Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
3e Session, 37e Législature,
Volume 141, Numéro 32
Le jeudi 22 avril 2004
L'honorable Lucie Pépin, Présidente intérimaire
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- La Loi électorale du Canada
La Loi de l'impôt sur le revenu - LA Loi sur le mariage
LA Loi d'interprétation - Le Code criminel
- Sécurité nationale et défense
- Autorisation au comité de reporter la date de présentation du rapport final sur la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada—Suite du débat
- Autorisation au Sous-comité des affaires des anciens combattants de reporter la date de présentation du rapport final surles prestations et services offerts auxanciens combattants, les activitéscommémoratives et la charte
- Autorisation au comité de reporter la date du rapport final de l'étude sur la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité
- Le Sénat
- L'ajournement
- La Loi électorale du Canada
LE SÉNAT
Le jeudi 22 avril 2004
La séance est ouverte à 13 h 30, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.
Prière.
LA SANCTION ROYALE
Son Honneur la Présidente intérimaire informe le Sénat qu'elle a reçu la communication suivante:
RIDEAU HALL
Le jeudi 22 avril 2004
Monsieur le Président,
J'ai l'honneur de vous aviser que la très honorable Adrienne Clarkson, Gouverneure générale du Canada, a octroyé la sanction royale par déclaration écrite aux projets de loi mentionnés à l'annexe de la présente lettre le 22 avril 2004,
à 9 heures 52.Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.
Le secrétaire de la Gouverneure générale,
Barbara UteckL'honorable
Le Président du Sénat
Ottawa
Projets de loi ayant reçu la sanction royale le jeudi 22 avril 2004:
Loi constituant Bibliothèque et Archives du Canada, modifiant la Loi sur le droit d'auteur et modifiant certaines lois en conséquence (Projet de loi C-8, Chapitre 11, 2004)
Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois (Projet de loi C-14, Chapitre 12, 2004)
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
LE CONSEIL RÉGIONAL DES PERSONNES ÂGÉES ITALO-CANADIENNES
TRENTIÈME ANNIVERSAIRE
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, le Conseil régional des personnes âgées italo-canadiennes célébrera ce samedi 24 avril le 30e anniversaire de sa fondation, à Montréal, à l'occasion d'une messe célébrée par le Nonce apostolique au Canada. Suivront ensuite un grand gala et un dîner sous la présidence de Mme Lise Thibault, lieutenant- gouverneur du Québec.
[Traduction]
Le Conseil régional compte 77 clubs de l'âge d'or, pour un total de 14 000 membres qui bénéficient de services et d'activités conçus en fonction de leurs besoins. La réussite du conseil au fil des ans est en grande partie attribuable à la participation de centaines de bénévoles, au nombre desquels figure une personne dont la contribution n'est pas la moindre, en l'occurrence la fondatrice du conseil, qui mérite tous les hommages qui lui seront témoignés samedi. De toute évidence, je parle de notre distinguée collègue, l'honorable Marisa Ferretti Barth, que nous félicitons chaleureusement de son initiative et de son dévouement indéfectible à sa collectivité.
LE GALA ET LA REMISE DES PRIX AU FESTIVAL EXPLORASIAN 2004
L'honorable Vivienne Poy: Honorables sénateurs, la semaine dernière, j'ai eu le plaisir d'assister, en compagnie de mon collègue le sénateur Jack Austin, leader du gouvernement au Sénat, et de l'honorable Rey Pagtakhan, au gala de remise des prix de l'édition 2004 du festival explorAsian, tenu à Vancouver et parrainé par la société pour le Mois du patrimoine asiatique de Vancouver.
Plus de 1 000 personnes étaient réunies dans le magnifique centre des arts de la scène pour assister au spectacle donné par un groupe remarquable d'artistes représentant tous les coins de l'Asie. Cet événement marquait le début du plus grand mois de festivités célébrant le patrimoine asiatique au Canada, en l'occurrence le festival explorAsian 2004.
L'an dernier, plus de 120 événements distincts se sont tenus au cours du mois de mai à Vancouver et ont attiré plus de 30 000 personnes. J'imagine que, compte tenu de ce début prometteur le 15 avril, le festival sera plus grandiose et plus réussi que jamais auparavant.
Outre le spectacle fantastique, les événements de la semaine dernière ont permis de rendre hommage aux réalisations des Canadiens d'origine asiatique qui auraient autrement pu passer inaperçus. Un des lauréats les plus impressionnants est Alex Wong, qui a remporté le prix d'excellence dans la catégorie jeunesse. Alex, dont nous avons eu le plaisir d'écouter la performance solo, est le premier Canadien a avoir remporté le Prix de Lausanne, considéré comme un concours olympique dans le domaine du ballet. Alex, qui a 17 ans, note qu'au Canada son succès n'a pas été souligné avec autant d'enthousiasme qu'en Suisse, où ce prix est décerné et où il a fait la une de quatre grands journaux.
Honorables sénateurs, il est grand temps que cela change. Il est grand temps que nous saluions les réussites de citoyens comme Alex, parce qu'ils représentent notre diversité grandissante et offrent des modèles qui inspirent d'autres jeunes Canadiens.
En plus de féliciter publiquement Alex Wong, j'aimerais féliciter aussi tous les lauréats des prix explorAsian qui ont apporté une importante contribution au développement des arts et de la culture à Vancouver.
L'événement auquel j'ai assisté et tous les événements qui ont lieu en mai chaque année pour marquer le Mois du patrimoine asiatique sont l'initiative de bénévoles qui enrichissent énormément nos collectivités. Puisque nous sommes en pleine Semaine nationale de l'action bénévole, je souligne tout spécialement la contribution des bénévoles. À Vancouver, deux bénévoles se distinguent plus spécifiquement; il s'agit de Beverly Nann et de Don Montgomery, respectivement présidente et coordonnateur de la société responsable du Mois du patrimoine asiatique, la Asian Heritage Month Society.
J'invite tous les sénateurs à profiter du Mois du patrimoine asiatique dans leurs collectivités d'un bout à l'autre du Canada et à appuyer les événements locaux.
L'IMPÔT SUR LES BOURSES D'ÉTUDES
L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur une question que je soulève ici depuis de nombreuses années; il s'agit de l'impôt sur les bourses d'études.
Hier, dans le Globe and Mail, un article soulignait les difficultés économiques d'une jeune étudiante du collège Appleby. Cela m'intéresse particulièrement parce que j'ai aussi étudié au collège Appleby, une institution indépendante située à Oakville, en Ontario.
(1340)
Cette jeune fille, vedette de hockey capable de représenter le Canada aux Jeux olympiques, a reçu du collège Appleby une bourse qui lui permet de fréquenter cette institution. Ses parents occupent quatre emplois à eux deux pour pouvoir payer une partie des frais mensuels excédant la somme de la bourse et, pourtant, elle reçoit une lourde facture pour les impôts qu'elle doit payer sur cette somme; or, elle ne peut l'acquitter.
