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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature,
Volume 137, Numéro 41

Le jeudi 19 février 1998
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 19 février 1998

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur la présence à notre tribune de deux visiteurs de marque, sir Anthony Goodenough, haut-commissaire du Royaume-Uni au Canada, et Lady Goodenough.

Bienvenue au Sénat.

Des voix: Bravo!


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La collecte de sang

L'honorable Eric Arthur Berntson: Honorables sénateurs, je voudrais parler un instant des gens qui nous entourent au Sénat, de ces hommes et de ces femmes qui composent le personnel de soutien et de sécurité. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'ils sont parfaits, mais ils n'ont rien à envier aux meilleurs éléments que l'on trouve aujourd'hui dans la population active.

Par exemple, en novembre dernier, les membres du personnel du Sénat ont organisé le sixième tournoi de quilles annuel de Centraide à Hull. C'était très amusant et, contrairement à d'autres ministères qui ont eu du mal à atteindre leur objectif dans le cadre de cette campagne, le Sénat a dépassé le sien de 50 p. 100.

Par ailleurs, il y a quelques années, je me rappelle, nous avions eu un terrible incendie à Gatineau. Un immeuble d'appartements avait été complètement détruit et plusieurs personnes s'étaient retrouvées à la rue. Beaucoup étaient des mères seules. Le Sénat, avec son esprit de charité bien connu, rassembla en quelques jours argent, vivres et mobilier qui furent tous beaucoup appréciés par les victimes de cette tragédie.

Il y a beaucoup de gens qui donnent généreusement de leur temps, de leurs talents et de leur argent pour diverses bonnes causes, de l'alphabétisation aux troubles d'apprentissage et aux enfants de la rue, jusqu'au célèbre Institut de cardiologie d'Ottawa. Ces activités ont leur appui, non pas pour la gloire, mais par désir d'aider. Ce bénévolat représente ce que sont ces personnes. Nos collègues du Sénat sont actifs non seulement dans la collectivité qu'ils représentent, mais aussi dans la collectivité d'Ottawa. Ces gens, les collègues et le personnel du Sénat, sont nos amis, et je suis fier d'appartenir à ce groupe.

Vous êtes sans doute en train de vous demander ce que je vais réclamer de plus. Votre sang peut-être? En un sens, oui. Nous avons tous lu ou entendu dire, récemment, que des interventions chirurgicales avaient dû être annulées, faute de sang. Nous savons tous que les événements entourant la collecte et la distribution du sang au Canada ont entraîné une désaffection des donneurs. Cela nous donne une nouvelle occasion d'essayer de rétablir la situation.

J'ai parlé à ma collègue, le leader adjoint du gouvernement. Nous avons décidé de faire cette déclaration aujourd'hui, mais ce n'est ni elle ni moi qui avons fait le travail. Ce travail a été fait, une fois de plus, par le personnel de sécurité, par notre personnel, par tous ceux avec qui nous traitons.

(1410)

Tout cela va aboutir, le 2 avril, à une collecte de sang à la salle des peuples autochtones. Nos attentes sont élevées, et je sais que nous atteindrons nos objectifs.

Je remercie tous les gens qui ont travaillé à l'organisation de cette clinique. J'encourage tous mes collègues à rouler leurs manches le 2 avril et à donner de leur sang.

Alors que la stratégie de communications prend forme, je tiens particulièrement à faire de cette collecte de sang l'une des mieux réussies. J'invite les gens de la Bibliothèque du Parlement et de la Chambre des communes et tous ceux qui peuvent nous écouter à participer à cet événement. Nous voulons en faire un grand succès.

Alors que le temps passe et que nous approchons de la date fixée, je voudrais rendre hommage comme il se doit à ceux qui ont organisé cette collecte de sang, qui ont déployé tant d'efforts dans l'ombre, et dont on n'a jamais reconnu officiellement l'apport. Je le ferai un peu plus tard.

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, à l'instar du sénateur Berntson, je voudrais appuyer la collecte de sang qui aura lieu à la pièce 160-S, le 2 avril. Je vais lancer un défi particulier non pas aux sénateurs, mais aux représentants des médias. Ils sont après nous depuis des mois et nous nous sommes dit prêts publiquement à leur donner un peu de notre sang. J'espère qu'en retour, ils donneront un peu de leur sang aux gens d'Ottawa.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais parler brièvement d'un autre sujet, mais s'il me reste un peu de sang le 2 avril, je serai heureux d'être un donneur à ce moment-là.

La Journée de l'alphabétisation

La cinquième réunion annuelle sur la colline du Parlement des groupes de promotion de l'alphabétisation

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Je voudrais attirer l'attention des honorables sénateurs sur l'importance de l'alphabétisation. Je sais que vous reconnaissez tous que grâce aux efforts herculéens de mon ancien leader du gouvernement - ma collègue qui siège maintenant à ma gauche - nous avons été informés quotidiennement et hebdomadairement et, parfois, à chaque heure du jour, l'importance de l'alphabétisation dans nos collectivités et dans notre pays. À cet égard, nous devons beaucoup au sénateur Fairbairn.

Aujourd'hui, sur la colline du Parlement, plus de 50 tuteurs bénévoles, apprenants adultes et professionnels de l'alphabétisation rencontrent des députés et des sénateurs pour les aider à mieux comprendre le rôle de l'alphabétisation et de l'éducation continue dans toutes nos vies. Six groupes nationaux participent à cet effort. Il s'agit du Rassemblement canadien pour l'alphabétisation, d'ABC Canada, du Collège Frontière, de la Fédération canadienne pour l'alphabétisation en français, de la Base de données en alphabétisation des adultes, et de la Laubach Literacy of Canada. Ensemble, ces groupes vont s'assurer que la l'alphabétisation demeure une priorité pour le gouvernement du Canada, pour tous les parlementaires et, en fait, pour tous les Canadiens.

Au nom de tous les honorables sénateurs, notamment tous ceux qui sont parmis nous aujourd'hui et, plus particulièrement, notre collègue, le sénateur Fairbairn, je voudrais remercier tous ceux qui luttent contre l'analphabétisme.

[Plus tard]

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, je me dois de remercier le leader du gouvernement au Sénat, le sénateur Graham, d'avoir si généreusement souligné la cinquième Journée annuelle de l'alphabétisation sur la colline du Parlement. Je souligne également le travail remarquable d'un groupe de personnes, dont certaines se trouvent dans la tribune des visiteurs, qui ont, en un sens, inversé les rôles. Ce n'est pas le Parlement qui a envoyé un message à la population, mais bien cette dernière qui, par la voix de ces promoteurs de l'alphabétisation, a adressé un très important message aux parlementaires. Ils nous rappellent une nécessité élémentaire dans la vie quotidienne de tous les gens: la capacité de lire et d'écrire.

Nous ne pourrions évidemment pas nous acquitter de nos responsabilités en tant que parlementaires si, comme plus de 40 p. 100 de la population adulte canadienne, nous ne savions pas bien lire, écrire et compter.

Les promoteurs de l'alphabétisation présents ici aujourd'hui, des gens qui apprennent et d'autres qui enseignent, sont venus nous livrer un message très important. L'alphabétisation est une condition indispensable à l'exercice de la démocratie. Or, des millions de Canadiens ne peuvent pas exercer leurs droits démocratiques parce qu'ils ne savent pas lire. Tous nos beaux discours et énoncés de politique demeurent inaccessibles à ceux qui sont incapables de les comprendre et de les lire.

Enfin, honorables sénateurs, les Canadiens doivent savoir qu'il se peut que plus de sept millions de leurs concitoyens ne se rendent pas voter aux élections parce qu'ils sont incapables de trouver le bureau de scrutin ou de comprendre la façon d'indiquer leur choix sur le bulletin de vote.

Nous vivons dans une démocratie, une des plus grandes au monde. L'alphabétisation devrait revêtir une importance cruciale pour tous ceux qui veulent servir la démocratie.

Je vous remercie du fond du coeur.

Le port de Saint John, au Nouveau-Brunswick

La réussite de l'année

L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, j'aimerais vous faire part d'une réussite à Saint John, au Nouveau-Brunswick.

L'année 1997 a été une autre année record pour le port de Saint John. Le port de Saint John est le plus occupé de l'est du Canada pour ce qui est du trafic des marchandises. Vingt et un million de tonnes de marchandises y ont transité au cours de la dernière année, par comparaison à 13 millions au port de Halifax et à 19 millions à celui de Montréal.

Des milliers d'emplois directs et indirects dépendent du port et des activités rapportant des millions de dollars en sont également tributaires. Les améliorations apportées récemment aux opérations du port nous ont permis de nous retrouver parmi les ports les plus concurrentiels de la côte Est et le chiffre d'affaires a encore augmenté cette année. Une partie de cette augmentation provient de la décision prise en novembre dernier de prévoir un nouvel arrêt, le seul au Canada, pour les marchandises envoyées au Moyen-Orient et en Extrême-Orient. Un autre élément important a été l'engagement par les industries des exportations et du tourisme de Saint John à travailler ensemble à établir des liens durables.

La Société du port de Saint John a annoncé en janvier qu'elle prévoyait réduire les droits portuaires en 1998. Comme c'est le seul port au Canada qui songe à adopter cette mesure progressive, nous pouvons nous attendre à un volume d'activités encore plus important au cours de l'année qui vient. Le capitaine Al Soppitt, président et chef de la direction de la Société du port de Saint John, croit que cette réduction encouragera un plus grand nombre de compagnies maritimes à utiliser le port de Saint John, mais les droits moins élevés profiteront aussi à tous les exportateurs du Nouveau-Brunswick, puisque la réduction des coûts de transport leur permettra de devenir plus concurrentiels sur le marché international.

Tous ceux qui ont un lien avec le port sont d'avis que le succès enregistré est attribuable à l'équipe des employés. Ceux-ci ont bien des raisons d'être fiers. La revue «Atlantic Progress Magazine» classe la Société du port de Saint John parmi les meilleures sociétés d'État de l'Est du Canada et le port de Saint John comme le meilleur port de la région de l'Atlantique. L'American Association of Port Authorities a également accordé au port de Saint John le prix d'excellence pour 1997 dans la catégorie des communications pour son annonce publicitaire intitulée «A Banner Year».

Je félicite les membres du conseil d'administration, les cadres et les travailleurs de ces installations rentables et efficaces, car à mesure que le port grossira, l'économie de ma propre ville en fera autant.

Les Nations Unies

La mission du secrétaire général à Bagdad, en Iraq

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, aujourd'hui, tout le monde le sait, le secrétaire général des Nations Unies effectue une des plus importantes missions qu'un secrétaire général de cet organisme ait jamais entreprises. Je ne voudrais pas que cette séance se termine sans lui avoir souhaité bonne chance, car un échec n'est pas une perspective très réjouissante pour la communauté internationale et encore moins pour les populations vivant à proximité des sites qui pourraient être bombardés.

Ces dix derniers jours, nous avons exprimé ici notre inquiétude face au manque de données concernant l'analyse des risques liés au fait de bombarder, à partir de quelque altitude que ce soit, des sites contenant des produits biologiques ou chimiques, ainsi que l'impact que cela pourrait avoir, si de tels produits s'échappaient dans l'atmosphère, sur les Iraquiens et les collectivités avoisinantes.

Honorables sénateurs, je suis convaincu que vous voudrez bien joindre vos prières aux miennes dans l'espoir que le secrétaire général des Nations Unies saura mener à bien sa mission à Bagdad.


AFFAIRES COURANTES

Privilèges, règlement et procédure

Présentation et adoption du rapport sur l'article 59 de la Loi sur le Parlement du Canada

L'honorable Shirley Maheu, président du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 1998

Le comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure a l'honneur de présenter son

TROISIÈME RAPPORT

L'article 59 de la Loi sur le Parlement du Canada, S.R., 1985, ch. P-1, telle que modifiée, pose que:

Le Sénat et la Chambre des communes peuvent, au moyen de règles ou d'ordres, prendre des règlements pour renforcer les exigences de la présente loi relatives à la présence de leurs membres respectifs ou aux déductions à effectuer sur l'indemnité de session.

Votre comité recommande ce qui suit:

a) que le Sénat, conformément à l'article 59 de la Loi sur le Parlement du Canada, prenne un règlement intitulé Règlement sur l'indemnité de session du Sénat (suspension) dans la forme présentée en annexe;
b) que l'article 1 du Règlement sur l'indemnité de session du Sénat (suspension) soit adopté en tant qu'article 137 du Règlement du Sénat;
c) qu'il soit donné instruction au greffier d'envoyer dans les deux langues officielles le Règlement sur l'indemnité de session du Sénat (suspension) au greffier du Conseil privé pour enregistrement et publication en vertu de la Loi sur les textes réglementaires.
Respectueusement soumis,

La présidente,
SHIRLEY MAHEU

(Le texte de la pièce jointe figure à l'annexe des Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 463.)

Son Honneur le Président: Quand le rapport sera-t-il étudié?

Le sénateur Maheu: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)g), je propose que le rapport soit adopté immédiatement.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Le sénateur Maheu: Honorables sénateurs, j'ai reçu une lettre que je voudrais lire. Je cite:

Vous trouverez ci-inclus copie d'une lettre du ministère de la Justice, renfermant deux copies dûment timbrées, dans les deux langues officielles, du Règlement sur l'indemnité de session du Sénat (suspension) et avisant que l'instrument a été examiné conformément à la Loi sur les textes réglementaires.

Il conviendrait d'en informer le Sénat lorsque vous aborderez le rapport de votre comité qui recommande l'adoption du règlement.

Si le Sénat décide d'adopter le rapport, le règlement sera immédiatement soumis pour fins d'enregistrement aux termes de la Loi sur les textes réglementaires, entrera en vigueur dès qu'il sera enregistré et sera publié dans la Gazette du Canada.

La lettre est signée par notre légiste et conseiller parlementaire, Mark Audcent.

Son Honneur le Président: Il est demandé qu'on fasse circuler la lettre. Ce sera fait.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je veux soulever une question de procédure. La recommandation b) se lit comme ceci:

que l'article 1 du Règlement sur l'indemnité de session du Sénat (suspension) soit adopté en tant qu'article 137 du Règlement du Sénat;

Notre Règlement prévoit aussi ceci, à l'article 57:

(1) Avis de deux jours doit être donné pour toute motion ayant pour objet:

a) l'établissement, la révocation ou la modification d'une règle;

J'ignore si cela a été porté à l'attention du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, mais je crois que, en adoptant ceci, nous violons l'alinéa 57(1)a) du Règlement. Je suis sûr que nous pouvons contourner cela, mais assurons-nous de suivre correctement la procédure, car nous entrons en terrain inconnu et tout faux pas pourrait nous nuire.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je croyais comprendre que, une fois la permission accordée, il était entendu que les règles sous-jacentes étaient automatiquement suspendues. Je croyais comprendre que, comme le Sénat a donné sa permission, il n'y a plus de problème.

Le sénateur Lynch-Staunton: Non, Votre Honneur, ce n'est certes pas entendu. Tout serait possible dans ce cas. Avec la permission du Sénat, on pourrait suspendre à peu près n'importe quoi. Le Règlement est très catégorique en fait et, si nous voulons adopter le rapport maintenant, je crois que, à moins que les services du greffier, qui sont compétents en la matière, soient de l'avis contraire, il faut présenter une motion visant à suspendre ou à écarter le paragraphe 57(1) du Règlement. Il n'est pas dit ici que nous puissions faire cela.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à la présidente du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure. Madame le sénateur expliquera-t-elle au Sénat comment le comité voit le paragraphe 57(1) du Règlement du Sénat?

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, au lieu de prendre l'affaire en délibéré et de vérifier les règles et les précédents, la solution serait peut-être pour moi de demander s'il y a consentement pour suspendre cet article du Règlement. Le cas échéant, nous pourrions aller de l'avant avec la discussion.

