de la même formule.
La sénatrice Marshall : Puis, il a été alloué selon le nombre d’habitants.
Mme Saab : C’est exact.
Le sénateur Pratte : Je me demande comment vous allez gérer tout cela. Vous allez avoir encore plus d’argent que vous n’en aviez auparavant, du moins pendant un an, pour le Fonds de la taxe sur l’essence. Vous venez tout juste de dire, madame Saab — je ne suis pas certain des mots exacts que vous avez employés —, que vous preniez le financement du gouvernement fédéral ou que vous vous assuriez qu’il était distribué de façon appropriée. Cependant, il doit certainement y avoir des coûts de gestion. Sont-ils compris dans l’argent que vous percevez?
Mme Saab : Je parlerai en premier du Fonds de la taxe sur l’essence, puisqu’il s’agit d’un transfert direct qui est transité et qui n’est pas géré par la FCM directement. L’argent passera, dans la majorité des cas, par les provinces. Cependant, en Ontario et en Colombie-Britannique, l’argent passe par les associations provinciales des municipalités, et il s’agit d’un transfert direct du gouvernement fédéral aux municipalités.
Lorsque nous avons informé nos membres du fait que le budget fédéral prévoyait un doublement ponctuel, les municipalités ne manquaient pas de projets à nous présenter, qu’elles avaient mis de côté pour financer d’autres projets d’infrastructure prioritaires. Je vais céder la parole à mon collègue pour qu’il vous parle du plan de gestion pour le Fonds municipal vert.
M. Boivin : Le Fonds municipal vert a affecté du personnel pour surveiller les processus de financement et pour superviser l’investissement des fonds de dotation ainsi que des fonds renouvelables. Les paramètres de ces coûts d’exploitation sont énoncés dans notre accord de financement avec le gouvernement fédéral. Cet accord couvre la gestion du financement; nous avons un volet visant le renforcement des capacités par la mobilisation des connaissances et la formation des employés municipaux pour une meilleure exécution des projets. Bien sûr, notre organisation a également un volet consacré aux finances.
Cette enveloppe d’exploitation provient du revenu généré à même les fonds de dotation, qui proviennent du gouvernement fédéral. Il s’agit de fonds renouvelables qui génèrent une source de revenus.
Le sénateur Pratte : Madame Saab, vous avez mentionné les gouvernements provinciaux. Je sais que, dans ma province d’origine, tout l’argent qui est octroyé aux collectivités doit passer par... Mais qu’en est-il du fonds vert? S’agit-il de la même chose? Il va directement aux municipalités qui sont sélectionnées, n’est-ce pas?
Mme Saab : C’est exact.
Le sénateur Pratte : Est-ce que cela cause des problèmes avec les provinces? Est-ce que les gouvernements provinciaux sont mécontents?
M. Boivin : C’est une structure qui a été mise en place il y a environ 20 ans. Il n’y a pas de problème avec la façon dont le Fonds municipal vert est organisé. Il est géré directement par la FCM; toutefois, au chapitre des investissements pour un projet, nous voyons souvent des fonds provinciaux s’ajouter au financement octroyé par le FMV. Le but du Fonds municipal vert est de mobiliser d’autres sources d’investissement pour des projets environnementaux à l’échelle municipale.
Le sénateur Pratte : Est-ce que cela signifie que vous entretenez des relations avec les gouvernements provinciaux? Dites-vous des choses du genre : « Nous allons financer ce projet, pouvez-vous verser plus d’argent à ceci? » Ou bien est-ce que cela se fait en cours de route?
M. Boivin : Je dirais que cela se fait de façon naturelle parce que les critères provinciaux changent constamment. Peu importe le financement qui est disponible, s’il correspond à nos secteurs d’activité, alors cela crée une occasion de cumul. Nous tentons de nous tenir à jour quant à la direction des programmes provinciaux afin de rendre notre financement le plus complémentaire possible à ces sources provinciales.
