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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 12

Le mardi 29 octobre 2002
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le mardi 29 octobre 2002

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE HARTLAND DE MONTARVILLE MOLSON, O.C., O.Q., O.B.E.

HOMMAGES

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, le Canada a récemment perdu un de ses plus dévoués et distingués citoyens, et nous avons perdu un ancien collègue qui fut un des plus admirés de tous.

[Traduction]

Qualifié par Peter Newman de personnalité quintessencielle de l'establishment canadien, le sénateur Molson se distingue par ses réalisations personnelles et par son service dans la vie publique. Bien qu'issu d'une famille très respectée et se distinguant éminemment par son succès, famille dont les origines à Montréal remontent à 1782, Hartland Molson a, dès ses toutes premières années, vécu selon l'adage qui dit qu'on peut attendre beaucoup de celui qui a beaucoup reçu. Ou encore, comme il avait coutume de dire, — en termes plus familiers — «L'argent s'accompagne d'une lourde responsabilité; si l'on a le bonheur d'en être pourvu, on a l'obligation de faire une contribution.» Et il n'a pas manqué d'apporter sa contribution.

[Français]

Après avoir quitté le Collège militaire royal, Hartland Molson reçut son diplôme de comptable agréé et se joignit à la firme McDonald Currie où il travailla jusqu'au crash de 1929, qui mena à sa mise à pied pour la première, et comme vous l'imaginez sans doute, l'unique fois de sa vie.

[Traduction]

S'étant lancé comme investisseur en capital de risque, de concert avec Henry Ford, un compagnon visionnaire, il a ouvert la première usine de fabrication d'huile, de tourteaux et de farine de soja au Canada. Malheureusement, cette entreprise avait au moins 50 ans d'avance sur son temps et elle a flanché en l'espace d'une année. Nullement découragé, Hartland Molson est devenu pilote et, en association avec son frère, Tom, et le légendaire Billy Bishop, il a fondé la Dominion Skyways, une société d'aviation de brousse qui transportait des approvisionnements et du matériel pour l'exploitation, la prospection et l'arpentage miniers dans le Nord. Cette entreprise a eu beaucoup plus de succès, mais, en 1938, il s'en est défait pour travailler dans la brasserie familiale.

Médaillé en tant que pilote de chasse lors de la bataille d'Angleterre, il a effectué 62 missions de combat avant d'être abattu et blessé, incident qu'il s'est typiquement reproché comme étant de sa seule faute, ayant commis le péché capital, avait-il expliqué, d'avoir voulu redresser son appareil sans avoir regardé autour de lui.

Après la guerre, Hartland Molson a repris ses activités professionnelles multiples. En tant qu'homme d'affaires, il a mis à contribution son esprit visionnaire avec les compétences d'un comptable de la haute finance pour mener la compagnie Molson vers un succès inégalé au Canada.

En tant que sportif, véritable sportif, il a fait l'acquisition de la Canadian Arena Company et de ce fait, de son équipe chérie, les Canadiens de Montréal. Sous sa gouverne active, et je sais que le sénateur Mahovlich peut attester qu'il était bien un président directement engagé, les Canadiens de Montréal ont terminé au premier rang de la Ligue nationale de hockey à huit reprises et ont remporté la coupe Stanley à six reprises. Je pense que le sénateur Mahovlich mérite vraisemblablement plus de crédit que le sénateur Molson à cet égard, mais je sais qu'il était tout aussi heureux.

En tant que philanthrope, le moins qu'on puisse dire est que sa générosité était légendaire et bien connue, tant auprès d'organisations comme le Conseil des Arts du Canada que l'Association canadienne des paraplégiques et d'innombrables groupes de citoyens et de personnes, partout au Canada et à l'étranger, notamment les scouts, comme le sénateur DiNino me l'a rappelé. Nombre de sénateurs se souviendront qu'à titre de parlementaire, il a servi avec grande distinction dans cette enceinte de 1955 à 1993, moment où il a décidé de prendre sa retraite.

[Français]

Certains sénateurs voudront sûrement partager leurs souvenirs personnels du sénateur Molson dans un de ces domaines, mais pour ma part, j'aimerais simplement parler brièvement de sa vie au sein du monde du hockey et au Sénat; les deux facettes de sa vie que je connaissais le mieux et qui, je crois, le passionnaient le plus.

[Traduction]

Pour HartlandMolson le hockey n'était pas une entreprise commerciale, même si ses brasseries bénéficiaient largement des retombées de ce sport. Pour lui, le hockey était plutôt une affaire de cœur, peut-être parce qu'il était lui-même un hockeyeur accompli. Il a en effet joué pour le RMC à Kingston, qui, incidemment, en 1926, s'est rendu en finale de la coupe Mémorial. Il a aussi joué en Suisse et en France, puis, pendant les années 30, il a été joueur de réserve pour les Maroons de Montréal. De plus, Jean Béliveau a déclaré que lorsque les membres de la famille Molson entraient au Forum, ils donnaient toujours l'impression d'aimer tellement le hockey et les Canadiens qu'ils en oubliaient même que l'équipe leur appartenait. HartlandMolson a lui-même déclaré que ce club est bien plus qu'une organisation sportive et que c'est une institution, un mode de vie.

Jusqu'à la fin de sa vie, HartlandMolson était une figure bien connue des spectateurs et des téléspectateurs canadiens, d'un océan à l'autre. On pouvait l'apercevoir assis dans sa loge, juste derrière le banc des joueurs. HartlandMolson était également bien connu dans les vestiaires des Canadiens, mais uniquement après une victoire! Il refusait résolument de s'aventurer dans les vestiaires après une défaite, peut-être parce qu'il savait que ses joueurs prenait la chose aussi à cœur que lui, ou peut-être l'inverse.

C'est probablement grâce au hockey que je suis devenu le beau-fils du sénateur Molson. Ma mère et lui se connaissaient depuis toujours mais, après le décès de leurs conjoints respectifs, ils ont commencé à se fréquenter grâce au hockey. Comme les honorables sénateurs l'imaginent bien, le sénateur Molson ne manquait pas d'admiratrices parmi les veuves de Montréal, mais je suis persuadé que la

connaissance et la passion du jeu dont faisait preuve ma mère — et le fait d'avoir été dans sa jeunesse une admiratrice enthousiaste des Maroons de Montréal — lui donnaient un avantage certain sur ses concurrentes ou, comme on dit au hockey, lui assuraient le jeu de puissance. C'est ce qui a fait, heureusement, qu'ils se sont mariés en mai 1990.

Le sénateur Molson était fermement convaincu du rôle et de l'utilité du Sénat. Les sénateurs n'ignorent pas qu'il siégeait en tant qu'indépendant, non pas par manque de convictions — loin de là — mais afin que sa carrière professionnelle ne le mette pas en situation de conflit d'intérêts.

(1410)

Au cours des 38 années qu'il a siégé ici, le sénateur Molson a siégé à presque tous les comités et en a présidé un certain nombre, surtout peut-être celui du Règlement et de la procédure, de 1969 à 1983. Toutefois, le sénateur Molson craignait de plus en plus que le véritable objet du Sénat ne soit compromis par ce qu'il considérait comme «une détérioration évidente du climat de la Chambre et un déclin presque catastrophique de la faveur et du respect du public.»

Le 26 mai 1993, dans son allocution de démission, qui était typiquement brève, à propos et trop modeste, le sénateur Molson a dit ceci:

Loin de moi l'idée de vouloir faire un réquisitoire aujourd'hui, mais je suis bien forcé de constater que certains des problèmes sont directement issus d'un sectarisme politique exacerbé dépassant de beaucoup l'esprit de parti. J'espère qu'un jour les sénateurs indépendants seront à nouveau plus nombreux et que, comme à la Chambre des lords, ils seront le levain de cette assemblée.

De quoi nous faire réfléchir tous, honorables sénateurs.

Hartland Molson était un Canadien passionné, qui n'était pas dénué de sens critique. Il croyait dans la grandeur intrinsèque du Canada. Il croyait dans la tradition et dans l'importance de notre histoire et de nos racines. Il croyait que les Canadiens étaient des alliés potentiels pour quiconque dans le monde, particulièrement au moment de se rassembler autour d'un but commun. En tant que Québécois anglophone bilingue, il se disait «entièrement d'accord sur l'objectif de protéger la culture et la langue françaises et de faire du français la langue première du Québec».

Honorables sénateurs, le souvenir d'Hartland Molson n'est pas prêt de sombrer dans l'oubli. Il a vécu une vie imprégnée du sens devoir et de la justice. Il laisse au Canada un souvenir de bonne réputation et de bonne conduite remarquables. En mon nom personnel et au nom de tous ses collègues et anciens collègues dans cet endroit ainsi qu'au nom de ses amis et de ses admirateurs aux quatre coins du pays et de la planète, qui partagent mes sentiments, j'offre mes plus sincères sympathies à sa fille, Zoë Murray, à ses trois petits-fils, Charles, Andrew et Maximilian Hardinge, et à ses nombreux neveux et nièces.

En tant que compagnon de pêche qui a partagé avec lui à maintes occasions les délices de sa chère rivière Bonaventure en Gaspésie, j'aimerais réciter «La prière du pêcheur» qu'on a récité lors de ses funérailles qui ont eu lieu à Montréal, le 4 octobre:

Seigneur, faites que je puisse pêcher jusqu'à mon dernier jour,
Et après mon dernier lancer, Seigneur, je vous prie humblement,
Une fois que je serai dans votre filet protecteur,
De ne pas me rejeter comme menu fretin.

Honorables sénateurs, Hartland Molson, en effet, n'était pas du menu fretin.

Des voix: Bravo!

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le 28 juillet 1955, le très honorable Louis Saint-Laurent a nommé 13 sénateurs au Sénat du Canada, dont Hartland Molson, de qui notre collègue vient de faire l'éloge. Parmi les autres sénateurs nommés ce jour-là se trouvait mon père. C'est donc lors de l'assermentation de mon père que j'ai eu la chance de rencontrer le sénateur Molson; j'avais 13 ans.

Je tiens à dire au sénateur Meighen que la bière pour moi à cette époque était la Olands. Je venais de la Nouvelle-Écosse et c'était donc la seule bière que je connaissais. Je suis persuadée que certains buvaient d'autres marques, mais la seule que nous connaissions était brassée par la famille Olands. Je me rappelle que mon père m'a présenté le sénateur Molson comme l'autre brasseur au Canada. Cela m'a laissé un très bon souvenir.

Bien entendu, j'en ai appris tellement par la suite sur cette promotion de 1955, qui comprenait des personnages légendaires comme David Croll, par exemple, et Chubby Powers. C'était tout un groupe de nouveaux sénateurs qui étaient nommés le 28 juillet 1955.

Bien entendu, je connaissais la contribution du sénateur Molson au Canada. Je crois qu'il est vrai de dire qu'il n'a pas son pareil dans l'histoire canadienne.

On peut regarder le nombre de distinctions que le sénateur Molson a reçues. C'était un Officier de l'Ordre du Canada et il était membre de l'Ordre de l'Empire britannique et de l'Ordre du Québec, membre de l'Institut des comptables agréés et de l'Institut des secrétaires et administrateurs agréés au Canada, en plus d'être le récipiendaire de multiples doctorats honorifiques et d'être un chevalier de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem.

Chose beaucoup plus importante que tous ses succès professionnels et sa grande réussite avec les Canadiens de Montréal, c'était un homme associé surtout à Montréal et à la culture du Québec, au Canada. Il parrainait un très grand nombre d'institutions culturelles et de bienfaisance, y compris l'hôpital Douglas, l'Association canadienne des paraplégiques et, bien entendu, sa propre Fondation Molson.

Sa vie était guidée par de vieux principes consacrés: un respect pour son patrimoine, le sens du devoir à l'égard de son pays et un sens des responsabilités personnelles envers ses concitoyens. Ainsi, il va beaucoup manquer aux Canadiens.

Je voudrais exprimer mes sincères condoléances et celles de tous mes collègues à l'honorable Michael Meighen, à sa famille élargie et, bien entendu, à la famille du sénateur Molson.

Des voix: Bravo!

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, même si le nom «Molson» est surtout identifié à un produit en particulier, il remonte en fait à de nombreuses générations qui ont toutes participé activement et généreusement à de nombreuses facettes de la vie canadienne.

Le premier Molson est arrivé au Canada à la fin du XVIIIe siècle, encore adolescent, et au fil des ans, il a oeuvré dans les domaines du commerce, des banques, du transport et de la politique. Des générations se sont succédé après lui, et en reconnaissance des possibilités qui leur étaient offertes, ces gens sont devenus les plus généreux des bienfaiteurs au point que de nombreux établissements culturels, médicaux et d'enseignement continuent aujourd'hui de profiter de leur grande générosité.

Hartland Molson était un descendant authentique de son ancêtre pionnier. Son engagement envers sa collectivité était exemplaire, tant en paroles qu'en actes. En sa qualité de sénateur, il a su insuffler ici une atmosphère de respect et de dévotion qui constitue un exemple pour nous tous.

Soit dit en passant, je me rappelle bien que pendant les longues vigiles où il a été question de la TPS, le meilleur refuge que l'on pouvait trouver lorsque le whip du gouvernement n'était pas là, c'était le bureau de Hartland, où l'on n'avait pas à se limiter à la marque familiale. Le bureau était plein de souvenirs des Canadiens de Montréal. Hartland était un des derniers propriétaires d'équipe professionnelle connue sous l'appellation de sportsman. C'était un fier Montréalais, heureux d'être intimement mêlé à une activité qui faisait la fierté de tous les Montréalais. Ce n'est pas une coïncidence si certaines des saisons les plus mémorables des Canadiens se sont déroulées pendant que la société Molson était propriétaire de l'équipe.

Les sénateurs ont toujours droit au titre d'«honorable» après leur retraite, mais je crois que nous pouvons tous convenir que peu d'entre eux le méritaient autant que Hartland Molson. Puissent-il reposer dans la paix qu'il mérite à si juste titre.

Des voix: Bravo!

L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, je me joins à mes collègues pour rendre hommage à feu le sénateur Hartland Molson, que l'on a décrit comme étant un héros de guerre, un homme d'État, un visionnaire en affaires et un entrepreneur du domaine sportif ayant assuré à une époque la présidence de la concession sportive la plus excitante au monde. Hartland Molson était un authentique gentleman dans tous les sens du terme.

Il était pour moi un sénateur exemplaire et un ami, qui a toujours manifesté un intérêt peu commun à l'égard de mes activités. Souvent, lorsque je revenais d'une mission d'observation des élections, le sénateur Molson voulait savoir ce que j'avais vécu dans une partie donnée du monde et les impressions que j'en avais retenues.

Je vais raconter une petite anecdote. Certains sénateurs se souviennent sans doute de feu Danny Gallivan, qui pendant sa brillante carrière de descripteur a su donner beaucoup de couleur à ses commentaires, faire preuve d'une vive imagination et soulever l'exaltation des millions de partisans qui ont suivi les exploits des Canadiens de Montréal au cours de certaines des glorieuses années se situant entre 1950 et 1984. Mon ami Danny Gallivan est décédé en 1993. Peu de temps plus tard, certains de ses amis et admirateurs ont convenu qu'un fonds commémoratif de bourses d'études devrait être établi au nom de Danny à l'Université St. Francis Xavier. On m'a demandé d'assurer la présidence générale du fonds.

J'ai immédiatement demandé au sénateur Molson d'assurer la présidence honoraire. Il a été fort réticent. Il a tout d'abord hésité, mais il m'a promis de me donner une réponse quelques jours plus tard. Lorsque nous avons enfin pu nous parler, j'étais au Pakistan afin de contribuer à convaincre les autorités de ce pays que des observateurs électoraux seraient utiles aux fins de l'évaluation du caractère équitable et légitime, ou non dans certains cas, des élections prochaines et de la confirmation de cette situation à l'échelle de la planète.

(1420)

Quoi qu'il en soit, le téléphone a sonné dans ma chambre d'hôtel. C'était ma secrétaire à Ottawa qui avait le sénateur Molson à l'autre bout du fil. «Où es-tu vieille branche?», m'a-t-il demandé. J'ai répondu: «Je suis à Islamabad.»

«Tu es fou», a-t-il dit.

«Penses-tu que je serais fou, Hartland, si je demandais à la Fondation Molson 50000$ pour le fonds de bourses d'études Gallivan?», lui ai-je demandé.

Il y a eu un long silence. Il a ensuite dit:«Je pars à l'étranger pour deux semaines vendredi après-midi. Si tu peux être à mon bureau de Montréal vendredi matin, nous en discuterons.»

Bref, par un itinéraire tortueux et après avoir franchi de nombreux fuseaux horaires, je me suis présenté les yeux rougis, mais relativement intact, au bureau du sénateur Molson, à 10h30 le vendredi matin. Après avoir discuté abondamment de mon voyage et du fonds de bourses d'études, le sénateur Molson, alors âgé de 86 ans, m'a conduit personnellement à mon hôtel en voiture. Nous avons eu les 50000$ et avons officiellement lancé la campagne pendant la Soirée du hockey, à l'occasion d'une rencontre mémorable entre ces vieux rivaux qu'étaient les Maple Leafs de Toronto et les Canadiens de Montréal.

Comme l'a mentionné le sénateur Meighen, le sénateur Molson a été décrit comme une personnalité représentant la quintessence de l'establishment. Il a effectivement été un des grands Canadiens de notre époque. Il connaissait sa place et il respectait celle de tout être humain vivant ici-bas. Nous rendons hommage à ce Canadien extraordinaire et nous offrons nos condoléances à notre collègue, le sénateur Meighen, et à tous les autres membres de sa famille élargie.

Des voix: Bravo!

[Français]

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, dans ma circonscription à 100 p. 100 francophone, tout le monde connaissait le nom de Molson.

Je me souviens très bien du sénateur Molson surtout lorsque les Nordiques de Québec donnaient du fil à retordre aux Canadiens de Montréal: quand les Nordiques remportaient la victoire, j'attendais que le sénateur Molson soit assis confortablement dans son siège. En passant devant lui, je lui disais: «Sorry!».

Certains se souviendront que durant la période tumultueuse du débat au Sénat au sujet de la taxe sur les produits et services (TPS), il était difficile de se lever et de prendre la parole. Le sénateur Molson qui était favorable à cette mesure, a attendu son tour jusqu'à 3h30 du matin. Pendant 40 minutes, il a parlé de l'importance de cette taxe et du fait qu'elle n'était pas populaire, mais nécessaire pour le Canada.

Mes collègues d'en face, qui se trouvaient du côté de l'opposition à l'époque, ne l'ont pas ménagé. J'étais mal à l'aise parce qu'un homme de cet âge, digne de respect et courageux, ne méritait pas de se faire quasiment insulter. Je me souviens que le sénateur Molson a fait son discours, il a attendu qu'on lui apporte ses bleus, il les a corrigés et à 6 heures du matin, il a pris son chapeau et il est parti. J'ai trouvé cela extraordinaire.

[Traduction]

L'honorable Francis William Mahovlich: Honorables sénateurs, c'est avec une grande tristesse que j'ai appris le décès de l'honorable Hartland de Montarville Molson. Un fier Canadien, sa prestigieuse carrière dans le monde des affaires lui avait gagné une grande réputation et beaucoup d'influence. C'était un héros de la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle il a effectué plus de soixante missions comme pilote de chasse durant la bataille d'Angleterre. Sur la scène politique, il a toujours défendu les intérêts du Canada. Dans le monde du sport, il a joué un rôle de premier plan dans la promotion du hockey au Canada, à titre de président du conseil d'administration et de président des Canadiens de Montréal.

Je n'ai jamais rencontré dans ma vie une personne qui se passionnait autant pour le hockey. C'était sa vision et son soutien de l'équipe qui avaient permis à l'équipe des Canadiens de remporter la Coupe Stanley cinq années de suite. Il était non seulement un grand dirigeant de l'organisation, mais aussi l'un plus grands admirateurs de l'équipe, assistant fidèlement à toutes les parties jouées à Montréal.

M. Molson a toujours fait preuve d'excellence dans ce que je considère comme l'une de ses plus grandes qualités, les relations personnelles. Il a toujours accordé un appui indéfectible à la direction et aux joueurs en traitant tout le monde avec dignité et respect. Il est incroyable de constater à quel point une équipe peut être unie quand la direction fait preuve de vision et de courage.

