Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 52
Le mardi 6 mai 2003
L'honorable Dan Hays, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- Les pêches et les océans
- La défense nationale
- Le remplacement des hélicoptères Sea King—Le courriel adressé par l'ambassadeur en France aux hauts fonctionnaires du cabinet du premier ministre au sujet d'Eurocopter
- Le remplacement des hélicoptères Sea King—Les modifications apportées aux besoins opérationnels et de mission pour satisfaire Eurocopter
- La citoyenneté et l'immigration
- La banque du Canada
- Le commerce international
- Dépôt de réponses à des questions inscrites au
Feuilleton
- L'Agence des douanes et du revenu du Canada—La Loi sur les carburants de remplacement
- L'Agence canadienne de développement international—La Loi sur les carburants de remplacement
- L'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec—La Loi sur les carburants de remplacement
- La Commission des champs de bataille nationaux—La Loi sur les carburants de remplacement
- ORDRE DU JOUR
- Projet de loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon
- La Loi sur l'hymne national
- Projet de loi sur Louis Riel
- Transports et communications
- La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale
- Pêches et océans
- Le Sénat
- L'héritage de gaspillage—Les années Chrétien-Martin
- L'Association parlementaire Canada-Europe
- Le budget de 2003
- Une nouvelle Constitution pour l'Irak
LE SÉNAT
Le mardi 6 mai 2003
La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
LA SEMAINE NATIONALE DES SOINS PALLIATIFS
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la semaine du 5 au 11 mai a été déclarée Semaine nationale des soins palliatifs au Canada. Cette manifestation annuelle nous fournit l'occasion non seulement de sensibiliser la population à l'utilité des soins palliatifs, mais aussi de prendre le temps de personnellement réfléchir à la façon dont les Canadiens achèvent leur vie. En ma qualité de ministre chargée spécialement des soins palliatifs, je fais de mon mieux pour m'assurer que chaque Canadien a droit à une fin de vie de qualité.
Cette année, en particulier, je suis très fière de célébrer la Semaine des soins palliatifs, car le gouvernement du Canada, en collaboration avec nos partenaires clés, a beaucoup accompli. Pour la première fois de notre histoire, des membres de la famille renonçant provisoirement à leurs activités professionnelles pour s'occuper d'un être cher en fin de vie auront droit à un congé pour soins prodigués par compassion et à des prestations en vertu du programme d'assurance-emploi du Canada. C'est là une réalisation exceptionnelle à mon avis.
Ce matin, lors d'un petit déjeuner spécial organisé dans le foyer du Sénat, nous avons été quelques-uns à nous réunir pour célébrer le fait d'avoir réussi à améliorer la qualité et la disponibilité des soins palliatifs pour les Canadiens.
Il n'est jamais aisé de s'occuper d'un être cher en fin de vie. Pourtant, tous les jours, au Canada, des aidants naturels dispensent généreusement des soins et du réconfort à ceux qui ont atteint ce stade de la vie.
J'invite les honorables sénateurs à se joindre à moi pour féliciter et remercier ces personnes exceptionnelles qui, discrètement et bravement, apportent dignité et soutien aux mourants. Il ne serait tout simplement pas possible d'assurer des soins palliatifs de qualité en l'absence des innombrables bénévoles, professionnels de la santé et travailleurs communautaires qui y contribuent au quotidien.
Cette année, près de 10 000 bénévoles et participants ont contribué aux soins palliatifs, mais d'une façon différente, en participant cette fois à une campagne nationale de collecte de fonds pour ce type de soins. Les Marches pour les soins palliatifs a eu lieu dimanche dernier dans 78 localités canadiennes et j'ai eu le plaisir d'accompagner les marcheurs à Winnipeg. Cette manifestation a sensibilisé la population et a permis de recueillir 300 000 $ pour les soins palliatifs. Je félicite tous ceux qui ont mis leurs chaussures pour participer à cette marche qui, je suis persuadée, se répétera dans l'avenir.
LE SOIXANTIÈME ANNIVERSAIRE DE LA BATAILLE DE L'ATLANTIQUE
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, le soleil s'est levé dimanche matin sur le monument commémoratif du parc Point Pleasant, à Halifax, pour illuminer les cérémonies marquant le soixantième anniversaire de la bataille de l'Atlantique. Dans le cadre d'une cérémonie colorée, des rangées d'anciens combattants en uniforme ont rendu hommage aux Canadiens qui ont perdu la vie durant la bataille.
La bataille de l'Atlantique a été la campagne la plus longue et, on peut l'affirmer, la plus critique de la Seconde Guerre mondiale. Du début de la guerre, en septembre 1939, jusqu'à sa fin en mai 1945, les marins canadiens et les membres de notre marine marchande ont fait face aux terribles tempêtes, aux glaces, au froid mordant et à la grande noirceur des nuits de l'Atlantique Nord pour livrer des fournitures à l'Angleterre.
En 1943, les alliés ont réussi à renverser la vapeur contre les sous-marins allemands et à prendre le contrôle des voies maritimes de l'Atlantique. Les navires canadiens ont coulé 27 sous-marins ennemis et ont coulé, capturé ou détruit 42 navires ennemis. Durant la guerre, les navires marchands ont transporté 182 millions de tonnes de marchandises vers le Royaume-Uni sous escorte canadienne. Quelque 90 000 tonnes d'approvisionnements de guerre ont été acheminées quotidiennement vers les champs de bataille en Europe.
Des dizaines de gerbes ont été déposées en souvenir des plus de 900 membres d'équipage d'aéronef tués durant la bataille de l'Atlantique. Entre 1939 et 1945, plus de 1 700 membres de la marine ont perdu la vie sous le feu ennemi. Un moment touchant de la cérémonie a été le dépôt d'une gerbe par le contre-amiral à la retraite Desmond Piers, de Chester. Des centaines de personnes ont assisté à la cérémonie commémorative de Halifax qui comprenait la lecture de prières et la sonnerie aux morts des navires de Sa Majesté et des navires de la marine marchande canadienne.
Honorables sénateurs, le rôle de la Nouvelle-Écosse dans la protection du Canada durant la Seconde Guerre mondiale a été important. La péninsule de la Nouvelle-Écosse, longue de 580 kilomètres, est entourée d'eau. Avec une superficie de 55 000 kilomètres carrés et une largeur moyenne de 128 kilomètres, aucune région de la province n'est éloignée de la mer. Les membres des Forces canadiennes ont surveillé les messages transmis par les navires allemands dans l'océan Atlantique et ont détecté leur emplacement en fonction des signaux reçus. Sans ces services de surveillance, le Canada n'aurait pas été en sécurité durant la Seconde Guerre mondiale.
La Seconde Guerre mondiale a également mis en évidence l'importance de Halifax, la capitale de la Nouvelle-Écosse, comme l'un des grands ports militaires du monde. Halifax était le point de rassemblement pour les navires traversant l'Atlantique Nord en convois durant la Seconde Guerre mondiale.
(1410)
LE MOIS DE LA SENSIBILISATION À LA SCLÉROSE EN PLAQUES
L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, j'attire aujourd'hui votre attention sur le fait que mai est le Mois de la sensibilisation à la sclérose en plaques.
La sclérose en plaques est une affection du système nerveux central qui peut s'avérer très invalidante. C'est l'une des maladies neurologiques les plus courantes au Canada, puisqu'on en diagnostique plus de trois victimes par jour. Les femmes en sont deux fois plus souvent atteintes que les hommes. La sclérose en plaques peut entraîner des pertes d'équilibre, la paralysie et une fatigue extrême et affecter la parole et la vue.
Les causes de cette maladie demeurent encore inconnues. Toutefois, les chercheurs en apprennent chaque jour davantage à son sujet. Au Canada, les autorités ont approuvé certains médicaments visant à réduire la fréquence et la gravité des attaques de sclérose en plaques. Les chercheurs qui collaborent avec la Société canadienne de la sclérose en plaques concentrent leurs travaux dans les six domaines suivants: la réparation et la croissance de la myéline, une enveloppe protectrice qui couvre le cerveau et la moelle épinière et qui est attaquée par la sclérose en plaques; le système immunitaire; la recherche virologique; la génétique; les études en IRM et la recherche en santé. L'ensemble de cette recherche a pour objet de comprendre la maladie, de trouver un traitement et d'aider les personnes ayant reçu un diagnostic de sclérose en plaques à faire face à cette maladie.
Je félicite la Société canadienne de la sclérose en plaques et tous les bénévoles de leur travail acharné. Cette société fondée par des bénévoles fonctionne grâce au dévouement d'environ 13 500 bénévoles répartis d'un océan à l'autre. L'an dernier, au cours de la campagne de l'œillet, les bénévoles ont vendu pour un million de dollars d'œillets pour soutenir la recherche sur la sclérose en plaques. Le concours des bénévoles est également crucial dans le cadre des activités de service et de soutien destinées à aider les victimes de sclérose en plaques à faire face à leur maladie.
Je tiens également à remercier toutes les personnes qui ont appuyé la recherche sur la sclérose en plaques. Je suis certaine que, cette année, la campagne de l'œillet, qui aura lieu pendant le week-end de la Fête des mères, connaîtra autant de succès que l'an dernier et permettra de mieux comprendre cette maladie et d'y trouver un traitement.
[Français]
LE NOUVEAU-BRUNSWICK
LES ÉVÉNEMENTS RÉCENTS AU SEIN DE LA COMMUNAUTÉ ACADIENNE
L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, vivre dans un pays démocratique comme le Canada, avec le droit de manifester nos émotions et nos déceptions, nous permet de nous questionner constamment sur nos vraies valeurs. C'est là où sont aujourd'hui les résidants de la péninsule acadienne et de la province du Nouveau-Brunswick. Le dimanche 20 avril, un jeune Acadien de la péninsule acadienne du nom de Wilfred LeBouthillier a su faire vibrer l'Acadie devant quatre millions de téléspectateurs à travers le pays.
Par son talent, sa persévérance et son authenticité, Wilfred a été un ambassadeur hors pair pour l'Acadie.
[Traduction]
Honorables sénateurs, en ce 6 mai, le Globe and Mail présente Wilfred LeBouthillier comme l'idole de l'Acadie. Le jeune homme a été couronné champion du concours Star Académie, version québécoise de la série télévisée américaine American Idol. On peut entre autres lire ce qui suit dans le Globe and Mail:
Des fans hystériques embrassent littéralement le pavé devant la maison familiale du jeune homme.
C'est la vérité.
[Français]
Certains sceptiques diront que c'est une grosse machine médiatique pour acheter des votes. Mais je cite notre collègue et artiste Viola Léger, qui dit: «On n'achète pas le charisme et le talent.» Wilfred en est un exemple.
Malheureusement, deux semaines plus tard, les 2 et 3 mai, la même péninsule acadienne était sous le choc et la désolation de voir les incendies et les dommages que les gens ont causés à Shippagan. Devant ces scènes de violence, nous devons tous clamer haut et fort notre désaccord.
Le premier ministre Bernard Lord a condamné ces actes de violence en disant: «Ce n'est pas acceptable d'agir de cette façon. Il n'y a absolument rien pour justifier ce comportement.»
Hier soir au Téléjournal de Radio-Canada, j'étais heureuse d'entendre M. Noël, le président de l'Association des pêcheurs traditionnels — ceux qui doivent partager les quotas — dire à Stéphan Bureau que son association dénonçait cette violence.
Alors, l'expression de fierté, de joie et d'euphorie vis-à-vis la Wilfredmania s'est transformée en un ouragan de violence et de destruction. Historiquement, le peuple acadien n'est pas violent. Le sénateur Robichaud disait: «On nous a déportés en 1755 sans violence.»
Pour terminer, je cite Serge Roussel, doyen de la faculté de droit de l'Université de Moncton, qui dit dans l'Acadie nouvelle:
[...] d'aucune manière, on ne doit comprendre et accepter que, dans un pays comme le nôtre, on en vienne à utiliser la violence et les incendies criminels pour manifester et exprimer son mécontentement et sa colère.
Mais il n'en demeure pas moins que l'image qui transpire d'une telle situation est peu enviable et que celle de Wilfred nous représente plus fidèlement.
Honorables sénateurs, je vous invite à venir nous voir en Acadie pour constater la joie, la cordialité et l'hospitalité du peuple acadien.
L'ONTARIO
TVONTARIO—DISPONIBILITÉ DE L'HORAIRE DE LA PROGRAMMATION EN FRANÇAIS
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, en Ontario nous avons deux chaînes de télévision éducative: TVO, la chaîne anglaise, et TFO, la chaîne française.
Jusqu'à récemment, le télé-horaire bimensuel bilingue Signal donnait un aperçu de la programmation de ces deux chaînes de télévision éducative.
Dernièrement, sans mot dire, la direction de TVOntario a distribué son magazine Signal en anglais seulement. Cette décision de ne pas publier dans les deux langues officielles a surpris un grand nombre de téléspectateurs.
On ne connaît pas les raisons véritables de cette décision de vouloir séparer le télé-horaire francophone de l'anglophone. Ni les membres de la direction de TFO ni les francophones et francophiles, qui sont nombreux en Ontario, n'ont été informés d'avance de l'interruption de ce service. Pour certains de ces abonnés, cette décision est inacceptable et représente un recul important pour les Franco-Ontariens. Je dirais même que cette décision administrative est «divisive» pour les communautés linguistiques.
Dans une lettre que j'ai adressée à Mme Bassett, présidente- directrice générale de TFO/TVO, je lui demande de revenir sur sa décision et de remettre les pendules à l'heure en publiant à nouveau le magazine Signal dans les deux langues officielles. Si cette décision a été prise par mesure d'économie, Mme Bassett a été mal conseillée, et je lui demande de changer sa décision.
L'Ontario comporte 1 319 715 personnes bilingues. Qu'elles portent le nom de Gauthier, Smith, Lesley, Tranchemontagne ou Fraser, cela n'a pas d'importance, cela n'indique pas la langue utilisée tous les jours ou le choix de leur programmation de la télévision éducative en Ontario. La télévision éducative s'adresse aux anglophones comme aux francophones.
Je disais à Mme Bassett, dans ma lettre, que si elle était sur la voie d'une gestion séparée de TVO et TFO, plusieurs personnes l'appuieraient. Il y a longtemps que l'on dit que la gestion de l'éducation devrait relever de la communauté francophone. Si Mme Bassett veut vraiment séparer les deux, elle est sur la bonne voie.
La télévision éducative est un établissement d'enseignement au même titre qu'une école, un collège ou une université. Peut-être est-il temps de demander aux tribunaux d'interpréter et de transférer ce droit de gestion à la communauté francophone. C'est la majorité anglophone qui gère présentement la télévision éducative en Ontario. Peut-être veulent-ils changer le système, nous verrons.
[Traduction]
AFFAIRES COURANTES
L'ÉTUDE SUR L'APPLICATION DE LA LOI SUR LA FAILLITE ET
L'INSOLVABILITÉ ET DE LA LOI SUR LES ARRANGEMENTS
AVEC LES CRÉANCIERS DES
COMPAGNIES
AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ DES BANQUES ET DU COMMERCE À REPORTER LA DATE DE PRÉSENTATION DE SON RAPPORT FINAL
L'honorable E. Leo Kolber: Honorables sénateurs, je donne avis qu'à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:
Que la date de présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce au sujet de son étude sur l'application de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, autorisée par le Sénat le 29 octobre 2002, soit reportée au jeudi 18 décembre 2003.
(1420)
L'ACCÈS AUX DONNÉES DU RECENSEMENT
PRÉSENTATION DE PÉTITIONS
L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, j'ai de nouveau l'honneur de présenter une pétition comprenant 431 signatures de Canadiens venant des municipalités de Maple Ridge, Quesnel, Campbell River, Prince Rupert, Nanaimo et Port Coquitlam, dans la province de Colombie-Britannique; de la ville de Toronto et des municipalités de Don Mills, Unionville, Bracebridge, Newmarket, Peterborough et Milton dans la province d'Ontario; de la ville de Halifax ainsi que des municipalités de Trenton et New Glasgow, dans la province de Nouvelle-Écosse. Les pétitionnaires sont à la recherche de leurs ancêtres.
J'ai aussi la signature de 69 Américains et d'une personne venant du Royaume-Uni qui sont également à la recherche de leurs racines canadiennes. Un total de 501 personnes présentent la pétition suivante:
Les pétitionnaires prient le Parlement d'adopter toutes les mesures qui s'imposent pour modifier rétroactivement les dispositions de la Loi sur la statistique applicables depuis 1906 en matière de confidentialité et de protection des renseignements personnels, afin que puissent être rendus publics au bout d'une période raisonnable les rapports de recensement postérieurs à 1901, en commençant avec le recensement de 1906.
J'ai maintenant présenté des pétitions regroupant 20 987 noms à cette 37e législature et des pétitions réunissant 6 000 noms à la 36e législature. Toutes demandaient une intervention immédiate concernant cet important volet de l'histoire canadienne que nous pourrons sous peu, je l'espère, mettre à la disposition des pétitionnaires.
Des voix: Bravo!
PÉRIODE DES QUESTIONS
LES PÊCHES ET LES OCÉANS
SHIPPAGAN, AU NOUVEAU-BRUNSWICK—LA RÉDUCTION DES QUOTAS DE CRABE DES NEIGES
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Les Canadiens ont récemment appris de la bouche de la ministre Copps que certains de ses collègues du Cabinet disparaissent lorsque leur ministère fait face à une crise.
Dans la foulée des actes de violence commis à Shippagan, au Nouveau-Brunswick, à cause de la décision du ministre des Pêches de réduire les quotas de crabe des neiges, quand le ministre va-t-il se rendre à Shippagan ou, comme d'autres ministres de Paul Martin, va-t-il décider de s'effacer?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'accepte aucun des préambules formulés par l'honorable sénateur dans sa question.
Cependant, je crois savoir que le ministre des Pêches est tout à fait disposé à rencontrer les pêcheurs de crabe dans le courant de la semaine.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, dans ce cas, madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle dire aux sénateurs pourquoi le ministre des Pêches et des Océans a réduit le total autorisé des captures de crabe des neiges de 5 000 tonnes métriques au Nouveau-Brunswick, après s'être montré incapable de parvenir à une entente avec les pêcheurs? Quels facteurs a-t-il pris en compte dans sa décision?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je tiens tout d'abord à préciser qu'il s'agit d'une réduction de quotas, et certainement pas d'une fermeture de la pêche, comme c'est malheureusement le cas pour la morue.
Le ministre des Pêches et des Océans a agi ainsi parce que la conservation revêt une importance primordiale et que c'est tout à fait crucial pour lui de protéger les stocks de crabe. Ces stocks sont précieux, non seulement pour le Nouveau-Brunswick mais aussi pour les provinces de Québec, de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du- Prince-Édouard. Le ministère doit, au mieux de sa capacité, protéger ces stocks.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, ce qui est troublant dans ce dossier c'est que, après les actes d'extrême violence perpétrés à Shippagan, le ministre des Pêches songe à modifier sa décision antérieure en relevant les contingents de 3 000 à 4 000 tonnes métriques. Cela représente à toutes fins pratiques un renversement de sa décision de réduire les quotas de pêche de 5 000 tonnes métriques cette année, et je crois comprendre que le ministre avait pris cette décision pour les bonnes raisons qu'il avait indiquées à la Chambre, à savoir des raisons d'ordre écologique.
D'où la question suivante: si le ministre des Pêches et des Océans songe à modifier sa décision, a-t-il tenu compte des répercussions écologiques et politiques de la décision qu'il a déjà prise, ou faut-il comprendre que sa décision préalable de réduire les quotas de pêche était malavisée ou qu'il cède devant l'utilisation de la violence comme moyen de négociation?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, l'élément essentiel qu'il ne faut pas perdre de vue en l'occurrence est la cogestion et la nécessité de parvenir à un accord de cogestion aux termes duquel non seulement le ministère des Pêches mais les pêcheurs eux mêmes participent à la gestion des stocks de crabes. Cela n'a pas encore été fait et cela doit être fait si nous voulons protéger cette précieuse ressource.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, j'en déduis donc que le ministre et ses fonctionnaires s'en tiennent aux objectifs écologiques de la gestion des pêches et ne sont pas influencés par la violence dont nous avons été témoins.
Étant donné les actes de violence déclenchés par les mesures relatives aux stocks de morue, pourquoi le ministre n'était-il pas convenablement préparé de manière à éviter la violence dont nous avons été témoins à Shippagan? Où était le ministre? Nous continuons à nous poser cette question. Pourquoi n'a-t-il pas pris les précautions nécessaires sachant, comme tout le monde aurait pu le prévoir, qu'une telle éventualité risquait de se présenter? En outre, étant donné les pertes de biens qui ont eu lieu, le ministre va-t-il se rendre à Shippagan?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, comme l'a dit le sénateur, il y a eu une série d'actes de violence. Fait intéressant, d'après mes renseignements, le ministre s'est entretenu avec les pêcheurs et les organisations qui les représentent. Ces derniers lui ont dit qu'ils étaient mécontents que les quotas soient réduits, mais qu'ils ne pensaient pas qu'il y aurait des manifestations et certainement pas des actes de violence.
Honorables sénateurs, j'aimerais parler du rôle de la GRC dans cette affaire. Les agents de la GRC, qui se sont trouvés tout à fait dépassés par cet incident, ont réagi avec beaucoup de calme et de maturité en s'employant en premier lieu, comme il se doit, à protéger les vies humaines.
Le sénateur Kinsella: Les honorables sénateurs seront heureux de savoir que, au Nouveau-Brunswick, le premier ministre Lord a envoyé aujourd'hui deux membres de son cabinet dans la péninsule acadienne, tout comme le premier ministre Eves, de l'Ontario, avait dépêché son ministre de la Santé à Genève pour y rencontrer des représentants de l'OMS. Il semble par contre que les ministres de ce gouvernement se cachent dès qu'il y a une crise.
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, c'est tout à fait faux. Le ministre ne se cache pas. Le ministre travaille avec ses fonctionnaires et avec les pêcheurs de cette localité afin de ramener le calme. Je ne pense pas qu'il serait sage pour le moment d'organiser une réunion à moins que nous sachions que les dispositions nécessaires ont été prises pour qu'elle soit fructueuse.
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, en réponse à la première question du sénateur Kinsella, madame le ministre a déclaré que la réduction du quota de 5 000 tonnes était une mesure de conservation. Par la suite, elle a parlé de cogestion. Est-ce que, comme je le comprends, la réduction du total autorisé des captures de 5 000 tonnes était une tactique employée par le ministère pour inciter les pêcheurs à se présenter à la table de négociation pour qu'alors le TAC puisse être augmenté de 5 000 tonnes?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, c'est une question de cogestion. Il est certain que le ministre aimerait que les stocks de crabe soient cogérés. Il pense que c'est crucial pour l'industrie. Il croit que si les parties peuvent conclure une entente de cogestion, il pourra être possible d'accroître le quota. Cependant, il faudrait vraiment que tous les pêcheurs, des eaux intérieures ou du large, acceptent de participer pleinement à la cogestion de la ressource.
Le sénateur Comeau: Je crois comprendre — et je ne connais pas aussi bien que je le voudrais probablement le régime de gestion dans la région de Shippagan — qu'il existe un régime de cogestion dans cette région depuis un bon nombre d'années déjà, en vertu duquel les pêcheurs de crabe paient pour les mesures scientifiques auxquelles le ministère ne voulait pas contribuer.
(1430)
En effet, il y avait un système de cogestion. Serait-ce une tactique de la part du gouvernement de réduire le total autorisé des captures de manière à ce que le ministère obtienne ce qu'il veut des pêcheurs de crabe? Serait-ce une nouvelle tactique? C'est la première fois que j'en entends parler.
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, toute entente de cogestion vise exactement le même objectif que la réduction des quotas. Il s'agit d'assurer que les pêcheurs auront accès à une quantité adéquate de crabe, non seulement cette année ou l'année prochaine, mais à long terme. Le crabe est une ressource extrêmement précieuse. Honnêtement, les pêcheurs de morue aimeraient bien avoir le type de revenus des pêcheurs de crabe. Toutefois, ces revenus ne seront pas durables à moins que la ressource ne soit gérée de façon appropriée et, à cet égard, la cogestion est essentielle.
Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, j'ai encore de la difficulté à comprendre. J'essaie de comprendre la nature du problème. Je comprends le principe de la cogestion. Le ministère, de concert avec les pêcheurs, instaure un système de contrôle et des mesures de conservation. Ce que je ne comprends pas, c'est que le ministère utiliserait une nouvelle tactique consistant à réduire le total autorisé des captures de manière à obtenir ce qu'il veut. Je croyais que les pêcheurs de crabe dans cette région ne dépassaient pas les quotas alloués et qu'ils respectaient toutes les mesures de conservation.
Qu'est-ce que le ministère veut obtenir des pêcheurs de crabe? Que je sache, il ne s'agit certainement pas d'augmenter les mesures de conservation, ni de forcer les pêcheurs de crabe à observer une éthique de conservation.
Le sénateur Carstairs: À ma connaissance, honorables sénateurs, le but de cette initiative est d'obtenir une entente de cogestion et on n'y est pas encore parvenu. Voilà où on en est. L'entente que le sénateur a signalée est expirée. Elle doit être renouvelée de manière à assurer que des mesures de conservation pertinentes sont prises.
LA DÉFENSE NATIONALE
LE REMPLACEMENT DES HÉLICOPTÈRES SEA KING—LE COURRIEL ADRESSÉ
PAR L'AMBASSADEUR EN FRANCE AUX HAUTS FONCTIONNAIRES
DU CABINET DU PREMIER
MINISTRE AU SUJET D'EUROCOPTER
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur les hélicoptères maritimes.
J'ai obtenu dans le cadre de la Loi sur l'accès à l'information un courriel en date du 3 avril 2001 adressé par M. Raymond Chrétien, ambassadeur en France, à MM. Jean Pelletier et Eddie Goldenberg, au CPM, à Mel Cappe, au BCP, et au vice-premier ministre de l'époque, M. Herb Gray. C'était il y a quelques années. Ce courriel faisait état de trois modifications que Eurocopter exigeait pour participer au projet de l'hélicoptère maritime. Le courriel conclut ainsi:
C'est un projet très important, tant du point de vue commercial que politique.
Madame le leader pourrait-elle nous dire pourquoi notre ambassadeur en France, qui est le neveu du premier ministre, ferait part des préoccupations d'Eurocopter aux principaux collaborateurs et conseillers politiques du premier ministre au CPM, au BCP ainsi qu'au Cabinet plutôt que d'écrire à Travaux publics, au Conseil du Trésor ou au ministère de la Défense nationale? Pourquoi M. Raymond Chrétien voudrait-il mêler le CPM et le BCP à cela? Avait-il reçu des ordres à cet effet?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, avec tout le respect que je vous dois, je suis forcée de dire que je n'en sais rien. Je présume que le sénateur ne s'attendait pas à ce que je puisse répondre à une question portant sur un courriel que je n'ai jamais lu. Je vais prendre cette question en délibéré et tenter d'obtenir des renseignements à ce sujet le plus rapidement possible.
Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, j'ai deux questions complémentaires à poser.
Dans le même document, il y a une note adressée à André Juneau et François Guimont dans laquelle on demande si les préoccupations d'Eurocopter sont réelles, et le cas échéant, pourquoi la troisième n'a pas été reprise dans la lettre d'intérêt. Cette note était signée par Mel Cappe je crois. Madame le leader peut-elle nous dire pourquoi l'ancien greffier du Bureau du Conseil privé est mêlé à ce dossier?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je ne suis pas en mesure de répondre à cette question aujourd'hui. Comme pour la question précédente, je vais prendre celle-ci en délibéré et je tenterai d'obtenir des réponses aux questions du sénateur.
Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, je présume que madame le leader du gouvernement, qui était membre du gouvernement à l'époque, ne connaît peut-être pas non plus la réponse à ma prochaine question. Peut-elle nous dire pourquoi M. Raymond Chrétien a dit du projet d'hélicoptère maritime que «c'est un projet très important [...] du point de vue [...] politique»?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je n'essayerai pas d'interpréter les propos de M. Raymond Chrétien, ambassadeur en France et homme très compétent. M. Chrétien est un fonctionnaire très professionnel du ministère des Affaires étrangères depuis plusieurs années. Je crois que le mieux serait que je me renseigne afin d'informer ensuite le sénateur.
LE REMPLACEMENT DES HÉLICOPTÈRES SEA KING—LES MODIFICATIONS APPORTÉES AUX BESOINS OPÉRATIONNELS ET DE MISSION POUR SATISFAIRE EUROCOPTER
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, voici ma dernière question. Madame le ministre peut sûrement y répondre. Elle porte sur le fait que la ministre me rappelle constamment que les besoins opérationnels n'ont pas changé, malgré les modifications apportées à la configuration et aux capacités de l'appareil dans toutes sortes de situations, et en dépit du fait que j'insiste pour dire que ce ne sont pas les besoins opérationnels qui ont changé, mais bien les besoins de mission. Madame le ministre pourrait-elle me dire si des modifications tenant compte des besoins de mission, sinon des besoins opérationnels, non seulement d'Eurocopter, mais également de l'industrie en général, ont été apportées ou non?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, permettez-moi d'être claire. Je vais relire ce passage. Je sais que je l'ai déjà lu, mais je le relis, car j'estime que cela est important: les spécifications des besoins du Projet d'hélicoptère maritime, SBPHM, qui sont les spécifications techniques détaillées du projet, sont toujours régies par les principes établis dans l'énoncé des besoins opérationnels. Les modifications apportées aux spécifications techniques sont le fruit d'un dialogue d'une transparence sans précédent avec l'industrie et les intéressés. Les auteurs de l'énoncé des besoins opérationnels ont examiné toutes les modifications qui ont été apportées aux spécifications techniques et ont été satisfaits de ces modifications. Ils estiment que les spécifications techniques sont entièrement conformes à l'énoncé des besoins opérationnels.
Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, comme nous l'avons dit à maintes reprises, les besoins opérationnels exigent un appareil capable de rester en vol stationnaire avec un moteur en panne. L'Eurocopter est doté de deux moteurs, mais il ne peut pas — je répète, il ne peut pas — rester en vol stationnaire, comme l'exige l'énoncé des besoins opérationnels, pendant le temps voulu. Il est intéressant de noter que le Cormorant et le Sikorsky sont dotés de trois et deux moteurs respectivement. Avec un moteur en panne, il leur en reste au moins un et ils peuvent tout de même fonctionner.
Le sénateur Carstairs: Il est évident que l'honorable sénateur a déjà décidé quel hélicoptère répondrait le mieux aux besoins des militaires canadiens. Il a le droit de prendre une telle décision en sa qualité de sénateur. Cependant...
Le sénateur Forrestall: Répondez à la question.
Le sénateur Carstairs: ...je crois que le gouvernement du Canada a non seulement le droit, mais l'obligation d'obtenir le meilleur hélicoptère possible pour les forces armées canadiennes.
(1440)
Le sénateur Forrestall: Le gouvernement du Canada a aussi le devoir et l'obligation d'être ouvert, franc, honnête et transparent et de dire aux contribuables dans quel contexte de fumisterie s'est négocié ce contrat. J'invite madame le leader à lire le courriel que j'ai cité il y a quelques instants. Nous reprendrons cette discussion demain.
Le sénateur Carstairs: Avec tout le respect que je porte à l'honorable sénateur, je dois dire qu'il est difficile d'être plus ouvert, franc, honnête et transparent que nous l'avons été car nous avons affiché tout le dossier sur le site Web.
LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION
LA RECHERCHE DES REVENDICATEURS DE STATUT DE RÉFUGIÉ ÉCONDUITS
L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur l'immigration. Dans son récent rapport, la vérificatrice générale affirme que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a tardé à renvoyer du Canada les revendicateurs jugés ou considérés comme non admissibles. En conséquence, au cours des six dernières années, le gouvernement fédéral a perdu la trace d'environ 36 000 revendicateurs du statut de réfugié éconduits. En outre, quelque 50 000 revendicateurs sont en attente d'audience et certains d'entre eux pourraient aussi disparaître, car ils doivent attendre jusqu'à deux ans avant que leur cause ne soit entendue.
La vérificatrice générale a parlé à ce propos de «risque pour la sécurité nationale». Voici ma question: des ressources supplémentaires seront-elles accordées au ministère pour qu'il puisse expulser les demandeurs jugés inadmissibles au Canada?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): L'honorable sénateur sait que des fonds supplémentaires ont été prévus dans le budget à l'intention du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. On peut espérer que, grâce à ces fonds, il sera possible d'accélérer le traitement des dossiers dont le sénateur a parlé.
LA BANQUE DU CANADA
LA POLITIQUE SUR LES MARCHÉS—LES MARCHÉS À FOURNISSEUR UNIQUE
L'honorable W. David Angus: Honorables sénateurs, nous avons appris hier, dans un rapport du 4 décembre 2002 qu'un journal a obtenu grâce à la Loi sur l'accès à l'information, que la Banque du Canada avait enfreint ses règles financières en accordant à McKinsey & Company et à une filiale de KPMG Consulting des marchés à fournisseur unique pour des services de consultation d'une valeur totale de 4,3 millions de dollars au lieu de lancer des appels d'offres pour faire jouer la concurrence, conformément à la politique interne de la banque.
Honorables sénateurs, l'information que je voudrais obtenir n'est peut-être pas facilement disponible pour l'instant. Néanmoins, je demande à madame le leader du gouvernement au Sénat de bien vouloir, tout de suite ou plus tard, donner des détails sur la nature de ces marchés, la démarche suivie pour les accorder, la méthode de facturation et les mesures prises par la Banque du Canada pour garantir aux Canadiens que des gaffes inquiétantes comme celles-là ne se reproduiront plus?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Comme l'honorable sénateur le sait pertinemment, la Banque du Canada est une entité indépendante du gouvernement. Selon moi, la meilleure source d'information serait le gouverneur de la Banque du Canada, et ces questions devraient lui être adressées la prochaine fois qu'il comparaîtra devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, dont l'honorable sénateur fait partie.
Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, vous pouvez avoir l'assurance que ces questions lui seront posées dès sa prochaine comparution. Malheureusement, il a comparu la semaine dernière et ne nous a rien dit à ce sujet.
Selon les règles internes de la banque, tout marché de plus de 100 000 $ doit faire l'objet d'un appel d'offres, sauf dans des circonstances spéciales. Étant donné que ces incidents embarrassants mettent en cause McKinsey et KPMG, qui ont obtenu des marchés de plus de 100 000 $, il a été proposé de modifier la politique de la banque pour ramener de 100 000 $ à 5 000 $ le montant au-delà duquel des appels d'offres sont exigés.
Il semble que cette proposition sera soumise, plus tard cette semaine, à l'approbation des administrateurs de la banque, qui ne sont pas nommés par le gouverneur de la Banque du Canada. Madame le leader du gouvernement aura-t-elle l'obligeance d'assurer aux sénateurs que ces administrateurs approuveront ces nouvelles règles améliorées et que la banque respectera ses propres règles à l'avenir?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, j'ose certes croire que la banque respectera ses propres règles. Toutefois, il n'est pas réaliste de demander aux administrateurs de réduire la limite de 100 000 $ à 5 000 $. Il arrive qu'on doive procéder rapidement et qu'il soit indiqué de faire un appel d'offres, d'où l'établissement d'une limite de 100 000 $, sans doute.
Je ne suivrai pas le conseil du sénateur et je ne recommanderai pas au ministre des Finances d'abaisser la limite à 5 000 $.
Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, on rapporte que la banque aurait commandé une étude par suite de la révélation de ces prétendues erreurs. Le sous-gouverneur a dirigé l'examen qui a mené au rapport auquel j'ai fait allusion et qui date du 4 décembre. Il y est effectivement recommandé que la limite soit abaissée à 5 000 $. Je crois savoir que la direction de la banque est en faveur de cela.
Madame le leader du gouvernement au Sénat sait manifestement quelque chose à ce sujet. A-t-on le sentiment que la direction de la banque ne devrait pas être appuyée par ses administrateurs nommés par favoritisme?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je suis persuadée que les administrateurs feront ce que le conseil d'administration et surtout le gouverneur leur demanderont de faire. Je n'ai pas d'information à ce sujet.
Tout ce que je dis au sénateur, c'est que, dans le fonctionnement logique du gouvernement, 5 000 $ n'est pas une somme utile dans l'exploitation quotidienne de toute société, y compris la Banque du Canada.
LE COMMERCE INTERNATIONAL
LES ÉTATS-UNIS—LA HAUSSE DES DROITS DE DOUANE SUR LE BLÉ
L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, ma question concerne la décision du département américain du Commerce d'imposer des droits additionnels de 8,15 p. 100 sur le blé dur de grande qualité et de 6,12 p. 100 sur le blé de printemps. Ces droits suivent de près la hausse des droits de 4 p. 100 que les Américains ont imposée en mars. Un grave problème menace le secteur agricole, notamment les céréaliculteurs.
Est-ce que madame le leader du gouvernement au Sénat peut nous dire quelles mesures le gouvernement canadien prend en réaction à ces décisions du gouvernement américain?
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Comme l'honorable sénateur le sait, ces droits compensateurs sont imposés par suite de la conclusion préliminaire à laquelle a abouti le département du Commerce des États-Unis. L'étape suivante du processus consiste à en arriver à une décision finale. Il est évident que nous contesterons cette décision du mieux que nous pourrons.
Comme l'honorable sénateur le sait aussi, ce n'est pas la première fois que le gouvernement des États-Unis, agissant par l'entremise de son département du Commerce, fait des difficultés au sujet de notre blé et de la Commission canadienne du blé. Chaque fois qu'il l'a fait dans le passé, il a perdu. J'espère bien qu'il perdra aussi cette fois-ci.
Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat doit admettre que ces droits sont élevés et qu'ils pourraient coûter à notre agriculture et à nos céréaliculteurs quelque 47 millions de dollars par an. Selon le ministre responsable de la Commission canadienne du blé, c'est un problème très sérieux pour le Canada. Le gouvernement envisage-t-il d'agir en faveur des agriculteurs si nous ne parvenons pas à persuader Washington de changer de position?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, la décision préliminaire dont parle l'honorable sénateur a été rendue le 4 mars 2003, et la décision finale n'est pas attendue avant juillet 2003. Notre principal objectif doit maintenant consister à présenter l'information nécessaire au département du Commerce des États- Unis afin de lui prouver qu'il a tort d'essayer d'imposer ces droits sur le blé canadien.
Il est également important de prendre contact avec les acheteurs de ce blé car, comme nous le savons bien, les genres de blé qui seront assujettis à ces droits compensateurs ne sont pas produits en quantités commerciales aux États-Unis. Or ces céréales sont nécessaires pour la fabrication de certains produits dans le pays. Nous espérons pouvoir nous joindre aux utilisateurs — qui se servent de ce blé pour fabriquer certains produits — pour persuader le département du Commerce du fait qu'il s'agit d'une mauvaise décision de sa part.
(1450)
Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, j'admets volontiers que les Américains sont incapables de produire ce genre de céréales de haute qualité. Par ailleurs, faut-il supposer que nous payons le prix du refus du Canada de participer à la guerre contre l'Irak et que les agriculteurs sont pénalisés à cause de la décision prise par le gouvernement?
Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, si nous devions faire ce genre de supposition, il nous faudrait remonter dans le passé pour découvrir les raisons pour lesquelles les Américains ont, à neuf occasions, contesté les décisions de la Commission canadienne du blé et ont toujours perdu. Je ne crois pas qu'il y ait un lien avec notre décision d'État souverain concernant l'Irak. Toutefois, il n'y a pas de doute que c'est un irritant permanent. Les agriculteurs américains ont l'oreille du gouvernement, surtout dans une année d'élections. Quoi qu'il en soit, la décision du département américain du Commerce est erronée et nous espérons arriver à l'en convaincre.
Le sénateur Gustafson: Est-ce que madame le leader du gouvernement au Sénat veut bien s'engager à faire part au Cabinet du sérieux de cette question? Je suis sûr que la question fait l'objet de discussions à l'autre endroit.
Le sénateur Carstairs: Je me ferai un plaisir de le faire. Je peux assurer à l'honorable sénateur que personne ne comprend l'importance de la question mieux que le ministre responsable de la Commission canadienne du blé, qui vient de la Saskatchewan. Je porterai à l'attention de l'honorable Ralph Goodale non seulement les préoccupations de l'honorable sénateur, mais aussi celles de tout le Sénat.
[Français]
DÉPÔT DE RÉPONSES À DES QUESTIONS INSCRITES AU FEUILLETON
L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose les réponses aux questions nos 11, 12 et 13 inscrites au Feuilleton par le sénateur Kenny.
L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 55 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.
L'AGENCE DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DU CANADA POUR LES RÉGIONS DU QUÉBEC—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 61 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.
LA COMMISSION DES CHAMPS DE BATAILLE NATIONAUX—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 101 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.
[Traduction]
ORDRE DU JOUR
PROJET DE LOI SUR L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE ET SOCIOÉCONOMIQUE AU YUKON
TROISIÈME LECTURE
L'honorable Ione Christensen propose: Que le projet de loi C-2, Loi instaurant un processus d'évaluation des effets de certaines activités sur l'environnement et la vie socioéconomique au Yukon, soit lu une troisième fois.
(La motion est adoptée, et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)
[Français]
LA LOI SUR L'HYMNE NATIONAL
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kinsella, appuyée par l'honorable sénateur Corbin, tendant à la deuxième lecture du S-14, Loi modifiant la Loi sur l'hymne national afin de refléter la dualité linguistique du Canada.—(L'honorable sénateur Cools).
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, je serai bref. Je voudrais tout d'abord féliciter le sénateur Kinsella pour cette initiative. Le sénateur Robichaud et moi-même côtoyons souvent des francophones et des anglophones à travers nos activités et nous aimerions pouvoir chanter l'hymne national dans les deux langues officielles, sans toutefois que cela ressemble à une tour de Babel.
J'ai eu la chance d'examiner le projet de loi et je crois que cela répond très bien à ce genre d'activités. J'encourage les sénateurs à appuyer cette initiative qui en est à l'étape de la deuxième lecture.
En guise d'appui à ce projet de loi, j'aimerais vous lire une lettre rédigée par Stéphane Dallaire, du bureau de la ministre du Patrimoine canadien. La lettre est adressée au sénateur Kinsella et se lit comme suit:
[Traduction]
Au nom de l'honorable Sheila Copps, ministre du Patrimoine canadien, je vous remercie de votre lettre du 13 février 2003 et des documents d'accompagnement concernant le projet de loi S-14, Loi modifiant la Loi sur l'hymne national afin de refléter la dualité linguistique du Canada.
Mme Copps vous sait gré de lui avoir fait part de vos idées sur la question. Il convient de souligner que la ministre appuie ce projet de loi et considère cette initiative comme un excellent moyen de promouvoir l'identité canadienne. L'hymne national est l'un des symboles canadiens les mieux connus et un symbole visant à mieux refléter notre dualité linguistique est certainement important.
Comme vous l'expliquez dans votre lettre, des versions bilingues de l'hymne sont chantées partout au Canada, dont une version non officielle chantée lors d'événements gouvernementaux fédéraux. Une version officielle bilingue est nécessaire.
Nos meilleurs souhaits vous accompagnent.
Veuillez accepter l'assurance de notre considération distinguée.
[Français]
Je voudrais déposer cette lettre au cas où quelqu'un voudrait en prendre connaissance.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs que l'honorable sénateur dépose la lettre?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Comeau: Pour toutes ces raisons, j'encourage les sénateurs à appuyer cette motion de deuxième lecture afin que le projet de loi soit renvoyé en comité et soit étudié de façon plus approfondie.
(Sur la motion du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)
(1500)
[Traduction]
PROJET DE LOI SUR LOUIS RIEL
DEUXIÈME LECTURE
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Chalifoux, appuyée par l'honorable sénateur Taylor, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-9, Loi visant à honorer Louis Riel et le peuple métis.—(L'honorable sénateur Cools).
L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, je suis très heureuse de participer à ce débat sur un des personnages les plus mythiques et fascinants de l'histoire du Canada — Louis David Riel, le fondateur de ma province, le Manitoba.
Ce personnage historique a fait l'objet de bien des recherches, débats et écrits savants — de fiction ou non. Il y a maintenant plus d'une douzaine de biographies complètes, 20 pièces de théâtre, un opéra, des émissions dramatiques radiophoniques et plusieurs séries télévisées sur Louis Riel. C'est là une part importante de notre culture canadienne unique.
Aucun personnage historique n'a fait l'objet d'autant de débats au Parlement, à l'autre endroit notamment. Un discours a été prononcé à la Chambre des communes le 13 avril 1871, moins d'un an après l'entrée du Manitoba dans la Confédération. L'auteur de ce discours était John Christian Schultz, député de Lisgar, au Manitoba, et ennemi implacable de Louis Riel. Il parlait du budget des dépenses supplémentaires qui comprenait un montant de 40 000 $ à titre de compensation pour les loyalistes gouvernementaux ayant perdu des biens durant la rébellion de la rivière Rouge.
On a retenu de ce discours une théorie que la plupart des historiens ont rejetée du revers de la main. Selon le Dr Schultz, Riel était moins un héros des Métis ayant défendu leurs terres, leur langue et leur religion qu'un allié des agents de la Compagnie de la Baie d'Hudson à la rivière Rouge, qui considéraient que l'achat du territoire du Nord-Ouest par le Canada marquerait la fin de leur style de vie et de leur source de revenus — et qui s'y opposaient pour cette raison. Comme je l'ai déjà dit, les historiens n'ont guère accrédité cette théorie, accordant davantage d'attention aux demandes de Riel en faveur de l'établissement d'un gouvernement provisoire, qui se sont frayé un chemin dans la Loi sur le Manitoba.
Patriote ou traître? Visionnaire ou aliéné? Président d'un gouvernement provisoire légitime menacé ou meurtrier sanguinaire ayant ordonné l'exécution de Thomas Scott contre l'avis même de ses partisans? Comme on dit aujourd'hui, on a les positions de son parti, et il en a toujours été ainsi.
Dans une lettre qu'il a adressée à un ancien collègue du Cabinet le 23 février 1870, sir John A. Macdonald a proposé que Louis Riel soit nommé sénateur. Quelques mois plus tard, après l'exécution de Scott, il pensait tout autrement. Il partageait le point de vue du Dr Schultz selon lequel Riel était un tueur sans scrupule. Au printemps 1890, le Dr Schultz a prononcé, devant plus de 10 000 personnes réunies à Toronto, un discours durant lequel il a monté les orangistes de l'Ontario contre Riel. Ce printemps-là, il a également témoigné à une audience du Sénat.
Le compte rendu des débats parlementaires renferme de nombreuses discussions portant sur Riel, y compris un débat sur une motion visant à l'expulser du Parlement après son élection comme député du Manitoba. Les motifs de son expulsion étaient que Riel fuyait la justice — le gouvernement ayant refusé de l'amnistier —, et on comprend qu'il n'ait pas acquiescé à l'ordre de se présenter à la Chambre.
Le Sénat des États-Unis a également tenu une séance spéciale en mars 1889 au cours de laquelle le président Benjamin Harrison, réagissant à une résolution sénatoriale, a rendu publique la correspondance entre Riel, alors emprisonné à Regina, et le chef du consulat américain à Winnipeg, James W. Taylor. Le président a également déposé des pétitions provenant de Lawrence, au Massachusetts, de Rochester, dans l'État de New York, et de Wayland, au Massachusetts — pétitions demandant au gouvernement d'intervenir pour sauver le citoyen américain Riel de l'échafaud. Dans ces pétitions, Riel était décrit comme étant une «victime apparente du fanatisme», son procès, comme «non impartial», et sa condamnation à mort, comme «un abus de la justice».
On peut dire qu'aucun autre personnage dans l'histoire du Canada ne continue de soulever les passions comme ce fut le cas dans cette Chambre au cours des dernières semaines.
Après plus de 100 ans, on s'entend généralement sur le fait que l'erreur tragique et fatale de Riel a été de soumettre le prisonnier Thomas Scott à une sorte de procès, puis d'ordonner son exécution le 4 mars 1870, à l'extérieur des murs de Upper Fort Garry, devant plus de 100 spectateurs. Il était déjà revenu sur sa décision d'exécuter d'autres prisonniers détenus dans le fort, mais il ne l'a pas fait dans le cas de Scott. C'est cet acte qui devait sceller son sort et contribuer à diviser l'opinion politique au Canada jusqu'à ce jour.
