Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 16
Le mercredi 6 novembre 2002
L'honorable Dan Hays, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- Le Code criminel
La Loi sur les armes à feu - Règlement, procédure et droits du Parlement
- Le discours du Trône
- Le Code de déontologie et les lignes directrices en matière d'éthique
- Banques et commerce
- Agriculture et forêts
- Pêches
- Sécurité nationale et défense
- Droits de la personne
- Agriculture et forêts
- Affaires juridiques et constitutionnelles
- Langues officielles
- Affaires étrangères
- Règlement, procédure et droits du Parlement
- Sécurité nationale et défense
- Le Code criminel
LE SÉNAT
Le mercredi 6 novembre 2002
La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
LE COADY INTERNATIONAL INSTITUTE
L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, j'ai la joie de vous signaler la tenue d'une réception spéciale qui aura lieu le 18 novembre, de 16 heures à 18 heures, sur la Colline du Parlement, dans la salle du Commonwealth, en l'honneur du Coady International Institute. À cette occasion, l'Institut, ce véritable succès canadien, en profitera pour lancer sa vision de l'avenir, laquelle a pour thème «L'éducation pour la démocratie, la paix et la prospérité».
Créé en 1959 par l'Université St. Francis Xavier, l'institut a été nommé en l'honneur du père Moses Coady, éminent novateur social canadien qui a fondé le mouvement Antigonish, un modèle véritablement édifiant de développement, axé sur l'entraide et l'initiative personnelle.
Après la Seconde Guerre mondiale, M. Coady a élargi le mandat du mouvement qu'il avait créé pour apporter une solution à la pauvreté des pêcheurs, des agriculteurs, des bûcherons et des mineurs de charbon locaux, et a entrepris de consacrer son énergie prodigieuse aux difficultés des nations émergentes. C'est ainsi que les valeurs, les principes et la philosophie de ce mouvement d'initiative personnelle, basé à l'Université de St. Francis Xavier, se sont transformés en des programmes internationaux d'entraide qui, au fil des années, ont été axés sur l'engagement en faveur de l'autonomisation des défavorisés auxquels on inculque les connaissances et les compétences dont ils ont besoin pour façonner leur vie.
Quand j'étudiais à St. Francis Xavier, je servais cet homme géant au réfectoire des prêtres. J'ai toujours pensé que j'avais eu une chance énorme de croiser et même de m'entretenir avec ce personnage dont l'influence personnelle sur la vie des pêcheurs et des mineurs de charbon de ma région allait finir par intéresser les dirigeants communautaires de plus de 120 pays et les attirer jusqu'à notre magnifique campus universitaire.
Il est plus important que jamais aujourd'hui pour la communauté internationale d'apprendre à façonner les individus pour les amener à maîtriser leur destin. L'Institut Coady illustre merveilleusement bien la capacité de créer un monde plus équitable et plus juste. J'espère que les honorables sénateurs feront tous l'effort d'assister à cette réception.
LA SEMAINE NATIONALE DES 4-H
L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, nous célébrons cette semaine la Semaine nationale des 4-H. D'un bout à l'autre du Canada, les clubs 4-H ont préparé des stands et des activités visant à promouvoir leur mouvement.
Le mouvement 4-H aide les jeunes à acquérir des connaissances de base et des qualités de leadership tout en suscitant une sensibilisation à la vie rurale. En effet, le programme 4-H canadien apporte une contribution essentielle à la vie rurale au Canada. L'Île-du-Prince-Édouard, ma province natale, compte près de 900 membres et 400 chefs bénévoles. Je félicite tous les bénévoles 4-H aux quatre coins du Canada, qui consacrent temps et efforts à l'organisation de programmes et d'activités.
Le mouvement 4-H donne à ses membres plusieurs occasions à saisir. En effet, ceux-ci peuvent voyager, tant au Canada qu'à l'étranger, et participer à des échanges. Ils peuvent aussi présenter des demandes de bourses pour leurs études supérieures.
J'estime le mouvement 4-H important et je suis ravie de voir qu'il se porte toujours bien au moment d'entrer dans sa 90e année au Canada. Le mouvement a une devise qui fait bien comprendre les valeurs qu'il prône: «Apprendre en travaillant».
AFFAIRES COURANTES
AFFAIRES ÉTRANGÈRES
AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À SE RÉUNIR DURANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT
L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:
Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé, en conformité avec le paragraphe 95(3) du Règlement, à siéger le lundi 18 novembre 2002 à 18 heures, même si le Sénat est ajourné à ce moment-là pendant plus d'une semaine.
Le Comité recommande, pour les fins du paragraphe 3 de l'article 95, que les comités sénatoriaux soient autorisés à se réunir à toute heure n'importe quel jour de la semaine où le Sénat ajourne au cours de sa semaine de séance.
TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS
AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À SE RÉUNIR DURANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT
L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:
Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé, en conformité avec le paragraphe 95(3) du Règlement, à siéger le mardi 19 novembre 2002 à 9 h 30, même si le Sénat est ajourné à ce moment-là pendant plus d'une semaine.
(1340)
ÉNERGIE, ENVIRONNEMENT ET RESSOURCES NATURELLES
AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À ÉTUDIER DES QUESTIONS LIÉES À SON MANDAT
L'honorable Tommy Banks: Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:
Que le Comité permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles soit autorisé à étudier de nouvelles questions concernant son mandat et à faire rapport à ce sujet:
a) la situation actuelle et l'orientation future des ressources énergétiques du Canada sur les plans de la production, de la distribution, de la consommation, du commerce, de la sécurité et de la durabilité;
b) les défis environnementaux du Canada, y compris des décisions concernant le changement climatique mondial, la pollution atmosphérique, la biodiversité et l'intégrité écologique;
c) la gestion et l'exploitation durable des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables dont l'eau, les minéraux, les sols, la flore et la faune;
d) les obligations du Canada issues de traités internationaux touchant l'énergie, l'environnement et les ressources naturelles, et leur incidence sur le développement économique et social du Canada;
Que le Comité fasse périodiquement rapport au Sénat, au plus tard le 28 février 2005, et qu'il conserve jusqu'au 31 mars 2005 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.
[Français]
LANGUES OFFICIELLES
AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER PENDANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT
L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le jeudi 7 novembre 2002, je proposerai:
Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles soit autorisé, conformément au paragraphe 95(3) du Règlement, à se réunir à 16 heures le lundi 18 novembre 2002, afin de discuter de ses travaux futurs, et ce même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine.
FINANCES NATIONALES
AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER PENDANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le jeudi 7 novembre, je proposerai:
Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé, en conformité avec le paragraphe 95(3) du Règlement, à siéger le mardi 19 novembre 2002 à 9 h 30, même si le Sénat est ajourné à ce moment pendant plus d'une semaine.
[Traduction]
BANQUES ET COMMERCE
AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT
L'honorable E. Leo Kolber: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose:
Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à siéger à 15 h 30 aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
L'honorable Lowell Murray: L'honorable sénateur aurait-il l'obligeance d'expliquer l'objet de cette motion?
Le sénateur Kolber: Honorables sénateurs, le Comité des banques est au coeur de deux importantes études. Nous avons une pléthore de témoins à entendre et il n'y a pas beaucoup de temps. Aujourd'hui, nous entendrons le témoignage de M. Thomas d'Aquino, du Conseil canadien des chefs d'entreprise, ainsi que de deux autres groupes de témoins, ce qui exigera beaucoup de temps. Si nous ne commençons pas, honorables sénateurs, nous ne finirons jamais. Si le Sénat veut bien faire preuve d'indulgence, nous aimerions nous mettre au travail.
(La motion est adoptée.)
[Français]
PÉRIODE DES QUESTIONS
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL
LES ACTIVITÉS ILLÉGALES AU CANADA DE LA DRUG ENFORCEMENT AGENCY
L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat et concerne les activités illégales au Canada d'une agence américaine importante, la Drug Enforcement Agency.
Honorables sénateurs, le 1er août 2002, la Cour suprême de la Colombie-Britannique, dans l'affaire U.S.A v. Licht, a ordonné l'arrêt des procédures judiciaires concernant une demande d'extradition des autorités américaines relative à Brian Anthony Licht. Ce dernier était poursuivi par la Drug Enforcement Agency, la DEA, pour trafic de stupéfiants en Californie.
Afin d'appuyer sa décision, le tribunal canadien a invoqué comme motif le fait qu'un informateur de la DEA s'est introduit illégalement au Canada, le 21 août 1999, afin de procéder à une opération de vente surveillée de stupéfiants, opération qui a mené à l'arrestation de Licht, en décembre 1999.
Or, la DEA n'avait pas reçu l'autorisation préalable de la Gendarmerie royale du Canada pour mener une telle opération, comme l'exige un protocole d'entente dûment signé par le Canada et les États-Unis d'Amérique.
Précisons, honorables sénateurs, que les États-Unis ont nié avoir agi de la sorte jusqu'au mois de février 2002, moment où une ordonnance du même tribunal les a forcés à admettre le contraire.
Ainsi, la cour canadienne a conclu que M. Licht avait été victime d'un abus de procédure puisque le geste posé par la DEA en territoire canadien et le refus des autorités américaines de divulguer à l'intimé des informations névralgiques sur les opérations de la DEA lors des procédures d'extradition étaient tous deux contraires à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. Le gouvernement américain n'a pas porté cette décision en appel. Pour que les sénateurs comprennent bien, je tiens à préciser que la DEA relève directement du ministère ou du Département de la Justice aux États-Unis.
Dans sa décision, la cour critique très sévèrement l'attitude de la DEA dans cette affaire. Ainsi, au paragraphe 56 de cette décision, la juge écrit:
[Traduction]
Cette conduite va clairement à l'encontre des intérêts canadiens sur le plan de la souveraineté.
[Français]
Elle poursuit au paragraphe 57:
[Traduction]
Ce n'était pas une enquête en bonne et due forme menée au Canada [...] Le fait de ne pas avoir avisé immédiatement la GRC de cette conduite témoigne plus avant encore de la mauvaise foi de l'État ayant présenté la demande.
[Français]
Considérant que les Américains font peu de cas de leurs obligations juridiques envers le Canada, des lois canadiennes et surtout de notre souveraineté, madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle indiquer aux membres de cette chambre ...
[Traduction]
L'honorable John G. Bryden: Votre Honneur...
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je dois vous rappeler que le Règlement dispose qu'il est inadmissible d'invoquer le Règlement durant le traitement des affaires courantes. Toutefois, j'imagine que le sénateur Bryden intervient pour citer des règles concernant la période des questions et le court préambule qui précède une question.
Le sénateur Bryden: Je croyais que l'honorable sénateur parlait d'une interpellation.
[Français]
Le sénateur Nolin: Afin que tous les honorables sénateurs comprennent bien l'importance de la question que je vais poser à la ministre, j'ai cru important dans mon préambule d'expliquer les tenants et les aboutissants de cette décision, qui m'apparaît fort curieuse compte tenu des relations importantes que le Canada et les Américains prétendent entretenir.
Considérant que les Américains font peu de cas de leurs obligations juridiques envers le Canada, les lois canadiennes et surtout notre souveraineté, madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle indiquer aux membres de cette chambre s'il s'agit d'un événement isolé ou si d'autres cas de même nature ont été portés à l'attention de la GRC ou du solliciteur général du Canada au cours des dernières années? En d'autres mots, s'agit-il d'une pratique habituelle de la DEA au Canada?
[Traduction]
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, l'honorable sénateur a posé une question très importante. Malheureusement, je ne suis pas en mesure d'y répondre.
Le ministre est au courant de la situation. Toutefois, il n'est pas disposé à faire des commentaires pour l'instant. Après m'avoir fourni cette information à l'avance et en dépit de nos interpellations en son nom, voilà tout ce que je peux dire à l'honorable sénateur. Néanmoins, je peux lui assurer que, dès que j'aura de plus amples détails sur ce cas, je les communiquerai au Sénat.
[Français]
Le sénateur Nolin: Considérant que l'affaire Licht a mis à jour les activités douteuses et même illicites de la DEA au Canada, madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle, en temps et lieu, nous indiquer si, au nom de la souveraineté du Canada, le gouvernement fédéral a officiellement dénoncé auprès des autorités américaines les gestes répréhensibles posés par un membre du personnel de la DEA?
[Traduction]
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je vais certainement parler de l'intervention de l'honorable sénateur Nolin au sujet de ce que le gouvernement fédéral devrait faire. Toutefois, je dois répéter que je n'ai pas d'autre information à donner à l'honorable sénateur pour l'instant. De toute évidence, le sénateur s'est penché sur une question extrêmement importante pour les deux nations et au sujet de laquelle il faut obtenir certaines réponses. J'obtiendrai ces réponses pour lui, dans les meilleurs délais.
(1350)
LES FINANCES
LE COÛT DES EMPRUNTS DE SOCIÉTÉS
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. Dans son dernier rapport sur la politique monétaire, la Banque du Canada reconnaît que les sociétés canadiennes ont été lentes à financer de nouveaux investissements, et que les banques sont de plus en plus prudentes à l'égard des prêts qu'elles consentent. Dans le rapport, on peut en effet lire: que les emprunteurs à haut risque sont confrontés à une hausse du coût du capital et à un accès réduit au financement externe en raison du creusement des écarts sur le marché obligataire, du recul des cours boursiers et de la diminution de l'offre de crédits bancaires.
Dans The Economist de cette semaine, on trouve un tableau qui compare les taux d'intérêt de neuf pays. De ce nombre, le Canada est maintenant en tête avec les taux les plus élevés sur les obligations de sociétés. En fait, notre taux des obligations de sociétés est de 44 points de base supérieur à celui du prochain pays sur cette liste, le Danemark.
Honorables sénateurs, la politique monétaire de la Banque du Canada se préoccupe principalement des intérêts à court terme. Le gouvernement du Canada est-il inquiet de voir qu'à l'heure actuelle, le coût des emprunts des sociétés au Canada, c'est-à-dire le coût d'investissement dans de la machinerie et de l'équipement neufs, dépasse le coût des emprunts de sociétés chez tous nos principaux partenaires commerciaux?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il est clair que le gouvernement du Canada est au courant de la place du Canada par rapport à d'autres nations qui ont une taille et une répartition économiques semblables. Cependant, comme l'honorable sénateur le sait, la Banque du Canada n'a pas pour politique de s'ingérer dans ce domaine particulier des taux d'intérêt. Je vais me renseigner davantage quant à savoir s'il va y avoir un changement dans cette politique, mais à ma connaissance, aucun changement n'est prévu.
LES POLITIQUES MONÉTAIRES DE LA BANQUE DU CANADA ET DU GOUVERNEMENT
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question complémentaire porte sur la contradiction apparente entre la politique budgétaire et la politique monétaire. De plus en plus de gens croient que, dans les mois à venir, le gouvernement va annoncer d'importantes nouvelles dépenses alors que le premier ministre essaie de bâtir son héritage. La Banque du Canada a pris note de ces conjectures. À un symposium organisé par la Banque fédérale de réserve de Kansas City, qui s'est tenu à Jackson Hole, au Wyoming, le gouverneur de la Banque du Canada a déclaré:
[...] une politique budgétaire de nature discrétionnaire peut aussi mettre les gouvernements qui la pratiquent dans un mauvais pas si elle les conduit à négliger leur cible budgétaire à long terme — d'autant plus que des mesures discrétionnaires risquent de pencher davantage vers le laxisme que vers l'austérité. Une telle négligence pourrait miner la crédibilité de l'autorité budgétaire, ou, plus précisément, la confiance du public envers l'atteinte des cibles budgétaires.
Honorables sénateurs, dans son rapport sur la politique monétaire du mois dernier, la Banque du Canada a de nouveau signalé qu'elle va lentement augmenter les taux d'intérêt alors qu'elle resserre sa politique monétaire. Pour sa part, le gouvernement du Canada semble vouloir s'embarquer dans une politique budgétaire expansionniste. En d'autres termes, il va appuyer sur l'accélérateur alors que la Banque du Canada met les freins.
Le gouvernement prend-il les préoccupations de M. Dodge au sérieux? Dans l'affirmative, madame le leader du gouvernement pourrait-elle donner aux sénateurs l'assurance que les politiques fiscale et monétaire n'iront pas dans des directions opposées?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): L'honorable sénateur a posé des questions intéressantes. Le gouvernement prend au sérieux tout ce que dit le gouverneur de la Banque du Canada. Toutefois, M. Dodge se trompe s'il croit que le gouvernement canadien va se lancer dans de folles dépenses. Nous avons un excellent ministre des Finances qui a indiqué clairement que le gouvernement ne fera pas de déficit. M. Manley a annoncé que le gouvernement canadien aurait un excédent budgétaire et que, en raison de l'accroissement des activités internationales, un fonds de prévoyance sera créé pour faire face aux dépenses imprévues qui ne seraient pas couvertes dans le cours normal des pratiques budgétaires. Le navire vogue normalement, comme c'est le cas depuis que ce gouvernement est à la barre et qu'il a commencé à réaliser l'équilibre budgétaire en 1993.
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
L'EXCÉDENT DU COMPTE D'ASSURANCE-EMPLOI
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question à madame le leader du gouvernement porte sur l'excédent du compte d'assurance-emploi, un excédent qui a été accumulé aux dépens des salariés. J'ai posé cette question à de nombreuses reprises au fil des années. De nouveau, je vais tenter d'embarrasser le gouvernement en attirant l'attention sur l'incroyable excédent qu'affiche ce compte.
Dans les Comptes publics, la vérificatrice générale attire de nouveau l'attention du Parlement sur l'excédent considérable du compte d'assurance-emploi. C'est la quatrième fois que le Bureau du vérificateur général soulève la question de la méthode de calcul des cotisations d'assurance-emploi. En mars dernier, le compte d'assurance-emploi contenait 40 milliards de dollars, soit 25 milliards de plus que les 15 milliards jugés nécessaires par l'actuaire du programme pour faire face à un ralentissement économique. Et l'excédent du compte continue d'augmenter.
En dépit d'excédents aussi massifs, la Commission de l'assurance- emploi a fixé les cotisations à 2,25 $ pour 2001, et le Cabinet les a fixées à 2,20 $ pour 2002. La vérificatrice générale note dans les Comptes publics que ni la commission ni le gouvernement n'ont clarifié et divulgué, pour ce qui est de l'établissement des taux, ce qu'ils considèrent comme un équilibre adéquat du compte, les délais requis pour atteindre cet équilibre et les facteurs pris en compte. Elle ajoute qu'elle ne peux donc conclure que l'établissement des taux de cotisation a respecté l'esprit de la Loi sur l'assurance-emploi.
Madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle faire savoir aux sénateurs si le gouvernement a une mince idée de ce qui constitue un équilibre adéquat du compte d'assurance-emploi? Il y a suffisamment d'argent dans ce compte aujourd'hui pour permettre à tous les travailleurs de ne pas y cotiser pendant deux ans et pour faire face à un éventuel ralentissement économique. Jusqu'où le gouvernement est-il prêt à laisser grimper le solde de ce compte avant de considérer que cela suffit? Attend-il d'avoir un milliard? Combien attend-il d'avoir accumulé dans ce compte?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme c'est intéressant de se rappeler que, lorsque les gens d'en face étaient au pouvoir en 1993, les cotisations d'assurance-emploi atteignaient le montant record de 3$. Que s'est-il passé au cours des neuf dernières années? Les cotisations sont passées de 3$ à 2,95$, à 2,90$, à 2,70$, à 2,55$ à 2,40$, à 2,25$ et finalement à 2,20$. De plus, le gouvernement du Canada a pu porter la durée des prestations de maternité et de paternité de 26 à 52 semaines. Récemment, une annonce faite dans le discours du Trône nous a laissé entrevoir la possibilité d'offrir des prestations aux personnes qui s'occupent de membres gravement malades de leur famille.