Je me souviens avec affection du moment, en 1957, où nous avions essayé de former une association avec des joueurs tels que Ted Lindsay, Jimmy Thompson des Maple Leafs de Toronto et
Doug Harvey des Canadiens de Montréal. J'en avais parlé à
M. Molson. Il y avait alors six propriétaires, dont cinq étaient opposés à l'idée d'une association. Hartland a essayé de les convaincre qu'il n'y aurait pas de difficultés. Il avait tout le temps affaire aux syndicats dans les brasseries et n'avait jamais eu à s'en plaindre. Toutefois, notre idée d'association a été rejetée, et ce n'est que dix ans plus tard qu'elle a vu le jour, ce qui a finalement permis aux joueurs de s'organiser pour obtenir une pension décente. Il n'en reste pas moins que j'avais beaucoup apprécié les efforts de
M. Molson en faveur des joueurs à ce moment-là.

Nous nous souviendrons toujours avec une grande affection de ce grand Canadien que fut Hartland Molson. Je voudrais présenter mes condoléances les plus sincères aux membres de sa famille.

L'honorable Joseph A. Day: Honorables sénateurs, je voudrais me joindre à mes autres collègues du Sénat pour rendre hommage au sénateur Molson. Comme le sénateur Meighen l'a dit, Hartland Molson était diplômé du Collège militaire royal, dont il a été pendant des années chancelier honoraire, comme il a été président

honoraire de l'association des anciens, le Club des Collèges militaires royaux du Canada. L'une de ses activités favorites était l'organisation de la fête annuelle des brasseries Molson à Montréal, occasion dont il profitait pour montrer aux diplômés et aux cadets du Collège militaire le processus de la fermentation et, en même temps, pour leur faire goûter à la production de l'usine.

Le sénateur Molson a, tout le long de sa vie, appuyé la merveilleuse institution nationale où il a obtenu son diplôme, le Collège militaire royal. Il a réalisé de nombreux projets commerciaux avec ses camarades de promotion comme
Billy Bishop, le sénateur Godfrey et Bud Drury. Je me joins aux honorables sénateurs ainsi qu'aux cadets, aux diplômés et aux amis du Collège militaire royal pour célébrer la vie du sénateur Hartland Molson.

(1430)

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, avec la permission de Son Honneur, je voudrais un autre jour profiter de la période des déclarations de sénateurs pour rendre hommage à l'un de nos collègues indépendants du Québec, le sénateur Molson, qui avait été nommé en 1955, car je ne m'attendais pas à ce que des hommages lui soient rendus aujourd'hui. J'attendrai donc cet autre jour pour dire quelques mots de mes relations avec le sénateur Molson.

[Français]

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je tiens à signaler la présence à notre tribune de M. Georges Rawiri, Président du Sénat de la République gabonaise. Il est accompagné de M. Étienne Guy Mouvagha Tchioba, Président du Groupe parlementaire ADS, du docteur Jean Marie Aganda-Akelaguelo, Président du Groupe parlementaire PGP/RDP, de Mme Martine Bondo, sénatrice, Commission des Affaires étrangères du parti au pouvoir PDG, du professeur Paulin Nguema Obam, Président de la Commission des Affaires culturelles, PNB/RPG et de Mme Charlotte Kombila, RNB/RPG.

Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LA SANTÉ

L'EXAMEN DILLIGENT DES NOUVEAUX MÉDICAMENTS

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, au mois de février dernier, le gouvernement du Canada a lancé sa stratégie d'innovation dont l'objectif était que le Canada se classe parmi les cinq premiers pays dans le monde en matière de R-D d'ici 2010.

[Français]

Bien que cet objectif soit ambitieux, il est possible de faire beaucoup dans le cadre des programmes existants qui nuisent actuellement à des améliorations de ce genre.

[Traduction]

Un de ces programmes a cours à la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada. Il faut maintenant plus de
700 jours pour examiner et approuver les nouveaux médicaments, alors que la cible de Santé Canada est de 345 jours. C'est incroyable, compte tenu qu'Industrie Canada a lancé sa propre stratégie en matière de sciences et de technologie en avril 2002. Selon cette stratégie, si les entreprises privées au Canada ne peuvent obtenir rapidement un examen et une approbation des nouveaux produits, elles iront ailleurs, empêchant ainsi le Canada de se classer à un rang plus élevé dans le monde.

[Français]

J'aimerais citer plus précisément ce rapport, qui souligne ce quisuit:

Non seulement les possibilités économiques et scientifiques fondées sur ces nouveaux produits seront-elles perdues pour les Canadiens, mais les possibilités que présente l'application de ces idées dans la société le seront également.

Par exemple, les retards répétés dans l'approbation de nouveaux médicaments pourraient inciter les fabricants de produits pharmaceutiques à s'installer ailleurs qu'au Canada. Le Canada perdrait ainsi la recherche et le développement réalisés par ces entreprises et les revenus provenant de la production de ces médicaments.

De plus, il est possible que les Canadiens ayant besoin de ces nouveaux médicaments aient à subir des délais considérables avant de les recevoir.

[Traduction]

Honorables sénateurs, si le gouvernement du Canada veut atteindre ses objectifs par la stratégie de l'innovation, il doit veiller à ce que tous les ministères travaillent de concert. En réduisant les délais d'examen et d'approbation des médicaments à Santé Canada, nous pouvons accroître les investissements de l'industrie pharmaceutique en R-D au Canada, ce qui aidera le Canada à se classer parmi les cinq premiers pays dans le monde.

[Français]

LE MOIS DU CANCER DU SEIN

L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, le mois d'octobre est le Mois du cancer du sein. Le cancer du sein constitue l'une des affections les plus graves, les plus angoissantes et aussi les plus fréquentes auxquelles les Canadiennes ont à faire face aujourd'hui.

[Traduction]

On ne connaît toujours pas exactement les causes du cancer du sein, mais on est en train de découvrir un nombre accru de facteurs de risque, ce qui contribuera à la prévention de cette forme de cancer.

Récemment, par exemple, le Dr Pierre Band, qui travaille à Santé Canada, a démontré que les adolescentes doublent pratiquement le risque de contracter un cancer du sein plus tard dans leur vie en commençant à fumer moins de cinq ans après leurs premières menstruations. Et ce risque persiste même si elles cessent de fumer au début de la vingtaine. C'est là une découverte très importante.

Comme vous le savez, le tabagisme se répand rapidement chez les adolescentes canadiennes. En fait, c'est devenu, je crois, la principale question de santé chez les femmes.

De même, le Dr Christine Freidenreich, de l'Alberta Cancer Board, a démontré récemment que le manque d'exercice physique augmentait de 30 p. 100 le risque de cancer du sein. Même une marche de 30 minutes constitue une mesure préventive efficace.

Le Dr Freidenreich reçoit l'appui de l'Initiative canadienne pour la recherche sur le cancer du sein, un regroupement unique d'organismes à but non lucratif publics et privés, tels que les Instituts canadiens de recherche en santé, qui assure une recherche coordonnée en profitant de la force de tous ses partenaires.

[Français]

De la même façon, cet organisme subventionne les travaux du
Dr Jacques Simard, directeur des Laboratoires des cancers héréditaires à l'Université Laval. Le docteur Simard, un chercheur de réputation internationale a démontré que deux gênes, soit les gênes BRCA1 et BRCA2 permettent d'identifier une prédisposition certaine au cancer du sein.

[Traduction]

Honorables sénateurs, il n'existe actuellement aucun moyen de prévenir définitivement le cancer du sein. Cependant, grâce aux efforts de chercheurs tels que les Drs Band, Freidenreich et Simard, nous allons gagner la bataille contre cette atroce maladie.

[Français]

LE SOMMET DE LA FRANCOPHONIE DE 2002

L'honorable Pierre De Bané: Honorables sénateurs, depuis quelques jours, les seuls échos que l'on entend dans cette Chambre à la suite du Sommet de la Francophonie qui vient de se clôturer à Beyrouth n'ont trait ni à la francophonie, ni à la tragédie du peuple palestinien, ni aux causes de la crise au Moyen-Orient, qui dure depuis plus d'un demi-siècle et dont les répercussions ne peuvent être surestimées. Cela étant, je voudrais faire quelques observations.

Lors du Sommet de la Francophonie de Moncton, qui a précédé celui de Beyrouth, les invitations étaient du ressort exclusif du gouvernement canadien. Il en fut de même à Beyrouth.

Lors du Sommet de Moncton, le Canada, en tant que pays hôte, a invité sans exception tous les chefs d'État et de gouvernement membres de la Francophonie, nonobstant les réserves que nous avions sur certaines des personnalités invitées.

L'un des socles de la politique étrangère canadienne est notre opposition à l'exclusion de quelque pays que ce soit d'organisations internationales. Cette donnée fondamentale de notre politique étrangère est une constante et nous l'avons proclamée bien haut, notamment en faveur d'Israël.

Sayed Nesrallah est un haut dirigeant chiite et, à ce titre, était l'un des invités parmi les dignitaires des 17 communautés religieuses qui font partie du tissu social libanais et du Parlement de ce pays.

Il est significatif, alors que certains se scandalisent que le premier ministre canadien, tout comme les premiers ministres du Québec et du Nouveau-Brunswick, n'aient pas quitté la salle où tous les leaders du Liban était présents, y compris le chef religieux Sayed Nesrallah, que le voisin immédiat de celui-ci était le vénéré Patriarche de l'Église greque-catholique, Sa Béatitude Gregorios III Laham, B.S., qui est une des figures marquantes de l'Église catholique universelle.

Tous les chefs d'État et de gouvernement de pays qui sont des alliés traditionnels de notre pays ont agi exactement comme le premier ministre du Canada.

[Traduction]

Un choix simple s'offrait au Canada, c'est-à-dire agir comme le premier ministre Chrétien l'a fait ou se retirer. Étant donné que le Canada avait présidé le Sommet de la Francophonie précédent, il aurait commis en se retirant une grossière erreur, dont il aurait eu à supporter les graves conséquences.

Honorables sénateurs, une chose est sûre: rien de ce qu'aurait pu faire le Canada n'aurait changé l'attitude et la décision prise par le gouvernement libanais d'inviter le secrétaire général du Hezbollah, un parti ayant fait élire 11 de ses membres au Parlement.

Enfin, honorables sénateurs, il est temps que chacun d'entre nous reconnaisse l'urgence de mettre fin à la tragédie qui se déroule au Proche-Orient. Tous les habitants de cette région, sans exception, doivent pouvoir vivre librement et dans la sécurité et la dignité. Seules ces conditions pourraient assurer une paix durable dans cette région. Ce n'est pas en boudant une réunion internationale que l'on parviendra à régler une crise qui dure depuis plus de 50 ans.


(1440)

[Français]

AFFAIRES COURANTES

PROJET DE RÈGLEMENT MODIFIANT LE RÈGLEMENT SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS
(RELATIF À L'ENTENTE SUR LE TIERS PAYS SÛRS) ET RÉSUMÉ DE L'ÉTUDE D'IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

DÉPÔT DE DOCUMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, en vertu du paragraphe 5(2) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, j'ai l'honneur de déposer deux copies, dans les deux langues officielles, du document intitulé «Projet de règlement modifiant le Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés et Résumé de l'étude d'impact de la réglementation».

[Traduction]

TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS

DÉPÔT DU RAPPORT VISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat du Canada, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, qui fait état des dépenses du comité pendant la première session de la trente-septième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à la page 113.)

DROITS DE LA PERSONNE

DÉPÔT DU RAPPORT VISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat du Canada, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne, qui traite des dépenses du comité pendant la première session de la trente-septième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à la page 114.)

FINANCES NATIONALES

DÉPÔT DU RAPPORT VISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat du Canada, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales, qui traite des dépenses du comité pendant la première session de la trente-septième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à la page 115.)

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

DÉPÔT DU RAPPORT VISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat du Canada, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, qui traite des dépenses du comité pendant la première session de la trente-septième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à la page 116.)

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

DÉPÔT DU RAPPORT VISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat du Canada, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, qui traite des dépenses du comité pendant la première session de la trente-septième législature.

(Le texte du rapport figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui à la page 117.)

L'ASSOCIATION PARLEMENTAIRE CANADA-EUROPE

LA CINQUIÈME CONFÉRENCE DES PARLEMENTAIRES DE LA RÉGION ARCTIQUE DU 11 AU 13 AOÛT 2002—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Francis William Mahovlich: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la délégation de l'Association parlementaire Canada-Europe à la cinquième conférence des parlementaires de la région arctique ayant eu lieu à Tromso, en Norvège, du 11 au 13 août 2002.

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À ÉTUDIER LE RAPPORT INTITULÉ «ÉTAT DES LIEUX SUR LA SITUATION DE L'ACCÈS À LA JUSTICE
DANS LES DEUX LANGUES OFFICIELLES»

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le rapport intitulé «État des lieux sur la situation de l'accès à la justice dans les deux langues officielles», révisé le 25juillet 2002 et commandé par le ministère de la Justice du Canada soit déféré au Comité permanent des langues officielles pour étude et rapport;

Que le Comité étudie ledit rapport en vue de clarifier l'accès et l'exercice aux droits linguistiques concernant la Loi sur le divorce, la Loi sur la faillite, le Code criminel, la Loi sur les contraventions et d'autres lois en conséquence, s'il y a lieu.

TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.

[Traduction]

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

[Français]

AVIS DE MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE SON ÉTUDE SUR LES ENJEUX STRATÉGIQUES TOUCHANT L'INDUSTRIE
DU TRANSPORT INTERURBAIN PAR AUTOCAR

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à examiner pour en faire rapport les enjeux stratégiques touchant l'industrie du transport interurbain par autocar.

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le vendredi 20 décembre 2002, et;

Que les mémoires reçues et les témoignages entendus sur la question par le comité au cours de la première session de la trente-septième législature soient déférés au comité.

DROITS DE LA PERSONNE

AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je donne avis que demain, mercredi le 30octobre 2002, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.

[Traduction]

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je donne avis que demain, mercredi 30 octobre 2002, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À MENER UNE ÉTUDE SUR LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE NATIONALE SUR LA SÉCURITÉ

L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mercredi 30 octobre 2002, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé à mener une étude et à faire rapport sur la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada. Le Comité sera en particulier autorisé à examiner:

a) la capacité du ministère de la Défense nationale de défendre et de protéger les intérêts, la population et le territoire du Canada et sa capacité de réagir à une urgence nationale ou à une attaque ou de prévenir ces situations;

b) les relations de travail entre les divers organismes participant à la collecte de renseignements, comment ils recueillent, colligent, analysent et diffusent ces renseignements, et comment ces fonctions pourraient être améliorées;

c) les mécanismes d'examen de la performance et des activités des divers organismes participant à la collecte de renseignements;

d) la sécurité de nos frontières.

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus dans la première session de la trente-septième législature soient déférés au Comité;

Que le Comité fasse rapport au Sénat au plus tard
le 28 février 2004 et qu'il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions jusqu'au 31 mars 2004.

AGRICULTURE ET FORÊTS

LES CONCLUSIONS DU RAPPORT INTITULÉ «LES AGRICULTEURS CANADIENS EN DANGER»—AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 31 octobre 2002, j'attirerai l'attention du Sénat sur les conclusions du rapport du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts intitulé «Les agriculteurs canadiens en danger», déposé le 13 juin 2002 au Sénat durant la première session de la trente-septième législature.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LA DÉFENSE NATIONALE

L'AFGHANISTAN—L'ARTICLE DE JOURNAL SUR L'ÉCHANGE PAR DES MILITAIRES D'UN CAMION SANITAIRE CONTRE DES PETITS-DÉJEUNERS ET DES DÎNERS

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, nous regrettons les blessures subies par votre très compétent adjoint.

Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Un article paru dans la chaîne de journaux Sun rapporte que nos troupes ont échangé leur camion sanitaire contre des petits-déjeuners et des dîners. Le gouvernement peut-il expliquer à la Chambre comment il se fait que le Canada, un pays du G-8, doit dépendre des Américains pour assurer le petit- déjeuner et le dîner de nos troupes en Afghanistan?

(1450)

Je me demande si madame le leader du gouvernement au Sénat ou en fait le leader du gouvernement à l'autre endroit ou tout autre Canadien ayant des responsabilités et de la fierté peut nous expliquer pourquoi nous devons payer pour le petit-déjeuner et le dîner de nos troupes canadiennes en échangeant les services de notre camion sanitaire. C'est scandaleux.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Après avoir lu l'article, je savais que le sénateur allait poser cette question. C'est pourquoi j'ai fait les vérifications appropriées. Cette affirmation est fausse. Nous avons envoyé suffisamment de vivres pour servir à nos troupes des petits-déjeuners, des déjeuners et des dîners.

Cependant, il arrive souvent que nous échangions du matériel. Cette partie de l'article est vraie. Lorsque les Canadiens ont appris que les Américains devaient brûler leurs ordures, il a semblé approprié de leur prêter notre camion sanitaire.

Pendant que j'y suis, je vais répondre à la question que l'honorable sénateur a posée la semaine dernière au sujet d'une réduction de 10 p. 100 de la réserve. On m'assure qu'il n'y a aucun plan et qu'aucune mesure n'a été prise pour réduire de 10 p. 100 notre réserve ou tout autre élément des forces régulières.

LE PRINCE EDWARD ISLAND RESERVE REGIMENT—L'ÉTAT DES VÉHICULES

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je suis heureux d'apprendre cela, car c'était une nouvelle très alarmante.

Je suis également heureux de savoir ce qu'il en est au sujet des méthodes de paiement adoptées par le gouvernement canadien en échange des services que nous offrent non seulement les États-Unis, mais également d'autres nations, car l'article dans la chaîne des journaux Sun était incroyable et plutôt scandaleux. Cependant, je suis très inquiet des répercussions du manque de ressources sur les Forces canadiennes et la réserve en particulier dans ce cas-ci.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous confirmer que le Prince Edward Island Regiment, un régiment blindé de reconnaissance de la réserve, n'a aucune jeep Iltis en état de fonctionner? Je pense qu'il y en a plus de 20 au total, mais je ne peux le confirmer. Madame le leader pourrait-elle me dire, ou sait- elle à la suite des séances d'information auxquelles elle a assisté, si oui ou non ce régiment est incapable de s'entraîner à cause de l'état de ces véhicules?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je dois dire à l'honorable sénateur que je n'ai pas ces renseignements sous la main. J'ajoute par ailleurs que, compte tenu d'autres faits sérieux que le sénateur a portés à mon attention et qui n'étaient pas tout à fait exacts, je doute que ceux-ci ne le soient pas tout à fait eux aussi. Qu'importe, je ferai tout en mon pouvoir pour obtenir les renseignements en question de manière à les communiquer au sénateur dès que possible.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, si madame le leader du gouvernement veut se montrer sarcastique, qu'elle ne se gêne pas. Elle sait que nous posons parfois ces questions pour qu'elle puisse apporter la preuve contraire en fournissant certaines précisions.

Madame le leader du gouvernement peut-elle me dire, si elle est découvre que le Prince Edward Island Regiment n'est pas en mesure de s'entraîner comme il se doit en raison du non-fonctionnement de ses jeeps, ce que le gouvernement compte faire relativement à ces véhicules?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je m'informerai certainement afin de fournir une réponse au sénateur. Il est évident que le Prince Edward Island Regiment est important pour le Canada et que, par conséquent, il importe que ce régiment ait l'équipement nécessaire pour s'entraîner au mieux de sa capacité.

Je dois dire que l'honorable sénateur et moi-même avons une divergence de vues sur ce qu'est la période des questions. Quand je posais des questions à l'Assemblée législative du Manitoba, je connaissais toutes les réponses.