Permission est-elle accordée, honorables sénateurs, de suspendre le paragraphe 57(1) du Règlement?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Un sénateur veut-il prendre la parole au sujet de la motion visant l'adoption du rapport?

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je veux poser une question à la présidente du comité. J'ai parcouru rapidement le rapport dans lequel se trouve la recommandation que notre Règlement soit modifié et, en fait, que le gouverneur en conseil prenne un nouveau règlement d'application de la Loi sur le Parlement du Canada, lequel prévoirait que «lorsque le Sénat suspend un de ses membres», et cetera.

Je comprends l'importance et la portée de cela. Cela s'appliquera à nous tous à l'avenir. Est-ce qu'une autre brique va nous tomber sur la tête? Que fait le comité du cas particulier de notre collègue, le sénateur Thompson?

Le sénateur Maheu: J'ai un autre rapport, que je présenterai dans un moment.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne veut prendre la parole, je vais mettre la motion aux voix.

L'honorable sénateur Maheu, appuyée par l'honorable sénateur Moore, propose: Que le rapport soit adopté maintenant. Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

La situation du sénateur Andrew Thompson-Présentation du rapport du comité

L'honorable Shirley Maheu, présidente du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 1998

Le comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure a l'honneur de présenter son

QUATRIÈME RAPPORT

Conformément à l'ordre de renvoi du 16 décembre 1997, votre comité a examiné la question de l'absence prolongée du sénateur Thompson afin de déterminer si cette absence constitue un outrage au Sénat.

Votre comité s'est réuni le mardi 10 février 1998 et a présenté son Deuxième rapport au Sénat le mercredi 11 février 1998, demandant qu'il soit ordonné au sénateur Thompson de comparaître devant le comité à sa prochaine réunion.

Le 11 février 1998, le Sénat a adopté un ordre demandant au sénateur Thompson de se présenter devant le comité des privilèges, du Règlement et de la procédure le mercredi 18 février 1998 à 19 heures à la salle 160-S.

Le jeudi 12 février 1998, le Sénat a adopté un ordre demandant à votre comité de prendre en considération les délibérations du Sénat du 11 février 1998, de même que son rapport intérimaire, surtout en ce qui concerne la motion d'amendement, et que votre comité soit autorisé à solliciter d'autres avis juridiques relativement au pouvoir du Sénat d'expulser ou de suspendre le sénateur Thompson ou de le priver de son siège au Sénat, de même qu'au pouvoir du Sénat de retenir l'indemnité de session et l'allocation pour frais du sénateur Thompson, indépendamment de sa qualité actuelle de membre du Sénat.

Votre comité s'est réuni à 19 heures le mercredi 18 février 1998. Après avoir examiné attentivement tous les faits, ainsi que les avis juridiques et techniques reçus, votre comité recommande:

1. Que l'honorable sénateur Andrew Thompson soit reconnu coupable d'outrage;

2. Que, cela étant, le sénateur Thompson soit suspendu pour le reste de la session;

3. Que la question de l'indemnité de dépenses, prévue par la Loi sur le Parlement du Canada, soit renvoyée au comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration pour action immédiate.

Respectueusement soumis,

La présidente,
SHIRLEY MAHEU

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

Le sénateur Maheu: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant le paragraphe 58(1)g) du Règlement, je propose: Que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président: Permission accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à l'honorable sénateur Maheu. Nous voudrions savoir à quoi nous en tenir, et les journalistes aussi. Lorsque vous parlez d'action immédiate, faut-il comprendre que cela se passera dès aujourd'hui?

Le sénateur Maheu: Vous avez raison, sénateur Prud'homme, au cours de la séance.

Son Honneur le Président: Effectivement.

(Sur la motion du sénateur Maheu, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

L'ajournement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit au mardi 24 février 1998, à 14 heures.

Son Honneur le Président: Permission accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Affaires juridiques et constitutionnelles

Avis de motion portant autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 24 février 1998, je proposerai:

Que le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à siéger à 15 h 15, le mercredi 25 février 1998, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Régie interne, budgets et administration

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose:

Que le comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration soit autorisé à siéger à 15 h 30 aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: Permission accordée?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

L'Iraq

La découverte de caches d'armes de destruction massive-Des frappes aériennes par opposition aux activités des équipes onusiennes d'inspection des armes-La position du gouvernement

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, dans un communiqué annonçant que le Canada participerait à l'intervention militaire contre l'Iraq, on dit que l'objectif de l'intervention militaire sera de réduire substantiellement la capacité de l'Iraq de produire des armes de destruction massive et de lancer une attaque contre les pays voisins. Il y a deux jours, le président Clinton a tenu sensiblement les mêmes propos:

Nous voulons sérieusement réduire la menace posée par les armes de destruction massive que possède l'Iraq. Nous voulons sérieusement réduire sa capacité de menacer ses voisins.

Ce qui m'amène à ma question, c'est l'emploi des termes «substantiellement» et «sérieusement», qui me laisse perplexe, car, à mon avis, ils sous-entendent qu'en réduisant à un nombre inconnu la quantité d'armes chimiques et biologiques, on éliminera ou, du moins, on atténuera la menace que posent celles qui resteront. Jusqu'ici, les équipes d'inspection onusiennes ont repéré des tonnes d'armes de cette catégorie sur des milliers de milles carrés de désert iraquien et elles ont été détruites.

Le leader du gouvernement au Sénat peut-il expliquer comment des frappes aériennes intenses - et si, par intenses, on veut dire une sortie toutes les 30 secondes en moyenne, comme lors de la guerre du Golfe - sont préférables à des équipes d'inspection des armes, surtout que, pendant la guerre du Golfe, de l'aveu même du Pentagone, 70 p. 100 des sorties de bombardiers ont raté leur cible et que, à cause de cela, un nombre incalculable de civils ont été tués?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais bien, comme, j'en suis sûr, le premier ministre, M. Chrétien, le président Clinton, le premier ministre Blair et tous les autres dirigeants mondiaux, pouvoir garantir un succès total. Lorsqu'on utilise le terme «substantiel», on veut dire substantiel. Je ne crois pas qu'il soit possible d'éliminer entièrement, aussi souhaitable que cela puisse être, ces terribles armes de destruction massive dont l'Iraq dispose actuellement.

Le sénateur Lynch-Staunton: Voilà une réponse type qui montre que la stratégie qu'on élabore risque d'entraîner des répercussions et des réactions que personne ne semble prendre en considération.

Il n'y a pas très longtemps, le président des États-Unis a dit que les équipes d'inspection des Nations Unies, et je cite:

[...] doivent pouvoir effectuer leur travail sans ingérence, afin de trouver et de détruire des armes nucléaires, chimiques et biologiques, et leurs missiles de lancement, et d'empêcher que l'Iraq ne les fabrique à nouveau.
Si le gouvernement du Canada partage cet objectif, le leader du gouvernement au Sénat ne conviendra-t-il pas qu'il sera impossible à réaliser, c'est-à-dire qu'il sera impossible d'envoyer des inspecteurs des Nations Unies sur place, à la suite des frappes aériennes?

(1440)

Il est évident que l'Iraq ne laissera pas entrer les inspecteurs, si nous décidons de bombarder le pays. On peut difficilement penser que nos frappes aériennes atteindront les objectifs proposés. Malgré les contraintes qu'on leur a imposées, les équipes d'inspection des armes ont assez bien réussi leur mission.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je laisse aux spécialistes du domaine le soin de décider des mesures à prendre. Comme l'honorable sénateur le sait et comme le sénateur Kinsella l'a mentionné plus tôt, le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, part pour Paris aujourd'hui. Il s'envolera ensuite vers Bagdad demain. Il informera le Conseil de sécurité du résultat de sa démarche la semaine prochaine, soit le mardi 24 février.

Le secrétaire général a donné une première séance d'information hier devant le Conseil de sécurité au grand complet. Ces représentants ont unanimement appuyé sa visite à Bagdad. Son objectif est de faire respecter les résolutions de l'ONU, mais les détails d'un accord possible avec l'Iraq n'ont pas été dévoilés.

Il vaut aussi la peine de mentionner que les cinq membres permanents ont verbalement avisé le secrétaire général qu'il devait obtenir un «accès total, inconditionnel et absolu à tous les sites ainsi que le respect de toutes les résolutions de l'ONU». Le secrétaire général a accepté que, si jamais l'Iraq violait un accord conclu dans le cadre de sa mission, l'Iraq subirait les conséquences les plus graves.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, voici ma dernière question concernant la visite du secrétaire général et, comme nous l'espérons, sa mission réussie à Bagdad. Les États-Unis ont dit clairement que, même s'ils ont approuvé cette visite, ils réservent leur jugement quant à ses résultats.

Hier soir, au cours d'un débat télévisé à l'Université Ohio State, les secrétaires d'État américains à la Défense et aux Affaires étrangères ont déclaré sans ambiguïté que le gouvernement américain tenait absolument à ce que les résolutions de l'ONU soient respectées à la lettre, sans quoi les frappes aériennes auraient lieu.

Le secrétaire général est allé en Iraq pour tâcher de trouver un compromis, pour tâcher de déterminer si, en édulcorant légèrement les résolutions, on ne pourrait pas parvenir à une entente. À en juger par la façon dont les États-Unis plaident leur thèse, ils ne laisseront pas changer les résolutions d'un iota.

Le gouvernement du Canada croit-il qu'on ne devrait tolérer aucune entrave à l'exercice de la mission des inspecteurs, comme les États-Unis le soutiennent, ou accepterait-il un compromis acceptable à l'Iraq qui éviterait qu'un recours aux frappes aériennes devienne nécessaire?

Jusqu'où le Canada est-il prêt à aller dans la voie du compromis avec l'Iraq, au risque de froisser les États-Unis, pour éviter des frappes aériennes? Les experts militaires nous préviennent de plus en plus que les frappes aériennes n'auront pas pour objet la destruction ou l'élimination complètes d'armes biologiques ou chimiques. Il y a en outre le risque qu'un nombre incalculable de civils, qui souffrent déjà beaucoup des sanctions économiques, soient tués.

Jusqu'où le Canada entend-il suivre les États-Unis dans la voie de la rigidité envers l'Iraq, en sachant que, si des négociations aboutissent à une stratégie de bombardement, nous allons participer, avec d'autres pays, au massacre de civils innocents sans que les bombardements puissent atteindre leur objectif?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, les habitants du monde entier se joignent sûrement à moi pour espérer que la mission du secrétaire général soit couronnée de succès.

Le gouvernement du Canada préfère de beaucoup une solution diplomatique. Cependant, si le recours à la force devient nécessaire, le Canada ne peut, quelles que soient les circonstances, demeurer sur la touche. Si une action militaire devenait nécessaire, elle aurait pour objectif de supprimer la capacité de l'Iraq d'attaquer ses voisins au moyen d'armes de destruction massive.

Le sénateur Lynch-Staunton: L'Iraq le fera de toute façon.

Le sénateur Graham: Je tiens à rappeler aux honorables sénateurs que le Canada n'est pas seul. Ce processus a commencé avec les États-Unis, puis le Canada, et ensuite le Royaume-Uni. De plus, d'autres pays fournissent leur appui: l'Australie, les Pays-Bas, la Belgique, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Pologne, la Hongrie, l'Argentine, l'Allemagne, le Koweït, Oman, l'Espagne et le Portugal. À l'heure actuelle, encore d'autres pays songent à donner leur appui également.

La défense nationale

L'utilisation d'équipement, de vêtements et de matériel désuets par les forces armées-La position du gouvernement

L'honorable Eric Arthur Berntson: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Dans le Ottawa Sun d'aujourd'hui, on apprend l'existence d'une campagne visant à recueillir des tenues de combat d'occasion pour les soldats dépêchés en Bosnie.

Cet été, des soldats se sont présentés à l'entraînement avec des bottes de combat couvertes de ruban gommé. Nos pilotes volent dans des hélicoptères Sea King vieux de 30 ans et plus. Nos marins vont en mer dans des sous-marins obsolètes et nos soldats s'en vont en mission avec des vêtements d'occasion et des bottes couvertes de ruban gommé. S'agit-il là des forces de combat polyvalentes que le gouvernement libéral a promises dans le livre blanc sur la défense de 1994?

L'honorable C. William Doody: À titre de question complémentaire, honorables sénateurs, quel genre d'avion le premier ministre utilise-t-il quand il parcourt le pays, comparativement à nos aviateurs et à nos soldats?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le type d'avion qu'utilise le premier ministre pour ses déplacements, comparativement à celui qu'utilisait son prédécesseur, est bien connu.

En ce qui concerne le genre d'équipement et de vêtements qu'utilisent nos militaires à l'heure actuelle, je ne doute pas que la description du sénateur serait l'exception plutôt que la règle. L'objectif du gouvernement et des dirigeants des forces armées consiste à fournir à nos militaires le matériel le plus à jour possible.

Je comprends ce que le sénateur dit au sujet des hélicoptères. Nous avons déjà annoncé le remplacement de 15 hélicoptères. Le remplacement est en cours, et je ne doute pas que les autres hélicoptères qui sont envisagés seront commandés dans un avenir assez rapproché.

La possibilité d'une frappe contre l'Iraq de la part des pays occidentaux-L'état opérationnel des hélicoptères Sea King

L'honorable Eric Arthur Berntson: Honorables sénateurs, en guise de question complémentaire, nous savons que le NCSM Toronto est en route vers la région du Golfe. Nous avons appris qu'il y avait à bord un hélicoptère Sea King. Nous avons également appris que cet appareil requérait 30 heures d'entretien pour chaque heure de vol. Le NCSM Toronto est certes un fort bon navire, mais la technologie de bord a été conçue en fonction de la capacité de l'hélicoptère embarqué. Nous avons un hélicoptère qui pourrait s'écraser à n'importe quel moment. Il lui faut, à tout le moins, 30 heures d'entretien pour chaque heure de vol.

Existe-t-il un plan d'urgence pour que le navire maintienne son potentiel de combat si le Sea King est incapable de remplir ses fonctions? Des arrangements ont-ils été pris avec les Américains pour embarquer un de leurs hélicoptères à bord du NCSM Toronto? Ce dernier sera-t-il laissé en haute mer pour ne pas nuire aux opérations? Est-ce une autre source d'embarras qui attend les militaires canadiens?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'espère bien que le Sea King à bord du NCSM Toronto est pleinement opérationnel et que sa capacité est maintenue au haut niveau attendu de lui.

(1450)

Quant à la disponibilité d'un appareil de remplacement, je suis convaincu que nos alliés savent de quoi il retourne. Nous réagissons à la situation difficile qui se déroule au Moyen-Orient comme notre allié et ami, les États-Unis d'Amérique, nous l'a demandé.

Je peux vous dire comme complément d'information que le NCSM Toronto fait route vers le Golfe et sort en ce moment du canal de Suez. Il est attendu dans le détroit d'Ormuz le 27 février.

La possibilité d'une frappe contre l'Iraq de la part des pays occidentaux-L'état opérationnel des hélicoptères Sea King

L'honorable Eric Arthur Berntson: Honorables sénateurs, en ce moment, nous n'avons pas d'argent pour payer nos militaires, pas d'argent pour les uniformes, pas d'argent pour les munitions et pas assez de temps pour vacciner notre personnel qui se dirige vers un théâtre d'opérations dans le golfe Persique. Devant de telles défaillances, comment le gouvernement peut-il justifier qu'il va gaspiller au moins un demi-milliard de dollars pour faire l'acquisition d'hélicoptères EH-101? Il n'a même pas encore commandé un seul hélicoptère pour la marine. Comment le gouvernement peut-il justifier un tel comportement?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Berntson conviendra que le gouvernement ne gaspille pas d'argent, mais plutôt qu'il économise des millions de dollars en achetant, selon le processus qu'il a suivi, des hélicoptères EH-101 modifiés.