Le gouvernement a bien fait les choses. Il a réalisé l'équilibre entre les programmes annoncés visant à fournir un meilleur niveau de service à tous les Canadiens et la continuation de la réduction des cotisations d'assurance-emploi depuis 1995.
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, madame le leader n'a pas répondu à ma question du tout. L'Énoncé économique et la mise à jour budgétaire de mercredi dernier comprennent des projections des dépenses et des revenus du compte d'assurance-emploi pour l'année en cours et pour les cinq prochaines années. À moins de réductions importantes des cotisations ou d'une importante augmentation des prestations versées, les revenus continueront de dépasser les prestations versées d'au moins 2,4 à 3 milliards de dollars chaque année. Si l'on se base sur la tendance actuelle, les cotisations devraient dépasser les prestations versées de 16 milliards de dollars pour toute cette période. Si ce montant était ajouté à l'excédent de 40 milliards de dollars, l'excédent atteindrait le chiffre incroyable de 56 milliards de dollars.
Honorables sénateurs, les cotisations d'assurance-emploi sont payées par les Canadiens qui travaillent et par leurs employeurs. Comment le gouvernement peut-il justifier d'accroître le compte d'assurance-emploi d'un excédent supplémentaire de 16 milliards de dollars?
(1400)
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, comme je l'ai dit à l'honorable sénateur, il y a un équilibre à établir entre augmenter les prestations et réduire les cotisations. Le gouvernement a été cohérent. Il a ajouté des prestations. Il a aussi réduit les cotisations.
Le gouvernement a annoncé régulièrement des réductions des cotisations et j'ai l'impression qu'une autre réduction des cotisations à l'assurance-emploi sera bientôt annoncée. Le gouvernement croit qu'il est proche des gens, et il continuera de répondre aux besoins des salariés canadiens.
Le sénateur Stratton: Le gouvernement se sert du compte d'assurance-emploi, dont l'excédent s'élève aujourd'hui à 40 milliards de dollars, pour payer d'autres coûts, puis il se vante de ses excédents budgétaires. L'honorable sénateur n'a pas répondu à ma question: quand est-ce que assez, c'est assez? Quand le gouvernement mettra-t-il fin à cette ponction fiscale?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur n'a pas écouté attentivement. J'ai passé en revue avec lui les constantes réductions des taux de cotisation que le gouvernement actuel a effectuées depuis 1995.
Le sénateur Stratton: Malgré cela, il y a quand même un excédent de 40 milliards de dollars.
LE SÉNAT
LA RATIFICATION DU PROTOCOLE DE KYOTO
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le gouvernement a clairement dit que la ratification du Protocole international de Kyoto constitue une priorité nationale du gouvernement libéral. Hier, madame le ministre a dit que le gouvernement avait prévu d'examiner le Protocole de Kyoto, qui porte essentiellement sur la réduction du dioxyde de carbone. Il est prévu d'examiner le protocole en comité plénier du Sénat. Le gouvernement a en outre dit que les honorables sénateurs seront invités à l'approuver rapidement avant l'ajournement des Fêtes.
Étant donné la pénurie actuelle de mesures d'initiative ministérielle à étudier à l'autre endroit, et étant donné que les porte-parole du gouvernement au Sénat ont dit maintes fois que le Sénat établit ses propres règles et son propre ordre du jour, madame le ministre respectera-t-elle les demandes formulées hier par certains honorables sénateurs qui souhaitent convoquer des témoins et entamer aujourd'hui le processus d'examen en profondeur de cet accord international?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je dois dire non à l'honorable sénateur car, comme il le sait, des négociations sont en cours. Des réunions ont eu lieu cette semaine avec les provinces et d'autres sont prévues dans 15 jours. On essaie d'aider tout le monde à comprendre le plan présenté par le gouvernement du Canada. Par ailleurs, dans la mesure du possible, nous voulons que les intervenants du secteur privé et du secteur public comprennent les conséquences du Protocole de Kyoto. Quand ces objectifs auront été atteints, il y aura des discussions et des débats au Sénat et dans l'autre endroit.
L'ENVIRONNEMENT
LA RATIFICATION DU PROTOCOLE DE KYOTO
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, j'ai écouté attentivement. On nous informe qu'il y aura d'autres discussions avec les provinces, pas forcément pour chercher à obtenir leur appui ou leur approbation, mais essentiellement dans l'espoir qu'elles comprendront la position des libéraux.
Madame le ministre est née en Nouvelle-Écosse mais a vécu au Manitoba, où elle a dirigé le Parti libéral provincial. Elle possède une connaissance intime de l'Ouest.
Madame le leader se rend-elle compte que cette question n'est pas différente du tristement célèbre Programme énergétique national de Trudeau et qu'elle pourrait provoquer des réactions négatives encore plus graves cette fois?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, permettez-moi de compléter ma biographie. J'ai également vécu 12 ans en Alberta, où mon mari était juriste dans l'industrie pétrolière et gazière. J'ai une bonne compréhension de l'importance de ce secteur pour l'économie de notre pays. Par ailleurs, pas plus tard que ce matin, je me suis entretenue avec des représentants du secteur pétrolier de cette province et nous avons discuté de leurs préoccupations concernant le Protocole de Kyoto.
Ces rencontres avec les provinces ont pour objet non pas de les convaincre que le plan du gouvernement du Canada est le bon à ce moment précis, mais d'élaborer et de faire fermenter un plan auquel les provinces et le secteur privé pourront se rallier et qu'ils pourront appuyer, autant que faire se peut.
Il est évident que le rythme de la participation de l'industrie et des provinces a été très lent jusqu'au jour où le premier ministre a annoncé la tenue d'un vote sur la ratification, ce qui a fait monter le ton des discussions et rehaussé le niveau de la participation à ces dernières. Nous espérons tous pouvoir parvenir à une entente qui répondra aux besoins les plus importants de tous les Canadiens, où qu'ils vivent.
Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement dit que les réunions doivent produire une certaine fermentation. J'en conviens volontiers. Parce que tout cela va sûrement tourner à l'aigre quand le gouvernement tentera de faire avaler cette couleuvre aux Canadiens. Il y aura des incidences négatives non seulement sur l'Alberta et la Colombie-Britannique, province dans laquelle je vis actuellement, mais aussi sur la Nouvelle-Écosse ainsi que sur Terre-Neuve-et-Labrador.
Ces régions sont tout juste sur le point d'atteindre l'autonomie économique. Au lieu de leur donner une chance d'établir des bases solides, nous nous proposons de percer le cœur et l'âme des habitants de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador. Ils ont, eux aussi, le droit d'aspirer à passer dans la catégorie des provinces riches. Pourquoi le gouvernement voudrait-il priver la population de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador de l'occasion de parvenir à la prospérité en prenant cette mesure internationale régressive que les Canadiens n'appuient pas?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, la population de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador n'est pas d'accord avec l'honorable sénateur, pas plus que la population de sa propre province. De récents sondages ont montré que 80 p. 100 des Canadiens veulent que le gouvernement ratifie le Protocole de Kyoto. Le seul vote négatif à cet égard vient de la province d'Alberta.
Il est toujours agréable de collaborer avec les gouvernements des provinces. Ce serait merveilleux d'avoir leur accord. Toutefois, s'il faut pouvoir compter sur l'appui de quelqu'un, c'est l'appui de la population canadienne que je rechercherai.
Le sénateur Stratton: Souvenez-vous de Charlottetown.
LA CHAMBRE DES COMMUNES
LE VOTE SUR LA MOTION VISANT L'ÉLECTION AU SCRUTIN SECRET DES
PRÉSIDENTS DE COMITÉ—LA SOLIDARITÉ DU CABINET DANS LE CAS
DES SECRÉTAIRES
PARLEMENTAIRES
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sujet des conventions du Cabinet. Si madame le ministre ne souhaite pas improviser, elle voudra peut-être obtenir une réponse pour plus tard.
J'ai réfléchi au vote tenu hier à la Chambre des communes sur une question de procédure. La solidarité du Cabinet a été invoquée dans le cas des ministres, qui ont tous voté en bloc. Cependant, on n'a pas fait jouer la discipline de parti dans le cas des simples députés. Je crois que plus d'un secrétaire parlementaire s'est joint à la majorité pour voter contre la position du Cabinet.
Qu'attend-on de la part des secrétaires parlementaires quand la solidarité du Cabinet est invoquée? Je suis bien conscient du fait que les secrétaires parlementaires ne sont ni ministres ni conseillers de la reine. Ils obtiennent cependant une rémunération supplémentaire à l'égard du travail qu'ils font pour le compte du gouvernement et, sauf erreur, je crois qu'ils prêtent un serment particulier.
Je voudrais savoir dans quelle mesure les secrétaires parlementaires doivent respecter la convention de la solidarité du Cabinet dans un cas comme celui qui s'est produit hier.
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois savoir que les secrétaires parlementaires ne sont pas du tout liés par la solidarité du Cabinet, puisqu'ils n'en sont pas membres. La décision prise hier prévoyait que les ministres voteraient ensemble et que, même si les médias ont publié certains commentaires à ce sujet, les secrétaires parlementaires n'étaient pas du tout visés par la solidarité du Cabinet.
[Français]
RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse différée à une question orale de l'honorable sénateur Tkachuk, posée le 22 octobre 2002, concernant le Sommet de la Francophonie.
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
LE SOMMET DE LA FRANCOPHONIE DE 2002—LE COMMUNIQUÉ APPROUVANT LA PROPOSITION SAOUDIENNE D'ÉCHANGE DES TERRITOIRES EN CONTREPARTIE DE LA PAIX
(Réponse à la question posée le 22 octobre 2002 par l'honorable David Tkachuk)
Le Canada s'est joint à la plupart des membres de la communauté internationale le printemps dernier en accueillant favorablement la proposition du prince héritier Abdallah de l'Arabie saoudite d'échanger la normalisation des relations entre les pays arabes et Israël contre le retrait des Israéliens des territoires occupés depuis 1967.
La proposition était, en soi, attrayante de par sa simplicité, mais, de la part de l'Arabie saoudite qui s'était jusque lors tenue à l'écart, elle représentait surtout un engagement à l'égard de la paix au Moyen-Orient.
Le ministre des Affaires étrangères d'Israël, Shimon Peres, a déclaré que cette proposition soulevait une nouvelle possibilité, à la fois fascinante et intéressante. Le président israélien Katsav a également manifesté son intérêt, qu'il a réaffirmé une semaine plus tard pendant une visite d'État au Canada. En outre, il a offert de visiter le prince héritier Abdallah à Riyadh afin d'en discuter davantage.
La proposition est fondée sur le principe de «la terre contre la paix» sur lequel s'appuie le processus de paix au Moyen- Orient depuis la Conférence de Madrid et les accords d'Oslo qui ont suivi la première intifada.
Nonobstant cette démarche, ainsi que les nombreuses autres suggestions utiles faites par des pays tiers, la politique du Canada maintient que seules les deux parties peuvent mettre fin au conflit et arriver à un règlement permanent qui déboucherait sur une paix juste et durable.
Le cheikh Nasrallah, l'un des 18 chefs religieux du Liban, participe régulièrement aux cérémonies et aux grands événements nationaux dans ce pays.
Aucun représentant du gouvernement canadien n'a été consulté d'avance quant aux personnes que le gouvernement du Liban comptait inviter à l'ouverture du Sommet de la Francophonie. Nous ne nous attendions pas à l'être d'ailleurs.
Le gouvernement du Liban est seul responsable des invitations qu'il a envoyées.
La politique du Canada sur l'Hezbollah reste la même. Nous traitons son aile militaire comme un groupe terroriste, mais nous sommes aussi conscients du fait que d'autres éléments jouent un rôle important dans le gouvernement et dans les services sociaux au sud du Liban.
[Traduction]
ORDRE DU JOUR
LE CODE CRIMINEL
LA LOI SUR LES ARMES À FEU
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Jaffer, appuyée par l'honorable sénateur Maheu, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-10, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu.
L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, en ce qui a trait au projet de loi C-10, je voudrais d'abord raconter une histoire au sujet du traitement charitable des animaux.
Il y avait dans une de mes remises un rat dont je voulais me débarrasser. J'ai décidé de l'attirer dans un piège. Je suis allé dans un magasin où l'on vend des articles de ce genre et j'ai demandé au vendeur s'il avait des pièges indolores. Il a répondu: «Oui, nous en avons. Pourquoi avez-vous besoin d'un piège indolore?» J'ai répondu: «Parce que je veux attraper un rat.» Il a dit: «Vous voulez vraiment un piège indolore?» Je voulais que même les rats ne souffrent pas.
J'ai acheté le piège. J'ai attrapé le rat. Je ne vous dirai pas comment j'en ai disposé.
Le projet de loi C-10 me préoccupe pour plusieurs raisons. La première critique que j'ai à formuler, c'est qu'il s'agit d'un projet de loi omnibus. Il traite de deux problèmes différents, dans deux secteurs différents. Bon nombre d'entre nous s'opposent aux projets de loi omnibus depuis longtemps.
Aujourd'hui, je ne parlerai que de la partie qui traite de la cruauté envers les animaux, car l'autre partie, qui concerne le contrôle des armes à feu, constitue une question distincte. Je regrette qu'elle n'ait pas été présentée sous la forme d'un projet de loi modificatif distinct, car un grand nombre de questions y sont traitées.
La plupart des gens sont contre la cruauté envers les animaux. Je viens d'entendre madame le leader du gouvernement dire que 80 p. 100 des gens sont en faveur du Protocole de Kyoto. J'ai également entendu dire que 80 p. 100 des gens sont en faveur du contrôle des armes à feu. Quatre-vingt pour cent des gens sont favorables à la prise de mesures contre la cruauté envers les animaux.
C'est exact. Nous voulons un contrôle des armes à feu. Cependant, certains aspects de cette question ont constitué de mauvaises nouvelles, notamment pour les collectivités autochtones et pour l'ouest du Canada.
Suis-je en faveur du contrôle des armes à feu? Bien sûr que oui, mais seulement dans une certaine mesure. Suis-je en faveur de l'accord de Kyoto? Oui, je suis parmi les 80 p. 100 de gens qui y sont favorables, mais je ne peux pas affirmer avec certitude que je l'appuie, car des dispositions qu'il peut contenir ou ne pas contenir m'empêcheraient de l'appuyer entièrement.
La même chose est vraie dans le cas de la cruauté envers les animaux. Nous sommes tous opposés à la cruauté envers les animaux, sauf peut-être 1 à 3 p. 100 de la population. Souhaitons- nous prévenir la cruauté envers les animaux? Bien sûr que oui.
Bon nombre des défenseurs extrémistes des droits des animaux à qui j'ai parlé, ou dont il a été question dans les journaux, sont opposés à toute consommation de produit animal; peu importe ce qu'on fait, selon eux, nous sommes cruels envers les animaux si nous abattons des bêtes pour des fins alimentaires ou autres. Une telle attitude pousse un peu trop loin l'argument en faveur du bien-être des animaux.
Le projet de loi C-10 stipule que toute personne commet une infraction criminelle si elle «tue un animal sans excuse légitime».
Je comprends mal cette formulation car je ne sais pas comment on peut déterminer, dans un cas en particulier, ce qui constitue une «excuse légitime». Comment décide-t-on quelle est l'excuse légitime lorsqu'on tue un animal? Certains sénateurs savent très bien que l'explosion de la population de spermophiles dans l'Ouest me préoccupe. Leur surpopulation justifie-t-elle qu'on les abatte? Bien des gens soutiennent que non, qu'il faut plutôt les attraper et les relâcher dans une autre région. D'après eux, nous n'avons absolument aucune excuse légitime pour tuer ces petits animaux.
Ces animaux subiraient-ils certaines douleurs si on procédait à leur abattage? Certainement. Si on utilise une arme à feu, ils ressentiront de la douleur à moins qu'ils ne meurent instantanément. De même, ils ressentiront de la douleur si on choisit plutôt le piégeage, le poison ou la noyade.
Nous devons abattre ces prédateurs, mais certaines personnes soutiennent qu'une telle mesure n'est pas nécessaire. L'Ouest canadien est infesté de prédateurs. Dans sa forme actuelle, ce projet de loi interdirait l'abattage des prédateurs car il faudrait le justifier en donnant une excuse légitime.
L'alinéa 182.2 (1)d) dit ceci:
... sans excuse légitime, empoisonne un animal, place du poison de telle manière qu'il puisse être facilement consommé par un animal...
Revenons aux prédateurs. Nous sommes des agriculteurs, mais nous ne pourrons pas avoir recours à ce genre de contrôle pour limiter la population de prédateurs sur nos fermes. Nous avons tenu les mêmes propos dans le cas du contrôle des armes à feu. Dans la plupart des cas, l'agriculteur doit se soumettre à des formalités fastidieuses pour pouvoir se débarrasser des prédateurs en les chassant à la carabine. Cette prérogative a été retirée aux autochtones et aux agriculteurs. On empiète constamment sur les méthodes que nous devons utiliser pour gagner notre vie dans l'industrie agricole.
Que dire des sociétés pour la protection des animaux et que dire des vétérinaires? Les sociétés pour la protection des animaux doivent détruire les animaux excédentaires que personne ne veut adopter. Ces animaux sont en santé. Ce ne sont pas des prédateurs. Les sociétés n'ont désormais plus le droit de détruire ces animaux. Qu'en est-il du vétérinaire à qui on demande de détruire un animal? Il doit le faire. Conformément à ce projet de loi, toutefois, il n'aurait pas le droit de le faire.
Qu'en est-il du cheval qui se casse une patte dans un trou de marmotte ou sur la piste de course? Cette blessure n'est pas mortelle; la fracture peut-être réduite, mais le cheval boitera toute sa vie. Comme le cheval ne mènera alors pas une vie normale, on a le droit de le détruire. Conformément à ce projet de loi, on n'aurait pas le droit de le faire. La question est tellement complexe.
Est-il question ici de se montrer charitable? Oui. Est-il question ici de se montrer charitable à l'égard d'êtres humains? La réponse est oui. Après une opération chirurgicale, on souffre beaucoup. Nous sommes nombreux à en avoir fait l'expérience. Les malades en phase terminale souffrent et on les laisse souffrir. Comme on ne peut rien faire à cet égard, ces malades souffrent. La brève douleur que subit l'animal qu'on marque au fer ou qu'on écorne n'est pas visée par le projet de loi. Ces gestes sont exclus. Voilà le danger. Les défenseurs des droits des animaux ont beau dire que ces gestes sont exclus, je sais pertinemment qu'ils exploiteront tout de suite cet aspect. Ne vous méprenez pas, les défenseurs des droits des animaux ont leur place dans la société. Tout ce que vous faites aux animaux — l'écornage, la castration, le marquage, tout acte douloureux — sera illicite et tombera sous le coup de ce projet de loi.
(1420)
Je voudrais disposer de plus de temps pour examiner le projet de loi. Je n'y ai pas consacré autant de temps que je l'aurais dû. J'espère que, d'ici à ce qu'il soit renvoyé au comité, j'aurai le temps de l'examiner plus à fond, d'interviewer davantage de gens à son sujet et de participer au comité. Compte tenu de la déclaration que j'ai présentée aujourd'hui, je sais que je ne ferai jamais partie du comité, mais cela ne m'empêchera pas d'examiner les questions.
J'exhorte les sénateurs à étudier de près les répercussions du projet de loi. Je ne suis en rien différent de vous. Je tiens à être aussi charitable que vous avec l'ensemble du règne animal.