LA FONCTION PUBLIQUE

L'OBJECTIF DE RECRUTEMENT DES MINORITÉS

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. Elle découle d'un article paru en première page de l'Ottawa Citizen d'hier annonçant que la fonction publique du Canada manquera son objectif de recrutement de membres des minorités. Il y a plus de deux ans, le gouvernement du Canada avait entrepris la mise en œuvre d'un plan destiné à remédier à des décennies de racisme dans le recrutement de la fonction publique grâce à l'attribution aux membres des minorités visibles d'un poste sur cinq en cas de nouveaux recrutements dans la fonction publique. Le gouvernement a approuvé un plan d'action et a affecté 30 millions de dollars aux ministères pour qu'ils prennent les dispositions nécessaires afin que, d'ici mars 2003, une nouvelle recrue sur cinq soit membre d'une minorité visible. La fonction publique a averti qu'elle était loin d'atteindre cet objectif. Honorables sénateurs, le manque de sérieux des efforts déployés par le gouvernement pour assurer l'égalité dans l'avancement au sein de la fonction publique du Canada n'est jugé acceptable ni par les minorités visibles ni par l'ensemble des Canadiens.

Est-ce que madame le leader du gouvernement au Sénat peut nous dire quelles mesures extraordinaires son gouvernement est disposé à prendre maintenant pour atteindre cet important objectif d'un sur cinq dans les délais prévus il y a trois ans, afin d'assurer aux minorités visibles la place qui leur revient aux niveaux supérieurs de la fonction publique canadienne?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie le sénateur de sa question. Je dois dire que je commence à bien connaître les membres de l'opposition. Il y a deux questions que j'ai demandé à mes collaborateurs d'étudier hier et aujourd'hui: la première était celle du sénateur Forrestall et la seconde, celle du sénateur Oliver. Je sais que le sénateur Oliver tient ce sujet très à cœur. Je voulais donc avoir une réponse à lui donner si possible.

Le groupe de travail a présenté des objectifs très ambitieux. La fonction publique travaille très fort pour les atteindre, mais elle admet que ce sera difficile. Les chiffres de représentation sont quand même passés de 5,7 à 10 p. 100. Ce n'est clairement pas l'objectif que nous nous sommes fixé, et il nous faut donc à travailler encore plus fort pour essayer de l'atteindre. Ce sera difficile, compte tenu du fait que nous devons veiller à appliquer pleinement le principe du mérite au stade du recrutement. Comme mon honorable collègue, je crois qu'il est possible de trouver des membres des minorités visibles qui ont les compétences, les qualités et la formation voulues pour être recrutés selon le principe du mérite.

Le sénateur Oliver: Honorables sénateurs, est-ce que madame le ministre peut nous expliquer pourquoi le programme de diversité du gouvernement a échoué? Mme Mawani a dit, comme on peut le lire dans l'Ottawa Citizen:

Nous nous attendions à un changement radical de la culture organisationnelle. Le plan d'action ne visait pas simplement les chiffres. Quand on s'approche de la diversité et de la représentativité, cela en soi engendre encore plus de diversité [...]. Le plan d'action ne donnait pas l'impression d'imprimer l'élan nécessaire pour faire progresser le programme de diversité du gouvernement.

Pourquoi le programme de diversité du gouvernement a-t-il échoué? Qu'est-ce que le gouverneur en conseil est disposé à faire pour corriger cette injustice? Madame le ministre, nous avons actuellement plus de 250 postes de sous-ministres et de sous- ministres adjoints dans la fonction publique du Canada. La représentation des minorités visibles dans ce groupe n'atteint même pas 3 p. 100. Est-ce que le gouvernement compte prendre immédiatement des mesures positives pour remédier à cette situation?

Le sénateur Carstairs: L'honorable sénateur parle de diversité, et je ne peux qu'être d'accord avec lui. Il n'y a pas de doute parmi les femmes que, sur le plan de la culture organisationnelle, les attitudes changent très sensiblement lorsque les nombres augmentent. En réalité, cependant, les sous-ministres et les sous-ministres adjoints ne sont pas remplacés très souvent. Quand ils le sont, ceux qui leur succèdent sont ordinairement choisis parmi les personnes qui se trouvent au niveau inférieur suivant. Pour accroître la représentation de nos minorités visibles, nous devons augmenter leur représentation générale dans l'ensemble de la fonction publique. Nous y arrivons petit à petit, comme je l'ai mentionné dans ma réponse à la première question, quand j'ai dit que nous sommes passés de 5,7 p. 100 à 10 p. 100. Nous avons besoin d'aller beaucoup plus loin pour atteindre l'objectif d'un sur cinq, comme il l'a mentionné. Mais, honorables sénateurs, il nous faudra du temps pour cela. Je ne crois pas que nous ayons échoué.

(1500)

Cela prendra du temps, honorables sénateurs. Nous n'avons pas échoué. Nous avançons vers cet objectif et il nous faudra plus de temps pour l'atteindre.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): N'est- il pas vrai que les sous-ministres sont nommés par décret?

Le sénateur Carstairs: Le sénateur a parfaitement raison, mais ils sont nommés sur la base de leur mérite et de leur expérience.

Le sénateur Kinsella: Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas opté pour un objectif plus réaliste, par exemple 25 p. 100 de l'ensemble des postes de sous-ministres, et ne s'est-il pas servi de son pouvoir de nomination par décret pour trouver des candidats à l'échelle du Canada? Pour reprendre les paroles de ma collègue, il se peut que le gouvernement ne trouve pas les personnes qualifiées dans les rangs de l'actuelle fonction publique du Canada, mais ne croit-elle pas qu'il puisse les trouver ailleurs au Canada?

Le sénateur Carstairs: Je reconnais que nous pourrions les trouver au Canada. Le gouvernement veut également faire de la fonction publique un organisme qui sait récompenser ceux qui ont bien travaillé dans nos institutions. Le gouvernement veut favoriser l'avancement professionnel à partir de la base.

Comme le sait le sénateur, la rétention des bons éléments s'est révélée problématique. L'un des moyens s'offrant au gouvernement pour les retenir est de s'assurer que ces employés sachent que l'avancement professionnel est possible dans la fonction publique.

Le sénateur Kinsella: Madame le ministre reconnaîtra sûrement que la rétention du personnel pourrait être améliorée si les fonctionnaires constataient qu'il n'y a effectivement pas de plafonnement voilé dans la fonction publique canadienne, que ce soit pour les femmes ou pour les membres des minorités visibles. Madame le ministre convient-elle que l'action positive, l'équité en matière d'emploi, consiste tout simplement, pour le gouvernement, à décider résolument de trouver des candidats de façon à éliminer la discrimination systémique laquelle, à franchement parler, nous n'avons pas réussi à enrayer au cours des dix dernières années?

Le sénateur Carstairs: Comme je l'ai déjà expliqué dans mes réponses au sénateur Oliver, nous nous employons à la faire disparaître petit à petit, ce qui explique que nous soyons passés de 5,7 p. 100 à 10 p. 100 et que nous visions des pourcentages plus élevés.

LES FINANCES

LA DEMANDE DU MINISTRE DES FINANCES VISANT À FAIRE ÉTUDIER PAR LE COMITÉ DES BANQUES ET DU COMMERCE LA POLITIQUE RELATIVE AUX FUSIONS BANCAIRES

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, j'aimerais dire quelques mots sur un article publié aujourd'hui dans le Globe and Mail sous le titre «Ottawa fait avorter les discussions sur les fusions bancaires».

Le ministre des Finances Manley avait consulté par lettre le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et le Comité permanent des finances de la Chambre des communes relativement aux répercussions des fusions bancaires sur l'intérêt public. Aujourd'hui, le Globe and Mail rapporte que le cabinet du premier ministre a fait avorter les discussions entre la Banque de la Nouvelle-Écosse et la Banque de Montréal. Qui est responsable de la politique gouvernementale sur ces questions? Sont-ce les bureaucrates et les collaborateurs politiques du cabinet du premier ministre ou est-ce le ministre des Finances?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il est bien évident que le ministre des Finances n'a pas écrit au comité sénatorial et au comité de la Chambre des communes sans avoir d'abord consulté le premier ministre.

Ce qui a été demandé et ce que , je crois savoir, vont entreprendre le Comité sénatorial des banques et le Comité des finances de la Chambre des communes, c'est une étude sur l'interprétation précise de la politique relative aux fusions bancaires.

L'article dans les médias disant que les discussions ont été interrompues ou avortées est inexact. Le gouvernement a décidé qu'il voulait que la question soit étudiée par les deux comités.

Le sénateur Tkachuk: Honorables sénateurs, le ministre des Finances a envoyé une lettre dans laquelle il demandait une consultation auprès du comité sénatorial, mais le comité ne s'est pas encore réuni pour examiner cette demande. C'est pour aider les honorables sénateurs à décider s'il faut agréer à cette demande ou même l'examiner que je pose la question sur la politique précise du gouvernement.

Madame le ministre va-t-elle obtenir une lettre du cabinet du premier ministre qui clarifie cette politique? Ce sujet nous intéresse au plus haut point. Les rumeurs de fusion bancaire ou de non-fusion ont une grande incidence sur les marchés boursiers. Personne ne sait ce qui se passe. Les cours montent à la suite d'un commentaire et ils descendent à la suite d'un autre. À mon avis, cela n'est pas très bon pour les investisseurs. Il semble qu'il n'y ait pas de politique nette.

Madame le ministre écrirait-elle au premier ministre pour lui demander de préciser si cet article est vrai? Est-ce que les fusions bancaires sont suspendues jusqu'à ce que le premier ministre quitte son poste, ce qui pour autant que je sache n'arrivera pas avant 2004?

Le sénateur Carstairs: En vérité, honorables sénateurs, cette demande est redondante. La politique du gouvernement est claire. C'est celle que le ministre des Finances a établie. À cet égard, le ministre a demandé au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce ainsi qu'au Comité permanent des finances de la Chambre des communes de déterminer quel est, à leur avis, l'avantage des fusions pour le grand public. Voilà ce qui a été demandé au comité sénatorial. En sa qualité de vice-président de ce comité, j'espère que c'est ce que l'honorable sénateur acceptera de faire.

Le sénateur Tkachuk: Quelle est la politique du gouvernement à l'égard des fusions?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, le gouvernement a demandé des éclaircissements au comité sénatorial qui a fait un excellent travail dans le passé sur les fusions bancaires. Le gouvernement a également demandé au Comité permanent des finances de l'autre endroit de faire un travail du même niveau. Ces deux comités doivent présenter leurs conclusions au ministre des Finances dans les meilleurs délais pour qu'elles soient intégrées dans les lignes directrices.

LE SÉNAT

LA DEMANDE DU MINISTRE DES FINANCES VISANT À FAIRE ÉTUDIER PAR LE COMITÉ DES BANQUES ET DU COMMERCE LA POLITIQUE RELATIVE AUX FUSIONS BANCAIRES

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, depuis quand un comité sénatorial devient- il un prolongement d'un ministère du gouvernement? Je crois comprendre d'après la réponse initiale de madame le leader du gouvernement qu'elle croit que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se chargera de cette responsabilité. Cela veut-il dire que le comité doit interrompre ses travaux actuels et se conformer au désir du ministre? Je trouve cela plutôt répugnant, franchement.

Les comités sénatoriaux doivent être indépendants du gouvernement, y compris pour l'examen des projets de loi émanant du gouvernement. Je m'oppose complètement à toute présomption qu'un comité sénatorial fera automatiquement une chose parce que le ministre des Finances le lui a demandé par lettre.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): J'ai rencontré hier après-midi le président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. J'ai probablement mal compris ce que le président m'a dit. Il est venu me dire que cette demande avait été adressée au Comité sénatorial des banques. Je lui ai dit que, si les membres du comité étaient disposés à examiner la demande, j'espérais qu'ils le fassent.

LES FINANCES

LA DEMANDE DU MINISTRE DES FINANCES VISANT À FAIRE ÉTUDIER PAR LE COMITÉ DES BANQUES ET DU COMMERCE LA POLITIQUE RELATIVE AUX FUSIONS BANCAIRES

L'honorable David Tkachuk: Normalement, je ne pose pas plus de deux questions, mais c'est un sujet très déroutant pour moi. À en juger d'après ce qu'a dit la ministre, j'ignore toujours complètement en quoi consiste la politique du gouvernement en matière de fusionnement des banques.

Le ministre Manley a également rendu public un communiqué annonçant que le comité étudierait la question, alors que le comité n'avait encore exprimé aucun accord confirmant qu'il le ferait. Je ne sais pas si le comité examinera ou non la question. Il appartient à tous les membres du comité de le décider. Le comité a été invité à tenir des consultations, ce qui était gentil de la part du ministre, et les membres du comité se réuniront pour discuter de la question.

Madame le ministre pourrait peut-être nous expliquer comment tout cela a pu se produire, et donner au Sénat un peu d' information sur la politique du gouvernement, car certains honorables sénateurs ne savent pas vraiment très bien de quoi il retourne.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Des honorables sénateurs ont mené dans le passé des études très sérieuses sur la question des fusions bancaire. Ils ont fait savoir au ministre des Finances qu'ils souhaitaient être consultés avant qu'on envisage tout changement à la politique concernant ces fusions.

Le ministre des Finances a donc demandé au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, et non ordonné ni exigé de lui, d'étudier toute initiative stratégique future dans ce domaine, conformément à son voeu.

Le ministre a demandé au comité de tenir des audiences publiques sur les grandes questions d'intérêt public que soulèvent les projets de fusion, afin de déterminer ce que pense le public et ce que, après mure réflexion, il croit être dans l'intérêt du pays.

Si le Comité des banques et du commerce choisit de décliner la demande, c'est son affaire. Cependant, je peux concevoir les critiques qui se seraient abattues sur notre tête si nous n'avions pas invité le comité à se pencher sur le sujet.

(1510)

L'AGRICULTURE ET L'AGROALIMENTAIRE

LA SÉCHERESSE DANS L'OUEST—L'INFLUENCE DES CONDITIONS CLIMATIQUES ACTUELLES SUR L'ASSURANCE-RÉCOLTE

L'honorable Leonard J. Gustafson: Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Après la sécheresse qui a frappé une grande partie des Prairies, voici maintenant qu'un manteau de neige recouvre les champs. Dans certaines régions, le tiers des récoltes n'a pas encore été fait. Le gouvernement y a-t-il songé ou est-il seulement conscient du problème? Tiendra-t-on compte de cette situation?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je crois que nous aurions tous préféré, dans l'Ouest, que la neige vienne un peu plus tard car, comme le sénateur le sait encore mieux que moi, la neige contribue au développement de la nappe phréatique dans l'ouest du Canada. En soi, la neige est une bonne chose, mais pas nécessairement à ce moment-ci. Comme le sénateur ne l'ignore pas, le gouvernement a prévu un fonds de transition de 600 millions de dollars. On n'envisage nullement à l'heure actuelle d'y ajouter quoi que ce soit.

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, le problème est le suivant. Un agriculteur qui a une assurance-récolte, mais qui ne récolte rien n'a pas droit à des prestations d'assurance-récolte. Il doit faire ses récoltes avant d'y avoir droit, que celles-ci soient maigres ou abondantes. La situation est très inhabituelle à l'heure actuelle. Je ne me souviens pas d'avoir vu de la neige à cette époque- ci de l'année, avec des températures de 10 à 12 degrés inférieures à la normale comme nous en connaissons à l'heure actuelle. La situation est grave.

Madame le ministre en discutera-t-elle avec le ministre de l'Agriculture et le Cabinet et en informera-t-elle le premier ministre? Je sais que ces conditions sont récentes, mais elles méritent qu'on en tienne compte et qu'on s'y attarde.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je transmettrai certes les préoccupations du sénateur Gustafson au Cabinet.


[Français]

ORDRE DU JOUR

PROJET DE LOI DE 2002 POUR LA MISE EN OEUVRE DE CONVENTIONS FISCALES

TROISIÈME LECTURE—REPORT DU DÉBAT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) propose: Que le projet de loi S-2, Loi mettant en oeuvre un accord, des conventions et des protocoles conclus entre le Canada et le Koweït, la Mongolie, les Émirats Arabes Unis, la Moldova, la Norvège, la Belgique et l'Italie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale et modifiant le texte édicté de trois traités fiscaux, soit lu une troisième fois.

[Traduction]

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, je répète ce que j'ai dit. Je veux faire des observations sur le projet de loi demain, pas aujourd'hui.

(Le débat est reporté.)

LE CODE CRIMINEL LA LOI SUR LES ARMES À FEU

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Jaffer, appuyée par l'honorable sénateur Maheu, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-10, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu.

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, je crois qu'il faut se pencher sur le projet de loi C-10 sur la cruauté envers les animaux et sur les armes à feu. Je pense qu'aucun d'entre nous ne tolère la cruauté envers les animaux.

De temps à autre, les groupes de partisans des droits des animaux nous forcent à dire et à faire des choses que nous ne dirions pas et ne ferions pas normalement. J'estime que nous faisons de nouveau l'objet de pressions relativement à la cruauté envers les animaux.

Les sénateurs ont dit précédemment, le sénateur Joyal, que ce projet de loi n'était pas facile à saisir parce qu'il traite de sujets qui ne sont pas liés directement à la cruauté envers les animaux, par exemple la nécessité de modifier la Loi sur les armes à feu. Je pense que les modifications proposées à la Loi sur les armes à feu devraient être traitées à part. Elles ne devraient pas figurer dans le projet de loi.

Comme les sénateurs le savent sans doute, les gens que les sénateurs Adams, Chalifoux, Christensen et moi-même représentons vivent dans un environnement qui leur cause beaucoup de stress. J'estime que le projet de loi, s'il est adopté, accentuera le stress que connaissent ceux qui chassent ou utilisent les animaux pour leur subsistance. Tous les Canadiens, qu'ils soient Inuits, Indiens ou Métis, jouissent de la protection du droit à la vie en vertu

de la Constitution. Parfois, j'estime que l'administration de la justice fait défaut. Je ne blâme personne pour cela. Cela a beaucoup à voir avec le fait que les Autochtones tiennent tout pour acquis. Nous subissons des pressions de l'extérieur, et le gouvernement intervient pour tenter d'améliorer la situation pour nous. De temps à autre, toutefois, il fait de plus grosses erreurs qu'il ne devrait.

Honorables sénateurs, les mesures prévues dans ce projet de loi seront difficiles à appliquer. Connaissant la situation chez nous et sachant comment les gens vivent dans le Nord, j'estime que l'application de ce projet de loi coûtera cher. Je ne pense pas qu'il y ait assez de policiers dans toutes les régions du pays pour faire respecter les dispositions de ce projet de loi.

Si le gouvernement croit vraiment qu'il faut légiférer pour corriger la situation, pourquoi ne limite-t-il pas la portée du projet de loi aux animaux en captivité au lieu de l'étendre aux animaux vivant dans la nature? Je parle ici des animaux sauvages. Selon le sénateur Joyal, le projet de loi ne fait pas de distinction entre les deux catégories d'animaux. Il serait très dangereux d'adopter ce projet de loi.

Il faut étudier soigneusement et minutieusement le projet de loi, le clarifier pour que l'on comprenne une fois pour toutes ce qu'il est censé faire. Le gouvernement n'adopte pas des lois pour le simple plaisir de les adopter, sans en connaître les conséquences. Si ce projet de loi est étudié trop rapidement, il y aura des erreurs. Il est possible de les corriger. C'est justement le rôle du comité. Honorables sénateurs, il semble que ce projet de loi est confus etpratiquement impossible à mettre en application et sa mise en œuvre coûtera très cher. Je vous rappelle qu'on ne sait pas encore les effets de la loi C-68 sur le contrôle des armes à feu.

On m'a appris récemment que, dans ma petite localité, les forces policières songent à fouiller les entrepôts des citoyens car des carabines ont été utilisées dans des homicides. Honorables sénateurs, cela causera encore plus de stress à nos citoyens. Il faut corriger une telle situation et cette mesure ne le fait pas.

Honorables sénateurs, je vous invite à étudier attentivement ce projet de loi. Je sais que personne ne veut être cruel envers les animaux.

(1520)

Vous avez probablement vu dans le National Geographic ou dans un film de l'Office national du film des images qui montrent un Inuk en train de chasser le phoque sur la glace. Que cherche-t-on sur la glace? Nous ne voyons pas de phoques; nous cherchons des trous d'air. Ces trous d'air que nous repérons sont à peu près de la taille de mon doigt. Nous devons utiliser des harpons; nous ne pouvons pas employer des carabines. Si nous le faisons, nous perdons le phoque. C'est du gaspillage. Nous utilisons des harpons pour chasser les baleines. Pourquoi utilisons-nous un harpon plutôt qu'une carabine? C'est pour éviter de perdre la baleine.

