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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 37e Législature,
Volume 139, Numéro 18

Le mercredi 21 mars 2001
L'honorable Dan Hays, Président


 

LE SÉNAT

Le mercredi 21 mars 2001

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LA JOURNÉE INTERNATIONALE POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je rappelle à tous les sénateurs que nous marquons aujourd'hui la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale. Les conséquences du racisme dans la société sont inquantifiables, mais elles font sentir leurs effets sur la capacité d'une personne à appuyer sa famille, son aptitude à obtenir du service dans des commerces, son estime de soi et, à l'occasion, sa sécurité personnelle.

Malheureusement, bon nombre de gens dans le monde, y compris des personnes habitant au Canada, sont toujours victimes de discrimination fondée sur leur nationalité ou leur race. Si les Canadiens pensent que le racisme n'existe pas dans leur pays, c'est parce qu'au Canada, le racisme se manifeste souvent de façon sournoise.

La Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale a été instaurée pour cette raison. Chaque fois que nous relevons du racisme, nous devons en discuter de façon ouverte et publique. Chaque fois que nous nous livrons à de la discrimination contre quelqu'un, cela a un effet insidieux sur les principes et les valeurs chers aux Canadiens. Le racisme a un effet destructeur sur le tissu de notre société et constitue une menace à la sécurité des futures générations de Canadiens.

[Français]

En tant que Canadiens, nous pouvons être fiers que notre pays ait été l'un des premiers à appuyer la décision des Nations Unies d'établir cette journée. Nous sommes à l'avant-garde mondiale des efforts pour favoriser la compréhension entre nos diverses communautés et promouvoir le respect de nos différences.

[Traduction]

Nous devons veiller à ce que le Canada poursuive son évolution et devienne un endroit où règne l'inclusivité et où chacun peut atteindre son plein potentiel. J'ai hâte de voir le jour où les Canadiens et les gens de partout dans le monde seront jugés en fonction non pas de la couleur de leur peau, mais bien de la qualité de leur personnalité.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, la journée que nous marquons aujourd'hui tire son origine de l'horrible massacre de 70 manifestants pacifiques à Sharpville, en Afrique du Sud, le 21 mars 1960.

En soulignant au Canada la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, nous faisons corps avec tous les Canadiens qui ont été si actifs dans la lutte pour l'élimination du racisme et de toutes les formes de discrimination raciale, des gens comme le Dr Ranjit Perera qui, de sa propre initiative, a produit un macaron précisant qu'il déteste le racisme et qu'il aime le Canada. C'est grâce à de grands Canadiens comme le Dr Ranjit Perera que nous pouvons avoir l'assurance que nous connaîtrons en bout de piste la victoire.

LA DÉFENSE NATIONALE

LE REMPLACEMENT DES HÉLICOPTÈRES SEA KING—LES OBSERVATIONS DU SOUS-MINISTRE ADJOINT (MATÉRIEL)

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, M. Alan Williams, sous-ministre adjoint (Matériel), a déclaré à un comité en l'autre endroit, le 13 mars de l'année courante, que le gouvernement a emprunté la bonne démarche en cherchant à acquérir le véhicule vert le moins onéreux possible pour le projet de l'hélicoptère maritime destiné à remplacer le Sea King. Il a dit que tout autre choix serait irresponsable. Il a dit que nous n'avions pas besoin de dépenser un dollar de plus de l'argent des contribuables pour obtenir ce que nous voulions. Il a comparé l'achat de l'hélicoptère maritime le moins cher à l'achat d'une voiture sans climatisation. Il a dit que pour un dollar de plus, on pourrait bien décider de renoncer à la climatisation.

(1340)

Je me demande ce qu'il pense de renoncer à un système de sacs gonflables pour un dollar de plus. Aurait-il rejeté aussi manifestement du revers de la main un dispositif de sécurité qui coûterait un dollar de plus?

Je trouve cela quelque peu irresponsable. Si un dollar de plus permet d'obtenir un hélicoptère plus endurant ayant une meilleure portance et une meilleure puissance de moteur, de même que des dispositifs de sécurité additionnels, ne choisirait-on pas de protéger ceux qui pilotent ces appareils en notre nom et tous les citoyens du Canada?

Le leader du gouvernement a dit «le meilleur équipement pour nos femmes et nos hommes des Forces armées canadiennes au meilleur coût», alors que le sous-ministre adjoint (Matériels) a dit «le moins cher» et qu'il a nommé, soit dit en passant, le Cougar d'Eurocopter.

Honorables sénateurs, l'acheteur doit être vigilant.

VISITEUR DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je voudrais vous signaler la présence d'un visiteur de marque à notre tribune. Il s'agit de M. Björn Bjarnson, ministre de la Culture et de l'Éducation de l'Islande.

De la part de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix: Bravo!


AFFAIRES COURANTES

PROJET DE LOI DE CRÉDITS NO 3 POUR 2000-2001

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes le projet de loi C-20, portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2001.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Robichaud, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

PROJET DE LOI DE CRÉDITS NO 1 POUR 2001-2002

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes le projet de loi C-21, portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2001.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Robichaud, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

PROJET DE LOI SUR LA RACE NATIONALE DE CHEVAUX DU CANADA

PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Lowell Murray présente le projet de loi S-22, Loi portant reconnaissance du cheval de race canadienne comme le cheval national du Canada.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Murray, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

LA DÉFENSE NATIONALE

LE REMPLACEMENT DES HÉLICOPTÈRES SEA KING—LE CARACTÈRE ADÉQUAT DU COUGAR

Mark II d'Eurocopter

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. J'ai en ma possession des documents confidentiels marqués — et je n'arriverai jamais à comprendre ceci — «Réservé aux Canadiens»; il s'agit d'un rapport d'évaluation des soumissions.

Supposant que nous sommes tous Canadiens, honorables sénateurs, je vais lire ce qui y est dit au sujet du Cougar d'Eurocopter. Si quelqu'un demande que le document soit déposé, je le ferai avec plaisir.

L'honorable B. Alasdair Graham: Donnez-nous la date du document, s'il vous plaît.

Le sénateur Forrestall: Je suis désolé, il n'est pas daté. Peut-être date-t-il des années 1700, à en croire sa logique.

Je cite:

Toute tentative de réduire un tel écart quant à la performance de l'aéronef exigerait soit de reprendre la conception du Super Puma Mark II soit de modifier radicalement le rôle opérationnel du NAE, ce qui entraînerait la réévaluation de ce que la Marine canadienne entend par opérations. On estime que reprendre la conception de l'appareil coûterait plus de 500 millions de dollars.

On peut lire plus loin:

Une portion importante de cette différence (350 millions) représente les modifications qu'il faudrait apporter au Super Puma de base pour qu'il soit compatible avec environ 50 p. 100 des [...] exigences opérationnelles.

L'achat du Cougar Mark II, la version maritime du Cougar, coûterait entre 350 et 500 millions de dollars, alors que cet appareil ne pourrait s'acquitter que de 50 p. 100 des tâches opérationnelles de la Marine.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle me dire comment le gouvernement peut penser que cet appareil est un candidat valable, et qu'il offre le meilleur rapport qualité-prix? Nous ne parlons pas de climatisation; nous parlons de la vie des Canadiens et des Canadiennes.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie le sénateur de sa question. Comme cela arrive souvent ici, le sénateur détient des documents que je n'ai jamais vus. Toutefois, il est toujours très correct à cet égard. D'habitude il me les communique après avoir posé sa question. Il est très bien à cet égard. Il s'arrange toujours pour me les faire remettre.

Je ne peux répondre à la question du sénateur. Je vais essayer de lui obtenir ces renseignements.

J'ai écouté avec grand intérêt la déclaration que le sénateur Forrestall a faite dans le cadre des déclarations de sénateurs il y a un moment.

Si ma mémoire est exacte, il a dit que le sous-ministre adjoint aurait déclaré que nous ne devrions pas dépenser un dollar de plus pour obtenir ce que nous voulons. Je pense qu'il faut insister sur «ce que nous voulons».

(1350)

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, je suis heureux que quelqu'un du côté ministériel ait fini par voir la réalité.

Seulement deux appareils conviennent: le Sikorsky S-92, qui devrait être homologué d'ici un an, et le EH-101, que nous sommes en train de louer à des fins de recherche et de sauvetage.

La sincérité et la transparence sont deux qualités que j'apprécie beaucoup. Je vois qu'il y a du progrès.

J'ajouterai à cette bonne nouvelle à laquelle je ne m'attendais pas, que j'ai ici le document no 1013031 de l'état-major de l'aéronavale française, intitulé: «Directive sur les limites d'utilisation des hélicoptères à bord des bâtiments de surface».

En ce qui concerne le Cougar, ce document dit:

Il y a un risque que le mécanisme qui sert à maintenir les pales en place (courroies et autres dispositifs) ne résiste pas au mouvement de la plate-forme par temps houleux. Dans ce cas, il est nécessaire d'ôter les pales. Étant donné que l'appareil est étroit et que son centre de gravité est relativement élevé, le Puma doit être manoeuvré avec précaution.

Honorables sénateurs, ceci veut dire que le Cougar n'est pas un hélicoptère navalisé. Il n'est pas muni d'un système de pales repliables nécessaire pour lui permettre de tenir dans les hangars du navire. Il n'a pas d'empennage escamotable ou de train d'atterrissage renforcé. Il a un centre de gravité très élevé, ce qui en fait une plate-forme instable.

La question que je pose à madame le ministre est celle-ci: Admet-elle que l'achat d'hélicoptères Cougar ne fait aucun sens, pas même aux yeux de la marine française, que ce n'est pas le meilleur matériel pour la marine canadienne, que ce matériel présente des risques et que les frais de conversion sont prohibitifs?

Le sénateur Carstairs: Le sénateur devrait savoir que je n'admettrai rien dans cette Chambre en ce qui concerne les pièces d'équipement que nous devrions acheter, étant donné que je m'y connais très peu en matériel de défense.

Si, toutefois, l'honorable sénateur veut bien me procurer le document et sa traduction, et connaissant sa nature serviable, je ne doute pas qu'il s'empressera de le faire, je transmettrai cette documentation au ministre de la Défense, et j'espère qu'ils en tiendront compte dans leurs délibérations.

LE REMPLACEMENT DES HÉLICOPTÈRES SEA KING—LES PRÉOCCUPATIONS DE L'ASSOCIATION DES INDUSTRIES AÉROSPATIALES DU CANADA

L'honorable J. Michael Forrestall: Enfin, j'aimerais savoir si le leader du gouvernement pourrait obtenir confirmation auprès de ses collègues que, durant la dernière semaine, le président de l'Association des industries aérospatiales du Canada, M. Peter Smith, a rencontré le vice-premier ministre, M. Gray, puis les ministres Gagliano et Eggleton et, sauf erreur, de nouveau ce matin le vice-premier ministre, pour les entretenir des préoccupations de son association concernant le processus d'achat d'hélicoptères maritimes.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je remercie l'honorable sénateur de sa question. J'ignore tout à fait ce qu'a fait M. Smith, mais s'il a participé à toutes ces rencontres, il a dû être très occupé. Si je puis en obtenir confirmation, j'en informerai le Sénat.

LES FINANCES

L'EFFET DE LA DÉPRÉCIATION ACTUELLE DU DOLLAR—LA VALEUR OPTIMALE

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, j'ai une question pour le leader du gouvernement. Le gouvernement canadien pratique-t-il délibérément une politique de dévaluation de notre monnaie, le dollar canadien, par rapport au dollar américain, afin de stimuler les exportations et de créer des emplois au Canada?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la réponse à cette question est très simple: c'est non.