Des voix: Bravo!
L'honorable Gerry St. Germain: Après cet excellent exposé sur la question, je suis prêt à parier que la majorité des sénateurs n'ont jamais vu deux pratiques courantes dans l'élevage, soit l'écornage et le marquage au fer.
Cela n'est pas sans rapport avec les difficultés de nos peuples autochtones. La plupart des gens n'ont jamais chassé dans la toundra, ce qui fait partie du mode de vie et de survie dans le Nord. Pourtant, la majorité des sénateurs n'ont jamais vu cela. Nous pensons être sages et en mesure de juger ceux dont c'est le mode de vie. Le sénateur Joyal a travaillé sur la Charte des droits et libertés, qui doit garantir la protection des droits des minorités. Il a parlé de façon experte du projet de loi et du traitement juridique de l'animal dans le Code criminel.
Sauf erreur, le sénateur Sparrow est le doyen du Sénat. Entrevoit- il une possibilité de solution pour ces groupes de gens tellement lésés à cause de l'ignorance des gens des villes qui imposent leur jugement? Y a-t-il un quelconque espoir que le sénateur peut entrevoir à la lumière de son expérience de 30 ans au Sénat?
Le sénateur Sparrow: Honorables sénateurs, pour commencer, je ne suis pas le doyen. Le sénateur Taylor est peut-être plus âgé que moi. Je siège peut-être depuis plus longtemps, mais je ne suis pas le doyen.
Le sénateur Taylor: Vous avez bourlingué davantage.
Le sénateur Sparrow: Peut-être bien.
Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Bien sûr, il y a des gens qui ne connaissent pas le milieu agricole, comme l'honorable sénateur l'a signalé. Ils ne savent pas comment les choses se passent en agriculture. Nous ne sommes pas nombreux à très bien connaître les problèmes des autochtones, dans leurs pratiques de chasse et de pêche. Je l'avoue. Pour ma part, je ne m'y connais pas aussi bien que je le devrais. C'est simplement de l'ignorance. Ignorance veut dire manque de connaissances. Il ne s'agit pas ici d'ignorance crasse, mais de gens qui ne connaissent pas les enjeux. Il y a un travail d'information à faire.
Les opposants à l'industrie agricole et les groupes de défense des animaux sont peut-être mieux organisés que nous le sommes en ce moment.
Pour répondre à votre question, je préciserai que le milieu urbain dénonce l'utilisation d'animaux à des fins de divertissement, notamment dans les rodéos, les foires et les expositions. Certains croient même qu'il faut interdire les expositions, les foires agricoles, les courses de chevaux, ainsi de suite. Ceux qui travaillent avec les animaux sont nombreux à se faire pointer du doigt.
La rédaction de ce projet de loi semble avoir été confiée à des gens qui ne comprennent pas le secteur agricole ou encore la chasse et la pêche telles que pratiquées par les Autochtones. Ils ne saisissent pas bien ces concepts.
Nous considérons, par exemple, le marquage au fer des animaux comme une pratique normale, puisque cela permet aux éleveurs de laisser leurs animaux brouter avec des bêtes appartenant à d'autres éleveurs et de facilement les reconnaître par la suite et de les trier à dos de cheval.
Cela peut sembler un motif raisonnable et légitime de marquer au fer les animaux, mais il reste que l'éleveur qui marque ses veaux au printemps et que ces bêtes ne se mêlent pas nécessairement toutes aux troupeaux des autres éleveurs. Un certain nombre de ces animaux pourraient très bien demeurer à l'intérieur de l'enclos, ce qui signifie qu'il lui était inutile de les marquer au fer rouge. Le projet de loi viserait alors cet éleveur, qui n'avait aucune raison de marquer au fer un animal confiné à l'enclos. L'éleveur peut ne pas décider quel animal il va mêler aux autres troupeaux tant qu'il n'aura pas déterminer à quelle fin l'animal est destiné. Un mois après le marquage, on pourrait trouver dans l'enclos de cet éleveur des bêtes qu'il a marquées mais qu'il ne laisse pas aller librement dans les champs.
Voilà jusqu'où va l'ignorance dans ce domaine. En tant que l'un des plus anciens sénateurs, j'espère avoir répondu à votre question.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le temps accordé au sénateur Sparrow est écoulé. Certains d'entre vous veulent lui poser des questions.
Le sénateur Sparrow: Honorables sénateurs, je demande la permission du Sénat.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée?
Des voix: D'accord.
L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, j'ai été frappé par le fait que le sénateur Sparrow a employé le mot «extrémistes» au sujet des défenseurs des droits des animaux. J'aurais aimé qu'il fasse une distinction entre les défenseurs extrémistes des droits des animaux et les végétariens, par exemple, ceux qui choisissent délibérément d'exclure la chair animale de leur régime alimentaire.
Je me demande si l'honorable sénateur pourrait préciser son choix de l'expression «défenseur extrémiste des droits des animaux» à la lumière des choix que font d'autres personnes. Parfois, les choix sont de nature très culturelle. Je crains que le qualificatif «extrémiste» employé par le sénateur soit insultant pour certains groupes de la société qui ne sont pas tant préoccupés par la consommation des viandes que soucieux d'adopter un régime alimentaire qu'ils estiment sain.
(1430)
Le sénateur Sparrow: L'honorable sénateur pourrait-il répéter la question?
Tout d'abord, je n'ai pas employé le mot «extrémiste» dans le mauvais contexte. Si je l'ai fait, je m'en excuse. Il y a certainement des gens qui ont à coeur les droits des animaux et qui font de l'excellent travail à cet égard. Je n'ai rien contre cela. De nombreux groupes sont très efficaces et soucieux de défendre les droits des animaux. Il y a quelques extrémistes dans ce groupe, mais je n'ai pas voulu associer ces gens aux végétariens. Je ne considère pas les végétariens comme des extrémistes. Ils ont personnellement décidé d'adopter un mode de vie et il n'y a rien de mal à cela.
J'espère avoir bien expliqué que le mot «extrémiste» ne vise pas à dénigrer touts les défenseurs des droits des animaux. Il ne vise certainement pas ceux qui décident d'être végétariens.
[Français]
L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, j'avais pris la parole à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-15B, mort au Feuilleton lors de la première session. Ce projet de loi est représenté et je n'ai pas l'intention de répéter mon discours sur la cuisson des homards. Tous ceux qui l'avaient entendu vont s'en souvenir. D'ailleurs, j'avais bien informé les honorables sénateurs que dorénavant, nous ne pouvions plus faire cuire un homard à tout venant, mais proprement et en respectant les droits fondamentaux du homard.
Laissez-moi lire les quelques lignes du projet de loi C-10 sur la cruauté envers les animaux. Elles sont très courtes et se trouvent au sommaire. On nous dit:
Le texte modifie le Code criminel de façon à regrouper les infractions concernant la cruauté envers les animaux et augmenter les peines maximales.
Si on ne lisait que le sommaire, on pourrait se dire que les législateurs ne font que moderniser de vieilles infractions au Code criminel et qu'ils en profitent pour augmenter les peines. Toutefois, à la lecture du projet de loi C-10, nous nous apercevons qu'ils font beaucoup plus que regrouper les infractions.
À l'étape de la deuxième lecture, nous devons obtenir certaines réponses avant de voter sur le principe de ce projet de loi. Pourquoi l'État est-il justifié d'augmenter les peines et de créer de nouvelles infractions? De créer même de nouvelles définitions des infractions qui existent déjà? Personne ne nous a donné la réponse à cette question. À quoi sert le droit pénal? Que voulons-nous atteindre comme objectif en adoptant cette mesure? Voulons-nous nous sentir mieux? Jusqu'où voulons-nous aller pour nous sentir mieux?
J'ai entendu plusieurs discours et j'en ai lu d'autres à propos d'activités humaines, commerciales et industrielles qui concernent les animaux. Voulons-nous ostraciser ces Canadiens? Non.
Le discours que je viens d'entendre est fort éloquent. Je ne connais pas ces façons de procéder. J'imagine que la plupart d'entre nous ne voulons pas mettre à genoux une industrie fort importante dans une partie du Canada.
L'adoption de ce principe vise quel objectif? Personne ne nous a démontré le lien entre le projet de loi que l'on nous demande d'adopter et les principes du droit pénal. En quoi ce projet de loi vient-il protéger les individus?
Aux fins de la discussion, oublions les animaux et leurs droits. D'ailleurs, le Parlement du Canada les a reconnus il y a longtemps. Ce n'est pas d'hier que l'on retrouve dans le Code criminel des infractions qui concernent la cruauté envers les animaux. Qu'est-ce qui pourrait nous convaincre de modifier ces infractions, d'en créer de nouvelles et même d'augmenter les peines? Quel lien y a-t-il entre la cruauté envers les animaux et la protection des Canadiens? Le gouvernement devra nous convaincre du bien-fondé du principe de ce projet de loi. Cette preuve n'a pas été faite. On n'a même pas tenté de la faire. Nous tenons pour acquis que nous sommes contre la cruauté envers les animaux et que pour cette raison, nous devrions ajouter ces nouveaux articles au Code criminel.
Lors de l'étude en comité, nous allons découvrir — et nous venons d'en avoir un exemple — qu'il n'y a pas uniquement des éleveurs de bétail, mais également des Canadiens, entre autres, des chercheurs universitaires, qui nous posent des questions sur l'intention du législateur. Le parrain de ce projet de loi et le gouvernement ont la responsabilité de nous informer de l'intention recherchée et de répondre à la simple question: pourquoi?
[Traduction]
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, il y a un sénateur qui souhaite prendre la parole.
Avez-vous une question à poser, sénateur Adams?
L'honorable Willie Adams: Non.
Le sénateur Kinsella: Une motion a été présentée.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, une motion a été présentée, mais je ne l'ai pas mise aux voix et j'ai été informé qu'un sénateur souhaitait prendre la parole. Je suivrais la pratique voulant que, lorsqu'un sénateur souhaite prendre la parole, nous le lui permettions.
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, si un sénateur souhaite prendre la parole, tout ce qu'il a à faire, c'est se lever. Il n'est absolument pas nécessaire que Son Honneur nous en informe ni en reçoive un message. S'il y a un débat en cours sur un article à l'ordre du jour et si un sénateur souhaite prendre la parole, tout ce qu'il a à faire, c'est se lever. C'est fort simple.
Son Honneur le Président: Vous avez tout à fait raison, sénateur Cools, mais il n'y a pas de mal non plus à ce qu'un sénateur s'approche de la présidence pour lui signifier qu'il souhaite prendre la parole.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, en fait, cela ne convient pas du tout, et nous devrions peut-être en débattre.
L'honorable George Baker: Honorables sénateurs, que le compte rendu indique que j'ai fait les deux. Non seulement j'ai informé Son Honneur, mais encore je me suis levé au moment approprié.
J'ai décidé de dire quelques mots sur ce projet de loi. Après avoir écouté le débat au Sénat et sachant que nombre de sénateurs souhaitent prendre la parole sur le principe du projet de loi, je me suis souvenu de la fameuse phrase: «C'est un travail pour Superman.»
Honorables sénateurs, ce projet de loi est un travail pour le Sénat. C'est une mesure dont la genèse remonte à plusieurs années. J'ai été à la Chambre des communes pendant 29 ans, et je me suis souviens que l'étude de ce projet de loi a commencé en 1998 ou en 1999. Honorables sénateurs, il a finalement été adopté par la Chambre des communes, mais ses questions clés ne sont toujours pas réglées. Ce sont surtout des questions juridiques.
J'ai reçu l'autre jour un courrier d'un couple retraité. Je suppose que tous les sénateurs ont reçu le même courriel. Dans celui-ci, le couple dit: «Nous sommes retraités, nous avons deux chats, et nous voulons que vous adoptiez ce projet de loi à l'étude au Sénat parce que je ne puis imaginer que quelqu'un puisse faire du mal à un chat lui appartenant.»
Pour ces gens, c'est là le principe du projet de loi. Les honorables sénateurs y voient des principes différents. Pour le sénateur Watt, par exemple, le principe du projet de loi est l'incidence qu'il aura sur les personnes vivant dans les régions du nord du Canada. Le projet de loi est en fait une combinaison de deux projets de loi, l'un portant sur le contrôle des armes à feu, l'autre, sur la cruauté envers les animaux. Je ne me rappelle pas de deux autres textes de loi qui aient eu un tel effet sur les habitants des régions rurales et du nord du Canada.
La date limite pour l'enregistrement des armes à feu est dans sept semaines, et 1,4 million de Canadiens n'ont pas encore enregistré leurs armes. Ce chiffre provient d'un sondage effectué par le ministère de la Justice lui-même. Le Sénat étudiera en comité de nombreuses modifications pouvant être apportées au projet de loi.
(1440)
Honorables sénateurs, le Sénat aura tout un travail à faire lorsque ce projet de loi sera examiné en comité, puisque chaque groupe d'intéressés qu'il consultera lui dira que le projet de loi fera disparaître trois moyens de défense offerts actuellement par le Code criminel. Ces moyens de défense figurent au paragraphe 429(2) du Code criminel, selon lequel nul ne peut être déclaré coupable d'une infraction visée aux articles 430 à 446 — et les infractions de cruauté envers les animaux se trouvent aux articles 445 et 446, si je ne m'abuse — s'il a agi avec une justification ou une excuse légale et avec apparence de droit. Tous les groupes d'intérêts que j'ai entendus et que la Chambre des communes a entendus ont insisté pour qu'on conserve dans le Code criminel ces moyens de défense que le projet de loi va complètement enlever.
Honorables sénateurs, la question qu'il faut se poser est la suivante: est-ce nécessaire? Certains experts qui disent appuyer ces modifications ajoutent qu'elles ne sont pas vraiment nécessaires. Ils disent que le motif valable et l'apparence de droit existent déjà en common law. Honorables sénateurs, certains d'entre nous ne sont pas de cet avis. La Cour suprême du Canada n'est pas de cet avis, ni la Cour d'appel de l'Ontario, ni la Cour d'appel de Terre-Neuve, ce qui est encore plus important pour moi. Honorables sénateurs, c'est une question très sérieuse.
Comme le sénateur Nolin l'a dit, oui, les peines sont accrues. Cela devient une infraction mixte. Qu'est-ce qu'une infraction mixte, honorables sénateurs? Ce qui me frappe surtout à propos des infractions mixtes est que, dès qu'une personne est mise accusation, on prend ses empreintes digitales et sa photo et on les entre dans le fichier du CIPC. Aux termes de la Loi sur l'identification des criminels, une infraction mixte est considérée comme un acte criminel, n'est-ce pas? Absolument. Voilà, honorables sénateurs, il s'agit là de modifications assez importantes qu'on veut apporter au Code criminel.
Honorables sénateurs, il y a une chose qu'on peut dire avec certitude à propos des comités du Sénat, c'est leur objectivité. Quelques-uns des plus grands juristes du Canada se trouvent être des sénateurs. En fait, l'un d'eux a même été salué récemment pas l'Association du Barreau canadien et a reçu un prix international. La Chambre des communes n'a pas et n'a jamais eu dans ses comités le genre de juristes que le Sénat possède pour examiner une mesure législative comme celle-ci.
Lorsque ce projet de loi sera renvoyé au comité, les membres de ce comité, dont je suis moi-même membre, examineront les préoccupations du sénateur Watt, celles très sérieuses des scientifiques universitaires, celles du milieu agricole, et celles de ces gens retraités, qui sont inquiets de leurs deux chats.
Son Honneur le Président: Le sénateur acceptera-t-il une question?
Le sénateur Baker: Oui.
Le sénateur St. Germain: Aujourd'hui, le leader du gouvernement au Sénat dit que, selon les sondages, la plupart des Canadiens appuient le Protocole de Kyoto. Si on faisait un sondage pour demander aux gens s'ils sont en faveur d'une loi interdisant la cruauté envers les animaux ou s'ils appuient la Charte des droits, on obtiendrait certainement des réponses affirmatives. Ce sont là deux sujets qui font l'unanimité.
Voici ma question au sénateur Baker: qu'est-ce qui motive cette politique, de votre point de vue? Si nous ne savons pas ce qui cause ce terrible type de mentalité dans la loi, il est difficile d'y faire face. Ce programme doit être motivé par quelque chose. J'ai siégé avec le sénateur à l'autre endroit et au Cabinet. Certaines choses qui se sont produites à mon époque n'étaient pas sensées non plus. C'est comme le contrôle des armes à feu. Demandez aux gens s'ils croient dans le contrôle des armes à feu. Comme le sénateur Sparrow l'a dit, qui n'y croit pas?
Le sénateur a mentionné aujourd'hui qu'environ 1,4 million personnes n'ont pas encore enregistré leurs armes à feu. Je fais partie de ceux-là. J'attends jusqu'à la toute fin. Je me plierai à la loi car nous sommes des législateurs et nous ne violerons pas les lois, mais il y a plus d'un million de personnes qui attendent d'enregistrer leurs armes.
En ce qui concerne la cruauté envers les animaux, j'accepte d'avoir perdu dans le cas du projet de loi C-68. Cependant, en ce qui concerne cette question de la cruauté, sur quoi repose ce programme?
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, je ne peux pas vraiment répondre à cette question. La réponse se trouve probablement dans les déclarations des ministres de la Justice qui ont proposé ce projet de loi dans le passé et dans la politique gouvernementale à ce sujet.
En tant que député d'arrière-ban à la Chambre des communes lorsque cela a commencé en 1999 et en 2000, honorables sénateurs, je ne peux que me reporter au poème intitulé The Charge of the Light Brigade, dont voici un extrait traduit:
Leur devoir n'est pas de se demander pourquoi,Leur devoir est d'exécuter les ordres et de mourir.
Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, je remercie l'honorable Baker de ses observations. J'ignore s'il est conforme au Règlement de poser une question au sujet du débat à l'autre endroit, mais dans la négative, on me le dira.
Vous avez expliqué les moyens de défense prévus dans le Code. Je pense que nous devrions signaler à nos collègues que, si nous supprimons un moyen de défense du Code criminel en disant qu'il est superflu étant donné qu'il existe déjà dans la common law, les tribunaux ne penseront pas que tel est notre motif et estimeront plutôt que nous le supprimons parce que voulons qu'il ne soit plus utilisé. Est-ce cela que nous voulons? Je n'en suis pas certain.
Pourquoi nous demande-t-on de faire cela? On dit qu'il s'agit de «regrouper» les infractions. Cependant, c'est plus que cela. Nous le savons tous. Il s'agit de savoir pourquoi. Pour quelles raisons faisons-nous cela? Y a-t-il plus de cruauté envers les animaux? Quel est le lien avec les Canadiens et les gens vivant au Canada et la sécurité de nos citoyens?
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, encore une fois, je ne peux pas en expliquer le pourquoi. Je peux simplement en prendre connaissance. J'ai lu beaucoup de choses sur ce qui a conduit au projet de loi — à savoir ses causes déclarées. Il y a de tout, depuis les enquêtes effectuées auprès des Canadiens aux préoccupations exprimées par différents organismes.
En 1988, le ministère de la Justice a mené auprès des Canadiens une enquête au sujet de la cruauté volontaire envers les animaux. Il l'a fait parce qu'il était préoccupé par les infractions aux lois qui étaient commises.
Le sénateur a parfaitement raison en ce qui concerne la suppression des moyens de défense. Si l'on en discute avec un juriste du ministère de la Justice, ou avec le conseiller juridique en matière de politiques, une personne brillante, on nous répondrait qu'il n'existe pas de différence entre ce qui est déjà prévu dans la common law et l'effet que la suppression de ces trois moyens de défense aurait sur le projet de loi.