La sénatrice Eaton : Je suis fascinée par tout cela. J’ai déjà demandé au ministre Morneau, lorsqu’il a comparu devant nous, pourquoi il n’envisageait pas de donner une plus grande part de la taxe sur l’essence aux municipalités, et il m’a répondu que c’était pour ne pas perdre le contrôle. Même en date d’hier, j’ai eu une sorte de dispute par rapport au libellé avec mes collègues ici parce que j’ai dit qu’une plus grande partie de la taxe devrait aller directement aux municipalités. Cette attribution ne devrait pas avoir à faire l’objet d’une entente politique entre les provinces, le gouvernement fédéral et les municipalités.
Croyez-vous que cette générosité a quelque chose à voir avec le fait qu’il s’agit d’une année électorale et que le gouvernement n’avait pas débloqué d’argent pour les infrastructures? Vous sentez-vous à l’aise de répondre à cela?
Mme Saab : Eh bien, je ne me prononcerai pas sur la question de savoir si cela est lié aux élections, mais je dirais qu’il s’agit d’une reconnaissance claire que le transfert du Fonds de la taxe sur l’essence s’est avéré être la façon la plus efficace de démarrer des projets et de faire circuler l’argent. Je dirais que dans d’autres programmes fédéraux d’importance pour lesquels il faut effectuer des demandes et qui passent par les provinces, nous connaissons d’importants retards et une incapacité à faire avancer les projets.
La sénatrice Eaton : Vous prêchez les convertis ici.
Mme Saab : Je ne fais que saisir l’occasion.
La sénatrice Eaton : Puis-je vous poser une question encore plus pertinente par rapport aux 300 millions de dollars alloués aux rénovations des maisons? Est-ce que votre fédération va mettre sur pied des programmes ou est-ce que les municipalités devront elles-mêmes mettre sur pied des programmes qui sont admissibles à du financement? Je pose cette question parce que certaines petites municipalités n’auraient pas la capacité de concevoir et de gérer ce type de programme. Allez-vous les aider à le faire?
M. Boivin : Oui. Je peux vous donner plus de détails par rapport à cela. Nous sommes très conscients que toutes les municipalités n’ont pas la même capacité. Une partie de la beauté de ce programme, c’est qu’il y aura beaucoup de renforcement des capacités, d’apprentissage selon la cohorte et de projets axés sur la connaissance qui aideront les collectivités plus petites à mettre sur pied des programmes en bénéficiant d’une aide considérable, puis à accéder au financement. Grâce à cela, nous souhaitions certainement pouvoir répondre aux besoins à la fois des grandes et des petites collectivités.
La sénatrice Eaton : Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci, et bienvenue au Sénat. Nous sommes heureux de vous revoir.
Dans un premier temps, la taxe sur l’essence est distribuée par personne selon un seuil pour certaines régions du Canada. Pouvez-vous nous donner un peu plus d’information sur les priorités à respecter? C’est le programme d’aide le plus apprécié du monde municipal d’un océan à l’autre. Il existe tout de même certaines contraintes, même si les sommes sont attribuées par personne, selon des priorités d’intervention et la participation du monde municipal dans ce programme. Pourriez-vous nous donner plus d’information à ce sujet?
[Traduction]
Mme Saab : Avec le transfert du Fonds de la taxe sur l’essence, il y a une liste de catégories prédéfinies de projets qui sont admissibles. Cette liste est plutôt longue et elle est axée sur l’infrastructure lourde, mais elle englobe tout : le transport en commun, le traitement des eaux usées et de l’eau potable, la gestion des déchets solides, les routes axées sur le transport, les ponts, les autoroutes, le transport maritime à courte distance et l’atténuation des catastrophes. Elle inclut également la culture, le tourisme, les sports et les loisirs. Cette liste est assez longue, mais elle est bien définie.
En ce qui a trait à la préoccupation qui a été soulevée plus tôt par rapport au fait que le gouvernement fédéral souhaitait savoir à quel escient l’argent est utilisé, l’argent est destiné à des catégories concrètes et bien définies d’infrastructure dans les municipalités partout au pays.
[Français]
Le sénateur Forest : Il y a aussi une participation financière de la part des municipalités dans le cadre de la réalisation de leur plan d’intervention, qui doit être soumis.