Pour ce qui est de la vaccination des militaires, je suis convaincu que personne ne tient à semer indûment ou inutilement la panique parmi la population canadienne. Mardi, le ministre de la Défense nationale m'a informé personnellement que, en ce qui concerne les vaccins et les antibiotiques, les autorités médicales des Forces armées canadiennes ont donné l'assurance que nos soldats auraient toute la protection possible.

Le développement des ressources humaines

Les modifications apportées au Régime de pensions du Canada-L'emplacement de l'Office d'investissement-La position du gouvernement

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question concerne les modifications proposées au Régime de pensions du Canada. Comme vous le savez, les membres du comité sénatorial permanent des banques et du commerce se rendent dans toutes les régions de notre pays afin d'étudier l'obligation de rendre compte et la composition de l'Office d'investissement. Au cours de leurs déplacements dans les régions, ils ont constaté que la façon dont l'Office devrait investir ses fonds suscite bien des questions. Dans l'Ouest, en particulier, les gens se demandent s'il ne serait pas opportun que l'Office veille à ce que les fonds soient investis dans les régions. Les Canadiens de l'Ouest craignent que, si l'Office a ses bureaux au centre, à Toronto, on n'investisse les fonds que dans de grandes sociétés canadiennes. Comme les honorables sénateurs le savent, 80 p. 100 des investissements doivent être faits au Canada.

L'autre question qui a été soulevée, c'est celle de savoir si le gouvernement a envisagé d'établir le siège social de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada ailleurs qu'à Ottawa ou à Toronto - en Colombie-Britannique, par exemple, ou dans les Prairies ou le Canada atlantique.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Les honorables sénateurs savent sûrement que le comité des banques fait un travail très utile, comme l'a reconnu le ministre des Finances lorsque nous étudiions le projet de loi C-2, celui sur le Régime de pensions du Canada.

Comme on l'a déjà expliqué à plusieurs occasions en réponse à des questions soulevées par d'autres honorables sénateurs, l'office qui s'occupera des investissements sera indépendant du gouvernement. Pour ce qui est de l'endroit où pourrait être établi le siège social, j'ai pensé à un endroit parfaitement logique, soit quelque part dans l'île du Cap-Breton.

Le sénateur Stratton: Je savais que j'obtiendrais cette réponse. Si je venais de cette région, je voudrais aussi y voir implanté l'Office. Comme je suis originaire de Winnipeg, je souhaite que l'Office ait ses bureaux là-bas. Je suis certain que tous les sénateurs qui viennent de l'extérieur de Toronto ou d'Ottawa voudront aussi accueillir l'Office dans leur région. Comme une bonne partie de l'argent viendra des régions, on devrait prendre en considération l'établissement du siège social de l'Office à l'extérieur de Toronto ou d'Ottawa.

Le sénateur Graham: C'est tout à fait sensé. J'irais même jusqu'à accepter que le siège social soit situé à n'importe quel endroit du Cap-Breton ou de la Nouvelle-Écosse.

Les sciences, la recherche et le développement

Les compressions touchant les budgets des institutions de recherches-L'effet sur les boursiers de recherches post-doctorales-La possibilité de revirement de la politique dans le prochain budget-La position du gouvernement

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, une récente rencontre de l'Association américaine pour l'avancement des sciences, l'AAAS, qui se tenait à Philadelphie, a mis en évidence une autre preuve de la négligence du Canada à l'endroit des sciences et de la recherche scientifique. Un sondage réalisé auprès de 3000 boursiers de recherches post-doctorales canadiens a révélé que bien que ces derniers effectuent la majeure partie du travail dans les laboratoires, ils demeurent sous-payés, surmenés et inquiets de leur avenir. Leur salaire annuel moyen oscille entre 25 000 $ et 35 000 $. Ces chercheurs ne sont pas des étudiants frais émoulus de l'université, mais des travailleurs dans la trentaine. Ce sont nos travailleurs les plus brillants et les mieux formés. Ces chercheurs effectuent certains des travaux les plus importants au Canada tout en tentant de faire vivre leur famille avec un salaire de misère. Certains sont obligés de s'expatrier.

Le Canada a fait des coupes sombres dans les budgets des conseils subventionnaires. Il est le seul pays du G-7 à l'avoir fait. Cette année, le Conseil de recherches médicales, par exemple, pourra dépenser 8 $ par habitant alors que son homologue aux États-Unis pourra dépenser 66 $ par habitant.

Que peut faire le leader du gouvernement au Sénat, en utilisant son influence, car nous savons que c'est ainsi que les choses se font, pour renverser cette tendance? Ensuite, croit-il que le budget de la semaine prochaine renversera la tendance actuelle si dommageable?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis un éternel optimiste. Comme je l'ai déjà dit, j'ai rencontré, au cours des deux dernières semaines, le président du Conseil de recherches médicales, le docteur Friesen ainsi que le docteur Dickson, de l'Université Dalhousie. Je sais qu'ils reçoivent les conseils très éclairés du sénateur Keon, qui est membre éminent du conseil consultatif.

Je puis donner l'assurance aux sénateurs que j'attends le budget de mardi prochain avec beaucoup d'impatience et d'espoir.

Le sénateur Spivak: C'est une réponse très encourageante. Le leader du gouvernement peut-il nous dire si des mesures sont prévues pour éviter à cette catégorie particulière de chercheurs de devoir s'expatrier, et je rappelle aux honorables sénateurs que ce ne sont pas des étudiants mais des chercheurs de niveau post-doctoral.

Selon Statistique Canada, ces travailleurs, qui ont en moyenne 34 ans et détiennent un baccalauréat, auraient un salaire annuel d'environ 40 000 $. Ils font partie de nos plus brillants cerveaux et j'estime qu'ils sont sous-appréciés. J'espère que vous toucherez un mot en leur faveur dans les conversations que vous aurez avec les décideurs du gouvernement.

Le sénateur Graham: Chacun peut entretenir des conjectures ou des espoirs au sujet de ce que pourrait contenir le budget. Même si je le savais, l'honorable sénateur sait qu'il serait tout à fait inconvenant de ma part - et le sénateur Murray m'approuverait - de confirmer ou de démentir quoi que ce soit. Seul le ministre des Finances le sait, et nous attendrons avec impatience ce qu'il a à dire mardi prochain.

Dépôt de réponses à des questions au Feuilleton

L'énergie-La Société du port de Prince Rupert-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 38 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

L'énergie-Travaux publics et Services gouvernementaux-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 49 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

L'énergie-Anciens combattants-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 50 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

L'énergie-Diversification de l'économie de l'Ouest canadien-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 52 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

ORDRE DU JOUR

La Loi sur la Commission canadienne du blé

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Nicholas W. Taylor propose: Que le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, en tant que représentant de l'Ouest du Canada, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé.

La Commission canadienne du blé a une longue et fière tradition de service envers les agriculteurs des Prairies depuis près de 60 ans. Sa force repose sur les trois piliers, ou principes - la commercialisation à comptoir unique, la mise en commun des prix et les garanties de l'État - en vertu desquels les agriculteurs mettent leur grain en commun et la Commission le vend pour eux. Je fais remarquer que cela s'applique uniquement au blé et à l'orge destinés à l'exportation ou à la consommation humaine au Canada. La Commission ne s'occupe pas des parcs d'engraissement.

Pour sa part, le gouvernement fédéral fournit des garanties financières pour les transactions de la Commission, en lui permettant d'exercer ses activités grâce au crédit de l'État, ce qui permet à celle-ci et aux agriculteurs qu'elle représente d'économiser des dizaines de millions de dollars chaque année.

La Commission canadienne du blé jouit d'une excellente réputation auprès de ses clients internationaux. Une étude effectuée par trois éminents économistes agricoles a révélé qu'entre 1980 et 1994, les agriculteurs avaient obtenu en moyenne 13,35 $ de plus la tonne pour le blé vendu par l'intermédiaire de la Commission qu'ils n'en auraient obtenu en le vendant hors du comptoir unique. Cela représente un apport moyen de 265 millions de dollars par année dans l'économie de l'Ouest.

Les clients internationaux qui apprécient la fiabilité d'approvisionnement qu'offre la Commission canadienne du blé et l'excellente qualité du grain que produisent les agriculteurs canadiens sont disposés à payer ces prix plus élevés. Les producteurs de l'Ouest sont les bénéficiaires de ces primes car toutes les recettes de la Commission, une fois défalquées les dépenses d'exploitation, leur sont redistribuées. Pour toutes ces raisons, le gouvernement du Canada appuie une Commission canadienne du blé solide. Pourquoi, alors, la changer?

Le gouvernement a tenu de vastes consultations au cours des dernières années. Tout d'abord, lors d'un vote tenu l'année dernière, les producteurs d'orge se sont prononcés dans une proportion de près des deux tiers en faveur de la conservation de la Commission. Ensuite, le Groupe d'experts sur la mise en marché du grain de l'Ouest a assisté à de nombreuses assemblées publiques et reçu des milliers de lettres, messages par télécopieur et appels téléphoniques des agriculteurs. Le processus englobait également le travail que le comité permanent de l'autre endroit a consacré à ce projet de loi et à celui qui l'avait précédé, le projet de loi C-72. Dans l'ensemble, le gouvernement a appris que la Commission canadienne du blé serait capable de fonctionner plus efficacement si elle avait plus de latitude pour acheter le grain et payer les agriculteurs.

Les agriculteurs ont fait savoir également que, bien qu'ils appuient le principe de la commercialisation à comptoir unique, on pourrait améliorer la Commission canadienne du blé en la rapprochant des agriculteurs et en la rendant plus responsable.

Le gouvernement a répondu en proposant le projet de loi C-4, qui donnera aux agriculteurs de l'Ouest une responsabilité extraordinaire à l'égard du fonctionnement de la Commission canadienne du blé, tout en maintenant essentiellement les trois piliers sur lesquels elle repose.

Ce qui est ressorti le plus clairement de toutes les consultations entreprises, c'est que les producteurs voulaient avoir davantage leur mot à dire dans le fonctionnement de la Commission. D'après les dispositions du projet de loi C-4, la Commission ne sera plus dirigée par un groupe de trois à cinq commissaires nommés par le gouvernement sans consultation, mais plutôt par un conseil d'administration de 15 membres. Les agriculteurs eux-mêmes éliront directement 10 des 15 membres, soit les deux tiers du conseil d'administration, les cinq autres étant nommés par le gouvernement. Les administrateurs élus, qui forment la majorité, seront tenus de rendre des comptes à leurs électeurs relativement à la façon dont ils gèrent les affaires de la Commission canadienne du blé. À la fin, si les producteurs ne sont pas satisfaits des résultats obtenus, ils peuvent toujours changer d'administrateurs aux prochaines élections.

Même si cette réorientation des pouvoirs vers les producteurs aura pour effet de réduire l'influence de l'appareil gouvernemental, le gouvernement canadien continuera, à titre de partenaire, de jouer un rôle dans la gestion de la Commission. Car il reste que le gouvernement nommera cinq administrateurs, dont le président-directeur général. Néanmoins, le gouvernement ne pourra nommer le président qu'après avoir dûment consulté le conseil d'administration. En gros, cette mesure législative exige que le gouvernement et le conseil d'administration en arrivent à un consensus sur la personne qui est la plus apte à diriger la Commission canadienne du blé.

Par le truchement de ces cinq administrateurs nommés, le gouvernement disposera d'une «fenêtre» sur les activités de la Commission canadienne du blé. Cette fenêtre lui permettra de maintenir ses garanties, qui peuvent atteindre six milliards de dollars par an. Il importe, tant que le Parlement conférera des pouvoirs publics à la Commission canadienne du blé, que le gouvernement garde le pouvoir de nommer des administrateurs.

En clair, honorables sénateurs, les administrateurs n'auront aucun statut ni pouvoir spécial. Ils seront choisis en fonction de certaines compétences, compétences dont le conseil d'administration serait peut-être privé sans eux - un peu comme ce qui se fait habituellement dans le secteur privé. Je rappelle que ces administrateurs nommés formeront la minorité.

Ensemble, les administrateurs dirigeront les activités et les affaires de la Commission canadienne du blé et définiront ses orientations stratégiques. Ils auront accès, sans exception, à l'ensemble des données sur les ventes et les finances de la Commission canadienne du blé. De façon plus précise, ils pourront examiner les prix de vente, les bonifications obtenues et tous les frais d'exploitation, et déterminer si la Commission est vraiment efficace.

Les administrateurs pourront également, s'ils le jugent bon, communiquer tous ces renseignements aux détenteurs de carnets de livraison. Ils détermineront quels sont les moyens à prendre pour garantir la confidentialité commerciale, pour protéger la position de vente de la Commission, et quels sont les renseignements qui peuvent être divulgués en ce qui concerne les rémunérations des employés ou le chiffre d'affaires, qu'il s'agisse de données actuelles ou chronologiques.

Comme ils sauront tout de la CCB et de ses concurrents à l'échelle mondiale, si les administrateurs ne sont pas contents du mode de fonctionnement ou de la procédure en vigueur, ils pourront apporter les changements qui s'imposent pour améliorer le rendement de la CCB. Ils choisiront un président parmi eux et fixeront leur propre salaire ainsi que celui du président. Les administrateurs pourront évaluer chaque année le rendement du président et recommander, au besoin, son congédiement.

Outre que la Commission canadienne du blé devra rendre davantage de comptes aux agriculteurs, par l'intermédiaire du conseil d'administration, le projet de loi C-4 donnera à la Commission la souplesse dont elle a besoin dans le contexte moderne du commerce mondial, avec ses changements rapides et sa forte concurrence. Par exemple, elle pourra faire des achats de blé ou d'orge au comptant, rajuster rapidement les acomptes à la livraison, c'est-à-dire dès que les conditions du marché le permettront et sans avoir à attendre l'autorisation du gouvernement, et effectuer des paiements forfaitaires anticipés de livraisons en commun avant la fin de la campagne agricole. Les administrateurs seront libres d'utiliser ces nouveaux moyens selon leur bon jugement, quand ce sera avantageux pour les agriculteurs.

Pour s'assurer contre les pertes que pourrait entraîner le recours à ces trois nouveaux moyens, et seulement celles attribuables à ces moyens, le projet de loi C-4 permettrait la création d'un fonds de réserve. Il appartiendrait ensuite au conseil d'administration, formé de membres élus par des agriculteurs dans une majorité des deux tiers, de décider quand et comment créer ce fonds de réserve. Quoi qu'il en soit, le gouvernement du Canada continuera de garantir les acomptes à la livraison versés au début de la campagne agricole, ainsi que les ventes à crédit et les emprunts généraux de la CCB.

Finalement, le projet de loi C-4 permet l'ajout de n'importe quel grain au mandat de la Commission, ou son exclusion. En ce moment, c'est une importante pomme de discorde. Le processus d'inclusion d'un grain - autrement dit l'ajout d'un grain au mandat de vente à guichet unique de la Commission - ne peut être mis en branle qu'au moyen d'une demande écrite présentée par une association légitime dont les membres sont tous producteurs de ce grain. Je veux que ce soit bien clair: aucun groupe minoritaire faisant bande à part ne pourrait exiger l'inclusion d'un grain, et ni le gouvernement ni la CCB ne pourrait le faire. La disposition d'inclusion ne pourrait être invoquée que pour les cultures qui répondent actuellement à la définition de «grain» dans la loi actuelle sur la CCB, soit l'avoine, le lin, le seigle et le canola.