(1450)
Voilà où le bât blesse et les honorables sénateurs devraient comprendre que c'est là le coeur du problème. Nous interprétons différemment la loi. Mais je pense que la proposition est sensée. Songez-y. Les personnes qui habitent les régions rurales peuvent cliquer sur les sites Quicklaw ou Carswell, comme beaucoup de sénateurs l'ont fait à partir de leur bureau, ce service étant d'ailleurs financé à même leur propre budget. Il n'y a pas beaucoup de députés qui l'ont, mais ils gagneraient à s'y abonner, car ils pourraient ainsi vérifier ce que dit la loi. Quand on clique sur ces sites, et qu'on inscrit les expressions «apparence de droit» et «poulet» ou «apparence de droit» et «poisson» ou encore «apparence de droit» et «environnement», le fureteur vous sort de nombreux jugements. Dans l'affaire R. c. Jorgenson, au paragraphe 6, le juge Lamer explique ce qu'il en est. Il s'agit d'une affaire jugée par la Cour suprême du Canada en 1995. Il s'agit d'une défense distincte concernant des erreurs de droit et non de fait. Il s'agit de la Cour suprême du Canada, un tribunal d'appel, et nous devrions en tenir compte, à mon avis, quand nous étudierons le projet de loi au comité. Voilà pourquoi je prétends qu'il incombe au comité sénatorial d'étudier ces questions juridiques. Nous devrions confier au comité le soin de nous renvoyer une mesure qui soit parfaite pour l'ensemble des Canadiens.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, selon moi, le sénateur Baker a une grande expérience...
Son Honneur le Président: Sénateur Baker, le Bureau vient de m'aviser que le temps qui vous était imparti est écoulé.
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, j'aimerais poursuivre, si vous me le permettez.
Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Cools: Comme j'allais le dire, l'arrivée du sénateur Baker enrichit selon moi la Chambre parce qu'il a siégé avec distinction à la Chambre des communes et que, en outre, il apporte aussi au débat le point de vue particulier de la Terre-Neuve rurale.
J'ai suivi avec beaucoup d'attention tout le débat concernant le projet de loi C-10. Ce qui a caractérisé ici ce débat, c'est que personne ne s'est porté à sa défense. En réalité, si l'on se reportait à la transcription des délibérations, on constaterait qu'à l'étape de la deuxième lecture, un intervenant après l'autre, un sénateur après l'autre a soulevé des questions et des objections ou encore évoqué des problèmes concernant le projet de loi. Si l'on se reportait à la transcription, on pourrait penser que personne ne défend le projet de loi.
Je me demande si le sénateur Baker pourrait nous éclairer au sujet de ce phénomène. Selon moi, lorsqu'ils soulèvent des questions, les honorables sénateurs sont en droit de s'attendre à ce que le gouvernement fournisse plein d'explications appropriées en temps opportun. Il incombe au gouvernement de fournir ici au Sénat des explications et des éclaircissements au fur et à mesure que des sénateurs soulèvent des préoccupations.
Le sénateur Baker est un parlementaire et un orateur d'expérience et il avait la réputation d'être un des meilleurs orateurs et débatteurs à la Chambre des communes. Je me demande si le sénateur Baker peut nous dire ce qu'il pense du fait qu'absolument personne ici ne défend ce projet de loi ni ne fournit d'explication concernant celui-ci pendant le débat.
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, «nul n'est censé ignorer la loi». À un moment donné, à l'époque des Romains, cette maxime avait force de loi. Pourquoi en était-il ainsi? C'était la loi parce que toutes les lois étaient des lois morales que tout le monde comprenait. De nos jours, il existe tant de lois et de règlements qu'une personne raisonnant normalement ne sait pas quelles lois et règlements régissent ses activités du lever au coucher du soleil. La situation empire continuellement. Le matin, lorsqu'un chasseur du Nunavut franchit le pas de sa porte, il se demande quelle loi il a enfreint.
Par conséquent, honorables sénateurs, la loi a évolué. Je n'ai jamais eu le temps de m'intéresser aux subtilités de la loi lorsque j'étais à la Chambre des communes parce que j'étais trop occupé par les problèmes de l'assurance-chômage et d'autres questions de ce genre. Je n'avais pas de temps à consacrer à ces problèmes. Je sais cependant qu'au fur et à mesure que nous adoptons de nouvelles lois et de nouveaux règlements au fil des ans, il incombe au Sénat — c'est là un travail de titan, qui convient donc au Sénat — de veiller à ce que le Code criminel protège les Canadiens. En d'autres termes, il faudrait reconnaître les erreurs de droit imputables à l'autorité. Ce genre d'erreur se produit quand une personne ne sait pas qu'elle a violé la loi, alors qu'elle l'a effectivement violée. Cette personne peut avoir consulté une autorité qui est censée connaître la loi et dont le rôle est de renseigner les gens, mais avoir obtenu quand même une fausse interprétation. La personne serait alors condamnée. Cela se produit très souvent. Il incombe au Sénat de faire le travail que les Communes sont incapables de faire. C'est le cas dans ce projet de loi.
On parle de motif valable ou d'excuse et d'apparence de droit. On peut remplacer le «et» par un «ou» parce que c'est là l'interprétation la plus récente des cours d'appel. Ces trois défenses, honorables sénateurs, sont très importantes. Elles le sont pour chacun. Nous devrions donc réfléchir soigneusement avant de laisser adopter un projet de loi qui supprime ces trois défenses actuellement inscrites dans le Code criminel, tout simplement parce qu'un expert du ministère de la Justice affirme que cela n'a pas d'importance.
L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, il est très intéressant d'écouter le sénateur Baker. Ce qu'il dit est très sensé. La question est de savoir s'il dira aux membres du Conseil exécutif qu'ils doivent écouter le Sénat.
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, je l'ai fait pendant 13 mois. J'ai perdu ensuite mon poste au Cabinet.
L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, pour faire suite à ce qu'a dit le sénateur Atkins, je crois que l'inscription qu'on peut voir dans le bureau du Président prouve bien le Sénat doit réfléchir. L'inscription est en latin; elle signifie que l'ordre exclut la hâte et la précipitation. La meilleure façon d'amener l'exécutif à comprendre consisterait pour le Sénat — j'invite le sénateur Robichaud à se montrer patient dans le cas de ce projet de loi parce que plus les gens en parlent, plus ils apprennent — d'aller s'il le faut jusqu'à dire «non» à la Chambre, afin d'envoyer le genre de message dont parle le sénateur Atkins.
(1500)
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, le paragraphe 8(3) du Code criminel dit bien que toutes les défenses qu'il est possible d'invoquer en vertu de la common law s'appliquent au Code criminel. Dans ce cas, le Sénat devrait dire qu'il ne suffit pas de répéter simplement cet énoncé dans le projet de loi. Nous devons veiller à ce que le projet de loi assure la protection du motif valable, de l'excuse ou de l'apparence de droit. C'était là le point central de l'argumentation de tous les groupes organisés qui ont présenté des exposés.
Honorables sénateurs, l'article 100 du projet de loi sur les espèces en péril est ainsi libellé: «La prise de précautions voulues peut être opposée en défense à toute accusation portée au titre de la présente loi.» Même si certains affirment que cette disposition est redondante, je la crois nécessaire.
Il y a seulement quelques années, l'article 78.6 a été ajouté à la Loi sur les pêches. Cet article précise aussi que la prise des précautions voulues peut être opposée en défense à toute accusation portée en vertu de la loi, ajoutant que nul ne peut être déclaré coupable s'il établit qu'il croyait raisonnablement et en toute honnêteté à l'existence de faits qui, avérés, l'innocenteraient. C'est précisément la définition de l'apparence de droit. C'est dans la Loi sur les pêches.
Pourquoi ne reprenons-nous pas la même définition dans ce projet de loi?
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorable sénateur, dans son brilliant raisonnement, le sénateur Nolin remet en question le principe même du projet de loi. Si c'est le cas, pourquoi continuons- nous d'examiner ce projet de loi? C'est le coeur de ma question.
Si nous votons sur un projet de loi dont nous ne connaissons pas le principe, ne devrions-nous pas tout simplement voter contre? Si nous remettons en question son principe même, y a-t-il lieu de le renvoyer au comité?
Le sénateur Baker: Honorables sénateurs, chaque sénateur voit différemment le principe du projet de loi.
Si je demandais au sénateur Nolin de me dire quel est le principe du projet de loi, je suis prêt à parier, honorables sénateurs, qu'il craint que nous adoptions un projet de loi qui élimine les trois moyens de défense.
Dans l'examen d'un projet de loi, les sénateurs doivent se demander quel est son objet. N'oublions pas que les interdictions sont déjà contenues dans le Code criminel. Cependant, le projet de loi alourdit les peines qui y sont prévues.
Quelle est la peine prévue pour des voies de fait simples? La peine maximale est de 5 ans d'emprisonnement en cas de déclaration de culpabilité par voie de mise en accusation. Si l'agression a été commise avec une arme, une peine d'emprisonnement de 18 mois peut être imposée dans les cas de déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Quelle peine prévoit le projet de loi dans les cas de cruauté envers les animaux? Si on procède par voie de mise en accusation, il prévoit une peine d'emprisonnement de 5 ans comme pour des voies. Si on procède par voie de déclaration de culpabilité par procédure sommaire, ce sera une peine d'emprisonnement de 18 mois et/ou une amende de 5 000 $. L'amende est doublée si la cruauté est commise contre un chien policier. Le projet de loi impose une peine plus lourde que celle prévue par le Code criminel pour des voies de fait simples commises contre une personne.
Pour certains sénateurs, le principe du projet de loi sera que nous supprimons trois défenses. Pour d'autres, nous créons, pour punir la cruauté envers les animaux, une peine plus lourde que dans les cas des voies de fait simples commises contre un être humain. Le principe est donc vu différemment d'une personne à l'autre. Notre responsabilité principale, cependant, est de nous assurer, lors de l'étude en comité, que nous représentons bien les Canadiens et que le libellé du projet de loi est adéquat.
L'honorable David Tkachuk: Il est intéressant d'entendre le sénateur Baker dire que nous avons trop de lois et de règlements, ce qui est la raison pour laquelle la majorité d'entre nous siégeons de ce côté-ci de la Chambre. Peut-être devrais-je l'accueillir dans nos rangs.
Quoi qu'il en soit, l'objection soulevée par le sénateur est tout à fait juste; je l'ai moi-même soulevée. Peut-être devrions-nous scinder le projet de loi avant de l'envoyer au comité, à cause des questions relatives à l'enregistrement des armes à feu. Nous pourrions alors étudier les modifications concernant l'enregistrement des armes à feu indépendamment des dispositions sur la cruauté envers les animaux, ce qui à mon avis serait plus censé. De plus, cela rendrait notre travail plus facile car nous ne mélangerions pas les deux questions.
Le sénateur Baker: Le sénateur a tout à fait raison de dire qu'il y a là deux choses absolument distinctes. Ces deux mesures auront des conséquences graves pour les habitants du Nord et des régions rurales.
Certaines des modifications concernant le contrôle et l'enregistrement des armes à feu qui sont proposées dans le projet de loi inquiètent certains membres de cette Chambre. Ces dispositions seront étudiées de près, particulièrement celles qui permettront aux non-résidents de se soustraire à cette obligation. Autrement dit, les gens qui viennent de l'extérieur ne seraient pas soumis aux dispositions d'une loi canadienne. Le comité sénatorial décidera comment procéder.
En ce qui concerne le contrôle des armes à feu, je dois admettre qu'il serait difficile d'apporter certaines des modifications suggérées par les sénateurs. La présidence devra se prononcer sur la majorité de ces demandes. Toutefois, cela ne serait pas hors de question. Le président de ce comité, un avocat éminent de St. John's, le sénateur Furey, possède les qualités nécessaires pour ce faire.
Le sénateur Tkachuk: Le sénateur serait-il en faveur de scinder le projet de loi avant de le renvoyer au comité?
Le sénateur Baker: En ma qualité d'ancien greffier en chef de d'une assemblée législative provinciale, je dirais qu'on ne peut pas le faire à ce stade. Il faudrait un amendement en ce sens à l'étape de l'étude en comité ou du rapport.
L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je suis très bien le raisonnement du sénateur. La seule solution est de renvoyer le projet de loi au comité et que le comité étudie tout ce qui a été dit au Sénat. Le comité est certainement en mesure de scinder le projet de loi. Je suggère donc que, le moment venu, le projet de loi soit renvoyé au comité.
(Sur la motion du sénateur Adams, le débat est ajourné.)
(1510)
RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT
PRÉSENTATION DU DEUXIÈME RAPPORT DU COMITÉ
Permission ayant été accordée de revenir aux rapports de comités permanents ou spéciaux:
L'honorable Lorna Milne, présidente du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, présente le rapport suivant:
Le mercredi 6 novembre 2002
Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement a l'honneur de présenter son
DEUXIÈME RAPPORT
Votre Comité, auquel le Sénat a renvoyé, le jeudi 31 octobre 2002, la motion portant que, pour la durée de la présente session, les comités restreints puissent se réunir pendant les ajournements du Sénat, fait rapport comme suit:
Le Comité recommande que, aux termes du paragraphe (95)3 du Règlement, les comités sénatoriaux soient autorisés à se réunir à toute heure, n'importe quel jour de la semaine où le Sénat ajourne au cours de la semaine de séance.
Respectueusement soumis,
La présidente,
LORNA MILNE
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons- nous ce rapport?
Le sénateur Milne: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, je demande que l'étude de ce rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
(Sur la motion du sénateur Milne, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance. )
LE DISCOURS DU TRÔNE
MOTION D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Morin, appuyée par l'honorable sénateur Hubley, tendant à l'adoption d'une Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours du Trône qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la deuxième session de la trente-septième législature.—(6e jour de la reprise du débat).
L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, le discours du Trône n'a pas été une surprise pour ceux d'entre nous qui avons suivi la carrière de l'actuel premier ministre. Ce qui a étonné nombre d'entre nous, et j'ajoute «heureusement», de l'avis de nombre d'entre nous, c'est que la liste de souhaits qui constitue l'héritage du premier ministre ait mis tellement de temps à voir le jour. Les visionnaires politiques, les sans-abri, les sages, avec qui, je crois, le premier ministre s'entretient régulièrement, ont pu entraîner ce retard. Ce demi-tour pour tenir les promesses contenues dans le livre rouge peut également être le résultat des manifestations d'émotion générales qui ont suivi le décès de l'ancien premier ministre Trudeau.
L'ancien premier ministre pouvait compter sur la Constitution et sur la Charte des droits et libertés pour préserver son héritage pour tous les libéraux et pour nombre d'autres personnes qui se sont prévalues de la charte pour changer la façon dont nous faisons des affaires au Canada, dans certains cas pour le mieux, dans d'autres pour le pire.
Le premier ministre laisse en héritage le fait d'avoir repris le contrôle du déficit et rétabli l'intégrité financière du Canada. À mon avis, ces réalisations suffisent pour lui mériter le respect dans les livres d'histoire. Toutefois, le discours du Trône donne un autre son de cloche et renvoie le premier ministre dans le camp des vieux libéraux qui estiment que le rôle du gouvernement est de veiller aux intérêts du Canada en utilisant l'argent des contribuables pour servir leurs propres ambitions sociales. Or, aux yeux des progressistes- conservateurs, cette tâche devrait être laissée aux gens eux-mêmes.
Je conseille au premier ministre de ne pas anéantir les réalisations positives qu'il a faites pour le Canada. Si quelques libéraux estiment que ce n'est pas suffisant, il faut les oublier. Il faut se souvenir qu'il a fallu neuf ans aux conservateurs, sous la direction de Brian Mulroney et de Michael Wilson, pour reprendre le contrôle des dépenses, pour faire baisser les taux d'intérêt et pour mettre en oeuvre le libre-échange et la TPS. En outre, il a fallu Preston Manning et l'arrivée en scène du Parti réformiste pour rendre le financement du déficit impopulaire. Le premier ministre doit également se souvenir qu'il a fallu quatre autres années, à lui- même et à Paul Martin, pour réparer les dégâts que Trudeau et ses conseillers financiers avaient causés au Canada. En une décennie, les dépenses inflationnistes de l'administration Trudeau ont dépossédé les Canadiens de la moitié de leurs économies et les retraités de la moitié de leurs régimes de retraite, aussi efficacement que des voleurs dans la nuit. Il faut se rappeler que c'est là l'autre partie de l'héritage Trudeau.
Pour ajouter à la consternation du premier ministre, celui-ci craint que Paul Martin ne réécrive l'histoire pour bien montrer qu'il a été le seul combattant au front du déficit. Nous observons ce qui ne s'était jamais vu en politique au Canada: nous voyons un homme, un aspirant premier ministre, qui ne rate pas une occasion de serrer la vis au premier ministre en place. Les relations autrefois difficiles de ces deux hommes ont laissé place à une guerre ouverte qui est en train de déstabiliser le Parti libéral, ce qui ne me chagrine guère, par ailleurs. Mais il y a pis encore, cette guerre ouverte est en train de déstabiliser le pays.
Ce gouvernement est désorganisé sur tous les dossiers: des fusions bancaires à la politique sur le Proche-Orient en passant par la guerre au terrorisme et le Protocole de Kyoto. Malheureusement, personne ne sait vraiment qui est aux commandes. Qui plus est, personne ne disconvient que le premier ministre n'ait perdu le contrôle de son caucus et de son parti.
À en juger par la controverse entourant les fusions bancaires et les critiques inconvenantes du ministre de la Défense à l'endroit du gouvernement, il est évident que le premier ministre est en train de perdre aussi le contrôle de son Cabinet. Pendant que les médias parlent en long et en large des faux pas de M. Manley, qui sont peut- être des faux-pas du premier ministre après tout, ils ne parlent guère du ministre de la Défense, qui a condamné le gouvernement libéral, gouvernement dont il est lui-même membre. Dans de telles circonstances, on pourrait s'attendre à ce que le ministre de la Défense remette sa démission en raison de ses divergences d'opinions politiques ou à ce que le premier ministre le remercie. L'époque est malsaine.
Voici un autre exemple: un assistant au cabinet du premier ministre a passé un coup de fil à un cadre dans une banque pour lui dire que le dossier des fusions bancaires n'était plus sur la table. Un assistant au cabinet du premier ministre est allé à Toronto et a supprimé une partie du discours sur les fusions bancaires que le ministre Bevilacqua s'apprêtait à livrer. N'y a-t-il pas de téléphone au cabinet du premier ministre? Les choses auraient pu se passer comme ceci: «Allô, John, c'est moi Jean, le premier ministre. Le dossier des fusions bancaires n'est plus sur la table. Tu t'attendais à quoi, mon vieux? Je dois tout de même penser à l'héritage que je vais laisser!» Ou alors le ministre des Finances aurait pu téléphoner aux présidents des banques pour leur dire: «Je suis désolé, mais le premier ministre a changé d'idée. Veuillez m'excuser, vous, vos employés ainsi que les milliers d'actionnaires.»
Le premier ministre nous assure que le Canada est en sécurité, mais nous sommes sceptiques. Le ministre de la Défense en remet et suscite la peur lorsqu'il affirme que nos forces sont tellement sous- financées qu'elles ne sont pas en mesure de faire leur travail. Pour autant que je sache, le Canada n'a plus de gouvernement; il n'a que quelques ministres qui se débrouillent tout seuls et qui cherchent à se faire valoir aux yeux de celui qu'ils croient être leur prochain maître.
