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OLLO - Comité permanent

Langues officielles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule no 2 - Témoignages du 7 mars 2016


OTTAWA, le lundi 7 mars 2016

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 17 h 30, pour poursuivre son étude de l'application de la Loi sur les langues officielles ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi.

La sénatrice Claudette Tardif (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, je déclare la réunion du Comité sénatorial permanent des langues officielles ouverte. Je m'appelle Claudette Tardif, je suis sénatrice de l'Alberta, et j'ai l'honneur et le plaisir de présider la réunion.

Avant de passer la parole aux témoins, j'invite les membres du comité à se présenter.

La sénatrice Poirier : Sénatrice Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick. Bonsoir et bienvenue.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, Québec.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Le sénateur Oh, de l'Ontario.

[Français]

Le sénateur Maltais : Sénateur Maltais, de Québec, dans la province de Québec.

La présidente : Le comité reçoit aujourd'hui la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, la FCFA, qui présentera un survol des principaux enjeux qui affectent ses communautés.

Nous avons le plaisir d'accueillir Mme Sylviane Lanthier, présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne, ainsi que Mme Suzanne Bossé, directrice générale de la fédération.

Au nom des membres du comité, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à venir témoigner devant nous. Je vous demanderais de faire votre présentation de la façon la plus concise possible afin de permettre à davantage de sénateurs de poser des questions.

Madame Lanthier, je vous donne la parole.

Sylviane Lanthier, présidente, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada : Madame la présidente, honorables sénatrices et sénateurs, c'est un réel plaisir pour moi d'être devant vous ce soir, et je tiens à vous remercier de nous avoir invitées à comparaître. Je m'appelle Sylviane Lanthier, je suis la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, et je suis accompagnée de notre directrice générale, Suzanne Bossé.

Il y a deux semaines, la FCFA a été invitée à comparaître devant vos collègues du Comité des finances de la Chambre des communes et, à cette occasion, je leur ai annoncé deux bonnes nouvelles que je tiens à partager avec vous également. La première bonne nouvelle, c'est qu'il n'y a jamais eu autant de personnes qui souhaitent vivre en français au Canada, et la demande d'activités et de services offerts dans cette langue va toujours croissant.

La deuxième, c'est qu'il existe, à la grandeur du pays, un réseau de bâtisseurs qui se sont pris en main pour développer les infrastructures dont nous avons besoin pour vivre en français. Ce réseau, dont la FCFA est le chef de file, est toujours à la recherche de solutions novatrices pour mieux servir 2,6 millions de citoyens et de citoyennes d'expression française dans neuf provinces et trois territoires, et pour mieux répondre à leurs besoins.

Vous nous avez justement demandé de vous parler de nos priorités, et j'aimerais ancrer mes propos dans un événement marquant qui aura lieu l'an prochain, soit le 150e anniversaire de la Confédération canadienne. Les célébrations de 2017 sont l'occasion de mettre l'accent sur tout ce qui fait partie de notre ADN comme peuple, d'affirmer clairement nos grandes valeurs, au chapitre desquelles on compte la dualité linguistique de notre pays.

L'existence même, dans toutes les régions du pays, de communautés de langue française est ce qui nous permet de parler réellement de dualité linguistique canadienne. Les célébrations de 2017 représentent une belle occasion pour le gouvernement de poser des gestes historiques pour réaffirmer l'importance de cette dualité linguistique en appuyant la vitalité de nos communautés et la capacité des Canadiens et des Canadiennes de vivre en français.

Plus précisément, je partage avec vous quatre grandes priorités qui pourront orienter les études que fera votre comité. Tout d'abord, il y a le renforcement des capacités de nos communautés, particulièrement au niveau des infrastructures, des services et des organismes et institutions qui travaillent au rayonnement du français. La valeur ajoutée de nos centres communautaires et culturels, de nos écoles, de nos services d'établissement et d'aide à l'emploi, de nos médias communautaires et de nos organismes francophones locaux ne fait plus aucun doute. Cependant, aujourd'hui, ces institutions ont atteint la limite de ce qu'elles peuvent faire avec les ressources à leur disposition.

Plusieurs de nos organismes reçoivent des fonds du ministère du Patrimoine canadien par le truchement du Programme d'appui aux langues officielles, mais ces fonds n'ont pas augmenté et n'ont même pas été indexés depuis maintenant 11 ans. Compte tenu de l'augmentation du coût de la vie, cela représente un recul de 30 à 35 p. 100 au niveau des ressources de ces organismes. D'autres organismes vivent des situations difficiles, parce que des fonds prévus dans le cadre de la Feuille de route pour les langues officielles n'ont toujours pas été débloqués, trois ans après le lancement de celle-ci.

Nos médias vivent également une fragilisation préoccupante; la FCFA comparaît d'ailleurs demain matin au Comité permanent du patrimoine canadien à ce sujet. Je ne vous apprends rien en vous disant que les compressions à Radio-Canada ont affaibli considérablement les stations régionales au service de nos communautés. Au chapitre des médias communautaires, la dernière année a vu L'Express Ottawa cesser sa publication et l'Eau vive, en Saskatchewan, suspendre la sienne pendant quelques mois. Nos journaux et nos radios ont connu une baisse significative des revenus provenant des placements publicitaires fédéraux. De façon plus générale, à l'heure où l'ensemble de l'industrie médiatique effectue, tant bien que mal, une transition vers des modèles d'affaires qui reposent davantage sur le numérique, nos médias ont besoin d'appui pour effectuer ce virage.

En amont, vivre dans un univers numérique n'est pas à la portée de tous les francophones, particulièrement ceux et celles qui vivent dans des communautés rurales ou éloignées. Il est difficile d'occuper l'espace numérique quand on n'a pas de réseau cellulaire, comme c'est le cas dans la péninsule de Port au Port, à Terre-Neuve. Il est difficile de regarder des contenus vidéo en français sur le Web lorsqu'on n'a pas accès à une connexion à haute vitesse digne de ce nom, comme c'est le cas dans les régions rurales de la Nouvelle-Écosse, ou lorsque la bande passante est hors de prix, comme au Yukon.

Bref, renforcer les capacités de nos communautés est essentiel si nous souhaitons qu'elles demeurent les championnes de la promotion du français qu'elles sont à l'heure actuelle. Nos infrastructures doivent pouvoir être modernisées ou améliorées pour faire face à la demande croissante. Nos médias doivent pouvoir prendre le virage numérique. Nos organismes et institutions doivent pouvoir répondre aux besoins émergents, par exemple en matière d'immigration francophone.

Cela m'amène à la deuxième priorité dont je veux vous parler aujourd'hui, soit la croissance démographique. À l'occasion de la Journée de réflexion sur l'immigration francophone, la semaine dernière, nous avons rencontré le ministre McCallum et nous avons pu le mettre au courant des grands enjeux à cet égard. Il a notamment bien compris que pour nous, l'immigration francophone n'est pas une simple question de prestation de services à des individus, mais bien de renforcement de nos communautés. C'est un problème collectif qui nous anime et, pour réussir, il nous faut la capacité de promouvoir nos communautés comme terres d'accueil auprès des candidats à l'immigration à l'étranger, il faut des mesures spécifiques pour accroître le nombre d'immigrants qui choisissent nos communautés ou qui sont recrutés par les employeurs de nos régions et, enfin, il faut un appui accru aux services d'accueil et d'établissement en français créés par et pour nos communautés.

La troisième priorité ne vous surprendra guère : il s'agit de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles. Je tiens d'ailleurs à saluer la sénatrice à la retraite Maria Chaput, grâce à laquelle vous avez à nouveau devant vous un projet de loi qui vise à moderniser la loi et le règlement qui détermine où et dans quelles circonstances les Canadiens et les Canadiennes reçoivent des services et des communications dans la langue officielle de leur choix.

Les dernières années ont vu un effritement prononcé au chapitre de la mise en œuvre de la loi. En l'absence d'une autorité centrale chargée de veiller à une application cohérente au sein de tout l'appareil fédéral, plusieurs institutions se sont contentées de faire le strict minimum et, parfois, même moins que cela. À cause des compressions budgétaires, certaines n'ont plus les capacités de s'acquitter correctement de leurs obligations linguistiques. D'ailleurs, on a vu récemment, dans un rapport du commissaire aux langues officielles, comment, lors de l'exercice de lutte au déficit de 2012, il n'y a eu aucun souci, de la part du Conseil du Trésor, d'exiger que les institutions fédérales tiennent compte de l'impact de leurs décisions sur ces obligations ou sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Toujours au chapitre de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles, il serait important que l'on se penche sur la façon dont le gouvernement fédéral, lorsqu'il transfère des fonds aux provinces et aux territoires dans le cadre de diverses ententes, veille à ce que ses obligations linguistiques soient respectées et que les fonds bénéficient aussi à nos communautés. Il serait important que le gouvernement s'assure d'une reddition de comptes transparente à cet égard.

La dernière priorité dont je souhaite vous parler ce soir est l'impact des projets de réforme démocratique sur la représentation de nos communautés au Parlement. Comme vous le savez sûrement, la FCFA a participé de façon très active au débat sur la réforme du Sénat au cours de la dernière législature, et nous comptons certainement participer aux discussions sur le nouveau mode de nomination des sénateurs et des sénatrices.

Nous savons également qu'un autre débat s'amorce à la Chambre des communes sur la mise en place d'un mode de scrutin proportionnel. Dans les deux cas, notre souci demeure avant tout de veiller à ce que ces réformes maintiennent la représentation politique de nos communautés. Cet enjeu pourrait d'ailleurs faire l'objet d'une étude au sein de votre comité. En tout cas, nous vous le recommandons.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, les défis sont nombreux, mais, à la FCFA et dans notre réseau de concertation, nous sommes des optimistes. Comme je vous l'ai dit plus tôt, le rôle de bâtisseur fait partie de notre ADN, et notre vision est de léguer une francophonie moderne, diversifiée et engagée à nos enfants et à nos petits- enfants et — pour reprendre le terme du député Randy Boissonnault —, à tous les franco-curieux du pays. Nous savons qu'avec de la bonne volonté, du travail et de la collaboration, nous pouvons y parvenir.

La sénatrice Poirier : Je vous remercie de votre présentation. Tout d'abord, je tiens à vous féliciter, madame Lanthier, pour votre nomination à la présidence de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada. Je vous souhaite beaucoup de succès. Je m'en voudrais de ne pas souligner également le bon travail accompli par Marie-France Kenny, votre ancienne présidente. Je crois que sa réputation n'est plus à faire.

Quelques-unes de mes questions ont été abordées dans votre présentation, mais j'aimerais avoir quelques éclaircissements. Tout d'abord, la fédération a-t-elle été consultée lors de la planification des célébrations du 150e anniversaire de la Confédération canadienne?

Mme Lanthier : Je ne crois pas que nous ayons été consultés dans le cadre de la planification, non.

La sénatrice Poirier : J'aimerais connaître les attentes de la fédération en ce qui concerne ces célébrations.

Mme Lanthier : Comme nous l'avons mentionné dans notre présentation, nous aimerions que cette fête soit l'occasion de célébrer la francophonie canadienne et la dualité linguistique et de se rappeler, à titre de Canadiens et de Canadiennes, l'importance de la dualité linguistique comme fil conducteur dans l'ensemble du pays. Nous croyons que l'une de nos grandes forces au Canada, c'est d'avoir deux langues officielles, et que cela doive être célébré par l'ensemble des Canadiens.

La sénatrice Poirier : Dans le passé, lors d'événements de cette ampleur, n'aurait-il pas été normal que la FCFA soit consultée?

