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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature,
Volume 137, Numéro 22

Le mercredi 26 novembre 1997
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 26 novembre 1997

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La santé

Le Conseil de recherches médicales-Les effets de la réduction du financement

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur la situation sérieuse dans laquelle se trouve le secteur de la recherche sur la santé au Canada.

Comme beaucoup d'entre vous le savent, le Conseil de recherches médicales a assuré la stabilité, la fiabilité, la continuité et l'établissement de normes dans la recherche de base et la recherche appliquée et clinique sur la santé au Canada depuis 1960. Chaque jour dans les laboratoires, les hôpitaux, les cliniques médicales et les universités, des chercheurs canadiens oeuvrent, avec l'appui du CRM, aux frontières mêmes de la science pure et des innovations pratiques dans le domaine de la santé. Ces chercheurs contribuent à l'avancement des connaissances et des soins et, ce faisant, contribuent à améliorer partout la qualité de vie des gens.

Depuis 1994 cependant, le budget du Conseil de recherches médicales a diminué de 13 p. 100, passant d'environ 266 millions de dollars en 1994-1995 à 221 millions en 1998-1999. Un nombre croissant de projets qui auraient normalement été acceptés doivent être refusés à cause du manque d'argent.

Notre premier réflexe nous porte sans doute à dire que tous les autres secteurs d'activité du gouvernement subissent des compressions budgétaires et qu'il n'y a pas de raison pour que la recherche sur la santé y échappe.

Honorables sénateurs, je voudrais essayer de vous faire comprendre les répercussions des compressions budgétaires dans le domaine de la recherche sur la santé. Il faut se rappeler au départ que les investissements dans la recherche sur la santé ont des retombées sociales et économiques.

Au plan social, les connaissances qui résultent de la recherche aident à maintenir et améliorer la santé des Canadiens. Sur le plan économique, les connaissances acquises sont indispensables au dynamisme de l'industrie de la santé et à la création d'emplois.

Les retombées économiques de la recherche dans le domaine de la santé sont particulièrement intéressantes à notre époque, parce que c'est l'une des industries les plus importantes et qui connaissent la plus forte croissance au pays. De plus, les chercheurs d'aujourd'hui cherchent à réaliser eux-mêmes des produits à valeur commerciale. En 1996, le quart de tout le capital de risque du Canada a été consacré aux sciences de la vie. C'est plus que pour tout autre domaine, y compris l'industrie informatique de pointe.

Tous les pays modernes favorisent des politiques conçues pour maximiser la productivité des scientifiques de talent. Les gouvernements, les industries, les universités et d'autres institutions du monde entier se livrent une concurrence féroce pour attirer les scientifiques. Le fait est que les chercheurs spécialisés dans un domaine précis sont rares et extrêmement mobiles. Pourtant, aujourd'hui, un certain nombre de chercheurs de marque se voient refuser du financement, au Canada.

Des prix qui auraient dû être remis personnellement à de grands chercheurs ou scientifiques pour la qualité de leurs travaux n'ont pas été approuvés. Des projets de recherche ne sont pas financés, même s'ils sont jugés méritoires. En fait, le Canada est le seul pays du G-7 à réduire ses investissements dans la recherche sur la santé, à un moment où des pays comme le Royaume-Uni et les États-Unis augmentent leurs investissements dans ce domaine. À l'heure actuelle, on compte au moins 500 projets de recherche de première classe, tels qu'évalués par des comités de pairs, que le CRM n'est pas en mesure de financer. Au niveau de financement actuel, le Canada ne pourra pas soutenir longtemps la concurrence mondiale des travaux de recherche dans le domaine de la santé.

Plutôt que de venir enrichir notre base de ressources, ceux qui ont des talents exceptionnels n'ont pas d'autre choix que de déménager. Les conséquences de cette tendance à l'exode constituent une grave menace pour l'avenir de l'industrie de la santé et, bien sûr, pour la santé des Canadiens.

Le Canada est réputé pour son système de soins de santé, qui est censé être l'un des meilleurs au monde. Honorables sénateurs, il est indispensable d'innover si nous voulons maintenir notre réputation et réagir efficacement à l'évolution de l'état de santé de la population, des conditions environnementales et des progrès de la science à laquelle nous devrons faire face dans les années à venir.

Les Canadiens consacrent chaque année 75 milliards de dollars à leur système de soins de santé. Une part importante de cet investissement est consacrée à des procédures et à des interventions dont la valeur peut être mise en doute. Le Canada a la possibilité unique de pouvoir bâtir sur son excellente réputation dans le domaine de la santé en se concentrant sur la recherche fondée sur des faits qui améliorera les problèmes de santé. La recherche est au coeur d'un régime de soin fondé sur les faits.

(1340)

Cela m'amène à mon dernier point. L'ironie de la baisse des ressources disponibles pour la recherche en matière de santé, c'est que cette baisse se produit à une des époques les plus stimulantes pour les scientifiques qui travaillent à la cause de l'amélioration de la santé. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le rythme des découvertes s'accélère.

La vague de possibilités qui existe maintenant dans le domaine de la compréhension des bases génétiques de la santé et de la maladie n'a jamais été aussi forte. Aujourd'hui, les avantages de la biologie moléculaire pour le diagnostic et le traitement préventif, par exemple, y compris l'évolution des nouvelles frontières de la biotechnologie, apparaissent illimités.

Le gouvernement fédéral doit assumer un rôle de leader pour préserver et améliorer la base qui soutient la recherche en matière de santé. Certaines des initiatives du gouvernement, notamment la création du Fonds pour la recherche en services de santé, la décision de fournir des fonds permanents aux réseaux de centres d'excellence, et la création de la Fondation canadienne pour l'innovation, sont des étapes positives qui montrent que le gouvernement a compris que l'investissement dans la recherche en matière de santé est critique.

Aussi importants que soient ces investissements, toutefois, ils sont insuffisants. À une époque où le Canada renouvelle son système de santé, à une époque où la recherche scientifique est à la veille de découvrir de nouveaux traitements et de nouvelles innovations, le gouvernement du Canada a choisi de réduire, de façon marquée, le financement de la recherche fondamentale.

Honorables sénateurs, la recherche sur la santé est un pilier essentiel supportant trois priorités gouvernementales: les soins, la croissance économique et la création d'emplois et une économie fondée sur le savoir. Ce ne sont pas des priorités séparées, mais des choses inextricablement liées. Notre compétitivité économique au siècle prochain dépendra de la base de connaissances produite par la recherche. La recherche en matière de santé sera sans nul doute un moteur pour la croissance économique, la création d'emplois et la compétitivité internationale au siècle prochain. Le moins que le Canada puisse faire s'il veut retrouver et maintenir son avantage concurrentiel dans le monde, c'est d'aligner les fonds qu'il consacre à la recherche en matière de santé avec ceux que consacrent d'autres pays à ce domaine.

La recherche fondamentale est à la base des grandes découvertes scientifiques et des applications de la science. Si elles continuent à être sous-financées, les sources de recherche fondamentale qui alimentent toutes les autres activités de recherche seront vite taries. Si cette industrie veut être mondialement concurrentielle, le gouvernement doit continuer de l'appuyer.

Honorables sénateurs des deux côtés de la Chambre, je vous demande de vous joindre à moi pour demander au gouvernement fédéral de renouveler son engagement à l'égard de l'excellence et de l'innovation dans les domaines de la recherche fondamentale et de la recherche appliquée en matière de santé en augmentant immédiatement la base de financement du Conseil de recherches médicales.

La période que nous vivons est une période fantastique de défis et de possibilités dans le domaine de la recherche en matière de santé. Ne regardons pas en arrière et arrêtons de nous dire rétrospectivement que nous aurions pu faire plus en matière d'investissement pour appuyer la recherche biomédicale et aider les chercheurs particulièrement doués à avancer dans leur carrière.