Nous avons récemment été témoins d'une situation plutôt cocasse. La conférence fédérale-provinciale sur l'accord de Kyoto a été annulée à la dernière minute et le premier ministre dit ne pas vouloir rencontrer les premiers ministres provinciaux pour discuter de cette question. Ce n'est pas que les premiers ministres provinciaux se montrent difficiles comme on les décrit souvent, mais le Protocole de Kyoto aura des conséquences sur l'exploration et l'extraction des ressources naturelles. Même le plus tordu des centralisateurs sait bien que cette question relève de la prérogative et de la compétence des provinces.
Aujourd'hui, je demande au premier ministre de faire preuve de leadership et de rencontrer les premiers ministres provinciaux avant de ratifier le Protocole de Kyoto. Je crois que tous les sénateurs libéraux qui se préoccupent des intérêts de leur région respective, et particulièrement ceux de la Saskatchewan, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, ainsi que tous les gouvernements provinciaux qui s'opposent au Protocole de Kyoto se joindront à mes collègues et à moi-même pour exhorter le premier ministre à prendre une telle mesure le plus rapidement possible.
(1520)
L'accord préoccupe bon nombre de personnes, non seulement parce qu'elles sont d'avis qu'il est basé sur des données scientifiques erronées et sur l'opinion de ces gens qui ont du mal à prévoir la température qu'il fera demain, mais parce qu'il aura des répercussions sur la santé financière individuelle des Canadiens, des factures de chauffage et d'électricité aux coûts de transport et de fabrication en passant par presque tous les autres frais.
Le gouvernement nous assure qu'il n'y aura pas de taxe sur les combustibles fossiles, tout comme on nous a déjà garanti qu'on ferait disparaître la TPS, qu'il n'y aurait pas de taxe d'aéroport à Pearson, qu'on réécrirait l'accord de libre-échange, qu'on augmenterait le budget des soins de santé, et qu'on préparerait un train de mesures éthiques. Plein d'autres promesses témoignent de leur supercherie.
Je vous dis aujourd'hui que, si l'accord de Kyoto est adopté, nous nous verrons imposer une taxe sur les combustibles fossiles et toute une série d'autres taxes du genre et que cela creusera un fossé permanent entre les producteurs de combustibles fossiles, le reste du Canada et le gouvernement. Cela peut inclure non seulement l'ouest du Canada, mais aussi les provinces de l'Atlantique. Dans ce contexte, le Programme énergétique national aura l'air d'un jeu d'enfant.
Afin de dissiper tout malentendu chez nos vis-à-vis, je tiens à assurer aux honorables sénateurs que les progressistes- conservateurs, partout au Canada, lutteront contre cet empiétement sur les droits des provinces et cette ponction dans le portefeuille des Canadiens avec la vigueur et la détermination dont Joe Clark et les progressistes-conservateurs ont fait preuve en défendant le Canada contre le Programme énergétique national.
Je vais maintenant passer aux dépenses gouvernementales. J'ai souvent lu et entendu dire que les libéraux sont conservateurs sur le plan budgétaire, que Paul Martin est un conservateur déguisé. Les sénateurs d'en face se réjouiront d'apprendre que ce n'est pas vrai. Ces éditorialistes se trompent. L'ex-ministre des Finances, M. Martin, a tranquillement gaspillé l'argent à un rythme qui dépasse de beaucoup ce que l'on croit, quoique pas à un rythme qui aurait de quoi réjouir les partisans de Mme Copps et ceux de M. Rock. Ces derniers aimeraient dépenser davantage.
Les libéraux peuvent se diviser en deux camps: ceux qui aiment dépenser beaucoup d'argent et ceux qui aiment en dépenser encore davantage, en un buffet d'extravagances. «Comment se peut-il», se demandent les gens, «que Martin soit aussi radin?» Les chiffres ne justifient pas pareille question.
En 1993, abstraction faite du Régime de pensions du Canada, le Canada a amassé 115 milliards de dollars en recettes fiscales. Aujourd'hui, il en amasse 174 milliards de dollars. La mise à jour économique et fiscale calcule qu'en 2007, les recettes fiscales s'élèveront à 221 milliards de dollars. Cela, malgré de prétendues réductions d'impôt ou, peut-être, à cause des réductions d'impôt. Les recettes augmentent, elles ne diminuent pas. C'est sans compter les augmentations auxquelles nous ferons face une fois que l'accord de Kyoto sera approuvé si les libéraux réussissent à le faire accepter.
Parmi les pays membres de l'OCDE, notre fardeau fiscal nous classe derrière le Danemark, la Finlande et la Suède seulement. Nous ne sommes pas en bonne compagnie.
En 1996, les dépenses gouvernementales étaient à leur plus bas, à 104 milliards de dollars, surtout à la suite des coupes effectuées dans les secteurs de l'éducation et de la santé. Aujourd'hui, les dépenses gouvernementales s'élèvent à 134 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation de 30 milliards de dollars en six ans. Il n'est pas prévu que l'excédent de 15 milliards de dollars calculé pour 2007 serve au remboursement de la dette. M. Manley cherche déjà de nouvelles manières de dépenser l'argent au lieu de s'en servir pour renforcer les capacités des forces armées ou augmenter les paiements versés aux provinces pour la santé.
La dette a diminué de 47 milliards de dollars depuis 1996. Cependant, nous oublions de noter qu'elle dépasse encore de 14 milliards le montant auquel elle se chiffrait en 1993. Nous pensons tous qu'elle diminue. Elle n'a pas diminué par rapport à 1993. Les paiements cumulatifs en intérêts depuis 1993 s'élèvent à 375 milliards de dollars. Au cours des cinq prochaines années, on paiera encore 181 milliards de dollars en intérêts, à condition que les taux d'intérêts ne changent pas.
Ces chiffres montrent que Paul Martin est un grand dépensier. Il se donne peut-être les airs d'un conservateur sur le plan budgétaire, mais c'est en réalité un libéral très dépensier qui pense que les réductions d'impôt sont mauvaises, qui croit que les gens ne devraient pas récupérer leur propre argent et qui n'a jamais vu un programme gouvernemental qui lui déplaisait.
Le discours du Trône se voulait peut-être l'héritage que nous laissait un premier ministre qui s'accroche aux vieilles valeurs libérales dépassées, mais, à l'autre endroit, le roi a été déposé. Le gouvernement Chrétien est fini. Ce qui est triste, c'est que tout le monde s'en rend compte, sauf lui.
L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, comme il s'agit probablement du dernier discours du Trône que je serai en mesure de commenter, je voudrais aborder le rôle que le Canada est appelé à jouer sur la scène internationale en cette période critique de notre histoire.
Premièrement, en tant que sénateur indépendant, je tiens à exprimer ma gratitude envers la présidence et les leaders des deux côtés pour la façon équitable et courtoise dont j'ai été traité. Je suis heureux d'avoir eu l'occasion de contribuer aux travaux du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et en particulier à son étude innovatrice sur les soins de santé.
Permettez-moi de saluer Son Excellence et de féliciter le sénateur qui a proposé l'Adresse en réponse au discours du Trône et celui qui l'a appuyé pour leurs exposés fort intéressants. C'est du volet international du discours du Trône que je veux traiter ici.
Dans le discours, on précise que le Canada continuera d'œuvrer au sein d'organisations telles que les Nations Unies pour faire en sorte que les règles de droit international soient respectées et mises en application. Il travaillera avec les États-Unis afin de combler nos besoins communs en matière de sécurité. Nous doublerons notre aide au développement d'ici 2010 et consacrerons au moins la moitié de cette augmentation à l'Afrique. Pour établir un dialogue avec les Canadiens au sujet du rôle que notre pays est appelé à jouer dans le monde, le gouvernement établira les principes directeurs à long terme de notre politique en matière d'affaires étrangères et de défense, principes qui seront le reflet de nos valeurs et de nos intérêts, et qui permettront aux militaires canadiens de disposer des outils nécessaires pour remplir le rôle qui leur est confié.
Il faut dire, d'entrée de jeu, que c'est une vision louable, même si ses détails comportent des lacunes. Voyons certains de ces détails. Essayons d'oublier les manchettes de la journée, qui font sans cesse état de conflits et ont créé un climat où il semble tout à fait antipatriotique de ne pas se précipiter pour injecter des milliards de dollars de nouveaux fonds dans les Forces canadiennes, à titre de réponse du Canada aux menaces pesant actuellement sur la sécurité. Ne soyons pas si obnubilés par les événements tragiques du 11 septembre au point de penser qu'une réponse militaire est la seule façon de garantir notre sécurité dans l'avenir. Ne suivons pas la voie du gouvernement américain, qui place les États-Unis sur un pied de guerre permanent au nom de la paix, une position qui deviendra certainement encore plus rigoureuse à l'issue des élections d'hier.
Honorables sénateurs, le principe très important dont devraient s'inspirer les politiques du Canada en matière de sécurité c'est que le militarisme ne peut, à lui seul, assurer la sécurité dans le difficile contexte de la mondialisation où nous nous trouvons. Au contraire, on ne peut assurer la sécurité qu'en mettant en oeuvre des programmes visant le développement durable dans toutes les parties du monde ainsi que la protection et la promotion des droits de la personne dans toutes leurs dimensions, tel qu'expliqué dans les documents des Nations Unies. Dans ce contexte, les forces armées ont un rôle à jouer, pour non seulement garantir, mais, au besoin, imposer la paix par l'application rigoureuse des lois internationales.
Compte tenu des craintes légitimes qu'ont fait naître les attentats terroristes du 11 septembre par rapport à la sécurité personnelle, l'idée selon laquelle il faut accroître considérablement le financement des forces armées s'est répandue au Canada. On a mis l'accent sur la nécessité d'accorder davantage d'argent, beaucoup d'argent, aux forces armées, pour que nous puissions ensuite tous pousser un soupir de soulagement parce que nous serons à l'abri des menaces que font peser sur nous des ennemis inconnus. En résumé, la logique qu'on nous présente donne à penser que plus d'argent pour les forces armées est synonyme de sécurité accrue. Le syndrome du 11 septembre vient biaiser un débat important qui devrait avoir lieu dans notre pays sur les façons d'améliorer la sécurité à l'échelle nationale et mondiale. Il faut situer le débat dans une plus vaste perspective afin de produire les meilleures politiques gouvernementales.
On devrait examiner l'idée selon laquelle les contribuables canadiens sous-financent actuellement les forces armées. Le budget du Canada en matière de défense est légèrement supérieur à 12 milliards de dollars, ce qui place le Canada dans le 10 p. 100 des pays qui dépensent le plus sur le plan militaire dans le monde. L'Institut international d'études stratégiques de Londres classe le Canada au 7e rang des 19 États membres de l'OTAN qui dépensent le plus en matière militaire. Même si les dépenses militaires du Canada ont chuté dans les années 90, cette baisse était le reflet d'une tendance à l'échelle mondiale. L'Institut international de recherches sur la paix de Stockholm fait état d'un déclin mondial de 11 p. 100 de 1992 à 2000. Au Canada, le déclin a été de 12 p. 100 durant la même période. Ainsi, comme le souligne Project Ploughshares, «l'affirmation selon laquelle les dépenses militaires canadiennes ont diminué à des niveaux excessivement bas par rapport au reste du monde ne résiste pas à l'examen».
(1530)
Les dépenses militaires mondiales montent maintenant en flèche. C'est aux États-Unis que la hausse est le plus marquée, s'établissant à pas moins de 50 milliards de dollars l'an dernier seulement. Nos voisins du Sud consacrent maintenant 400 milliards de dollars par année à la défense, soit plus que les 25 pays suivants collectivement. Et l'ambassadeur américain au Canada ose critiquer constamment le Canada pour la faiblesse de ses dépenses militaires, comme si le budget gargantuesque américain devrait être la norme pour le Canada. Les États-Unis poussent aussi à la hausse les dépenses militaires de l'OTAN. S'élevant à 500 milliards de dollars par année, les dépenses militaires de l'OTAN représentent 60 p. 100 de l'ensemble des dépenses militaires dans le monde. Si le Canada ajoutait 2 ou 3 milliards de dollars par an aux dépenses militaires de l'OTAN, comment peut-on affirmer sérieusement que cela accroîtrait la sécurité mondiale? On ne peut certes pas dire que la paix et la sécurité sont menacées simplement par une faiblesse de la capacité militaire mondiale.
Les porte-parole de la défense n'aiment pas devoir l'admettre, mais en ce qui concerne les niveaux de dépenses militaires canadiennes en chiffres absolus, le Canada est bien au-dessus de la moyenne mondiale. Faut-il en conclure qu'on devrait refuser d'accorder aux Forces canadiennes des échelles de salaire équitables ou du matériel convenable et en bon état de fonctionnement? Quelle est notre politique? Voulons-nous que le rôle hautement reconnu de pacification et de maintien de la paix du Canada soit maintenu ou que notre capacité de combat soit accrue afin que le Canada puisse participer à de futures guerres, devrait-on ajouter, qui sont préparées par les États-Unis? Si ceux-ci sont déterminés à aller se battre en Irak, même sans l'autorisation du Conseil de sécurité des Nations Unies, minant ainsi le droit international et ouvrant la porte à d'autres théâtres de combat, y compris l'espace, les Canadiens devraient alors savoir maintenant pourquoi on leur demande d'accroître le budget de la défense du Canada. Le fait d'équiper le Canada pour qu'il puisse aller en guerre dans l'avenir constituerait une importante réorientation de la politique de défense du Canada.
Voilà qui démontre à quel point il est important que le gouvernement énonce une politique de défense à long terme, tel qu'il l'a promis dans le discours du Trône. Nous n'avons rien entendu jusqu'à présent concernant l'établissement de l'ordre de priorité des besoins futurs. Si ces besoins se rapportent à la défense du Canada, alors on devrait débloquer les sommes nécessaires, mais s'ils ont trait à la participation aux guerres menées par les États- Unis, il faudrait refuser d'injecter des sommes supplémentaires dans la défense. Autrement dit, on devrait accorder plus d'argent aux Forces canadiennes si cela était nécessaire, mais si c'était nécessaire seulement.
Le Canada s'est distingué dans les dernières années par son programme en matière de sécurité humaine, suivant lequel la sécurité et le bien-être des gens dépendent davantage des conditions économiques, sociales et politiques que de la puissance militaire. Ce programme, comme le souligne l'analyste Ernie Regehr, englobe des questions telles que l'égalité économique, les droits de la personne, la démocratie et l'environnement physique durable. Pour le mener à bien, il faudra une injection importante de nouvelles ressources, qui pourraient prévenir des conflits armés régionaux et mettre un terme au terrorisme.
L'Aide publique au développement, ou APD, est au coeur même de ce programme. Le gouvernement le reconnaît en affirmant son intention de doubler l'aide au développement d'ici 2010. Lester B. Pearson, un des grands premiers ministres du Canada et lauréat du prix Nobel de la paix, a été le premier à proposer aux pays membres de l'ONU de consacrer 0,7 p. 100 de leur produit intérieur brut à l'APD. Si les militaires canadiens étaient mécontents de la diminution de 14 p. 100 de leur budget dans les années 90, que penser de la réduction de 31 p. 100 de l'APD au cours de la même période?
La contribution du Canada à l'APD s'élève aujourd'hui à seulement 0,25 p. 100 de son PIB, ce qui nous vaut le 17e rang parmi les 22 pays donataires. Elle est bien inférieure à la contribution moyenne de 0,39 p. 100. Il n'y a pas de quoi être fiers. Cette situation est aussi en contradiction avec les affirmations selon lesquelles le programme de sécurité humaine est à la base de nos politiques en matière de sécurité mondiale.
Notre pays a adhéré à la Déclaration du millénaire des Nations unies, qui définit les buts de cet organisme aux chapitres du désarmement, du développement et de l'éradication de la pauvreté, qui sont essentiels à l'établissement d'une paix durable dans le nouveau millénaire. Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, selon lequel toute mesure prise pour réduire la pauvreté contribue à prévenir les conflits, a déclaré qu'il faudrait dépenser une somme supplémentaire de 50 milliards de dollars pour atteindre les buts fixés pour le nouveau millénaire. Cette somme représente un seizième du montant dépensé actuellement par les pays du monde entier en préparatifs de guerre. Le Conseil canadien pour la coopération internationale a fixé à 2,5 milliards de dollars par année la contribution canadienne à ces 50 milliards de dollars. Même en versant cette somme, ce qui nous obligerait à doubler l'APD canadienne, nous serions toujours bien à court de la contribution cible de 0,7 p. 100 de notre PIB établie par l'ONU aux fins de l'APD.
Le gouvernement soutient que nous devrions être satisfaits d'une augmentation de 8 p. 100 de notre APD cette année. C'est mieux que rien, mais c'est insuffisant étant donné tout ce qui doit être fait sur notre planète pour y créer les conditions nécessaires à la paix et à la sécurité. Ce n'est pas difficile à comprendre. Les données prouvent que, par rapport à l'indice de sécurité humaine, les États se classant après la médiane sont trois fois plus susceptibles de subir des guerres que ceux qui se situent avant la médiane. Si nous voulons la paix, nous devons payer pour assurer la paix. Nous devons notamment payer pour la destruction des stocks d'armes excédentaires, le démantèlement des armes nucléaires, l'élimination des matières fissiles et la mise en oeuvre de programmes sociaux ou économiques qui procureront aux humains la sécurité qu'ils recherchent si ardemment.
Honorables sénateurs, le Canada doit reconnaître la nécessité d'augmenter les dépenses au titre de la sécurité. Cela va bien au-delà des seules dépenses militaires. Le gouvernement veut revoir ses politiques. Que son étude commence dès maintenant et qu'il organise, finance et annonce adéquatement la participation publique.
Le Canada doit aider la communauté mondiale à trouver des solutions aux principaux défis de notre temps, à savoir la guerre et la violence généralisées, le terrorisme, la pauvreté et la détérioration de l'environnement. Comme les lauréats du prix Nobel qui se sont rencontrés à Rome récemment, prenons fermement position contre le cynisme et le désespoir qui écrasent toute vision et tout espoir. Notre humanité commune exige des politiques gouvernementales favorables à la paix, à l'humanité et à l'égalité.
(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)
(1540)
LE CODE DE DÉONTOLOGIE ET LES LIGNES DIRECTRICES EN MATIÈRE D'ÉTHIQUE
MOTION VISANT À RENVOYER DES DOCUMENTS AU COMITÉ PERMANENT DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT—REPORT DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Robichaud, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Carstairs, c.p.:
Que les documents intitulés «Proposition de modification de la Loi sur le Parlement du Canada (commissaire à l'éthique) et de certaines lois en conséquence» et «Proposition de modification du Règlement du Sénat et du Règlement de la Chambre des communes visant à mettre en oeuvre le rapport Milliken-Oliver de 1997», déposés au Sénat le 23 octobre 2002, soient renvoyés au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je croyais que le débat avait été ajourné hier au nom du sénateur Sparrow. Je voulais prendre la parole après le sénateur Sparrow.
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, lorsqu'il s'agit des affaires du gouvernement, le débat n'est pas ajourné au nom d'un sénateur en particulier. Si quelqu'un voulait s'exprimer aujourd'hui sur cette motion, il pourrait très bien le faire. Le sénateur Sparrow m'a indiqué qu'il en parlerait demain.
(Le débat est reporté.)
[Traduction]
BANQUES ET COMMERCE
AUTORISATION AU COMITÉ D'ÉTUDIER LES RÉPERCUSSIONS EN MATIÈRE D'INTÉRÊT PUBLIC DE LA FUSION DES BANQUES
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kolber, appuyée par l'honorable sénateur Maheu:
Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à étudier les répercussions en matière d'intérêt public de la fusion des grandes banques sur:
. l'accès des Canadiens de toutes les régions du pays à des services financiers convenables et de qualité;
. la disponibilité des fonds pour les particuliers et les entreprises, notamment les petites et les moyennes entreprises;
. l'économie canadienne et la capacité des entreprises canadiennes d'être concurrentielles sur le plan international;
. les collectivités et les employés des banques;
. toute autre question connexe;
Que le Comité soit habilité à permettre le reportage de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux;
Que le Comité soumette son rapport final au plus tard le 31 mars 2003.—(L'honorable sénateur Tkachuk).