La demande devrait avoir fait l'objet d'une annonce publique prévoyant un délai d'au moins 120 jours pour laisser à la communauté agricole et à d'autres intéressés le temps de réagir. Le conseil d'administration de la CCB examinerait ensuite la demande. Les administrateurs devraient prendre en considération toutes les conséquences d'une telle mesure, dont les coûts de l'inclusion, les conséquences pour le commerce ou les pratiques commerciales et les réactions du public.

Si les administrateurs finissaient par accepter la demande d'inclusion, et ce serait la deuxième étape du processus, leur décision devrait alors être ratifiée par les producteurs du grain en question au moyen d'un vote démocratique. Tout le processus, du début à la fin, devrait être transparent et entièrement régi par les agriculteurs. L'existence d'une disposition d'inclusion ne modifie pas, en soi, le mandat de la CCB. Cette disposition institue simplement une procédure claire pour les nouveaux producteurs désireux d'utiliser les services de la Commission pour la mise en marché de leur grain.

Pour des raisons d'équité et d'équilibre, tout type de blé ou d'orge pourrait aussi être exclu du mandat de la Commission. Cette disposition ne vise pas uniquement l'inclusion d'un grain; elle fonctionne dans les deux sens. Pour avoir une exclusion, il faut tout d'abord l'unanimité des membres du conseil d'administration et il faut aussi un système acceptable qui permette de séparer, au cours de la manutention, le grain exclu du grain confié à la Commission canadienne du blé. Finalement, si les administrateurs sont d'avis que la quantité de grain à exclure est importante, il faut tenir un vote parmi les producteurs.

Honorables sénateurs, les opposants de l'inclusion et de l'exclusion ont exprimé bien fort leurs critiques. Qu'ils se rassurent. Le processus visant à inclure ou à exclure des récoltes est équilibré et transparent. Ces dispositions ne permettront que ce que la majorité des producteurs décidera. La décision reviendra aux agriculteurs, comme il se doit.

La Commission canadienne du blé a un chiffre d'affaires de 6 milliards de dollars par année et vend à plus de 70 pays au monde. C'est l'un de nos dix plus grands exportateurs et les recettes en devises étrangères qu'elle nous rapporte sont parmi les plus importantes.

Le début d'un nouveau siècle, que nous verrons dans un peu moins de deux ans, constituera un tournant pour cet organisme fondé en 1935 par l'honorable Richard Bedford Bennett, un grand conservateur de Calgary. Le gouvernement est résolu à ce que le Canada soit prêt à tirer profit de toutes les occasions qui se pointent à l'horizon. La présence de la Commission canadienne du blé, opérant selon les mêmes bases solides mais dotée des options dont elle a besoin pour être efficace dans l'environnement international très dynamique et très concurrentiel d'aujourd'hui, nous permettra de relever le défi.

J'appuie le projet de loi C-4 et j'exhorte mes collègues à faire de même.

(Sur la motion du sénateur Gustafson, le débat est ajourné.)

Privilèges, règlement et procédure

La situation du sénateur Thompson-Adoption à la majorité du quatrième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du quatrième rapport du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, présenté au Sénat plus tôt aujourd'hui.

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je propose: Que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, la présidente du comité a-t-elle l'intention d'aborder le rapport?

Le sénateur Maheu: Honorables sénateurs, le règlement a été signé par le greffier du Conseil privé, ce qui nous donne la permission de renvoyer la question au comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, qui se réunira bientôt. Cela confirme que le règlement sera publié dans la Gazette du Canada.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, la présidente du comité a-t-elle l'intention d'aborder le quatrième rapport?

Le sénateur Maheu: J'attendrai le dépôt du rapport du comité de la régie interne, qui ne devrait pas tarder.

Le sénateur Murray: Naturellement, je m'en remets aux leaders des deux côtés, s'ils désirent l'ou ou l'autre intervenir au sujet du quatrième rapport.

Le sénateur Lynch-Staunton: Nous voulons savoir ce qu'il en est.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): La présidente du comité va-t-elle nous fournir des explications?

Le sénateur Murray: J'ai demandé si la présidente avait l'intention d'intervenir. Elle a répondu non. Je m'en remets aux leaders des deux côtés et aux membres du comité, s'ils peuvent nous éclairer. Autrement, je prendrai simplement part au débat, si débat il y a.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la motion dont nous sommes saisis peut faire l'objet d'un débat. Si personne ne désire participer au débat, je mettrai la motion aux voix.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, essentiellement, le rapport dit que l'honorable sénateur Thompson est coupable d'outrage au Parlement, qu'il est suspendu pour le reste de la session et que la question de son allocation pour frais est renvoyée au comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration. Honorables sénateurs, je vais voter pour l'adoption du rapport, parce qu'il est évident qu'on aurait dû depuis longtemps prendre des mesures au sujet de notre collègue, le sénateur Thompson et parce que j'accepte, car je n'ai pas d'autre choix, la garantie selon laquelle il est implicite dans le rapport du comité que nous pouvons nous appuyer sur de solides bases juridiques et constitutionnelles pour prendre les mesures que nous sommes sur le point de prendre, semble-t-il. Dans la négative, nous allons certes passer pour de grands imbéciles dans quelque temps d'ici.

C'est certes une occasion historique. Nous établissons tout un précédent. Jamais, dans les 130 années d'histoire de notre institution, une chose de ce genre ne s'est produite. Pourquoi faisons-nous cela? À mon humble avis, la source du problème réside dans l'article 31 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, qui dit ceci:

Le siège d'un sénateur deviendra vacant dans chacun des cas suivants:

1. Si, durant deux sessions consécutives du parlement, il manque d'assister aux séances du Sénat;

(1520)

Jusqu'à maintenant, notre collègue, le sénateur Thompson, a réussi à sauver son siège en respectant la lettre de cette disposition. Il s'est, en effet, présenté une fois tous les deux ans afin d'être présent à une occasion durant une session.

Cette disposition de la Loi constitutionnelle de 1867 a été édictée à une époque où les sessions du Parlement duraient quelques mois. J'ai pris la peine de faire un retour en arrière. À l'époque, pendant une longue période de l'histoire de notre Parlement, il y avait cinq ou six sessions durant chaque législature de quatre ou cinq ans. Les sessions duraient parfois aussi peu que deux mois, cinq mois ou six mois. Ce n'est qu'à partir de la Seconde Guerre mondiale qu'une session a commencé à durer jusqu'à 12 mois et, dans un cas, 14 mois.

Ce n'est que depuis peu que les sessions durent plus de 12 mois. Durant la 32e législature, entre 1980 et 1984, une session a duré trois ans et sept mois, et durant les 33e, 34e, et 35e législatures, nous avons eu des sessions durant deux ans et plus. Ainsi, un sénateur comme le sénateur Thompson respecte la loi en se présentant ici une fois tous les deux ans.

Honorables sénateurs, il me semble que la solution à cette situation, du moins à l'avenir, consiste à apporter une modification constitutionnelle à l'article 31 de la Loi constitutionnelle de 1867. Je ne suis pas un expert, mais je pense que nous pourrions modifier cet article de la Constitution grâce à une résolution constitutionnelle du Sénat et de la Chambre des communes. À mon humble avis, nous n'aurions pas besoin de l'appui de sept provinces représentant 50 p. 100 de la population pour modifier l'article 31. En d'autres termes, nous pourrions le modifier en ayant recours au mode de révision de la Constitution du Canada figurant à l'article 44 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui dit:

Sous réserve des articles 41 et 42, le Parlement a compétence exclusive pour modifier les dispositions de la Constitution du Canada relatives au pouvoir exécutif fédéral, au Sénat ou à la Chambre des communes.

Si j'ai raison - et il appartiendrait au gouvernement de décider si cette opinion est bien fondée - j'inviterais le leader du gouvernement au Sénat à consulter ses collègues du Cabinet, ainsi que les sénateurs, pour nous saisir rapidement d'une résolution tendant à modifier l'article 31 de la Constitution. Nous pourrions stipuler qu'un sénateur doit assister à un certain pourcentage des séances à chaque session. J'ignore ce que les sénateurs ou les Canadiens jugeraient équitable comme proportion, mais disons que ce pourrait être 50, 60 ou 65 p. 100. Je m'en remets aux consultations et aux discussions.

Il me semble que la solution consiste à modifier l'article 31 de la Loi constitutionnelle. À mon avis de profane, il est possible de modifier cette disposition par simple résolution des deux Chambres sans qu'il faille obtenir l'assentiment des provinces.

Je le répète, nous établissons un précédent de taille. Je ne saurais prévoir à quelles fins ce précédent pourra servir à l'avenir, mais j'espère vivre assez longtemps pour le voir. La question mérite réflexion. Si nous décidons de faire ce qui est proposé ici, nous devrions au moins le faire avec dignité et un certain décorum. J'espère donc que ce rapport fera l'objet d'un vote inscrit. Dans les circonstances, j'estime que tous les sénateurs devraient se prononcer pour ou contre le rapport, même s'il y a unanimité, ce qui n'est pas impossible.

Je crois savoir que c'est ce qui est prévu. Sinon, j'espère qu'au moins un autre sénateur se lèvera avec moi, le moment venu, puisqu'il faut deux sénateurs pour demander un vote inscrit. Peu m'importe que nous votions cet après-midi ou à notre prochaine séance, mardi. Il serait peut-être un peu exagéré de dire que nous avons attendu 30 ans pour régler ce problème, mais nous avons certes attendu longtemps.

Mon collègue, le sénateur Ghitter a fait état, mercredi de la semaine dernière, des présences du sénateur Thompson depuis 1984. Selon des articles que j'ai lus dans les journaux et qui me paraissent véridiques, le sénateur Thompson aurait assisté à 47 séances en 30 ans. Honorables sénateurs, nous devons tous des excuses aux Canadiens et au Parlement. Nous sommes les gardiens de l'une des deux Chambres, et nous avons fait preuve de négligence. Je siège depuis 19 ans, et j'aurais pu à tout moment intervenir pour attirer l'attention sur un problème que nous connaissions tous, soit l'absentéisme flagrant de notre collègue. D'autres siègent depuis plus longtemps que moi et d'autres encore sont là depuis trois, cinq, huit, dix ans. Aucun d'entre nous n'a soulevé la question en public, parce que cela ne se fait pas. Nous sommes coupables de traiter le Sénat comme un club au lieu de faire notre devoir comme l'une des deux Chambres du Parlement.

Les médias nous ont forcés à agir. Ils ont dévoilé cette situation. Il est mortifiant que nous n'ayons agi que sous la contrainte des médias, mais c'est ce qui s'est produit. Si je puis me permettre de juger, je crois que nos collègues d'en face sont les plus coupables, car la tradition parlementaire veut que ces questions soient abordées d'abord au caucus de la personne en cause.

[Français]

Notre amie, le sénateur Lavoie-Roux, ex-présidente du comité de la régie interne, des budgets et de l'administration, a tenté à plusieurs reprises de persuader ses collègues de ce comité de se pencher sur cette sérieuse question de l'absentéisme au Sénat.

La même tentative a été faite par le sénateur Robertson, ex-présidente du comité des privilèges, du Règlement et de la procédure du Sénat. Nos amis d'en face leur ont accordé une fin de non-recevoir. Pas question d'en discuter!

[Traduction]

Gardons cela secret.

(1530)

Honorables sénateurs, ayant été ici 19 ans, je dois dire que je suis aussi coupable que quiconque, sinon plus, pour n'avoir pas rendu cette affaire publique plus tôt. Je pense qu'une bonne dose d'humilité de notre part serait plus séante que la fausse indignation et la vindicte dont font état les médias depuis quelque temps. J'espérais qu'il y aurait une explication. J'espère que quelqu'un pourra m'éclairer en ce qui concerne les fondements juridiques et constitutionnels de ce que nous nous apprêtons à faire.

Dans la mesure où nous serons sur un terrain solide, je voterai en faveur du rapport et, comme je l'ai dit, je m'excuse auprès de la population canadienne de ne pas avoir soulevé cette affaire publiquement auparavant.

Des voix: Bravo!

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, c'est effectivement une occasion historique et solennelle. Nous avons pris une décision en comité et nous demandons maintenant à la Chambre de l'approuver. C'est une chose que notre institution n'a jamais faite auparavant. Hier soir, j'ai assisté à la réunion du comité à la place d'un sénateur malheureusement malade.

On nous demande de répondre à des questions concernant notre pouvoir; des questions d'outrage; des questions de précédents; des questions qui, comme le disait le sénateur Murray, nous amènent à nous demander quelle sera la suite.

Les avis juridiques donnés aux membres du comité lors des réunions de la semaine dernière et d'hier soir étaient unanimes en ce qui concerne l'outrage. Ils disaient que le fait de ne pas répondre à un ordre direct, et répété, du Sénat était effectivement un outrage. Certains étaient aussi d'avis que l'outrage était et pouvait être retenu si quelqu'un jetait le discrédit sur l'institution. Le comité a jugé que le sénateur Thompson était coupable d'outrage à l'institution.

Puis, la tâche difficile a été de déterminer ce qu'il fallait faire devant un tel outrage. Nous avions le choix entre trois options. Nous devions justifier chacune d'elles et déterminer si nous avions le pouvoir de les appliquer. Manifestement, nous avions le pouvoir de blâmer l'intéressé ou de le réprimander, de le convoquer devant le Sénat et de le faire réprimander par le Président, mais les sénateurs s'entendaient tous pour dire que cette option ne convenait pas.

À l'autre extrême, si l'on veut, nous devions nous demander si nous avions le pouvoir d'expulser le sénateur Thompson du Sénat. Sur ce point, les experts constitutionnels étaient divisés à deux contre un. Notre propre conseiller juridique, Mark Audcent, estimait que non. Cette opinion très ferme était appuyée par M. Finkelstein, qui a également déclaré que nous n'avions pas ce pouvoir. Selon leur thèse, si je peux la résumer brièvement, bien que nous ayons reçu nos pouvoirs de la Grande-Bretagne et qu'ils soient censés être les mêmes que ceux qui ont été conférés à la Chambre des communes - la Chambre des communes, tant en Grande-Bretagne qu'au Canada, a le droit d'expulsion - des limitations explicites étaient imposées sur nos pouvoirs. Ces limitations explicites avaient été insérées dans l'article 31 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Cet article énonce les circonstances dans lesquelles un siège devient vacant.

On présume qu'expulser un sénateur signifie créer une vacance, et ils étaient d'avis que le premier cas entraîne l'autre. Ils nous ont dit ensuite que, aux termes de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, nous ne pouvions créer une vacance que si, durant deux sessions consécutives du Parlement, il n'assistait pas aux séances du Sénat, il prêtait un serment d'allégeance à une puissance étrangère, il était déclaré failli ou insolvable, il était coupable de trahison ou condamné pour forfait, ou il avait cessé d'être admissible relativement à la propriété ou à la résidence.

Nous n'avons pas pu déterminer de manière satisfaisante que l'une ou l'autre de ces cinq conditions avaient été violées. Par conséquent, nous ne pouvions pas conclure que le siège était devenu vacant. Selon eux, nous ne pouvions donc pas l'expulser.

L'autre option qui s'offrait à nous, c'est celle qu'a retenue le comité hier soir. Il s'agissait de la suspension. Tous les conseillers juridiques ont convenu que le Sénat avait le pouvoir de suspension et que, en outre, nous avions le droit de contester l'indemnité de session prévue dans le paragraphe 59(1) de la Loi sur le Parlement du Canada. Cette loi prévoit que le Sénat ou la Chambre des communes ou les deux ont le droit de rendre plus strictes les conditions en vertu desquelles une indemnité parlementaire peut être accordée. Les deux Chambres pouvaient le faire en adoptant une motion, laquelle deviendrait ensuite un règlement.

