Aller au contenu
Séances précédentes
Séances précédentes
Séances précédentes

Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 36e Législature,
Volume 139, Numéro 23

Le jeudi 16 décembre 1999
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 16 décembre 1999

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Richard G. Greene

Hommages à l'occasion de sa retraite

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, j'aimerais, au nom du Sénat, dire un mot d'adieu spécial à un homme que je suis fière de pouvoir appeler ami, M. Richard Greene, notre greffier adjoint, qui prend sa retraite. Je ne voudrais pas que Richard nous quitte avant qu'il soit dit publiquement combien je me fiais à la sagesse, au savoir et aux compétences qu'il mettait généreusement à ma disposition, et cela, bien avant que je n'entre au Sénat.

En lisant son curriculum vitae hier, j'ai appris qu'il avait commencé sa carrière ici en tant que page, en 1956. C'est l'année même où je quittais Lethbridge pour une aventure qui devait m'amener, en compagnie d'autres jeunes étudiants canadiens et américains, un peu partout au pays et jusqu'aux Nations Unies pendant une semaine. J'avais alors 16 ans et je n'étais jamais allée plus à l'est que Medicine Hat. C'était ma première visite à Ottawa et sur la colline parlementaire. Pendant que je grimpais l'escalier de la tour de la Paix, comme le font chaque année des milliers d'étudiants, Richard me devançait, entamant ce qu'il croyait probablement être une simple initiation au travail. Mais nous avons tous les deux attrapé le virus qui hante ces murs et nous en avons fait le lieu de travail de toute une vie.

Quand j'ai rencontré Richard pour la première fois, je travaillais auprès du premier ministre Trudeau. On m'avait dit qu'une partie de mon travail consistait à «bien m'entendre» avec le Sénat. La première priorité était, bien sûr, de rencontrer une certaine Jean Sutherland, qui était considérée avec tout le respect qui convenait comme, et je cite, «la dame qui dirige le Sénat». D'après ce que j'ai pu recueillir à l'époque, elle semblait constituer un élément clé du bon fonctionnement de ces lieux.

Jean Sutherland avait un jeune assistant qui savait à peu près tout sur le fonctionnement du Sénat, les étapes de la législation et les pièges dans lesquels peut tomber un gouvernement négligent qui ne respecte pas la procédure en matière de consultation et de coopération. Il était là aussi pour empêcher les gens comme moi d'embêter Jean Sutherland et il devait donc être au courant de tout ce qu'elle faisait.

L'assistant en question, c'est bien sûr Richard Greene. Outre ses compétences, Richard était un homme charmant et nous sommes immédiatement devenus de très bons amis, même si je l'appelais en principe quand quelque chose risquait d'aller mal.

J'irais jusqu'à dire que le Sénat du Canada n'a jamais eu d'employé aussi loyal que Richard Greene. Peu importaient les pressions, ce qui lui importait, c'était que tout fonctionne bien dans cet endroit, et non pas les préoccupations de ses occupants, quel que fût leur parti. Je ne l'ai jamais vu perdre patience ou son sens de l'humour, contrairement à moi. Je regrette qu'il ait décidé de nous quitter, mais je sais que sa famille réelle - Ethel, Lesley et Steven - sera ravie d'être le centre de son attention.

La semaine dernière, honorables sénateurs, cette Chambre a adopté une motion afin de désigner Richard comme haut fonctionnaire honoraire de cet endroit, avec ses entrées au Sénat et un siège au Bureau à l'occasion de cérémonies. J'espère qu'il remplira pleinement ces fonctions et qu'il passera un peu de temps avec nous dans l'intervalle.

Je veux assurer à Richard que nous serons toujours amis. Je lui adresse tous mes meilleurs voeux pour les nouveaux défis et les nouvelles aventures que la vie lui réserve.

(1410)

L'honorable Sharon Carstairs: Honorables sénateurs, lorsque Richard Greene est arrivé ici en 1956, il faisait partie d'un nouveau groupe de sénateurs qui comprenait des gens comme Chubby Power, David Croll, Hartland Molson, Muriel McQueen Fergusson et mon père, Harold Connolly. À partir du moment où il a commencé à travailler dans cette enceinte, j'ai commencé pour ma part à venir visiter cette enceinte, car je venais fréquemment avec mon père au cours de ses premières années ici.

J'ignore si Richard le sait, mais c'est à cause de moi qu'une Cadillac noire en a frappé une autre devant l'entrée du Sénat lorsque la femme du sénateur Basha a insisté pour que je conduise la Cadillac du sénateur Basha. Lui et moi nous rappelons qu'à l'époque, il y avait encore des travaux de sculpture en cours dans les couloirs. On montait et démontait les échafaudages et du jour au lendemain apparaissait une nouvelle gargouille. Ce sont les souvenirs que j'ai en tant que jeune fille de 12 à 15 ans errant autour de cet endroit. Je partage ces souvenirs avec Richard Greene.

Honorables sénateurs, il y a un lien spécial entre le poste de leader adjoint du gouvernement au Sénat et le poste occupé par Richard - c'est-à-dire jusqu'à l'annonce de sa retraite. Chaque jour, normalement autour de 10 ou 11 heures, Richard Greene arrivait dans le bureau du leader adjoint avec les «scroll». Beaucoup de sénateurs ignorent ce que c'est, mais ce sont ces longs bouts de papier que tiennent le leader adjoint du gouvernement et le chef de l'opposition. Ils indiquent ce qui va se produire dans cette enceinte. Je m'assoyais avec Richard et nous décidions si cela convenait pour cette journée-là. Par cela, je veux dire que Michelle MacDonald, mon adjointe, avait grand plaisir à chercher les erreurs de Richard. Nous n'en trouvions pas très souvent, mais lorsque nous le faisions, nous nous amusions du fait que le document ne soit pas arrivé sous une forme parfaite comme d'habitude. Michelle se joint à moi pour dire que ces moments quotidiens dans mon bureau nous manquent beaucoup.

Richard était un professionnel consommé. Il avait une capacité incroyable d'écouter, de prendre note de ce qu'il avait entendu et de faire tout ce qu'il pouvait pour faciliter un petit peu la vie non seulement au leader adjoint et au leader du gouvernement au Sénat, mais également à tous les autres sénateurs dans cette enceinte. J'avais besoin de son appui et de son aide, et il me les a donnés volontiers avec affection et humour.

Je vous remercie pour ces années pendant lesquelles nous avons travaillé ensemble, Richard. Vous allez nous manquer.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, il y a ici une intrigue que nous n'avions pas vue. Mon bon ami M. Greene a tenté un bon coup. Comme il a une très bonne mémoire et qu'il se rappelle de tout ce qui s'est passé à la Chambre des communes comme au Sénat, je suis persuadé qu'il n'a pas oublié que lorsque le premier ministre Pierre Elliott Trudeau a annoncé son départ, le Parlement a siégé pendant des heures. Tellement d'hommages lui ont été rendus que nous connaissons tous la suite: il est revenu. Je crois que cet événement a beaucoup marqué M. Greene.

Honorables sénateurs, j'ai du mal à croire que le doyen des membres du personnel des deux Chambres puisse m'abandonner ainsi. Je sais qu'après son départ je deviendrai le deuxième plus ancien ici, après Herb Gray, de l'autre endroit.

M. Greene et moi avons souvent voyagé et travaillé ensemble. M. Greene et son épouse ont été très gentils envers l'une de mes soeurs au cours d'un voyage et nous sommes devenus de bons amis.

Honorables sénateurs, je n'ai pas préparé de notes parce que je ne voulais pas que, mes commentaires prennent un ton trop officiel. Richard nous manquera beaucoup, mais je continue de croire qu'en fin de compte, il ne nous quittera pas vraiment. Regardez-le maintenant, tout souriant en entendant les commentaires élogieux que nous avons à son égard. Il n'aura bientôt d'autre choix que de dire quelque chose du genre: «Je me suis rendu compte combien vous étiez tristes de me voir partir et j'ai changé d'idée. Je vais rester.» J'espère sincèrement que c'est ce qui va arriver.

Néanmoins, s'il décide de quitter réellement cet endroit, je veux qu'il sache que, pour ma part, je lui conserverai toujours mon amitié. Au nom de tous les honorables sénateurs, j'aimerais lui offrir personnellement, à lui, à son épouse et à tous ses amis, nos meilleurs voeux.

L'Association parlementaire Canada-Europe

L'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, tenue du 13 au 15 octobre 1999

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, plus tard aujourd'hui, je déposerai au Sénat le rapport sur la deuxième conférence de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, intitulé: «Les coopérations économiques sous-régionales en Europe face aux nouveaux enjeux». Cette conférence a eu lieu à Nantes, en France, du 13 au 15 octobre 1999.

L'histoire et la théorie du régionalisme économique ont pris vie à la conférence de Nantes sous le leadership créateur de notre bon ami Jacques Floch, député distingué de l'Assemblée nationale française. Lorsque Jacques, qui est président du comité de l'économie de l'OSCE, m'a invité, en ma qualité de vice-président de ce même comité, à décrire une région unique du Canada, aucune ne m'a paru plus attrayante que le Nord canadien.

Si vous regardez un globe de haut en bas, vous verrez que la région circumpolaire est la région la plus vaste qui reste encore inexploitée et dont on n'a pas encore établie la carte. Vous remarquerez que l'Amérique du Nord et l'Europe sont géographiquement de proches voisins. Seul un étroit bras de mer sépare les États-Unis de la Russie, là où se trouvait le pont continental appelé détroit de Béring. Le Canada est le reflet des territoires septentrionaux de la Russie, et si on laisse courir son regard vers l'est, au nord du 60e parallèle, on aperçoit l'extrémité septentrionale des pays scandinaves: la Norvège, la Suède, le Danemark, la Finlande, l'Islande et les États baltes. Rappelez-vous le rêve d'un passage vers la Chine par le nord-ouest qui animait les premiers explorateurs, comme Jacques Cartier, qui, il y a plus de cinq siècles, s'est embarqué pour le Canada de Saint-Malo, au nord de Nantes, où a eu lieu notre conférence.

Le passage du Nord-Ouest, qui traverse le sommet du globe, est long de 2200 à 2900 milles nautiques, suivant la route exacte. On nous dit qu'une route maritime établie suivant un plan proposé par la Russie pourrait raccourcir la route maritime entre l'Europe et l'Asie de 35 à 60 p. 100. L'effet évident que cela aurait sur le coût du voyage et la rentabilité pourrait entraîner le développement économique des régions tout le long de cette nouvelle route maritime.

À titre de coprésident du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis, j'ai assisté à une conférence à Washington au cours de laquelle le sénateur Murkowski de l'Alaska, notre coprésident américain, a brossé un tableau enthousiasmant de la vision qu'il avait esquissée à notre réunion de Québec, plus tôt cette année. Il a proposé que le Canada et les États-Unis unissent leurs efforts pour créer un lien ferroviaire nord-sud entre l'Alaska, le Yukon et la Colombie-Britannique, jusqu'à la frontière américaine, en achevant un tronçon de 900 milles. Le sénateur Murkowski a également évoqué l'idée d'une autre liaison ferroviaire au-delà des côtes de l'Arctique. Cette liaison ferroviaire aboutirait par un tunnel sous le détroit de Béring jusqu'en Russie continentale. À cet endroit, l'Eurasie et l'Amérique du Nord ne sont séparées que par une cinquantaine de milles. Elles se touchent comme deux doigts tendus l'un vers l'autre. Il pourrait donc y avoir une liaison ferroviaire et peut-être même routière entre la Russie, les États-Unis et le Canada, grâce à la technologie mise au point en Europe pour le tunnel sous la Manche.

Imaginez qu'on puisse se rendre de Londres à Paris en train, emprunter ensuite un transsibérien à grande vitesse pour traverser la Russie jusqu'au Pacifique, franchir ensuite le détroit de Béring pour atteindre l'Alaska, descendre rapidement vers le sud en passant par le Yukon et la Colombie-Britannique jusqu'à Vancouver, puis filer vers le sud jusqu'à Hollywood ou, vers l'est, jusqu'à New York ou Halifax, sur la côte Atlantique. Tout cela sera possible, économiquement, au début du prochain siècle. Cela pourrait transformer la plate-forme stratégique de l'économie mondiale et modifier profondément les relations stratégiques et économiques.

Je tiens à remercier de nouveau Jacques Floch, de France, de nous avoir incités à imaginer un grand projet septentrional pour le XXIe siècle, un projet qui suscitera de nouveaux partenariats économiques pour le plus grand bien de tous les habitants de la planète.

Je profite de cette occasion pour souhaiter à tous les sénateurs un heureux nouveau millénaire.

[Français]

Ces Canadiennes qui ont marqué notre histoire

L'honorable Lucie Pépin: Honorables sénateurs, le siècle qui s'achève a été témoin d'importants changements pour les Canadiennes dans toutes les sphères d'activité. Ces changements n'auraient pas été possibles sans les efforts inlassables de plusieurs femmes vraiment exceptionnelles, des femmes qui n'ont pas eu peur de travailler inlassablement pour obtenir la justice sociale et d'innover malgré de fortes oppositions.

En tant que société, nous leur devons beaucoup. À la veille du nouveau millénaire, il n'est que juste de les rappeler à notre souvenir et de leur rendre hommage.

[Traduction]

Faute de temps, je ne saurais nommer tout le monde. Si je n'en nomme aujourd'hui que quelques-unes, ma sincère reconnaissance va à toutes les Canadiennes qui ont servi la cause de l'égalité des femmes au cours du siècle qui s'achève.

[Français]

Nous célébrons cette année le soixante-dixième anniversaire de l'affaire «personne». Impossible de parler d'évolution des femmes sans mentionner ces cinq célèbres Canadiennes: Irene Parlby, Nellie McClung, Emily Murphy, Henrietta Muir Edwards et Louise McKinney, qui ont amené le comité judiciaire du Conseil privé à déclarer que le mot «personne» dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique incluait les femmes et que les femmes pouvaient être nommées au Sénat.

Et que dire d'Agnes MacPhail, première femme à être élue à la Chambre des communes en 1921? Sans elle et sans ces cinq célèbres Canadiennes, combien d'entre nous seraient ici aujourd'hui?

(1420)

Mme Thérèse Casgrain a été la première Canadienne à diriger un parti politique. De 1942 à 1962, elle a été élue neuf fois dans des assemblées législatives fédérale et provinciales. Présidente de la Ligue des droits des femmes, elle a contribué à la fondation de la Fédération des femmes du Québec ainsi que de la Voix des femmes, mouvement qui lutte pour la paix. Mme Thérèse Casgrain restera dans notre mémoire principalement pour avoir obtenu le droit de vote pour les femmes au Québec.

Jeanette Viviane Corbière Lavell est une autre femme exceptionnelle qui a consacré sa vie à défendre le droit des femmes autochtones. En 1971, elle a contesté l'article 12 de la Loi sur les Indiens, qui faisait perdre le statut d'Indien aux femmes autochtones qui épousaient des non-autochtones. La Cour suprême rejeta sa requête, mais Sandra Lovelace décida de porter l'affaire devant la Commission des droits de la personne des Nations Unies, et la Loi sur les Indiens a été modifiée en 1985.

Il y a aussi Madeleine Parent qui, pendant 40 ans, a été active dans le mouvement syndical au Québec. En 1942, elle a présidé à la syndicalisation des usines de fabrication de vêtements Dominion Textiles, qui employaient surtout des femmes. Il ne faut pas oublier aussi feu sénateur Yvette Rousseau, qui a été une des pionnières de la syndicalisation dans les usines de fabrication du vêtement.

Il ne faut pas oublier Kay Livingston, présidente fondatrice de la Canadian Negro Women's Association, qui a été la cheville ouvrière du premier congrès national des femmes noires à Toronto. Le congrès existe encore aujourd'hui, un témoignage durable de ses efforts.

Entre autres héroïnes canadiennes, mentionnons Elizabeth Bagshaw, le docteur Marion Powell et le docteur Lise Fortier. Le docteur Bagshaw a été directrice de la première clinique de contrôle des naissances au Canada. Elle a dirigé la clinique de l'Ontario, illégalement, de 1932 à 1966. Le docteur Powell a fait de même à Toronto. Pour sa part, le docteur Lise Fortier a établi la première clinique de planification des naissances au Québec et a lutté inlassablement pour obtenir le droit au libre choix pour les femmes au Canada.

Nombreuses sont les femmes exceptionnelles qui ont marqué notre histoire, que ce soit dans les domaines de la politique, des soins de la santé ou des droits de la personne. Toutes ont fait preuve de courage, de ténacité, de leadership et de talent. Sans elles, le Canada ne serait pas la démocratie vivante, prospère et exemplaire qu'il est aujourd'hui. Espérons que le XXIe siècle aura autant d'héroïnes que cette dernière décennie en a eues. Et puissent ces paroles de Nellie McClung inspirer nos héroïnes de demain:

Il faut jamais renoncer, s'expliquer ou s'excuser, mais faire ce qu'il faut faire et laisser dire.

[Traduction]

Le Sénat

L'état de santé du sénateur Willie Adams

L'honorable Isobel Finnerty: Honorables sénateurs, je suis très heureuse de signaler que le sénateur Willie Adams, qui a subi une opération chirurgicale importante, hier, se remet extrêmement bien et, espérons-le, sera de retour bientôt. Le pronostic est excellent.

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune de la femme de Richard Greene, Ethel, et de leur fils, Steve.

Honorables sénateurs, je sais que les Présidents ne sont pas autorisés à faire une allocution, mais, en cette occasion, je voudrais remercier personnellement Richard, un ami avec qui j'ai travaillé pendant plus de 29 ans.


AFFAIRES COURANTES

Sécurité et services de renseignement

Dépôt de la réponse du gouvernement au rapport du comité spécial

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, avec un plaisir que partageront sûrement d'autres sénateurs lorsqu'ils la liront, la réponse du gouvernement au rapport du Comité spécial du Sénat sur la sécurité et les services de renseignement.

La situation actuelle du régime financier canadien et international

Présentation du rapport du comité des banques et du commerce demandant l'autorisation d'engager du personnel et de voyager

L'honorable E. Leo Kolber, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:

Le jeudi 16 décembre 1999

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

TROISIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat le mardi, 23 novembre 1999 à examiner la situation actuelle du régime financier canadien et international et à faire rapport au plus tard le 31 décembre 2000, demande respectueusement que le Comité soit autorisé à retenir les services d'avocats, de conseillers techniques et de tout autre personnel jugé nécessaire, ainsi qu'à se déplacer d'un endroit à l'autre au Canada et à l'étranger aux fins de son enquête.

Le budget fut présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration le jeudi 16 décembre 1999. Dans son deuxième rapport, le Comité de la régie interne a noté qu'il procède à une étude de la situation budgétaire des comités du Sénat et fait la recommandation que 6/12 des fonds accordés soient libérés d'ici le 10 février 2000. Ce rapport fut adopté par le Sénat le mardi 14 décembre 1999.

Respectueusement soumis,

Le président,
E. LEO KOLBER

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Kolber, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Régie interne, budgets et administration

Dépôt du troisième rapport du comité

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le troisième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration concernant la nomination du sous-greffier et greffier principal des services législatifs.

Avec la permission du Sénat, je voudrais dire ici quelques mots.

Son Honneur le Président: Permission accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Rompkey: Honorables sénateurs, je tiens à souhaiter la bienvenue à Gary O'Brien dans son nouveau poste.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Rompkey: Gary n'a pas besoin de présentation. Il nous sert fidèlement et bien. Il n'a l'air de rien, mais son humilité cache une grande expérience et un grand savoir. Il est vrai dans son cas qu'il faut se méfier de l'eau qui dort. M. Gary O'Brien, Ph.D., est professeur de métier et est notamment un spécialiste de John F. Kennedy. C'est un enseignant. Il participe à un certain nombre d'activités extraparlementaires pour le plus grand honneur de notre assemblée.

Par-dessus tout, Gary nous a fourni un service hors pair. C'est une de ces personnes pour lesquelles le mot service a un sens. J'ai été impressionné par le souci dont fait preuve Gary dans le cadre des services qu'il nous fournit. Il veut que les choses soient faites comme il faut et il ne ménage aucun effort à cette fin. Je sais qu'il conservera cette attitude dans son nouveau poste.

Je vous souhaite la bienvenue dans votre nouveau poste, Gary, et je vous offre nos félicitations.

Honorables sénateurs, je veux aussi remercier Richard Greene qui, entre autres choses, a un grand sens de l'humour.

Permettez-moi de raconter une histoire apocryphe. Je ne vous dirai pas qui en est l'auteur, mais je me suis laissé dire qu'au moment de l'arrivée de Richard au Sénat, il y avait sur place un habit pour la personne qui comblerait le poste. C'était un habit pour un homme de faible taille et d'assez forte constitution. Richard avait tout ce qu'il fallait pour hériter de cet habit. Il a obtenu le poste et il est avec nous depuis ce temps. Par conséquent, on peut dire qu'au Sénat, dans le cas de Richard, l'habit fait le moine.

Le sénateur Carstairs a dit que Richard a connu un certain nombre de prises de bec, dont une à laquelle elle a aussi été mêlée. Je suis convaincu que Richard a eu connaissance de plus d'une prise de bec dans cette Chambre au fil des ans.

Richard a exercé un véritable pouvoir en cette enceinte, y étant chargé de la sanction royale. Comme vous le savez tous, des juges remplacent parfois le Gouverneur général à l'occasion de nos cérémonies de sanction royale. Toutefois, ils doivent avoir en leur possession l'autorisation écrite pertinente d'agir de la sorte. Il est arrivé que d'éminents juristes du pays se présentent ici pour la cérémonie sans avoir l'autorisation écrite pertinente et Richard les a renvoyés pour qu'ils aillent se la procurer. Ça, c'est l'exercice du pouvoir.