[Traduction]
Mme Saab : C’est absolument vrai. De plus, une grande partie de l’argent que les municipalités perçoivent de la taxe sur l’essence n’est qu’une petite partie de ce dont elles ont besoin pour mettre sur pied n’importe quel projet. La taxe sur l’essence est cumulable, et les municipalités l’utilisent de pair avec leur propre argent, en plus de l’argent reçu de la part du gouvernement provincial.
[Français]
Le sénateur Forest : Pour ce qui est du FMV, en comparant les résultats obtenus, si on regarde l’investissement qui est consenti depuis un bon bout de temps par rapport au coût à la tonne qu’on a réduit quant aux émissions, on arrive à une moyenne de 170 $ la tonne. Lorsqu’on fait la comparaison par rapport aux crédits octroyés pour les véhicules électriques, on arrive environ au même montant. Dans le cadre du FMV, au-delà de l’investissement axé sur la réduction des émissions, on dote les communautés d’infrastructures. Par contre, bien souvent, les petites municipalités ne font pas appel au FMV. Dans certaines régions du Canada, et surtout au Québec, ce fonds est moins utilisé.
La Fédération canadienne des municipalités a-t-elle une stratégie pour soutenir les petites collectivités et augmenter la participation de certaines régions du Canada qui utilisent moins le Fonds vert que d’autres?
M. Boivin : Vous posez une très bonne question. Oui, absolument. Nous avons certainement des objectifs lorsqu’il s’agit de maintenir un certain équilibre entre les plus petites collectivités et les plus grandes. Jusqu’à maintenant, notre portefeuille est tout de même assez équilibré quant aux municipalités. Nous avons reçu, au fil des ans, des commentaires de la part des petites municipalités, qui trouvent que la tâche est plus difficile, qu’elles ont moins de capacité et moins de personnel. Il faut donc prévoir un peu plus d’accompagnement.
Nous avons toujours envisagé ce défi selon une optique d’amélioration continue. L’an dernier, nous avons même cerné d’autres initiatives lancées dans le cadre du Fonds municipal vert pour rendre le tout plus accessible. On songe à lancer un type de bureau d’aide au sein du Fonds municipal vert afin d’offrir un peu d’encadrement aux municipalités pour les guider dans le processus et aussi pour les aider, une fois que leurs projets sont approuvés, avec l’étape de la mise en œuvre. Il y a aussi les produits liés aux connaissances et au renforcement des capacités qui visent surtout ces municipalités, puisqu’il y a un manque d’accès à l’information et à l’expertise. Nous sommes très conscients du fait qu’il faut déployer plus d’efforts pour ces collectivités que pour d’autres. Nous tenons à ce qu’elles fassent partie de notre mandat et des résultats que nous cherchons à obtenir.
[Traduction]
Le sénateur Klyne : J’ai deux questions qui portent sur le budget de 2019, lequel propose du financement — et la sénatrice Eaton l’a abordé plus tôt — pour augmenter l’efficacité énergétique des bâtiments résidentiels, commerciaux et à logements multiples. A-t-on déterminé ou prescrit la façon dont ces fonds seront alloués par région ou par municipalité, ou par type de biens immobiliers?
M. Boivin : Je peux certainement répondre à cela. Dans notre accord de financement pour ce programme, nous avons l’obligation de maintenir un équilibre régional, comme je l’ai dit plus tôt, en plus de maintenir l’équilibre entre les collectivités plus rurales et plus petites et les grandes municipalités.
Nous avons toujours été sur la bonne voie au chapitre du maintien de l’équilibre régional et de l’équilibre entre les petites et les grandes municipalités. Vouliez-vous parler du type d’actifs?
Le sénateur Klyne : Pour augmenter l’efficacité des bâtiments résidentiels, commerciaux ou à logements multiples... Vous avez parlé de l’échelle régionale, mais y a-t-il des montants alloués en fonction du type de bâtiment?
