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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 37e Législature,
Volume 139, Numéro 66

Le jeudi 1er novembre 2001
L'honorable Dan Hays, Président


 

LE SÉNAT

Le jeudi 1er novembre 2001

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATION D'UN SÉNATEUR

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur la présence à la tribune de M. Gunnar Johan Stalsett, évêque d'Oslo et vice-président du Comité Nobel norvégien. Il est l'invité du sénateur Wilson.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

PROJET DE LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

LES EXPLICATIONS AU SUJET DE L'APPUI ACCORDÉ

L'honorable Mobina S. B. Jaffer: Honorables sénateurs, la Chambre a adopté hier le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada. Certains sénateurs se sont peut-être interrogés sur les raisons pour lesquelles j'ai appuyé le projet de loi.

Honorables sénateurs, ma plus grande crainte est de voir les Canadiens douter de la sécurité de leur système d'immigration, car ils pourraient alors se dire que c'est assez et décider de fermer les portes qui sont restées ouvertes pour accueillir des gens comme ma famille et moi-même, leur offrant pendant si longtemps espoir et refuge. Si le Canada avait fermé ses portes à ma famille, nous n'aurions peut-être pas survécu.

Honorables sénateurs, depuis que j'ai prêté serment il y a un peu plus d'un mois, vous m'avez tous accueillie chaleureusement. Mon arrivée ici a cependant suivi de peu les terribles événements du 11 septembre. J'ai entendu mes concitoyens et les honorables sénateurs au Sénat dire que c'était le moment de repenser la façon dont nous faisons les choses. Je les ai entendus dire que nous sommes entrés dans une nouvelle ère de sécurité. J'ai entendu des propos traitant injustement les réfugiés de mendiants, de voleurs et de terroristes. Les horribles événements du 11 septembre n'ont rien à voir avec la politique de notre Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Honorables sénateurs, ma famille et moi n'avons pas choisi de quitter notre pays de naissance, l'Ouganda, et de venir ici en abandonnant tout. Lorsque je suis arrivée au Canada sans rien d'autre que mon bébé nouveau-né dans les bras et un mari qui a échappé à la détention de l'armée ougandaise, ce n'était pas de gaité de coeur.

[Français]

Nous ne choisissons pas de devenir des réfugiés. Je n'ai pas fait ce choix.

[Traduction]

Nous n'avions pas choisi de renoncer aux rêves et aux aspirations que nous avions en Ouganda. C'est Idi Amin Dada qui nous y a forcés. Nous n'avons pas choisi de quitter notre foyer. C'est Amin Dada qui l'a fait. Nous n'avons pas choisi de devenir des réfugiés. C'est Idi Amin Dada qui nous y a forcés. Tous ces choix ont été faits pour nous et nous ont été imposés. J'en parlerai à une autre occasion.

Honorables sénateurs, la prochaine fois que nous parlerons de réfugiés ici ou ailleurs, ne perdons pas de vue que ceux qui ont des démêlés avec la justice et qui menacent notre sécurité ne sont qu'une minorité. Peut-être pourrons-nous nous rappeler que la plupart des réfugiés sont des gens laborieux qui ne veulent rien d'autre que rebâtir leur vie et contribuer à notre pays, le Canada. J'espère que nous pourrons nous souvenir de l'importance de cette distinction.

Des voix: Bravo!


[Français]

AFFAIRES COURANTES

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2001-2002

DÉPÔT DU BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (A)

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose le Budget supplémentaire (A) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2002.

[Traduction]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, je voudrais informer le Sénat que, plus tard aujourd'hui, j'ai l'intention de demander la permission de revenir à la présentation des rapports des comités permanents et spéciaux pour pouvoir déposer le premier rapport du Comité sénatorial spécial sur la teneur du projet de loi C-36, Loi antiterroriste. Le comité et moi-même ne souhaitions pas déposer le rapport avant de pouvoir en distribuer des exemplaires à tous les sénateurs, ce qui, je l'espère, sera fait sous peu.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

[Français]

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2001-2002

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ DES FINANCES NATIONALES À ÉTUDIER LE BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (A)

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que mardi prochain, le 6 novembre 2001, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses projetées dans le Budget supplémentaire (A) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2002.

[Traduction]

(1340)

AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À EXAMINER LE RÈGLEMENT RÉFÉRENDAIRE PROPOSE PAR LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 6 novembre 2001, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à étudier le règlement proposé par le directeur général des élections, qui a été déposé au Sénat le 16 octobre 2001, et que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 29 novembre 2001.

L'ARRÊT DU CYCLE DE VIOLENCE AU MOYEN-ORIENT

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Pierre De Bané: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mercredi 7 novembre 2001, j'attirerai l'attention du Sénat sur ma recommandation pour mettre fin à l'infernal cycle de violence qui sévit présentement au Moyen-Orient.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LES FINANCES

LA BAISSE DU DOLLAR

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Bien sûr, notre dollar qui dégringole fait aujourd'hui la manchette des journaux, comme il l'a fait ces derniers jours. Dans la période qui a suivi le 11 septembre, le dollar, après avoir atteint un sommet de 69,19 cents par rapport au dollar américain le 15 septembre, est tombé hier, à la fermeture des marchés, à 62,94 cents, niveau le plus bas qu'il n'ait jamais atteint, et était à 62,75 cents ce matin. Nous n'avons jamais vu le dollar aussi bas. Ce sont de mauvaises nouvelles économiques annoncées aux États-Unis qui ont constitué le déclencheur immédiat de la plus récente baisse, mais le fait demeure que notre dollar a perdu quatre cents depuis le début février, quand il s'échangeait contre 66,95 cents.

La question qui vient à l'esprit des Canadiens quand le dollar tombe si bas est la suivante: quelle est la politique du gouvernement face à la chute du dollar? Allons-nous continuer à observer la chute au fur et à mesure du ralentissement de l'économie? Est-ce une tentative du gouvernement pour se rattacher à une transition vers le dollar américain? Que se passe-t-il exactement?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la politique que nous suivons depuis assez longtemps déjà au Canada se base sur un taux de change flottant. La valeur de notre monnaie est déterminée par le marché. Comme je l'ai dit, cette politique est la même depuis très longtemps. Nous savons qu'elle a des avantages et des inconvénients. L'honorable sénateur le sait bien.

Cet après-midi, cependant, je tiens à signaler que notre dollar a moins reculé par rapport au billet vert que les autres grandes monnaies. Par exemple, le yen japonais a accusé un recul de 6,55 p. 100 au cours de l'année dernière, la couronne suédoise a perdu 11,37 p. 100 et le dollar australien a reculé de 9,86 p. 100, mais le dollar canadien n'a régressé que de 5,59 p. 100. C'est une baisse notable, mais par rapport aux autres monnaies, il continue de très bien se comporter.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, je comprends bien tout cela. Ce qui m'inquiète, cependant, c'est le long terme. Je suis préoccupé par ce qui va se passer à longue échéance. Nous savons que, à court terme, un dollar faible stimule nos exportations. En revanche, il porte un dur coup à notre productivité. Il fait de nous un joueur de deuxième ordre, parce que nous ne sommes plus concurrentiels. Nous comptons sur un dollar faible pour vendre nos marchandises et les exporter ailleurs dans le monde. Le gouvernement est en train de passer à côté de cet aspect déterminant, mais à ses risques et périls.

Si le dollar remonte, et l'on peut espérer que cela arrivera un jour, comment, selon le leader du gouvernement au Sénat, les entreprises s'adapteront-elles pour être concurrentielles dans l'avenir — et je parle ici de l'avenir à long terme?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, il est certain que les produits canadiens sont concurrentiels sur les marchés mondiaux, et ils le sont depuis très longtemps. En réalité, ce sont toutes les monnaies qui ont subi un rude coup. Ainsi, depuis janvier 2000, la livre sterling a perdu 16 p. 100 par rapport au dollar américain. Celui-ci est très fort. Les pays du monde entier sont en situation de concurrence mutuelle par rapport au dollar américain. Honorables sénateurs, sur les autres plans, et même si elle n'est pas des plus vaillantes, l'économie canadienne se porte mieux que celle des États-Unis.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, le gouvernement semble se dire que si notre monnaie ne recule pas autant que d'autres par rapport au dollar américain, c'est que tout va bien. L'argument est spécieux. Jusqu'où le gouvernement va-t-il laisser chuter le dollar canadien avant de se porter un peu à son secours?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, pour soutenir le dollar canadien, il faudrait sans doute augmenter considérablement les taux d'intérêt. Personnellement, je ne pense pas que ce soit la solution.

Le sénateur Lynch-Staunton: Nous devons donc en conclure que le gouvernement va laisser régresser notre dollar jusqu'à ce que sa valeur atteigne celle des monnaies de certains pays du tiers-monde, ce qui veut dire qu'il rejoindra le groupe des monnaies qui n'inspirent plus de confiance dans le monde.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je me permets de faire remarquer que la valeur des monnaies de certains pays du tiers-monde n'a aucun rapport avec celle de la nôtre.

Le sénateur Lynch-Staunton: Le dollar canadien ne se porte pas bien. Il vient d'atteindre un creux historique. Le gouvernement ne semble pas s'en rendre compte. Il prétend que cela va aider nos exportations, que l'économie canadienne se porte bien, que tout est relatif. La santé de la monnaie d'un pays est indicative de la santé du pays lui-même. Plus notre dollar s'affaiblit et plus nous donnerons l'impression que notre économie est faible. Si le gouvernement n'est pas capable de se ranger à cette évidence, je crois que notre dollar va continuer de régresser.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je fais respectueusement remarquer au chef de l'opposition que notre monnaie n'évolue pas toute seule sur les marchés mondiaux. Elle est en compagnie de bien d'autres monnaies. Si l'honorable sénateur estime que notre économie est à la dérive — ce avec quoi je ne suis pas d'accord, parce que ce n'est pas le cas — qu'a-t-il à dire à propos du dollar australien? Qu'a-t-il à dire à propos de l'euro, du yen ou de la livre sterling? Ces monnaies sont-elles celles d'économies également à la dérive?

L'honorable Pat Carney: Honorables sénateurs, ma question complémentaire s'adresse au sénateur Stratton. L'honorable sénateur vient d'indiquer qu'un dollar bas permet de stimuler les exportations canadiennes. C'est là un côté de la médaille. Le revers, c'est qu'un dollar faible augmente sensiblement le coût des importations en provenance des États-Unis, importations qui sont très importantes pour l'industrie manufacturière canadienne, surtout dans le centre du pays. Dès lors, la politique qui consiste à maintenir un dollar faible a un effet fortement inflationniste en une période où l'économie est stagnante.

(1350)

Selon le leader du gouvernement au Sénat, pourquoi le gouvernement suit-il une telle politique qui provoque une augmentation des coûts de nos importations, des coûts de production pour les fabricants canadiens et des prix à la consommation? C'est là une politique particulièrement inflationniste dans une économie stagnante.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, le sénateur Carney a raison quand elle dit qu'une telle politique limite la capacité des Canadiens d'acheter des produits américains, parce qu'ils ne peuvent plus les obtenir au même prix qu'avant. Cette politique favorise nos exportations et nuit aux importations; c'est certain. Il faut songer à la balance commerciale. Nous sommes un pays qui exporte beaucoup plus qu'il n'importe. Quant à ce que l'honorable sénateur a déclaré au sujet de l'inflation, je dois dire que celle-ci est très faible au Canada. La politique du gouvernement n'a pas, contrairement à ce que l'honorable sénateur a indiqué, réveillé le «spectre des pressions inflationnistes massives». Ces pressions n'existent tout simplement pas.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, la haute finance est un autre domaine où je n'excelle pas particulièrement. Je vais donc formuler ainsi ma question au leader du gouvernement au Sénat: en raison du recul de notre dollar, est-ce qu'il ne va pas nous en coûter plus cher pour acheter des oranges ou d'autres agrumes cet hiver?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je crois que j'ai répondu à cette question lorsque j'ai dit que le sénateur avait entièrement raison et que nos importations coûteront davantage, nos exportations coûteront moins et que cela sera profitable. Si nous importons des oranges, elles seront plus chères à cause du prix de notre dollar. Élémentaire, sénateur Kinsella. Je dois dire à l'honorable sénateur que la plupart de mes élèves du secondaire auraient su répondre à cette question.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, une situation fort intéressante se déroule à l'heure actuelle parallèlement à ce qui se passe pour le dollar canadien. Il s'agit de la conjecture à propos du dollar américain. L'Europe a adopté une monnaie unique et cela pousse l'Amérique du Nord à faire de même, à savoir le Mexique, les États-Unis et le Canada, sauf que nous n'aurions pas une monnaie nord-américaine continentale, mais nous adopterions le dollar américain en tant que monnaie nationale.