Le matériel traditionnel que nous utilisons encore de nos jours et qui est important pour nous sera-t-il interdit à cause de cette mesure législative? Le cas échéant, cela signifie que même si la Constitution nous reconnaît le droit d'exister, cela ne s'applique pas aux Inuits du Grand Nord.

J'espère que les honorables sénateurs prendront cette question au sérieux.

Des voix: Bravo!

L'honorable David Tkachuk:J'ai une question à poser à l'honorable sénateur Watt, s'il le veut bien.

Le sénateur Watt:Certainement, honorable sénateur.

Le sénateur Tkachuk:, À la fin de son discours, le sénateur Watt a mis le doigt sur le problème lorsqu'il a mentionné la chasse au phoque et la chasse à la baleine. Le sénateur a-t-il beaucoup de craintes au sujet de l'interprétation par les tribunaux de ce qui est cruel pour un animal? Ce qui peut sembler cruel à un citadin qui n'a qu'à se soucier à l'occasion d'attraper une souris est bien différent de ce que les habitants des régions rurales, les agriculteurs et d'autres personnes doivent faire pour se trouver de quoi manger. Je voudrais en savoir davantage sur les préoccupations que l'honorable sénateur peut avoir relativement à l'interprétation que les tribunaux pourraient donner de ce qui est cruel et des répercussions que cela aura, notamment sur la population des Territoires du Nord-Ouest, du nord du Québec et d'autres régions du Canada qui doit chasser pour assurer leur subsistance.

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Tkachuk de sa question.

L'honorable sénateur a parfaitement raison. Cela m'inquiète. Je n'ai présenté que deux exemples de ce que ce projet de loi pourrait signifier. Je ne suis même pas certain que nous pourrons capturer et remettre à l'eau du poisson. Cela sera probablement considéré comme étant cruel. Cela a des répercussions sur mon peuple, mais aussi sur les pourvoyeurs de partout au Canada. C'est un aspect qui m'inquiète.

En ce qui concerne la question de l'honorable sénateur, qui voulait savoir si je me préoccupais du fait que la Cour suprême du Canada soit appelée à tenter de définir la cruauté, cette perspective me préoccupe effectivement. Il arrive, de temps à autre, que ce tribunal soit appelé à interpréter le sens incertain d'un mot dans une loi. C'est important. Il pourrait en résulter toutes sortes de stress additionnel pour les gens que nous représentons. Je crois que nous devrions faire notre possible pour apporter les correctifs voulus au projet de loi. Si cela se révèle impossible, je pense que nous devrions le rejeter.

L'honorable Marcel Prud'homme: Le problème ne provient-il pas en partie de l'ignorance des Canadiens au sujet de ce qu'est vraiment le Canada? Ce n'est pas la première fois que nous tenons ce débat. L'honorable sénateur ne croit-il pas qu'il incombe au Sénat de faire preuve de fermeté et de dire que, quel que soit le niveau d'organisation d'un lobby et quelles que soient les pressions qu'il puisse exercer, le Sénat, dans sa sagesse, entend prendre le temps qu'il lui faut pour voir qui est touché par ce projet de loi, et qu'il votera en conséquence? N'est-il pas vrai que nous connaissons mal notre pays et le véritable rôle du Sénat au sein de notre fédération?

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je pourrais donner différentes réponses à l'honorable sénateur, qui demandait si la population canadienne a une bonne compréhension que ce qu'est notre pays. Une des raisons pour lesquelles j'ai accepté ma nomination au Sénat, par Pierre Elliott Trudeau, c'est que je savais que le rôle du Sénat consiste à représenter les minorités et les régions. Ce mandat me convenait parfaitement, et c'est pourquoi j'ai accepté la nomination qui m'a été offerte.

Comment pouvons-nous éduquer la population canadienne de façon qu'elle comprenne ses responsabilités? Il faut commencer ici. Le Sénat est l'endroit tout désigné pour examiner les questions de ce genre, non pas seulement de façon superficielle, mais aussi en profondeur. Si, un jour, les délibérations du Sénat sont télédiffusées, nous pourrons peut-être éduquer les Canadiens. La Chambre des communes ne semble pas avoir la même vison du village global que celle que les sénateurs Adams, Chalifoux, moi-même et d'autres avons. Nous pouvons nous exprimer librement ici. Dans l'autre endroit, cela n'est pas toujours possible. Le Sénat me semble l'endroit tout indiqué pour faire l'éducation du public.

L'honorable Anne C. Cools: Je prends la parole pour participer au débat de deuxième lecture du projet de loi C-10 visant à modifier le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu. En 1995, le gouvernement et le ministre de la Justice d'alors, Allan Rock, ont saisi le Sénat du projet de loi C-68 sur les armes à feu. Le projet de loi a été adopté malgré la forte opposition de nombreux députés à la Chambre des communes et de beaucoup de sénateurs, y compris moi-même. Au Sénat, les partisans du gouvernement ont refusé toute modification du projet de loi C-68. Depuis, cette nouvelle Loi sur les armes à feu est un échec complet. Sur le plan politique, son adoption a coûté au gouvernement libéral de nombreux sièges à la Chambre des communes et a causé ce qui pourrait être des dommages irréparables dans l'ouest et l'est du Canada, et particulièrement en Alberta.

Beaucoup de députés libéraux regrettent aujourd'hui d'avoir appuyé le projet de loi. L'un de ces députés a prononcé un discours à Ottawa le 22 octobre 2002 devant l'Institut de la gestion financière du Canada. M. Roger Gallaway, qui représente la circonscription de Sarnia-Lambton, a déclaré ce qui suit:

Le registre fédéral des armes à feu est un bon exemple d'une politique insensée devenue loi, une loi que j'ai appuyée, je dois l'admettre à regret aujourd'hui. Comme politique cadre, les objectifs de ce projet de loi avaient été laissés aveuglément aux «experts» du Centre canadien des armes à feu.

Pour 85 millions de dollars, selon les témoignages des experts du ministère, un registre des armes à feu pourrait être mis en place, qui permettrait de suivre la trace des armes à feu au Canada. On devait arriver ainsi à contrôler vraiment la possession d'armes par les personnes ayant des tendances criminelles. Plusieurs années et peut-être un milliard de dollars plus tard, la loi a abouti à une situation lamentable. C'est une vraie plaisanterie. Il y a dans cette salle des spécialistes des projections financières, des circuits de traitement, des prix de revient et des estimations. Pouvez-vous imaginer qu'il soit possible de s'écarter d'une prévision de 1250 p. 100, c'est-à- dire de se tromper de douze fois et demie?

Le Sun d'Edmonton a donné des comptes rendus du discours de
M. Gallaway dans un article d'Andrea Sands qui a paru
le 23 octobre sous le titre «Un député libéral s'en prend violemment à la Loi sur les armes à feu», et aussi dans un article de Mike Jenkinson publié le 24 octobre sous le titre «Vas-y, Roger!»

Il y a beaucoup d'autre députés comme M. Gallaway. Toutefois, leurs préoccupations demeurent lettre morte, comme ce fut le cas en1995.

Honorables sénateurs, le prix extravagant de la loi C-68, et particulièrement du registre des armes à feu, a été évoqué à de multiples reprises au Sénat et dans les comités sénatoriaux, sans qu'on obtienne une réponse ni de l'actuel ni de l'ancien ministre de la Justice. Le 24 novembre 2001, au Comité sénatorial permanent des finances nationales, des fonctionnaires du Conseil du Trésor ont comparu à l'occasion de l'examen du Budget supplémentaire (A) de 2001-2002. Le sénateur Terry Stratton avait alors posé la question suivante à M. Richard Neville, contrôleur général adjoint au Secrétariat du Conseil du Trésor:

Quand allons-nous cesser de dépenser de l'argent pour les armes à feu? À quel total en sommes-nous maintenant? Vous demandez maintenant la somme effarante de 158,6 millions de dollars en nouveaux crédits. Le ministre responsable à l'époque — le ministre de la Justice, M. Rock — était assis dans ce même fauteuil et nous a promis que l'on ne dépasserait pas 85 millions de dollars. Où en sommes-nous maintenant?

(1530)

Le sénateur Stratton a ajouté:

Ce qui m'inquiète, c'est qu'on a 689 millions de dollars, c'est- à-dire presque 600 millions de plus que ce que le ministre avait promis. Comment peut-on se tromper aussi lourdement?

Honorables sénateurs, le Comité des finances nationales a soumis son dixième rapport au Sénat le 4 décembre 2001, faisant état de ces dépenses croissantes pour le programme des armes à feu et des inquiétudes des sénateurs. En voici un extrait:

Le comité a noté que le ministère de la Justice a demandé des fonds supplémentaires de l'ordre de 158,6 millionsde dollars (une augmentation de 51,5p.100) pour assurer ses dépenses de fonctionnement. La plus grosse part de cette augmentation (90,5 millions) est consacrée au Programme de contrôle des armes à feu. Un montant plus petit mais cependant notable de 26,6 millionsvise à couvrir le coût supplémentaire de causes judiciaires uniques. Les coûts associés au Programme de contrôle des armes à feu continuent de préoccuper les sénateurs. Depuis sa mise en œuvre, le coût global de la mise en œuvre du programme, y compris les dépenses courantes prévues, atteindra 689,67 millionsde dollars.

Le 11 décembre 2001, le sénateur Lowell Murray, président du Comité des finances nationales a déclaré ceci au Sénat, dans le cadre du débat sur la motion portant adoption du dixième rapport:

[...] les fonctionnaires nous ont appris que cela porterait le coût total du programme à 689,6 millions de dollars. On approche donc les 700 millions de dollars. Or, il s'agit d'un programme qui, selon ce qu'avait assuré au Parlement et aux Canadiens le ministre de la Justice de l'époque, M. Rock, devait coûter seulement 80 millions de dollars. De plus, on devait pouvoir recouvrer les coûts de ce programme.

Honorables sénateurs, ce ministère ne tient aucun compte des préoccupations et des rapports du Sénat.

Honorables sénateurs, le ministre de la Justice et le gouvernement n'ont jamais rendu de comptes à cet égard et n'ont jamais donné d'explications au Parlement. Ils ne semblent pas croire que c'est leur devoir. De plus, ils foncent de l'avant et apportent des modifications à cette mauvaise loi pour créer un poste de commissaire aux armes à feu. Ce n'est pas raisonnable.

Le 22 octobre2002, le sénateurMobinaJaffer a parrainé, au nom de gouvernement, le projet de loi C-10 au Sénat. À cette occasion, le sénateur a adopté la position qu'avaient retenue en 1995 le ministre de la Justice de l'époque, Allan Rock, et la secrétaire d'État à la condition féminine de l'époque, Sheila Finestone. Selon le gouvernement de l'époque, le programme des armes à feu découlait de l'oppression des femmes, particulièrement du risque de la violence familiale et d'homicide commis par des hommes, des époux et des compagnons. En 1995, d'après le mantra féministe du gouvernement, les femmes vivaient, sous leur propre toit, dans la peur constante d'une mort imminente infligée par des hommes. Les partisans du gouvernement appartenant à des organisations féministes radicales ont repris ce mantra les unes après les autres. Le sénateurJaffer se fonde sur les affirmations fallacieuses et ressassées selon lesquelles le mal, le vice, l'agression et la violence appartiennent à l'univers masculin et que la vertu, la bonté et la lumière sont le propre de l'univers féminin. D'après cette déclaration féministe les femmes sont moralement supérieures aux hommes, les hommes sont moralement inférieurs aux femmes ou moralement déficients.

En 1995, le ministre Rock nous a répété que les armes à feu constituaient une problématique homme-femme, une question préoccupant les femmes et que la violence familiale contre les femmes était un des principaux motifs qui avaient entraîné l'élaboration du projet de loi C-68 et du programme d'enregistrement des armes à feu.

Le 13avril1995, le quotidien Toronto Star publiait un article sur la rencontre du ministre Rock avec les représentantes de la commission des femmes libérales de l'Ontario. L'article s'intitulait «Rock estime que les femmes sont menacées» et rapportait la déclaration suivante du ministre:

Certaines sont menacées dans leur propre foyer et la police n'a ni l'information, ni les outils pour les protéger.

Voilà pourquoi il fallait des outils pour l'enregistrement des armes à feu.

SheilaFinestone, alors secrétaire d'État à la condition féminine, avait repris ces propos. En effet, le 6décembre1994, dans un communiqué sur l'engagement du gouvernement a assurer une protection accrue aux femmes et aux enfants, Mme Finestone avait déclaré que le contrôle des armes à feu était une question de vie ou de mort pour les femmes au Canada.

Le débat sur le projet de loi C-68 a été faussement et injustement présenté comme une problématique homme-femme. Le débat a été imprégné d'appels à caractère émotif à notre horreur instinctive de la violence et à notre répugnance naturelle à l'égard de la violence dans les rapports intimes et familiaux. Des mesures draconiennes ont été mises de l'avant dans un tourbillon d'hypothèses creuses et erronées fondées sur la notion qu'il faut protéger les femmes des hommes et de leur patriarcat. Les honorables sénateurs se rappelleront qu'à l'époque, j'avais parlé de balivernes patriarcales.

Les droits et libertés des Canadiens ont été violés au nom d'une politique malavisée, qui se résume à de la sociologie appliquée fondée sur une fiction scientifique. La sociologie appliquée et le féminisme ont été à la base de la politique publique. Il n'est donc pas surprenant, honorables sénateurs, que ces politiques et lois échouent et s'effondrent sous le poids de leur propre fiction.

Honorables sénateurs, le 22 octobre 2002, le sénateur Jaffer nous a dit qu'«une grande majorité des homicides familiaux ont été perpétrés avec ce qu'on appelle des carabines et des fusils de chasse.» Veut-elle dire plus de la moitié de 5, 10, 100 ou 10 000 homicides? Elle a également ajouté: «C'est pourquoi une intervention pratique en matière de violence conjugale doit comprendre une approche proactive en ce qui concerne les fusils de chasse et les carabines.»

Un tel langage est vague et élastique sur le plan statistique et scientifique, mais il soulève des émotions. Un tel manque de précision obscurcit des questions qui sont difficiles et complexes. De plus, il est difficile d'obtenir des féministes ou des ministres le chiffre réel d'homicides familiaux commis à l'aide d'armes à feu.

J'ai interrogé des féministes et des membres du Cabinet et même le sénateur Jaffer, pour essayer de connaître le nombre exact de femmes en cause.

Honorables sénateurs, je veux maintenant vous faire part du nombre réel d'homicides obtenu du Centre canadien de la statistique juridique de Statistique Canada pour l'année 1994, ces données étant les plus récentes lorsque le Sénat a été saisi du projet de
loi C-68. En 1994, le nombre total de femmes tuées par leur conjoint ou leur partenaire intime a été de 77, et ce chiffre englobe toutes les méthodes d'assassinat. Sur ces 77, le nombre réel de femmes tuées par des armes à feu par leur conjoint ou leur partenaire intime a été de 23. C'est donc 23, honorables sénateurs, le chiffre magique.

Honorables sénateurs, je veux que vous sachiez que j'ai passé beaucoup d'heures, de jours et de semaines à fouiller dans les données de Statistique Canada pour obtenir ce chiffre. Si vous examinez tout le débat sur le projet de loi C-68, c'est un chiffre que vous ne retrouverez que dans mes discours.

Selon la définition de Statistique Canada, «un conjoint ou un partenaire intime» peut être un conjoint légal, de fait, séparé ou divorcé. Il peut être également l'ami de coeur, l'amant d'une personne mariée ou l'ancien amoureux.

Honorables sénateurs, en 1994, 77 femmes ont été tuées par leur conjoint ou leur partenaire intime et le grand total de tous les homicides s'est élevé à 596. De ces 596 homicides, 196 ont été commis avec une arme à feu. Ainsi, un simple calcul arithmétique de première année nous apprend qu'il y a eu 400 homicides commis sans l'aide d'une arme à feu, soit le double de ceux commis à l'aide d'une arme à feu.

Honorables sénateurs, je vais vous fournir une ventilation des causes de ces 400 homicides. Sur ces 400 homicides, 154 personnes ont été poignardées, 106 ont été battues à mort, 83 ont été étranglées, 51 ont été victimes d'autres méthodes et 6 sont mortes de causes inconnues. De ces 196 homicides commis avec une arme à feu, je tiens à ajouter que 157 concernaient des hommes et 39 des femmes. Comme je l'ai déjà dit, 23 des 39 femmes tuées à l'aide d'une arme à feu l'ont été par leur conjoint ou leur partenaire intime. Ainsi, dans le contexte de la violence à l'égard des femmes, puisque le débat semble toujours axé autour de la violence à l'égard des femmes, en entendant le sénateur Jaffer dire: «Une vaste

majorité des homicides familiaux sont perpétrés avec des carabines et des fusils de chasse», on pense à des centaines, voire à des milliers de femmes. En fait, en 1994, sur 77 femmes tuées par leur conjoint ou leur partenaire intime, 23 l'ont été à l'aide d'une arme à feu.

(1540)

Honorables sénateurs, j'invite le ministre de la Justice à aborder la question des homicides familiaux en recourant à des faits scientifiques et non pas à la sociologie et en mettant de côté toute idéologie sexuelle. En 1995, le ministre Rock pensait nous faire croire que le projet de loi C-68 avait été mis de l'avant dans la foulée d'horribles homicides de femmes. Or, il se trouve que 157 hommes ont été tués de la même manière. Il est essentiel de comprendre que nous parlons de crimes horribles. La vérité est qu'un nombre beaucoup plus grand d'hommes sont tués à l'aide d'une arme à feu et qu'un nombre beaucoup plus grand d'hommes sont tués par un autre moyen. Les chiffres montrent aussi que la plupart des homicides ne font pas intervenir une arme à feu, mais sont commis par d'autres moyens, comme je viens de le dire: coups de poignard, mains, coups, et cetera. J'invite l'actuel ministre de la Justice, M. Cauchon, à participer aux audiences que notre comité tient sur le projet de loi C-10, afin d'exposer les fondements de sa politique devant le Sénat, car il est évident que la protection des femmes de leur conjoint n'est pas et n'a jamais été un objectif du projet de loi C-68 pas plus qu'elle ne fait l'objet des modifications aux termes du projet de loi C-10. Les témoignages présentés par le gouvernement ne vont pas dans ce sens; ils vont en fait dans le sens contraire.

Honorables sénateurs, à propos de violence familiale, je rappelle que les spécialistes américains de la question, les Drs Murray Straus, Richard Gelles, Susan Steinmetz et Jan Stets, affirment tous que les voies de fait perpétrées contre les conjoints ou les conjointes sont en nombres égaux pour les uns par rapport aux autres et que mutualité, symétrie et réciprocité sont la norme. Il y a autant d'hommes qui agressent et battent des femmes que de femmes qui agressent et battent des hommes. Les études menées par ces chercheurs ont permis de constater que les hommes et les femmes commettent des actes de violence à la même fréquence. Les données et les conclusions de ces études ont été reproduites et confirmées au Canada par des spécialistes canadiens de la violence conjugale, notamment les Drs Merlin Brinkerhoff, Kim Bartholomew,
Donald Dutton, Eugen Lupri et Reena Sommers.

Honorables sénateurs, en 1971, mon excellente amie et associée Erin Pizzey a ouvert le premier foyer d'hébergement pour femmes battues. C'était à Chiswick, près de Londres, en Angleterre. Elle a publié son fameux ouvrage intitulé Scream Quietly or the Neighbours Will Hear. Dans un article intitulé «Les hommes sont forts, batailleurs et violents, ils ne pleurent pas quand leurs femmes leur donnent une raclée — voici l'image inédite de al violence conjugale», paru dans l'édition du 5 juillet 1998 du journal Observer, publié au Royaume-Uni, Erin Pizzey a déclaré, à propos des femmes accueillies dans son centre:

... sur les 100 premières femmes que nous avons hébergées,
62 avaient été aussi violentes que les partenaires qu'elles avaient quittés.

Je rappelle aux honorables sénateurs qu'Erin Pizzey et moi étions deux précurseurs des actions menées de par le monde pour aider les victimes de violence conjugale.

Honorables sénateurs, m'autorisera-t-on à finir mon intervention?

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, il est temps de...

