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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule no 31 - Témoignages du 25 octobre 2017


OTTAWA, le mercredi 25 octobre 2017

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, auquel a été renvoyé le projet de loi C-277, Loi visant l’élaboration d’un cadre sur les soins palliatifs au Canada, se réunit aujourd’hui, à 17 h 15, pour poursuivre son étude du projet de loi.

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je suis Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse, et je suis président du comité. J’inviterais maintenant mes collègues à se présenter à tour de rôle, en commençant par ma droite.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, Montréal, Québec.

La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.

[Français]

La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Eggleton : Sénateur Eggleton, vice-président du comité.

Le président : Nous sommes ici aujourd’hui pour examiner le projet de loi C-277, Loi visant l’élaboration d’un cadre sur les soins palliatifs au Canada. Nous allons entendre deux groupes. Nous sommes très heureux de les avoir avec nous aujourd’hui. Je vais vous les présenter dans l’ordre dans lequel ils figurent sur l’ordre du jour.

Dans un premier temps, nous allons accueillir Mme Kelly Masotti, directrice des questions d’intérêt public pour la Société canadienne du cancer, ainsi que M. Shawn Chirrey, gestionnaire principal.

Madame Masotti, je crois que c’est vous qui ferez l’exposé.

Kelly Masotti, directrice, Questions d’intérêt public, Société canadienne du cancer : Merci beaucoup, monsieur le président. C’est un privilège pour moi d’être ici aujourd’hui, au nom de la Société canadienne du cancer, soit le plus important organisme de bienfaisance voué à la santé au Canada et le seul qui soutient les personnes atteintes de tous les types de cancer.

Toutes les heures, quelque 24 Canadiens apprennent qu’ils sont atteints du cancer, joignant ainsi les plus de 810 000 personnes qui, partout au pays, vivent déjà avec la maladie. Une personne sur deux au Canada recevra un diagnostic de cancer au cours de sa vie, et d’ici 2035, le nombre de nouveaux cas de cancer devrait bondir de 35 p. 100.

Malgré une amélioration des chances de survie pour les malades du cancer, de nombreuses études révèlent que les patients, les survivants et les familles ont toujours de la difficulté à obtenir de l’information sur la santé, de même que le soutien pratique et affectif dont ils ont besoin.

La Société canadienne du cancer appuie sans réserve le projet de loi C-277. Selon les estimations, jusqu’à 80 p. 100 des Canadiens qui reçoivent des soins palliatifs sont des patients atteints du cancer, mais des milliers d’autres partout au pays ne peuvent profiter de l’accès rapide et abordable aux soins de haute qualité dont ils ont besoin. Ainsi, 45 p. 100 des patients atteints du cancer meurent dans les services de soins intensifs, ce qui souvent ne correspond pas aux volontés du patient, en plus d’exercer une pression sur des ressources hospitalières qui coûtent cher et qu’on utiliserait mieux en les affectant à d’autres besoins.

Il a été démontré que les soins palliatifs ont un effet important et positif lorsqu’ils sont prodigués seuls, ou en combinaison avec les traitements oncologiques habituels. Voilà pourquoi la Société canadienne du cancer appuie et encourage le développement de soins palliatifs fournis, en temps opportun, de façon proactive, avec compétence et compassion.

En 2016, la Société canadienne du cancer a publié un rapport intituléDroit aux soins : des soins palliatifs pour tous les Canadiens, qui présente un aperçu de l’état des soins palliatifs au Canada. En s’appuyant sur l’examen d’études récentes et sur les constatations de spécialistes canadiens de renom, le rapport cerne des lacunes dans les soins palliatifs dans l’ensemble du pays, examine leurs répercussions sur les patients, les familles et nos systèmes de santé et formule des recommandations pour y remédier.

Dans ce contexte, le projet de loi C-277 constitue un important progrès. L’adoption et la mise en œuvre d’un cadre national assorti de normes et de définitions claires, ainsi que d’exigences en matière de collecte de données, contribueront à réduire les principaux obstacles qui nuisent à l’accès aux soins palliatifs au Canada.

La Société canadienne du cancer vous prie de mettre en œuvre ce projet de loi et est impatiente de travailler avec vous à l’atteinte de ces objectifs. Nous sommes la principale source d’information fiable sur le cancer et, chaque année, nos services aident des millions de gens à accéder à un traitement, à des soins et à une prise en charge, alors qu’ils continuent souvent de travailler et d’habiter chez eux ou dans un établissement communautaire.

Nous voulons collaborer avec le gouvernement fédéral afin d’accroître notre portée et de renforcer notre capacité à fournir de l’information et du soutien affectif en vue d’aider les Canadiens à en apprendre davantage au sujet de leur diagnostic, à recevoir des soins à domicile et palliatifs et à bénéficier de programmes de soutien par les pairs, de même qu’à s’y retrouver dans les services de santé et les services sociaux et financiers qui s’offrent à eux.

Au nom de tous les Canadiens qui recevront un diagnostic de cancer, de leur famille et de leurs proches, nous vous prions d’adopter et de mettre en œuvre ce projet de loi. Lorsqu’il s’agit des soins palliatifs, il est grand temps de passer de la parole aux actes.

Je vous remercie du temps que vous m’avez consacré.

Le président : Merci beaucoup.

Je vais maintenant céder la parole à Mme Pauline Tardif, chef de la direction de la Société Alzheimer du Canada. Soyez la bienvenue.

Pauline Tardif, chef de la direction, Société Alzheimer du Canada : Merci beaucoup, monsieur le président. Bonjour à tous et merci de m’avoir invitée à comparaître devant le comité au sujet du projet de loi C-277.

[Français]

Je suis très heureuse que le comité ait à nouveau invité la Société Alzheimer du Canada à apporter sa pierre au développement de politiques en matière de santé aussi importantes qu’un cadre de travail national pour les soins palliatifs.