La défense nationale

La situation dans les Forces armées canadiennes-Le rôle de l'opposition et l'obligation de rendre des comptes

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai récemment reçu la réponse écrite à deux questions que j'avais posées en cette enceinte. On les trouvera dans les Débats du Sénat, respectivement le 21 octobre et le 5 novembre 1997. La première question portait sur la base de mobilisation des Forces armées canadiennes et l'effectif minimal établi par le livre blanc, et la seconde sur la solde et les allocations des réservistes.

Honorables sénateurs, le droit de l'opposition de poser des questions au gouvernement est la pierre angulaire de cette démocratie constitutionnelle, comme de toutes les autres, et les membres de l'opposition sont en droit de s'attendre à ce que le gouvernement leur donne des réponses honnêtes et franches. C'est le fait même de la transparence et de l'obligation de rendre des comptes qui sont au coeur même du gouvernement et de la gestion des affaires publiques. J'ai été étonné par deux éléments d'information présentés dans la réponse écrite du protecteur auto-proclamé de la transparence et de l'obligation gouvernementale de rendre des comptes.

Honorables sénateurs, en ce qui concerne la première question, j'avais signalé le fait que le 2e Bataillon du Royal Canadian Regiment, basé au Centre d'instruction au combat, à Gagetown, n'avait pas été envoyé en Bosnie faute d'effectifs et qu'il avait été remplacé par le 3e Bataillon du RCR basé à la BFC de Petawawa. Cela m'a été dit par des sources que je considère très sûres. La réponse du gouvernement est qu'on avait envoyé une unité de Petawawa afin de profiter de son bassin plus important de militaires ne faisant pas partie de l'infanterie et de réduire au minimum les bouleversements pour les familles des militaires au cours de l'instruction préalable au déploiement.

Or j'ai appris que l'unité basée à Petawawa a été envoyée à Meaford pour son entraînement, soit à une très grande distance des familles dont on semblait tant se soucier. Par ailleurs, j'aimerais également faire remarquer qu'on avait fait venir ces soldats des quatre coins du Canada pour compléter l'effectif et que, en fait, il y a en ce moment des artilleurs qui servent dans l'infanterie. Cela me fait douter de la véracité de la réponse que j'ai reçue.

Honorables sénateurs, dans ma seconde question, j'ai demandé si les réservistes du Canada étaient payés correctement et à temps, car on me disait qu'il n'en était rien depuis longtemps. Il s'agit d'une question sérieuse qui non seulement exigeait une réponse, mais également des mesures immédiates. Le gouvernement m'a répondu ainsi:

Quelle que soit la méthode de paiement, à quelques exceptions près, les réservistes reçoivent dans les délais voulus la solde qui leur est due.

Mon bureau a fait part de cette réponse aux réservistes et, en toute franchise, cela les a fait grimacer et les a vraiment mis en colère. L'un d'eux a suggéré à mon bureau de lire la réponse du gouvernement aux 14 membres de sa compagnie qui avaient vécu l'expérience d'une nouvelle procédure informatisée de paye. En fait, le gouvernement pourrait vouloir regarder sur Internet ce que certains groupes de discussion ont à dire à ce sujet.

Encore hier, devant le comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants de la Chambre des communes, le lieutenant-général David Kinsman, le sous-ministre adjoint du Personnel, a déclaré qu'il y avait un problème avec la paye de la réserve.

Le leader du gouvernement ne veut certainement pas que je présente une demande d'information sur l'Internet ou que je me tienne à l'extérieur des manèges militaires pour demander aux réservistes comment ils sont payés. Chose certaine, aucun d'entre nous ne devrait avoir autant de mal à obtenir une réponse et des mesures concrètes au nom de ces réservistes qui s'attendent à recevoir la solde qui leur est due et à temps pour Noël.

Honorables sénateurs, j'ai posé deux questions et je crois que les réponses étaient de pures inventions. Elles sont le fruit de l'imagination de quelqu'un ou du désir absolu de quelqu'un de me cacher la vérité.

Je ne blâme pas le leader du gouvernement au Sénat, un honorable collègue que je connais depuis plus de 30 ans. Cependant, quelqu'un exagère la vérité. Je m'attends à recevoir en temps opportun des réponses exactes et vérifiables à ces questions graves. C'est fondamental dans une démocratie. Le gouvernement dit attacher de l'importance à la transparence et à l'obligation de rendre des comptes. Je l'exhorte à respecter son engagement. Cessez de raconter des histoires pour qu'il n'y ait plus de malentendus.

D'après les dictionnaires, la transparence est associée à la visibilité d'une chose et l'obligation de rendre des comptes revient à donner des explications. Je veux donc que la politique du gouvernement soit transparente et qu'il explique ses actions.

Enfin, je voudrais qu'on bouge un peu pour répondre à ces questions plus rapidement que «sous peu», car on sait aujourd'hui que «sous peu» veut dire 52 jours pour ce gouvernement.


(1350)

AFFAIRES COURANTES

Agriculture et forêts

Dépôt du premier rapport du comité

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat du Canada, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du comité mixte permanent de l'agriculture et des forêts, rapport qui concerne les dépenses engagées par le comité au cours de la deuxième session de la trente-cinquième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

État du système financier

Présentation et impression en annexe du rapport du comité des banques et du commerce demandant l'autorisation de voyager et d'engager du personnel

L'honorable Michael Kirby: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter le quatrième rapport du comité sénatorial permanent des banques et du commerce, rapport qui concerne sa mise en oeuvre du budget pour l'exercice 1997-1998 et son examen de l'état actuel du système financier au Canada.

Je demande que ce rapport soit imprimé en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui afin qu'il fasse partie du compte rendu permanent du Sénat.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(Le texte du rapport figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 233.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Kirby, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi de crédits no 2, 1997-1998

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-23, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1998.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du mardi 2 décembre 1997.)

La Loi sur le tabac

Projet de loi modificatif-Première lecture

L'honorable Stanley Haidasz présente le projet de loi S-8, Loi modifiant la Loi sur le tabac (réglementation du contenu)

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Haidasz, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du mardi 2 décembre 1997.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

Le développement des ressources humaines

La réforme du Régime de pensions du Canada-Le rôle des vérificateurs par rapport au conseil d'administration-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader adjoint du gouvernement au Sénat, en l'absence du leader du gouvernement. Elle porte sur le licenciement des vérificateurs en vertu du projet de loi sur le RPC.

La législation fédérale régissant les sociétés stipule clairement que les vérificateurs sont là pour protéger les actionnaires et non le conseil d'administration. Les vérificateurs d'une société ne peuvent être licenciés que par les actionnaires réunis en assemblée extraordinaire. Les vérificateurs démissionnaires ou licenciés doivent remettre à leurs remplaçants une lettre décrivant leur version des événements.

Cependant, cette protection n'existe pas pour les vérificateurs de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada. En fait, le conseil d'administration peut renvoyer un vérificateur en tout temps, sans se plier aux mesures de protection qui s'appliquent aux conseils d'administration du secteur privé. Je me reporte ici aux articles 32 et 33 du projet de loi C-2.

Le gouvernement est-il d'avis que le rôle des vérificateurs de cet office est de protéger le conseil d'administration ou est-il d'avis que les vérificateurs sont là pour protéger les actionnaires?

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Je remercie le sénateur de sa question et j'en prends note pour le leader du gouvernement.

La réforme du Régime de pensions du Canada-Demande de réponse à des questions

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, à titre de question complémentaire, je tiens à rappeler que j'ai posé quelques questions concernant le Régime de pensions du Canada et que je n'ai reçu aucune réponse jusqu'à maintenant. Est-ce que le leader adjoint du gouvernement peut me dire approximativement quand les réponses à mes questions sur la réforme du Régime de pensions du Canada seront présentées à cette Chambre?

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, puisque je suis responsable des réponses différées, je vais vérifier où en sont les réponses à ces questions. Nous avons déposé bon nombre de réponses, mais malheureusement, aucune d'entre elles ne s'adressait à vous. Je vais m'occuper de cette affaire.