M. Boivin : Par exemple, dans le cas du marché immobilier des ménages individuels, les 300 millions de dollars pour le programme de l’Accélération de l’écoefficacité des communautés ne concerne que les ménages, donc les logements individuels. Puis, le deuxième volet, le volet pour l’Innovation en matière de logement abordable et durable, concerne seulement les logements abordables ou un mélange de logements abordables et sociaux, ou encore un mélange d’unités abordables et plus conventionnelles, en fonction du modèle qui est le plus logique d’un point de vue financier. Il s’agira d’un projet à logements multiples qui sera axé sur le logement abordable. Puis, le troisième volet concerne les installations plus grandes — nous les appellerons les installations de type énergivore —, où l’accent sera probablement mis sur les installations récréatives, c’est-à-dire les résidences à unités multiples. Le volet commercial est moins axé sur les programmes tels qu’ils ont été conçus, de sorte qu’il concerne davantage les installations multirésidentielles et les grandes installations municipales et communautaires qui consomment beaucoup d’énergie.
Le sénateur Klyne : Ma deuxième question porte précisément sur l’augmentation de l’efficacité énergétique des immeubles résidentiels. Vous avez parlé de rénovation plus tôt. À cet égard, parle-t-on de rénovation ou de nouvelles constructions en ce qui concerne les bâtiments résidentiels?
M. Boivin : C’est une excellente question. Tant pour le logement abordable que les immeubles résidentiels, il s’agissait de rénovations et de nouvelles constructions, mais notre financement vise principalement les mesures ou les initiatives énergétiques, donc les installations, les énergies renouvelables sur place et des choses du genre.
Le sénateur Klyne : Que ce soit des rénovations ou de nouvelles constructions?
M. Boivin : Ou de nouvelles constructions, oui.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : J’aimerais revenir au processus d’accès, pour les municipalités, aux enveloppes budgétaires. À l’exception du FMV, avec lequel on procède directement, le processus en place permet-il aux municipalités d’accéder rapidement et efficacement aux enveloppes budgétaires?
[Traduction]
Mme Saab : Parlez-vous du processus lié au transfert du Fonds de la taxe sur l’essence? Oui, c’est le moyen le plus direct et le plus efficace parce qu’il est fondé sur l’allocation contrairement à la présentation d’une demande, où il y a souvent des retards et des blocages.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : J’ai une question plus générale. Est-ce suffisant? Auriez-vous souhaité voir la prise d’autres mesures pour augmenter l’éco-efficacité des municipalités?
[Traduction]
Mme Saab : Je dirai que nous sommes très heureux de voir l’investissement qui a été réalisé. Nous pensons qu’il y a certainement des possibilités futures, particulièrement pour le transport en commun. C’est un secteur important pour d’autres activités de développement. Nous travaillons déjà avec le Fonds municipal vert sur l’électrification des flottes et d’autres initiatives, mais c’est vraiment un secteur dans lequel on peut mener davantage d’activités de développement.
La sénatrice M. Deacon : Je félicite votre organisation pour le nombre de visites que vous faites au Parlement en vue de rencontrer les sénateurs et les députés. C’est certainement très instructif. Cela nous permet de comprendre certains des aspects qui font l’objet de nos discussions aujourd’hui.
Monsieur Boivin, vous avez commencé à parler, au début, de la surveillance, de la responsabilisation et de l’évaluation à mesure que nous avançons. Où nous situons-nous à ces égards? Les possibilités, le financement et les projets sont là, mais comment assurons-nous la surveillance et effectuons-nous les évaluations afin de nous assurer que l’argent est attribué judicieusement et au bon endroit?
Comme nous en sommes au début du processus, y a-t-il quelque chose en place qui nous permettra d’être à notre meilleur avec les municipalités afin que l’argent soit utilisé à bon escient? Sinon, avons-nous la souplesse de nous adapter à la situation?
M. Boivin : Oui, absolument. Nous nous sommes consciemment accordé du temps pour concevoir et mettre en œuvre du programme avant de recevoir les demandes. Notre équipe travaille très dur pour fixer des cibles de rendement qui accompagneront ces investissements. Par exemple, devrait-on s’approcher le plus possible d’une consommation énergétique nette zéro dans certains types d’immeubles? Pour y arriver, on doit effectuer un examen plus approfondi de l’état des connaissances en vue d’établir les paramètres tout en trouvant un équilibre entre la faisabilité et l’orientation du secteur vers les objectifs qu’il doit atteindre de façon à obtenir un meilleur rendement sur le plan énergétique et environnemental.