(1430)

Richard, je vous transmets aussi les félicitations de Gerry et de Nicky.

Honorables sénateurs, je désire également féliciter les greffiers au Bureau qui ont accédé à d'autres postes. Nous leur souhaitons la bienvenue dans leurs nouvelles fonctions. Nous les félicitons et nous les remercions de leur travail dans le passé. Nous savons qu'ils continueront à nous fournir un travail de haute qualité dans l'avenir.

Je tiens aussi à remercier toutes les personnes qui travaillent pour nous, ici comme ailleurs, et qui tiennent nos dossiers. Nous les remercions du service de haute qualité qu'ils nous ont fourni. Je souhaite à chacune d'entre elles et à tous les honorables sénateurs de très joyeuses fêtes.

[Français]

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée à l'honorable sénateur Nolin de prendre la parole?

Des voix: D'accord.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, j'aimerais aussi, à titre de vice-président de votre comité de la régie interne, des budgets et de l'administration, souhaiter à Gary O'Brien la bienvenue et toute la chance nécessaire pour accomplir ce travail.

Je connais assez bien Gary, ayant travaillé avec lui au cours des cinq dernières années au comité de la régie interne. C'est un homme très efficace, mais très réservé. Comme le disait le sénateur Rompkey, derrière ce visage sombre se cache certainement un homme efficace et joyeux. Je me joins donc au sénateur Rompkey pour lui souhaiter bonne chance ainsi qu'à ses collègues du Bureau qui ont accédé récemment à de nouvelles responsabilités.

[Traduction]

La Loi sur la défense nationale
La Loi sur l'identification par les empreintes génétiques
Le Code criminel

Rapport du comité

L'honorable Lorna Milne, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant:

Le jeudi 16 décembre 1999

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

TROISIÈME RAPPORT

Votre Comité, auquel a été déféré le Projet de loi S-10, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et le Code criminel a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 18 novembre 1999, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les amendements suivants:

Page 9, article 1: ajouter, après la ligne 22, ce qui suit:

«(3) Dans le cas de l'ordonnance visée aux articles 196.14 ou 196.15 ou de l'autorisation visée à l'article 196.24, l'agent de la paix - ou toute personne agissant sous son autorité - peut également, aux fins de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, prendre les empreintes digitales de l'intéressé.»

Page 18, article 19:

a) Substituer, à la ligne 25, ce qui suit:

«19. (1) Le passage du paragraphe 487.06(1);»

b) Ajouter, après la ligne 38, ce qui suit:

«(2) L'article 487.06 de la même loi est modifié par adjonction, après le paragraphe (2), de ce qui suit:

(3) Dans le cas de l'ordonnance visée aux articles 487.051 ou 487.052 ou de l'autorisation délivrée au titre des articles 487.055 ou 487.091, l'agent de la paix - ou toute personne agissant sous son autorité - peut également, aux fins de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, prendre les empreintes digitales de l'intéressé.»

Respectueusement soumise,

La présidente,
LORNA MILNE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Milne, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

La Loi sur la statistiqu
La Loi sur les Archives nationales du Canada

Projet de loi modificatif-Première lecture

L'honorable Lorna Milne présente le projet de loi S-15, Loi modifiant la Loi sur la statistique et la Loi sur les Archives nationales (documents de rencensement).

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Milne, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance du mardi 8 février 2000. )

L'Union interparlementaire

Dépôt du rapport du Groupe canadien de l'Union interparlementaire sur la cent deuxième conférence interparlementaire tenue à Berlin, en Allemagne

L'honorable Sheila Finestone: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport du Groupe canadien de l'Union interparlementaire, qui a représenté le Canada à la cent deuxième conférence interparlementaire tenue à Berlin, en Allemagne, du 9 au 16 octobre, 1999.

Dépôt du rapport du Groupe canadien de l'Union interparlementaire sur la 54e session de l'Assemblée générale des Nations Unies tenue à New York

L'honorable Sheila Finestone: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport du Groupe canadien de l'Union interparlementaire, qui a représenté le Canada à la 54e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, tenue à New York du 25 au 27 octobre 1999.

L'Association parlementaire Canada-Europe

Dépôt du rapport de la délégation canadienne à la conférence de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe tenue du 13 au 15 octobre 1999

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l'Association parlementaire Canada-Europe intitulé: «Document de Nantes», qui porte sur la deuxième conférence de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, tenue du 13 au 15 octobre 1999 à Nantes, en France, où il a été question des processus de coopération économique infrarégionale en Europe à la lumière des nouveaux défis à relever.

[Français]

L'Association interparlementaire Canada-France

Dépôt du rapport de la vingt-neuvième réunion annuelle de la délégation canadienne tenue du 8 au 15 septembre 1999

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la vingt-neuvième réunion annuelle de la délégation canadienne de l'Association interparlementaire Canada-France, qui a eu lieu à Montréal, Laval, Ottawa, Vancouver et Victoria, du 8 au 15 septembre 1999.

[Traduction]

L'Union interparlementaire

Rapport du Groupe canadien de l'Union interparlementaire sur la cent deuxième conférence interparlementaire tenue à Berlin, en Allemagne-Avis d'interpellation

L'honorable Sheila Finestone: Honorables sénateurs, je donne avis que, le 8 février 2000, j'attirerai l'attention du Sénat sur le rapport du Groupe canadien de l'Union interparlementaire sur la cent deuxième conférence interparlementaire tenue à Berlin du 9 au 16 octobre 1999.

PÉRIODE DES QUESTIONS

L'agriculture et l'agroalimentaire

Le sort des agriculteurs céréaliers de l'Ouest-La réponse au rapport du comité de la Chambre des communes

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'ai été très déçu de lire ce matin dans le National Post que le premier ministre se penchera sur la question de la crise dans l'agriculture seulement après la période des fêtes. Je pose des questions à ce sujet depuis un an et demi. Les premiers ministres provinciaux et même Dennis Mills maintenant - et je lui en sais gré - indiquent qu'ils vont attirer l'attention des citadins de Toronto au moyen d'une journée de secours.

Le comité de l'agriculture de la Chambre des communes s'est rendu dans les Prairies et j'ai participé à deux de ses huit rencontres. Ce comité a fait de l'excellent travail. Il a reconnu qu'il existe de graves problèmes, que l'agriculture est en crise et que le programme ACRA ne donne pas les résultats escomptés.

Le comité a-t-il fait part de ses constatations au premier ministre et au Cabinet? Nous partons en congé pour la période des fêtes. Le Sénat s'ajournera sans doute ce soir. Je crois comprendre que la Chambre des communes ne reprendra probablement pas ses travaux avant le 7 février. Ce dossier ne peut attendre. La situation est grave. Le comité a-t-il fait des recommandations au premier ministre et au Cabinet à la suite de ce qu'il a constaté dans les Prairies?

(1440)

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je dirai comme l'honorable sénateur que le comité de la Chambre des communes a fait un excellent travail pendant qu'il était dans les Prairies. Il y a entendu des opinions fortes dont il a fait part au premier ministre, au ministre de l'Agriculture et à d'autres ministres.

Le premier ministre a eu l'occasion de parler aux membres du Cabinet de la tournée du comité dans les Prairies et il est très au courant du problème. Il se peut qu'il n'y ait pas, comme il a été dit dans l'article, de réunion formelle des premiers ministres d'ici Noël, mais rien ne permet de supposer que le premier ministre a décidé de mettre ce problème sur une voie de garage.

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, on peut se demander quel degré d'urgence la situation devra atteindre avant que le premier ministre ne s'en occupe. Le premier ministre a-t-il rencontré le comité? J'étais secrétaire parlementaire du premier ministre Mulroney et il n'en fallait pas tant que cela aux gens qui avaient un grave problème pour organiser une rencontre avec lui. Ce comité a fait un merveilleux travail - et j'étais là pour le voir. Il a reconnu que le programme ACRA ne fonctionnait pas, qu'il fallait entièrement réorienter le secteur agricole touché et que c'était un problème national très grave. Je ne peux comprendre pourquoi il ne réussit pas à obtenir une rencontre avec le premier ministre.

Le sénateur Lynch-Staunton: Sur quel terrain de golf est-il? C'est ce qu'il faut découvrir.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, j'ignore quelles rencontres ont pu avoir lieu entre le premier ministre et les membres de ce comité. Je sais cependant que les membres du comité, individuellement ou en groupe, ont fait part de leur opinion au premier ministre, au ministre de l'Agriculture et à d'autres aussi. Quant aux arrangements qui seront pris pour la tenue d'une rencontre formelle, je n'en sais rien pour le moment. Je suis convaincu que le premier ministre connaît les opinions des membres du comité et qu'il s'occupera du problème au cours des prochaines semaines et des prochains mois, même s'il n'y a pas de rencontre formelle des premiers ministres.

Les difficultés des céréaliculteurs de l'Ouest

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire à poser à cet égard. Si la mère de David Milgaard essayait de rencontrer le premier ministre actuel plutôt que le précédent, je pense que David Milgaard croupirait toujours en prison.

Des voix: Oh, oh!

Le sénateur Tkachuk: Eh bien, le temps est venu de hausser le ton dans cette pièce!

Le sénateur Graham: Soyez raisonnable. Posez une question.

Le sénateur Tkachuk: Je le suis. De ce côté-ci de l'enceinte, nous avons été très patients. Nous posons ces questions depuis un an et demi. Ce n'est pas comme si nous ne l'avions fait qu'hier. Le sénateur Gustafson a posé ces questions, tout comme le sénateur Andreychuk. Je l'ai fait moi aussi. Même des sénateurs d'en face l'ont fait; c'est le cas, notamment, du sénateur Sparrow. Nous avons posé cette question à maintes reprises et la seule réponse que nous ayons obtenue, c'est: «Nous allons examiner cela. Peut-être que le programme est mauvais.» Tout le monde sait au Canada que le programme est mauvais. Tout ce que nous obtenons, ce sont des faux-fuyants, ce qui fait que la population des Prairies ne profitera pas de la fête de Noël comme M. Chrétien.

Le premier ministre s'abstiendra-t-il d'accorder des prêts et des subventions dans sa circonscription pendant la période des fêtes ou continuera-t-il d'ouvrir toutes grandes les vannes du Trésor public pour sa circonscription pendant qu'il les fermera pour les Prairies?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le premier ministre demeurera très occupé avec tous les problèmes économiques du pays et il n'aura que très peu de loisir, quelle que soit la période de l'année.

Je ne veux pas diminuer la gravité de la situation avec laquelle sont aux prises les agriculteurs, dans les Prairies notamment. Cependant, je tiens à rappeler aux honorables sénateurs que le gouvernement s'est engagé à fournir une aide non négligeable. De toute évidence, le programme - comme nous l'avons dit au cours du débat au Sénat - ne donne pas les résultats escomptés. Nous nous sommes engagés à le réexaminer et à veiller à ce que l'argent soit versé plus rapidement aux agriculteurs. En outre, depuis mon arrivée, 170 millions de dollars de plus ont été affectés au programme. Le premier ministre Romanow, qui souhaite tellement une aide supplémentaire, a choisi de ne pas s'engager à verser le même montant même si l'entente sur les fonds supplémentaires prévoit que la province doit le faire.

Je n'en suis pas sûr, mais je pense que le premier ministre Romanow a présenté un budget tout récemment. Quoi qu'il en soit, le gouvernement provincial ne semble pas avoir prévu d'accorder de nouveaux crédits. Il se contente d'en réclamer au gouvernement fédéral. Le gouvernement de M. Romanow devra venir à la table et travailler de concert avec le gouvernement fédéral.

M. Romanow se vante depuis quelques années de ses excédents budgétaires successifs. Il en est très fier, et à juste titre d'ailleurs. Toutefois, s'il veut aborder le problème, il faudra qu'il se mette à table lui aussi.

Les difficultés des céréaliculteurs de l'Ouest-L'attente d'une réponse du premier ministre

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire pour le leader du gouvernement au Sénat.

Ce n'est pas que je défende le premier ministre Romanow, qui devra répondre de ses actes en matière agricole devant ses électeurs, mais je suis en mesure d'affirmer qu'il ne sert à rien d'injecter des fonds complémentaires dans le programme ACRA, qui est mal accueilli en Saskatchewan. Ces fonds servent ailleurs, s'ils servent effectivement, mais si le programme ne convient pas aux besoins des producteurs de la Saskatchewan, quand ils ne peuvent pas en bénéficier pour la bonne raison qu'ils ne remplissent pas les critères, à quoi sert-il d'en augmenter les crédits fédéraux ou provinciaux? Le premier ministre Romanow a été avisé, à mon avis, de ne pas investir davantage dans un mauvais programme.

J'estime par conséquent que la réponse donnée par le leader du gouvernement ne dédouane pas ce dernier. La Saskatchewan souhaiterait que le premier ministre commence par dire clairement que la question le préoccupe. Une telle déclaration convaincrait la population de la province que le Canada prend à coeur ses intérêts. Ensuite, il devra indiquer que des correctifs seront apportés.

À ce jour, nous avons eu droit aux discours nobles des ministres et autres députés, mais le premier ministre n'en a certainement pas fait une priorité. Si le leader du gouvernement ne se méprend sur les intentions futures du premier ministre, alors la meilleure chose qu'il puisse faire à l'occasion de Noël, c'est de nous donner un signe tangible.

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis quelque peu en désaccord avec l'approche généreuse du sénateur à l'égard du premier ministre de la Saskatchewan. Je ne suis pas un expert en la matière, mais on me dit que les provinces ont participé à l'établissement de ces critères. Il y a eu un processus et il s'agissait d'un programme conjoint. Il est vrai que le programme ne fonctionne pas comme nous le voudrions et nous en avons discuté souvent au Sénat. Le ministre de l'Agriculture a déclaré que les lacunes devraient être examinées et corrigées.

Il me semble que cela laisse encore le premier ministre de la Saskatchewan dans une position plutôt intenable. Il insiste pour dire que la solution au problème réside dans un accroissement des crédits débloqués par le gouvernement fédéral alors que lui-même dirige un gouvernement qui accumule des excédents depuis plus longtemps que le gouvernement fédéral.

Le sénateur Tkachuk: Un gouvernement de coalition!

Le sénateur Boudreau: Je n'ai pas les chiffres en main, mais je me rappelle avoir lu que le gouvernement de la Saskatchewan avait réduit de façon importante l'aide apportée dans le secteur de l'agriculture. Ces réductions étaient de l'ordre de 60 à 70 p. 100 sur dix ans. Je pense qu'il lui incombe au moins de dire qu'il est prêt à débloquer des fonds. Le gouvernement fédéral a consacré 170 millions de dollars au programme. Si ce programme avait prévu un financement de contrepartie, le gouvernement fédéral aurait pu dire qu'il n'allait pas verser ces 170 millions de dollars à moins que le premier ministre Romanow ne verse une somme équivalente. Cela aurait été compatible avec le programme conjoint. Le premier ministre Romanow n'a pas prévu un financement et il n'a pas offert d'autres fonds.

(1450)

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, tous les partis doivent examiner le problème en Saskatchewan. En disant cela, je ne renie pas le passé. Comme ma mère le dirait, on ne répare pas une injustice par une autre injustice. Si le premier ministre Romanow ne fait pas ce qui s'impose ou n'a pas fait ce qui s'imposait, ce n'est pas une excuse pour le premier ministre du Canada. Il est responsable à l'égard de tout le pays. Nous avons besoin d'un signal de la part du premier ministre et de personne d'autre pour que les gens sachent que les problèmes de la Saskatchewan sont importants et qu'il entend s'y attaquer. Cela permettrait dans une large mesure d'améliorer le sort des gens de la Saskatchewan dont l'avenir est incertain.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je comprends la préoccupation soulevée par le sénateur Andreychuk. Je suis persuadé que ce problème qui afflige les agriculteurs des Prairies préoccupe le premier ministre. Comme je l'ai fait dans le passé, je vais certainement faire part au premier ministre et au ministre de l'Agriculture des discussions qui ont eu lieu dans cette enceinte.

[Français]

Les Affaires intergouvernementales

l'Ontario-La Loi sur la restructuration régionale-La détermination du pouvoir juridique de la ville d'Ottawa

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, le conseil municipal d'Ottawa a discuté et adopté hier une motion demandant à la province de l'Ontario de désigner officiellement bilingue la ville d'Ottawa qui sera créée l'an prochain. Selon un article paru dans le journal Le Droit aujourd'hui, la nouvelle ville n'aura pas le droit de se désigner bilingue. En effet, une décision de la Cour supérieure de l'Ontario aurait statué, en 1986, dans le cas de Kapuskasing, que cette ville n'avait ni le droit ni le pouvoir de se désigner officiellement bilingue. C'est donc un autre pavé dans la mare!

D'une part, la loi 25, habilitant la restructuration de la nouvelle ville d'Ottawa, est silencieuse sur la question. D'autre part, la province a rejeté la recommandation d'une requête de M. Shortliffe dont je lis l'introduction:

Je recommande que la loi habilitante établisse et désigne la cité d'Ottawa officiellement bilingue en français et en anglais.

La province aurait répondu que le nouveau conseil qui sera élu, en novembre 2000, aura le pouvoir de décider du statut linguistique de la nouvelle cité d'Ottawa. Or, cette autorité municipale de se déclarer officiellement bilingue n'existe pas. Il reviendra à la province de déclarer le statut bilingue de la nouvelle cité.

Le ministre peut-il nous dire si le premier ministre de l'Ontario joue au fou dans cette affaire en sachant très bien que la nouvelle cité d'Ottawa ne peut pas se déclarer officiellement bilingue, avec l'égalité des droits en anglais et en français? Le ministre peut-il assurer à cette Chambre qu'il cherchera à faire éclaircir cette question par les juristes et à mettre fin à l'incertitude et à la confusion créées par la décision de M. Harris?

[Traduction]

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la question soulevée par l'honorable sénateur Gauthier a été portée à mon attention plus tôt aujourd'hui. J'ai pu me renseigner à ce sujet. La nouvelle municipalité, comme toutes les municipalités de la province et, en fait, du pays, relève en effet légalement du gouvernement provincial et est assujettie à la loi provinciale. Elle exerce son autorité dans le cadre constitutionnel, autorité qui lui est conférée par une loi provinciale.

D'après mes connaissances et mes informations, la nouvelle municipalité d'Ottawa, comme toute autre municipalité de la province de l'Ontario, n'a ni la compétence ni l'autorité, en vertu de la loi qui gouverne les municipalités, pour se déclarer bilingue. Toutefois, il existe en Ontario une loi sur la prestation de services en français qui permet aux municipalités d'offrir certains services bilingues par arrêté municipal. En fait, la municipalité peut décider que des services seront offerts dans les deux langues dans certains cas. Toutefois, cela ne lui donne pas le droit de se déclarer officiellement ville bilingue. On m'a dit que c'est la province de l'Ontario qui détient ce pouvoir.

L'ancienne ville d'Ottawa, si je peux l'appeler ainsi, a agi en vertu de cette loi et de règlements municipaux pour offrir des services bilingues. On m'a expliqué que ces services bilingues resteront en place jusqu'à ce que des règlements municipaux changent cela. Déterminer si la nouvelle ville d'Ottawa sera officiellement bilingue relève de la seule compétence de la province de l'Ontario.

L'honorable Serge Joyal: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement et porte sur la même question. Lorsque j'ai eu l'occasion de prendre la parole au Sénat cette semaine, notre collègue, le sénateur Grafstein, a parlé de la possibilité que le gouvernement fédéral recoure à son autorité sur l'administration régionale de la capitale nationale ou au pouvoir d'annulation. J'étais d'avis que la seconde proposition ne serait pas la bienvenue comme premier choix.

Hier, le ministre des Affaires intergouvernementales a déclaré ceci:

Nous devons examiner les moyens constitutionnels dont nous disposons pour aider à régler la situation dans les circonstances actuelles.

Selon le journal The Toronto Star d'aujourd'hui, des spécialistes de la Constitution estiment que le gouvernement fédéral pourrait vouloir s'inspirer d'une décision de la Cour suprême du Canada rendue dans les années 60 et lui accordant le pouvoir de légiférer lorsqu'il s'agit de questions liées à la capitale nationale. Le leader du gouvernement au Sénat demandera-t-il à la ministre de la Justice et procureur général du Canada si, en vertu de la décision de la Cour suprême du Canada, le gouvernement fédéral peut invoquer son pouvoir général de légiférer sur des questions liées à des problèmes nationaux, y compris à la capitale nationale, pour faire de la nouvelle ville d'Ottawa une ville bilingue?

Le sénateur Boudreau: Je suis sûr que tous les honorables sénateurs préfèrent que ce problème soit résolu dans le cadre d'une intervention claire de la province de l'Ontario visant à déclarer la capitale nationale officiellement bilingue.

Le gouvernement a indiqué qu'il analyse les choix possibles. Aucune décision n'a encore été prise à cet égard. On peut encore espérer que le premier ministre Harris et son gouvernement interviendront de façon pertinente. Sinon, je peux transmettre la demande de l'honorable sénateur Joyal et demander au ministre compétent de se pencher aussi sur cette possibilité, si elle n'est pas déjà à l'étude.

[Français]

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, le sénateur a posé la question que j'avais en tête. Le statut de ville bilingue représente un peu plus que l'obtention de services bilingues à Ottawa. Ottawa, la capitale de notre nation, doit envoyer un message clair partout au pays en ayant un statut bilingue. Je souligne avec force que ce statut de ville bilingue représente plus que l'obtention de services en français.

