Journaux du Sénat
50 Elizabeth II, A.D. 2001, Canada
Journaux du Sénat
1ère session, 37e législature
Numéro 19 - Annexe « B »
Le jeudi 22 mars 2001
14 heures
L'honorable Daniel Hays, Président
Jeudi le 22 mars 2001
Le Comité sénatorial permanent des Finances nationales a l'honneur de présenter son
TROISIÈME RAPPORT
Votre Comité auquel a été déféré le Budget des dépenses 2001-2002, a, conformément à l'ordre de renvoi du 1 mars 2001, examiné ledit Budget et présente ici son rapport intermédiaire.Le Budget des dépenses 2001-2002 a été déposé au Sénat le 1er mars 2001 et renvoyé au Comité permanent des finances nationales pour examen. Comme d'habitude, le Comité a réservé plusieurs réunions à son examen, qu'il a commencé dans la soirée du mercredi 14 mars 2001 et qu'il entend poursuivre ce printemps. À la première de ces réunions, des fonctionnaires du Conseil du Trésor, soit MM. Keith Coulter, Andrew Lieff et Kevin Lindsey, ont décrit les dépenses prévues par le gouvernement et expliqué les principales caractéristiques du nouveau budget. Après leur exposé, ils ont répondu aux questions des membres du Comité et se sont engagés à fournir d'autres renseignements sur plusieurs sujets intéressant le Comité.
LE PLAN DE DÉPENSES - APERÇU
Cette année, pour la première fois depuis longtemps, le Budget des dépenses ne suit pas immédiatement la présentation d'un nouveau budget par le gouvernement. La raison en est que le plan de dépenses du gouvernement pour l'exercice 2001-2002 a été exposé dans l'énoncé économique et la mise à jour budgétaire d'octobre 2000. Le Budget des dépenses principal est basé sur ce plan.Le Budget des dépenses de cette année comporte quatre volets. La PARTIE I fait un survol des dépenses du gouvernement en résumant les éléments clés du Budget des dépenses principal et en faisant ressortir les principaux changements qu'il comporte. La PARTIE II, qu'on appelle habituellement le Livre bleu et qui est à la base de la Loi portant affectation de crédits, énumère et décrit dans le détail les ressources dont les ministères et agences auront besoin au cours du prochain exercice. Elle énonce aussi les autorisations de dépenser et les crédits qui seront affectés ultérieurement. Le Rapport sur les plans et les priorités (RPP) donne des précisions sur la planification stratégique et les résultats visés dans chacun des ministères et agences. Les RPP, qui seront déposés à la fin de mars, portent surtout sur les résultats visés par les activités de dépenses des ministères. Enfin, le Rapport ministériel sur le rendement (RMR) est une reddition de comptes fondée sur les résultats et compare les résultats obtenus aux résultats visés et aux engagements en matière de résultats tels qu'ils figurent dans le Rapport sur les plans et les priorités du printemps. Les RMR sont déposés à l'automne.
L'énoncé économique et la mise à jour budgétaire que le ministre des Finances a fait le 18 octobre 2000 énoncent le plan de dépenses budgétaires du gouvernement, lesquelles devraient s'élever à 166,3 milliards de dollars. Le plan prévoit des dépenses de programmes de 124,6 milliards de dollars et une somme de 41,7 milliards de dollars au titre des frais de la dette publique. Le Budget des dépenses de 2001-2002 présente des autorisations de dépenser atteignant les 163,4 milliards de dollars. Cette somme représente 98 p. 100 du plan de dépenses qui figure dans l'énoncé économique et la mise à jour budgétaire. Il convient de noter que le budget des dépenses s'écarte du budget et de l'énoncé économique présenté en octobre par le ministre des Finances d'un montant de 2,94 milliards de dollars. Cet écart peut s'expliquer de plusieurs façons :
- Un certain nombre de dépenses ne figurent pas dans le Budget des dépenses en raison du moment auquel les décisions budgétaires ont été prises ou parce qu'elles sont tributaires de l'adoption d'autres mesures législatives;
- Le Budget des dépenses ne tient pas compte de fonds mis de côté dans le Plan de dépenses en prévision d'éventualités de fonctionnement ou au titre de postes que le Parlement ou le Conseil du Trésor doivent encore approuver;
- Le Budget des dépenses ne prévoit pas de dispositions pour la réévaluation des biens et exigibilités du gouvernement, comme l'indiquaient l'énoncé économique et la mise à jour budgétaire.