Le sénateur Tkachuk: Notre dollar, qui perd de la valeur depuis quelques années, a poursuivi sa chute et ne valait qu'un peu plus de 63 cents il y a quelques jours. Madame le leader du gouvernement est-elle en train de nous dire que le gouvernement du Canada n'a aucune politique économique pour renforcer le dollar canadien?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, le gouvernement canadien, sous la gouverne éclairée du ministre des Finances, a confiance dans l'économie canadienne. Notre économie se porte très bien. Comme je le disais en réponse à une question de l'honorable sénateur Bolduc hier, notre dollar se tire très bien d'affaire comparé à d'autres monnaies. Notre monnaie fait moins bonne figure face au dollar américain, mais comparée au dollar australien, au yen japonais et à la livre britannique, elle se comporte très bien, et cela en raison du dynamisme de notre économie.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, je voudrais poser une autre question. Je puis comprendre que le dollar américain se soit apprécié par rapport aux autres monnaies.

Le sénateur Taylor: Expliquez-le nous alors.

Le sénateur Tkachuk: Cela s'explique par la vigueur et la plus grande productivité de l'économie américaine et par le fait que le monde entier considère le dollar américain comme une devise sûre. Nous ne pouvons plus prétendre, d'une part, que notre monnaie se déprécie autant que les autres monnaies dans le monde et, d'autre part, que l'on ne doit pas nous comparer aux Japonais, qui ont leurs propres difficultés économiques, et en déduire que l'économie canadienne se porte comme un charme, même si nous sommes voisins, mais que notre dollar se déprécie autant que toutes les autres monnaies. Nous sommes voisins des États-Unis.

Le sénateur Taylor: Notre pétrole nous rapporte davantage.

Le sénateur Tkachuk: Étant issu de l'ouest du Canada, sénateur Taylor, je voudrais vous entretenir au sujet du dollar canadien car nous subventionnons les exportations de l'Ontario. J'ai le droit de m'exprimer.

Le sénateur Taylor: Vous ne connaissez rien à l'économie. Pourquoi ne vous rasseyez-vous pas?

Des voix: Oh, oh!

Son Honneur le Président: À l'ordre!

Le sénateur Taylor: Il y a une limite à ce que l'on peut accepter d'un idiot.

Le sénateur Tkachuk: J'exige des excuses.

Le sénateur Taylor: D'accord.

Le sénateur Tkachuk: Je veux de véritables excuses. Je ne permettrai pas que l'on me traite ainsi.

Le sénateur Taylor: Je m'en excuse, Votre Honneur. Je crois que je lui ai fait trop d'honneur.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, la question est de ...

Le sénateur Tkachuk: Je poserai mes autres questions demain. Allez-y.

Le sénateur Murray: Je voudrais poser une question complémentaire au leader du gouvernement. Si, comme on nous l'a laissé croire hier et encore aujourd'hui, l'économie se porte effectivement à merveille du fait que le dollar a été déprécié, le gouvernement est-il d'avis que l'économie se porterait encore mieux si le dollar se dépréciait davantage? En d'autres mots, quelle est la position du gouvernement? Le dollar canadien est-il sous-évalué, surévalué ou bien, comme le gruau de Bébé ourson, est-il juste à point?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, pour répondre simplement en partie au sénateur Tkachuk, dont certains arguments sont valables quoique sa question soit jusqu'à un certain point fondée sur une fausse prémisse, je dirai que le dollar canadien se porte bien. L'honorable sénateur, en fait, a comparé le dollar canadien à d'autres monnaies en disant que leurs dépréciations sont comparables. Oui, le dollar canadien s'est déprécié au cours de la dernière année. Il a perdu 7 p. 100 de sa valeur depuis janvier 2000. Toutefois, au cours de la même période, le dollar australien a chuté de 25 p. 100 et le yen japonais de 16 p. 100. C'est grâce à la solidité de notre économie que notre dollar ne s'est pas autant affaibli que le yen, qui a perdu presque deux fois et demie autant, ou que le dollar australien, qui a perdu trois fois et demie autant. Cela tend à démontrer que notre économie est plus robuste que les leurs.

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement. Elle n'a pas répondu au sénateur Murray, qui voulait savoir jusqu'où on devrait laisser le dollar canadien glisser. Devrait-on le laisser tomber jusqu'à zéro? Notre richesse globale diminue. Ce qui me préoccupe, et j'espère que cela préoccupe également le Parti libéral, c'est que nous perdons de grandes sociétés. Nous avons perdu MacMillan Bloedel. Seagrams a été achetée par une société étrangère et, essentiellement, tout ce que le Canada possède vaut moitié prix pour les Américains.

(1400)

Lorsque j'étais dans l'Aviation royale du Canada, nous nous mesurions aux Américains. Nous étions aussi bons qu'eux, sinon meilleurs, pendant les années où nous disposions du matériel adéquat. Je me suis toujours comparé aux meilleurs, jamais aux nullards. Le sénateur Tkachuk essayait de présenter la réalité sous cet angle, affirmant que nous devions nous comparer aux meilleurs. Je sais qu'il est difficile pour les libéraux de l'Alberta de penser de cette façon, mais, franchement, je suis très inquiet de voir les Américains venir acheter à moitié prix des sociétés comme MacMillan Bloedel ou des grosses pétrolières. La tendance s'accentuera certainement si le dollar continue de chuter. Tout sera vendu au prix de gros et rapportera moins. Qu'en pense le leader?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, en matière de mises en chantier, le Canada se compare très bien aux États-Unis, car nos statistiques sont meilleures. Notre bilan en matière de création d'emplois est également meilleur, car nous avons obtenu de meilleurs résultats dans ce secteur au cours des huit derniers mois. En ce qui concerne l'augmentation du taux de création d'emplois, elle est deux fois supérieure au Canada qu'aux États-Unis. En outre, nos ventes au détail se comportent mieux que celles des États-Unis. Lorsque le gouvernement se compare à celui des États-Unis, il peut dire bien franchement qu'il s'en tire fort bien et qu'il est en tête du peloton.

Le sénateur Kinsella: Qu'en est-il de la LNH?

Le sénateur St. Germain: Je répète ma question à madame le leader du gouvernement au Sénat: à combien le dollar devrait-il tomber? En outre, n'est-on pas préoccupé au sujet des grandes entreprises canadiennes qui sont achetées par des Américains au prix de gros ou même moins? Cela doit sûrement être inquiétant. Même en Alberta, les Américains achètent les pétrolières à moitié prix et même moins à mesure que la valeur de notre dollar diminue. La situation ne fera que s'aggraver. Que fait le gouvernement à ce sujet?

Le sénateur Carstairs: Je remercie le sénateur de sa question. Laisse-t-il entendre que le gouvernement devrait intervenir et contrôler directement le marché au Canada? Est-ce là ce qu'il propose? La position de l'Alliance canadienne est-elle désormais l'interventionnisme à outrance?

Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, les libéraux critiquaient constamment le gouvernement Mulroney parce qu'il maintenait les taux d'intérêt à un niveau assez élevé, mais, à tout le moins, il maintenait la valeur du dollar canadien à un niveau assez raisonnable. Cela dissuadait les Américains d'acquérir des entreprises canadiennes comme MacMillan Bloedel. C'est cela qui me préoccupe. Je suis favorable à la concurrence, mais soyons plus productifs et allons de l'avant. Cessons de nous bercer d'illusions. À en croire les beaux discours, nous sommes aussi productifs que les Américains. À une certaine époque, notre dollar valait plus que le dollar américain. Si nous étions concurrentiels, notre dollar serait à parité avec le dollar américain, peu importe ce qui se passe dans le reste du monde.

Le sénateur Carstairs: Si le sénateur tenait sérieusement à ce que la valeur de notre dollar augmente, il se dissocierait entièrement de la politique de son parti au sujet d'un impôt uniforme, lequel ferait probablement baisser la valeur de notre dollar à 50 cents.

Des voix: Bravo!

LE SÉNAT

LES PROPOS DU SÉNATEUR TAYLOR

L'honorable Edward M. Lawson: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur l'incident dont nous venons tout juste d'être témoins, au cours duquel le sénateur Taylor a attaqué le sénateur Tkachuk et l'a qualifié d'idiot. Tentant faiblement de s'excuser, il a dit: «Je crois que je lui ai fait trop d'honneur.» Je suis au Sénat depuis de nombreuses années, mais c'est la première fois que j'y entends une déclaration aussi méprisante.

Honorables sénateurs, si le sénateur Taylor n'a pas la décence de présenter des excuses honorables pour son accès de colère, madame le leader du gouvernement établira-t-elle des normes en lui ordonnant de s'excuser, ou présentera-t-elle elle-même des excuses au nom du côté ministériel?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai peut-être pas été assez claire. En tentant de répondre au sénateur Tkachuk — car tout ce que j'essaie de faire ici est de répondre aux questions —, j'espère avoir dit clairement que sa question était valable. Honnêtement, je désapprouve de tels échanges au Sénat. Je ne voudrais jamais y participer. J'espère que le sénateur Taylor fera des excuses sans réserve.

L'honorable Nicholas W. Taylor: Puis-je m'excuser, honorables sénateurs?

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, permettez-moi d'intervenir brièvement, à titre de président de séance, pour souligner que, même si certaines libertés sont utiles aux fins des échanges qui caractérisent la période des questions au Sénat, il y a une façon de s'exprimer que tous les sénateurs devraient respecter — et le Règlement interdit les «propos vifs».

Honorable sénateur Taylor, je pense que vous voulez dire quelque chose.

Le sénateur Taylor: Honorables sénateurs, je dois avouer que j'ai importé de l'autre endroit une certaine manière de m'exprimer. J'ai peut-être passé trop de temps sur les banquettes de l'opposition. Je présente des excuses. Je ne suis pas certain que le terme «idiot» soit interdit...

Des voix: Oh, oh!

Le sénateur Taylor: Un instant. Qu'il soit interdit ou non, je le retire certainement et je présente des excuses. Si c'est possible, je suis prêt à faire tout ce qu'il faut pour que le sénateur puisse reposer ses questions, quitte à sourire pendant qu'il le fera.

L'honorable David Thachuk: Pourrais-je dire quelque chose, honorables sénateurs?

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Tkachuk, cela est contraire au Règlement, mais étant donné les circonstances, je vous donne la parole.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, cela ne me fait rien qu'on me traite d'idiot; on m'a traité de bien pire. Bien des fois j'ai eu envie de dire des choses, en cette Chambre, à l'autre endroit ou dans la rue, que l'on considérerait impolies là d'où je viens, mais je pense que Dieu m'a donné un cerveau pour que je puisse réfléchir à ce que je veux dire et m'abstenir de dire des choses impolies.

Honorables sénateurs, j'ai demandé des excuses. Je pense que j'ai droit à des excuses non équivoques. Le sénateur a pris la parole par deux fois et ne m'en a pas fait. Cela ne me fait rien, pourvu que les mêmes règles s'appliquent à tout le monde. Si c'est là un exemple de la façon dont nous devons nous comporter ici, je pense qu'il incombe à Son Honneur, ou au leader du gouvernement, de bien faire comprendre au sénateur Taylor que nous ne devons pas nous comporter de cette façon au Parlement.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je voudrais attirer l'attention sur la règle à laquelle je faisais allusion il y a un instant dans le contexte de l'échange qui vient de se produire entre les honorables sénateurs. L'article 51 du Règlement stipule ceci:

Les propos vifs, offensants ou accusateurs sont proscrits.

J'applique cet avertissement dans notre Règlement à la conduite des sénateurs au cours de la période des questions.

DÉPÔT DES RÉPONSES À DES QUESTIONS INSCRITES AU FEUILLETON

LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ—UNE PLAINTE DE DISCRIMINATION RACIALE

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 6 inscrite au Feuilleton par le sénateur Oliver.

LA SANTÉ—L'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'HÉPATITE C

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 13 inscrite au Feuilleton par le sénateur Lynch-Staunton.

LES TRANSPORTS—LE CODE CANADIEN DE SÉCURITÉ POUR LES TRANSPORTEURS ROUTIERS

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 7 inscrite au Feuilleton par le sénateur Spivak.