[Traduction]

(1500)

Le sénateur Boudreau: Je remercie l'honorable sénateur de ce commentaire. J'essayais effectivement d'établir cette distinction. Bien qu'il puisse y avoir une mesure législative qui permette à une municipalité d'offrir des services bilingues à sa discrétion, le Sénat ne considère pas que cela confère un statut bilingue officiel à une ville. Il ne relève pas de la compétence de la municipalité de se déclarer officiellement bilingue.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, ma question complémentaire s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'ai posé une question au sénateur Joyal au sujet du pouvoir de révocation. Il a répondu et j'ai depuis lors découvert que le pouvoir de révocation a été utilisé régulièrement jusqu'à il y a environ une quarantaine d'années. Je crois comprendre qu'il est tombé en discrédit. Il existe des points de vue constitutionnels sur cette question, mais il est toujours prévu dans la Constitution.

Le leader du gouvernement au Sénat peut-il demander au procureur général du Canada si, in extremis, ce qui selon bon nombre d'entre nous semble être le cas dans cette situation, le pouvoir de révocation pourrait ou non être adopté pour une mesure législative qui, à notre avis, ne concorde pas avec le XXIe siècle et le Canada?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je suis convaincu que le procureur général analyse actuellement toutes les solutions possibles qui pourraient être adoptées. Aucune d'entre elles ne constitue une solution privilégiée. L'option privilégiée, c'est que le gouvernement et le premier ministre de l'Ontario agissent. Toutefois, je veillerai à ce que cette solution soit aussi soumise au procureur général.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, pendant six ans au Sénat et 30 ans à la Chambre des communes, j'ai assez clairement exprimé ma position sur ce qu'est véritablement le Canada.

Dans tout pays, il y a une capitale. Certains l'appellent la capitale nationale, je l'appelle la capitale fédérale parce que c'est une institution fédérale. Si la capitale nationale se doit de refléter l'histoire et la diversité de notre pays, l'honorable sénateur Hays de l'Alberta, l'honorable sénateur Marcel Prud'homme et les autres doivent s'y sentir à l'aise.

J'ai une approche différente. Je vais tout faire pour dépolitiser la question; je vais parler à un groupe au Parlement torontois, le vendredi 14 janvier, au c9ur même du Parlement provincial.

[Traduction]

Tous les sénateurs devront intervenir collectivement, certains en empruntant la voie juridique et d'autres en cherchant à persuader. Enfin, nous devrions faire comprendre aux Canadiens que nous ne demandons pas que toutes les villes soient bilingues. C'est là un autre débat.

Nous devrions faire valoir clairement - et je saurais gré au ministre de s'exprimer brièvement là-dessus - qu'il y a une différence entre le débat concernant la capitale fédérale et toutes les autres questions. C'est un débat tout à fait distinct.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je dirais aux honorables sénateurs, comme je l'ai déjà mentionné d'ailleurs, que ses mots très éloquents sur la question, je pourrais les faire miens.

Des points de vue exprimés ici à ce sujet il se dégage un certain nombre de choses. Premièrement, les sénateurs prennent très au sérieux cette affaire qui revêt un intérêt capital pour notre pays. Deuxièmement, ce n'est pas une question de débat partisan. Les sénateurs des deux côtés de la Chambre se sont prononcés là-dessus et je pense que nous avons démontré nettement qu'il ne s'agit pas d'une question de débat partisan. Troisièmement, cela concerne cette ville en tant qu'elle est la capitale nationale ou, comme dit le sénateur, la capitale fédérale.

J'ai exprimé mon point de vue sur la question et je continuerai de le faire. Les opinions des honorables sénateurs sont bien connues et doivent être prises au sérieux. Je suis convaincu que le gouvernement les partage.

[Français]

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Si une étude est faite par le procureur général du Canada sur le statut bilingue de la capitale du Canada, ne pourrions-nous pas aussi étudier l'article 16 de la Constitution concernant directement la capitale du Canada et aussi le pouvoir résiduel du Parlement canadien, à l'article 91, en vertu duquel certains pouvoirs sont donnés et reconnus par la jurisprudence pour la région de la capitale nationale du Canada?

[Traduction]

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, le procureur général agit en tant que principal avocat du gouvernement du Canada. Comme le ferait tout avocat compétent, elle étudie les options et en présente une série au gouvernement en espérant qu'aucune de ces options ne sera nécessaire et que le problème se réglera autrement.

Je m'engage à transmettre l'essentiel des remarques de l'honorable sénateur à madame le procureur général. Je suis convaincu qu'elle étudiera toutes les options disponibles, comme tout avocat consciencieux le ferait au nom d'un client.

L'honorable Sheila Finestone: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Compte tenu de la situation et de l'obligation du gouvernement de désigner Ottawa officiellement bilingue, cette désignation inclurait-elle tout le principe d'égalité aux termes du statut officiel, y compris l'égalité sur le plan des droits et privilèges, et non seulement sur celui de la langue? La question concerne l'expression même.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, de toute évidence, les ramifications du statut entièrement bilingue seraient clarifiées par le tribunal.

En plus d'avoir une conversation avec la ministre de la. Justice, ma collègue Anne McLellan, je m'engage à lui remettre la transcription des observations qui ont été faites sur le sujet ces derniers jours et aujourd'hui, et à lui demander de les prendre en considération. Je prends cet engagement non seulement à l'égard de l'honorable sénateur Finestone, mais aussi des autres honorables sénateurs qui sont intervenus sur le sujet.

Les transports

L'accord sur l'Administration de l'aéroport international de Halifax-L'obligation du gouvernement fédéral de contrôler la nature acide de l'ardoise

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question au leader du gouvernement au Sénat est suscitée par les inquiétudes formulées concernant l'arrangement entre le gouvernement du Canada et l'Administration provisoire de l'aéroport international de Halifax, qui prendra officiellement l'entière responsabilité de l'aéroport en février.

D'aucuns craignent un problème qui, à ce que je croyais, avait été réglé au début des négociations. Ma question porte sur les mesures qui doivent être prises régulièrement pour contrôler la nature acide de l'ardoise à l'aéroport et tout autour. Comme le ministre le sait, l'aéroport se situe sur une colline d'où l'eau coule dans de petits bassins, ce qui peut donner lieu à certains dangers.

(1510)

Le ministre a-t-il communiqué avec les responsables de la nouvelle administration de l'aéroport au sujet de cette question à l'égard de laquelle ils estiment que les autorités fédérales sont revenues sur leur parole?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis au courant de la situation dont parle l'honorable sénateur. Ces négociations se déroulent comme toutes négociations. On marchande des deux côtés, c'est donnant donnant. On avance sa position, on fait des compromis.

J'ai parlé aux responsables de l'administration aéroportuaire après qu'ils aient accepté et signé l'accord. Je ne pense pas qu'il ait été modifié après avoir été signé.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, il est donc exact que les 700 000 $ qui ont été convenus pour prendre des mesures correctives font toujours partie de l'accord, que, comme on le prétend, le fédéral ne continuera pas à assumer la responsabilité des dommages qui risquent de subvenir à l'avenir, et que cette question a été réglée? Est-il exact qu'une entente à cet égard est en place et que si quelque chose devait arriver, ce serait entre maintenant et la mi-février, quand la prise en charge deviendra officielle?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, autant que je le sache, l'accord couvre des questions telles que le passif environnemental et la responsabilité des coûts de fonctionnement, y compris ceux qui sont liés à l'environnement.

L'essentiel, c'est que l'accord que l'administration et le ministère des Transports ont signé visait ces questions et que, à ma connaissance, il n'a pas été modifié depuis qu'il a été signé.

Je suis certain que, comme c'est le cas dans toutes négociations, l'accord ne contient pas tout ce que voulait l'administration et contient plus que ce que le ministère des Transports était prêt à céder. Toutefois, autant que je le sache, les deux parties ont signé un accord définitif qui règle les questions soulevées par l'honorable sénateur. J'ignore s'il les règle à la satisfaction de tous, mais il les règle. Il a été signé par les deux parties.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, le ministre n'est donc pas en mesure de nous dire si les 700 000 $ par an seront disponibles pour prendre les mesures correctives nécessaires. Je suis sûr que c'est là où en sont les choses à l'heure actuelle.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, cette brève rencontre a eu lieu il y a trois semaines ou plus. Pour autant que je me souvienne, la somme de 700 000 $ devant servir à régler ce problème est incluse dans l'entente. Je vérifierai les données pour être certain de ce que j'avance, mais je me souviens très précisément que, lorsque j'ai rencontré le groupe, l'entente avait été signée. Elle traitait de toutes les questions et je ne crois pas qu'on ait modifié cette entente depuis.

Les peuples autochtones

Demande de réponse au rapport du comité sur les anciens combattants autochtones

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je félicite le gouvernement d'avoir répondu en temps opportun au rapport du Comité spécial du Sénat sur la sécurité et les services de renseignement. Nous consacrons de longues heures à la rédaction de nos rapports en cet endroit et le gouvernement les consulte souvent pour élaborer sa politique gouvernementale.

Cependant, quand pouvons-nous espérer recevoir la réponse que nous avions demandée au rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur les anciens combattants autochtones? Le sénateur Fairbairn était leader du gouvernement au Sénat à l'époque de la présentation de ce rapport. Elle nous avait assuré que nous la recevrions car le gouvernement y travaillait.

Bien des anciens combattants autochtones sont morts depuis la présentation du rapport. La réponse du gouvernement est extrêmement importante pour ceux qui sont encore en vie. Il est primordial de ne pas oublier ces gens qui ont mis leur vie en péril pour assurer notre sécurité. Quand recevrons-nous la réponse du gouvernement?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, c'est la première fois qu'on porte cette question à mon attention. Je vais communiquer avec le ministre responsable et essayer d'obtenir une réponse à la question de l'honorable sénateur au cours du congé.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je regrette, mais la période des questions est maintenant terminée.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi de crédits no 3 pour 1999-2000

Troisième lecture

L'honorable Anne C. Cools propose: Que le projet de loi C-21, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2000, soit lu une troisième fois.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, c'est très bien qu'il se soit écoulé assez de temps entre la lecture à l'étape du rapport et la troisième lecture du projet de loi C-21, car cela nous a permis de jeter un dernier regard sur ce projet de loi. J'attirerais l'attention des honorables sénateurs sur le fait que ce projet de loi s'intitule: «Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2000».

L'article 6, à la page 3 de ce projet de loi, stipule que:

[...] il est possible d'inscrire un crédit découlant de la présente loi ou de toute autre loi et prévu à l'annexe 2 après la clôture de l'exercice suivant celui pour lequel il est attribué[...]

Autrement dit, l'article 6 du projet de loi tend à autoriser des dépenses postérieurement au 31 mars 2000.

Dans la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, 6e édition, il y a à la page 258 une description des travaux des subsides et voies et moyens. Sous la rubrique «Présentation», au commentaire 933, nous pouvons lire:

Un budget de dépenses a pour objet de communiquer au Parlement les propositions budgétaires et extra-budgétaires du gouvernement pour l'exercice à venir.

Honorables sénateurs, l'article 6 du projet de loi pose un problème. Y a-t-il à cela une explication simple que pourrait nous faire partager un membre de notre comité des finances nationales qui a examiné le projet de loi en détail?

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur Kinsella de sa question. Si je comprends bien, sa question a trait au fait qu'un crédit semble chevaucher deux exercices.

S'il avait signalé ce point pendant les audiences du comité, nous aurions pu l'examiner plus en détail. Je pense que la même chose s'est produite dans le cas du dernier projet de loi de crédits et que le sénateur Bolduc avait alors soulevé la question.

(1520)

Je crois que la réponse du ministère était que le crédit avait été affecté dans une seule année, mais que les dépenses s'étendraient sur deux ans. Si nous parlons de la même chose - et je crois qu'on nous avait alors dit en substance que ce n'était pas inhabituel - cela avait l'air de devenir une pratique un peu plus courante à cause de la complexité et de la taille de ces crédits.

J'espère avoir répondu à la question du sénateur, mais je suis disposée à examiner l'affaire plus en détail. Je le répète, une partie de la question du sénateur m'a échappé.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, voici le problème et voici le principe. À la page 31 du projet de loi, l'annexe 2 prévoit ceci:

D'après le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 1999-2000, le montant accordé est de 234 733 521 $, soit le total des montants des postes de ce budget figurant à la présente annexe.

L'annexe 2 ajoute ceci:

Sommes accordées par la présente loi à Sa Majesté pour l'exercice se terminant le 31 mars 2 000, pouvant être imputées à l'exercice en cours et à l'exercice suivant se terminant le 31 mars et fins auxquelles elles sont accordées.

Cela vise surtout l'Agence des douanes et du revenu du Canada, mais la situation existe bel et bien et il faut se demander si l'on fait bien d'envisager une telle pratique. Je ne tiens pas à invoquer le Règlement à cet égard, mais le comité des finances nationales voudra bien examiner le fait qu'on vote un crédit qui doit être dépensé au plus tard le 31 mars 2000.

Le sénateur Cools: Je suis disposée à promettre au sénateur Kinsella que notre comité - et je puis consulter le président, le sénateur Murray - examinera cette question et l'étudiera plus en détail. Si le phénomène semble récurrent, nous devrions chercher à savoir pourquoi. Je prends la critique et l'opinion du sénateur très au sérieux et je m'engage à m'occuper de cette affaire.

Honorables sénateurs, hier, dans mon intervention à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-21, j'ai donné des détails substantiels sur la teneur du projet de loi. Le sénateur Murray, président du comité des finances nationales, a pris part au débat et nous a communiqué des informations très pertinentes et détaillées.

Je devrais cependant ajouter, mi-figue, mi-raisin, mais avec beaucoup de gratitude néanmoins, que j'ai cru hier que ce projet de loi avait rallié le consensus des sénateurs, que ces derniers estimaient l'avoir suffisamment et très sérieusement étudié et qu'il avait donc été examiné en bonne et due forme. Par conséquent, en ma qualité de vice-présidente du comité, et de porte-parole du gouvernement dans cette affaire, je suis intervenue hier et j'ai demandé la permission du Sénat d'avancer d'un jour la date de la troisième lecture du projet de loi.

Je dois reconnaître que, fort heureusement pour nous tous, le sénateur Lynch-Staunton était suffisamment vigilant pour bondir et me refuser son accord. Il avait parfaitement raison et je l'approuve maintenant, et si je n'avais pas été chargée de piloter le projet de loi pour le compte du gouvernement, je l'aurais appuyé hier. Il est de son devoir de surveiller le gouvernement et surtout d'être à l'affût de ce genre de choses. Il n'a pas failli à sa tâche en exigeant que cette troisième lecture n'ait lieu qu'aujourd'hui.

Honorables sénateurs, le projet de loi mérite d'être bien examiné. Je remercie encore une fois le sénateur Lynch-Staunton, car il a fait son devoir de chef de l'opposition et rempli son rôle d'une manière que nous respectons tous. En outre, il a rempli son devoir de sénateur. Ce devoir est particulièrement important, car la Constitution confère au Sénat un rôle constitutionnel à l'égard des projets de loi de crédits et le projet de loi à l'étude porte sur le pouvoir de dépenser un très fort montant d'argent.

Je remercie de nouveau les honorables sénateurs et je vous souhaite à tous un Joyeux Noël. Je suis reconnaissante du fait que nous serons tous payés.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

Projet de loi de 1999 pour la mise en oeuvre de conventions fiscales

Troisième lecture

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Hervieux-Payette, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Gauthier, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-3, Loi mettant en oeuvre un accord, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et le Kirghizistan, le Liban, l'Algérie, la Bulgarie, le Portugal, l'Ouzbékistan, la Jordanie, le Japon et le Luxembourg, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Cools de ce consentement royal, que j'apprécie énormément.

Le sénateur Andreychuk a fait hier un excellent exposé sur les inquiétudes auxquelles le projet de loi S-3 a donné lieu. Comme ses observations ont été bien suffisantes, je me ferai très bref. Au risque de répéter certaines de ses observations, je veux simplement souligner ce qui a fait l'objet du débat.

Honorables sénateurs, il est très inhabituel que l'étude d'un projet de loi sur une convention fiscale prenne tant de temps. Je crois que c'est parce que nous avons maintenant tendance à passer de l'aspect financier des traités à celui des droits de la personne. C'est une chose sur laquelle on insistera, je l'espère, avec les années.

Le gouvernement ne peut blâmer que lui-même pour l'intérêt particulier que nous avons porté à ce projet de loi, parce que son cahier de breffage était exceptionnel. Le cahier de breffage portant sur le projet de loi était l'un des meilleurs, sinon le meilleur, que j'aie jamais vus. Il donnait le contexte des conventions fiscales, il expliquait la nature de chaque convention, en quoi elles étaient toutes différentes et il donnait des informations de base sur chaque pays concerné. J'aimerais féliciter les auteurs du cahier d'avoir apporté une telle aide à ceux qui s'intéressaient au projet de loi.

Honorables sénateurs, nous avons donné du fil à retordre au leader adjoint du gouvernement lorsque nous avons insisté pour que le projet de loi soit renvoyé au comité des affaires étrangères, alors qu'il insistait - à juste titre à ce moment-là - pour qu'il soit renvoyé au comité des banques, comme c'était la coutume. Le leader adjoint a donc fait preuve de générosité en permettant que le projet de loi soit renvoyé aux deux comités. C'était quelque peu amusant et déroutant à ce moment-là, mais, rétrospectivement, je crois que cela a été un exercice profitable. Le comité des banques a examiné les conventions fiscales elles-mêmes, et le comité des affaires étrangères s'est intéressé plus particulièrement aux pays concernés - à un pays en particulier - et à la façon dont le Canada, dans sa politique étrangère, faisait entrer en considération la question des droits de la personne pour déterminer ses relations avec certains pays.

J'estime que ces projets de loi devraient plutôt être renvoyés au comité des affaires étrangères parce que, de plus en plus, la discussion relative aux conventions fiscales portera sur les pays eux-mêmes plutôt que sur la nature des conventions. Ces dernières sont toutes assez similaires. Elles sont destinées à éviter la double imposition et l'évitement fiscal.

(1530)

La question fondamentale consistait alors à savoir quel effet notre évaluation du bilan d'un pays en matière de droits de la personne devrait avoir sur notre politique étrangère. C'est ce que nous nous efforçons de déterminer en faisant un cas particulier de l'Ouzbékistan, un pays dont le bilan reste assez mitigé. Je ne répéterai pas ce que j'ai déjà dit lors du débat de deuxième lecture, mais ce n'est pas un pays avec lequel j'aimerais faire des affaires ou que j'aimerais visiter dans l'état actuel des choses. La réponse que nous avons obtenue n'est pas très satisfaisante, du moins pour moi.

Un des témoins entendus par le comité des affaires étrangères était la directrice des droits de la personne, des affaires humanitaires et de l'égalité des femmes dans le monde, au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Sa réponse a été la suivante:

D'un point de vue canadien, le Canada n'est pas un partenaire suffisamment lourd pour forcer à lui seul un pays à changer ses pratiques en matière de droits de la personne en lui imposant des sanctions unilatérales. Même des sanctions multilatérales bien appliquées ne sont pas toujours particulièrement efficaces.

Elle a également déclaré que, jusqu'à maintenant, le Canada n'avait imposé que les sanctions décidées par les Nations Unies. Il y a beaucoup de réalisme dans cette observation, mais il y a aussi, j'en ai bien peur, un renoncement aux principes.

Qu'un pays soit petit et n'ait qu'une influence marginale - ce qui n'est pas le cas du Canada -, s'il a certains principes, il ne devrait pas craindre de les mettre de l'avant et de les faire respecter. C'est ce que nous essayons d'obtenir du comité et des fonctionnaires des Affaires étrangères.

Hier, le sénateur Taylor a demandé si nous devions mélanger droits de la personne et commerce. Beaucoup croient, comme lui, que le commerce finit par se répercuter sur la situation des droits de la personne dans un pays. Je ne partage pas ce point de vue. C'est là le sujet d'une discussion philosophique dans laquelle nous n'avons pas besoin de nous engager aujourd'hui. Certaines personnes croient que l'engagement est la clé. Je crois que l'isolement et les boycotts peuvent avoir plus d'effet. Encore là, c'est une position hautement théorique pour le moment. Comme le sénateur Andreychuk l'a fait hier, nous voulons seulement bien faire ressortir que, lorsque nous concluons de tels traités, nous ne pouvons pas nous contenter de ne jeter qu'un regard distrait sur la situation des droits de la personne dans le pays en cause.

Comme le sénateur Grafstein l'a souligné au comité des affaires étrangères, chaque année, le Département d'État américain prépare une analyse approfondie du bilan de presque tous les pays du monde au chapitre des droits de la personne. Cette analyse est par la suite soumise à l'administration et au Congrès, qui en disposent alors à leur guise. Ils ont à tout le moins les données en main. Cela se fait non seulement par le département d'État et les fonctionnaires américains postés partout dans le monde, mais avec l'appui de l'organisme Human Rights Watch, d'Amnistie Internationale et d'autres ONG dont la crédibilité ne peut être mise en doute. Nous ne semblons pas accorder autant d'importance à ce genre de travail dans notre pays. Il ne s'agit pas de reproduire ce qui se fait ailleurs, mais plutôt d'utiliser les moyens disponibles pour faire appliquer les principes que nous avons tenté d'adopter en ce qui a trait aux droits de la personne.