Suzanne Bossé, directrice générale, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada : Si vous me le permettez, la FCFA a comparu deux fois devant des comités parlementaires il y a déjà deux ans. Les orientations du programme Canada 150 ont paru depuis, et nous n'avons pas eu d'autres discussions en termes d'orientation quant à l'utilisation des fonds.

La sénatrice Poirier : Ma deuxième question concerne Radio-Canada. Il s'agit d'un sujet tout de même assez délicat depuis quelques années. Le gouvernement fédéral a promis de verser un financement accru à Radio-Canada. Quelles sont vos attentes quant à ce financement additionnel?

Mme Lanthier : Nous souhaitons fortement qu'une partie de ces fonds soit dirigée vers les stations régionales de Radio-Canada, afin qu'elles puissent être rééquipées en ressources humaines, en capital humain, pour bien servir les communautés francophones. Nous constatons que, depuis l'abolition du fonds précédent qui permettait d'appuyer la programmation régionale, les compressions à Radio-Canada dans les communautés francophones et les stations régionales ont entraîné des changements importants, et que nous sommes en perte de vitesse. La capacité journalistique de Radio-Canada à couvrir les événements dans nos communautés a beaucoup diminué; nous croyons donc qu'un réinvestissement au chapitre du service des nouvelles est incontournable. Nous croyons également que des fonds devraient être investis dans d'autres types d'émissions que les nouvelles afin de faire rayonner la vitalité de nos communautés.

La sénatrice Poirier : On ne peut passer sous silence la décision de la Cour d'appel fédérale qui a renversé celle de la Cour fédérale concernant Radio-Canada et le commissaire aux langues officielles quant aux obligations linguistiques de la société d'État. Selon vous, si le commissaire pouvait enquêter, est-ce qu'il y aurait un meilleur reflet des communautés francophones et acadienne?

Mme Lanthier : Oui.

La sénatrice Poirier : Nous allons rencontrer le commissaire sous peu à ce sujet.

Ma dernière question concerne les réfugiés. Le gouvernement fédéral a-t-il consulté la FCFA afin de connaître la capacité des communautés francophones à accueillir des réfugiés, et plus particulièrement dans les communautés francophones en situation minoritaire?

Mme Bossé : La FCFA a participé à plusieurs rencontres téléphoniques organisées par le ministère de l'Immigration. Il est certain que, dans nos communautés, nous nous sommes organisés. Les conseils scolaires, les familles, les services de santé, tous les organismes qui gravitent autour de nos réseaux d'immigration francophone se sont très bien organisés.

Cependant, les réfugiés n'ont pas été orientés vers nos services francophones alors qu'ils existaient. Les services d'établissement offerts aux immigrants sont très rares en termes de services francophones par et pour des francophones. Le seul endroit au pays où il y a des services en français pour les réfugiés, c'est au Manitoba.

Autrement, il n'y en a pas pour les réfugiés comme tels. Pour ce qui est de l'évaluation des compétences linguistiques, de la formation linguistique et de l'intégration à l'emploi, les services en français sont très rares, sauf au centre-sud-ouest de l'Ontario et au Manitoba.

Par contre, nous avons tout de même réussi. Dans nos communautés, certains parents ont réussi à identifier des réfugiés syriens dans les écoles, par exemple, et nous sommes allés les chercher et les accueillir afin de nous assurer qu'ils reçoivent des services en français, malgré les ressources limitées que nous avions pour le faire.

La sénatrice Poirier : Le Nouveau-Brunswick, une province officiellement bilingue, n'offre-t-il pas ce genre de services?

Mme Bossé : La province n'offre pas de service d'accueil spécialisé aux réfugiés.

La sénatrice Poirier : Sur les 25 000 réfugiés, quel pourcentage a reçu des services en français?

Mme Bossé : Nous n'avons pas cette information. Nous l'avons demandée au ministère. Nous avons informé le ministre McCallum que, malgré tous les efforts que nous avons faits dans les communautés, il demeure très difficile d'offrir les services parce que, la plupart du temps, les réfugiés arrivent dans des organismes d'accueil anglophones. Ils ne sont pas référés à nos services francophones. Nous travaillons de très près avec le ministère pour tenter de changer cette approche, mais il y a encore beaucoup de travail à faire.

Le sénateur Maltais : Je vous remercie, mesdames, pour votre excellente présentation et pour le travail très important que vous faites.

Concernant le 150e anniversaire de la Confédération canadienne, y aurait-il moyen de rappeler bien gentiment à la ministre du Patrimoine que le Canada a d'abord été découvert en français, chez vous, en Acadie? Ce n'est pas Sébastien Cabot qui l'a découvert. Le Canada a été bâti grâce à deux nations, et la première nation canadienne était francophone. C'est clair. De plus, les explorateurs ne sont pas arrivés en Alberta, mais bien à Port-Royal, n'en déplaise à madame la présidente. Il faudrait taper dur sur le clou. Il est inconcevable que vous soyez si peu impliqués.

Parlons de Radio-Canada maintenant. Lorsque le gouvernement conservateur était au pouvoir, on lui a attribué tous les maux. Le gouvernement libéral a annoncé très clairement son intention d'octroyer à Radio-Canada une enveloppe de 75 millions de dollars dans le cadre de son premier budget et de 150 millions de dollars l'année suivante. C'est ce que la ministre a laissé entendre. Croyez-vous que cet argent sera dirigé vers les communautés francophones en situation minoritaire ou bien, tout comme moi, avez-vous l'impression que Montréal va récolter la majeure partie de ces fonds?

Déjà, les gens sont en attente. Les gens de Radio-Canada n'attendent que le lendemain du budget pour frapper à la porte et présenter un projet ou n'importe quoi. D'ailleurs, ils le font ouvertement. J'ai bien peur que les 75 millions de dollars ne se rendent ni à Moncton, à Fredericton, à Halifax, à Saint-Jean, à l'Île-du-Prince-Édouard, à Sudbury, au Manitoba, en Saskatchewan ou en Alberta.

Quelles garanties pouvez-vous obtenir de la ministre que cet argent sera versé aux communautés qui ont connu des compressions? Dès qu'on met à pied un employé de Radio-Canada, on le fait toujours dans les régions, et jamais à la tête. Personne à Montréal n'a perdu son emploi. La société a des édifices de 30 étages, et il n'y a pas de problème. Je viens d'une région du Nord du Québec, et je vous assure que ce n'est pas grâce à Radio-Canada qu'on en sort. J'aimerais donc savoir si vous pouvez obtenir une garantie de la ministre à ce sujet.

Mme Lanthier : Nous n'avons pas encore rencontré la ministre Joly. Lorsque nous la rencontrerons, nous aurons toute une liste de sujets à lui proposer, et Radio-Canada en fera certainement partie.

Comme je l'ai dit, il est important qu'il y ait des réinvestissements en faveur des stations régionales de Radio- Canada. Nous avons comparu récemment devant le CRTC, qui a mené des consultations sur la télévision régionale, et nous avons proposé que soit créé un nouveau fonds consacré à la télévision régionale et locale qui permettrait de combler l'écart qui existe en ce moment, et afin que les stations de chez nous disposent des ressources nécessaires pour bien faire leur travail. On parle encore une fois des nouvelles, mais aussi d'autres types d'émissions qui permettent de refléter ce qui se passe dans les communautés.

Nous travaillons donc en ce sens et nous faisons toutes les représentations que nous pouvons. Pour nous, il est important de faire en sorte que Radio-Canada, tout comme les médias communautaires, soient en mesure de faire leur travail et de refléter la vie de nos communautés.

Le sénateur Maltais : Actuellement, les communautés francophones hors Québec n'existent pas pour Radio-Canada, ou très peu. Lorsque des émissions sont tournées dans ces régions — je regarde, entre autres, la chaîne Unis — elles sont faites avec une pointe d'humour que je n'aime pas du tout.

La réalité canadienne, c'est A mari usque ad mare. Radio-Canada, selon son mandat, doit faire rayonner l'unité canadienne et non pas en faire une pomme de discorde. Quand on me parle de l'élevage de chevaux de race dans le Nord de l'Ontario, je trouve le sujet vraiment intéressant, car je ne savais même pas que cela existait. Il ne faut toutefois pas tourner les choses à la dérision.

Lorsqu'on parle des aboiteaux de la vallée d'Annapolis, il faut plutôt se pencher sur leur architecture pour en faire presque un cours universitaire, car on parle d'une structure qui existait il y a 500 ans. Malheureusement, on ne met pas en valeur ce qu'ont fait les francophones, du moins, pas assez.

Il y a deux ans, lors des fêtes de la francophonie du Nouveau-Brunswick, j'ai eu le privilège de faire le tour de plusieurs municipalités du Nouveau-Brunswick et d'assister à des fêtes paroissiales. J'en suis sorti ébahi du talent des jeunes. J'ai vu, entre autres, la pièce de théâtre tout à fait fantastique d'Évangéline, présentée d'une façon humoristique par des jeunes, à un point tel que Charlie Chaplin passerait en second. Le talent qu'on y trouve est extraordinaire. J'en ai parlé sur les ondes de la CBC, et deux jours plus tard, les gens de Radio-Canada étaient en ville et cherchaient cette petite pièce de théâtre. Ils ne l'ont pas trouvée, car il n'y a eu que deux représentations. C'est pour vous dire qu'ils sont loin d'être avant-gardistes.

Je vous demande d'être très diligente en ce qui concerne les fonds accordés, car j'ai peur qu'ils soient affectés uniquement à la tour de Radio-Canada à Montréal qui, soit dit en passant, est à vendre. Si vous voulez des animateurs et des producteurs, il y en a quelques-uns à Montréal qui ne font pas grand-chose, qui pourraient se recycler et retourner en région. Il leur ferait du bien de voir ce qu'est le Canada. C'est ce que je vous souhaite.

J'aimerais ajouter un mot sur les réfugiés. Ce que vous vivez chez vous présentement est aussi invraisemblable que ce qu'on vit au Québec. Pourtant, nous en avons accueilli une bonne partie, justement en raison d'une loi linguistique. Le Québec est la seule province à avoir légiféré en la matière, faisant du français la langue officielle. Les jeunes qui arrivent au Québec sont assujettis à la Loi 101. Toutefois, les parents ne le sont pas. La langue commune est l'arabe, mais les parents devront apprendre l'anglais et les enfants le français. Imaginez-vous comment un employeur doit démêler tout ça dans une telle situation. C'est un problème actuellement. Les deux gouvernements et les communautés d'accueil travaillent très bien ensemble. Cependant, ils font face à un problème réel, et la solution immédiate n'est pas encore évidente. Je regardais un reportage au sujet de Toronto, et il s'avère qu'elle aussi est confrontée à de graves problèmes.

Je ne sais pas, compte tenu de ces 25 000 ou même 40 000 réfugiés, à la fin de l'année, comment nous pourrons, en tant que Canadiens et Canadiennes, réagir dans chacune de nos langues personnelles. C'est une suggestion que je vous fais.

La présidente : Vouliez-vous réagir, madame Lanthier?

Mme Lanthier : Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que Radio-Canada a un mandat national. C'est aussi ce qu'on dit aux gens de Radio-Canada. On espère, on souhaite, on voudrait, on exige un meilleur travail pour favoriser une sorte de conversation entre les différentes régions du pays et entre les différentes personnes, de sorte que, au Québec, on comprenne davantage ce qui se passe dans les communautés francophones et pas seulement l'inverse. Je pense que Radio-Canada est là pour construire des ponts entre les différentes régions du pays et les différentes communautés. Or, ce qui se fait n'est pas suffisant. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour améliorer les choses, entre autres pour que les Québécois puissent davantage comprendre qui nous sommes, nous qui vivons en français à l'extérieur du Québec. C'est l'une de nos revendications par rapport à Radio-Canada, et c'est un message que l'on ne cesse de leur soumettre. Les stations régionales font tout de même un bon travail, qui pourrait être amélioré s'il y avait davantage de ressources, et pour lequel nous souhaitons davantage de ressources.