Son Honneur le Président: Sénateur Cools, le sénateur Robichaud s'est levé.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis d'accord pour accorder le temps nécessaire afin de permettre à l'honorable sénateur Cools de terminer ses remarques.

[Traduction]

L'honorable Herbert O. Sparrow: Est-ce que cela s'applique aussi aux questions qui pourront être posées?

Son Honneur le Président: Non, la permission accordée par le sénateur Robichaud — je n'ai entendu que lui — a pour effet de donner au sénateur Cools davantage de temps pour terminer son intervention. Selon mon interprétation, cela n'inclut pas les questions.

Le sénateur Taylor: Pourriez-vous répéter?

Son Honneur le Président: Il y a d'autres sénateurs qui aimeraient...

Le sénateur Cools: J'aimerais savoir sur quelle base reposent les règles de cet endroit qui permettent que l'intervention d'un sénateur soit interrompue de cette façon par un débat. J'aimerais savoir sur quoi reposent ces règles, et si on pourrait me l'expliquer.

Son Honneur le Président: La situation dans laquelle nous nous trouvons, sénateur Cools, est que, lorsque votre temps a expiré, j'ai demandé aux honorables sénateurs, ou pour être plus précis, vous avez demandé aux honorables sénateurs s'ils vous accordaient la permission de continuer. Le sénateur Robichaud...

Le sénateur Cools: Et elle a été accordée, Votre Honneur. Il me semble que le Règlement prévoit que...

Son Honneur le Président: Sénateur Cools, je vous demanderais de me laisser terminer, j'étais en train de répondre à votre question.

Le sénateur Cools: C'est une plaisanterie.

Son Honneur le Président: Le sénateur Robichaud s'est levé, et l'usage ici veut que si quelqu'un s'oppose à ce que la permission soit accordée, elle ne l'est pas et, dans un pareil cas, vous n'auriez pas la permission de continuer. Il me semble toutefois que le sénateur Robichaud a clairement dit qu'il était d'accord pour qu'on vous donne la permission de finir votre intervention. J'ai peut-être tort; et j'espère que le sénateur Robichaud se lèvera, avant que je ne reprenne mon siège, pour me corriger si tel est le cas.

Le sénateur Sparrow a ensuite demandé si l'interprétation que je venais de faire était correcte et je lui ai dit que oui. Le sénateur Prud'homme s'est levé et je vais lui donner la parole car ce que nous essayons de déterminer, sénateur Cools, c'est si on devrait vous donner la permission de continuer, et dans l'affirmative, s'il y a des conditions à cela, ce que je crois.

Avez-vous quelque chose à dire, sénateur Prud'homme, avant que je donne la parole au sénateur Cools sur cette question?

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je serai bref. J'aurais espéré que, sachant combien cette question est importante pour certains d'entre nous, le sénateur Robichaud accepte aussi des questions. Je ne poserai pas de questions. Je parlerai quand ce sera mon tour. Cependant, le Sénat est un endroit où l'on doit tenir des débats et cette mesure législative est très importante, comme bon nombre d'autres d'ailleurs. Certains sénateurs ont des idées plus arrêtées que d'autres et ils parleront un peu plus longtemps. Je crois que les sénateurs l'auront compris en donnant leur accord. Toutefois, les questions jouent aussi un rôle très important pour un bon débat et je suis certain que le sénateur Robichaud acceptera d'inclure des questions.

Son Honneur le Président: Madame le sénateur Cools a certainement raison de dire qu'il ne s'agit pas là d'une question à soumettre au débat. De toute façon, on a demandé au sénateur Robichaud de revoir sa position.

[Français]

Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, le fait que je doive me lever de temps à autre, afin de donner mon consentement, n'est pas une tâche que j'affectionne beaucoup, mais afin de nous assurer qu'autant de sénateurs possible puissent prendre la parole, nous avons accepté cette pratique.

Lorsqu'un honorable sénateur a presque terminé son discours, nous permettons de lui accorder un peu plus de temps afin qu'il puisse terminer ses remarques. J'ai eu beaucoup de commentaires à cet effet. Nous nous devons d'être cohérents si nous voulons continuer cette pratique et si nous désirons que les débats ne s'éternisent pas. Pour être cohérent, je dois m'en tenir au consentement avec réserve que j'ai donné tout à l'heure.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Il ne s'agit pas là d'une question donnant lieu à un débat, sénateur Sparrow. Cependant, comme vous avez beaucoup d'ancienneté au Sénat, je vous accorderai la parole.

Le sénateur Sparrow: Le sénateur Cools me permettra peut-être...

Le sénateur Cools: Je vais...

Son Honneur le Président: Sénateur Cools, vous avez la permission de terminer vos commentaires.

Le sénateur Cools: ... je crois que ce qui se produit ici est tout à fait déplacé et non parlementaire. Le Règlement est très clair. Lorsqu'un sénateur désire obtenir une prolongation de temps, il doit en faire la demande à tous les sénateurs et non au Président, ni au leader adjoint du gouvernement.

(1550)

La question doit être réglée entre le sénateur intéressé et le reste des sénateurs. J'ai posé la question aussi clairement que j'ai pu aux honorables sénateurs. Je les ai très bien entendus donner leur consentement. En ce qui me concerne, la question était réglée. À ce moment-là, on aurait dû me laisser terminer mon intervention en paix sans que le compte rendu ne montre que tel ou tel sénateurs sont intervenus pour dire quelques mots en interrompant une intervention que j'ai mis énormément de temps à préparer.

Honorables sénateurs, le fait est que nous sommes ici pour discuter. Si certains honorables sénateurs ne veulent pas supporter un peu de discussion, c'est correct, ils peuvent sortir. S'ils ne veulent pas écouter les autres sénateurs, ils peuvent sortir.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Cools: Notre assemblée existe pour ceux qui veulent discuter des sujets à l'étude. Nous sommes saisis d'un sujet fondamental. Le projet de loi comporte des propositions radicales et révolutionnaires. Le sénateur Watt avait parfaitement raison quand il est intervenu dans le débat. Il s'agit d'un projet de loi qui mérite notre attention, qui exige et force l'attention. Pour ma part, j'estime que le temps que nous lui accordons est insuffisant. Honorables sénateurs, je parlais de violence conjugale. Quand vous lirez vos interjections dans le compte rendu, vous verrez comme elles semblent insignifiantes.

Honorables sénateurs, je parlais du projet de loi C-10 et des fondements du projet de loi C-10 et de la loi C-68. Je parlais des problèmes que pose le phénomène de manipulation des structures sociales et de la manipulation et de l'exploitation de la terrible tragédie que constitue la violence conjugale comme un moyen de faire avancer ce que je considère comme une manipulation des structures sociales.

Honorables sénateurs, il est temps que le gouvernement actuel admette que l'agression, la violence et l'homicide sont des problèmes humains et non des problèmes de relations hommes-femmes. Il est temps que la ministre de la Justice admette que cette politique infructueuse d'enregistrement des armes à feu n'a rien à voir avec la sécurité publique mais plutôt avec le désir d'un gouvernement d'exercer un contrôle excessif sur ses citoyens et de s'établir comme le gardien unique des armes à feu et le gardien unique des instruments de force, même au point de détruire les libertés civiles, de détruire le mode de vie rural et de détruire l'interaction naturelle des Canadiens avec la nature et le plein air comme les chasseurs et les pêcheurs la connaissent depuis des siècles.

Honorables sénateurs, j'aborde maintenant les articles du projet de loi C-10 concernant la cruauté envers les animaux et modifiant le Code criminel. Je tiens pour acquis que la cruauté envers les animaux et les infractions s'y rattachant constituent pour nous tous un sujet de profonde préoccupation . À mon avis, tous les honorables sénateurs seraient préoccupés par des réactions humaines.

Les questions que vient tout juste de soulever le sénateur Joyal présentent un intérêt particulier. Je parle des nouvelles dispositions du Code criminel que créera le projet de loi C-10 et surtout du nouveau genre d'infractions. À l'heure actuelle, le Code criminel traite des infractions à l'endroit de la personne et des infractions contre les biens. Les articles concernant les biens comprennent des dispositions relatives à la cruauté envers les animaux. Si je me rappelle bien, ces dispositions figurent à l'article 446 du Code.

Le projet de loi C-10 crée une nouvelle catégorie de victimes, en l'occurrence les animaux, ainsi que les infractions conséquentes commises contre ces derniers. Le projet de loi C-10 propose à l'égard des nouvelles infractions à l'endroit des animaux des peines concordant avec celles qui sont décernées pour des crimes comme l'infanticide, soit une peine maximum de cinq ans. Ce projet de loi prévoit une peine maximum de cinq ans pour certains crimes contre les animaux tandis que le Code criminel ne prévoit rien en cas de crime contre des enfants à naître. Cette approximation exigera nécessairement un examen du lien entre ces nouvelles dispositions concernant les animaux et l'absence de dispositions dans le Code criminel pour assurer la protection des enfants à naître.

Honorables sénateurs, il est temps d'examiner ces importantes questions ainsi que le rôle du Code criminel dans la protection des animaux, des humains à naître et des nouveau-nés.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Tkachuk, je crois que la situation est claire. Le sénateur Robichaud est intervenu lorsqu'il y a eu une demande de prolongation de la période d'intervention du sénateur Cools, et il a dit clairement à ce moment- là et à l'occasion d'une intervention subséquente que la permission était accordée à la condition qu'elle serve uniquement au sénateur Cools à terminer ses observations. Si le sénateur Cools souhaite demander une autre permission, je suppose que cette demande serait recevable.

Le sénateur Cools: Je crois comprendre que des sénateurs voudraient me poser des questions. Je serai heureuse d'attendre ces questions et d'y répondre.

Son Honneur le Président: Permission accordé pour que des questions soient posées au sénateur Cools?

Des voix: D'accord!

Son Honneur le Président: La permission est accordée.

Le sénateur Tkachuk: Lorsque l'honorable sénateur a parlé du nombre de meurtres commis en 1994, je crois qu'elle a mentionné que 23 femmes avaient été assassinées à l'aide d'armes à feu.

Le sénateur Cools: Par des conjoints ou des partenaires intimes.

Le sénateur Tkachuk: Sur ces 23 meurtres, madame le sénateur sait-elle combien ont été commis à l'aide de revolvers ou d'armes de poing, par opposition à des armes d'épaule? Nous avons déjà des restrictions sur les armes de poing qui comptent probablement parmi les plus strictes du monde.

Le sénateur Cools: Oui, c'est bien le cas. Je suis sûre que la plupart d'entre nous savent que le Canada a probablement l'un des régimes les plus stricts de contrôle des armes à feu. Je connais le chiffre que le sénateur veut. J'ai déjà fait des recherches à ce sujet dans le passé. Cependant, je n'ai pas ce chiffre sous la main, mais j'ai presque n'importe quoi d'autre.

Le sénateur Tkachuk: Si le sénateur possède ce renseignement, je lui saurai gré de le transmettre à mon bureau.

Le sénateur Cools: Je serais très heureuse de le faire. Les honorables sénateurs doivent comprendre clairement que je me basais sur les statistiques de 1994 parce que c'est la dernière année pour laquelle on disposait de données complètes au moment où le Sénat a été saisi du projet de loi C-68. À ce moment-là, ces données étaient récentes. Si vous vous en souvenez, j'ai dit tout à l'heure que 23 femmes ont été tuées par des intimes à l'aide d'armes à feu. Voici une autre donnée publiée cette même année: le nombre de bébés tués avant d'avoir atteint l'âge de 12 mois était de 27.

J'ai entendu citer des chiffres comme «60 p. 100 de...» ou «la grande majorité de...». Est-ce 60 p. 100 de 3 ou 60 p. 100 de 10 000? Cependant, quand j'ai étudié les mathématiques et ce genre de phénomène, on m'a toujours appris qu'une proportion n'a de sens que par rapport à un chiffre absolu. Par conséquent, quand on vous dit 60 p. 100 de ceci, il pourrait s'agir de 60 p. 100 de 2, 3 ou 6. Il serait utile que le gouvernement, et en particulier le ministre de la Justice, s'efforce de nous éclairer une fois pour toutes. Il n'y a pas de sujet où la confusion soit aussi généralisée dans le pays que la question de la violence conjugale.

Le gouvernement du Canada, actuellement par l'entremise de
M. Cauchon, a le devoir de mettre la situation au net et de nous présenter les faits tels qu'ils sont. Je n'ai jamais pu comprendre comment le ministre Rock a si bien réussi à convaincre tant de députés et de sénateurs que le problème des armes à feu était une question de sexe, quand les données montrent que la majorité des gens tués ou touchés par les armes à feu sont des hommes.

Je n'ai pas abordé le nombre de suicides commis à l'aide d'armes à feu. Ce sont aussi des meurtres. Nous vivons maintenant dans une société dont l'histoire semble s'être estompée et qui semble s'être dissociée de sa propre tradition juridique. En fait, c'est bien cela que le suicide représente. Je peux voir que le sénateur Kinsella y pense. Jusqu'à très récemment, le suicide était considéré comme un meurtre et était donc illégal.

(1600)

Dans de nombreux ouvrages, on a écrit que le suicide était le meurtre de soi-même, et chacun de nous a un intérêt public collectif dans la vie les uns des autres. Je n'ai pas du tout abordé ce phénomène.

Honorables sénateurs, il serait utile que le ministre tente de clarifier un peu cette sombre question, car elle est tellement pénible. Qu'on ne se méprenne pas. J'ai travaillé dans le domaine de la violence conjugale pendant de nombreuses années, et c'était un domaine difficile et désagréable. La plupart d'entre nous en sont consternés et horrifiés. Lorsqu'un projet de loi est présenté dans un contexte comme celui-là, ses opposants ont du mal à dissiper la confusion. La confusion est énorme, tout comme l'obscurcissement du problème. J'espère que ce comité, présidé par le sénateur Furey, pourra recourir à l'esprit incisif du président pour s'en tenir à l'essentiel.

Le sénateur Sparrow: Honorables sénateurs, dans ses observations, madame le sénateur a dit que le Comité sénatorial permanent des finances nationales et peut-être d'autres comités ont travaillé à ce dossier. Elle a mentionné que les coûts du programme seraient recouvrés, de sorte que le contribuable n'aurait rien à payer.

Le sénateur Stratton: Quatre-vingt millions de dollars.

Le sénateur Sparrow: Ce qui me préoccupe, c'est que le recouvrement des coûts représente tout de même une taxe imposée aux contribuables. Ils doivent payer cette dépense. Le gouvernement peut dire que le programme ne coûte rien aux contribuables, car les coûts sont recouvrés. J'ai entendu cela à d'autres occasions. À mon avis, cette prémisse est fausse. Le recouvrement des coûts est une taxe imposée aux contribuables. Votre comité a-t-il examiné cela?

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, j'ai tendance à être d'accord avec le sénateur Sparrow sur ce point. C'est un fait. En 1995, on a soulevé maintes et maintes fois la question du recouvrement partiel ou d'un quelconque recouvrement des coûts. En fait, je ne crois pas que le Comité sénatorial permanent des finances nationales ait examiné directement cette question en particulier. Cependant, je serais ravie de faire en sorte que nous l'examinions dans le prochain budget.

La vraie question, c'est que le gouvernement, par l'entremise du ministre de la Justice, M. Rock, a comparu devant divers comités, nos groupes parlementaires nationaux et ceux du Sénat et a dit essentiellement que ceux d'entre nous qui n'étaient pas contents n'avaient qu'à avaler la pilule. Ce sera un programme, il sera achevé rapidement et il ne coûtera qu'un tel montant.

En réalité, le programme ne coûtera pas ce qu'on dit. Les faits montrent que cela coûtera plus de 1 milliard de dollars, ce qu'aucun membre du gouvernement ne veut reconnaître. Il faudra bien qu'on admette un jour au Canada qu'il nous faut un gouvernement responsable ou qu'on soit prêt à mentir pour prouver le contraire. On s'attendrait à ce qu'un ministre à qui on présente un rapport de comité sénatorial comme celui-là s'empresserait de fournir des explications au Parlement. Or, ce n'est pas le cas.

Honorables sénateurs, la situation est unique. Les gouvernements et les ministres s'en moquent et continuent à faire comme si nous n'existions pas. On a beau soulever encore et encore ces questions, des comités ont beau les articuler encore et encore dans des rapports, les gouvernements font tout simplement la sourde oreille. C'est lassant à la fin. Et on s'étonne ensuite que les gouvernements perdent du terrain dans les sondages d'opinion. On s'en étonne.

Le sénateur Sparrow: Je remercie le sénateur pour cette réponse.

En ce qui concerne les armes à feu, la question des preuves balistiques a peut-être été examinée au comité des finances ou à quelque autre comité dont parle le sénateur. Il faut avoir des dossiers balistiques pour pouvoir retracer une arme et avoir ainsi un bon contrôle des armes à feu. Si je ne m'abuse, nous n'avons pas, dans le système canadien, de dossier balistique sur toutes les armes à feu, qu'il s'agisse d'armes de poing ou d'armes longues. La prochaine étape consistera à tester toutes les armes pour les traces balistiques et à en établir le registre. Dans ce cas — et je voudrais savoir si le comité y a songé — le coût sera prohibitif pour les Canadiens. Il faut en être averti.

Le sénateur Cools: Je remercie le sénateur de poser la question. Il devrait se considérer comme averti. Ce projet de loi et les intrusions qu'il prévoit dans des maisons et sur des propriétés privées, dans le cas surtout de gens qui ont hérité des armes de leurs grands-pères, leurs arrière-grands-pères, et cetera, portent atteinte au droit à la propriété privée. En ce qui me concerne, nous sommes avertis.

Je voudrais proposer que le Sénat entreprenne une étude spéciale sur l'incidence de ce système de contrôle des armes à feu. J'estime que ce genre de contrôle social est diabolique. Quelque part au Canada, des tas de dossiers font état des biens personnels et des adresses des gens. Je crois que cela est impie.

Je n'ai pas examiné la question en profondeur parce que ce qui m'a préoccupée pendant plusieurs années, c'était la piètre utilisation qu'on faisait de la notion de violence conjugale. J'en connais un peu sur les pathologies des couples. Ce sont les autres aspects de la Loi sur les armes à feu qui n'ont pas été bien pris en considération, par exemple, comment les armes ont été confisquées et les autres pouvoirs extraordinaires que cette loi confère avec la désignation des inspecteurs des armes à feu et ainsi de suite.

Comme le sénateur Prud'homme l'a dit tout à l'heure, quiconque connaît un peu le Canada sait que c'est un pays en grande partie rural. L'existence du Canada se fonde sur une grande interaction avec la nature et le milieu sauvage. Lorsqu'un groupe de Toronto conçoit un plan comme celui sur le contrôle des armes à feu et qu'il propose de l'imposer à des régions essentiellement rurales, notamment à des régions d'où sont originaires mes amis autochtones comme les sénateurs Watt et Adams, le Sénat a le devoir de mettre un terme à cela. Il y a quelque chose de fondamentalement erroné lorsqu'un gouvernement va toujours à l'encontre de l'intérêt public d'un pays.

Son Honneur le Président: Le Sénat est-il prêt à se prononcer?

Le sénateur Sparrow:Honorables sénateurs, je ne sais trop s'il s'agit d'un recours au Règlement. Le moment n'est peut-être pas bien choisi pour soulever cette question.

Quand j'ai essayé plus tôt de demander la permission de poser une question, madame le sénateur qui avait la parole a été autorisée à continuer son discours. Le leader adjoint du gouvernement a dit qu'il accepterait une prolongation du temps de parole de madame le sénateur, mais aucune réponse ne m'a été faite quand j'ai demandé l'autorisation de poser des questions. Il me semble qu'il serait conforme au Règlement que je prenne la parole lorsque madame le sénateur aura terminé et que je demande alors à poser une question. Est-ce exact?

Son Honneur le Président: C'est un recours au Règlement, et je répondrai de mon mieux.

Le sénateur Robichaud:Ce n'est pas un recours au Règlement.

Son Honneur le Président:. C'est au sénateur qui a la parole qu'il appartient de décider s'il acceptera ou non de répondre à une question. Le sénateur Cools avait la parole. Elle devait donc demander la permission de continuer, mais il lui est possible de refuser de répondre à une question. Voilà pourquoi tout dépend du sénateur qui a la parole, le sénateur Cools, en l'occurrence.