En outre, personne n'a, semble-t-il, avisé la famille de l'imminence de cette facture. Voilà un effet direct du régime fiscal canadien qui pénalise l'excellence dans les études et favorise ce que nous appelons tous «l'exode des cerveaux». Si cette jeune femme de Sarnia, en Ontario, avait accepté l'une des nombreuses bourses qui lui ont été offertes au sud de la frontière, elle n'aurait pas à supporter ce lourd fardeau fiscal car sa bourse ne serait pas assujettie à l'impôt. Cependant, ses parents ont préféré qu'elle fréquente un collège plus près de chez elle.
Le problème est aggravé par le fait qu'elle fréquente l'école secondaire; il n'y a donc pas de déduction pour les droits de scolarité, comme dans le cas des études postsecondaires. Le gouvernement a choisi d'imposer comme revenu une bourse d'études de 35 000 $ pour fréquenter une école secondaire qui a permis à cette étudiante de s'inscrire à cette école, ce qui aurait été autrement impossible.
Manifestement, si cette jeune fille venait d'une famille riche, cela ne poserait pas un si gros problème, car ces gens auraient les moyens de payer cette facture fiscale. Cependant, elle vient d'une famille ouvrière qui a cinq enfants et qui a d'importantes obligations financières.
Les établissements d'enseignement comme Appleby ont établi des programmes pour permettre à certains étudiants de surmonter les obstacles financiers. Cela ne devrait pas ensuite devenir un fardeau fiscal pour les étudiants visés ou pour leurs parents.
Les bourses d'études sont données par des gens qui souhaitent financer les études d'étudiants méritants. Le gouvernement impose ensuite ce revenu lorsqu'un étudiant le reçoit sous la forme d'une bourse. C'est déraisonnable et inutile. Nous devrions récompenser l'excellence au lieu de la pénaliser.
C'est un exemple qui montre pourquoi notre régime fiscal doit être réexaminé et modifié. L'argent des bourses d'études doit aller directement aux étudiants. Autrement, on dénature l'objectif de la bourse d'études et cela crée dans certains cas des difficultés financières extrêmes.
Pourquoi le gouvernement ne peut-il trouver une solution à cette question? Le fait est que quel que soit le nombre d'exceptions, il n'est pas question de beaucoup d'argent.
LA SEMAINE NATIONALE DE SENSIBILISATION AU DON D'ORGANES ET DE TISSUS
L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour parler d'une façon importante d'améliorer la santé des gens ou même de sauver la vie de milliers de Canadiens. Nous sommes en pleine Semaine nationale de sensibilisation au don d'organes et de tissus. Même si près de 2 000 Canadiens ont eu la chance de recevoir un don d'organe l'année dernière, deux fois plus attendent encore. Chose tragique, pour certains, l'attente est trop longue. L'année dernière, en moyenne, cinq Canadiens par semaine sont morts en attendant un don d'organe, alors que la moyenne était de trois par semaine en l'an 2000.
Au cours de la dernière décennie, le nombre de Canadiens attendant un don d'organe a presque doublé pour passer à près de 4 000 l'année dernière. En raison du vieillissement de notre population et du fait que les progrès de la médecine augmentent la portée et les taux de réussite des opérations de transplantation, les besoins ne vont que s'accroître.
Au cours de la dernière décennie, le nombre de donneurs vivants a fortement augmenté, ayant plus que doublé depuis 1994. Le nombre de Canadiens faisant un don d'organe au moment de leur décès est resté relativement inchangé depuis dix ans.
Il est essentiel que tous les Canadiens soient conscients de la nécessité et de l'importance vitale des dons d'organes et de tissus. Un don total par une personne peut sauver jusqu'à huit vies au moyen de dons d'organes vitaux et contribuer à l'amélioration de la qualité de vie et de la santé de 50 personnes par le don de tissus comme la peau, les os et les valves cardiaques. Quel que soit l'âge du donneur, ses organes et ses tissus, s'ils sont en bon état, peuvent sauver des vies ou les améliorer. Par la même occasion, les donneurs contribuent à atténuer les pressions à long terme qui s'exercent sur notre système de santé.
Un sondage récent a révélé que nombre de Canadiens sont conscients de ces avantages et de ces besoins. Plus tôt cette semaine, nous avons appris que près des trois quarts des Canadiens comptent faire don d'au moins un organe à leur décès. Plus de la moitié d'entre eux ont déjà pris des mesures pour que leur volonté soit faite.
Je remercie ces Canadiens, et je les exhorte à prendre d'autres mesures pour s'assurer que leurs souhaits soient réalisés en informant leur famille de leur intention de faire don de leurs organes. J'exhorte également les Canadiens qui songent à faire un don d'organes à s'informer au sujet des exigences dans leur province et à prendre les mesures voulues pour que, le moment venu, à leur décès, ils puissent faire le don de la vie à d'autres.
L'IMPORTANCE DU SPORT POUR LA FIERTÉ NATIONALE
L'honorable Francis William Mahovlich: Honorables sénateurs, je voudrais vous parler de l'importance du sport pour notre fierté nationale. Rien n'est plus favorable à l'unité nationale que notre célébration collective des succès de nos athlètes sur la scène mondiale. Quand nous entendons le nom de Catriona LeMay Doan, de Donovan Bailey ou de Jamie Salé et de David Pelletier, nous nous souvenons de la fierté que nous avons ressentie lorsqu'ils ont offert au monde des prestations exceptionnelles.
La société profite beaucoup du sport et de l'activité physique. La participation aide à maintenir la population en santé, renforce le tissu social et crée des modèles d'excellence à suivre pour nos jeunes.
Le récent budget fédéral a injecté 10 millions de dollars de plus dans le réseau canadien des sports, portant le financement total de Sport Canada à 100 millions de dollars par année. Cet investissement aidera plus de Canadiens à pratiquer une activité physique et à exceller dans les sports.
En février, le ministre d'État au Sport a créé un comité sur le sport composé de représentants de tous les partis politiques afin de susciter la discussion dans ce domaine. Bon nombre d'électeurs de partout au pays accordent beaucoup d'importance aux sports et tous les parlementaires, peu importe leur allégeance politique, apportent des contributions constructives au débat. Je considère qu'il s'agit là d'un progrès très important, et je félicite le ministre de son initiative.
Le ministre a déclaré:
Nous sommes sérieux lorsque nous affirmons que nous voulons donner à nos athlètes les moyens d'exceller dans leur discipline. Du terrain de jeu au podium, nos athlètes continueront de bénéficier des services et des programmes d'appui au sport que finance le gouvernement du Canada.
De plus, le ministre des Finances s'est engagé à affecter 310 millions de dollars à l'infrastructure requise en vue de la tenue des Jeux olympiques d'hiver de 2010.
Aujourd'hui, j'interviens au nom des athlètes canadiens. À l'heure actuelle, Sport Canada consacre environ 16 millions de dollars de son budget au Programme d'aide aux athlètes. Les honorables sénateurs savent-ils que, dans le cadre de ce programme, un athlète de calibre olympique reçoit entre 500 $ et 1 110 $ par mois pour subvenir à ses besoins? Bon nombre d'athlètes qui suivent des cours et des entraînements intensifs ont de la difficulté à joindre les deux bouts, particulièrement ceux qui vivent dans nos grandes villes. Il va sans dire que l'augmentation récente du financement améliorera la situation. J'estime que les athlètes, particulièrement ceux qui pratiquement un sport individuel, ont besoin d'une aide supplémentaire.