Nous allons vérifier ce qui se passe avec les sommes supplémentaires qui seront investies à Radio-Canada, car nous exigeons qu'elles ne servent pas seulement au Québec, mais à l'ensemble des provinces. Nous avons rencontré les cadres supérieurs de Radio-Canada la semaine dernière. Ils ont dit avoir déjà cerné des endroits vulnérables, où ils ont l'intention de réinvestir. Nous ne savons pas exactement quels sont ces endroits vulnérables, mais nous pouvons deviner qu'il y en a un certain nombre dans les régions.

La présidente : Le rapport que notre comité a produit en avril 2014 sur CBC/Radio-Canada et le respect de ses obligations linguistiques est tout aussi pertinent aujourd'hui qu'il ne l'était en 2014. Certaines des recommandations que vous avez faites, et auxquelles le sénateur Maltais fait référence, ont déjà été formulées.

Le sénateur Maltais : Lors de votre rencontre avec madame la ministre, parlez-lui de la place qu'occupe la radio de Radio-Canada. Je vais vous en donner un exemple. Je fais en voiture le trajet entre Québec et Ottawa toutes les semaines. Bien entendu, cette année, on n'écoutera pas le hockey. On est donc pris à écouter Radio-Canada, parce que c'est le seul poste que l'on capte de façon continue un peu partout.

Des émissions intéressantes sont diffusées sur les jeunes du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Acadie, et les chroniqueurs se rendent dans les écoles. Toutefois, ces émissions sont diffusées à 11 h 30 le soir. Qui les écoute, à part moi qui ne suis pas couché, ou le gardien de nuit dans un hôpital? La plage horaire est importante. Pourquoi ne pas les diffuser en avant-midi ou à 16 heures, lorsque les jeunes sortent de l'école, afin qu'ils puissent se brancher, au Québec et ailleurs, pour savoir ce qui se passe dans la francophonie canadienne? La plage horaire est importante.

Mme Lanthier : Nous existons pendant les heures de grande écoute aussi, je suis bien d'accord avec vous.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Merci, madame la présidente. Merci à nos témoins. Ma question s'adresse à vous. Parmi les enjeux clés qui concernent la minorité francophone, lequel est selon vous la plus grande priorité? S'agit-il, par exemple, de l'immigration, des mandats ministériels, de la capacité de la fonction publique ou de quelque chose d'autre?

[Français]

Mme Lanthier : Merci de votre question, monsieur le sénateur. Notre plus grande priorité, si nous devions en choisir une, ce serait le renforcement de nos capacités, parce que la vie en français passe par des communautés fortes et des organismes qui sont sur le terrain et qui sont capables d'organiser la vie en français. Donc, lorsque nous parlons du renforcement de nos capacités communautaires, nous parlons vraiment de renforcer les centres culturels, les organismes qui permettent à des enfants de jouer au soccer en français, de suivre des cours de natation en français et d'acheter des livres en français, soit tout ce qui permet aux enfants de s'inscrire à l'école française et de créer un espace public où on entend du français.

Ainsi, ce qui est important pour nous, c'est que le français vive à l'extérieur des foyers et qu'il soit reconnu sur la place publique. Pour ce faire, il faut des organismes qui favorisent la vie en français et qui deviennent des lieux de travail en français, des milieux de vie en français, afin que cela crée un engouement et de la vitalité. Pour nous, c'est très important. Il y a eu un recul au cours des dernières années de la capacité des organismes, entre autres en raison du financement qui n'a pas augmenté. Des organismes ferment leurs portes dans certains milieux et, souvent, c'est dans des milieux qui sont aussi les plus vulnérables.

Nous voudrions renverser la vapeur pour faire en sorte de ne pas perdre cette vitalité et pour que les francophones qui vivent dans nos milieux, et les anglophones qui veulent aussi avoir une certaine vie en français — car il y en a tout de même beaucoup —, puissent trouver des moyens de vivre une partie de leur vie en français.

La sénatrice Seidman : Merci, madame Lanthier, pour votre présentation.

[Traduction]

Vous avez parlé de la feuille de route actuelle et vous avez fait mention de certaines déceptions. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus long à ce sujet et, peut-être, que vous nous indiquiez les points forts de cette feuille de route ainsi que les réussites qui y sont associées. Nous sommes déjà bien engagés dans le processus, mais vous avez parlé de problèmes concernant la mise en œuvre du plan d'exécution. On dirait que c'est derrière nous.

Vous pourriez ensuite nous dire quelles sont les principales faiblesses et quelles sont vos attentes pour la suite des choses. Merci.

[Français]

Mme Lanthier : Merci pour votre question. Nous avons deux préoccupations principales avec la feuille de route. Notre première préoccupation concerne la transparence de la feuille de route, c'est-à-dire la capacité que nous avons d'accéder à l'information qui nous permet de savoir si elle est réellement mise en œuvre, comment elle l'est et comment l'argent est dépensé. Notre deuxième préoccupation consiste à savoir si les sommes ont été dépensées.

Ce que nous comprenons, par exemple, c'est que, en matière d'immigration francophone, dans le cadre de la feuille de route, il y a une somme assez importante qui devait être dépensée en faveur de l'immigration francophone, soit 120 millions de dollars qui, théoriquement, sont et seront dépensés à ce chapitre. Cependant, ce que nous constatons, dans nos communautés, c'est que les organismes qui offrent des services ne sont pas en mesure, en ce moment, de faire ni de la promotion, ni du recrutement, et parfois, pas d'accueil non plus. Il y a donc des lacunes, parce qu'il n'y a pas de ressources. Si ces sommes ont été dépensées, on ne sait pas comment elles l'ont été.

Il y a aussi certains programmes liés à la création d'emplois et au développement social. Par exemple, 4 millions de dollars sont versés aux communautés francophones, mais cette somme a mis énormément de temps à se mettre en route. D'ailleurs, j'ai lu dans un rapport du Comité des langues officielles que, paraît-il, l'argent commence à être dépensé, mais que cela a pris beaucoup de temps et que, pendant ce temps-là, il ne s'est pas passé grand-chose dans ce domaine. Il y a des domaines comme celui-là pour lesquels on se demande ce qui se passe avec la feuille de route.

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Voilà donc les faiblesses et les déceptions particulières dont vous avez parlé. Croyez-vous que ces problèmes sont liés à cette feuille de route-là ou s'il s'agit de quelque chose qui s'est déjà produit? Nous savons qu'il y a des plans quinquennaux, et que celui-là n'est pas le premier. S'agit-il d'un problème récurrent?

[Français]

Mme Lanthier : Oui, c'est un problème qui se répète, effectivement.

Mme Bossé : Je pourrais peut-être ajouter quelque chose. Oui, c'est un problème qui est récurrent, mais c'est aussi une situation qui a empiré. En plus de l'absence de transparence, en plus du fait que les fonds n'ont pas été débloqués, il reste que le gouvernement a aussi une nouvelle approche quant au financement. On peut parler de finance sociale, on peut parler du fait que, par exemple, dans les domaines de la santé, de la création d'emplois, du développement social, de l'alphabétisme et du développement des compétences, le gouvernement a décidé de procéder par des appels de propositions élargis, ce qui signifie que les organismes dans nos communautés n'ont pas reçu les investissements leur permettant d'offrir des services aux citoyens. Ce sont plutôt des organismes québécois ou anglophones qui ont été choisis, mais qui ne connaissent pas du tout nos communautés. Alors, c'est une situation qui est de plus en plus difficile, qui fait que les communautés francophones en situation minoritaire ont accusé un recul.

Cela dit, vous nous avez demandé aussi s'il y avait des succès. Certainement, il y en dans le cadre de projets dans le domaine de la santé. Des fonds importants ont été investis dans ce domaine, par l'intermédiaire des universités, pour permettre davantage de formation de professionnels de la santé en français. Quant au développement économique, plusieurs millions de dollars y ont été investis, et les organismes des communautés savent bien les utiliser. J'imagine que vous aurez la chance de recevoir ces organismes-là également.

Quant à nos aspirations pour l'avenir, la FCFA a commencé à tenir des discussions avec les 42 organismes qui font partie du réseau de la francophonie. En novembre dernier, nous avons commencé à examiner, secteur par secteur, comment notre prochain plan en faveur de l'amélioration des langues officielles pourrait contribuer au développement des communautés. Ce serait effectivement les communautés qui pourraient en bénéficier, plutôt que d'autres institutions ou d'autres organismes.

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Je présume que, comme nous tous, vous avez vu les lettres de mandat adressées à la ministre de Patrimoine canadien. Avez-vous certaines attentes à ce sujet? Croyez-vous qu'il y a là des éléments qui pourront, par exemple, remédier aux problèmes de transparence qui vous préoccupent et vous permettre de savoir vraiment où va l'argent?

[Français]

Mme Lanthier : Ce qu'on voit dans la lettre de mandat de la ministre Joly en particulier, c'est cette idée de créer, en collaboration avec les communautés francophones, un nouveau plan d'action pour les langues officielles. Ce que nous avons trouvé intéressant dès le départ, c'était l'idée que nous allions participer à l'élaboration de ce plan. Nous savons que des consultations ont été annoncées pour cet été. Ainsi, comme le disait ma collègue, Suzanne, nous sommes en train de travailler avec nos communautés pour déterminer quelles seraient nos orientations, à partir de 2016, et quelles seraient nos prochaines priorités. C'est un aspect sur lequel il sera important de bien travailler.

Il y a aussi, évidemment, le Programme de contestation judiciaire qui pourrait être remis en œuvre dans une version modernisée. Nous avons travaillé sur ce dossier également, et nous avons mis sur pied un comité d'experts afin de proposer un nouveau programme qui pourrait répondre aux besoins des communautés francophones et à ceux de la minorité linguistique anglophone au Québec. Nous sommes donc prêts à travailler avec le gouvernement sur ce dossier.

Il y a certains éléments qui nous intéressent énormément, par exemple, toute la question des juges bilingues à la Cour suprême, de même que la question de faire en sorte que la Loi sur les langues officielles soit mise en application.

La présidente : Avant de passer à un deuxième tour, j'aimerais poser quelques questions qui font suite à des questions qui ont déjà été posées.

Vous avez indiqué que, selon vous, certains fonds n'ont pas été débloqués. Savez-vous quel est le montant d'argent qui n'aurait pas été débloqué? Est-ce que certains secteurs ont été plus affectés que d'autres? Parlant de la nouvelle formule de finance sociale, est-ce que certains ministères utilisent cette formule plus que d'autres? Avez-vous eu à travailler avec certains ministères qui utilisent cette formule?

Mme Lanthier : Dans le cadre de la feuille de route, on parle d'Emploi et Développement social Canada. On parle de 4 millions de dollars en particulier, dont nous savons très bien qu'ils n'ont pas été dépensés jusqu'ici. C'est un exemple concret.

Quant à la finance sociale, c'est ce ministère qui mène le projet. Ce qui nous inquiète à ce chapitre, c'est le fait que, dans nos communautés, il s'agit de très petits milieux pour lesquels il est difficile d'attirer l'attention d'entreprises privées qui seraient prêtes à investir dans des projets de finance sociale avec des organismes tout en demeurant profitables. Donc, il n'y a pas nécessairement de marché pour cela. Cela nous inquiète, et c'est pour cette raison que nous avons demandé au gouvernement de faire une étude d'impact sur les répercussions de cette initiative si nous utilisions la finance sociale comme moyen de financer nos activités.

