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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 37

Le mardi 25 février 2003
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le mardi 25 février 2003

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LES JEUX D'HIVER DU CANADA 2003

L'honorable Viola Léger: Honorables sénateurs, j'ai eu le plaisir d'assister à l'ouverture officielle des Jeux d'hiver du Canada 2003, à Bathurst-Campbellton, au Nouveau-Brunswick. Ces deux régions voisines du nord du Nouveau-Brunswick, situées sur la rive sud de la baie des Chaleurs, sont un véritable microcosme du Canada bilingue. Plus de la moitié des résidents peuvent s'exprimer dans les deux langues officielles du Canada et la culture et la langue de la nation mi'kmaq sont toujours bien vivantes au sein de la communauté.

[Traduction]

Cet événement sportif multidisciplinaire, qui se tient du 22 février au 8 mars, est le plus important au pays. Environ 3 200 athlètes et entraîneurs, en provenance de 10 provinces et de 3 territoires, sont attendus aux Jeux d'hiver du Canada de 2003. On y a réservé un accueil spécial au territoire du Nunavut, qui participe pour la première fois.

En tout, 21 disciplines sportives sont inscrites au programme. Pour la première fois de l'histoire des jeux, des olympiens spéciaux seront présents. Ils concourront en patinage artistique individuel.

Honorables sénateurs, près de 5 000 bénévoles ont été recrutés pour assurer le succès des jeux.

Au Pavillon du Canada, tous les visiteurs sont invités à participer à la création d'un artéfact culturel unique: un totem de neuf mètres sculpté dans un tronc de cèdre en provenance de Colombie- Britannique. Il est prévu que le projet se rende dans 14 foires commerciales et autres manifestations au Canada. À ce jour, plus de 150 000 personnes ont sculpté une portion de ce mât héraldique traditionnel typique de la première nation haida. Une fois terminé, le totem sera exposé de façon permanente.

[Français]

Samedi dernier, la cérémonie d'ouverture des Jeux d'hiver du Canada 2003 était riche en couleurs pour souligner la magie de l'hiver et la diversité culturelle de notre pays. Le premier ministre du Canada y était présent et a déclaré que les athlètes participant à ces jeux incarneront pour nous les valeurs de respect, de discipline et de franc-jeu dans la victoire comme dans la défaite. Un sentiment de fierté anime toute la communauté de la baie des Chaleurs.

On entend souvent dire que les jeunes d'aujourd'hui n'ont pas d'ambition, qu'ils manquent d'énergie, mais ce n'est pas ce qui s'est passé samedi après-midi. Tout le monde avait le coeur à la fête. Que c'est beau de voir tous ces jeunes revêtus de leurs atours colorés scander des slogans rassembleurs, fraterniser, s'amuser, vivre l'émotion et l'intensité du sport dans ce qu'il a de plus amateur et de plus pur!

Les sourires victorieux que vous verrez n'ont rien à voir avec l'argent, la gloire ou les commanditaires. Ces sourires sont l'expression du bonheur dans sa plus simple expression, le bonheur de l'athlète qui a atteint l'objectif qu'il s'était fixé, le bonheur de l'athlète qui a dépassé ses limites uniquement par passion, le bonheur de l'athlète pour qui l'effort a véritablement payé. Bravo et longue vie aux Jeux d'hiver du Canada!

[Traduction]

Avant de terminer, permettez-moi de rester fidèle à ma tradition. J'aimerais vous réciter deux petits poèmes.

Son Honneur le Président: J'aimerais beaucoup les écouter, mais je regrette de devoir prévenir l'honorable sénateur que son temps de parole est écoulé.

L'honorable John G. Bryden: Je propose que la limite de temps ne soit pas observée en l'occurrence.

Son Honneur le Président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Léger: Honorables sénateurs, le premier poème est de Thompson Hughes.

Ratissez le sable de vos yeuxet recueillez-le dans un sablierpour que, allongé et éveillé, vous comptiezchaque minute liquide qui s'écoule des heures comme d'un robinet, goutte-à-goutte,chaque heure fondue tombéede la lune telle la chandelle dont la lueurillumine votre chambre, l'horrible vacarme du silence résonne comme du grésilcontre votre fenêtregronde comme les vagues de l'Atlantique Norddéferlant dans le vide caverneuxque jadis remplissaitle rythme lent et placidedu souffle d'un autre dormeur.

[Français]

Sculpture, par Albert Roy:

Je bâtiraiune sculpture qui chantera la descente des grands pins sur la Saint-Jean Je ranimeraiune sculpture qui sera comme le souffle chaud de nos forges rallumées par la vitalité de nos grands-pèresune sculpture qui endiguera les légendes sorties du lit de notre rivièreUne sculpture qui parlera de l'amour du vent de l'amour de la terre je découvrirai un oiseau qui creusera des sillons où les rêves déposeront les semences d'un monde d'égalité.

[Traduction]

LE TOURNOI DE COEURS DE SCOTT

FÉLICITATIONS AUX CHAMPIONNES

L'honorable Jane Cordy: Honorables sénateurs, les éliminatoires de curling du tournoi de coeurs de Scott ont eu lieu ce dernier week-end à Kitchener, en Ontario. Pour la toute première fois, les deux finalistes étaient du Canada atlantique. En fait, les trois premières équipes venaient de cette région. L'équipe qui s'est classée deuxième venait de Terre-Neuve et était dirigée par Cathy Cunningham, qui a joué une excellente partie de championnat. La troisième équipe, qui a fini le tournoi à la ronde en tête de liste, était formée d'un groupe exceptionnel de jeunes femmes de l'Île-du-Prince-Édouard, dirigées par Susan Gaudet, ancienne championne junior du Canada et du monde. Je suis sûre que nous continuerons à entendre parler de cette équipe à l'avenir. Je voudrais féliciter ces équipes pour leurs performances.

(1410)

Honorables sénateurs, venant moi-même de la Nouvelle-Écosse, je suis enchantée de vous parler cet après-midi des athlètes exceptionnelles de ma province natale, l'équipe féminine championne du Mayflower Curling Club de Halifax formée de Colleen Jones, Kim Kelly, Mary Ann Waye, Nancy Delehunt et Laine Peters. L'équipe de Colleen Jones a gagné son troisième championnat canadien consécutif dimanche. C'était aussi son quatrième en cinq ans. C'est seulement la deuxième fois dans l'histoire du curling féminin qu'une équipe gagne trois championnats canadiens consécutifs et la première fois qu'une même équipe remporte quatre fois le titre Scott.

Colleen Jones a ainsi remporté cinq championnats féminins, soit plus que n'importe quelle autre capitaine. Elle avait remporté son premier championnat il y a 21 ans, en 1982, à l'âge de 22 ans. Pour ce qui est de Kim Kelly, c'est son deuxième championnat canadien cette année. Elle était membre de l'équipe mixte de curling de la Nouvelle-Écosse, représentant également le Mayflower Curling Club de Halifax, sous la direction de Paul Flemming. Cette équipe avait remporté le championnat mixte canadien de curling à Abbotsford, en Colombie-Britannique, en janvier.

Le Daily News de Halifax a parlé de l'équipe Jones comme d'une dynastie du curling. C'est en effet une équipe extraordinaire qui domine la scène du curling féminin au Canada. Elle représentera le Canada aux championnats mondiaux à Winnipeg, en avril. Je suis sûre que tous les sénateurs voudront se joindre à moi pour souhaiter bonne chance à l'Équipe Canada.

Au sujet du curling, honorables sénateurs, je voudrais vous inviter au Nokia Brier, qui commence à Halifax le week-end prochain. Cette invitation s'accompagne d'une garantie de chaude hospitalité de la Nouvelle-Écosse au Brier Patch.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

LE BUDGET DE 2003

DÉPÔT DE DOCUMENTS

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les documents suivants: un avis de motion des voies et moyens visant à modifier la Loi sur l'impôt et le revenu; un avis de motion des voies et moyens visant à modifier la Loi sur la taxe d'accise; un avis de motion des voies et moyens visant à modifier le Tarif des douanes, la Loi sur la taxe d'accise et la Loi de 2001 sur l'accise; le Discours du Budget; le Budget en bref; un document intitulé «Investir dans le système canadien des soins de santé, améliorer la reddition des comptes et la gestion des dépenses et le plan budgétaire de 2003».

[Traduction]

LA DÉLÉGATION DU SÉNAT EN RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

14-21 OCTOBRE 2002—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Dan Hays: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, j'ai honneur de déposer le rapport de la délégation conduite par le Président du Sénat, qui s'est rendue en République tchèque du 14 au 21 octobre 2002.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

[Français]

LA DÉLÉGATION DU SÉNAT EN ESPAGNE

21-25 OCTOBRE 2002—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Dan Hays: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la délégation conduite par le Président du Sénat, qui s'est rendue en Espagne du 21 au 25 octobre 2002.

[Traduction]

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

[Français]

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

PRÉSENTATION DU DIXIÈME RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Lise Bacon, présidente du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le mardi 25 février 2003

Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

DIXIÈME RAPPORT

Votre Comité recommande que les fonds additionnels suivants soient débloqués pour l'année fiscale 2002-2003:

Peuples autochtones (Étude spéciale relativement aux jeunes Autochtones en milieu urbain)

Services professionnels et autres    5 000 $
Transports et communications    0 $
Autres dépenses            0 $
Total    5 000 $

Banques et commerce (Étude spéciale relativement à la situation actuelle du régime financier)

Services professionnels et autres      0 $
Transports et communications      22 700 $
Autres dépenses               0 $
Total     22 700 $

Énergie, environnement et ressources naturelles (Étude spéciale relativement à son mandat)

Services professionnels et autres    0 $
Transports et communications    24 900 $
Autres dépenses             0 $
Total    24 900 $

Sécurité nationale et de la défense (Étude spéciale sur la nécessité d'une politique nationale)

Services professionnels et autres    20 000 $
Transports et communications    24 000 $
Autres dépenses             0 $
Total    44 000 $

La présidente,
LISE BACON

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons- nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Bacon, nonobstant l'article 58(1)g) du Règlement, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour plus tard aujourd'hui.)

[Traduction]

BANQUES ET COMMERCE

PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ CHARGÉ D'ÉTUDIER LA QUESTION DE PRIVILÈGE CONCERNANT LA DIVULGATION PRÉMATURÉE DU RAPPORT
SUR LES CONSÉQUENCES DES FUSIONS DE BANQUES POUR L'INTÉRÊT PUBLIC

L'honorable E. Leo Kolber, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:

Le mardi 25 février 2003

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de déposer son

SEPTIÈME RAPPORT

Conformément à l'annexe IV du Règlement du Sénat, votre comité a le plaisir de faire rapport sur la question de privilège soulevée par l'honorable sénateur Kolber.

Le jeudi 12 décembre 2002, le sénateur Kolber, conformément à l'article 43 du Règlement, a déposé un avis écrit et il a soulevé par la suite une question de privilège au Sénat. La question de privilège concernait la divulgation prématurée du rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce sur les conséquences des fusions de grandes banques pour l'intérêt public. Il faisait référence à trois articles — le premier distribué le jour précédent par l'agence Reuters et les deux autres publiés par The Globe and Mail et le National Post le matin où le rapport a été déposé. Après les interventions des sénateurs John Lynch-Staunton, Noël A. Kinsella, Richard H. Kroft, Anne C. Cools, Lowell Murray et Jack Austin, le Président a jugé qu'il y avait question de privilège fondée de prime abord.

Votre comité s'est réuni le mercredi 5 février 2003 pour étudier la question de privilège soulevée par le sénateur Kolber. Le comité a discuté de la fuite présumée et de la question de privilège avant de décider qu'il était inutile d'entendre des témoins.

Par ailleurs, votre comité est d'avis qu'aucune autre mesure n'est nécessaire, sauf de rappeler aux sénateurs et au personnel qu'ils doivent préserver la confidentialité et d'établir des procédures de sécurité pour empêcher la répétition d'une telle atteinte au privilège. Il faut parvenir à un équilibre entre, d'une part, notre désir d'ouverture et de transparence et, d'autre part, le droit des sénateurs de discuter librement des questions qui leur sont soumises sans craindre de voir leurs observations dans les journaux le lendemain. Les sénateurs devraient faire preuve de prudence lorsqu'ils discutent du travail des comités avec les médias afin de ne pas dévoiler, par inadvertance, des renseignements que le Sénat est en droit d'entendre en premier ou de compromettre les recommandations éventuelles du comité.

Respectueusement soumis,

Le président,
E. LEO KOLBER

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons- nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Kolber, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

PROJET DE LOI SUR LE JOUR DE LA BATAILLE DE VIMY

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-227, Loi instituant une journée nationale de commémoration de la bataille de la crête de Vimy.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Poulin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

(1420)

LE BUDGET DE 2003

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 18 mars 2003:

J'attirerai l'attention du Sénat sur le budget présenté par le ministre des Finances à la Chambre des communes le 18 février 2003.

[Français]

LA DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE AU ROYAUME DU MAROC

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, je donne avis que jeudi prochain, le 27 février 2003:

J'attirerai l'attention du Sénat sur la visite qu'une délégation parlementaire du Sénat et de la Chambre des communes a effectuée, sur invitation du roi, au Royaume du Maroc, du 19 au 26 janvier 2003, pour discuter du commerce, des droits, de l'égalité et d'autres questions.

[Traduction]

BANQUES ET COMMERCE

AVIS DE MOTION

L'honorable E. Leo Kolber: Honorables sénateurs, je donne avis que, lors de la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, autorisé à étudier l'application de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, soit habilité à s'ajourner d'un lieu à l'autre au Canada et de voyager à l'intérieur et à l'extérieur du Canada aux fins de ses travaux.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LA DÉFENSE NATIONALE

LES RÉDUCTIONS DES SUBVENTIONS AUX ASSOCIATIONS MILITAIRES

L'honorable J. Michael Forrestall: L'autre jour, honorables sénateurs, j'ai adressé des observations et une question à madame le leader du gouvernement au Sénat au sujet des réductions dans le financement accordé à la Fédération des instituts militaires et interarmées du Canada. Si on en croit les médias ce matin, la Conférence des associations de la défense subira des réductions de quelque 25 p. 100 cette année et verra ses subventions supprimées totalement l'année prochaine. Madame le leader du gouvernement au Sénat a eu la bonté de me dire, car ce n'était pas une question directe, que cela s'expliquait peut-être par le fait que ces associations ne sont pas conformes à la description de base. Je la remercie de son explication.