En 2000, les Australiens ont remporté un nombre record de 58 médailles aux Jeux olympiques de Sydney. Dans les années précédant l'événement, le gouvernement australien a augmenté de façon considérable le financement des organisations sportives et des athlètes. Il semblerait que cet investissement a amélioré considérablement le nombre de médailles remportées par l'Australie lors des jeux.
Honorables sénateurs, dans six ans les yeux du monde entier seront tournés vers les Jeux de Vancouver et Whistler, une occasion en or de capter les cœurs de tous les Canadiens.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Je regrette d'informer l'honorable sénateur que son temps de parole est écoulé.
[Français]
LE JOUR DE LA TERRE
L'honorable Joseph A. Day: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de vous rappeler que c'est aujourd'hui le Jour de la Terre.
[Traduction]
Honorables sénateurs, c'est aujourd'hui l'événement environnemental le plus long et le plus célébré au monde: le Jour de la Terre. Plus de six millions de Canadiens se joindront à quelque 500 millions de personnes dans plus de 180 pays pour participer à des activités et projets touchant des questions environnementales. À peu près tous les écoliers au Canada participent à une activité liée au Jour de la Terre.
Les crises environnementales se multiplient parce que nous polluons et détruisons chaque jour, par nos activités, l'environnement fragile dont dépend la survie des humains et de la faune. Que pouvons-nous faire?
(1350)
Le Jour de la Terre est l'occasion de réfléchir et de renouveler notre engagement en faveur d'une action et de résultats positifs. Institué aux États-Unis en 1970 pour sensibiliser les gens à la question environnementale, le Jour de la Terre marque la naissance du mouvement écologiste. Il s'est révélé être un puissant moteur de changement.
Au Canada, le Jour de la Terre a engendré la Semaine de la Terre et même le Mois de la Terre, pour tenir compte de la profusion d'activités et de projets, qui vont d'importantes activités publiques comme le Earth Walk de Victoria, le Earth Day Festival d'Edmonton et le Marsh Creek Sweep de Saint John, au Nouveau-Brunswick, aux milliers d'activités privées de moindre envergure organisées par les écoles, les groupes d'employés et les organisations communautaires un peu partout au pays.
En aidant à sensibiliser la population à la question environnementale, les activités liées au Jour de la Terre ont contribué à améliorer considérablement la qualité de notre environnement, et notamment la qualité de l'air que respirent les Canadiens. Une étude récente révèle que, entre 1974 et 2001, la concentration d'anhydride sulfureux dans l'atmosphère a diminué de 73 p. 100, celle des matières particulaires de 54 p. 100 et celle du plomb de 94 p. 100. Ces chiffres sont d'autant plus impressionnants que, pendant la même période, on a enregistré une augmentation de 30 p. 100 du nombre de véhicules à moteur.
Les honorables sénateurs ne sont pas sans savoir que de nombreux défis attendent encore les Canadiens soucieux de protéger l'environnement. Je suis convaincu que les honorables sénateurs voudront rendre hommage aujourd'hui aux personnes et aux organisations qui, par leurs efforts, ont contribué jusqu'à maintenant à la réussite du mouvement écologiste.
Nous sommes tous déterminés, j'en suis sûr, à faire davantage pour protéger l'environnement de notre pays et celui de la planète où nous vivons, la Terre.
AFFAIRES COURANTES
RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION
DÉPÔT DU SEPTIÈME RAPPORT DU COMITÉ
L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le septième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, concernant la sécurité.
L'ÉTUDE SUR L'ÉTAT ACTUEL ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE L'AGRICULTURE ET DES FORÊTS AU CANADA
DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DES FORÊTS SUR L'ENCÉPHALOPATHIE SPONGIFORME BOVINE
L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'informer le Sénat que, conformément aux ordres adoptés le 6 février et le 1er avril 2004, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts a déposé, le 15 avril 2004, auprès du greffier du Sénat, son quatrième rapport provisoire intitulé «La crise de l'ESB — Leçons pour l'avenir».
Conformément au paragraphe 97(3) du Règlement, je propose que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
(La motion est adoptée et l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
LE TARIF DES DOUANES
PROJET DE LOI MODIFICATIF—RAPPORT DU COMITÉ
L'honorable David Tkachuk, vice-président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:
Le jeudi 22 avril 2004
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son
QUATRIÈME RAPPORT
Votre Comité auquel a été déféré le projet de loi C-21, Loi modifiant le Tarif des douanes a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 1er avril 2004, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.
Respectueusement soumis,
Le vice-président,
DAVID TKACHUK
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois?
(Sur la motion du sénateur Tkachuk, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
LA COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE
AVIS DE MOTION APPROUVANT LA NOMINATION DE MARIA BARRADOS À LA PRÉSIDENCE
L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:
Que, conformément au paragraphe 3(5) de la Loi concernant l'emploi dans la fonction publique du Canada, chapitre P-33 des Lois révisées du Canada (1985), le Sénat approuve la nomination de Maria Barrados, d'Ottawa (Ontario), à titre de présidente de la Commission de la fonction publique pour une période de sept ans.
LE CODE CRIMINEL
LE PROJET DE LOI C-250—PRÉSENTATION D'UNE PÉTITION
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour déposer une pétition signée par plus de 6 275 personnes. Ces Canadiens, qui s'ajoutent aux 5 000 dont j'ai déposé les signatures hier, veulent eux aussi attirer l'attention du Sénat sur ce qui suit. Je ne citerai qu'un bref extrait de leur pétition:
Nous nous opposons au projet de loi C-250 pour plusieurs raisons, notamment parce que les libertés d'expression et de religion garanties par la Charte seront fragilisées si le projet de loi est adopté.
Comme il existe déjà des protections juridiques pour tous les Canadiens, il est inutile et dangereux d'adopter le projet de loi, dont le seul but est de semer la peur dans la population, rendant impossible toute discussion sur l'orientation sexuelle si un groupe d'intérêt spécial ou un militant s'y oppose.
Par conséquent, honorables sénateurs, les pétitionnaires demandent au Sénat de modifier le projet de loi C-250 pour que tous les Canadiens jouissent d'une protection égale de leur droit à la liberté de parole et, à défaut, de rejeter le projet de loi.
[Français]
LES LANGUES OFFICIELLES
LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA—PRÉSENTATION DE PÉTITIONS
L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, conformément à l'article 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer en cette Chambre les pétitions de 29 signataires demandant de déclarer Ottawa, la capitale du Canada, une ville bilingue reflétant la dualité linguistique du pays.
Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:
Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;
Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;
Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;
Que la capitale nationale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;
Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, doit être déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 et 1982.
[Traduction]
L'honorable Marilyn Trenholme Counsell: Honorables sénateurs, conformément à l'alinéa 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer des pétitions signées par 95 personnes qui demandent qu'Ottawa, la capitale du Canada, soit déclarée une ville bilingue reflétant la dualité linguistique du pays.
Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:
Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;
Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;
Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;
Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;
Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada — la seule mentionnée dans la Constitution, — doit déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 à 1982.
[Français]
L'honorable Pierrette Ringuette: Honorables sénateurs, conformément à l'article 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer en cette Chambre les pétitions de 22 autres signataires demandant de déclarer Ottawa, la capitale du Canada, une ville bilingue reflétant la dualité linguistique du pays.
Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:
Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays, ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;
Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;
Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;
Que la capitale nationale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;
Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, doit être déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 et 1982.
[Traduction]
L'honorable Mac Harb: Honorables sénateurs, j'ai également l'honneur de présenter des pétitions signées par un grand nombre d'électeurs de la région d'Ottawa, qui demandent que la ville d'Ottawa soit déclarée officiellement bilingue.
PÉRIODE DES QUESTIONS
LA SANTÉ
LE VIRUS DU NIL OCCIDENTAL—LE RISQUE D'INFECTION PAR TRANSFUSION SANGUINE
L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat au sujet du virus du Nil occidental. La semaine dernière, on a signalé que la maladie avait été dépistée chez un homme âgé, en Ohio. Il se pourrait que ce soit le cas le plus hâtif d'infection par le virus du Nil occidental en Amérique du Nord. C'est même probable.
Étant donné que cette infection survient tôt dans l'année, le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous dire si Santé Canada et ses partenaires modifient leur façon d'aborder la lutte contre la propagation de ce virus cette année?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais que Santé Canada accorde beaucoup d'attention au virus du Nil occidental. Je ne vois pas tout à fait quel changement le sénateur Keon voudrait que je préconise. Aurait-il l'obligeance de me poser une question complémentaire?
Le sénateur Keon: Je conviens que la question complémentaire sera peut-être utile. J'aurais dû donner ces précisions. Les U.S. Centers for Disease Control and Prevention ont fait savoir que, l'an dernier, six personnes ont été infectées par le virus du Nil occidental aux États-Unis à cause de transfusions sanguines et, peut-être, par des dons d'organe, malgré les tests de dépistage. Même si les tests de dépistage employés par le Québec et la Société canadienne du sang ont fait leurs preuves, ces faits survenus aux États-Unis soulèvent de graves questions.
Je suis sûr que le leader du gouvernement au Sénat ne peut nous donner de réponse aujourd'hui, mais pourrait-il se renseigner et nous dire si le test employé pour dépister le virus dans le sang a été évalué ou modifié depuis qu'il a été adopté, il y a un an? Au Canada, quel est le risque d'infection par des transfusions, et les tissus des organes font-ils l'objet d'un dépistage comme par le passé?
Le sénateur Austin: Je remercie le sénateur Keon de sa question. Je vais me renseigner.
LA NOUVELLE STRATÉGIE NATIONALE—LE FINANCEMENT À LONG TERME—LES DISCUSSIONS AVEC LES PROVINCES
L'honorable Marjory LeBreton: Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, le premier ministre a prononcé un discours sur la réforme des soins de santé qu'il prévoit faire. Son discours ne contenait pas beaucoup de détails, mais il a réitéré qu'un accord sur le financement à long terme assuré par le gouvernement fédéral dépendait de la volonté provinciale de procéder à différentes réformes, comme réduire les listes d'attente et régler le problème de pénurie de médecins. En réponse à ce discours, les provinces, même si elles reconnaissent la nécessité des réformes et d'une plus grande reddition de comptes, ont averti le gouvernement fédéral qu'il ne devrait pas dicter unilatéralement la teneur de ces réformes.
Qu'arrivera-t-il si le gouvernement fédéral ne parvient pas à conclure un accord avec les provinces cet été? Son plan est-il à prendre ou à laisser?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme le sait l'honorable sénateur LeBreton, en raison de sa vaste expérience des relations fédérales-provinciales acquise lors de vies antérieures, ces dialogues et discussions ont lieu à deux niveaux: public et privé. Comme le savent sans doute les honorables sénateurs, l'Ontario et le Québec sont en train de se concerter en vue de répondre aux propositions du gouvernement fédéral et à la vision du premier ministre concernant une nouvelle stratégie de soins de santé. Les premiers ministres de l'Ouest font de même. Il ne fait aucun doute qu'il y aura de nombreux marchandages avant la fin des discussions.
Toutefois, il y a des signes très encourageants selon lesquels les provinces et le gouvernement fédéral sont en faveur d'une approche constructive pour aboutir à une stratégie nationale de soins de santé. Le gouvernement est confiant que les deux ordres de gouvernement seront capables de servir efficacement la population canadienne.
Le sénateur LeBreton: Honorables sénateurs, la semaine dernière, le Globe and Mail rapportait que le financement du régime fédéral d'assurance-maladie serait augmenté de plus de 2 milliards de dollars par an, et ce, tous les ans. Selon une étude récente du Conference Board du Canada, il faudrait 5 milliards de dollars de plus uniquement pour maintenir les services actuels. Le Globe and Mail rapportait aussi que si le gouvernement fédéral ne réussissait pas à s'entendre avec les provinces, il présenterait un projet de loi pour fixer des normes nationales pour l'assurance-maladie, normes que les provinces seraient obligées de respecter.
Le gouvernement fédéral ne craint-il pas d'envenimer l'atmosphère des réunions, comme cela s'est produit dans le passé, s'il donne l'impression de vouloir empiéter sur la compétence des provinces sans offrir suffisamment en retour?
Le sénateur Austin: Rien n'est plus historique dans la Confédération canadienne que les divergences de vues entre le gouvernement fédéral et les provinces en matière de financement, de points d'impôt et, en général, de mainmise sur les recettes provenant des contribuables canadiens. C'est la ligne de démarcation en fonction de laquelle une bonne partie de la politique gouvernementale est établie.
Tout ce que je peux dire à l'honorable sénateur, c'est que, en dépit de ce l'on pourrait percevoir, la collaboration des provinces et du gouvernement fédéral s'améliore très notablement.
[Français]
LE SPORT
LA PARTICIPATION DE DOMINIQUE VALLÉE AUX JEUX OLYMPIQUES DE 2004
L'honorable Madeleine Plamondon: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire si le Canada sera représenté aux Jeux olympiques d'Athènes en 2004 dans le domaine des véliplanchistes? Je m'explique: Dominique Vallée, à cause d'une blessure, n'a pu participer à une dernière séance de qualifications avant la tenue des Jeux. Elle serait toutefois capable de joindre l'équipe olympique le moment venu. Pourquoi le Canada se prive-t- il d'un représentant de sa trempe? Le siège du Canada sera-t-il vide dans cette discipline aux Jeux d'Athènes?
(1410)
Je sais que, dans le sport amateur, tout athlète qui a un problème peut avoir recours au règlement extrajudiciaire des différends pour présenter sa plainte. Je sais aussi que des accords sont intervenus entre le Comité olympique canadien et les fédérations sportives quel que soit le sport en cause mais, en resserrant les critères que doivent respecter les athlètes canadiens au-delà de ce que d'autres pays exigent, est-ce qu'on ne se prive pas d'envoyer une véliplanchiste de la trempe de Dominique Vallée pour représenter le Canada? Pire encore, ne forçons-nous pas alors nos athlètes à aller représenter un autre pays pour se rendre aux Olympiques?