Sherry Cooper, économiste principale de Nesbitt Burns, a déclaré aujourd'hui que la dégringolade de notre dollar nous pousse de plus en plus à adopter le dollar américain. Le gouvernement est-il convaincu que nous serons inexorablement poussés à adopter le dollar américain, ou bien entend-il rester sur sa position pour un pays souverain et dire: «Nous conserverons notre dollar canadien, même s'il ne vaut que 25 ou 50 cents»?

Le sénateur Carstairs: Permettez-moi d'aborder le préambule de la question complémentaire de l'honorable sénateur. Les Européens ont adopté une monnaie unique. Il me semble que le sénateur a dit que ce serait peut-être quelque chose à envisager au Canada.

Pour mettre les choses au point, l'euro est dans une bien plus mauvaise posture que la monnaie canadienne. Ce ne serait pas cela qui me pousserait à recommander une monnaie unique. Le ministre des Finances tout comme la population canadienne ont été clairs à ce sujet, ils ne veulent pas d'une monnaie unique avec les États-Unis.

Le sénateur Stratton: Je sais que telle est la situation actuelle. Toutefois, si notre dollar continue de fléchir, la réalité économique nous montrera que nous n'aurons peut-être pas le choix. C'est une inquiétude qui commence à se faire ressentir de plus en plus dans l'esprit des Canadiens.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, cette inquiétude peut se faire ressentir dans l'esprit du sénateur Stratton, mais certainement pas dans l'esprit de ceux qui sont assis de ce côté de la Chambre.

[Français]

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La ministre a-t-elle dit que le faible niveau du dollar canadien a pour effet d'augmenter le prix de nos importations? J'aimerais également savoir quels types d'importations sont concernées?

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, il s'agit d'une question fort généreuse, sénateur Bolduc, dans le sens que je pourrais passer le reste de la période de questions à énumérer toutes les choses que nous pourrions importer. Mais je ne le ferai pas.

Manifestement, les importations en provenance des États-Unis deviendront plus onéreuses en raison de la chute de notre dollar par rapport au dollar américain dont nous parlons. En revanche, les importations, disons des pays européens, de l'Argentine — dont la devise est dans une situation précaire —, du Brésil ou de l'Australie seront tout à notre avantage.

[Français]

Le sénateur Bolduc: Il faut savoir que les produits que l'on importe sont en bonne partie des produits de haute technologie pour améliorer la productivité de l'industrie canadienne. C'est ce qui fait que, chaque fois que cela se produit, la productivité canadienne diminue. C'est un cercle vicieux. Plus cela coûte cher d'importer des produits de haute technologie, plus on se dirige vers un système où la productivité relative du Canada baisse par rapport à celle des États-Unis. Que fait le gouvernement par rapport à cela?

[Traduction]

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, beaucoup de nos importations de technologie de pointe viennent des États-Unis. Elles seraient donc touchées par ces mesures. Toutefois, nous importons également des produits de technologie de pointe du Japon et, comme notre dollar est en meilleure posture que le yen japonais, ces importations sont moins chères.

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LES ÉTATS-UNIS-LE RENOUVELLEMENT DE L'ACCORD SUR LE BOIS D'OEUVRE

L'honorable Pat Carney: Honorables sénateurs, les Américains matraquent les producteurs canadiens de bois d'oeuvre en imposant un droit antidumping de 12,57 p. 100 en moyenne qui vient s'ajouter à un droit compensateur de 19,3 p. 100 déjà en place. Cela cause des difficultés économiques considérables. Il s'agit d'une industrie de 10 milliards de dollars par an à l'échelle nationale et de 5 milliards de dollars en Colombie-Britannique. Quelque 30 000 travailleurs sont touchés ou l'ont été. Ce droit est le résultat direct de la position du gouvernement qui essaie d'arranger les Américains au lieu de négocier avec eux. Le gouvernement canadien a choisi de suivre un processus qui a donné lieu à l'imposition de ces droits au lieu de négocier avec les Américains.

Qu'est-ce que le gouvernement entend faire pour obvier aux difficultés infligées aux provinces et aux travailleurs? Comment le gouvernement entend-il faire payer les Américains?

(1400)

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme le sait si bien l'honorable sénateur Carney, le gouvernement américain a accusé six sociétés canadiennes de se livrer à des activités d'antidumping. Le droit de douane imposé s'élève à environ 12,58 p.100 en moyenne.

Le ministre responsable, l'honorable Pierre Pettigrew a été très clair à ce sujet. Il a indiqué que ce droit était tout à fait injustifiable et qu'il s'agissait d'une mesure punitive qui venait non seulement aggraver les difficultés de nos producteurs de bois d'oeuvre, mais qui aurait aussi de graves répercussions aux États-Unis, dans le secteur de la construction de logements neufs. Comme le sait fort bien l'honorable sénateur, une bataille se déroule à l'heure actuelle aux États-Unis entre les États producteurs de bois d'oeuvre et les États qui n'en produisent pas et en ont grand besoin à cause des activités de construction qui y ont lieu.

Je dois dire aux honorables sénateurs qu'une autre réunion aura lieu entre le ministre Pettigrew et son homologue américain durant la semaine du 12 novembre. Le gouvernement continue d'agir avec vigueur dans ce dossier. Nous continuerons de défendre notre cause non seulement devant le gouvernement américain, mais également devant des instances internationales.

Le sénateur Carney: Honorables sénateurs, à la suite de la réponse du leader, je dirai que les Américains suivent leur propre procédure. On ne comprend pas, dans notre pays, que les Américains suivent une procédure prévue dans leur propre loi. La façon dont s'y prend le ministre Pettigrew pour les faire plier ne marchera pas.

Dans des circonstances absolument identiques, le gouvernement conservateur a imposé à la frontière une taxe sur les exportations qui a permis de garder l'argent au Canada et les usines ouvertes. On me dit que cette approche est privilégiée par un grand nombre d'entreprises de la Colombie-Britannique. Pourquoi ce gouvernement ne garde-t-il pas l'argent au Canada et les usines ouvertes en imposant à la frontière une taxe à l'exportation?

Le sénateur Carstairs: Parce que nous croyons au libre-échange.

Des voix: Oh, oh!

Le sénateur Carney: Il faut que je réponde à cela, honorables sénateurs. La réponse est inexacte.

Le sénateur Lynch-Staunton: Les Américains aussi y croient!

Le sénateur Carney: La réponse est inexacte et madame le ministre le sait. Si elle veut laisser entendre que le libre-échange amène l'imposition de droits antidumping et compensateurs s'élevant à près de 40 p. 100, elle devrait consulter à nouveau son cahier de réponses.

Le sénateur Carstairs: Avec tout le respect que je vous dois, honorable sénateur Carney, cette question est devant les tribunaux depuis longtemps et le Canada a gagné dans tous les cas. C'est le Canada qui respecte les règles du jeu.

Le sénateur Lynch-Staunton: Vous venez de perdre! Vous avez perdu hier!

[Français]

LA SANCTION ROYALE

AVIS

Son Honneur le Président informe le Sénat qu'il a reçu la communication suivante:

RIDEAU HALL

Le 1er novembre 2001

Monsieur le Président,

J'ai l'honneur de vous aviser que l'honorable Jack Major, juge puîné de la Cour suprême du Canada, en sa qualité de suppléant de la Gouverneure générale, se rendra à la Chambre du Sénat, aujourd'hui, le 1er novembre 2001 à 16 h 30, afin de donner la sanction royale à plusieurs projets de loi.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.

La sous-secrétaire, politique, programme et protocole,
Michèle Lévesque

L'honorable
        Le Président du Sénat
                Ottawa


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

PROJET DE LOI DE 2001 POUR LA MISE EN OEUVRE DE CONVENTIONS FISCALES

TROISIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Poulin, appuyée par l'honorable sénateur Poy, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-31, Loi mettant en oeuvre des accords, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et la Slovénie, l'Équateur, le Venezuela, le Pérou, le Sénégal, la République tchèque, la République slovaque et l'Allemagne, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, ceux d'entre vous qui étaient là à cette époque se souviendront que nous avons vu un projet de loi comparable il y a deux ou trois ans dans lequel un des pays visés par une convention fiscale était l'Ouzbékistan. Certains d'entre nous se sont opposés à ce que le Canada, en signant une convention fiscale, appuierait de facto les politiques d'un pays qui ignore presque totalement les droits de la personne.

Cette intervention n'a pas amené le rejet de ce projet de loi, mais elle a permis une bonne discussion au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères sur la nature des relations que le Canada entretient avec des pays avec lesquels nous sommes en désaccord à propos du respect des droits de la personne.

Il est difficile de définir une politique qui parvient à concilier le commerce et le respect des droits de la personne, mais il n'est pas si difficile que ça de constater que certains pays ont de tels comportements en matière de droits de la personne que nous ne devrions pas commercer avec eux ou ne le faire que sur une base très restreinte.

Comme le savent les honorables sénateurs, les Ouzbeks sont tout à coup devenus nos alliés dans la guerre contre le terrorisme. Néanmoins, je veux étayer mon point de vue en mettant de côté temporairement le projet de loi lui-même. Selon un article paru dans le New York Times il y a deux jours, «à court terme, les Américains craignent que la coopération avec l'Ouzbékistan ne donne l'impression de légitimer les restrictions que cette république impose à l'exercice de la foi et qu'elle ait l'air d'appuyer son système juridique qui juge les gens en secret, avec des forces de sécurité qui torturent les suspects et conservent des prisons inhumaines».

La question soulevée à l'époque était: pourquoi notre pays négocie-t-il une convention fiscale avec un pays qui a de si déplorables antécédents dans ce dossier et où nous n'avons pratiquement aucun investissement?

À ce moment-là, nous avons demandé aux fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères qui ont comparus devant le Comité que, la prochaine fois que nous aurions à nous pencher sur un projet de loi analogue traitant de convention fiscale, ce ministère nous remette un compte rendu analytique de la situation des droits de la personne dans les pays concernés. Malheureusement, cela n'a pas été fait. Nous avons reçu un cahier d'information qui loue tous les pays signataires des conventions qu'on nous demande de ratifier.

Je ne vais mentionner qu'un seul des pays avec lesquels nous avons conclu une convention fiscale, le Sénégal. Je cite cet extrait du cahier d'information sur les droits de la personne qui dit ceci:

L'un des pays dans lequel les droits de la personne sont les mieux protégés, le Sénégal, est signataire de la plupart des conventions internationales sur les droits de l'homme. Les droits civils et politiques y sont largement respectés [...]. Un grand nombre d'ONG travaillent dans ce pays sans entrave.

La vérité est que ce cahier d'information était extraordinairement trompeur. D'après Amnistie Internationale, les forces de sécurité dans la région de Casamance sont responsables de plusieurs cas d'exécution sans jugement, de disparitions et de torture. Le Départment d'État des États-Unis signale que le gouvernement poursuit ou punit rarement les membres des forces militaires, de la GRC et de la police qui violent les droits de la personne.

Malgré l'affirmation rassurante dans notre cahier d'information au sujet des ONG, Amnistie Internationale maintient qu'elle a de sérieuses inquiétudes sur les conditions dans lesquelles des gens sont détenus à Holda, car aucun organisme de défense des droits de la personne n'a eu accès à eux malgré des demandes répétées.

Je sais fort bien que je n'irai pas très loin avec cette question, mais je tiens à insister sur le fait que le Canada, qui est un ardent défenseur des droits de la personne sur son propre territoire ainsi qu'à l'étranger, devrait se montrer fidèle à lui-même avec lui quand il conclut des traités et des conventions avec des pays qui ont des antécédents déplorables en matière des droits de la personne. Nous ne pouvons tout simplement pas justifier les principes que nous appuyons avec les mesures qu'on nous demande de prendre.