Le sénateur Sparrow: Si j'obtiens la permission de mes collègues, alors je pose la question. Madame le sénateur n'est pas tenue de répondre. Si j'ai la permission de poser la question, elle peut répondre, bien entendu. Si elle décide de ne pas le faire, elle a le privilège de s'abstenir. Cependant, je ne crois pas qu'on puisse me refuser le privilège de poser une question.

(1610)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je ne veux pas discuter de menus détails. J'ai dit plus tôt que, dans une telle situation, la personne qui avait le droit de trancher était celle qui avait la parole. Dans ce cas, il s'agissait du sénateur Cools. Il était préférable d'éviter que tous les autres sénateurs soient autorisés à poser une question pour constater ensuite que madame le sénateur Cools n'était pas disposée à répondre. Pour éviter cela, il valait mieux que la présidence, moi-même en l'occurrence, s'adresse directement au sénateur Cools. Voilà pourquoi j'ai agi comme je l'ai fait.

Le sénateur Cools: Je voudrais qu'il soit bien clair que les sénateurs n'ont rien à craindre car, chaque fois qu'ils voudront me poser une question, je serai toujours prête à répondre; je crois profondément au dialogue, aux échanges et aux débats en cette Chambre.

J'aimerais qu'on réponde à la question que j'ai posée plus tôt au sujet de la permission. En fait, le Président n'a pas à intervenir. Les règles sont claires. Elles disent que le sénateur qui veut formuler une demande doit s'adresser à l'assemblée, aux sénateurs en fait, et que les sénateurs doivent répondre. Il n'est pas nécessaire que le Président intervienne.

Voici ce que je voudrais vraiment tirer au clair. Si un sénateur demande au Sénat la permission de continuer, et qu'un autre sénateur se lève et fasse une proposition, comme c'est arrivé quand le sénateur Robichaud a pris la parole, que se passera-t-il si dixsénateurs en font autant?

Supposons le scénario suivant: le sénateur Robichaud propose d'accorder 15 minutes. Un autre sénateur propose d'accorder plutôt 5 minutes et un autre, 10 minutes. Comment cela fonctionnerait-il? Comment trouver une solution? Autrement dit, si le sénateur Robichaud a dit que le sénateur peut parler encore 20 minutes, par exemple, cela serait-il séquentiel? Je crois que c'est une question à laquelle vous ne pouvez répondre, Votre Honneur.

Son Honneur le Président: Sénateur Cools, je vais essayer d'abréger. Les règles prévoient que, lorsque la permission est demandée, elle doit être accordée sans aucune dissidence. Autrement dit, il faut l'unanimité. Nous sommes en train de changer les règles. Si un sénateur veut assortir la permission d'une condition, il semble clair que la condition la moins généreuse doit s'appliquer. C'est la meilleure réponse que je puisse donner.

Le sénateur Cools: Votre Honneur, on peut dire avec assurance que, si un sénateur fait une demande aux autres sénateurs, chacun peut répondre par oui ou non.

Ce que je ne comprends pas, c'est comment un sénateur ou deux peuvent imposer des conditions qui n'ont pas été débattues ou étudiées par les autres sénateurs. C'est ce qui m'échappe. Au nom de quelle autorité un sénateur peut-il intervenir, alors qu'un consentement a déjà été accordé, pour faire sa proposition? Il y a des règles claires au Sénat sur la façon de faire des propositions. Il faut normalement proposer une motion avec l'appui d'un autre sénateur.

Son Honneur le Président: Sur ce rappel au Règlement, je ne crois avoir besoin d'ajouter rien d'autre. Je crois que c'est clair.

Le sénateur Robichaud: Votre Honneur, vous avez dit clairement que, s'il n'y a pas de dissidence, le consentement est accordé. On m'encourage maintenant à être désormais la voix dissidente. Je dirai non et tout s'arrêtera là.

Le sénateur Sparrow: Je pense qu'il s'ensuit que tous les sénateurs refuseront leur consentement sur ces questions. Le leader adjoint du gouvernement demande le consentement plus souvent que quiconque. Si nous ne donnons pas notre consentement dans ces cas-là, nous ne devrions pas l'accorder dans tous les autres cas.

Si les sénateurs se reportent à l'article 4(k)(iii) du Règlement du Sénat, concernant la permission, ils constateront que rien n'empêche le Sénat d'accorder ce qu'il entend. Aucune disposition du Règlement du Sénat n'empêche celui-ci d'accorder son consentement à quoi que ce soit. Le Sénat peut donner son consentement à tout ce qu'il veut n'importe quand. Nous n'avons pas à passer par la présidence. Nous n'avons pas à passer par le leader adjoint du gouvernement, le leader du gouvernement ou le leader de l'opposition. Nous sommes maîtres de notre assemblée. Nous devons revenir à cette question et ne jamais oublier que les sénateurs sont maîtres de leur assemblée.

Le sénateur Cools: Je suis d'accord avec vous.

Son Honneur le Président: Le sénateur Prud'homme invoque le Règlement.

Le sénateur Prud'homme: Je vous souhaite la bienvenue à l'occasion de votre retour. Les choses n'ont pas tellement changé. Bienvenue dans la réalité. Toutefois, ce n'est pas là-dessus que porte mon rappel au Règlement.

Je suis un peu surpris; je ne dirai pas «atterré». J'espère que les bons esprits prévaudront maintenant. Le sénateur Robichaud a tenu des propos que, à la réflexion, il aimerait sans doute reformuler. Il a dit qu'à partir de maintenant, en conséquence, il se lèvera et dira non.

Le sénateur Robichaud: Ce n'est pas ce que j'ai dit.

Le sénateur Prud'homme: Je pense qu'il serait extrêmement dangereux si le sénateur commence à appliquer cette logique. Je n'aimerais pas siéger à un Sénat où on refuserait d'accorder du temps supplémentaire à certains sénateurs. Il est très difficile, Votre Honneur, de dire: «J'accorde cinq minutes à celui-ci et 15 minutes à celui-là.»

Je me souviens d'un débat tenu récemment qui m'intéressait particulièrement. Je ne mentionnerai pas lequel. Nous avions permis au sénateur libéral qui parlait de façon si éloquente du sujet à l'étude, et avec qui j'étais d'accord, de prolonger son discours de
45 minutes. On ne lui avait imposé aucune limite. Était-ce parce qu'il fait partie du Conseil privé, ou parce qu'il est près des autorités? Nous avons créé un dangereux précédent qui pourrait un jour avoir des conséquences sur tous les honorables sénateurs.

J'ai vu des sénateurs applaudir vigoureusement les derniers commentaires du sénateur Robichaud. Je suis vraiment mécontent de devoir siéger ici en sachant que des sénateurs sont très heureux de savoir qu'à partir de maintenant le sénateur Robichaud pourrait dire «non» et ce serait définitif. Ce n'est pas la raison pour laquelle nous sommes au Sénat.

Comme les honorables sénateurs le savent, nous tenons des débats dans cette enceinte. Nous n'abusons pas du Règlement. Nous ne siégeons pas si longtemps. Nous sommes bien rémunérés. Si certains d'entre nous ne sont pas contents, ils peuvent toujours dire «Je ne peux pas siéger au Sénat. Ces gens sont stupides. Ce sont des imbéciles. Ils parlent trop.» Mais il y a des règles.

Je pense que certains sénateurs fort intéressés parlent pour de nombreux autres qui n'aiment peut-être pas prendre la parole, Votre Honneur.

Je voudrais demander à mon ami — et lorsque j'appelle quelqu'un «mon ami», je ne galvaude pas cette expression; je m'entends bien avec le sénateur Robichaud. J'aimerais qu'il clarifie pour moi ce qu'il a dit. Il va peut-être prétendre que je l'ai mal compris. Dieu merci si c'est le cas.

Des sénateurs impatients pourraient se dire: «Si le sénateur Robichaud ne le fais pas, moi je vais le faire.» Je vais surveiller ceux qui diront non. Ils feraient mieux de participer aux comités et aux travaux du Sénat à partir de maintenant.

[Français]

Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, je voudrais m'expliquer. Je n'ai pas dit que j'allais refuser le consentement pour prolonger le débat, mais que je serai peut-être encouragé à le faire. Je ne veux d'aucune façon que cela serve de menace à quiconque. Je ne veux absolument pas limiter le débat, mais suivre une pratique mise en place suite à des consultations et des réunions avec le leadership pour s'assurer que le débat se déroule normalement et que tous les sénateurs puissent avoir la chance de participer au débat.

Honorables sénateurs, je ne surveille pas les sénateurs à la minute ou à la seconde près lorsqu'ils prennent la parole. Je donne consentement au sénateur qui a pris la parole pour qu'il puisse compléter ses remarques dans un temps raisonnable. C'est tout simplement cela.

[Traduction]

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, je voudrais donner mon interprétation de l'article 34 du Règlement du Sénat. Nous semblons confondre les paragraphes 34(1) et 34(2). Le paragraphe 34(1) autorise un sénateur à demander au sénateur qui parle de lui céder la parole. Si ce dernier accepte, l'autre peut prendre le reste du temps alloué. Le paragraphe 34(2) du Règlement autorise les questions. De toute évidence, la question doit être posée dans le délai imparti au sénateur qui a la parole.

Je sais que les honorables sénateurs Sparrow et Cools ne seront peut-être pas d'accord, mais il incombe à la personne qui prononce le discours de prévoir du temps pour les questions. Je ne pense pas qu'un orateur puisse parler indéfiniment et s'attendre à ce qu'il reste encore du temps pour répondre aux questions.

Si cinq ou dix minutes supplémentaires sont accordées à un sénateur pour terminer son discours, il incombe à ce sénateur de comprendre que les hochements de tête signifient généralement que les sénateurs sont prêts à poser des questions. Je sais que certains de mes collègues ne prennent pas souvent la parole, mais on peut habituellement savoir quand ils sont prêts à le faire et à demander la possibilité de poser une question.

L'article 34 stipule clairement que la personne qui pose des questions doit le faire pendant le temps alloué au sénateur qui lui a cédé la parole. Il incombe donc à l'orateur d'écourter son discours pour permettre à des sénateurs de poser des questions.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nous avons eu un échange utile sur la question, parfois délicate, de savoir quand on doit donner la parole à un sénateur.

Le sénateur Kinsella: Pouvons-nous en appeler maintenant?

Son Honneur le Président: Je ne prends pas l'affaire en délibéré parce que les règles sont claires. Je demande maintenant aux honorables sénateurs s'ils sont prêts à se prononcer.

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, le débat est ajourné.)

DISCOURS DU TRÔNE

MOTION D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Morin, appuyée par l'honorable sénateur Hubley, relative à l'Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la deuxième session de la trente-septième législature.—(3ejour de la reprise du débat).

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, c'est pour moi un plaisir particulier de participer à ce débat. Le discours du Trône reflétait les valeurs et les préoccupations des Canadiens, et je pourrais parler longuement de tous ses aspects positifs et, notamment, de l'importance accordée aux droits des minorités linguistiques. J'aurai cependant pitié de vous et me limiterai à un seul sujet, soit le réchauffement climatique. C'est l'une des questions les plus importantes sur lesquelles nous serons appelés à nous pencher pendant nos carrières parlementaires.

[Français]

Le gouvernement nous affirme que d'ici la fin de l'année, il présentera une résolution concernant la ratification du Protocole de Kyoto. C'est un sujet de grande controverse dans certaines régions du pays, notamment en Alberta. Je constate avec beaucoup de plaisir le progrès qui semble avoir été accompli hier pendant la rencontre fédérale-provinciale.

Je comprends les craintes de ceux qui voudraient savoir tous les détails de toutes les implications avant de signer le protocole, mais même si je comprends ces personnes, je ne peux pas me joindre à elles.

[Traduction]

Honorables sénateurs, j'ai écouté les arguments contre la ratification du Protocole de Kyoto et ceux en faveur d'attendre au moins plus longtemps et ils ne m'ont tout simplement pas persuadée. Par contre, je trouve convaincant l'argument voulant que les coûts probables d'une non-ratification de l'accord ou d'un retard dans cette ratification seront beaucoup plus élevés que les coûts que la ratification pourrait entraîner.

Permettez-moi d'énumérer certains des arguments qui ont été présentés contre la ratification. Certains critiques disent encore que les données scientifiques sur le réchauffement de la planète manquent de clarté. Il se pourrait, en fait, que le réchauffement de la planète ne soit pas un problème du tout ou du moins pas un problème créé par l'activité humaine. D'autres, plus nombreux, disent que la ratification du Protocole de Kyoto coûterait trop cher, aurait des conséquences catastrophiques sur l'économie canadienne et particulièrement sur les économies de l'Alberta et de l'Ontario. Ils affirment que nous ne devrions pas ratifier le protocole tant que nous n'aurons pas mis en place un plan de mise en oeuvre détaillé. Ils disent qu'il est injuste de demander au Canada de se plier aux exigences du Protocole de Kyoto alors que notre pays ne représente que 2 p. 100 des émissions mondiales de gaz à effet de serre, que les États-Unis, notre plus important partenaire, ont refusé de souscrire à l'accord de Kyoto et que de nombreux pays, y compris certains des plus gros, comme la Chine et l'Inde, ne sont pas visés par cet accord même s'ils sont de grands pollueurs.

Nous pouvons mettre de côté le cas des États-Unis. Ce pays est bien avancé dans la mise en oeuvre de contrôles des émissions qui amèneront les Américains en gros à ce que prône l'accord de Kyoto.

Comment les autres critiques résistent-elles à l'examen? Pas très bien, honorables sénateurs.

Prenons les données scientifiques tout d'abord. Il est peut-être vrai qu'il n'y a pas de preuves absolues que le réchauffement de la planète aura les effets que nous craignons. La seule façon d'obtenir ce type de preuves est d'attendre que cela se produise: il faut attendre que les déserts s'étendent davantage, que les glaces et le pergélisol fondent encore plus, que les niveaux de la mer montent et que les niveaux des eaux intérieures baissent encore davantage, que les maladies tropicales s'étendent au Nord, que des sécheresses et des incendies de forêt encore pires dévastent de plus en plus notre territoire et que les inondations et les tempêtes de verglas deviennent plus fréquentes et plus graves.

Nous pourrions attendre. À ce moment-là, lorsque nous verrions enfin que tout cela s'est produit, je soupçonne que certains irréductibles diraient encore que cela faisait simplement partie du grand cycle de la nature et n'avait rien à voir avec l'activité humaine.

Certains choisissent encore de croire que la terre est plate. Pour ma part, je crois les plus de 1 000 experts météorologiques de premier plan qui forment le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. Il est très rare qu'un si grand nombre d'experts étudient quoi que ce soit aussi intensément que ces gens ont étudié le changement climatique. D'après ces spécialistes, nous avons un problème imputable à la production d'émissions de gaz à effet de serre causés par l'activité humaine.

Honorables sénateurs, il suffit d'interroger le sénateur Watt, par exemple, au sujet du changement climatique observé ces dernières années dans l'Arctique. Le problème va empirer. Reste à savoir dans quelle mesure et à quel rythme. Certains des changements à venir sont inévitables, en fait. Mais, si nous agissons dès à présent, il demeure possible de freiner cette tendance et d'atténuer l'impact final.

[Français]

Passons à la fameuse question des coûts. Combien est-ce que la mise en opération de Kyoto va nous coûter? Il est clair qu'il y aura un coût considérable. Cela pourrait s'élever jusqu'à 2 p.100 du produit national brut, ce qui me semble impressionnant. Mais, attention. Il ne s'agit pas d'une diminution du PNB, il s'agit d'une croissance un peu moindre que ce que nous aurions peut-être obtenu sans Kyoto, c'est-à-dire que notre économie pourrait connaître une croissance de seulement 28 p.100 d'ici l'an 2010, plutôt que de
30 p.100. Ce n'est pas énorme du point de vue national ni au niveau régional. Une décision d'Alan Greenspan peut avoir autant d'impact sur notre économie sans que personne ne crie au désastre.

Oui, il faudrait un grand effort collectif pour relever le défi de Kyoto. Oui, ce sera parfois pénible. D'ici l'an 2010, nos émissions de gaz à effet de serre devront atteindre l'équivalent de 571mégatonnes de gaz carbonique. C'est une diminution de 112mégatonnes, ou 16p.100, en comparaison du niveau atteint en 1997, dernière année pour laquelle j'ai des chiffres.

[Traduction]

Évidemment, les réductions exigées paraissent plus importantes lorsque comparées aux niveaux qu'atteindraient les émissions en 2010 si nous négligions la surveillance du climat. Il s'agit de ce fameux chiffre de 240 mégatonnes qu'on entend souvent citer. Mais nous agirons. En fait, le plan d'action annoncé par le gouvernement fédéral il y a deux ans nous aura permis de réduire le volume annuel de nos émissions de 65 mégatonnes d'ici à l'échéance de Kyoto. Nous sommes ainsi en bonne voie de réaliser notre objectif. Le plan annoncé la semaine dernière nous mènera plus loin sur cette voie. Il ne nous sera pas impossible d'aller jusqu'au bout et cela ne nous ruinera pas non plus.

(1630)

Quoi qu'il en soit, honorables sénateurs, n'oublions pas qu'il coûte plus cher de ne pas agir. Certains calculs effectués indiquent que les Canadiens paient déjà plus de 1 milliard de dollars par mois les conséquences des incidents météorologiques extrêmes. Cela équivaut à 1,5 p. 100 ou 2 p. 100 du PIB. Ce chiffre vaut pour aujourd'hui, et non pas pour 2010. Comme n'a cesse de le répéter, entre autres, l'industrie de l'assurance, la tendance et les coûts sont à la hausse et continueront d'augmenter de façon marquée tant que nous n'aurons pas décidé d'agir. Vu sous ce jour, le Protocole de Kyoto commence à nous paraître beaucoup moins coûteux.

Devrions-nous signer avant que le détail du plan de mise en oeuvre ne soit arrêté? À mon avis, la réponse est oui. Nous sommes déjà relativement au courant de ce qui nous incombe, grâce à l'énorme processus de consultation qui a duré au moins cinq ans. C'est un processus d'une envergure considérable, contrairement à ce que certaines opinions laissent croire. Je suis convaincue que nous en saurons tous davantage d'ici la fin de l'année, compte tenu de l'intense processus politique présentement en cours. Il est vrai que nous ne connaîtrons pas tous les petits détails de dernière minute, voire certains détails importants, comme de savoir combien de crédits le monde nous permettra de réclamer pour divers éléments environnementaux positifs. Néanmoins, ce n'est pas une raison pour reporter notre engagement parce qu'un délai pourrait avoir un prix élevé. Comme de nombreuses personnes l'ont signalé, nous n'avions pas planifié tous les détails lorsque nous nous sommes engagés dans la Seconde Guerre mondiale. Jacques Cartier, quant à lui, ne disposait d'une carte détaillée quand il s'est engagée dans les eaux du golfe du Saint-Laurent. Il n'est jamais possible de connaître avec exactitude l'ampleur d'une entreprise parce que sa véritable grandeur entraîne de nouveaux défis de même que des réalisations et des découvertes. Tout ce qu'il est possible de savoir c'est que si nous ne commençons pas, nous ne pourrons rien accomplir.

Honorables sénateurs, j'aimerais me pencher sur une dernière critique concernant le Protocole de Kyoto. On comprend mal que le Canada doive réduire considérablement ses émissions de gaz à effet de serre même s'il n'y contribue que dans une proportion minime alors que de nombreux autres pays ne sont absolument pas concernés par le Protocole de Kyoto.

En fait, nous émettons pas mal de gaz à effet de serre. Au prorata, nous sommes au haut de la liste. Et ce n'est pas tout, les effets du réchauffement climatique sont déjà plus importants et continueront de l'être dans les latitudes nord, soit ici, que dans le reste du monde. Nous avons donc un plus grand intérêt que le reste du monde à réduire nos émissions polluantes.