Cent ans plus tard, d'aucuns croient fermement que l'exécution de Scott et la fureur qu'elle a engendrée dans l'Ontario orangiste sont ce qui a conduit Riel à la potence, et non l'accusation de trahison sur laquelle il a été jugé. L'Ontario protestante voulait sa mort. Les Québécois étaient outrés de ce procès et de la sentence de mort qui a été prononcée. Riel avait séjourné pendant deux ans dans des asiles d'aliénés au Québec. Ils croyaient qu'il était devenu vraiment fou et qu'on ne devait pas l'exécuter. Comme Riel, sir John A. Macdonald a choisi de ne pas se laisser fléchir. Certains croient que c'était une erreur tout aussi tragique de la part du premier ministre.
L'érudit manitobain J. M. Bumsted a beaucoup écrit sur Riel et la rébellion de la rivière Rouge. Il a notamment écrit ce qui suit:
La grande majorité des Canadiens-Français croient que Riel est mort parce qu'il était un Canadien-Français et un catholique [...]. Le Québec venait soudainement de se rendre compte qu'il était privé d'une part légitime de l'Ouest canadien. Il avait appris qu'il n'avait aucun pouvoir au sein du gouvernement national. Comme l'a souligné un pamphlétaire de l'époque, il a réagi en faisant appel au nationalisme franco-canadien: «La province de Québec nous appartient et laissons savoir aux Anglais que nous avons l'intention de la conserver. Ne faisons aucune concession: gardons chez nous le pouvoir absolu et le privilège d'élire des gouvernements de langue française.»
En 1886, Honoré Mercier affirmait à l'occasion de l'élection provinciale que les conservateurs du Québec n'avaient pas réussi à préserver l'autonomie du Québec. D'après l'histoire du Canada, la mort de Riel a mené inexorablement à l'élection d'un gouvernement qui se qualifiait lui-même de nationaliste et qui se dévouait à la défense de l'autonomie du Québec. Un pas important vers le séparatisme venait d'être fait.
Que l'on soit d'accord ou non avec cette interprétation de l'histoire, il ne fait aucun doute que la vie et la mort de Louis Riel ont largement contribué à façonner non seulement le Manitoba et l'Ouest canadien, mais aussi les allégeances politiques et, donc, le gouvernement fédéral, pendant très longtemps.
Comme nous le savons tous fort bien, presque un siècle s'est écoulé avant que les électeurs du Québec aient la sagesse d'élire un premier ministre conservateur provenant de leur province. Ils ont maintenant pris la sage décision d'élire un ancien chef conservateur comme leur premier ministre. Certains passages de cette histoire sont désagréables, mais nous ne devrions pas avoir peur d'encourager les gens à l'étudier.
Le projet de loi S-9 n'entend pas réécrire l'histoire, du moins pas pour ce qui est de l'aspect important de la question. Contrairement au projet de loi S-25, il ne demande pas un pardon posthume. Je ne l'appuierais pas si c'était le cas. Ce qui a été fait l'a été par des hommes honorables, les meilleurs de l'époque, des hommes que nous avons déjà reconnus en proclamant des jours en leur honneur, soit le 11 janvier pour sir John A. MacDonald et le 20 novembre pour sir Wilfrid Laurier, lequel a débattu farouchement en faveur de Riel. Il ne revient pas à la présente génération de condamner leurs décisions ou de les infirmer.
Ce que fait ce projet de loi, et je suis d'accord, c'est de désigner le 12 mai la Journée Louis Riel. Le 12 mai a été choisi parce que c'est à cette date que le Gouverneur général a sanctionné la Loi sur le Manitoba. Je suis en faveur de légiférer la Journée Louis Riel pour des raisons différentes des orateurs qui m'ont précédée. Ils ont parlé de la nécessité de donner un héros aux jeunes Métis, un exemple à suivre. J'aimerais que tous les jeunes de la province, mais surtout les jeunes Manitobains, approfondissent cette page fascinante de l'histoire que j'ai brièvement évoquée. J'aimerais que les professeurs d'histoire au Manitoba soulignent la Journée Louis Riel. J'aimerais que leurs élèves se renseignent sur les gens qui ont joué un rôle dans cette histoire et qui survivent en grande partie dans les noms de rues, Bannatyne, Hargrave, Lagimodière et Taché. J'aimerais que les Manitobains, peu importe leur âge ou leur origine, rendent visite au musée de Saint-Boniface qui rend hommage à Riel, et qu'ils aient le goût de se renseigner sur leur histoire.
J'aimerais que soit souligné tous les ans le rôle que Riel a tenu dans notre histoire parce qu'il constitue une fenêtre unique ouverte sur notre passé qui nous permet de comprendre qui nous sommes aujourd'hui.
Comme l'a écrit l'historien Thomas Flanagan dans les années 80:
Tant que le Canada existera, ses habitants s'intéresseront à la vie de Louis Riel, car elle résume de manière exceptionnelle les tensions que l'on éprouve à être Canadien, les tensions qui opposent les anglophones aux francophones, les autochtones aux blancs, les gens de l'Est aux gens de l'Ouest, les Canadiens aux Américains.
(1510)
Ce projet de loi permettrait en quelque sorte de donner raison à cet écrivain. Nous devons nous pencher sur les origines de ces tensions et, au lieu de chercher à les perpétuer, nous efforcer de les atténuer.
Il est question, dans le projet de loi, de réconciliation et de rétablissement de l'harmonie dans l'histoire du Canada en rendant hommage à Louis Riel et aux Métis. Il ne s'agit pas ici de justifier l'histoire ou de faire de Riel un personnage caricatural. Ce serait impossible, à moins de gommer de larges portions de sa vie. Il ne s'agit pas non plus de raviver de vieilles blessures et de vieilles inimitiés. Au meilleur sens du terme, on entend par réconciliation le fait de «redevenir amis».
Nous «redevenons amis» en essayant de mettre du baume sur les décisions douloureuses du passé. C'est ce qu'a essayé de faire le gouvernement Mulroney dans la résolution qu'il a adoptée il y a 11 ans. Nous nous réconcilions en honorant les promesses non tenues. Là encore, le gouvernement conservateur des années 80 a vigoureusement encouragé le bilinguisme au Manitoba et en Saskatchewan. Nous «redevenons amis» en lisant l'histoire sous de nombreux angles différents et en observant les faiblesses de tous les dirigeants et les erreurs qui ont débouché sur des malentendus et, surtout, à l'époque de la colonie de la Rivière rouge, sur les immenses difficultés de communication.
Quand les émissaires devaient voyager par chemin de fer en passant par les États-Unis, pour ensuite chausser des raquettes à neige ou monter à cheval pour faire le reste du chemin entre la dernière portion du chemin de fer et la localité de la rivière Rouge, il n'est pas étonnant que le gouvernement de Riel soit devenu légitime par le fait du hasard. Le lieutenant-gouverneur aspirant, William McDougall, a prématurément mis fin à la maîtrise exercée par la Compagnie de la Baie d'Hudson, sans savoir que le gouvernement, à Ottawa, avait retardé la date du transfert du Nord-Ouest au Canada.
J'espère sincèrement que ce projet de loi encouragera une interprétation variée et un débat animé. J'espère aussi qu'il n'incitera pas à réécrire une version officielle aseptisée de l'histoire. Ce projet de loi ne devrait pas donner lieu à une nouvelle version politiquement correcte de l'histoire.
Il établit cependant Louis Riel comme un patriote métis et un héros canadien. Je veux bien qu'il soit un patriote métis, mais un héros canadien? Je ne sais pas. Il ressemble davantage au héros d'une tragédie shakespearienne, possédant des passions qui sont plus grandes que nature, parfois marquées au coin des illusions, et une faiblesse qui a entraîné sa perte — ce qui n'est pas généralement un trait canadien, si ce n'est dans de très rares circonstances, et je ne peux penser qu'à un seul cas.
Riel était également un poète. Il y a une certaine prophétie dans certaines de ses premières oeuvres, écrites alors qu'il étudiait pour devenir prêtre à Montréal. Il a écrit au sujet de la souris qui avait réussi avec succès à se rebeller contre le chat. Il a écrit au sujet d'un jeune homme qui se mourait. Au cours de ses dernières années, il a écrit au sujet de ses ennemis politiques et de ce qu'il a essayé de faire dans le cadre de sa rébellion de la rivière Rouge. Je voudrais vous citer une strophe d'un poème qui précise, dans ses propres mots, l'objectif de ses luttes.
[Français]
Elle n'eut pas peur de défendre
Le droit à la propriété,
L'honneur qu'à tout homme on doit rendre
Le droit civil; la liberté La liberté religieuse
Et politique en même temps;
La vie humaine précieuse
Dont Dieu compte tous les instants.
[Traduction]
«Héros» ou «légende» ou «figure mythique», le mot ou l'expression que nous utilisons dans ce projet de loi importe peut- être peu. Je prétends que l'un des deux derniers conviendrait mieux.
Enfin, pour appuyer ce projet de loi, je dois faire face à une critique qui veut que nous ayons déjà trop de journées commémoratives et que plus nous en créons, plus cela diminue l'importance de celles qui sont déjà établies. Lorsqu'on regarde le calendrier de ce mois-ci, on s'aperçoit qu'en mai, nous avons la Journée internationale de la liberté de la presse, la Journée mondiale de la Croix-Rouge, la Journée nationale de la santé, qui tombe également le 12 mai tout comme la Journée internationale des infirmières. Nous avons la Journée internationale des familles, la Journée nationale des enfants disparus et la Journée mondiale sans tabac.
La réalité, c'est que personne ne marque toutes ces journées. Elles sont respectées par divers segments de la population et de temps à autre, sur la colline du Parlement, on nous rappelle certaines d'entre elles. Même si j'espère que les enseignants et d'autres dans de nombreuses provinces choisiront de marquer la Journée Louis Riel, en fait, elle sera respectée dans l'ensemble par les Métis du Canada et par certains Manitobains, tout comme la Journée internationale des infirmières est plus susceptible d'être marquée par des infirmières que par des ingénieurs.
Devons-nous nier aux Métis et aux Manitobains une Journée Louis Riel? Ce serait méchant de notre part, étant donné que nous avons adopté des projets de loi prévoyant une Journée sir John A. Macdonald et une Journée sir Wilfrid Laurier. En principe, j'appuie ce projet de loi et j'espère qu'il sera renvoyé rapidement au comité. Je promets aux honorables sénateurs qui l'étudieront qu'ils n'auront qu'à aller dans nos propres archives et à notre Bibliothèque du Parlement pour trouver un trésor d'information.
L'honorable Thelma J. Chalifoux: Honorables sénateurs, j'ai discuté avec madame le sénateur Cools et elle m'a dit qu'elle ne souhaitait pas intervenir au sujet de ce projet de loi et que l'on avait répondu à toutes ses préoccupations. Je propose donc que nous passions à l'adoption d'une motion visant à renvoyer ce projet de loi au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.
Son Honneur le Président: Je vais donner suite à la motion originale.
L'intervention du sénateur Chalifoux est utile dans la mesure où elle nous rappelle que la motion était inscrite au nom du sénateur Cools.
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je suis plutôt curieux de savoir pourquoi le projet de loi serait renvoyé au Comité des peuples autochtones, étant donné que l'on vient tout juste de nous dire que ce comité est débordé de travail. L'étude menée par les droits de la personne au sujet des droits matrimoniaux des autochtones et des droits de propriété des femmes autochtones n'a pu être renvoyée à ce comité parce qu'il était trop occupé. Madame le sénateur pourrait-elle peut-être suggérer que la motion soit renvoyée à un autre comité?
Son Honneur le Président: J'interprète cela comme une observation au sujet du discours du sénateur Spivak. À cette étape, le vote sur la motion en deuxième lecture est recevable, ou il se peut qu'un honorable sénateur souhaite proposer l'ajournement du débat. Nous allons un petit peu vite en affaire ici.
Si la Chambre est prête, je mettrai la motion aux voix.
Des voix: Le vote!
Son Honneur le Président: Madame le sénateur Chalifoux a le droit d'intervenir, mais je dois l'aviser que si elle prend la parole maintenant, cela aura pour effet de clore le débat sur la motion concernant la deuxième lecture du projet de loi.
La motion prévoyant le renvoi du projet de loi à un comité ne peut faire l'objet d'un débat.
Le sénateur Chalifoux: Honorables sénateurs, je désire proposer que l'on passe au vote.
Son Honneur le Président: Je mettrai la question aux voix, et il appartiendra aux sénateurs de déterminer quel comité étudiera le projet de loi, s'il est renvoyé à un comité.
Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, étant donné que le sénateur Chalifoux a pris la parole, puis-je lui poser une question? Peut-être cela nous permettra-t-il d'échapper à l'ornière procédurière vers laquelle nous nous dirigeons.
Madame le sénateur convient-elle que ce projet de loi devrait être renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie? Je suggère ce comité parce que ses membres ont étudié le projet de loi Macdonald. Toutefois, il pourrait être renvoyé à ce comité ou encore au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Selon moi, ces comités sont mieux en mesure que celui des affaires autochtones de se livrer à une étude de ce projet de loi.
Le sénateur Chalifoux: Honorables sénateurs, lors de mes brefs entretiens avec le whip de mon parti, nous avons examiné la situation du Comité des affaires juridiques, mais ce dernier semble également débordé de travail. Il serait peut-être approprié de s'adresser aux leaders pour savoir quel comité serait le mieux placé pour étudier ce projet de loi.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je suggère l'ajournement de la séance et la reprise de cette question demain. Je ne veux pas qu'elle fasse l'objet d'une discussion aujourd'hui.
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne crois pas que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit débordé. Il devrait être en mesure de terminer bientôt l'étude du projet de loi, qu'il a déjà entreprise, à condition que le résultat du vote qui aura lieu cet après- midi à 17 h 30 soit comme il doit l'être. Par conséquent, je recommande que les honorables sénateurs acceptent de renvoyer le projet de loi soit au Comité des affaires juridiques, soit au Comité des affaires sociales, à leur choix. Personnellement, j'estime qu'il serait plus approprié de confier l'étude de ce projet de loi au Comité des affaires juridiques.
Le sénateur Chalifoux: Je partage cet avis.
L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs je fais un commentaire additionnel. Nous devons adopter une approche uniforme en ce qui concerne le renvoi de ce genre de mesure législative aux comités. Avec le temps, les comités acquièrent une certaine expertise et une certaine compétence. Le Comité des affaires juridiques étudie déjà le projet de loi du sénateur Comeau. Nous avons entendu d'excellents témoignages, non seulement sur ce sujet en particulier, mais aussi sur la désignation de jours, de semaines et d'autres événements spéciaux, au besoin. L'expérience ainsi acquise ne doit pas se perdre. De ce fait, uniquement pour cette raison, j'appuie entièrement la proposition voulant que ce projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
Des voix: Le vote!
Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer? Comme le sénateur Chalifoux a fait son intervention, je n'ai d'autre choix que de soumettre la question au vote. Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Chalifoux propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Taylor, que ce projet de loi soit maintenant lu une deuxième fois.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)
(1520)
RENVOI AU COMITÉ
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?
L'honorable Thelma J. Chalifoux: Honorables sénateurs, je propose que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, je tiens à préciser que la motion dont nous sommes saisis peut faire l'objet d'un débat, d'un vote ou de modifications. C'est l'étape pour régler ce qui a été discuté avant la deuxième lecture. Par conséquent, pour plus tard, nous pouvons nous prononcer sur le principe du projet de loi et discuter du comité qui l'étudiera avant l'étape de la troisième lecture.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je considère l'intervention comme un rappel au Règlement parce que je ne suis pas sûr d'être d'accord avec le sénateur Kinsella.
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, l'honorable leader de l'opposition s'est servi d'une procédure pour poser, au bon moment, une question à l'honorable sénateur Chalifoux. Cela a eu pour effet de clore le débat.
Je crois que tout était conforme au Règlement. Je conviens avec l'honorable sénateur Kinsella qu'à la prochaine prise d'une telle décision, on pourrait poser la question et discuter ensuite du renvoi en comité.
[Traduction]
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le sénateur Chalifoux a proposé une motion. J'ai mis la question aux voix et je vais maintenant vous demander si vous voulez adopter la motion du sénateur Chalifoux.
Honorables sénateurs, voulez-vous que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles?
Des voix: D'accord.
(Sur la motion du sénateur Chalifoux, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)
TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS
BUDGET—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DES MÉDIAS CANADIENS
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Fraser, appuyée par l'honorable sénateur Gauthier, tendant à l'adoption du cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications (budget—étude des industries de médias canadiennes), présenté au Sénat le 3 avril 2003.—(L'honorable sénateur Stratton).
L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, le sénateur Stratton a accepté de me laisser parler d'abord au sujet du cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, qui porte sur le budget du comité pour son étude des médias canadiens.
Le comité a présenté une demande de crédits budgétaires de 435 250 $. C'est l'un des plus importants budgets demandés. Le Comité de la régie interne a apprécié le fait que la présidence du Comité des transports se soit montrée disposée à étaler les déplacements du comité sur deux années financières, de façon à réduire les exigences budgétaires de cette année. Sur ce, le Comité de la régie interne a recommandé de débloquer des crédits de 197 850 $.
Le Comité de la régie interne a déjà reçu des demandes totalisant trois millions de dollars. Je rappelle aux honorables sénateurs que lorsqu'il a approuvé son Budget principal des dépenses pour 2003- 2004, le Sénat a prévu des crédits de 2,2 millions pour les comités. Sur ce montant, 400 000 $ ont été mis de côté pour les dépenses des témoins et les conférences vidéo, ce qui laisse 1,8 million à distribuer aux comités.
Pendant le débat sur les budgets des comités, jeudi dernier, de nombreux sénateurs ont déclaré que le budget prévu pour les comités était inadéquat. Certains ont dit que tous les comités auraient dû présenter des demandes correspondant à leurs besoins avant que le Budget principal des dépenses ne soit présenté.
Je tiens à assurer aux honorables sénateurs que les besoins des comités ont été pris en compte dans l'établissement du Budget principal des dépenses. On a tenu compte des demandes préalables ainsi que des habitudes de dépenses passées. Ces dernières années, les comités ont dépensé, en moyenne, environ 70 p. 100 de leurs budgets, et les 2,2 millions représentent un montant sensiblement plus élevé que ce qui a habituellement été dépensé.
Je rappelle aux honorables sénateurs qu'il est ici question de fonds publics et de l'affectation de fonds dans un contexte politique. Les sénateurs se souviendront certainement de l'importance qu'accordait le dernier discours du Trône aux restrictions budgétaires. Le Sénat doit tenir compte du cadre financier plus large, et des décisions difficiles devront être prises. Le Sénat, comme toutes les institutions publiques, doit tenir compte des contraintes budgétaires.
Il serait peut-être utile de rappeler aux honorables sénateurs tout le chemin qui a été parcouru en ce qui concerne le financement des comités sénatoriaux. Je partage l'opinion du sénateur Lynch- Staunton qui estime que, dans la mesure du possible, le financement devrait être inclus dans le Budget principal des dépenses. Les budgets supplémentaires des dépenses ne devraient servir que pour les dépenses imprévisibles.
L'examen du financement des comités sur les dix dernières années révèle clairement une augmentation considérable de leurs budgets. En 1993-1994, le budget des comités était de 819 000 $, auxquels s'ajoutaient 58 000 $ pour les dépenses des témoins, soit 877 000 $ en tout.
Dans le Budget principal des dépenses, le financement des comités est demeuré assez stable pendant toute la décennie 1990, mais il a varié énormément dans le budget supplémentaire des dépenses.
Dans le Budget principal des dépenses de 2000-2001, il y eut une hausse impressionnante des fonds alloués aux comités, qui sont passés à 1,5 million de dollars, dont 300 000 $ pour les dépenses des témoins. Dans le Budget principal des dépenses de 2001-2002, le financement total des comités a encore augmenté, passant à 2 millions de dollars, et un montant supplémentaire de 1,2 million de dollars fut obtenu dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses. En 2002-2003 et en 2003-2004, le budget des comités était de 2,2 millions de dollars. Bref, les fonds alloués aux comités ont augmenté de quelque 250 p. 100 au cours des dix dernières années.
Il est évident que le Sénat reconnaît le travail de ses comités et qu'il est prêt à montrer qu'il appuie ce travail au moyen d'un soutien financier accru. Toutefois, un soutien financier accru ne signifie pas pour autant un soutien financier illimité. Traditionnellement, les demandes des comités ont dépassé les fonds disponibles. Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration n'a jamais eu la tâche facile; il doit examiner les demandes des comités et déterminer une façon d'allouer les crédits de manière à faciliter le travail des comités tout en respectant les contraintes financières.
Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration accorde une importance manifeste aux budgets, si bien que le comité directeur a entrepris la tâche de se pencher sur ces budgets et de formuler des recommandations au comité plénier.
Le comité directeur a invité les présidents des comités à présenter et à défendre leur budget. Certains présidents n'ont pris que 15 minutes pour faire valoir leur demande alors que d'autres, notamment le président du Comité permanent de la sécurité nationale et de la défense, ont pris beaucoup plus de temps, jusqu'à 45 minutes. Le comité directeur a donné aux présidents des comités amplement de temps pour qu'ils fassent valoir leur demande.
Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a fait un effort particulier pour se montrer transparent dans sa prise de décisions, de manière à assurer que les comités comprennent le bien-fondé de ses décisions et de la répartition des fonds.
Je crois que nous avons été équitables. Nous n'avons paralysé aucun comité. Toutefois, nous avons remis en question certaines demandes. Par exemple, la demande de crédits présentée par le Comité permanent de la sécurité nationale et de la défense en vue de l'étude de son sous-comité sur les soins de santé des anciens combattants prévoyait un montant de 14 000 $ pour la participation à des cérémonies commémoratives, une au Canada et une à l'étranger.
(1530)
Au cours du débat, jeudi, le sénateur Day a affirmé, et je cite qu'«on déploiera la moitié des efforts qui auraient pu être déployés» parce que le budget sera ramené de 35 000 $ à 17 000 $.
Presque toute la réduction du budget découle directement de la décision de ne pas financer la participation à ces manifestations commémoratives, qui ne semblent aucunement liées au mandat du comité. Même si les fonds étaient illimités, ce poste n'a pas vraiment sa place dans un budget réclamé pour faire une étude sur les services de santé dispensés aux anciens combattants, et je ne peux concevoir que cette coupe entraînera une réduction quelconque de la capacité du comité de faire rapport sur ces services de santé.
Je rappelle aux honorables sénateurs qu'il y a bien des façons d'étudier un sujet donné, et que la plus coûteuse n'est pas forcément la meilleure. Il n'existe aucune corrélation directe entre la qualité et le coût. Certaines des études sénatoriales qui ont eu le plus d'influence ont été très peu coûteuses. Par exemple, l'étude «Des soins de fin de vie de qualité: chaque Canadien et Canadienne y a droit» a coûté en tout 17 000 $, dont 15 500 $ pour les frais des témoins. L'étude sur la santé réalisée par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a coûté une infime fraction des ressources consacrées à la commission royale dirigée par Roy Romanow. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a la réputation de réaliser d'importants travaux législatifs à Ottawa en se servant presque exclusivement des ressources internes.
De toute évidence, les comités peuvent produire des rapports valables et influents sans faire des dépenses astronomiques. Il est possible d'adapter les plans de travail pour tenir compte des contraintes budgétaires. Au lieu de se déplacer un peu partout au Canada, les comités peuvent entendre des témoins à Ottawa ou tirer parti des progrès technologiques pour recueillir des témoignages par vidéoconférence.
Cela m'amène à parler du processus d'approbation des budgets. Ce processus se trouve à l'annexe II du Règlement du Sénat intitulé «Directives régissant le financement des comités du Sénat». Ces directives sont tirées d'un rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement adopté en mars 1986. Le Comité du Règlement est habilité par le Sénat à proposer des amendements au Règlement. Toutefois, en ce qui a trait aux articles qui portent sur le budget, il est clair que le Comité de la régie interne est directement visé, puisqu'il est responsable de la gestion de l'administration financière du Sénat. Il semblerait donc qu'un groupe de travail constitué de représentants des deux comités serait tout indiqué pour mener une discussion approfondie sur le processus budgétaire. Idéalement, les présidents des deux comités devraient participer aux travaux du groupe de travail de façon à pouvoir faire rapport à leurs membres des progrès des travaux.