Comme certains de nos collègues le savent, j'avais l'intention de proposer des amendements demandant la radiation de l'Ouzbékistan du projet de loi, mais je crois que j'ai été convaincu. Après avoir entendu le sénateur Andreychuk et les autres, je reconnais qu'il ne serait pas juste à ce stade-ci de traiter un pays de façon différente et de le pénaliser sans avoir recueilli d'abord davantage de renseignements. Toutefois, maintenant que la question a été soulevée, j'espère que des mesures seront prises pour que, lorsque viendra le temps de mettre au point de nouveaux traités fiscaux, les responsables pousseront leur analyse plus loin que la rédaction ordinaire d'un traité et qu'ils tiendront compte du bilan de ce pays en matière de droits de la personne avant de décider de notre engagement. Les droits de la personne ne devraient pas être le seul sujet de considération, mais il est certain qu'ils devraient faire l'objet d'une considération plus minutieuse que celle qu'on lui accorde maintenant.

L'honorable Jerahmiel S.Grafstein: Le sénateur est-il prêt à répondre à une brève question?

Le sénateur Lynch-Staunton: Bien sûr.

Le sénateur Grafstein: Je suis d'accord en principe sur tout ce que l'honorable sénateur a dit au sujet du fait que le gouvernement ne fasse pas intervenir les droits de la personne dans sa politique et de la possibilité d'associer intimement ces deux éléments de façon à exercer une pression morale sur un État fautif. L'honorable sénateur a-t-il songé, par exemple, à faire adopter une résolution à la Chambre qui fasse savoir à la délégation canadienne auprès de l'OSCE que le Sénat du Canada n'est pas satisfait du bilan des droits de la personne dans un pays donné, disons l'Ouzbékistan, et qui charge la délégation de transmettre ses doléances à l'OSCE pour débat? À une échelle plus modeste, ses préoccupations, que je partage, pourraient être soulevées devant une tribune internationale où, avec de la persuasion morale, il serait possible de rallier d'autres États à ces vues.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Grafstein de cette excellente suggestion. Elle ne m'était pas venue à l'esprit, mais je serai heureux d'y donner suite.

[Français]

L'honorable Céline Hervieux-Payette: Honorables sénateurs, permettez-moi, à l'étape de la troisième lecture, un commentaire sur les propos du chef de l'opposition ainsi que de ma collègue, le sénateur Andreychuk. Nous n'avons pas de dissension sur la question du principe des droits de la personne; c'est plutôt sur les moyens de faire avancer les droits de la personne qu'il y a une mésentente. Dans mon discours à l'étape de la troisième lecture, j'ai rappelé les actions de l'ACDI pour faciliter l'apprentissage du respect des droits de la personne, l'application de la règle de droit, de même que l'encouragement à progresser en Ouzbékistan. Le sénateur Taylor disait que nous devrions plutôt mesurer les progrès, constater si le pays va de l'avant dans l'amélioration du respect des droits de la personne ou s'il régresse avant de prendre des mesures; de toute façon, cette nouvelle démocratie vit un apprentissage difficile.

Dans ces conditions, le projet de loi S-3 est dans l'intérêt général du Canada et des populations qui bénéficieront des avantages du commerce. Il améliorera la condition des citoyens de ces pays et, en même temps, il facilitera l'avancement des droits de la personne. Lorsque les droits fondamentaux et la survie des individus sont protégés, il est plus facile d'assurer le respect de ces droits. Je propose l'adoption du projet de loi S-3.

[Traduction]

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

Projet de loi sur l'Accord définitif nisga'a

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Jack Austin propose: Que le projet de loi C-9, Loi portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a, soit lu une troisième fois.

- Honorables sénateurs, tout projet de loi qui a ou semble avoir pour objet de modifier la répartition de droits, de pouvoirs, de privilèges et de responsabilités ou encore de coutumes bien établies a peu de chances d'être adopté facilement. Cela vaut également pour celui dont nous sommes saisis. Le projet de loi C-9, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord définitif nisga'a, est un projet de loi qui en est à cette dernière étape législative. Il est le fruit d'un long processus qui date de plus de 100 ans, qui a suscité bien des controverses mais qui, espérons-le, se termine aujourd'hui même.

(1540)

Étant l'un des sénateurs qui représentent cette célèbre région du Canada connue sous le nom de Colombie-Britannique, je suis très heureux et très fier de parrainer le projet de loi C-9 et d'en recommander l'adoption. Je le fais avec l'appui des autres sénateurs de la Colombie-Britannique de ce côté-ci de la Chambre, les sénateurs Perrault et Fitzpatrick, mais j'espère aussi, en temps opportun, des sénateurs de la Colombie-Britannique d'en face. Évidemment, je sollicite l'appui et l'adhésion des sénateurs de toutes les régions du Canada.

Le projet de loi C-9 est le premier traité autochtone moderne de son espèce en Colombie-Britannique. Bien que cette mesure législative concerne strictement les Nisga'as, mes collègues et moi-même sommes convaincus que, d'une façon très large, le projet de loi C-9 encouragera le processus de réconciliation avec de nombreux peuples autochtones dans les autres localités qui forment la société de la Colombie-Britannique. Le projet de loi C-9 n'est pas un modèle, c'est-à-dire une structure pour tous les autres accords avec les divers groupes autochtones, et il en existera sans aucun doute de nombreuses variations, résultat des négociations à venir. Nous croyons que le projet de loi C-9 offre du concret et qu'il avivera le désir de négocier, ce qui est essentiel à la stabilité sociale et au progrès économique que recherchent tous les Britannos-Colombiens.

Le projet de loi dont nous sommes saisis marquera l'histoire. Il représente ce qu'il y a de mieux au Canada, c'est-à-dire la volonté des Canadiens d'écouter, de chercher le consensus, d'accepter la diversité, de trouver des solutions et d'élaborer des compromis. Ce projet de loi, qui mettra en vigueur l'Accord définitif nisga'a, marque un autre jalon dans la négociation de traités au Canada à l'ère moderne.

Avec la Convention de la Baie James et du Nord québécois au milieu des années 70 et, plus récemment, avec la Convention définitive des Inuvialuit, l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut et l'Entente-cadre finale avec les Indiens du Yukon, le Sénat a le privilège d'étudier des mesures législatives qui unissent le Canada, qui reconnaissent la place des peuples autochtones dans le tissu économique et social du Canada, et qui établissent de nouvelles relations positives entre les gouvernements et les peuples autochtones.

Honorables sénateurs, l'Accord définitif nisga'a et ce projet de loi qui le mettra en vigueur peuvent être insérés dans l'histoire des traités de l'ère moderne. Notre rôle consiste à voir si ce projet de loi reflète correctement l'accord définitif, tel que négocié par les trois parties, et s'il mérite d'être adopté en tant que loi. Je crois fermement que ce projet de loi, et l'accord auquel il se rapporte, est dans l'intérêt des Canadiens, qu'il est conforme à la Constitution et au cadre juridique du Canada, et qu'il devrait être adopté.

Avant de passer aux questions de fond, je voudrais dire aux sénateurs qui sont les Nisga'as, où ils vivent et comment l'entente sur leurs revendications territoriales et le projet de loi lui donnant effet sont arrivés au Sénat pour y être discutés. Les Nisga'as vivent le long de la rivière Nass dans une région relativement éloignée du nord-ouest de la Colombie-Britannique, 100 kilomètres au nord de Terrace et de Prince Rupert. Outre les 2 500 Nisga'as vivant dans quatre villages le long de la rivière et de son embouchure, seulement quelque 125 autres habitants permanents occupent le territoire de 24 000 kilomètres carrés de cette vallée. Les seules collectivités organisées dans la vallée de la Nass sont celles des Nisga'as.

Les Nisga'as vivant dans la vallée de la Nass forment l'un des nombreux groupes culturels des peuples autochtones de la côte Nord-Ouest. Ils ont une culture complexe fondée sur les riches ressources de la mer. Depuis des temps immémoriaux, à l'instar des autres peuples de la côte Nord-Ouest, les Nisga'as sont de grands artistes, bâtisseurs et artisans. Leur art rehausse toujours l'apparence de nombreux immeubles de leurs villages, à l'intérieur comme à l'extérieur.

Le saumon et les autres ressources de la Nass leur fournissaient nourriture et matières brutes pour leurs oeuvres sociales, artistiques et architecturales. Ici, sur les rives de la rivière Outaouais, les oeuvres culturelles et artistiques des Nisga'as peuvent être admirées dans la Grande Galerie du Musée canadien des civilisations et dans une exposition récemment montée, «Le bol commun nisga'a». On en trouve d'autres dans de nombreux musées dans le monde.

Aujourd'hui, sur 5 500 Nisgas'as, 2 500 vivent répartis dans quatre villages: Kincolith, Greenville, Canyon City et New Aiyansh. La plupart des autres Nisga'as vivent à Terrace, Prince Rupert ou Vancouver. Les Nisga'as disposent de logements et d'une infrastructure modernes. Les écoles et les centres communautaires sont constamment utilisés pour des cérémonies ou des activités sociales et culturelles.

Certains Nisga'as connaissent les mêmes difficultés que les communautés autochtones, comme le chômage et l'éclatement de la famille. Cependant, les Nisga'as se sont employés à améliorer les choses. Ils attachent beaucoup d'importance à la scolarisation et à l'enseignement postsecondaire. Les Nisga'as ont leur propre arrondissement scolaire, l'arrondissement scolaire 92. L'enseignement va de la maternelle à la douzième et s'adresse aux Nisga'as et aux autres résidents de la vallée de la Nass. Les membres du conseil scolaire, dont un résident non nisga'a, sont élus. Les Nisga'as ont aussi un collège d'enseignement postsecondaire relié à l'Université de la Colombie-Britannique. On peut y suivre des programmes menant à des diplômes, des programmes de formation en dynamique de la vie et des programmes culturels et linguistiques. Les Nisga'as ont aussi leur propre conseil des services de santé, où les non-Nisga'as sont également représentés.

Ils ont saisi toutes les occasions possibles de prendre le contrôle de l'éducation, des soins de santé, des services sociaux et des services aux familles ainsi que d'autres programmes gouvernementaux, toujours en quête de nouvelles possibilités de renforcer leurs familles et la communauté. Ils ont travaillé en coopération avec leurs voisins. Ils participent au gouvernement régional. Ils font partie du gouvernement régional par l'entremise de l'aîné, Harry Nyce, qui siège au conseil.

Les Nisga'as tentent depuis au moins 1887 de régler ce qu'ils appellent la question des terres - depuis le moment où, comme les honorables sénateurs l'ont déjà entendu, les chefs nisga'as ont fait leur premier voyage jusqu'à l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique pour tenter d'obtenir la reconnaissance de leur titre autochtone, un règlement par traité et une certaine autonomie gouvernementale. Leur voyage à Victoria a cependant été infructueux.

En 1890, ils ont établi leur premier comité chargé de la question des terres. En 1913, ce comité a envoyé une pétition au Conseil privé, en Angleterre, pour essayer d'obtenir un règlement de la question des terres. Toujours sans succès.

Des années 1920 jusqu'aux années 1950, les Nisga'as et d'autres nations ont vu leurs efforts pour la reconnaissance de leurs droits et de leur culture réprimés. Certaines pratiques traditionnelles sont devenues illégales, comme les potlatchs. La collecte de fonds devant servir la cause des revendications territoriales ou d'autres droits a été interdite. Après l'abrogation de la loi en cause en 1955, les Nisga'as ont reconstitué leur comité chargé des revendications territoriales. Sous la direction de M. Frank Calder, le conseil tribal a saisi les tribunaux de la question. Cette décision résolue montre la détermination des Nisga'as à obtenir la reconnaissance de leurs droits.

Beaucoup d'autres Premières nations craignaient que les tribunaux ne rejettent leur demande, détruisant ainsi tout espoir que leurs droits soient reconnus dans le cadre d'un processus politique. Après le rejet de leur cause par les tribunaux inférieurs, les Nisga'as l'ont portée jusque devant la Cour suprême du Canada.

En 1973, la Cour suprême a rendu sa décision dans l'affaire Calder. Bien que partagée également sur la question de savoir si les Nisga'as conservaient un titre autochtone, elle a admis la possibilité que les droits et titres autochtones existent toujours au Canada. Cette décision a beaucoup pesé dans la décision du gouvernement Trudeau d'adopter une politique de négociation des revendications territoriales là où elles n'avaient pas déjà été réglées.

Par leurs actes et leur détermination, les Nisga'as ont joué et continuent de jouer un rôle de chef de file dans la réconciliation des autochtones avec les autres Canadiens en Colombie-Britannique. Ils sont maintenant sur le point de donner l'exemple dans la mise en oeuvre de cet accord. C'est maintenant à nous, après une étude attentive, de faire notre part pour rendre cette réconciliation possible.

Le Sénat a également l'occasion ici d'appuyer solidement le principe voulant que le processus de négociation des traités en Colombie-Britannique soit valable et nécessaire. Seuls la négociation, le compromis et la largeur de vues peuvent rendre possible la conclusion de traités qui répondent aux intérêts de tous. Nous ne pouvons progresser qu'avec le plein assentiment de toutes les parties intéressées.

Les Nisga'as ont été l'un des premiers groupes à entreprendre des négociations à la faveur de ce nouveau processus. Les négociations ont débuté en 1976. Cependant, sans la participation de la Colombie-Britannique, il était impossible de progresser sur la question des terres. Le gouvernement Mulroney a continué d'insister sur les négociations, et il a réussi, en 1990, à amener le gouvernement provincial de William Vander Zalm à participer au processus, après quoi le rythme des négociations s'est accéléré.

Cinq ans après la signature de l'accord cadre sur les modalités des négociations, le gouvernement Chrétien, le gouvernement Harcourt et les Nisga'as ont signé un accord de principe qui fixait les principaux éléments de l'accord aujourd'hui à l'étude. L'accord de principe a fait l'objet de débats considérables dans l'opinion et à l'assemblée législative de la province. Les principes ainsi acceptés ont déterminé le contenu et la structure des négociations sur l'accord définitif.

(1550)

Deux ans et demi plus tard, soit en août 1998, le gouvernement Chrétien et le gouvernement de Glen Clark ont paraphé un accord définitif. C'était une grande réalisation et l'aboutissement de plus d'un siècle d'efforts persévérants de la part des Nisga'as. Ont participé à ce processus non seulement quatre gouvernements fédéraux - soit les gouvernements Trudeau, Clark, Mulroney et Chrétien - mais aussi trois gouvernements provinciaux successifs. En outre, plus de 500 consultations publiques et assemblées d'information ont été tenues en Colombie-Britannique.

Le traité nisga'a marque une étape dans la longue histoire de la conclusion de traités avec les Premières nations au Canada. C'est le premier traité canadien à prévoir l'autonomie gouvernementale, une autonomie qui respecte les droits des Nisga'as dans le cadre légal du Canada et qui a été négociée en tenant compte des droits de tous les Canadiens.

Dans ce contexte, je tiens à citer ici une déclaration que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, l'honorable Robert D. Nault, a faite, le 26 octobre 1999, à la Chambre des communes, au cours du débat de deuxième lecture. Voici ce qu'il a dit:

Le gouvernement estime que l'autonomie gouvernementale est, à l'instar des autres droits des autochtones, reconnue et confirmée par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Comme les tribunaux l'ont mentionné, il vaut mieux négocier ces droits que de laisser la question être portée en justice, et c'est justement ce que nous avons fait.

Je veux maintenant donner un aperçu de la façon dont fonctionnera le gouvernement nisga'a, car je crois que l'accord montre qu'on peut négocier l'établissement d'un gouvernement autochtone efficace et responsable et prévoir des dispositions pratiques à cet égard.

La Loi sur l'Accord définitif nisga'a et l'Accord définitif nisga'a visent notamment à moderniser le gouvernement nisga'a et à créer une structure gouvernementale démocratique, responsable et efficace pour les Nisga'as. Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien n'aura plus le dernier mot dans les décisions à caractère régional. Des limites importantes à l'autonomie gouvernementale des Nisga'as qui sont prévues dans la Loi sur les Indiens ne s'appliqueront plus et les Nisga'as seront en mesure de se donner un gouvernement qui englobe leurs collectivités et tous les membres de la nation nisga'a.

Je sais que notre collègue de la Saskatchewan, en face, le sénateur Tkachuk, a approfondi, dans son projet de loi S-14, le sujet de l'autonomie gouvernementale des autochtones. Il pourra constater avec d'autres que nombre des pouvoirs qui sont conférés au gouvernement nisga'a sont similaires à ceux qui étaient énumérés à l'annexe de l'ancien projet de loi S-14. Le gouvernement nisga'a sera un gouvernement démocratique à l'intérieur du modèle canadien établi.

D'abord, tous les hommes et les femmes nisga'as ayant atteint l'âge adulte pourront se porter candidats aux élections et voter pour les représentants de leur gouvernement. En outre, des élections doivent avoir lieu tous les cinq ans et, conformément à la Constitution nisga'a, les élus doivent faire le serment d'assurer un gouvernement bon, efficace et responsable. Le gouvernement nisga'a possède d'autres attributs propres à un gouvernement démocratique. Par exemple, il doit prévoir des lignes directives sur les conflits d'intérêts et des mécanismes visant à assurer la responsabilité financière, comme c'est le cas pour d'autres gouvernements du Canada. Il doit assumer cette responsabilité envers ses propres citoyens et envers les gouvernements dont il tirera une partie de ses fonds.

La Constitution nisga'a est au coeur de l'exercice d'un gouvernement nisga'a démocratique. Ce gouvernement fonctionnera conformément aux dispositions de la Constitution du Canada. Le traité énonce des conditions précises de la Constitution nisga'a qui doivent être respectées. Elles ne peuvent être annulées par aucun gouvernement nisga'a à venir.

Le traité renferme également des dispositions visant à protéger les droits des autres autochtones et ceux des non-Nisga'as qui habitent dans des terres nisga'as. La Constitution nisga'a doit assurer la reconnaissance et la protection des droits et des libertés des citoyens nisga'as et offrir la possibilité de contester la validité des lois nisga'as. Elle doit également renfermer des éléments clés, comme des mécanismes permettant d'en appeler des décisions administratives et d'avoir accès à l'information. Le gouvernement nisga'a comprendra des aspects uniques à la culture et au patrimoine des Nisga'as, mais il sera très reconnaissable comme gouvernement semblable à d'autres gouvernements du Canada. Il pourra et sera tenu politiquement et légalement responsable des décisions qu'il prendra.

Le gouvernement nisga'a comporte deux paliers: le gouvernement nisga'a Lisims sera le gouvernement central, chargé des aspects touchant tous les citoyens nisga'as, comme la langue et la culture. Le gouvernement Lisims sera également responsable au premier chef des relations avec d'autres paliers de gouvernement. Les quatre gouvernements des villages nisga'as composeront le deuxième palier du gouvernement nisga'a. Ces organismes seront chargés des questions locales concernant les quatre collectivités nisga'as: New Aiyansh, Gtwinksihlkw, Laxgalt'zap et Gingolx.

Le traité nisga'a tient également compte des Nisga'as vivant à l'extérieur des terres nisga'as. Le traité établit trois locaux urbains, soit Terrace, Prince Rupert et Grand Vancouver. Ils n'ont pas de pouvoirs législatifs mais participeront au gouvernement nisga'a en élisant chacun un membre du gouvernement Nisga'a Lisims.

Penchons-nous maintenant sur les pouvoirs législatifs des Nisga'as. Les seuls pouvoirs législatifs que les Nisga'as auront sont établis dans le traité. Je tiens à rappeler aux honorables sénateurs qu'il n'y a pas de pouvoirs législatifs exclusifs aux Nisga'as. Les lois fédérales et provinciales s'appliqueront aux terres nisga'as en même temps que les lois nisga'as. Cela ressemblera à ce qui se fait sur les autres territoires du Canada, où les Canadiens sont assujettis à la législation fédérale, provinciale, municipale ou régionale. Dans ce type de modèle, des règles de priorité sont nécessaires pour établir ce qui va se passer en cas de conflit ou d'incompatibilité entre deux lois valides. Le traité nisga'a renferme certaines règles de priorité dans chaque cas où le gouvernement nisga'a aura des pouvoirs législatifs.

Pour que les lois nisga'as soient valides, elles doivent respecter ces règles de priorité. Elles doivent se plier à un certain nombre d'autres exigences. D'abord et avant tout, elles doivent être conformes à la Constitution du Canada, y compris à la Charte canadienne des droits et libertés. Elles doivent être également conformes à la Constitution nisga'a.

Je voudrais maintenant m'arrêter un instant sur les liens entre les lois nisga'as promulgées de façon légitime et les lois du Canada et de la Colombie-Britannique. Honorables sénateurs, il n'y a que quelques domaines limités où le gouvernement nisga'a aura des pouvoirs prépondérants. Ce sont des domaines qui sont essentiels aux Nisga'as et au gouvernement nisga'a. Plus particulièrement, les seules lois nisga'as qui entrent dans cette catégorie sont celles liées à l'administration du gouvernement nisga'a, à la gestion des terres et des biens nisga'as, à la citoyenneté nisga'a, ainsi qu'à la culture et à la langue nisga'as.

Honorables sénateurs, je veux préciser clairement que les pouvoirs que je viens de mentionner au sujet de la citoyenneté nisga'a ne comprennent pas le droit de prendre des lois concernant l'immigration, la citoyenneté canadienne, l'inscription en tant qu'Indien aux termes de la Loi sur les Indiens ou la possibilité d'imposer au Canada ou à la Colombie-Britannique l'obligation d'offrir des droits ou des avantages. On le précise très clairement dans le traité nisga'a.