Nous savons que des organismes ont déjà répondu ou participé à des appels de propositions qui comportaient un volet de finance sociale, mais il ne s'agit pas nécessairement d'une avenue facile à utiliser dans nos milieux.

Mme Bossé : Alors, l'initiative de 4 millions de dollars d'Emploi et Développement social Canada vise le Programme de partenariats pour le développement social. À ce point-ci, quatre organismes sont impliqués et ont travaillé pendant plus d'un an pour développer un projet, mais nous sommes toujours sans réponse du ministère. Je parle plus précisément de l'Alliance des femmes de la francophonie canadienne, de la Commission nationale des parents francophones, de la Fédération des aînées et aînés francophones du Canada et de...

Mme Lanthier : ...la Fédération de la jeunesse canadienne-française.

Mme Bossé : Merci beaucoup. Les 4 millions de dollars proviennent en fait du budget de la Feuille de route de 2008- 2013. Cette enveloppe avait été investie dans les activités visant à renforcer les réseaux de la petite enfance. Donc, tous les réseaux de nos organismes qui s'occupaient de la petite enfance avaient pu bénéficier de ces investissements. Dans le cadre de la Feuille de route de 2013-2018, la petite enfance a été évacuée complètement. Donc, l'organisme qui s'en occupe a des difficultés très importantes. Le Réseau pour le développement de l'alphabétisme et des compétences (RESDAC), de son côté, n'a reçu aucun appui financier de la part du ministère de l'Emploi et du Développement social. Donc, les fonds prévus par la feuille de route ont plutôt été accordés à d'autres organismes, ce qui fait que les organismes du RESDAC sont en train de fermer leurs portes.

Quant à la finance sociale, depuis au moins un an et demi, la FCFA a présenté un projet au ministère de l'Emploi et du Développement social afin de faire une étude d'impact permettant de déterminer si le modèle peut fonctionner au sein de nos communautés. Nous attendons toujours une réponse du ministère.

La présidente : Merci. On passe à la deuxième ronde. Avez-vous une question complémentaire, sénateur Maltais?

Le sénateur Maltais : J'ai une très courte question complémentaire. J'aimerais savoir si vous avez un moyen de contrôle, ou si le gouvernement fédéral en a un. Je vous donne un exemple concret. Le gouvernement fédéral verse 5 millions de dollars en faveur de la francophonie en Alberta. Le gouvernement fédéral a-t-il un moyen de contrôle pour s'assurer que les fonds seront effectivement investis dans le secteur scolaire ou de la francophonie, et non pas dans les travaux publics ou la voirie? Le gouvernement fédéral a-t-il un mécanisme de contrôle?

Mme Lanthier : À notre connaissance, le gouvernement fédéral finance directement des organismes de la francophonie par l'intermédiaire, par exemple, des programmes d'appui du ministère du Patrimoine canadien ou d'autres ministères. Le gouvernement fédéral finance également des initiatives au sein de la francophonie par le truchement d'ententes fédérales-provinciales dans le domaine de l'éducation ou dans d'autres domaines. Est-ce qu'il a des moyens de contrôler ce type de financement? Je ne le crois pas. Je crois aussi que c'est une excellente question, parce qu'on entend dire qu'il serait intéressant d'obtenir plus d'information sur la façon dont ces sommes sont dépensées, sur leur impact et sur ce que les ministères visés en font.

On sait aussi que, en ce qui concerne la question des ententes fédérales-provinciales, dans d'autres secteurs, comme celui de la création d'emplois, ce qui nous importe, c'est de nous assurer que des dispositions à portée linguistique permettent le transfert des obligations linguistiques du gouvernement fédéral vers les provinces, et que ces dernières respectent leurs obligations.

La sénatrice Poirier : Vous avez parlé tout à l'heure de quatre différentes organisations qui préparent des propositions; les gouvernements provinciaux peuvent-ils présenter des demandes pour ces fonds-là, ou le programme s'adresse-t-il seulement aux organisations?

Mme Lanthier : Parlez-vous des fonds prévus par la feuille de route?

La sénatrice Poirier : Oui.

Mme Lanthier : En matière culturelle, les provinces peuvent faire une demande dans le cadre du fonds culturel de la feuille de route.

La sénatrice Poirier : Non, pas sur le fonds culturel, mais l'autre dont on parlait.

Mme Bossé : S'agit-il du Programme de partenariats pour le développement social?

La sénatrice Poirier : Oui.

Mme Bossé : Je ne saurais vous répondre. Il faudrait poser la question à Emploi et Développement social Canada, mais je ne crois pas. À ma connaissance, le ministère souhaite pouvoir travailler avec des organismes de nos réseaux et de nos communautés. Par contre, le problème, c'est que rien ne se concrétise. Dans d'autres programmes, par exemple à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, un appel de propositions a été lancé à l'été 2015, dont l'admissibilité — quant aux entités qui pouvaient soumettre une proposition — s'étendait aux gouvernements provinciaux, aux municipalités et aux individus à l'international qui pourraient offrir des services d'établissement aux immigrants au sein de nos communautés, et ce, dans l'ensemble du pays. Dans le cas de nos communautés, nos réseaux ont présenté des propositions, mais en ce qui concerne l'initiative de partenariats pour le développement social, cela me surprendrait.

La sénatrice Poirier : Savez-vous s'ils ont fait une demande et s'ils ont reçu des fonds?

Mme Bossé : Non, il faudrait voir avec les ministères concernés.

La présidente : J'aimerais revenir sur quelques points que vous avez mentionnés. Vous avez indiqué que vous souhaitiez un renforcement de vos capacités en infrastructures et que vous avez comparu devant le Comité des finances de la Chambre des communes.

Avez-vous proposé un montant dans vos demandes? Quel montant visons-nous pour faire le renforcement des infrastructures dans les domaines cernés?

Mme Lanthier : Nous avons demandé au Comité des finances une indexation des sommes qui sont versées en ce moment, dans le cadre des Programmes d'appui aux langues officielles, aux organismes communautaires. Donc, ce sont des sommes qui n'ont pas été indexées depuis 10 ans. Nous avons demandé une indexation, dans un premier temps, de même que l'investissement des sommes non débloquées dans le cadre de la feuille de route, car cela contribue à accroître la capacité communautaire, et à renforcer notre capacité au sein de nos communautés.

[Traduction]

La sénatrice Jaffer : Merci pour vos exposés. J'ai deux questions distinctes. D'abord, vous avez parlé d'un programme qui m'est cher, le Programme de contestation judiciaire. Je voudrais que vous nous disiez si vous croyez qu'il y aura du financement. J'aimerais vous l'entendre dire. Je sais que ce n'est pas la première fois que nous en parlons, mais êtes-vous optimiste? Le programme a déjà été très solide, mais il a disparu.

J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet, puis j'aurai une autre question dans un autre domaine, si nous avons le temps.

[Français]

Mme Lanthier : Est-ce que nous sommes optimistes? Nous n'avons pas d'autre choix que de l'être. Nous défendons vraiment le fait que des communautés francophones vigoureuses, actives et dynamiques représentent une valeur ajoutée pour l'ensemble des Canadiens, et que des communautés francophones actives et dynamiques contribuent réellement à un Canada qui est lui-même plus actif et plus dynamique. Donc, oui, nous espérons fortement que le gouvernement entendra notre message et réinvestira des sommes en faveur de nos communautés.

La dualité linguistique est une valeur qui appartient à tout le monde, mais il ne peut y avoir une saine dualité linguistique dans ce pays si les communautés francophones hors Québec ne sont pas dynamiques elles-mêmes. Depuis 10 ans, il n'y a pas eu de réels réinvestissements ou de réindexation du financement de base de la majorité des organismes communautaires, lesquels contribuent à la vie en français dans nos communautés. Dans certains cas, surtout chez les plus vulnérables, les organismes vivotent, d'autres ferment leurs portes ou vivent des défis considérables, notamment en ce qui concerne les médias communautaires. Dans ces cas, les organismes ont un réel besoin de financement pour progresser au lieu de régresser. Nous voulons éviter que nos communautés francophones prennent du recul. Elles ont besoin de ce soutien financier pour être en mesure de se développer et de s'épanouir. Ainsi, nous demeurons optimistes, et nous continuerons de répéter ce message pour faire part de nos besoins et de notre volonté à faire en sorte que nos communautés soient bien vivantes.

La sénatrice Jaffer : Je viens de la Colombie-Britannique et, dans ma province, beaucoup de familles souhaitent que leurs enfants apprennent le français. Cependant, le financement représente un défi.

[Traduction]

À Maple Ridge, une ville située assez loin de Vancouver, les parents se sont battus pour que l'on enseigne le français, mais ils ont perdu. Selon moi, c'est une grande perte pour nous tous. Même si ma province accueille un grand nombre d'immigrants, les immigrants veulent du français. Il y a une perception selon laquelle les personnes qui viennent d'ailleurs ne veulent pas nécessairement de cette langue.

Je vous demande de ne pas oublier qu'il y a beaucoup de gens à l'extérieur du Québec et partout dans l'Ouest qui souhaitent apprendre le français, et que nous devons le promouvoir.

Je me suis aperçue que de nombreuses personnes issues de communautés francophones qui émigrent d'abord au Québec et déménagent ensuite en Colombie-Britannique pour quelque raison que ce soit trouvent qu'il est plus difficile de garder leurs enfants dans des écoles françaises. Soit les enfants se retrouvent en classes d'immersion et ce n'est pas là qu'ils devraient être — soits l'offre de cours en français est tout simplement inexistante. C'est dans cette situation que les gens issus de la francophonie perdent leur patrimoine.

[Français]

Mme Lanthier : Au sein des communautés francophones, depuis plusieurs années, on manifeste le désir d'être plus diversifié et accueillant à l'aide de l'immigration francophone. Avec l'arrivée des anglophones dans nos familles, celles- ci sont de plus en plus exogames, c'est-à-dire que les enfants y grandissent dans les deux langues officielles. Il y a cette compréhension que nous formons une grande famille et que le français est un cadeau qu'on devrait pouvoir donner à tout le monde. Dans certaines provinces, les écoles d'immersion reçoivent moins de financement qu'ailleurs. Pourtant, il y a aussi une grande demande pour ces écoles. En Colombie-Britannique, il y a des listes d'attente de parents qui souhaitent inscrire leurs enfants dans les écoles d'immersion, mais qui n'y parviennent pas, parce qu'il n'y a pas suffisamment de place. Pour notre pays, cela représente un enjeu, et nous sommes en train de manquer une belle occasion. Nous devrions rectifier le tir rapidement afin de veiller à ce que les gens qui veulent apprendre les deux langues officielles du pays puissent le faire en milieu scolaire, sans que cela cause des problèmes.

Le sénateur Maltais : Je crois que le Québec est la seule province qui compte un ministère de la Francophonie. Il y en a peut-être un en Ontario également? Je ne suis pas certain. Y a-t-il suffisamment de francophones au Canada — une douzaine de millions, semble-t-il — pour que chaque province, sans avoir un ministère de la Francophonie, ait son département de la francophonie qui relèverait du gouvernement fédéral, mais dont les ententes seraient conclues entre les pouvoirs publics fédéraux et provinciaux? Cela permettrait d'assurer la pérennité de la langue française. Que l'on soit francophone du Québec ou d'ailleurs, nous payons tous des impôts. Il n'y a pas d'exception à la règle. Je crois sincèrement que chaque province devrait avoir son Commissariat aux langues officielles, doté d'un pouvoir exécutif et non consultatif. Voilà en quoi ce serait différent.