En février dernier, je me suis entretenue avec le sénateur Milne, qui préside le Comité du Règlement et je lui a présenté cette suggestion. Comme les sénateurs le savent, le Comité du Règlement a été très occupé, mais je sais que madame le sénateur Milne partage mon intérêt pour cette question et qu'elle aimerait que cette question soit étudiée lorsque le Comité du Règlement aura terminé son travail sur le dossier de l'éthique.
Au cours des discussions que j'ai eues avec le sénateur Milne, je lui ai fait part de certaines questions sur lesquelles le groupe de travail pourrait se pencher. Je lui ai proposé des questions comme: quel lien peut-on faire entre un ordre de renvoi et un budget? Devrait-il y avoir des restrictions quand au nombre d'ordres de renvois qui sont approuvés par le Sénat au cours d'une période donnée et le contrôle devrait-il se faire au niveau budgétaire? Le Règlement du Sénat devrait-il être mis à jour? Y a-t-il d'autres questions, que ce soit au niveau politique, des communications, de l'éducation ou autres, qui devraient être étudiées? Dans quelle mesure l'approbation préalable d'un ordre de renvoi du Sénat peut-elle avoir des répercussions sur le processus de prise de décision du Comité de la régie interne au niveau de l'étude d'une présentation budgétaire? Si les budgets étaient soumis au Comité de la régie interne avant que l'ordre de renvoi ne soit approuvé par le Sénat, est-ce que cela limiterait la liberté du Sénat de déterminer quelles études entreprendre? Étant donné que les ordres de renvoi ne sont pas toujours issus d'un comité mais qu'ils viennent parfois de sénateurs à titre individuel ou d'un ministre, dans quel délai un budget devrait-il être étudié par un comité, le Comité de la régie interne et le Sénat? Les comités devraient-ils avoir un budget de base? Est-ce que prendre l'année financière comme base du budget est l'approche la plus efficace? De quelle latitude les comités devraient-ils disposer pour transférer des fonds d'un type de dépenses à un autre une fois que leur budget a été approuvé? De quelle latitude les comités devraient-ils disposer pour transférer des fonds entre divers types de dépenses une fois que l'activité est terminée? Est-ce que les catégories de dépenses décrites dans le Règlement suffisent? Est-ce que les dépenses sont correctement réparties entre les budgets centraux — par exemple les dépenses des témoins, les conférences vidéo et les boissons — et le budget de chaque comité? Est-ce que les pratiques actuelles pour faire rapport au Sénat des budgets sont adéquates?
Le groupe de travail pourrait également se pencher sur d'autres sujets. Il pourrait étudier le recours aux réunions d'information, qui semble être une manière de plus en plus courante de recueillir des renseignements. Je tiens particulièrement à m'assurer que cela n'est pas une façon d'éviter d'avoir à se conformer aux exigences de la Loi sur les langues officielles que notre institution se doit de respecter. Je m'inquiète aussi énormément de l'utilisation des comptes rendus des réunions d'information. Le privilège parlementaire protège tant les sénateurs que les témoins dans le cadre des réunions officielles des comités, mais il n'en va pas de même des réunions d'information et il faut faire très attention quand on utilise ou diffuse des renseignements ainsi recueillis. Nous ne voulons pas que les Canadiens ou le Sénat soient mis en danger.
Après avoir discuté de ces sujets et décidé s'il convient de modifier certaines règles ou de prendre d'autres mesures, les représentants du groupe de travail pourraient faire rapport au Comité du Règlement et au Comité de la régie interne et leur recommander la meilleure façon de procéder.
Les travaux des comités font partie intégrante des travaux du Sénat. Toutefois, nous devons également nous rappeler que les sénateurs ont l'obligation d'assister aux séances du Sénat. Les déplacements des comités, qui sont d'un grand secours dans de nombreuses circonstances, doivent être envisagés dans le contexte plus vaste des travaux qui doivent être accomplis au Sénat ici à Ottawa. Ce contexte plus vaste comprend également l'environnement politique et procédural dans lequel nous fonctionnons.
La démarche qu'a suivie le Comité de la régie interne dans l'attribution des fonds pour 2003-2004 respecte la démarche établie par le Règlement du Sénat et les contraintes imposées par le budget qu'a adopté notre institution. Votre comité n'a d'autre choix que d'agir ainsi. Comme les demandes que les comités ont présentées jusqu'ici totalisent quelque 3 millions de dollars, le comité n'a pas pu recommander l'affectation de la totalité des fonds demandés. Au lieu de cela, des fonds ont été affectés pour permettre aux comités de planifier leurs travaux jusqu'au début de l'automne. Les montants recommandés jusqu'ici s'élèvent à plus de 1,6 million de dollars, ce qui laisse une modeste réserve de prévoyance pour le reste de l'exercice financier.
Des contrôles budgétaires ont toujours été imposés aux comités. Par exemple, par les années passées, le Sénat a parfois accordé des fonds en dégageant une certaine proportion de chacun des budgets présentés, comme trois-douzièmes ou six-douzièmes. Cette façon de faire entraîne un traitement préférentiel pour les comités qui disposent de budgets plus élevés et ne tient pas compte du fait que la gestion de certains types de dépenses permet de faire preuve d'une plus grande souplesse.
Pour 2003-2004, afin de faire preuve d'équité envers tous les comités, le Sénat a consenti à adopter une disposition de récupération pour veiller à ce que les fonds qui restent à la fin d'une activité soient retournés au budget central pour être réaffectés. Je souligne qu'un processus de récupération encore plus rigoureux existe à la Chambre des communes.
Votre Comité de la régie interne n'entend pas assurer une microgestion des activités d'autres comités. Par exemple, si un comité désire modifier ses dates de déplacement et sa destination, il revient aux membres de ce comité d'en décider. Cependant, le Comité de la régie interne doit exercer un contrôle rigoureux sur le nombre de déplacements effectués. Il ne serait pas financièrement responsable d'accorder des fonds pour un déplacement et d'autoriser que les fonds excédentaires demeurent tout simplement entre les mains du comité pour qu'il les utilise au cours d'un voyage ultérieur. En effet, une telle façon de faire ne ferait qu'encourager le gonflement des budgets. Compte tenu du fait que des fonds ont été libérés pour permettre à douze sénateurs de voyager à l'occasion d'audiences publiques et à neuf sénateurs de participer à une mission d'enquête, en sus du personnel nécessaire, il est probable qu'un important montant reviendra au budget central puisqu'il est établi que, dans la plupart des cas, le nombre de sénateurs participants se situe entre six et huit.
(1540)
Ce processus permettra aux comités d'accéder à des fonds qu'ils n'auraient pas pu obtenir autrement.
Je sais qu'un certain nombre de sénateurs sont insatisfaits du financement accordé à leur comité. Je suppose que n'importe quoi en deçà du budget demandé leur serait inacceptable. Toutefois, nous ne pouvons pas faire abstraction de la réalité politique et financière. Les fonds disponibles sont limités.
Le Comité de la régie interne a la responsabilité de recommander la répartition des fonds prévus dans notre cadre établi d'une façon prudente, équitable et transparente. Je suis persuadée que nous l'avons fait.
L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, je n'ai pas eu l'occasion d'examiner soigneusement ce que l'honorable sénateur a dit au sujet du Comité de la régie interne, mais je me demande si le comité a procédé à une autre forme d'analyse, celle de l'optimisation des ressources. Nous avons entendu parler d'économies et de l'importance accordée aux coûts, mais je m'intéresse aussi au modèle de l'optimisation des ressources. En avons-nous pour notre argent et, si oui, dépensons-nous assez?
Le sénateur Bacon: Du point de vue des présidents de comité, nous ne dépensons jamais assez. Comme je l'ai dit, nous formerons un groupe de travail pour trouver des réponses à toutes les questions.
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, la semaine dernière, j'ai demandé l'ajournement du débat surtout parce qu'aucun membre de notre comité n'était présent à Ottawa. Trois ou quatre d'entre eux étaient malades. Je voulais d'abord m'assurer de la présence des membres de notre comité. Ensuite, je voulais être sûr qu'ils acceptaient le budget dans sa forme actuelle. C'est le cas. Je retire donc toute objection que j'avais au sujet de l'approbation, en demandant seulement que nous n'ayons pas à recommander un journal appuyé par le gouvernement, comme l'a préconisé Patrick Watson. Je m'attends à ce que le comité souhaite entendre M. Frum au sujet de sa récente démission.
Le sénateur Carstairs: Et Patricia Pearson aussi.
Son Honneur le Président: Est-ce que l'honorable sénateur souhaite formuler des observations sur le discours du sénateur Stratton? Elle peut le faire, comme elle peut lui poser une question.
L'honorable Joan Fraser: J'ai quelques observations sur les deux questions soulevées par l'honorable sénateur Stratton. Au sujet de la suggestion de Patrick Watson, je voudrais signaler que nous ne faisons que commencer notre travail et je m'attends à ce que nous entendions de nombreux témoins. En fait, nous avons entendu ce matin au moins un témoin qui était opposé à la suggestion de M. Watson. Il nous reste encore beaucoup à faire à cet égard.
Le sénateur Stratton: J'espère bien.
Le sénateur Fraser: Quant à M. Frum, il lui appartiendra de décider s'il souhaite comparaître. Toutefois, je dois dire que lorsque j'ai appris qu'il avait quitté son employeur précédent, ma première réaction a consisté à me demander s'il nous serait possible de le faire venir.
Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
LA LOI CANADIENNE SUR L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE
PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE
Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
(Le projet de loi est lu une première fois.)
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?
(Sur la motion du sénateur Robichaud, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après- demain.)
PÊCHES ET OCÉANS
BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL ET DE SE DÉPLACER—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR LES QUESTIONS RELATIVES AUX STOCKS CHEVAUCHANTS ET À L'HABITAT DU POISSON
Le Sénat passe à l'étude du quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans (budget—étude relative aux stocks chevauchants et à l'habitat du poisson), présenté au Sénat le 30 avril 2003.—(L'honorable sénateur Comeau).
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, je propose l'adoption du rapport.
Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Comeau, appuyé par l'honorable sénateur Beaudoin, propose que le rapport soit adopté maintenant.
L'honorable sénateur Comeau souhaite-t-il prendre la parole?
Le sénateur Comeau: Non.
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Pour être cohérent, honorables sénateurs, je voudrais poser au sénateur Comeau la même question qu'aux autres présidents de comité dont le budget a été réduit.
Ayant écouté madame le sénateur Bacon, je crois que nous comprenons mieux les difficultés de son comité. Je voudrais profiter de cette occasion pour la féliciter, ainsi que les membres du Comité de la régie interne, pour leur excellent travail dans des conditions financières et politiques difficiles.
Cela dit, le comité du sénateur Comeau a demandé 245 000 $ en chiffres ronds et a reçu 167 000 $. Le sénateur peut-il nous assurer que, malgré ce budget réduit, son comité pourra accomplir son travail aussi efficacement et avec autant de soin qu'il l'aurait fait avec la somme initialement demandée? La réduction va-t-elle nuire aux efforts et au travail du comité et, le cas échéant, dans quelle mesure?
Le sénateur Comeau: Je remercie le sénateur Lynch-Staunton de sa question. Il me donne l'occasion de féliciter le sénateur Bacon et les membres de son comité pour l'excellence avec laquelle ils ont étudié les budgets de tous les comités. Je dois ajouter que les membres de ce comité font un travail incroyable. Il n'est pas facile de voir des présidents de comité arriver et demander des sommes d'argent devant servir à des fins auxquelles ils croient. J'apprécie leur tâche à sa juste valeur. Leurs questions et observations sont toujours bienvenues. Les comités et leurs présidents doivent s'efforcer d'établir des budgets réalistes.
En réponse à la question, je dirai bien évidemment que nous ferons de notre mieux avec le budget accordé. Nous avons accepté de réduire les dépenses, notamment dans le domaine des audiences publiques. Nous avons convenu de faire des tournées d'observation qui seront beaucoup moins coûteuses que la tenue d'audiences publiques.
Je tiens à répéter que les audiences publiques ne sont pas nécessairement préférables aux tournées d'observation. Elles ont tendance à attirer des représentants de la population, des représentants des pêcheurs au lieu des pêcheurs eux-mêmes. Notre comité a toujours préféré entendre les pêcheurs, leurs familles et leurs collectivités au lieu d'entendre leurs représentants.
Nous avons accepté de réduire le nombre de membres qui participeront à ces déplacements; nous serons neuf au lieu de douze. Nous profiterons d'une meilleure représentation du milieu des pêcheurs.
Au cours des derniers jours, nous avons vu ce qui peut se produire lorsqu'une décision est prise à Ottawa, dans les hautes sphères, sans qu'on étudie attentivement les effets possibles de sa mise en oeuvre sur le terrain. Voilà une des raisons qui incitent notre comité à se rendre dans les diverses régions du pays. Nous voulons entendre les gens du milieu des pêches et ceux qui sont directement touchés par les décisions d'Ottawa.
(1550)
Aussi réduit que soit le budget, nous arriverons à accomplir une bonne partie du travail que nous avions l'intention d'accomplir cette année. Je crois que nous serons en mesure de présenter des rapports très constructifs et majoritaires.
Son Honneur le Président: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?
(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)
[Français]
LE SÉNAT
MOTION VISANT À CRÉER UN COMITÉ SPÉCIAL POUR SURVEILLER L'APPLICATION DE LA RÉSOLUTION SUR LA DIFFUSION—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Gauthier, appuyée par l'honorable sénateur Fraser,
Que le Sénat approuve la radiodiffusion et la télédiffusion de ses délibérations et de celles de ses comités, avec sous-titres en temps réel, selon les principes analogues à ceux qui régissent la publication des comptes rendus officiels des débats; et
Qu'un comité spécial, composé de cinq sénateurs, soit constitué pour surveiller l'application de cette résolution.—(L'honorable sénateur Gauthier).
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je pourrais modifier la dernière partie de ma motion. J'ai reçu avis de mettre en place un comité de cinq sénateurs. Je sais que les sénateurs sont assez occupés. Il n'est pas nécessaire d'avoir un comité spécial pour étudier cette question. Le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration est déjà responsable de toute la télédiffusion des travaux du Sénat et de ses comités. Je demande la permission de modifier la motion pour qu'elle soit renvoyée au Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration.
Cela dit, je sais que les honorables sénateurs sont divisés sur cette question de la télédiffusion de nos délibérations. Il y a longtemps que je réfléchis à cette question. J'en suis venu à la conclusion qu'il serait dans l'intérêt du public et du Sénat de rendre accessibles aux Canadiens et Canadiennes les délibérations des séances du Sénat ou d'une partie de celles-ci et des comités.
Le Sénat est une partie prenante du Parlement et constitue l'une des deux chambres. Le Sénat, comme la Chambre des communes, joue un rôle important en démocratie. Nous sommes la chambre de la fédération et nous représentons les régions. La Chambre des communes est la chambre élue; elle représente, en démocratie, le peuple. Il y a une grande différence entre les deux. La diffusion de nos délibérations ne modifiera en rien la fonction législative du Sénat.
Toutefois, l'expérience de la Chambre des communes servira à nous guider et à nous inspirer en ce qui a trait à la mise en place d'un système de télédiffusion de nos délibérations.
J'étais député à la Chambre des communes lorsque cette motion a été adoptée en 1977. Des discussions faisaient état des avantages et des désavantages. Une entente a été conclue le 17 octobre 1977. On a voté sur cette question. Il a fallu trois ans, jusqu'en 1980, avant que les comités obtiennent la permission de télédiffuser leurs débats. À compter de 1992, la pratique est devenue régulière et sujette à une entente avec la CPAC. Le Sénat a adopté une pratique différente. Plutôt que de télédiffuser nos séances de façon régulière, nous avons adopté une politique d'enregistrer les réunions sur vidéo. Depuis 1997, l'entente avec la CPAC permet la télédiffusion des délibérations des comités qui ont obtenu la permission du Sénat. Nous avons diffusé 195 heures en 2000-2001 et presque le double en 2001-2002.
Le Sénat n'a pas l'équipement nécessaire pour enregistrer des débats, donc il n'y a pas de télédiffusion des débats de cette Chambre. Je voudrais que cette télédiffusion soit autorisée. Il est vrai qu'à l'occasion de certaines séances du Sénat, entre autres lors du discours du Trône ou de comités pléniers, les témoignages de certaines personnes invitées ont été enregistrés. Toutefois, c'est fait par Radio-Canada ou par la CPAC, pas par nous. Nous télédiffusons à peu près 200 heures de séances en comité et quelques heures de séances du Sénat dans une année normale.
Il y a une grande différence entre les débats des deux Chambres. Je me souviens, en 1972, lorsque j'ai été élu député, d'avoir vécu une expérience très différente de celle-ci: la Chambre des communes était un endroit très bruyant. On tapait sur les pupitres. Des gens se promenaient presque partout. Il y avait des rideaux derrière les bancs. Les députés allaient fumer et jaser. Ils faisaient même des interventions autour des rideaux. Tout cela a changé lorsque la télévision est arrivée, en 1977. Le comportement a été amélioré. On a arrêté de se servir de nos pupitres pour faire du bruit, de crier, d'émettre des commentaires parfois désobligeants, de fumer derrière les rideaux, de manger dans la Chambre des communes et derrière les rideaux. Je trouvais cela absolument correct. Le peuple l'exigeait.
On se souviendra des commentaires des gens relativement aux fumeurs qui s'allumaient une cigarette derrière le rideau. On voyait cela à la télévision. Les gens disaient que ce n'était pas bon pour la santé et c'était vrai.
De nombreux comportements ont été améliorés suite à cette décision et le bruit a beaucoup diminué. Il faut savoir que la télédiffusion des débats est soumise à l'autorité du Président de la Chambre des communes, qui est autorisé à organiser et à contrôler l'image publique de la Chambre des communes. Au Sénat, ce n'est pas le Président ou le leader du gouvernement qui régit cette pratique. Ce rôle revient au président du Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration. En bout de ligne, on sera mieux servis par le Comité de la régie interne qui est autorisé à étudier cette question. Je pense que c'est approprié et nécessaire. Le Sénat a une meilleure image aujourd'hui. Il est mieux compris. Il faut se faire voir, il faut se faire entendre, et il faut surtout se faire comprendre des Canadiens.
(1600)
Le Sénat joue un rôle important. Il faut le dire et il faut laisser aux Canadiens la chance de choisir eux-mêmes la programmation qu'ils voudront et de suivre à l'occasion les débats de cette institution. Je regrette que certains grands débats n'aient pas été télédiffusés récemment. C'étaient de bons débats sur des questions aussi importantes que la sécurité publique. Les Canadiens ne sont pas au courant de ces débats, à moins que l'on se fie aux médias, qui sont rarement ici pour transmettre le message. Si nous avions le contrôle de l'image, du son et des délibérations qui sont télédiffusées, je pense que cela serait une bonne chose.
Certains sénateurs sont hésitants et je les comprends. Cependant, si l'on veut se faire comprendre par le peuple canadien, il faudra se dégourdir un peu, dire publiquement ce qu'on fait et de ne pas se cacher pour légiférer.
Nous vivons dans une ère de communication. On a dit que la télévision était un médium chaud que les gens utilisent. La majorité des Canadiens se renseignent et s'informent par le biais de la télévision. Ils se tiennent au courant de ce qui se passe.
On peut aujourd'hui prendre note des événements qui se déroulent en Chine et savoir ce qui s'y passe. Cela permet aux Canadiens et aux Canadiennes d'être mieux informés. Il y a des conséquences. Certains médias utilisent ce médium pour des fins particulières que je n'approuve pas.
Je pense, par exemple, qu'il est essentiel que les Canadiens et les Canadiennes aient accès de façon régulière aux délibérations du Sénat et de ses comités. Cela devrait être une règle générale. Cela va exiger de prendre des décisions et va occasionner des dépenses. C'est vrai. Il faudra peut-être se prendre en main un jour et décider nous- mêmes ce que nous allons faire.
Lorsque j'ai demandé, il y a plusieurs années, pourquoi nous ne télédiffusions pas nos délibérations, on m'a répondu que le Sénat allait décider. Ce n'est pas le gouvernement qui prendra la décision ni l'administration. J'ai dit alors que si c'est une décision que doit prendre le Sénat, pourquoi ne pas proposer une motion? C'est ce que je fais aujourd'hui.
J'ai aussi demandé que nos émissions soient sous-titrées pour permettre aux 3 millions de Canadiens malentendants d'avoir accès régulièrement, par le biais de leur télévision, aux nouvelles et aux débats parlementaires. On peut le faire aujourd'hui.
J'ai accès quotidiennement et régulièrement à un portable qui me donne la transcription des débats en anglais et en français. La transcription est correcte dans une proportion de 95 p. 100. Cela m'informe et me tient au courant de ce qui se passe et me permet de participer aux débats.
La même chose est vraie pour des millions de Canadiens qui apprécieraient énormément si le Sénat innovait sur cette question. Je suis certain qu'on serait beaucoup plus apprécié des gens qui, avec le temps, prennent de l'âge. À 70 ans, 30 p. 100 des gens ont des problèmes d'audition; à 75 ans, 40 p. 100 des Canadiens et des Canadiennes ont des problèmes d'audition.
[Traduction]
Ils refusent souvent de reconnaître qu'ils ne comprennent pas ce qui se passe. Ils hausseront le volume de leur téléviseur. Ils diront que leur téléphone ne fonctionne pas bien. Ils diront que la télévision ne les intéresse pas parce qu'ils n'arrivent pas à suivre. Ils pourraient suivre, toutefois, s'ils avaient des sous-titres.
Des sous-titres constitueraient un excellent outil pédagogique pour les personnes qui veulent apprendre une langue seconde. Ils constitueraient un excellent outil pour nos immigrants et pour les jeunes en classe d'immersion parce qu'ils pourraient entendre et lire ce qui est dit.
Je pourrais trouver toute une série de bonnes raisons d'appuyer cette proposition. C'est la première fois que nous avons la chance d'en discuter publiquement. J'espère que des décisions à cet égard seront prises promptement.
Honorables sénateurs, je voudrais renvoyer cette motion au Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, puis-je suggérer à l'honorable sénateur Gauthier de reporter la suite du débat à la prochaine séance du Sénat, afin qu'il puisse déposer devant le Sénat sa motion amendée pour le renvoi de cette dernière au Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration et ainsi recevoir une date à laquelle ce comité devrait faire rapport au Sénat? De cette façon, les sénateurs pourraient mieux se prononcer sur la question parce que tout serait clair.
[Traduction]
Son Honneur le Président: Êtes-vous d'accord, sénateur Gauthier?
[Français]
Le sénateur Gauthier: Honorables sénateurs, j'apprécie le commentaire du leader adjoint du gouvernement. Je pourrais mettre par écrit ma motion et la déposer demain, sans avoir à passer par la période d'avis de motion.
J'enlève le dernier paragraphe de la motion et je le remplace par ce qui suit: «que le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration étudie cette question...».
L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, ce n'est pas aussi simple que cela. L'honorable sénateur Gauthier ne peut pas modifier la motion sans le consentement unanime du Sénat. Je ne voudrais pas qu'il perde son temps.
[Traduction]
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, les 15 minutes sont écoulées. Voulez-vous avoir plus de temps, sénateur Gauthier?
Le sénateur Gauthier: Non, Votre Honneur.
Son Honneur le Président: Si des sénateurs voulaient suivre la proposition du sénateur Robichaud voulant qu'une modification soit envisagée, une décision unanime des sénateurs de modifier la résolution exigerait que le sénateur Gauthier prenne à nouveau la parole.
[Français]
Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Gauthier n'a pas demandé le consentement du Sénat pour avoir plus de temps pour présenter sa motion. Je propose donc que la suite du débat soit reportée à la prochaine séance du Sénat.
(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)
(1610)
[Traduction]
L'HÉRITAGE DE GASPILLAGE—LES ANNÉES CHRÉTIEN-MARTIN
INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur LeBreton, attirant l'attention du Sénat sur l'héritage de gaspillage des années Chrétien- Martin.—(L'honorable sénateur Eyton).