La réforme du Régime de pensions du Canada-La situation du vérificateur général par rapport à l'Office d'investissement-La position du gouvernement

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, jeudi matin, la semaine dernière, des fonctionnaires du ministère des Finances ont dit au comité des finances de l'autre endroit que le vérificateur général trouvaient satisfaisantes les méthodes de vérification prévues pour l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada. Cependant, des employés du vérificateur général se trouvaient dans l'auditoire et, à la fin de la journée, le vérificateur général lui-même avait écrit au comité pour faire une mise au point. Selon lui, en fait, il préférait se voir confier le poste de vérificateur de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada et il rejetait toute insinuation, comme on l'avait fait devant le comité, que son bureau n'était pas compétent pour accomplir un travail de ce genre. Il a également dit qu'il préférerait que son droit de regard sur les livres soit couché dans la loi.

Pendant la période des questions de vendredi, à l'autre endroit, l'honorable ministre des Finances a dit que la position du vérificateur général serait clarifiée. Quel genre de clarification le gouvernement a-t-il à l'esprit? Le vérificateur général aura-t-il réellement accès aux livres de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada?

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Je remercie le sénateur de sa question. J'en ferai part au leader du gouvernement.

La défense nationale

La situation dans les Forces armées canadiennes-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, est-il préférable d'obtenir une réponse «rapidement» ou «sous peu»? Je vous souhaite la meilleure des chances, sénateur Oliver!

À la lumière des réponses discutables que j'ai reçues jusqu'à maintenant - j'aurais peut-être préféré n'obtenir aucune réponse au lieu de ces réponses discutables - je voudrais demander ceci au gouvernement: le retrait du 2e Bataillon du régiment canadien du prochain tour de mission en Bosnie et son remplacement par le 3e bataillon s'expliquent-ils par le fait que le 2e bataillon n'a pas l'effectif réglementaire? L'effectif des forces régulières a-t-il chuté en-dessous du plafond de 60 000 membres? La même réponse peut s'appliquer aux deux questions.

Que fait le gouvernement pour régler les problèmes ridicules associés à la solde de nos forces de réserve, car nos réservistes dévoués ne reçoivent pas leur solde ou bien la reçoivent en retard pour les services qu'ils rendent à notre pays. Peuvent-ils s'attendre à être payés avant Noël?

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, on essaie de faire vite, plus vite et encore plus vite. Je prends note de la question et la transmettrai au leader du gouvernement au Sénat.

Le développement des ressources humaines

L'utilisation de l'excédent du compte de réserve de l'assurance-emploi-La position du gouvernement

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je ne pense pas recevoir une réponse à cette question, mais je vais la poser quand même.

Au 1er octobre de cette année, le sénateur Meighen a posé une question concernant l'assurance-emploi. Le 23 octobre, j'ai posé une autre question qui mentionnait celle qu'avait posée mon collègue. Hier, j'ai obtenu une réponse à ma question et je voudrais la lire pour qu'elle soit consignée au compte rendu. La question portait sur l'assurance-emploi et la réserve. Je cite:

Une réserve est nécessaire puisqu'elle permet d'appliquer des taux de cotisation plus stables pendant tout le cycle économique, ce qui évite de devoir les augmenter en période de récession. Elle permet en outre de faire en sorte qu'il y ait suffisamment de fonds pour verser les prestations lorsque ces dernières sont le plus nécessaires.

Ce qui s'est produit au cours de la dernière récession, c'est qu'un excédent de deux milliards de dollars du compte d'assurance-emploi s'était transformé en déficit de six milliards de dollars en deux ans, et on avait dû augmenter les cotisations de 30 p. 100 à un moment déjà difficile pour la création d'emplois. Étant donné ces faits, le gouvernement croit qu'il est sage de constituer une réserve dans le compte d'assurance-emploi.

J'imagine que, si vous m'avez donné cette réponse, c'est la stratégie du gouvernement qui y est décrite.

(1400)

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je transmettrai la question sur la stratégie du gouvernement au leader du gouvernement au Sénat.

Le sénateur Stratton: Si vous me le permettez, j'aimerais citer le Financial Post d'aujourd'hui, le 26 novembre 1997. Dans un éditorial intitulé «L'excédent de l'assurance-emploi est un impôt servant à réduire le déficit», on dit clairement que l'assurance-emploi deviendra:

[...] un excédent accumulé qui, selon les prévisions, devrait atteindre un scandaleux 19 milliards de dollars à la fin de 1998.

Si vous avez besoin de huit milliards de dollars pour faire face à une récession, quel genre de récession attendez-vous, compte tenu des besoins que nous avons eus lors de la dernière récession?

Le sénateur Carstairs: Je remercie l'honorable sénateur pour sa question. Je la transmettrai au leader du gouvernement au Sénat.


[Français]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi de mise en oeuvre de la convention sur les mines antipersonnel

Deuxième lecture

L'honorable Eymard G. Corbin, propose: Que le projet de loi C-22, Loi de mise en 9uvre de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, est-il nécessaire que je vous explique la raison d'être de ce projet de loi? Je vous pose la question et j'entends votre réponse.

Qui de vous n'a pas été choqué à la vue d'un ancien combattant, d'un soldat d'une force de maintien de la paix de notre pays ou d'ailleurs, déchiqueté, défiguré, amputé, pour avoir mis le pied sur le plus sournois des engins de guerre, une mine antipersonnel? Mais les morts, vous ne les voyez plus. Ils sont devenus une statistique.

Et comme si cela n'était pas, en soi, déjà trop, qui de vous n'a pas ressenti la plus profonde indignation à la vue - évidemment à la télévision, dans le confort et la sécurité de votre salon - d'enfants, de filles, d'agriculteurs, de simples passants dans des pays ou des zones de guerres actives ou éteintes, mutilés horriblement par une mine antipersonnel. Mais vous ne voyez plus les milliers de morts. Ils sont devenus une statistique. Les statistiques nous interpellent du fond de l'abîme: assez, c'est assez!

Une clameur s'est fait entendre de partout: cessez le carnage. Il faut revenir à la raison. Il faut que la technique meurtrière soit soumise à l'esprit humanitaire. Que cessent la tuerie et la mutilation de populations innocentes!

Le nombre des seuls morts directement attribués aux mines antipersonnel s'élèverait à 26 000 par an. Et Dieu seul sait, malgré tous les efforts actuellement déployés, combien de milliers de personnes pour des années à venir seront encore tuées, meurtries, rendues infirmes pour le reste de leur existence, même après la ratification du traité sur les mines antipersonnel dont je vais maintenant parler.

Il y a de l'espoir; un jour nouveau pointe à l'horizon. Le Canada a été au premier plan d'un effort mondial visant à faire interdire les mines antipersonnel dans le monde entier. La Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction sera ouverte lors de la signature à Ottawa la semaine prochaine. On s'attend à ce que plus de 100 États signent ce traité.

Tous les Canadiens devraient pouvoir s'enorgueillir de cette réalisation historique. Ils n'auront pas le coeur moins lourd en pensant aux victimes passées et, hélas! aux milliers d'enfants, de femmes et d'hommes qui, pour un temps encore, seront tués ou rendus invalides. Victimes innocentes qui n'avaient rien à voir et qui n'auront rien à voir avec le conflit au cours duquel les mines, les unes plus diaboliques que les autres, ont été utilisées, mais non récupérées.

Au milieu de 1996, le Canada et plusieurs autres États décidèrent qu'il fallait mettre fin au carnage. Le Canada a donc organisé, en octobre 1996, la première d'une série de réunions visant ultimement l'interdiction globale des mines antipersonnel.