Il y aura également une seconde catégorie de pouvoirs législatifs nisga'as qui comprennent l'éducation, les services à l'enfance et à la famille, l'adoption, la pêche et la chasse nisga'as, ainsi que l'exploitation forestière. Les lois nisga'as dans cette catégorie ne seront valides que si elles respectent ou dépassent les normes fédérales ou provinciales. Par exemple, la loi nisga'a dans le domaine de l'éducation devra respecter le programme d'études et les normes d'accréditation des enseignants établis par la Colombie-Britannique. C'est tout à fait sensé.

Enfin, il est des domaines où les intérêts des autres Canadiens pourraient être considérablement et directement touchés par la loi nisga'a, mais où l'intérêt public est respecté tout en laissant aux autorités locales un certain pouvoir. Dans cette troisième catégorie, les lois fédérales et provinciales priment sur la loi nisga'a. Les lois fédérales et provinciales primeraient ainsi dans les domaines de la protection de l'environnement, de l'ordre public, de la paix et de la sécurité, des services de santé, des services sociaux, des bâtiments et des travaux publics, de la circulation routière et des transports, de la célébration des mariages, de la vente des produits de la chasse et de la pêche, et de la réglementation des substances intoxicantes.

Il ne fait aucun doute que le gouvernement nisga'a fonctionnera dans le cadre juridique et législatif canadiens, et dans le respect de la Constitution canadienne et de la Charte des droits et libertés.

Honorables sénateurs, les Nisga'as vivaient dans la vallée de la Nass depuis des siècles déjà avant l'arrivée des Européens. Nous savons que leur société était bien organisée, prospère et régie par des règles de conduite sociale et de responsabilité envers la communauté. Le principal exploit de ce traité a été d'intégrer la culture et le système de gouvernement propres aux Nisga'as à la culture et au système de la majorité. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est un arrangement pratique.

Honorables sénateurs, l'un des principaux objectifs des négociations des traités en Colombie-Britannique est de créer des certitudes en ce qui concerne les droits des autochtones par rapport aux droits des gouvernements fédéral et provinciaux, et de la population canadienne. L'Accord définitif nisga'a satisfait cet objectif. Il constitue une définition complète et définitive des revendications des Nisga'as face aux droits et titres autochtones. Grâce à cet accord, et comme il est prévu dans le projet de loi C-9, ces droits seront définitivement connus.

(1600)

À l'avenir, nous serons en mesure d'utiliser l'accord définitif pour décrire précisément les droits des Nisga'as. Chacun d'entre nous pourra utiliser l'accord définitif parce que le traité prévoit qu'il peut servir non seulement au gouvernement et aux Nisga'as, mais à tout le monde.

Il est important pour les groupes d'entreprises et les groupes ouvriers de la Colombie-britannique que la situation soit claire. Des groupes ayant des intérêts aussi divers que le Canadien National et le Congrès du travail du Canada ont fait savoir au comité permanent de la Chambre que la certitude était à la base de leur appui à ce traité et à la signature de traités en général. Le maire de la ville de Terrace, Jack Talstra, a dit au comité permanent:

Nous adressons tous nos voeux à nos voisins nisga'as. Allons de l'avant avec ce traité.

Honorables sénateurs, autrement dit, il faut garantir les droits des autochtones pour assurer un avenir économique fort à la Colombie-Britannique.

À l'avenir, les Nisga'as seront en mesure de développer les terres nisga'as. Les entreprises qui s'intéressent aux possibilités de développement économique sur les terres nisga'as sauront que les Nisga'as sont propriétaires de ces terres.

À l'extérieur des terres nisga'as, la province de la Colombie-Britannique pourra développer des terres et connaître précisément la portée des droits des Nisga'as et les procédures à suivre dans ce cas. Les entreprises qui s'intéressent aux possibilités de développement économique à l'extérieur des terres nisga'as gagneront également à savoir que la province a l'autorité nécessaire pour développer ces terres.

C'est ce que signifie le texte du préambule de l'accord final qui précise que l'accord doit procurer une certitude concernant la propriété et l'utilisation des terres et des ressources. Ceux qui s'opposent à l'Accord final nisga'a risquent de nous faire perdre cela. Je dis à mes compatriotes de la Colombie-Britannique que cela n'est pas acceptable.

Un rapport rendu public en 1991 par Price Waterhouse arrivait à la conclusion que les revendications territoriales non résolues en Colombie-Britannique avaient coûté à la province 1 milliard de dollars en investissements et 1 500 emplois dans les seuls secteurs des forêts et des mines. Le coût pour les autochtones est également très élevé en raison des contraintes qui s'exercent sur leurs possibilités de développement économique.

En contrepartie d'un accord définitif et intégral concernant toutes les revendications nisga'as à l'égard des droits et titres autochtones, les Nisga'as recevront un règlement qui comprend 196,1 millions de dollars versés sur une période de 15 ans et un territoire d'environ 2 000 kilomètres carrés dans la vallée de la Nass, transfert qui inclut les droits de surface et d'exploitation du sous-sol et aussi le droit à une part du stock de saumons de la rivière Nass et des animaux sauvages de la région de la Nass.

Le coût unique global de mise en application du traité, y compris la valeur du territoire et d'autres éléments connexes, s'établit à 478,1 millions de dollars de 1999. La part du Canada est de 225 millions de dollars. Toutefois, ne prêtons pas foi aux propos tendancieux de certains qui prétendent qu'il y aura un transfert en espèces de plus de 500 millions de dollars. Ce n'est absolument pas le cas.

Qui peut calculer pleinement ce que représente pour les Nisga'as le fait de compter sur un bail foncier solide? Les Nisga'as estiment que cet accord leur donne la possibilité, grâce aux efforts qu'ils consentiront et à leurs compétences, de devenir autonomes sur le plan économique. Une tribu nisga'a prospère exercerait un énorme effet multiplicateur sur l'ensemble de l'économie du nord-ouest de la Colombie-Britannique, comme le sait le maire de Terrace.

De l'avis de certains Britanno-Colombiens, il vaudrait mieux laisser aux tribunaux le soin de se prononcer sur les revendications autochtones. C'est une fausse croyance. Ce serait onéreux et une perte de temps de recourir aux tribunaux pour examiner chaque revendication d'un droit ou d'un titre autochtone pour chaque endroit en Colombie-Britannique.

Dans l'affaire Delgamuukw, la Cour suprême du Canada a traité des désavantages du recours aux tribunaux et soutenu que la négociation constituait la meilleure façon de résoudre ces problèmes. Certains d'entre vous se rappelleront peut-être que l'affaire Delgamuukw est demeurée pendant dix ans devant les tribunaux et que, en bout de piste, la Cour suprême du Canada a ordonné la tenue d'un nouveau procès. Il reste encore de l'incertitude quant aux droits autochtones des Gitskan et Wet'suwet'en qui étaient mêlés à cette affaire. La certitude qui se dégage du traité nisga'a montre clairement les avantages de la négociation par rapport au recours au tribunal.

Pour atteindre l'objectif consistant à arrêter une solution pratique et applicable, l'Accord définitif nisga'a prévoit des arrangements établissant avec certitude ce qu'il en est de la propriété et de l'utilisation des terres et ressources dans la vallée de la Nass. Il est très important de souligner que le tout s'est déroulé dans le cadre juridique canadien.

Les négociations de l'Accord définitif nisga'a n'avaient pas pour objet de définir les droits des Nisga'as, mais plutôt de mettre fin à l'incertitude en explicitant, de la façon la plus claire et la plus précise possible, tous les droits prévus à l'article 35 que les Nisga'as pourront exercer une fois que l'Accord définitif nisga'a aura été conclu.

Dans le passé, le Canada a obtenu une forme de certitude en échangeant des droits autochtones non définis contre des droits définis issus de traités par le recours à des mots comme «céder» ou «renoncer». Les objections des Premières nations à cette technique de la cession constituaient l'obstacle principal à la conclusion de traités modernes.

L'Accord définitif nisga'a adopte une approche axée sur la «modification des droits». Selon l'approche dite du droit autochtone modifié, les droits autochtones des Nisga'as, y compris le titre, subsistent, mais modifiés, conformément aux paramètres géographiques et autres énoncés dans l'Accord définitif nisga'a. Cela a été rendu possible grâce à l'accord des trois parties et à l'exercice des pouvoirs législatifs des gouvernements fédéral et provinciaux. Ainsi donc, tous les droits autochtones que les Nisga'as possédaient sous le régime de common law seront modifiés et prendront la forme des droits énoncés dans l'Accord définitif nisga'a. La technique visant à favoriser la certitude passe donc par l'acceptation des droits plutôt que leur extinction.

Si, en dépit de l'Accord définitif et de la Loi sur l'Accord définitif nisga'a, il est un droit autochtone autre que les droits de l'article 35 de la nation nisga'a énoncés dans l'Accord définitif nisga'a ou dont les attributs sont différents, ce droit sera aboli à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi. En vertu de la nouvelle approche à l'égard des droits autochtones, les seuls droits qu'auraient les Nisga'as en vertu de l'article 35 seraient ceux énoncés dans l'Accord définitif.

Honorables sénateurs, je pense que nous pouvons voir les compromis, les arrangements et la conciliation des différents points de vue qui permettent la négociation d'approches modernes et réalisables à l'égard de questions difficiles. Le fait que les entreprises, les groupes qui ont des intérêts dans les ressources, les administrations locales et les syndicats appuient le nouveau modèle des droits montre que l'on a tenu compte de leurs intérêts à la table des négociations.

Plusieurs détracteurs et adversaires de l'Accord définitif nisga'a semblent ne pas être intéressés par les faits. Au lieu de cela, ils déforment la vérité pour faire vibrer des cordes sensibles en vue de provoquer une réaction négative de la part du public. Les sénateurs sont au courant de ce qui s'est passé dans l'autre endroit, où l'opposition officielle, le Parti réformiste, a essayé de le faire. Je pense que trop de choses ont été accomplies au Canada et en Colombie-Britannique ces dix dernières années en faveur de la reconnaissance des droits des autochtones et de la tolérance des différences entre les nombreux peuples du Canada pour que la stratégie du Parti réformiste réussisse.

Honorables sénateurs, un des critiques virulents de ce traité est le chef de l'opposition officielle en Colombie-Britannique, M. Gordon Campbell. Ce dernier a admis ceci dans son mémoire au comité permanent de l'autre endroit:

Les gens de Colombie-Britannique veulent des traités qui concilient les droits des peuples autochtones protégés par la Constitution avec la souveraineté de la Couronne. Ils veulent négocier des règlements parce que cela est préférable à des règlements imposés par des tribunaux.

Honorables sénateurs, c'est exactement ce que nous avons fait.

M. Campbell prétend que la Loi sur l'Accord définitif nisga'a crée un nouvel ordre de gouvernement au Canada et que, par conséquent, il représente une modification à la Constitution qui doit être soumise à la population de la Colombie-Britannique par voie de référendum sous le régime de la loi provinciale en vigueur afin d'obtenir l'approbation de la majorité. Il a intenté une action pour faire intervenir les tribunaux et en obtenir une interprétation.

Les parties à l'accord et les constitutionnalistes qui ont témoigné lors d'audiences antérieures estiment que l'affirmation de M. Campbell n'a aucun fondement constitutionnel. Je voudrais citer de nouveau le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien qui, en s'adressant à l'autre endroit le 26 octobre dernier, a dit:

L'Accord nisga'a est d'une grande importance et il importe de souligner qu'il a été conclu dans le cadre constitutionnel actuel du Canada. Il ne modifie pas directement ou indirectement la Constitution et il ne nécessite pas non plus une modification constitutionnelle pour prendre effet. L'Accord nisga'a est un arrangement pratique qui définit les droits que la nation nisga'a exercera aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Ces droits seront certes protégés en vertu de l'article 35, mais cela ne signifie pas qu'ils seront absolus. Les tribunaux ont confirmé que ces droits peuvent être enfreints si cela se justifie.

(1610)

Honorables sénateurs, le traité nisga'a précise ce qui suit:

L'Accord ne modifie pas la Constitution du Canada, notamment la répartition des pouvoirs entre le Canada et la Colombie-Britannique.

Le 23 novembre, lorsque le doyen Peter Hogg et le professeur Patrick Monahan, de la faculté de droit Osgoode Hall, témoignaient devant le comité permanent de l'autre endroit, le professeur Monahan a dit ceci:

L'accord et la mesure législative le ratifiant sont valides et ne constituent pas un amendement de la Constitution du Canada... et la principale raison pour laquelle je suis parvenu à cette conclusion est basée sur les termes des paragraphes 35(1) et 35(3) de la Loi constitutionnelle de 1982. [...] La Constitution ne protège pas uniquement les accords qui existaient en 1982 et les droits découlant de ces accords, mais également les droits acquis en vertu d'accords futurs. Donc, en gros, ma position est que les paragraphes 35(1) et 35(3) de la Constitution envisagent précisément le processus qui est en train de se dérouler, à savoir qu'un accord est conclu entre un peuple autochtone, le gouvernement fédéral et/ou une province.

Plus loin, le professeur Monahan ajoute:

Cela ne signifie pas que les accords en soi font partie de la Constitution du Canada, mais plutôt que les droits qui en découlent sont protégés et que toute loi, fédérale ou provinciale, qui serait contraire aux droits issus du traité devront satisfaire au critère de justification fixé par les tribunaux lorsqu'un droit protégé par l'article 35 est violé, critère qui a été fixé dans l'affaire Sparrow.

En résumé, honorables sénateurs, rien dans le projet de loi C-9 n'a la moindre influence sur la répartition des pouvoirs accordés au gouvernement fédéral et aux provinces par la Constitution canadienne. Leur pouvoir législatif demeure intact. Il ne fait aucun doute que cette question sera tranchée un jour par des autorités plus haut placées que celles que je viens de citer.

On reproche également au projet de loi d'être fondé sur la race. Par exemple, le Dr Keith Martin, député réformiste d'Esquimalt-Juan de Fuca, a écrit dans un article paru le 24 novembre 1999 dans le quotidien The Ottawa Citizen:

Nous créons un sentiment d'animosité et des divisions qui rappellent l'Afrique du Sud du temps de l'apartheid.

Dans le même article, il déclare ce qui suit:

Il doit aussi y avoir une loi pour tous.

Toutefois, au cours de l'audience que j'ai mentionnée tout à l'heure, le professeur Bradford Morse, de la faculté de droit de l'Université d'Ottawa, a dit:

La question fondamentale qui échappe à bien des critiques, c'est que les autochtones ne sont pas reconnus comme un groupe distinct en vertu de la race, mais, comme la cour suprême des États-Unis l'a répété clairement à maintes reprises pendant au moins 170 ans, certains peuples possèdent leurs propres territoires depuis des temps immémoriaux, en tant que nations indépendantes ayant leurs propres systèmes juridique, culturel, religieux, linguistique et politique... ce qui reflète leur différence comme entités politiques, et non comme groupes raciaux.

Honorables sénateurs, les droits accordés aux Nisga'as en vertu de l'article 35 de notre Constitution sont fondés sur leur présence avant l'arrivée des Européens dans la vallée de la Nass, et non sur des raisons raciales, comme certains l'ont laissé entendre. Cette autonomie gouvernementale suppose des droits fondés sur la présence avant l'arrivée des Européens et elle est soigneusement conçue pour que les droits et les intérêts des autres Canadiens, en particulier ceux qui vivent dans la région immédiate, soient traités correctement. Tous les droits à la propriété privée sont entièrement protégés. Tous les droits à la propriété existants sur des terres nisga'as feront l'objet de modalités équivalentes ou améliorées. Toutes les lois fédérales et provinciales s'appliqueront, y compris les lois provinciales qui ne s'appliquent pas dans les réserves indiennes. Autrement dit, il y aura plus de protections pour la femme nisga'a, par exemple, qui ne s'appliquent pas actuellement selon la Loi sur les Indiens et le système des réserves indiennes.

Les négociateurs pour le Canada et la Colombie-Britannique ont tenu des centaines d'assemblées publiques aux fins de consultation et d'information, pour garantir la compréhension et le respect des droits et des intérêts de tous les habitants de la Colombie-Britannique. Les négociations sont passées d'un style moins ouvert dans les premières années à celui de la consultation très ouverte par la suite. Par conséquent, il y a eu d'amples possibilités de recueillir des opinions sur toutes les questions substantielles. D'ailleurs, ce processus de consultation s'est finalement révélé le plus exhaustif et le plus efficace de toute l'histoire des traités au Canada.

Dans son mémoire, Gordon Campbell a aussi fait allusion à certaines «préoccupations liées à l'égalité dans le traité nisga'a», laissant entendre que la règle de droit ne sera pas appliquée uniformément à tous les habitants de la Colombie-Britannique et que ceux-ci ne seront pas traités également à l'intérieur du Canada. L'argument voulant que tous les habitants de la Colombie-Britannique aient exactement les mêmes droits ne correspond pas aux dispositions constitutionnelles qui prévoient des droits particuliers pour certains groupes.

Ce point de vue nierait aux Nisga'as tous les droits issus de traités et donne à entendre également qu'il ne devrait pas y avoir de droits autochtones. En outre, ce point de vue rejette tous les autres droits particuliers protégés par la Constitution comme les droits des minorités, les droits à l'éducation et les droits linguistiques.

Honorables sénateurs, les Nisga'as ne devraient pas avoir à renoncer à leur culture et à leur langue pour vivre dans notre magnifique pays. Il est possible, au Canada, d'être à la fois autochtone et canadien. Avec le traité nisga'a, nous permettons aux Nisga'as d'être des Nisga'as tout en demeurant des Canadiens. Cela est nettement préférable à la version tordue de l'égalité qu'a M. Campbell.

Le temps ne me permet pas d'aborder beaucoup des questions soulevées par ce traité historique où le droit à l'autonomie gouvernementale d'un peuple autochtone est, pour la première fois, reconnu par le Parlement en vertu de l'article 35. De bien des manières, les droits des non-Nisga'as vivant en territoire nisga'a sont améliorés par l'élimination des restrictions imposées par la Loi sur les Indiens. En matière d'imposition, les Nisga'as ont accepté, en bref, que leur peuple paie des impôts comme tous les autres Canadiens après une certaine période. Parallèlement à leur développement économique, les Nisga'as assumeront une responsabilité croissante de leur propre financement. Ils attendent avec impatience de pouvoir se libérer de la dépendance financière.

Honorables sénateurs, j'ai très hâte que nous reprenions le débat sur le projet de loi C-9. Je crois que, lorsque nous l'aurons étudié à fond, nous l'appuierons avec enthousiasme.

Je crois que Terry Glavin, un membre du Pacific Fisheries Resource Conservation Council, de la Colombie-Britannique, a très bien résumé la situation lorsqu'il a pris la parole le 17 novembre dernier devant ses concitoyens de la Colombie-Britannique et a dit:

Je ne doute pas que la vaste majorité des Britanno-Colombiens appuieront l'objectif de la conclusion, avec les Premières nations, de traités qui soient justes et raisonnables et qui fassent honneur à la Couronne.

Plus loin, il a ajouté:

Ce n'est pas un traité parfait, car il a été négocié par des humains. Cependant, dans la certitude que le Parlement donnera bientôt effet au traité conclu par la nation nisga'a et la Couronne du chef du Canada, je dirai que mon pays est sur le point de faire une chose des plus louables, et c'est tout un début.

En guise d'épilogue, honorables sénateurs, je tiens à souligner que quelques sénateurs présents aujourd'hui ont joué un rôle marquant au sein du Comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat sur la Constitution en 1980-1981, qui a tenu des audiences et discuté sur ce qu'est devenue la Loi constitutionnelle de 1982. Ce fut une période historique au cours de laquelle la Charte des droits, le rapatriement de la Constitution et de nombreuses autres questions importantes ont, collectivement, changé la nature du Canada, et en bonne partie pour le mieux, à mon avis. L'article 35 compte parmi les dispositions importantes ayant été adoptées à ce moment-là. Un certain nombre de sénateurs et de députés ont éprouvé une grande émotion quand le ministre de la Justice de l'époque, Jean Chrétien, sous la pression énorme du comité mixte, a accepté, au nom du gouvernement Trudeau, d'ajouter l'article 35 à la Constitution. Le projet de loi C-9 représente l'un des principaux résultats de nos efforts de l'époque.

Le comité mixte était coprésidé par feu le sénateur Harry Hays et par un fringant député du Québec, devenu depuis le fringant sénateur Joyal. Je représentais alors le gouvernement au Sénat, tandis que l'ancien sénateur Duff Roblin dirigeait l'opposition. L'un des membres permanents de l'autre endroit dont l'assiduité était exemplaire était Eymard Corbin, aujourd'hui sénateur. Que l'on me pardonne si j'ai oublié de mentionner qui que ce soit au Sénat qui a siégé à ce comité à titre de membre permanent.

En terminant, je ferai observer qu'un Sénat dont certains des membres comptent plus de 20 années d'expérience a certes une contribution utile à apporter en matière de politique gouvernementale.

(1620)

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, cet accord - car il s'agit bien d'un accord, et non d'un traité - est assujetti à la Constitution, à la Charte des droits et au Code criminel. Cela fait beaucoup.

Ma seule préoccupation, et peut-être pourrait-on l'examiner plus en profondeur en comité, a trait aux compétences concurrentes à l'égard de la suprématie des Nisga'as. Cela est sans précédent, en ce sens que, dans le système fédéral canadien, il y a partage des pouvoirs entre le fédéral et les provinces. Ainsi, la suprématie est exercée tantôt par le Parlement du Canada, tantôt par les assemblées législatives provinciales. Le système fonctionne très bien.

J'ai entendu dire que - et vous me corrigerez si je me trompe - dans certains cas, ce qui fait concurrence à la suprématie n'est de compétence ni fédérale ni provinciale; cela veut peut-être dire qu'il y a du flou quelque part dans l'accord. Dans la mesure où l'accord ne modifie pas le partage des pouvoirs entre Ottawa et les provinces, je suis satisfait. Est-ce le cas?