Nous avons maintenant un fait nouveau. Je ne vois rien en ce qui concerne les subventions du même ministère à l'Institut canadien des affaires internationale. Je me demande pourquoi deux associations militaires, qui existent depuis si longtemps, dont peu d'entre nous peuvent se rappeler la création, ont été choisies. Le sénateur Graham saura, en tant que premier maître à la retraite, quand elles ont été créées. Peut-on nous expliquer pourquoi ces deux institutions ont subi des coupes sombres, mais pas la troisième?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): La Conférence des associations de la défense n'a pas vu ses subventions supprimées immédiatement, comme l'honorable sénateur le sait. Elle va recevoir 50 000 $ cette année et rien l'année suivante. Cette association compte 600 000 membres et elle a un budget d'à peine 150 000 $ pour ses activités de base. Il semblerait raisonnable qu'elle puisse percevoir beaucoup plus que 150 000 $. Grâce à une toute petite cotisation de 1 $, elle pourrait percevoir environ quatre fois son budget actuel.

Le sénateur Forrestall: La réponse concernant l'autonomie financière d'une association est un peu différente de celle qui s'applique aux Instituts interarmées, au sujet desquels madame le ministre a eu la bonté de nous préciser qu'ils sont probablement visés du fait qu'ils ne sont pas conformes aux objectifs de base. Madame le ministre prétend-elle que la Conférence des associations de la défense n'est pas non plus conforme?

Ces deux institutions, honorables sénateurs, remontent au début des années 30. Elles ont joui d'un soutien ininterrompu, malgré le point de vue de ceux qui les rejettent en disant qu'il s'agit simplement d'une bande de généraux à la retraite. Malgré cela, la Conférence des associations de la défense, les Instituts interarmées et d'autres organisations qui soutiennent nos militaires ont de tout temps rendu au Canada et à ses forces armées de grands services.

Est-ce une situation permanente? Cette année, une de ces organisations ne reçoit pas de subvention et l'autre ne recevra que 50 000 $ ou 75 000 $ et ne touchera rien l'année prochaine. Doit-on considérer ces coupes comme permanentes et définitives et en déduire que les subventions ne seront pas rétablies ultérieurement?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, c'est assez clair, ces compressions sont définitives. Elles sont liées au processus que l'honorable ministre de la Défense, John McCallum, a mis en oeuvre pour réduire les coûts afin de maintenir et d'améliorer la capacité opérationnelle de son ministère. Le ministre a clairement dit qu'il avait besoin de 800 millions de dollars. C'est le montant qui lui a été alloué dans le budget. Il a même reçu 275 millions de dollars de plus afin que les crédits à venir ne servent pas à payer des dépenses passées. Le ministre a également indiqué ouvertement en public que, s'il examinait attentivement le budget, il pourrait trouver le moyen d'économiser 200 millions de dollars.

Le sénateur Forrestall: Si chaque mesure d'économie lui rapporte 25 000 $, je lui souhaite bon courage.

LE CABINET DU PREMIER MINISTRE

LE COÛT DE LA RECHERCHE D'UN TITRE POUR LE DISCOURS DU TRÔNE

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information a révélé que le gouvernement a dépensé 33 000 $ pour charger un groupe de consultation de trouver un titre approprié au discours du Trône. Le titre proposé est «Le Canada que l'on veut».

En premier lieu, j'aimerais savoir pourquoi on ne s'est pas simplement contenté de parler de «discours du Trône» comme tout le monde le fait, ce qui aurait permis d'économiser 33 000 $ de l'argent des contribuables?

En deuxième lieu, j'ai une question concernant le budget. En ajoutant un mot au titre «Le Canada que l'on veut», on a créé le titre du budget qui est «Bâtir le Canada que nous souhaitons». L'ajout de ce mot a nécessité l'intervention d'un autre groupe de consultation et on a effectué une nouvelle recherche sur l'opinion publique. D'après ce gouvernement, quel est le prix d'un verbe?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, pour autant que je sache, le gouvernement n'a pas fait appel à un autre groupe de consultation. Le mot «bâtir» a été ajouté parce que le dernier discours du Trône, comme tous les discours du Trône précédents, constitue un énoncé des principes fondamentaux que prône le gouvernement. Or, le budget fournit les éléments permettant de concrétiser cet engagement.

LES NATIONS UNIES

LES INITIATIVES POUR ÉVITER UNE GUERRE AVEC L'IRAK

L'honorable Douglas Roche: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Madame le ministre pourrait-elle nous donner des détails sur le plan devant permettre de prévenir une guerre en Irak que l'ambassadeur du Canada auprès des Nations Unies, M. Paul Heinbecker, a présenté aujourd'hui au Conseil de sécurité? Je pose la question, car cette crise pourrait faire connaître son heure de gloire aux Nations Unies, si la guerre pouvait être évitée. Jamais affrontement diplomatique n'a été aussi intense, à ma connaissance, aux Nations Unies. Il est possible de jeter un pont entre la position des États-Unis et de la Grande-Bretagne, d'une part, et celle de la France, de l'Allemagne et de la Russie, de l'autre, et il s'impose de le faire. Le premier ministre, M. Chrétien, et le ministre des Affaires étrangères, M. Graham, comprennent la nécessité d'un tel pont, et il convient de les féliciter d'essayer de jeter ce pont. Madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle renseigner le Sénat sur les mesures que prend actuellement le Canada?

(1430)

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, soyons clairs: le gouvernement canadien n'a aucun plan ou projet précis. Le gouvernement échange des idées en partant du principe que ce qui importe par-dessus tout, c'est de préserver l'unité de la communauté internationale tendant vers un objectif commun. Voilà l'objet central de notre travail aux Nations Unies, maintenant et dans l'avenir. Nous appuyons fermement la résolution 1441, selon laquelle l'Irak doit respecter ses obligations. Nous estimons en outre qu'il faut absolument que, dans la mesure du possible, les Nations Unies présentent un front uni.

Le sénateur Roche: Je remercie madame le ministre de sa réponse. J'aimerais qu'elle donne ultérieurement, un autre jour, si elle le peut, des précisions au sujet de l'intervention que le Canada fait aux Nations Unies aujourd'hui.

L'IRAK—LE RESPECT DE LA RÉSOLUTION 1441

L'honorable Douglas Roche: Hans Blix, chef inspecteur des Nations Unies, a dit que l'Irak avait montré de nouveaux signes de coopération manifeste dans le processus d'inspection au cours des derniers jours. Il a aussi fixé au 1er mars le délai pour le début du désarmement des missiles Al Samoud 2.

Si l'Irak respecte ce délai, est-ce que le gouvernement du Canada verra cela comme un pas dans la voie du respect de la résolution 1441 et estimera-t-il que les inspections devraient se poursuivre, comme la France, l'Allemagne et la Russie le veulent?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le monde entier accueille favorablement les nouvelles de M. Blix voulant qu'il y ait eu de nouveaux signes de coopération. Il n'en demeure pas moins que le gouvernement irakien est soumis à un délai serré. Il a été sommé de détruire ses missiles, lesquels, apparemment, ont une portée au-delà des limites prévues par les Nations Unies. Il a été sommé de commencer la destruction de ses missiles d'ici le 1er mars, et il a jusqu'au 7 mars pour terminer cette opération. Je crois comprendre que l'Irak soutient que ses missiles ne contreviennent pas aux critères imposés bien qu'il n'ait pas refusé catégoriquement de les détruire.

La position du gouvernement canadien est que l'Irak doit répondre aux exigences des Nations Unies, et chaque pas dans cette voie est positif.

LES ANCIENS COMBATTANTS

L'ACCÈS DES ANCIENS COMBATTANTS MÉTIS DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE ET DE LA GUERRE DE CORÉE AUX PRESTATIONS DE RÉADAPTATION

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, le gouvernement fédéral a offert récemment une indemnisation aux anciens combattants des Premières nations à qui on avait refusé des prestations de réadaptation après leur retour de la guerre. Les Métis, eux, n'ont pas eu accès à ce programme d'indemnisation.

Les anciens combattants métis soutiennent que le programme de réadaptation du gouvernement, la Charte des anciens combattants à l'époque, ne prévoyait pas de mesures d'aide adéquates à leur égard. Par exemple, la plupart des anciens combattants métis ne pouvaient pas accéder aux programmes de logement du fait que de tels programmes n'étaient offerts qu'en milieu urbain. Par ailleurs, les programmes de formation ne tenaient pas compte du fait que, avant de s'engager dans les forces armées, les Métis n'avaient peut-être pas le niveau d'éducation qui leur permettrait d'entrer à l'université après la guerre.

Pour obtenir les sommes auxquelles ils croient avoir droit, ces anciens combattants ont lancé une campagne qui vise à faire honte au gouvernement dans le but de le forcer à les indemniser pour les efforts qu'ils ont consentis au nom de notre pays au cours de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée.

En juillet dernier, le Conseil national des associations d'anciens combattants a déposé une demande au Comité des droits de l'homme des Nations Unies au nom des anciens combattants métis à qui l'on n'avait pas versé d'indemnités. Ce mois-ci, la National Metis Veterans Association a annoncé qu'elle présenterait cette situation au monde entier, plaidant la cause des soldats autochtones dans les pays d'Europe où ces derniers ont combattu.

Honorables sénateurs, compte tenu du peu d'enthousiasme dont le gouvernement fait preuve pour apporter une aide adéquate aux militaires actuellement en opération, il est triste, mais peut-être pas réellement étonnant, de constater qu'il traite nos anciens combattants de cette façon.

Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le gouvernement compte-t-il faire ce qui s'impose et offrir aux anciens combattants métis l'indemnité auxquels ils ont droit avant que cette demande n'aille plus loin, et plus important encore peut-être, avant que plus de ces gens meurent sans que cette affaire n'ait été résolue?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur affirme au début de sa question portant sur les Métis que les anciens combattants autochtones ont été indemnisés pour leurs efforts. J'aimerais croire que les nombreux rapports qui ont été préparés par le Sénat préconisant la résolution de cette affaire ont favorisé ce résultat. Je pense tout particulièrement à l'ancien sénateur Len Marchand, qui a travaillé avec assiduité à ce dossier.

Pour ce qui est des Métis, l'étude préliminaire qui a été effectuée dans ce dossier a déterminé qu'ils avaient eu droit à ces indemnités. Toutefois, le gouvernement reconnaît que certains Métis affirment aujourd'hui qu'en raison de l'endroit où ils vivaient, il n'ont pas obtenu toutes les indemnités. Cette question est présentement à l'étude.

LA JUSTICE

LE PROGRAMME DES ARMES À FEU—LE STATUT DE PROJET DE L'ÉTAT

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le sous-ministre de la Justice a reconnu hier devant un comité de la Chambre des communes que l'on aurait pu communiquer davantage de renseignements sur le programme fédéral des armes à feu.

Aujourd'hui, la vérificatrice générale a fait savoir que le ministère de la Justice avait l'obligation de communiquer davantage de détails sur les dépenses effectuées. Le Conseil du Trésor a établi des règles il y a longtemps sur les dépenses effectuées par le gouvernement fédéral dans le cadre des grands projets de l'État.

Le Programme canadien des armes à feu est-il considéré comme un grand projet de l'État? Il semble y avoir une certaine ambiguïté. Madame le ministre pourrait-elle nous donner des précisions à ce sujet?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il y a de l'ambiguïté. Les réponses données hier à l'autre endroit par le sous-ministre faisaient état de cette ambiguïté.

La réalité, c'est que tous les montants ont été justifiés soit dans le Budget principal des dépenses, soit dans le Budget supplémentaire des dépenses. Le Comité des comptes publics de la Chambre des communes n'a pas consulté l'information à laquelle il pouvait facilement avoir accès, à la différence du Comité sénatorial permanent des finances nationales, qui a saisi l'occasion de faire comparaître des témoins. L'information était certes disponible et très claire. Dans ce cas-ci, cependant, le ministère de la Justice et la vérificatrice générale ne voient pas tout à fait les choses du même oeil.

Le sénateur St. Germain: Je pose donc la question suivante. Le programme des armes à feu est-il un grand projet de l'État? Le cas échéant, et bon nombre de personnes pensent que c'en est un parce qu'il satisfait aux critères applicables aux grands projets de l'État, pourquoi les exigences en matière de rapport n'ont-elles pas été respectées? Qu'en est-il de la reddition de comptes? Le gouvernement blâme-t-il le comité de la Chambre des communes de ne pas avoir posé de questions? Il semble que le gros de l'argent ait été prévu dans le Budget supplémentaire des dépenses plutôt que dans le Budget principal des dépenses. N'est-ce pas le cas?

Le sénateur Carstairs: Je crois comprendre que le gros de l'argent a été prévu dans le Budget principal des dépenses. Toutefois, que l'argent ait été prévu dans le Budget principal des dépenses ou dans le Budget supplémentaire des dépenses ne devrait pas importer au Comité des comptes publics. Cette situation n'a pas gêné le Comité des finances du Sénat dont les membres ont accompli le travail que l'on attendait d'eux.

Quant à savoir s'il s'agit ou non d'un projet de l'État, il existe un différend au sujet de cette définition. Le ministère de la Justice n'accepte pas le point de vue de la vérificatrice générale à ce sujet.

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

LES MODIFICATIONS AUX LOIS SUR LE SYSTÈME CORRECTIONNEL

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Il y a près de deux ans, dans son rapport sur les plans et priorités pour 2001-2002, le ministère du Solliciteur général a dit au Parlement que l'on prévoyait apporter des changements à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Le printemps dernier, dans le rapport sur les plans et priorités pour 2002-2003, on nous a appris que le gouvernement mettrait trois ans à réviser cette loi. Deux mois plus tard, nous avons appris dans le National Post du 15 mai que le gouvernement présenterait cet automne des modifications à la Loi sur le système correctionnel et à la Loi sur le transfèrement des délinquants. Le gouvernement prévoit-il présenter des modifications à la Loi sur le système correctionnel et à la Loi sur le transfèrement des délinquants? Si c'est le cas, quand le gouvernement prévoit-il présenter un tel projet de loi?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, à ma connaissance, la question ne figure pas au programme. Je ne m'attends pas à ce qu'un projet de loi en ce sens soit déposé au printemps, et il reste à voir s'il le sera à l'automne 2003. Quoi qu'il en soit, ces modifications ne constituent pas une priorité pour l'instant.