- Certaines autorisations de dépenser figurant dans le Budget des dépenses prendront fin.
Le tableau I ci-dessous donne un aperçu des dépenses planifiées. Pour avoir accès aux données du tableau organisées différemment, voir les pages 1 à 3 du Budget des dépenses 2001-2002, Partie I - Plan de dépenses du gouvernement.
TABLEAU I
LE PLAN DE DÉPENSES ET
LE BUDGET DES DÉPENSES 2001-2002
(en millions de dollars)
Frais de la dette publique | 41 700 |
Dépenses de fonctionnement et dépenses en capital | 34 335 |
Prestations aux personnes âgées | 25 181 |
Assurance-emploi | 12 247 |
Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux | 17 300 |
Péréquation | 10 479 |
Autres paiements de transfert et subventions | 18 996 |
Autres obligations législatives | 3 118 |
Total du budgétaire du Budget des dépenses principal | 163 356 |
Rajustements à rapprocher du Budget | 2 944 |
Total du budgétaire des dépenses | 166 300 |
Des 165,2 milliards de dollars prévus dans le Budget des dépenses principal, 112,8 milliards de dollars ou 68 p. 100 correspondent à des dépenses législatives. Le reste, soit 52,4 milliards de dollars, doit être approuvé par le Parlement. Selon le Budget des dépenses de cette année, 17 ministères ou agences planifient des dépenses de plus d'un milliard de dollars en 2001-2002. Les trois budgets les plus importants sont ceux du ministère des Finances (68,9 milliards de dollars), du ministère du Développement des ressources humaines (28,2 milliards de dollars) et du ministère de la Défense nationale (11,4 milliards de dollars).
Les sénateurs ont commencé leur étude du Budget des dépenses en examinant l'écart séparant les dépenses totales prévues pour l'exercice 2001-2002 et celles du dernier exercice. Indépendamment des explications données par le Conseil du Trésor, les sénateurs s'inquiètent de voir que les ministères semblent incapables de mieux prévoir les dépenses gouvernementales. Le Budget principal d'abord présenté pour 2000-2001 se chiffrait à 156,3 milliards de dollars. Au cours de l'exercice 2000-2001, 16,4 milliards ont été ajoutés aux dépenses gouvernementales, portant ainsi le total du budget à 172,68 milliards de dollars. Les fonctionnaires du Conseil du Trésor sont en mesure d'expliquer la hausse des dépenses nécessitant des crédits supplémentaires, mais les sénateurs estiment qu'on mise trop souvent sur cette manière de gérer les finances du gouvernement. Le Comité préférerait que les ministères fassent des prévisions plus précises et donnent plus de détails sur les montants qui ne figurent pas dans le Budget des dépenses mais qui sont prévus dans l'exposé budgétaire. Par exemple, le Budget principal des dépenses en 2001-2002 projette des dépenses de 163,4 milliards de dollars, alors que le budget et l'énoncé économique d'octobre 2000 autorisent des dépenses de 166,3 milliards de dollars. Cette somme additionnelle de 2,9 milliards doit être mieux expliquée dans les documents budgétaires.
Le recours fréquent à des budgets de dépenses supplémentaires amène à douter de la précision du Budget des dépenses principal. Les fonctionnaires ont répondu au Comité que le Conseil du Trésor fait tout pour produire un relevé exact des dépenses que le gouvernement projette de faire au cours du prochain exercice. Les postes supplémentaires sont vraiment des postes nouveaux à l'égard desquels le Parlement n'a pas encore approuvé les crédits ou au sujet desquels des détails manquent encore.