C'est, essentiellement, ce que nous avons fait hier soir en comité. Nous avons cherché à savoir quel genre de règle ou de règlement serait requis et si une telle règle ou un tel règlement existait déjà. Nous nous sommes ensuite demandé si le sénateur Thompson, en cas de suspension, serait assujetti à ce règlement. C'est pourquoi deux rapports ont été présentés aujourd'hui. Le premier rapport a créé la règle. Le deuxième rapport a assujetti le sénateur Thompson à la règle par suite de sa suspension du Sénat.

Il ne fait pas de doute qu'il reste des points à discuter quant à la question de l'expulsion, mais la majorité d'entre nous étions convaincus hier soir. Sauf erreur, un sénateur s'est abstenu et un autre a voté contre. La majorité des membres du comité, représentant les deux partis, après mûre réflexion, a décidé que, selon ce que la loi nous permet, nous pouvons tout au plus suspendre le sénateur Thompson et que nous avions fait, à notre avis, tout ce que la loi nous permettait de faire et tout ce que nous avions le pouvoir de faire.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à madame le leader adjoint du gouvernement. Je la remercie infiniment du rapport complet qu'elle nous a donné sur les travaux d'hier soir. Nous n'avons pas de compte rendu des délibérations du comité. J'en savais très peu, si ce n'est l'issue de la réunion.

En ce qui concerne la question de l'outrage, nous avons tous déjà entendu parler de l'outrage au Parlement, mais c'était toujours par rapport à quelqu'un de l'extérieur du Sénat ou de l'autre endroit que l'on accusait d'outrage au Parlement pour une raison ou une autre. Les conseillers juridiques et constitutionnels de votre comité ont-ils fait une distinction ou mentionné un précédent quant à la possibilité d'accuser un parlementaire d'outrage au Parlement?

(1540)

J'ai aussi une question sur la déclaration du leader adjoint selon laquelle des actes susceptibles de jeter le discrédit le Sénat pourraient être considérés comme un outrage au Parlement.

Madame le leader adjoint du gouvernement et d'autres honorables sénateurs ne pensent-ils pas que le fait de jeter le discrédit sur le Sénat est une question subjective? Au cours des 19 dernières années, il se peut qu'on m'ait accusé de cela moi-même. J'ai pu accuser d'autres sénateurs de la même faute. Toutefois, a-t-on sérieusement examiné la solution qui consistait à voter majoritairement pour déclarer qu'un sénateur jetait le discrédit sur le Sénat et qu'il devait donc être suspendu?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, comme on le verra dans le compte rendu des délibérations du comité, ceux qui étaient présents à la séance d'hier soir ont insisté beaucoup sur l'outrage que représente le refus de se soumettre à un ordre direct de l'institution.

Bien sûr, l'avocat nous a fourni d'autres motifs de suspension, notamment le manque de respect à l'endroit du Sénat. Cependant, selon les membres présents à la séance du comité, et selon la confirmation du conseiller juridique qui a comparu, l'outrage le plus manifeste était le fait que le sénateur Thompson avait désobéi à un ordre direct du Sénat.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, je voudrais poser une question à madame le leader adjoint du gouvernement.

Sauf erreur, le règlement adopté plus tôt par le Sénat a été examiné conformément à l'article 59 de la Loi sur le Parlement du Canada ou en vertu des procédures prévues par la Loi sur les textes réglementaires. Le leader du gouvernement a eu la délicatesse de nous remettre copie d'un document signé déclarant que la question avait été examinée par le Conseil privé, conformément à cette procédure.

À la dernière page des documents que nous a communiqués le leader du gouvernement, on peut lire que le règlement sera publié dans le numéro 5, volume 132, du 4 mars de la Gazette du Canada.

Ma question est la suivante: est-ce que la Loi sur le Parlement du Canada ou la Loi sur les textes réglementaires exigent que le règlement en question soit promulgué avant d'entrer en vigueur?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, si je ne m'abuse, la réponse à la question est «non». Le règlement entre en vigueur aujourd'hui, mais il doit ensuite être publié.

L'honorable Ron Ghitter: Honorables sénateurs, tout d'abord, je tiens à féliciter le sénateur Carstairs qui nous a bien décrit ce qui s'est passé hier soir. Je voudrais aussi féliciter la présidente et les membres du comité. Même si je ne fais pas partie du comité, j'ai assisté aux délibérations et j'ai trouvé que la présidente avait agi de façon appropriée et professionnelle. On a posé des questions astucieuses et pertinentes qui ont certes fait ressortir la difficulté de la décision que les membres du comité ont dû prendre hier soir.

Honorables sénateurs, les questions dont nous débattons ne sont pas faciles. Comme l'a déclaré le sénateur Murray, nous sommes en terrain inconnu. Nous sommes en train de créer cet après-midi un précédent, d'adopter quelque chose qui n'a jamais été appliqué, essayé ni soulevé dans toute l'histoire du Sénat. Ce n'est pas une chose qu'il faut prendre à la légère.

Chaque fois que nous nous posons en juges de nos pairs ou de nos collègues, chaque fois que nous agissons en tant que tribunal de dernier recours ou d'autorité de quelque nature, nous devons prendre les choses très au sérieux et nous devons aussi nous préoccuper de notre responsabilité publique, aussi gonflée soit-elle par des médias trop indulgents, qui exige certes toute notre réflexion et que nous devons assumer de la manière la plus claire possible.

En prenant cette décision, nous devons aussi tenir compte des privilèges de notre institution. Les pouvoirs et les privilèges d'une institution parlementaire ne sont pas à prendre à la légère. Les pouvoirs conférés aux Chambres du Parlement et aux assemblées législatives sont des pouvoirs qui remontent à la Grande Charte. Ce sont des pouvoirs pour lesquels des gens ont lutté et sont morts. Ce sont des pouvoirs qui sont inhérents à cette institution et il importe que nous nous assurions de garder les pouvoirs et les privilèges qui sont les nôtres.

Un des privilèges dont nous jouissons dans le processus parlementaire est le privilège ultime d'expulser un sénateur qui jette le déshonneur et le discrédit sur le Sénat et qui fait fi des exigences et des ordres de l'institution.

J'ai écouté attentivement, hier soir, les avis juridiques. Je me suis efforcé de puiser dans les connaissances juridiques que j'ai en la matière, quelles qu'elles soient. Consultez deux juristes et vous obtiendrez deux opinions différentes. Pour avoir pratiqué le droit pendant 25 ans, je connais la nature de l'argumentation et la nature de la préoccupation et je sais comment conseiller un client. Les bons avocats donnent des conseils parce que c'est leur travail.

Quels sont les recours dont dispose le sénateur Thompson, quelle que soit la décision que nous allons prendre? Nous ne devons pas considérer seulement ce que nous allons faire, mais aussi les recours qui s'offrent au sénateur - ou, dirons-nous tout à l'heure, de monsieur - Thompson, compte tenu de la position dans laquelle il nous a mis et de la position dans laquelle il s'est mis lui-même.

Hier soir, j'ai demandé au témoin qui a comparu devant le comité, M. Finkelstein, qui s'est merveilleusement bien exprimé et qui s'est montré un constitutionnaliste compétent, quels étaient les recours du sénateur Thompson si nous devions l'expulser du Sénat. Autrement dit, le sénateur a-t-il des recours devant les tribunaux? La réponse, comme ceux qui étaient là hier soir peuvent le confirmer, est que le recours doit être intenté devant le Sénat. Les tribunaux refuseraient de se prononcer sur la question et ils ne doivent pas se prononcer sur ce que nous faisons, car nous sommes maîtres de nos travaux et de nos membres. Il n'appartient pas aux tribunaux de décider.

Nous sommes le tribunal ultime au Canada. C'est nous qui adoptons les lois du pays. Il n'appartient pas aux tribunaux de venir dire au Sénat qu'il s'est trompé. Si le sénateur Thompson désire se présenter devant nous, il peut le faire. On nous a dit hier soir que le recours, pour lui, c'est d'entrer en communication avec le Sénat pour se faire entendre.

J'ai ensuite examiné le pouvoir de suspension. Je n'ai aucune objection à ce que le sénateur Thompson soit suspendu. Cependant, que se passera-t-il si nous le suspendons? S'il ne démissionne pas, le problème reste entier. Imaginez que la session est prorogée et que, comme cela se produit normalement tous les deux ans, il se présente au Sénat au moment de la lecture du discours du Trône, disons en mars, que faisons-nous?

Pour déclarer alors qu'il commet un outrage au Sénat s'il est à son fauteuil, y reste et est présent, nous devons trouver un nouveau motif sérieux. Quel pourrait être ce motif? Il pourrait être difficile d'en trouver un. Cela signifie-t-il que le sénateur Thompson pourrait siéger au Sénat jusqu'à 75 ans, soit en décembre 1999, après avoir été suspendu?

Pensez-vous que nous ne serions pas ridiculisés au Canada si cela se produisait?

(1550)

J'ai fait un pari avec le sénateur Gigantès, qui a dit que le sénateur Thompson démissionnerait dans une semaine. Nous avons remis chacun 3,25 $ au greffier. Mais qu'arrivera-t-il s'il ne démissionne pas? Je me demande ce qui arrivera s'il dit au Sénat: «Désolé, sénateurs. Je vais attendre. Je ne prendrai pas ma retraite» - même si ce serait une bonne décision du point de vue économique - «parce que je suis au Mexique, le coût de la vie est bas ici, la tequila est bonne, et je vais simplement continuer ainsi. Je vais rester au Mexique et je retournerai au Canada la prochaine fois. Je ne prendrai pas ma retraite maintenant. Je vais prendre les 10 000 $.» Je doute fort que le comité de la régie interne puisse, d'un coup de baguette magique, lui enlever les 10 000 $, et je doute fort que M. Audcent, qui nous a donné son opinion hier soir, soit d'avis qu'on puisse lui enlever les 10 000 $. Je dirais que nous courrions des risques si nous tentions une telle manoeuvre.

Et si M. Thompson disait: «Je vais prendre les 10 000 $ et attendre jusqu'en décembre 1999 pour prendre ma retraite». Que ferions-nous alors? La décision de suspendre le sénateur Thompson ne règle pas le problème de façon définitive.

J'ai participé à des tribunes téléphoniques aujourd'hui, et je peux dire aux sénateurs que les Canadiens savent ce qui se passe. On me pose ce genre de questions. Des gens de Hamilton et même de Calgary m'ont posé des questions ce matin. Cette suspension ne règle pas le problème de façon définitive. En fait, elle ne le règle pas du tout. Même si je sais que c'est la volonté du Sénat de suspendre le sénateur et même si je sais que cela se fera cet après-midi, je ne peux pas appuyer la motion.

Je crois que la meilleure façon de procéder est d'expulser le sénateur Thompson pour régler le problème une fois pour toutes, pour le régler de façon définitive. La solution que nous adoptons maintenant ne règle rien. Elle laisse les choses en suspens. Elle ne me satisfait pas, mais, ce qui est plus important encore, elle ne satisfait pas les Canadiens.

Je n'appuierai pas la motion non pas parce que je ne veux pas que nous nous débarrassions du sénateur Thompson - c'est tout le contraire - mais bien parce que je veux que nous le fassions de façon définitive. Je ne veux pas que nous ayons à craindre qu'il soit ici avec nous dans dix mois en train de nous ridiculiser, comme le fera tout le reste du Canada.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, il y a peut-être quelque chose que je ne saisis pas, et ma connaissance insuffisante du droit sera certainement très évidente ici.

Mon collègue a dit que les tribunaux n'avaient pas d'affaire à nous dire ce que nous pouvons faire et ce que nous ne pouvons pas faire. Si nous prenons une mesure qui est inconstitutionnelle, les tribunaux peuvent certainement déclarer que la mesure que nous avons prise était inconstitutionnelle. Ils le font constamment. Si nous déclarions un siège vacant, que le premier ministre recommandait le nom d'une autre personne au Gouverneur général pour combler ce siège et que les tribunaux jugeaient ensuite que nous avions agi de façon inconstitutionnelle, toutes ces actions seraient annulées, n'est-ce pas?

Le sénateur Ghitter: La réponse qui nous a été donnée hier soir par M. Finklestein, comme beaucoup le confirmeront, est que, si cela arrivait, le siège deviendrait vacant. C'était là son opinion.

Le sénateur Murray: Selon lui, avons-nous le pouvoir de déclarer un siège vacant?

Le sénateur Ghitter: Non. C'est tout à fait juste, comme l'a dit le sénateur Carstairs. M. Finkelstein nous a dit hier soir que, même si l'on peut présenter de solides arguments en faveur d'une expulsion, il pense qu'il serait inopportun que nous agissions de la sorte, car nous prendrions alors un risque. Il a émis des doutes sur notre pouvoir d'agir de la sorte. C'était son opinion.

Ce que je voulais surtout savoir, c'était quels sont les pouvoirs du sénateur Thompson si nous agissons ainsi. Vers qui se tourne-t-il? C'est là la nuance. Ce qu'on nous a expliqué hier soir, c'est qu'il doit revenir devant le Sénat, pas devant les tribunaux. C'est ce que j'ai compris de l'avis juridique qui nous a été fourni. D'autres l'ont peut-être interprété autrement.

L'honorable John. B. Stewart: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question à mon collègue.

Le sénateur Ghitter estime que ce qui est en cause, dans le cas présent, c'est le droit d'un sénateur, mais il y a beaucoup plus que cela, à mon avis. Je suis un sénateur qui représente la Nouvelle-Écosse; le sénateur Ghitter, lui, représente l'Alberta.

Permettez-moi d'exposer un scénario et voyons ce que le sénateur Ghitter répondra à la question que je poserai à la fin. Supposons qu'une majorité au Sénat estime que le sénateur Ghitter a fait quelque chose d'offensant et qu'elle décide de l'expulser, créant ainsi une vacance dans la représentation de l'Alberta, vacance que le premier ministre alors en fonction et d'une autre allégeance politique peut immédiatement combler en nommant une personne de son choix. Que ferait valoir le sénateur Ghitter en pareil cas? Je me demande si, comme il l'a laissé entendre aujourd'hui, il dirait ceci: «Vous, les libéraux en face - ou même les réformistes - vous êtes majoritaires. Vous avez tenu un vote en bonne et due forme, j'ai été dûment expulsé, même si cela me contrarie, et vous avez, en toute légitimité, désigné quelqu'un pour me remplacer. Je me réjouis de cette primauté du droit.» Est-ce là ce qu'il dirait?

Le sénateur Ghitter: Oui, bien sûr. Tout à fait. Je n'aimerais pas être expulsé - évidemment - mais je pense que le Sénat a le pouvoir de le faire, un point c'est tout.

Le sénateur Stewart: Et le premier ministre, en pareil cas, a évidemment le droit de nommer un remplaçant?

Le sénateur Ghitter: Oui, c'est ma position.

Le sénateur Stewart: Je comprends ce que dit mon collègue.

Autrement dit, la population de l'Alberta, qui est peut-être très satisfaite du sénateur Ghitter, n'aurait pas de droits. Ce serait la majorité au Sénat et le leader de ce parti, probablement tous des sénateurs de l'Est du Canada, qui auraient tous les droits. Est-ce cela que le sénateur Ghitter préconise?

Le sénateur Ghitter: Nous nous aventurons en terrain difficile.

Le sénateur Stewart: En effet.

Le sénateur Ghitter: D'après ce que vous dites, la population de l'Alberta dirait que le sénateur Ghitter n'a pas le droit d'être là parce que nous ne l'avons pas délégué. J'entends cela tout le temps.

Le sénateur Stewart: C'est peut-être vrai, mais je suppose que le sénateur Ghitter, même s'il n'a pas été élu, a un soutien considérable en Alberta. Je me trompe peut-être, mais supposons que ce soit le cas. Veut-il dire que cela pourrait compter pour rien aux yeux d'une majorité de l'Ontario et du Québec, et d'un premier ministre, disons, de Toronto? Est-ce bien ce qu'il dit?