La conférence d'Ottawa a été le tremplin de ce qu'il est convenu d'appeler «le processus d'Ottawa». Au cours de la conférence, le ministre des Affaires étrangères, l'honorable Lloyd Axworthy, a garanti que l'engagement pris à l'égard de l'interdiction des mines ne resterait pas lettre morte. À cette fin, il a promis que le Canada collaborerait avec tous les pays et les organisations non gouvernementales intéressés pour préparer un traité susceptible d'être signé au plus tard en décembre 1997 et qui serait mis en oeuvre d'ici l'an 2000. Le ministre a mis au défi tous les États de se joindre au Canada pour atteindre cet objectif.

Nous savons maintenant que nous relèverons ce défi. Le nombre de pays qui appuient cette initiative a crû de façon constante au cours des 13 derniers mois. La semaine dernière, nous avons appris que des représentants de l'Australie, de l'Indonésie et de la Roumanie viendraient à Ottawa pour signer le traité. Des États de toutes les régions du monde se joignent aux pays qui considèrent les mines antipersonnel comme un legs déplorable du passé et non comme une arme légitime pour l'avenir. Hier encore, alors que je préparais ces notes, on m'apprenait que la Thaïlande et la Tunisie, qui avaient qualité d'observateurs aux réunions préparatoires, viendraient signer le traité à Ottawa.

Les efforts déployés à l'échelle internationale dans le cadre de réunions concernant tous les aspects de la question des mines antipersonnel ont eu lieu dans le monde entier pendant la dernière année. L'Autriche, le Japon, le Mozambique, l'Allemagne, l'Afrique du Sud, la Suède, le Turkménistan, la Belgique, l'Australie, les Philippines, l'Inde, le Sénégal et le Yémen ont tous accueilli des réunions internationales et régionales. À la conférence d'Oslo, tenue du 1er au 18 septembre, 89 États ont négocié et parachevé le texte de la convention qui sera signée la semaine prochaine. Le fait que cette tâche puisse être menée à bonne fin en moins de trois semaines démontre l'esprit de coopération existant entre les États qui signeront ce traité et leur compréhension qu'il faut agir rapidement.

Par conséquent, de nombreux États qui ont une histoire bien différente - qu'il s'agisse d'anciens producteurs et d'exportateurs de mines antipersonnel, de pays où des mines ont été employées sur une grande échelle au cours des conflits - ont décidé que les préoccupations humanitaires l'emportent sur l'utilité militaire limitée des mines antipersonnel, mais combien dévastatrices pour les populations civiles innocentes. C'est pourquoi il y a consensus: ces engins destructeurs de vies innocentes doivent être interdits.

(1410)

Des États ne signeront pas la convention à Ottawa la semaine prochaine. Aucune convention n'emporte l'adhésion universelle lors de son ouverture à la signature. La Chine, qui n'a pas assisté aux réunions du «processus d'Ottawa» jusqu'à présent, pourrait assister à la réunion de décembre à titre d'observateur. D'autres, comme la Russie, l'Inde, le Pakistan et la plupart des pays du Moyen-Orient viendront également observer le déroulement de la réunion et contribuer à l'élaboration d'un plan d'action.

Nous sommes témoins d'un effet d'entraînement à l'effet que nombre de pays qui n'avaient pas souscrit, au départ, à l'urgence de proscrire ces mines et qui ne souhaitaient pas renoncer aux mines antipersonnel, se sont maintenant engagés à signer la convention et à s'employer à la mettre effectivement en oeuvre.

Au yeux de l'opinion internationale, le Canada est intimement lié à cette convention. Le premier ministre du Canada, le ministre des Affaires étrangères, tous les membres du conseil des ministres, nos ambassadeurs et représentants à l'étranger, une vaste gamme de fonctionnaires et même des parlementaires, n'ont eu de cesse pour tenter de convaincre le plus grand nombre possible d'États à souscrire à l'objectif de la convention. Je crois que ce déploiement d'efforts est sans précédent dans l'histoire de notre diplomatie canadienne, et nous pouvons tous nous en féliciter, compte tenu de la période de temps restreinte que l'on s'était fixée au départ pour en arriver à l'étape décisive de la semaine prochaine. Et cela ne sera pas terminé pour autant. Il n'y aura pas de relâche tant que tous les pays n'auront pas ratifié le traité.

Pour l'instant, un premier objectif doit consister à recueillir le nombre de ratifications nécessaires pour que la convention puisse entrer en vigueur. Six mois après que le 40e pays l'aura ratifiée, la convention aura force obligatoire en droit international. D'ici là, bien que la convention représente les meilleures intentions de la communauté internationale, les signataires ne sont que moralement, et non juridiquement, tenus de s'y conformer.

Le Canada veut mettre le processus en branle en étant parmi les premiers pays à ratifier la convention. Pour y arriver, le gouvernement propose ce projet de loi. S'il reçoit l'aval du Sénat et la sanction royale, et je n'ai aucune raison de croire que cela ne sera pas le cas, le projet de loi C-22 permettra la promulgation des lois intérieures qui permettront au Canada d'honorer les obligations contractées sous la convention.

Le projet de loi C-22 vise plusieurs objectifs. D'abord, il permet au Canada de respecter les obligations qui résulteront de la ratification de la convention. Aux termes de l'article 9 de la convention, tous les États signataires doivent prendre les mesures appropriées pour prévenir toute activité qui serait menée sur un territoire sous leur juridiction. Le projet de loi vise expressément cet objectif car il interdira la production, l'emploi, le stockage et le transfert de mines antipersonnel. Aux termes du projet de loi, toutes les mines antipersonnel doivent être détruites, à l'exception d'un petit nombre qui pourra être conservé à des fins de formation.

Le projet de loi C-22 crée également le régime de vérification prévu dans la convention et décrit les mesures à prendre au cas où une mission d'information serait envoyée au Canada pour enquêter sur des questions de conformité.

Le projet de loi C-22 criminalise dans le droit canadien les activités qui sont interdites en vertu de la convention. La peine maximale pour de tels actes serait de cinq années d'emprisonnement et/ou une amende de 500 000 $.

Donc, et il m'incombe de le souligner, si ce projet de loi est adopté, la possession, l'acquisition, la mise au point, la production et le transfert de mines antipersonnel deviendront des infractions punissables en vertu du droit canadien. Une fois la loi en place, quiconque sera en possession de mines antipersonnel devra les remettre aux agents compétents qui les détruiront.

Le ministère de la Défense nationale a déjà détruit au complet son stock de mines antipersonnel. Il n'en a conservé qu'un petit nombre aux seules fins de la formation en matière de déminage et de techniques de destruction des mines. En effet, la convention autorise l'emploi des mines à ces fins.

Les mines neutralisées qui se trouvent dans les musées, ou que peuvent transporter les opposants à l'utilisation des mines pour des fins militaires, ne seraient pas visées par le projet de loi. Un ancien combattant qui conserve une telle mine, désamorcée bien sûr, comme souvenir, ne sera pas tenu de la faire détruire. J'insiste sur ce point pour éviter tout malentendu: le projet de loi contient une disposition qui exempte les mines qui ont été complètement neutralisées, c'est-à-dire dont il ne reste que la coquille.

En outre, une exception est prévue pour les membres des Forces armées canadiennes, les agents de la paix ou les fonctionnaires qui peuvent être obligés d'avoir en leur possession temporaire des mines antipersonnel dans l'exercice de leurs fonctions. Ceux-ci pourront, lorsque cela sera justifié, transporter des mines antipersonnel aux fins de les éliminer ou de les détruire.

Une partie importante du projet de loi C-22 porte sur la procédure à suivre lorsqu'une mission d'établissement des faits internationale est envoyée au Canada, conformément à la convention, pour déterminer si nous honorons les obligations contractées en vertu de la convention. Des mesures ont été prévues pour que le projet de loi respecte les dispositions de la Charte canadienne à cet égard. Ainsi, une mission de ce type au Canada ne pourra avoir accès à des installations ou des résidences privées à moins d'être préalablement munie des mandats appropriés.