LA JUSTICE

LES MODIFICATIONS À LA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

L'honorable Terry Stratton: Il y a presque trois ans, le ministère de la Justice a informé le Parlement, dans son rapport de 2000-2001 sur les plans et les priorités que, suite à un examen du juge Gérard La Forest, de la Cour suprême, le gouvernement pourrait déposer un projet de loi modificatif de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Le gouvernement a répété cette annonce dans son rapport sur les plans et les priorités de 2001-2002. Le gouvernement a-t-il mis ces modifications en suspens? Dans la négative, pour quand pouvons-nous attendre un projet de loi?

(1440)

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais que les plans ne sont pas en suspens. Ils progressent, quoique lentement. Je ne saurais dire quand ils seront présentés.

LE PROJET DE LOI VISANT À DÉCRIMINALISER LA MARIJUANA

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, en septembre 2002, le gouvernement a annoncé, dans le discours du Trône, qu'il modifierait la législation canadienne en matière de drogues et qu'il pourrait présenter un projet de loi visant à décriminaliser la consommation de marijuana. Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire quand le gouvernement entend déposer ce projet de loi?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Étant donné que cet engagement figure dans le discours du Trône, je suppose qu'on y donnera suite pendant la session actuelle.

LES MODIFICATIONS À LA LOI SUR L'ACCÈS À L'INFORMATION

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, il y a près de quatre ans, le ministère de la Justice annonçait dans son rapport sur les plans et les priorités pour l'année financière 1999-2000 que le gouvernement projetait des modifications à la Loi sur l'accès à l'information et à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Il y a deux ans et demi, en août 2000, la ministre de la Justice de l'époque, Mme Anne McLellan, annonçait qu'un groupe de travail composé de fonctionnaires de plusieurs ministères serait chargé de l'examen. Le 26 juillet 2001, le Ottawa Sun rapportait que les modifications à la Loi sur l'accès à l'information étaient attendues pour janvier 2002.

Le 12 juin 2002, le gouvernement a finalement rendu publics les résultats de l'examen de la loi et a fait savoir qu'il y répondrait à l'automne. L'étude recommande notamment d'étendre la portée de la loi pour qu'elle vise davantage de renseignements et d'institutions, dont les documents parlementaires, et de rejeter les demandes d'accès frivoles ou abusives.

En outre, le 6 août 2002, le National Post a signalé qu'un projet de loi devant être présenté à l'automne élargirait la loi pour qu'elle englobe des sociétés d'État et d'autres institutions actuellement exemptées, dont la SRC et Postes Canada.

Madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle informer le Sénat du calendrier du gouvernement en ce qui concerne la présentation de ces modifications?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai eu connaissance d'aucun calendrier de présentation d'un projet de loi sur l'accès à l'information. Comme les sénateurs le savent, il y a un nouveau ministre de la Justice. Il a établi des priorités qui englobent le projet de loi auquel le sénateur a fait référence et qui concerne les lois sur les drogues. Je ne peux pas donner d'autres détails sur le moment où nous pourrions nous attendre à prendre connaissance de modifications apportées à la Loi sur l'accès à l'information.

LES TRANSPORTS

LES MODIFICATIONS À LA LOI SUR L'AÉRONAUTIQUE

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, en mars 2001, par l'entremise de son rapport sur les plans et les priorités pour 2001-2002, Transports Canada a dit au Parlement qu'il consultait le secteur de l'aviation en vue de mettre à jour la Loi sur l'aéronautique. Un an plus tard, en mars 2002, dans son rapport sur les plans et les priorités pour l'exercice 2002-2003, le ministère a dit au Parlement qu'il voulait présenter au plus tard dans un an des modifications qui porteraient sur la gestion de la fatigue, l'assurance-responsabilité et la communication de données sur la sécurité, tout en prévoyant de nouveaux outils de conformité et d'application.

Étant donné que l'ordre du jour n'est pas très chargé, madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle informer le Sénat du moment où nous pourrions espérer prendre connaissance de ce projet de loi?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Je peux assurer au sénateur qu'il prendra connaissance de ce projet de loi très bientôt.

[Français]

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer deux réponses différées à des questions orales: la première à une question de l'honorable sénateur Tkachuk, posée le 7 novembre 2002, concernant la reconnaissance du Hezbollah en tant qu'organisation terroriste, et la deuxième à une question de l'honorable sénateur Forrestall, posée le 7 novembre 2002, concernant les véhicules Iltis.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LA RECONNAISSANCE DU HEZBOLLAH EN TANT QU'ORGANISATION TERRORISTE

(Réponse à la question posée le 7 novembre 2002 par l'honorable David Tkachuk)

Le Canada a inscrit l'Organisation de sécurité externe du Hezbollah à la liste établie en vertu du Règlement des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme (le «Règlement») le 7 novembre 2001. Le Hezbollah en entier a été inscrit en vertu du Règlement le 10 décembre 2002, ainsi qu'en vertu des règlements de la Loi antiterroriste.

Selon le Règlement des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme, il est interdit de contribuer des fonds et d'organiser la collecte de fonds destinés à des entités ou à des personnes inscrites. Toute personne au Canada et tout Canadien à l'étranger est obligé de bloquer les fonds des entités et des personnes inscrites. Le Règlement n'aborde pas la question de l'adhésion à une entité.

La Loi antiterroriste permet la désignation de groupes dont les activités répondent à la définition d'activité terroriste comme étant des «groupes terroristes». Ce cadre sert de fondement aux nouvelles infractions du Code criminel, qui rendent criminelles les infractions suivantes:

- quiconque sciemment réunit ou fournit des fonds, directement ou non, dans l'intention de commettre des crimes terroristes;

- quiconque sciemment participe, contribue aux activités d'un groupe terroriste ou les facilite. La participation ou la contribution doit inclure le recrutement délibéré de nouvelles personnes dans le but d'accroître la capacité du groupe terroriste de faciliter ou de commettre des actes terroristes;

- quiconque charge une personne de se livrer à une activité terroriste au profit ou sous la direction d'un groupe terroriste;

- quiconque sciemment héberge ou cache un terroriste.

Toute personne au Canada et tout Canadien à l'étranger est obligé de bloquer les fonds de groupes terroristes qui sont définis dans la Loi comme une entité inscrite ou comme une entité dont l'un des objets ou l'une des activités est de se livrer à des actes terroristes ou de les faciliter.

L'adhésion à une entité n'est pas en soi une infraction. Une infraction est constituée par la participation consciente à, la contribution consciente à ou la facilitation consciente des activités illégales d'une entité.

LA DÉFENSE NATIONALE

LE RÉGIMENT DE RÉSERVE DE L'ÎLE-DU-PRINCE- ÉDOUARD—L'ÉTAT DES VÉHICULES

(Réponse à la question posée le 7 novembre 2002 par l'honorable J. Michael Forrestall)

Comme cela a déjà été dit dans la réponse du 20 novembre 2002, le Régiment de l'Île-du-Prince-Édouard n'utilise pas actuellement de véhicules Iltis.

On m'a informé qu'il faut plus de renseignements pour traiter la demande de l'honorable sénateur de déposer le livret technique de maintenance des jeeps du Régiment de l'Île-du- Prince-Édouard à la Chambre.

Étant donné que la demande concerne des documents, il faut davantage de renseignements fixant une date de commencement et une date de fin de la recherche. Nous recommandons que les documents en question soient obtenus en faisant une demande d'accès à l'information au ministère de la Défense nationale ou en requérant la production des documents à la Chambre.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, le bureau semble avoir oublié les «Affaires du gouvernement».

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Je croyais que le sénateur se levait pour parler du premier article à l'ordre du jour sous la rubrique «Projets de loi d'intérêt public du Sénat», qui est inscrit à son nom.

Le sénateur Lynch-Staunton: N'y a-t-il rien d'inscrit sous «Affaires du gouvernement»?

Le sénateur Kinsella: Puisqu'il n'y a pas d'affaires du gouvernement, de projets de loi, d'interpellations, de motions ou de rapports de comités à l'ordre du jour, nous en sommes aux «Autres affaires»; je crois que le premier article inscrit est le projet de loi S-12, et je demande qu'il soit reporté et demeure inscrit à mon nom.

PROJET DE LOI SUR LES MOTOMARINES

DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Spivak, appuyée par l'honorable sénateur Forrestall, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-10, Loi concernant les motomarines dans les eaux navigables.—(L'honorable sénateur Kinsella).

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, j'interviens pour appuyer le projet de loi S- 10 et je serai bref et concis. Voilà le genre de projet de loi que le Sénat devrait appuyer. Nous en sommes saisis depuis très longtemps. Tous les sénateurs ont eu le temps de l'analyser. Lors de notre dernière séance, le sénateur Cook l'a bien expliqué.

Comme quelqu'un l'a souligné, le projet de loi impose au ministre des Pêches et des Océans l'obligation d'écouter les représentants locaux lorsque la sécurité publique et l'environnement sont menacés et il exige que le ministre prenne en considération les solutions locales aux problèmes de vitesse, de distance ou de restrictions quant aux heures d'utilisation des motomarines. Au lieu d'instaurer un seul ensemble de règlements pour tout le pays, nous devrions avoir des règlements variant d'une collectivité à l'autre et adaptés aux besoins de chaque voie navigable, ce qui me semble tout à fait logique étant donné la diversité des situations au pays.

Dans le cas de certaines initiatives, notamment au niveau municipal, on est d'accord tant qu'on n'est pas personnellement touché de près. J'espère que nous n'aurons pas le problème cette fois-ci.

Le projet de loi, conçu par le sénateur Spivak et appuyé par les honorables sénateurs des deux côtés de la Chambre, n'interdirait pas les motomarines. Il prévoit la création d'une autorité locale qui se prononcerait sur ce qui peut être permis sur telle ou telle voie navigable. Elle pourrait décider ce qui constitue une utilisation acceptable des motomarines en fonction des préoccupations locales et des besoins locaux.

Le projet de loi confie aux autorités locales le mandat d'adopter des résolutions proposant que le ministre prenne un règlement restreignant l'utilisation des motomarines sur une voie navigable après consultation générale de la collectivité. Le ministre peut rejeter la proposition de règlement qui entraverait la navigation. Ces deux mécanismes devraient suffire pour éviter que le projet de loi ne serve à mener la vie dure aux propriétaires de motomarines et pour faire en sorte qu'il serve plutôt à assurer un juste équilibre.

Honorables sénateurs, il s'agit d'une démarche à peu près identique à celle qui existe maintenant pour le ski nautique ou les régates de bateaux de plaisance rapides. Il se peut très bien qu'il y ait de très petits lacs ou de petites portions de grandes voies navigables où les autorités locales décident que les motomarines ne conviennent pas, soit parce qu'il y a des lieux de baignade où elles constitueraient un danger pour les baigneurs, soit parce que ces véhicules perturberaient des lieux de nidification, ou encore parce que l'huile ou l'essence qu'elles laissent échapper se retrouveraient dans le système d'eau potable. Dans ces zones très restreintes, les motomarines pourraient être interdites, tout comme le ski nautique n'est pas permis partout.

Certes, les motomarines, utilisées au mauvais endroit et au mauvais moment peuvent présenter des problèmes de bruit et de pollution ou des risques pour la sécurité des baigneurs, des canoteurs ou d'autres plaisanciers, mais il y a également d'autres sports pratiqués avec des véhicules à moteur qui sont bruyants, polluants et peut-être même plus dangereux. Récemment, l'Institut canadien d'information sur la santé a publié un rapport selon lequel la motoneige, loisir très populaire dans ma province, le Nouveau- Brunswick, où une famille sur trois possède une motoneige ou un véhicule tout-terrain, est devenue un sport très dangereux. Le danger est mesuré d'après les problèmes de santé et les risques de décès.

(1450)

La motoneige entraîne des blessures plus graves, des séjours à l'hôpital plus longs et un plus grand nombre de décès que n'importe quel autre sport. Les chiffres relatifs aux motomarines ne figurent pas à part dans l'étude.

La base de données tenue par le Système canadien hospitalier d'information et de recherche en prévention des traumatismes de Santé Canada donne une idée des risques que présentent les motomarines. Les blessures subies en motomarine représentent 21 p. 100 de l'ensemble des blessures causées par de petites embarcations à moteur, tandis que les constructeurs indiquent que les motomarines ne forment que 3 à 5 p. 100 de l'ensemble des petites embarcations à moteur. D'après ces données, honorables sénateurs, le risque est disproportionné.

Au Nouveau-Brunswick, les autorités locales travaillent de concert avec la province pour établir des règlements applicables sur l'important réseau de pistes qui couvre la province. C'est la Fédération des clubs de motoneige du Nouveau-Brunswick. Elle définit les règles observées sur les pistes, favorise la sécurité en motoneige et s'occupe de l'entretien des pistes. Pour accéder à celles- ci, il faut payer un abonnement auprès d'un club affilié ou, dans le cas d'un touriste de passage, une carte temporaire. La GRC s'occupe davantage de patrouiller les pistes, ce qui rend le sport un peu plus sûr. Apparemment, il ne l'est pas assez et il resterait encore beaucoup de travail à faire. Si ce système peut fonctionner à l'échelle provinciale pour un sport motorisé, la motoneige, peut-être pourrait-il également donner de bons résultats dans le cas des motomarines.

Le Nouveau-Brunswick a déjà pris quelques mesures dans ce domaine. Il a interdit toutes les embarcations ayant des moteurs à deux temps — c'est le type de moteur qui équipe la plupart des motomarines — dans deux douzaines de bassins hydrographiques de la province. Le motif déclaré est de protéger un environnement aquatique sensible des produits pétroliers que les moteurs à deux temps laissent échapper. C'est un problème de santé et de sécurité publique d'un autre ordre.