ORDRE DU JOUR

DISCOURS DU TRÔNE

MOTION D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE—MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Cordy, appuyée par l'honorable sénateur Setlakwe, relative à l'Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la première session de la trente-septième législature.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Kinsella, appuyée par l'honorable sénateur Rossiter, que le texte suivant soit ajouté à l'Adresse:

Nous soumettons respectueusement à Votre Excellence que le discours du Trône aurait captivé les citoyens et citoyennes du Canada s'il avait contenu les mots suivants:

«Les Canadiens et les Canadiennes sont aujourd'hui les citoyens les plus remarquables de notre communauté mondiale. Notre citoyenneté commune trouve de multiples expressions et nous donne des occasions sans pareilles de nous battre pour la liberté et la dignité que mérite chacune des personnes avec qui nous partagerons notre planète Terre au cours du XXIe siècle.

Mon gouvernement reconnaît que le Canada est une terre bénie aux paysages et aux ressources naturelles et humaines incomparables. Notre sens de la liberté, de la paix et du civisme est profondément ancré dans notre histoire. Le Canada a toujours été une terre rêvée pour ceux et celles qui sont en quête d'une autre chance et qui ont soif de justice et de sécurité.

Malgré ces points forts, encore valables aujourd'hui, nombre d'entre nous se trouvent exclus du rêve canadien. Le monde évolue très rapidement autour de nous, tandis que nous faisons face à un avenir incertain, chargé de défis, sans pouvoir nous appuyer sur aucun plan. De plus en plus, nous avons l'impression de nous être égarés.

Nous nous devons de retrouver une aspiration commune pour le pays, de retrouver l'impression que nous travaillons ensemble dans l'intérêt de toute la collectivité; nous devons aussi encourager le genre d'actions volontaristes qui ont défini le Canada et qui, dans le passé, nous ont permis de progresser dans des temps difficiles.

Le plan de mon gouvernement est un plan pour renforcer les collectivités, bâtir une économie dynamique, et garantir l'intégrité du gouvernement.

Renforcer les collectivités canadiennes

Les Canadiens croient que notre tissu collectif et institutionnel s'est considérablement affaibli au cours des dernières années.

La foi que les Canadiens avaient dans leur système de soins de santé a été ébranlée. Les compressions dans ce domaine ont provoqué la fermeture de milliers de lits d'hôpital, l'encombrement des salles d'urgence et la création de listes d'attente qui sont intolérables dans le cas de services et de traitement critiques.

À cause de la réduction du financement de l'éducation, les frais de scolarité des collèges et des universités ont augmenté et les étudiants doivent assumer des dettes inadmissibles. L'accès à l'enseignement supérieur est maintenant une chose du passé, même si l'économie du savoir privilégie plus que jamais les qualifications de niveau supérieur.

Alors que les Canadiens se sentent de moins en moins en sécurité dans leurs collectivités, la GRC s'est fait couper les vivres. Pendant ce temps, le programme d'enregistrement des armes à feu coûte des centaines de millions de dollars aux Canadiens et les propriétaires respectueux de la loi sont traités en criminels.

Les Canadiens veulent retrouver leur valeur commune dans les programmes sociaux du Canada: l'autonomie et la responsabilité personnelle, d'un côté, et la compassion, l'investissement dans une population saine et instruite, des collectivités sûres et une responsabilité financière, de l'autre.

Les Canadiens veulent que leur gouvernement national fasse preuve de leadership en matière de protection de l'environnement.

Le plan de mon gouvernement pour assurer l'avenir du Canada couvre ces enjeux et vise à bâtir un pays plus fort grâce à des collectivités plus fortes.

Mon gouvernement:

- ramènera immédiatement à leurs niveaux de 1993-1994 les versements au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Ce faisant, nous retrouverons exactement le niveau des transferts à la santé et à l'éducation postsecondaire d'avant les coupures.

- ajoutera, par voie de législation, un sixième principe à l'assurance-maladie, celui d'un financement stable garanti et prévisible à long terme. Désormais, jamais plus aucun gouvernement ne sera en mesure de retirer des milliards de dollars aux soins de santé.

- augmentera le crédit d'impôt pour les fournisseurs de soins, en consultation avec les groupes représentant les personnes âgées et les personnes handicapées.

- changera les conditions de remboursement du Programme canadien de prêts aux étudiants pour que le remboursement corresponde à un pourcentage du revenu net d'impôt, le premier paiement n'étant exigé que 12 mois après l'obtention du diplôme.

- instaurera un crédit d'impôt pour les étudiants du niveau postsecondaire qui remboursent des emprunts en vertu du Programme canadien de prêts aux étudiants. Sous réserve que l'intéressé travaille au Canada, ce crédit annuel équivaudra à 10 p. 100 au maximum du montant principal et sera consenti pendant les dix premières années suivant l'obtention du diplôme.

- défiscalisera les bourses accordées aux étudiants des collèges et des universités.

- assurera à la GRC un financement stable et lui demandera, en priorité, de lutter contre le crime organisé, surtout contre le blanchiment d'argent, contre le trafic d'êtres humains et la contrebande, et contre la fraude et le crime informatique.

- remplacera la Loi sur les jeunes contrevenants par une nouvelle mesure qui reflétera les principes de protection du public, de dissuasion et de dénonciation, de même que les principes de réinsertion et de recours accru au concept de justice réparatrice.

- abrogera l'actuel système d'enregistrement des armes d'épaule et confirmera et renforcera les dispositions régissant l'utilisation dangereuse et criminelle des armes à feu.

- fera de la santé de nos enfants une priorité explicite en légiférant dans le domaine de l'environnement par le biais d'une loi sur la salubrité des eaux et d'une loi sur la salubrité de l'air.

Bâtir une économie plus forte

Aujourd'hui, le Canadien moyen voit partir 47 p. 100 de son revenu dans des taxes et des impôts qui, parce qu'ils sont très élevés, grugent son niveau de vie. À cause de cette lourde fiscalité, nos entreprises sont moins concurrentielles. Qui plus est, nos jeunes professionnels et entrepreneurs partent à l'étranger dans l'espoir d'y trouver de meilleurs cieux.

Les Canadiens sont conscients que l'équilibre budgétaire et la croissance économique d'aujourd'hui n'ont été réalisés que parce qu'ils se sont sacrifiés et qu'ils ont travaillé fort. Ils veulent que la prospérité du Canada profite à tous, mais ils exigent un fardeau fiscal équitable et moins lourd.

Les Canadiens savent par ailleurs que, pour réussir dans le monde d'aujourd'hui, nous devons être compétitifs par rapport à nos partenaires commerciaux et que la nouvelle économie exige qu'on récompense l'investissement, l'innovation et la créativité.

Les Canadiens veulent que le fardeau de la dette nationale — qui est maintenant de 560 milliards de dollars — ne vienne pas reposer sur les épaules de leurs enfants.

Les Canadiens réclament des investissements stratégiques qui soient fonction de leurs priorités.

Mon gouvernement:

- réduira les impôts de tous les Canadiens en faisant passer l'exemption personnelle de base de 7 231 $ à 12 000 $ en 2005. Cette réduction permettrait de défiscaliser 2,3 millions de Canadiens à faible revenu — c'est-à-dire ceux qui sont le moins en mesure de payer des impôts. Il accordera aussi un allégement fiscal général qui pourrait atteindre 1 100 $ (impôts fédéral et provincial) dans le cas des contribuables moyens.

- portera à 12 000 $ d'ici 2005 l'exemption de marié ou l'équivalent. Quand cette mesure aura été mise en oeuvre, une famille à salaire unique ne paiera plus d'impôt sur le revenu tant qu'elle ne franchira pas la barre des 24 000 $ par an.

- adoptera une exemption d'impôt pour enfants de 1 176 $ pour aider les familles canadiennes. Cela donnerait lieu à une réduction fiscale de 200 $ par enfant.

- éliminera immédiatement l'impôt sur les gains en capital, ce qui permettrait de débloquer du capital-risque, de récompenser l'initiative personnelle et d'enrayer l'exode des cerveaux en encourageant les entrepreneurs à bâtir leur avenir au Canada.

- supprimera la taxe d'accise sur l'essence, sur les carburants diesel et sur le mazout domestique afin d'alléger le fardeau associé à l'augmentation des prix de l'énergie.

- éliminera, sur 25 ans, la dette nationale — qui hypothèque l'avenir de nos enfants — et remboursera 25 milliards de dollars de cette dette au cours des cinq prochaines années.

- adoptera un «budget des formalités administratives» annuel où l'on estimerait le coût total associé à chaque règlement envisagé par le fédéral, y compris les coûts liés à l'application de la réglementation et les coûts de conformité pour les citoyens et les entreprises.

- s'affairera à élargir ses relations commerciales avec d'autres pays, tout en veillant à promouvoir les droits de la personne et le respect de l'environnement, et à protéger notre culture.

- instaurera un Fonds fédéral de stabilisation agricole (FFSA), qui sera un programme national exhaustif de sécurité du revenu comportant un fonds régulièrement alimenté de secours en cas de catastrophe et un volet de stabilisation des revenus.

- travaillera avec la communauté internationale à la protection des pêches transfrontalières contre les pratiques de prélèvement non durables sur nos côtes Est et Ouest.

Gouverner avec intégrité

Notre vision s'entend d'une démocratie forte.

La réussite ou l'échec des gouvernements démocratiques dépend de la mesure dans laquelle la population est prête à accepter ou à appuyer les décisions qu'ils prennent en son nom. Pour prospérer, il faut être riche et, pour gouverner, il faut avoir la confiance de la population. Or, Ottawa n'a plus cette confiance.

L'intolérance face à toute dissidence légitime a considérablement affaibli le rôle des députés. Nous ne parviendrons pas à attirer les éléments les plus valables de la société pour leur confier des charges publiques si ces gens savent qu'ils n'auront plus droit à la parole et qu'ils perdront toute influence après leur élection.

Mon gouvernement restaurerait l'intégrité du gouvernement national en exigeant que celui-ci ait, du point de vue démocratique, davantage de comptes à rendre au Parlement.

Mon gouvernement:

- renforcera le rôle des députés en permettant la tenue d'un plus grand nombre de votes libres à la Chambre des communes. Les députés doivent pouvoir représenter le point de vue de ceux qui les ont élus.

- donnera au Parlement le pouvoir d'examiner les pratiques de dépenses des ministères fédéraux, quand bon lui semblera.

- déposera une loi complète sur les «dénonciateurs».

- augmentera les dépenses annuelles de la défense au cours des cinq prochaines années afin de lui permettre de maintenir ses capacités à un niveau adéquat, pour améliorer la qualité de vie du personnel des Forces armées et pour financer l'achat de nouveaux équipements.

Un plan prudent et équilibré

Le plan que mon gouvernement propose pour le Canada est prudent et équilibré; il vise à redonner une inspiration et une orientation à notre pays pour que nous réussissions dans l'avenir, dans un monde en pleine évolution.

Nos chiffres parlent d'eux-mêmes. Dans le plan quinquennal de notre gouvernement:

- nous insistons — avec plus de 55 milliards de dollars — sur la réduction des taxes et des impôts afin de laisser plus d'argent dans les poches des Canadiens et des Canadiennes. Cet argent est le leur et nous voulons qu'ils puissent en disposer pour l'économiser, le dépenser ou l'investir à loisir.

- notre régime de remboursement obligatoire de la dette permettra d'éliminer l'hypothèque que nous transmettrions autrement à nos enfants dans 25 ans. Le plan de mon gouvernement réduira la dette fédérale de 25 milliards de dollars en cinq ans. Suivant ce plan, nous réaffecterons 1,3 p. 100 du budget annuel de programme à la réduction de la dette.

- nous avons dégagé de nouveaux investissements ciblés dans nos programmes pour un total de 7,4 milliards de dollars.

Membres de la Chambre des communes,

Vous serez appelés à voter les crédits nécessaires à la prestation des services et des dépenses autorisées par le Parlement.

Honorables membres du Sénat et de la Chambre des communes,

Puisse la Divine Providence vous guider dans vos délibérations.».—(Conformément à l'ordre adopté le 1er mars 2001-Il reste trois jours de séance.)