La loi sert essentiellement de fondement juridique permettant d'éviter qu'à l'avenir, le Canada utilise, mette au point, produise, inventorie ou transfère des mines antipersonnel ou aide quelque État que ce soit à le faire. J'ai tout lieu de croire que les honorables sénateurs conviendront que cette loi permet au Canada non seulement de mettre en oeuvre la convention, mais aussi de respecter l'esprit et la lettre de son engagement sur toute la ligne.

La loi permettra au Canada de continuer de contribuer dans une large mesure à l'établissement d'une norme humanitaire contre l'emploi des mines antipersonnel.

Bien entendu, le Canada n'a pas contribué à la crise des mines antipersonnel qui existe dans tellement de pays aujourd'hui. Nous n'avons pas utilisé de mines antipersonnel depuis la guerre de Corée, nous n'en avons pas exporté depuis 1987 et nous avons cessé d'en fabriquer en 1992.

(1420)

Malgré tout, un certain nombre de Canadiens ayant participé à des missions de maintien de la paix sous l'égide des Nations Unies ont été tués ou blessés par des mines antipersonnel. Nous connaissons les dégâts causés par ces armes insidieuses, et nous avons pris la décision, pour des motifs humanitaires, de les supprimer absolument de notre arsenal.

Toutefois, quel que soit le bien-fondé de nos intentions, aucune mesure unilatérale du Canada ne peut suffire à mettre fin à la situation catastrophique que représentent 110 millions de mines antipersonnel implantées dans le sol. Il reste peut-être la même quantité de mines dans les inventaires mondiaux susceptibles d'être à leur tour enfouies dans le sol lorsque les hostilités reprennent. Et il est impossible de savoir combien de mines antipersonnel supplémentaires sont fabriquées chaque année. Ces données dépassent l'entendement! La situation dans bien des pays est déjà critique. Nous devons mettre fin à ce cycle abominable.

Le travail n'est pas terminé! Le Canada déploiera tous les efforts pour essayer de convaincre tous les pays signataires de prendre toutes les mesures nécessaires sur leur territoire, tout comme le Canada le fait maintenant, pour faire en sorte que ce traité, à l'élaboration duquel tant d'efforts ont été consacrés, entre en vigueur le plus tôt possible.

Quarante est le nombre à retenir. Quarante pays doivent ratifier la convention pour qu'elle devienne loi internationale. Quarante pays doivent la ratifier pour que le compte à rebours puisse commencer: soit quatre ans pour détruire les inventaires, dix ans pour l'extraction et la destruction des mines dans les zones minées. Tant que 40 pays n'auront pas ratifié la convention, elle demeurera un document de bonnes intentions sans effet tangible.

Je parle d'exemple, d'effet d'entraînement. Le projet de loi dont nous sommes saisis permettra au Canada de ratifier le traité après sa signature. Une fois notre propre processus terminé, nous pourrons nous employer à essayer de convaincre d'autres États à ratifier la convention.

Comme il l'a fait au cours de la dernière année pour obtenir des appuis en faveur de la convention, le Canada tirera parti de toutes les possibilités bilatérales et multilatérales pour tâcher de persuader tous les États signataires de la ratifier le plus tôt possible. Par ailleurs, le Canada s'emploiera à convaincre les pays qui ne l'auront pas signée à y ajouter leur nom. Même maintenant, la plupart des États souscrivent aux idéaux humanitaires du traité, mais certains ne sont pas encore prêts à renoncer complètement et pour toujours aux mines antipersonnel. Nous espérons que tous les États en viendront à croire que ces idéaux humanitaires sont plus importants que l'avantage militaire limité qui résulte de l'emploi des mines antipersonnel.

Honorables sénateurs, j'ai assez parlé. Ce projet de loi sera déféré, je le crois bien, avec l'appui de mes vis-à-vis, au comité des affaires étrangères pour une étude détaillée. Le ministre et les fonctionnaires seront présents pour répondre à toutes les questions techniques ou autres que voudront alors soulever les honorables sénateurs.

J'invite maintenant mes honorables collègues à donner un appui enthousiaste à une initiative qui fait honneur au pays et à l'humanité.

[Traduction]

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je félicite le sénateur Corbin, qui a fourni une explication très éloquente du projet de loi. Je suis heureuse d'intervenir dans le débat sur cette mesure qui permettra au Canada de ratifier la convention internationale sur les mines antipersonnel.

Il est déjà arrivé qu'on demande au Parlement d'approuver des projets de loi visant la mise en oeuvre d'accords internationaux. Ces accords étaient rarement destinés à réduire la brutalité dans le monde. Le Canada n'a pas l'habitude de jouer un rôle aussi déterminant pour obtenir l'accord d'autres pays. Il n'a jamais réuni plus de 100 pays et organisations non gouvernementales, comme il s'apprête aujourd'hui à le faire. L'initiative est excellente pour le Parlement et pour le Canada, et, comme l'honorable sénateur l'a déclaré, pour l'humanité.

Dans moins d'une semaine, les représentants de plus de 100 pays seront à Ottawa pour signer la convention interdisant l'emploi, le stockage, la production et l'expédition de mines antipersonnel. Ils seront ici, comme l'a reconnu le comité des prix Nobel, par suite des efforts considérables de Mme Jody Williams et de la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres, ainsi que des nombreuses années de travail du comité international de la Croix-Rouge. Ils seront ici également parce que la regrettée princesse Diana a apporté sa compassion et son magnétisme personnel à cette cause. Enfin, et ce n'est pas la moindre des raisons, ils seront ici parce qu'un groupe moteur de pays - l'Autriche, la Belgique, le Canada, l'Irlande, l'Allemagne, le Mexique, les Pays-Bas, les Philippines, l'Afrique du Sud et la Suisse - ont uni leurs efforts avec espoir et détermination.

Honorables sénateurs, la convention est une victoire marquante pour les droits de la personne. Il est significatif et approprié que la cérémonie de signature ait lieu à Ottawa. Nous savons tous que ce n'est pas accidentel. Nous le devons aux efforts dévoués et déterminés du ministre des Affaires étrangères, qui est à l'origine de ce que nous connaissons aujourd'hui comme le processus d'Ottawa. Il y a un peu plus d'un an, le ministre a défié la communauté internationale de faire de l'interdiction mondiale des mines antipersonnel une réalité avant novembre 1997.

Le processus d'Ottawa n'a pas encore atteint cet objectif, mais ses résultats sont renversants. Comme on a pu le lire dans The Economist:

 

La force de la méthode adoptée par Ottawa, c'est d'avoir stigmatisé les mines antipersonnel et en avoir fait des dispositifs abominables à ne jamais utiliser, sous aucun prétexte, par personne, sans la moindre exception.
Cette approche, réaffirmée à Oslo, sera bientôt adoptée par plus de 100 pays. Tous les pays signataires devront, sans exception, cesser toute activité liée aux mines antipersonnel. Chacun détruira ses stocks de mines antipersonnel, comme le Canada l'a déjà fait, et chacun s'engagera à participer à un effort international visant à éliminer ces armes et à aider ceux qui en ont été victimes.

Honorables sénateurs, à bien des égards, l'aspect le plus important du projet de loi dont nous sommes saisis se trouve à l'annexe qui énonce la convention historique. Cette convention est simple et claire. Elle ne comprend que 22 articles, dont l'article 9, qui obligent les pays à adopter des mesures de mise en oeuvre, comme nous le faisons actuellement. C'est aussi une entente très impressionnante et très facile à lire, et je pense qu'il vaut la peine de répéter une partie de son préambule.