Honorables sénateurs, je crois savoir que le Québec a l'intention d'emboîter le pas en interdisant toutes les embarcations à moteur à essence dans les lacs d'une superficie inférieure à un kilomètre carré, de même que dans les lacs de moins de quatre kilomètres carrés si on y puise de l'eau potable.

Le projet de loi veillerait à ce que les problèmes locaux et provinciaux soient réglés dans le respect de la Constitution. Il mettrait en place des mesures que les responsables de la Garde côtière avaient demandées il y a une dizaine d'années. Le projet de loi me semble donc éminemment raisonnable. C'est une initiative de protection et de sécurité qui est nécessaire, à mon avis. Il est à espérer que le comité auquel le projet de loi sera renvoyé pour une étude détaillée sera en mesure d'examiner toutes ces questions.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je propose que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, le projet de loi S-10 est intitulé «Loi concernant les motomarines dans les eaux navigables». Comme les eaux navigables sont une responsabilité de la Garde côtière, ne serait-il pas préférable que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, qui traite également de la Garde côtière sous la gouvernance du ministère des Pêches, soit l'endroit où l'on pourrait étudier le projet de loi?

[Traduction]

Le sénateur Spivak: Honorables sénateurs, je propose alors que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Son Honneur le Président: Pourquoi pas le Comité des pêches?

Le sénateur Spivak: Je vous signale que le projet de loi sur la marine marchande a également été renvoyé au Comité des transports. Le projet de loi qui nous occupe comporte des aspects reliés à la Loi sur l'environnement et à la Loi sur la marine marchande du Canada. Avec tout le respect que je vous dois, je ne crois pas que le Comité des pêches et des océans soit l'endroit indiqué.

Le sénateur Corbin: Envoyez-le donc au Comité des affaires étrangères.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Spivak propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Cochrane, que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des transports et des communications pour une étude détaillée. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Le sénateur Robichaud: Est-ce que...

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant d'aller plus loin, je vous prie de noter que cette motion ne peut pas faire l'objet d'un débat. Elle ne peut qu'être adoptée ou rejetée. Toutefois, il serait possible, avec la permission du Sénat, de formuler des observations.

La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

[Français]

Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, dans le cas présent, ne devrait-on pas s'en tenir à la première motion proposée? Ma suggestion du renvoi du projet de loi S-10 au Comité sénatorial des pêches et des océans n'a pas été acceptée. On n'a pas amendé la première motion. Nous avons devant nous la première motion ayant trait au renvoi du projet de loi S-10 au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Cela vous convient-il, sénateur Spivak?

Le sénateur Spivak: Je suis à votre disposition, honorables sénateurs.

Son Honneur le Président: Conformément au Règlement, le parrain de la motion peut en modifier le libellé avec la permission du Sénat.

Honorables sénateurs, vous plaît-il de permettre au sénateur Spivak de proposer la motion modifiée?

Honorables sénateurs, je vais expliquer très clairement les choses pour que tout le monde comprenne.

Il est proposé que la motion soit modifiée de façon à renvoyer le projet de loi au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles au lieu du Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Sénateur Cools, avez-vous une question?

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'essaie de déterminer quel comité devrait examiner ces questions. Il ne devrait pas être difficile de passer en revue la liste des comités. Lequel s'occupe des questions de navigation et de réglementation des embarcations sur les rivières, les lacs et les océans?

Le sénateur Spivak: C'est le Comité sénatorial permanent des transports et des communications. Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles s'occupe des questions d'environnement et d'énergie. Les deux se retrouvent dans le projet de loi. Il y a des aspects de cette mesure qui pourraient être renvoyés à l'un ou l'autre des deux comités. Je suis cependant heureuse qu'il aille au Comité des transports.

Le sénateur Cools: Nous devrions le renvoyer au comité où siège l'honorable sénateur. À quel comité madame le sénateur siège-t-elle?

Le sénateur Spivak: Aux deux.

Le sénateur Cools: Il appartient alors à l'honorable sénateur de choisir.

(1500)

L'honorable Gerald J. Comeau: Je ne peux m'empêcher de faire remarquer ici que le sénateur Robichaud a bel et bien fait ressortir que les questions intéressant les eaux navigables relevaient en général de la Garde côtière et concernaient le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Je ne cherche pas du tout à faire renvoyer ce projet de loi à mon comité.

Je tiens à signaler cependant que certaines questions concernant l'environnement sont traitées dans la Loi sur les océans.

Son Honneur le Président: Permission est-elle accordée, honorables sénateurs, pour que la motion du sénateur Spivak prévoie: Que ce projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Spivak propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Cochrane: Que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles pour une étude plus approfondie. Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Spivak, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'entends proposer que le projet de loi S-15 soit lu une deuxième fois dans quelque jours. Je signale que le projet de loi figure aujourd'hui au Feuilleton, au troisième point de l'ordre du jour, en tant que projet de loi C-15. Je demande que le compte rendu soit rectifié pour indiquer qu'il s'agit du projet de loi S-15. Je remarque que le greffier vient de l'appeler le projet de loi S-15.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord pour apporter cette correction, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

LA LOI SUR L'HYMNE NATIONAL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition) propose: Que le projet de loi S-14, Loi modifiant la Loi sur l'hymne national afin de refléter la dualité linguistique du Canada, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je propose l'ajournement du débat.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)

PROJET DE LOI SUR LA PROTECTION DES PHARES PATRIMONIAUX

DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Forrestall, appuyée par l'honorable sénateur LeBreton, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-7, Loi visant à protéger les phares patrimoniaux.—(L'honorable sénateur Callbeck).

L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, je voudrais tout d'abord féliciter mon collègue, le sénateur Forrestall, d'avoir présenté ce projet de loi. Je crois dans le principe de ce projet de loi, le projet de loi S-7, qui vise à protéger les phares patrimoniaux, car ceux-ci font partie intégrante de l'identité, de la culture et du patrimoine du Canada.

Ce projet de loi vise à protéger les phares patrimoniaux de trois façons. Tout d'abord, il prévoit un processus de sélection et de désignation des phares. Deuxièmement, il empêche leur modification ou leur aliénation non autorisée. Troisièmement, il exige que ces phares soient raisonnablement entretenus. Autre aspect important, il prévoit des consultations publiques.

La province d'où je viens, l'Île-du-Prince-Édouard, compte de nombreux phares. Parmi eux, il y a le phare de Point Prim. C'est d'ailleurs le plus vieux phare de la province. Il a été déclaré édifice du patrimoine et c'est le seul phare en briques de forme arrondie au Canada. C'est également à l'Île-du-Prince-Édouard que se trouve le phare de Cap Bear, où était installée la station-radio Marconi, la première à capter le message de détresse émis par le Titanic.

En fait, les phares font partie intégrante de la vie à l'Île-du-Prince- Édouard, non seulement pour la navigation, mais encore à titre de symboles de la vie maritime. Aujourd'hui, nombre de ces phares sont des attractions touristiques. Par exemple, le phare West Point, qui a été construit en 1875, est maintenant une auberge et un musée. C'est le premier phare de l'île à avoir été construit par le gouvernement fédéral.

À l'heure actuelle, le Bureau d'examen des édifices fédéraux du patrimoine, le BEEFP, est chargé d'évaluer les édifices appartenant au gouvernement fédéral et construits il y a au moins 40 ans et de déterminer s'ils devraient être déclarés édifices du patrimoine.

Si ce projet de loi est renvoyé à un comité sénatorial permanent, je crois que ce dernier devrait examiner le processus actuel du BEEFP et se demander s'il protège les phares patrimoniaux. Si la réponse est non, le comité devra alors déterminer les changements nécessaires. Autrement dit, il devra se demander si nous avons besoin d'une nouvelle loi.

Je crois savoir que ce projet de loi est calqué sur le projet de loi visant à protéger les gares ferroviaires du patrimoine, mais j'estime que nous devons décider s'il est sage d'adopter une loi distincte pour chaque catégorie d'immeuble.

J'estime que le comité qui étudiera le projet de loi devra examiner une foule de questions. Par exemple, étant donné que le BEEFP a déjà examiné plus de 200 phares du Canada, desquels 120 ont été classés édifices du patrimoine, l'adoption du projet de loi aura-t-elle pour effet que le ministre du Patrimoine devra réexaminer tous les immeubles qui ont déjà été désignés édifices du patrimoine ou ces immeubles conserveront-ils d'office leur désignation?

Je crains que le fait de faire appel aux citoyens dans ce projet de loi nuira à son objet général, qui est de protéger les phares du Canada.

Aux termes des alinéas 8a) et 8b), les Canadiens qui souhaitent qu'un phare soit désigné comme phare patrimonial devront adresser une pétition au ministre dans les deux ans de l'entrée en vigueur de la présente loi. Aux termes de l'alinéa 8a), il s'agit d'une pétition:

qui porte la signature d'au moins 25 personnes âgées d'au moins 18 ans résidant au Canada, dont les nom et adresse y sont inscrits en lettres moulées;

Cela m'amène à la question de savoir ce qui se passera après la période limite de deux ans. Les Canadiens pourront-ils toujours demander au ministre qu'il désigne un phare donné comme phare patrimonial? Si ce n'est pas le cas, et si le projet de loi et le processus de présentation de pétitions ne sont pas bien annoncés, il se pourrait bien que le ministre ne reçoive pas beaucoup de pétitions.

Honorables sénateurs, ce sont là quelques-unes des questions que j'ai relativement au projet de loi S-7. En terminant, j'aimerais réitérer mon appui au principe qui sous-tend cette mesure législative. Cependant, un bon nombre de questions nécessiteraient des réponses en comité.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Forrestall, avec l'appui de l'honorable sénateur LeBreton, propose: Que le projet de loi soit lu une deuxième fois. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Forrestall, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

BUDGET—RAPPORT DU COMITÉ—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense (budget—étude des soins de santé offerts aux anciens combattants—autorisation d'embaucher du personnel et de se déplacer), présenté au Sénat le 13 février 2003.—(L'honorable sénateur Meighen).

L'honorable Michael A. Meighen propose: Que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président: Désirez-vous prendre la parole, sénateur Meighen?

Le sénateur Meighen: Non.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Il y a une question avant le vote.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je pensais que l'honorable sénateur Meighen allait prononcer un discours sur le rapport. Je vais donc proposer que la suite du débat soit reportée à la prochaine séance du Sénat.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Meighen, voulez- vous répondre?

Le sénateur Meighen: Peut-être pourrais-je différer ma réponse jusqu'à la prochaine séance du Sénat.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)

(1510)

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

ADOPTION DU DIXIÈME RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du dixième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présenté au Sénat plus tôt aujourd'hui.

L'honorable Lise Bacon propose: Que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, le dixième rapport est l'aboutissement d'un processus qui a été un défi. L'automne dernier, au début de la deuxième session de l'actuelle législature, les comités ont reçu leurs ordres de renvoi du Sénat et ont présenté leur demande de budget au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration. Comme les dépenses des témoins ont été inférieures à ce qui avait été prévu à l'origine, 1,4 million de dollars ont été mis à la disposition des comités pour leur travail législatif et stratégique.

Comme c'est habituellement le cas, les demandes de fonds ont dépassé les ressources disponibles. Nous avons mis au point un processus d'attribution des fonds permettant de traiter équitablement les comités et leur donnant la possibilité de poursuivre leurs travaux tout en respectant les contraintes budgétaires. Nous avons élaboré des lignes directrices pour permettre de respecter ces objectifs. Je remercie les sénateurs qui ont compris et qui ont accepté l'obligation dans laquelle nous nous trouvions d'élaborer une série de lignes directrices pour nous aider dans notre travail.

Le comité a agi avec diligence pour veiller à ce que les fonds soient mis à la disposition des comités le plus rapidement possible. Tous les comités ont reçu leur financement du Sénat au début de décembre et, dans la plupart des cas, les fonds débloqués ont suffi pour que les comités poursuivent leurs activités jusqu'à la fin de l'exercice financier. Le comité savait toutefois que son travail n'était pas encore terminé. Il s'était engagé à réévaluer la situation après le congé de Noël. En revoyant quelles autres demandes pourraient être présentées et la disponibilité de fonds, il serait alors en mesure de formuler des recommandations pour le déblocage de crédits supplémentaires.

L'équité est le principe le plus important dont s'est inspiré le comité. Tous les comités devraient avoir une chance égale de demander des fonds et avoir l'assurance que leurs demandes seront prises en considération dûment et équitablement. J'insiste sur le fait qu'il n'y a pas de super comité ni de super sénateur. Tous les comités considèrent leur travail comme étant important. La tâche du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration consiste à attribuer des fonds d'une manière responsable pour permettre à tous de poursuivre leurs objectifs. Il est un proverbe qui ne tient pas en l'occurrence, celui selon lequel à force de se plaindre, on obtient ce qu'on veut.

Donc, au moment de la présentation de son neuvième rapport, votre comité a invité tous les présidents de comité à soumettre leurs demandes de crédits supplémentaires et à indiquer s'ils prévoyaient faire d'autres demandes budgétaires au cours du présent exercice.

Nous avons reçu des demandes de crédits supplémentaires de quatre comités. Deux comités ont aussi demandé un transfert de fonds d'une catégorie de dépenses à une autre. Ayant été en mesure de déterminer la quantité de fonds disponibles et les répercussions possibles sur le budget, le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a pu faire preuve d'une plus grande souplesse à l'égard des directives qu'à l'automne. Par bonheur, les fonds restants étaient suffisants pour répondre à pratiquement toutes les demandes de crédits supplémentaires.

Le dixième rapport recommande l'affectation de crédits supplémentaires au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, ainsi qu'au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, afin de permettre à un plus grand nombre de sénateurs de mener des missions d'information aux États-Unis. Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones recevra des crédits supplémentaires pour les frais de repas et de transcription et l'organisation de tables rondes avec les jeunes.

La seule demande de crédits supplémentaires qu'il a été impossible de satisfaire complètement était celle du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Celui-ci voulait qu'on augmente son budget original pour financer un voyage à Washington. Nous ne pouvions que répondre à sa requête originale.

Advenant l'adoption du dixième rapport, et compte tenu de la possibilité d'une petite affectation budgétaire supplémentaire au Comité sénatorial permanent des transports et des communications, la totalité des 106 000 $ restants, moins 2 400 $, aura été allouée.