L'honorable W. David Angus: Honorables sénateurs, je suis heureux de participer au débat sur l'interpellation lancée par le sénateur LeBreton sur l'héritage du gaspillage durant les années Martin- Chrétien. Honorables sénateurs, au cours des dernières semaines, nous avons entendu 11 de nos collègues de ce côté-ci, soit les sénateurs Bolduc, Buchanan, Comeau, Di Nino, Gustafson, LeBreton, Oliver, Stratton, Forrestall, Nolin et Kelleher. Ils nous ont fait part d'une série d'exemples très inquiétants du gaspillage abominable de millions de dollars, et peut-être même de milliards de dollars, de deniers fiscaux durement gagnés par les Canadiens durant les années Martin-Chrétien. De plus, dans ce contexte, nous avons entendu à de multiples reprises parler d'exemples extrêmement inquiétants d'arrogance absolue de la part du gouvernement libéral et de tergiversations totales de sa part alors que les ministériels ont refusé de reconnaître une quelconque responsabilité dans ce comportement honteux et, dans certains cas, criminel. Honorables sénateurs, il y a beaucoup d'autres scandales qui, ensemble, brossent un terrible tableau de l'héritage de gaspillage qui caractérise les années Martin-Chrétien.
Honorables sénateurs, j'entendais consacrer tout mon temps cet après-midi à l'abus flagrant du gouvernement de son programme de commandites, surtout dans le cadre de ce qui est devenu le scandale Groupaction. Cependant, honorables sénateurs, nous avons reçu de nouvelles révélations sur ce que je considère, en toute déférence, comme le pire de tous les scandales et de tous les abus auxquels on a assisté dans ces terribles années Martin-Chrétien. Je veux parler de la scandaleuse «affaire Airbus», au cours de laquelle l'ancien premier ministre Brian Mulroney et sa famille ont été persécutés sans vergogne, de façon pernicieuse, publique et injuste pendant huit années dans le cadre d'une enquête de la GRC lancée à la demande de représentants du gouvernement libéral.
Même si M. Mulroney a poursuivi en diffamation avec succès le gouvernement et la GRC, l'équipe Chrétien a résolument refusé, avec arrogance, de présenter des excuses complètes au premier ministre et à sa famille et de reconnaître publiquement que l'enquête avait des motifs politiques. Au lieu de cela, les intéressés ont fait en sorte que l'enquête de la GRC se poursuive sans relâche pendant six années de plus après le règlement de la poursuite, ce qui a vivement contrarié et embarrassé la famille Mulroney et entraîné toutes sortes d'autres rumeurs et spéculations préjudiciables tout à fait injustifiées dans les médias, sans parler des énormes coûts supplémentaires injustifiés que les pauvres contribuables ont dû financer.
Soudainement, le 22 avril, il y a seulement deux semaines, la GRC, ce corps policier qui a déjà été fier et respecté à l'échelle internationale, a publié un communiqué laconique dans lequel elle annonçait que l'enquête sur l'affaire des Airbus était enfin close, qu'aucune preuve de méfait n'avait été découverte et qu'aucune accusation ne serait portée. Tout cela est survenu après une enquête de huit ans qui aura apparemment coûté aux contribuables plus de 50 millions de dollars, sans compter les coûts engagés pour la défense dans la poursuite en justice intentée par M. Mulroney, lesquels sont évalués à environ 11 millions de dollars. N'est-ce pas là un autre exemple scandaleux d'abus et de mauvaise utilisation de l'argent des contribuables? C'en est tout un, honorables sénateurs, c'est un exemple tout à fait classique de l'héritage de gaspillage des années Martin-Chrétien.
Nous croyons comprendre que c'est Allan Rock, le ministre de la Justice de l'époque, qui a entrepris cette horrible «chasse aux sorcières» en communiquant au solliciteur général, puis à la GRC, des «rumeurs» selon lesquelles des pots-de-vin auraient été versés relativement à l'achat par Air Canada de 34 appareils Airbus A320 au coût de 1,8 milliard de dollars. Nous croyons comprendre que ces rumeurs ont été lancées ou alimentées par un certain journaliste exagérément zélé qui nourrissait une grande aversion personnelle envers M. Mulroney et sa famille.
Ce sont aussi des subalternes de M. Rock au ministère de la Justice qui ont par la suite transmis la lettre scandaleuse de Kimberly Prost et Fraser Fiegenwald, en date du 29 septembre 1995, demandant l'aide du gouvernement suisse dans cette enquête. Cette lettre contenait cette phrase incroyable:
Cette enquête préoccupe sérieusement le gouvernement du Canada, car elle porte sur une activité criminelle de la part d'un ancien premier ministre.
Par la suite, pendant les audiences dans la poursuite intentée par M. Mulroney, nous avons appris quelque chose de tout aussi scandaleux, c'est-à-dire que le commissaire de la GRC n'avait jamais lu ladite lettre, même deux ans après le fait. Honorables sénateurs, quel jour lugubre ce fut pour la justice et la loyauté au Canada!
Voici ce qu'on a pu lire dans le London Free Press du 29 avril 2003:
Qu'un homme soit révéré ou détesté, les règles de la justice naturelle s'appliquent; bref, les règles fondamentales en matière d'équité s'appliquent à tous. Et la façon dont Mulroney a été traité par le gouvernement Chrétien après avoir quitté le pouvoir est honteuse. J'en veux pour preuve la déclaration faite le 23 avril par le commissaire adjoint à la GRC, Bill Lenton. Celui-ci a annoncé que l'enquête de huit ans qui a coûté des millions de dollars et qui a été menée par la GRC au sujet de la prétendue affaire «Airbus» était terminée. «Il n'y a plus de piste à suivre et il n'y a rien d'autre pour étayer les allégations initiales; il est de notre devoir de mettre un terme à l'enquête, ce que nous avons fait.» Et devinez quoi? On a constaté qu'il n'y avait pas eu d'activités criminelles. Il n'existait pas de faits. En dehors des idées exaltées de prétendus «journalistes d'enquête», il n'y avait rien qui aurait résisté à l'analyse devant un tribunal. Et la GRC l'a finalement reconnu.
L'article du London Free Press ajoute ce qui suit:
Qui plus est, le manque de responsabilité politique est presque aussi choquant que la façon dont le ministère de la Justice a lancé cette enquête, et la GRC l'a menée. À ce jour, aucun politicien n'a démissionné à la suite de cet indécent abus de pouvoir. Si une conclusion s'impose à la suite de la saga d'Airbus, c'est qu'un gouvernement hors de contrôle fait peser un danger sur ses citoyens. Le ministère de la Justice n'a pas vérifié l'exactitude de son information avant de diffamer un ancien premier ministre. La GRC a consacré des millions de dollars à une enquête vaine.
Honorables sénateurs, l'enquête dans l'«affaire Airbus» a peut- être pris fin, mais aucune réponse n'a été apportée aux questions les plus importantes. Comment cette parodie de justice a-t-elle même pu se produire? Combien de temps encore les Canadiens toléreront-ils cet abus de confiance inexplicable de la part du gouvernement Chrétien? Qui devra rendre compte du fait qu'il a soumis Brian Mulroney et toute sa famille à cette tourmente déraisonnable au cours des huit dernières années? Qui justifiera auprès des contribuables canadiens les millions de dollars gaspillés? Comme nous l'avons vu depuis le début de la moche administration libérale en 1993, la réponse est: personne. L'héritage que laisse ce gouvernement est manifestement caractérisé par la sordidité, l'arrogance et le gaspillage abusif.
Cette attitude arrogante s'est manifestée dans cette enceinte le 29 avril 2003. Lorsque le sénateur Tkachuk a demandé très poliment à madame le leader du gouvernement au Sénat à quel moment le gouvernement transmettrait des excuses officielles aux personnes ayant été accusées à tort et avec beaucoup de bruit d'avoir été mêlées à cette mésaventure, celle-ci a répondu trois fois, si je me rappelle bien, «l'enquête a été ordonnée par la GRC. Si l'honorable sénateur a des questions à poser à la GRC, je lui conseille de les adresser à cette organisation». Peut-être le sénateur Tkachuk ne souhaite-t-il pas attendre huit ans pour se faire dire par la GRC qu'«il n'y a rien eu». Il veut et il mérite de savoir quand le gouvernement prendra la décision qui s'impose et s'excusera, comme le souhaitent tous les Canadiens, honorables sénateurs.
[Français]
Honorables sénateurs, je prends la parole maintenant afin de vous parler du programme de commandites. Ce programme libéral a été mis sur pied par l'ancien ministre des Travaux publics, M. Alfonso Gagliano, à la suite des résultats serrés du référendum de 1995 sur la souveraineté du Québec.
Ce programme, d'après les libéraux, avait pour mandat d'augmenter la visibilité du gouvernement fédéral dans les provinces.
[Traduction]
C'est tout simplement une autre affaire scandaleuse, une affaire où la GRC est encore en cause, mais pour les bonnes raisons cette fois-ci. La clé est: quand la GRC terminera-t-elle son enquête criminelle amorcée il y a un an et, au besoin, quand prendra-t-elle les mesures qui s'imposent contre les coupables en conséquence de ce qu'elle aura découvert? J'espère que nous n'aurons pas à attendre huit ans pour cela. Le programme a été créé en 1997, et devait servir à soutenir des activités sportives, culturelles et communautaires dans toutes les régions du Canada ainsi qu'à redorer l'image du gouvernement fédéral et à accroître sa présence et sa visibilité dans tout le Canada par l'usage du sigle Canada dans les événements et les articles promotionnels. En théorie, ce programme de 40 millions de dollars par année semblait être une bien bonne idée. Malheureusement, il a donné lieu à quantité de scandales et de controverses presque à partir de sa création.
(1620)
Certains des marchés les plus controversés ont été accordés à une société de communications ou de marketing de Montréal du nom de Groupaction, amie et partisane notoire du Parti libéral du Canada. Entre 1996 et 1999, Groupaction a obtenu trois marchés évalués à 500 000 $, 550 000 $ et 575 000 $ respectivement. Au mois de mars 2002, ce programme de parrainage a éclaté au visage du gouvernement, par suite de reportages dans les médias et de questions posées à la Chambre des communes et ici au Sénat. D'importantes préoccupations ont été soulevées au sujet de l'inefficacité du programme et d'exemples évidents de gaspillage. Groupaction a été au coeur de cette controverse. Après des pressions accrues des médias, du public et des parlementaires, le ministre des Travaux publics de l'époque, Don Boudria, a été forcé de demander à la vérificatrice générale de procéder à un examen spécial des trois marchés de commandite de Groupaction.
La vérificatrice générale, Mme Sheila Fraser, a approuvé la tenue d'une vérification spéciale. Quelques mois plus tard, le 8 mai 2002, elle déposait un long rapport à la Chambre des communes. Elle ne mâche pas ses paroles. Voici ce qu'elle déclare:
Notre vérification a révélé que les hauts fonctionnaires chargés de la gestion des contrats ont manifesté un mépris flagrant à l'égard de la Loi sur la gestion des finances publiques, du Règlement sur les marchés de l'État, de la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor, et des règles visant à garantir que les contrats gouvernementaux sont octroyés et administrés avec prudence et probité [...]. Les dossiers du gouvernement sur les trois contrats sont si mal documentés que de nombreuses questions clés entourant la sélection de l'entrepreneur et la méthode utilisée pour établir le prix et l'étendue des travaux stipulée dans les contrats demeurent sans réponse. À notre avis, le gouvernement n'a pas reçu tout ce qui était stipulé dans les contrats et ce pourquoi il a versé de l'argent [...].
Des éléments clés des exigences des contrats de Groupaction n'ont jamais été livrés, et personne n'a pu trouver le rapport prévu aux termes du deuxième contrat, pour lequel le gouvernement a versé 549 990, 42 $ [...]. Les fonctionnaires ont approuvé des paiements pour des travaux qui différaient considérablement de ce qui était stipulé dans les contrats. Dans quelques cas, ils ont approuvé des paiements tout en sachant bien que les exigences des contrats n'avaient pas été entièrement respectées [...]. Nous avons constaté que le premier contrat a été modifié de façon à en doubler la valeur, mais nous n'avons trouvé aucun document justifiant la nécessité de cette modification [...]. Aucun des documents que nous avons examinés ne contient d'explications sur la façon dont le gouvernement a déterminé les services requis et sur les raisons pour lesquelles il a décidé que la passation d'un contrat serait la meilleure façon d'obtenir ces services. Nous n'avons trouvé aucune preuve d'un processus de sélection approprié pour l'attribution du premier contrat [...]. Nous n'avons trouvé que très peu d'éléments de preuve étayant la décision d'attribuer les deuxième et troisième contrats à Groupaction [...]. Les fonctionnaires n'ont pas respecté les dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques et des règlements sur les marchés publics, ni vérifié si le nombre d'heures facturées par l'entrepreneur reflétait raisonnablement bien les travaux effectués.
Au cours de la conférence de presse qui a suivi le dépôt de son rapport, Mme Fraser a déclaré:
La Loi sur la gestion des finances publiques et les règlements sur les marchés publics s'applique aux fonctionnaires, non pas aux entrepreneurs, et les hauts fonctionnaires ont enfreint à peu près toutes les règles.
Les constatations de la vérificatrice générale concernant les contrats passés avec Groupaction l'ont amenée à entreprendre une vérification à l'échelle du gouvernement des programmes de commandites. Elle a également ajouté au cours de sa conférence de presse: «Vous ne pouvez pas mettre trois contrats aussi mal gérés sous les yeux de la vérificatrice générale et vous attendre à ce qu'elle ne demande pas à voir la suite.» Elle a également ajouté: «C'est une façon tout à fait inacceptable, pour le gouvernement, de faire des affaires. Les contribuables canadiens méritent mieux.»
Le 24 mai 2002, il y a à peine un an, la GRC annonçait qu'elle lançait une enquête criminelle complète sur l'octroi de contrats de publicité à Groupaction. Les Canadiens en attendent le résultat avec impatience.
Les médias s'en sont donné à coeur joie après le dépôt du rapport de Mme Fraser. Par exemple, le 18 septembre 2002, le Globe and Mail rapportait ceci:
Dans le cadre de l'ancien programme fédéral de commandites, des agences de publicité recevaient de grasses commissions, généralement de 12 p. 100, pour surveiller la commandite d'événements par le gouvernement [...]. Des agences québécoises, qui contribuaient largement au Parti libéral, et dont les cadres travaillaient à la campagne électorale du parti — Groupaction, Groupe Everest et Lafleur Communication Marketing Inc. — ont reçu la part du lion des contrats [...]. Une vérification interne faite en 2000 à Travaux publics a révélé que Groupaction et Groupe Everest avaient reçu à elles deux 63 p. 100 de l'argent des commandites, et ce, en violation des lignes directrices du gouvernement qui limite à 25 p. 100 ce qu'une compagnie peut recevoir.
Et il y a pire, honorables sénateurs. Groupaction était également l'entreprise de choix pour un autre fiasco notoire du gouvernement actuel — le programme d'enregistrement des armes à feu. Cette agence a réussi à obtenir pour 29,3 millions de dollars de contrats depuis 1997 au titre de ce programme d'un milliard de dollars. À cet égard, le Telegraph-Journal de Saint John rapportait, le 18 juin 2002:
Le travail de Groupaction sur le registre des armes à feu a produit un autre rapport qui reste introuvable.
Son Honneur le Président: Je suis désolé de vous interrompre, sénateur Angus, mais vous n'avez plus de temps.
Le sénateur Angus: Pourrais-je avoir l'autorisation de poursuivre?
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, l'article se poursuit ainsi:
Le gouvernement fédéral fait enquête sur un autre contrat passé avec l'Agence de publicité montréalaise Groupaction Marketing, d'un montant de 330 000 $, pour élaborer une stratégie de communication que le ministère de la Justice n'a jamais demandée afin de vendre aux Canadiens la politique du gouvernement fédéral en matière de contrôle des armes à feu [...]. Le contrat, accordé en décembre 1996, prévoyait que Groupaction sonde les personnes touchées par les nouvelles règles sur l'enregistrement des armes à feu adoptées en vertu de la Loi sur les armes à feu et mette au point une stratégie de communication à l'intention du gouvernement[...]. Le ministère de la Justice dit n'avoir jamais demandé cette étude et n'avoir rien reçu de Groupaction. Le contrat a été passé par Travaux publics et approuvé par Charles Guité, un haut fonctionnaire qui a depuis pris sa retraite sans fanfare.
En février de cette année, le ministre des Travaux publics Ralph Goodale annonçait que jusqu'à sept fonctionnaires impliqués dans le programme des commandites faisaient face à des mesures disciplinaires, ou même à des accusations criminelles. Le ministre Goodale a également suggéré que l'enquête pourrait inclure l'ex- ministre des Travaux publics Alphonso Gagliano, qui était responsable du ministère quand ces activités scandaleuses ont pris place.
[Français]
Honorables sénateurs, j'aurais pu continuer pendant des heures à vous réciter les scandales du gouvernement libéral. Cependant, par faute de temps, je me suis limité aux faits fort troublants, sinon incroyables, entourant une seule agence de communication, Groupaction.
Nous pouvons conclure que le scandale entourant le programme de commandites a vu le jour quand les libéraux, sous le prétexte de combattre le mouvement séparatiste, en ont profité pour signer des chèques importants à leurs supporteurs. Afin d'y arriver, les libéraux ne se sont pas lassés de contourner ou de briser toutes les règles gouvernementales mises en place pour assurer l'attribution adéquate des contrats gouvernementaux.
[Traduction]
Prétextant lutter contre le mouvement séparatiste au Québec, le gouvernement fédéral a signé de gros chèques à ses loyaux donateurs et partisans. Les faits indiquent clairement que les services donnés à contrat contre de généreux honoraires ont été, dans bien des cas, rendus seulement en partie et, dans tous les autres cas, ils ne l'ont pas été du tout.
Le gouvernement semble aussi avoir agi de façon sournoise et trompeuse en brouillant les pistes et en n'ayant aucun document à présenter aux vérificateurs. Qui plus est, le gouvernement a seulement décidé de corriger la situation après avoir été pris la main dans le sac, non pas une fois, mais trois fois, quatre fois, et même davantage.
Il y a plusieurs jours, honorables sénateurs, Ralph Goodale, le ministre des Travaux publics qui est actuellement responsable des pratiques fédérales d'adjudication des marchés, a annoncé une série de nouvelles mesures visant à apporter un semblant d'intégrité à cette énorme dépense de fonds publics pour la publicité gouvernementale. M. Goodale, qui est devenu le défenseur en résidence de l'intégrité du gouvernement, a déclaré au moment de cette annonce: «Nous devrions avoir élaboré un processus qui va être ouvert, transparent et équitable [...]. Je crois que nous avons maintenant un ensemble de règles solides et crédibles.» Pour ce qui est d'offrir des contrats de publicité aux militants pour des services rendus durant les campagnes électorales, M. Goodale a déclaré ceci: «Cela ne se fera plus. On a pu le faire par le passé, mais ce genre de pratique ne sera plus accepté aujourd'hui par la population, et il ne doit pas l'être.»
(1630)
Selon un éditorial du Ottawa Sun de vendredi dernier:
Dans la décennie au cours de laquelle le gouvernement Chrétien a été au pouvoir, les agences de publicité amies du gouvernement ont pu décrocher des contrats fédéraux d'une valeur d'environ 1,5 milliard de dollars. L'année dernière seulement, les ministères fédéraux ont gaspillé près de 200 millions de dollars pour faire de la publicité sur n'importe quoi, depuis le SRAS jusqu'aux obligations d'épargne. D'office, la part du lion est allée à un petit cercle étroit d'entreprises proches du pouvoir libéral... Il n'y a aucun moyen de déterminer exactement combien de millions de dollars d'argent des contribuables ont été ainsi gaspillés.
Honorables sénateurs, la vérificatrice générale Fraser a dit que les nouvelles règles d'adjudication des marchés de publicité de l'État constituaient un pas dans la bonne direction. Je suis d'accord. Toutefois, elle a ajouté:
... il faudra attendre de voir comment les politiques seront mises en œuvre. Nous verrons alors. Dans beaucoup de cas, le gouvernement a de très bonnes politiques et procédures. C'est la façon de les mettre en pratique qui suscite des difficultés.
Tout cela nous amène à nous demander combien d'autres cadavres sont cachés dans le placard libéral, attendant d'être découverts. Il est clair que ces contrats ne sont rien d'autre qu'une manifestation flagrante de favoritisme. Plus on en apprend sur les tractations du gouvernement, plus les abus et les malversations deviennent évidents. Les priorités libérales sont simples: récompenser les amis et cacher la vérité aux Canadiens.
Les Canadiens travaillent très dur, honorables sénateurs. Les contribuables versent au gouvernement une part considérable de leur argent durement gagné. Honorables sénateurs, il est tout simplement inacceptable que cet argent soit gaspillé de cette façon déplorable et soit utilisé pour contribuer à ce comportement malhonnête et immoral. Les responsables ont des comptes à rendre sur leurs flagrants abus.
Des voix: Bravo!
L'honorable John G. Bryden: Puis-je poser une question à l'honorable sénateur?
Je prends la parole, honorables sénateurs, parce que j'ai appris vers la fin de la semaine dernière qu'il y a eu un important malentendu au sujet de mon discours. Je sais que je n'ai pas le droit de parler plus d'une fois dans le cadre de cette interpellation. J'ai pris connaissance de cette erreur parce que le sénateur Stratton a posé une question au leader du gouvernement au Sénat. La question était directement tirée de mon discours, et il n'y a pas de doute qu'une bonne partie de mon discours dépendait de la phrase mentionnée. Il était évident pour moi que le sénateur avait mal compris cette partie. Madame le leader du gouvernement a dit qu'elle ne pouvait pas répondre en mon nom, ce qui est vrai. Elle a ajouté que je pourais répondre moi-même. Depuis que j'ai lu cela, j'essaie de trouver un moyen de répondre, puisque je ne peux prendre la parole qu'une seule fois et que je l'ai déjà fait.
J'attire l'attention du Sénat sur le paragraphe 37(1) de notre Règlement, qui traite de cette question. Voici ce qu'on peut y lire:
Aucun sénateur ne peut parler plus d'une fois au cours d'un même débat, sauf si une partie importante de son discours a été mal comprise...
Le sénateur Stratton: C'est cousu de fil blanc, sénateur Bryden.
Le sénateur Bryden: Voici la suite du paragraphe:
Avec la permission du Sénat, le sénateur a alors cinq minutes, au plus, pour expliquer cette partie mal comprise, mais il ne peut apporter aucun nouvel élément à la discussion.
Le sénateur Stratton: Avez-vous l'intention de vous excuser?
Le sénateur Bryden: Parce que je crois que la question a été posée sérieusement et qu'il est évident, pour moi, qu'il y a malentendu, je demande au Sénat de m'accorder cinq minutes pour m'expliquer.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: Non.
Son Honneur le Président: Honorable sénateur Bryden, la permission n'est pas accordée.
Des voix: C'est honteux!
Le sénateur Stratton: La prochaine fois, vous pourrez accepter des questions.
L'honorable Pierrette Ringuette: Je voudrais poser une question à l'honorable sénateur sur son discours.
Des voix: Il est parti.
Le sénateur Ringuette: Honorables sénateurs, je suis désolée qu'il ait quitté si tôt. Je vous remercie.
Le sénateur Lynch-Staunton: Posez une question au sénateur Bryden.
(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Eyton, le débat est ajourné.)
L'ASSOCIATION PARLEMENTAIRE CANADA-EUROPE
DEUXIÈME SESSION D'HIVER DE L'ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE TENUE LES 20 ET 21 FÉVRIER 2003—DÉPÔT DU RAPPORT
Permission ayant été accordée de revenir au dépôt des rapports de délégations interparlementaires:
L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l'Association parlementaire Canada- Europe — OSCE, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, sur la deuxième session d'hiver de l'AP — OSCE qui a tenu son assemblée parlementaire à Vienne, en Autriche, les 20 et 21 février 2003.
LE BUDGET DE 2003
INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Lynch-Staunton attirant l'attention du Sénat sur le budget présenté par le ministre des Finances à la Chambre des communes le 18 février 2003.—(L'honorable sénateur Carstairs, c.p.)