(1410)

J'aurais préféré que ce projet de loi soit soumis au Comité sénatorial permanent des Affaires étrangères ou à celui des droits de la personne pour permettre d'apprécier pleinement les conséquences des négociations du Canada avec certains pays dont nous désapprouvons complètement les politiques, les dossiers et les mesures.

C'est le point que je voulais faire. Si un autre projet de loi du même type nous est présenté, je soulèverai à nouveau les mêmes interrogations, en étant davantage entendu j'espère.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

[Français]

PROJET DE LOI SUR LE TRIBUNAL D'APPEL DES TRANSPORTS DU CANADA

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Aurélien Gill propose: Que le projet de loi C-34, Loi portant constitution du Tribunal d'appel des transports du Canada et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-34, Loi portant constitution du Tribunal d'appel des transports du Canada et modifiant certaines lois en conséquence. Ce projet de loi a été soumis à l'examen du Comité permanent des transports et des opérations gouvernementales à l'autre endroit, et a été adopté en troisième lecture le 26 octobre 2001.

J'ai été ravi de l'accueil favorable réservé à ce projet de loi par tous les partis de l'autre endroit. Cela démontre que tous les partis peuvent travailler ensemble pour le bien des Canadiens en reconnaissant que cette initiative est une bonne idée et une affaire de bon sens pour l'application des lois.

L'un des principaux engagements de ce gouvernement est de repenser le rôle de l'État. Dans le secteur des transports, cela signifie moderniser la législation fédérale sur les transports et revoir les façons dont le gouvernement administre et applique nos lois dans l'intérêt des Canadiens. Pour avoir le réseau de transport le plus sûr et le plus sécuritaire possible, il est important que les fonctionnaires de Transports Canada disposent d'une large gamme de pouvoirs efficaces et efficients pour appliquer les règlements.

Lorsque sont commises de graves infractions à la législation en matière de sécurité et de sûreté, le gouvernement a recours à des procédures et à des sanctions criminelles. Il continuera de traiter ce type d'infractions en exerçant ses pouvoirs d'application de la loi et en appliquant des sanctions criminelles. Toutefois, en vertu de plusieurs lois sur les transports, le ministère doit appliquer ces mêmes procédures pénales devant les tribunaux criminels en cas d'infractions mineures aux règlements.

Les procédures criminelles peuvent être très coûteuses et s'étirer dans certains cas sur plusieurs années. Par ailleurs, la grande majorité des infractions aux diverses lois fédérales sur le transport ne sont pas de nature criminelle. Il y a une grande différence entre une infraction mineure et la sanction pénale qui peut être imposée. Pour ces deux raisons, on a de plus en plus tendance à décriminaliser les lois fédérales sur les transports et à avoir recours à des mesures d'application de nature administrative plutôt que de recourir aux tribunaux criminels, sauf pour les infractions les plus graves.

Les mesures administratives que peut prendre le ministère se présentent sous diverses formes: mesures concernant la délivrance des licences; conclusion de transactions de conformité; imposition d'amendes pécuniaires; et émission d'ordres liés à la sécurité ferroviaire.

En revanche, cette nécessité de fournir au ministère une diversité de pouvoirs administratifs entraîne aussi la nécessité de fournir aux personnes et aux entreprises assujetties à une de ces mesures administratives un recours à un organisme indépendant qui peut réviser l'usage que fait Transports Canada de ses pouvoirs d'application. Dans le secteur de l'aviation, on peut recourir au Tribunal de l'aviation civile. Aucun tribunal de la sorte n'existe pour les secteurs maritime ou ferroviaire. Les processus de révision, là où ils existent en vertu des lois maritimes et ferroviaires, sont habituellement internes au ministère.

Le but du projet de loi C-34 et de la création du Tribunal d'appel des transports du Canada est de fournir aux secteurs maritime et ferroviaire les mêmes droits de recours efficaces concernant les décisions de nature administrative que ceux qui sont actuellement offerts au secteur de l'aviation par le Tribunal de l'aviation civile.

Depuis plus de 15 ans, le Tribunal de l'aviation civile dessert admirablement l'industrie aéronautique et le ministère. Le Tribunal de l'aviation civile est une petite organisation mais elle est efficace. Au cours d'une année typique, le Tribunal de l'aviation civile tient environ 100 audiences et en entend quelque 100 autres qui se règlent sans passer par le processus complet d'audience. Il n'est constitué que de deux conseillers à temps complet — le président et le vice-président — et de 24 conseillers à temps partiel qui vont entendre des causes dans diverses régions du pays.

La constitution de ce nouveau tribunal amélioré implique la transformation de l'actuel Tribunal de l'aviation civile en un tribunal de transport multimodal. Ce nouveau tribunal fonctionnerait suivant les mêmes principes qui ont assuré le succès du Tribunal de l'aviation civile: expertise, équité, informel, peu coûteux, accessible et abordable. Comme le tribunal serait un organisme administratif plutôt qu'un tribunal criminel, il ne serait pas assujetti à certains coûts, restrictions et considérations qui s'appliquent aux causes criminelles.

Il y aurait deux niveaux d'audiences devant le tribunal. Le premier serait une audience en révision entendue par un seul conseiller du tribunal. Après avoir entendu les deux parties et tenu compte de toutes les preuves présentées, le conseiller rendrait sa décision par écrit. Une partie non satisfaite de la décision rendue par le conseiller pourrait en appeler devant un comité d'appel du tribunal, généralement formé de trois conseillers. Évidemment, le conseiller qui a rendu la décision ne pourrait pas siéger au comité d'appel. La décision d'appel serait finale.

Un élément clé du succès de ce tribunal serait l'expertise des conseillers qui entendent les causes. Les conseillers du nouveau tribunal devraient posséder une expertise pertinente dans le domaine du transport. Cela signifie, par exemple, qu'une audience en révision portant sur une question maritime serait entendue par un conseiller possédant une expérience du domaine maritime. Lorsque le tribunal entendrait une cause portant sur des questions médicales, c'est un conseiller ayant une expertise dans le domaine médical qui entendrait l'affaire, peu importe le secteur du transport. Les types de mesures prises par le ministère pourraient être révisés par le tribunal, et les pouvoirs décisionnels de ce dernier sont établis par les voies de modifications proposées à six lois sur le transport: la Loi sur l'aéronautique, la Loi sur la sûreté du transport maritime, la Loi sur les transports du Canada, la Loi sur la marine marchande du Canada, la Loi sur la sécurité ferroviaire et le projet de loi C-14, Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada.

Les pouvoirs du tribunal dépendraient de la nature de la décision administrative faisant l'objet de la révision. Lorsque la mesure d'application est essentiellement de nature punitive, le tribunal pourrait substituer sa décision à celle du ministère. On peut penser, par exemple, à la révision d'une sanction administrative pécuniaire par le tribunal.

Toutefois, lorsque la mesure d'application touche davantage les compétences, les qualifications requises pour détenir une licence, l'intérêt public ou d'autres considérations de sécurité, le tribunal n'aurait généralement que le pouvoir de confirmer la décision du ministère ou de lui renvoyer l'affaire pour réexamen.

(1420)

Le projet de loi ne vise pas à diluer les responsabilités fondamentales en matière de sûreté et de sécurité conférées au ministre des Transports en vertu des diverses lois.

En terminant, honorables sénateurs, je crois que la constitution de ce tribunal contribuerait grandement à la réforme législative dans le secteur des transports. Je suis aussi convaincu que le Tribunal d'appel des transports du Canada pourrait offrir un droit de révision efficient et efficace aux secteurs maritime, ferroviaire et aérien et qu'il pourrait bénéficier des mêmes niveaux élevés d'appui actuellement accordés au Tribunal de l'aviation civile.

J'invite les honorables sénateurs à examiner ce projet de loi, et j'ai bon espoir que vous trouverez, vous aussi, qu'il s'agit d'une approche raisonnable et pratique qui mérite votre appui.

(Sur la motion du sénateur Eyton, le débat est ajourné.)

LA LOI SUR L'EXPANSION DES EXPORTATIONS

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Raymond C. Setlakwe propose: Que le projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi sur l'expansion des exportations et d'autres lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, mon expérience à titre d'administrateur de la Société pour l'expansion des exportations m'a fait réaliser jusqu'à quel point ce joyau du gouvernement canadien est bien administré, grâce à son excellente équipe de gestion.

[Traduction]

Le projet de loi C-31 est le résultat d'un examen législatif dont le mandat remonte à 1993. Cette année-là, un certain nombre de modifications avaient été apportées à la Loi sur l'expansion des exportations. Ces modifications avaient pour but de permettre à la Société pour l'expansion des exportations de mieux servir les exportateurs canadiens. Comme notre commerce se développait rapidement, il fallait rationaliser certains aspects des opérations de la SEE.

Un examen des délibérations qui ont entouré les modifications de 1993 vous montrerait, honorables sénateurs, qu'on s'entendait en général sur le fait que la SEE constitue un élément clé du soutien canadien au commerce international. L'expansion des pouvoirs de la Société en 1993 avait l'appui de tous les partis.

Je n'ai pas à rappeler aux sénateurs l'importance des exportations pour notre prospérité nationale. Quelque 43 p. 100 de notre PIB et un emploi sur quatre au Canada dépendent directement de nos exportations. À l'heure actuelle, la SEE appuie environ 10 p. 100 de ce commerce. C'est là un rôle remarquable pour une seule entreprise, qui témoigne de son importance pour le Canada.

Depuis l'entrée en vigueur des modifications de 1993, le chiffre d'affaires de la SEE a presque quadruplé, dépassant les 45 milliards de dollars l'année dernière. Il est clair que les modifications de 1993 ont porté fruit même si, à l'époque, ils avaient été jugés audacieux. Cela étant, le Parlement avait alors décidé que la performance future de la Société devait être soigneusement suivie. À cette fin, il avait imposé un examen approfondi du mandat et des activités de la SEE après cinq ans.

Cet examen a commencé comme prévu en 1998 et a fait l'objet d'audiences du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre de communes ainsi que du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Ce dernier a publié un rapport intitulé La Loi sur l'expansion des exportations en mars 2000.

Ne voulant pas recommencer le travail déjà accompli par le comité de la Chambre des communes, notre Comité des banques a concentré son attention sur une question qu'il jugeait essentielle: la participation insuffisante du secteur privé au financement à moyen terme des exportateurs canadiens. Le comité a donc invité le gouvernement à établir des services de garantie gouvernementaux pouvant appuyer une plus grande participation du secteur privé au financement du commerce.

Avant de passer aux éléments de fond du projet de loi, je voudrais signaler certains points de l'examen législatif lui-même. Premièrement, le mandat était extrêmement vaste. Il s'étendait à tous les aspects des opérations et du mandat de la SEE: de quelle façon fonctionnent les programmes actuels, quel est le point de vue des clients, quel est celui des exportateurs qui n'ont pas recours aux services de la SEE?

Deuxièmement, l'examen a porté sur le monde en évolution rapide du commerce international et sur les défis que doivent relever les exportateurs canadiens lorsqu'ils livrent concurrence aux entreprises mondiales. Est-il possible de réviser les programmes actuels pour mieux les adapter à ces besoins? Y a-t-il dans le système financier canadien des capacités inexploitées que la SEE pourrait mettre au service des exportateurs?

Troisièmement, on a beaucoup insisté sur des questions non commerciales, comme l'environnement et les droits de la personne. La SEE défend-elle les valeurs traditionnelles canadiennes? Quels effets ont les activités commerciales du Canada sur le développement économique et social des autres pays?

Enfin, l'examen comportait également d'importantes consultations publiques. Si vous jetez un coup d'oeil à la liste des témoins et des mémoires présentés au cours de l'examen, vous constaterez, honorables sénateurs, qu'une foule de personnes, de sociétés et d'organisations ont exprimé leur point de vue. Il y a également eu d'autres consultations sur des questions confidentielles. L'examen a été mené à grand renfort de publicité.

Cela n'a pas toujours facilité les décisions. La gamme des opinions exprimées sur les différentes questions est extrêmement étendue. La plupart de ces opinions sont valables en soi, mais sont difficiles à concilier. Nous avons veillé à ce que tout le monde soit entendu et à ce que nous soyons bien renseignés sur la position des Canadiens.