L'honorable Ross Fitzpatrick: Honorables sénateurs, je suis très heureux de parler aujourd'hui du discours du Trône du gouvernement, d'autant plus que je pourrai indiquer comment les Britanno-Colombiens profiteront du programme mis de l'avant par le gouvernement.

Le programme décrit dans le discours du Trône témoigne clairement de la vision pancanadienne du gouvernement. Il a été conçu dans l'intérêt de tous les Canadiens. C'est un programme inclusif qui démontre que ce gouvernement entend respecter son engagement à créer de nouvelles perspectives pour tous les Canadiens, de manière à ce qu'aucune personne ni aucune famille ne soit laissée pour compte à l'aube du nouveau millénaire, alors que se profilent de nouveaux défis et de nouvelles perspectives découlant d'une économie fondée sur le savoir.

(1410)

Beaucoup de bons programmes ont été annoncés dans le discours du Trône et je vais devoir me limiter aux plus importants. Je voudrais donc attirer l'attention sur certains des programmes nationaux qui seront avantageux pour tous les Canadiens, et surtout pour les habitants de la Colombie-Britannique. Par exemple, le gouvernement a réaffirmé son engagement d'injecter 21 milliards de dollars de plus dans le régime national de santé au cours des cinq prochaines années. Il est déterminé à faire en sorte que les Canadiens continuent de recevoir des soins de qualité et accessibles.

Il y a deux semaines, j'ai eu le plaisir d'annoncer un financement de 3 millions de dollars pour le programme de télésanté de la Colombie-Britannique. Cette initiative améliorera l'accès aux services de santé pour les ruraux de la province. Grâce à cet équipement de téléconférence de pointe, un moins grand nombre de patients de la vallée d'Okanagan-Similkameen, par exemple, devront se rendre à Vancouver pour se faire traiter ou obtenir un diagnostic.

Honorables sénateurs, tous les Canadiens, y compris ceux de la Colombie-Britannique, profiteront d'autres programmes visant à promouvoir l'égalité des chances et le mieux-être social. Les versements de la Prestation nationale pour enfants, par exemple, continueront d'augmenter au cours des quatre prochaines années. Le gouvernement a également annoncé son intention de canaliser ses ressources supplémentaires vers ceux qui ont le plus besoin d'aide, notamment les handicapés, les peuples autochtones et les jeunes à risque.

De la même manière, le gouvernement est résolu à collaborer avec tous les Canadiens pour que tous puissent profiter des occasions que leur offre l'économie du savoir. Dans le discours du Trône, le gouvernement s'engage à faire en sorte que nous ayons une main-d'oeuvre compétente dans le cadre d'une stratégie économique nationale dont le but est de préserver notre compétitivité. Il intensifiera ses efforts pour relever le niveau d'alphabétisation des travailleurs canadiens de toutes les régions, y compris la Colombie-Britannique. Il collaborera avec ses partenaires pour faire en sorte que les jeunes à risque, qui décrochent du système scolaire, soient mieux en mesure d'opérer la transition entre l'école et le monde du travail.

Honorables sénateurs, l'une des plus importantes initiatives du gouvernement à cet égard, honorables sénateurs, est peut-être son plan pour faire du Canada l'un des pays les plus branchés du monde. La décision du gouvernement d'établir un Groupe de travail sur les services Internet à large bande pour que tous les citoyens aient accès à l'autoroute de l'information d'ici l'an 2004 est, selon moi, prévoyante et révolutionnaire. L'engagement du gouvernement de s'assurer que l'autoroute de l'information au Canada soit accessible aux gens à faible revenu et aux gens des régions rurales et des collectivités isolées, aux écoles et aux organismes bénévoles peut fort bien se révéler être la plus importante initiative nationale en matière d'infrastructure depuis la construction du réseau ferroviaire national. C'est un projet dont tous les Canadiens et, chose certaine, ceux des régions rurales et éloignées de la Colombie-Britannique, profiteront immédiatement.

La même chose peut être dite sur de nombreux projets gouvernementaux dans le domaine de l'environnement. On a annoncé plusieurs initiatives pour ce qui est d'effectuer de la recherche sur la qualité de l'eau, d'offrir des fonds fédéraux pour le développement de l'infrastructure municipale d'adduction d'eau et d'égouts et d'établir de nouveaux centres d'excellence pour la recherche dans les domaines de l'agriculture et des ressources naturelles. Il est évident que les Canadiens de toutes les régions du pays et, chose certaine, de la Colombie-Britannique, retireront des avantages considérables des activités proposées dans ces programmes, pour ce qui est de leur qualité de vie et de leur prospérité économique.

Il y a un certain nombre d'initiatives gouvernementales prévues dans le discours du Trône qui, même si elles sont destinées à bénéficier à tous les Canadiens, intéresseront particulièrement les gens de la Colombie-Britannique. Prenez par exemple l'engagement du gouvernement de doubler ses investissements en recherche et développement d'ici l'an 2010. Comme on l'a signalé dans le discours du Trône, le gouvernement entend d'une part, renforcer la capacité de nos universités et des laboratoires gouvernementaux en matière de recherche et, d'autre part, accélérer notre processus de transfert technologique pour que les découvertes tirées de la recherche permettent d'offrir de nouveaux produits et de nouveaux services.

Dans le budget 2000, le gouvernement du Canada a prévu 900 millions de dollars pour soutenir la création de 2 000 postes de recherche dans les universités de tout le pays d'ici 2005. Je voudrais profiter de l'occasion pour féliciter le recteur de l'Université de la Colombie-Britannique, Mme Martha Piper, pour son travail remarquable relativement à cette initiative et le leadership dont elle a fait preuve pour assurer le succès des universités de la Colombie-Britannique dans le cadre de leur participation à ce programme captivant. Pour la Colombie-

Britannique, qui compte un grand nombre d'universités excellentes et chercheurs de niveau mondial, cela ne peut être qu'une nouvelle positive.

Honorables sénateurs, le gouvernement s'est clairement engagé à ce que les Canadiens qui vivent dans les localités urbaines et rurales de notre pays puissent s'épanouir dans des communautés fortes et sûres. Ainsi, le discours du Trône réaffirme l'engagement du gouvernement à travailler en étroite collaboration avec ses partenaires provinciaux et municipaux, cela pour améliorer le transport public et encourager la construction de logements abordables dans des secteurs urbains comme Vancouver.

Le discours du Trône réaffirme l'engagement du gouvernement à l'égard des Autochtones. Le gouvernement a adopté des mesures importantes afin d'améliorer la qualité de vie des Premières nations. Il joue un rôle proactif dans la lutte contre l'abus de stupéfiants et il a instauré des programmes éducatifs visant à réduire le nombre de nouveau-nés atteints du syndrome d'alcoolisme foetal. Le gouvernement a créé le Programme d'aide préscolaire aux autochtones — un investissement de près de 50 millions de dollars par année — programme dont bénéficient des milliers d'enfants d'âge préscolaire et leur famille membres des Premières nations, inuites et métisses. Le Canada s'est engagé à fournir aux jeunes Canadiens autochtones les outils de base dont ils ont besoin pour mieux se prévaloir des possibilités que le Canada a à offrir. C'est un programme fort nécessaire pour les collectivités autochtones de la Colombie-Britannique.

Honorables sénateurs, je crois que les mesures que je viens de décrire, ainsi que de nombreuses autres qui sont exposées dans le discours du Trône, peuvent être très avantageuses pour la population de la Colombie-Britannique. Cependant, je crois aussi que la mesure dans laquelle les Britanno-Colombiens profiteront de ces divers programmes fédéraux dépendra en grande partie des initiatives que prendront leurs élus provinciaux et municipaux ainsi que leurs députés fédéraux locaux et, jusqu'à un certain point, des initiatives qu'ils prendront eux-mêmes.

Compte tenu des reportages que les médias ont faits au sujet des dernières élections fédérales, je voudrais aborder brièvement ce que certains ont appelé l'aliénation apparente de nombreux Canadiens de l'Ouest et Britanno-Colombiens par rapport à leur gouvernement national. De l'avis de certains représentants des médias, les résultats des dernières élections ont aggravé cette situation. Permettez-moi de dire clairement que je ne souscris pas à cette thèse, mais que je comprends parfaitement les Canadiens de l'Ouest de vouloir que leur voix soit entendue dans les officines du pouvoir à Ottawa. Évidemment, cette préoccupation n'a rien de nouveau. De tout temps, il a toujours été difficile pour les gouvernements fédéraux au Canada, quelle que soit leur allégeance politique, de gouverner à partir du centre, dans l'intérêt national. Après tout, le Canada est un immense pays qui couvre six fuseaux horaires et qui est bordé par trois océans. Vancouver est située à près de 4 600 kilomètres d'Ottawa et elle en est séparée par des chaînes de montagnes, les Prairies et des forêts boréales. Il n'est guère surprenant que la distance physique qui sépare les habitants de la Colombie-Britannique de leur gouvernement national se soit souvent accompagnée d'une certaine distance psychologique.

C'est probablement ce à quoi pensait Allan Fotheringham le mois dernier lorsqu'il a proposé, à la blague, que la solution consisterait à déplacer la Colombie-Britannique pour la rapprocher d'Ottawa. Évidemment, c'est physiquement impossible. Voilà pourquoi je dis que nous devons surmonter cette insécurité non seulement en posant des gestes concrets, mais aussi en changeant d'attitude. Comme tous les habitants de ma région, Okanagan — Similkameen, le savent, il n'y a pas que la distance qui sépare notre région du pays du centre. Au fil du temps, d'autres différences sont apparues et ont attisé notre sentiment d'isolement. Par le passé, nous avons surtout fondé notre économie sur nos ressources naturelles, comme l'ont fait les autres provinces de l'Ouest, tandis que l'économie du centre du Canada repose sur l'industrie manufacturière. Comme il fallait s'y attendre, des conflits sont nés entre les deux. Chacune des quatre provinces de l'Ouest a développé sa propre culture politique, en fonction des préoccupations et des intérêts des divers groupes d'immigrants de souche et de culture différentes venus s'établir dans sa région. Prises dans leur ensemble, ces différences ont donné naissance à un grand sentiment de mécontentement envers le centre avec lequel chaque gouvernement fédéral porté au pouvoir au cours du dernier siècle a dû composer.

(1420)

Il convient sûrement de reconnaître aujourd'hui, comme l'a d'ailleurs fait le Parlement, que la Colombie-Britannique forme une région à part entière, avec des inquiétudes et des préoccupations bien différentes de celles des provinces des Prairies. Pourtant, à bien des égards, il me semble que nos dirigeants politiques provinciaux et municipaux, de même que nos représentants fédéraux, n'ont pas su mettre à profit leur nouvelle influence. À mon avis, on n'a pas consacré assez d'efforts à expliquer, de façon positive, les vrais intérêts de la Colombie-Britannique aux décideurs nationaux ou à saisir les occasions qui nous ont été fournies, ces dernières années, dans le cadre de diverses initiatives du gouvernement fédéral. On a malheureusement eu plutôt tendance à attendre que le gouvernement fédéral nous ouvre des portes au lieu de reconnaître que nous avons tout à gagner à prendre les devants, comme l'a fait le docteur Piper.

Plutôt que de collaborer de façon constructive avec le gouvernement fédéral pour obtenir de plus grands avantages économiques et sociaux pour la province, on a trop souvent critiqué automatiquement et sévèrement des initiatives fédérales, quand on ne les a pas catégoriquement rejetées. Trop souvent, les leaders politiques ont préféré la confrontation à la collaboration au palier fédéral dans l'intérêt des Britanno-Colombiens.