Mme Lanthier : Oui, tout à fait. Des secrétariats aux affaires francophones existent déjà dans l'ensemble des provinces.

Le sénateur Maltais : Je n'étais pas au courant. Vous me l'apprenez.

Mme Lanthier : Dans les territoires aussi. Voilà une première étape qui est déjà franchie. Des ministres responsables des affaires francophones dans l'ensemble des provinces se rencontrent au moins une fois par année dans le cadre de la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne. Ils travaillent étroitement sur différents enjeux, notamment la petite enfance et le développement économique. À l'heure actuelle, ils se penchent sur la santé touristique à l'échelle nationale pour mettre en valeur les communautés francophones un peu partout. Un certain travail se fait déjà en collaboration avec les provinces. Le gouvernement fédéral participe à ces conférences. Donc, nous avons bon espoir.

Certaines provinces adoptent des lois sur les services en français. Depuis 10 ans, de nombreux progrès ont été réalisés au chapitre de la francophonie, et les provinces y sont de plus en plus sensibles. Dans certaines régions de l'Ouest, les maires sont bilingues et appuient les communautés francophones. Le message de la dualité linguistique se fait de plus en plus entendre. Lorsqu'on est loin de cette réalité, on la perçoit moins, et on est étonné de voir à quel point la dualité linguistique est un fait acquis chez certaines personnes. C'est une valeur qu'elles défendent et qu'elles adoptent. Mme la sénatrice l'a bien dit : des immigrants en Colombie-Britannique veulent apprendre le français. On rencontre des gens dans toutes les communautés qui viennent de l'extérieur et qui choisissent de vivre au Canada en raison de sa dualité linguistique. Comme ils ne maîtrisent pas les deux langues officielles et qu'ils n'ont appris qu'une langue, ils souhaitent que leurs enfants fréquentent l'école d'immersion pour apprendre les deux langues. Je rencontre beaucoup de gens qui tiennent ce type de discours.

Le sénateur Maltais : Je suis heureux de l'entendre. Vous voyez, madame la présidente, que la francophonie a progressé au cours des 10 dernières années.

La présidente : Oui, c'est vrai. Cela étant dit, il y a encore de nombreux défis à relever.

Je tiens à remercier nos témoins de ce soir, Mme Sylviane Lanthier et Mme Suzanne Bossé. Je vous félicite pour votre excellent mémoire, votre travail et votre engagement envers la francophonie dans l'ensemble du Canada. Madame Lanthier, je vous souhaite beaucoup de succès dans votre nouveau mandat à titre de présidente.

Mme Lanthier : Je vous remercie beaucoup.

La présidente : Nous deuxième groupe de témoins est le Groupe Média TFO, qui est une chaîne de télévision éducative et culturelle en français et qui est disponible dans l'ensemble de l'Ontario ainsi que dans certaines régions du Québec, du Nouveau-Brunswick et du Manitoba.

Nous avons le plaisir d'accueillir M. Glenn O'Farrell, président et chef de la direction du Groupe Média TFO, et M. Michel Tremblay, directeur exécutif des projets spéciaux. Bienvenue à vous deux.

Veuillez enchaîner avec votre présentation et, par la suite, les sénateurs vous poseront des questions.

Glenn O'Farrell, président et chef de la direction, Groupe Média TFO : Honorables sénatrices, honorables sénateurs, monsieur le greffier, membres et personnel du comité, merci beaucoup de votre accueil qui est très apprécié.

Nous sommes ici ce soir pour vous parler d'une histoire à succès qui découle de beaucoup d'ambition et avec laquelle il reste encore beaucoup de choses à faire. Cette histoire est celle du Groupe Média TFO, dont le mandat est d'élargir le rayonnement de sa télévision éducative de langue française afin de mieux servir la francophonie canadienne.

Je suis Glenn O'Farrell, président et chef de la direction du Groupe Média TFO, et j'ai à ma droite Michel Tremblay, notre directeur exécutif des projets spéciaux.

Michel est bien connu dans le milieu des médias pour avoir mené plusieurs guerres, autant au CRTC qu'à l'Association canadienne des radiodiffuseurs et à Radio-Canada. Il peut donc répondre à toutes vos questions au sujet de Radio-Canada.

Permettez-moi tout d'abord, madame la présidente, de vous féliciter pour votre nomination à titre d'officier de la Légion d'honneur. C'est une grande reconnaissance de votre engagement, de votre sensibilité et de la passion avec laquelle vous vous dévouez à la cause de la francophonie, non seulement au Canada, mais à la francophonie dans toute sa magie et dans tout son univers.

Je vous présentai tout d'abord un bref survol du Groupe Média TFO. En 2011, TFO était une chaîne de télévision conventionnelle qui était en déclin, une chaîne qui cherchait son audience, parce que, comme vous le savez, il y a cette tourmente qui s'agite dans le milieu des médias où les gens sont constamment à la recherche de nouveaux contenus sur de nouveaux appareils. On a alors demandé à Groupe Média TFO de faire un virage technologique et un virage numérique, justement pour lui donner une façon de mieux rejoindre sa clientèle, de mieux s'adapter et de mieux épouser les habitudes de consommation de son audience cible, les jeunes.

Cette transformation était essentielle afin que l'entreprise redevienne pertinente et puisse mieux répondre aux attentes de sa clientèle. La transformation à laquelle je fais référence s'explique bien en faits et en chiffres. TFO est devenue le Groupe Média TFO afin d'assumer pleinement sa vocation multimédia et multiplateforme.

Aujourd'hui, le Groupe Média TFO a une plus forte présence grâce à plus d'une quarantaine de télédistributeurs et à une large présence sur les plateformes numériques de diffusion de contenu, y compris 10 chaînes YouTube et Dailymotion, 150 sites web, son site TFO.org qui compte plus de 9 000 vidéos, 14 plateformes de médias sociaux, tels que Facebook, Twitter, Pinterest et les autres. En outre, son contenu éducatif est maintenant disponible sur d'autres plateformes de divertissement, y compris celles de VIA Rail et d'Air Canada, ce qui aide justement à étendre sa portée.

La qualité de nos contenus a joué un rôle important dans cette diffusion plus étendue, et cette qualité y est depuis longtemps. Nous avons fait beaucoup de virages, comme je vous l'ai expliqué, mais la qualité de nos contenus est la source du succès de l'entreprise. Ces contenus ont été reconnus pour leur qualité innovatrice, leur qualité d'engagement et leur qualité éducative, d'Austin, au Texas, jusqu'à Amsterdam.

Nos émissions pour les jeunes font notre force, mais TFO se veut aussi le reflet de la vitalité des communautés francophones en Ontario et d'ailleurs au pays grâce à des émissions comme 24.7, Carte de visite et BRBR, cette dernière étant consacrée aux talents musicaux émergents de la francophonie hors Québec, sans oublier des séries phares comme Le rêve de Champlain, une contribution du Groupe Média TFO aux célébrations du 400e anniversaire de la présence francophone en Ontario.

Cependant, le Groupe Média TFO est beaucoup plus qu'un diffuseur de contenu : TFO est au service de 2 millions d'élèves et de 30 000 enseignants au Canada qui ont accès à ces outils pédagogiques multimédias. Nous offrons des services à 72 conseils scolaires de langue française et de langue anglaise en Ontario, et à plus de 60 conseils scolaires, de la Colombie-Britannique à la Nouvelle-Écosse, qui sont abonnés à nos contenus.

En réponse à ces besoins croissants du monde de l'éducation, le Groupe Média TFO a lancé, le 17 février dernier, une nouvelle plateforme qui se nomme IDÉLLO, dont je pourrai vous parler plus en détail tout à l'heure. Cette plateforme s'adresse aux enseignants, aux parents et aux étudiants francophones et francophiles, de même qu'au public qui apprend en français.

Michel, je te cède maintenant la parole.

Michel Tremblay, directeur exécutif, projets spéciaux, Groupe Média TFO : Le Groupe Média TFO est devenu le plus grand producteur et diffuseur de contenus éducatifs en langue française au Canada grâce à sa vaste présence sur toutes ces plateformes. Nous souhaitons rendre nos contenus disponibles au plus grand nombre de francophones et de francophiles, surtout à ceux qui vivent en milieu minoritaire et qui reçoivent moins de services.

Voici ce que nous ont dit les Canadiens dans le cadre d'un sondage réalisé par la firme Ipsos, à notre demande, en avril 2015 : 88 p. 100 des répondants trouvent qu'il est important que les francophones et francophiles du Canada aient accès à un minimum de choix de services de télévision en français; 56 p. 100 de ces répondants souhaitent avoir accès à des émissions de télévision éducative en langue française parmi les services offerts par les télédistributeurs de leur région, et ce pourcentage augmente à 77 p. 100 chez les gens dont les enfants sont inscrits à des programmes d'immersion. Cela rejoint donc la tendance générale qui démontre l'ampleur des besoins.

Voilà qui nous amène à la raison première de notre présence aujourd'hui devant votre comité. Dans une lettre que nous avons adressée à madame la présidente le 27 janvier dernier, nous l'informions de la démarche de TFO afin d'offrir un meilleur accès aux émissions éducatives de la chaîne TFO.

Comme vous le savez, le CRTC a ordonné à tous les télédistributeurs d'offrir à leurs abonnés un service de base, qu'on appelle communément le « skinny basic », au coût de 25 $, à compter du 1er mars. Ce service de base comprend un nombre de canaux plus limité, comme les chaînes de télévision locales et régionales, les délibérations de la Chambre des communes et des législatures provinciales, de même que les autres services désignés obligatoires.

Le CRTC a aussi permis aux télédistributeurs terrestres d'ajouter un service éducatif comme celui de TFO dans ce service d'entrée de gamme dans les provinces et territoires où il n'existe pas de diffuseur éducatif en langue française, c'est-à-dire toutes les provinces à part l'Ontario et le Québec. Nous avons donc offert à tous les télédistributeurs des provinces atlantiques et de l'Ouest la possibilité avantageuse d'offrir la chaîne TFO à leurs abonnés, et ce, gratuitement pour une période de six mois à compter du 1er mars. Nous avons posé ce geste pour répondre aux besoins exprimés par les communautés francophones et pour contribuer à l'apprentissage et au rayonnement d'une de nos langues officielles. Notre proposition offre des avantages importants à tous les Canadiens qui vivent dans ces communautés où les contenus en français sont rares, et ce, à peu d'efforts et de coûts de la part des télédistributeurs. Certaines grandes entreprises ont fait preuve de leadership et ont accepté notre proposition, mais d'autres hésitent à le faire.

Nous nous tournons aujourd'hui vers le comité pour solliciter son appui et l'inviter à contribuer à l'élargissement du rayonnement des services éducatifs de langue française comme ceux de TFO. Nous estimons que c'est là une question d'intérêt national, puisque le bilinguisme et l'éducation sont des pierres angulaires d'un Canada fort et compétitif.

M. O'Farrell : Nous concluons notre présentation avec une courte vidéo qui vous transmettra peut-être en images ce que nous voulons vous communiquer ici ce soir.

[Présentation d'une vidéo]

La présidente : Merci beaucoup de cette belle présentation, accompagnée d'un support audiovisuel. Cela nous permet de comprendre de façon plus concrète dans notre esprit ce que vous nous demandez.

Nous passons maintenant aux questions des sénateurs, dont la première sera posée par la vice-présidente du comité, la sénatrice Rose-May Poirier.

La sénatrice Poirier : Merci de votre présentation. Vous avez proposé cette période de six mois gratuits. Vous proposez aussi un tarif de 1,44 $ pour l'usage. Lorsqu'on compare avec Unis et TV5, on constate que leurs tarifs sont de 0,24 $ dans le marché anglophone et de 0,28 $ dans le marché francophone. Pouvez-vous nous expliquer comment vous êtes arrivés à ce chiffre?