Une fois que cette analyse est effectuée, les résultats viennent s’ajouter aux produits de connaissance pour que l’on puisse aider les gens à réaliser les objectifs et recommander des mesures à prendre — disons des couches de mesures. On recommandera comment financer ces mesures, et cela fera partie des critères d’admissibilité pour le financement en soi. Les demandeurs devront démontrer que leurs mesures peuvent atteindre les cibles que nous voulons qu’ils atteignent.
La sénatrice M. Deacon : Je pense à l’activité et au changement typiques, qui prennent au moins de trois à cinq ans. Croyez-vous qu’on accélèrera un peu le processus, que les indications pourront être obtenues plus tôt?
M. Boivin : Oui. Un des avantages du Fonds municipal vert, c’est qu’il est permanent. Nous avons cette capacité. Il ne s’agit pas seulement d’un financement de trois ans qui ne permet pas de corriger le tir parce qu’on ne sait pas s’il sera renouvelé. Nous allons exercer une surveillance annuelle pour savoir si nous devons effectuer des rajustements. L’objectif est-il réalisable? Devrions-nous prolonger les cibles? Comme une partie importante du nouveau financement vise à appuyer le secteur au cours des sept prochaines années, j’imagine qu’il y aura au moins une ou deux versions pendant cette période pour que l’on puisse continuer à accroître le rendement du secteur.
La sénatrice M. Deacon : Merci.
Le sénateur Boehm : Merci à vous deux de vos observations aujourd’hui. Quand on regarde la Fédération canadienne des municipalités d’un bout à l’autre du pays, on peut constater que nombre de petites municipalités s’intéressent à la question des villes intelligentes ou des villages intelligents, s’il s’agit d’une petite population. Nombre d’entre eux n’ont pas encore de coordonnateurs ou d’agents de projet.
Leur dites-vous que cela pourrait être la voie à suivre? On porte beaucoup d’attention à Sidewalk Toronto, mais qu’en est-il des petits centres urbains ou des villages qui pourraient probablement utiliser des méthodes écoénergétiques dans les immeubles municipaux? Ils pourraient examiner leurs propres réseaux et la façon dont ils les gèrent. Voilà la première question.
Ma deuxième question est la suivante : vous appuyez-vous sur l’expérience et les pratiques exemplaires internationales d’autres pays? En Europe, par exemple, nombre de régions sont un peu plus avancées que nous. C’est peut-être parce que leur population est davantage concentrée sur le plan géographique. Ces mesures pourraient-elles s’appliquer au travail que vous faites ou au pouvoir de persuasion que vous pourriez avoir sur les petites municipalités qui commencent à peine à s’engager sur cette voie?
Mme Saab : Merci beaucoup, monsieur le sénateur. Il s’agit de deux excellentes questions qui sont pertinentes. La capacité des petites municipalités et collectivités partout au pays est certainement un sujet brûlant pour nous dans presque tout ce que nous faisons... nous voulons nous assurer de faire avancer les choses et d’aider nos membres à renforcer leur capacité à s’engager dans de tels projets.
Pour ce qui est des villes intelligentes, je peux vous dire qu’elles intéressent tous nos membres : les petites, les moyennes et les grandes collectivités. Nous travaillons beaucoup à l’heure actuelle sur nos politiques afin de communiquer les pratiques exemplaires qui peuvent aider nos membres à mener ce type de réflexion et à renforcer leur capacité avec les ressources dont ils disposent. Le Fonds municipal vert est une initiative qui vise délibérément le renforcement des capacités, ce qui nous permet de nous assurer que les petites municipalités sont en mesure de participer efficacement au programme et que nous pouvons atteindre nos membres de toute taille partout au pays avec ce type de financement.
J’aimerais souligner — parce que votre question nous donne l’occasion de le faire — qu’une partie de l’investissement du gouvernement fédéral dans ce budget est également destiné à un programme que la FCM gère : le Programme de gestion des actifs municipaux. Il s’agit d’un programme de renforcement des capacités qui n’est pas réservé uniquement aux petites collectivités rurales, mais qui est presque exclusivement utilisé par celles-ci afin qu’elles puissent renforcer leurs capacités et leur gestion des actifs, ce qui, bien sûr, conforte les pratiques exemplaires relatives à l’efficacité énergétique dans l’avenir.