Ma question comporte deux volets: où en est le dossier de Dominique Vallée, et est-ce que le siège du Canada sera vide dans cette discipline aux Jeux d'Athènes du 2004? L'esprit olympique doit primer sur les procédures.
[Traduction]
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le gouvernement du Canada ne fixe pas les critères, non plus qu'il ne choisit les candidats admissibles à représenter notre pays à un événement olympique. Cette décision revient au Comité olympique canadien, qui est membre du Mouvement olympique international. Je suis sûr que la plupart des honorables sénateurs préféreraient que le système fonctionne exactement comme je viens de le décrire, et non pas que le gouvernement canadien ou tout autre organisme politique prenne des décisions au sujet de nos athlètes.
Un problème beaucoup plus difficile à résoudre serait de prédire le temps qu'il fera sur une ville quelconque un jour donné. Je n'ai pas de réponse à fournir à l'honorable sénateur, précisément parce que cela n'est pas du ressort du gouvernement canadien.
[Français]
Le sénateur Plamondon: La question a été posée à la Chambre des communes, où l'on a répondu que la plainte devait être envoyée à un comité extrajudiciaire. Cependant, dans le cas de Dominique Vallée, il est certainement à considérer qu'elle aurait pu se qualifier si elle ne s'était pas blessée à une cheville. Elle ne peut donc pas franchir la dernière étape, qui est celle de la qualification. D'autres pays participeront avec des critères moins élevés.
Au moment de la tenue des Jeux, elle sera en mesure de prendre part aux compétions, mais parce que, physiquement, elle n'aura pas pu se présenter aux examens de qualification, elle manquera son tour. Il est dommage qu'un athlète soit obligé d'aller représenter un autre pays parce que le système canadien actuel manque de souplesse.
[Traduction]
Le sénateur Austin: Je suis sûr que madame le sénateur transmettra au Comité olympique canadien les critiques dont elle fait part au Sénat aujourd'hui.
LES FINANCES
LA FORMULE DE PÉRÉQUATION—LE TRAITEMENT RÉSERVÉ AUX RECETTES PROVENANT DES RESSOURCES
L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, ma question concerne la rencontre de samedi entre le premier ministre de la Saskatchewan, Lorne Calvert, et le premier ministre du Canada. M. Calvert a déclaré qu'il avait parlé au premier ministre de deux questions relatives à la péréquation. La première concernait une éventuelle réparation rétroactive, en raison du traitement réservé, dans la formule de péréquation, aux recettes provenant de l'industrie minière dans notre province. La deuxième question visait à demander que la Saskatchewan bénéficie du même accord sur les recettes provenant de ses ressources pétrolières que le Canada atlantique.
Lundi, le Star Phoenix rapportait les propos suivants queM. Calvert aurait tenus:
Je suis heureux d'annoncer que le premier ministre demandera au ministre des Finances, Ralph Goodale, d'examiner ces deux questions avec nos représentants et Harry Van Mulligen.
Le dernier budget annonçait pour tout changement que l'examen des recettes de l'exploitation des ressources constituerait une priorité lorsque viendrait le temps de redéfinir le programme, ce qui aura lieu dans cinq ans, en 2009. Le gouvernement du Canada a-t-il modifié la politique définie dans le dernier budget?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, les renseignements dont je dispose ne me permettent pas de répondre au sénateur Tkachuk.
Le sénateur Tkachuk: La Saskatchewan n'est pas la seule province qui aimerait modifier le traitement des recettes tirées des ressources dans la formule de péréquation. Le gouvernement est-il dès maintenant disposé à aborder de nouveau la question de l'imposition des ressources, dans le cas non seulement de la Saskatchewan mais également de toutes les autres provinces?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je tâcherai de fournir bientôt au sénateur Tkachuk une réponse précise à ce sujet.
LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE—LE PROGRAMME DES COMMANDITES—ACCUSATIONS À PORTER
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, l'un des principaux quotidiens d'aujourd'hui rapporte que Jean Lapierre, lieutenant politique du premier ministre pour le Québec, aurait dit qu'il aimerait voir la GRC porter sous peu des accusations contre les auteurs de méfaits dans le cadre du scandale des commandites. Monsieur Lapierre affirme ceci: «Ce serait un soulagement parce que je pense que les gens veulent qu'il y ait des coupables.»
Des voix: Oh, oh!
Le sénateur St. Germain: Ce sont ses mots. Je ne fais que répéter ce qu'il a dit.
L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Non, le sénateur répète ce que le journal a dit qu'il avait dit.
Le sénateur St. Germain: Peut-il arriver que les journaux fassent des erreurs? Les journalistes rapportent-ils parfois incorrectement les choses? Le sénateur remet-il en question l'intégrité de nos médias? Quelle honte!
Le sénateur Rompkey: Qui voudrait faire une chose pareille?
Le sénateur St. Germain: On peut se demander si tout cela ne pourrait servir qu'à accélérer le processus judiciaire dans le but d'appuyer le programme politique de M. Lapierre et du premier ministre. Est-ce là l'explication? Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous assurer que la GRC ne reçoit pas encore une fois des directives du CPM?
Des voix: Oh, oh!
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Pour répondre à cette question, oui, je peux vous l'assurer. Nous avons vu le commissaire Zaccardelli répondre à cette question devant le comité de l'autre endroit hier et affirmer vigoureusement qu'il n'acceptait aucune directive politique et qu'il n'en avait pas même été question.
En ce qui a trait à la personne dont le sénateur St. Germain parle, le sénateur n'est pas sans savoir qu'il s'agit là d'un simple citoyen et que, à ce titre, il a le droit d'exprimer ses opinions.
Le sénateur St. Germain: J'ai une question supplémentaire, honorables sénateurs. Le leader a dit que M. Lapierre était un simple citoyen, et c'est vrai. Toutefois, il est bien connu qu'il a accepté un rôle au sein du Parti libéral du Canada, à titre de représentant de la province de Québec. Je peux me tromper, puisque, comme les libéraux me l'ont si judicieusement fait remarquer, nous ne pouvons pas nous fier entièrement aux médias. Toutefois, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire si les commentaires de M. Lapierre reflétaient l'opinion du premier ministre et de son Cabinet? Le leader du gouvernement au Sénat fait partie du Cabinet. Est-ce ainsi que le gouvernement prévoit faire toute la lumière sur le scandale des commandites, c'est- à-dire en portant quelques accusations puis en mettant rapidement un terme à l'enquête par la suite?
Je regrette de le rappeler, mais c'est ce qui a été fait dans le cas de Stevie Cameron et d'Allan Rock contre le premier ministre Mulroney.
Des voix: Quelle honte!
Le sénateur St. Germain: Allez-vous continuer de faire ce déplorable usage inapproprié et abusif de pouvoir?