Entre-temps, les alliancistes, qui représentent le plus grand nombre de circonscriptions de la Colombie-Britannique à l'autre endroit, se sont concentrés sur leur programme plutôt que de chercher à améliorer ou à modifier les programmes proposés. Souvent, il n'est pas très raisonnable que ces députés considèrent de leur devoir d'exercer agressivement des pressions auprès du gouvernement au nom de leurs électeurs. C'est d'autant plus dommage que, dans les démocraties parlementaires, le rôle de l'opposition officielle est justement de critiquer le gouvernement de façon constructive.

À l'instar de mes collègues sénateurs de l'Ouest, je me suis toujours efforcé de faire valoir l'opinion des Canadiens de la Colombie-Britannique à Ottawa et je vais continuer de le faire au cours de la présente législature. J'espère que mon bon ami, le sénateur St. Germain, un Britanno-Colombien et ancien député qui souhaite désormais représenter ici le parti de l'Alliance canadienne, saura faire comprendre à son parti qu'il lui faut absolument se mettre à la critique constructive.

Honorables sénateurs, le gouvernement et l'opposition peuvent travailler ensemble, et je crois que les particuliers, les organisations et les collectivités peuvent vraiment offrir une autre forme de gouvernement politique.

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, je veux commenter brièvement aujourd'hui quelques initiatives prévues dans le récent discours du Trône. Toutefois, je tiens tout d'abord à féliciter de leur nomination les leader et leader adjoint du gouvernement, les sénateurs Carstairs et Robichaud, ainsi que le whip, le sénateur Mercier. Leurs responsabilités et leurs défis à tous les trois seront nombreux au cours de la prochaine année. Compte tenu de leur expérience et de leur compétence, je suis persuadé qu'ils tireront très bien leur épingle du jeu.

Je voudrais tout autant féliciter publiquement l'équipe de direction de l'opposition, les sénateurs Lynch-Staunton, Kinsella et DeWare, qui, compte tenu de nos rangs dégarnis, a une énorme responsabilité.

Je voudrais aussi souhaiter la bienvenue aux nouveaux sénateurs Hubley et Tunney ainsi qu'à mon cher vieil ami, le sénateur Morin.

L'engagement du gouvernement d'investir dans la R-D à un certain nombre de niveaux est particulièrement encourageant. De nouveaux investissements fédéraux viendront renforcer la capacité de recherche des universités, la capacité du Canada de commercialiser les découvertes en recherche, créer des possibilités de partenariats nationaux et susciter de la recherche internationale en collaboration qui profiteront aux Canadiens dans les domaines de la santé, de l'eau, de l'environnement et de la gestion des ressources naturelles.

Je souligne également l'annonce du versement de fonds supplémentaires par le gouvernement fédéral aux Instituts de recherche en santé du Canada. Il s'agit là d'un de mes projets favoris depuis de nombreuses années, soit même avant sa conception au Conseil de recherches médicales.

Il ne fait pas de doute que le soutien et le financement accrus offerts aux Instituts de recherche en santé du Canada amélioreront considérablement le financement de la recherche en santé au Canada. Les effets du financement fédéral accru par l'entremise des IRSC sur le secteur de la recherche médicale sont considérables. Ce financement a permis de créer des possibilités dans tous les domaines de la recherche médicale, qu'il s'agisse de recherche biomédicale ou de santé publique. Il a permis la création de possibilités de financement pour les chercheurs qui n'exercent pas leur activité dans les secteurs biomédicaux. Il a vigoureusement engagé les chercheurs dans la concurrence pour les fonds des IRSC avec une collaboration accrue entre les disciplines. Il a renforcé la formation de partenariats entre les secteurs communautaire, privé et public. Ces entreprises accroissent la visibilité du Canada en tant que chef de file dans le domaine de la R-D.

L'annonce d'un financement supplémentaire continuera de soutenir ces changements pour le mieux. En outre, le financement permettra aux instituts de continuer d'élargir leurs champs de recherche pour qu'ils englobent la prévention et le traitement de la maladie, les déterminants de la santé et l'efficacité du système de santé. Je suivrai avec intérêt les progrès réalisés dans ce domaine parce qu'il est essentiel que les fonds soient investis là où il faut et au moment opportun pour que le système progresse. À l'heure actuelle, toutefois, le cheminement de ce financement est plutôt obscur, ce qui préoccupe nombre de scientifiques du pays.

Honorables sénateurs, je reconnais moi aussi que le gouvernement s'est engagé à collaborer avec les provinces et les territoires pour créer un conseil des citoyens sur la qualité des soins de santé afin de garantir à la population que son point de vue entrera en ligne de compte dans l'élaboration d'indicateurs du rendement du système de santé. La majeure partie des discussions actuelles sur la réforme de la santé sont axées uniquement sur les besoins, c'est-à-dire les niveaux de financement associés aux hôpitaux, au personnel infirmier et aux médecins, tandis que peu d'attention était accordée à la population. Il nous faut en savoir davantage sur le rendement de nos investissements dans le système de santé.

La prestation et la gestion des soins de santé au Canada est la responsabilité des provinces et des territoires, mais les Canadiens de tout le pays attendent toujours un leadership de la part du gouvernement fédéral. Un rôle de leadership fédéral fort dans le domaine de la santé est crucial pour assurer la pérennité du système de santé qui pourra toujours répondre aux besoins de tous les Canadiens.

Le discours du Trône va dans la bonne direction en s'attaquant à certains défis qui nous attendent, mais il reste de grands défis qui n'ont pas été relevés dans le secteur de la santé. L'adoption d'un plan d'action national clair qui soutiendra et favorisera le renouvellement du système de santé revêt une importance toute particulière. Ce plan doit préciser que les préoccupations actuelles au sujet du système de santé ne se rattachent pas uniquement au financement.

Honorables sénateurs, je suis profondément préoccupé de voir toutes les discussions sur les soins de santé tourner autour de questions d'argent.

(1430)

Injecter des millions et même des milliards de dollars dans le système sans planification convenable aura peu d'incidence. En effet, le principal facteur déterminant de la santé au Canada demeure la richesse. Elle n'a que peu à voir avec la prestation des soins de santé, qui nous coûte très cher. Injecter davantage d'argent dans le système de soins de santé sans plan d'action clair ne nous mènera pas là où nous devons aller.

Honorables sénateurs, j'exhorte le gouvernement à s'engager à mettre en oeuvre un plan d'action clair. Il nous faut un plan dont les priorités concernent quatre problèmes critiques.

L'une de ces priorités figurait dans le programme électoral des conservateurs, et je crois que le gouvernement devrait la concrétiser. Il s'agit de l'établissement de cibles de rendement et d'objectifs pour notre régime de soins de santé et de rapports publics en vue de mesurer les progrès vers l'atteinte de ces objectifs.

Deuxièmement, il faudrait élaborer des stratégies et des programmes axés sur la rétention et le rapatriement des médecins canadiens et des Canadiens formés à l'étranger. Comme nous le savons tous, le manque de médecins au Canada paralyse certaines provinces et territoires à l'heure actuelle, surtout dans les collectivités rurales et éloignées. Les médecins, les infirmières et autres professionnels de la santé quittent le pays en raison des impôts élevés, des faibles salaires et des conditions de travail de plus en plus frustrantes.

J'insiste sur le fait que je ne pense pas que les professionnels de la santé quittent pour l'argent. Ils partent parce qu'ils pourront traiter leurs patients comme ils souhaitent le faire. Je ne crois nullement que les États-Unis ont un meilleur système que le nôtre parce qu'ils consacrent 14 p. 100 de leur PIB à la santé. C'est faux. Notre système est meilleur. Cependant, nous devons trouver un moyen de donner plus de liberté à nos professionnels de la santé, qui se sentent actuellement frustrés de devoir encaisser les critiques et l'insatisfaction des patients.

Troisièmement, l'accent devrait être mis sur l'intégration des solitudes de la santé — c'est ce que je ne cesse de répéter —, y compris la santé de la population. En effet, tant que la santé de la population ne sera pas redevenue notre mesure de base, nous n'aurons aucune idée de ce que nous faisons.

Honorables sénateurs, nous devons intégrer la santé de la population, la santé publique, la prestation des services de soins, la recherche et l'éducation dans le domaine de la santé. À l'heure actuelle, ces solitudes demeurent isolées. Leur intégration permettrait d'arriver à de nouvelles solutions et de mettre davantage l'accent sur l'investissement dans les facteurs déterminants de la santé, autres que les facteurs médicaux, dans la recherche en matière de santé, dans la prévention des accidents, dans la promotion de la santé, dans la réadaptation et dans le traitement des maladies chroniques chez certains groupes.

Quatrièmement, il faudrait élaborer une stratégie nationale en vue de la mise en place d'un système intégré d'information. Des efforts ont été faits en ce sens ces dernières années, mais il reste beaucoup à faire. En tant que membre de plusieurs comités consultatifs, j'ai passé plusieurs années à étudier la question et je suis tout à fait conscient du travail qu'il reste à faire. Prévoir un identificateur unique pour chaque Canadien — un dossier médical électronique — serait un pas considérable dans la bonne direction. Honorables sénateurs, cet identificateur permettrait de s'assurer que le numéro de sécurité sociale de l'intéressé est saisi avec exactitude et servirait de moyen d'identification à tous les niveaux des services de santé. Il permettrait la mise à jour du dossier au lieu d'immatriculation et au prestataire de soins d'avoir accès aux antécédents médicaux de l'intéressé, tout en protégeant les renseignements personnels au moyen de codes intégrés.

Ce n'est pas impossible. Les militaires américains portent sur eux une petite plaque qui contient leur dossier médical. Je vous assure qu'il y a sur cette plaque plus d'informations que sur les fiches médicales que l'on peut voir aujourd'hui dans la section des rapports médicaux de n'importe quelle institution. C'est possible à faire. Nous devons simplement nous mettre au travail.

Honorables sénateurs, en tant que sénateurs et en tant que patients, voire pour certains en tant que professionnels de la santé, nous avons la responsabilité commune de veiller à la durabilité de notre système de santé. Je demande à chacun de vous d'assumer cette responsabilité et d'aider à renforcer le rôle du gouvernement fédéral de façon à assurer le leadership nécessaire pour intégrer nos solitudes, qu'elles soient géographiques, opérationnelles ou institutionnelles.

Ce n'est que si le gouvernement fédéral procède à cette intégration que nous pourrons avoir un système durable.

L'honorable John G. Bryden: Honorables sénateurs, étant donné mes antécédents médicaux, j'aimerais poser certaines questions au sénateur. Elles seront inoffensives.

J'ai beaucoup apprécié que l'on reconnaisse la nécessité d'intégrer les différentes solitudes qui se rapportent à notre bien-être médical. Le sénateur a toutefois parlé des médecins qui quittent le Canada pour le sud. Il a déclaré que ces gens ne le faisaient pas nécessairement pour des raisons d'argent, bien qu'ils gagnent effectivement davantage aux États-Unis. Il a indiqué qu'ils partaient vers les États-Unis pour être en mesure de traiter leurs patients comme ils l'entendent.

J'en ai discuté avec des médecins qui sont partis pour les États-Unis et qui en sont revenus. L'une des raisons évoquées pour expliquer leur retour est tout à fait à l'inverse de ce que dit le sénateur. Ces médecins affirment qu'ils n'étaient pas libres de traiter leurs patients au meilleur de leurs connaissances professionnelles. Ils étaient limités par des quotas imposés par les organisations de soins de santé qui fixent les primes, et par d'autres questions comme le nombre des cardiogrammes et d'analyses qui peuvent être ordonnés.

Le sénateur est-il au courant de cette pratique? Est-ce là une préoccupation valide qui a été soulevée? Les contraintes imposées par le système et les compagnies d'assurance aux États-Unis empêchent-elles les médecins de traiter leurs patients avec les techniques d'analyse et de diagnostic auxquelles ils auraient normalement recours?

Le sénateur Keon: Honorables sénateurs, il ne fait aucun doute que les organisations américaines de soins de santé intégrés font jouer leurs muscles. Les médecins et les chirurgiens doivent, avant d'entreprendre certaines procédures coûteuses, obtenir la permission des OSSI qui en prendront à leur charge les frais. Cela ne fait aucun doute.