[Traduction]

On dénombre actuellement au-delà d’un demi-million de Canadiens atteints de démence, et comme vous le savez, ce nombre ne fait qu’augmenter. L’accès aux soins palliatifs devient un enjeu plus important que jamais. C’est la raison pour laquelle nous avons suivi avec beaucoup d’intérêt la progression du projet de loi C-277, Loi visant l’élaboration d’un cadre sur les soins palliatifs au Canada.

C’est également la raison pour laquelle la Société Alzheimer du Canada est membre de longue date de la Coalition pour des soins de fin de vie de qualité du Canada. À ce titre, elle soutient les efforts de la coalition qui visent à améliorer l’accès à des soins palliatifs de haute qualité en fin de vie.

Cet après-midi, j’aimerais aborder deux enjeux : premièrement, le rôle des soins palliatifs dans le cadre du diagnostic de la démence, du traitement et des soins; et deuxièmement, la manière dont un cadre de travail entourant les soins palliatifs s’harmoniserait avec une stratégie nationale sur la démence au Canada.

L’Alzheimer est une maladie évolutive qui diminue la durée de vie et qui, au bout du compte, est mortelle, même si les personnes qui en sont atteintes peuvent vivre pendant de nombreuses années.

[Français]

En fait, il s’agit d’offrir la meilleure qualité de vie possible aux personnes qui font face à une maladie mortelle comme une maladie cognitive et de les accompagner jusqu’à leur dernier jour. La Société Alzheimer du Canada encourage les personnes atteintes d’une maladie cognitive à planifier leurs soins aussi rapidement que possible à la suite du diagnostic. L’accès à des soins palliatifs de qualité minimise les souffrances inutiles et améliore la qualité des soins de fin de vie des personnes atteintes d’une maladie limitant leur espérance de vie.

[Traduction]

Un plan de soins palliatifs doit commencer très tôt pour les Canadiens, y compris ceux qui sont atteints de démence. C’est pourquoi le Plan mondial d’action de santé publique contre la démence, adopté par 194 pays de l’OMS en mai 2017, définit clairement les soins palliatifs comme étant un élément fondamental du continuum des soins chez les personnes atteintes de démence.

Selon l’OMS, la planification des soins palliatifs devait commencer au moment du diagnostic et se poursuivre jusqu’à la fin de la vie et au-delà, lors des différents stades du deuil que traversent les familles et les partenaires en soins. Puisque la démence est progressive, s’aggrave avec le temps et affectera les nombreuses capacités fonctionnelles de la personne atteinte, les lignes directrices en matière de politiques et de pratiques doivent couvrir la progression de la maladie dans son ensemble, à partir du diagnostic jusqu’à la fin de la vie.

Cette approche a été clairement énoncée dans l’étude marquante de votre comité sur la démence au Canada. On peut lire dans votre rapport que :

L’intégration de soins palliatifs et de soins en fin de vie adéquats est devenue une composante importante dans l’offre des soins, quel que soit l’endroit où les patients vivent leurs derniers jours.

En juin, le Sénat a aidé le Canada à poser un geste historique en adoptant la Loi relative à une stratégie nationale sur la maladie d’Alzheimer et d’autres démences. À ce moment-là, nous sommes devenus le 30e pays au monde à annoncer son intention d’élaborer une stratégie nationale sur la démence. Mais je m’en voudrais de ne pas saisir cette occasion pour remercier à nouveau les membres du comité pour le leadership et le soutien dont ils ont fait preuve à l’égard de cette importante mesure législative.

L’élaboration d’un cadre de travail pour les soins palliatifs, tel que présenté par le projet de loi C-277, aiderait à orienter le travail déjà en cours pour mettre sur pied une stratégie nationale sur la démence. À l’instar de la stratégie, ce projet de loi est conçu pour aider les provinces à mettre au point de meilleurs plans de soins palliatifs et à faire avancer des pratiques exemplaires partout au pays. Un cadre de travail pour les soins palliatifs sera inclusif, collaboratif et complémentaire à notre travail visant à élaborer une stratégie nationale sur la démence.

Pour appuyer notre travail, le Canada a également l’occasion de s’inspirer des pratiques exemplaires en matière de soins palliatifs qui ont été intégrées dans les plans nationaux de 29 pays. Par exemple, des communautés qui composent bien avec la démence comme le Japon ont établi un exemple international en mettant en œuvre des pratiques de soins palliatifs et de fin de vie souples. En outre, Alzheimer’s Disease International recommande, au regard du nombre croissant de personnes mourant avec la démence, que la préparation en vue de la dernière phase de leur vie soit ajoutée aux stratégies.

Nous voulons tous bénéficier de services de soins palliatifs complets et nous méritons tous d’y avoir accès; les personnes atteintes de démence ne sont pas différentes; elles souhaitent la même chose.

Je voudrais formuler une observation sur le paragraphe 2(1) du projet de loi.

[Français]

La Société Alzheimer du Canada croit fermement que les parties prenantes doivent aussi s’impliquer dans l’élaboration du cadre de travail, et non seulement les gouvernements provinciaux et territoriaux responsables de la santé, tout comme les fournisseurs de soins palliatifs. Les Canadiens touchés par les conséquences de ce cadre de travail doivent également participer à la conversation, y compris les aidants et les personnes qui sont au stade précoce de la maladie

[Traduction]

Un cadre en matière de soins palliatifs sera mieux adapté aux besoins de la population canadienne s’il s’appuie sur les commentaires des Canadiens et des dirigeants du domaine des soins de santé provinciaux et territoriaux.

Monsieur le président, permettez-moi de conclure mon propos en exprimant, au nom de la Société Alzheimer du Canada, notre soutien à l’égard des initiatives qui amélioreront et élargiront l’accès aux soins palliatifs pour l’ensemble de la population, particulièrement, dans notre cas, à ceux et celles qui vivent avec la maladie d’Alzheimer et la démence.

Je vous remercie de nouveau de nous donner l’occasion de témoigner aujourd’hui. Je répondrai à vos questions avec plaisir.

Le président : Merci beaucoup.

Nous allons maintenant entamer la période de questions, au cours de laquelle chacun posera une question par intervention.