Nous déployons beaucoup d’efforts pour soutenir les petites municipalités et leur permettre d’aller de l’avant et, dans certains cas, d’apporter des changements dans leurs collectivités avec les ressources dont elles disposent.
Quant aux exemples internationaux, je dirais que nous effectuons certainement beaucoup de recherches sur ce sujet. Pour ce qui est de notre modèle d’efficacité énergétique résidentielle, nous suivons également des exemples aux États-Unis — des modèles PACE qui pourraient être adaptés et mis en œuvre ici. Je vais demander à M. Boivin s’il désire souligner d’autres exemples internationaux en ce qui concerne le Fonds municipal vert.
M. Boivin : Oui, nous surveillons assurément très souvent ce qui se passe ailleurs dans le monde. Cela fait partie de la conception de ces nouveaux programmes. Nous ne nous limitons pas à ce qui se fait ici au Canada. Nous examinons des modèles efficaces dans des pays similaires qui ont un climat semblable et ainsi de suite.
Pour revenir à ce que disait Mme Saab, même lorsque nous examinons les instruments de financement du volet résidentiel, nous imitons les pratiques qui ont connu un peu plus de succès en Europe et aux États-Unis.
J’ai une brève observation sur les villes intelligentes. Dans le cadre des initiatives ou des approches où nous fournirons des capacités liées au programme d’efficacité énergétique, il y aura des choses comme la modélisation énergétique. La fonction de commande intelligente est une des possibilités les plus simples pour les programmes.
La sénatrice Marshall : Au chapitre du Fonds de la taxe sur l’essence et du Fonds municipal vert, l’argent est-il directement versé aux municipalités ou les provinces jouent-elles un rôle à cet égard? Comment l’argent est-il acheminé?
Mme Saab : Je vais commencer par le Fonds de la taxe sur l’essence fédérale. Partout, à l’exception de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, l’argent passe par les provinces. Ces dernières versent ensuite directement l’argent aux municipalités.
La sénatrice Marshall : Les trois ordres de gouvernement doivent-ils s’entendre sur les projets? S’agit-il de projets fédéraux, provinciaux et municipaux ou de projets de la Fédération?
Mme Saab : Dans le cas du Fonds de la taxe sur l’essence fédéral, le gouvernement fédéral remet l’argent aux provinces. En Ontario et en Colombie-Britannique, c’est l’association provinciale de municipalités qui s’en occupe. L’argent est remis directement aux municipalités, qui décident des projets.
La sénatrice Marshall : À Terre-Neuve, que je représente, c’est en coordination avec la province, n’est-ce pas?
Mme Saab : L’argent passe par la province, mais elle n’a pas son mot à dire sur la sélection des projets.
La sénatrice Marshall : Qu’en est-il du Fonds municipal vert?
M. Boivin : En général, le financement est accordé directement aux municipalités. Dans certains cas, il faut en quelque sorte informer la province des transactions...
La sénatrice Marshall : Est-ce que ce sont les municipalités qui présentent une demande?
M. Boivin : Oui. Elles décident ce pour quoi elles désirent obtenir des fonds, mais, compte tenu d’éléments comme les limites de dette, dans les municipalités et ainsi de suite, il faut...
La sénatrice Marshall : Pour le Fonds municipal vert, les municipalités s’adressent-elles aux provinces pour partager les coûts d’un projet, ou le projet est-il entièrement financé par la Fédération et la municipalité?
M. Boivin : Il y a plusieurs possibilités. Il n’est pas nécessaire de consulter la province. On peut fournir jusqu’à 80 p. 100 du financement de grands projets, alors les 20 p. 100 restants peuvent provenir des taxes municipales, du secteur privé, du gouvernement fédéral ou de divers endroits.
La sénatrice Marshall : Le financement peut-il provenir de la taxe sur l’essence?
M. Boivin : Oui, cela pourrait s’ajouter aux autres sources.
La sénatrice Marshall : Ce pourrait être le cas?
M. Boivin : Oui.
[Français]
Le sénateur Forest : Afin d’être clair, la taxe sur l’essence est distribuée par personne, et le fonds vert, par appel de projets. Ai-je raison de faire cette distinction?