L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai commencé ce discours le 25 mars. Malheureusement, mes activités et, je me dois d'ajouter, celles de leader du gouvernement m'ont empêchée de revenir en cet endroit avant aujourd'hui. J'étais en train de parler naturellement de la bonne nouvelle que les journaux nous ont apprise aujourd'hui au sujet de l'économie nationale. Permettez-moi de commencer.
[Français]
À la même période l'an dernier, le sénateur Bolduc exprimait des doutes au sujet de notre reprise économique, qualifiant de trop optimistes les prévisions du ministre des Finances. Pour étayer sa position, il a cité le cas de nos voisins du Sud et rappelé le scepticisme prudent affiché par M. Alan Greenspan, président du Federal Reserve Board et par M Bob Rubin, secrétaire au Trésor.
[Traduction]
Heureusement pour les Canadiens, nous ne pouvons établir de parallèles entre les performances de nos deux économies. Je suis heureuse de signaler qu'en dépit du ralentissement de l'économie américaine et de l'augmentation de la dette nationale des États- Unis, les indicateurs économiques ici au Canada demeurent favorables. Depuis le dépôt du budget l'année dernière, notre économie nationale a connu une croissance favorable selon un certain nombre de facteurs économiques importants. Le Canada se retrouve dans une position enviable comparativement à l'ensemble de ses partenaires du G-7. Au cours de la dernière année, il a connu le plus haut taux de croissance parmi les membres du G-7, les autres pays faisant face à une incertitude économique. On s'attendait à ce que le Canada soit le seul parmi les membres du G-7 à être en mesure d'afficher un excédent l'année dernière. Tous les indicateurs montrent que sa croissance économique se poursuivra et qu'il affichera un excédent encore cette année.
Notre niveau de vie a augmenté plus rapidement que dans les autres pays du G-7 et la conjoncture économique continue d'être favorable.
[Français]
Le Fonds monétaire international et l'Organisation de coopération et de développement économiques prévoient que le Canada devancera tous les autres pays du G-7 pour ce qui est de la croissance économique au cours des deux prochaines années.
(1640)
Le budget de 2003 est le sixième budget équilibré présenté par le gouvernement. Cette prudence sur le plan financier a rapporté de nombreux dividendes aux Canadiens. Nous avons assisté à un renforcement de la sécurité économique qui a permis au revenu disponible des particuliers d'augmenter de 13 p. 100 au cours de ces dernières années.
[Traduction]
Au cours des dernières semaines, le dollar canadien a connu une flambée extraordinaire. Combien d'honorables sénateurs ici présents se rappellent les conversations que nous avons eues à la période des questions, il y a tout juste un an? De l'avis de l'opposition, notre dollar était en pleine dégringolade et ne pouvait reprendre de la vigueur. Or, je crois qu'il a atteint, hier, les 70,87 cents par rapport à l'étalon américain. Il n'a pas atteint les creux redoutés et a connu de fortes augmentations au cours des derniers mois. Il affiche aujourd'hui sa valeur la plus élevée en plus de cinq ans.
Les nouvelles mises en chantier dans le secteur résidentiel se sont également envolées. Le nombre de demandes de permis de construction a atteint un nouveau record à la hausse, au début de l'année, et, comme les taux d'intérêt demeurent faibles, les Canadiens peuvent se permettre d'acheter ces nouvelles propriétés.
Parmi les pays du G-7, le Canada a enregistré l'an dernier la plus forte croissance au chapitre de l'emploi, dans tous les groupes d'âge et dans toutes les régions. Le mois dernier, alors que les Américains perdaient plus d'emplois qu'à toute autre période de l'an dernier, Statistique Canada annonçait que le Canada avait créé 55 000 nouveaux emplois au cours de la même période.
Grâce aux remboursements records de la dette nationale, les Canadiens sont aujourd'hui moins accablés par le service de la dette. Le gouvernement du Canada est désormais en mesure de consacrer les fonds antérieurement appliqués au service de la dette à des dossiers prioritaires comme ceux des soins de santé, de la prestation nationale pour enfants et de l'éducation.
Honorables sénateurs, le gouvernement du Canada s'est également engagé à réduire les impôts, dans la mesure du possible, en fonction du véritable coût des programmes fédéraux. Comme certains programmes ont peut-être dépassé leur durée de vie utile et que peu d'entre eux sont conçus pour durer indéfiniment, les dépenses gouvernementales feront l'objet d'un examen. Cet examen des programmes, en l'occurrence de tous les programmes fédéraux, dans l'ensemble des ministères, sera mis en œuvre par les ministères eux-mêmes. Ces examens permettront d'établir l'utilité et l'efficacité des programmes et se termineront par un rapport au Conseil du Trésor. Ils permettront en outre de libérer davantage de recettes qui pourront être consacrées à des nouveaux programmes, mieux conçus pour répondre aux besoins des Canadiens aujourd'hui.
Afin de réduire la dette, les budgets antérieurs ont plutôt visé la compression des dépenses que la nécessité de faire un ajustement de l'apport des recettes. À l'heure actuelle, l'économie canadienne traverse une période favorable. Les contribuables méritent de bénéficier des sacrifices qu'ils ont consentis. Comme l'un de mes prédécesseurs, en l'occurrence l'honorable Alasdair Graham, l'a déclaré il y a quelques années, l'élimination du déficit n'est pas une fin en soi. Ainsi, en plus de mettre en œuvre de nouvelles initiatives, le gouvernement fédéral instaure présentement un programme de réduction des coûts dans plusieurs secteurs.
Lorsque le gouvernement du Canada a imposé un droit pour la sécurité des passagers du transport aérien, nous nous sommes engagés à revoir les coûts de ce programme. Le dernier budget a réduit ce droit de 40 p. 100, le ramenant de 24 $ à 14 $ pour un billet aller-retour pour toute destination au Canada.
Je sais que l'honorable sénateur Stratton doit être absolument ravi d'apprendre que le gouvernement fédéral engagera des experts indépendants pour mener des consultations sur les programmes d'assurance-emploi et qu'il haussera les taux de cotisation des employés afin de mieux les harmoniser avec les coûts de ce programme. Les honorables sénateurs savent sûrement que, même si on les réduit chaque année, les cotisations au régime d'assurance- emploi demeurent trop élevées pour les besoins, et c'est ce sur quoi se pencheront ces experts.
[Français]
Les impôts seront diminués afin d'encourager les investissements au Canada. L'impôt fédéral sur le capital sera éliminé au cours des cinq prochaines années. Les petites entreprises auront droit à des déductions plus importantes. Il y aura également une baisse des impôts dans le secteur des ressources minérales et naturelles.
[Traduction]
Par le passé, nos budgets étaient en grande partie axés sur la responsabilité financière, et cela ne changera pas. Cependant, nous mettons également l'accent sur la nécessité d'accroître la transparence et la reddition de comptes.
Le gouvernement du Canada, sur la recommandation de la vérificatrice générale, a mis en place un nouveau système de gestion financière. La comptabilité d'exercice intégrale permettra au gouvernement et aux contribuables d'obtenir une image plus exacte et plus réaliste des recettes et des dépenses.
Au lieu de prendre des décisions financières fondées sur des données se limitant aux conditions actuelles, on pourra, grâce à ce type de comptabilité, tenir compte des avantages et des inconvénients à long terme des mesures envisagées. Le passage de la comptabilité de trésorerie à la comptabilité d'exercice permettra au contribuable canadien d'en avoir plus pour son argent et au gouvernement fédéral de voir les avantages financiers découlant de ses dépenses.
Afin d'accroître la transparence, le soutien offert aux provinces par le gouvernement fédéral prendra la forme de deux nouveaux transferts: le transfert canadien en matière de santé, pour les questions de santé, et le Transfert canadien en matière de programmes sociaux, pour l'enseignement post-secondaire et les services sociaux.
[Français]
L'accroissement des fonds destinés aux prêts consentis par la Banque de développement du Canada aidera davantage les entreprises. D'autres institutions comme Entreprises autochtones Canada, Financement agricole Canada et le Programme d'aide à la recherche industrielle du Conseil national de recherches du Canada recevront des fonds supplémentaires pour encourager les initiatives pouvant rapporter à leurs secteurs respectifs.
[Traduction]
Honorables sénateurs, l'une des initiatives les plus importantes dans ce budget est l'augmentation des crédits consacrés à l'aide destinée aux membres les plus démunis de la société, à savoir les sans-abri que nous voyons tous les jours dans nos collectivités. Nous savons que ce n'est pas une simple affaire que de régler les problèmes d'un aussi grand nombre de personnes vivant dans la rue. Toutefois, en leur donnant un gîte, nous leur procurons aussi stabilité et dignité, deux éléments indispensables à la reconstruction de leur vie.
Au cours des trois prochaines années, plus de 400 millions de dollars seront investis pour combattre l'itinérance. L'Initiative de partenariats en action communautaire coordonnera le transfert des fonds aux collectivités afin de cerner les priorités et d'y répondre. Elle fonctionnera en partenariat avec d'autres niveaux de gouvernement, mais aussi avec les organismes de bénévoles et du secteur privé pour enrayer l'itinérance.
Honorables sénateurs, j'ai eu l'honneur, il y a quelques mois de cela, de visiter deux refuges au Canada, celui de Thompson, dans le nord du Manitoba, qui accueille presque exclusivement des autochtones qui ont quitté leur localité et qui se retrouvent à Thompson à la rue, et celui d'Ottawa appelé le Mission Hospice. Honorables sénateurs, je dois dire que, d'après ce que j'en ai vu personnellement, il n'y a absolument rien à redire quant à ce que nous rapporte l'argent que nous investissons dans des refuges comme ceux-là.
J'ai trouvé difficile de visiter le refuge de Thompson, qui ne peut accueillir que 15 personnes par nuit. S'il accueille une femme, par exemple, il ne peut accepter que huit hommes car il n'y a que deux chambres, une pour les femmes et une pour les hommes. S'il n'y a qu'une femme et qu'elle a besoin de cette chambre, il faut demander à six hommes de partir et de dormir à la dure, car on ne peut pas les garder sur place. De toute évidence, il leur faut plus de place. Il est à espérer que, grâce à cette initiative, on leur en fera.
Il se produit quelque chose de spécial au Mission Hospice, ici, à Ottawa. On y a en fait prévu d'y dispenser des soins palliatifs. On y traitera les sans-abri qui ne veulent pas aller à l'hôpital. Leur mode de vie est tel qu'ils refusent d'être hospitalisés et on a donc prévu de leur prodiguer des soins palliatifs au Mission Hospice.
La ministre responsable, Claudette Bradshaw, est tellement impressionnée par ce programme qu'elle prend contact avec d'autres refuges aux quatre coins du pays pour voir s'ils pourraient offrir le même type de service.
J'attire l'attention des sénateurs sur le fait que l'Initiative de partenariats en action communautaire est reconnue à l'échelle internationale en tant que programme modèle répondant aux besoins des sans-abri. L'année dernière, l'IPAC a reçu le titre de pratique exemplaire dans le cadre de la remise des Prix internationaux pour les «meilleures pratiques» de l'ONU Habitat. Ces prix reconnaissent les programmes qui améliorent la qualité de vie au sein des villes et des collectivités du monde entier.
Le gouvernement du Canada s'est engagé à investir 3 milliards de dollars dans nos infrastructures au cours des dix prochaines années, dont un milliard dans les infrastructures municipales. Une part de ces fonds va à l'IPAC et une part à l'augmentation du nombre de logements abordables et au Programme d'aide à la remise en état des logements.
Les Canadiens savent toutefois que la qualité de vie ne dépend pas seulement du logement et des infrastructures.
(1650)
Les sénateurs savent quelle est la pierre angulaire de ce budget, soit l'investissement quinquennal de près de 35 milliards de dollars dans le système de soins de santé, la première priorité des Canadiens. Cet investissement est le résultat de plusieurs facteurs convergents. Certes, la Commission Romanow sur l'avenir des soins de santé au Canada, qui a présenté ses recommandations l'année dernière, est un facteur déterminant. Cependant, le facteur ultime et décisif est la conclusion de l'accord sur la santé en 2003, aboutissement des discussions tenues plus tôt cette année par les premiers ministres fédéral et provinciaux.
Toutefois, la chose n'aurait pas été possible sans l'importante contribution des membres du Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Ce comité a examiné la qualité des services de soins de santé et l'accessibilité à ces services d'un océan à l'autre et formulé des recommandations détaillées en vue de la modification des approches actuelles et de l'ajout de services nouveaux et innovateurs. Son travail a été pris en compte également. Honorables sénateurs, je crois que si vous examinez les recommandations du comité sénatorial, les recommandations du rapport Romanow et l'accord sur la santé, vous trouverez que le Sénat a fait un bon rapport.
J'ai déjà parlé des progrès importants réalisés dans le domaine dont je m'occupais à titre de ministre responsable des soins palliatifs. Je suis extrêmement heureuse de signaler que ce budget pour les soins de santé instaure une nouvelle prestation, financée par le fonds de l'assurance-emploi, qui permettra aux gens de prendre un congé de six semaines pour prodiguer des soins par compassion. Ainsi, tout membre d'une famille pourra prendre soin d'un parent gravement malade ou en fin de vie sans se préoccuper de son revenu pendant cette période difficile. Les Canadiens m'ont souvent demandé que le gouvernement augmente l'aide accordée durant ces périodes stressantes et bouleversantes. Je crois que c'est là une des meilleures façons d'accorder un appui réel.
Puisque les soins de santé sont si fondamentalement importants pour les Canadiens, bien d'autres aspects des soins de santé profiteront aussi d'un financement accru. La plus grande proportion des fonds en matière de santé servira à aider les provinces et les territoires à améliorer les soins de santé primaires, les soins à domicile et la couverture des médicaments d'ordonnance onéraux. En fait, nous allons acheter le changement.
Le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux sera enrichi de milliards de dollars et recevra une injection immédiate de 2,5 milliards de dollars qui permettront d'améliorer le système actuel de soins de santé. Les sommes versées serviront à accélérer la mise sur pied d'un système national de télédossiers de santé confidentiels, à établir un fonds pour l'achat d'équipement diagnostique et médical et à appuyer la recherche médicale.
Les Canadiens considèrent notre système d'assurance-maladie universel comme une condition essentielle de notre bien-être national. Ils se préoccupent aussi du bien-être de nos enfants, qui hériteront de ces valeurs et devront les maintenir. Le mois dernier, la ministre Stewart a annoncé que les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables des services sociaux s'étaient entendus sur un élargissement des programmes et des services de développement de la petite enfance. Neuf cent millions de dollars seront répartis entre les provinces et les territoires pour accroître l'accès à des services d'éducation de la petite enfance abordables et de haute qualité. Il importe toujours de conjuguer «garde d'enfants» avec «éducation de la petite enfance». Les enfants sont comme des éponges. Ils commencent à apprendre dès leur naissance, sinon dès leur conception. Il suffit de les regarder dans les yeux pour savoir qu'ils apprennent tous les jours. Les bonnes garderies ne font pas qu'héberger les enfants, elles les éduquent aussi. Il y a aussi des dispositions relatives à une nouvelle prestation pour enfant handicapé, destinée aux familles à bas revenus, et la liste des dépenses médicales qui sont admissibles à un crédit d'impôt a été élargie.
Je ne doute pas que les sénateurs sont conscients de l'importance que représentent les Premières nations et les peuples autochtones pour notre premier ministre. Je sais que les premiers Canadiens préoccupent aussi nombre d'entre nous et qu'ils ont toujours été écoutés au Sénat. Je sais également que vous comprenez la complexité du problème auquel est confronté tout gouvernement qui tente de combler les écarts économiques entre les peuples autochtones et les autres collectivités du pays.
[Français]
Ce budget renferme de nombreuses initiatives visant à régler les préoccupations de santé et autres sur les réserves. Comme vous le savez, bon nombre de programmes comprennent des dispositions touchant les Autochtones. Outre ces importants programmes, le budget prévoit des fonds précis pour protéger les langues et la culture autochtones grâce à l'établissement d'un nouveau centre qui sera dirigé par les Autochtones, de fonds pour élargir le Programme des services de police des Premières nations et de fonds pour trouver de nouvelles façons de répondre aux besoins des Autochtones vivant en milieu urbain.
[Traduction]
Ce budget renferme des mesures visant à investir davantage dans des programmes qui rehaussent la qualité de vie des Autochtones dans les réserves et à l'extérieur des réserves. Un montant important, soit 1,3 milliard de dollars, sera affecté au cours des cinq prochaines années pour soutenir des programmes de santé destinés aux Premières nations et aux Inuits. Ces fonds serviront à accroître le développement des immobilisations, les programmes de soins infirmiers et les programmes d'immunisation.
L'été dernier, j'ai passé une semaine à visiter des réserves du nord du Manitoba, particulièrement leurs centres de soins infirmiers, leurs hôpitaux et leurs centres de soins personnels. La qualité des soins y est exemplaire, mais le manque de matériel et de ressources est stupéfiant. Aucun de nous, dans cette région-ci, ne tolérerait un seul instant les conditions que bon nombre d'entre elles doivent tolérer.
Je citerai un exemple qui m'a estomaquée. Dans une collectivité où chaque malade doit être transporté à l'extérieur de la réserve et où le trajet prend une heure et demie, on n'avait pas les moyens d'acheter une couverture chauffante de 500 $. Des patientes accouchent, des malades font des crises cardiaques ou sont victimes d'accident et, pourtant, nous ne pouvons pas leur procurer une couverture chauffante. Enfin, quelqu'un a décidé de le faire. Quelqu'un du ministère de la Santé a autorisé cet achat et ils ont obtenu leur couverture chauffante. Cependant, quelqu'un d'autre du ministère de la Santé a décidé qu'ils n'en avaient pas besoin et a voulu la confisquer. Heureusement, le conseil de bande a payé la couverture chauffante et elle est toujours dans la collectivité. Une telle situation est intolérable.
J'ai également appris que des patients étaient transportés à l'extérieur pour des tests qu'ils auraient pu subir dans la réserve. Le coût du transport d'une personne entre cette localité et Winnipeg s'élevait à 900 $, et on transportait 50 personnes par année. Le coût de l'équipement nécessaire pour les tests était de 5 000 $. Il n'est pas nécessaire d'être très fort en calcul pour comprendre qu'il suffirait de trois mois pour payer l'équipement. On pouvait se demander, très logiquement, s'il y aurait du personnel compétent pour utiliser l'équipement et faire passer les tests. En réalité, il y avait à l'hôpital une personne qui avait la formation voulue pour faire passer le test. Je crois savoir que l'établissement a maintenant l'équipement nécessaire.
Honorables sénateurs, cette expérience directe m'a vraiment ouvert les yeux. Ce n'est vraiment pas comme lire des documents traitant de ces problèmes. Je l'avais déjà fait. C'est bien différent d'aller sur place, de visiter des postes de soins infirmiers et des centres de soins primaires et de rencontrer les infirmières qui dispensent les soins. J'ai pu voir Télésanté, une initiative splendide parrainée par le gouvernement fédéral et les municipalités. Un exemple des avantages de Télésanté est le cas d'un jeune enfant qui a été opéré pour une hernie. Normalement, il aurait fallu envoyer l'enfant à Winnipeg trois ou quatre fois. Grâce à Télésanté, il n'y est allé qu'une fois. Le reste du temps, il est resté chez lui, soutenu par les membres de sa famille. Voilà le genre de technologie innovatrice dans laquelle nous devons investir si nous voulons assurer à nos peuples autochtones les soins de qualité auxquels ils ont droit à titre de Canadiens. Cette technologie doit être plus largement disponible.
(1700)
La contribution que les Autochtones ont apportée à notre pays a assuré un héritage culturel particulier au Canada. Il y a d'autres aspects que nous considérons comme tout particulièrement canadiens, dont le fait que notre pays a été formé par la combinaison de deux cultures européennes distinctes.
J'ai assisté la semaine dernière à l'annonce faite par le premier ministre et le ministre des Affaires intergouvernementales qui ont promis une somme de 750 millions de dollars sur cinq ans dans le cadre d'un plan d'action en matière de langues officielles. Nous avons déjà fait de grands progrès au chapitre de la promotion du bilinguisme chez nos jeunes. Au cours de la dernière décennie, le nombre d'étudiants bilingues a doublé, atteignant maintenant les 25 p. 100. Nous devons toutefois accroître ce niveau à 50 p. 100 si nous voulons que le bilinguisme continue d'être protégé au pays et de faire partie de notre identité culturelle.
Honorables sénateurs, l'une des initiatives de ce nouveau programme que je considère importante est la nécessité d'accroître les exigences des programmes d'étude de base en langue française. Étant professeure, cela me semble logique, mais ce n'est pas nécessairement le cas pour vous. Toutefois, dans ma province par exemple, nous avons trois types de programmes. Il y a des enfants qui sont inscrits à des programmes français. Ces enfants ont des parents francophones et, à part leurs cours d'anglais, tout le reste de leur programme se donne en français.
Nous avons également des programmes d'immersion française hâtive ou tardive, l'immersion hâtive commençant à la maternelle et l'immersion tardive en quatrième et parfois même seulement en septième année. Je dois dire que bon nombre des professeurs de ces classes sont extraordinaires. Ils sont très compétents.
Toutefois, les autres, qui constituent de loin la majorité des enfants manitobains qui apprennent le français, suivent ce que nous appelons un programme de français de base. Cela signifie qu'ils ont 40 minutes de cours de français par jour à compter de la première et parfois seulement de la quatrième année. Je crois que nous devons améliorer ce programme de base. Je ne voudrais pas que les enfants vivent ce que moi j'ai vécu. J'ai suivi des cours de français pendant toutes mes études, mais mon professeur ne parlait pas français. J'ai appris à écrire et à lire le français, mais il est très difficile de parler français à quelqu'un qui ne peut répondre dans la même langue. En conséquence, je n'ai pas appris à parler français, même si cela faisait partie du programme et que je l'ai étudié. Malheureusement, cela n'était pas suffisant.
Par conséquent, il nous faut améliorer la formation des professeurs de français pour que tous les enfants aient la chance d'apprendre à parler français. Il est probablement tout aussi vrai qu'il faut offrir au Québec une solide formation en anglais de telle sorte qu'on y apprenne à communiquer dans l'autre langue officielle.
Un aspect de la culture canadienne qui m'intéresse au plus haut point en tant qu'ancienne professeure d'histoire du Canada est la protection de notre patrimoine. Nous allons libérer 30 millions de dollars sur trois ans pour encourager financièrement le secteur privé à protéger des sites historiques. Cela servira non seulement à restaurer certains de nos plus beaux bâtiments, mais aussi à stimuler la croissance économique dans les quartiers les plus anciens et les plus négligés de nos villes où ils se trouvent le plus souvent.
Au-delà de notre santé, de nos enfants et de nos communautés, ce budget s'étend à notre frontière nationale et à la protection du bien- être collectif de l'humanité. Compte tenu du caractère multiculturel de notre pays, les Canadiens ont un sens inné de l'importance des affaires internationales. Nous savons que le Canada occupe une place spéciale dans le concert des nations et que nous pouvons jouer un rôle important dans les relations internationales. Pour les Canadiens, toutefois, la sécurité est affaire non seulement de défense nationale, mais aussi de paix et de prospérité économique à l'échelle internationale.
Ce budget prévoit 800 millions de dollars pour nos forces armées, plus 250 autres millions de dollars dès l'annonce du budget. Il prévoit aussi une hausse de l'aide internationale de 1,4 milliard de dollars sur trois ans. Le Canada est en voie de doubler son aide internationale d'ici à 2010, car nous croyons qu'un équilibre plus juste entre les pays contribuera à réduire les conflits, et le gouvernement n'a annoncé aucune initiative nationale plus importante que le fonds d'investissement pour l'Afrique du premier ministre.
[Français]
Afin de renforcer l'économie de notre pays, nous investirons d'autres fonds pour élargir le commerce avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis.
Nous affecterons également des fonds dans les réserves pour éventualités au titre de la sécurité, pour répondre aux besoins imprévus en matériel de sécurité, notamment la sécurité frontalière.