La sénatrice Eaton : Merci beaucoup. Je suis désolée d’être arrivée en retard, mais je participais à une réunion spéciale.

Vous avez fait deux remarques intéressantes, affirmant notamment que les soins palliatifs devraient commencer lorsque tombe le diagnostic d’Alzheimer. Pouvez-vous me dire les propos précis que vous tiendriez à ma famille et à moi pour améliorer ma qualité de vie si je recevais un tel diagnostic aujourd’hui ou demain?

Mme Tardif : Un des principaux problèmes au chapitre des soins palliatifs, c’est qu’on attend aux toutes dernières étapes de la vie pour aborder la question. De pratiques saines et solides en matière de soins palliatifs encouragent les échanges au sujet de la planification des soins avancés dès que le diagnostic est posé.

Nous savons que des gens atteints de démence ou de la maladie d’Alzheimer mourront de ces maladies — comme c’est le cas pour le cancer ou d’autres maladies terminales — et que des facteurs pourraient accélérer le rythme de la progression. Selon notre expérience, les professionnels des soins de santé et le personnel des centres de soins palliatifs qui composent avec la démence, les ressources sont très limitées. Même les généralistes ne parlent pas des soins palliatifs avant les toutes dernières étapes.

Qu’est-ce que nous vous encouragerions de faire après un diagnostic précoce? Nous vous encouragerions avec votre famille à discuter de la question avec vos professionnels des soins de santé et à recevoir du soutien. Nous savons que les soins palliatifs, la mort et la progression de maladies chroniques ont des répercussions sur les familles. Les soins palliatifs ne se limitent pas à soulager la personne qui va mourir dans trois mois; ils visent à aider les gens tout au long du processus de fin de vie.

Mme Masotti : En ce qui concerne le cancer, nous savons que les soins palliatifs peuvent prolonger la vie de la personne atteinte s’ils commencent dès la pose du diagnostic. Nous recommanderions la même chose : les soins doivent débuter au moment du diagnostic pour que l’on puisse prolonger la vie et offrir des services ne s’inscrivant pas dans la gamme habituelle, comme les services psychosociaux, dès le départ.

La sénatrice Cordy : La semaine dernière, un de nos témoins a indiqué que notre taux de mortalité est encore de 100 p. 100. Je pense donc qu’il importe que nous discutions de la question, comme vous l’avez souligné.

J’ai lu que les Canadiens lisent beaucoup au sujet des soins palliatifs et souhaitent pouvoir s’en prévaloir. Nous savons que la plupart d’entre eux souhaitent mourir à la maison, alors qu’en fait, c’est le contraire qui se passe. Madame Tardif, vous avez indiqué qu’ils doivent commencer à discuter de la question.

Madame Masotti, vous avez dit que les soins doivent commencer dès le début, quand le diagnostic est posé. C’est tout un changement par rapport au fait d’offrir les soins quand la personne n’a plus que deux jours à vivre.

Le problème, c’est que les gens ne savent pas comment aborder le sujet avec leur équipe de soins de santé. Même s’ils lisent sur la question, ils n’en discutent pas. Comment informer les Canadiens pour qu’ils aient ces conversations à l’étape du diagnostic, ou si ce n’est pas à ce moment-là, certainement au début du processus?

Shawn Chirrey, gestionnaire principal, Société canadienne du cancer : Les recherches montrent certainement qu’en ce qui concerne les survivants et les soins palliatifs, il faut établir des plans de soins avancés ou de survivance, lesquels améliorent énormément l’expérience du patient et de la famille. Le fait d’agir de la sorte très tôt tend à changer les choses.

Mme Tardif : Sénatrice Cordy, j’ajouterais qu’il y a des limites à ce que les organisations comme la nôtre, la Société canadienne du cancer et bien d’autres peuvent faire. Même si nous informons les gens et les encourageons à discuter avec leur famille et leurs professionnels des soins de santé, les occasions de le faire sont trop rares. Je ne suis pas certaine que les fournisseurs de soins de santé aient cette conversation, pour répondre à la question que vous posez.

Ce que j’espère, c’est que ce cadre les obligera à le faire et inclura, comme je l’ai indiqué dans mon exposé, les personnes qui doivent passer ou qui ont passé par le processus de soins palliatifs avec un être cher. Si ce cadre ne s’appuie pas sur les observations des Canadiens, nous risquons de nous retrouver avec une approche compartimentée qui s’occupera peut-être des questions de soins de santé et du système, mais pas de la question très importante que vous posez.

Mme Masotti : Je pense que cela montre qu’il importe d’élaborer une initiative ou une stratégie d’éducation, peu importe comment on l’appellera. Les Canadiens ne savent probablement même pas comment entamer la discussion; ils ne savent pas quoi dire. Il est donc crucial de les informer.

Il existe des pratiques exemplaires au pays. J’ai déjà travaillé avec l’Association des psychiatres du Canada. Nous devons simplement observer ce que les professionnels de la santé mentale ont fait et tout le travail formidable qu’ils ont accompli au sujet des préjugés afin d’éliminer la stigmatisation à l’égard de la santé mentale. Ils sont parvenus à le faire, lançant la campagne « Cause pour la cause » avec Bell et mettant en œuvre un éventail d’excellentes initiatives. Si on peut le faire dans le domaine de la santé mentale, je pense qu’on peut réussir dans celui des soins palliatifs; c’est une simple question d’éducation.

Le sénateur Eggleton : Merci beaucoup de témoigner aujourd’hui.

Hier, je me suis adressé à la Société Alzheimer à Toronto, et Pauline Tardif était là pour veiller à ce que je ne m’éloigne pas trop de mon propos. J’ai présenté l’étude de notre comité à quelques personnes, dont des aidants naturels et des patients atteints de la maladie d’Alzheimer.

Ce qu’il nous faut, c’est un cadre national. Nous employons les mêmes mots tant pour le cancer que pour la démence. Dans le rapport sur la démence, nous recommandons de former un partenariat. Vous avez indiqué, madame Tardif, que ce partenariat ne devrait pas se limiter aux gouvernements, un avis que je partage entièrement.