D'autre part, il est possible aux États-Unis d'opter pour le système privé. Ce n'est pas ce que je préconise pour le Canada. Je dis simplement que le système privé permet de sortir du système traditionnel et d'accéder rapidement à certains traitements médicaux. Ce n'est donc pas toujours le médecin qui est porteur de la mauvaise nouvelle.

(1440)

Il y a le secteur privé, si quelqu'un veut en absorber les coûts, même s'il est protégé par une OSSI. C'est un système différent et, à mon avis, les OSSI sont source d'une plus grande frustration que le système canadien. J'évolue au sein du système canadien depuis 30 ans et je n'ai pas été très frustré, car c'est un bon système. Toutefois, il existe indéniablement des secteurs où les gens sont de plus en plus frustrés. Nous devons nous en préoccuper. Nous ne pouvons continuer à ne pas en tenir compte et à croire simplement que, parce que nous avons un remarquable système, les motifs de frustration n'ont pas d'importance. De fait, ils revêtent une grande importance pour les personnes prisonnières du système, à savoir les patients et les médecins. Nous devons nous attaquer à ces problèmes et les résoudre.

L'honorable Ione Christensen: Honorables sénateurs, je me joins à mes collègues pour féliciter notre nouveau Président et les dirigeants des deux côtés de la Chambre qui s'acquittent de leurs fonctions. Ils nous fourniront des conseils au cours de la présente session. Nous sommes à mon avis entre bonnes mains.

Je souhaite aussi la bienvenue aux trois nouveaux sénateurs, qui amènent avec eux un vaste bagage d'expérience et de nouvelles idées. Je suis convaincue qu'ils contribueront grandement aux travaux du Sénat.

Un discours du Trône donne un aperçu des objectifs que le gouvernement veut atteindre pendant son mandat. Un tel discours renferme souvent peu de détails et, par conséquent, prête le flanc à des spéculations positives ou négatives. Il va de soi que le discours du Trône ne satisfera pas intégralement toutes les attentes de chaque Canadien. Chaque secteur de la société attache une haute priorité aux questions qui le préoccupe et si ces questions ne sont pas présentées dans cette perspective, les Canadiens estiment que le gouvernement ne satisfait pas à ces besoins. Cette situation peut susciter un débat stimulant, mais elle est loin de jeter de la lumière sur ce qui est accompli ou non durant le mandat.

C'est pourquoi, au moment de la préparation de mes observations au sujet du discours du Trône, j'ai cherché à trouver des preuves concrètes de résultats imminents. Les choses bougent-elles dans les domaines qui ont été abordés?

Honorables sénateurs, la meilleure façon de répondre à cette question consiste à me pencher sur mon propre territoire, le Yukon, en vue de déterminer si l'on y répond à certains des besoins urgents. Je partagerai avec vous quelques-unes de mes constatations.

Dans le discours du Trône, la Gouverneure générale a souligné la détermination du gouvernement à aider les Canadiens à profiter des possibilités d'apprentissage. Depuis, le gouvernement a engagé près de 400 000 $ en trois ans dans des programmes d'alphabétisation au Yukon. Ces fonds aideront de nombreux Yukonnais non seulement à avoir une meilleure estime de soi, mais aussi à participer davantage à l'économie et à la vie communautaire.

Le gouvernement s'est engagé à promouvoir des programmes de prévention de la maladie, ciblant plus particulièrement la réduction de l'incidence des formes de diabète évitables ainsi que les problèmes tels que le syndrome d'alcoolisme foetal et les effets de l'alcoolisme foetal. Ces problèmes touchent de nombreux Yukonnais, spécialement dans les communautés autochtones. Dans le cadre de cet engagement, le gouvernement du Canada a annoncé une contribution de presque 140 000 $ à trois projets de santé communautaire au Yukon portant justement sur ces problèmes.

Au Canada, nous nous vantons de vivre dans l'un des pays les plus sûrs au monde. Se sentir en sécurité chez soi et dans son quartier est un élément fondamental de notre façon de vivre. Toutefois, la criminalité est une réalité dans toute société, et comme c'est le cas pour tout conflit social, la prévention est la meilleure solution.

Dans le discours du Trône, le gouvernement a dit aux Canadiens qu'il fallait miser tout autant sur la prévention que sur le châtiment. À cette fin, le gouvernement appuie les efforts de plusieurs organisations communautaires du Yukon, accordant 322 110 $ à 27 projets de prévention de la criminalité. Ces initiatives en matière de prévention de la criminalité au Yukon contribueront à réduire les risques de violence dans un grand nombre de nos localités.

Le discours du Trône a également souligné que, pour assurer le succès de notre société, nous devons reconnaître et inclure les moins avantagés. Il est clair que les sans-abri ont besoin d'aide et d'appui. En mars, le gouvernement est venu à l'aide des Yukonnais en leur accordant une première somme de 47 000 $ en vue de contribuer à prévenir et à soulager la crise des sans-abri à Whitehorse. Ce n'est pas beaucoup, mais c'est un début.

Honorables sénateurs, le tableau que je dresse n'est pas parfait. Je pense que l'on peut dire sans se tromper que le gouvernement pourrait faire davantage, et je crois sincèrement que, s'il en a l'occasion, il le fera. Il reste encore de nombreux problèmes à régler, mais, en tant que pays, nous devons établir un ordre de priorités. En tant que citoyens responsables, nous devons voir à ce que chacun reçoive sa juste part. Que ce soit dans le domaine de l'économie, de la criminalité, de la santé, ou de l'environnement, notre gouvernement agit. Il peut sembler parfois qu'il progresse très lentement, mais il progresse néanmoins, et dans la bonne direction.

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, en réponse au discours du Trône, j'émettrai quelques commentaires au sujet de l'agriculture et du comité que je préside. Je vous ferai aussi part des réflexions que m'a inspirées le congrès des municipalités rurales de la Saskatchewan, auquel j'ai participé en même temps que 2 500 agriculteurs, conseillers et préfets.

Durant ces quatre jours, une question a trotté dans beaucoup de têtes: le gouvernement du Canada se préoccupe-t-il vraiment des agriculteurs de la Saskatchewan? Je serai franc, la plupart des agriculteurs avaient cette question en tête. Plusieurs m'ont demandé: «Len, le gouvernement se préoccupe-t-il vraiment de nous?»

Le gouvernement a certes pris un certain nombre d'initiatives, mais il n'a rien fait pour régler la crise actuelle. Le Canada peut-il se permettre de ne pas régler le problème? Il suffit d'examiner la situation en la comparant à celle des États-Unis et de l'Europe pour se rendre compte que nous sommes loin d'avoir un programme de redressement de l'agriculture.

Honorables sénateurs, des statistiques que j'ai consultées révèlent que l'économie agricole à l'Île-du-Prince-Édouard chancelle, avec 50 p. 100 du revenu moyen. Quelle couche de la société peut accepter une telle situation? Dans les Prairies, c'est encore plus alarmant, puisqu'il s'agit de 60 p. 100.

Il y a aussi l'autre côté de la médaille: les coûts des facteurs de production dans le cas des fertilisants ont plus que doublé. Les coûts des carburants ont augmenté de façon astronomique. Tout crédit injecté par le gouvernement aurait aussitôt été grugé par le coût des facteurs de production de l'année dernière.

Il y a en outre la dégringolade des prix des produits de base. On nous répète depuis 15 ans que les Américains supprimeront leurs subventions, que les Européens feront de même et que le problème sera résolu. On peut rêver, mais cela ne se produira pas, à court terme à tout le moins. Cela ne se produira pas. La politique agricole américaine sera en vigueur pendant quatre ans encore, et les subventions ont déjà augmenté aux États-Unis. Les Américains ont supprimé les subventions à une catégorie de blé pour les appliquer au blé dur, car on prévoit que le blé dur sera en demande.

(1450)

On peut s'attendre à voir le Dakota du Nord et le Dakota du Sud semer presque uniquement du blé de force parce que ce produit sera davantage subventionné. Dans quelle situation cela laisse-t-il les Canadiens? Dans quelle situation cela laisse-t-il le gouvernement du Canada pour ce qui est de régler cette question?

Certains sénateurs, dont le sénateur Stratton et d'autres, se sont rendus en Europe avec notre comité. Durant ce voyage de dix jours, ils ont assisté à 25 réunions dans quatre pays. Nous avons commencé à la Chambre des lords, à Londres, et avons terminé le voyage à l'union des agriculteurs, à Paris. Il y a une chose que nous avons comprise très clairement. On nous a dit que les Nord-Américains, contrairement aux Européens, ne savent pas ce que c'est que d'être sans nourriture. Du point de vue politique, les gouvernements européens croient qu'ils ne pourront plus jamais abandonner leurs agriculteurs parce que la population ne le tolérerait pas. Au Canada, nous tenons notre approvisionnement alimentaire pour acquis. Ce qui pourrait arriver dans le milieu agricole fait vibrer une corde sensible chez ceux d'entre nous qui s'intéressent de près à ces questions et au secteur agricole. Nous en sommes au point où des décisions sérieuses doivent être prises.

Je tiens à dire que le Comité de l'agriculture du Sénat, que j'ai le privilège de présider, est un bon comité. Aucun sénateur du côté libéral ou de ce côté-ci ou parmi les sénateurs indépendants ne conteste le fait qu'il existe une crise agricole. Le problème a été bien reconnu. La question qu'il faut se poser est la suivante: pourquoi le gouvernement ne reconnaît-il pas l'existence de cette crise? Est-ce la bureaucratie? La bureaucratie a-t-elle décidé de la direction que le pays prendra, qu'il ne restera qu'un certain nombre d'agriculteurs et que les fermes seront désormais exploitées par des sociétés? Qu'est-ce qu'on attend? J'ai parlé à bien des députés libéraux à l'autre endroit. Ils admettent qu'il y a une crise et que le problème est grave. Espérons que le gouvernement passera à l'action et s'occupera de cette crise, sinon, nous allons nous retrouver devant un grave problème.

Honorables sénateurs, je veux parler de ce qui se passe sur le plan des ressources au Canada. Sur la côte Ouest et sur la côte Est, nous avons les pêches. Il y a l'industrie du bois d'oeuvre, qui est en négociation à cause des problèmes commerciaux avec les États-Unis, puis il y a l'industrie pétrolière et gazière. Le prix du gaz augmente à cause de la demande aux États-Unis. J'ai été surpris de voir les statistiques de la Saskatchewan concernant le pétrole. Soixante pour cent de notre production pétrolière va directement aux États-Unis. Ce pourcentage n'est pas tout à fait aussi élevé pour l'agriculture, mais il n'est pas loin de cela. Je signale que cela s'applique uniquement à la Saskatchewan et que cela n'inclut pas les chiffres pour l'Alberta.

Ensuite, il y a l'industrie minière. Le Canada fournit 25 p. 100 de toute la potasse produite dans le monde. Cela représente environ la moitié du revenu net provenant de l'agriculture en Saskatchewan. Ce n'est pas une petite entreprise. On peut songer aussi à notre eau, ou à l'ensemble de nos ressources naturelles. L'aspect important à considérer, c'est que ces ressources proviennent des régions rurales du Canada. Nous devons nous demander si nous gérons bien ces ressources.

Je viens d'entendre certains politiciens américains dire qu'ils vont demander au président des États-Unis d'intervenir dans le dossier du bois d'oeuvre. Nous devrions nous demander, je présume, si nous avons vraiment une politique au sujet de nos ressources naturelles. Nous avons de merveilleuses ressources, mais nous sommes devenus des équarisseurs de bois et des porteurs d'eau. Nous sommes probablement en train de donner nos ressources, même si la valeur du dollar est faible. Cela semble représenter beaucoup d'argent en dollars américains, mais c'est encore très bon marché. Les Américains achètent nos ressources à très bon marché. Nous devrions peut-être exiger des règles du jeu équitables avec les Américains au moyen du libre-échange. Je sais que bien des gens ne sont pas d'accord, mais je pense que cela fonctionnerait.