Il ne faut pas non plus oublier, honorables sénateurs, que le Protocole de Kyoto n'est qu'une étape. On demandera aux pays en développement de commencer à emboîter le pas à la prochaine étape, à compter de 2013, et il sera essentiel qu'ils le fassent. Comment pouvons-nous leur demander de faire des sacrifices au nom du climat planétaire si nous, qui avons tellement plus de richesses, de compétences techniques et de ressources de tous types, ne sommes pas prêts à prendre des mesures qui seront beaucoup moins pénibles pour nous qu'elles ne le seront pour les pays pauvres de la terre? Je le répète, nous avons grandement intérêt à montrer que nous sommes déterminés à joindre le geste à la parole.

[Français]

Il est certain que le protocole n'est pas parfait, mais il a rallié la majorité des pays de la planète, et nous ne pouvons pas nous permettre de le renier parce que nous aurions voulu qu'il soit meilleur. Il est beaucoup trop tard pour cela.

[Traduction]

Honorables sénateurs, si nous n'agissons pas maintenant, qui agira? Quand? Nos enfants et nos petits-enfants, ceux qui vivent aujourd'hui aussi bien que les générations futures, n'accepteront pas comme excuse qu'il était trop difficile ou trop pénible d'agir maintenant. Ils seront confrontés à des difficultés et à des inconvénients bien pires à cause de notre inaction.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

PROJET DE LOI SUR LOUIS RIEL

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Thelma J. Chalifoux propose: Que le projet de loi S-9, Loi visant à honorer Louis Riel et le peuple métis, soit lu une deuxième fois.—(L'honorable sénateur Chalifoux).

— Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour parler du projet de loi S-9, Loi visant à honorer Louis Riel, à titre de patriote métis et de héros canadien, et le peuple métis.

Permettez-moi de dire tout d'abord que c'est un honneur et un privilège pour moi de participer au débat sur ce projet de loi. Je ferai de mon mieux pour vous expliquer, honorables sénateurs, ce que cela représente pour moi. M. Guy Freedman, un écrivain métis du Manitoba, m'a beaucoup aidé pour cette histoire de notre héros canadien.

Il est curieux de noter qu'il y a 116 ans, les Métis et la famille de Riel se sont retrouvés à Saint-Boniface, au Manitoba, pour honorer ce grand homme et le porter en terre au cours de funérailles auxquelles ont assisté des centaines de parents et de partisans. La plupart des Métis, en fait la plupart des Canadiens en savent beaucoup sur Louis Riel, qui a fait couler plus d'encre que sir John A. Macdonald. Toutefois, la plus grande partie de ce qui a été écrit prête à controverse, chacun ayant sa propre idée sur le sujet. Était-il fou? Était-ce un héros et un prophète? Qu'était-il au juste? Une chose est sûre: il était le chef des Métis à un moment de pagaille épouvantable dans l'Ouest. L'histoire nous montre que c'était un homme vraiment remarquable.

Louis Riel est né le 22 octobre 1844, dans la colonie de la rivièreRouge — par une belle matinée particulièrement ensoleillée, aux dires de sa mère. À peine 41 ans plus tard, le père manitobain de la Confédération a été pendu par le cou sur un gibet de Regina jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Comme d'autres grands hommes emportés trop tôt, tel Martin Luther King, nous rappelons son souvenir le jour de sa mort. C'est bien sûr une déclaration politique. Mais, si l'on peut dire une chose de nous, Métis, c'est que nous sommes politisés jusqu'aux dents.

Pour mettre les choses en perspective, que les honorables sénateurs me permettent de parler des funérailles organisées après l'exécution du grand chef des Métis, Louis Riel. Beaucoup de gens ont ouvertement protesté contre sa condamnation, mais les protestations et les appels lancés aussi bien par les dirigeants que par la population des plaines de l'Ouest n'ont eu aucun effet sur le gouvernement d'alors. Pour les gens des plaines de l'Ouest et pour tous leurs descendants, Louis Riel représentait une société juste et équitable, une société inclusive, une nouvelle nation qui pouvait prendre la place qui lui revenait de droit dans l'avenir du Canada.

Le corps de Riel a finalement été renvoyé par le train à sa famille. Son cortège funèbre avait un mille de long. Des centaines de personnes étaient massées dans l'église et des centaines d'autres attendaient à l'extérieur dans le froid de décembre à Saint-Boniface, sa ville bien-aimée. Contrairement aux funérailles faites aux dirigeants et aux combattants pour les droits et le traitement équitable des masses, Riel avait la tête masquée et un nœud coulant autour du cou. Le père Alexis André, qui l'avait trahi, était à ses côtés sur le gibet. Le père André pleurait à chaudes larmes, et ce fut un Riel très droit et très calme qui lui murmura: «Courage, mon père.»

Au moment de l'exécution très publique de Riel, les prêtres ont commencé à réciter le Pater, mais avant la fin de la prière, la trappe s'est soudainement ouverte, la corde s'est tendue, a violemment oscillé d'avant en arrière puis s'est arrêtée d'un coup.

Il a fallu attendre près d'un mois pour que le corps de Riel soit renvoyé par le train dans sa ville bien-aimée. Il y avait des raisons de croire qu'il serait profané. Je vais raconter aux sénateurs ce qui s'est vraiment passé.

Le corps de Riel a été enfoui dans une fosse peu profonde sous le plancher de l'église. Le fils d'un homme d'affaires canadien-français de Regina et partisan de Riel a monté la garde, armé, pendant des jours. Il n'y a eu aucune tentative ouverte, mais, la nuit, on entendait des pas dans l'obscurité et l'on voyait des visages regarder par la fenêtre. Enfin, quand il a pensé que les sentiments étaient apaisés, le gouverneur Dewdney a informé M. Bonneau qu'un wagon de marchandises serait laissé sur la voie d'évitement de la rue Albert pour transporter le corps à Winnipeg. Le jeune Bonneau a déterré le corps gelé de Riel et, le prenant dans ses bras, l'a porté en trébuchant à travers les bancs de neige du parc Victoria, l'a placé dans une boîte et l'a hissé dans le wagon. Bonneau l'a accompagné jusqu'à Winnipeg où il l'a remis aux amis et à la famille de Riel.

(1640)

De jeunes hommes comme Bonneau font partie de ce que nous sommes vraiment. Bien que non-Métis, il partageait nul doute la vision de Riel concernant ce pourquoi les Métis poursuivent leur lutte, soit l'obtention de l'autonomie gouvernementale et d'un territoire qui leur est propre. Nous avons encore des amis comme Bonneau.

Riel a accompli dans la mort ce qu'il n'a jamais pu faire de son vivant, soit unir les Métis. À mon avis, sa révoltante pendaison et les mauvais traitements subséquents infligés aux Métis de tout le pays ont fait comprendre à tous ces derniers ce pourquoi ils luttaient et ce à quoi tous se heurtaient.

Ce projet de loi revêt une signification très particulière pour ceux d'entre nous ayant participé à la lutte quotidienne de notre nation et de notre peuple en quête de dignité et de justice.

Lorsque le gouvernement de l'époque a exécuté Louis Riel, il a en fait exécuté tout un peuple. On nous a enlevé le droit de parler notre langue. Nous n'avions pas le droit de tenir des réunions publiques. Nous ne pouvions faire entendre notre voix. Nos structures gouvernementales organisées ont été détruites.

Les décrets gouvernementaux ne pouvaient faire disparaître les rêves et les visions que Louis Riel avait donnés aux gens de l'Ouest et du Québec qui luttaient afin de conserver leur propre identité culturelle si semblable à la nôtre et qui voulaient néanmoins faire partie du nouveau Canada. Riel était le reflet des espoirs et des rêves que nous entretenions au sujet de ce que pourrait être le Canada d'un océan à l'autre.

Sous le leadership de Louis Riel, et avant que la terre de Rupert et le territoire connu sous le nom de Red River ne deviennent de compétence canadienne, on avait établi un gouvernement provisoire reposant sur les principes de tolérance et de représentation égale de la majorité métisse, des Français, des Anglais et des Premières nations.

Le gouvernement a élu Louis Riel comme président et a rédigé une liste des droits de gestion de ce territoire ayant été adoptée à l'unanimité. Cette liste de droits a été acceptée par le gouvernement du Canada comme fondement de l'adhésion du territoire à la Confédération canadienne et de l'adoption de la Loi sur le Manitoba.

Le Manitoba est devenu la cinquième province à adhérer à la Confédération et la première province de l'ouest du Canada à le faire. Le nom «Manitoba» a été présenté par Louis Riel et choisi par le Parlement canadien. C'est pourquoi il est reconnu comme étant le fondateur du Manitoba.

Par trois fois, Louis Riel a été élu à la Chambre des communes, soit les 13 octobre 1878, 13 janvier 1874 et 3 septembre 1874. Par suite de pressions politiques, il n'a jamais pu y siéger.

Je vois dans ces événements le début de l'aliénation de l'Ouest qui dure encore aujourd'hui. Les habitants des territoires étaient de plus en plus préoccupés par le manque de respect de leurs droits en tant que citoyens canadiens. N'est-ce pas ce qui arrive encore aujourd'hui? Les gens comptaient sur Riel pour les aider à défendre leur maison, leur famille et leur terre.

En mars 1992, la Chambre des communes et le Sénat du Canada ont adopté à l'unanimité des résolutions reconnaissant les diverses et importantes contributions de Louis Riel au Canada et au peuple métis et, surtout, le rôle unique et historique que celui-ci a joué en tant que fondateur du Manitoba. En mai 1992, l'Assemblée législative du Manitoba a adopté à l'unanimité une résolution reconnaissant le rôle unique et historique que Louis Riel a joué en tant que fondateur du Manitoba et sa contribution à l'édification de la Confédération canadienne.

Pourquoi reconnaître la ceinture fléchée en tant que symbole du peuple métis? Notre prêtre métis, le père Guy Lavallée, a ouvert avec une prière la première conférence constitutionnelle des premières nations, qui s'est tenue à Ottawa, le 14 mars 1992, et à laquelle j'ai eu l'honneur d'assister. Il a tenu des propos tellement profonds sur les raisons pour lesquelles la ceinture fléchée devrait être notre symbole que je voudrais répéter ici sa prière. La voici:

Je voudrais donc terminer ma prière, Seigneur, sur le même thème que je l'ai commencée, à savoir un symbole métis. Considérons un instant la ceinture fléchée. Il existe d'autres symboles métis, tels notre drapeau, le violon et la fameuse gigue de la rivière Rouge.

Mais cela fait des années, Seigneur, que les Métis portent fièrement la ceinture fléchée. Lorsque je l'examine, je constate qu'elle est faite de nombreux fils entrelacés. De nombreux brins, de nombreux motifs, de nombreuses couleurs contribuent au tissu général de cette ceinture. La vie des Métis est un tissu de cultures, de langues, de traditions et de croyances. Par exemple, Seigneur, nous descendons des Anglais, des Français, des Indiens — Cris et Ojibwés — et des Écossais, pour n'en nommer que quelques-uns. Nous parlons diverses langues: l'anglais, le français du Canada, le français michif, le cri michif et le mashkegon.

Voyez la ceinture. Elle est un assemblage. Elle est un mélange. Elle est métisse. Elle est constituée de divers éléments, comme la vie des Métis. Voyez sa trame, son tissu, ses couleurs. Malgré leur disparité, ces éléments forment un tout intégré. Dans le même ordre d'idées, les différentes origines ethniques et les différentes langues des Métis se fondent toutes ensemble pour former une autre tapisserie riche comme la vie et la culture des Métis.

Seigneur, le caractère multiculturel de notre identité est ce qui fait de nous des êtres uniques, des Métis. De bien des façons, Seigneur, je pense que nous représentons ce que le Canada devrait être en tant que pays uni.

Seigneur, nous, ton peuple métis, reconnaissons notre caractère unique devant toi aujourd'hui.

Actuellement, Seigneur, nous n'avons pas de rituel extraordinaire à exécuter pour toi et nous n'avons pas apporté de présent particulier à t'offrir. Cependant, ce que nous avons à t'offrir, Seigneur, c'est nous-mêmes, nos vies, la nation métisse du Canada et son histoire, ses souffrances, ses joies et ses aspirations.

Et c'est dans le même esprit que celui qui animait nos ancêtres à la rivière Rouge en 1870 et à Batoche en 1885 que nous nous engageons à bâtir un Canada vraiment uni d'un océan à l'autre, comme l'auraient souhaité Louis Riel et Gabriel Dumont s'ils étaient des nôtres aujourd'hui.

Le combat pour la justice se poursuit de nos jours. Le
7 septembre 2002, le Ralliement national des Métis a adopté à l'unanimité la définition suivante de notre nation, une définition semblable à celle que Louis Riel avait établie sous le gouvernement provisoire. La voici:

«Métis» désigne une personne qui s'identifie comme étant métisse, qui est distincte des autres autochtones, dont les ancêtres faisaient partie de la nation métisse historique et qui est acceptée par la nation métisse;

«nation métisse historique» désigne les autochtones connus à l'époque comme étant des Métis qui vivaient dans la patrie de la nation métisse historique;

«patrie de la nation métissehistorique» désigne les terres du centre-ouest de l'Amérique du Nord utilisées et occupées comme territoire traditionnel des Métis ainsi reconnus à l'époque;

«nation métisse» désigne les autochtones descendant de la nation métisse historique qui comprend maintenant tous les membres de la nation métisse et qui est un des «peuples autochtones du Canada», conformément à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

«distinct des autres peuples autochtones» signifie distinct à des fins culturelles et par rapport au statut de nation;

Cette définition ressemble à celle que Riel avait lui-même proclamée.

Ces deux dernières semaines, la SRC a diffusé le nouveau procès de Louis Riel. Les conclusions de ce procès ont été très émouvantes. Près de neuf Canadiens sur dix ont innocenté Louis Riel des chefs d'accusation qui pesaient contre lui. Par conséquent, j'exhorte maintenant tous mes collègues à appuyer ce projet de loi, car le Canada a réellement des héros merveilleux et consacrés, et Louis Riel est l'un d'eux.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

(1650)

PROJET DE LOI SUR LA PROTECTION DES PHARES PATRIMONIAUX

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable J. Michael Forrestall propose la deuxième lecture du projet de loi S-7, Loi sur la protection des phares patrimoniaux.—(L'honorable sénateur Forrestall).

— Honorables sénateurs, c'est un plaisir et un privilège pour moi d'intervenir aujourd'hui Loi visant à protéger les phares patrimoniaux. Ce n'est pas une question partisane, ni une question d'argent. Il faut prendre des mesures pour protéger le patrimoine canadien pour les générations à venir, qu'il s'agisse de lieux à valeur patrimoniale, de gares de train, de phares ou peut-être même bientôt de ces icônes de l'Ouest canadien que sont les élévateurs à grains. Ce sont des monuments qui rappellent le mode de vie canadien. Tous les sénateurs qui connaissent bien la Nouvelle- Écosse, le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard, le bassin du Saint-Laurent et Terre-Neuve-et-Labrador, tous ceux qui connaissent ces endroits, qui apprécient les particularités de ces endroits, peuvent certainement imaginer la beauté, la tranquillité et la sérénité d'un phare montant la garde. On me dit que les gens ont été tellement impressionnés par cette beauté et cette sérénité que cela a fait l'objet d'un long article dans une revue allemande.

J'aimerais que vous imaginiez un instant qu'il n'y a plus de phare à Peggy's Cove, plus de phare dans l'île Grand Manan, plus de phare à Gannet Rock, plus de phare à West Point, dans l'Île-du- Prince-Édouard, ou à Cape Spear, à Terre-Neuve. Qu'arriverait-il de notre monde, du monde comme nous le connaissons aujourd'hui?

Honorables sénateurs, chaque jour que nous laissons passer sans agir, des agglomérations côtières de tout le Canada, qu'elles se trouvent sur notre magnifique côte est, le long du Saint-Laurent, sur les bords des Grands Lacs ou du grand lac Winnipeg, ou sur les côtes majestueuses du Pacifique, les collectivités en cause risquent de voir disparaître les phares historiques qu'elles abritent. Ces phares ont sauvé la vie des marins naviguant sur les eaux de notre littoral pendant des centaines d'années et ils se sont retrouvés au centre de nos agglomérations côtières. De magnifiques images de phares du monde entier se trouvent sur bien des murs. Pourquoi? Parce que ces phares symbolisent la victoire de l'homme sur les hautes mers et les océans. Par le passé, les phares ont capturé le coeur et l'esprit de nombre de gens partout au monde, puisqu'ils étaient souvent le premier signe de la proximité d'une terre pour ceux qui arrivaient au pays ou qui y revenaient par la mer. L'importance de ces phares pour l'homme ne fait aucun doute et leur beauté simple est évidente sur une côte accidentée et sombre et devant une mer parfois violente. Il n'est pas nécessaire d'avoir grandi sur les côtes de l'Atlantique ou du Pacifique pour apprécier les phares.

La Lighthouse Preservation Society, dont le siège social se trouve en Nouvelle-Écosse et qui compte des représentants dans tout le Canada, a beaucoup fait pour examiner le sort des phares du Canada et tenter de les sauver de la destruction. D'autres groupes sur la côte ouest ont aussi essayé de sauvegarder cette précieuse partie de l'histoire maritime du Canada. Notre collègue, qui appuie ce projet de loi, l'honorable sénateur Patricia Carney, a travaillé inlassablement en collaboration avec les gardiens de phares de la côte ouest pour protéger les phares et les gardiens eux-mêmes. Je ne peux pas vous dire combien de fois je l'ai suivie le long des escaliers en spirale, jusqu'à des hauteurs étourdissantes parfois, pour l'aider à défendre cette grande cause, cause qui ferait honneur au Sénat si on la gagnait, je ne crains pas de le dire.

La dernière fois que nous avons compilé des données exactes, il restait à peine plus de 500 phares au Canada. De ces 500, seulement 19 sont protégés à titre de phares patrimoniaux. Reconnus dans une certaine mesure comme sites historiques, 101 autres phares sont partiellement protégés. Les autres n'ont aucun statut pour le moment.

Que signifie ce statut de protection et de phare patrimonial en réalité? J'attire votre attention sur le projet de loi C-62, Loi sur la protection des gares ferroviaires patrimoniales de 1988, qui a servi de modèle au présent projet de loi. Pourquoi, si les sites patrimoniaux sont à ce point spéciaux, a-t-il fallu proposer une autre loi pour protéger nos gares ferroviaires patrimoniales dans la plupart des collectivités canadiennes? La réponse est que, malheureusement, même protégées par leur statut de gares patrimoniales, ces gares historiques dont certaines avaient été construites à l'époque de l'avènement de la Confédération pouvaient être vendues, transférées, modifiées ou détruites sans consultation de la population et sans considération pour ses préoccupations à ce sujet. La Loi sur la protection des gares ferroviaires patrimoniales a instauré un processus exigeant une consultation publique avant toute opération visant ces sites et a imposé de lourdes peines à ceux qui agiraient précipitamment et causeraient des dommages à une gare ferroviaire historique. Dans le cadre de notre recherche, nous avons constaté que les 19 phares patrimoniaux et les 101 sites partiellement reconnus se trouvent dans la même situation précaire que les gares ferroviaires historiques du Canada avant l'adoption du projet de loi C-62.

Tel est donc l'objectif du projet de loi S-7. J'attire votre attention sur l'article 3 qui se lit comme suit:

La présente loi a pour objet d'assurer la conservation et la protection des phares patrimoniaux:

a) en prévoyant un processus de sélection et de désignation des phares patrimoniaux;

b) en empêchant leur modification ou leur aliénation non autorisée;

c) en exigeant leur entretien dans une mesure raisonnable.

Le projet de loi définit le «phare patrimonial» comme étant:

... un phare — ainsi que tout site ou structure connexe — désigné comme phare patrimonial aux termes de l'article 6.

Le projet de loi définit «modifier» comme:

... le fait de restaurer ou de rénover, mais non d'effectuer l'entretien courant et les réparations.

La «Commission», aux fins du présent projet de loi, est la Commission des lieux et monuments historiques du Canada. Le ministre compétent est le ministre du Patrimoine canadien.

L'article 4 du projet de loi précise ceci:

La présente loi s'applique aux phares relevant de l'autorité législative du Parlement du Canada.

Les articles 6 à 10 du projet de loi autorisent le gouverneur en conseil, sur la recommandation du ministre du Patrimoine canadien, à désigner un phare et les structures connexes comme un phare patrimonial et à mettre en branle un processus pour les faire reconnaître comme des structures patrimoniales.