Nous avons recommandé que le partenariat relatif à la démence s’apparente à celui qui existe déjà dans le domaine du cancer. J’aimerais savoir comment vos deux organisations aident les gens dans le cadre d’un partenariat afin de préparer et de planifier les soins palliatifs. Le partenariat contre le cancer facilite-t-il les choses à cet égard? Comment les choses se passent-elles dans ce cadre?

M. Chirrey : Les gens ont été formidables. Ils ont publié un excellent rapport sur la question de soins palliatifs. Ce rapport, paru en septembre, met déjà en lumière une panoplie de lacunes. Il fait état des défis et les mesures qui fonctionnent dans d’autres provinces. Les auteurs ont brillamment réussi à braquer les projecteurs sur la question.

Dans notre cas, notre rôle consiste principalement à fournir de l’information et du soutien psychosocial aux patients et aux êtres chers quand le besoin se fait sentir et à l’étape où ils en ont besoin. Nous offrons du soutien en ligne, en personne et au téléphone. Ce qu’il faut, c’est fournir tous les renseignements nécessaires au cours du cheminement avec le cancer, du diagnostic à la planification des soins palliatifs, et ce, quand les gens en ont besoin. Il faut que les fournisseurs de soins puissent fournir facilement ces renseignements. C’est là notre principal rôle.

Le partenariat constitue un excellent modèle, car il permet d’avoir une bonne idée de ce qu’il se passe au pays. Les provinces ne pouvaient pas échanger entre elles aussi bien avant qu’il ne soit établi. Je fais partie de plusieurs de ses réseaux de dépistage, et là aussi, il y a beaucoup d’échange de renseignements et d’apprentissage, et les changements s’effectuent plus rapidement parce que le partenariat fonctionne.

Mme Tardif : Bien entendu, vous savez que dans le secteur de la démence, nous considérons le partenariat du domaine du cancer comme un formidable modèle, et nous espérons qu’une stratégie nationale en matière de démence nous permettra d’établir un tel partenariat de manière plus exhaustive.

Tout comme c’est le cas pour la Société canadienne du cancer, notre rôle consiste à accompagner les gens dans leur cheminement avec la démence; nous discutons avec eux des soins palliatifs au moment où ils nous arrivent. Bien entendu, ils passent du stade précoce jusqu’à l’étape finale, et les échanges évoluent tout au long de la progression parce que leurs questions et la manière dont ils se comportent avec les professionnels des soins de santé évoluent aussi.

J’oserais même dire que les organisations comme la nôtre font des merveilles quand il s’agit d’entamer les discussions à propos des soins palliatifs. En fait, nous le faisons sans hésiter, avec beaucoup d’honnêteté, d’ouverture et de transparence quand les gens communiquent avec les organisations.

À mon avis, c’est avec les professionnels des soins de santé qu’il existe une lacune dans le partenariat. Le cadre exige donc que ces professionnels et les experts des soins palliatifs unissent leurs efforts. Voilà pourquoi je pense que le partenariat que vous proposez serait bien plus solide s’il ne se limitait pas aux personnes qui sont nommées afin de faire participer les organisations comme la nôtre et les coalitions dont nous faisons partie, qu’il s’agisse d’organismes du domaine du cancer ou de la Coalition pour des soins de fin de vie de qualité du Canada dont j’ai parlé plus tôt. Nous sommes membres de ces regroupements. Ces coalitions existent, mais sans faire partie de l’approche relative aux soins de santé et aux soins palliatifs. Le cadre traite des soins de santé, mais pas des avantages des soins palliatifs pour la communauté ou des besoins en soins palliatifs. J’espère que nous pourrons participer à l’élaboration et à l’atteinte des objectifs du cadre.

Le sénateur Eggleton : Merci.

La sénatrice Seidman : Merci à tous de comparaître aujourd’hui. Je comprends l’importance de ce projet de loi pour les patients atteints du cancer et le fait qu’il faut leur offrir très tôt des soins palliatifs. Je voudrais poser ma question à Mme Masotti.

Tous les témoins que le comité a entendus ont largement appuyé la mesure et nous ont indiqué deux choses. D’abord, il faut agir maintenant, comme vous l’avez d’ailleurs fait remarquer à la fin de votre exposé. De plus, nous ne partons pas à zéro, puisque bien du travail a déjà été réalisé en vue d’établir un cadre. Nous espérons qu’une fois que le projet de loi aura été adopté, le gouvernement agira immédiatement pour procéder aux consultations dans le délai d’un an prévu dans la loi.

Je vous demanderais donc ce que nous devons faire ensuite. Selon vous, comment pouvons-nous tous nous assurer que ces consultations atteignent leurs objectifs et permettent de présenter au Parlement un rapport exhaustif proposant un cadre réaliste dans le délai accordé?

Mme Masotti : Vous avez raison de dire qu’il est nécessaire de faire avancer ce projet de loi.

Le domaine des soins palliatifs est intéressant, cas il semble y avoir un consensus entre un grand nombre d’organisations à l’heure actuelle. Aucun conflit ne semble diviser ces groupes.

Pauline continue d’évoquer la Coalition pour des soins de fin de vie de qualité du Canada, dont fait partie chacune de nos organisations. Je pense que c’est probablement par là qu’il faut commencer afin de parler aux organisations qui ont contribué à influencer le cadre que cette coalition a élaboré.

Il faut commencer par faire appel aux organisations qui œuvrent dans le domaine et continuer de les consulter afin d’écouter vraiment ce qu’elles ont à dire sur la question.

Cela ne figure pas dans nos notes, mais je conviens qu’il faut prendre en compte le point de vue du patient. C’est là un élément crucial, dont on n’a peut-être pas encore tenu compte.

M. Chirrey : Il nous manque beaucoup d’information sur les meilleures choses à faire. Nous avons besoin de meilleures données. Nous disposons d’excellents renseignements concernant le diagnostic et le décès, mais pas sur ce qu’il se passe entre les deux. Sans données solides, il est difficile de prendre de bonnes décisions. Nous devons donc établir de meilleures normes à ce sujet.