M. O'Farrell : Cela s'inscrit dans la démarche d'une entreprise qui est une agence gouvernementale. TFO est une agence qui reçoit la grande partie de son financement de la part du ministère de l'Éducation de l'Ontario. Nous ne sommes pas une société commerciale comme TV5. Nous abordons la question de la redevance avec une sensibilité publique.

Ce que nous avons proposé, c'est d'offrir à ces télédistributeurs qui voudraient bien nous distribuer un service à raison de 1,44 $ par année, alors que dans le cas de ces autres stations, le tarif est de 0,24 $ et 0,28 $ par mois. Nous l'avons fait au plus bas prix possible pour éviter les discussions tarifaires. Cela revient à moins cher que le café « double- double » du matin chez Tim Hortons pour l'année. Nous voulions éviter, autant que faire se peut, la question financière. Ce que nous voulons faire, c'est recouvrir nos coûts. Nous ne cherchons pas à établir un prix en fonction d'une marge bénéficiaire.

La sénatrice Poirier : Ce que vous cherchez, c'est un appui pour être acceptés par le CRTC, n'est-ce pas?

M. O'Farrell : Le CRTC a proposé une politique pour développer un nouveau cadre dans lequel les services télévisuels seraient offerts au public. Nous avons entendu le CRTC dire qu'il encourageait les télédistributeurs à offrir aux communautés un service éducatif de langue française. Ainsi, nous avons saisi l'occasion de dire que nous sommes le seul service de langue française qui existe en milieu minoritaire. Nous pourrions donc offrir ce service d'emblée aux autres communautés qui n'en ont pas, et nous pourrions le faire à un très bas prix.

Notre démarche ici ce soir est de vous sensibiliser à la chose et de vous demander votre appui, dans la mesure où vous le jugez utile, opportun et à la mesure des attentes liées à vos responsabilités quant à la promotion du bilinguisme, pour permettre à un nouveau service de s'ajouter, mais un service réellement éducatif.

Je n'ai rien contre les autres services. D'ailleurs, plus il y a de services de langue française distribués au Canada, mieux c'est. Ce n'est pas une question de nombre. Toutefois, il faudrait faire de la place pour les services éducatifs, sachant que les parents, les enseignants et les élèves eux-mêmes aiment pouvoir faire une partie de leur parcours à l'aide de contenus éducatifs.

La sénatrice Poirier : Vous en avez fait la demande et le CRTC a refusé?

M. O'Farrell : Nous avons demandé au CRTC qu'il nous offre comme service. Le CRTC a dit non, que les instruments existent déjà, et il est revenu avec cette mention invitant les câblodistributeurs à distribuer un service éducatif.

La décision selon laquelle le CRTC a refusé notre demande, à notre avis, est erronée, dans la mesure où une agence gouvernementale comme le CRTC aurait dû et aurait pu prendre une décision pour défendre ses obligations à l'égard de la Loi sur les langues officielles, mais ne l'a pas fait. Nous avons donc fait demi-tour pour voir quels autres moyens sont à notre disposition pour favoriser la distribution de nos contenus.

Je termine en vous expliquant pourquoi nous faisons tout cela : c'est parce que notre actionnaire principal, le ministère de l'Éducation de l'Ontario, nous encourage à le faire. Il nous encourage à partager nos contenus éducatifs. Si on nous ferme la porte à un endroit, nous irons voir ailleurs si nous ne pourrions pas ouvrir cette porte d'une autre façon. En bout de piste, nous voulons essayer, autant que faire se peut, de distribuer ces contenus éducatifs au public apprenant qui le désire.

La sénatrice Poirier : Je suppose que vous êtes conscients que le CRTC est un organisme indépendant. Y a-t-il d'autres groupes qui vous offrent du soutien de ce type?

M. O'Farrell : Tout à fait. Le CRTC est hors portrait pour nous, pour l'instant. C'est vraiment aux câblodistributeurs, aux compagnies elles-mêmes qu'il est redevable, à leurs abonnés, aux territoires et aux populations que ces derniers desservent. C'est auprès d'eux que cette démarche se fait.

Le CRTC a pris ses décisions, a encadré ses projets; nous ne sommes pas d'accord, mais nous ne le comptons plus dans le jeu pour l'instant. Pour le moment, le jeu se fait avec les câblodistributeurs.

M. Tremblay : J'ajouterais peut-être un mot, puisque vous parlez de la notion de soutien. L'année dernière, au même moment où nous soumettions cette demande au CRTC, nous travaillions aussi au renouvellement de la licence de TFO, et nous avons reçu un appui important de la part de Canadiens de toutes les régions du pays. Nous avons reçu plus de 700 interventions de soutien de la part d'organismes comme la FCFA qui a comparu plus tôt, ou de la part de simples citoyens, de mères albertaines dont les enfants fréquentent l'école d'immersion et ont besoin d'outils pour parfaire leurs acquis.

Un vif intérêt s'est manifesté dans le cadre de ce processus que nous continuons d'alimenter afin de faire pression sur les entreprises de distribution. Avec l'ère numérique, il n'est pas sorcier pour les distributeurs d'ajouter un service comme TFO, soit à la carte, dans des forfaits thématiques ou dans ce service de base, parmi la centaine de canaux qui sont distribués.

La sénatrice Jaffer : Je vous remercie encore une fois.

[Traduction]

Monsieur Tremblay, vous avez terminé en disant que « le bilinguisme et l'éducation sont les pierres angulaires d'un Canada fort et compétitif ». L'une des raisons pour lesquelles je fais partie de ce comité, c'est que je crois, moi aussi, que l'un des rôles de la télévision — et de tout un chacun, nous compris — est de veiller à ce que les Canadiens sachent que le français est aussi notre patrimoine. Je suis convaincue que c'est quelque chose que vous pensez aussi, mais je ne pouvais pas m'empêcher de le dire.

D'après ce que je comprends de nos notes d'information, vous n'êtes pas encore rendus en Colombie-Britannique. Est-ce exact?

M. Tremblay : La bonne nouvelle, c'est que nous avons eu des discussions avec les gens de Telus, l'une des principales entreprises de télécommunications en Colombie-Britannique et en Alberta, et qu'ils nous ont dit que 100 p. 100 de leurs abonnés allaient être en mesure de capter TFO jusqu'à la fin du mois août, soit durant toute la période de six mois que nous avons proposée. C'est une très bonne nouvelle. L'offre fera partie de tous les forfaits auxquels leurs abonnés souscriront. Nous avons aussi eu des discussions encourageantes avec eux sur la possibilité de poursuivre l'hébergement de TFO au-delà du mois d'août.

La sénatrice Jaffer : Mon collègue vous l'a déjà demandé, mais j'aimerais avoir des précisions sur la différence de prix. Vous demandez 1,44 $ alors que le CRTC dit que le prix devrait être de 0,28 $. Pouvez-vous nous en dire plus long à ce sujet? Pourquoi demandez-vous des coûts additionnels? Je peux comprendre que vous avez plus de dépenses, mais pouvez-vous nous expliquer les motifs de votre démarche?

M. Tremblay : La plupart des entreprises de télécommunications — sinon toutes — versent actuellement un droit à TFO afin d'être en mesure de porter son signal à l'extérieur de l'Ontario. C'est une mesure courante dont l'objectif est de contribuer aux coûts d'ensemble — la liaison par satellite et tout le reste. Le droit est essentiellement conçu pour nous permettre d'assumer nos coûts.

À vrai dire, le CRTC n'a rien à voir là-dedans puisqu'il s'agit d'une discussion purement commerciale entre les câblodistributeurs et nous. Notre objectif n'était autre que d'abaisser la barre. Cela coûte moins cher qu'un café chez Tim Hortons. Pourquoi en faire tout un plat en affirmant qu'il est très difficile d'offrir TFO? Je crois que c'est pour cette raison qu'il y a un droit à payer. En fait, je pense que ce montant est négociable. Si nous parlons à de très petits câblodistributeurs qui semblent intéressés, je crois que ces prix pourront servir de point de départ, de tremplin pour discuter.

[Français]

La présidente : Si je comprends bien, le 0,24 $ était le prix par mois comparativement à 1,44 $ pour l'année, c'est cela?

M. O'Farrell : C'est cela. Le 0,24 $, pour préciser, c'est bel et bien une redevance que reçoivent certaines chaînes de télévision par mois, alors que dans notre cas, nous avons voulu fixer le prix à son plus bas. Nous l'avons fixé à 0,12 $ par mois, pour 1,44 $ par année.

Le sénateur Maltais : Avant de poser mes questions, je dois faire une déclaration d'intérêt, puisque j'ai très bien connu la mère de M. O'Farrell dans un autre Parlement. Au Québec, les anglophones et les francophones se côtoient. Vous venez de la très belle région de Saint-Malachie, un producteur d'excellent sirop d'érable. Je dois le dire au départ, je ne connaissais pas M. O'Farrell, mais j'ai très bien connu sa mère, qui était une dame exceptionnelle et gentille.

D'abord, je veux féliciter votre pourvoyeur de fonds, soit le gouvernement de l'Ontario, si je ne me trompe pas, pour vous avoir aidé à produire ce que vous produisez.

Je vais vous parler du CRTC et des difficultés que nous éprouvons au Québec à vous faire inclure dans le service de base que les fournisseurs de câblodistribution nous offrent. Ils incluent peut-être 25 stations américaines, mais pas vous. J'ai des discussions très fermes à ce sujet avec mon fournisseur. On m'envoyait de Calife à Pilate, et je les ai finalement menacés de changer de pourvoyeur. Il semblerait que le problème puisse se régler.

J'aimerais connaître votre recette : au Québec, nous avons Radio-Canada, TV5, Télé-Québec, mais jamais on n'entend cinq minutes d'opéra par année, alors que vous en produisez une toutes les semaines. Comment faites-vous?

M. O'Farrell : Ce n'est pas moi qui chante le dimanche soir pour votre bonheur! Pour bien vous situer, nous faisons de la production de contenu et de l'acquisition de contenu. Nous vous avons présenté un peu de notre production de contenu ici, mais nous faisons aussi de l'acquisition. Justement, en voulant être distinctifs et différents, nous nous sommes demandé quels contenus nous pourrions offrir qui ne sont pas déjà présents ailleurs.

Nous avons vite compris qu'il y avait, entre autres, l'opéra, mais aussi le cinéma que nous appelons le cinéma de festival, le cinéma français de France, le cinéma de partout au monde produit par les plus grands réalisateurs, et le cinéma d'auteur. Vous retrouvez cela à TFO. Je m'en voudrais de ne pas vous dire que, très souvent, on peut lire dans les pages de La Presse ou du Devoir des compliments extrêmement élogieux à l'égard des sélections que nous faisons. C'est parce qu'elles sont différentes. Cela nous représente, et c'est ce qu'on peut offrir.

Ce que nous faisons valoir auprès des câblodistributeurs, c'est que l'ajout de TFO est un ajout positif, complémentaire, et une valeur ajoutée. Premièrement, nous sommes une chaîne éducative de par notre mandat. Ainsi, lorsque nous pouvons nous permettre de faire certaines acquisitions, nous le faisons justement pour offrir du contenu que les autres n'ont pas. Entre autres, pour l'opéra et le cinéma d'auteur, nous croyons qu'il y a des messages et du contenu éducatif dans ces grandes réalisations artistiques que nous contribuons à mieux faire connaître.

Je termine en vous disant ceci : tout d'abord, je suis un producteur acéricole, en passant, sur la ferme à Saint- Malachie. Si j'avais su, je vous aurais apporté du bon sirop d'érable de chez nous.