On s'inquiète aussi du mouvement ascendant des dépenses du gouvernement. Même si le chiffre de 166,3 milliards de dollars pour le Budget des dépenses principal de 2001-2002 représente 6,4 milliards de moins que le chiffre final de 172,7 milliards rapporté dans le Budget supplémentaire des dépenses « A » 2000-2001, c'est tout de même 10 milliards de dollars de plus que l'estimation originale figurant dans le Budget principal de 2000-2001. Les sénateurs sont préoccupés par les rumeurs persistantes d'un ralentissement de l'économie mondiale. Compte tenu de la conjoncture mondiale, le Comité se demande si la hausse relativement rapide des dépenses ne viendra pas se heurter à une diminution des recettes gouvernementales.
Les membres du Comité ont souligné que les contributions au titre du programme Rescol, Accès communautaire, du ministère de l'Industrie, sont tombées de 95,3 millions de dollars pour 2000-2001 à 47 millions de dollars pour 2001-2002. Les fonctionnaires leur ont alors rappelé que ce programme, qui vise à aider les communautés à établir des points publics d'accès à l'Internet, n'est censé assurer que des fonds de démarrage. Il est prévu que son financement diminuera au fur et à mesure que ses objectifs seront atteints.
Des membres du Comité ont posé des questions sur le fait que les fonds que Patrimoine canadien affecte aux subventions accordées aux organismes voués à l'utilisation, à l'apprentissage et à la promotion des langues officielles n'ont pas augmenté depuis un certain temps. Les fonctionnaires n'ont pas pu expliquer exactement la méthodologie qui sert à déterminer les affectations annuelles, mais ils ont promis de se renseigner et de répondre au Comité plus tard.
Les membres du Comité se sont intéressés aux activités du Centre canadien de gestion (CCG), qui verra ses crédits augmentés d'un million de dollars au cours de l'exercice 2001-2002. Cette agence fédérale assure la formation des cadres supérieurs de la fonction publique. Ils ont eu l'impression - renforcée par certaines déclarations publiques et le discours du trône - que le gouvernement attache beaucoup d'importance à la réforme de la fonction publique. Or, le CCG l'a convaincu qu'il ne pourrait pas contribuer à cette réforme sans une forte augmentation de son budget de base. Le Comité a demandé des précisions sur le fonctionnement du Centre et la composition de son conseil d'administration.
Industrie Canada est notamment chargé de verser de fortes sommes d'argent à des entreprises et institutions canadiennes. Les membres du Comité ont dénoncé le fait que beaucoup des critères de sélection des bénéficiaires de l'aide fédérale ne relèvent pas de la compétence du Ministère. Ils ont discuté de deux programmes. La Fondation canadienne pour l'innovation, qui administre un fonds de dotation de plus d'un milliard de dollars, soutient financièrement des projets de recherche dans des universités et des hôpitaux. Le Programme de partenariats technologiques d'Industrie Canada devrait distribuer 356,8 millions de dollars en subventions à des sociétés au cours du prochain exercice, non seulement pour soutenir des projets de recherche, mais aussi pour appuyer des activités commerciales. Les membres du Comité ont dit douter que des fonctionnaires aient les compétences voulues pour choisir des activités commerciales florissantes dignes de l'appui du gouvernement. Le Comité a demandé des précisions supplémentaires sur ces programmes et, plus particulièrement, sur les critères de sélection des récipiendaires et sur les activités de ces derniers.
Le Comité sait que le gouvernement fédéral gère un grand nombre de structures publiques à travers le pays et qu'il faut entretenir ces structures périodiquement. Les membres notent que Les Ponts Jacques Cartier et Champlain Inc., une société d'État fédérale, a demandé des fonds additionnels pour faire plusieurs réparations aux structures qu'elle gère. Plus particulièrement, cette société d'État gère, contrôle, exploite et entretient les ponts Jacques Cartier et Champlain, des parties de l'Autoroute Bonaventure, la jetée du Pont Champlain, le Pont Mercier et le Tunnel Melocheville, à Montréal. Elle demande en ce moment des crédits de 116,2 millions de dollars pour réparer les ponts, les chaussées et l'autoroute qui relèvent d'elle. Les fonctionnaires ont convenu d'obtenir plus de détails sur la nature de ces réparations.