Nous devons également mieux informer la population et les fournisseurs de soins de santé. L’éducation est limitée. La situation est légèrement meilleure en ce qui concerne le cancer, mais quand les gens discutent avec leur fournisseur de soins primaires ou d’autres intervenants, il faut fournir l’information plus tôt et savoir comment la communiquer. La question relève donc en partie du fournisseur de soins, qu’il faut mieux informer.

Nous avons entendu dire qu’en ce qui concerne les survivants, on observe un manque substantiel d’information chez les fournisseurs de soins.

[Français]

La sénatrice Mégie : Dernièrement, j’ai rencontré un groupe d’ambulanciers qui me faisaient voir l’importance de leur travail en région éloignée. En effet, ils ne sont pas seulement de premiers répondants d’urgence, mais ils participent également à la vie communautaire avec les personnes âgées et les personnes souffrant de démence. Ils apportent aussi du soutien aux personnes en soins palliatifs. Au début, je leur ai demandé comment ils voyaient leur rôle, et ils me l’ont expliqué. Dans le cadre des plans en cours d’élaboration, pour ce qui est des régions éloignées où il est plus difficile de trouver de la formation, avez-vous pensé à inclure ces ambulanciers dans votre programme de formation destiné aux intervenants?

[Traduction]

Le président : Pourriez-vous faire un lien avec les soins palliatifs dans votre réponse?

M. Chirrey : Cela s’est passé en Nouvelle-Écosse, et il me semble que l’Île-du-Prince-Édouard s’est également intéressée à la question. De nombreuses provinces cherchent à déterminer ce qu’il se passe à cet égard. Je sais toutefois que les ambulanciers fournissent des soins palliatifs et traitent des problèmes de douleur dans la communauté, ce qui semble très bien fonctionner dans cette province. Je n’ai pas vu d’évaluation exhaustive, mais un grand nombre d’organismes du domaine du cancer observent ce qu’il se passe là-bas. Nous sommes remplis d’espoir, mais il semble que cette façon de fournir des soins à domicile soit bien meilleure que l’autre modèle.

Mme Masotti : En ce qui concerne votre question sur les communautés éloignées, nous savons qu’il existe des disparités entre les régions du pays au chapitre des soins palliatifs, des disparités encore plus criantes dans les communautés éloignées et autochtones.

Même s’il peut être nécessaire d’adopter des approches différentes en raison de la vastitude et de la diversité de notre pays, nous considérons que la qualité des soins et l’accès à des derniers devraient demeurer constants à l’échelle du pays.

[Français]

La sénatrice Mégie : Nous savons qu’il faut beaucoup de formation en soins palliatifs. Donc, il faudrait peut-être vous servir d’un tel modèle pour l’étendre à d’autres régions. C’est ma suggestion.

Mme Tardif : Puis-je rajouter un commentaire? Je dirais que les partenariats avec les gens qui oeuvrent au sein du système de soins de santé sont critiques, que ce soit en région ou dans les centres urbains. Notre approche avec les organisations est très cohérente. Donc, les défis sont peut-être beaucoup plus importants en région. Il faut être plus créatif dans la façon de livrer les soins palliatifs, c’est important. Nous avons le besoin et la volonté de collaborer avec les intervenants qui livrent les soins communautaires de santé, tels les ambulanciers. Je ne pense pas qu’il y ait de résistance avec nos groupes. La façon dont les soins de santé sont livrés, en région ou en centre urbain, doivent impliquer toutes ces personnes, et j’espère que le cadre qu’on propose ici pourra inclure cette façon de faire. De notre côté, nous allons vouloir des partenariats qui fonctionnent.

Le sénateur Cormier : Merci pour vos présentations. La relation que les Canadiens entretiennent avec cette étape de fin de vie est forcément différente selon leur culture ou selon leurs convictions. On a entendu parler ici de sécurité culturelle. Vous parliez, madame Tardif, des parties prenantes qui devraient être présentes. Est-ce que, dans le cadre de la loi, les intervenants identifiés sont ceux qui peuvent tenir compte des éléments culturels, des convictions et de la spiritualité des personnes en fin de vie?

Mme Tardif : Si j’ai bien compris le projet de loi, j’ai noté l’absence de gens qui participent aux soins de fin de vie. Je crois que c’est une lacune très importante parce que, si vous regardez le paragraphe 2(1), on mentionne les gens qui sont des professionnels de soins de santé. Compte tenu du groupe qui va se rassembler, il y a un risque de lacunes importantes afin d’apporter des perspectives telles que celles que vous suggérez et qui sont très intéressantes. Je ne connais pas les gens qui seront autour de la table, mais compte tenu de leur rôle, je pourrais estimer qu’ils vont apporter une perspective très spécifique. Évidemment, je voudrais que ce soit plus large et je dirais aux gens qui jouent un rôle de leadership de développer cette perspective, ce plan d’action. Pour avoir un impact, mon conseil serait d’impliquer les gens qui sont atteints et qui sont touchés dans leur travail. Ma recommandation serait de les impliquer dans la conférence, mais la conférence, dans le projet de loi, ne fait pas intervenir des Canadiens qui ne sont pas impliqués dans le système de santé. C’est la façon dont c’est écrit.

[Traduction]

Mme Masotti : Voilà qui souligne l’importance de la définition des soins de fin de vie. Je pense peut-être en termes trop simples, mais si nous les définissons adéquatement, on pourrait inclure certains de ces éléments.