Vous savez, il y a des valeurs fondamentales qu'on retrouve dans la politique qui a créé ces missions éducatives pour des chaînes comme TFO. Il faut qu'on se le dise. Il y a des endroits comme Télé-Québec qui existent, qui font encore du bon contenu éducatif, mais, en passant, comme Michel me le mentionnait encore aujourd'hui, 94 p. 100 de notre contenu ne se retrouve pas sur Télé-Québec, et vice-versa. Donc, il ne s'agit pas de chaînes qui sont semblables les unes aux autres. Il s'agit de chaînes complémentaires et de services complémentaires.

J'en arrive au sujet de mon intervention, c'est-à-dire au fondement de tout cela : on a voulu créer, au Canada — et c'est un modèle presque unique au monde —, des entreprises médiatiques à vocation éducative pour offrir un complément au service public d'éducation. Le Québec en a un; en Ontario, il existe en français et en anglais. En Colombie-Britannique, il y a le Knowledge Network, qui est aussi un service éducatif.

Ce que j'aime dire aux gens, sans dire que tout est parfait, c'est qu'il faut parfois reconnaître la juste valeur des choses. Il n'y a aucune entreprise au monde comme TFO, à ma connaissance, par laquelle un gouvernement offre un service public d'éducation à toute sa population, à sa population majoritaire et à sa population minoritaire — parce qu'il y a 12 conseils scolaires de langue française qui existent en Ontario, en plus de l'enseignement du français langue seconde et des cours d'immersion qui s'offrent dans les 60 conseils scolaires de langue anglaise. De plus, nous avons mis sur pied une entreprise médiatique à vocation éducative. C'est pour cela qu'il est important de la faire vivre et de la faire progresser. C'est une démonstration extrêmement généreuse d'une majorité à l'égard d'une minorité. C'est quelque chose que je mets sur un piédestal, car nous avons d'autres exemples qui sont moins parlants quant à la façon dont se comporte la majorité. Voilà pourquoi il est important pour nous de faire avancer la cause de TFO et de ses contenus, et de les partager avec d'autres francophones et d'autres communautés.

Le sénateur Maltais : Vous avez tout de même un pif extraordinaire, une chance du pendu, comme on dit chez nous. Quant au Rêve de Champlain, nous avons fêté le 400e anniversaire au Québec, et vous êtes les seuls à avoir produit quelque chose sur Champlain. Chez nous, cela s'est terminé par une fête sur les plaines. Vous, vous avez fait des émissions extraordinaires et exceptionnelles, documentées historiquement de façon fantastique.

M. O'Farrell : Merci.

Le sénateur Maltais : Comment avez-vous pu faire cela en Ontario, alors que nous avons les grandes universités au Québec, comparables à toutes les universités mondiales, les plus grands chercheurs, historiens et j'en passe? Ils n'ont pas été capables de produire cinq minutes sur l'arrivée de Champlain à Québec. D'ailleurs, le monument n'est même pas situé sur le bon bord du fleuve. Comment un organisme comme le vôtre, avec des moyens, disons, limités, est arrivé à produire de si belles émissions?

M. O'Farrell : Merci du compliment. Je vous dirais très franchement que c'est par une audace, un sentiment de vouloir le faire et de ne pas s'arrêter quand on nous disait non que nous y sommes arrivés. Le projet est très simple, dans le fond. Il s'agit au départ d'un livre magnifique d'un grand auteur américain, David Hackett Fisher qui, selon moi figure au palmarès des grands historiens américains, comme John Meacham, Doris Kearns Goodwin et David McCullough. C'est l'un des grands narrateurs de l'histoire américaine, mais lui, pour une raison ou une autre, s'est intéressé à l'histoire de Champlain.

J'avais lu ce livre, et d'autres également. D'ailleurs, notre ministre des Affaires francophones, Madeleine Meilleur, l'avait lu elle aussi. Nous cherchions un projet pour contribuer au 400e anniversaire. Ayant un mandat éducatif, nous cherchions un élément à connotation éducative. Nous avons donc essayé d'adapter ce livre en docu-fiction, avec des applications pour rendre la chose accessible au jeune public. Nous nous sommes lancés là-dessus.

Pour vous le raconter rapidement, ce n'était pas facile, parce que la tâche d'aller chercher les droits d'un prix Pulitzer ne se fait pas en criant « lapin! ». Nous avons retenu les services d'un agent littéraire pour transiger avec l'agent littéraire de l'auteur, qui était à Londres. Ils se sont parlé deux ou trois fois, et la réponse que nous avons reçue n'était pas une fin de non-recevoir, mais plutôt l'expression de peu d'intérêt. Pour forcer la note, j'ai proposé qu'on tente d'organiser un dernier appel et de faire en sorte que l'auteur soit en ligne. Ils ont dit oui, et j'ai pris l'appel. Je ne vous le cacherai pas, nous avons sorti tous les violons de l'opéra, que vous avez entendus tantôt, et même davantage, pour expliquer pourquoi ce projet était important pour nous. M. David Hackett Fisher s'est finalement rendu à notre demande. J'avais fait un long plaidoyer, et j'avais terminé en disant ceci :

[Traduction]

« Voilà pourquoi c'est si important pour nous. » Et il a répondu : « Glen, c'est très intéressant, vraiment formidable. »

J'aimerais revenir sur quelque chose. Qu'est-ce que TFO? J'ai dit à M. David Hackett Fischer : « Nous ne sommes pas HBO. Nous sommes TFO. Nous sommes une petite organisation. Nous avons une fonction pédagogique. Nous sommes importants; et cela est important pour nous. »

[Français]

En fin de compte, il a été un allié extraordinaire, et nous avons gagné un prix Gémeaux pour Le Rêve de Champlain, dont nous sommes très fiers.

Le sénateur Maltais : Bravo, parce que c'était quelque chose de vraiment très bien.

M. O'Farrell : Je dois dire qu'il a été réalisé par une entreprise de production d'Ottawa, du nom de Slalom Productions, en association avec une entreprise de production de Montréal, du nom de groupe Fair-Play. Ils se sont mis ensemble pour le produire. Nous avons mis les pièces en place, le financement, puis nous nous sommes retirés, et les producteurs ont fait un travail merveilleux.

Le sénateur Maltais : Avez-vous été approchés par des chaînes québécoises ou canadiennes pour vendre ces émissions?

M. O'Farrell : Télé-Québec l'a pris, et Canal Savoir aussi. Il y a maintenant une version en anglais que nous voulons rendre disponible pour le 150e anniversaire en 2017.

Le sénateur Maltais : C'est une leçon d'histoire extraordinaire. Merci beaucoup.

La sénatrice Fraser : Effectivement, c'était un livre extraordinaire, et je suis ravie que vous ayez pris l'initiative de le transformer pour un autre public. J'ai trois questions et une demande. Ma demande est la suivante : pourriez-vous nous fournir le rapport sur le sondage que vous avez cité tout à l'heure, qui a l'air tout à fait intéressant?

M. O'Farrell : Avec plaisir.

La sénatrice Fraser : Pour les questions, je me présente un peu en avocat du diable, si vous le permettez. Je vous ai posé cette question tantôt avant que la séance commence, mais je voudrais vous la poser formellement : est-ce que vous n'arrivez pas un peu tard? Les câblodistributeurs ont déjà décidé de ce qu'ils vont offrir comme service. Est-ce qu'il n'est pas trop tard?

M. O'Farrell : Je vais demander à Michel de vous répondre en détail, mais la réponse courte est non. Nous sommes en chantier, madame la sénatrice, depuis un bon nombre de mois. C'est un processus qui sera long et probablement ardu, mais nous en sommes au début. Michel, veux-tu ajouter à cela?

M. Tremblay : Le CRTC, au cours des deux dernières années, a mené un réexamen important de ses politiques, qu'on a appelé Parlons TV. Dans ce cadre, il a changé les obligations des télédistributeurs. Ces changements ont été promulgués dans les règlements et s'opèrent en deux phases. La première phase commence le 1er mars avec l'entrée en vigueur du service de base et d'autres éléments, et sera suivie d'une phase d'obligations en décembre 2016.

Nous sommes constamment en chantier et en discussion avec ces entreprises. Une entreprise qui ne l'aura pas fait au 1er mars pourra toujours le faire dans les mois qui suivent. De notre côté, nous sommes constamment en campagne et en discussion pour faire avancer les choses. Nous n'abandonnons pas le projet si ce n'est pas fait le 1er mars; ce n'est pas notre approche. Nous continuons à nous battre pour faire avancer la cause. Des obligations vont s'ajouter au cours de l'année, et notre rôle sera de nous assurer que les entreprises remplissent bien leurs obligations et qu'un service éducatif comme TFO occupe la place qu'il mérite.

La sénatrice Fraser : Merci. Passons à ma deuxième question : vous avez fait un saut absolument extraordinaire vers l'avenir; vous avez parlé de 150 sites web et d'autres éléments de communication, du présent et de l'avenir. Le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est impressionnant. De la même façon, est-ce qu'il n'est pas vrai que la télévision par câble est presque une industrie du passé — du présent aussi, certes, mais pas de l'avenir? Pourquoi vous acharner sur cet élément-là lorsque vous avez, de toute évidence, non seulement une vision, mais une capacité de vous lancer dans les autres plateformes qui ont plus d'avenir?

M. O'Farrell : Merci de poser la question comme vous le faites si bien, parce que cela nous permet de vous dire à quel point nous vivons un moment extrêmement intéressant dans le milieu des médias que vous connaissez.

Nous vivons avec des habitudes de consommation qui sont en pleine mutation. D'autres vont rester peut-être plus stables, d'autres se cherchent encore. Alors, je m'explique. C'est au cœur de ce raisonnement que l'on a travaillé pour devenir le Groupe Média TFO et pour se déployer sur plusieurs canaux et sur des multiplateformes. Nous constatons que, chez certains segments démographiques, une programmation linéaire offerte par un télédistributeur restera fort probablement pertinente pendant encore un bon bout de temps. Les pronostics sont nombreux. Certains disent 5 ans, d'autres, 10 ans, et d'autres encore, 20 ans.

Je note dans les grands portefeuilles d'investissement qu'il y a encore énormément d'argent du côté américain et du côté européen pour les services de télédistribution. Ce n'est pas parce qu'ils offrent Internet seulement. C'est parce qu'il y a encore de belles possibilités d'affaires en télédistribution pour les enfants de l'après-guerre et un bon nombre de segments démographiques. Il faut donc continuer à être présent sur cette plateforme.

Il ne faut pas oublier que la toute jeune enfance est souvent dirigée, dans son habitude ou dans son écoute, par le parent à la maison, et le téléviseur restera peut-être encore pertinent pendant un certain temps. Toutefois, entre les deux, il y a toute cette mouvance et cette panoplie. C'est un chaos médiatique. Aujourd'hui, on vit à l'ère où le plus important, c'est d'être découvert; découvert sur les sites web, sur les canaux YouTube, sur les canaux Dailymotion, sur les propriétés CraveTV, Shomi, Hulu, Netflix, et il y en a une profusion.

Pour notre part, nous essayons de faire entendre notre voix en déterminant précisément notre public cible et notre clientèle première. Or, ce sont les 2 à 12 ans en particulier. Cela ne veut pas dire que nous ne souhaitons pas parler aux adultes et aux autres. Cependant, pour être à la hauteur de notre mandat éducatif, nous devons être vraiment présents pour la jeune enfance en particulier. Nous constatons que ces jeunes sont à l'écoute sur plusieurs plateformes, mais la situation change. Il y a un an et demi, Facebook n'offrait pas de fil vidéo. Aujourd'hui, Facebook est devenu l'un des principaux fournisseurs de nouvelles — peut-être pas pour vous ni pour moi, mais pour plusieurs autres qui écoutent et qui se renseignent —, comme Twitter.