Je remercie mes collègues au sein du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, surtout ceux qui ont travaillé avec moi au comité de direction, pour toute l'aide qu'ils m'ont fournie au cours de ce processus difficile et exigeant. Je remercie également tous les sénateurs qui ont compris et respecté les contraintes auxquelles nous étions soumis.

À l'approche du nouvel exercice financier, je suis convaincue que nous aurons à faire face à des décisions difficiles. Je tiens à assurer les honorables sénateurs que nous continuerons de traiter les comités de façon juste et équitable. Nous voulons appuyer et faciliter leur travail, en respectant toutefois les limites du budget. D'ici à ce que nous recevions toutes les demandes budgétaires, il est impossible de connaître l'ampleur du manque de fonds, le cas échéant, et les directives qui s'imposent dans les circonstances.

Entre-temps, je suis certaine que mes collègues du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration et moi pouvons compter sur votre appui et sur votre compréhension, tandis que nous poursuivons cette entreprise exigeante.

Honorables sénateurs, je vous prie instamment d'adopter le dixième rapport.

L'honorable Tommy Banks: Les honorables sénateurs ont peut-être eu l'occasion de lire la lettre que j'ai adressée à tous les sénateurs à ce sujet, ainsi que les pièces jointes à cette lettre. Elle se veut une expression de confiance envers l'impartialité du comité que préside madame le sénateur Bacon. Sans minimiser l'importance des préoccupations exprimées dans le rapport qu'elle nous a présenté aujourd'hui, je félicite madame le sénateur Bacon et les membres de son comité d'avoir fait preuve d'une très grande souplesse. Je les en remercie et les félicite pour l'attitude qu'ils ont adoptée.

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, le comité de madame le sénateur a-t-il révisé sa position au sujet des comités qui partent en mission d'information, et du nombre de sénateurs qui se déplacent dans pareilles circonstances, ou privilégie-t-il les comités qui se déplacent pour tenir des audiences publiques? Autrement dit, si un comité voyage pour tenir des audiences publiques, tous les membres sont invités à participer. S'il s'agit d'une mission d'information, le comité doit réduire le nombre des participants en demandant à quelques-uns de ses membres de ne pas y aller. Est-ce que madame le sénateur et son comité ont reconsidéré cette position?

(1520)

Le sénateur Bacon: Je prends note de ce qu'a dit l'honorable sénateur, mais, selon le montant demandé par les comités, nous pourrions avoir besoin d'un autre ensemble de lignes directrices.

Le sénateur Comeau: Si l'on considère à nouveau les lignes directrices, madame le sénateur dit que cela dépend du montant. Si madame le sénateur veut faire une évaluation ou comptabiliser les coûts d'un comité qui tient des audiences publiques par rapport à un comité qui mène une enquête, je crois qu'elle se rendrait compte que le second dépense beaucoup moins d'argent que le premier, parce que celui-ci se déplace avec beaucoup d'équipement, de voyageurs, de sténographes, d'interprètes, etc. Je soulève cette question à cause des considérations de coûts. Il est en fait moins coûteux de voyager en mission d'information que pour des audiences publiques.

Le sénateur Bacon: Je ne voudrais pas que l'honorable sénateur oublie que nous vivons dans un pays bilingue. En cas d'audiences publiques, je crois que les deux langues doivent être utilisées. Par conséquent, nous devons être accompagnés d'interprètes. Je sais que c'est très coûteux, mais il s'agit de la nature même de notre pays.

Le sénateur Comeau: Je ne crois pas avoir besoin de leçons de madame le sénateur pour savoir que nous vivons dans un pays qui tente de reconnaître les deux langues officielles. Si elle voulait bien examiner le dossier de mon comité, elle constaterait que nous respectons bel et bien le bilinguisme. Ce n'était pas du tout sur cet aspect que j'essayais d'attirer l'attention.

Je veux simplement dire que lorsqu'un comité se déplace pour tenir des audiences publiques, ses dépenses sont beaucoup plus élevées que s'il est en mission d'information. Autrement dit, si notre comité avait demandé à tenir des audiences publiques, tous nos membres auraient eu la permission de voyager. En demandant à entreprendre une mission d'information, qui est beaucoup moins coûteuse et plus économique, nous nous sommes vu refuser l'autorisation de participer tous au voyage.

Le sénateur Bacon: Je ne pense pas avoir autre chose à ajouter à ce que j'ai dit. Les audiences publiques sont aussi importantes pour les gens qui suivent ce que font le Sénat et les honorables sénateurs.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

L'HÉRITAGE DE GASPILLAGE—LES ANNÉES CHRÉTIEN-MARTIN

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur LeBreton, attirant l'attention du Sénat sur l'héritage de gaspillage des années Chrétien-Martin. —(L'honorable sénateur Bryden).

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je prends la parole pour participer au débat sur l'interpellation.

En 1963, l'hélicoptère maritime CH-124 Sea King a été mis en service dans la Marine royale canadienne. La même année, l'hélicoptère de recherche et de sauvetage Labrador CH-113 a également été mis en service dans l'Aviation royale du Canada et dans l'armée. Le Sea King assumait un rôle de premier plan dans l'activité anti-sous-marine des hélicoptères.

On me dit que lorsque les premiers hélicoptères Sea King ont rallié leur base principale de Halifax en 1963, c'était une belle soirée d'été. Les vieux Sikorski étaient désaffectés et les équipages étaient fiers de leurs tout nouveaux appareils maritimes.

À ce moment, le Canada possédait un porte-avions d'escadre léger, le NCSM Bonaventure, et avait un Commandement de l'aéronavale. Chaque pilote de Sea King appartenait alors à l'aéronavale. Avec leur mouvement d'unification et les perturbations qui en ont résulté, les ministres du gouvernement Pearson, comme Paul Hellyer, ont mis fin à tout cela. Par la suite, le gouvernement Trudeau a mis le Bonaventure au rancart, juste à sa sortie du bassin de radoub en 1969.

En 1978, même le cabinet libéral de Pierre Elliott Trudeau savait qu'il serait nécessaire de remplacer l'hélicoptère Sea King dans un avenir pas trop lointain. C'est ainsi qu'en juillet 1978, le Projet d'une nouvel aéronef embarqué a été inscrit dans le Programme des services de la Défense. La même année, le Labrador de recherche et de sauvetage a été placé sur la liste des équipements à remplacer. En 1981, le Projet du nouvel hélicoptère de recherche était également inscrit dans le Programme des services de la Défense.

Les libéraux de Trudeau ont alors été remplacés par le gouvernement Turner. Dans la période qui a suivi, le programme de remplacement du Sea King et du Labrador a fait tranquillement son chemin jusqu'à l'arrivée au pouvoir, en 1984, du gouvernement progressiste-conservateur de Brian Mulroney. Pour la communauté de la défense, ce fut un jour de joie après les souffrances subies aux mains des gouvernements Pearson et Trudeau.

En 1986, le Conseil du Trésor du gouvernement Mulroney a donné son approbation préliminaire au Projet d'un nouvel aéronef embarqué devant remplacer le Sea King vieillissant, alors âgé de 23 ans. Sous le gouvernement Mulroney, le projet a avancé rapidement. En septembre 1986, une demande de propositions était distribuée dans le secteur privé à l'égard du nouvel aéronef embarqué. Seules deux sociétés ont répondu à la demande en février 1987, Eurocopter et EH Industries.

En août 1987, la définition du projet a été confiée à EH Industries, le Cougar d'Eurocopter ayant été jugé non conforme au cahier des charges du ministère de la Défense nationale. En avril 1988, un contrat portant sur la phase de définition du projet d'un nouvel aéronef embarqué a été signé avec EH Industries. L'hélicoptère maritime EH-101 était né. C'était un grand appareil robuste et à longue portée, doté de trois moteurs. J'attire votre attention sur les trois records extraordinaires que cet hélicoptère a enregistrés dans les deux derniers mois.

Entre-temps, en janvier 1990, le ministère de la Défense nationale a approché EH Industrie et Boeing pour se renseigner sur les prix et la disponibilité d'un nouvel hélicoptère de recherche pouvant remplacer les escadrilles vieillissantes de Labrador. En décembre 1990, presque un an plus tard, la définition d'un nouvel hélicoptère de recherche a été approuvé. Lorsque le ministère de la Défense nationale a examiné les capacités à prévoir pour un hélicoptère de recherche et de sauvetage, sur les plans de la taille, de la portée et de la fiabilité, il s'est aperçu qu'il venait tout juste d'acheter l'EH-101 pour ces mêmes capacités très spéciales, en tant qu'hélicoptère maritime.

Les avantages d'un programme commun étaient évidents. Avec un même appareil pour l'aéronavale et la recherche, le gouvernement pouvait réaliser des économies sur les pièces de rechange, la formation et les simulateurs. Par conséquent, en mars 1991, le ministère de la Défense nationale a décidé de combiner les Projets d'un nouvel aéronef embarqué et d'un nouvel hélicoptère de recherche et de sauvetage. En juillet 1992, le gouvernement Mulroney a annoncé l'achat de 50 hélicoptères EH-101, dont 35 pour remplacer le Sea King et 15 pour remplacer le Labrador. En octobre 1992, des contrats d'importation avaient déjà été signés avec EH Industries et Paramax pour l'acquisition de 50 hélicoptères EH- 101 au coût de 1,4 milliard de dollars, plus 1,4 milliard de dollars pour leurs systèmes de mission. On en était à au plus quatre ans de la livraison des premiers hélicoptères EH-101.

(1530)

Puis, en septembre 1993, dans un geste qu'on ne peut que qualifier d'opportunisme crasse, Jean Chrétien, qui était alors chef de l'opposition libérale, s'est servi des EH-101 à des fins politiques, a allégué que ce contrat coûterait 5,8 milliards de dollars et a juré d'annuler le contrat d'acquisition de 50 appareils EH-101 conclu avec EH Industries et Paramax pour renforcer sa campagne électorale qui semblait en difficulté. Après tout, la guerre froide était terminée, et les équipages des Sea King pouvaient être sacrifiés, cela faisait partie des dividendes de la paix. Le bien-être des forces armées n'avait jamais été une priorité de Jean Chrétien ni d'aucun autre ministre du Cabinet Trudeau.

En réponse aux attaques bruyantes des libéraux, en 1993, la première ministre du gouvernement progressiste-conservateur, Kim Campbell, a réduit le nombre d'appareils EH-101 de 50 à 43, puisque les changements apportés à la structure de la marine et à la capacité de l'appareil donnaient lieu à des économies d'échelle qui permettaient de réduire la commande. Cependant, ce n'était pas assez. Sentant la possibilité d'un carnage politique, les libéraux de Chrétien se sont servis des EH-101 pour se lancer dans une guerre électorale contre la première ministre Campbell jusqu'à ce que le programme, tout comme Mme Campbell, soit politiquement mort. En novembre 1993, le premier ministre Jean Chrétien a annulé le programme de remplacement des hélicoptères d'un simple trait de plume. L'annulation a coûté 500 millions de dollars au gouvernement en pénalités, du moins c'est ce qu'il a admis, bien que d'autres sources estiment les coûts d'annulation à bien au-delà de 1 milliard de dollars.

En novembre 1996, une demande de propositions a été lancée à l'industrie dans le cadre du projet d'hélicoptères de recherche du Canada. Le concours devait permettre de trouver un seul fournisseur, en fonction de l'offre la plus avantageuse pour le gouvernement et pour les contribuables canadiens.

En mai 1997, on a reçu de l'industrie quatre soumissions pour l'hélicoptère de recherche, pour remplacer les Labrador. Le Cougar d'Eurocopter, le Chinook de Boeing et le S-70 Seahawk de Sikorsky ont été jugés non conformes par le ministère de la Défense nationale. Après plusieurs tentatives pour revenir sur les résultats du concours, les libéraux ont reconnu leur défaite et, en l'absence du Parlement en janvier 1998, le gouvernement a annoncé d'un air penaud qu'il entendait acheter 15 hélicoptères Cormorant EH-101 pour le programme canadien de recherche et de sauvetage, en d'autres termes, pour le remplacement des Labrador. Ce marché s'élevait à 790 millions de dollars et il s'agissait d'un contrat unique. Une somme additionnelle de 1,7 milliard de dollars en coûts estimés de soutien en service à long terme était cachée dans de petits contrats, renouvelables pour jusqu'à 20 ans — un contrat qui a été accordé à IMP, Industrial Marine Products, à Halifax. Cette information n'a été rendue publique qu'au moment des élections de 2000.

Jusqu'à maintenant, le gouvernement préférerait marcher pieds nus sur des charbons ardents que de reconnaître les coûts cachés, alors que des articles reliés à l'accès sur l'information signalent qu'ils présentent un défi de communication lorsqu'on compare cela au programme des EH-101 du Parti progressiste-conservateur. L'ancien ministre de la Défense nationale a dit en confidence à tous ceux qui voulaient bien l'entendre que l'achat allait tout à fait à l'encontre de ses convictions.

Enfin, en août 2000, le gouvernement Chrétien a annoncé des plans pour acheter 28 hélicoptères maritimes pour remplacer les hélicoptères navals Sea King. Le projet de l'hélicoptère maritime a été évalué à 2,9 milliards de dollars et comprenait quatre contrats distincts; il n'était pas question du marché pour un seul fournisseur auquel l'industrie aéronautique s'attendait d'après ce qu'on lui avait dit et pour lequel le ministère de la Défense nationale et celui des Travaux publics et des Services gouvernementaux avaient préparé les documents durant plusieurs mois.

Le projet devait être octroyé en fonction du prix le plus bas, ce qui va à l'encontre des lignes directrices du Conseil du Trésor, comme nous le savons tous. L'industrie était sidérée. Manifestement, le gouvernement Chrétien craignait tant de devoir acheter le EH-101 à nouveau qu'il a formé le comité Grey pour veiller à ne pas avoir à faire face à un choix qui devait être entre le EH-101 et le EH-101.