Le sénateur Ghitter: Oui.

Le sénateur Stewart: Je craignais que ce soit votre réponse.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, en termes précatifs, les écoles de droit...

Son Honneur le Président: Je suppose, honorable sénateur Grafstein, que ce n'est pas une question.

Le sénateur Grafstein: Si, c'est une question.

Son Honneur le Président: Bon, d'accord.

Le sénateur Grafstein: De toute évidence, les écoles de droit de l'Alberta et de l'Ontario n'enseignent pas la même chose.

Voyons si je comprends bien le sénateur Ghitter. Il dit au Sénat, à la population du Canada et à la population de sa région: «Nous n'avons pas le pouvoir constitutionnel d'expulser un sénateur mais, le sénateur n'ayant pas de bon remède, nous allons l'expulser tout de même.» Est-ce bien ce que le sénateur Ghitter dit au Sénat?

Selon le conseiller et selon le sénateur Murray, nous n'avons pas en droit le pouvoir constitutionnel d'expulser ce sénateur. Il est clair que nous avons le droit de le suspendre, mais pas de l'expulser. Toutefois, le sénateur semble dire que nous pouvons certes l'expulser, mais qu'il n'aura peut-être pas le recours parfait. Ubi jus, ibi remedium. Là où il y a un droit, il y a un recours. Le sénateur est-il en train de dire que c'est la norme ou la règle de droit ou les standards légaux ou moraux qu'il voudrait voir établis pour le Sénat? Je ne suis pas d'accord. En Ontario, nous ne sommes pas d'accord. On l'est peut-être en Alberta, mais pas en Ontario.

Le sénateur Ghitter: Je voudrais bien être aussi catégorique que le sénateur Grafstein.

Le sénateur Grafstein: Eh bien, soyez catégorique! La question est importante. C'est la première fois en plus d'un siècle que le Sénat fait cela. Nous faisons preuve de la plus grande prudence. Le sénateur peut bien parler dans les tribunes radiophoniques ou ailleurs si cela convient à l'Alberta, mais ce n'est pas assez bon pour moi ni pour l'Ontario. Je peux vous le garantir.

Le sénateur Ghitter: Quel discours, sénateur Grafstein! Voilà à mon avis ce qui peut s'appeler parler pour la galerie. Lorsque des gens nous présentent des arguments de façon honorable et que quelqu'un se lève et l'accuse de parler pour la galerie, cela m'offusque au plus haut point.

Laissez-moi vous dire, monsieur, du haut de votre école de droit de l'Ontario, que les avis juridiques que nous avons obtenus ici n'étaient pas aussi clairs que vous pouvez le croire.

Nous avons toujours eu au Canada, et déjà du temps de Louis Riel, des discussions sur les pouvoirs de la Chambre des communes en rapport avec l'expulsion. En fait, Louis Riel n'a pas accepté un ordre de la Chambre des communes et il a été expulsé.

Il y a eu une expulsion en Nouvelle-Écosse, comme le sénateur Buchanan pourrait en témoigner. Ce n'est pas une nouvelle mesure. On y a déjà eu recours.

Vous n'avez qu'à consulter l'ouvrage de Beauchesne. Il dit exactement la même chose. Il affirme que nous avons le pouvoir d'expulser quelqu'un pour toute raison que nous estimons justifiée. Ce n'est pas aussi clair que ce qu'affirment les écoles de droit de l'Ontario. J'accepte l'autre point de vue juridique qui peut être différent du vôtre tout en étant aussi valable. Je suis très blessé par vos commentaires.

Son Honneur le Président: S'il n'y a pas d'autre question, je cède la parole à l'honorable sénateur Lynch-Staunton.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, bien que j'appuie les recommandations du comité, je ne le fais pas avec enthousiasme, ni même avec satisfaction ou avec le sens du devoir accompli, quoique je considère que, dans les circonstances, le Sénat n'a d'autre choix que d'appuyer ce que le sénateur Maheu demande avec instance au nom de ses collègues. Porter un jugement sur un collègue et imposer une sanction est à la fois répugnant et offensant. Je ne veux pas dire par là que la mesure qu'on nous demande de prendre n'est pas juste, mais seulement qu'il devrait exister d'autres mécanismes qui pourraient empêcher que nous ayons à agir en tant que juge, jury et procureur comme nous nous apprêtons à le faire.

Dans ce cas-ci, nous n'avons eu d'autre choix que d'appliquer ce que je qualifierais de «justice expéditive». Espérons que ce genre de situation ne se répétera jamais plus. Quoi qu'il en soit, nous devrions envisager sérieusement de mettre en place un mécanisme, une procédure qui, dans l'éventualité où un sénateur aurait une conduite inacceptable, limiterait le Sénat à prendre uniquement une décision finale et à éviter ainsi la répétition des situations tortueuses et parfois confuses où nous nous sommes retrouvés ces dernières semaines.

Beaucoup jubilent à l'heure actuelle car ce jour marque pour eux le début d'une campagne contre ceux dont les fiches de présence justifient, à leurs yeux, un renvoi du Sénat. Comme si les heures de présence étaient la seule façon d'évaluer la contribution d'un sénateur aux travaux du Parlement et qu'une assiduité insuffisante constituait une grave violation des obligations du parlementaire. Des attitudes pareilles sont la preuve des préjugés et de l'ignorance de ceux qui les adoptent et ne contribuent en rien à améliorer leur réputation.

Si les 104 sièges du Sénat étaient occupés en ce moment, les Canadiens auraient-ils lieu de croire que nous nous acquittons de notre travail de façon plus efficace, plus constructive et plus objective? Non, bien sûr, car si tous les sénateurs étaient présents en permanence au Sénat, ils en viendraient rapidement à négliger leurs autres responsabilités.

Allons-nous demander au sénateur Keon de renoncer à sa pratique médicale pour mieux servir ses concitoyens, à ne plus aller en salle de chirurgie, où il sauve des vies, dans le seul but d'avoir une fiche de présence parfaite au Sénat et de pouvoir y conserver son siège?

Faut-il obliger madame le sénateur Pearson à renoncer à ses efforts en faveur des enfants du monde si elle veut continuer de siéger au Sénat?

Madame le sénateur Cohen devra-t-elle renoncer au travail qu'elle fait depuis tant d'années dans le domaine de l'aide sociale pour conserver son titre de sénateur?

Allons-nous demander au sénateur Beaudoin de demeurer rivé à son siège et de ne plus agir comme conseiller auprès d'autres pays qui veulent se doter d'un régime constitutionnel?

Allons-nous demander au sénateur Chalifoux de mettre fin aux efforts qu'elle faits depuis tant d'années pour le compte de la communauté métisse, afin d'éviter que l'on nous reproche ses absences qui n'ont pour cause que son engagement à l'égard de cette communauté?

Le dévouement du sénateur Fairbairn à la cause de l'alphabétisation, qui l'oblige à s'absenter de cet endroit, va-t-il lui valoir des reproches pour n'avoir pas un dossier de présences que certains estiment devoir être parfait?

On dit aux Canadiens que présence égale assiduité et qu'absence égale négligence. Tous ceux de nous qui suivent scrupuleusement ce qui se fait dans cette Chambre savent combien cette impression est fausse.

Oui, un de nos collègues - le premier et, oserai-je dire, le dernier - a grossièrement abusé des privilèges de cette Chambre. Sa suspension et la perte de salaire qu'elle entraîne sont compatibles avec la théorie de la non-performance et de la non-rémunération. Toutefois, la vraie valeur de la contribution d'un sénateur ne se mesure pas à ses présences ou à ses absences - loin de là. Elle se mesure à sa participation en comité, au sein des associations parlementaires, en tant que représentant de son pays à l'étranger, enfin - et non le moindre - à la part active qu'il prend à la communauté pour le compte de ses concitoyens moins fortunés. Si être sénateur signifie une plus grande contribution à l'amélioration de la société et un dossier de présences moins que parfait, alors je dis qu'il faut donner aux sénateurs plus de pouvoir. Les Canadiens devraient s'estimer heureux d'avoir de tels citoyens parmi eux.

Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, je voudrais faire quelques très brefs commentaires à ce propos car je considère le sénateur Thompson comme un ami. Ces votes sont peut-être les plus difficiles de ma carrière au Sénat.

Pour mettre les choses au point, ce processus a commencé l'été dernier au sein d'un comité présidé par le sénateur Kenny. À l'époque, j'avais décidé que, pour ma part, en tant que sénateur, j'essaierais de veiller à ce que nous agissions avec prudence et précaution, avec respect de la suprématie du droit, avec dus égards pour cette Chambre et pour le Parlement du Canada, en observant la Constitution et en respectant les Canadiens. Je crois que durant toute cette période difficile, les sénateurs de tous les côtés ont essayé de faire la même chose.

C'est avec le plus grand regret pour mon vieil ami Andy Thompson, mais avec fierté pour le Sénat, que j'appuierai ces votes.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, la motion proposée par le sénateur Ghitter la semaine dernière était directe. Le sénateur Thompson a fait preuve de mépris envers le Sénat du Canada et le Parlement et il devrait être expulsé. J'appuierai cette motion si nous avons l'occasion de nous prononcer sur celle-ci.

J'ai suivi le débat et j'ai écouté les arguments formulés au sujet des problèmes juridiques que ce choix pose. Malheureusement, comme tout le monde, je n'ai pu m'appuyer sur de nombreux documents en matière de procédure pour prendre une décision solidement étayée, car il s'agit-là d'une situation nouvelle.

Dans le cadre du débat cet après-midi, le sénateur Murray a soulevé des questions et formulé des suggestions importantes à propos d'une modification constitutionnelle. D'un point de vue social et moral, je continue toutefois de penser que le sénateur Thompson devrait être expulsé.

Nous sommes saisis d'une proposition du comité qui a examiné attentivement cette question. Elle respecte les conditions de la Loi sur le Parlement du Canada et les dispositions qui ont été prises pour que le règlement soit dûment enregistré conformément à la Loi sur les textes réglementaires.

(1600)

Une suspension sans avantages est une forme d'expulsion. J'appuierai donc la motion, bien qu'elle ne soit pas aussi sévère que je l'aurais voulu.

Le sénateur Stewart: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur. Je lui poserai essentiellement la même question que celle que j'ai posée au sénateur Ghitter, mais je dois faire une intervention en raison d'une observation qui a été faite entre-temps.

On a laissé entendre que l'expulsion d'un sénateur est comparable à celle d'un député de la Chambre des communes. Certes, en Grande-Bretagne, des députés de la Chambre des communes ont été expulsés. John Wilkes a été expulsé à quatre reprises au cours d'une même session. Il a été expulsé, réélu, expulsé, puis réélu. Cependant, dans le cas d'un député de la Chambre des communes, l'électorat peut décider de renvoyer, comme dans le cas de Wilkes, la balle dans leur camp. Cela n'est pas vrai dans le cas d'un sénateur.

Admettons qu'on ait jugé la conduite du sénateur Kinsella choquante parce qu'il aurait voté sur une question et persisterait dans sa décision. Dois-je comprendre qu'il croit que la majorité au Sénat aurait le droit de voter pour l'expulser, de sorte que le premier ministre de l'heure puisse nommer une personne appartenant à son propre parti politique pour représenter le Nouveau-Brunswick au Sénat? Est-ce là sa position?

Le sénateur Kinsella: Ma position, c'est qu'il n'existe aucun précédent. J'ai jeté un coup d'oeil sur la Chambre des lords, et la situation qui existe là-bas nous aide encore moins à y voir clair.

Le sénateur Stewart: C'est hors de propos, car il ne s'agit pas d'une Chambre fédérale.

Le sénateur Kinsella: C'est hors de propos.

Notre situation est radicalement différente de celle d'un parlementaire qui a été élu.

Franchement, ma propre conclusion, c'est que le sénateur Thompson a mal agi. C'est pour ce motif qu'il devrait être expulsé. Je reconnais que cela est difficile à faire. Les arguments du sénateur Ghitter me convainquent. Par ailleurs, nous sommes saisis d'un rapport qui fait suite à une procédure particulière. Je suis convaincu que cette procédure répond au critère de la recevabilité sur le plan juridique, et je l'appuierai, bien que j'estime que nous aurions pu aller plus loin.

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, comme vous le savez, la semaine dernière le sénateur Ghitter a proposé une motion visant à expulser Andrew Thompson. Le sénateur n'a pas agi à la légère. J'ai appuyé sa motion et je continue d'appuyer le sénateur Ghitter. J'ai entendu tous les arguments juridiques et, bien sûr, il y a du pour et du contre.

Oui, sénateur Stewart, je comprends votre point de vue.

Cependant, si nous faisons cela aujourd'hui, nous créons un précédent qui, à mon avis, sera un facteur déterminant chaque fois qu'une expulsion sera envisagée. Nous n'agissons pas à la légère, du moins ce n'est pas mon cas.

À l'instar du sénateur Murray, je présente des excuses à la population canadienne. Je ne suis pas au Sénat depuis 19 ans, mais j'y suis depuis assez longtemps pour savoir qu'il ne fallait pas compter sur la présence du sénateur Thompson.

Si j'appuie le sénateur Ghitter, ce n'est pas pour des raisons légales. Je ne suis pas avocat. J'accepte ce que disent les avocats. Il y a assez de preuve pour motiver une expulsion.

J'essaie de m'en tenir à des motifs d'ordre moral, qui sont simplement les suivants: non seulement le sénateur traite le Sénat avec mépris, mais, surtout, il traite les Canadiens avec mépris. C'est comme s'il leur crachait au visage. Voilà pourquoi je voudrais envoyer un message clair et distinct au sénateur Thompson, l'avertissant qu'il devrait être expulsé.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, moi aussi j'étais en faveur de la motion du sénateur Ghitter, la semaine dernière, en entendant les gens de la Saskatchewan et d'un peu partout au Canada réclamer à cor et à cri que l'on s'occupe du cas du sénateur Thompson.

Je croyais alors que le comité avait déjà sollicité toutes les opinions juridiques et que le temps était venu pour nous d'agir collectivement. C'est à regret que j'ai vu s'écouler une autre semaine. Je suis néanmoins persuadée que nous avons emprunté la voie la plus indiquée, celle de la prudence.

Le but recherché ici est-il de punir le sénateur Thompson ou de l'obliger à rendre des comptes? S'agit-il de rendre des comptes à la population canadienne ou de tenir compte de ce que la presse a dit ou de ce que certains députés ont fait? Non seulement ils ont rabaissé le Sénat, mais ils se sont rabaissés en tant que politiciens. Ils nous ont fait tomber dans le discrédit et ils ont fait tomber des institutions démocratiques dans le discrédit.

Pour avoir servi dans des pays qui se prétendent des démocraties et pour qui la primauté du droit se limite au respect de la lettre de la loi, non à son esprit, j'estime qu'il nous faut faire ce que nous dicte l'opinion majoritaire du Sénat. Nous ne devrions pas nous en tenir uniquement à la lettre de la loi dans le dossier du sénateur Thompson.

À mon avis, une certaine part de responsabilité nous incombe à nous tous, et pas seulement aux sénateurs qui auraient dû rendre public le cas du sénateur Thompson. Cela va au-delà. Cela ne se limite pas à ceux occupant une position d'autorité qui connaissaient la situation du sénateur Thompson et se sont abstenus d'agir.

Je ne veux pas poursuivre un but punitif en recourant au processus démocratique; je veux me montrer responsable. Une attitude punitive consisterait à exiger ce que bon me semble, puis à continuer de siéger au Sénat sans rien faire pour corriger la situation.