[Français]

Un fort consensus s'est dégagé autour de certains points. J'ai déjà souligné combien le bien-être économique du Canada dépendait du commerce international. L'examen a fait ressortir la contribution décisive de la SEE à ce chapitre. La SEE est un organisme bien géré, hautement apprécié par ses clients et respecté par ses concurrents. La SEE conçoit des programmes novateurs et elle contribue beaucoup au dialogue multilatéral sur les questions commerciales. Quelle que soit la nature des modifications proposées, il est important de préserver la marge de manoeuvre dont dispose la SEE pour offrir ses services, et de protéger les programmes qui fonctionnent bien.

Parallèlement à tout cela, on s'entendait toutefois sur le fait que la SEE pouvait en faire davantage pour assurer le respect des valeurs auxquelles les Canadiens s'attendent de la part d'un organisme gouvernemental. C'est notamment le cas pour les questions relatives à l'environnement et aux droits de la personne. La SEE est effectivement l'émissaire du Canada à bien des égards et tous les Canadiens ont un grand intérêt dans tout cela.

Par conséquent, on nous a dit que la SEE devait répondre à des normes environnementales et sociales raisonnables dans le cadre de ses activités. Pour ce faire, son cadre d'évaluation environnementale devait être fortement ancré dans la loi.

En vue de promouvoir une transparence et une rigueur accrues au sein de ce cadre, le vérificateur général pourrait être chargé de surveiller son fonctionnement de manière régulière et transparente. On s'est dit satisfait de ce que la SEE se soit dotée, en matière de divulgation des renseignements, d'une politique allant dans le sens des recommandations du rapport Gowlings, mais on a recommandé de soumettre cette question à des consultations publiques et à un examen indépendant. Nous avons, par ailleurs, endossé la proposition visant à ce que la SEE envisage de créer un poste d'ombudsman pour administrer la politique.

Enfin, on a recommandé que la Loi sur l'expansion des exportations soit modifiée afin d'enjoindre la SEE de tenir compte des engagements et des obligations contractés par le Canada dans ses accords internationaux, notamment au chapitre des droits de la personne et des normes du travail.

Bien entendu, la SEE et les institutions financières internationales ne sont pas les seules à faire face à ces défis. De plus en plus, ces enjeux concernent n'importe quelle entreprise faisant des affaires à une certaine échelle. Nous assistons d'ailleurs à l'adoption de mesures très ciblées, tant du côté des entreprises individuelles que de celui des organes multilatéraux tels que l'Organisation de coopération et de développement économiques, où l'on est en train d'élaborer des codes d'éthique commerciale.

Il n'existe aucun exemple simple à suivre pour entreprendre ces initiatives. Ces nouveaux systèmes auront une incidence sur les coûts, sur les attentes des clients et sur les normes admises pour faire des affaires. Ce genre d'initiative requiert du temps, des ressources et un véritable engagement. Le gouvernement estime que nos sociétés d'État disposent des moyens nécessaires et qu'elles ont le devoir de prendre les devants dans ce domaine. Toutefois, l'importance et la complexité des intérêts en jeu nécessitent que l'on procède avec prudence.

[Traduction]

Je voudrais maintenant passer au projet de loi C-31 pour décrire les modifications proposées de la Loi sur l'expansion des exportations et vous expliquer de quelle façon elles répondent aux préoccupations exprimées au cours de l'examen législatif.

(1430)

La SEE dispense des services à quelque 6 000 exportateurs canadiens chaque année. Elle espère continuer à élargir sa clientèle. Pour le faire, il faut que les petites et moyennes entreprises aient un meilleur accès à ses services. Une partie du travail à cet égard consiste tout simplement à faire plus de publicité. Certains d'entre vous auront probablement remarqué les récentes annonces télévisées de la SEE. Tant ici qu'à l'étranger, la SEE est connue par son sigle anglais EDC. Le projet de loi propose par conséquent de rebaptiser la SEE Exportation et développement Canada en français, et Export Development Canada en anglais. Cela permettra d'utiliser le sigle bien connu EDC dans les deux langues officielles. Cela renforcera aussi ses liens avec les institutions du Canada et facilitera ses efforts de marketing, notamment auprès des petits exportateurs, partout dans le pays.

D'une façon assez subtile, cette modification répond à un important objectif que nous pourrons tous appuyer, je l'espère. Le projet de loi C-31 comporte en outre deux modifications à caractère technique des pouvoirs du conseil d'administration. La première permet au conseil de déléguer des pouvoirs à des sous-comités composés d'administrateurs spécialisés dans certains domaines. C'est là une pratique d'affaires moderne qui permet aux conseils d'administration de charger des experts de certaines questions, sans pour autant leur enlever la responsabilité ultime des décisions finales à prendre sur ces questions.

La seconde modification technique autorisera le conseil d'administration de la SEE à édicter des règlements pour administrer un régime de pension récemment établi. Le régime est entré en vigueur en avril 2000. Il n'a été créé qu'après l'obtention de toutes les autorisations nécessaires et est conforme à la politique du Conseil du Trésor selon laquelle les sociétés d'État devraient établir des régimes de pension indépendants de celui de l'administration fédérale.

[Français]

Je passe maintenant aux modifications qui susciteront le plus d'intérêt de votre part. En résumé, le projet de loi C-31 permettrait d'imposer une exigence juridique à la SEE, l'obligeant à procéder à un examen environnemental des projets qui font l'objet d'une demande d'aide de sa part. La SEE le fait déjà, mais cette modification donnera force de loi à cette obligation. Une modification connexe exigerait du vérificateur général qu'il effectue des examens réguliers du cadre d'évaluation environnemental de la SEE. Ces examens porteraient aussi bien sur la conception du cadre que sur la manière dont il est appliqué par la SEE. Il s'agirait d'examens quinquennaux qui feraient l'objet d'un rapport au Parlement.

[Traduction]

Selon les critiques du projet de loi C-31, la SEE devrait être réglementée en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Ce point de vue a été exprimé à maintes reprises au cours de l'examen législatif, mais ni Gowlings ni les comités parlementaires n'ont retenu cette suggestion. En fait, Gowlings a même écrit qu'il ne serait pas pratique d'imposer à la SEE des exigences précises par voie de législation. Le consultant a plutôt recommandé une solution semblable à celle retenue pour l'agence américaine de crédit à l'exportation, l'Ex-Im Bank.

La loi qui régit l'Ex-Im Bank comporte des dispositions environnementales depuis près de 10 ans. Les pratiques appliquées par l'Ex-Im Bank sont souvent citées en modèle par les autres agences du domaine. Dans son cas, la loi lui impose d'effectuer des examens environnementaux, mais son conseil d'administration est tenu de formuler des lignes directrices et des procédures particulières, en consultation avec les parties prenantes.

Après avoir analysé plusieurs modèles, c'est précisément celui qui sera appliqué dans le cas du projet de loi C-31. Il consistera à imposer un mandat général sur le plan environnemental à la SEE tout en laissant le soin à son conseil d'administration de décider de la façon de passer aux actes. C'est, par ailleurs, l'approche que le comité de la Chambre a approuvée, moyennant quelques améliorations.

[Français]

La SEE a récemment achevé des consultations publiques sur la révision de son cadre d'examen environnemental. Elle s'est inspirée à la fois des recommandations du vérificateur général et des directives du gouvernement pour mener à bien ses consultations. La SEE a sollicité l'avis du secteur privé et des ONG, et en a tenu compte. Par ailleurs, elle a retenu les services d'un éminent expert-conseil en environnement pour qu'il l'aide au cours des consultations et qu'il prépare des recommandations détaillées sur la révision de son cadre. Aucun autre organisme de crédit à l'exportation n'avait, jusqu'ici, soumis ses procédures environnementales à un examen aussi méticuleux et approfondi.

La possibilité de soumettre la SEE à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale a fait l'objet d'une analyse poussée avant que l'on choisisse la voie actuelle. Pour prendre sa décision, le gouvernement s'est servi de critères tels que la garantie de projets écologiquement viables, la protection de la compétitivité canadienne, le respect de la souveraineté des gouvernements étrangers et la création d'une marge de manoeuvre suffisante pour évoluer au sein d'un environnement international diversifié, complexe et en mutation rapide.

La démarche que nous avons choisie est conforme aux nouvelles pratiques de la communauté internationale et à nos travaux sur la question au sein de l'OCDE. Cela nous permettra de soumettre les projets à un processus uniforme et de nous adapter aux changements rapides en matière de concurrence et de progrès techniques. En vue de garantir le caractère adéquat des normes et procédures de la SEE, le vérificateur général continuera d'en surveiller la conception et le fonctionnement. Il existe une question pour laquelle une recommandation a été suivie en principe, mais non par le biais de moyens législatifs. Il a été recommandé que le mandat de la SEE comporte une exigence générale, de manière à accorder une importance toute spéciale aux avantages pour le Canada et aux engagements internationaux contractés par le Canada, notamment aux chapitres des droits de la personne et des normes fondamentales de travail.

[Traduction]

La SEE a pour mandat de promouvoir les exportations canadiennes et de stimuler la prospérité collective. De plus, en sa qualité de mandataire de l'État, elle est déjà tenue de respecter les engagements internationaux du Canada. Cependant, il a été établi qu'un mandat général de ce genre, conféré par une loi, augmenterait considérablement les risques juridiques pour la SEE sans pour autant préciser les exigences auxquelles elle devrait se conformer dans telle ou telle situation.

Contrairement à un mandat environnemental, il n'existe pas de cadre préétabli permettant d'ancrer ce genre d'obligation dans un ensemble de mesures opérationnelles concrètes. Cependant, le gouvernement prend acte des préoccupations sérieuses qui sont à la base de cette recommandation et il est déterminé à faire en sorte que la SEE prenne ses décisions en fonction des retombées économiques et de nos obligations internationales. Le gouvernement a décidé de s'attaquer à ce problème par le truchement de deux mécanismes liés entre eux.

Tout d'abord, la SEE devra, en vertu de son plan d'entreprise, tenir compte des avantages économiques pour le Canada et des engagements internationaux que nous avons contractés dans les domaines des droits de la personne et des normes fondamentales du travail. La loi qui régit les sociétés d'État, la Loi sur la gestion des finances publiques, exige que celles-ci préparent un plan d'activité annuel. Ce plan doit énoncer les activités commerciales et autres, et en délimiter la portée. Il est approuvé par les ministres et il est déposé au Parlement, sous forme de résumé, après quoi la société d'État ne peut agir que dans le respect des paramètres du plan. En outre, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international collabore avec la SEE pour affiner les mécanismes d'échanges continus d'information sur la question des droits de la personne et sur certains pays. Tout cela concerne autant les activités générales ou sectorielles que les projets individuels.

Le Comité des banques a recommandé l'adoption d'un programme de garantie, mais aucun changement législatif n'est proposé pour l'instant. Néanmoins, conformément à la recommandation du comité, les fonctionnaires ont discuté de cette possibilité avec les banques canadiennes et étrangères, de même qu'avec des experts en commerce international. Nous proposerons peut-être certaines mesures qui seraient susceptibles de combler l'écart de capacité mis au jour par le comité, mais cela devra se faire de façon à ne pas perturber les programmes actuels de la SEE. Il y a lieu, bien sûr, de se préoccuper du coût du programme de garantie, qui pourrait être très élevé.

[Français]

En présentant le projet de loi C-31 au Parlement, le ministre du Commerce international a adopté une démarche équilibrée au chapitre de la réforme stratégique au sein de la SEE. D'un côté, ce projet de loi conférerait une importante responsabilité à la SEE pour ce qui est de l'élaboration de politiques environnementales et sociales crédibles et efficaces. De l'autre, ces politiques seraient soumises à la surveillance du gouvernement et à l'obligation de rendre des comptes, par le biais de consultations publiques régulières et du Bureau du vérificateur général.

Des voix: Bravo!

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Angus, le débat est ajourné.)

[Traduction]

PROJET DE LOI DE 2001 MODIFIANT LE DROIT CRIMINEL

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Landon Pearson propose: Que le projet de loi C-15A, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je souhaite lancer le débat sur la deuxième lecture du projet de loi C-15A, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois.

(1440)

J'ai demandé à parrainer ce projet de loi parce qu'il renferme plusieurs articles concernant l'exploitation sexuelle des enfants, phénomène déplorable et inhumain qui me préoccupe au plus haut point depuis plusieurs années. Ce projet de loi va créer plusieurs infractions touchant à la pornographie juvenile sur Internet et aux activités visant à attirer les enfants. Il facilitera aussi la poursuite de ressortissants canadiens qui vont à l'étranger pour y exploiter des enfants.