Le sénateur Austin: Le sénateur St. Germain louange d'abord l'intégrité de la GRC et lui porte atteinte ensuite dans son autre question. Le sénateur doit se faire une idée. Il a certainement voulu dire qu'il ne doute pas un instant que l'intégrité de la GRC est irréfutable.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Austin: En ce qui concerne la question au sujet de M. Lapierre, il parle à titre personnel. Comme citoyen du Canada, il a parfaitement le droit de le faire, qu'il ait raison ou non.
Le sénateur St. Germain: J'ai une brève question complémentaire: Le leader du gouvernement au Sénat dit-il que M. Lapierre ne fera pas partie de l'organisation libérale au Québec lors des prochaines élections fédérales?
Le sénateur Austin: Je dis que toute tentative de la part du sénateur St. Germain de faire endosser au gouvernement la responsabilité des paroles d'un simple citoyen ne va probablement mener nulle part.
(1420)
LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET LA PROTECTION CIVILE
LA SÉCURITÉ NATIONALE—L'AFFECTATION DE FONDS
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question au leader du gouvernement au Sénat concerne des rumeurs publiées par la presse depuis une journée ou deux au sujet de dépenses supplémentaires de 500 millions de dollars pour la sécurité nationale. Le gouvernement ne va tout de même pas dépenser une telle somme pour des élections, n'est-ce pas?
Je crois qu'il y a lieu de penser que les nouveaux crédits serviront à remédier aux sujets de préoccupation exposés dans le récent rapport de la vérificatrice générale. Le ministre peut-il confirmer cela, de façon à ce que nous ayons une idée de l'orientation générale en matière de sécurité?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la sécurité nationale est une question importante. À la période de questions d'hier, nous avons amorcé un important renvoi à ce sujet.
Le gouvernement a entrepris l'élaboration d'une politique d'ensemble relative à la sécurité nationale, laquelle, je l'espère, sera annoncée sous peu. D'ici à ce que cette politique soit annoncée, je ne suis pas en mesure de communiquer d'autres informations à l'honorable sénateur Forrestall.
Le sénateur Forrestall: Le ministre peut-il indiquer s'il y aura, d'ici la semaine prochaine, un énoncé portant sur la question de la sécurité et s'il concernera la dépense de fonds supplémentaires pour des fins de sécurité?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je ne peux que dire au sénateur Forrestall que le gouvernement a l'intention de faire une déclaration de première importance, dans un délai assez court, sur la sécurité nationale. Je répondrai volontiers aux questions du sénateur Forrestall, ou d'autres sénateurs, lorsque cet énoncé de politique aura été déposé.
Le sénateur Forrestall: La ministre McLellan et d'autres autorités au sein du gouvernement se sont intéressées à la question de la supervision de la contribution parlementaire. Je pose mes questions du point de vue de cette contribution. Par exemple, il serait utile que les parlementaires sachent si ces fonds serviront à l'identification, à la vérification des passeports, au soi-disant programme de prélèvement des empreintes digitales ou à l'accroissement des effectifs à nos frontières. Le gouvernement ne veut-il plus intervenir en fonction des données qui le préoccupent? En dernière analyse, en ce qui concerne les questions portant sur notre sécurité, les préoccupations des Canadiens, et des simples citoyens en général, ne sont sûrement pas différents de celles des membres du gouvernement et, notamment, des conseillers du gouvernement.
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, la sécurité de ses citoyens constitue probablement la plus grande responsabilité d'un gouvernement. Compte tenu de cela, et pour répondre aux questions posées hier, j'ai décrit les mesures que le gouvernement fédéral a prises depuis le 11 septembre 2001, y compris l'affectation d'environ 8 milliards de dollars à la sécurité des Canadiens.
Le gouvernement fera sous peu une déclaration complète sur diverses questions de sécurité nationale. Je sais que le sénateur Forrestall s'intéresse vivement à ces questions, et je serai heureux de partager mon point de vue avec lui lorsque cette déclaration sera faite.
Le sénateur Forrestall: Le Programme d'identification en temps réel, ou PITR, soulève des préoccupations. Comme le ministre le sait, la vérificatrice générale a déclaré dans son rapport que le programme de prélèvement d'empreintes digitales et d'images numérisées de la GRC a été pratiquement inutile, puisque la technologie connexe nécessaire pour traiter l'information générée par le programme d'images numérisées n'a pas été achetée à cette fin. Par conséquent, le traitement s'effectue encore manuellement, ce qui prend beaucoup de temps.
Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous assurer que, compte tenu de ces nouvelles dépenses, il usera de ses bons offices — car nous pouvons agir presque immédiatement à cet égard — pour aider la GRC et les responsables de la sécurité à acheter ce matériel supplémentaire afin que les vérifications aient lieu en temps réel et non d'ici les fêtes?
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, le côté inquisiteur des questions du sénateur Forrestall me plaît beaucoup. Bien sûr, son affirmation s'appuyant sur le rapport de la vérificatrice générale est exacte et, à mon avis, ce fait a été admis et pris en considération. C'est tout ce que je peux dire pour le moment.
Pendant que j'ai la parole, j'aimerais répondre à une question posée par le sénateur Andreychuk, hier. Il n'y a pas de projet en vue d'instaurer une carte d'identité biométrique.
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL
LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA—LA PRÉSENCE D'AGENTS EN UNIFORME À UNE RÉUNION D'INVESTITURE LIBÉRALE
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, qu'en est-il de la question que j'ai posée il y a quelques semaines au sujet de la pratique qui consiste à louer des agents en uniforme rouge comme parures lors de divers événements politiques, culturels et sociaux? J'aimerais qu'on réponde à ma question au cas où je voudrais soulever ce point pendant la campagne électorale.
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur Murray veut vraiment savoir où en est la réponse à sa question. Je ferai une autre recherche.
LA SANTÉ
LE LABORATOIRE DE LUTTE CONTRE LES MALADIES—LE PROCESSUS DE SÉLECTION ET LES CRITÈRES DU POINTAGE
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Il y a quelques jours, nous avons parlé de l'endroit où serait situé le laboratoire de lutte contre les maladies. Le sénateur Austin a vanté sa région comme étant la meilleure région du monde pour ce type de laboratoire. J'ai essayé d'en faire autant pour le Manitoba.
Comme réponse partielle à la question, le ministre a parlé du pointage et du nombre de points attribués à chaque endroit. Est-ce que le Manitoba et la Colombie-Britannique étaient les deux seules régions concernées? Ottawa était-elle dans la course? Dans l'affirmative, combien de points a-t-elle obtenu? Peut-on prendre connaissance du pointage? Est-il affiché sur un site Web? Peut-on voir la grille des critères établis pour les questions?
L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme je l'ai dit hier, le rapport en question est le rapport d'un groupe de scientifiques dirigé par le docteur David Naylor. La question posée à ce groupe était la suivante: que nécessite la création d'un laboratoire complet de lutte contre les maladies au Canada? On a établi une grille comportant 20 points. On a ensuite soumis les Centers for Disease Control des États-Unis, à Atlanta, aux critères établis. Si ma mémoire est bonne, on a attribué 14 points à Atlanta. On en a attribué 12 à Vancouver et 4 à Winnipeg. Aucun autre centre que Winnipeg n'a eu plus de points.