Le sénateur Austin: Je veux remercier le sénateur Beaudoin de sa question. Comme je l'ai dit dans mon discours, il y a une disposition particulière qui précise que cet accord ne touche en rien la répartition des pouvoirs entre le Canada et la Colombie-Britannique.

En ce qui a trait au reste de vos observations, il y a eu depuis la distribution initiale des pouvoirs dans le cadre de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique l'adoption de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Cet article est le résultat d'un processus constitutionnel qui a l'aval du Parlement et d'un nombre important de provinces, pour reprendre une expression qu'on retrouve dans la décision de la Cour suprême et que vous connaissez. Ainsi, il y a l'article 35 protégeant les droits prévus dans cet accord. Ces droits reçoivent une protection constitutionnelle, mais cela ne touche en rien la répartition des pouvoirs. La Constitution, issue de l'accord entre le gouvernement fédéral et les provinces, protège les droits des autochtones une fois que le Parlement et la Colombie-Britannique ont ratifié l'accord au moyen d'une loi.

Le sénateur Beaudoin: Je n'ai absolument aucun problème avec l'article 35, car il donne des droits collectifs aux autochtones dans la Constitution du Canada. Je suis tout à fait en faveur de ces droits, car les autochtones étaient ici les premiers.

Ma question porte simplement sur la prépondérance d'un pouvoir par rapport à un autre lorsque des pouvoirs sont exercés concurremment. Lorsque ce projet de loi sera étudié par un comité, j'espère qu'on examinera cette question plus en profondeur. Le reste de l'accord ne me pose aucun problème.

Le sénateur Austin: J'attends avec impatience cette étude.

Le sénateur soulève un point essentiel. Je suppose que dans certains cas, les pouvoirs du Conseil tribal nisga'a auront prépondérance, surtout en ce qui concerne les droits linguistiques et culturels. Cependant, ils sont toujours sujets au critère du caractère raisonnable énoncé dans l'arrêt Sparrow, car cette cause fait partie de notre droit constitutionnel.

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, j'ai écouté attentivement le discours du sénateur et une de mes questions porte sur les quotas de saumon alloués dans la rivière Nass. Le poisson appartient à la population et non à la Couronne; c'est une ressource commune. Cependant, il y a un moyen par lequel le ministre et la Couronne peuvent accorder des quotas de pêche, soit l'article 7 de la Loi sur les pêches. Le gouvernement peut même créer des réserves exclusives de pêche, ce qui est envisagé dans le traité nisga'a. Comme on le précise dans l'article 7, cela doit se faire par l'adoption d'une mesure législative pertinente.

Le traité prévoit une zone de pêche exclusive qui sera ensuite protégée en vertu de l'article 35 de la Constitution. Par conséquent, les parlementaires céderont leur pouvoir législatif touchant la répartition de cette ressource commune. Pour une des premières fois de l'histoire, des parlementaires renonceront à un devoir, prévu dans la Constitution, de protéger une ressource publique. Les négociateurs ont-ils tenu compte de cet aspect ou avez-vous eu droit à une séance d'information à ce sujet?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je ne suis sans doute pas aussi bien préparé que le sénateur Comeau à examiner à ce stade-ci les conséquences exactes de l'attribution de la zone de pêche. Je sais que la Loi sur les pêches et les règlements afférents s'appliquent aux prises en vertu de l'Accord nisga'a. Un plan de pêche annuel doit être présenté et, comme l'a dit l'honorable sénateur Comeau, les Nisga'as ont un accord prévoyant un droit à une part précise de la récolte de poisson. À mon avis, vous obtiendrez une meilleure réponse à vos questions pendant les discussions en comité.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Ma question s'adresse au sénateur Austin. L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 vient tout juste après les articles 1 à 34 qui constituent la Charte des droits et libertés. Est-il correct de dire que la Charte des droits et libertés ne s'applique pas à l'article 35, mais qu'en vertu de ce traité, la Charte des droits et libertés s'appliquera? De fait, j'estime que la Charte s'applique en vertu de cet accord, ce qui confère une plus grande protection dans une perspective de droits de la personne qu'une mesure qui ne relève que de l'article 35.

Le sénateur Austin: Ce que je vais dire ne devrait pas être considéré comme faisant autorité. Toutefois, mon interprétation de la situation correspond également à ce que vous venez de dire, sénateur Kinsella.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, au moment d'amorcer le débat sur le principe du projet de loi, je veux éclaircir les droits que possèdent les Indiennes en vertu du projet de loi C-31, l'amendement à la Loi sur les Indiens qui a abrogé l'alinéa 12(1)b) de l'ancienne Loi sur les Indiens. Certains appellent cela le «droit de réversion.» Ce droit est-il maintenu en vertu de l'Accord nisga'a, ou s'agit-il d'une plus grande ou d'une moins grande protection pour les femmes qui voudraient réintégrer la communauté nisga'a?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je ne puis répondre à cette question qu'en termes généraux, en disant qu'étant donné que la Charte s'applique et que la Charte interdit la discrimination, je crois que les droits des femmes nisga'as sont désormais égaux à ceux de toutes les autres femmes canadiennes.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur St. Germain, le débat est ajourné.)

[Français]

La Sanction royale

Avis

Son Honneur le Président informe le Sénat qu'il a reçu la communication suivante:

RIDEAU HALL

Le 16 décembre 1999

Monsieur le Président,

J'ai l'honneur de vous aviser que le très honorable Antonio Lamer, juge en chef de la Cour suprême du Canada, en sa qualité de Gouverneur général suppléant, se rendra à la Chambre du Sénat aujourd'hui, le 16 décembre 1999, à 17 heures, afin de donner la sanction royale à certains projets de loi.

Veuillez agréer, monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.

Le secrétaire de la Gouverneure générale,
Judith A. LaRocque

L'honorable
    Le Président du Sénat
        Ottawa
[Traduction]

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, comme vous avez pu vous en rendre compte lorsque j'ai fait lecture, c'est le juge en chef sortant qui viendra ici ce soir. Ce sera sa dernière sanction royale avant de prendre sa retraite et, sans doute, la dernière sanction royale de ce millénaire.

J'espère que tous les honorables sénateurs pourront assister à la réception qui sera donnée en l'honneur du juge en chef à l'issue de la sanction royale.

[Français]

La Loi sur le Parlement du Canada

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Callbeck, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (poète officiel du Parlement).-(L'honorable sénateur Hays).

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, le sénateur Grafstein sait que je n'ai pas beaucoup d'enthousiasme pour son projet de loi. Néanmoins, je lui suis reconnaissant d'avoir saisi le Sénat de cette proposition. Si j'ai bien compris, le projet de loi S-5 vise à institutionnaliser la poésie en proposant un poète officiel du Parlement.

Mon horaire ne m'a pas permis de me préparer comme je l'aurais désiré pour exprimer mes réticences. Cependant, puisque le sénateur Grafstein me presse depuis 48 heures de prendre la parole avant l'ajournement des fêtes, afin que ce projet de loi puisse être renvoyé à un comité pour étude et audition de témoins de son cru, je m'efforce aujourd'hui de le satisfaire, mais ce ne sera pas nécessairement mon dernier mot.

Il a eu le temps de rédiger son discours, d'y penser, de prendre des avis et de recevoir des conseils. Il a eu des mois pour ce faire. Il voudrait maintenant que les rares personnes au Parlement qui vivent et mangent littérature se précipitent abracadabrants dans l'engrenage de son enthousiasme. Il doit savoir pourtant que le processus de la production intellectuelle, dont il lui arrive parfois de tant déplorer la quantité, demande du temps pour la recherche, la réflexion et la rédaction. Enfin, j'accommoderai l'honorable sénateur puisque le choc des idées n'est jamais en soi un exercice futile.

Cela dit, j'apprends maintenant que le débat sera ajourné après mes remarques. Comme par hasard, mais quelle heureuse coïncidence, je relisais en fin de semaine Edgar Allan Poe, sa vie et ses ouvrages, un écrit de Charles Baudelaire daté de 1852. J'ai pour ces deux monuments littéraires que sont ces deux grands poètes, que je n'ai jamais cessé de fréquenter au cours des ans, une admiration illimitée. J'ai dont un parti pris, sachez-le.

Or, je retrouvais cette phrase de la main de Baudelaire, et je cite:

Alfred de Vigny a écrit un livre, (Stello, 1832) pour démontrer que la place de la poésie n'est ni dans une république, ni dans une monarchie absolue, ni dans une monarchie constitutionnelle [...]

Et Baudelaire ajoute:

[...] et personne ne lui a répondu.

Stello défend un point de vue bien particulier, que je partage presque entièrement. Je n'ai pas le temps, pour la raison invoquée au début de mon propos, d'entrer dans le détail. Pour être honnête, et sans prétendre que Stello peut être transposé mutatis mutandis de la situation de la poésie de 1830 à celle qui prévaut à notre époque, il y a une considération fondamentale à retenir, du moins je le pense. Et je résumerai, pour gagner du temps, sous forme de question toute rhétorique: que diable vient faire la poésie dans cette galère, c'est-à-dire cette république, cette monarchie constitutionnelle, ce Parlement? En fait, arrivé au chapitre XL de Stello, le Docteur Noir, personnage clé du récit, répond à cette question lorsqu'il donne son ordonnance au narrateur du roman, une première prescription. Il dit:

Séparer la vie poétique de la vie politique.

Et pour y parvenir:

Laisser à César ce qui appartient à César, c'est-à-dire le droit d'être à chaque heure de chaque jour honni dans la rue, trompé dans le palais, combattu sourdement, miné longuement, battu promptement et chassé violemment.

Deuxième prescription du Docteur Noir au poète:

Seul et libre, accomplir sa mission. Suivre les conditions de son être, dégagé de l'influence des Associations, même les plus belles. Parce que la Solitude seule est la source des inspirations.

Et j'en passe beaucoup, l'essentiel étant énoncé.

L'essentiel, c'est la nature même du travail de création poétique qu'on ne saurait embrigader. Un versificateur, un rimeur rémunéré au verset, oui, peut-être, mais pas un authentique poète - cela jamais! Je ne puis m'imaginer qu'un poète dans l'âme voudrait s'emprisonner dans le carcan que comporte le mot officiel.

En fait, il faut poser la question d'une autre façon, il me semble. Quelle est la frontière entre le langage et le pouvoir? Je vous réponds qu'elle est de la minceur du tranchant de la guillotine qui décolleta André Chénier, poète.

Je vous dirais aussi que cette frontière se présentait jadis sous la forme de l'Index romain ou du tribunal qui condamna les poèmes de Baudelaire, qui en maudit tant d'autres. Cela vous donne seulement une très petite idée, pour souligner que la poésie ne doit rien du tout aux césars, aux papes, aux empereurs, aux despotes de tout acabit. Et c'est à l'honneur du poète. Aujourd'hui, la frontière entre le langage et la politique est aussi distante que l'espace qui sépare de sa terre natale le poète exilé et persécuté.

Je n'ai malheureusement pas eu le temps de lire les propos de mon honorable ami, le sénateur Kinsella. Je le ferai pendant l'ajournement, après les fêtes. Je crois cependant, pour avoir entendu la toute fin de son discours de l'autre jour, qu'il baigne dans une nostalgie surannée. Je m'en ferai une meilleure idée sous peu, et si j'ai mal interprété son propos, je saurai m'en excuser.

(1640)

Je considère que la proposition du sénateur Grafstein a une odeur de moisi victorien, et je m'excuse de le dire en présence du joli buste qui orne le devant de cette salle d'assemblée, juste au-dessus de votre tête, Votre Honneur.

Qu'est-il advenu de notre capacité de rêve, de nos talents d'explorateurs? C'est comme si nous, Canadiens, étions encore écartelés au-dessus d'un abîme sans fond et aussi vaste que l'océan qui nous sépare de nos mères patries; écartelés entre notre passé et nos défis. S'accrocher à une pratique ou à une symbolique vide de sens serait-il une autre manifestation de notre insécurité nationale?

C'est comme si nous manquions de maturité pour innover. Sommes-nous à ce point déficients? Je pensais, mais suis-je illusionné, que notre tradition démocratique suffisait pour nous libérer des carcans et des façons d'être au monde désuètes. Je ne parle pas pour le poète, j'exprime une conviction profonde.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Lynch-Staunton, le débat est ajourné.)

[Traduction]

La Loi sur l'immigration

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Report du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Ghitter, appuyée par l'honorable sénateur Cohen, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-8, Loi modifiant la Loi sur l'immigration.-(L'honorable sénateur Hays).

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais obtenir la permission pour que cet article reste inscrit au nom de l'honorable sénateur Grafstein, qui a l'intention d'en parler.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs que cet article reste inscrit au nom de l'honorable sénateur Grafstein?

Des voix: D'accord.

(Le débat est reporté.)

[Français]

Langues officielles

Adoption du deuxième rapport du comité mixte permanent

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité mixte permanent des langues officielles (le caractère bilingue de la capitale du Canada), présenté au Sénat le 14 décembre 1999.-(L'honorable sénateur Losier-Cool).

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de ce rapport.

En proposant l'adoption de ce rapport, j'aimerais citer le très honorable Pierre Elliott Trudeau lors de la cérémonie de la proclamation de la Constitution, le 17 avril 1982:

[Traduction]

Je parle d'un Canada où les hommes et les femmes d'ascendance autochtone, française ou britannique, ou originaires d'autres cultures fassent preuve de la volonté de vivre ensemble dans ce pays dans la paix, la justice et le respect mutuel. Je parle d'un Canada fier et renforcé du fait de sa nature bilingue, d'un Canada où les gens croient dans le partage et l'entraide, non pas dans l'édification de barrières régionales.

[Français]

C'est dans l'esprit de cette vision que le Comité mixte permanent des langues officielles croit et travaille à la défense de la promotion des droits linguistiques des communautés anglophone et francophone du Canada, et c'est aussi dans l'esprit de cette vision que les membres du comité proposent l'adoption de ce deuxième rapport présenté le 14 décembre.

[Traduction]

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, nous sommes d'accord avec les recommandations figurant dans le rapport présenté par le sénateur Losier-Cools et nous sommes prêts à appuyer la motion d'adoption.

Des voix: Bravo!

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

Examen de la réglementation

Adoption du premier rapport du comité mixte permanent

Le Sénat passe à l'étude du premier rapport du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation (ordre de renvoi permanent), présenté au Sénat le 9 décembre 1999.-(L'honorable sénateur Hervieux-Payette, c.p.).

L'honorable Céline Hervieux-Payette: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de ce rapport.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Traduction]

L'Union monétaire européenne

Le rapport du comité des affaires étrangères-Report du débat

L'ordre du jour appelle:

Étude du quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères intitulé: «Le point sur l'Europe: les implications d'une intégration accrue de l'Europe pour le Canada», déposé au Sénat le 17 novembre 1999.-(L'honorable sénateur Stollery).

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, j'aimerais que l'article no 4 demeure inscrit à mon nom.

Je pense que je dois un mot d'explication aux honorables sénateurs, étant donné que cela fait 12 jours que cet article figure au Feuilleton. J'ai pris la responsabilité de cette question après le départ du sénateur Stewart, qui a pris sa retraite récemment. Le comité des affaires étrangères a été très occupé ces derniers temps. Je m'occuperai de cette question, mais n'en ai pas eu le temps jusqu'ici.

(Le débat est reporté.)

[Français]

Air Canada

Le décret déposé conformément à la Loi sur les transports au Canada autorisant la tenue de discussions sur la proposition d'achat de transporteurs aériens majeurs par le secteur privé-Adoption du rapport du comité des transports et des communications suite à son étude

Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du comité sénatorial permanent des transports et des communications (embauche du personnel), présenté au Sénat le 15 décembre 1999.-(L'honorable sénateur Bacon).

L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de ce rapport.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le rapport est adopté.)

[Traduction]

L'Ontario

Le projet de loi sur la restructuration régionale-Le refus de déclarer Ottawa officiellement bilingue-Interpellation-Suspension du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Poulin, attirant l'attention du Sénat sur la décision du gouvernement de l'Ontario de ne pas adopter une recommandation visant à faire d7'Ottawa une ville bilingue après sa restructuration proposée.-(L'honorable sénateur Fraser).

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, quand je prends la parole ici à la Chambre, j'essaie en général d'utiliser les deux langues officielles. Aujourd'hui cependant, je m'exprimerai en anglais seulement pour unir ma voix à celle de tous ceux qui exhortent le gouvernement de l'Ontario à adopter une loi précisant que la nouvelle grande ville d'Ottawa sera officiellement bilingue. Je m'adresserai à vous en anglais seulement parce que je crois qu'il est important de reconnaître que c'est une question qui concerne tous les Canadiens, les anglophones, les francophones, ceux que nous appelons au Québec les allophones et les autochtones, qu'ils parlent les deux langues officielles ou seulement une ou même aucune des deux.

Il y a bon nombre de raisons pour lesquelles la ville d'Ottawa, et pas seulement la région de la capitale nationale qui appartient au gouvernement fédéral, devrait être officiellement bilingue. La première, qui se situe au plan humain, c'est qu'un grand nombre de francophones y vivent, 125 000, je crois. Nous savons qu'ils reçoivent des services publics dans leur langue. Toutefois, à titre de québécoise anglophone, à titre de membre de l'autre minorité linguistique du Canada, je sais très bien qu'il y a une différence entre le fait de simplement recevoir des services dans sa langue et celui d'être reconnue à part entière par son gouvernement. Je sais ce que cela signifie de voir son propre gouvernement hésiter à reconnaître la légitimité de sa communauté linguistique, son droit à être reconnue à part entière pour ce qu'elle est, c'est-à-dire un attribut d'un des peuples fondateurs de ce pays.

Je sais ce que cela signifie d'entendre son gouvernement provincial dire quelque chose du genre «Regardez comme nous vous traitons bien. Vous devriez être reconnaissants pour toutes ces bonnes choses que nous faisons pour vous. Ne demandez surtout pas à être reconnus pour ce que vous êtes. Ne vous attendez pas à ce qu'on vous accorde des droits. Ce que vous obtenez de notre part, c'est la charité et non de l'acceptation.»

Quelle impression en ressent-on? Cela fait mal, honorables sénateurs. Cela vous donne l'impression que chez vous, dans votre propre province, vous n'êtes pas considéré comme un citoyen à part entière même si vos ancêtres ont contribué à bâtir ce pays et que la Constitution reconnaît votre langue comme l'une des deux langues officielles du pays.

Honorables sénateurs, nous savons tous que, depuis une génération, les gouvernements ontariens successifs, y compris le gouvernement actuel, ont déployé des efforts impressionnants pour mettre sur pied et offrir un vaste éventail de services de langue française et pour aider les francophones à bâtir et à contrôler leurs institutions communautaires essentielles. Bien que nous regrettions peut-être tous profondément la situation à l'Hôpital Montfort et que nous espérions peut-être, comme je le fais, qu'elle sera réglée de façon satisfaisante, il est également important de reconnaître que le gouvernement ontarien actuel a pris l'initiative de confier aux francophones le contrôle des écoles françaises. Ce n'est pas rien. J'en rends hommage au gouvernement de l'Ontario.

Nous comprenons tous que nous siégeons ici, au Parlement fédéral et que, au Canada, les municipalités relèvent de la compétence des provinces. Nous savons que la création de la mégaville est une affaire de compétence provinciale. Il n'y a sûrement aucun d'entre nous qui le conteste. C'est également incontestable qu'Ottawa est un cas spécial. C'est une municipalité ontarienne, certes, mais ce n'est pas une municipalité comme les autres, car Ottawa et Ottawa seule est la capitale nationale. La région de la capitale nationale n'est pas la capitale. C'est une région, une belle région, créée et administrée comme il faut, une merveilleuse reconnaissance géographique de l'importance de la capitale pour tous les Canadiens; mais Ottawa, la ville d'Ottawa, est la capitale.

Au Canada, nous avons deux langues officielles. C'est un aspect fondamental de notre histoire, de notre existence comme pays. C'est un des piliers de notre identité et de nos politiques nationales. Comment se peut-il que la capitale du pays ne devrait pas refléter ce fait merveilleux? Quel message cela envoie-t-il aux Canadiens, pas seulement aux francophones mais à tous les Canadiens, quand nous disons que, même si nous avons deux langues officielles, seule l'une d'elles est vraiment officielle ici, dans la capitale elle-même?

Honorables sénateurs, le printemps dernier, il m'a été donné de visiter Bruxelles, la capitale d'un pays aux prises avec des problèmes linguistiques qui relèguent les nôtres à des caprices d'enfants. Je suis persuadée que vous savez que la Belgique est divisée en cantons français et flamands, mais, officiellement, en pratique et de par ses lois, Bruxelles est une ville bilingue. Il devrait en être ainsi et nous devrions nous en inspirer.

D'aucuns soutiennent que, si nous insistons pour que la ville d'Ottawa soit bilingue, nous devons également insister pour que celle de Hull le soit aussi. Cela soulève un problème de ressort provincial. Le fait est que Hull n'est pas la capitale, au contraire d'Ottawa. En tant que Québécoise de langue anglaise, je puis souhaiter ardemment que le gouvernement du Québec accorde à Hull le statut officiel de ville bilingue, comme il l'a fait pour d'autres municipalités, y compris celle où je réside. Mais cela ne concerne en rien la ville d'Ottawa.

Je suis persuadée, honorables sénateurs, que nous avons tous été ravis d'apprendre que la municipalité d'Ottawa a demandé au gouvernement de l'Ontario de reconnaître à cette méga-ville le statut de ville bilingue. Je crois savoir que seul le gouvernement provincial peut reconnaître ce statut à une municipalité ontarienne. Il y a eu des précédents devant les tribunaux à cet effet.