Je vous lirai la définition que comprend notre rapport :

Les soins palliatifs sont axés sur la qualité de vie des personnes atteintes d’une maladie grave et progressive. Les soins palliatifs incluent le contrôle de la douleur et la gestion des symptômes; le soutien professionnel sur les plans psychosocial, émotionnel et spirituel; des conditions de vie confortables et un niveau de soins approprié, que la personne atteinte choisisse d’être soignée à la maison, à l’hôpital ou ailleurs. Les soins palliatifs sont mis en œuvre tôt dans le cours de la maladie, en conjonction avec d’autres thérapies, et reposent sur une approche multidisciplinaire afin de répondre aux besoins des personnes atteintes et de leurs familles. Les soins de fin de vie font partie des soins palliatifs et sont axés sur les besoins particuliers des personnes dont le décès est imminent.

Je crois que si nous portons une attention particulière à la façon dont nous définissons les soins palliatifs, peut-être que la définition permettra d’apaiser certaines de ces inquiétudes.

M. Chirrey : Dans la lutte contre le cancer, beaucoup de travaux ont été réalisés au cours des dernières années sur des modèles de soins axés sur la personne. Beaucoup d’organismes de lutte contre le cancer ainsi que le PCCC se concentrent sur une approche axée sur la personne. Donc, dans ce contexte, ces différences devraient ressortir.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci d’avoir accepté notre invitation.

Madame Masotti, je vous suis très reconnaissante pour la définition que vous venez de nous lire, car ma question s’y rapporte directement. J’ai remarqué que lorsque l’on dit qu’il faudrait réfléchir à la façon dont nous parlons des soins palliatifs, de nombreux patients perdent tout espoir et se disent que c’est la fin, qu’ils n’ont plus d’options. Selon vous, comment peut-on aborder cette situation?

Mme Masotti : Encore une fois, cela fait ressortir la nécessité de mener une campagne de sensibilisation publique sur la définition des soins palliatifs et l’importance d’expliquer aux Canadiens pourquoi il n’est pas nécessaire que les soins palliatifs ne s’appliquent qu’en fin de vie. Je crois que c’est à cet égard que nous devons éduquer les gens, que l’on peut commencer à parler de soins palliatifs dès que l’on reçoit un diagnostic.

Ce n’est pas facile. Je le vis actuellement, car je dois expliquer à mon père qu’il faut commencer à examiner l’option des soins palliatifs.

Mme Chirrey : Nous savons que de nombreux Canadiens sont conscients que les soins palliatifs existent, mais très peu y ont recours. Environ 54 p. 100 des Canadiens savent que ces soins existent, mais ils ne les utilisent pas.

La sénatrice Omidvar : Merci à tous les témoins d’avoir accepté notre invitation.

Il est question ici d’un cadre législatif. Ce cadre permettrait notamment de définir comment assurer un accès systématique aux soins palliatifs à l’échelle du pays. J’aimerais vous demander à tous votre opinion à savoir si un accès systématique est possible étant donné que la prestation des soins de santé n’est pas une compétence fédérale; il s’agit d’une compétence provinciale. Comment anticipez-vous cette mise en œuvre?

Mme Tardif : Je vous répéterai ce que j’ai dit au sénateur Cormier. La mesure législative propose un cadre qui sera conçu et créé par la communauté des soins de santé, ce qui pourrait entraîner certains écarts en matière d’expérience. Ce qu’il y a de positif dans tout cela, c’est que, même si la prestation des soins de santé n’est pas une compétence fédérale, le cadre oblige les professionnels de la santé partout au pays à travailler ensemble. C’est ce qui fait que ce cadre est solide. Je crois qu’il permettrait d’apaiser certaines de vos inquiétudes.

Est-ce possible? Absolument. Je le crois. Réunir les gens pour parler de la définition des soins palliatifs, de l’impact de cette définition sur les Canadiens, des pratiques exemplaires qui existent à l’échelle du pays et de qui peut apprendre de qui, non seulement au pays, mais aussi ailleurs, sont tous des éléments qui me convainquent davantage qu’il est possible de favoriser la collaboration et d’accroître notre capacité à offrir de meilleurs soins palliatifs à tous les Canadiens.

Mme Masotti : Nous avons également parlé de la nécessité d’effectuer une collecte continue et cohérente des données. À mon avis, cela serait utile, au même titre que l’élaboration et la mise en œuvre de normes mesurables en matière de soins palliatifs. Cela nous aiderait à assurer une certaine cohérence à l’échelle du pays.

La sénatrice Omidvar : Selon vous, si nous adoptons des points de repère nationaux, le gouvernement fédéral devrait-il, à un certain moment, publier un rapport sur l’accès systématique aux soins palliatifs, un rapport dont les provinces seraient tenues de prendre note?

Mme Masotti : Oui.

M. Chirrey : Oui.

Mme Tardif : Absolument. Selon le cadre, il est attendu que le gouvernement fédéral publie un rapport sur l’efficacité de cette approche. Donc, oui, je m’attendrais à ce qu’il publie un tel rapport.

Le président : Avant d’amorcer notre prochaine série de questions, j’aimerais revenir sur certains points.

Chacun de vous, dans son rapport, définit l’identification de points de repère et leur diffusion à l’échelle du pays comme étant un problème majeur. C’est certainement le cas dans cette situation-ci.

J’aimerais revenir aux toutes premières réponses concernant la question de la communication précoce de l’information sur les soins palliatifs pour les patients ou les personnes qui ont besoin de ces soins.

J’aimerais parler plus particulièrement de l’étude que nous avons menée sur la démence. Soit dit en passant, cinq des témoins qui ont comparu devant nous étaient atteints de démence et avaient reçu un diagnostic précoce. Un de ces témoins, et les autres étaient d’accord avec lui, nous a dit que lorsque l’on rend visite à notre omnipraticien parce qu’on présente des signes de démence et que le diagnostic est confirmé, le médecin nous dit de retourner à la maison et d’attendre la mort. C’est l’essentiel du message : on vous dit de retourner à la maison, d’annuler votre permis de conduire, et de cesser de travailler. Pour vous, c’est la fin.

Cela contraste avec ce qui se produit lorsque l’on se présente à l’hôpital pour un problème cardiaque ou un AVC. On est alors immédiatement pris en charge par une équipe. C’est la même chose dans de nombreux endroits lorsqu’il s’agit du cancer ou de la plupart des grandes maladies.