À la période des questions, l'autre jour, j'ai dit que Winnipeg était un laboratoire fédéral de niveau 4. Que je sache, il n'y a que deux laboratoires de ce type en Amérique du Nord, l'autre étant celui d'Atlanta.
(1430)
Il s'agit d'une installation très importante dans le contexte d'un réseau canadien de lutte contre les maladies. Il y a effectivement d'autres installations destinées à diverses fonctions dans de nombreuses régions du pays, notamment à Toronto, à Guelph, à Hamilton, à Halifax et à Saskatoon.
L'étude visait à déterminer les besoins liés à un système global de lutte contre les maladies. Un des éléments de base de l'étude consistait à voir si la capacité du système de liaison électronique était suffisante pour que les diverses installations puissent former un seul centre.
Je crois que le rapport est public mais, s'il ne l'est pas, je vous ai déjà donné assez de renseignements sur son contenu. Le sénateur Keon me dit que le rapport est public.
Si je peux continuer, le rapport est un élément très important de l'analyse globale des exigences en matière de santé publique au Canada. Une partie des discussions actuelles porte sur l'endroit où serait situé le bureau de l'agent de santé publique en chef et sur la désignation d'un scientifique en chef dans le secteur de la santé au Canada. Je n'ai pas son titre exact pour l'instant.
J'essaie d'être neutre. Inévitablement, une fois que les dirigeants politiques dans diverses collectivités ont découvert que nous avions un rapport scientifique contenant diverses conclusions fondées sur la science — et non sur les opinions politiques, les intérêts régionaux ou les retombées économiques —, le premier ministre de la Colombie-Britannique, celui du Manitoba, d'autres premiers ministres et d'autres dirigeants politiques fédéraux et provinciaux ont lancé une campagne en vue d'obtenir la plus grande part possible des nouveaux développements. Dans la fédération canadienne, cela n'est jamais facile.
J'aurais dû mentionner aussi un important centre de recherche au Québec, qui doit être intégré d'une façon ou d'une autre au programme national de lutte contre les maladies.
Comme nous l'avons entendu dans la question posée il y a quelques minutes par le sénateur Keon, des menaces imminentes pèsent sur le Canada en ce qui a trait à la santé, menaces qui viennent à la fois des maladies chroniques et des maladies infectieuses. On tente maintenant de trouver une solution globale pour répondre à ces menaces.
Je ne peux pas dire au sénateur Stratton ce qui se passe au plan politique, mais la communauté scientifique est très claire sur ce qui doit être fait.
RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE
L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer la réponse à une question posée le 17 février par le sénateur Tkachuk concernant la Banque de développement du Canada et le jugement de la Cour supérieure du Québec exonérant l'ancien président.
LA JUSTICE
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA—LE JUGEMENT DE LA COUR SUPÉRIEURE DU QUÉBEC EXONÉRANT L'ANCIEN PRÉSIDENT
(Réponse à la question posée le 17 février 2004 par l'honorable David Tkachuk)
Le 12 mars 2004, au nom du gouvernement du Canada, la ministre de l'Industrie, Lucienne Robillard, a annoncé que le gouvernement met fin à la nomination de Michel Vennat au poste de président et chef de la direction de la Banque de développement du Canada.
Le gouverneur en conseil est d'avis que la conduite de M. Vennat relativement aux questions visées dans les motifs de la décision de la Cour supérieure du Québec est incompatible avec son maintien en fonction.
ORDRE DU JOUR
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADALA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Mercer, appuyée par l'honorable sénateur Munson, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu.
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je prends la parole relativement au projet de loi C-3, qui vise à modifier la Loi électorale du Canada. Ce projet de loi est la mesure prise par le gouvernement suite à une décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Figueroa c. Canada. La cour a accepté l'argument voulant que l'exigence actuelle dans la Loi électorale du Canada portant qu'un groupe doit présenter 50 candidats aux élections pour continuer d'être reconnu comme un parti politique était trop lourde.
En 1993, le Parti communiste du Canada n'a pu satisfaire à cette exigence et il a perdu son statut de parti politique. Le comité devra confirmer les faits, mais je crois savoir qu'à l'époque, M. Figueroa avait offert au leader du gouvernement à la Chambre, M. Don Boudria, de se désister si le nombre minimum de candidats exigé était ramené de 50 à 12. Il semble que M. Boudria ait rejeté cette offre et qu'il aurait dit que le gouvernement se conformerait à la décision de la cour.
Pour la gouverne du Sénat, je propose que le comité s'assure que c'est bien ce qui s'est passé.
M. Figueroa a ensuite convaincu la cour que l'exigence en question violait la Charte des droits et libertés, parce qu'elle mine le droit de chaque citoyen de participer de façon concrète au processus électoral. La cour a rejeté cette exigence, mais elle a suspendu l'application de sa décision pour une année, soit jusqu'au 27 juin 2004, afin de permettre au Parlement d'apporter les changements nécessaires à la loi.
Cela intéresse sûrement le sénateur Murray, à l'instar d'autres personnes et groupes au Canada, parce que le fait d'abaisser le nombre de candidats d'un parti de 50 à 1 créera une situation fort intéressante.
En conclusion, je signale que, dans sa décision majoritaire, la Cour suprême a été très claire à ce sujet:
Il pourrait fort bien arriver que l'État puisse faire valoir d'autres objectifs qui justifieraient l'obligation de présenter au moins 12 candidats. Je me contenterai toutefois de dire que ceux avancés, invoqués en l'espèce, ne sauraient justifier quelque seuil que ce soit et, a fortiori, un nombre minimal de 50 candidatures.
Le projet de loi dont nous sommes saisis abaissera ce seuil de 50 à un candidat. L'un des critères énoncés par le sénateur Mercer vise à abaisser à 1 le nombre de candidats requis. On demande également à tous les partis politiques d'avoir 250 membres, un conseil exécutif formé de quatre dirigeants et une philosophie ou un objectif global clairement énoncé. Le directeur général des élections déterminera ensuite si le parti politique est viable ou non.
Vous pouvez vous imaginer ce qui risque de se produire. De nombreux groupes sincères voudront se faire reconnaître comme partis politiques officiels. Je peux m'attendre à une ruée partout au pays.
J'ai fait observer au sénateur Mercer un peu plus tôt qu'on semblait faire un premier pas vers la représentation proportionnelle, ce que les sénateurs de ce côté-ci favorisent, car nous pourrions alors mettre un terme à l'hégémonie qu'exerce le Parti libéral à la tête du Canada. Voilà la position du Parti conservateur. Je n'ai aucune idée de ce que les autres sénateurs pensent de cette question.
Cela dit, honorables sénateurs, je pense que le projet de loi C-3 n'est autre qu'une réaction primaire. On en vient presque à se demander pourquoi on tient à exiger qu'un parti soutienne un candidat aux élections. Au lieu de fixer un nombre de candidats moins élevé, plus raisonnable et justifiable, le gouvernement a privilégié une solution qui semble plus prudente pour se conformer à la décision de la Cour suprême et il a adopté la règle d'un candidat pour un parti.