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Le vote!
Son Honneur la Présidente intérimaire: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
(La motion est adoptée.)
AGRICULTURE ET FORÊTS
LES CONCLUSIONS DU RAPPORT INTITULÉ & LES AGRICULTEURS CANADIENS EN DANGER—INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT
L'honorable Donald H. Oliver, ayant donné avis le 29 octobre 2002:
Qu'il attirera l'attention du Sénat sur les conclusions du rapport du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et les forêts intitulé «Les agriculteurs canadiens en danger», déposé le 13 juin 2002 au Sénat durant la première session de la 37e législature.—(L'honorable sénateur Oliver).
— Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que j'amorce le débat sur cette interpellation. L'an dernier, sous la direction compétente du sénateur Gustafson, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts a réalisé une étude internationale importante à l'issue de laquelle il a publié un rapport approfondi, «Les agriculteurs canadiens en danger». Il y a une semaine, on m'a fait l'honneur de m'élire à la présidence de ce comité. En raison de la somme imposante de travail que représente ce rapport, je tiens à prendre quelques minutes aujourd'hui pour attirer l'attention des honorables sénateurs sur quelques-unes de ses importantes conclusions.
Avant de le faire, je voudrais profiter de l'occasion pour rendre hommage au sénateur Gustafson, à titre d'ancien président. Le sénateur Gustafson, qui est un agriculteur de la Saskatchewan, a assumé la présidence du comité en 1996. Sous sa direction, le comité a fait un travail remarquable d'analyse et de recherche de solutions réalistes. Pendant une période de huit ans, il a présidé environ 130 séances du comité et a entendu plus de 480 témoins. Durant cette période, le comité a beaucoup influencé l'agriculture et la foresterie au Canada grâce à son examen de huit projets de loi et au dépôt de sept rapports de fond traitant de questions telles que le commerce, la sécurité alimentaire et l'environnement.
Cette année, le comité a entrepris une grande étude du changement climatique. Nous analyserons la façon dont les agriculteurs et les exploitants forestiers doivent s'adapter à l'évolution imposée par ce changement. Nous espérons avoir aussi la possibilité d'étudier d'autres questions qui intéressent les agriculteurs et le secteur forestier en menant de courtes études ciblées sur des sujets tels que le bioterrorisme, les organismes génétiquement modifiés, la sécurité alimentaire, l'industrie fromagère, la viticulture et la production du vin, les industries d'exportation, le bois d'œuvre, et cetera.
Aujourd'hui, honorables sénateurs, je voudrais aborder le concept de la multifonctionnalité. C'est un mot que nous n'entendons pas souvent au Canada, du moins pas dans le contexte de l'agriculture. Très brièvement, c'est le concept selon lequel les gens qui s'occupent d'agriculture jouent différents rôles à part celui qui consiste à produire des aliments, et devraient être rémunérés pour cela. Ayant grandi dans un environnement rural, je crois que, pour beaucoup de Canadiens, les agriculteurs font deux choses: les semailles au printemps et, avec l'aide de Dieu, la récolte à l'automne. Tout le reste du temps, ils prennent du soleil en Floride ou se prélassent sur une plage. De toute évidence, la réalité est très différente. Au Canada, l'agriculteur moyen travaille du lever du jour jusqu'au coucher du soleil, comme beaucoup d'autres membres de sa famille. Plutôt que de rester assis, il joue, par exemple, un rôle important dans le maintien de l'environnement local. Il le fait en protégeant les sources d'eau souterraines locales, en appliquant une politique de fertilisation approuvée, en gardant des espaces verts pour les oiseaux migrateurs, et cetera. Les agriculteurs jouent également des rôles économiques allant au-delà de la production et de la vente de récoltes. Ils créent des milliers d'emplois, attirent des investissements dans les commerces locaux et, avec leurs familles et leurs voisins, créent une demande d'infrastructure qui, à son tour, engendre de l'activité économique. Je pense par exemple à des choses telles que l'eau, les routes, les égouts, l'électricité, les écoles, la collecte des ordures, etc. Sans agriculteurs, il n'y aurait rien de tout cela. Nous n'aurions que des terres vides ne produisant ni aliments ni revenu pour personne.
Les agriculteurs jouent également un rôle culturel. Ils préservent d'importantes parties de notre patrimoine en s'occupant de bâtiments historiques. Ils produisent des aliments locaux, comme le fromage d'Oka et les vins du Niagara, qu'on ne peut pas trouver ailleurs. Ils contribuent au maintien de traditions qui distinguent des gens et des régions de ceux qui les entourent. On en trouve un exemple au Québec, où les agriculteurs subdivisent leurs terres d'une façon qui n'a pas d'équivalent ailleurs.
Les agriculteurs font gratuitement toutes ces choses qui n'ont rien à voir avec l'agriculture en soi. Selon la théorie de la multifonctionnalité, ces contributions sont importantes et jouent un rôle concret dans le maintien de la viabilité économique et culturelle de grandes régions de nombreux pays. Par conséquent, les agriculteurs méritent d'être rémunérés pour le temps, les efforts et l'argent qu'ils dépensent à cette fin.
Une telle indemnisation des agriculteurs relève depuis une décennie à peine de la politique publique d'un certain nombre de pays, en particulier ceux de l'Union européenne, le Japon et l'Australie. Fait plutôt intéressant, elle découle du grand débat environnemental qui s'est tenu au début des années 90 sur des questions comme le réchauffement de la planète et le développement durable. Ce débat a fait ressortir que les régions rurales forment une espèce d'écosystème. Elles font partie intégrante quoique distincte de la société dans son ensemble. Dans ces régions, les agriculteurs fournissent un certain nombre de services tangibles aussi bien qu'intangibles. Ensemble, ceux-ci contribuent à assurer la viabilité du mode de vie rural et de l'économie rurale. En effet, ils sont essentiels à la prospérité économique de la société dans son ensemble. Les régions rurales forment un tout avec le reste du pays. La santé et la prospérité des unes sont intimement liées à celles de l'autre.
Contrairement à nos amis européens, japonais et australiens, nous, Canadiens, n'avons pas encore adopté cette notion de multifonctionalité. En fait, sauf pour un groupe relativement petit d'agriculteurs professionnels et de professeurs d'université, cette idée est encore relativement inconnue. On explique en général cela du fait que le Canada pratique le libre-échange. Nous sommes déterminés à réduire et à supprimer éventuellement toutes les barrières tarifaires. Comme le multifonctionalisme prévoit que l'on finance les agriculteurs pour des activités non strictement liées à la production de nourriture, il va à l'encontre de nos principes de libéralisation des échanges. Nous ne l'appuyons donc pas. Autrement dit, les États européens qui appliquent la politique de la multifonctionalité se trouvent, en fait, à subventionner leurs agriculteurs lorsqu'ils les paient pour laisser leurs champs en jachère afin que les oiseaux migrateurs y nichent ou lorsqu'ils les rémunèrent pour assurer à tous leurs concitoyens l'accès à un approvisionnement suffisant de denrées alimentaires. Pour le Canada, il semble que ce soit inacceptable.
(1550)
C'est le genre de débat qui peut devenir très intense. Ceux qui sont en faveur de la libéralisation des échanges commerciaux rejettent la notion de l'Union européenne selon laquelle l'agriculture est un écosystème comprenant une multitude d'activités non productives pour lesquelles les agriculteurs méritent d'être rémunérés. Pour eux, l'agriculture ne sert qu'à produire des aliments. En tant que producteurs, les agriculteurs devraient se faire concurrence dans le marché libre, comme tout le monde. De l'autre côté, les partisans du libre-échange comme les États-Unis se plaignent tout en versant des milliards de dollars de subventions à leurs propres agriculteurs.
Pour mettre les choses dans une perspective un peu plus globale, j'ajouterai que le débat sur la multifonctionnalité n'est pas un phénomène purement nord-américain. De nombreux pays du tiers monde, comme les pays d'Afrique, critiquent farouchement la multifonctionnalité. Ils la voient comme une simple excuse employée par les pays industrialisés pour justifier des subventions agricoles élevées auxquelles ils ne peuvent pas faire concurrence de façon équitable.
Honorables sénateurs, le Comité de l'agriculture et des forêts a examiné la question en détail et, parmi les recommandations que nous avons incluses dans le rapport, il y en a une qui dit qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada devrait étudier l'applicabilité du concept de la multifonctionnalité ici, dans ce pays. De façon plus particulière, il devrait tenter de déterminer les différents rôles que joue le secteur agricole, comment ces rôles varient d'une région à l'autre et comment le gouvernement fédéral pourrait, s'il choisissait de le faire, promouvoir cette idée auprès des Canadiens. Le rapport disait que le comité croit qu'on devrait accorder de l'aide aux agriculteurs en reconnaissance de leur rôle d'intendants des terres et que l'aide gouvernementale devrait cibler les autres rôles de l'agriculture pour promouvoir les valeurs rurales.
Certains sénateurs se demandent peut-être pourquoi le Canada n'a pas embrassé l'idée de la multifonctionnalité étant donné que de nombreux pays européens l'ont fait. Un facteur pourrait bien être la façon dont nous élaborons les politiques gouvernementales ici. Contrairement à bien des pays européens, particulièrement la France, le Canada n'établit généralement pas ses politiques gouvernementales en se fondant sur des cadres théoriques; nous essayons de régler les questions au fur et à mesure qu'elles se présentent. Nous avons tendance à élaborer une politique seulement lorsqu'une question a causé de grandes préoccupations et qu'il y a une forme de consensus qui se dégage sur la nécessité de faire quelque chose à ce sujet.
Un deuxième facteur est la question de la propriété privée. Même si le Canada n'insiste pas autant sur la question que les Américains, en partie grâce à M. Trudeau et à la Charte canadienne des droits et libertés, le gouvernement fédéral au Canada a néanmoins depuis toujours hésité quelque peu à dire aux gens comment gérer leurs biens propres. Il importe peu que ce soit un trait canadien ou que ce soit lié aux conflits de compétence toujours présents, mais le fait demeure que, dans le cas de l'environnement, par exemple, le gouvernement établit des normes nationales qui sont à leur tour appliquées par les gouvernements provinciaux, alors que la question de l'utilisation des terrains est régie par les autorités locales au titre des droits à la propriété et des droits civils. Étant donné toutes ces compétences qui s'affrontent, il est peut-être peu surprenant que rien n'ait jamais été fait.
Un troisième facteur pour expliquer l'absence de multifonctionnalité dans le débat sur la politique publique au Canada réside peut-être chez nos voisins du Sud. Le gouvernement américain est fermement opposé à l'idée, et que nous le voulions ou non, lorsque les Américains ne sont pas satisfaits, nous sommes souvent obligés de faire contre mauvaise fortune bon coeur également, que ce soit dans notre intérêt national ou non.
Le quatrième facteur mais non le moindre réside dans les attitudes et les sentiments des Canadiens. L'un des principaux facteurs derrière la mise en oeuvre du principe de la multifonctionnalité en Europe, c'est la crainte que beaucoup ressentent au sujet de l'exode rural et de la sécurité alimentaire à long terme. Ces questions n'ont jamais été un problème au Canada.
Paradoxalement, un de nos plus grands atouts en tant que pays va à l'encontre de l'élaboration de pressions publiques en faveur de la multifonctionnalité. Je veux parler bien entendu de notre taille. Nous sommes le deuxième pays en étendue sur la planète. Nous avons de grandes étendues d'espaces verts, les plus grandes réserves d'eau douce du monde et d'immenses — peut-être incommensurables — ressources naturelles. Ainsi, les Canadiens ne se sentent pas oppressés contrairement à beaucoup d'homologues européens ou japonais et ils ne voient pas non plus l'urgence de questions comme la sécurité alimentaire. En l'absence de ces insécurités, il y a peu de débats publics, il n'y a aucun consensus et, en fin de compte, aucune pression n'est exercée sur le gouvernement.
De plus, 70 p. 100 de nos citoyens vivent dans des régions urbaines. Notre culture est fondamentalement urbaine et cela se reflète dans nos priorités politiques. La lutte contre la criminalité et la construction de routes passe à chaque fois devant les espaces verts et la conservation et la culture. Cela n'a rien de nouveau. En fait, c'est peut-être un acquis dans n'importe quelle société occidentale moderne, mais cela ne fait pas que les problèmes auxquels les régions rurales font face sont moins réels ou moins importants ou qu'ils n'en méritent pas moins d'être réglés. Après tout, il y a encore 30 p. 100 des Canadiens — plus de 9 millions de personnes — qui se considèrent comme des ruraux. Leurs besoins devraient certes avoir un certain poids.
En ma qualité de propriétaire d'une petite ferme forestière en Nouvelle-Écosse, je peux attester par expérience personnelle des nombreuses difficultés auxquelles font face les ruraux, même en cette ère supposément moderne. En dépit de la croissance et de la diversification récentes de l'économie rurale, nos jeunes continuent de quitter la terre, l'infrastructure cause problème, la valeur des terres chute et les investissements diminuent. Le gouvernement fédéral n'est pas totalement insensible à ces tendances. Je crois comprendre qu'un organisme portant l'appellation de «Secrétariat rural» a été établi pour s'attaquer à certains de ces problèmes, mais les initiatives bureaucratiques de ce genre sont-elles suffisantes? A-t- on vraiment besoin d'une autre étude?
Il nous faut un plus grand nombre de secrétariats ruraux. Il nous faut un plan, ainsi que des solutions. La multifonctionnalité ou quelque chose d'apparenté pourrait contribuer en partie à assurer la viabilité de nos collectivités rurales. Pour certaines des raisons que je viens tout juste d'évoquer, je ne suis pas sûr qu'elle donnerait les résultats escompté si elle prenait la forme d'une politique nationale, mais je ne vois pas pourquoi elle ne pourrait pas être adaptée à divers besoins régionaux dans un cadre global de priorités et d'objectif nationaux.
(Sur la motion du sénateur Gustafson, le débat est ajourné.)
PÊCHES
AUTORISATION AU COMITÉ DE POURSUIVRE L'ÉTUDE DES QUESTIONS LIÉES AUX OCÉANS ET AUX PÊCHES
L'honorable Gerald J. Comeau, conformément à l'avis donné le 30 octobre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des pêches reçoive la permission d'étudier, afin d'en faire rapport, les questions relatives aux océans et aux pêches;
Que les documents et témoignages recueillis par le Comité sur ces mêmes questions au cours de la première session de la trente-septième législature soient renvoyés au Comité;
Que le Comité dépose son rapport final au plus tard le 30 juin 2003; et
Que, nonobstant la pratique habituelle, le Comité soit autorisé à déposer son rapport final auprès du greffier du Sénat si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que le rapport soit réputé avoir été déposé à la Chambre.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, conformément à l'article 30 du Règlement, je demande la permission de modifier ma motion. Avant de lire la motion modifiée, j'aimerais que les pages distribuent la nouvelle motion à chacun des honorables sénateurs.
Son Honneur le Président: Je crois que l'information a maintenant été distribuée.
(1600)
MOTION D'AMENDEMENT
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, la motion modifiée serait désormais ainsi libellée:
Que le Comité sénatorial permanent des pêches reçoive la permission d'étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, les questions relatives aux stocks chevauchants et à l'habitat du poisson;
Que les documents et témoignages recueillis par le Comité sur ces mêmes questions au cours de la première session de la trente-septième législature soient renvoyés au comité; et
Que le Comité dépose son rapport final au plus tard le 31 décembre 2003.
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, si je comprends bien, l'honorable sénateur Comeau nous demande de remplacer la motion actuellement inscrite au Feuilleton par la motion qu'il vient de présenter?
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, la nouvelle motion semble plus limitée ou plus restreinte dans sa portée que celle à l'ordre du jour. Pourquoi?
Le sénateur Comeau: On nous a suggéré que la portée de notre motion originale était trop large. Nous en avons discuté en comité. Le comité était d'accord pour restreindre la portée de la motion originale. La motion que nous présentons maintenant démontre bien le travail que nous devrons effectuer au cours de la prochaine année.
[Traduction]
Son Honneur le Président: Je vais soumettre la question aux sénateurs. Le sénateur Comeau a demandé l'autorisation de supprimer la motion no 31 et de la remplacer par la motion dont il a fourni le texte aujourd'hui aux sénateurs et dont il a donné lecture.
La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Son Honneur le Président: La permission est accordée.
Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de cette motion.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
(La motion modifiée est adoptée.)
SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE
ADOPTION DE LA MOTION AUTORISANT LE COMITÉ À DÉPOSER SON DEUXIÈME RAPPORT AUPRÈS DU GREFFIER DU SÉNAT
L'honorable Colin Kenny, conformément à l'avis donné le 31 octobre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé, nonobstant les pratiques habituelles, à déposer son deuxième rapport, le mardi 12 novembre 2002, auprès du greffier du Sénat, et que ledit rapport soit réputé avoir été déposé au Sénat; et
Qu'au moment de la présentation du rapport, tous les sénateurs en reçoivent une copie électronique et une copie papier à leur bureau.
— Honorables sénateurs, avec votre permission, je voudrais parler brièvement de la motion.
La motion est précise et concerne une seule occurrence. Elle diffère des autres motions présentées jusqu'ici, en ce que ces dernières étaient de nature générale, permettant aux comités de déposer des rapports en l'absence du Sénat.
Quand le comité s'est penché sur cette motion, nous avons étudié de près l'expression «nonobstant les pratiques habituelles». Les pratiques habituelles du Sénat concernent le très important principe voulant que le Sénat soit le maître de tous les comités. Les comités sont subordonnés à la Chambre et ils sont tenus de se conformer à la volonté et aux instructions de la Chambre.
Gardant ce principe à l'esprit, nous avons pensé au contexte habituel quand on parle de pratiques courantes. Normalement, lorsque le Sénat donne à un comité l'ordre ou la directive d'étudier une question, il s'attend à être le premier à avoir des nouvelles de ce comité. Le Sénat s'attend en effet à avoir des nouvelles dans cette enceinte. C'est un principe important qui prévoit que les honorable sénateurs sont les premiers à entendre parler du comité, avant la presse et le public.
Nous avons également examiné les intérêts plus généraux du Sénat. Dans le cas qui nous intéresse, le Sénat n'a pas qu'un seul intérêt. Je soutiens que le Sénat a plusieurs intérêts, mais je fais des observations au moins sur deux de ceux-ci.
Le premier intérêt est d'informer les sénateurs. Les sénateurs n'aiment pas être pris au dépourvu. Personnellement, je n'aime pas être pris au dépourvu quand un rapport est rendu public. Nous ne voulons pas qu'un ami ou qu'un journaliste lance une nouvelle au sujet d'un rapport de comité en affirmant qu'il a été publié dans le journal.
Nous estimons important que les sénateurs soient informés à l'avance. Toutefois, nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire que le rapport soit concrètement déposé sur la table pour que le Sénat soit informé. L'époque où on procédait uniquement de cette façon est révolue. Cette règle remonte vraisemblablement à l'époque où le train était le mode de transport pour venir à Ottawa, où les communications télégraphiques étaient la norme et où le fait de déposer un rapport sur la table était la seule façon pour les sénateurs d'avoir l'assurance d'être informés à l'avance.