Nous savons que certains milieux opposent une résistance à cette mesure. Toute la résistance active dont je suis au courant vient d'anglophones, et une grande partie de cette résistance semble s'exprimer par la crainte, une crainte des conséquences que le statut bilingue de la capitale nationale pourrait avoir pour les anglophones qui habitent à Ottawa.

Bien sûr, beaucoup de gens craignent le changement et parfois, cette crainte est justifiée; cependant, un peu de changement est positif. Un peu de changement permet de bâtir un avenir meilleur pour notre pays et pour nous tous, qui sommes tellement privilégiés d'en être les citoyens. Nous pouvons arriver à embrasser ce changement. Je songe à mes parents, des anglophones de la Nouvelle-Écosse, fiers de leurs racines, qui remontaient à 200 ans dans notre pays. Ils n'ont jamais parlé français. Autant que je sache, aucun de leurs ancêtres ne parlait français, le gaélique, oui, mais pas le français.

Lorsque mes parents étaient jeunes, la question du bilinguisme et du biculturalisme ne pointait même pas à l'horizon. Dans les années 60, lorsque le Canada anglais a enfin compris cet élément de l'histoire, de l'identité et de l'avenir de notre pays, mes parents ont été parmi les millions de Canadiens anglais à le comprendre eux aussi et à se réjouir de l'identité bilingue et biculturelle de notre pays. Ils n'ont pas appris le français, mais ils ont fait en sorte que je l'apprenne, car ils estimaient que tous les Canadiens qui en avaient la possibilité devraient parler les deux langues du Canada. Ils étaient fiers que j'aie appris le français. Je leur suis éternellement reconnaissante de m'en avoir offert la possibilité.

Je suis au courant de l'argument selon lequel accorder le statut de ville bilingue à Ottawa serait un geste uniquement symbolique et que la seule chose qui compte, ce sont les services qui sont fournis sur le terrain; quoi qu'il en soit, le symbolisme est important. Pourquoi avons-nous des drapeaux, par exemple, si le symbolisme n'est pas important? Le symbolisme est une chose extrêmement importante pour nous tous. Et où est-ce plus important que dans la capitale du pays?

Enfin, je suggère que si Ottawa n'est pas une ville comme les autres, l'Ontario est une province pas comme les autres. L'Ontario est non seulement la province la plus riche et la plus peuplée du pays, c'est une province qui a toujours montré la voie. Maintes fois au cours de notre histoire, elle a donné le ton et servi de modèle, indiquant la direction que devait prendre le Canada. Elle a toujours contribué à plusieurs des éléments de notre identité dont nous sommes si fiers - la tolérance, l'ouverture d'esprit, l'équilibre dont nous nous targuons. J'exhorte donc le gouvernement de l'Ontario, une fois encore, à assumer son rôle historique de chef de file. Comme nous l'avons entendu en cette enceinte aujourd'hui et les jours précédents, on est en train d'étudier très sérieusement d'autres voies pour qu'Ottawa ait le statut de ville bilingue qu'elle mérite, à mon avis. Une action en justice est prévue par notre collègue, l'honorable sénateur Joyal, sans doute le plus infatigable défenseur des droits des minorités que nous connaissions. Il est question que le gouvernement fédéral intervienne. S'il faut en arriver là, qu'il en soit ainsi, mais il serait tellement plus préférable que le gouvernement de l'Ontario fasse ce qu'ont fait tant de ses prédécesseurs avant lui, qu'il affirme son leadership et assume son rôle historique qui est de se montrer le fier protecteur de ce qu'il y a de mieux au Canada.

J'exhorte de tout mon coeur le gouvernement de l'Ontario à tenir compte des supplications de cette Chambre et de tant de Canadiens.

Des voix: Bravo!

[Français]

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Beaudoin, je dois malheureusement vous informer qu'il ne reste qu'une minute avant que je quitte le fauteuil afin que nous procédions à la sanction royale. Aussitôt qu'elle sera terminée, nous reprendrons le débat.

[Traduction]

Honorables sénateurs, le Sénat s'ajourne maintenant à loisir en attendant l'arrivée du très honorable suppléant de Son Excellence la Gouverneure générale.

(Le Sénat s'ajourne à loisir.)


[Français]

Sanction Royale

L'honorable Antonio Lamer, juge en chef de la Cour suprême du Canada, en sa capacité de suppléant de la Gouverneure générale, prend place au pied du trône. La Chambre des communes, priée de se présenter, arrive avec son Président. Son Honneur le Président dit:

J'ai l'honneur de vous faire savoir qu'il a plu à Son Excellence la Gouverneure générale d'ordonner l'émission de lettres patentes sous ses seing et sceau constituant l'honorable Antonio Lamer, juge en chef de la Cour suprême du Canada, son suppléant, et le chargeant d'exécuter au nom de Son Excellence, tous les actes nécessaires, au gré de Son Excellence.

Le greffier du Sénat donne lecture de la commission.

Il plaît à l'honorable suppléant de Son Excellence la Gouverneure générale de donner la sanction royale au projet de loi suivant:

Loi portant mise en oeuvre de l'Accord conclu entre le gouvernement du Canada, les gouvernements d'États membres de l'Agence spatiale européenne, le gouvernement du Japon, le gouvernement de la Fédération de Russie et le gouvernement des États-Unis d'Amérique sur la coopération relative à la Station spatiale internationale civile et apportant des modifications connexes à d'autres lois, (Projet de loi C-4, Chapitre 35, 1999)

L'honorable Gilbert Parent, Président de la Chambre des communes, s'adresse ensuite à l'honorable suppléant de la Gouverneure générale en ces termes:

Qu'il plaise à Votre Honneur.

La Chambre des communes du Canada a voté certains crédits requis pour permettre au gouvernement de pourvoir aux dépenses du service public.

Au nom de la Chambre des communes, je présente à Votre Honneur le projet de loi suivant:

Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2000, (Projet de loi C-21, Chapitre 36, 1999)

À ce projet de loi, je prie humblement Votre Honneur de donner la sanction royale.

Il plaît à l'honorable suppléant de la Gouverneure générale de donner la sanction royale au projet de loi.

La Chambre des communes se retire.

Il plaît à l'honorable suppléant de Son Excellence la Gouverneure générale de se retirer.


Le Sénat reprend sa séance.

(1720)

L'Ontario

La loi sur la restructuration régionale-Le refus du gouvernement ontarien d'adopter la recommandation visant à faire d'Ottawa une ville bilingue-Interpellation-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Poulin, attirant l'attention du Sénat sur la décision du gouvernement de l'Ontario de ne pas adopter une recommandation visant à faire d'Ottawa une ville bilingue après sa restructuration proposée.-(L'honorable sénateur Fraser).

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, le Canada est une fédération bilingue et multiculturelle, ainsi que le reconnaissent nos diverses lois constitutionnelles de 1867 à nos jours. Il est dans l'ordre des choses que la capitale de ce pays soit également bilingue. Plusieurs États fédéraux ont une capitale bilingue, voire même multilingue.

Il est exact qu'aux termes de la Constitution canadienne, les municipalités relèvent de la compétence provinciale, selon le paragraphe 92(8) de la Loi constitutionnelle de 1867. C'est dire que les structures et les pouvoirs d'un conseil municipal sont l'attribut des provinces. On doit respecter le partage des pouvoirs.

Cependant, Ottawa n'est pas une ville comme les autres, c'est la capitale du Canada. Et au c9ur de ce pays, les grandes institutions fédérales sont bilingues: le Parlement fédéral, la Cour suprême du Canada, Rideau Hall et les ministères. Ces institutions sont toutes assujetties à la Loi sur les langues officielles. Ottawa se trouve donc à avoir un caractère particulier, voire différent.

Un article de la Constitution du Canada, l'article 16, traite de la capitale du Canada et déclare que le siège du gouvernement fédéral est à Ottawa. Dans l'arrêt Munro de 1966, la Cour suprême du Canada a reconnu que le Parlement fédéral peut légiférer sur la capitale nationale en vertu de sa compétence résiduelle en vertu de la clause: paix, ordre et bon gouvernement.

Dans cette affaire, la Cour suprême a reconnu que le Parlement fédéral peut créer une région de la capitale nationale, instituer une Commission de la capitale nationale et habiliter cette commission à exproprier des terrains pour l'embellissement de la capitale nationale.

Cette Commission de la capitale nationale est soumise à la Loi sur les langues officielles puisqu'elle est un organisme créé par une loi fédérale. La loi fédérale sur les langues officielles, qui met sur un pied d'égalité l'usage de la langue anglaise et de la langue française dans les institutions fédérales, repose sur la compétence résiduelle du Parlement canadien, comme l'a établi l'arrêt Jones de 1975, un jugement unanime de notre plus haut tribunal.

La partie VII de la Loi sur les langues officielles permet une certaine extension du bilinguisme et a plus qu'une valeur déclaratoire en droit, elle a une valeur obligatoire. Il y a donc, selon la Constitution, un certain partage des pouvoirs dans le domaine qui nous préoccupe.

L'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 a été interprété libéralement et, à mon avis, on doit continuer à le faire. Certains juristes ont déjà étudié la question d'un véritable district fédéral, comme à Washington et plusieurs autres capitales fédérales. Ils ont étudié la question d'une capitale sur les deux rives de l'Outaouais, et aussi la question d'un district fédéral sur les deux rives. Je ne veux pas ouvrir ce débat aujourd'hui, car il n'est pas actuellement devant nous. Ce qui est devant nous, toutefois, c'est la question d'une capitale bilingue, ni plus ni moins. C'est déjà beaucoup.

Mon collègue, le sénateur Serge Joyal, a invoqué, à l'appui de son plaidoyer en faveur d'une capitale bilingue, les principes identifiés par la Cour suprême dans le renvoi sur la sécession du Québec, pour encadrer les négociations entre le Québec et le Canada ou entre une province et le Canada, c'est-à-dire le constitutionnalisme, la démocratie, la règle de droit, le respect des droits des minorités et le fédéralisme. Si on peut invoquer ces principe à l'occasion d'une sécession, ils peuvent certes être invoqués pour le renouvellement du fédéralisme.

Je termine mon exposé juridique sur les remarques du juge Cartwright, dans l'arrêt Munro, dans lequel ce juriste invoquait la théorie de l'intérêt national:

[Traduction]

Je peux difficilement imaginer l'objet d'une mesure législative qui dépasse plus clairement les intérêts locaux ou provinciaux et qui intéresse davantage le Canada dans son ensemble que celui du développement, de la préservation et de l'amélioration de la région de la capitale nationale.

[Français]

Le juge Jean Beetz, dans le renvoi sur la Loi anti-inflation de 1976, écrit que:

[...] l'aménagement, la conservation et l'embellissement de la région de la capitale nationale sont des cas clairs de sujets distincts qui ne se rattachent à aucun des paragraphes de l'art. 92 et qui, de part leur nature, sont d'intérêt national.

On dira sans doute qu'il y a une différence entre la capitale et la région de la capitale. C'est vrai, je le reconnais. Mais à mon avis, ce qui est bon pour la région de la capitale du Canada est certes très souhaitable pour la capitale nationale, qui est située au c9ur même de cette région bilingue. Je conclus que la capitale de notre pays se doit d'être bilingue.

Des voix: Bravo!

(1730)

L'honorable Serge Joyal: Honorables sénateurs, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'exposé du sénateur Beaudoin. Je voudrais porter à son attention une nuance sur l'affirmation concernant la partie VII de la Loi sur les langues officielles que le comité des langues officielles a eu l'occasion d'étudier. Le sénateur Gauthier, cette semaine, me transmettait une information sur la nature précise de la partie VII. Vous avez soutenu que la partie VII avait un caractère exécutoire, et pas uniquement déclaratoire.

Actuellement, une cause en Cour fédérale conteste précisément la nature du caractère déclaratoire de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Comme elle n'est pas couverte par les articles de la loi qui traitent des recours judiciaires possibles, cette partie de la loi échappe à la révision et à l'ordonnance des tribunaux canadiens. Je ne suis pas de cet avis dans le contexte du renvoi de la Cour suprême sur la sécession du Québec.

Cette question a été soulevée par le sénateur Gauthier et par madame le Président pro tempore, à titre de coprésidente du comité des langues officielles. Cette question fait actuellement l'objet d'un débat devant les tribunaux. Au moment où on en arrivera à l'étape des plaidoiries, les arguments développés par la Cour supérieure de l'Ontario, dans la cause de l'Hôpital Montfort, auront leur utilité pour la Cour fédérale, qui aura à se prononcer de façon à éclaircir une fois pour toutes l'application réelle de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Comme vous le savez, elle serait d'une extrême importance pour définir la responsabilité du gouvernement canadien à l'égard de son rôle de promotion active au soutien des minorités de langues officielles anglaise ou française. Je voulais porter à l'attention de l'honorable sénateur cet élément important que les sénateurs Gauthier et Losier-Cool ont souligné dans leurs échanges au sujet des travaux de ce comité.

Le sénateur Beaudoin: Honorables sénateurs, dans le fond, nous souhaitons la même chose. Si c'est contesté, on espère que ce sera rejeté et qu'on trouvera à la partie VII de la Loi sur les langues officielles une valeur non simplement déclaratoire, mais aussi impérative.

Cela me rappelle toujours le fameux arrêt sur l'article 133, dans lequel une cour inférieure avait dit que l'usage du français et de l'anglais était indicatif et non impératif. La Cour suprême, dans une décision de 9 à 0, avait corrigé le tir en disant que: quand la Constitution parle de façon claire et précise, c'est impératif. Nous nous battons tous pour le même résultat. C'est contesté, mais c'est notre régime. On peut faire valoir des arguments très forts pour prétendre que la partie VII de la Loi sur les langues officielles a un caractère impératif. Il faut essayer de faire valoir nos arguments à la cour.

[Traduction]

L'honorable Ione Christensen: Honorables sénateurs, c'est en tant que Canadienne unilingue que j'interviens dans le débat sur la décision du gouvernement de l'Ontario de ne pas donner suite à une recommandation visant à déclarer région bilingue la ville restructurée d'Ottawa.

Venant du coin du Canada situé le plus à l'Ouest, je trouve futile l'idée même de tenir ce débat. La capitale du Canada ne peut qu'être bilingue. Le Canada et le bilinguisme sont synonymes; ils ne font qu'un.

Depuis 1898, le Yukon a une communauté francophone très active et très fière. Aujourd'hui, ses membres sont représentés par l'Association francophone yukonnaise. Il y a une école française et le taux de fréquentation des programmes d'immersion en français dans notre système d'éducation est très élevé. Des Canadiens de partout sont venus au Yukon pour que leurs enfants apprennent et partagent cette grande culture bilingue.

La question ne relève ni d'une municipalité, ni d'une province ni d'une compétence fiscale. C'est une question d'unité. La réaction de la province contiguë à celle qui compte la plus forte population de Canadiens francophones est incroyablement insensible. La recommandation visant à faire d'Ottawa une ville bilingue n'aurait jamais dû soulever la moindre interrogation. Ce n'était pas nécessaire. Le bilinguisme est acquis. Ottawa, notre capitale nationale, devrait refléter notre dualité et nous ne pouvons accepter rien de moins.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, il y a eu une entente. C'est avec beaucoup d'honneur que je demande l'ajournement du débat en mon nom, non sans dire que j'appartiens à l'école de la persuasion plutôt qu'à l'école judiciaire.

(Sur la motion du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones relativement à la fonction gouvernementale autochtone

Adoption du rapport du comité des peuples autochtones

Permission ayant été accordée de revenir aux rapports de comité:

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones (embauche de personnel) présenté au Sénat le 15 décembre 1999.-(L'honorable sénateur Watt).

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement) propose l'adoption du rapport.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Affaires sociales, sciences et technologie

Autorisation au comité d'examiner l'état du système de santé

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kirby, appuyée par l'honorable sénateur Mercier:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner pour en faire rapport l'état du système de santé au Canada. Plus particulièrement, que le Comité soit autorisé à examiner:

a) Les principes fondamentaux sur lesquels est fondé le système public de santé au Canada;

b) L'historique du système de santé au Canada;

c) Les systèmes de santé publics dans d'autres pays;

d) Le système de santé au Canada - pressions et contraintes;

e) Le rôle du gouvernement fédéral dans le système de santé au Canada;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 14 décembre 2001; et

Que le Comité soit autorisé, par dérogation aux règles usuelles, à déposer tout rapport auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là; et que le rapport soit réputé avoir été déposé à la Chambre du Sénat.-(L'honorable sénateur Di Nino).

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, à titre de vice-présidente du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, je voudrais commenter brièvement la motion.

Il est remarquable que les quelques derniers mots qui seront prononcés au Sénat pendant ce millénaire portent sur ce sujet. Cela tombe à point nommé, car, à l'aube du nouveau millénaire, nous demanderons l'autorisation du Sénat pour étudier l'état des services de santé au Canada et en faire rapport. Cette étude s'impose d'urgence, et le Sénat est particulièrement bien placé pour réaliser cette étude, si on le compare aux Communes, où d'autres facteurs gênent souvent ce type de travail.

Honorables sénateurs, comme tous les autres membres du comité, j'appuie cette initiative. La question mérite une étude sérieuse. Beaucoup d'idées fausses sont répandues au sujet des services de santé au Canada. Nous devons faire face à de nombreuses réalités. Nous devons nous interroger sur le rôle du gouvernement fédéral et sur les moyens à prendre pour rendre le système économiquement viable.

Je demande respectueusement l'autorisation de faire cette étude.

Son Honneur le Président pro tempore: Y a-t-il d'autres sénateurs qui désirent prendre la parole?

L'honorable Michael Kirby: Honorables sénateurs, je m'en tiendrai à deux brèves observations. Tout d'abord, à la lumière des débats qui ont eu lieu au Sénat la semaine dernière sur les coûts de l'étude, je préciserai que le comité n'envisage pas de dépenser plus de 10 000 $ d'ici au 31 mars 2000.

(1740)

Ensuite, pour ce qui concerne le prochain exercice, ce ne sera pas une étude terriblement coûteuse, car nous nous proposons de faire la plupart de nos comparaisons internationales au moyen de visioconférences qui, comme a pu le constater le comité des banques, fonctionnent extrêmement bien. Même si le cadre de référence est vaste, je ne m'attends pas à ce que cette étude soit terriblement coûteuse.

Enfin, honorables sénateurs, je tiens à présenter une observation sur la façon dont nous espérons gérer cette étude. Je crois que le sénateur Carstairs, en parlant de la façon dont le comité a traité le projet de loi C-6, a fait remarquer que, rigoureusement parlant, notre comité directeur se compose de deux libéraux et d'un conservateur. Pour ce qui concerne le projet de loi C-6, nous avons demandé au sénateur Murray d'assister à nos séances et de bien s'assurer de participer à tout ce que nous faisions, et nous nous sommes entendus sur deux libéraux et deux conservateurs. De la même manière, lorsque le comité directeur a commencé à établir le cadre de référence de cette étude, nous avons demandé au sénateur Keon de se joindre à nous. Le sénateur Keon a pu nous aider à établir le mandat en question et nous a donné des idées sur la façon de traiter cela. À la première heure, ce matin, je lui ai écrit que je trouve important qu'il continue de jouer un rôle dans cette étude.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Kirby: Comme pour le projet de loi C-6, nous fonctionnerons avec un comité directeur composé de quatre personnes, soit les sénateurs Carstairs et moi-même, de ce côté-ci, et les sénateurs LeBreton et Keon, de l'autre. J'espère que les sénateurs essaieront de nous faire bénéficier du savoir-faire du sénateur Keon au cours des deux prochaines années que durera cette étude.

Honorables sénateurs, ce sont là les observations que je voulais faire. J'ai constaté, en m'entretenant avec des sénateurs des deux côtés, que cette étude suscite un intérêt considérable.

Son Honneur le Président pro tempore: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Affaires étrangères

Autorisation au comité de reporter la date du dépôt de son rapport final sur l'étude de la modification apportée au mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

L'honorable Peter A. Stollery, conformément à l'avis du 9 décembre 1999, propose:

Que, par dérogation aux ordres adoptés par le Sénat le jeudi 14 octobre 1999 et le mercredi 17 novembre 1999, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, autorisé à examiner pour en faire rapport les ramifications pour le Canada: 1. de la modification apportée au mandat de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et au rôle du Canada dans l'OTAN depuis la dissolution du pacte de Varsovie, de la fin de la guerre froide et de l'entrée récente dans l'OTAN de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque; et 2. du maintien de la paix, surtout la capacité du Canada d'y participer sous les auspices de n'importe quel organisme international dont le Canada fait partie, soit habilité à présenter son rapport final au plus tard le 10 mars 2000;

Que le Comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenus dans son rapport final, et ce jusqu'au 31 mars 2000; et

Que le Comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer son rapport auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat.

(La motion est adoptée.)

Les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones relativement à la fonction gouvernementale

Autorisation donnée au comité de reporter le dépôt du rapport final

L'honorable Landon Pearson, au nom du sénateur Watt, conformément à l'avis du 14 décembre 1999, propose:

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 24 novembre 1999, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit autorisé à faire une étude et à présenter un rapport sur les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones (Document parlementaire no 2/35-508.) relativement à la fonction gouvernementale autochtone et plus particulièrement, à obtenir le point de vue des peuples autochtones et des autres intéressés sur les questions suivantes:

  1. les nouvelles relations structurelles requises entre les peuples autochtones et les paliers de gouvernement fédéral, provincial et municipal et entre les différentes collectivités autochtones elles-mêmes;
  2. les mécanismes nécessaires à l'implantation des nouvelles relations structurelles;
  3. les modèles d'autonomie gouvernementale autochtone nécessaires pour répondre aux besoins des peuples autochtones et pour concorder avec les nouvelles relations structurelles;

Que le comité soit autorisé à déposer son rapport final au plus tard le 16 février 2000, et que le comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenus dans son rapport final, et ce jusqu'au 29 février 2000; et

Que le comité soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer son rapport auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas, et que ledit rapport soit réputé avoir déposé au Sénat.