 

DÉTERMINÉS à faire cesser les souffrances et les pertes en vies humaines causées par les mines antipersonnel qui tuent ou mutilent des centaines de personnes chaque semaine, pour la plupart des civils innocents et sans défense, en particulier des enfants; entravent le développement et la reconstruction économiques; empêchent le rapatriement des réfugiés et des personnes déplacées sur le territoire; et ont d'autres graves conséquences pendant des années après leur mise en place...
SOULIGNANT le rôle de la conscience publique dans l'avancement des principes humanitaires comme en atteste l'appel à une interdiction totale des mines antipersonnel et reconnaissant les efforts déployés à cette fin par le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, la Campagne internationale contre les mines terrestres et de nombreuses autres organisations non gouvernementales du monde entier...
SE FONDANT sur le principe du droit international humanitaire selon lequel le droit des parties à un conflit armé de choisir des méthodes ou moyens de guerre n'est pas illimité, sur le principe qui interdit d'employer dans les conflits armés des armes, des projectiles et des matières ainsi que des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus, et sur le principe selon lequel il faut établir une distinction entre civils et combattants...
La convention précise ensuite les termes de l'entente entre les parties. C'est ce qui motive les parties à la convention et toutes sont d'accord pour prendre des mesures précises.

Au cours de la dernière année, la communauté du processus d'Ottawa a été accusée d'être un «groupe d'anges». Dans ce cas, espérons que ses membres se multiplieront et qu'elle ouvrira d'autres sections.

Toutefois, on ferait bien de se rappeler que le Canada n'est pas sans tache. Dans un rapport qu'il a publié l'an dernier, le comité international de la Croix-Rouge cite un incident survenu au cours de la guerre de Corée lorsqu'un contingent australien est entré accidentellement dans un champ miné par les Canadiens et que près d'une cinquantaine de soldats ont péri.

Des Canadiens aussi sont sautés sur des mines terrestres. En juin 1994, le caporal-chef Mark Isfeld, des troupes canadiennes de maintien de la paix, a été tué pendant qu'il enlevait des mines terrestres au Cambodge. Au moins un autre Canadien est mort et des douzaines d'autres ont été blessés depuis 1992 à cause des mines antipersonnel. Aujourd'hui, les membres de nos troupes de maintien de la paix stationnées sur les hauteurs du Golan doivent assumer des fonctions dans des endroits non marqués où ils risquent leur vie à chaque pas.

(1430)

Les dangers que doivent affronter la grande majorité des Canadiens sont évidemment minuscules comparés à ceux que courent les civils dans d'autres parties du monde. Comme on l'a déjà mentionné, il y a 110 millions de ces petites horreurs bon marché dans le monde entier et 600 à 800 d'entre elles explosent accidentellement chaque mois, faisant des victimes qui sont à 80 p. 100 des femmes, des enfants et d'autres innocents.

Nous pouvons tous être fiers que le Canada ait fait preuve d'autorité dans le monde en lançant le processus d'Ottawa, qui vise à mettre fin à cette sorte de destruction. Nous pouvons tous être satisfaits que tant de choses aient été accomplies en si peu de temps, que plus d'une centaine de pays aient été convaincus jusqu'à maintenant de signer la convention et que même ceux qui ne sont toujours pas prêts à signer aient été persuadés par l'attention mondiale de cesser les exportations et de commencer à réduire les stocks.

Nous pouvons tous approuver ce projet de loi de mise en oeuvre qui montre l'exemple aux autres pays avec ses dispositions relatives aux missions d'établissement des faits et aux peines pouvant atteindre 500 000 $ ou cinq ans de prison.

Le projet de loi ne réduira pas les possibilités pour nos casques bleus de recevoir une formation appropriée en matière de détection et de neutralisation de mines terrestres. Il n'empêchera pas nos militaires de participer à des activités avec les forces armées de pays qui n'ont pas encore signé la convention, sauf qu'il ne leur permettra pas de participer activement à des activités interdites par la convention.

On s'attend évidemment à ce que le Canada soit le premier pays à ratifier la convention et, lorsque 39 autres pays auront suivi son exemple, la convention entrera en vigueur, comme le sénateur Corbin l'a fait remarquer.

Le ministre des Affaires étrangères a déjà commencé à parler de la prochaine étape, la phase II du processus d'Ottawa, visant à rendre les pays infestés de mines à nouveau vivables et à donner aux victimes des mines la dignité et l'espoir de mener une vie plus productive. J'espère que la série de tables rondes de la semaine prochaine fera des progrès importants dans l'établissement du programme d'action pour atteindre ces objectifs.

Enfin, je m'accorde avec le ministre pour dire que l'année de travail que nous venons de consacrer à la convention a révélé deux choses importantes. D'abord, des petites et moyennes puissances, groupées ensemble par le courage et la conviction, peuvent mener avec succès des campagnes mondiales. Deuxièmement, la société civile peut non seulement avoir un impact direct sur la politique, mais peut aussi l'établir. Les organisations non gouvernementales jouent maintenant un rôle important, et servent même de catalyseur, dans les relations internationales.

Ces deux faits nouveaux constituent des signes d'espoir dans un monde où les différends et les conflits sont monnaie courante. J'espère certes que le ministre poursuivra sur la lancée de ce progrès remarquable pour passer à des entreprises plus grandes et plus fortes. Bien sûr, la première chose à faire consiste à amener le reste des pays à signer la convention. Le processus de mise en oeuvre sera également difficile. Cependant, le ministre songe déjà tout haut à des entreprises plus grandes et plus fortes: l'interdiction de la vente d'armes légères, le démantèlement des arsenaux nucléaires russe et américain, et l'élimination de toutes les armes nucléaires dans le but de faire de l'OTAN une alliance dénucléarisée. Comme on dépense plus de 1 000 milliards de dollars US à l'achat d'armements dans le monde, la tâche est énorme, mais j'espère que ces efforts ne se relâcheront pas et qu'ils trouveront un appui non seulement ici, mais dans le monde entier.

(La motion est adoptée, et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Corbin, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires étrangères.)

Le tarif des douanes

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Michael Kirby propose: Que le projet de loi C-11, Loi concernant l'imposition de droits de douane et d'autres droits, la mise en oeuvre de la Convention internationale sur le Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises et l'exonération de divers droits de douane ou autres, comportant des mesures connexes et modifiant ou abrogeant certaines lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je prends aujourd'hui la parole pour vous inviter à appuyer le projet de loi C-11, qui vise à simplifier le tarif des douanes. Le projet de loi se traduira par des économies de quelque 90 millions de dollars pour les entreprises et les consommateurs canadiens pendant l'année civile 1998, à supposer qu'il soit adopté et entre en vigueur le 1er janvier.

Le projet de loi allège les formalités administratives et améliore l'efficacité. Il abaisse les coûts de production pour les entreprises canadiennes et améliore leur compétitivité tant au Canada qu'à l'étranger. Il a obtenu un large appui à l'autre endroit, et j'espère que l'appui du Sénat ne sera pas moins enthousiaste.

Je voudrais maintenant énumérer les avantages du projet de loi C-11 pour les entreprises canadiennes. Le projet de loi fait diminuer les coûts pour les entreprises canadiennes qui importent des marchandises, et cela, de deux façons. Tout d'abord, il réduit les droits tarifaires. Deuxièmement, il allège le fardeau administratif que les importateurs doivent maintenant porter. La mesure à l'étude propose, pour améliorer l'efficacité administrative, un certain nombre d'initiatives qui ont été mises au point depuis 18 mois par le monde des affaires et le ministère des Finances. Elle est donc une réaction à certaines des pressions de la concurrence que les entreprises canadiennes doivent affronter.

Cela est important parce que le régime tarifaire du Canada est devenu de plus en plus complexe au fil des ans. Il est si complexe que l'Organisation mondiale du commerce a fait des remarques à son sujet.

Il faut viser la simplicité, car on assiste aujourd'hui partout dans le monde à une réduction des droits de douane. L'ALENA et l'Uruguay Round seuls se sont traduits par une diminution de près de 60 p. 100 des droits de douane canadiens moyens après pondération selon le volume des échanges. Dans un monde où les droits de douane continuent de diminuer, la simplification du processus d'imposition des droits de douane et d'importation est importante.