En catimini, je crois qu'un groupe de ministres ont décidé de modifier ce processus pour éviter que le EH-101 ne remporte jamais le marché et dans leur empressement d'être les plus malins, ils ont écarté le Sikorsky S-92 avec un processus de certification restreint. Là encore, une somme estimée à 1,9 milliard de dollars a été cachée aux contribuables dans des contrats devant être signés après l'octroi du marché et tendant à financer 20 et quelque années de soutien en service à long terme. Les ingénieurs du ministère de la Défense ont travaillé jour et nuit tout l'automne afin de produire des documents distincts pour appuyer les quatre marchés.

L'industrie criait «à l'assassin» et la rumeur circulait dans l'ensemble de l'industrie de l'aviation que le président de l'Association des industries aérospatiales du Canada s'était discrètement adressé au comité Grey en vue de se frayer un chemin à travers les embûches politiques du processus des acquisitions qui l'attendaient. La société EH Industries, qui fabrique le plus coûteux des candidats, le EH-101 Cormorant, et, partant, le concurrent le plus vulnérable dans un processus où l'emporte le soumissionnaire offrant le prix conforme le plus bas, a immédiatement porté la question d'abord devant le Tribunal international du commerce, puis devant la Cour d'appel fédérale. Le Cougar d'Eurocopter a été retiré du processus par son fabricant français lorsqu'il a compris qu'il lui était impossible de satisfaire aux exigences de l'Énoncé des besoins opérationnels. Sikorsky a demandé de modifier les exigences et le processus de passation de marché pour ce qui est des conditions de certification déraisonnables qu'on imposait à son nouveau H-92, lequel devait être certifié avant même d'être construit. Enfin, la société NH Industries a indiqué qu'elle se retirerait de la course si les exigences n'étaient pas modifiées. Une des difficultés posée par son concurrent, le NH-90, est qu'il faisait partie d'un ensemble et qu'il ne faisait pas le poids dans un processus d'acquisition scindé en deux.

Le 5 décembre, reconnaissant les énormes difficultés posées par un processus scindé en deux, le gouvernement a annoncé le fusionnement des quatre contrats en vue de remplacer les Sea King. On a parlé de révision de la structure des contrats.

L'honorable Shirley Maheu (Son Honneur la Présidente suppléante ): Honorable sénateur Forrestall, je regrette de devoir vous informer que votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous l'autorisation de continuer?

Le sénateur Forrestall: Oui.

Son Honneur la Présidente suppléante: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Forrestall: C'est le genre de tactiques auxquels nous ont habitués les libéraux en vue d'accélérer le processus, réduire les risques et les coûts — c'est du moins ce qu'ils ont prétendu. En fait, c'était à peu près exactement le contraire de ce que le gouvernement Chrétien avait prétendu pas plus tard que deux ans auparavant. La valeur totale du nouveau contrat n'a pas été divulguée, car, à tout le moins, elle serait égale à la valeur présumée du programme de EH- 101 de 5,8 milliards de dollars contre lequel les libéraux ont fait campagne en 1993 en raison de la fusion en un seul projet des coûts relatifs à la cellule, aux systèmes d'émission et au soutien en service.

(1540)

En janvier 2003, une seconde guerre risquant d'éclater depuis deux ans, cette fois en Irak, les Sea King volent toujours et ne seront vraisemblablement pas remplacés, selon des sources gouvernementales, avant 2012 ou 2015. Chaque année de report coûte plus de 100 millions de dollars aux contribuables canadiens, et chaque année les coûts relatifs aux Sea King augmentent, tant au Canada qu'à l'étranger. Au Canada, on s'inquiète du jour où les vieux et non fiables Sea King ne rentreront pas à la base sans encombre. En haute mer, les équipages des Sea King sont insatisfaits. Pour chaque heure de vol, il faut au moins 30 heures d'entretien pour maintenir les Sea King en état de vol, et même là ils n'arrivent pas à décoller dans 60 p. 100 des cas. Quand ils sont en vol, ils doivent rebrousser chemin au moins la moitié du temps, rendant les missions plutôt hasardeuses. Les équipages s'indignent que le gouvernement ne semble pas comprendre ou ne pas se préoccuper vraiment de leur bien-être.

Enfin, honorables sénateurs, il y a lieu de craindre que, tôt ou tard, un Sea King percutera le pont d'une coûteuse frégate dans l'Atlantique-Nord, ce qui pourrait avoir de graves conséquences pour l'aéronef lui-même, le navire et, Dieu nous en garde, pour l'équipage.

Le moment est venu de remédier à la situation, de faire cesser l'hémorragie et de doter les Forces armées canadiennes d'un nouvel hélicoptère embarqué équipé non pas de deux mais de trois moteurs, et qui puisse accomplir, au large des côtes est et ouest, les prouesses du EH-101 dont la presse a fait état ces deux ou trois derniers mois.

(Sur la motion du sénateur Bryden, le débat est ajourné.)

LA SANCTION D'UNE ACTION MILITAIRE CONTRE L'IRAK DANS LE CADRE DU DROIT INTERNATIONAL

MOTION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Roche, appuyée par l'honorable sénateur Taylor:

Que le Sénat prenne note de la crise entre les États-Unis et l'Irak et confirme l'urgent besoin, pour le Canada, de se conformer au droit international en vertu duquel, en l'absence d'attaque ou de menace imminente d'attaque, seul le Conseil de sécurité des Nations Unies a le pouvoir de déterminer le respect de ses résolutions et de sanctionner une action militaire.—(L'honorable sénateur Rompkey, c.p.)

L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, la motion est reportée au nom du sénateur Rompkey. Avec sa permission, j'aimerais prendre la parole aujourd'hui.

L'honorable Bill Rompkey: D'accord.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je prendrai aujourd'hui la parole au sujet de la motion que notre collègue, le sénateur Roche, a présentée dans cette Chambre le 8 octobre 2002. Je félicite le sénateur Roche de son initiative, ainsi que tous les sénateurs qui ont participé au débat.

Le sénateur Roche fait valoir que le Canada ne peut échapper aux sérieuses conséquences d'une guerre contre l'Irak et qu'il est de l'intérêt direct de notre pays de s'efforcer de prévenir un conflit armé. On nous conseille de prendre la défense de la paix. Comme nous avons pu le constater ces derniers mois, l'opinion publique mondiale s'est effectivement mobilisée en faveur de la paix. Les énormes manifestations pacifistes, un peu partout sur la planète, nous ont démontré que l'humanité ne veut pas de la guerre. En fait, Patrick Tyler écrivait la semaine dernière, dans le New York Times, qu'il y a maintenant deux superpuissances dans le monde: les États- Unis d'Amérique et l'opinion mondiale.

Les sondages nous révèlent que la majorité des Canadiens font désormais partie de l'arsenal de la deuxième superpuissance mais, selon moi, cette situation ne signifie pas que les liens très étroits qui unissent les Canadiens et les Américains se sont relâchés. À mon avis, tous les Canadiens comprennent la tristesse et la frustration énormes ressenties par nos proches alliés et amis au sud de la frontière dans la foulée des événements du 11 septembre, et ils sympathisent avec eux. Le partenariat qu'entretiennent nos deux grands pays a toujours transcendé les frontières. Lorsque je dis: «Laissons les Nations Unies faire leur travail; laissons les Nations Unies continuer à trouver de nouvelles résolutions et de nouvelles façons d'endiguer la menace à volets multiples que pose l'Irak, tant dans la région proprement dite qu'à une plus vaste échelle internationale», cela ne change en rien la grande affection, la profonde admiration et le respect que j'entretiens à l'égard des États-Unis ou de la population de ce pays en cette période très difficile.

J'ajouterais que c'est une période fertile en créativité pour les Nations Unies. C'est un moment historique où les possibilités nouvelles abondent. C'est une période où la collectivité mondiale vient faire part aux Nations Unies d'inquiétudes sans précédent, après mûre réflexion, et animée par une résolution et une détermination d'éviter la guerre qui n'a pas eu d'égal au cours des 58 dernières années depuis qu'existe cette remarquable institution.

Au cours des dernières semaines, honorables sénateurs, j'ai cherché des ouvrages de référence pour guider ma propre réflexion concernant nos difficultés actuelles. Je me reporte aujourd'hui aux paroles d'un grand Canadien que j'ai eu le privilège de connaître. Lorsque Lester Pearson a accepté le prix Nobel de la paix en 1957, il a prononcé un discours dont je recommande la lecture à tous les honorables sénateurs. Il s'intitule «The Four Faces of Peace». Selon lui, pour aboutir à la paix:

...il faut une nouvelle et vigoureuse détermination d'utiliser toutes les techniques de discussion et de négociation disponibles ou, plus important encore, susceptibles d'être rendus disponibles pour apporter une solution aux problèmes inextricables et effrayants qui nous divisent aujourd'hui, dans un climat de peur et d'hostilité [...] et qui, partant, menacent la paix. Nous devons continuer de chercher à résoudre ces problèmes, un par un, étape par étape, à tout le moins sur la base de la tolérance réciproque et du respect mutuel de nos intérêts, si ce n'est sur une base de confiance et de coopération.

Des problèmes inextricables et effrayants. La tragédie de la guerre. Le recours à toutes les techniques de discussion et de négociation possibles. Des leçons tirées du passé. Un message lancé en 1957 par un diplomate, un professeur d'histoire, un ministre et un ancien combattant qui devait devenir ultérieurement premier ministre du Canada.

Ce message préconise la paix et la sauvegarde des vies humaines. Il préconise de faire passer l'humanité au premier plan et de rejeter les solutions rapides qui sont issues de la colère et de la frustration, aussi fondées que soient ces réactions au vu des agressions haineuses que les Américains ont subies. Oui; le message de Pearson est empreint d'une sagesse qui a traversé les générations et les décennies, qui s'est élevée au-dessus des dissensions politiques et des idéologies, qui a rallié les pays en développement comme les pays développés dans ce monde malheureux qui est le nôtre aujourd'hui. Ce message préconise de permettre aux Nations Unies de faire leur travail. Il nous encourage à nous montrer résolus, à faire preuve de détermination, à déployer notre meilleure diplomatie, à mettre tout cela au service de l'internationalisme passionné qui fait la réputation du Canada.

(1550)

Je ne suis pas de ceux qui croient que les Canadiens doivent marcher dans les traces des États-Unis au seul prétexte que cela pourrait nous être utile sur le plan politique ou économique. Le très honorable premier ministre Chrétien a posé un geste des plus mémorables dans sa carrière de premier ministre du Canada lorsqu'il est allé à Chicago, il y a deux semaines, pour porter un message important au Council on Foreign Relations et, en fait, aux Américains. C'est un message qu'il n'a pas manqué de répéter maintes et maintes fois. Il a indiqué dans son message que les institutions multilatérales sont indispensables à la bonne gestion des affaires mondiales. Il a déclaré, et je cite: «...les intérêts à long terme des États-Unis seront mieux servis s'ils font appel aux Nations Unies au lieu d'agir seuls». Plus loin, il a ajouté: «... si on lui en donne la chance, l'ONU remplira ses obligations envers la communauté mondiale.»

Honorables sénateurs, on ne saurait trop répéter ces paroles: «... si on lui en donne la chance, l'ONU remplira ses obligations envers la communauté mondiale.» En dépit de toutes les pressions que nous subissons aujourd'hui, je demeure persuadé que nous devons continuer de faire preuve de patience, de faire preuve de retenue. Nous sommes confrontés à des difficultés énormes qui semblent défier nos capacités humaines. On n'a pas réussi à convaincre une bonne partie de la communauté internationale que des frappes préventives contre l'Irak seraient conformes au droit international, ni même, et cela est encore plus important, qu'elles seraient nécessaires en ce moment.

Or, qu'on essaie de dire cela aux nombreux Américains qui sont encore ébranlés à la suite de la tragédie du 11 septembre. Leur perception est extrêmement différente de celle des Européens, qui ont été à l'abri d'attaques au cours de cette période dangereuse. Les Américains comprennent désormais toute l'importance de la sécurité nationale et sont extrêmement conscients qu'il faut tout mettre en oeuvre pour la garantir.

Par ailleurs, les Européens en sont à une étape fort différente de leur histoire. Ils sont engagés dans un processus remarquable où ils imprègnent l'Union européenne d'éléments de souveraineté. Les Européens ont connu les horreurs de deux grandes guerres sur leur territoire, et bon nombre estiment que la guerre n'est plus un instrument acceptable de politique nationale.

Le Canada, dont le regard est souvent fixé sur son immense voisin, au sud du 49e parallèle, et ses habitants sont mieux en mesure de comprendre la perception qu'ont les Américains de la sécurité nationale. Bon nombre de Canadiens ne voient peut-être pas la menace immédiate à la sécurité que pose le tyran, le dictateur et le boucher de Bagdad, Saddam Hussein, mais ils sont pleinement conscients, instinctivement et de façon réfléchie, qu'il faut traiter les perceptions des Américains comme une réalité.

En outre, beaucoup de Canadiens sérieux craignent à juste titre que, si nous appuyons notre allié sans réserve dans le recours à une force militaire contre Saddam Hussein, nous contribuerons à miner le système international que les deux pays se sont employés à bâtir.

Honorables sénateurs, actuellement, le coeur de ce système international, les Nations Unies, est le foyer de pays de petite ou de moyenne taille qui expriment leur pensée, leur opinion et leur détermination. La plus grande puissance du monde, souvent exaspérée et perplexe, siège dans les mêmes salles. Le fait est que les États-Unis sont encore là.

Laissons les Nations Unies accomplir leur travail. Peu importe la tournure des événements, ayons confiance que cette organisation internationale prouvera hors de tout doute qu'elle est plus pertinente que jamais et continuons de soutenir que, même si la communauté internationale en général abhorre Saddam Hussein, elle abhorre encore plus la guerre.

Le Canada doit tout mettre en oeuvre pour éviter la tragédie de la guerre. C'est ce que nous devons faire pour les institutions que la communauté internationale a mises sur pied depuis une demi-siècle. Ces institutions sont le seul moyen que nous avons d'assurer un minimum de paix et de sécurité au cours de ce nouveau siècle. C'est ce que nous devons faire pour les dizaines de milliers de citoyens irakiens innocents qui mourront parce qu'ils sont victimes de l'insidieuse soif de pouvoir d'un régime paria qui, il faut le préciser, n'est qu'un parmi tant d'autres. Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour éviter la tragédie d'un conflit armé, pour les États- Unis et pour leur place dans le monde. Les États-Unis ont soutenu le bien aux quatre coins du globe, mais ils risquent, aujourd'hui plus que jamais dans l'histoire, d'être mal compris et de se retrouver isolés en tant que superpuissance.

