Journaux du Sénat
50 Elizabeth II, A.D. 2001, Canada
Journaux du Sénat
1ère session, 37e législature
Numéro 79 - Annexe
Le lundi 10 décembre 2001
20 heures
L'honorable Daniel Hays, Président
OBSERVATIONS DE LA MAJORITÉ LIBÉRALE
Les événements du 11 septembre à New York, à Washington et en Pennsylvanie ont forcé les Canadiens et le gouvernement fédéral à réagir à la menace terroriste en Amérique du Nord. L'ampleur de ces bouleversements a eu un profond impact sur la vie quotidienne des citoyens respectueux de la loi.
Le Comité reconnaît que la nature même de cette menace terroriste exige que nous intervenions pour doter les organismes d'application de la loi et les services de sécurité des outils nécessaires pour faire enquête et prévenir les attentats terroristes et pour déstabiliser les organisations terroristes. Dans leur témoignage, certains témoins ont exprimé l'avis que la sécurité était elle-même une condition préalable à la liberté.
L'objectif avoué du projet de loi C-36 est d'arriver à concilier le mieux possible la prévention du terrorisme et la protection des droits des particuliers. La nature même de ces discussions suscite une part d'émotivité, d'anxiété et de crainte. Nous tenons à réagir aux préoccupations exprimées, en particulier à celles des représentants de minorités religieuses et ethniques au Canada qui ne sont pas convaincus que les outils prévus dans le projet de loi seront de nature à protéger leur liberté et que les pouvoirs conférés pourront être exercés de façon à ne pas cibler indûment des membres de leurs collectivités.
Voici quelques observations qui, pourraient être extérieures aux dispositions du projet de loi, mais qui rendent compte du contexte de leur mise en œuvre.
1. Nous prenons note de l'engagement du gouvernement du Canada à travailler de concert avec ses homologues provinciaux et territoriaux, les organismes d'application de loi et les services de sécurité, la magistrature, les procureurs de la Couronne et les responsables des services correctionnels de tout le Canada, afin d'amorcer un processus de formation continue qui tienne compte de la diversité ethnique des collectivités canadiennes.
Nous exhortons le gouvernement, par l'entremise du procureur général et du solliciteur général du Canada, à accorder de toute urgence la priorité à ce processus de sensibilisation et à créer un mécanisme pour permettre aux représentants des groupes minoritaires de donner leur point de vue sur la meilleure façon de parvenir au degré d'adaptation recherché de manière à ce que l'application de cette nouvelle loi soit exempte de toute discrimination.
2. Nous prenons acte de la réponse faite aux recommandations du Sénat en faveur de la communication régulière et publique aux Canadiens des données quantitatives relatives aux mesures prises conformément aux dispositions régissant les audiences d'enquête et les arrestations préventives, par le biais de rapports annuels déposés par le procureur général et par le solliciteur général ainsi que par leurs homologues provinciaux.
Nous exhortons le gouvernement à s'engager à fournir des données qualitatives dans ces rapports et recommandons à cet effet la création d'un groupe consultatif spécial et permanent composé de représentants d'organismes ethnoculturels, dont le mandat consistera à fournir des preuves factuelles et empiriques de la façon dont les dispositions de ce projet de loi sont appliquées et à proposer des rajustements, lorsque la situation l'exige.
3. L'exercice judicieux des pouvoirs conférés par le projet de loi C-36 décidera en bout de ligne de la capacité de cette mesure législative de bien concilier la protection des Canadiens et le maintien des droits et libertés fondamentaux. Ce projet de loi imposera un fardeau supplémentaire aux organismes actuels d'examen et de traitement des plaintes, aux services de sécurité et aux représentants parlementaires, puisqu'il les obligera à assumer les fonctions de surveillance et d'examen nécessaires, dans la mesure où elles relèvent de leurs mandats. Des témoins ont notamment souligné au Comité les pressions qui s'exerceront sur la Commission des droits de la personne à mesure que le projet de loi sera mis en oeuvre.
Un nouveau territoire étant en voie d'être délimité, il est essentiel de prévoir de nouvelles ressources en quantité suffisante pour permettre à ces organismes et agents de s'acquitter de leurs nouvelles obligations sans les détourner de leurs responsabilités déjà lourdes.
Enfin, le Comité tient à insister sur la capacité du Sénat du Canada d'assumer un rôle d'examen et de surveillance en tout temps que la mise en œuvre de cette nouvelle mesure législative l'exigera. Cette chambre a déjà par le passé pris sur elle d'effectuer des études spéciales en convoquant des témoins et en faisant rapport au gouvernement et aux Canadiens sur des questions d'importance et d'intérêt pour le pays. Il ne s'agit pas là simplement d'une option mais bien d'un devoir, puisque les sénateurs continuent d'entretenir un grand intérêt à l'égard des initiatives prises dans la foulée d'événements sans précédent qui menacent la sécurité et le bien-être du Canada.
OBSERVATIONS DES SÉNATEURS PROGRESSISTES-CONSERVATEURS
Les sénateurs progressistes-conservateurs continuent d'appuyer les recommandations du rapport issu de la pré- étude du Comité spécial sénatorial sur la Teneur du Projet de loi C-36, la Loi antiterroriste.
Il est recommandé dans le rapport unanime du Comité un certain nombre d'amendements au projet de loi C-36 qui visent à atteindre un équilibre satisfaisant de manière, pour reprendre les termes du rapport, « à fournir aux services chargés d'appliquer les lois et d'assurer la sécurité nationale les outils nécessaires pour protéger les citoyens et pour prévenir les actes terroristes avant leur perpétration, mais sans pour autant compromettre les libertés que notre gouvernement a pour mission de protéger. En effet, les actes terroristes ne doivent pas avoir pour effet de nous faire renoncer à nos principes fondamentaux et à nos garanties démocratiques essentielles. »
Le projet de loi C-36, tel qu'amendé à la Chambre des communes et renvoyé à notre Comité, sans les amendements recommandés dans la pré-étude, n'atteint pas cet équilibre. Il n'a pas été tenu compte des deux principales recommandations du Sénat, soit la nomination d'un haut fonctionnaire du Parlement mandaté pour contrôler l'exercice des pouvoirs conférés dans le projet de loi et l'application d'une disposition de temporisation visant tout le projet de loi.
Les sénateurs progressistes-conservateurs croient que d'importants amendements doivent être apportés au projet de loi C-36 pour faire en sorte que les libertés civiles des Canadiens et Canadiennes bénéficient d'une protection adéquate.
Les sénateurs progressistes-conservateurs continuent d'appuyer le rapport issu de la pré-étude du Comité spécial sénatorial sur la Teneur du Projet de loi C-36, la Loi antiterroriste, adopté à l'unanimité dans la salle du Sénat le jeudi 22 novembre 2001.