Lorsque l’omnipraticien confirme le diagnostic de démence, plutôt que de fournir au patient une trousse d’information sur les choses qu’il doit faire, il leur parle immédiatement de soins palliatifs. Je le souligne, car il s’agit d’un problème sérieux. Les personnes atteintes de démence ne se voient pas offrir un ensemble de soins. Je suis d’accord avec vous en ce qui a trait à l’accès rapide à des renseignements et à une orientation quant au rôle des soins palliatifs. Cependant, en ce qui a trait à la démence, les recommandations que nous formulons dans notre rapport doivent être adoptées si nous voulons éviter que les personnes craignent de recevoir de mauvais conseils quant à la façon de gérer leur situation et d’aborder immédiatement la discussion concernant les soins palliatifs.

Même si chaque province a une société de l’Alzheimer, de nombreuses provinces ont des organisations distinctes qui traitent la maladie. Évidemment, la situation diffère d’une personne à l’autre. Je fais référence à un témoignage en particulier; je ne fais pas un commentaire général. Mais il s’agit clairement d’un problème important, car les témoins représentaient l’organisation ontarienne sur la démence.

Outre informer les patients sur les options relatives aux soins palliatifs, des mesures doivent être prises en rapport à nos recommandations relatives aux renseignements sur la maladie et à l’orientation des personnes atteintes de démence vers les sociétés de démence provinciales concernées et les sociétés de l’Alzheimer si des omnipraticiens ne sont pas en mesure de leur fournir les renseignements nécessaires. Nous devons faire en sorte que ces patients reçoivent des dépliants et des documents d’information comparables à ce que l’on remet aux personnes atteintes d’un cancer, à celles qui ont des problèmes cardiaques ou qui ont été victimes d’un AVC, des documents très poussés qui fournissent dès le début des renseignements sur tout, de la diète à l’exercice.

Je tenais vraiment à souligner l’importance de cet élément dans la question de la démence, un élément essentiel pour fournir aux personnes atteintes de cette maladie tout le soutien dont elles ont besoin, sans parler des informations sur ce qui les attend.

J’ai vraiment aimé vos réponses, mais je voulais souligner cet écart en ce qui a trait au premier diagnostic de démence.

Je vous rappelle que la séance se terminera au plus tard à 18 h 15. Nous allons entreprendre la deuxième série de questions. La sénatrice Cordy est la première intervenante.

La sénatrice Cordy : Le projet de loi demande au ministre d’examiner l’opportunité de rétablir le Secrétariat des soins palliatifs et des soins de fin de vie. J’ai donc demandé à la marraine du projet de loi pourquoi on ne faisait qu’examiner la possibilité de le rétablir au lieu de tout simplement demander son rétablissement. Il a été mis sur pied en 2001 par la sénatrice Carstairs — qui a fait un travail de ministre incroyable — et permettait de centraliser les efforts. Puis, en 2007, le financement a pris fin et le secrétariat a été aboli. La raison qu’elle m’a donnée, qui est exacte, c’est qu’on ne pouvait pas obtenir une recommandation royale puisque cela exigerait un financement. Il ne faut pas proposer un amendement à cet égard, parce que cela empêcherait l’adoption du projet de loi.

Si ce n’est le présent projet de loi, croyez-vous qu’un autre projet de loi pourrait rétablir le secrétariat? Est-ce que cela permettrait un certain regroupement et l’obtention d’un financement?

M. Chirrey : Oui, nous croyons qu’il serait tout à fait sensé de rétablir le secrétariat. Il permettrait une certaine uniformité et une surveillance. Nous savons qu’en vertu de leur mandat, Santé Canada, l’ICIS et le PCCC réalisent des travaux sur les soins palliatifs, sous la responsabilité de la ministre de la Santé, et que certains de ces travaux peuvent être mis de l’avant. Le secrétariat serait responsable d’assurer la surveillance et l’uniformité requises en vue de mettre en œuvre le projet de loi.

La sénatrice Cordy : Nous pourrions peut-être l’ajouter aux observations.

Le président : Il est difficile d’imaginer une stratégie nationale sans un secrétariat. À mon avis, c’est quelque chose d’implicite dans une stratégie nationale. L’enjeu associé à la première ronde, c’est qu’elle a duré trois ou quatre ans, mais qu’il s’agissait en fait d’un projet pilote. Il n’y avait aucun financement continu dans ce domaine en particulier. Si nous établissons une stratégie nationale, il faut qu’elle soit permanente.

À la lumière des témoignages que nous avons entendus et des questions que vous avez posées au sujet de l’élaboration d’une stratégie, j’espère qu’il y aura une certaine forme de coordination. Je crois qu’il serait bon qu’on le mentionne à titre de caractéristique essentielle, bien entendu.

Le sénateur Eggleton : J’aimerais aborder la question du fardeau des coûts, surtout pour les personnes à faible revenu. J’en ai parlé à d’autres témoins également.

Les bénéficiaires des services de soins palliatifs peuvent se retrouver dans les hôpitaux ou dans des lits de soins actifs, dans des centres de soins palliatifs ou des établissements de soins de longue durée ou encore — et c’est ce qui est préférable pour bon nombre d’entre eux — à la maison. Mais la couverture et la contribution du gouvernement à cet égard sont inégales. Si les patients sont à l’hôpital, alors les frais sont couverts en vertu de la Loi canadienne sur la santé. Or, dans d’autres établissements, une partie des coûts doit être assumée par les patients, ce qui est très difficile pour certains d’entre eux. Les centres de soins palliatifs, les établissements de soins de longue durée et les soins à domicile sont souvent mieux que les hôpitaux de soins actifs pour nombre des bénéficiaires de soins palliatifs.

Les gouvernements disent qu’ils financent les établissements de soins de longue durée; le gouvernement fédéral a investi plus d’argent dans les soins à domicile. Or, on prévoit que le nombre de personnes qui souffrent d’Alzheimer ou de démence doublera au cours des 15 prochaines années; il est donc difficile de suivre le rythme de cette évolution.