Le Comité continue de s'intéresser aux rapports qu'entretient l'Agence canadienne de développement international (ACDI) avec la magistrature canadienne. Il s'est surtout dit préoccupé par le fait que la Direction générale du partenariat canadien de l'ACDI paie à même ses fonds le travail à l'étranger fait par des juges par l'intermédiaire du Bureau du commissaire à la magistrature fédérale. Le Comité a déjà demandé, par le passé, des précisions sur les subventions et contributions versées aux juges pour leur travail à l'étranger, mais comme les réponses obtenues ne l'ont pas satisfait, il a demandé aux fonctionnaires du Conseil du Trésor de faire une étude plus poussée de la question. Il a plus précisément demandé à connaître le montant total dépensé à cette fin par l'intermédiaire du Bureau du commissaire à la magistrature fédérale, le montant des dépenses par projet et ce qui autorise l'Agence à dépenser des fonds de cette façon.
Il y a, au ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, un secteur d'activités appelé « Fondations solides pour le secteur et les collectivités rurales » (voir les pages 2 et 3 de la Partie II). Ce secteur soutient des activités qui confèrent à l'industrie agricole et agroalimentaire une rentabilité et une autarcie économique plus grandes et favorisent le développement économique des communautés rurales. Certains de ses programmes relèvent notamment de la Loi sur la protection du revenu agricole. Aux pages 2 à 5 de la Partie II, le Ministère demande 227,3 millions de dollars au titre d'un de ces programmes, le Programme d'assurance-récolte. Les crédits demandés pour l'exercice 2001-2002 sont exactement les mêmes que pour l'exercice 2000-2001. Il demande aussi la même somme que pour le dernier exercice, soit 212,6 millions de dollars, pour le Compte de stabilisation du revenu net (CSRN). Les membres du Comité se sont interrogés au sujet des méthodes utilisées pour arriver à ces chiffres et ont demandé si ces prévisions influaient sur le niveau des versements faits à l'industrie. Les fonctionnaires leur ont assuré que toutes les indemnités demandées qui étaient justifiées étaient accordées, quels que soient les montants affichés à ces deux postes, signalant que, comme les sommes demandées dans le cadre de ces programmes de soutien du revenu varient fortement d'une année à l'autre et que le ministère ne peut prédire avec exactitude à combien s'élèveront celles qui lui seront demandées au cours de l'année, il affiche simplement dans le Budget des dépenses un chiffre crédible qu'il modifie lorsqu'il reçoit des données précises en cours d'exercice.
Le programme de création d'un registre des armes à feu a de nouveau retenu l'attention du Comité. Plus précisément, ses membres voulaient savoir combien de provinces refusaient de participer à cette initiative et à combien s'élèvent les coûts que doivent assumer les ministères et agences fédéraux chargés d'administrer le programme dans ces provinces. Les sénateurs ont été informés qu'en ce moment, l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, Terre-Neuve, le Yukon, le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest ne participent pas au programme. Les fonctionnaires ont admis qu'une partie des coûts demeure inconnue quand ces ministères et agences les intègrent à l'ensemble de leurs dépenses de fonctionnement.
Les fonctionnaires s'efforcent de répondre immédiatement aux questions des membres du Comité, mais ils ne réussissent pas toujours. Aussi ont-ils offert de fournir des précisions supplémentaires à une date ultérieure sur plusieurs sujets, à savoir, à l'égard du ministère de l'Environnement : les contributions croissantes du Ministère à des projets de protection de l'environnement et de développement durable (17,96 millions de dollars), son soutien décroissant aux engagements internationaux du Canada (337 300 $) et son appui plus important (18,2 millions de dollars) au nettoyage des mares de goudron de Sydney et des cokeries du bassin hydrographique de Muggah Creek. Ils vont aussi expliquer les besoins financiers de la Société de développement du Cap-Breton, compte tenu du fait qu'elle réduit progressivement ses opérations.
Comme nous l'avons indiqué plus haut, le Comité compte faire plus tard un examen plus poussé de divers aspects des plans de dépenses du gouvernement.
Respectueusement soumis,
Le président,
LOWELL MURRAY