La motion est adoptée.

[Français]

Le Sénat

L'octroi d'un statut bilingue à la ville d'Ottawa-Adoption de la motion

L'honorable Jean-Robert Gauthier, conformément à l'avis du 15 décembre 1999, propose:

Que, de l'avis du Sénat du Canada, Ottawa, la capitale du Canada devrait être officiellement bilingue.

- Honorables sénateurs, cette motion que je présente aujourd'hui est limpide et, en peu de mots, résume le débat qui se déroule ici depuis quelques jours. J'espère que ce débat continuera d'être apolitique.

La motion pour désigner la capitale de mon pays officiellement bilingue est essentielle à l'existence même du Canada. Comme vous le savez tous, il a deux langues officielles, soit l'anglais et le français. Dans la Constitution de ce pays, ces deux langues ont égalité de statut et de privilèges.

Cette motion demande à la province de l'Ontario de déclarer la nouvelle cité d'Ottawa officiellement bilingue. Le mot «officiel» - si on se reporte à un dictionnaire - veut dire:

[...] qui émane d'une autorité reconnue, dûment sanctionnée, autorisée, [...]

La question est de savoir si le statut officiel que conférerait une telle déclaration peut être «mis sur pied ou dit égal» en droit. Dans le cas qui nous préoccupe, est-ce que ce statut des deux langues officielles aurait les mêmes droits et les mêmes privilèges? En ce qui me concerne, la nouvelle cité d'Ottawa doit être officiellement bilingue et ainsi conférer aux deux langues officielles du pays le statut d'égalité, et relever de la compétence provinciale. Je vais m'expliquer.

Avant-hier, au cours d'un débat, j'ai dit clairement que la province de l'Ontario se doit de déclarer bilingue la capitale nationale. Beaucoup d'entre vous ont participé au débat et je vous en remercie, car cela renforce notre position.

M. Shortliffe a de plus noté, dans son rapport sur la restructuration municipale, qu'il serait du ressort du conseil de la municipalité d'Ottawa de déterminer la portée et la nature des services qui seront disponibles dans les deux langues officielles du pays.

Il n'y a aucun doute qu'une municipalité de l'Ontario peut, par règlement, décider d'assurer quelques services dans les deux langues officielles du pays. Un règlement municipal peut changer très rapidement selon l'humeur du conseil municipal, ce qui ne confère pas une certitude à l'exercice des deux langues officielles.

Je terminerai en disant que le Sénat a toujours poursuivi l'objectif de représenter les régions du pays et surtout de défendre ses minorités. C'est pour cette raison que je suis heureux aujourd'hui de constater que plusieurs d'entre vous ont participé à ce débat et j'espère que vous serez nombreux à appuyer la motion.

Honorables sénateurs, je suis né à Ottawa. J'y ai passé toute ma vie. J'ai de la difficulté à concevoir que la capitale de mon pays ne puisse être qu'unilingue ou, pour être optimiste, ne puisse pas être bilingue. Je demande à mes amis du Sénat d'appuyer cette motion.

(1750)

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, c'est un honneur pour moi d'appuyer cette motion très importante. J'imagine qu'on peut comprendre pourquoi un sénateur de l'opposition et de la province du Nouveau-Brunswick doit appuyer avec conviction cette motion. Notre province est officiellement bilingue.

Le sénateur Nolin: C'est la seule.

Le sénateur Kinsella: La seule province au Canada à être officiellement bilingue. Le sénateur Louis Robichaud a été un pionnier puisqu'il est l'auteur de la première Loi sur les langues officielles de notre province. Je dois aussi souligner le travail du sénateur Simard, qui continue de défendre le bilinguisme dans notre province. Alors, pour nous, Néo-Brunswickois, il est logique que la capitale de notre pays soit bilingue. C'est par principe et par devoir, et en tant que sénateur du Nouveau-Brunswick, que j'insiste là-dessus et que j'appuie cette motion.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, tous ceux qui connaissent ma longue amitié pour le sénateur Gauthier savent très bien que je ne pouvais pas rester silencieux. Je vais donc me joindre sans équivoque à ce que les sénateurs Kinsella et Gauthier ont dit.

Il serait inconcevable autrement de croire que je puisse être chez moi ici en tant que Canadien français et certainement passionné du Québec. Ottawa est ma capitale et lorsqu'on parle de sa capitale, il faut se sentir à l'aise. Non pas que je ne me sente pas à l'aise dans l'autre langue officielle, je travaille dans cette langue tous les jours depuis que je suis arrivé dans l'autre Chambre. Et encore, si je n'avais pas le sénateur Rossiter et quelques autres à l'occasion pour corriger mon anglais, vous verriez que j'en ai encore beaucoup à apprendre.

Je me suis toujours considéré comme l'adjoint du sénateur Gauthier. C'était une blague que certains n'appréciaient pas, mais je n'ai jamais eu honte de dire que dans toutes ses préoccupations, je l'appuyais. C'est lui qui m'a ouvert les portes, à travers le Canada, de tous les minoritaires qui s'occupaient de la survivance du fait français au Canada. Il m'a transmis tous ses contacts, que ce soit en Colombie-Britannique, en Alberta et même dans les provinces un peu plus récalcitrantes.

[Traduction]

Honorables sénateurs, il est très facile de diviser pour se rendre populaire. Aujourd'hui, je n'en ai pas la force. En vieillissant, je suis de moins en moins fort. Mes vis-à-vis qui m'ont connu de l'autre côté savent que je peux défendre une opinion avec passion, quel que soit le côté où je siège. Je pourrais être très populaire auprès d'un groupe de Canadiens mais, en même temps, dénoncer ceux qui ne sont pas d'accord avec moi. C'est trop facile. Je l'ai fait dans votre province, Votre Honneur, dans les années 1960, lorsque j'ai pris la parole devant les Daughters of the Eastern Star, qui m'avaient d'abord rejeté comme conférencier. J'étais censé transmettre les bons voeux de M. Pearson, qui devait rentrer à Ottawa. Plutôt que de retourner à Québec et dénoncer celles qui m'avaient rejeté, je suis allé directement chez elles, en prétendant que je n'avais pas reçu leur message. Savez-vous combien d'amies je me suis faites chez les Daughters of the Eastern Star? Une personne a dit: «Nous n'avons pas besoin de ces bons voeux!» Cependant, 700 autres étaient très heureuses de recevoir ces voeux, que j'ai transmis dans mon mauvais anglais.

Honorables sénateurs, il y a deux manières d'être au Canada: on peut être un constructeur et on peut être de ceux qui préfèrent diviser. Plus souvent qu'autrement, j'ai été épinglé pour mes opinions politiques sur d'autres sujets. Je n'ai jamais choisi la voie de la facilité, qui consiste à dénoncer. Il y en a qui seraient presque prêts à vous assassiner en raison de vos opinions politiques sur certains sujets. Même à un âge avancé comme le mien, je continue à espérer que je réussirai à en faire changer d'autres d'opinion.

Honorables sénateurs, il y a quelques heures, des jeunes sont passés dans mon bureau. Ils participent à un projet qui a lieu dans la circonscription où j'habite, qui est celle de M. Pettigrew. La moitié d'entre eux ne s'étaient jamais intéressés à la politique. La moitié d'entre eux se sentaient très tristes en raison du processus et ne partageaient pas les opinions politiques que nous avons ici. Cependant, après moins d'une demi-heure de patientes explications, ils veulent maintenant revenir pour voir les honorables sénateurs au travail parce qu'ils ont vu les députés de la Chambre des communes plus tôt aujourd'hui.

J'unis ma voix à celle du sénateur Kinsella et remercie notre ami, le grand champion.

[Français]

Ce n'est pas facile d'être champion en Ontario, comme ce ne l'est pas dans d'autres provinces. C'est la raison pour laquelle je félicite le sénateur Kinsella. Il n'a pas peur d'exprimer son point de vue. Je pourrais nommer tous les autres, mais je vais m'abstenir parce que j'en oublierais. Je mentionne le sénateur Kinsella parce qu'il s'est prononcé et je l'en remercie. Je lui porte toute mon amitié, et en tout temps il me trouvera à ses côtés pour la bonne cause, c'est-à-dire la cause canadienne, mais la cause canadienne bien comprise.

[Traduction]

Certes, on peut parcourir le monde en vantant les mérites du Canada, mais en rentrant au pays il ne faut oublier les propos qu'on a tenus. Je viens tout juste de rentrer du Pakistan et d'autres pays. Ils voient dans le Canada des choses que les Canadiens ont de la difficulté à voir. Vous ne pouvez pas vous déplacer librement à l'extérieur de bien des pays comme on le fait au Canada, puis rentrer au pays et refuser d'oeuvrer pour la démocratie. Le Canada est un pays qu'il faut bâtir tous les jours. Le Canada n'est pas encore un pays. C'est un pays constamment en voie de réalisation. Cela exige de la patience. Il faut parfois se garder de chercher vengeance, comme certains d'entre nous le font. Remettre les coups donnés ne mène nulle part. C'est un mauvais exemple à donner à nos pages, qui viennent des quatre coins du pays, que de parler les uns contre les autres.

Honorables sénateurs, chacun de nous a un devoir. Nous devrions nous réengager au service du Canada. Il suffirait pour cela que 100 sénateurs prennent part à 10 événements chaque année pour défendre le Canada et expliquer ce que veut dire être Canadien. C'est ce que le sénateur Gauthier essaie de faire et c'est aussi ce que j'essaie de faire, à ma façon.

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, je tiens à féliciter le sénateur Gauthier pour sa motion. Je trouve qu'il convient parfaitement que le dernier article inscrit au Feuilleton ait trait à cette question. En tant que sénateur ontarien qui n'est pas bilingue - et j'en suis désolé -, j'ose espérer que cette motion sera adoptée à l'unanimité.

Des voix: Bravo!

L'honorable Bill Rompkey: Honorables sénateurs, j'interviens à propos de cette motion, et cela, pour deux grandes raisons. Premièrement, je tiens à appuyer le sénateur Gauthier. Le sénateur Gauthier et moi avons été élus tous deux en 1972. Je tiens simplement à appuyer mon collègue, le dernier parlementaire de la promotion 1972.

(1800)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suis désolé de vous interrompre, mais il est 18 heures.

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je propose de ne pas voir l'heure.

Son Honneur le Président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Rompkey: Je n'ai pas l'intention de retenir le Sénat, mais je voudrais dire quelques mots. Je souhaiter saluer le sénateur Gauthier pour le courage personnel et politique qu'il a montré aujourd'hui. J'appuie sa motion.

Si j'ai demandé à prendre la parole, c'est aussi à la suite des observations formulées par le sénateur Fraser à une autre occasion et ailleurs. Elle a déclaré que la question n'intéressait pas exclusivement les francophones, qu'elle revêtait plutôt un intérêt national. En tant que Terre-Neuvien, je fais partie d'un groupe de Canadiens nouvellement arrivés, puisque nous n'avons fait notre entrée dans la Confédération canadienne qu'en 1949. En tant qu'anglophones unilingues, nous avons dû faire l'apprentissage du Canada. Nous sommes encore nombreux à ne pas parler le français. En fait, certains d'entre nous ne parlent même pas l'anglais si bien que cela. Nous parlons la langue de Shakespeare. Je vois le sénateur Cochrane qui me fait des remontrances. Je voudrais simplement dire que sur mon île et au Labrador, nous parlons une langue qui a vu le jour à l'époque de Shakespeare, au XVIe siècle, et qui n'a pas beaucoup évolué depuis. Nous ne cherchons pas à nous justifier. Ce sont les autres qui ont changé la langue anglaise, pas nous.

Le statut linguistique d'Ottawa n'est affaire ni de francophones, ni d'anglophones. C'est une affaire nationale. Je suis en faveur d'une capitale bilingue, car Ottawa est la capitale des habitants du Labrador. Elle est la capitale de la population des territoires et de la Nouvelle-Écosse. Elle est la capitale des habitants de l'Île-du-Prince-Édouard et du Nouveau-Brunswick, de la Colombie-Britannique et du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta, de l'Ontario et du Québec. C'est la capitale de tous les Canadiens. Et, comme telle, elle devrait se faire le reflet du Canada.

La nature de ce pays, c'est que les deux peuples fondateurs doivent s'y sentir à l'aise. Nous avons livré cette bataille d'innombrables fois à la Chambre des communes. Nous avons adopté des mesures pour accommoder les divers groupes au pays et pour que les gens se sentent à l'aise au Canada. Nous avons donné des services et nous avons permis au gouvernement du Canada d'offrir des services dans les deux langues officielles. Cette disposition est importante. La capitale où nous vivons et travaillons tous devrait refléter le caractère bilingue du pays et la culture dont nous sommes si fiers. C'est pourquoi j'appuie cette motion, honorables sénateurs.

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, je ne devrais pas laisser passer cette occasion sans joindre ma voix à celle de mes collègues des deux côtés de la Chambre pour appuyer la motion de mon vieil ami le sénateur Jean-Robert Gauthier. Le sénateur Gauthier a été mis sur terre pour intervenir dans un moment semblable. Depuis les nombreuses années que je le connais, il s'est toujours fait le défenseur de l'équité dans cette ville, dans cette province et dans tout le pays. À un moment comme celui-ci, où nous sommes témoins d'un état d'esprit incompréhensible dans la capitale de la province, il est très heureux que nous puissions compter sur une personne ayant la force de caractère et la passion du sénateur Gauthier. Il a de nouveau pris la tête des forces du canadianisme, de l'équité et de l'égalité dans ce dossier.

Il est très vrai que la situation linguistique d'Ottawa est une question d'intérêt national. Il est impossible de se rendre dans quelque partie du Canada que ce soit sans savoir que certains des pionniers les plus inspirants, aussi loin que vous puissiez vous rendre à l'Ouest, au Nord ou à l'Est, étaient des gens qui y ont fait rayonner la langue et la culture françaises. Nous sommes très fiers de ces pionniers en Alberta mais, comme le souligne mon ami le sénateur Prud'homme, les gens luttent continuellement pour conserver leur culture. Plus nous nous éloignons du centre, plus la lutte devient difficile. Cette question constitue un champ de bataille.

Je suis fière d'appuyer mon collègue, le sénateur Gauthier, sur cette question. Des citoyens de Saint-Paul, de Lac La Biche, de Morinville et de St. Albert suivent ce qui se passe au Parlement sur cette question, afin de savoir s'ils sont toujours des Canadiens à part entière. Bien sûr qu'ils le sont!

Sénateur Gauthier, je vous remercie. À tous les honorables sénateurs, je dis que nous vivons un grand moment au Sénat lorsque nous pouvons tous appuyer une question aussi fondamentale que celle-ci pour notre pays.

Des voix: Bravo!

L'honorable Sharon Carstairs: Honorables sénateurs, en 1905, après la naissance de son dix-septième enfant, ma grand-mère, Sophie Leblanc Martel, a quitté son petit village de pêcheurs du Cap-Breton pour aller s'établir à Boston, au Massachusetts. Quand elle est arrivée là-bas, elle a dit à ses enfants qu'ils ne devaient plus parler français, qu'ils vivaient désormais dans un pays anglophone et qu'ils devaient apprendre à parler anglais.

Ma mère, dix-huitième enfant de la famille et la cadette, est née deux ans plus tard. Elle n'a jamais entendu ma grand-mère parler français, sauf lorsque celle-ci récitait ses prières. Je pense que ma grand-mère serait très contente de savoir que ses petits-enfants, du moins certains, sont revenus au Canada, dans un pays bilingue. Je pense qu'elle serait d'accord pour que la ville d'Ottawa, la capitale de ce pays, soit bilingue.

On m'a appris à penser que j'étais irlandaise, d'un côté, et américaine, de l'autre, jusqu'au jour où ma mère est arrivée à la maison avec un morceau de vitrail très ancien, décoré d'une fleur de lys. Ce morceau de vitrail se trouve maintenant dans mon bureau, dans l'Édifice de l'Est. Après l'avoir nettoyé, ma mère l'a mis sur un support, dans le salon. Elle a ensuite annoncé à mon père que ses enfants n'étaient pas seulement Irlandais mais qu'ils étaient aussi Canadiens français.

L'honorable Francis William Mahovlich: Honorables sénateurs, en 1972, lorsque le sénateur Rompkey et le sénateur Gauthier ont été nommés, j'étais en Russie avec une équipe de hockey qui était bilingue. Nous avons remporté un très gros succès, et 1972 a été une très bonne année.

Je voulais seulement signaler que je suis d'accord avec ce que le sénateur Rompkey a dit.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud: Honorables sénateurs, j'aimerais signifier mon appui à cette motion du sénateur Gauthier. Je pensais que vous tiendriez pour acquis que j'appuierais cette motion. Bien sûr que je le fais. On pourrait souvent tenir pour acquis - je pense que beaucoup de gens tiennent pour acquis - que la capitale nationale se doit d'être bilingue.

C'est souvent une erreur que nous faisons lorsque nous sommes en situation minoritaire: nous tenons des choses pour acquises. Le fait que nous ayons à déposer une motion pour demander que la région de la capitale nationale revête ce caractère bilingue illustre bien que nous devons toujours être vigilants. Nous devons encourager les gens à respecter les deux langues officielles du pays. C'est tout à fait sans condition et j'appuie sincèrement cette motion.

(1810)

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, nous constatons aujourd'hui quelle place le Sénat occupe dans notre pays. Comme le disaient si bien plusieurs de nos collègues, il est tout à fait approprié de clore l'année 1999, avec fierté, sur une motion de principe unanime. Le Sénat du Canada représente toutes les minorités et toutes les professions, toute la diversité culturelle et la richesse de notre pays.

J'ai exprimé mardi dernier ma surprise devant le fait qu'on ne voulait pas reconnaître le statut bilingue de la capitale du Canada. Quelques jours plus tard, au service du pays, en tant que législateurs représentants les Canadiens, nous avons pu nous rallier et crier d'une même voix, d'un même coeur et d'un même sentiment de fierté. Toutes les équipes qui nous appuient méritent nos félicitations.

L'honorable Louis J. Robichaud: Honorables sénateurs, autant j'ai été déçu, presque insulté, lorsque le gouvernement de l'Ontario a déterminé que la capitale nationale ne serait peut-être pas bilingue, autant je me réjouissais tout à l'heure d'entendre les propos de mes collègues du Sénat qui ont été offensés parce qu'on refuse de déclarer officiellement bilingue la nouvelle ville d'Ottawa.

Le sénateur Frank Mahovlich a dit tout à l'heure qu'en 1972, un événement d'importance s'est produit au pays et à Moscou; j'y étais également. Les Canadiens ont alors montré leur suprématie dans un domaine qui leur est cher, le hockey. Un autre domaine aussi nous est cher, le bilinguisme. Nous voudrions tellement cesser les luttes chez nous. Nous voudrions tellement ne pas avoir à lutter pour que le bilinguisme soit officiellement reconnu.

Je n'avais pas l'intention de dire quoi que ce soit. J'étais absolument sûr que la motion du sénateur Jean-Robert Gauthier serait adoptée à l'unanimité. Comme on l'a dit, je suis l'un des derniers dans ce millénaire à m'exprimer. J'appuie très clairement le bilinguisme.

L'honorable Aurélien Gill: Honorables sénateurs, j'aimerais aussi m'associer au sénateur Gauthier. J'appuie sa motion. J'aimerais aussi féliciter les deux groupes majoritaires du pays qui veulent que la capitale nationale conserve son nom: Ottawa.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, je vais procéder. Vous plaît-il d'adopter la motion, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

Le sénateur Kinsella: Je demande le consentement des honorables sénateurs pour que le compte rendu indique que la motion a été adoptée à l'unanimité.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Les voeux de Noël

L'honorable Mabel A. DeWare: Au nom de l'opposition officielle, je vous remercie, Votre Honneur, ainsi que les greffiers au Bureau et les pages pour le soutien que vous nous avez apporté dans cette merveilleuse institution où nous travaillons. Je souhaite à Votre Honneur et aux honorables sénateurs de passer de joyeuses fêtes et je vous offre nos meilleurs voeux à l'occasion du nouveau millénaire.

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je me joins à ma collègue d'en face pour vous souhaiter à tous de joyeuses fêtes et vous offrir mes meilleurs v9ux pour le XXle siècle. Je remercie tous et chacun pour leur coopération, le soutien et les bons services qu'ils ont apportés à notre pays au sein de cette institution.

Ajournement

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 8 février 2000, à 14 heures.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de mettre la motion aux voix, je tiens moi aussi à remercier tous les honorables sénateurs et tout le personnel, de fait tous les employés du Sénat, pour leur excellent soutien.

[Français]

Je souhaite à tous un très Joyeux Noël et une très Bonne Année. Nous vivons une journée historique, la dernière séance de l'année 1999, la dernière séance de ce millénaire.

[Traduction]

J'offre à tous mes meilleurs v9ux pour le nouvel an. Je regrette que le juge en chef ait dû partir, car nous avons siégé un peu plus longtemps que prévu, mais j'espère vous retrouver tous dans mes appartements.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mardi 8 février 2000, à 14 heures.)


Haut de page