Outre que cette mesure va permettre de s'attaquer aux crimes graves commis contre les enfants, les modifications proposées dans le projet de loi de 2001 modifiant le droit criminel apportent une réponse aux préoccupations que nous entretenons à propos des membres les plus vulnérables de la société. Ces modifications apportent une protection supplémentaire pour les services policiers, améliorent le processus d'examen des allégations de condamnation injustifiées et permettent d'améliorer les procédures du système de justice pénale.

Prenons d'abord les modifications destinées à protéger les enfants contre cette forme d'exploitation. Dans le discours du Trône prononcé au lendemain de la dernière élection, le gouvernement du Canada a réaffirmé sa détermination à protéger les enfants contre les criminels qui agissent par le biais d'Internet, en à les mettant à l'abri de ceux qui veulent exploiter leur vulnérabilité.

Les dispositions du projet de loi C-15A relatives à la protection des enfants sont la concrétisation de cet engagement. Elles donnent suite au consensus auquel sont parvenus les ministres responsables de la Justice, lors de leur dernière rencontre fédérale-provinciale-territoriale, relativement à la création d'une infraction, celle de prédation sur Internet.

Quand je me suis émue pour la première fois de l'exploitation des enfants par des individus dépravés, qui ne cherchent qu'à assouvir leurs plus bas instincts, Internet n'existait pas encore. Aujourd'hui, il s'étend à une vitesse phénoménale. Si je me réjouis du rôle très important que joue Internet sur les plans de la communication et de la recherche, je déplore qu'il ait été corrompu par des prédateurs, et je ne suis pas la seule dans ce cas. La majorité des Canadiens aimeraient empêcher que des personnes — réfugiées dans l'anonymat, la sécurité et le secret de leurs foyers — utilisent Internet pour attirer des enfants et les exploiter ensuite sexuellement.

La nouvelle infraction en question vise à infléchir un phénomène qui, selon la police et les médias, est en pleine progression. Elle permettra de criminaliser l'utilisation d'un système informatique en vue de faciliter la commission d'une infraction sexuelle contre un enfant ou l'enlèvement d'un enfant.

Comme nous avons ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, nous définissons habituellement les enfants au Canada comme étant des êtres humains de moins de 18 ans. Cependant, l'âge du consentement pour des activités sexuelles à caractère non criminel est actuellement de 14 ans et l'on craint que, si l'on n'augmentait pas cette limite, la nouvelle infraction en question ne permettrait pas de protéger tous les enfants.

Je n'ai pas d'idée tout à fait arrêtée à ce sujet. Je suis cependant heureuse de remarquer que la ministre de la Justice s'est engagée à étudier cet enjeu dans le cadre d'un examen et de consultations plus vastes sur la nécessité de réformes du droit et de la politique en matière pénale relativement à la définition d'infractions précises contre des enfants, à l'âge de consentement à l'activité sexuelle, au témoignage d'enfant et à la détermination de la peine. La ministre a indiqué qu'elle attendait d'ici la fin de l'année un rapport final sur les résultats de cet examen et de ces consultations et qu'elle discutera par la suite des options envisagées pour de plus amples réformes avec ses homologues fédéraux, provinciaux et territoriaux.

Nous voulons également nous assurer que ceux qui regardent ou transmettent de la pornographie juvénile n'esquiveront pas leur responsabilité criminelle au moyen des nouvelles technologies. Nous élargirons la portée des infractions actuelles visant la pornographie juvénile afin de bien établir que des actes qui constituent une infraction lorsqu'ils sont commis avec des moyens traditionnels sont toujours des infractions lorsqu'ils sont commis avec des moyens électroniques.

Par conséquent, nous créerons dans ce projet de loi quatre nouvelles infractions en plus de la nouvelle infraction de séduction par la ruse: une infraction de transmission de pornographie juvénile pour la distribution personnelle de ce genre de matériel, telle qu'un courriel adressé à une seule personne; une infraction relative au fait de donner accès à de la pornographie juvénile, visant les personnes qui affichent de la pornographie juvénile sur un site Web accessible au public mais qui ne prennent pas d'autres mesures pour la distribuer; une infraction d'exportation de la pornographie juvénile, pour nous acquitter de nos obligations internationales; et une infraction d'accès à de la pornographie juvénile pour capturer ceux qui regardent sciemment de la pornographie juvénile sur Internet mais où la notion juridique de possession risque de présenter des problèmes. L'infraction est définie de sorte qu'une visualisation par inadvertance ne sera pas englobée dans la définition de cette infraction.

[Français]

Nous avons aussi élargi la portée de l'infraction de possession de pornographie juvénile en vue de la distribuer et de la vendre en y ajoutant en vue de la transmettre, de la rendre accessible et de l'exporter.

[Traduction]

En créant ces nouvelles infractions, le gouvernement examine avec soin comment cela pourrait toucher l'industrie qui a fait du Canada le pays le plus branché du monde. Nous reconnaissons que les fournisseurs de services Internet ne peuvent pas surveiller tout ce qui passe par leurs réseaux informatiques. Je vous assure que ce projet de loi ne les y obligera pas. Toutes ces infractions à l'aide d'Internet pour exploiter les enfants — les infractions proposées et celles qui existent déjà — sont des infractions caractérisées par une intention criminelle. Elles ne peuvent pas être commises par un fournisseur de services Internet ou toute autre personne qui ne commettent pas sciemment l'infraction.

[Français]

Le projet de loi accorderait au tribunal le pouvoir d'ordonner la suppression de la pornographie juvénile sur Internet et il renferme des dispositions qui permettraient la confiscation des instruments appartenant à la personne trouvée coupable d'une infraction de pornographie juvénile, qui ont été utilisés pour commettre cette infraction.

[Traduction]

Toutes les infractions de pornographie juvénile et la nouvelle infraction de séduction par ruse seraient ajoutées à la liste des infractions pour lesquelles un juge serait autorisé à infliger une ordonnance d'interdiction ou d'obligation de ne pas troubler l'ordre public, ou à déclarer une personne comme contrevenant à long terme. Le juge qui rend une ordonnance d'interdiction ou d'obligation de ne pas troubler l'ordre public serait également autorisé à imposer en condition que la personne ne se serve pas d'Internet pour communiquer avec un enfant.

Dans ce projet de loi, un autre élément qui n'est pas relié à Internet contribuera également à protéger les enfants. En effet, le projet de loi C-15A propose une modification aux dispositions visant le tourisme du sexe juvénile du Code criminel afin de faciliter la poursuite en justice des Canadiens qui commettent des infractions de nature sexuelle contre un enfant à l'étranger. Ces dispositions permettent aux tribunaux canadiens d'avoir juridiction sur les ressortissants canadiens qui ont commis des infractions de nature sexuelle contre des enfants à l'étranger.

Sous le régime de la loi actuelle, et avec le consentement du procureur général, les infractions de prostitution enfantine peuvent faire l'objet de poursuites en justice sans demande spécifique du pays étranger dans lequel l'infraction a été commise, mais les Canadiens qui ont, par exemple, agressé sexuellement des enfants canadiens ou autres ne peuvent être poursuivis au Canada que si une telle demande a été reçue. Le projet de loi C-15A propose de simplifier ce processus en éliminant les exigences procédurales de demande officielle d'un pays étranger, ce qui permettrait d'entamer plus rapidement des poursuites au Canada.

Les honorables sénateurs se rappellent sans doute que dans le projet de loi C-40, concernant l'extradition et la Loi sur la preuve au Canada, il y avait des mesures visant à faciliter l'admissibilité du témoignage des enfants d'un pays étranger en cas d'utilité.

Je voudrais aborder maintenant d'autres mesures proposées en vue d'améliorer la protection des Canadiens vulnérables. Le projet de loi C-15A propose de faire passer la peine maximale pour harcèlement criminel de cinq à dix ans par voie de mise en accusation. Même si n'importe qui peut être victime de harcèlement criminel, selon les statistiques canadiennes, les victimes sont souvent des femmes et les contrevenants, des hommes. C'est d'ailleurs un facteur prédominant de la violence faite aux femmes — souvent de la violence domestique contre les femmes. C'est un problème familier pour nombre d'honorables sénateurs. Je voudrais en particulier rendre hommage à cet égard au sénateur Oliver qui, dans la législature précédente, a déposé un projet de loi d'initiative parlementaire à ce sujet.

Le projet de loi S-17 a un objectif commun avec le projet de loi C-15A. Ces deux projets de loi cherchent en effet à renforcer la réponse du système de justice pénale à ce genre de comportement criminel.

[Français]

En faisant passer de cinq à dix ans la peine maximale pour le harcèlement criminel, nous enverrons un message très clair à d'éventuels harceleurs criminels. Le harcèlement criminel est une infraction grave qui entraîne des conséquences sérieuses.

[Traduction]

L'objectif du projet de loi C-15A visant à diminuer le harcèlement criminel est appuyé par une mesure complémentaire de la ministre de la Justice et de ses homologues provinciaux et territoriaux. Je veux parler de l'élaboration et de la publication d'un train de lignes directrices détaillées et pratiques à l'intention des corps de police, des procureurs et d'autres employés du système de justice pénale concernant tous les aspects d'une affaire de harcèlement criminel, y compris la sécurité des victimes. Ces lignes directrices ont été publiées en décembre 1999 et ont été largement distribuées dans tout le pays.

(1450)

Pour en venir maintenant au problème des invasions de domicile, les honorables sénateurs savent peut-être que ce phénomène a pris de plus en plus d'importance dans la presse et dans l'esprit du public. Le terme «invasion de domicile» sert en général pour décrire un vol ou une introduction par effraction dans une résidence privée au cours de laquelle l'agresseur entre par la force alors que les occupants sont chez eux, et qu'il recourt à la violence contre eux ou menace de le faire. Les infractions au Code criminel les plus souvent citées dans les cas d'invasion de domicile sont le vol et l'entrée par effraction dans une maison, qui sont toutes deux passibles d'une peine maximale d'emprisonnement à vie. Si le nombre, en termes statistiques, d'invasions de domicile est encore faible, ces infractions ont des effets importants sur les victimes et amènent de nombreuses personnes à ne pas se sentir en sécurité dans leur propre maison.

La modification proposée au Code criminel ferait que, dans les cas où le contrevenant aurait commis une infraction comportant un élément qui en fait une invasion de domicile, le tribunal serait tenu de retenir cet élément de l'infraction comme une circonstance aggravante lors de la détermination de la peine. Une telle modification donnerait des directives précises aux tribunaux et traduirait l'opinion du Parlement voulant que les invasions de domicile sont une forme grave d'actes criminels dont il faut tenir compte comme il convient lors de la détermination de la peine. Cette modification reconnaît également que les invasions de domicile ont un effet dévastateur sur les victimes et que la sécurité des Canadiens à leur domicile doit être protégée.

Certains critiques ont demandé qu'on retienne une approche différente face à ce comportement grave. Ils ont demandé qu'on crée une infraction distincte pour les invasions de domicile. Toutefois, ce type de comportement est déjà couvert par les infractions déjà prévues dans le Code criminel et les juges ont déjà tendance à prononcer une sentence plus sévère dans le cas des invasions de domicile, la gamme des sentences commençant en général à huit ans d'emprisonnement. La nécessité de créer une infraction distincte n'est pas évidente. La disposition visant la circonstance aggravante prévue dans le projet de loi C-15A constitue une solution équilibrée et raisonnable au problème des invasions de domicile.

J'aimerais maintenant aborder une autre mesure importante du projet de loi C-15A. C'est la nouvelle infraction visant le désarmement ou la tentative de désarmement d'un agent de la paix. Le projet de loi C-15A crée pour la première fois dans notre Code criminel une nouvelle infraction distincte pour punir un tel acte commis contre un agent de la paix dans l'exercice de ses fonctions. La peine maximale prévue est de cinq ans d'emprisonnement.

Cette peine correspond bien à la gravité de l'infraction et envoie un message clair selon lequel la société ne tolérera pas qu'on prenne l'arme d'un agent de police.