D'une manière significative, le projet de loi C-11 avance au 1er janvier 1998 la plupart des réductions définitives de l'Uruguay Round, qui ne devaient prendre effet qu'en janvier 1999. En outre, il supprime ce qu'on a fréquemment qualifié de droits de douane vexateurs, à savoir ceux qui s'élèvent à moins de 2 p. 100. Il arrondit aussi la plupart des droits de douane au demi-point de pourcentage le plus proche. Les autres droits seront harmonisés et le manque d'uniformité des taux sera corrigé. Toutes ces mesures sont des exemples de la façon dont le projet de loi C-11 va réduire les coûts pour les fabricants et les importateurs canadiens.

De plus, le projet de loi renferme un certain nombre de mesures de simplification qui visent à réduire les tracasseries administratives, à supprimer des règlements sur les droits de douane qui sont devenus obsolètes et à diminuer le fardeau réglementaire en révoquant 300 décrets de remise de droits de douane qui ne sont plus nécessaires.

Le projet de loi est le plus volumineux que j'aie vu depuis mon arrivée au Sénat - il comprend plus de 4 000 pages. À cause de sa longueur, je n'ai pas d'autre choix que d'être bref dans ma présentation. Permettez-moi cependant de vous donner quelques exemples illustrant ce que fait le projet de loi.

Il existe à l'heure actuelle en matière de douane et de droits de douane 12 règlements et 13 dispositions de remise de droits sur certaines marchandises qui sont importées temporairement. Dans le projet de loi, tous ces règlements et dispositions seront remplacés par un seul article tarifaire qui exonère conditonnellement du paiement des droits de douane virtuellement toutes les marchandises qui sont importées temporairement.

Les autres choses apportées par le projet de loi sont simples. Par exemple, il ramène à deux les cinq colonnes actuelles de l'annexe regroupant les dispositions tarifaires, ce qui va certainement les rendre plus lisibles et plus faciles à comprendre.

Côté souplesse, le projet de loi C-11 donne au Cabinet le pouvoir de continuer de réduire, par décret, les droits de douane à l'importation. Il donne au gouvernement la souplesse nécessaire pour réagir efficacement aux pressions de la nouvelle concurrence qui s'exerce sur les entreprises canadiennes. Dans cette veine, le projet de loi donne également au ministre des Finances un pouvoir de trois ans pour corriger les erreurs et omissions qui auraient pu être commises dans la préparation de la nouvelle liste tarifaire.

(1440)

Si des différends surviennent par suite de modifications complémentaires à la Loi sur les douanes, qui sont également prévues dans le projet de loi C-11, on a mis en place un nouveau régime d'appel administratif simplifié à Revenu Canada. Cela permettra aux entreprises non seulement de régler rapidement ces différends, mais aussi d'apporter sur une base routinière des ajustements indépendants qui auraient auparavant fait l'objet d'appels officiels auprès de Revenu Canada, même si les faits n'étaient pas contestés.

Bref, honorables sénateurs, le projet de loi C-11 fait des changements qui rendront notre régime tarifaire plus simple, moins coûteux, plus transparent et plus prévisible.

Comme les sénateurs le savent, sous le régime de l'ALENA, tous les droits de douane avec les États-Unis seront éliminés le 1er janvier 1998. Le milieu des affaires au Canada a fait des démarches sérieuses auprès du gouvernement au cours des deux ou trois dernières années pour lui faire comprendre que le tarif douanier simplifié contenu dans le projet de loi C-11 devait être prêt à entrer en vigueur à la même date que l'élimination de tous les droits de douanes avec les États-Unis afin que la simplification du régime tarifaire coïncide avec la réduction finale des droits de douanes en vertu de l'ALENA.

Depuis avril, Revenu Canada et Statistique Canada travaillent en étroite collaboration avec le milieu des affaires pour assurer une transition simple au nouveau régime. Des procédures administratives et techniques seront mises en place afin que tout se passe bien lorsque les dispositions du projet de loi C-11 entreront en vigueur.

Bien que le projet de loi jouisse d'importants appuis dans le milieu des affaires, il fait l'objet de quelques critiques mineures, venant principalement de fabricants d'automobiles. Ceux-ci s'opposent à la franchise de droits sur les pièces d'automobiles utilisées par les fabricants non-membres du Pacte de l'automobile qui assemblent des véhicules au Canada. Les associations de fabricants d'automobiles canadiens et étrangers ont été invitées à témoigner devant le comité permanent des banques et du commerce pour exprimer leurs vues, dont il sera dûment tenu compte. Il est à noter que, malgré leurs objections, même ces groupes ont dit appuyer les objectifs généraux du projet de loi.

Comme le congé de Noël approche à grands pas et comme il est important pour le milieu des affaires au Canada que ce projet de loi entre en vigueur le 1er janvier, je prie instamment les sénateurs de le renvoyer le plus tôt possible au comité permanent des banques et du commerce. Nous tiendrions sans tarder des audiences sur le projet de loi et ferions rapport de ce dernier au Sénat le plus rapidement possible, étant donné notre ferme intention de voir à ce que cette mesure entre en vigueur le 1er janvier 1998.

Compte tenu de l'importance de cette mesure législative, j'exhorte les sénateurs à renvoyer ce projet de loi au comité permanent des banques et du commerce le plus rapidement possible.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Meighen, le débat est ajourné.)

Le code criminel

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Stanley Haidasz propose: Que le projet de loi S-7, Loi modifiant le Code criminel afin d'interdire la coercition contre une personne à l'égard des actes médicaux qui sont contraires à sa religion ou à sa croyance au caractère inviolable de la vie humaine, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, j'ai le privilège cet après-midi de proposer la deuxième lecture du projet de loi S-7. Je tiens d'abord à remercier mon attaché de recherche et le bureau du légiste du Sénat pour l'aide qu'ils m'ont apportée pour la rédaction de cette importante mesure législative que je présente aujourd'hui.

Le projet de loi S-7 a fait l'objet de la première lecture mercredi dernier. J'aimerais aujourd'hui expliquer le projet de loi et certaines de ses dispositions dans le but de justifier son inscription au Feuilleton.

Le projet de loi S-7 modifierait le Code criminel afin d'interdire la coercition, directe ou indirecte, contre les personnes travaillant dans le domaine de la santé, à qui il incombe plus particulièrement de guérir et de veiller au bien-être des vies humaines qui leur sont confiées.

Au cours des quatre dernières années, j'ai reçu plus de 8 000 pétitions de la part de citoyens canadiens demandant que le Parlement les sorte de la situation difficile dans laquelle ils se trouvent. À l'heure actuelle, ces personnes n'ont aucun moyen de défense légale lorsqu'il est question de leur liberté de conscience, ou de leur droit de refuser de faire un travail qui va à l'encontre de leur religion ou de leur croyance au caractère inviolable de la vie humaine.

J'ai établi ce projet de loi parce que le Code criminel ne contient aucune disposition qui aide ces personnes qui sont des professionnels de la santé et qui cherchent une solution à leurs problèmes particuliers. Comme les honorables sénateurs le savent, le Canada a adopté une nouvelle loi en matière d'hygiène et de sécurité du travail il y a quelques années. Cette loi protège un employé contre tout danger pendant qu'il est au travail, par exemple pendant qu'il utilise un appareil dans le cadre de ses fonctions. Il y a donc un précédent en droit canadien établissant qu'un employé a le droit à la protection de sa santé physique. Le projet de loi S-7 concerne la protection de la santé mentale et de la conscience d'un professionnel de la santé et des préceptes de sa religion.

Puisque, exception faite de la Charte, il n'y a pas de protection légale pour les professionnels de la santé en termes de protection de leur conscience et de leurs croyances religieuses, il convient tout à fait, et il est même impératif, de légiférer pour leur permettre de disposer d'un moyen de recours. C'est surtout le cas dans le domaine des soins de santé, où la valeur de la vie humaine est de plus en plus exposée à de graves compromis et à des doutes.