[Traduction]
Lorsque le gouvernement actuel a été élu pour la première fois, nous avons fait une promesse fondamentale aux Canadiens, celle de mettre en oeuvre une stratégie économique solide. Nous nous sommes engagés à long terme à ne pas enregistrer de déficit et à ne pas accroître notre dette nationale. Comme les honorables sénateurs le savent, il y a seulement huit ans, notre niveau d'endettement national atteignait les 71 p. 100. L'an dernier, il est passé à 46,5 p. 100, et la dette fédérale proprement dite a été réduite de 47,6 milliards de dollars. Nous savions que nous pourrions mieux nous acquitter de nos obligations sociales en ayant davantage de recettes fiscales disponibles et moins de recettes engagées pour rembourser notre dette.
Ce budget, axé sur les dépenses d'ordre social, fait contrepoids aux politiques antérieures. Les Canadiens ont maintenant la chance de pouvoir assumer également leurs responsabilités financières et leurs responsabilités sociales. Nous bâtissons le Canada que nous voulons, un pays qui est économiquement fort, unique sur le plan culturel et sans égal lorsqu'il s'agit de faire preuve de compassion envers ses citoyens.
Des voix: Bravo!
L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser.
Son Honneur le Président: Sénateur Bolduc, après la question du sénateur Grafstein, je vous donnerai la parole pour l'ajournement.
Le sénateur Grafstein: Tout d'abord, j'ai une observation à faire. Madame le sénateur a fait un exposé très émouvant sur le rétablissement des soins de santé pour les Autochtones. Elle se souviendra sans doute que le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a produit un rapport unanime proposant un moyen de rétablir l'alimentation en eau potable dans les réserves. Madame le ministre peut-elle nous dire quels progrès le gouvernement a accomplis par rapport à ses promesses d'améliorer la situation dans les réserves?
Le sénateur Carstairs: Je remercie le sénateur de sa question. Je peux lui dire qu'une bonne partie du 1,3 milliard de dollars servira expressément à améliorer la qualité de l'eau dans les réserves. De toute évidence, pour être en bonne santé et présenter des signes d'une vie saine, il faut avoir accès à de l'eau de bonne qualité. Le sénateur sait mieux que quiconque qu'il y a de nombreuses réserves, même dans ma province, qui n'obtiendraient pas de bons résultats si on soumettait à une évaluation indépendante leur système central d'alimentation en eau.
L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, le discours du budget que le ministre des Finances a prononcé il y a deux mois était axé sur cinq points clés: la santé des Canadiens, les familles et les communautés canadiennes, l'économie, le Canada dans le monde, et la gestion des dépenses publiques ainsi que l'obligation de rendre compte.
Avant d'aborder ces cinq points, permettez-moi de vous dire sans ambages, honorables sénateurs, que j'ai la très nette impression que les budgets du gouvernement fédéral sont maintenant dépourvus de toute signification. Les écarts entre les prévisions, les budgets et la réalité sont tels qu'il faut maintenant nous fier au passé, c'est-à-dire aux comptes approuvés par la vérificatrice générale. Le gouvernement s'empresse de dépenser les recettes toujours grandissantes provenant des contribuables, en fonction non pas des besoins réels des Canadiens, mais des pressions exercées par des groupes de contribuables habiles à se faire entendre.
L'exercice 2002-2003 nous fournit de cela un exemple frappant. Les dépenses de programmes ont augmenté de 11,5 p. 100, soit 14,3 milliards de dollars, même si la croissance économique était bien en deçà de la moitié de ce pourcentage. À ceux et celles qui objecteraient que les augmentations de dépenses sont attribuables aux besoins en santé ainsi qu'à la menace d'une guerre, je répondrais que toutes les autres dépenses ont augmenté de 7,3 p. 100 cette année, soit deux fois le taux de croissance de l'économie.
Le budget prévoit des dépenses supplémentaires de 25 milliards de dollars sur trois ans. En outre, lorsqu'il est question de dépenser des fonds publics, le gouvernement imite l'ancien gouvernement péquiste du Québec en recourant à des plans quinquennaux pour grossir les montants, sans savoir si le gouvernement serait toujours en place pour distribuer l'argent à ceux qui font le plus de bruit. Et on ne nous fournit pas de prévisions des dépenses et des recettes au- delà de la prochaine année, ce qui nous porte à nous demander ce qu'on essaie de nous cacher.
(1710)
Finie l'époque où la modération et la frugalité avec l'argent des contribuables allaient de soi. À titre d'exemple, le Cabinet fédéral compte maintenant 39 ministres. Ce n'est pas un cabinet, c'est une assemblée. Un autre exemple est qu'environ un demi-million de personnes travaillent maintenant dans le secteur public, c'est-à-dire 450 000 personnes. Le tiers seulement de ces personnes travaillent dans la fonction publique en tant que telle. Les autres travaillent pour des sociétés d'État, des agences spéciales et tous ces organismes qui ne font pas partie de la fonction publique. Au lieu de changer les lois régissant la fonction publique afin de les adapter au nouveau contexte et de les moderniser, nous recrutons des gens à l'extérieur de la fonction publique mais ils travaillent quand même pour le gouvernement.
De nos jours, les courses à la direction et la santé du parti semblent passer avant la santé du pays. Le ministre exagérait lorsqu'il a dit que nous traversions une période de prospérité. J'ai des nouvelles pour lui. L'économie mondiale est très mal en point. Ceux qui sont informés de la situation dans le monde savent que les Américains vivent depuis trois ans — et qu'ils continueront de vivre pendant quelque temps encore — la pire dévaluation des actifs de la bourse des valeurs mobilières depuis les années 1930.
Le Japon est en récession depuis dix ans malgré les injections massives de fonds gouvernementaux qui n'ont eu aucun effet sur la croissance économique. Les dépenses publiques, qui représentaient 30 p. 100 du PNB, en représentent maintenant 40 p. 100. C'est un changement monumental pour une économie de quelque 4,5 billions de dollars. Bien que la croissance économique soit nulle au Japon, ce pays est un concurrent important. On parle toujours de la France, mais elle n'est rien ou si peu par rapport au Japon.
L'économie du continent européen, en dépit de son ostentation, est dans le marasme depuis un bon bout de temps. Au cours des deux dernières années, les États-Unis ont perdu deux millions d'emplois. En mars de cette année, 300 000 personnes ont perdu leur emploi aux États-Unis.
Il y a un an, j'avais prévu une récession en cascade aux États- Unis. Elle est là. Je préviens les honorables sénateurs que le Canada en subira très bientôt les effets.
Le sénateur Carstairs nous a donné de bonnes nouvelles au sujet de l'économie canadienne. Attendons de voir ce qui se produira dans six mois. J'espère avoir tort, mais nous verrons. Ceux qui croient que tout va bien vivent dans un monde de rêve. Le fait que les statistiques fédérales montrent le Canada sous un jour favorable comparativement aux autres pays du G-8 ne signifie pas que nous sommes au paradis. Loin de là. J'invite les sénateurs à lire le discours très puissant que M. Brian Mulroney a livré à Halifax, il y a quelques mois.
Le ministre répète encore et encore les bons points que l'OCDE a vus dans nos statistiques économiques en novembre 2002. Il oublie de dire que l'OCDE a aussi souligné que les impôts étaient trop élevés au Canada. Par rapport à d'autres pays, la productivité du Canada s'améliore peu et le marché est trop rigide. L'OCDE est aussi d'avis que le moment est mal choisi pour l'instauration d'incitatifs fiscaux tels que la hausse des dépenses gouvernementales qui n'engendre pas de richesse.
Qu'a fait le budget de M. Manley? Il a fait exactement le contraire. Les réductions d'impôt sont inexistantes ou si petites qu'elles sont ridicules et pourtant, les dépenses ont augmenté de façon excessive sans qu'on examine la validité des nombreux programmes déjà en place. Je suis déçu par M. Manley qui, après sept ans au ministère de l'Industrie, me paraissait être sensible à la faiblesse du Canada sur le plan de la productivité. Je pensais qu'il marquerait son arrivée au ministère des Finances par une initiative audacieuse, peut-être une réduction des impôts des sociétés, ce qui réduirait les coûts de production et aiderait les entreprises à devenir plus innovatrices grâce à des investissements dans la recherche et du matériel plus perfectionné — mais non. Le budget n'offre que des miettes; une réduction de 12 cents des cotisations à l'assurance- emploi; une réduction de 5 $ par billet d'avion; une augmentation minuscule des limites de cotisation à un régime enregistré d'épargne- retraite et l'élimination sur cinq ans des impôts sur le capital. C'est tout ce que le ministre a fait pour apaiser sa conscience relativement aux problèmes mêmes qui sont responsables de l'écart entre notre niveau de vie et celui de nos voisins. Ainsi, il ne fait pratiquement rien pour stimuler la croissance de la productivité de la main- d'œuvre, c'est-à-dire le PIB par travailleur. À preuve, en 1995, nous étions 15 p. 100 en retard sur les États-Unis dans le secteur manufacturier. Six ans plus tard, ce retard était passé à 33 p. 100. Ce sont des moyennes, ce qui signifie qu'elles couvrent un large éventail de nos secteurs forts comme les ressources et de nos secteurs faibles comme la machinerie et le matériel électronique.
De 1990 à 1995 et de 1995 à 2002, la croissance annuelle moyenne du PIB par heure a été de 1,5 p. 100 au Canada, comparativement à 2 p. 100 au cours des sept dernières années aux États-Unis, même si ce dernier pays a subi un ralentissement économique. J'ajouterais qu'au cours de la dernière année, les investissements étrangers directs au Canada ont baissé de façon marquée et les exportations canadiennes vers les États-Unis ont également diminué.
En ce qui concerne la rigidité du marché, le ministre a promis une réglementation plus intelligente, mais nous entendons cette rengaine depuis environ une décennie.
Honorables sénateurs, je voudrais revenir brièvement sur l'allusion de l'OCDE à la productivité, alors qu'il est essentiel que je ramène le ministre sur terre au sujet de notre richesse relative. Nous sommes tombés au quatorzième rang parmi les pays d'OCDE en ce qui concerne les dépenses en recherche et développement. C'est moins bien que la Suède qui a une population d'à peine le tiers de celle du Canada. Nous sommes passés de la troisième à la huitième place en matière de compétitivité pendant que M. Manley était ministre de l'Industrie. Notre niveau de vie, mesuré en PIB par habitant, se classe aujourd'hui au septième rang par rapport aux pays membres de l'OCDE, alors qu'il occupait le deuxième rang auparavant. On se sert, pour ces calculs, du taux de change assurant la parité des pouvoirs d'achat pour éliminer les variations dans le coût de la vie et les taux de change sur les marchés. Quand les États américains et les provinces canadiennes sont classés en fonction des richesses qu'ils produisent, seule l'Alberta occupe un rang respectable, l'Ontario venant loin derrière et les autres provinces se plaçant en toute fin de liste. Il n'y pas de quoi se vanter comme l'a fait le ministre à la Chambre. Il a même nommé chacun des députés libéraux dont la circonscription bénéficiera d'une gâterie spéciale dans ce budget, comme s'il cherchait à s'acheter des votes à l'occasion du prochain congrès. C'était désagréable à voir à la télé. J'étais en Floride et je regardais ce spectacle sur le petit écran. J'étais scandalisé. Il va sans dire que le pouvoir vous transforme un homme.
Revenons au premier point saillant du budget.
[Français]
Qu'en est-il, en effet, de la politique du gouvernement en matière de santé? En fait d'orientation, rien n'est changé à part le fait que suite aux pressions des provinces, le gouvernement a signé un accord de transfert additionnel de fonds assaisonné d'un retour aux subventions à des fins spécifiques décidé par Ottawa.
[Traduction]
L'État interventionniste sait quelle est la meilleure solution à apporter aux problèmes que nous éprouvons à Vancouver, à Regina, à Montréal et à St. John's.
[Français]
Pourtant, ce ne sont pas les avis qui ont manqué puisqu'il y a eu le rapport de la commission Clair au Québec, le rapport Kirby, le rapport Mazankowski ainsi que le rapport Romanow. De ce dernier, le gouvernement n'a retenu que deux choses: injecter des fonds additionnels et interdire l'introduction du secteur privé.
Bref, on se complaît dans le bon vieux modèle socialiste inventé par le Parti travailliste en Angleterre après la Seconde Guerre mondiale. Au Canada, accepter les ressources du secteur privé est un péché mortel, même si presque tous les autres pays développés les acceptent.
L'Autriche, l'Australie, la Belgique, le Danemark, la France, l'Allemagne, la Hollande, l'Italie, la Nouvelle-Zélande, l'Espagne, la Suède et la Suisse le font. Même l'Angleterre du socialiste Tony Blair le fait.
(1720)
Mais pour nous, au Canada, ce n'est pas acceptable. Ces gouvernements sont sans doute malades. Nous sommes les seuls à avoir le pas, comme le souligne Jeffrey Simpson dans le Globe and Mail.
Puis-je ajouter que, parmi les pays industrialisés qui ont un régime d'accès universel aux soins de santé, le Canada a le système le plus coûteux. Il coûte plus cher aux États-Unis, mais l'accès y est plus limité.
Parmi les pays qui ont un accès universel, c'est au Canada qu'il coûte le plus cher. On y met plus de 10 p. 100 de notre PNB. Pourtant, notre rang en termes de résultats — les attentes, l'équipement hi-tech, et cetera —, à partir d'indicateurs significatifs, est très moyen. Autrement dit, il n'y a aucun lien proportionnel entre la dépense et la performance.
Par exemple, il y a les attentes par rapport aux coûts en Saskatchewan. Le Canada, le gouvernement et les bureaucrates du ministère de la Santé n'ont pas encore saisi les données fondamentales du problème. Quelles sont-elles? La première et la plus fondamentale est le vieillissement de la population en raison des progrès de la médecine moderne. L'espérance de vie s'est accrue de 30 ans depuis un siècle pour se situer autour de 80 ans. D'ici 20 ans, les 65 ans et plus augmenteront de 75 p. 100 et constitueront 20 p. 100 de la population totale.
La deuxième donnée majeure représente les dépenses dans la santé qui augmentent avec l'âge. En l'an 2000, les 65 ans et plus, 13 p. 100 de la population, constituaient la source de 45 p. 100 des dépenses dans la santé au Québec. La dépense moyenne est de 2 095 $ par an; pour les 65 ans et plus, les soins coûtent 7 330 $, soit plus du triple.
Depuis 20 ans, le vieillissement est la cause de 22 p. 100 de l'augmentation des dépenses de la santé. D'ici 20 ans, 36 p. 100 de l'augmentation des dépenses sera liée au vieillissement en raison des soins, des médicaments, de la technologie, et cetera. Les dépenses dans la santé sont appelées à doubler d'ici vingt ans. Nous en sommes à 100 milliards de dollars, soit 10 p. 100 de l'économie canadienne.
À cette hausse, il faut ajouter non pas le coût de l'inflation générale, qui serait de 114 p. 100 sur une base de 20 ans, mais une inflation plus forte qui caractérise ce secteur et est évaluée à 148 p. 100.
La population active diminuera par suite du vieillissement et de la faible natalité. Depuis 30 ans, le nombre de Canadiens de plus de 65 ans a plus que doublé: de 1,7 million de personnes, nous sommes maintenant 4 millions de personnes, un adulte sur six, un Canadien sur huit.
En 2021, nous serons 6,7 millions de Canadiens de 65 ans et plus, soit un adulte sur quatre ou un Canadien sur cinq. En 2041, au moment où les diplômés d'aujourd'hui seront près de la retraite, il y aura 9,2 millions de personnes de plus de 65 ans, un adulte sur trois ou un Canadien sur quatre. Il y aura moins de travailleurs pour supporter les coûts du système qui sont de 3 149 $ par tête alors qu'ils seront de 8 500 $ dans 20 ans. Le revenu personnel n'augmentera pas assez pour faire face à cette hausse anticipée des coûts. Il y a trois lignes de force qui font que nous allons vers un cul- de-sac dans le système actuel.
Remettre à plus tard une réforme en profondeur du système est une attitude gouvernementale irresponsable tant pour Ottawa que pour les provinces, mais particulièrement pour Ottawa, qui décide des règles du jeu.
Je veux revenir sur le rapport du sénateur Kirby, qui est supérieur à celui de M. Romanow. On y voit des choses discutables, mais il a joué sur les incitatifs. Si on ne comprend pas cela, il n'y a pas de réforme possible du système de la santé.
[Traduction]
Son Honneur le Président: Sénateur Bolduc, je suis désolé de vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.
Le sénateur Bolduc: Je ne fais que commencer.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, permission est- elle accordée pour que le sénateur puisse continuer?
Des voix: D'accord.
[Français]
Le sénateur Bolduc: Tout le monde s'acharne à miser sur les changements de gestion du système, y compris le rapport Kirby. Cela influe à peine sur 8 à 10 p. 100 des coûts, donc là n'est pas l'avenir. Il faut reconnaître que le rapport Kirby a été plus analytique que le rapport Romanow et qu'il mentionne le rôle central des incitatifs dans une réforme.
Or le régime actuel comporte des effets pervers. Par exemple, la gratuité suscite une demande excessive et inefficace des services pouvant aller jusqu'à 30 p. 100. Personne ne l'admet, mais c'est la réalité.
Autre exemple, la rémunération à l'acte favorise la surproduction de services. Il faut réduire le «moral hazard» et utiliser, du côté de la demande, des moyens comme le partage des coûts et, du côté de l'offre, le «managed care». Autrement dit, il faut mettre dans le système un régime qui va permettre de diminuer naturellement les coûts tout en donnant les services.
On se plaint du manque de médecins au Québec, mais le régime de financement impose des quotas aux facultés de médecine, encourage la retraite prématurée des médecins et impose une limite au revenu actuel des professionnels que l'on retrouve sur les terrains de golf en semaine parce qu'ils ont atteint leur quota. Les médecins ne travaillent que trois jours par semaine parce qu'ils n'ont pas le droit de gagner plus de 200 000 $ ou 250 000 $ par année. Ce n'est pas du manque de médecins dont on souffre! Laissez-les travailler. Ceux qui veulent travailler 6 jours par semaine, laissez-les faire. Nous allons régler le problème. C'est ridicule et tragique pour ceux qui attendent des soins chirurgicaux et autres et pour qui le temps est un élément vital.
L'avenir passe par la responsabilisation des personnes face à leur avenir. Chaque travailleur devrait pouvoir, à l'abri de l'impôt, se créer un fonds de santé dont les cotisations seraient investies prudemment pour affronter les coûts à venir. C'est le même principe qui, pour des raisons semblables, devrait s'appliquer à la retraite. Il n'est pas populaire de parler en ce sens dans une ère de bien-être social donné par l'État et où la majorité des gens attendent leur salut de l'État, comme si personne ne pouvait assurer son propre avenir. Quelle illusion!
Il me semble que les folies de gestion du fonds de pension du Canada — de 1965 à 2000, le gouvernement prêtait de l'argent aux provinces sous les taux réels — devraient convaincre les gens que le bien-être social par l'État est une sortie de secours nécessaire. Ce bien-être n'est pas pour tous, mais pour les 8 à 10 p. 100 des éclopés de la vie, les déficients mentaux, les victimes de handicaps graves, les gens en soins prolongés ou victimes d'accidents majeurs ou de toute maladie grave qui prive la famille d'un revenu.
Le budget Manley prévoit, outre la santé, un soutien aux familles et aux collectivités canadiennes. Le gouvernement, au lieu de baisser les taux de cotisation pour tous, fait de la discrimination envers certaines catégories: des faveurs aux uns, rien pour les autres. Ottawa décide des dépenses fiscales car il sait mieux que les contribuables comment dépenser leur argent.
L'examen du dernier rapport sur les dépenses fiscales de toutes sortes, à savoir les exemptions, les déductions, les dégrèvements, les reports ou les crédits fiscaux, révèle une quantité effarante de situation. Elles sont d'autant plus complexes qu'il y a rétroaction dans plusieurs cas, bref, du travail payant pour les avocats et les comptables. L'impact économique de ces mesures est bien difficile à estimer, malheureusement.
Le gouvernement se donne cinq ans pour effacer la taxe sur le capital qui est tellement nuisible aux entreprises dans leur effort pour être plus productives. Je voudrais souligner que les charges sociales ont augmenté de 2,5 p. 100 par 100 $ de gains en dix ans. Il s'agit d'une ponction importante des revenus des salariés et des compagnies. Quant aux subventions pour les infrastructures, c'est une formule facile et politiquement rentable de distribuer des fonds au lieu de réformer la fiscalité de façon à ce que les administrations régionales conservent leur autonomie et ne dépendent pas du patronage pour assurer une qualité de vie décente à leurs citoyens.
Cela me rappelle les arguments de Georges-Émile Lapalme contre Duplessis dans les années 50, au Québec, lorsque le premier ministre actuel du Canada étudiait au séminaire de Trois-Rivières.
[Traduction]
La troisième partie du budget de 2003 est consacrée à l'économie. J'ai remarqué d'emblée que le gouvernement voulait aider la petite entreprise au moyen d'une augmentation de 100 000 $ sur cinq ans de la déduction pour petites entreprises. Pensez-y: 20 000 $ par année, et seulement pour les entreprises constituées en société. Celles qui ne le sont pas doivent s'en passer.
Au Canada, la plupart des propriétaires de petites entreprises travaillent chez eux. Ils n'ont pas constitué de société. Seule une minorité d'entreprises obtiendra la déduction. Quel soulagement!
La situation des REER était tellement ridicule que c'était embarrassant pour le gouvernement. Le plafond des contributions a donc été légèrement modifié.
Comme son prédécesseur, le ministre des Finances a signalé l'avantage fiscal du Canada par rapport à nos voisins du sud. Cet avantage pourrait être de courte durée si le Congrès accepte les propositions du président Bush. M. Manley a oublié de nous dire que son gouvernement était allé chercher 55 milliards de dollars de plus qu'en 1994 dans les poches des contribuables. Les recettes fiscales sont passées de 106 milliards de dollars en 1994 à 161 milliards en 2001-2002.
(1730)
La hausse démesurée des dépenses des dernières années a été rendue possible par un fardeau fiscal trop lourd, depuis huit ans, un incitatif fiscal tout à fait déplacé dans le contexte économique, que la Banque du Canada a rapidement sanctionné, comme elle seule peut le faire, compte tenu du taux d'inflation chez nous, qui est le plus élevé de tous les pays du G-7, mais dont personne ne parle.
Le gouvernement a mal évalué la situation économique mondiale, comme je le disais plus tôt. Il me paraît nécessaire d'y revenir, car le problème est plus sérieux que les gens ne le croient. On estime que la valeur des avoirs américains a chuté de sept billions de dollars, ce qui représente une perte de 40 p. 100 selon l'indice du Standard of Poor's. C'est l'équivalent de 70 p. 100 du PIB américain, et dix fois la valeur annuelle de l'économie canadienne. Ailleurs dans le monde, on enregistre des pertes comparables. En fait, on parle d'une déflation de 13 billions de dollars américains, soit plus d'un tiers du produit mondial brut ou 20 fois le PIB canadien.
Les gens s'imaginent que le Canada se tire bien d'affaire sur le plan économique. En fait, ce n'est vrai que depuis peu.
Il faudra beaucoup de temps pour absorber le surinvestissement massif effectué ces dernières années dans certains secteurs économiques, dont deux billions de dollars dans les communications. Les entreprises et les particuliers, eux aussi, sont surendettés parce que les prix des actions ont toujours été surévalués de 20 à 25 p. 100, voire 30 p. 100, alors que les taux d'intérêt demeurent faibles. Il y a un risque de déflation mondiale, car la capacité d'intervention de la réserve fédérale a ses limites.
Les honorables sénateurs se souviendront de ce que M. Greenspan a dit en 1998 à propos de l'exubérance irrationelle. On sait cependant qu'il n'a rien fait, parce que des élections fédérales approchaient; il s'est rangé du côté du gouvernement. Ce n'est pas pour cela qu'il est payé, mais nous en avons subi les conséquences, depuis.
Il s'ensuit que le taux de croissance restera faible plus longtemps que prévu. La hausse des prix de l'immobilier touche également à sa fin. En raison de la mondialisation engendrée par la technologie et de notre dépendance commerciale envers les États-Unis, il est certain que le Canada subira prochainement le contrecoup de ces secousses majeures.