Nous avons maintenant d'autres façons de protéger cet intérêt vital qu'ont les sénateurs à connaître à l'avance le contenu d'un rapport. Nous pouvons le faire de biens des façons lorsque le Sénat ne siège pas. Nous pouvons transmettre les rapports par courrier électronique, par télécopieur ou par poste prioritaire. Nous avons essayé de tenir compte de tout cela dans la formulation de la motion.
Il y a certains autres intérêts que je considère importants pour les sénateurs et pour le Sénat. L'un d'entre eux touche au fait que nous devons informer de notre mieux le public sur notre travail.
Je dois avouer que, lorsque je suis arrivé au Sénat, j'ai entendu des sénateurs dire que leur rapport était très valable et que la logique intrinsèque du rapport était irrésistible. Ce qu'ils disaient en fait, c'est que le monde se fraierait un chemin vers notre porte une fois le rapport déposé parce que les arguments qu'il contenait étaient tellement irrésistibles qu'aucun effort n'était nécessaire pour assurer que les gens savaient ce que nous faisions. J'ai d'abord accepté cela. C'était il y a 18 ans et j'étais un peu naïf.
J'en suis toutefois depuis venu à la conclusion que le Sénat n'est pas très bien estimé par tous les Canadiens parce que bon nombre de gens ne savent pas ce que nous faisons. J'ai personnellement décidé de tenter de trouver le plus de façons possible de faire connaître le bon travail qui est réalisé au Sénat et de faire savoir aux Canadiens ce que nous faisons.
Je suis d'avis qu'il est très important pour le Sénat que les gens sachent ce que nous faisons. Nous devons comprendre que nous vivons dans un monde très concurrentiel. Il est très difficile de faire passer les messages. Je ne peux pas voir la tribune d'ici, mais j'ai bien l'impression qu'on pourra me confirmer qu'elle est vide.
(1610)
Le sénateur Day: Il n'y a personne à la tribune.
Le sénateur Kenny: Je dois dire à regret que cela se produit tous les jours. Si nous voulons que le public soit au courant de ce que nous faisons, nous devons faire en sorte qu'il entende parler des travaux du Sénat. Dans tous les travaux auxquels j'ai participé, je me suis efforcé de le faire.
Dans cette motion particulière, j'essaie de tenir compte d'au moins deux intérêts du Sénat: d'abord, protéger tous les honorables sénateurs en les informant du sujet du rapport; ensuite, faire des efforts pour mettre le public au courant. En supposant que le rapport puisse être terminé à temps, sous réserve des difficultés techniques qui peuvent se présenter, nous le déposerons pendant la semaine où les gens penseront à la défense et à nos anciens combattants. C'est le 11 novembre que nous nous souvenons des sacrifices que nos soldats ont faits pour nous. En ce moment, les gens pensent à la défense et la sécurité. En produisant au cours de cette semaine un rapport traitant de la défense, nous toucherions une corde sensible chez les gens. Notre rapport arriverait au bon moment, et ce serait également un bon moment pour s'en occuper. Le fait de publier un rapport qui appuierait ces gens et concorderait avec leurs aspirations et leurs espoirs serait un bon moyen de les honorer.
C'est une proposition ponctuelle présentée avant un ajournement de quelques jours. Le rapport vise les deux intérêts que j'ai décrits, à savoir informer les sénateurs d'avance et veiller à ce que le public comprenne bien le travail que nous faisons.
Honorables sénateurs, je vous demande instamment d'appuyer cette motion.
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ai l'intention de parler du rapport, mais je voudrais en premier poser une question à l'honorable sénateur Kenny.
Le sénateur Kenny a dit que le rapport n'était pas prêt et qu'il y a différentes difficultés techniques à régler. Où en est ce rapport?
Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, le rapport en est aux derniers stades de la correction d'épreuves et de la pagination.
Le sénateur Murray: Y aura-t-il une autre réunion du comité avant le 19 novembre?
Le sénateur Kenny: Le comité ne tiendra pas de réunion, mais il a le pouvoir de s'occuper de ces derniers détails. Le comité a approuvé la substance du rapport en entier. Je peux vous assurer que le dépôt du rapport ne nécessite pas d'autre réunion du comité.
Le sénateur Murray: Autrement dit, à part les difficultés techniques, la seule autre chose dont il faut s'occuper, d'après l'honorable sénateur, est la correction d'épreuves, qui ne porte pas sur des questions de fond. Je suppose que le comité disposait du rapport en entier, dans les deux langues officielles, lorsqu'il l'a adopté.
Le sénateur Kenny: Le comité avait le rapport dans les deux langues officielles, ainsi qu'un rapport me demandant de faire certains changements de nature technique, à savoir la correction d'épreuves et la pagination.
Le sénateur Murray: Le comité était donc saisi du même document dans les deux langues officielles, c'est-à-dire du rapport complet, auquel il ne manquait que la correction d'épreuves que l'honorable sénateur était autorisé à faire.
Le sénateur Kenny: Je dois préciser que le rapport comporte en fait deux documents, un en anglais et un en français.
Le sénateur Murray: Oui, il y a une version anglaise et une version française du même document. À quand cela remonte-t-il? J'ai demandé le procès-verbal de la réunion du comité, mais je l'ai peut- être lu trop rapidement ou j'ai manqué une date. Quoi qu'il en soit, je n'ai pas pu trouver la motion adoptant le rapport et autorisant l'honorable sénateur à faire ce qu'il fait.
Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, je suppose que l'honorable sénateur veut parler du procès-verbal daté du lundi 28 octobre, qui ne mentionne pas les délibérations à huis clos. C'est à ce moment que cela s'est produit, le lundi 28 octobre.
Le sénateur Murray: Je comprends que cette réunion a eu lieu à huis clos et qu'il arrive qu'un comité amorce et complète le processus de rédaction à huis clos. Toutefois, une motion aurait dû être présentée pour que le rapport soit adopté dans les deux langues officielles. Je suppose qu'on a présenté et adopté une motion à cet effet.
Le sénateur Kenny: Le sénateur ne me demande certainement pas d'enfreindre les règles et de rapporter ce qui s'est dit à huis clos, mais je peux lui donner l'assurance que tout a été fait dans les règles. Je ne serais pas ici autrement.
Le sénateur Murray: J'en suis fort aise. Une des explications que quelqu'un d'autre que le président m'a fournie au sujet du délai est que la traduction française n'était pas prête. Le sénateur Kenny, qui est au Sénat depuis pas mal de temps et qui a servi, je me rappelle, au cabinet du premier ministre Trudeau, n'est pas sans connaître l'importance de l'adoption simultanée de ces rapports dans les deux langues officielles au sein des comités.
Honorables sénateurs, comme le sénateur Kenny l'a indiqué, il a été question récemment de l'habitude que semblent prendre les comités de chercher à obtenir une autorisation ou une permission générale de manière à s'éloigner de la tradition et de la coutume de déposer les rapports au Sénat d'abord.
Je me suis opposé à cette pratique, et des motions présentées récemment indiquent que le sénateur Kenny et d'autres préféreraient procéder au cas par cas, comme le sénateur le fait dans le cas qui nous occupe. Il procède de la bonne manière.
(1620)
Je suis tout à fait en désaccord avec certaines observations qu'il a faites cet après-midi. Il parlait des intérêts des honorables sénateurs, de l'intérêt de déposer un rapport de comité en cette enceinte et de l'intérêt de faire parler de nos travaux. Il n'est pas question ici d'intérêts. Il s'agit plutôt des droits et du statut de l'une des chambres du Parlement. Nos pratiques, notre tradition et nos conventions veulent, pour de bonnes raisons, que les comités déposent d'abord leurs rapports à la chambre.
Je salue l'honorable sénateur pour le travail qu'il a déjà accompli dans plusieurs comités dont il a été membre ou qu'il a dirigés et pour l'aptitude qu'il a démontrée à faire connaître les conclusions et le travail de ces comités. Tout cela est très utile. Je ne reconnais pas, cependant, qu'il soit nécessaire de passer outre à des conventions, traditions et règles importantes en cet endroit pour servir une stratégie des médias.
Il est question ici des droits de cet endroit. Dans un cas comme celui-ci, si la stratégie des médias est tellement importante, quels autres droits, prérogatives, conventions et règles accepterons-nous de laisser tomber dans l'intérêt d'une stratégie des médias? Franchement, je pense que nous prenons la stratégie des médias un peu trop au sérieux; je ne veux cependant pas aborder cette question en détail. Nous nous engagerions dans un débat sur le sujet.
Les deux cas dont nous avons récemment été saisis, à savoir le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur le système de soins de santé canadien, et les divers rapports du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, présentés par mon ami, portaient sur des sujets très spécialisés. Ces sujets intéressent beaucoup les médias. Je ne pense pas qu'il soit important que le sénateur Kirby ait déposé son rapport à la chambre un jeudi après- midi et qu'il ait rencontré les médias le vendredi. Le comité et le rapport auraient de toute façon attiré autant l'attention.
Il en va de même du rapport que déposera l'honorable sénateur. Si je demandais à l'honorable sénateur pourquoi il ne peut pas attendre le retour du Sénat, le 19 novembre, il répondrait qu'il suit une stratégie des médias qui permettra d'attirer davantage l'attention sur le document public s'il est déposé pendant une semaine où le Sénat et la Chambre des communes ne siègent pas et qu'aucun autre sujet n'attire l'attention, du moins l'espère-t-il. Cependant, qui sait quels autres sujets d'actualité viendront attirer l'attention des médias ce jour-là ou au cours de cette même semaine?
Honorables sénateurs, quant à la façon de procéder, le sénateur agit de la bonne façon. Il procède au cas par cas. Il a expliqué qu'il agit ainsi parce qu'il espère faire avancer sa stratégie et celle du comité auprès des médias. Cela n'est pas convenable. Cela n'est pas suffisant, à mon avis, pour faire abstraction de la pratique, des conventions, des règles et des droits du Sénat au sujet de ces questions. Par conséquent, je m'oppose à sa motion.
Cela étant dit, je souligne que, en ce moment même, le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement examine cette question et en fera rapport, je l'espère, en temps opportun. Je ne ferais pas valoir cet argument pour empêcher le sénateur de présenter sa motion. Cependant, je le répète, en ce qui concerne le bien-fondé de sa motion et de sa thèse, je n'hésite pas à maintenir ma position, à savoir qu'il faudrait que le Parlement ou l'une des chambres du Parlement se trouvent dans une situation très exceptionnelle pour que nous fassions abstraction d'une convention, d'une tradition, d'un droit ou d'un article du Règlement. À mon avis, dans pratiquement tous les cas, promouvoir une stratégie médiatique ne justifie pas un tel manquement.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Avec dissidence.
(La motion est adoptée avec dissidence.)
AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER PENDANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT
L'honorable Jane Cordy, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé, en conformité avec l'article 95(3) du Règlement, à siéger le lundi 18 novembre 2002, même si le Sénat est ajourné à ce moment pour une période plus longue qu'une semaine.
(La motion est adoptée.)
DROITS DE LA PERSONNE
AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER PENDANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT
L'honorable Shirley Maheu, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé, en conformité avec le paragraphe 95(3) du Règlement, à siéger le lundi 18 novembre 2002, même si le Sénat est ajourné à ce moment-là pendant plus d'une semaine.
(La motion est adoptée.)
AGRICULTURE ET FORÊTS
AUTORISATION AU COMITÉ DE PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS
L'honorable Donald H. Oliver, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et les forêts soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.
(La motion est adoptée.)
AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL
L'honorable Donald H. Oliver, conformément à l'avis du 5 novembre, propose:
Que le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et les forêts soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.
(La motion est adoptée.)
AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES
AUTORISATION AU COMITÉ DE PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS
L'honorable George J. Furey, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit habilité à permettre la couverture de ses audiences publiques par des médias électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.
(La motion est adoptée.)
AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL
L'honorable George J. Furey, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres personnes nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.
(La motion est adoptée.)
[Français]
LANGUES OFFICIELLES
AUTORISATION AU COMITÉ DE PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS
L'honorable Rose-Marie Losier-Cool, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles reçoive la permission de faire téléviser, selon le bon vouloir du comité, les délibérations publiques de ce comité pourvu que ses travaux soient le moins possible dérangés.
(La motion est adoptée.)
[Traduction]
AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL
L'honorable Rose-Marie Losier-Cool, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles reçoive la permission d'embaucher tout conseiller juridique et personnel technique, de bureau ou autre dont le Comité pourrait avoir besoin lors de son étude des projets de loi, de la teneur de ces derniers ou des prévisions budgétaires qui lui ont été déférés.
(La motion est adoptée.)
AFFAIRES ÉTRANGÈRES
AUTORISATION AU COMITÉ DE PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS
L'honorable Peter A. Stollery, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible ses travaux.
(La motion est adoptée.)
AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL
L'honorable Peter A. Stollery, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui ont été renvoyés.
(La motion est adoptée.)
RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT
AUTORISATION AU COMITÉ DE PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS
L'honorable Lorna Milne, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit habilité à permettre le reportage de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, en dérangeant le moins possible ses travaux.
(La motion est adoptée.)
AUTORISATION AU COMITÉ D'ENGAGER DU PERSONNEL
L'honorable Lorna Milne, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur de projets de loi et les prévisions budgétaires qui lui sont déférés.
(La motion est adoptée.)
AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER PENDANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT
L'honorable Lorna Milne, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit autorisé, en conformité avec le paragraphe 95(3) du Règlement, à siéger le lundi 18 novembre 2002, même si le Sénat est ajourné à ce moment-là pendant plus d'une semaine.
MOTIONS D'AMENDEMENT
L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, conformément à l'article 30 du Règlement, je demande l'autorisation de modifier ma motion en ajoutant «et le mardi 19 novembre 2002», après les mots «le lundi 18 novembre».
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
L'honorable Anne C. Cools: J'invoque le Règlement.
Son Honneur le Président: Le sénateur Stratton a-t-il une question?
L'honorable Terry Stratton: Peut-être devrions-nous entendre le rappel au Règlement; je poserai ma question après.
Le sénateur Cools: Je pense avoir entendu le sénateur Milne demander au Sénat l'autorisation de modifier une motion? Je crois comprendre qu'on ne peut modifier une motion par simple autorisation. Si on veut modifier une motion, il faut proposer une motion en ce sens.
Le sénateur Stratton: C'est exact.
Le sénateur Cools: Madame le sénateur Milne demande-t-elle l'autorisation de modifier la motion?
Son Honneur le Président: Madame le sénateur Milne a-t-elle des observations à ce propos?
Le sénateur Milne: Honorables sénateurs, en vertu de l'article 30 du Règlement, un sénateur qui a fait une motion ou une interpellation peut, avec la permission du Sénat, la retirer ou la modifier. Je demande donc la permission du Sénat pour modifier ma motion afin que le comité siège, comme il le fait normalement, mardi matin.
Son Honneur le Président: Pour être absolument certain, je vais poser la question à nouveau. La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Son Honneur le Président: La permission est accordée.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion telle que modifiée par le sénateur Milne?
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, notre côté aura du mal à se rendre à une réunion lundi. Nous siégeons normalement les mardis matin et les mercredis à midi. Mon personnel a discuté avec celui de madame le sénateur Andreychuk, qui est vice-présidente de ce comité. Son bureau n'était pas au courant de cette discussion sur la demande de permission pour siéger le lundi 18 novembre. Nous avons du mal à accepter cela de notre côté car nous ne savons pas si nos membres du comité seront disponibles le lundi. Par ailleurs, nous n'avons reçu aucune explication pouvant justifier la nécessité de siéger lundi alors qu'on peut se rencontrer aux heures habituelles. Le sénateur Andreychuk doit venir de la Saskatchewan et ce n'est pas aussi facile que de voyager depuis Toronto ou Montréal. Les vols venant de l'Ouest sont extrêmement difficiles à réserver et je crois qu'il ne convient pas de demander des rencontres le lundi alors que nous avons deux périodes durant la semaine où nous nous rencontrons normalement. Notre côté ne peut pas appuyer cette motion. Nous appuierons la motion portant rencontre le mardi, mais pas celle qui proposait une rencontre le lundi.
Le sénateur Milne: Honorables sénateurs, tout ce que je peux dire, c'est que la question a été soulevée au comité directeur. Je croyais qu'il était entendu avec madame le sénateur Andreychuk qu'elle en parlerait à son whip comme j'ai moi-même discuté de la question avec mon whip. Je croyais que nous avions convenu de siéger lundi afin de terminer le rapport en cours de préparation.
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, nous ne savons pas si nos collègues seront en mesure d'assister à la séance du comité à cause des déplacements qu'ils doivent effectuer. Je conviens que la question est importante, mais je crois que nous pouvons l'examiner aux heures normales. Il nous faut amender la motion pour changer à mardi.
Le sénateur Milne: Puis-je suggérer d'amender la motion en supprimant la mention du lundi?
Le sénateur Stratton: Oui, je serai d'accord. Je propose une motion à cet effet.
Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix: Sur la motion d'amendement.
Son Honneur le Président: Voulez-vous demander la permission du Sénat ou amender la motion?
Des voix: Amender la motion.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion telle que modifiée par le sénateur Milne?
Des voix: D'accord.
(La motion modifiée est adoptée.)
Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Stratton, avec l'appui de l'honorable sénateur Kinsella, propose: Que la motion soit amendée par suppression des mots «le lundi 18 novembre 2002.»
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion modifiée?
Des voix: D'accord.
(La motion modifiée est adoptée.)
SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE
MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À SE DÉPLACER—AJOURNEMENT DU DÉBAT
L'honorable Joseph A. Day, conformément à l'avis du 5 novembre 2002, propose:
Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé à se déplacer à travers le Canada et à l'étranger aux fins de son enquête.
— Honorables sénateurs, j'ai pensé que cette motion pouvait déroger quelque peu à la procédure habituelle. Les honorables sénateurs méritent qu'on leur explique pourquoi nous la présentons.
Nous nous inspirons du paragraphe 95(1) du Règlement du Sénat, suivant lequel «Un comité particulier peut ajourner ses séances de temps à autre et» — voilà la partie intéressante — «par ordre du Sénat, se transporter d'un lieu à l'autre». Le comité souhaite ajourner à divers endroits, ce qui, bien sûr, signifie qu'il souhaite se transporter d'un lieu à l'autre.
Les mots «à travers le Canada et à l'étranger» figurent dans la motion puisque le comité pourrait devoir se déplacer aux États- Unis. Une motion de ce genre serait normalement présentée après l'examen du budget par le Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration. Ce comité n'a pas reçu notre budget et ne l'a donc pas encore examiné. Je suis conscient, comme l'est notre comité, de la directive 2:08 à l'annexe II du Règlement, concernant les dépenses de fonds, qui précise que:
Un comité n'a le droit de faire aucune dépense spéciale tant que le Sénat n'a pas adopté le rapport visé par la directive 2:06.
(1640)
Cela n'a pas été fait. Nous n'allons pas engager des dépenses, et le Sénat ne devrait pas s'empêcher d'adopter cette motion nous autorisant à nous déplacer tant que nous n'engagerons pas de dépenses. Nous avons l'occasion d'aller visiter, sur l'invitation du ministre de la Défense nationale, les installations de Colorado Springs et du NORAD, ce qui serait extrêmement important pour nous. Comme nous n'avons pas l'intention d'engager des dépenses, nous avons décidé de présenter cette motion.