Y a-t-il d’autres façons de réduire le fardeau des coûts? De façon particulière, est-ce que les centres de soins palliatifs ou les établissements des soins de longue durée devraient s’associer aux hôpitaux pour ainsi être visés par la Loi canadienne sur la santé? Est-ce que ce serait possible?

M. Chirrey : À l’heure actuelle, il y a 25 milliards de dollars de soins à domicile non rémunérés au pays. Nous savons que 77 p. 100 des coûts sont relayés aux patients qui souffrent de cancer lorsqu’ils reçoivent des soins à domicile, notamment en raison de la perte de salaire et parce qu’ils doivent payer pour des choses qui font habituellement partie du système de soins de santé. Je crois qu’il faut s’inspirer des modèles qui fonctionnent.

Comme nous l’avons dit plus tôt, cela revient au choix que les gens font en vue de recevoir des soins palliatifs ou de fin de vie. Il ne s’agit donc pas de penser uniquement aux économies et de déplacer les services vers le bas de la chaîne, qui coûte beaucoup moins cher. Nous devons trouver des solutions et je crois qu’il faut nous inspirer des modèles qui fonctionnent. Je ne crois pas que nous ayons une idée claire quant à la marche à suivre.

On a bonifié les avantages offerts aux soignants, ce qui est très bien, mais on n’a pas fait de même pour les patients. Je crois que le problème demeure.

Mme Masotti : La Société canadienne du cancer parle du besoin d’accroître les prestations de maladie. Nous étions très heureux de voir que le gouvernement avait bonifié les prestations pour les aidants naturels, mais à l’heure actuelle, les patients sont moins bien couverts et reçoivent moins de soutien financier que les soignants. Il faut absolument examiner la situation, mais lorsqu’on pense à l’ensemble du système d’assurance-emploi, on sait que ce sera difficile et que le changement ne se fera pas du jour au lendemain.

Mme Tardif : Je crois que votre question au sujet du regroupement des hôpitaux et des centres de soins palliatifs est intéressante. Je n’ai pas la réponse, mais je dirais que pour les personnes atteintes de démence que nous accompagnons, l’endroit où elles se trouvent dans le système de soins de santé n’a pas vraiment n’importance. Malheureusement, à cause de la peur, de la stigmatisation et des défis en matière d’éducation dont nous avons parlé, les soins palliatifs sont souvent remis en question.

Donc, je ne sais pas si le regroupement des hôpitaux et des centres de soins palliatifs nous permettrait d’économiser de l’argent ou de réduire le fardeau des coûts. De nombreuses études montrent que les soins à domicile sont beaucoup plus abordables que les soins hospitaliers, mais tous ces intervenants doivent faire partie du cadre des soins palliatifs. C’est là où, à mon avis, il faut travailler ensemble pour voir les responsabilités de chacun à l’égard de la prestation et déterminer qui est le mieux placé pour offrir les soins et, au bout du compte, ce qui est le plus abordable. C’est une question intéressante.

Mme Masotti : J’aimerais ajouter une chose au sujet des prestations pour les aidants naturels. On en a récemment élargi la portée, ce que j’appuie pleinement, mais l’adhésion à certaines de ces prestations est assez faible. Étant donné leur situation, les membres de la famille et les soignants n’ont pas la tête à faire une demande de soutien financier; ils ont beaucoup trop d’autres choses à penser.

Je réitère l’importance de l’éducation et des campagnes. Il faut que les Canadiens sachent que ces prestations existent et qu’ils peuvent bénéficier d’un soutien financier.

Le sénateur Eggleton : Le crédit pour aidant naturel n’est pas remboursable, toutefois; est-ce exact? Cela signifie qu’il ne vise pas les personnes dont le revenu est très faible.

Le président : Oui. Cela fait partie de nos recommandations. Nous voulons qu’il soit remboursable.

La sénatrice Seidman : Madame Tardif, nous savons que la recherche sur les soins palliatifs n’a pas été bien défendue publiquement au cours de l’histoire, ce qui restreint notre capacité de mesurer les services et pratiques connexes parmi une gamme de soins et de présenter des rapports à cet égard, puisque les données sont très limitées. Vous en avez tous trois parlé dans vos déclarations.

J’ai trouvé intéressant que la Coalition pour des soins de fin de vie de qualité désigne les soins palliatifs pour les personnes atteintes de démence à titre de priorité de recherche dans son Plan d’action 2010.

Pourriez-vous nous parler plus en détail de ces lacunes en matière de recherche et nous dire quelles seront les priorités de recherche pour l’avenir?

Mme Tardif : Je vais être honnête avec vous, madame Seidman; je n’ai pas lu ce rapport. Je travaille à la Société Alzheimer depuis six mois; je vais lire ce rapport. Je ne peux malheureusement pas répondre à votre question.

Le président : Il n’y a pas de problème. Il n’y a pas d’autres commentaires non plus.

C’est un enjeu évident. Nous en avons parlé lors de notre dernière réunion également : lequel de ces trois types d’établissements de soins est le mieux dans ce domaine? De nombreux intervenants croient qu’il s’agit des centres de soins palliatifs. Certains ont proposé d’associer ces centres aux hôpitaux. Nous nous sommes demandé si cela pourrait fonctionner. On craint toujours que les soins visés par la Loi canadienne sur la santé ne disparaissent dans ce monstre de bureaucratie et qu’on doive instantanément assumer le coût total des soins.

Je n’irai pas plus loin. Vous connaissez tous la différence entre les soins offerts dans les deux types d’établissements à cette étape particulière. Nous voulons progresser en vue de trouver le meilleur concept en matière de soins palliatifs, et non seulement un emplacement, ce qui sera essentiel à mon avis.

Nous avons abordé de nombreux enjeux importants aujourd’hui et je tiens à vous en remercier. Je sais que vos organisations ont une grande expérience dans ce domaine et nous sommes très heureux de vous avoir reçus.

Je remercie mes collègues de leurs questions.

(La séance est levée.)

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