Les articles 11 à 16 visent à protéger les phares patrimoniaux. J'attire particulièrement l'attention des honorables sénateurs sur l'article 11, qui dit ceci:

Nul ne peut enlever, modifier, démolir ou aliéner — notamment par vente ou cession — tout ou partie d'un phare patrimonial, à moins d'y avoir été autorisé par le ministre aux termes de la présente loi.

Les articles 11 à 16 exposent le processus de consultations publiques concernant l'aliénation des phares patrimoniaux.

(1700)

L'article 17 oblige simplement le propriétaire d'un phare patrimonial à le garder en bon état et à l'entretenir de façon à respecter son caractère patrimonial. Ce n'est rien de plus que ce que la plupart des municipalités, sinon toutes, exigent des propriétaires de biens immobiliers. La pollution visuelle n'intéresse personne; c'est pourquoi il faut assurer l'entretien des phares patrimoniaux.

L'article 18 autorise le gouverneur en conseil à établir des règlements, tandis que l'article 19 modifie la Loi sur le ministère du Patrimoine canadien en établissant l'autorité du ministre sur les phares patrimoniaux.

En fin de compte, honorables sénateurs, ce projet de loi élargira les pouvoirs du ministre du Patrimoine canadien et régira la consultation publique ainsi que la désignation, la préservation et l'entretien général des phares patrimoniaux du Canada.

Honorables sénateurs, je sollicite votre appui et je vous rappelle que le projet de loi avait déjà été adopté au Sénat au cours de la dernière session, avait été transmis à l'autre endroit et y avait presque été adopté lorsque la prorogation est survenue. J'espère qu'un tel sort n'adviendra pas au projet de loi cette fois-ci. Je le recommande aux honorables sénateurs.

(Sur la motion du sénateur LaPierre, le débat est ajourné.)

AFFAIRES SOCIALES, SCIENCES ET TECHNOLOGIE

BUDGET—ÉTUDE SUR L'ÉTAT DU SYSTÈME DE SOINS DE SANTÉ—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (budget — étude spéciale sur l'état du système de soins de santé), présenté au Sénat le 24 octobre 2002.—(L'honorable sénateur LeBreton).

L'honorable Marjory LeBreton propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

ADOPTION DU TROISIÈME RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (hausse de traitement du Groupe de direction) présenté au Sénat le 24 octobre 2002.—(L'honorable sénateur Bacon).

L'honorable Lise Bacon propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

DROGUES ILLICITES

LE RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL— INTERPELLATION—REPORT DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Nolin, attirant l'attention du Sénat sur les conclusions du rapport du Comité spécial sénatorial sur les drogues illicites intitulé «Le cannabis: Positions pour un régime de politique publique pour le Canada», déposé le
3 septembre 2002 auprès du greffier du Sénat durant la première session de la 37e législature.—(L'honorable sénateur Prud'homme, c.p.).

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je crois que le président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce attend impatiemment et apprécierait que je reporte le débat. Je ferai donc plaisir au sénateur Kolber en demandant le report du débat.

(Le débat est reporté.)

AFFAIRES SOCIALES, SCIENCES ET TECHNOLOGIE

ADOPTION DE LA MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À CONTINUER SON ÉTUDE DU DOCUMENT INTITULÉ «SANTÉ EN FRANÇAIS—POUR UN MEILLEUR ACCÈS
À DES SERVICES DE SANTÉ EN FRANÇAIS»

L'honorable Yves Morin, conformément à l'avis du 10 octobre 2002, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à examiner et à faire rapport sur le document intitulé «Santé en français — Pour un meilleur accès à des services de santé en français».

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus par le Comité dans la première session de la trente-septième législature soient déférés au Comité;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard
le 31 décembre 2002; et

Que le Comité soit autorisé, par dérogation aux règles usuelles, à déposer tout rapport auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là; et que le rapport soit réputé avoir été déposé à la Chambre du Sénat.

[Traduction]

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, je propose que le dernier paragraphe soit supprimé.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, je propose cette motion d'amendement pour assurer la cohérence avec la décision prise la semaine dernière au sujet d'un autre comité. Je sais qu'il y a là un problème et que ce problème doit être étudié de près.

Plusieurs comités ont des préoccupations concernant la publication de leurs rapport.s L'article 95 du Règlement et d'autres questions risquent d'entrer en jeu. Toutefois, afin d'expédier notre travail, je pense qu'il est important que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie dispose de ce pouvoir. Par conséquent, en proposant cet amendement aujourd'hui, je ne pense pas que nous nous ingérions dans les travaux du comité.

Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer sur la motion d'amendement?

Des sénateurs: Le vote!

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

(La motion d'amendement est adoptée.)

Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer sur la motion principale?

Des voix: Le vote.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion modifiée?

(La motion modifiée est adoptée.)

BANQUES ET COMMERCE

AUTORISATION AU COMITÉ D'ÉTUDIER L'APPLICATION DE LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ ET DE LA LOI SUR LES ARRANGEMENTS
AVEC LES CRÉANCIERS DES COMPAGNIES

L'honorable E. Leo Kolber, conformément à l'avis du 23 octobre 2002, propose:

Qu'en conformité avec les mesures contenues dans
l'article 216 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et dans l'article 22 de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à étudier et à faire rapport sur l'application de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies; et

Que le comité soumette son rapport final au plus tard
le 19 juin 2003.

(La motion est adoptée.)

AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL

L'honorable E. Leo Kolber, conformément à l'avis du 24 octobre 2002, propose:

Que le Comité permanent des banques et du commerce soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été déférés.

(La motion est adoptée.)

(1710)

AUTORISATION AU COMITÉ À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS

L'honorable E. Leo Kolber, conformément à l'avis du 24 octobre 2002, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.

(La motion est adoptée.)

PEUPLES AUTOCHTONES

AUTORISATION AU COMITÉ À CONTINUER À ÉTUDIER LES QUESTIONS QUI TOUCHENT LES JEUNES AUTOCHTONES QUI VIVENT EN MILIEU URBAIN

L'honorable Thelma J. Chalifoux, conformément à l'avis du
24 octobre 2002, propose:

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, conformément aux opinions reçues des organisations et des peuples autochtones vivant en milieu urbain, soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les questions qui touchent les jeunes Autochtones canadiens vivant en milieu urbain. Le comité est notamment autorisé à examiner l'accessibilité, l'éventail et la prestation des services, les problèmes liés aux politiques et aux compétences, l'emploi et l'éducation, l'accès aux débouchés économiques, la participation et l'autonomisation des jeunes, et d'autres questions connexes;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question et les travaux accomplis par le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones au cours de la première session de la 37e législature soient déférés au comité;

Que le comité présente son rapport au Sénat au plus tard le 27juin 2003.

(La motion est adoptée.)

LE DISCOURS DU TRÔNE

RECOURS AU RÈGLEMENT—DÉCISION DU PRÉSIDENT

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le mercredi
2 octobre, le sénateur Murray invoquait le Règlement pour parler de deux choses, concernant l'ouverture de la deuxième session de la
37e législature et le discours du Trône prononcé par Son Excellence la Gouverneure générale dans cette enceinte le 30 septembre. Le premier point concernait la sonorisation et le fait que le volume de l'interprétation était tellement fort qu'il perturbait non seulement les sénateurs, mais la Gouverneure générale elle-même. Bien que la cause du problème ait été inconnue, le sénateur a demandé que des mesures soient prises pour éviter que cela ne se reproduise. Le second point soulevé par le sénateur concernait le fait que plusieurs sénateurs, ainsi que des visiteurs dans les tribunes, ont applaudi à certains moments du discours du Trône, ce qui est contraire à l'usage habituel.

Comme le sénateur l'a rappelé, en sa qualité de représentante de la Reine, la Gouverneure générale doit être tenue à l'écart de toute action politique. C'est pourquoi son discours doit être écouté en silence. Les applaudissements étaient déplacés et ne sauraient être excusés. L'intervention du sénateur Murray a suscité plusieurs autres observations concernant l'ouverture de la session.

[Français]

Le sénateur Carstairs, leader du gouvernement, a ensuite apporté son appui aux propos du sénateur Murray, tout en évoquant un autre incident. Un député qui s'est présenté à la barre du Sénat pour entendre le discours s'est permis de prendre le fauteuil d'un sénateur et il a fallu que le whip du gouvernement lui demande d'aller

retrouver ses collègues de l'autre côté de la barre pour qu'il parte. Pour éviter de semblables incidents, le sénateur Carstairs a proposé qu'une note d'information soit préparée afin d'expliquer le décorum auquel on s'attend lors du discours du Trône.

[Traduction]

Le sénateur Kinsella, leader adjoint de l'opposition, a invoqué le Règlement à son tour, d'abord pour donner son appui aux propos des sénateurs Murray et Carstairs, et ensuite, pour évoquer trois autres incidents survenus lors des cérémonies et qui l'ont troublé. Le premier a également trait au décorum. Selon le sénateur, il n'était pas approprié qu'on se lève lorsque les juges de la Cour suprême sont entrés dans la salle du Sénat pour prendre leur fauteuil devant les trônes, là où se trouve habituellement le Bureau.

Le second point concerne la séance du Sénat tenue à 11 h 30, et au cours de laquelle la présentation officielle du sénateur Smith a eu lieu. Comme l'heure du discours du Trône avait été fixée par proclamation à 14 h, le sénateur s'est demandé en vertu de quelle autorité on avait tenu cette réunion. Enfin, le sénateur Kinsella a mis en doute le bien-fondé des délibérations tenues par le Sénat à la suite du départ de la Gouverneure générale après son discours, étant donné que la masse n'avait pas été posée sur le Bureau comme c'est le cas habituellement.

[Français]

D'autres sénateurs sont intervenus dans le débat sur le rappel au Règlement. Le sénateur Austin a parlé de «coups bas» à propos de la télévision, qui a tenté de projeter une certaine image du Sénat. Pour sa part, le sénateur LaPierre se demandait pourquoi on en faisait toute une histoire et il ne voyait rien de mal au fait d'applaudir à certains moments du discours du Trône. Le sénateur Prud'homme a parlé d'adopter des règles strictes concernant les images que les caméras peuvent capter. Le sénateur Grafstein a pris la parole pour défendre la tradition parlementaire et pour expliquer son comportement lors de l'entrée des juges de la Cour suprême. Après avoir indiqué que le sénateur Murray avait eu raison d'invoquer le Règlement, le sénateur Cools a déploré qu'on comprenne de moins en moins en quoi consiste un système parlementaire dans le cadre d'une monarchie constitutionnelle. Le sénateur Comeau a profité du rappel au Règlement pour soulever la question des présences. Enfin, le sénateur LaPierre a repris la parole pour suggérer d'interdire aux photographes l'accès au Sénat.

[Traduction]

Je souhaite remercier les honorables sénateurs qui ont pris part au débat. Il est clair que certains éléments des cérémonies ne se sont pas déroulés comme ils auraient dû et que certains usages semblent mal compris. Je me propose d'aborder chaque point à tour de rôle. Il convient d'abord de rappeler que le rôle du Président lors du discours du Trône n'est pas le même qu'au cours d'une séance du Sénat. Lorsque le Parlement est réuni au Sénat, que la représentante de la Reine est sur le Trône, et que les sénateurs sont à leur place et les députés à la barre, je ne crois pas qu'on puisse dire que le Président dirige des délibérations. Je crois néanmoins qu'il est important que soit traité chacun des points soulevés lors de ce rappel au Règlement, même si ce ne sont pas strictement parlant des rappels légitimes.

Pour ce qui est de la sonorisation défectueuse, par suite de ce rappel au Règlement et des préoccupations exprimées par des fonctionnaires du Sénat, une enquête a révélé qu'il y avait eu certaines difficultés liées à une panne soudaine de la sonorisation

juste avant l'ouverture, et qu'on n'avait plus le temps de faire une dernière vérification du son avant le début des cérémonies. En outre, il y a eu des ennuis avec l'équipement du radiodiffuseur pour ce qui est du niveau sonore, mais on m'assure que des mesures ont été prises pour que ce genre de problèmes ne se reproduise plus.

[Français]

Pour ce qui est des applaudissements au cours du discours du Trône, je suis d'accord que cela n'est pas approprié et qu'il faut éviter de le faire, et ce, pour les raisons invoquées par plusieurs sénateurs. C'est le gouvernement qui prépare le discours du Trône, qui constitue le canevas de son programme pour la session. Il n'y a pas lieu d'exposer le pour et le contre de ce programme en présence de la Gouverneure générale, mais plutôt au cours de la période prévue à cet effet pour l'Adresse en réponse au discours. Je dois reconnaître par ailleurs que s'il devait y avoir des applaudissements, ou des manifestations de désapprobation, en tant que Président, je ne serais pas en mesure d'y mettre fin. Se lever puis tenter d'étouffer une réaction bruyante à un passage ou l'autre du discours ne ferait qu'ajouter à l'offense. Cela mettrait la Gouverneure générale dans l'embarras et porterait atteinte à la dignité de la cérémonie.

[Traduction]

Il en va de même pour ce qui s'est produit lorsque les juges de la Cour suprême sont entrés dans la salle du Sénat. Selon l'usage les sénateurs ne devraient pas se lever, mais aurait-il été acceptable de ma part d'intervenir pour les en empêcher? Je ne crois pas. C'est pourquoi je souscris à la suggestion faite par plusieurs sénateurs qu'une note d'information accompagne tout dossier remis aux participants afin de leur expliquer le déroulement des cérémonies d'ouverture de session. Autrement dit, la meilleure façon de procéder est de vraiment s'assurer que les personnes présentes sont au courant des usages appropriés.

Quant à l'incident du député qui a pris le fauteuil d'un sénateur, il s'agit clairement d'une violation de la tradition et du Règlement du Sénat. Les membres de l'autre endroit qui viennent au Sénat pour la sanction royale ou pour entendre le discours du Trône, comme
le 30 septembre dernier, devraient toujours se tenir derrière la barre. L'article 126 prévoit que des sièges seront réservés «hors de la barre» aux anciens sénateurs ou aux députés qui souhaitent assister aux délibérations du Sénat. Ceux-ci ne devraient jamais s'asseoir de ce côté-ci de la barre. Le sénateur Prud'homme a signalé qu'un sénateur avait invité le député à s'asseoir. Mais d'autres sénateurs s'y sont opposés, et le whip du gouvernement a pu persuader le député de se retirer. Un tel incident n'aurait pas dû se produire, mais cela ne fait que renforcer la nécessité d'établir et de distribuer un document qui expliquerait les usages et traditions à suivre lors de l'ouverture d'une session parlementaire.

(1720)

Le sénateur Kinsella s'interroge sur l'autorité permettant la tenue de la séance du matin, ainsi que sur le bien-fondé de celle tenue après le discours du Trône, étant donné que la masse ne reposait pas sur le Bureau. Une recherche a permis de voir l'évolution de l'usage. Les résultats sont intéressants et ils peuvent fournir au sénateur Kinsella une partie de la réponse à sa première question. Toutefois, en tant que Président, je n'ai pas le pouvoir de rendre une décision sur une question constitutionnelle ou un point de droit, et de toute évidence un aspect de la question du sénateur est de nature constitutionnelle.

Avant 1930, la proclamation fixant la date de la rentrée parlementaire, que ce soit pour une nouvelle législature ou une nouvelle session, n'indiquait pas l'heure de l'arrivée du gouverneur général sur la colline. Et même avant le changement intervenu en 1930, le Sénat se réunissait toujours avant. Il y avait plusieurs raisons à cela: pour recevoir le message de Rideau Hall précisant l'heure de l'ouverture, pour accueillir le nouveau président du Sénat nommé par le gouvernement ou, encore, pour présenter de nouveaux sénateurs. D'après les Journaux, toutes ces séances auraient été brèves. Mais avant 1930, il est moins clair si ces séances se tenaient peu de temps ou plusieurs heures avant l'arrivée du gouverneur général, mais certaines ont effectivement été tenues plusieurs heures avant. C'est d'ailleurs plus souvent le cas pour les rentrées après 1930, mais pas toujours. Si l'ouverture d'une nouvelle législature est toujours précédée d'une séance du Sénat, il est arrivé quelques fois que l'ouverture d'une nouvelle session ait été prévue pour coïncider avec la présence du gouverneur général au Sénat pour la lecture du discours du Trône. C'est ainsi que le cas du
30 septembre dernier cadre tout à fait avec les usages du Sénat depuis 1867.

L'incident de la masse est aussi intéressant. Sans se prononcer dans un sens ou dans l'autre, le sénateur Kinsella invite le Président à prendre en considération la question de la place de la masse lors de la séance tenue par le Sénat après le départ de la Gouverneure générale. Les honorables sénateurs s'en souviendront, il y a eu des délibérations le 30 septembre selon l'usage établi. Conformément au Règlement du Sénat, le projet de loi fictif a été déposé et a reçu la première lecture, et je me suis acquitté de mon obligation de faire rapport du discours du Trône. En outre, le leader adjoint du gouvernement a présenté une motion pour la création du comité de sélection. Au cours de la séance, la masse se trouvait dans la salle, mais pas sur le Bureau, qui avait été enlevé temporairement. D'après ce que j'ai pu constater, on a toujours enlevé le Bureau pour chaque rentrée depuis 1920, année où le Sénat s'est installé dans cette salle. De fait, chaque fois qu'il s'agit d'une rentrée «importante», les pupitres des sénateurs sont enlevés et remplacés par des rangées de bancs. Même le fauteuil du Président est retiré pour une partie de la journée afin que le Gouverneur général ait facilement accès au Trône. Ces aménagements, ainsi que l'installation de plate-formes pour les caméramans font maintenant partie des préparatifs en vue des cérémonies liées à une rentrée parlementaire. Aucun de ces aménagements, et notamment l'absence du Bureau, ne compromet la légitimité de la brève séance tenue par le Sénat à la suite du discours du Trône. La masse est présente, même si elle n'est pas posée sur le Bureau. C'est la condition minimale, et elle est suffisante. Comme l'expliquent Marleau et Montpetit, à la page 238 de La Procédure et les usages de la Chambre des communes à propos de la masse à la Chambre des communes:

La masse fait partie intégrante du fonctionnement de la Chambre; depuis la fin du XVIIe siècle, il est acquis que la masse doit être présente pour que la Chambre soit correctement constituée.

[Français]

Une autre question a été soulevée au sujet de la pratique consistant à considérer la séance du matin comme distincte de celle de l'après-midi. Cette pratique n'est pas uniforme. Elle semble remonter à 1930 et a été suivie de façon discontinue depuis. La manière dont cela figure dans le registre des présences des sénateurs est une question administrative et non de procédure et je n'ai pas l'intention de la commenter.

[Traduction]

Enfin, plusieurs sénateurs ont déploré les «coups bas» des caméramans. Il a été proposé que le Sénat se dote de règles et de lignes directrices comme celles qui s'appliquent aux séances de la Chambre des communes. On peut présumer que c'est le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement qui se chargerait de la rédaction. Ces lignes directrices de la Chambre des communes précisent par exemple que la caméra doit se limiter à la tête du député qui parle. Par ailleurs, il a été proposé d'interdire les caméras aux cérémonies d'ouverture. Honnêtement, je ne crois pas que l'une ou l'autre formule soit possible. La rentrée n'est pas une séance ordinaire du Sénat ou des Communes. Sans compter qu'il y a différentes équipes de caméramans, ainsi que des photographes ordinaires, et qu'il serait difficile de leur imposer les règles que la Chambre des communes oblige sa propre équipe à suivre lors de ses séances. Ces règles sont trop contraignantes pour une cérémonie comme celle de la rentrée parlementaire.

J'ai fait le tour des points soulevés au cours de la discussion qui a été lancée par le rappel au Règlement du sénateur Murray. Comme je l'ai dit, votre Président ne peut pas faire grand-chose pour contrôler les activités entourant le discours du Trône. Dans la mesure du possible, toutefois, des mesures seront prises pour réduire, et espérer éviter, les incidents techniques comme ceux qui se sont produits le 30 septembre. En outre, je ferai le nécessaire pour qu'un document expliquant les traditions et usages de la rentrée parlementaire soit préparé et mis en circulation avant la tenue des prochaines cérémonies.

Je remercie les honorables sénateurs.

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 30 octobre 2002, à 13 h 30.)


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