[Français]

Le gouvernement désire souligner la participation de l'Association canadienne des policiers à l'élaboration de cette mesure. L'Association a signalé que le fait de désarmer un agent de la paix était l'une de ses trois priorités dans le cadre de la réforme de la loi. Nous la félicitons d'avoir attiré notre attention sur cette question et nous félicitons le gouvernement du Canada d'y avoir répondu au moyen de cette modification.

[Traduction]

Nous demandons aux agents de police d'agir dans de nombreuses situations qui peuvent se révéler très volatiles. En enquêtant sur des incidents qui peuvent paraître banals, l'agent peut fort bien ne pas connaître tous les détails de la situation. Il n'est pas toujours évident au premier abord que le suspect peut être violent. Si quelqu'un prend l'arme ou la matraque d'un agent, une enquête relativement classique peut tourner mal tout d'un coup, jusqu'à devenir mortelle. Il y a des exemples d'agents de police appelés à intervenir à l'occasion de bagarres dans des bars, qui se font maîtriser ou qui sont agressés par plusieurs assaillants qui veulent voler leur arme. Des suspects en état d'ébriété peuvent saisir l'arme pour tenter de résister à la police alors qu'ils sont transportés dans la voiture de patrouille ou lorsqu'on tente de les immobiliser. D'autres suspects font tout pour s'échapper, allant jusqu'à retourner l'arme contre l'officier qui les arrêtait. On peut espérer que la création d'une infraction spécifique dans le Code criminel amènerait les suspects à réfléchir à deux fois avant d'essayer de s'emparer de l'arme d'un agent procédant à une enquête.

Le projet de loi C-15A contient des améliorations marquées à la procédure actuelle pour revoir les erreurs judiciaires. Les modifications qui sont proposées au processus d'examen de la condamnation après l'appel rendront ce processus plus efficace, plus ouvert et plus responsable. Elles sont destinées à tenir compte des préoccupations de ceux qui critiquent l'article 690 actuel, qui traite des modalités de révision des condamnations.

L'efficacité et l'intégrité du système pénal dépendent de sa capacité à protéger les innocents, tout en punissant les coupables. Toutefois, les affaires Donald Marshall et David Milgaard ont bien montré que, malgré toutes les précautions que prend le système judiciaire pour éviter la condamnation d'un innocent, il peut malheureusement y avoir des erreurs judiciaires fort regrettables.

[Français]

Ce système de révision des demandes de clémence au Canada est réservé aux personnes qui croient avoir été victimes d'une erreur judiciaire et qui ont épuisé tous les recours judiciaires à leur disposition. Les demandes de clémence sont adressées au ministre de la Justice du Canada qui détermine, à partir de nouveaux renseignements qui n'étaient pas disponibles au moment du procès ou de l'appel, s'il convient d'ordonner un nouveau procès. Le processus de révision est le dernier filet de sécurité pour les victimes d'une erreur judiciaire. Grâce à lui, les dossiers ayant pu faire l'objet d'une telle erreur sont remis au système judiciaire.

[Traduction]

Cependant, nombreux sont ceux qui critiquent le système actuel. Ils demandent depuis de nombreuses années de modifier les modalités de révision des condamnations dans les cas d'erreurs judiciaires présumées. En octobre 1998, la ministre de la Justice a publié un document de consultation publique demandant qu'on lui fasse parvenir des observations sur la façon dont notre système d'examen des condamnations pourrait être amélioré. La ministre cherchait une solution juste et efficace qui servirait au mieux les intérêts du public canadien et de notre système de justice.

Certains critiques ont prétendu que le Canada a besoin d'un organisme indépendant, comparable à la Commission de révision des procès criminels qui a été créée en 1997 en Grande-Bretagne, pour analyser les cas d'erreurs judiciaires présumées. Toutefois, à la fin d'un long processus de consultation, la ministre de la Justice a rejeté la solution d'un organisme indépendant et a conclu que le pouvoir ultime de décision en matière de révision des condamnations devrait continuer d'appartenir au ministère fédéral de la Justice, parce que le rôle du ministre fédéral de la Justice est parfaitement adapté pour assurer un contrôle efficace et renvoyer aux tribunaux les cas qui le justifient. Le ministre fédéral de la Justice est responsable devant le Parlement et la population canadienne. Cette approche reconnaît et maintient la compétence traditionnelle des tribunaux, tout en permettant de disposer d'un recours juste dans les cas exceptionnels où les tribunaux se sont trompés.

La consultation a également révélé que, dans son état actuel, le processus de révision des condamnations n'est pas une solution souhaitable et qu'il y a lieu d'améliorer le système en place.

L'un des principaux reproches que l'on adresse à l'actuel processus de révision des condamnations en vigueur au Canada est la longueur des délais nécessaires pour procéder à l'examen d'une demande de révision. Les modifications proposées dans le projet de loi visent à régler le problème en conférant de nouveaux pouvoirs d'enquête aux personnes chargées d'enquêter pour le compte du ministre de la Justice. Cela permettra enfin aux enquêteurs d'obliger les témoins à témoigner, et d'exiger la production des documents voulus. De tels pouvoirs rendront le processus de révision plus complet et plus efficace et permettront de le mener à bien en temps opportun.

Pour accroître la transparence du processus d'examen des condamnations, les ministres de la Justice seront désormais tenus de déposer au Parlement un rapport annuel sur les demandes de révision des condamnations.

Dans l'état actuel des choses, le Code criminel limite la révision des condamnations aux personnes ayant été inculpées pour des infractions parmi les plus graves, mais comme les erreurs judiciaires sont déplorables et qu'elles menacent la confiance qu'inspire le système de justice, le projet de loi C-15A propose d'étendre le processus de révision des condamnations à l'ensemble des condamnations fédérales.

La ministre de la Justice compte également apporter des changements administratifs dans le service de révision des condamnations pour rendre le processus plus ouvert, plus accessible et plus responsable. Ce service s'attachera désormais des enquêteurs. Un site Web sera créé pour informer les candidats à cet examen de la marche à suivre et un conseiller spécial sera nommé pour superviser l'examen des demandes et conseiller directement le ministre.

[Français]

Le gouvernement constate que ces modifications législatives et administratives constituent le moyen le plus efficace et efficient d'améliorer le processus extrajudiciaire de révision d'une décision rendue par une cour d'appel au Canada.

[Traduction]

Passons à la question de la réforme de la procédure pénale.

[Français]

Depuis un certain temps, le gouvernement fédéral travaille étroitement avec les provinces et les territoires à la réforme de la procédure pénale. Deux séries de réformes ont été proposées, l'une en 1994 — le projet de loi C-42 — et l'autre en 1996 — le projet de loi C-17 —, et sont maintenant en vigueur. Ces deux premières séries de réformes ont aidé les administrations à mieux gérer les ressources du système de justice pénale. Les administrations insistent maintenant pour que l'on passe à la troisième étape. Celle-ci contient les modifications proposées dans le projet de loi C-15A.

[Traduction]

Les objectifs de cette troisième étape sont de simplifier la procédure qui régit les procès, de moderniser le système de justice pénale et d'en accroître l'efficacité grâce à une utilisation accrue de la technologie. En outre, ils visent à mieux protéger les victimes et les témoins dans les procès de nature pénale et à accélérer la tenue des procès, conformément aux exigences de la Charte. Cette étape s'avère essentielle dans nos efforts pour moderniser la procédure sans amoindrir le degré de justice assuré par le système.

(1500)

Les modifications proposées dans le projet de loi C-15A, au titre de la réforme de la procédure pénale, maintiennent le droit inconditionnel à une enquête préliminaire sur demande, dans les cas d'actes criminels. Toutefois, ces modifications touchent l'aspect procédural des enquêtes, créent une obligation limitée de divulgation de la preuve dans le cas de témoignages d'experts, facilitent la mise en oeuvre de technologies de l'information, notamment l'utilisation de documents en version électronique, accroissent les possibilités de comparution à distance, codifient un système d'enquête sur la compréhension du plaidoyer pour faciliter la tâche des procureurs généraux qui supervisent les poursuites privées, imposent certaines restrictions concernant le recours à des mandataires dans les affaires criminelles et permettent la sélection de jurés de remplacement, disponibles jusqu'à l'ouverture du procès.

Comme je l'ai indiqué au départ, cet ensemble de réformes a été élaboré en partenariat avec les provinces et les territoires. Ces gouvernements appuient les réformes et, comme ils ont la responsabilité de l'administration de la justice, j'estime que nous devrions faire de notre mieux pour leur fournir les outils nécessaires au fonctionnement efficace et efficient du système de justice pénale.

Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots au sujet des modifications qu'apporterait le projet de loi C-15A à la Loi sur la capitale nationale et à la Loi sur la défense nationale. Afin d'harmoniser la Loi sur la capitale nationale avec les règlements d'autres lois fédérales, on propose de faire passer la peine maximale pour les infractions aux règlements de 500 à 2 000 dollars, soit la peine maximale que prévoit le Code criminel pour les accusations sommaires. Les types d'infraction visés par cette modification sont les infractions aux règlements relativement sérieuses telles que le braconnage de gros gibier et le déversement illégal de déchets.

Les modifications proposées à la Loi sur la défense nationale permettraient de prendre les empreintes digitales des personnes accusées ou trouvées coupables d'infractions militaires désignées par une cour martiale et d'obtenir d'autres informations à leur sujet. Ces infractions désignées seraient des infractions identiques ou très semblables aux infractions pour lesquelles les civils sont maintenant tenus de fournir leurs empreintes digitales en vertu de la Loi sur l'identification des criminels. De telles mesures législatives visent à permettre aux forces policières d'avoir un accès illimité au dossier criminel des personnes visées par le code de discipline militaire.

Honorables sénateurs, à l'instar de tous les projets de loi omnibus modifiant le Code criminel, le projet de loi C-15A aborde un certain nombre de questions disparates. Avant sa scission, le projet de loi C-15 avait un contenu encore plus varié. Nul doute que nous serons éventuellement saisis du projet de loi C-15B et que nous aurons l'occasion de nous pencher sur des questions touchant la cruauté envers les animaux aussi bien que les armes à feu. À d'autres le soin de mener la charge dans le cas de cet autre projet de loi!

Pour ma part, je suis très heureuse de me charger de demander aux sénateurs d'appuyer la partie A du projet de loi C-15. Je me réjouis particulièrement des dispositions visant à protéger les enfants contre les prédateurs sexuels sur Internet et à prévenir la diffusion de la pornographie juvénile. Depuis 1996, j'ai présidé le comité interministériel après le premier Congrès mondial contre l'exploitation sexuelle commerciale des enfants, qui s'est tenu à Stockholm. Durant cette période, plusieurs policiers — des cyberpoliciers — m'ont fait part des difficultés qu'ils éprouvaient dans la poursuite des individus qui se servent d'Internet pour leurrer des jeunes. Il fut un temps où le foyer était un sanctuaire pour les prédateurs. Cependant, depuis l'avènement d'Internet, ce n'est plus le cas. Le projet de loi C-15A ne réglera pas la question de l'intrusion électronique, mais il sera certainement utile. En outre, lorsque cette loi entrera en vigueur, certains enfants seront mieux protégés par les lois canadiennes lorsqu'ils voyageront à l'étranger.

Les dispositions sur le harcèlement et l'invasion de domicile sont également un pas dans la bonne direction quant à la protection des personnes vulnérables. Les policiers semblent peut-être moins vulnérables que d'autres que ce projet de loi cherche à protéger. Néanmoins, ils prennent des risques pour nous protéger et ils méritent que nous les appuyions dans leur travail en adoptant la modification qui vise à criminaliser toute tentative, réussie ou non, de les désarmer.

Je souscris aussi aux modifications visant à améliorer l'examen des allégations de condamnations injustifiées, étant convaincue de l'utilité des changements proposés à la procédure. Quant aux modifications concernant tant la Loi sur la peine capitale que la Loi sur la défense nationale, elles semblent sensées et nécessaires.

Les projets de loi comme le projet de loi C-15A sont très difficiles à lire à moins d'avoir le Code criminel à côté de soi. Cependant, j'ai posé de nombreuses questions et les réponses que j'ai reçues m'ont informée et m'ont généralement satisfaite.

Honorables sénateurs, je vous demande d'appuyer ce projet de loi, car je suis persuadée qu'il fera une différence positive pour tous les Canadiens. Je voudrais être en mesure de dire aux 2 000 personnes qui vont se rassembler en décembre prochain à Yokohama, au Japon, à l'occasion du deuxième Congrès mondial contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, que nous aurons bientôt une nouvelle loi qui pourra servir d'exemple à d'autres pays faisant face aux mêmes problèmes.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Nolin, le débat est ajourné.)