Honorables sénateurs, nous devons mettre en oeuvre tout notre arsenal de diplomatie. Le Canada est une puissance moyenne expérimentée et l'unifolié suscite le respect partout dans le monde. Cette semaine et la prochaine peuvent s'avérer un point de repère quant à ce que les générations à venir écriront au sujet de la guerre et de la paix. Le Canada doit continuer à affirmer clairement que la guerre constitue un dernier recours et qu'un conflit armé avec l'Irak ne sera pas facile. Ce sera une réalité brutale et laide qui entraînera un grand nombre de morts de part et d'autre.

On parle beaucoup des avantages d'un changement de régime, et il est vrai qu'il faut déployer tous les efforts diplomatiques, politiques et militaires, sauf la guerre, pour déloger Saddam Hussein, mais il ne faut pas oublier que la reconstruction de l'Irak, après Saddam, sera difficile et coûteuse et qu'elle exigera une vision à long terme unifiée.

La profonde tristesse inhérente à l'antiaméricanisme, dans toute son ambivalence, se ressent dans ce court poème dont j'ai pris connaissance récemment dans le Guardian Weekly de Londres. Le poème, signé par Saadi Youssef, a été traduit de l'arabe. En voici un passage:

Moi aussi, j'aime bien les jeans, Treasure Islandet le perroquet de John Silver, et les balcons de la Nouvelle- Orléans.J'adore Mark Twain et les navires à vapeur du Mississippi et les chiens d'Abraham Lincoln.J'aime les champs de blé et de maïs, et l'odeur du tabac de Virginie.Mais je ne suis pas Américain.C'est pour cela que le pilote d'un Phantom me renverra à l'âge de pierre?

(1600)

Tous les honorables sénateurs sont au courant du déplorable déferlement d'antiaméricanisme en Europe. Un grand nombre des qualités les plus admirables de l'Amérique — les fiers principes démocratiques d'une grande république, «la terre de liberté», «la patrie du courage» — ont été complètement défigurées dans bien des milieux. Dans le Times de Londres, John Le Carré a écrit le mois dernier: «L'Amérique est entrée dans l'une des périodes de folie de son histoire, mais celle-ci est pire que tout ce dont je peux me souvenir.»

Honorables sénateurs, j'exhorte les Européens à y réfléchir à deux fois avant de céder au simplisme d'un antiaméricanisme commode.

Son Honneur la Présidente suppléante: Honorables sénateurs, le temps de parole du sénateur Graham est terminé. A-t-il la permission de poursuivre?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, il serait peut-être utile de rappeler un incident qui s'est produit à une conférence internationale à laquelle j'ai assisté il y a 24 ans, soit en 1979, dix ans avant la chute du mur de Berlin. La conférence avait lieu dans le vieux Reichstag, à Berlin-Ouest comme on l'appelait à l'époque. Les participants avaient été saisis d'une résolution proposant que les Européens s'associent uniquement avec l'Alliance européenne. De toute évidence, l'objet de la résolution était de réduire la dépendance de l'Europe à l'égard de l'OTAN. Selon les rumeurs qui circulaient en coulisses, les Européens craignaient ce qu'ils percevaient comme de l'indécision de la part du président américain de l'époque, Jimmy Carter. Ils pensaient également que Ronald Reagan allait remporter les prochaines élections aux États-Unis. Ce n'est pas tant Reagan lui-même qui leur faisait peur que la ligne dure adoptée par les gens de son entourage.

Lorsque ce fut mon tour à intervenir, j'ai invité les délégués à se lever pour ce qu'on appelle en Amérique du Nord la pause de la septième manche. Je me souviens de mon discours comme si c'était hier.

On pouvait entendre le grondement sourd des chars d'assaut qui patrouillaient près de l'immeuble où nous nous trouvions et qui faisait partie du mur de Berlin. Une fois tous les délégués debout, je leur ai demandé de se tourner vers les deux fenêtres à l'arrière de la salle, par lesquelles on pouvait apercevoir les soldats au sommet de la tour d'observation du côté de Berlin-Est. Armés de mitraillettes automatiques, ils nous observaient au moyen de jumelles à travers les fenêtres de notre salle de conférence. «Dès que les Russes commenceront à franchir ce mur, leur ai-je dit, nous appellerons de nouveau nos amis, les Américains, à notre secours.» La résolution a été rejetée.

Honorables sénateurs, de nos jours, le Canada a une lourde responsabilité à assumer sur la scène internationale: éviter les conséquences d'un gigantesque choc des civilisations. En tant que nation multiculturelle reconnue à l'échelle internationale pour sa tolérance et son respect de la diversité et en tant que pays partageant un immense continent avec la seule superpuissance du monde, nous comprenons mieux que quiconque l'importance des enjeux en cause.

Pendant que nous discutons dans cette magnifique enceinte aujourd'hui, nos diplomates, ici et aux Nations Unies, travaillent des heures supplémentaires, recourant à toutes les techniques de discussion et de négociation possibles, comme Lester Pearson avait déjà conseillé de faire. Le compromis canadien au sujet de l'Irak jette des ponts et, de nouveau, nos capacités à cet égard sont essentielles à la résolution d'une sérieuse menace à la paix et à la sécurité.

Au fil des prochaines semaines, qui seront cruciales à n'en pas douter, nos diplomates et nos hommes d'État doivent demeurer et demeureront des internationalistes engagés, comme ils l'ont montré au cours des dernières décennies et comme ils le montrent encore avec brio aujourd'hui, recherchant compromis et consensus au sein de l'organisation que nous avons contribué efficacement à créer.

Laissons-les poursuivre leurs efforts et n'oublions pas que, si on leur en laisse la chance, les Nations Unies honoreront leurs obligations à l'égard de la communauté mondiale. La paix en dépend, et je crois que nous avons encore le temps de donner une chance à la paix.

Des voix: Bravo!

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, puis-je poser une question au sénateur?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Murray: Le sénateur nous a exhortés à plusieurs reprises au cours de son discours à recommander au monde de laisser les Nations Unies faire leur travail. Comment le sénateur Graham définit-il «le travail» des Nations Unies en ce qui a trait à l'Irak, à la lumière des diverses résolutions qui ont été déposées au cours des 10 ou 12 dernières années?

Le sénateur Graham: Bon nombre de résolutions ont été adoptées en ce qui a trait à l'Irak. Je reconnais que la résolution 1441 du Conseil de sécurité englobe toutes les résolutions adoptées auparavant et qui ont en fait été ignorées par l'Irak. Nous avons maintenant une nouvelle résolution, qui a été déposée par le Royaume-Uni au nom des États-Unis et de l'Espagne, si je comprends bien.

Comment les Nations Unies traiteront-ils le dossier de l'Irak? Je crois que nous en sommes parvenus à une nouvelle étape dans l'évolution de nos relations avec l'Irak et avec cette partie du monde. Je ne fais pas partie de ceux qui croient que les inspecteurs devraient avoir un mandat illimité qui leur permettrait de poursuivre leur travail pendant des mois sans en arriver à une résolution ferme. Toutefois, j'ai toute confiance en M. Hans Blix et s'il devait demander plus de temps pour que ses inspecteurs puissent terminer leur travail, nous pourrions peut-être avoir une meilleure chance de résoudre ce problème.

Le sénateur Murray: Je remercie le sénateur de sa réponse. Toutefois, pour être plus précis, j'aimerais qu'il me dise si, dans le cas de l'Irak, le travail des Nations Unies correspond à faire des inspections en Irak, ou si le travail des Nations Unies pourrait plutôt être, en fin de compte — ce qui, à son avis, pourrait être d'ici moins de quelques mois — d'inspecter et de désarmer l'Irak?

Le sénateur Graham: Oui, tout à fait.

Le sénateur Murray: L'honorable sénateur a fait allusion au compromis canadien. Je sais que, hier ou avant-hier, l'ambassadeur du Canada à l'ONU a fait une déclaration. Le sénateur Graham pourrait-il décrire le compromis canadien?

Le sénateur Graham: Le compromis canadien consiste à demander expressément que l'on accorde plus de temps aux inspecteurs pour faire leur travail et à fixer un délai précis pour la présentation du rapport définitif des inspecteurs.

Le sénateur Murray: Ce délai a-t-il été précisé?

Le sénateur Graham: Nous ne sommes pas certains de la durée précise de ce délai. Je crois que les Canadiens ont parlé de deux semaines, mais je ne sais pas si une date précise a été proposée.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Qu'arrivera-t-il ensuite?

Le sénateur Murray: M. Blix a fixé le 1er mars comme date limite pour que l'Irak détruise ses missiles. Toutefois, je pense que le Canada parle d'un échéancier général pour que le désarmement se fasse. Je voudrais poser une autre question. J'espère que ce n'est pas injuste. Je pose ma question principalement pour inciter d'autres honorables sénateurs a participer au débat. Mon parti et un certain nombre de personnes au pays ont adopté la position selon laquelle le Canada ne devrait pas participer à une intervention militaire contre l'Irak, à moins que celle-ci ne soit sanctionnée par les Nations Unies. Cette position est proche de celle des Canadiens en général.

(1600)

Étant donné que cinq pays ont un droit de veto au Conseil de sécurité des Nations Unies, l'honorable sénateur n'est-il pas préoccupé par cette position? Si le Canada et d'autres pays estiment qu'une intervention militaire est nécessaire et que celle-ci fait l'objet d'un veto par l'une des cinq puissances aux Nations Unies, notre engagement antérieur de ne pas aller en guerre, sauf sous l'égide des Nations Unies, ne constitue-t-il pas un veto à notre politique étrangère même si d'autres pays que le nôtre pourraient juger cette intervention nécessaire?

Le sénateur Graham: La question du sénateur soulève deux points. Premièrement, je crois qu'il faudrait revoir le droit de veto des cinq États membres permanents du Conseil de sécurité. Deuxièmement, je crois fermement que nous ne devrions pas déclencher une guerre contre l'Irak sans l'approbation des Nations Unies.

Le sénateur Murray: Le sénateur est-il d'avis que, en ce qui concerne le Canada, le premier ministre a laissé toutes les options ouvertes?

Le sénateur Graham: C'est pourquoi il est un chef aussi extraordinaire, honorables sénateurs, et c'est pourquoi il est premier ministre du pays depuis dix ans.

L'honorable Douglas Roche: Je félicite le sénateur et je le remercie de son discours très perspicace et sensible, qui fait honneur au Sénat. J'espère qu'il obtiendra toute la notoriété qu'il mérite. Cependant, j'ai une question à poser à l'honorable sénateur.

Ma question s'inscrit dans le contexte des propos du sénateur Graham, qui a déclaré que le Canada est une puissance moyenne qui a une grande responsabilité et une grande aptitude aux rapprochements. Je suis entièrement d'accord avec cela. Le sénateur pourrait-il puiser à même son expérience pour nous dire comment on pourrait jeter des ponts entre les deux positions que je vais décrire brièvement?

La première position se trouve exprimée dans la résolution que les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Espagne ont présentée hier aux Nations Unies. Elle ne compte qu'un véritable paragraphe après le préambule et il dit essentiellement que «L'Irak a manqué de saisir la dernière chance qui lui était offerte dans la résolution 1441». En clair, cela signifie que la guerre est imminente parce que l'Irak ne s'est pas conformée à la résolution.

La France, l'Allemagne et la Russie ont adopté la deuxième position, entièrement opposée à la première, qui est exprimée clairement dans une note émise aujourd'hui qui affirme que «Les inspections se déroulent maintenant à un rythme soutenu. Elles ne rencontrent aucun obstacle. Elles ont déjà produit des résultats». Par conséquent, ceux qui appuient cette deuxième position sont en faveur d'un processus d'inspection plus poussé et sont contre la guerre.

Peut-on établir un rapprochement entre ces deux positions? Que peut faire le Canada, tout en maintenant sa crédibilité à titre de pays médiateur, pour apporter aux Nations Unies une contribution qui permettrait d'éviter la guerre?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, le sénateur Roche a parfaitement raison. Le Canada a la réputation d'être une puissance moyenne non interventionniste qui établit des ponts. Je le répète, nous devrions poursuivre les négociations. Quelles que soient les circonstances, je ne favoriserai jamais une frappe préventive ni une guerre fondée sur la dernière résolution du Royaume-Uni, des États- Unis et de l'Espagne.

La résolution dont parle le sénateur est renvoyée dans toutes les capitales intéressées. Je crois savoir qu'elle sera à nouveau débattue, le 27 février, à une autre séance privée.

Entre-temps, je suis persuadé que le Canada saura être fidèle aux merveilleuses traditions qui ont été établies par des gens comme M. Pearson et cela, par l'intermédiaire du premier ministre et de notre ambassadeur aux Nations Unies, avec qui j'ai eu l'occasion de m'entretenir à ce sujet lorsque je suis allé à l'ONU, à la fin de novembre, avec l'Union interparlementaire.

Le sénateur Roche: Si le sénateur Graham a l'occasion de s'entretenir avec le premier ministre du Canada, j'espère qu'il lui dira qu'il est sur la bonne voie lorsqu'il essaie d'établir ce pont et qu'il a l'appui de très nombreux Canadiens à cet égard.

Le sénateur Graham: Je serais heureux de transmettre ce message au nom du sénateur Roche, qui a la réputation d'être bien connu aux Nations Unies et qui est un ancien ambassadeur en matière de désarmement. Il s'intéresse grandement, comme nous tous, aux questions de cette nature.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je remercie moi aussi le sénateur Graham de son discours. Je l'ai écouté attentivement de mon bureau. C'est l'un des avantages d'être si près de la salle du Sénat.