On constate que, d’une année à l’autre, le plan d’intervention du gouvernement vise à investir de façon ciblée dans nos infrastructures en y consacrant des crédits fort importants. Pourtant, à la fin de l’année, on n’arrive pas... Malgré le fait que notre parc d’infrastructures soit déficient, bon nombre de crédits ne sont pas dépensés et ne sont pas investis dans nos collectivités. La Fédération canadienne des municipalités a-t-elle pensé à une stratégie qui permettrait une meilleure utilisation des fonds disponibles dans le cadre du programme d’infrastructure pour l’ensemble des collectivités canadiennes?
[Traduction]
Mme Saab : Oui, c’est un très bon point et une excellente question, et je vais utiliser le plan Investir dans le Canada actuel à titre d’exemple.
Des 13 provinces et territoires, il y en a seulement six qui ont lancé le processus de traitement des demandes pour des projets. Il y a littéralement de l’argent qui n’est pas utilisé et qui ne fera certainement pas avancer les projets à l’échelon local, argent qui devait aller aux priorités en matière d’infrastructure locale. Cela nuit réellement à la réalisation de progrès efficaces. C’est également un obstacle à la fiabilité et à la prévisibilité de l’octroi du financement à la municipalité, ce qui est essentiel pour elle afin qu’elle soit en mesure d’effectuer la planification à long terme nécessaire dans le cadre de programmes d’infrastructures importants. En réponse à votre question sur ce sujet, nous avons toujours dit au gouvernement fédéral que, s’il avait de la difficulté à verser de l’argent par l’intermédiaire de programmes d’infrastructures fédéraux, les municipalités préféreraient recevoir directement de l’argent de la taxe sur l’essence fédérale. Le processus de cette taxe est exempt de blocage et permettra aux municipalités de faire avancer les projets parce que les critères d’admissibilité sont assez généraux. C’est l’outil le plus prévisible à long terme qui est accessible. La FCM désire se libérer de ce type d’engagement budgétaire en utilisant cet outil pour aller de l’avant et en faisant en sorte que le financement des municipalités soit une caractéristique permanente.
[Français]
Le sénateur Forest : Dans ce scénario, vous utilisez la voie de la taxe sur l’essence. Donc, ce serait également sur la base d’une distribution par personne, et non par appel de projets.
[Traduction]
Mme Saab : Le montant reçu par une municipalité serait calculé par habitant à moins qu’on soit dans une province qui comporte également des frais de base. À partir de ce moment-là, la municipalité consacre l’argent aux divers projets qu’elle a mis en œuvre.
Le sénateur Klyne : J’aimerais revenir à l’augmentation de l’efficacité énergétique des immeubles résidentiels. Comme nous pouvons tous l’imaginer dans le cas des maisons existantes, il peut s’agir de nouvelles fenêtres, de chaudières à haut rendement et de chauffe-eau instantanés sur demande. Pour une nouvelle construction, il existe un éventail de choses accessibles, y compris les maisons intelligentes, les maisons passives et l’énergie solaire et éolienne, voire le débranchement du réseau.
Avez-vous une politique qui influence les propriétaires dans le choix de leurs initiatives?
M. Boivin : Oui. C’est une excellente question. Une des choses que nous devons prendre en considération, c’est si cela est approprié pour la région si nous essayons vraiment de rendre ces initiatives abordables et de favoriser la réduction d’émissions. Nous concevons les programmes de façon à déterminer quelques grandes régions ainsi que l’intensité des émissions de carbone des réseaux électriques qui s’y trouvent parce que, dans certains cas, il ne serait peut-être pas logique de passer à l’électricité, alors que ce serait une bonne idée dans d’autres.
Également, il y a l’incidence de certaines initiatives. Si on utilise la technologie solaire PV au Québec en comparaison de l’Alberta, on constaterait une grande différence en ce qui concerne la réduction des émissions. Notre façon d’aborder cela, en ce qui concerne le programme, c’est d’avoir probablement trois ou quatre catégories pour lesquelles nous formulerons des recommandations sur les mesures les plus appropriées à prendre.
Le président : Je remercie les témoins de nous avoir fait part de leurs opinions et de leur vision. C’était fort instructif.
(La séance est levée.)