[Français]

PROJET DE CHARTE DU DROIT À LA VIE PRIVÉE

DEUXIÈME LECTURE—REPORT DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Finestone, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Rompkey, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-21, Loi visant à garantir le droit des individus au respect de leur vie privée.—(Teneur renvoyée au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, le 26 avril 2001).

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, lorsque la teneur de ce projet de loi a été renvoyée au Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, il avait été convenu que ce point resterait inscrit au Feuilleton pendant 15 jours. Cette période étant écoulée, je propose que ce point soit réinscrit au Feuilleton pour une deuxième période de 15 jours.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, permission est-elle accordée de réinscrire ainsi au Feuilleton le projet de loi S-21?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

PROJET DE LOI ANTITERRORISTE

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL SUR LA TENEUR DU PROJET DE LOI C-36

Permission ayant été accordée de revenir à la présentation de rapports des comités permanents ou spéciaux:

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du comité spécial qui a examiné la teneur du projet de loi C-36, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur les secrets officiels, la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et d'autres lois, et édictant des mesures à l'égard de l'enregistrement des organismes de bienfaisance, en vue de combattre le terrorisme et la protection des droits de la personne et des libertés publiques dans l'application de la Loi à l'étude.

Conformément au paragraphe 97(3) du Règlement, je propose: Que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la séance de mercredi prochain, le 7 novembre 2001, et qu'un message soit envoyé à la Chambre des communes pour lui faire part du contenu dudit rapport.

(Le texte du rapport figure en annexe, dans les Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 930.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(1510)

LE PATRIMOINE ASIATIQUE

MOTION VISANT À DÉSIGNER LE MOIS DE LA RECONNAISSANCE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Poy, appuyée par l'honorable sénateur Carney, c.p.:

Que le mois de mai soit désigné Mois du patrimoine asiatique, étant donné l'importante contribution des Canadiens d'origine asiatique à la fondation, à la croissance et au développement du Canada, la diversité de la communauté asiatique et la valeur de celle-ci pour le Canada.—(L'honorable sénateur Taylor).

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, je tiens à appuyer cette motion, surtout après avoir vécu dans l'ouest auprès de trois groupes ethniques. Le premier est celui des sikhs, qui viennent pour la plupart du Punjab et qui parlent le punjabi. Aujourd'hui, ces gens-là dominent notre secteur de l'exploitation forestière. En fait, depuis que les Américains ont acheté la plupart des grandes entreprises canadiennes, ils constituent le pilier de notre mouvement des producteurs indépendants de bois ou de notre mouvement des transformateurs de fibre en Colombie-Britannique, en Alberta et en Saskatchewan.

Les sikhs forment un groupe où la loyauté envers la famille est très importante et ils envoient leurs enfants à l'université pour qu'ils y étudient notamment les sciences. Au cours des 25 dernières années, ils ont beaucoup participé à l'édification de l'ouest du Canada moderne. Ils ont exercé une influence dominante qui est très appréciée. Les sikhs sont le genre d'immigrants dont on lit souvent qu'ils sont arrivés ici et ont créé trois ou quatre emplois dans leur localité.

Les sikhs sont aussi devenus députés. Ils sont un peu comme les Irlandais — un peu raisonneurs — et ils sont donc attirés par la politique. Les sikhs n'attendent pas trois ou quatre générations avant de se lancer en politique. Ils font habituellement le saut rapidement dans ce secteur de la société. Ils font d'excellents politiciens et ont des députés dans tous les partis politiques.

Parmi les peuples d'Asie qui ont contribué à l'édification du Canada, je veux aussi parler des Japonais. À titre de Canadien de l'Ouest, j'approchais de l'adolescence lorsque les Japonais ont été expulsés de la Colombie-Britannique. En rétrospective, on reconnaît maintenant que c'était une chose horrible à faire parce qu'ils étaient des citoyens de notre pays, parfois depuis deux ou trois générations. Ces jours-ci, il suffit d'acheter le journal et de lire sur la guerre sainte qui se déroule en Afghanistan et à laquelle participent des Afghans qui ne possèdent guère plus qu'une carabine de calibre .22 enfoncée dans le sol pour comprendre à quel point la propagande peut survolter les esprits.

Dans les années 40, les gens étaient survoltés parce qu'ils craignaient qu'en laissant les Japonais seuls au bord de l'eau, ceux-ci utiliseraient leur lampe de poche et enverraient aux sous-marins des signaux pour leur indiquer de venir détruire Vancouver. Le fait que Vancouver puisse être détruite n'a pas vraiment préoccupé les Albertains, mais il reste que les Japonais ont été internés dans des camps du centre de la Colombie-Britannique, des camps qui ressemblaient énormément à des camps de concentration, à cette différence qu'ils étaient situés au Canada.

Au bout d'un an à peu près, on a jugé que les Japonais feraient plus de bien dans le sud de l'Alberta. C'est là que j'ai passé mon adolescence et où les Japonais exécutaient des travaux d'agriculture, d'irrigation et d'exploitation maraîchère. Ils sont donc arrivés et, fait plutôt étonnant, les habitants du sud de l'Alberta les ont adoptés comme s'ils étaient des leurs. Il pouvait y avoir des cas de discrimination ici et là, mais comme le sud de l'Alberta était une terre d'immigrants, l'arrivée de Japonais ne changeait pas grand-chose. D'ailleurs, à l'école, j'appartenais à l'une des rares familles anglo-saxonnes. Jusqu'à l'âge de 14 ou 15 ans, je jurais plus souvent en hongrois qu'en anglais.

Les Japonais étaient membres à part entière de la collectivité. Les Asiatiques ont cette qualité de ne pas jamais tenir rancune. Bon nombre de ces gens n'ont pas pris la peine de retourner en Colombie-Britannique. Ils se sont mariés entre eux et sont devenus des personnes en vue dans cette partie de l'Alberta. De nombreux Japonais venus des camps de concentration en Colombie-Britannique sont devenus des maires, des médecins et des leaders dans nos collectivités. À ce jour, il est absolument renversant de constater qu'ils n'en veulent à personne et n'ont pas le sentiment d'avoir été maltraités. Ils nous ont pardonné cette mesure presque impardonnable et forment maintenant une grande partie de la mosaïque canadienne.

Pour remonter plus loin dans le passé, je vous dirai que j'ai grandi dans le sud de l'Alberta à l'époque où la sécheresse ravageait les récoltes. Il y avait très peu de culture sur une grande partie du sud de l'Alberta et de la Saskatchewan. Le peu de produits se vendaient à des prix réellement très bas. Les agriculteurs obtenaient peu pour leurs produits de base. Pourtant, dans la plupart des petites villes, les seuls commerçants étaient des Asiatiques. Les banques et les sociétés de prêts avaient plié bagages, parce qu'il fallait être fou pour consentir un prêt à un agriculteur à l'époque. Pourtant, il y avait toujours un commerçant chinois dans ces petites villes.

Très souvent, ces commerçants chinois possédaient une épicerie ou un restaurant. Un grand nombre de familles dans l'ouest du Canada, spécialement dans le sud de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, régions dévastées par la sécheresse, ont dû leur survie aux Chinois. Ce fait est trop souvent oublié aujourd'hui. Ces immigrants, qui n'avaient même pas le droit de faire venir leur femme et leur famille au Canada, s'étaient installés dans les villages et faisaient crédit. Ce n'était pas des banquiers, mais, quand les temps étaient durs, on pouvait toujours aller dans un restaurant chinois ou à l'épicerie chinoise et le marchand faisait presque toujours crédit. Ils sont devenus l'épine dorsale de la région et ont contribué à y retenir la population.

Sans les marchands chinois, l'Alberta et la Saskatchewan auraient l'air encore plus déserts qu'aujourd'hui. À tout le moins, un groupe très différent aurait peuplé cette région du Canada. Nous avons maltraité les marchands asiatiques dans la même mesure que les Japonais un peu plus tard.

(1520)

Ils s'installaient dans les localités, vendaient de l'épicerie et faisaient crédit. Ce faisant, ils sont devenus partie intégrante de la communauté. Aujourd'hui, c'est un hommage que nous leur rendons, quoique minime, en reconnaissant leur importance et en ayant comme Gouverneur général du Canada une personne d'ascendance chinoise.

Je tenais à rendre hommage aux Chinois et aux Japonais qui sont restés ici après avoir été internés dans des camps de concentration. Je ne pense pas qu'aucun d'entre nous, certainement aucun de mes ancêtres, qui sont principalement Écossais et Indiens, aurait jamais pardonné aux gens qui leur auraient fait cela. Pourtant, la plupart des Japonais et des Chinois nous ont pardonné, se sont installés ici et ont contribué à édifier l'économie de l'Alberta et de la Saskatchewan. Je leur en serai éternellement reconnaissant.

(Sur la motion du sénateur LaPierre, le débat est ajourné.)

[Français]

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À EXAMINER LE RENOUVELLEMENT DE L'ENTENTE DE RADIODIFFUSION DE LA CPAC—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Jean-Robert Gauthier, conformément à l'avis du 11 juin 2001, propose:

Que le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration soit autorisé à examiner et à faire rapport sur le renouvellement de l'entente de radio-télédiffusion entre le Sénat et CPAC (la Chaîne d'affaires publiques par câble), afin que celle-ci inclue le sous-titrage des débats parlementaires autorisés à la télévision et que le renouvellement de cette entente donne suite aux engagements de CPAC concernant les services aux malentendants.

— Honorables sénateurs, la motion numéro 68 s'insère dans le même ordre d'idées que l'interpellation numéro 13, que je parraine depuis quelque temps et qui a été débattue au Sénat à quelques reprises.

Si cette motion était adoptée par le Sénat, elle autoriserait le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration à examiner et à faire rapport sur le renouvellement de l'entente de radio-télédiffusion entre le Sénat et la CPAC afin d'inclure le sous-titrage des débats parlementaires autorisés à la télévision.

Honorables sénateurs, vous vous souviendrez que j'ai soulevé cette question à quelques reprises en cette Chambre car l'entente entre le Sénat et la CPAC, la Chaîne d'affaires publiques par câble, a expiré le 30 août 2000, depuis plus d'un an. Ma préoccupation était d'assurer que dans les négociations en cours, la nouvelle entente veillerait à protéger la télédiffusion de nos délibérations et à accompagner ces débats d'un sous-titrage codé, c'est-à-dire en temps réel.

Il faut savoir que le renouvellement de l'entente entre la Chambre des communes et la CPAC me préoccupe également. À l'heure actuelle, les débats de la Chambre des communes sont disponibles et diffusés avec sous-titrage lors de la période des questions. Comme le sous-titrage n'est offert qu'en langue anglaise actuellement, cela a suscité des critiques justifiées de la part de certaines personnes, surtout dans les provinces maritimes, qui étaient desservies par une compagnie de câblodistribution locale qui ne recevait que les images et le son du parquet, c'est-à-dire la langue utilisée par le député.

Ces personnes se demandaient pourquoi elles ne pouvaient pas capter le signal dans leur langue maternelle. Des plaintes ont été déposées auprès de la commissaire aux langues officielles. Cette dernière a fait enquête et le Comité mixte des langues officielles s'est réuni pour étudier le sujet et faire rapport. Le rapport a été déposé en Chambre, demandant au gouvernement de fournir une réponse globale à cette question. C'est ce que le gouvernement a fait le 26 septembre 2001.

Je vais vous lire un extrait d'une lettre signée par le leader du gouvernement à la Chambre des communes, l'honorable Don Boudria:

Le gouvernement tient à signaler son appui à la diffusion des débats et travaux du Parlement dans les deux langues officielles. Le gouvernement croit que l'accès par un plus grand nombre de Canadiens et de Canadiennes aux débats et travaux télédiffusés du Parlement joue un rôle essentiel dans le processus démocratique au Canada.

(1530)

Notre pays a une Constitution voulant que l'on utilise une ou l'autre des deux langues officielles du pays au Parlement et dans les tribunaux. Par conséquent, il va de soi qu'on diffuse les débats dans les deux langues officielles et, si possible, qu'on les sous-titre en temps réel afin de permettre aux personnes sourdes ou malentendantes de suivre ce qui se passe au Parlement du Canada.