J'espère que, si nous préférons l'attitude responsable à l'attitude punitive, nous servirons la cause des sénateurs qui remplissent assidûment leurs fonctions et, que, ce faisant, nous oeuvrerons dans l'esprit de la loi. Il nous arrive d'avoir tort; nous ne sommes pas toujours infaillibles, comme le voudraient parfois la population et la presse. Nous avons commis des erreurs, et

nous avons commis une erreur au sujet du sénateur Thompson. Nous risquons d'en commettre une autre, mais nous sommes conscients de la réaction de la population et de la presse. Nous devons prendre, à mon avis, la mesure appropriée que prévoit la loi, c'est-à-dire procéder à un second examen objectif, suivre les meilleurs conseils qui nous sont donnés et puis tenter de prendre les mesures les plus sévères contre nous-mêmes. La mesure la plus sévère est, à mon avis, celle que propose le comité.

Je ne crois pas que nous devrions nous préoccuper du sénateur Thompson. J'aurais défendu les droits du sénateur Thompson s'il n'avait pas fait de déclarations publiques - qui doivent être justes, puisqu'il n'a pas pris le temps de les corriger ou de faire quoi que ce soit à leur sujet - à propos d'autres sénateurs et de la façon dont ils travaillent.

Aux députés et aux journalistes qui nous attaquent, je dis: Changez votre démocratie. Changez le processus parlementaire. Ne vous servez pas du Sénat comme bouc émissaire.

Nous faisons ici un pas dans la bonne direction pour rendre les sénateurs plus responsables. J'espère que nous ne nous arrêterons pas là. Il reste encore beaucoup à faire pour moderniser et améliorer notre institution et pour devenir plus responsables.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire intervenir, je mettrai la motion aux voix.

Avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 55(1)g) du Règlement, l'honorable sénateur Maheu, appuyée par l'honorable sénateur Perrault, propose que le rapport soit adopté maintenant.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Une voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Le sénateur Murray: Je veux un vote par appel nominal.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président: Les whips m'informent que le timbre doit retentir pendant 15 minutes. Le vote aura donc lieu à 16 h 35.

(1635)

Son Honneur le Président: La motion dont le Sénat est maintenant saisi se lit comme suit: Que le quatrième rapport du comité soit maintenant adopté.

(La motion, mise aux voix, est adoptée et le rapport est adopté.)

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuk, Atkins, Beaudoin, Berntson, Bryden, Buchanan, Butts, Callbeck, Carstairs, Cohen, Cools, Corbin, De Bané, DeWare, Di Nino, Doody, Doyle, Fairbairn, Ferretti Barth, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Gustafson, Hébert, Johnson, Keon, Kinsella, Lavoie-Roux, LeBreton, Losier-Cool, Lynch-Staunton, Maheu, Moore, Murray, Nolin, Pearson, Pépin, Perrault, Poulin, Prud'homme, Rivest, Robichaud, (L'Acadie-Acadia), Robichaud, (Saint-Louis-de-Kent), Rossiter, Simard, Sparrow, Spivak, Stewart, Taylor, Watt, Whelan-52

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Stratton-1

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Robertson-1
 

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, malheureusement, j'étais absent pendant le vote, mais si j'avais été présent, j'aurais voté de la même façon que la majorité.

L'enseignement postsecondaire

Étude du rapport final du comité sénatorial spécial-Poursuite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'étude du rapport final du comité sénatorial spécial de l'enseignement postsecondaire, déposé au Sénat le 16 décembre 1997.-(L'honorable sénateur Forest).

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je commencerai par remercier le sénateur Bonnell de cette initiative; je suis convaincue qu'il continuera de poursuivre cette cause même s'il est maintenant à la retraite. J'adresse également mes remerciements à tous les honorables sénateurs qui ont apporté des perspectives uniques à notre débat et qui l'ont enrichi d'une manière aussi collégiale. J'exprime ma gratitude à Jill Ann Joseph et à tous les membres du personnel, notamment Grant Purves et Robin Farquard. La pression sous laquelle ils ont travaillé n'a d'égale que mon admiration devant leur dévouement, leur professionnalisme et leur patience envers les membres du comité. Je dois une reconnaissance spéciale à M. John Allan, qui m'a aidée à focaliser mes sujets de préoccupation d'une manière constructive.

Le 19 juin 1996, je suis intervenue au Sénat pour exprimer mon appui à la motion du sénateur Bonnell, qui proposait de renvoyer au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie l'interpellation au sujet de la gravité de l'état de l'enseignement postsecondaire au Canada. J'interviens de nouveau pour parler des problèmes de l'enseignement postsecondaire. J'appuie le rapport du comité sénatorial spécial de l'enseignement postsecondaire, auquel l'interpellation a été renvoyée.

Le rapport contient des recommandations dont l'adoption et la mise en oeuvre contribueraient beaucoup à assurer la santé future de notre système d'enseignement postsecondaire et à faire en sorte qu'il devienne accessible aux Canadiens qui ont le talent et la détermination nécessaires pour en bénéficier.

Honorables sénateurs, le temps ne me permet pas de m'arrêter à tous les aspects de l'enseignement postsecondaire qui me préoccupent. Une bonne partie de notre débat a tourné autour du niveau d'endettement des étudiants et des responsabilités du gouvernement. Je regrette que d'autres études approfondies sur d'autres aspects de l'enseignement postsecondaire n'aient pas été entreprises. Cependant, je tiens à énumérer les aspects qui méritent d'être étudiés.

Je tiens à souligner ce que le sénateur Lavoie-Roux et le rapport du comité disent au sujet de l'état des études de deuxième cycle et de la capacité des étudiants de deuxième cycle de demeurer au Canada. Si nous ne parvenons pas à endiguer les flots dès maintenant, nous risquons de nous retrouver devant une pénurie de compétences et, par conséquent, de voir décliner les industries et les technologies fondées sur le savoir.

Il existe également une tendance croissante à concentrer les fonds. La concentration des fonds a certains avantages, mais cela risque d'aboutir à une situation où tous les fonds destinés à l'enseignement postsecondaire aboutissent dans les grands centres. Notre rapport aborde le fait que la vigueur des établissements d'enseignement postsecondaire dans toutes les régions du Canada contribue à l'enrichissement, à la prospérité et à la stabilité du Canada. Il faut viser l'excellence dans toutes les régions de notre pays. En fait, les cégeps, les collèges et les petites universités sont vitaux dans les régions rurales et isolées du Canada. La technologie peut, dans une certaine mesure se substituer aux salles de classe, mais elle ne pourra jamais remplacer un contact personnel.

Finalement, dans un contexte de rationalisation qui a frappé tous les Canadiens, certains fonctionnaires et peut-être même la population en général ainsi que les médias ont tendance à croire que les universités résistent au changement. Selon mon expérience personnelle, et ce qu'ont confirmé les audiences du comité, les universités ont changé et ont réagi aux compressions financières en faisant preuve d'imagination et de créativité, notamment en anticipant les besoins futurs, en trouvant de nouvelles avenues de collaboration et en créant de nouveaux réseaux. Il faut féliciter les universités pour leur esprit de collaboration et il faut les aider davantage pour assurer leur survie. Il faut apporter davantage d'attention au soutien des infrastructures et à la collaboration dans l'élaboration de la politique.

Je vais maintenant retourner à l'essence de notre rapport. Au cours des 15 dernières années, il y a eu au Canada une diminution massive du nombre d'emplois qui nécessitent au plus un diplôme d'études secondaires. Par contraste, la croissance de l'emploi s'est produite dans les secteurs qui exigent au moins un diplôme d'études postsecondaires. C'est une asymétrie sur laquelle nous fermons les yeux à nos risques et périls. Les possibilités d'emploi pour les travailleurs relativement peu qualifiés disparaissent à mesure que la technologie avance et que la concurrence des autres pays s'accroît. Si on veut que les Canadiens trouvent leur place sur le marché du travail, et il le faut, on doit d'abord leur donner les connaissances et les compétences exigées par les employeurs dans une économie basée sur la technologie et l'information. Le Canada doit être à l'avant-garde du développement des connaissances nécessaires pour être compétitif dans l'économie mondiale. Notre capacité de répondre à ces exigences critiques dépendra de divers facteurs, mais le plus important est de faire les investissements nécessaires, tant du point de vue de la qualité que du point de vue de la quantité, dans l'éducation postsecondaire. Avec ces investissements, les possibilités qui s'offrent à nous sont illimitées; sans ces investissements, le déclin relatif est quasi certain.

(1650)

Avant de faire quelques remarques sur le but premier du rapport du comité spécial, je vais prendre un moment pour parler de certaines questions générales qui ont une influence sur toute recommandation concernant l'éducation postsecondaire. J'espère qu'on en aura tenu compte dans le prochain budget. Ces questions concernent la nature de l'éducation postsecondaire et les avantages qui en découlent, ce qui constitue l'équité dans le financement de l'éducation postsecondaire et le rôle que le gouvernement fédéral devrait jouer dans ce secteur. Le fait que l'éducation est un investissement qui rapporte des dividendes

considérables est reconnu depuis longtemps. Il est également reconnu que ces dividendes sont à la fois pour ceux qui ont profité directement de ces investissements dans l'éducation et pour la société en général. Nous profitons tous de vivre dans une société dont les membres sont suffisamment instruits pour assumer des rôles productifs et se comporter de façon responsable en tant que citoyens. Dans le cas de l'enseignement élémentaire et secondaire, les retombées positives pour la société en général sont tellement importantes qu'on finance normalement ces niveaux d'instruction dans le cadre du processus budgétaire plutôt que de faire payer les utilisateurs.

Dans le cas de l'enseignement postsecondaire, la situation est différente. La norme à ce niveau-là est d'exiger que ceux qui profitent directement de l'enseignement postsecondaire assument une part importante du coût de leur instruction, sous la forme de droits. On agit ainsi, car une très grande part des avantages de cette instruction revient directement à ceux qui ont le privilège de fréquenter nos établissements d'enseignement postsecondaire. Ces gens, qui sont favorisés, je le souligne, ont généralement des revenus supérieurs, un taux de chômage moindre et, même lorsqu'ils sont sans emploi, c'est pour une période plus courte que ceux qui n'ont pas fréquenté nos établissements d'enseignement postsecondaire. Au cours de leur vie, nos diplômés du postsecondaire ont tout simplement un meilleur statut socioéconomique.

Nous ne devons pas faire fi de ces considérations dans le cadre d'un examen de l'enseignement postsecondaire. Les coûts qui ne sont pas récupérés grâce à des droits de scolarité doivent être supportés par le contribuable moyen qui, malheureusement, à ce stade-ci, n'est pas encore un diplômé de notre système d'enseignement postsecondaire. Le fait de demander à ces contribuables de supporter une part disproportionnée des coûts de l'enseignement postsecondaire revient fondamentalement à proposer de redistribuer les revenus de ceux qui ont un revenu relativement faible durant leur vie à ceux qui vont toucher des revenus relativement élevés. Il est clair qu'une proposition de ce genre serait inacceptable sur le plan financier.

Ainsi, l'équité dans le financement de l'enseignement postsecondaire exige qu'on continue, comme à l'heure actuelle, de demander à ceux qui profitent directement de cet enseignement de supporter une part raisonnable des coûts de l'éducation. Cela signifie également que la pauvreté ne devrait pas être un obstacle, pas plus d'ailleurs que des questions comme le lieu de résidence au Canada ou tout autre facteur visé par la Loi sur les droits de la personne.

Le fait que l'enseignement postsecondaire ne bénéficie pas uniquement aux étudiants est à la fois un avantage et un inconvénient. Les retombées peuvent être considérées comme un dividende social pour l'ensemble de la société, et c'est là un net avantage. Il est vrai, cependant, que les avantages directs et indirects ne connaissent pas les limites territoriales des provinces. On ne peut donc pas présumer qu'une province donnée peut s'arroger tous les gains découlant de ses investissements dans l'enseignement postsecondaire. Grâce à leurs études supérieures, les diplômés peuvent vendre leurs compétences sur des marchés plus larges et variés. Ils ont de meilleurs débouchés, et leur mobilité leur permet d'en profiter. Ils peuvent donc être une perte sèche pour la province qui a investi dans leur formation supérieure.

Pareillement, lorsque l'investissement prend la forme d'un soutien pour la recherche et le développement dans nos universités, les connaissances ainsi acquises devraient être diffusées le plus largement possible, et non limitées à la province de résidence des chercheurs. Dans le jargon des économistes, on dirait que seul un niveau de gouvernement qui est en mesure d'internaliser ces retombées peut assurer le niveau optimum de soutien. Dans notre cas, il s'agit du gouvernement fédéral.

Le comité spécial, évidemment, était très conscient que l'éducation est de compétence provinciale, mais nous savions aussi qu'au cours des dernières décennies, par une variété de moyens - les transferts de points d'impôts dans le cadre du Financement des programmes établis, les transferts dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, le financement de la recherche par les organismes subventionnaires nationaux, le Programme de prêts aux étudiants du Canada, l'éducation autochtone et nombre d'autres initiatives -, le gouvernement fédéral a contribué essentiellement à la moitié des coûts de l'éducation postsecondaire au Canada. Le rôle et la contribution du gouvernement fédéral ont donc de solides bases tant en théorie qu'en pratique.

J'ai été des plus ravies d'entendre ce point de vue confirmé par l'honorable Robert W. Mitchell - qui était alors ministre de l'Éducation postsecondaire et de la Formation professionnelle de la Saskatchewan et qui est maintenant ministre du Travail - quand il a comparu devant le comité spécial. Le ministre a dit spécifiquement que la Saskatchewan se réjouissait beaucoup du rôle de chef de file de premier plan que le gouvernement fédéral a joué dans ce domaine pendant de nombreuses années. Il a ajouté que si le gouvernement fédéral se retirait de ce secteur, une balkanisation croissante était à craindre. Bien que je sois sensible au problème constitutionnel, je n'en partage pas moins le point de vue du ministre Mitchell sur la nécessité du maintien d'un rôle actif du gouvernement fédéral.

Au cours des délibérations, le comité spécial a souligné - à bon droit, à mon avis - que les dépenses en éducation postsecondaire constituent un investissement. Or, c'est une caractéristique des investissements qu'ils requièrent d'importants déboursés au départ et qu'ils rapportent par la suite des dividendes sur une longue période - dans le cas présent, durant toute la vie de ceux en qui des investissements ont été faits. Cela a donné lieu à un problème financier. Même si investir dans son éducation postsecondaire représente sans doute le meilleur investissement qu'un jeune Canadien puisse faire, cet investissement ne rapporte pas de dividendes pendant que les frais d'éducation sont engagés. Nombre d'étudiants doivent donc s'endetter pour pouvoir s'instruire. Quantité de témoins qui ont comparu devant le comité ont souligné que leur principale préoccupation était l'endettement croissant des étudiants.

Je voudrais faire deux observations sur ce qui est perçu comme une crise de l'endettement des étudiants: d'abord, je trouve important de faire remarquer que, de fait, ce ne sont pas tous les étudiants de niveau postsecondaire qui ont dû avoir recours aux programmes de prêts aux étudiants du Canada et des provinces. Une majorité de nos étudiants, même si c'est une majorité de plus en plus mince, ont réussi, probablement avec l'aide de leur famille et d'amis, et grâce à des prêts d'institutions privées et à un emploi, à éviter d'avoir recours à nos programmes de prêts aux étudiants pour effectuer leurs études postsecondaires. Pour ces étudiants, il n'y a pas de crise de l'endettement. Je crois que nous devons les féliciter, ainsi que leur famille, d'être aussi autonomes et d'avoir réussi à investir dans leur avenir et dans celui du Canada.

Ma deuxième observation a trait au nombre croissant d'étudiants qui doivent demander un prêt. Après avoir écouté attentivement nos nombreux témoins, j'ai conclu que nous avons deux crises de l'endettement: la première, c'est le niveau d'endettement atteint chez certains étudiants; la deuxième, c'est leur capacité limitée de rembourser ces prêts. Il importe de faire la différence entre ces deux problèmes, mais il faut aussi comprendre que l'origine des deux problèmes est la même.