L'honorable Tommy Banks: À l'appui des propos du sénateur Day, honorables sénateurs, j'ajouterai que le comité a une raison convaincante et catégorique de demander au Sénat d'approuver cette motion pour qu'il puisse notamment aller à Colorado Springs. Les sénateurs se rappelleront que, ces derniers mois, le comité a fait état dans son rapport de l'établissement de ce qu'on appelle le Commandement du Nord des États-Unis. Le fait est que le Commandement du Nord des États-Unis est situé à toutes fins pratiques à Colorado Springs et fonctionne en étroite collaboration avec le centre du commandement du NORAD, qui se trouve aussi là-bas. Ce sont là deux entités distinctes, mais les membres du comité ont très hâte de déterminer quels sont les rapports de proximité et autres entre elles et de renforcer à nouveau l'importance de la souveraineté du Canada dans l'opération.
Pour vous montrer, honorables sénateurs, à quel point la collaboration est étroite et efficace ces dernières années au sein du NORAD, je vous rappellerai que, le 11 septembre 2001, ce sont des officiers canadiens qui étaient en charge des salles de contrôle du NORAD, à Colorado Springs. Ils étaient au commandement de toutes les défenses aériennes de l'Amérique du Nord et de toutes les opérations aériennes en réponse aux événements de cette journée. Cela montre à quel point la collaboration est étroite et efficace au sein du NORAD depuis sa création au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Le comité veut s'assurer qu'il y a une différence claire et distincte entre la décision unilatérale des États-Unis d'établir un commandement du Nord, d'un côté, et les dispositions bilatérales qui existent dans le cadre du NORAD, de l'autre. C'est là une des questions précises que le ministre de la Défense nous a demandé d'examiner. C'est à sa demande, comme l'a dit le sénateur Day, que nous voulons faire ce voyage. Nous aurons peut-être à payer nous- mêmes notre repas du midi ou quelque chose du genre. Ce que je tiens à faire valoir, c'est que les frais de transport et d'hébergement associés à ce voyage ne seront nullement imputés au compte du Sénat.
L'honorable Terry Stratton: C'est une supposition, honorables sénateurs. Dois-je en déduire que le ministère et le ministre de la Défense paieront ce voyage?
Le sénateur Banks: En partie.
Le sénateur Stratton: Le sénateur a dit «en partie». Les États-Unis paient-ils une partie de la note?
Le sénateur Banks: Non, pas à ma connaissance. Je pense que nous séjournerons dans des installations existantes à Colorado Springs. Il y a des installations pour les invités à Colorado Springs pour lesquelles il n'y a pas de coûts, c'est-à-dire pour lesquelles il n'est pas nécessaire de signer un chèque.
Le sénateur Stratton: Qui d'autre paie pour cela? Si le ministre de la Défense n'est pas le seul à payer, qui d'autre paie?
Le sénateur Banks: Le mot clé est «paie», en l'occurrence. Il y a des coûts, par exemple, pour l'hébergement pendant notre séjour à Colorado Springs. Cependant, comme je l'ai dit, il ne s'agit pas de coûts pour lesquels il faut signer un chèque. Sauf erreur, je pense que le transport des membres du comité d'ici à Colorado Springs serait aux frais des Forces canadiennes.
Le sénateur Stratton: Les repas et l'hébergement sont aux frais de qui?
Le sénateur Banks: Du NORAD, je crois, sénateur.
Le sénateur Stratton: Le NORAD est une organisation mixte américano-canadienne, n'est-ce pas?
Le sénateur Banks: C'est exact.
Le sénateur Stratton: Il n'y a pas de conflit d'intérêts?
Le sénateur Banks: Je ne vois pas en quoi il peut y avoir un conflit d'intérêts si un comité chargé d'examiner des questions concernant les Forces canadiennes, entre autres choses, est transporté à l'endroit où les activités ont lieu par les Forces canadiennes.
L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, je voudrais savoir si la date de ce voyage a déjà été arrêtée.
Le sénateur Banks: Elle a été fixée provisoirement parce que les autorités ont demandé aux membres des comités, lorsqu'ils planifient un voyage, d'informer les bureaux de leur whip respectif pour éviter que trop de comités voyagent en même temps. Dorénavant, tous les comités désireux de faire un voyage devront en informer à l'avance les bureaux de leur whip afin de fixer provisoirement les dates de ces voyages et d'éviter qu'ils n'entrent en conflit avec ceux d'autres comités.
Le sénateur Corbin: Quelles sont les dates possibles?
Le sénateur Banks: Je ne sais pas.
Une voix: Cela montre à quel point c'est incertain.
L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Je voudrais poser une question au sénateur Kenny, si le Sénat le permet.
L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, d'abord, il y a eu d'importants précédents. Le gouvernement actuel a établi des précédents où des comités semblables ont été autorisés à se déplacer à bord d'avions des Forces canadiennes. Certains d'entre vous se souviendront du comité mixte qui a été créé en 1993 par le gouvernement et qui a pu se déplacer à bord d'un avion des forces d'un océan à l'autre aux États-Unis, d'un océan à l'autre au Canada, en Europe et dans les Balkans. Soit dit en passant, nous avons pris l'avion pour une réunion au quartier général du NORAD et nous sommes restés là-bas aussi. Le précédent est clairement établi.
En ce qui concerne les coûts, le comité songeait initialement à un voyage à Moose Jaw, à Regina, à Edmonton et à Cold Lake durant la première semaine de décembre. Cela étant dit, nous sommes le 6 novembre et le Sénat ne siégera pas la semaine prochaine. Jusqu'à maintenant, aucun comité, à l'exception du Comité des affaires sociales, n'a eu l'occasion de comparaître devant le Comité de régie interne pour présenter son budget. Le plus tôt que tout comité pourrait comparaître devant le Comité de la régie interne serait durant la semaine de notre retour, le 19 novembre. Ce pourrait être le 19, le 20 ou le 21 novembre, si le Comité de la régie interne est prêt à recevoir les demandes budgétaires. Toutefois, à ce jour, nous n'avons reçu aucune information du Comité de la régie interne selon laquelle celui-ci serait prêt à étudier des demandes budgétaires. Si jamais le comité est prêt à recevoir et à approuver des demandes budgétaires de comités, il faudra quand même que les budgets soient approuvés par le Sénat.
(1650)
Si le comité a de la chance et qu'il peut consulter le Comité de la régie interne, qui doit se réunir le 21 novembre, la question pourrait nous revenir le 26 novembre. Nous pourrions en donner avis ce jour- là et espérer que, le 27 ou le 28 novembre, le Sénat pourrait en fait approuver le budget. Il n'est cependant pas sûr que les choses iront aussi rapidement. En fait, je suis persuadé que le sénateur Stratton se rappellera que, la dernière fois qu'il nous a été présenté, le budget de ce comité n'a pas été adopté en deux jours. Le sénateur Stratton a-t-il bien dit que les dépenses étaient faites à bon escient et qu'elles représentaient une bonne valeur pour les contribuables? Je suis convaincu que le sénateur Stratton a dit quelque chose en ce sens.
Cela dit, ne sachant pas si nous obtiendrions les fonds demandés, nous n'avons pas cru pouvoir retourner une seconde fois à Moose Jaw, Regina, Edmonton et Cold Lake. Nous y étions déjà allés une première fois en août, avant la prorogation; nous avons organisé le déplacement, pris tous les arrangements, mais, quand la prorogation a été annoncée, nous avons dû tout annuler. Nous voulions y retourner, mais nous n'avons pas pu le faire. Bien entendu, n'étant pas certains d'obtenir les fonds nécessaires, nous ne pourrions pas le faire maintenant.
Comme par hasard, l'invitation pour aller à Colorado Springs est venue du ministre de la Défense nationale et du NORAD. C'est une question sur laquelle le comité s'est penché et vient de faire rapport au Sénat. Honorables sénateurs, vous avez été saisis de ce rapport en septembre. Nous avons recommandé des modifications importantes au sujet de la conduite des affaires là-bas. Il semble raisonnable d'avoir l'occasion de voir ce qui se passe.
Nous ne parlons pas de fonds qui sortent de nos poches, nous parlons des fonds qui viennent de Sa Majesté. Toutefois, il faut avouer qu'il est nettement moins cher pour Sa Majesté ou pour les contribuables de payer pour que nous voyagions dans un seul avion plutôt que d'emprunter les lignes aériennes commerciales. Quoi qu'il en soit, les contribuables paient les frais de déplacement. Je suis vraiment curieux de voir où se trouve le conflit d'intérêts, puisque les contribuables paieront de toute façon pour ces déplacements.
Deuxièmement, le gouvernement actuel, cette administration, a non seulement créé un précédent, mais a aussi déjà incité un comité qui étudiait les questions de défense à utiliser des avions de la Défense nationale et a facilité les déplacements du comité. Les personnes qui ont siégé à ce comité, notamment le sénateur Forestall, que je vois dans cette enceinte, ne se sont pas trouvées compromises ou en situation de conflit d'intérêts lorsqu'elles ont pris cet avion. S'il en est, nous avons trouvé que c'était un mode de transport inconfortable et désagréable et que nous étions plutôt défavorables que favorables. En toute franchise, c'est vraiment un faux problème.
Nous pensons que cela servirait les intérêts du Sénat si nous avions l'occasion de voir comment les affaires sont menées là-bas. Les fonds ne seront pas puisés à même le budget du Sénat. Le Sénat aura l'occasion, s'il approuve la motion, de voir la création d'un comité qui se mettra à l'œuvre plus tôt que cela ne serait le cas normalement, car il semble que le processus budgétaire se déroule de telle façon qu'il est peu probable que quiconque au Sénat ait un budget d'exploitation avant février, compte tenu des délais dont j'ai parlé plus tôt. Nous pouvons soit ajourner jusqu'en février, soit poursuivre nos travaux maintenant. C'est à vous d'en décider, honorables sénateurs.
Le sénateur Corbin: Honorables sénateurs, permettez-moi de dire quelques mots. De deux choses l'une: soit vous recherchez un chèque en blanc pour les voyages que fera votre comité aux quatre coins du Canada afin d'examiner diverses questions dans l'avenir, soit vous recherchez aujourd'hui la permission du Sénat d'accepter l'invitation du ministre de la Défense nationale afin d'aller visiter les installations, non pas d'aller tenir des audiences, mais d'aller visiter les installations à Colorado Springs. Par ailleurs, le comité n'a pas besoin de la permission du Sénat. Il n'a besoin que d'accepter l'invitation du ministre de la Défense nationale. Si le comité cherche à obtenir des fonds pour des travaux dans l'avenir, il devrait présenter ce type de demande, à laquelle le Sénat donnerait suite à ce moment-là. Je ne vois pas pourquoi il vous faudrait la permission du Sénat pour faire le type de visite que vous avez décrite.
Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, je veux faire une brève intervention. J'ai eu l'occasion de discuter de cette question avec le sénateur Kenny, et j'ai entendu l'échange de propos. Si on pousse plus loin le principe énoncé ici, cela signifierait que, par exemple, si un comité des affaires étrangères s'était rendu en Europe à bord d'un avion de la Lufthansa et avait pris un bus de l'hôtel à l'aéroport, il pourrait y avoir un conflit d'intérêts. Si un sénateur des États-Unis ou un membre de la Chambre des représentants s'organisait, comme c'est généralement le cas, pour voyager avec le président des États-Unis à bord de l'appareil Air Force One, il y aurait là un conflit d'intérêts entre les deux chambres. Qu'en serait-il si nous utilisions un véhicule qui sert à la Chambre des communes pour nous rendre à l'édifice Victoria?
Honorables sénateurs, il y a une rectitude politique qui est justifiée et il y a une rectitude politique qui n'est pas justifiée.
À partir du moment où l'honorable sénateur nous dit de façon transparente qu'il a reçu une invitation de voyage, j'accepte la proposition du sénateur Corbin. Que le sénateur fasse le voyage. Si le comité décide de ne pas y aller, qu'il ne le fasse pas. Ce sera alors transparent. Ce sera notoire. Il ne s'agit pas, à mon sens, d'un conflit. C'est une question théorique intéressante, mais ce n'est pas un conflit. Si nous disons qu'il y a là conflit, il sera difficile de prendre un crayon de la Chambre des communes et de s'en servir pour écrire.
Le sénateur Kenny a fait de l'excellent de travail au nom du Sénat au cours de la dernière année, comme tous les autres membres de ce comité. Essayer de le prendre en défaut sur des questions aussi insignifiantes jette sur le Sénat le genre de discrédit qu'aucun sénateur n'acceptera, j'en suis certain.
Le sénateur Stratton: Honorables sénateur, je crois que c'est aller un peu trop loin. C'était une question légitime. J'étais satisfait de la réponse. Les sénateurs sont allés trop loin en faisant des insinuations sur le bien-fondé de ma question concernant l'existence possible d'un conflit. C'était une question légitime. Si le sénateur est disposé à répondre qu'il n'y a pas de conflit, j'accepterai cette réponse. Je crois qu'il aurait dû comprendre cela avant d'intervenir.
Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, je ne voulais aucunement manquer de respect envers le sénateur. J'écoutais la discussion et espérais pouvoir y participer. S'il a interprété n'importe quelle de mes remarques comme un manque de respect ou comme une tentative en vue de l'empêcher de présenter ses arguments, je suis prêt à retirer mes paroles.
L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, ce qui arrive, en gros, c'est que la résolution ou la motion pourrait finir par ressembler à un chèque en blanc. Le sénateur Kenny ne pourrait-il pas préciser une date, même un mois — le mois de décembre, par exemple — au lieu de demander au Sénat la permission de voyager n'importe où quand il le voudra?
Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, en toute justice, ce n'est pas ma motion. On m'a posé une question. Le Sénat doit nous donner des fonds pour voyager où que ce soit, sans quoi nous ne pouvons pas voyager. Une date est superflue parce que, sans les fonds et la motion connexe, nous ne pourrions pas voyager même si nous le voulions.
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, la motion dont nous sommes saisis me porte à me poser beaucoup de questions sur le Règlement du Sénat. Comment un comité obtient-il la permission de se déplacer? Comment un comité peut-il engager certaines dépenses ordinaires ou spéciales? Je ne me sens pas prêt à me prononcer. Je voudrais proposer que la suite du débat sur cette motion soit reportée à la prochaine séance.
(1700)
L'honourable Rose-Maire Losier-Cool (Son Honneur la Présidente suppléante): Honorables sénateurs, la motion du sénateur Robichaud était-elle une motion d'ajournement?
Le sénateur Robichaud: Exactement, j'ai proposé que la suite du débat sur cette motion soit reportée à la prochaine séance du Sénat.
[Traduction]
L'honorable Anne C. Cools: J'invoque le Règlement. J'exhorte Son Honneur à regarder dans le fond de la Chambre parfois. Elle verra alors des sénateurs qui espèrent avoir l'occasion d'obtenir la parole.
Honorables sénateurs, je voudrais obtenir des éclaircissements avant que le débat ne soit ajourné. La question n'a pas été mise aux voix et ainsi, mon intervention est opportune.
Le sénateur Kenny devrait savoir qu'un grand nombre de sénateurs ici sont fiers du travail remarquable qu'il a effectué au sein de ce comité. Beaucoup d'entre nous ont la plus grande estime pour ce travail.
Il semble être clair que la demande est quelque peu inhabituelle, mais il n'y a aucun conflit d'intérêts ni aucune autre forme de conflit. En fait, je dirais que la demande va tout à fait dans le sens du mandat du comité du sénateur Kenny. Elle est également conforme au type de travail de qualité qui a été effectué. J'inclurais également le sénateur Day dans ces observations.
La motion demande au Sénat d'autoriser le Comité de la sécurité nationale et de la défense à se déplacer à travers le Canada et à l'étranger aux fins de son enquête. Nous devrions comprendre que le sénateur Kenny ne demande pas à dépenser de l'argent et que sa demande n'entraînera pas de dépenses. Le comité demande que le Sénat approuve sa volonté, si on peut dire, d'accepter une invitation spéciale inhabituelle du ministre de la Défense nationale et des responsables du NORAD à Colorado Springs, aux États-Unis.
Je voudrais ajouter à cette requête. Le sénateur Grafstein et d'autres sénateurs affirment que le comité n'a peut-être pas besoin de l'autorisation du Sénat pour accepter une telle invitation. Le comité pourrait simplement aller là-bas.
Cependant, notre chambre devrait comprendre que le sénateur Kenny est une personne extrêmement consciencieuse. L'autorisation qu'il cherche à obtenir, c'est que le comité puisse agir en tant que comité, en d'autres termes qu'il puisse se former en comité dans le cadre de ces déplacements. Or, cette autorisation doit être demandée à notre chambre.
De nombreux sénateurs ne le savent peut-être pas, mais le paragraphe 95(1) du Règlement est ainsi libellé:
Un comité particulier peut ajourner ses séances de temps à autre et, par ordre du Sénat, se transporter d'un lieu à l'autre.
Cette disposition précise que le comité «peut ajourner ses séances de temps à autre». Cela signifie que le comité peut agir et s'occuper de ses travaux en tant que comité, c'est-à-dire en tenant au besoin des audiences et des dossiers appropriés. Autrement dit, le comité peut agir en comité, et non comme un groupe de personnes qui voyagent ensemble.
L'argument du conflit d'intérêts est un peu usé. De toute évidence, il n'y a là aucun conflit. Dans mon esprit, c'est tout à l'honneur de ce comité particulier, du sénateur Day, du sénateur Kenny et du sénateur Banks d'avoir reçu cette invitation du ministre de la Défense nationale et du NORAD.
Nous devrions considérer cela comme une occasion pour le Sénat et les sénateurs d'étendre leur horizon et leurs capacités. Le Sénat devrait chaudement féliciter le sénateur Kenny et le sénateur Day pour cette initiative particulière.
On peut entendre le sénateur Smith dire derrière moi: «Un peuple sans idéal est un peuple qui doit mourir.»
Un comité sénatorial demande au Sénat la permission d'agir et de se comporter en comité et d'être reçu comme tel aux États-Unis.
Si l'inquiétude est si grande, il suffirait d'ajouter à la motion une précision du genre «Si la Chambre y consent...» pour autoriser le comité à accepter une invitation particulière ou pour limiter ses pouvoirs. Nous pouvons dire, en toute honnêteté et avec une grande certitude, qu'une autorisation particulière est demandée dans des conditions particulières pour répondre à des invitations particulières à aller à un endroit particulier des États-Unis.
Pour ma part, je dis bravo et tant mieux pour le sénateur Kenny et le sénateur Day!
Son Honneur la Présidente suppléante: Sénateur Cools, le Bureau m'informe que vous vous êtes levée avant le sénateur Robichaud.
La Chambre est saisie d'une motion d'ajournement.
Sénateur Kenny, avez-vous une question à poser? Nous ne pouvons pas débattre une motion d'ajournement.
Le sénateur Kenny: Je ne souhaite pas participer au débat, je veux tout simplement poser une question.
Son Honneur la Présidente suppléante: Le sénateur Kenny veut poser une question au sénateur Robichaud. La permission est-elle accordée? Sénateur Robichaud, acceptez-vous de répondre à une question?
[Français]
Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, je viens de proposer une motion pour que la suite du débat soit reportée à demain afin que nous disposions d'un peu de temps pour considérer cette motion qui a été proposée aujourd'hui. Elle pose certaines questions au sujet du Règlement du Sénat. Ma motion est là, elle ne peut pas être débattue. On aura la chance d'y revenir demain.
[Traduction]
Son Honneur la Présidente suppléante: Il est proposé par l'honorable sénateur Robichaud, avec l'appui de l'honorable sénateur Milne, que le débat sur la motion soit ajourné à la prochaine séance du Sénat.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente suppléante: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Son Honneur la Présidente suppléante: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente suppléante: À mon avis, les oui l'emportent.
(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné, avec dissidence.)
(Le Sénat s'ajourne au jeudi 7 novembre 2002, à 13 h 30.)