Pour ceux qui aimeraient en savoir plus long sur ce sujet, je vous recommande de lire le rapport du Comité mixte permanent des langues officielles. Il contient des recommandations qui sont réalisables. Il faut cependant une volonté politique pour le faire et il est grand temps qu'on y pense. Le rapport s'intitule: «La diffusion et la disponibilité des débats et travaux du Parlement dans les deux langues officielles». Il a été déposé le 2 mai au Sénat et adopté le 16 mai. Nous avons reçu la réponse du gouvernement le 26 septembre.

J'ai deux préoccupations. La première est d'assurer que la nouvelle entente, que le consortium des câblodistributeurs CPAC a négociée avec la Chambre des communes et le Sénat, stipule que les débats seront non seulement fournis par le Parlement canadien dans les deux langues officielles, mais qu'ils seront accompagnés d'un sous-titrage en temps réel afin que tous puissent avoir accès à ces débats. Il est évident que nous avons des décisions importantes à prendre avant d'en arriver à rendre ce service accessible à tous. Actuellement, le Sénat ne diffuse pas ses délibérations, à l'exception, occasionnellement, de quelques séances de comités.

Certains ont prétendu que c'était la faute de la CPAC si le message n'était pas diffusé dans les deux langues officielles. La CPAC est le messager. Elle prend le message qu'on lui donne à la Chambre des communes et au Sénat et elle le retransmet par son système de satellites à travers tout le Canada. C'est le Parlement canadien qui est responsable du message. C'est le Président de la Chambre des communes et le président du Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration du Sénat qui sont responsables de veiller à ce qu'il y ait une certaine discipline assurant que les deux langues officielles seront utilisées dans la diffusion de notre message.

Ma deuxième préoccupation est de convaincre les autorités du Sénat qu'il est grand temps de télédiffuser les débats parlementaires du Sénat. Il n'est plus acceptable, à l'ère des communications modernes, que le Sénat ne soit pas outillé des meilleures technologies de pointe afin de permettre aux Canadiens et aux Canadiennes d'avoir accès aux débats parlementaires, afin d'en connaître davantage sur l'important travail accompli par le Sénat. Même les journalistes pourraient suivre les débats du Sénat et comprendre l'importance des délibérations.

Les séances de certains de nos comités sénatoriaux sont télédiffusées, mais pas de façon continue, même si, dans le contrat qui a échu en août 2000, on s'était engagé à fournir à la CPAC de six à huit heures de séances par semaine. Je doute très fort qu'on l'ait fait.

Je suis convaincu qu'il faut aujourd'hui en venir à télédiffuser non seulement les séances des comités du Sénat, mais également les délibérations dans l'enceinte du Sénat. Cela contribuerait à une meilleure compréhension du travail accompli par les sénateurs. Une autre option serait de permettre à des comités de le faire selon la disponibilité des équipements et des ressources humaines, puisque la télédiffusion nécessite des salles spécialement équipées.

Permettez-moi de vous citer l'exemple de la cérémonie de la sanction royale qui se déroule au Sénat. Elle débute à la Chambre des communes lorsque le huissier du Bâton noir invite les députés à venir au Sénat assister à la cérémonie. La cérémonie est publique de l'autre côté, mais pas ici parce qu'elle n'est pas télédiffusée. De retour au Sénat, la cérémonie se poursuit, toujours à l'abri de la télévision. Je ne comprends pas vraiment comment on peut avoir une cérémonie sérieuse qui est diffusée publiquement lorsque qu'elle se passe en partie à la Chambre des communes, et qui n'est pas diffusée quand elle se tient de ce côté-ci. Nous n'avons pas l'équipement. Nous n'avons peut-être pas la volonté non plus!

Il y a présentement un projet de loi du gouvernement qui est à l'étude pour modifier cette procédure de sanction royale parce que plusieurs sénateurs et députés pensent que c'est une perte de temps. Ils disent que c'est une cérémonie symbolique. C'est vrai. C'est un des gestes importants que le Gouverneur général accomplit dans ses fonctions. Son représentant ou lui-même viennent ici pour donner la sanction royale aux projets de loi adoptés par les deux Chambres du Parlement. C'est important. Il serait intéressant pour les Canadiens et les Canadiennes de comprendre de quoi on parle lorsqu'on dit S-29, C-15 ou C-11.

La situation actuelle contribue indirectement au manque d'information visuelle et orale quand on passe à des choses aussi importantes que la sanction royale. Le président du Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration, le sénateur Kroft, nous a rappelé dans son discours la semaine dernière que le CRTC avait publié en 1995 des exigences de radiodiffusion concernant le sous-titrage codé.

Dans un communiqué émis le 24 mars 1995, le CRTC a traité d'un certain nombre de questions sociales se rapportant aux décisions de renouvellement des licences des stations de télévision, dont celle pour les sourds et les malentendants. Le CRTC a exigé des grandes stations — celles dont les revenus dépassent les 10 millions de dollars par année — qu'elles sous-titrent au moins 90 p. 100 de toutes les émissions au cours d'une journée de diffusion avant la fin de la période visée par leur licence. CPAC n'est pas une chaîne de télévision, c'est un service public, un consortium de compagnies de câblodistribution qui distribuent à leurs clients certains signaux, en particulier ceux de la Chambre des communes et du Sénat lorsqu'ils sont disponibles.

J'aimerais obtenir une décision du Sénat permettant la diffusion de nos délibérations avec sous-titrage. Depuis quelque temps, on me fournit un sténotypiste avec un portable. Je peux donc suivre ce qui se passe au Sénat parce que cette personne écrit sur sa sténotype et qu'elle rend visuel le signal oral qu'elle reçoit. C'est très utile pour moi. Il y a 200 000 personnes au Canada qui ont des problèmes auditifs. Des gens de l'Association des malentendants canadiens viennent me voir et me demandent de vous expliquer leurs difficultés. C'est très important pour les Canadiens et les Canadiennes qui veulent observer les délibérations du Sénat et de la Chambre des communes d'avoir accès à un sous-titrage en temps réel. C'est essentiel dans une bonne démocratie.

(1540)

Je reconnais qu'il y a des problèmes, mais il y a aussi une demande importante pour les services de ces personnes spécialisées en sténotypie, tant dans les organismes publics, les réseaux de télévision, les tribunaux, les législatures provinciales qu'au Parlement canadien. Nous avons besoin d'un service comme celui-ci.

Il est difficile d'obtenir des sténotypistes qualifiés parce que la formation se donne uniquement en anglais, à Toronto, Edmonton et Vancouver. Actuellement, il n'y a plus de formation en français.

J'ai essayé de convaincre la Cité collégiale, qui est une institution d'enseignement postsecondaire à Ottawa, d'offrir un cours de formation en sténotypie française. Cela a pris quelques mois et ils m'ont dit que cela les intéressait si nous les assurions que ces étudiants auraient éventuellement accès à un emploi.

Je leur ai répondu que le besoin était là, que nous n'étions pas seuls. En effet, la Cour suprême, la Cour fédérale et les tribunaux ont tous besoin de sténotypistes, comme la Chambre des communes et le Sénat. On a besoin de sténotypistes francophones. Il n'y a plus de formation en français depuis l'automne. La dernière école à Montréal a fermé ses portes puisque la dame qui la dirigeait avait atteint l'âge de la retraite. Nous sommes mal pris! Il n'y a plus de formation. Je pense qu'il est absolument essentiel de mettre en place une formation professionnelle.

Son Honneur le Président pro tempore: Je regrette d'informer l'honorable sénateur que son temps de parole est écoulé. La permission est-elle accordée pour que l'honorable sénateur poursuive?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Gauthier: Honorables sénateurs, nous avons déjà discuté de cette question. Je voudrais tout simplement demander aux honorables sénateurs d'être généreux et patients avec moi, et que la motion soit adoptée et renvoyée au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration afin que l'on puisse, de façon sérieuse, étudier la question et en faire rapport dans le but de concrétiser l'objectif de fournir aux Canadiens un message précis, selon lequel le Sénat et la Chambre des communes veulent bien permettre la télédiffusion de leurs travaux avec le sous-titrage dans les deux langues officielles du pays.

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, j'aimerais vous entretenir de la motion présentée par le sénateur Gauthier. J'ai ensuite l'intention de demander l'ajournement du débat.

Je veux, en tout premier lieu, féliciter de nouveau le sénateur Gauthier et lui dire combien j'admire son endurance et sa détermination à traiter des questions qui touchent non seulement la Loi sur les langues officielles et son application, mais aussi des problèmes qui sont apparus depuis sa malheureuse maladie.

Il est évident que l'on ne peut avoir une idée de ce qu'est un handicap tant qu'on n'est pas soi-même frappé ou atteint par un handicap. J'en sais quelque chose. Il fut un temps où, étudiant, j'apprenais à jouer du hautbois, de la clarinette et du saxophone. Comme cela prend dix doigts pour jouer de ce genre d'instruments, j'ai dû abandonner l'étude de cette musique.

C'est à ce moment que j'ai réalisé qu'on tient parfois la condition physique des autres pour acquise et que, peu importe comment souffle le vent, ces gens vont poursuivre leur vie. Il arrive des choses dans la vie qui sont fracassantes, comme la surdité, par exemple, dont il est question dans la motion du sénateur Gauthier.

C'est pour cela qu'il demande, puisqu'il en est lui-même atteint, que l'on réponde aux attentes et aux besoins de ces nombreux Canadiens et Canadiennes qui sont atteints de cette affliction. Non seulement le sous-titrage est-il important aux fins de l'application ou de l'extension de la Loi sur les langues officielles, c'est aussi une pratique qui devrait être progressivement implantée, à mesure que nous aurons les ressources nécessaires, en profitant des nouvelles techniques constamment en évolution constante dans bien d'autres secteurs médiatiques.

Dans un pays qui se dit non seulement bilingue, mais aussi multiculturel, cela est important sur le plan de nos acquis culturels et de l'expansion de ces acquis.

Honorables sénateurs, je n'en dirai pas plus pour le moment. J'ai l'intention de relire avec beaucoup d'attention les propos du sénateur Gauthier parce que j'ai été distrait à certains moments. Je poursuivrai mes propos un autre jour.

(Sur la motion du sénateur Corbin, le débat est ajourné.)

[Traduction]

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, le vice-premier ministre de la Russie nous rend visite aujourd'hui. Ces choses sont parfois indépendantes de notre volonté. Par conséquent, avec la permission du Sénat, je propose:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à siéger aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président pro tempore: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président pro tempore: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(1550)

PROJET DE LOI ANTITERRORISTE

DÉPÔT DE LA VERSION FRANÇAISE CORRIGÉE DU RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL SUR LA TENEUR DU PROJET DE LOI C-36

Permission ayant été accordée de revenir au dépôt de documents:

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, plus tôt cet après-midi, j'ai déposé le premier rapport de l'étude préliminaire du Comité sénatorial spécial sur la lutte au terrorisme, chargé d'examiner le projet de loi C-36. Il manquait une ligne dans la version française. J'ai fait apporter la correction. Je demande la permission de déposer ceci à la place.

Son Honneur le Président: Permission accordée?

Des voix: D'accord.

(Le texte du rapport figure en annexe dans les Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 930.)

[Français]

L'AJOURNEMENT

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à mardi prochain, le 6 novembre 2001, à 14 heures.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne à loisir.)


(1630)

SANCTION ROYALE

L'honorable Jack Major, juge puîné de la Cour suprême du Canada, en sa capacité de suppléant de la Gouverneure générale, prend place au pied du trône. La Chambres des communes, priée de se présenter, arrive avec son Président suppléant. Il plaît au très honorable suppléant de la Gouverneure générale de donner la sanction royale aux projets de loi suivants:

Loi concernant la marine marchande et la navigation et modifiant la Loi dérogatoire de 1987 sur les conférences maritimes et d'autres lois. (Projet de loi C-14, Chapitre 26, 2001).

Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger (Projet de loi C-11, Chapitre 27, 2001).

La Chambre des communes se retire.

Il plaît à l'honorable suppléant de Son Excellence la Gouverneure générale de se retirer.


Le Sénat reprend sa séance.

(Le Sénat s'ajourne au mardi 6 novembre 2001, à 14 heures.)


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