Au cours des dernières années, la conjoncture n'a pas été tendre envers les étudiants et les diplômés de nos institutions postsecondaires. Les emplois à temps partiel qui paient bien sont devenus extrêmement rares, ce qui a forcé les étudiants à compter dans une trop grande mesure sur des emprunts pour payer leurs études et leurs dépenses courantes. En outre, cette difficulté a été grandement accrue par la hausse rapide des droits de scolarité, attribuable aux compressions dans les transferts fédéraux aux provinces et, par ricochet, à la réduction des subventions provinciales aux institutions postsecondaires. Par ailleurs, une croissance lente et des taux de chômage inacceptablement élevés ont fait en sorte qu'un nombre important de diplômés ont ensuite été incapables de trouver, dans un délai raisonnable après l'obtention de leur diplôme, un emploi qui leur permette d'utiliser leurs nouvelles compétences et de faire fructifier leur investissement dans leur éducation. Sans ces emplois, certains ont de la difficulté à rembourser leur prêt étudiant. Pour d'autres, ce climat d'incertitude les décourage d'entreprendre des études pour lesquelles ils devront s'endetter.

Une simple reprise de l'économie marquée par la croissance ferait beaucoup pour régler tous ces problèmes, mais il faut faire davantage, et je suis sûre que les recommandations de notre rapport vont contribuer à réduire la nécessité d'emprunter et à alléger la dette du diplômé qui doit commencer à rembourser.

(1700)

Un autre aspect que j'aimerais aborder revêt une importance particulière dans ma province. En Saskatchewan, la composante de notre système d'éducation qui connaît la plus forte croissance, c'est l'enseignement aux autochtones. Les leaders de nos Premières nations comprennent toute l'importance de l'éducation comme moyen de permettre à leur peuple de réaliser pleinement leur potentiel et, ce faisant, de contribuer au bien-être non seulement des peuples autochtones mais également de l'ensemble des Canadiens. C'est cette prise de conscience qui est à l'origine du Saskatchewan Indian Federated College, le premier collège universitaire dirigé par les Premières nations du Canada.

À mon avis, il n'y a pas de meilleure façon de rentabiliser au maximum les investissements consentis dans l'enseignement postsecondaire que d'accroître le nombre des diplômés autochtones. Notre rapport contient plusieurs propositions à cet égard et je les soumets plus particulièrement à votre attention.

Je signale notamment la recommandation de rendre remboursables les crédits d'impôt pour frais de scolarité et pour études. Permettre aux étudiants de reporter la partie inutilisée des crédits pour s'en prévaloir plus tard, comme le prévoyait le dernier budget, c'était déjà bien, mais rendre ces crédits remboursables serait d'une grande utilité pour les étudiants au moment où ils en ont le plus besoin, c'est-à-dire quand ils sont encore aux études.

La restructuration des dispositions fiscales relatives aux régimes enregistrés d'épargne-études en vue de les rendre similaires à celles applicables aux régimes enregistrés d'épargne-retraite est une autre bonne mesure fiscale que recommande le rapport. Cette mesure encourage et récompensera l'autonomie des familles qui prennent tôt des dispositions pour que leurs enfants puissent faire des études postsecondaires.

Étant donné l'intérêt que je porte aux affaires internationales, je suis très heureuse que le rapport recommande des mesures visant à amener le Canada et les Canadiens à se préoccuper davantage des dimensions internationales de l'enseignement postsecondaire. Un regret, cependant, c'est qu'il ne signale pas les conséquences négatives possibles de la tendance à miser de plus en plus sur les droits scolaires extrêmement élevés que l'on exige des étudiants étrangers. Bon nombre de ces étudiants, quand ils retournent dans leur pays, jouent un rôle vital pour la promotion de nos échanges commerciaux. N'allons pas renoncer à cet avantage considérable en insistant trop sur l'objectif à courte vue qu'est le recouvrement des coûts.

Je suis également très heureuse que notre rapport recommande plusieurs mesures visant à promouvoir l'expansion des programmes de recherche et développement au Canada en général et dans nos universités en particulier.

Son Honneur le Président: Je regrette de devoir interrompre le sénateur, mais les 15 minutes sont expirées. Permission est-elle accordée de prolonger son temps de parole?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Andreychuk: Merci. Je vais m'efforcer d'être brève.

J'attire l'attention du Sénat sur le fait que nous mettons en garde, dans notre rapport, contre une dépendance excessive envers les partenariats de recherche et de développement avec le secteur privé. Il est manifestement souhaitable d'encourager nos entreprises à appuyer les activités de recherche de nos universités, mais les partenaires privés potentiels ne sont pas également disponibles partout au Canada ni dans le cas de tous les établissements. Il est donc essentiel que les partenariats soient appuyés par d'autres programmes qui maximisent les bienfaits et le plein potentiel de nos établissements d'enseignement postsecondaire.

Enfin, ce ne sont pas tous les Canadiens qui peuvent ou veulent poursuivre des études postsecondaires. Nous sommes sans aucun doute entrés dans l'ère de l'information et de la technologie, mais le Canada continuera dans un avenir prévisible à compter sur un grand nombre d'artisans et d'hommes de métier. Notre compétitivité au plan international dépendra dans une très grande mesure de leur compétence et de leur adaptabilité. C'est pourquoi nous devons nous assurer, en tant que pays, d'offrir les meilleurs programmes d'enseignement et de formation de façon à exploiter pleinement l'ingéniosité et la productivité de toutes nos ressources humaines vitales.

Beaucoup d'autres pays à l'intérieur et à l'extérieur du G-7 réussissent mieux que nous dans ce domaine. D'autres pays sont très conscients de cet impératif et le Canada risque sérieusement de prendre du retard. Malheureusement, le comité spécial n'a pas eu le temps de se pencher sur cette question plus vaste. Une autre étude spéciale s'imposerait. Si je soulève maintenant la question, c'est simplement pour mettre les gens en garde contre le danger de s'en tenir aux nombreux problèmes qui assaillent notre système d'enseignement postsecondaire.

Les problèmes auxquels se trouve aujourd'hui confronté l'enseignement postsecondaire au Canada sont en effet monumentaux, mais ne sont pas insurmontables, même en une période où les ressources ont diminué. Pour surmonter les problèmes manifestes en faisant preuve de responsabilité sur le plan financier, il faudra que le gouvernement fédéral mette au point un plan stratégique avec les gouvernements provinciaux. Ce document doit servir à les informer et à les guider dans leurs efforts en faveur de l'enseignement postsecondaire.

Je pense que le rapport du comité spécial contient un grand nombre de conseils judicieux qui devraient aider à la formulation d'un plan stratégique. Je suis sûre que, si nos recommandations sont adoptées et que suite y est donnée le Canada se retrouvera avec un système d'enseignement post-secondaire renforcé. Il se retrouvera avec un système capable d'absorber ceux et celles qui auront les capacités et la détermination d'en tirer parti, un système qui les dotera des compétences intellectuelles dont ils auront besoin pour faire la concurrence au plus haut niveau. Ce qui est plus important, ce sera un système dont les divers obstacles pour y accéder auront été réduits jusqu'à la limite de notre capacité financière. Si nous voulons réussir dans la nouvelle économie mondiale, nous ne devons nous contenter de rien de moins.

L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur.

Il y a une dizaine d'années, le comité sénatorial permanent des finances nationales a fait une étude sur la participation du gouvernement fédéral au financement de l'enseignement postsecondaire.

Cet après-midi, le sénateur Andreychuk nous a dit que si les étudiants s'endettent davantage pour payer leurs études, c'est en grande partie à cause des compressions dans les transferts fédéraux aux provinces.

Lorsque le comité sénatorial permanent des finances nationales a étudié la question de la participation du gouvernement fédéral au financement de l'enseignement postsecondaire, le président du Conseil des ministres de l'Éducation a dit au comité que le gouvernement fédéral n'avait guère de rôle à jouer dans l'éducation au niveau des provinces et qu'il s'agissait en réalité d'une question de compétence provinciale. Voici ce qu'a dit, en gros, le président qui était le ministre de l'Éducation de la Nouvelle-Écosse à l'époque: «Si le gouvernement fédéral veut envoyer des fonds, c'est très bien, mais nous les dépenserons comme bon nous semble. Nous les utiliserons pour paver des routes, pour des programmes d'aide sociale, et cetera. Nous en dépenserons peut-être une partie pour l'enseignement postsecondaire.»

Y a-t-il eu un changement d'attitude de la part des gouvernements provinciaux, de sorte que si le gouvernement fédéral augmentait les transferts, les fonds serviraient effectivement à financer l'enseignement postsecondaire, ou est-ce que la position exprimée par le ministre de l'Éducation de la Nouvelle-Écosse, il y a dix ans, au nom du Conseil des ministres de l'Éducation des dix provinces, tient toujours?

Le sénateur Andreychuk: Ce n'est pas une question facile.

De nombreux secteurs ont demandé, pour l'enseignement postsecondaire, l'établissement de lignes directrices nationales semblables à celles qui existent dans le domaine de la santé. Nous avons entendu parler de problèmes de mobilité, et certains semblent penser qu'une présence fédérale est nécessaire. Je crois que toutes les autorités responsables ont des réticences à l'idée que la présence fédérale se traduise par des lignes directrices nationales.

L'idée que les gouvernements - aussi bien les représentants des provinces et des universités que les autorités fédérales - semblent avoir privilégiée le plus souvent, c'est qu'il y a un conseil des ministres qui est en place et qu'il y a des fonds qui proviennent du gouvernement fédéral. Si ces fonds continuent d'être versés, des ententes devront être conclues avec les provinces à cet égard. C'est là qu'il devrait y avoir une coopération et une certaine uniformisation, mais les provinces n'ont cédé aucun pouvoir au gouvernement fédéral.

Par ailleurs, même si l'éducation est de compétence provinciale, nous savons que l'argent qui a été retiré du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux a été en fait consacré à l'éducation postsecondaire, comme je l'ai fait remarquer. Tous les secteurs ont été touchés par les compressions, et les universités n'ont certes pas été épargnées. On pourrait adopter une ligne constitutionnelle, une ligne juridique ou une ligne pratique. Adopter une ligne pratique, c'est dire qu'il y a moins d'argent par suite des compressions budgétaires.

Nous ne voulions pas intervenir dans les débats entre les gouvernements. Nous voulions les inviter tous à adhérer à ces recommandations. C'est la raison d'être du plan stratégique. Il faudra un effort collectif de tous les gouvernements provinciaux dans leurs propres champs de compétence.

Le gouvernement fédéral a joué un rôle dans l'éducation postsecondaire, et il doit continuer de le faire. Si vous lisez le rapport au complet, vous comprendrez. Nous respectons les compétences constitutionnelles des provinces, mais l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants requiert la coopération de tous et exige que l'on fasse de cette question une priorité. Le gouvernement fédéral doit faire sa part, que ce soit comme il l'a fait dans le passé ou de façon différente, dans ses champs de compétence ou en collaboration avec les provinces.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne veut prendre la parole, il est entendu que l'article restera au nom du sénateur Forest. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(Au nom du sénateur Forest, le débat est ajourné.)

Régie interne, budgets et administration

Présentation et adoption du dixième rapport du comité

Permission ayant été accordée de revenir aux rapports des comités spéciaux et permanents:

L'honorable Bill Rompkey, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 1998

Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

DIXIÈME RAPPORT

Attendu que le sénateur Thompson a été reconnu coupable d'outrage et qu'il a été suspendu du Sénat;

et attendu que, conformément à l'article 137 et au Règlement sur l'indemnité de session (suspension), son indemnité de session a été suspendue pour le reste de la session;

et attendu que le paragraphe 63(3) de la Loi sur le Parlement du Canada stipule que «les parlementaires reçoivent une indemnité annuelle de fonctions»;

il est résolu que:

Le sénateur Thompson n'est pas admissible à l'indemnité de fonctions qui lui serait normalement versée durant la période de sa suspension.

Respectueusement soumis,

Le président,
WILLIAM ROMPKEY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

Le sénateur Rompkey: Maintenant, avec la permission du Sénat.

Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs le permettent-ils?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, je propose que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, l'honorable sénateur pourrait-il nous donner des explications, s'il vous plaît?

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, ce rapport a pour effet de retirer l'indemnité non imposable du sénateur Thompson. Ce pouvoir est clairement prévu au paragraphe 63(3) de la Loi sur le Parlement du Canada. L'explication, c'est que le sénateur Thompson reçoit seulement une allocation pour frais liés à ses fonctions de sénateur. Il a été suspendu du Sénat. Il n'a aucune fonction de sénateur à remplir. Il n'a donc pas besoin d'une allocation pour frais, de sorte que nous la lui retirons.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'ai une question pour le sénateur Rompkey. Je suppose que vous avez des avis juridiques à cet effet, n'est-ce pas?

Le sénateur Rompkey: Oui, nous avons des opinions juridiques à cet effet.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Présentation et adoption du onzième rapport du comité

L'honorable Bill Rompkey, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 19 février 1998

Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

ONZIÈME RAPPORT

Votre comité recommande que le Septième rapport du comité adopté par le Sénat le 16 décembre 1997 soit modifié par la suppression de l'article 2 du rapport et son remplacement par ce qui suit:

«2. Que l'indemnité du sénateur Thompson pour frais de déplacement et frais de télécommunications soit suspendue;»

Respectueusement soumis,

Le président,
WILLIAM ROMPKEY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

Le sénateur Rompkey: Maintenant, avec la permission du Sénat.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, le rapport vise à enlever au sénateur Thompson les services de soutien qu'il avait conservés en vertu d'un rapport que le comité de la régie interne a présenté antérieurement.

Vous vous souvenez sans doute que nous avions enlevé au sénateur Thompson tous ses services de soutien, sauf le privilège de se déplacer entre son lieu de résidence, en Ontario, et Ottawa. Ce privilège lui a maintenant été retiré en vertu de l'ordre susmentionné. Il s'agit d'une modification à un rapport antérieur que le comité de la régie interne avait soumis, dans lequel on retirait au sénateur Thompson certains services de soutien. Le nouveau rapport prive dorénavant le sénateur Thompson de tous les services de soutien dont il jouissait.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à mon collègue. Lorsque nous avons accepté la suspension, on nous a dit que c'était pour la session en cours. La suppression des allocations et de tout le reste ne vaut-elle que pour la session ou a-t-elle un caractère plus permanent?

Le sénateur Rompkey: L'ordre que nous avons déjà pris n'a pas changé. Il subsiste toujours. Le rapport ne fait que modifier l'ordre. Il n'est pas du tout question de la durée. Selon moi, ces mesures s'appliquent jusqu'à la fin de la session, soit la période de suspension.

Le sénateur Lynch-Staunton: La durée de la suspension est précisée dans le dixième rapport. C'est très clair. Le onzième rapport ne parle pas, dans la modification du septième rapport, d'une période de suspension, puisqu'il n'en était pas question, à ce moment-là. Il était un membre en règle qui siégeait et avait tous les privilèges. Nous avons fait disparaître les avantages indirects. J'espère qu'il n'y a pas de contradiction entre ce rapport et ce que nous avons fait plus tôt. Je veux simplement le préciser pour être certain que nous ne faisons pas fausse route.

Le sénateur Rompkey: Excellente observation. Nous voulons certainement, dans ce rapport, nous conformer aux autres ordres pris au sujet du sénateur Thompson.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai été avisé par écrit que l'honorable sénateur Hébert est le leader adjoint suppléant au Sénat.

(Le Sénat s'ajourne au mardi 24 février 1998, à 14 heures.)


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