Ce qu'on a voulu faire, c'est prendre acte de tout cela. C'est extraordinaire, parce que les choses bougent continuellement. Nous voulons voir où nos auditoires et nos publics cibles se situent par rapport à leurs tendances, à leurs façons de consommer les médias et à leur désir de s'ajuster et d'être présents sur ces plateformes.

Je termine en vous informant que nous venons de lancer en production une nouvelle série intitulée Maxi. Maxi est une série en animation dont le fond de toile est une dramatique pour enfants de 9 à 12 ans, qui touche la science du changement climatique. Cette série s'inscrit dans une formule dramatique pour enfant, accompagnée de beaucoup de jeux. Nous avons consulté une société qui est très présente dans le domaine du jeu. Bien que la série puisse se décliner éventuellement sur un téléviseur, son auditoire premier sera sur le téléphone intelligent ou la tablette. La série est présentée, conçue et produite tout d'abord pour être à l'antenne. On ne parle pas de 30 minutes ni de 60 minutes, mais bien de 26 épisodes de 11 minutes adaptés à cet écran et à ce public.

[Traduction]

La sénatrice Fraser : Je m'excuse, mais je ne comprends pas encore tout à fait toute cette question des prix. Le CRTC et ses fameux 24 et 28 cents — c'est ce que les abonnés payaient aux câblodistributeurs. Avant d'aller plus loin, est-ce exact?

M. O'Farrell : Vous citez un document particulier. Je veux seulement m'assurer que nous répondons exactement...

La sénatrice Fraser : Je me réfère au rapport produit par l'admirable Bibliothèque du Parlement où il est dit que le CRTC exige que TV5 fasse partie du service numérique de base à un coût mensuel de gros de 24 cents par abonné dans les marchés de langue anglaise et de 28 cents par abonné dans les marchés de langue française.

Je me trompe peut-être, mais je croyais vous avoir entendu dire que des chiffres semblables s'appliquaient à TFO. J'essaie seulement de ventiler ces coûts. Vous demandiez 12 cents par mois.

M. O'Farrell : C'est exact.

La sénatrice Fraser : Vous demandiez aux câblodistributeurs de vous payer ces montants pour vous aider à couvrir vos coûts.

M. O'Farrell : Oui.

La sénatrice Fraser : Parfait. En plus de vos coûts, qui vont être remboursés, quelles dépenses le câblodistributeur doit-il faire, le cas échéant, pour offrir votre chaîne, et combien compte-t-il gagner en faisant cela?

M. O'Farrell : Michel connaît mieux ces choses-là que moi, mais de façon générale, les bénéfices sont très intéressants. Le prix payé par le câblodistributeur au fournisseur de contenu est souvent, sinon toujours, moins de la moitié de ce qu'il facture à l'abonné.

M. Tremblay : Lorsque certains distributeurs avec qui nous sommes en train de négocier choisissent d'offrir TFO en chaîne individuelle à 4 $, le marché typique est de se partager le montant en deux parts égales. Nous obtenons la moitié et eux gardent l'autre. Alors, je présume qu'ils appliquent le même principe au moment de transférer ces coûts à leurs abonnés.

[Français]

La sénatrice Fraser : Mais ce chiffre de 50 p. 100 comprend un profit. Leur coût n'est pas de 50 p. 100.

M. Tremblay : Absolument pas.

La sénatrice Fraser : Savez-vous quel serait leur profit?

M. Tremblay : C'est difficile à dire, parce que cela varie en fonction des services. Si on prend, par exemple, des services onéreux haut de gamme comme TSN, le prix est très élevé, mais ce qu'on appelle le « mark-up » est peut-être beaucoup plus mince. Dans le cas de petits services, c'est différent. Il n'y a pas de règle magique. Cela dépend de la nature des services et du prix de base demandé par le diffuseur.

Si vous me le permettez, j'aimerais apporter une petite précision. Vous nous avez demandé de vous transmettre l'étude Ipsos que nous avons menée. J'aimerais vous annoncer que nous entamerons le deuxième volet de cette étude en avril et mai 2016, pour comprendre l'évolution de la demande et de l'intérêt pour le service de TFO dans les provinces de l'Ouest en particulier.

La sénatrice Fraser : Madame la présidente, pourrait-on demander de voir cette étude lorsqu'elle sera complétée?

La présidente : Je vous demanderais, s'il vous plaît, de nous faire parvenir les documents qui ont été demandés ce soir, de même que tout autre document que vous jugez pertinent.

M. O'Farrell : On vous le fera parvenir avec du sirop d'érable.

La présidente : Ce sera un plaisir.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Merci, messieurs. Les programmes d'immersion française sont très populaires dans les écoles, et je sais que ces écoles doivent former beaucoup d'enseignants qualifiés pour ces programmes. Je pense que des émissions de télévision pédagogiques en français seraient une formidable ressource pour donner un coup de main à cet égard.

Quels sont les principaux obstacles qui empêchent les câblodistributeurs d'aller au-delà des signaux réseau de leur service de câble de base?

M. O'Farrell : Je crois que les obstacles sont en fait une affaire de choix commerciaux. Je crois que la question se résume à cela. Les câblodistributeurs établissent les services qui seront les plus avantageux à offrir, ceux qui leur rapporteront le plus. C'est très bien comme cela. Ils sont dans les affaires, et nous n'y voyons aucune objection.

Nous avons de plus en plus de lettres d'appui de collectivités. Michel a dit que nous en sommes à 700. Le chiffre n'arrête pas d'augmenter parce que nous allons sur le terrain et que nous parlons à beaucoup de gens pour les inciter à écrire à leurs câblodistributeurs. C'est cet engouement que nous tentons de susciter chez vous aussi en étant ici. Nous croyons que les câblodistributeurs sont des gens raisonnables et qu'il est possible de leur faire entendre raison si les populations s'adressent directement à eux et qu'un nombre suffisant de personnes montrent qu'elles ont un intérêt pour des services éducatifs en français, comme en fait foi — vous en avez parlé tantôt — la popularité croissante des programmes d'immersion partout au pays.

En fait, un article du Globe and Mail d'hier signale que c'est quelque chose qui est même en train de devenir un problème pour certains parents : leurs enfants apprennent le français, mais eux n'ont pas les outils pour les aider à faire leurs devoirs puisqu'ils ne parlent que l'anglais.

Si des services étaient offerts à des périodes d'écoute communes, les parents pourraient regarder les émissions destinées aux enfants et participer à leur apprentissage. De plus, nous avons beaucoup de renseignements et d'outils pédagogiques en ligne qui fonctionnent avec la majeure partie du contenu que nous offrons, ce qui peut s'avérer très utile.

Pour nous, l'important est d'essayer de convaincre les gens d'élever leur voix et de porter ces demandes à l'attention des câblodistributeurs. Comme je l'ai dit, les câblodistributeurs sont des gens d'affaires plutôt raisonnables qui essaient habituellement de répondre aux demandes de leurs clients.

Le sénateur Oh : Travaillez-vous aussi avec les compagnies de téléphone cellulaire pour les inciter à offrir des applis en français?

M. O'Farrell : Absolument. Nous avons pris le docudrame en six parties que nous avons produit sur Champlain et nous avons demandé à l'un de nos fournisseurs d'en faire une application. Vous pouvez dès maintenant vous rendre sur l'Apple Store et télécharger Le Rêve de Champlain, une application qui s'installe sur votre iPad et qui vous permet de faire ni plus ni moins comme si vous étiez Champlain sur son iPad, utilisant les comptes Facebook pour interagir avec ses pairs, envoyant un gazouillis à Pierre de Monts pour parler de ce qu'ils iront faire à Tadoussac, comme cela se serait passé à l'époque. L'idée derrière ce projet a été de produire un contenu pertinent pour les jeunes et de leur présenter ce contenu sur une plateforme qu'ils maîtrisent.

Alors, la réponse est oui, nous travaillons avec les applis et nous continuons de le faire. Voici un autre exemple : nous avons constaté que, souvent, les parents qui téléchargent des applis pédagogiques d'une boutique d'applications ou de Google Play veulent savoir si ces applis sont vraiment pédagogiques. Nous y avons vu une occasion de créer un service de notation. Au Canada, personne n'évalue les applications. Nous avons donc créé un comité d'experts indépendants. Nous avons formé des évaluateurs. Maintenant, si vous vous rendez sur EduLulu, vous pourrez voir les notes attribuées par ce groupe indépendant à toutes les nouvelles applis offertes au Canada par l'intermédiaire de la boutique Google Play ou de l'Apple Store. Telle appli a obtenu quatre sur cinq, telle autre, trois sur cinq. Mais, comme Lulu est un chien, les chiffres correspondent à des os. Si vous obtenez trois os, vous avez une bonne appli. Si vous n'obtenez rien, votre appli ne vaut pas grand-chose. Nous essayons constamment de faire ce genre de chose, car nous croyons que ce sont des occasions de créer une valeur ajoutée.

[Français]

Le sénateur Maltais : J'ai remarqué que l'approche pédagogique que vous employez dans les programmes éducatifs ne fait pas concurrence à celle de Télé-Québec, par exemple. Bien au contraire, elle est différente pour arriver au même but. Est-ce que les concepteurs d'émissions pour enfants sont des fonctionnaires, des firmes privées, ou encore des enseignants? Comment en êtes-vous arrivés à cela?

M. O'Farrell : Nous avons du personnel spécialisé chez TFO qui est effectivement composé de pédagogues et de spécialistes en la matière, mais nous travaillons aussi avec des producteurs indépendants et nous les suivons de très près. Certains fournisseurs ont développé des capacités et des qualités extraordinaires, mais il y a aussi de nouveaux producteurs qui veulent faire affaire avec nous. Nous sommes prêts à les accompagner, parce que nous sommes une boîte qui fait beaucoup d'acquisitions. Alors, nous achetons des productions en Ontario, au Québec, au Nouveau- Brunswick et dans l'Ouest. Les gens nous les proposent et, souvent, ce sont de jeunes producteurs indépendants qui arrivent avec des idées nouvelles qui sont, en toute candeur, les meilleures.

Le sénateur Maltais : Je vous remercie infiniment. Je suis heureux d'avoir pu mettre un visage sur TFO. Vous avez tout mon appui pour le travail exceptionnel que vous faites en faveur de l'éducation et de toute la francophonie. Ne lâchez pas, et continuez votre beau travail!

M. O'Farrell : Merci.

La présidente : Au nom des membres du comité, je remercie nos témoins d'avoir accepté l'invitation à témoigner devant notre comité. Je suis d'accord avec le sénateur Maltais qui vous félicite pour votre travail. Vous avez une vision pour l'ensemble des Canadiens qui est basée sur un modèle d'innovation, sur l'atteinte d'un certain standard d'excellence, et les succès que vous avez obtenus avec vos émissions en témoignent.

Au nom du comité, je vous souhaite beaucoup de succès, et j'espère que votre comparution devant notre comité ce soir servira de tremplin afin de sensibiliser davantage les citoyens canadiens, qui pourraient regarder TFO davantage, ou s'ils n'y ont pas accès, qui pourraient le demander auprès de leur câblodistributeur.

Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord que nous poursuivions la réunion à huis clos afin d'étudier un projet d'ordre du jour?

Des voix : Oui.

La présidente : Nous allons donc poursuivre la séance à huis clos.

(La séance se poursuit à huis clos.)

(La séance est levée.)


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