Pour comprendre la situation actuelle, je crois fermement qu'il faut remonter dans le passé pour voir comment tout cela a commencé et comment nous en sommes arrivés à ce point. Le sénateur Graham est un membre éminent du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et un ami. Je vois ici au Sénat au moins un survivant du fameux Comité des affaires étrangères sous la présidence du sénateur van Roggen, comité qui a étudié pendant trois ans le Proche-Orient et les intérêts du Canada dans cette région. Le sénateur Murray a joué un rôle important au début des années 80, jusqu'à ce qu'un autre sénateur qui siège de ce côté-là et dont je tairai le nom le remplace. Ce sont les deux survivants qui ont saboté l'étude du comité au bout de trois ans. Cela fera partie de mon discours lorsque viendra mon tour d'être inscrit pour le débat.

Le sénateur ne croit-il pas que, pour aider les sénateurs à avoir une meilleure compréhension de la question, on devrait faire des pressions sur le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères pour qu'il tienne au moins, comme je l'ai mentionné dans mon discours la semaine dernière, une réunion ouverte à tous les sénateurs intéressés pour faire le point sur la situation au Proche- Orient? Je ne parle pas ici d'un compte rendu des accidents, incidents, meurtres et représailles qui arrivent chaque jour, mais bien du genre de compte rendu général qui nous aidera à mieux comprendre la situation actuelle.

J'espère, sénateur Graham, que vous m'appuierez dans mes efforts au cours des semaines à venir parce que, si la guerre contre l'Irak devient une réalité, ce sera horrible, pas seulement en Irak, comme les gens le pensent, mais aussi dans d'autres parties du monde. Si quelque chose arrivait là-bas, cela engendrerait de la haine et toutes sortes de difficultés partout dans le monde. Je hais le mot «terrorisme», mais nous connaissons tous ce concept. Quiconque suit cette situation depuis 40 ans, 10 ans ou même 5 ans connaît ce concept.

(1620)

Serait-il sage que ce qui est à mon avis le comité le plus prestigieux du Sénat, soit le Comité permanent des affaires étrangères, réexamine au moins cette question? Je sais que les membres du comité subissent beaucoup de pressions pour revoir l'étude qui avait été faite par certains des sénateurs les plus en vue à l'époque, y compris les anciens sénateurs Lapointe, Hicks, Flynn et Macquarrie, qui ont consacré trois ans à cette étude. En bout de ligne, les résultats du comité ont été sabotés.

Le temps n'est-il pas venu, 20 ans plus tard, peu importe les pressions et les difficultés, de revoir la question et d'étudier le vrai rôle du Canada au Proche-Orient? Nous pourrions peut-être nous instruire de cette façon.

Aujourd'hui, nous avons entendu parler de ce que M. Pearson a fait en 1957. J'aimerais parler de ce qu'il a fait en 1947 aux Nations Unies et de son rôle à ce moment-là.

L'honorable sénateur aurait-il l'obligeance de travailler au sein de son propre parti et de se joindre à moi pour mener à bien ce projet? Je ne veux pas déblatérer contre quiconque. Je tiens seulement à ce que nous soyons mieux informés et que nous ayons un rôle à jouer. Le Canada a un rôle à jouer. Le moment n'est-il pas venu de jouer ce rôle? En étant mieux informés, nous pourrions jouer un rôle plus important.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, voilà un long préambule à une question répétée à plusieurs reprises. Je comprends cependant, avec énormément de respect, le vif intérêt manifesté par le sénateur Prud'homme à l'égard de ce problème et de la situation dans cette partie du monde. Je reconnais avec lui que si la guerre éclate en Irak, elle s'étendra aux pays adjacents.

En ce qui a trait à l'exposé de l'honorable sénateur, je serais heureux de soumettre la question au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, plus précisément à son président.

L'honorable John G. Bryden: Honorables sénateurs, j'aimerais poser une question au sénateur Graham comme suite à la question complémentaire que j'avais prévu poser au sénateur Murray.

Le Canada a-t-il clairement décidé de ne pas s'engager dans une action militaire sans le soutien des Nations Unies? Qu'arriverait-il si un des membres du Conseil de sécurité décidait d'opposer son veto? Si tous les membres du Conseil de sécurité, à l'exception d'un seul pays qui utiliserait son droit de veto, en arrivaient à la conclusion qu'il n'y a aucune autre façon de faire appliquer la résolution que par une intervention armée en Irak, quelle serait la position du Canada?

Je ne veux pas parler pour l'honorable sénateur, car aucun de nous ne sait ce qui se passera, mais cela ne donnerait-il pas un signe clair à la vaste majorité des pays représentés au Conseil de sécurité, même si la France, par exemple, décidait d'appliquer son veto? Si la position des États-Unis va à l'encontre de l'opinion publique, que veut l'opinion publique dans les circonstances?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, certains prétendent que la France pourrait utiliser son droit de veto ou même s'abstenir. Si la France s'abstient et que la résolution est adoptée, je pense que le Canada devra appuyer les Nations Unies.

Le sénateur Bryden: Que répondrait l'honorable sénateur à la question qu'on pose souvent face à cette difficile situation: pourquoi devons-nous agir maintenant, alors que cela fait longtemps que l'on constate des infractions? Qu'est-ce qui force aujourd'hui les Nations Unies à s'engager totalement et inconditionnellement dans la recherche d'une solution au problème que pose Saddam Hussein? Existe-t-il une solution satisfaisante?

Les Américains ont d'abord exigé un changement de régime, puis l'élimination des armes de destruction massive et enfin le désarmement. Est-ce que cela va jusqu'aux armes de poing? La question que je veux soulever et au sujet de laquelle j'aimerais avoir l'avis du sénateur est celle-ci: y a-t-il une limite aux concessions que doit faire le régime de Saddam Hussein pour éviter une invasion et un nettoyage par les États-Unis ?

Le sénateur Graham: Je remercie à nouveau l'honorable sénateur Bryden. L'objectif est rien de moins que le désarmement total et absolu. Je répète, nous devons nous en remettre à M. Blix pour tirer les conclusions qui s'imposent et formuler les recommandations appropriées aux instances compétentes des Nations Unies.

J'ai essayé de démontrer que les événements du 11 septembre expliquaient manifestement la grande nervosité des Américains. L'honorable sénateur demande pourquoi maintenant alors que dix ans se sont écoulés depuis la guerre du Golfe et que l'Irak a violé à maintes reprises les résolutions des Nations Unies. En fait, le régime s'y est à peine plié, voire pas du tout.

J'ai eu l'occasion d'adresser la parole à nos militaires et aux Américains travaillant au complexe du NORAD peu avant le 11 septembre. Je me rappelle leur avoir dit, à l'intérieur de Cheyenne Mountain, un endroit fascinant, à quel point nous étions fiers du rôle que nos propres forces armées y jouaient. Je suis revenu de cet endroit convaincu que le terrorisme était la menace la plus grave qui pesait sur le monde et non les missiles susceptibles d'être lancés par une puissance comme l'ancienne Union soviétique ou un état voyou. J'ai retiré deux impressions de ma visite: la menace la plus importante était le risque de lancement d'un missile par des terroristes depuis un navire de haute-mer, par exemple. L'autre grande menace était la Corée du Nord parce qu'on m'a dit à l'époque qu'elle possédait des missiles capables d'atteindre la côte ouest des États-Unis ou l'Alaska.

Le sénateur Bryden: L'honorable sénateur a soulevé beaucoup de questions intéressantes. Je vais cependant être bref. À mon avis, la question place l'administration Bush face à un problème. C'est un problème de crédibilité, compte tenu des déclarations absolues et catégoriques selon lesquelles Saddam Hussein possède des armes de destruction massive, c'est-à-dire des armes chimiques, des armes biologiques et les moyens de produire des armes nucléaires.

(1630)

Les gens ont demandé comment le gouvernement Bush savait que Saddam possédait ces armes. La réponse qu'on trouve sur Internet, c'est que Washington a les reçus.

Hier matin, j'ai entendu à la radio de la CBC la grave allégation selon laquelle des parties du fameux rapport de 1 200 pages remis par Saddam Hussein aux Nations Unies se trouvaient également entre les mains du gouvernement américain en version originale non retouchée.

Le sénateur Stratton: Est-ce un discours ou une question?

Le sénateur Bryden: J'arrive à la question.

Selon ces allégations, les noms des sociétés qui ont fourni les produits chimiques, les dessins et les plans ainsi que les noms des gens qui ont fourni des renseignements pour permettre à Saddam Hussein d'utiliser ces armes pendant sa guerre contre l'Iran auraient été supprimés dans le document et commencent tout juste à être connus.

Ma question porte sur la crédibilité. Nous avons commencé par une guerre contre le terrorisme. Le gouvernement Bush a déclaré qu'il allait retrouver Oussama ben Laden, ce qu'il n'a pas fait, et étouffer le terrorisme, ce qu'il n'a pas encore réussi à faire, même si nous aurions bien voulu qu'il le fasse.

Quand tout va mal et que nous n'arrivons à atteindre aucun de nos objectifs, nous rentrons chez nous et donnons un coup de pied au chat. Est-ce que le président Bush veut simplement attaquer une cible facile? Faut-il bien parler de «guerre contre l'Irak»? N'est-ce pas plutôt un exercice de tir réel avec des êtres vivants comme cibles?

L'honorable sénateur ne croit-il pas que le gouvernement Bush souffre d'un sérieux problème de crédibilité dans ce cas?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, j'attends avec impatience le discours du sénateur Bryden sur cette question. Je ne souhaite pas contester les motifs ou la crédibilité du gouvernement Bush.

Quand j'ai visité le NORAD, la question de l'heure était le bouclier antimissiles, dont les militaires américains et Georges W. Bush s'étaient faits les champions et dont on parlait déjà quand Bush père était président. Bien sûr, le Canada a adopté une position neutre. En fait, certains s'étaient prononcés contre le bouclier antimissiles. Je crois que notre collègue, le sénateur Roche, avait fait des déclarations au Sénat à ce sujet.

La question qui se pose est la suivante: qui va défendre l'Amérique du Nord? Allons-nous en laisser la responsabilité exclusive aux États-Unis? Le Canada a-t-il une contribution à faire? Je crois que oui, mais nous ne pouvons pas faire cette contribution en attribuant des motifs à nos amis du Sud. Toutefois, nous devons être honnêtes. J'ai dit dans mon discours que je n'appuierais pas une action unilatérale américaine causée par de simples motifs politiques ou économiques.

Le sénateur Bryden doit tirer ses propres conclusions sur la question de savoir s'il a vu les reçus après dix années de surveillance, après ce qui s'est passé entre les États-Unis et l'Irak, et en particulier Saddam Hussein, et après le travail de tous les agents des États-Unis et des autres pays qui ont examiné la situation de l'intérieur — pour les bonnes raisons, nous l'espérons, c'est-à-dire pour désarmer cette région du monde et y rétablir la paix, ainsi que partout ailleurs dans le monde.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, je me joins aux autres honorables sénateurs pour remercier le sénateur Graham de son discours.

Le sénateur Graham a parlé de la tragédie du 11 septembre. Si je l'ai bien compris, il soutient qu'il est possible de comprendre la psychologie américaine à la lumière de cette horrible expérience.

Est-il d'avis qu'il existe une relation entre le désarmement de l'Irak, processus qui a commencé au début des années 90, et la tragédie du 11 septembre, qui s'est produite une décennie plus tard?

Le sénateur Graham: Je remercie l'honorable sénateur Kinsella de sa question. Il a déjà brillamment contribué à ce débat d'un point de vue juridique. J'ai dû lire son intervention à plusieurs reprises pour comprendre les détails du droit international que l'honorable sénateur a évoqués.

Le sénateur Bryden a posé la même question que le sénateur Kinsella: pourquoi maintenant? Je crois qu'il existe un rapport direct entre les événements du 11 septembre et les mesures prises à l'heure actuelle.

Le sénateur Kinsella: Dans l'analyse du sénateur Graham, la réaction des États-Unis rappelle un peu leur réaction à l'attaque contre Pearl Harbour qui, de l'avis de beaucoup d'observateurs, était justifiée puisqu'ils venaient de subir une attaque directe.

Est-ce que le sénateur Graham pense que la politique américaine actuelle est une réaction du même ordre que l'attentat commis contre les tours jumelles? Est-ce là la justification d'une invasion possible de l'Irak?

Le sénateur Graham: Il pourrait y avoir un rapport avec le moment choisi pour réagir. Quand le président Bush a visité le site de l'attentat qui a détruit les tours jumelles, il s'est servi d'un mégaphone pour parler. Un pompier lui a crié: «Parlez plus fort, nous ne vous entendons pas.» Le président Bush a répondu en substance: «Eh bien, je peux vous entendre, et le monde entier vous entendra et nous entendra. Et les responsables seront châtiés pour leur action ignoble.»

(1640)

Le sénateur Kinsella: C'est ce qui m'inquiète beaucoup. Est-ce que l'honorable sénateur croit qu'il y a une relation de cause à effet entre le fait d'amasser des armes de destruction massive, d'une part, et le fait pour la communauté mondiale de décider qu'après l'invasion d'un pays voisin par l'Irak il y a onze ans, la tragédie du 11 septembre justifie une invasion possible de l'Irak? Cette relation causale est-elle distincte de l'invasion du Koweït et de l'utilisation d'armes de destruction massive? La communauté mondiale a dit dans diverses résolutions, y compris la résolution 1441, que l'Irak a l'obligation morale de se débarrasser de ces armes.

J'aimerais comprendre l'argument avancé par ceux qui tentent d'établir un lien entre le 11 septembre et les armes de destruction massive possédées par l'Irak, dont la communauté mondiale a ordonné l'élimination.

Le sénateur Graham: Je crois qu'il y a deux situations distinctes.

Le sénateur Kinsella: D'accord.

Le sénateur Graham: Je crois que le 11 septembre est le catalyseur qui permet, encore une fois, de répondre à la question du sénateur Bryden: pourquoi maintenant? La résolution 1441 est pleine de mentions d'autres résolutions et de promesses non tenues. Après l'invasion du Koweït, le monde a réagi et a obtenu certains engagements de Saddam Hussein. Toutefois, malgré toutes les résolutions des Nations Unies, les promesses n'ont pas été tenues. Je crois qu'il y a un lien direct entre le choix du moment de la réaction actuelle et le 11 septembre.

(Sur la motion du sénateur Rompkey, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 26 février 2003, à 13 h 30.)


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