Il ne faudrait pas non plus croire qu'on a résolu le problème de la dette du Canada. Avec la mise en œuvre intégrale de la comptabilité d'exercice, la dette fédérale a baissé à 507 millions de dollars. Toutefois, la dette nette se chiffre à 563 millions de dollars à cause d'engagements qui n'avaient pas été pris en compte dans l'ancien système, mais qui le sont dans le nouveau, notamment les exigences pour les régimes de retraite publics. En outre, en ce qui concerne les mouvements de trésorerie, le gouvernement enregistre cette année un manque à gagner de 5,8 milliards de dollars.
La quatrième partie du budget porte sur un sujet très important, en l'occurrence les relations extérieures du Canada.
[Français]
Le gouvernement a ajouté un milliard de dollars au budget de la Défense. Ce n'est pas avec cela que le Canada deviendra crédible à l'OTAN. Cela ne fait pas sérieux. C'est gênant ce qui nous arrive, c'est-à-dire ne plus être capables de nous défendre. On n'a jamais été capables de se défendre, mais au moins, les gouvernements d'avant, à partir du ministre Saint-Laurent, savaient qu'on n'était pas capables de se défendre. On a un grand territoire, mais on n'est pas capables de se défendre. On a alors conclu un accord avec les Américains avec le NORAD. Cela avait du bon sens.
Aujourd'hui, on se demande si on devrait se joindre au «Northern Command». Pourquoi refuser cela? Nous ne sommes pas réalistes au Canada. J'ai écouté les débats au sujet de l'Irak. J'ai écouté cela bien sérieusement et j'ai écouté d'autres versions que celles venant des Américains. J'ai consulté TV5, France Presse et plusieurs autres.
On s'est comportés comme des enfants au Canada. Il y a même un ministre qui a chialé personnellement contre le président des États- Unis. Et le gouvernement l'a gardé! C'est cela qu'on appelle du leadership? Rien qu'à y penser, cela me choque!
Au moins, les gouvernements précédents ont été assez réalistes pour conclure des ententes assurant notre protection, mais le gouvernement, à partir d'un concept de souveraineté confus, hésite encore à accepter un périmètre de sécurité qui nous couvrirait. Quant à la collaboration traditionnelle au NORAD, il n'est pas évident qu'on l'offrira pour le «Northern Command». J'y reviendrai, parce que je veux faire un discours sur la sécurité et que j'ai des choses à dire là-dessus. Cela fait des années que je veux parler de sécurité.
Nos relations avec nos voisins sont au plus froid. On dirait qu'on s'ingénie à se mettre dans le trouble; le trouble diplomatique, le trouble commercial, la faible présence des États importateurs, et cetera.
Par exemple, le Canada a une représentation aux États-Unis dans environ 10 ou 15 endroits, tandis que le Mexique en a une quarantaine. Il y a plus de représentants mexicains au Texas qu'il y en a du Canada dans l'ensemble des États-Unis. C'est ridicule! Les trois quarts du budget du ministère des Affaires étrangères sont en Europe, alors qu'on ne fait rien avec l'Europe. Les affaires commerciales se passent avec les États-Unis, mais le Canada investit en Europe et pas en Asie. C'est en Asie qu'il faut avoir du monde et aux États-Unis, pas en Europe. C'est le «fun» d'aller en Europe parce que ce sont nos cousins au point de vue culturel. On a bien du plaisir avec ce monde-là, mais la réalité et l'avenir du Canada ne sont pas là. Le ministère des Affaires étrangères devrait se réveiller un peu et réorienter ses ressources.
Dans la situation tendue qui prévaut présentement, nous hésitons toujours entre les États-Unis et l'Europe qui, elle, nous envoie paître depuis 25 ans sur le plan commercial, alors que nous étions là pour faire la paix dans la cour arrière.
Au plan de l'aide internationale, nous en sommes encore à un autre livre blanc sur les orientations discrétionnaires du ministère des Affaires étrangères. Après 40 ans d'aide, et au-delà de 100 milliards de dollars de fonds environ, on n'en connaît pas l'impact réel sur les pays en développement.
Peut-être est-il opportun de noter que la hausse du niveau de vie en Asie s'est produite à la suite de l'introduction de l'économie de marché, comme quoi la croissance économique profite autant aux pauvres qu'aux autres. C'est important que le monde sache que la mondialisation et le commerce international servent à la croissance économique et que la croissance économique est répartie aussi bien pour les riches que pour les pauvres. C'est une donnée fondamentale.
Des voix: Oh!
Le sénateur Bolduc: Oui, oui, c'est ce qui se passe. Il y a 3 milliards de personnes en Asie qui ont vu leur niveau de vie augmenter, honorables sénateurs. En Afrique, cela ne s'est pas produit, mais en Asie cela s'est produit. Je connais le coin, j'y suis allé; je peux vous le dire.
Je note aussi que l'ACDI se trouve toujours sans encadrement législatif pour définir ses objectifs, ses politiques, ses principes d'action, ses critères d'allocation de ressources et ses obligations d'imputabilité. J'ai fait un discours à ce sujet et j'espère recueillir des appuis.
[Traduction]
Le dernier point saillant du budget porte sur les fonds publics et sur la reddition de comptes. Le gouvernement a enfin entièrement adopté la comptabilité d'exercice, ce qui s'avère une décision administrative fort judicieuse. Toutefois, je note que le ministre s'est montré vertueux au moment opportun. C'était un excellent prétexte pour injecter, avant la fin de l'exercice, des montants qui figureraient dans les états financiers et qui seraient nettement supérieurs à ceux du budget, particulièrement compte tenu du fait que des milliards de dollars affectés à l'innovation ont été versés dans des comptes bancaires et s'y trouvent encore.
En ce qui concerne les comptes réservés à des fondations, c'est à juste titre que le gouvernement s'est fait chauffer les oreilles par la vérificatrice générale et par le Comité sénatorial permanent des finances nationales. Il s'est finalement engagé à faire preuve d'un peu plus de transparence. Il n'en demeure pas moins que, de toute façon, il y aura une nouvelle mesure législative pour rétablir la situation à l'égard du Parlement, même si la vérificatrice générale, notre agent, ne sera pas en mesure d'effectuer une vérification indépendante de l'optimisation des ressources dans ces secteurs. Si le ministre désire rassurer les investisseurs inquiets, je lui suggère d'examiner certaines des règles de fonctionnement du gouvernement contenues dans la Loi sur les corporations canadiennes, et de ne pas entrer en conflit avec les provinces au sujet du marché des valeurs mobilières mais d'offrir plutôt de la médiation.
[Français]
Je reviens sur cela parce qu'il s'est fait des cochonneries. Je suis un gars des entreprises privées et de marché, mais j'admets les folies qu'ils ont faites. Il s'est fait des folies aux États-Unis et au Canada dans la rémunération des détenteurs de postes de direction. Je ne dis pas que cela doit être changé par des règlements, mais il faudrait que quelqu'un leur fasse sentir que les folies, ce sont des folies, même lorsque c'est fait par des hommes d'affaires. En général, ils ont un assez bon jugement, mais ils ont manqué de jugement au cours des cinq dernières années en termes de rémunération. Ils se sont pris pour d'autres. Dans certains cas, je vous dis que cela frôlait les conflits d'intérêt... Lorsqu'on gonfle les états financiers pour s'assurer que les actions vont monter à la bourse et qu'une fois à la bourse, on ramasse les options... Aie! Cela va loin!
Le sénateur Robichaud: Ce n'était pas correct, cela.
Le sénateur Bolduc: Non, ce n'était pas correct.
(1740)
[Traduction]
Soit dit en passant, cela pourrait contribuer dans une certaine mesure à attirer des investissements étrangers au Canada, d'autant plus que notre participation à cette activité internationale est plutôt modeste. Je rappelle l'avertissement du président de la Banque royale au sujet de la perte de sièges sociaux. Le ministre prévoit réallouer des fonds; sur les 143 milliards de dollars, il veut en réallouer 1 milliard. Ce n'est pas ce qu'on pourrait appeler un examen complet des programmes existants, compte tenu notamment du fiasco du registre des armes à feu.
Enfin, la présidente du Conseil du Trésor a déposé des avant- projets de réforme de la Loi sur la fonction publique. Nous allons les examiner très attentivement au comité, car ils prévoient des choses très troublantes. Entre-temps, je voudrais attirer votre attention, honorables sénateurs, sur une tendance à l'exagération dans la fonction publique.
Je veux parler maintenant de dépenses administratives. Les exemples viennent d'en haut. Les dépenses de la Chambre des communes ont augmenté de 37 millions de dollars en un an. Cela montre à quel point nos représentants se font une idée artificielle de l'argent des Canadiens. Honorables sénateurs, une hausse de 37 millions de dollars en un an, en face, c'est beaucoup.
Presque tous les hauts fonctionnaires reçoivent de substantielles primes de rendement en plus d'excellents traitements, et pourtant, la vérificatrice générale trouve que l'évaluation du rendement laisse à désirer.
[Français]
On ne peut jamais avoir une évaluation de rendement des ministères. C'est trop compliqué, nous dit-on. En même temps, on donne un bonus de performance aux administrateurs. On est incapable d'évaluer le rendement des administrations, mais on est capable d'évaluer la performance des administrateurs. Ce n'est pas sérieux, franchement!
[Traduction]
Dans le même ordre d'idées, comment peut-on justifier l'analyse des responsabilités et l'évaluation de rendement à l'égard d'un revenu de près de 500 000 $ accordé au président de la Société canadienne des postes, par exemple? La Société canadienne des postes a un monopole — personne ne pouvant livrer une lettre, comme vous le savez, pour moins de 48 cents — et elle peut hausser le prix des timbres chaque fois qu'elle le souhaite. Ce qui manque, ce sont certainement des solutions de rechange. Il s'agit d'un monopole. Le président de cette société peut augmenter le prix des timbres à sa guise, et nous le rétribuons 500 000 $ par année. Ce n'est pas sérieux. Il y a quelqu'un quelque part qui est stupide.
Ces excès témoignent d'un changement profond dans l'éthique de la fonction publique. Les fonctionnaires veulent être considérés comme des entrepreneurs, mais sans risquer leurs propres capitaux ni s'exposer aux risques d'une faillite.
J'ai eu l'honneur de travailler dans la fonction publique du Québec et de traiter avec les mandarins fédéraux de l'époque, les Robert Bryce, les Sharp, les Robertson, les Johnson et autres. Je peux vous assurer, honorables sénateurs, qu'ils ne servaient pas leur pays pour de l'argent et qu'ils n'avaient pas besoin de primes au rendement pour accroître leur motivation au travail.
Je suis peut-être nostalgique de cette période, mais il fut un temps où la qualité existait au ministère des Finances et au ministère des Affaires étrangères. Des sous-ministres et d'autres fonctionnaires ont ensuite été puisés dans ce groupe de ressources humaines éminentes. Espérons que ce n'est pas la fin de cette tradition.
[Français]
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, j'aimerais proposer l'ajournement du débat au nom du sénateur Meighen.
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la coopération de l'honorable sénateur, si on suivait la coutume lors d'un débat d'entendre un sénateur du gouvernement et un de l'opposition, le sénateur Morin aimerait prendre la parole. Si l'honorable sénateur était d'accord, je ferais la proposition que la suite du débat soit reportée à la prochaine séance au nom du sénateur Morin.
Le sénateur Kinsella: D'accord.
(Sur la motion du sénateur Robichaud, au nom du sénateur Morin, le débat est ajourné.)
UNE NOUVELLE CONSTITUTION POUR L'IRAK
INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT
L'honorable Gérald-A. Beaudoin, ayant donné avis le 29 avril 2003:
Qu'il attirera l'attention du Sénat sur une nouvelle constitution possible pour l'Irak.
— Honorables sénateurs, on parle beaucoup d'une nouvelle constitution pour l'Irak. Certains ont même parlé de fédéralisme, dont le premier ministre du Canada. L'idée fait son chemin. Ce pays devra se donner une nouvelle constitution. La formule fédérale pourrait s'avérer appropriée. Dans certains cas, le fédéralisme est la solution. Tout dépend de l'histoire du pays qui veut se donner une nouvelle constitution. Le Canada peut être un modèle intéressant.
Avant de parler de fédéralisme, il faut traiter des mesures politiques préalables incontournables. Il faut d'abord assurer l'ordre et faire la paix. L'Irak est dans une période transitoire difficile.
Il faut ensuite implanter un système démocratique. Les Irakiens, bien sûr, sont ceux qui doivent choisir leur système. Ce n'est pas à nous de leur en imposer un.
Il faut asseoir sur des bases solides la règle de droit, la suprématie de la Constitution et la séparation des grands pouvoirs. C'est la base même de la démocratie.
Il importe par la suite de réaliser une véritable séparation de l'Église et de l'État. L'Irak actuellement est un État laïque; l'islam est la religion d'État. L'État doit être laïque en théorie et en pratique. Il faut qu'il soit possible pour les citoyens d'avoir une ou plusieurs religions ou la liberté de ne pas en avoir une. C'est un problème difficile à résoudre. Il a fallu beaucoup de temps en Occident pour en arriver là. Ceci doit être considéré dès le départ, avant même de parler de fédéralisme. Il faut régler ce problème d'abord.
Le Canada, les États-Unis et plusieurs fédérations démocratiques ont une constitution qui, tel qu'interprétée par leur Cour suprême ou constitutionnelle, respecte la séparation de l'Église et de l'État.
Il faut ici définir au départ les termes «fédération» et «confédération». Une confédération est une association d'États indépendants qui ont un ou plusieurs objectifs communs. Une fédération est un pays où le pouvoir est partagé entre le centre et les régions. Je doute fort que l'Irak soit intéressé par une confédération. Pour un État fédéral, c'est possible.
Quand on parle de fédéralisme moderne, on pense volontiers aux États-Unis, à la Suisse, au Canada, à l'Australie, à l'Allemagne, à la Belgique. Nous avons actuellement 24 fédérations dans le monde.
Après la guerre d'indépendance américaine, les treize États ont adopté la formule confédérative. Les articles de cette Confédération furent proposés le 15 novembre 1777, et entrèrent en vigueur le 1er mars 1781. Cette forme de gouvernement fut bien transitoire. Elle ne s'est pas révélée, pour ces États, la solution idéale.
(1750)
En 1787, à l'été, à Philadelphie, les représentants des treize États ont adopté une constitution fédérale après quatre mois de discussions. Ainsi, une fédération succédait à une confédération. La Constitution fut mise en vigueur le 4 mars 1789.
Les États-Unis sont toujours un État fédéral. Ils étaient treize États au début; ils sont cinquante aujourd'hui. La fédération fonctionne très bien. Bien sûr, il y a eu une guerre civile de 1860 à 1864, mais le président Abraham Lincoln réussit à sauver la fédération américaine.
La Suisse est passée de la confédération à la fédération en 1848. Le Canada a adopté en 1867 un système fédéral de gouvernement après les conférences de Charlottetown et de Québec, en 1864, et celle de Londres en décembre 1866.
Notre fédération s'est agrandie. En 1867, le Canada comptait environ trois millions d'habitants. Aujourd'hui, il en compte 30 millions, soit dix fois plus. Nous faisons partie du G-7 et certains pays se sont inspirés de notre fédéralisme: l'Australie, l'Inde et l'Afrique du Sud, notamment.
L'Australie est devenue une fédération en 1901. L'Allemagne a adopté le fédéralisme en 1949. Le système fonctionne très bien. La Belgique est devenue un État fédéral en 1993, l'Inde est fédérale depuis 1950, l'Autriche depuis 1920 et la Russie également.
Deux milliards quatre cent millions d'individus actuellement vivent sous un régime fédéral. C'est beaucoup. Au Canada, lors des assemblées constituantes de 1864 à 1867, John A. Macdonald ne cachait pas qu'il aurait souhaité un État unitaire. George Étienne Cartier, au Bas-Canada et Joseph Howe, en Nouvelle-Écosse, l'ont dissuadé. Cartier fut l'homme clé en matière d'établissement du fédéralisme au Canada.
Aucune constitution n'est parfaite. C'est un vêtement sur mesures et ce sera le cas pour les Irakiens. Ils devront créer leur propre système. Dans un État fédéral, le pouvoir est forcément décentralisé alors que dans un État unitaire, il est centralisé. Il y a cependant des degrés en matière de centralisation et de décentralisation.
Dans les pays qui ont des religions variées, des ethnies différentes et des groupes divers, l'idée du fédéralisme prima facie est la solution qui vient spontanément à l'esprit.
Le fédéralisme qui existe dans 24 pays n'est pas le même dans chaque fédération. Bien sûr, dans ces fédérations, le pouvoir est partagé entre le centre et les régions, car c'est la base même du fédéralisme, mais la séparation des compétences varie d'une fédération à l'autre. Il ne peut en être autrement.
De plus, le fédéralisme vient chapeauter tantôt un système de gouvernement parlementaire, tantôt un régime de démocratie présidentielle, tantôt encore une démocratie qui emprunte aux deux modèles. Un système semblable peut bien fonctionner dans un pays et échouer dans l'autre. Comme le faisait remarquer Montesquieu, c'est une chance si un système emprunté à un pays porte les mêmes fruits dans un autre.
Il faut être prudent avec les emprunts. Le parlementarisme britannique a bien réussi au Canada, en Australie et dans d'autres fédérations. Le système présidentiel en vogue aux États-Unis et dans d'autres pays ne réussit pas nécessairement partout. Une fédération peut être plus ou moins décentralisée. Ce qui différencie l'État unitaire de l'État fédéral, c'est le partage de la souveraineté entre le centre et les régions. Qu'on appelle ces régions États fédérés, provinces, landers ou cantons, c'est aussi l'énumération des pouvoirs, une liste provinciale et une liste fédérale.
Le Canada est un bon exemple de fédéralisme. L'État unitaire, lui, n'a qu'un gouvernement. Il peut être très centralisé ou très décentralisé. Le Royaume-Uni, un État unitaire, s'est décentralisé avec une dévolution de certaines compétences attribuées à l'Écosse, au pays de Galles et à l'Irlande du Nord. Par contre, la France, autre État unitaire, est demeurée centralisée.
Revenons à la distinction entre une fédération et une confédération, d'autant plus que deux fédérations, les États-Unis et la Suisse, ont été des confédérations avant d'opter pour la formule d'État fédéral. L'Union européenne est un type de confédération, elle a même des traits fédératifs.
L'Autriche-Hongrie fut une confédération de 1848 à 1916. Comme on l'a dit, une fédération est un pays où la souveraineté est partagée entre le centre et les régions. Une fédération évolue. Elle connaît fatalement la centralisation et la décentralisation. C'est tout à fait normal pour cette forme de gouvernement. On n'a qu'à lire l'histoire de l'Australie, du Brésil, des États-Unis, du Mexique, de la Suisse et du Canada pour s'en convaincre.
Elle évolue aussi selon les décisions des tribunaux par des amendements constitutionnels, plus d'une vingtaine aux États- Unis et au Canada, de même que par des ententes administratives. Les tribunaux jouent un grand rôle dans certaines fédérations. C'est le cas dans notre pays, où le pouvoir judiciaire est fort, indépendant et contrôle la constitutionnalité des lois. Ceci peut varier d'une fédération à l'autre. L'indépendance du pouvoir judiciaire est l'une des composantes d'une grande démocratie.
Plusieurs pays qui ont vu le jour depuis la Seconde Guerre mondiale et la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 ont enchâssé une charte des droits dans leur constitution. Voilà des modèles à suivre, aussi bien pour les États unitaires que fédéraux.
Le juge Charles Evans Hughes, aux États-Unis, allait jusqu'à dire:
[Traduction]
La Constitution est ce que les juges décident qu'elle est.
[Français]
Cela est peut-être discutable. Au Canada, en vingt ans, la Cour suprême a rendu plus de 450 décisions sur la Charte canadienne des droits et libertés et ce, tout en continuant à se prononcer sur le partage des pouvoirs. Notre contrôle de la constitutionnalité des lois est donc rigoureux et efficace. Un tel contrôle judiciaire force l'admiration.
Le pouvoir de nomination des juges de la Cour suprême est un pouvoir considérable. Au Canada, il relève du premier ministre du Canada et aux États-Unis, le choix du président est sujet à la ratification par le Sénat. Au Canada, la Cour suprême, qui est une cour générale d'appel, est aussi notre cour constitutionnelle.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je m'excuse de devoir interrompre le sénateur Beaudoin, mais il est maintenant 18 heures. Plaît-il aux honorables sénateurs de ne pas voir l'horloge?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Beaudoin: Dans d'autres fédérations comme l'Allemagne, la cour constitutionnelle est distincte et ne tranche que les litiges constitutionnels. Les deux systèmes ont leurs vertus. Voilà quelques mots sur le fédéralisme. Le sujet est très vaste.
Une nouvelle constitution pour l'Irak soulève un grand débat. Toutefois, il faut se souvenir qu'avant de parler d'une formule fédérale pour l'Irak, il faudra, comme je l'ai dit, régler quelques problèmes politiques fondamentaux. Ces problèmes seront très difficiles à solutionner, mais il faut avoir le courage de s'engager sur cette voie. C'est ce que je souhaite aux Irakiens.
[Traduction]
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, mon honorable ami a dit au début de son discours que le premier ministre est en faveur d'une constitution fédérale pour l'Irak. Pourrait-il clarifier ce qu'il a dit?
Le sénateur Beaudoin: C'est ce que j'ai entendu aux nouvelles. Je ne me souviens plus à quelle occasion. C'était il y a environ deux ou trois semaines. Le premier ministre a dit que le Canada pourrait servir de modèle à une fédération.
Le sénateur Lynch-Staunton: Il voulait dire le Parti libéral.
Le sénateur Beaudoin: Voilà pourquoi nous parlons de la Confédération du Canada. Mais nous ne sommes pas une confédération, comme l'Europe; nous sommes une fédération et, même si je suis un peu subjectif, une très bonne fédération. Le modèle canadien a servi à l'Australie, comme nous le savons très bien, et il a aussi inspiré l'Inde et l'Afrique du Sud. Les Sud- Africains auront beau le nier, ils forment un État fédéral. Le premier ministre a dit que le Canada pourrait servir de modèle.
Mon propos est de souligner que si l'Irak veut un jour se doter d'un État fédéral, il pourrait sans doute s'inspirer de notre pays. Toutefois, avant de conclure que le système fédéral est celui qui leur convient le mieux, bien que ce soit probablement le cas, ce pays doit résoudre trois problèmes difficiles, soit ceux de la paix, de l'ordre et de la séparation de l'Église et de l'État. Le troisième problème est très difficile à régler car, même dans notre pays, il a fallu de nombreux siècles pour séparer l'Église de l'État. C'est très difficile, mais nous avons réussi. La Cour suprême a dit à maintes et maintes reprises que c'est une des assises fondamentales de la démocratie.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, le modèle de fédération recommandé par le premier ministre comprendra-t-il une disposition concernant la clarté qui s'appliquera au secteur kurde de l'Irak lorsqu'il fera sécession? Ou s'agira-t-il d'un modèle fédéral comme celui des États-Unis ou du Mexique, où la sécession n'est pas possible?
Le sénateur Beaudoin: Les États-Unis ont débuté avec des articles de confédération qui ont duré moins de 10 ans. Puis ils ont rédigé un chef d'oeuvre en quatre mois à Philadelphie. C'était incroyable, mais ils ont réussi. Toutefois, leur Constitution, bien que fantastique, n'était pas sans présenter des lacunes.
Je me rappelle que la femme de John Adams, le deuxième président, a envoyé un jour une lettre à son mari dans laquelle elle lui disait: «Vous pensez que la Constitution des États-Unis est la meilleure au monde, mais les hommes et les femmes ne sont pas égaux.» Il y avait aussi une différence entre les Noirs et les Blancs. Gladstone dit que la Constitution américaine est la meilleure à avoir été écrite. Il se peut que ce soit le cas, mais elle n'est pas sans lacunes ni faiblesses.
Au Canada, nous n'avons eu qu'un système depuis l'union du Bas et du Haut-Canada. Nous avons réussi comme État fédéral; cela ne fait aucun doute.
Honorables sénateurs, rien n'est parfait.
(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)
(Le Sénat s'ajourne au mercredi 7 mai 2003, à 13 h 30.)