Dernièrement, un médecin des Maritimes a été accusé du meurtre d'un patient. Un gardien parental a été reconnu coupable du meurtre de sa fille qui, il en était convaincu, était incapable de vivre une vie heureuse. À cause de fermetures d'hôpitaux en Ontario et ailleurs au Canada, le personnel des soins obstétricaux et des services de naissance est obligé de travailler sous une administration commune où des avortements sont effectués. Dans le cas de certains professionnels de la santé, ces circonstances difficiles ne présentent guère plus qu'un défi ou un compromis. Pour d'autres, la juxtaposition pose une menace directe à leur conscience et à la stabilité de leur emploi.

J'ai reçu beaucoup de correspondance qui prouve que les gens sont souvent appelés à vivre des situations fort pénibles, qu'il s'agisse de maladies terminales, d'infertilité, ou même de grossesses imprévues. Sans porter aucun jugement sur la rectitude morale ou les mérites des personnes qui ont vécu ces expériences, je crois qu'elles seraient mieux servies par quelque chose qui puisse les guider quant à leur rôle professionnel et à la primauté de leur conscience face à la vie humaine.

(1450)

L'esprit de cette demande pressante et justifiée cadre bien avec les dispositions de la partie VIII du Code criminel en ce qui concerne la préservation de la vie et l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour fournir les choses nécessaires à la vie. De même, la Charte des droits et libertés expose clairement à l'article 2 les libertés fondamentales que sont la liberté d'expression, la liberté de religion et la liberté de conscience. Même en faisant la promotion d'une certaine pluralité des convictions et des croyances à l'article 15, la Charte autorise le Parlement à adopter des mesures de nature à permettre aux individus et aux groupes défavorisés d'exercer leurs droits fondamentaux.

Honorables sénateurs, je vais maintenant lire un extrait d'une note d'information préparée par Susan Alter, de la Bibliothèque du Parlement, intitulée «Refus de travailler pour des motifs religieux ou moraux» et publiée en 1993:

Une loi établissant le droit de refuser d'effectuer un travail mettant en danger les convictions morales ou religieuses d'un employé et qui pourrait être utilisée pour parer aux menaces que l'on pourrait faire peser sur sa sécurité d'emploi [...]

[...] n'existe pas encore au Canada, d'où la nécessité du projet de loi S-7.

Parmi les signatures que j'ai présentées comme autant de pétitions au Parlement au cours des trois ou quatre dernières années, nombreuses sont celles de mes collègues, des médecins qui ont de plus en plus de problèmes avec les nouvelles règles appliquées dans les hôpitaux, et ce, du fait, entre autres, qu'il n'existe pas à l'heure actuelle une loi interdisant l'avortement, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur d'un hôpital.

De plus, il subsiste encore de l'incertitude quant à savoir dans quelles conditions une intervention médicale peut être criminelle en soi - cette incertitude résultant du fait que, en ce qui concerne l'interruption de traitement ou l'action chirurgicale risquée, il est difficile d'établir hors de tout doute raisonnable que ladite action a été entreprise dans une intention criminelle. Or, il est essentiel d'établir clairement cette preuve, même si elle difficile à acquérir, si l'on veut protéger un innocent. Qui plus est, si l'intention de l'accusé est douteuse, il faut prendre la peine de déterminer si l'action en question enfreint le Code criminel. À l'heure actuelle, cela constituerait dans de nombreux cas une entreprise juridique complexe, coûteuse et de longue haleine.

Dans une situation controversée typique, un professionnel de la santé préférerait ne pas accuser un collègue d'intention criminelle et demanderait à se retirer de l'affaire. Le problème surgit quand, en retour, on subit des conséquences injustes, qui peuvent parfois aller jusqu'à la perte de son emploi.

Honorables sénateurs, n'oublions pas que le projet de loi S-7 crée une nouvelle infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité, et non par voie de mise en accusation. Il ne modifie nullement le droit d'une personne de refuser de participer à une activité criminelle, que ce soit pour prodiguer des soins de santé ou autrement. Il ne fait qu'ajouter que, dans le domaine des soins de santé, la loi interdit la coercition contre une personne à l'égard d'actes qui sont compris comme contraires à sa croyance au caractère inviolable de la vie humaine. Le projet de loi ne dit pas que l'acte auquel refuse de participer le professionnel de la santé doit être criminel, il dit simplement qu'il est interdit de forcer quiconque en mesure de porter atteinte à la vie à participer à un acte qui est contraire à sa croyance, notamment, en l'inviolabilité de la vie.

Comme dans les dispositions législatives sur l'intégrité de la personne et le droit à la sécurité de la personne, selon les termes de l'article 7 de la Charte, ce projet de loi rend inviolables l'intégrité de l'esprit et le droit à une croyance morale particulière, surtout quand les adeptes de cette croyance sont particulièrement désavantagés dans certaines circonstances nouvelles ou exacerbées du domaine de la santé de nos jours.

Le projet de loi S-7 répond aux préoccupations d'un grand nombre d'infirmières et de sages-femmes, de membres du personnel paramédical et de médecins, en se reportant clairement aux motifs précis pour lesquels un professionnel de la santé ne peut pas participer à un acte qui menace la vie humaine. On peut opposer que tout acte médical, par exemple une chirurgie, comporte une menace pour la vie. Cependant, pour ceux qui donnent des soins dans l'intention de guérir et de minimiser le risque de maladie ou de mort, il faut une solide protection contre la coercition de faire le contraire en soumettant délibérément la vie à des risques ou à une destruction qu'on aurait pu éviter.

Au cours des trois dernières années, j'ai déposé des pétitions signées par plus de 8 000 habitants de tout le Canada. J'ai reçu de nombreuses autres pétitions dernièrement et je continuerai de recevoir des lettres de nombreux professionnels de la santé ainsi que de plusieurs groupes d'infirmières et associations professionnelles de médecins, qui répètent qu'il est urgent d'agir, surtout dans la foulée des réformes effectuées partout au pays dans le domaine des soins de santé. La semaine dernière, j'ai reçu une autre pétition des dirigeants d'un groupe d'infirmiers et d'infirmières pro-vie, ainsi que des lettres demandant l'adoption d'un projet de loi comme celui-ci.

Ce projet de loi aide précisément les professionnels de la santé qui font face à de la coercition lorsqu'il appert que celle-ci est exercée afin de les obliger à renoncer à leur conviction concernant le caractère inviolable de la vie humaine, par exemple.

J'invite les honorables sénateurs à prendre en considération ce projet de loi et toutes ses répercussions et à l'examiner objectivement dans le cadre d'un débat public. Je suis certain que le débat éclairera ceux qui dispensent des soins à des êtres humains malades ou fragiles et qu'il leur confirmera qu'ils ont eu raison de demander au Parlement de reconnaître leurs préoccupations profondes et leurs valeurs et de leur accorder la place qu'elles méritent dans une des plus extraordinaires réalisations du Canada, à savoir la prestation à tous de soins de santé empreints de compassion.

J'invite les honorables sénateurs à participer à ce débat et à renvoyer le plus tôt possible le projet de loi au comité sénatorial compétent.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le débat est ajourné.)

Examen de la réglementation

Adoption du premier rapport du comité mixte permanent

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Hervieux-Payette, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Hébert, tendant à l'adoption du premier rapport du comité mixte permanent d'examen de la réglementation (mandat additionnel et dépenses conformément à l'article 104 du Règlement), présenté au Sénat le 6 novembre 1997.-(L'honorable sénateur Kinsella).

Son Honneur le Président: Dois-je comprendre qu'aucun autre sénateur ne veut prendre la parole à ce sujet? En ce cas, je vais mettre la question aux voix.

L'honorable sénateur Hervieux-Payette, appuyée par l'honorable sénateur Hébert, propose: Que le rapport soit adopté.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Finances nationales

Autorisation au comité d'engager du personnel

L'honorable Terry Stratton, conformément à l'avis du 25 novembre 1997, propose:

Que le comité sénatorial permanent des finances nationales soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui sont déférés.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne à 14 heures demain.)


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