En tant qu'agriculteur, j'estime que nous devons commencer à nous servir de nos avantages en matière de ressources pour amener les Américains à négocier. À l'heure actuelle, la côte ouest des États-Unis manque d'électricité. Pas plus tard qu'hier, le courant a encore une fois été coupé à Los Angeles et dans d'autres régions de la côte ouest. Les États-Unis ont prévenu leurs citoyens que cette situation se répétera fréquemment. J'ai assisté récemment à des funérailles et j'ai rencontré trois dirigeants de pétrolières de Calgary. Je leur ai demandé pourquoi le prix des carburants augmentait. Ils ont dit que les Américains étaient disposés à payer cher. Ils ont besoin du pétrole, et le prix a été déréglementé. Les pétrolières demanderont le même prix aux Albertains. On me dit que le prix du gaz naturel a triplé en Alberta. Sans vouloir trop insister sur la question, je me dois de demander si nous gérons bien nos ressources agricoles et nos autres ressources.

Honorables sénateurs, j'estime devoir aborder un autre aspect important. Il y a actuellement 6 milliards de personnes sur la Terre. Il y en a 1,5 milliard qui sont mal nourries. Elles n'ont pas assez de nourriture. J'ai ici un dessin humoristique. Ma secrétaire en enverra un à chaque sénateur, car il livre un message important. On y voit un homme lancer une balle, et la légende dit ceci:

Cet homme lance la balle à d'autres hommes. Il gagne un million de dollars par année.

Cet homme fait le pitre à la télé. Il gagne 5 millions de dollars par année.

Cet homme nourrit le pays et le monde...

Puis, on voit un panneau sur lequel on peut lire «Vente de saisie». Cela résume assez bien la gravité de la situation.

Avons-nous des responsabilités morales envers ceux qui n'ont pas de quoi manger? C'est une bonne question à poser à un pays comme le Canada. La Saskatchewan à elle seule compte 40 p. 100 des terres arables qui servent à produire des aliments. Je me souviens des paroles du premier ministre Brian Mulroney qui disait: «Len, la seule chose que nous pouvons reprocher à vos agriculteurs, c'est d'être trop productifs.»

Honorables sénateurs, nous vivons une situation de crise qui doit et qui peut être prise en charge. À titre d'agriculteurs, nous pouvons faire concurrence aux Américains, aux Européens et à n'importe quel autre agriculteur au monde. Il faut toutefois se demander si nous avons un programme. Avons-nous un programme de longue portée qui touche tout le secteur agricole et celui des ressources naturelles et qui tient compte de l'énorme responsabilité de gérer les ressources de notre beau pays?

(1500)

J'avais prévu parler de l'aspect environnemental, mais je laisserai cela au sénateur Spivak. Le temps est certainement venu de nous pencher sur la question d'un point de vue plus large et de nous demander ce à quoi nous devons nous attendre dans le domaine des ressources au Canada, tout particulièrement au chapitre de l'agriculture.

Son Honneur le Président pro tempore: Le sénateur Bryden intervient-il pour poser une question au sénateur Gustafson?

Le sénateur Bryden: Oui, Votre Honneur.

Son Honneur le Président pro tempore: Je suis désolé de faire savoir au sénateur Bryden que le temps de parole du sénateur Gustafson est écoulé. Le sénateur demande-t-il la permission de poursuivre?

Le sénateur Gustafson: Oui

Son Honneur le Président pro tempore: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Bryden: On commence à voir un changement intéressant dans l'opinion des journalistes partout au Canada en ce qui concerne les questions rurales et, en particulier, l'agriculture. Que dirait le sénateur aux journalistes qui demandent si le Canada peut encore se permettre de subventionner les exportations agricoles vers l'Europe?

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, à ceux qui posent cette question, je réponds que nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas le faire. Je vais traiter cette question en tenant compte de nos offices de commercialisation. Je trouve toujours quelque chose à redire au sujet des offices de commercialisation, qu'ils vendent du lait, des poulets, des dindes ou d'autres produits. Ils se tirent assez bien d'affaire parce qu'ils n'offrent qu'un seul produit de consommation. Je ne veux pas le leur enlever. Cependant, je pense que le Canada a une responsabilité morale plus grande que cela en ce qui concerne ces produits, du moins en ce qui concerne les céréales et les oléagineux, pour nourrir le monde.

Je me suis beaucoup intéressé aux travaux de la Banque de céréales vivrières du Canada. Voici comment fonctionne la Banque. Un agriculteur donne une quantité de céréales. En vertu d'un excellent programme, le gouvernement donne une quantité équivalente et les céréales vont aux pays du tiers-monde qui n'ont pas les moyens de les acheter. Le ramassage des vivres s'effectue par l'intermédiaire de diverses Églises. Le programme a été lancé par les mennonites en 1924, après la grande famine dont ces derniers avaient été victimes. Il s'est révélé excellent.

Je voudrais faire connaître aux honorables sénateurs la réaction d'un agriculteur, qui avait immigré d'Allemagne au Canada et que j'ai bien connu. Malheureusement, il est aujourd'hui décédé. Avec son camion, il avait transporté un chargement de 200 boisseaux de blé jusqu'à Lampman, en Saskatchewan. On avait demandé dix wagons de blé. Saviez-vous que les agriculteurs de cet endroit seulement avaient donné 30 wagons de blé? Avec son camion, cet agriculteur en avait transporté 200 boisseaux.

Interviewé au réseau CBC, il avait dit: «Pendant les années difficiles, en Allemagne, j'ai mangé seulement du chou-navet pendant un an. Je serai heureux de donner 200 boisseaux de blé pour aider à nourrir ceux qui ont faim.»

Honorables sénateurs, en tant que fiers Canadiens, chacun de nous s'acquitterait d'une telle responsabilité, si nous pouvions produire un des plus importants aliments au monde. Sans produits alimentaires, ni vous ni moi ne serions ici.

Pour répondre à la question du sénateur, nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas le faire, moralement, économiquement ou autrement.

Le sénateur Bryden: Honorables sénateurs, le monde a l'obligation morale de nourrir 1,5 milliard d'individus qui manquent de nourriture. Pour la première fois, si ma mémoire est bonne, certains commencent à poser cette question: Pourquoi le contribuable canadien devrait-il payer pour essayer de nourrir ces gens? Pourquoi ne serait-ce pas une obligation internationale des Nations Unies?

Je viens d'une région rurale. Lorsque j'étais beaucoup plus jeune, j'ai traversé une période très difficile parce que l'exploitation agricole familiale a dû cesser ses activités. Nous ne pouvions plus soutenir la concurrence et le reste. Le sénateur a soulevé la question des ressources naturelles, qu'il s'agisse de la potasse ou du pétrole et du gaz. Je pose la question comme quelqu'un vivant dans une région rurale. Qu'est-ce qui fait que les agriculteurs s'attendent à ce que tous les contribuables canadiens les soutiennent, non seulement pour qu'ils produisent, mais également pour qu'ils affrontent la concurrence sur les marchés mondiaux? Les agriculteurs demandent de l'aide pratiquement chaque année. Comme l'honorable sénateur l'a déclaré, le gouvernement dont il a fait partie a injecté six milliards de dollars dans l'agriculture. Si, pendant 15 ans, l'industrie pétrolière et gazière avait demandé aux contribuables canadiens de lui donner deux milliards tous les deux ans pour qu'elle continue de produire, pensez-vous que les contribuables réagiraient comme nous, les Canadiens des régions rurales, réagissons parce que nous produisons un produit vendu sur les marchés mondiaux? Pourquoi y a-t-il une différence?

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, pour ce qui est de la première question de l'honorable sénateur sur les Nations Unies, je dois dire que j'y pense depuis un certain temps déjà. La question devrait être portée à l'attention des Nations Unies, qui a un programme alimentaire. Il est clair que le Canada devrait contribuer à porter cette grave situation devant les Nations Unies.

Les chiffres que j'ai évoqués proviennent d'un organisme missionnaire qui vient de compiler des chiffres sur la population mondiale. Ces chiffres établissent où vivent les démunis et ceux qui souffrent de la faim. Le Canada devrait à juste titre soumettre cette question aux Nations Unies. Notre ministère de l'Agriculture devrait s'occuper de cette question au niveau mondial. Cela ne fait aucun doute. Le Canada ne peut agir seul, mais nous pouvons faire notre part.

En ce qui a trait aux contribuables canadiens, je me rends compte que le citoyen moyen n'est pas aussi ému que nous, les agriculteurs, à propos de la situation agricole. C'est comme si la terre faisait partie de nous. Voici une des choses tristes que l'on peut voir quand un agriculteur fait faillite: par exemple, il peut posséder une terre valant 150 000 $, mais il doit 160 000 $ à la banque; il ne peut cependant pas comprendre que la ferme n'est plus sa ferme, car il la considère encore comme la sienne, bien qu'elle appartienne à la banque.

Un des auteurs de l'Ancien Testament exprime la chose ainsi. Il dit que puisque nous nous nourrissons du fruit des entrailles de la terre, si nous ne récoltons pas le fruit des entrailles de la terre, nous allons tous disparaître. Cela en sera fini de nous.

Étant donné la gravité de la situation, j'espère que les Canadiens auront la bienveillance de comprendre que nous avons une certaine responsabilité à cet égard. Comme tous les autres sénateurs, je crois que nous vivons dans le meilleur pays au monde. Si nous ne pouvons pas contribuer à faire quelque chose pour remédier à cette situation de crise, qui le fera?

Beaucoup de ces situations résultent de révolutions, de guerres et d'événements qui ne devraient pas se produire. Le fait est que beaucoup de pays ne jouissent pas de la stabilité que nous connaissons au Canada. Nous devrions certainement leur donner l'exemple.

(1510)

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, j'ai souvent écouté les propos du sénateur Gustafson; ils sont toujours inspirants. Je crois cependant qu'il a omis un point et je voudrais lui poser une question à ce sujet.

Le producteur est celui qui n'est pas traité équitablement. La question ne se poserait pas en termes de subventions payées par les contribuables, comme celles que reçoit le secteur des hydrocarbures, si le producteur recevait sa juste part.

Honorables sénateurs, on a expliqué de diverses façons cette iniquité envers les producteurs. On a affirmé qu'il n'y avait pas suffisamment de concurrence dans le secteur agroalimentaire. Autrement dit, il existe un monopole et le marché est contrôlé par les grandes sociétés du secteur.

Les fabricants d'intrants ont procédé à des fusions d'une telle ampleur que leur emprise sur le marché leur permet de s'emparer de toute somme supplémentaire que l'agriculteur pourrait gagner. Les producteurs font faillite parce que la structure économique ne leur permet pas d'encaisser des profits. Ils n'ont aucun pouvoir sur le marché.

Autre fait tout aussi important, en dehors de la situation de crise, les milliards de dollars ne sont pas utilisés adéquatement parce que l'offre est excédentaire. Une petite réduction de l'offre mondiale de céréales ferait grimper les prix, pourtant, le gouvernement achemine la production.

C'est le constat que font bien des gens, y compris le Syndicat national des cultivateurs, que j'appuie naturellement. Que répond le sénateur Gustafson à cette analyse? Est-il d'accord avec ce constat?

Deuxièmement, je crois que cette analyse reflète bien la situation. Si on y souscrivait, les contribuables n'auraient plus à porter le fardeau. Les producteurs sont très efficients maintenant. Ils ont tout fait. Ils ont agrandi leurs entreprises. Ils ont amélioré leur rendement au maximum.

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, je veux présenter quelques chiffres au sénateur Spivak. Un agriculteur reçoit quatre cents sur le prix total d'une boîte de flocons de maïs. Le joueur de hockey dont le visage est imprimé sur la boîte reçoit dix cents. Les agriculteurs reçoivent quatre cents sur le prix d'un pain. Les produits alimentaires qu'ils produisent ne leur rapportent pas beaucoup d'argent; ils gagnent bien peu. Si on examinait les résultats financiers des transformateurs, et cela pourrait inclure les pétrolières, on verrait qu'ils réalisent d'énormes profits. Ils ont profité dernièrement d'années records et de revenus records.

En réponse à la question du sénateur Spivak, je dirai que l'agriculteur ne touche pas sa juste part des profits. On l'en empêche. D'après mon fils cadet, cela n'arrangerait rien si le cours du grain montait et que les sociétés productrices de carburant et d'engrais haussaient leurs prix. C'est certes là un autre aspect de l'agriculture à examiner.

Honorables sénateurs, je ne suis pas en faveur de l'intervention du gouvernement. À l'heure actuelle, toutefois, nous sommes vraiment dans le pétrin et il faut faire quelque chose, car la situation est critique.

L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, le sénateur Gustafson a parlé des profits que réalise l'athlète dont la photo figure sur les boîtes de céréales. Le colonel Sanders touche bien davantage pour avoir sa photo sur les boîtes de poulet.

Dans les questions qui ont été posées, on a laissé entendre que l'aide gouvernementale ne vaut que pour certains marchés d'exportation, ce qui n'est pas vrai. Les agriculteurs du Canada nourrissent les Canadiens. Ces agriculteurs sont maintenant en difficulté. Les subventions vont fondamentalement servir à nourrir les Canadiens. Elles sont absolument essentielles à la survie du secteur agricole.

Le journal que cite le sénateur s'efforce de démolir toute argumentation que nous pourrions avoir en prétendant que nous subventionnons les consommateurs étrangers. En fait, il se peut que nous le fassions un peu, mais nous nous efforçons de protéger le secteur agricole.

Nous sommes disposés à subventionner les enseignants à coup de millions de dollars. Critique-t-on cela? Non. Nous payons les professionnels de la santé pour nous soigner. Cela donne-t-il lieu à des critiques? Non. Nous exigeons cela.

Toutefois, c'est une tout autre histoire lorsqu'il s'agit de nourrir les gens. On n'est pas censé manger. Les gens qui rendent ce service ne devraient-ils pas être aussi bien traités que les enseignants et les infirmières, par exemple?

Le sénateur Spivak dit que ce sont les contribuables qui en assument le fardeau. Ce n'est pas un fardeau de payer pour la production des aliments dont on a besoin. Le sénateur Gustafson aurait-il l'obligeance de nous dire ce qu'il en pense?

Le sénateur Gustafson: Les commentaires sont inutiles, honorables sénateurs. Le sénateur Sparrow a bien fait valoir son point de vue.

Ce que dit le sénateur est vrai. Compte tenu de l'importance de la nourriture, nous, Canadiens, n'avons pas pris cette affaire au sérieux, qu'il s'agisse des denrées à consommer au Canada ou de celles destinées à l'exportation.

Je remercie l'honorable sénateur pour ces observations.

Le sénateur Bryden: Honorables sénateurs, une préoccupation que j'ai toujours eue est que nous ne devons jamais manquer de quoi nourrir la population. Qu'il s'agisse du porc du Nouveau-Brunswick, du boeuf du Nouveau-Brunswick ou du blé de la Saskatchewan, j'estime que nous ne devons jamais avoir besoin de subventionner l'agriculture pour nourrir les Canadiens.

Il y a des pays dans le monde, comme la Nouvelle-Zélande et l'Australie, qui ont éliminé les subventions à l'agriculture et qui ont arrêté d'essayer de livrer concurrence au niveau international en agriculture. Ces pays s'efforcent de nourrir leur propre population.

Honorables sénateurs, on s'est inquiété de l'aviculture, qui a des offices de commercialisation du poulet et des oeufs. Nous ne fournissons pas le colonel Sanders, qui ne s'approvisionne qu'aux États-Unis.

Je suis heureux que le sénateur Gustafson ait parlé de la nécessité d'étudier cette ressource en permanence. Il n'y a aucun doute là-dessus. Cependant, il faut aborder la question un peu comme le philosophe qui aborde une question religieuse, par opposition au théologien qui aborde la même question. Alors que le philosophe met en doute toutes les questions, y compris: «Y a-t-il un Dieu?», le théologien part du principe que Dieu existe. Tous les deux sont très rigoureux dans leur analyse.

(1520)

Lorsque nous faisons une analyse approfondie de notre façon de traiter nos ressources naturelles, qu'il s'agisse du poisson, des denrées alimentaires, du bois d'oeuvre, du blé ou du porc, nous devons poser les questions très fondamentales du commerce international. En préparant notre analyse, nous pouvons peut-être nous demander si nous ne freinons pas notre capacité de nourrir ou de chauffer — tenons compte aussi du pétrole et du gaz — notre propre population. Ce que nous disons peut-être, en réalité, c'est que, globalement, nous pouvons affronter la concurrence du reste du monde, qu'il s'agisse de l'Europe, des États-Unis ou de la Russie.

L'analyse doit être exhaustive, et l'on ne soustraira à cet examen aucune «vache sacrée» — pardonnez-moi le jeu de mots. Les sénateurs Gustafson et Spivak ont dit qu'il faut faire quelque chose parce que les entreprises du secteur agroalimentaire s'accaparent une grande part du gâteau. Si elles n'en prenaient pas une si large part, les agriculteurs en recevraient davantage. Qui dira aux entreprises du secteur agroalimentaire d'être moins gourmandes? Ce sera probablement le gouvernement qui leur dira.

Ceux d'entre nous qui sont issus de milieux ruraux, qui sont farouchement indépendants, qui ne veulent pas que le gouvernement se mêle de leurs affaires, de leurs exploitations agricoles et de leurs champs et qui préfèrent mener les choses à leur façon peuvent le faire. Je me souviens que cette situation s'est produite dans le passé. Cela peut fonctionner tant que nous réussissons assez bien.

Je me souviens d'avoir lu des articles sur les discussions qui ont eu lieu au sujet des diverses denrées connexes, comme les produits laitiers, la volaille et les oeufs, le porc, le boeuf dans le Canada atlantique — lequel n'a jamais été assujetti à un système de commercialisation — et le boeuf et les céréales de l'ouest du Canada. Pour ces denrées, il n'existe pas à proprement parler d'office de commercialisation, alors que la Commission canadienne du blé existe depuis longtemps. Ce que je crains, c'est que, à titre de grande nation productrice de ressources, nous nous soyons engagés, peut-être de manière irréfléchie, et c'est là une hérésie, j'en suis certain, dans un accord de libre-échange avec un «géant» au sud de notre pays. Ce géant nous paierait, qu'il existe ou non un accord de libre-échange, le prix que nous lui demanderions pour notre pétrole et notre gaz, parce qu'il en a besoin. Il ne paiera pas le prix que nous demandons pour notre bois d'oeuvre parce qu'il a suffisamment de bois d'oeuvre pour répondre aux besoins de ceux qui appuient ses organisations politiques.

Dans la conjoncture actuelle, lorsque nous ferons cette analyse, nous devrons la faire à l'échelle continentale. Certains — pas moi — prétendent que les programmes agricoles et les exploitations qui existent dans un rayon raisonnable de zones densément peuplées se portent très bien. Peu importe que ces producteurs cultivent des navets ou élèvent des poulets, qu'ils soient ou non assujettis à une réglementation, qu'ils nourrissent des chevaux de course ou la population de Toronto.

Honorables sénateurs, nous avons un problème à résoudre au Canada. Il ne s'agit pas d'opposer les agriculteurs aux consommateurs. À ce stade, le vrai problème, c'est un conflit rural-urbain. C'est assez différent des questions qui sont soulevées dans le domaine de la santé. Par exemple, si j'avais une crise cardiaque maintenant, le sénateur Keon est ici pour m'aider, et, dans cinq minutes, une ambulance se présenterait à la porte avant, les ambulanciers placeraient de l'équipement dernier cri sur ma poitrine et je serais transporté dans le meilleur hôpital du monde, où j'obtiendrais les meilleurs soins. Cependant, si j'avais cette crise cardiaque à ma ferme, qui se trouve à 30 milles ou à une heure de Moncton, l'ambulance n'arriverait pas avant une demi-heure. Les ambulanciers n'auraient que de l'oxygène — c'est tout — pour me garder en vie jusqu'à ce que j'arrive enfin à l'hôpital une heure plus tard.

Nous avons un problème fondamental dans notre pays entre les régions rurales et urbaines. Au sujet de l'agriculteur qui ne touche que 4 cents pour la vente d'une boîte de flocons de maïs et du joueur de hockey qui figure sur la boîte et qui touche 10 cents, je dis que la Saskatchewan produit aussi beaucoup de joueurs de hockey et que, par conséquent, le rendement des joueurs de hockey est bon. Le fait est que nous devons décider si le Canada rural n'existe que pour maintenir la séparation entre les villes et les villages.

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, premièrement, je demande au sénateur Bryden s'il me prend pour un théologien ou un philosophe. Deuxièmement, que fera le Canada s'il ne s'occupe pas convenablement du monde rural canadien?

J'ai assisté hier soir à une réunion du Syndicat du blé. Un député et moi-même étions présents. Plus tard, à mon arrivée à la réception tenue sous la surveillance de la police, nous pouvions à peine nous déplacer tellement il y avait foule. Cela constitue un message. J'ai demandé au président du Syndicat du blé de la Saskatchewan, Martin Wiens, combien il y avait de silos jadis en Saskatchewan. Il a répondu qu'il y en avait près de mille, mais qu'il ne reste plus un seul silo en bois. C'est certainement un changement draconien dans les régions rurales du Canada.

Le Canada tire son produit intérieur brut de ses ressources, qui se trouvent en milieu rural. Il y a 21 ans, Alvin Hamilton me disait qu'il y avait une guerre sans nom entre le Canada urbain et le Canada rural. Cela ne devrait jamais arriver. Ne devrions-nous pas nous montrer responsables, en tant que gouvernement et Canadiens choyés? Ne devrions-nous pas prendre les mesures qui s'imposent aussi bien à l'égard des citadins que des ruraux?

Le sénateur Bryden: Honorables sénateurs, je ne répondrai pas directement à la première question du sénateur Gustafson, qui me demandait si je le considérais comme un théologien ou comme un philosophe, mais je sais que dans ses étables, il n'y a pas de vaches sacrées.

Bien sûr, il faut nous montrer responsables. Cependant, je me pose des questions lorsque les gens parlent de la nouvelle économie tertiaire, dans laquelle le gros de notre produit intérieur brut provient des services et non des marchandises. Il faut offrir des services à quelque chose et pour une raison précise. Si nous n'avons pas de produits manufacturés auxquels offrir des services, quelle est la raison des services? S'il n'y a pas de voitures, il est inutile d'avoir des stations-service.

Je pense que nos industries primaires contribuent de façon continue à notre produit intérieur brut et qu'elles le font en exportant. Par conséquent, il faut qu'elles soient capables d'être concurrentielles à l'échelle mondiale. Ce sera le cas de plus en plus, non seulement des industries de l'or et du zinc, mais de toutes les industries au Canada, y compris celles de la pêche et de l'agriculture.

[Français]

(1530)

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, normalement, le mercredi, nous essayons autant que possible d'ajourner le Sénat vers 15 h 30 afin de permettre aux comités de siéger.

Je ferai remarquer aux honorables sénateurs qu'il reste encore deux jours de débat en réponse au discours du Trône. Jeudi et mardi de la semaine prochaine, les honorables sénateurs pourront certainement prendre la parole.

Honorables sénateurs, je demande votre coopération afin que nous puissions ajourner dans quelques minutes et que les comités puissent siéger comme prévu.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Beaudoin, le débat est ajourné.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, il est déjà 15 h 30 et, conformément à une entente plus ou moins formelle, je propose l'ajournement du Sénat. Je demande que tous les points figurant à l'ordre du jour et au Feuilleton demeurent dans leur ordre actuel.

(Le Sénat s'ajourne à 14 heures demain.)


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