(1440)
À mon avis, une limite d'un candidat, si l'on peut appeler cela une limite, n'est tout simplement pas assez élevée et elle risque de nuire au bon fonctionnement du système électoral. Il reste à voir si cette proposition peut faire ses preuves. La réponse deviendra peut-être évidente si les débats mettant en présence tous les candidats deviennent impossibles à cause de la prolifération des partis et si le bulletin de vote devient plus long qu'un bras. C'est peut-être ce que souhaite le Parti libéral. Est-ce ce qu'il souhaite au bout du compte l'absence de débat public?
Il est facile de prévoir les problèmes qui résulteront du projet de loi C-3. Malgré le nombre relativement important de nouvelles exigences administratives, y compris la nécessité d'avoir un candidat et un chef, au moins trois dirigeants, un agent principal, un vérificateur et une liste d'au moins 250 électeurs que l'on présente au directeur général des élections au moins tous les trois ans, ainsi que les diverses signatures et attestations à présenter, et j'en passe, les avantages financiers découlant de la formation d'un parti politique sont tels qu'il se pourrait que nous assistions à la création d'un grand nombre de nouveaux partis lors d'élections futures.
J'imagine très bien la création d'un parti «Sauvons notre école» qui serait formé pour attirer l'attention sur la fermeture imminente d'une école dans une circonscription particulière. Les parents pourraient faire front commun, présenter un candidat dont le seul objectif serait de garder ouverte l'école en question et d'obtenir des avantages fiscaux ainsi qu'un peu de publicité gratuite pendant leur campagne. Les honorables sénateurs se souviendront qu'aux termes des modifications récentes apportées au financement électoral, le financement sera maintenu même après les élections et même si l'école dont il était question dans le programme du parti n'existe plus.
Cela ne veut pas dire qu'un effort concerté pour attirer l'attention sur un problème est en principe condamnable. Cependant, la formation d'un parti politique fédéral devrait viser un objectif plus important et d'une plus vaste portée, dans l'intérêt des Canadiens.
Le projet de loi comporte une sorte de mesure de protection qui sert à réduire ou à éliminer les abus. En vertu du projet de loi C-3, le directeur général des élections a la responsabilité de porter des jugements sur la pertinence des programmes électoraux, sur les politiques mises de l'avant, sur la nature et la portée des activités du parti et sur la façon dont celui-ci utilise ses fonds. Cela soulève une série de questions complètement différentes, et je suis certain que le directeur général des élections exprimera certaines préoccupations au sujet du nouveau rôle de surveillance que lui réserve cette mesure législative à cet égard. J'imagine qu'il est emballé à la perspective d'avoir à s'occuper de ces questions. La prise de décisions dans ces secteurs peut fort bien remettre en question l'impartialité du Bureau du directeur général des élections, parce qu'il aura été amené à participer de plus près au processus en tant que tel, plutôt que de rester au-dessus de la mêlée en qualité d'administrateur impartial.
Qu'arriverait-il si le directeur général des élections décidait de ne pas reconnaître un groupe? Le groupe visé ferait-il appel à la Cour suprême pour faire renverser cette décision? Évidemment, c'est ce qui se passerait. Par conséquent, à cause de ce projet de loi et de cette définition, nous nous retrouvons encore à la case départ au sujet de la définition — c'est apparemment un processus sans fin. Autrement dit, il y aura d'autres mesures législatives et d'autres formalités juridiques, car nous semblons tout simplement incapables de traiter une question plus facilement qu'en créant une nouvelle mesure législative. Avec le projet de loi C-3, nous créons une autre série d'obstacles logistiques à franchir pour qu'une personne puisse, en dernier recours, faire appel aux tribunaux si sa demande est rejetée. Pourquoi procédons-nous ainsi sans prendre le temps nécessaire? On a exprimé le souhait que cela soit fait avant le 27 juin, et il y a eu amplement de temps pour demander aux tribunaux que la date soit reportée afin que ce projet de loi soit étudié plus à fond qu'il ne l'est à l'heure actuelle.
Le projet de loi C-3 impose aux partis politiques des exigences accrues qui ont déjà été adoptées au cours de la dernière session dans le projet de loi C-25. Ces exigences combinées peuvent suffire à dissuader la formation de partis ne comptant qu'un seul candidat ou quelques candidats. En toute franchise, je préfère que le gouvernement et le Parlement prennent une décision concrète en imposant un seuil raisonnable et en justifiant cette exigence, plutôt que de tenter de contourner la décision rendue par la Cour suprême du Canada au moyen d'obstacles bureaucratiques qui empêchent effectivement la formation d'un nouveau parti politique, comme cela semble être le cas. Regardez l'autre côté de la médaille. Dans le cas qui nous intéresse ici, les obstacles bureaucratiques sont tels qu'il devient plus difficile de former un parti politique légitime.
Je dirai, en terminant, que le projet de loi C-3 déborde de problèmes. Il est peut-être nécessaire et suffisant comme mesure intérimaire, étant donné les difficultés que posent les contraintes de temps qui nous sont maintenant imposées, mais je ne le considère pas comme une solution satisfaisante. Il me tarde de discuter en comité des questions soulevées, ici et ailleurs, par rapport à ce projet de loi. J'espère qu'on recommandera que ce projet de loi ne soit qu'une mesure intérimaire assujettie à une durée limitée et devant être remplacée par une mesure beaucoup plus efficace afin que les partis politiques légitimes puissent se constituer d'une manière raisonnable, à l'abri de ce genre d'obligations bureaucratiques.
Je suis toujours impressionné de voir à quel point nous pouvons rendre les choses beaucoup plus compliquées qu'elles ne doivent l'être. C'est ce que nous faisons dans ce cas et nous devrions nous demander pourquoi.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Une voix: Le vote!
Son Honneur la Présidente intérimaire: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)
RENVOI AU COMITÉ
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois?
(Sur la motion du sénateur Rompkey, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)
LA LOI SUR LE MARIAGE
LA LOI D'INTERPRÉTATION
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT
L'honorable Anne C. Cools propose: Que le projet de loi S-10, Loi modifiant la Loi sur le mariage (degrés prohibés) et la Loi d'interprétation afin de confirmer la définition du mot «mariage», soit lu pour la deuxième fois.—(L'honorable sénateur Cools).
— Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour parler du projet de loi S-10 qui est très court, mais dont le titre au long sera Loi concernant le droit interdisant le mariage entre personnes apparentées, s'il est adopté bien entendu, et dont le titre abrégé sera Loi sur le mariage. Pour les fins du présent débat, je parlerai simplement de la Loi sur le mariage.
Je sais que la plupart des sénateurs sont au courant de la situation sociale et politique actuelle dans ce pays en ce qui concerne les personnes homosexuelles qui veulent avoir accès à l'institution du mariage.
(1450)
Dans mon projet de loi, la définition du mariage précise essentiellement, comme il est énoncé dans l'article 1.1, que:
Le mariage est l'union légitime d'un homme et d'une femme, à l'exclusion de toute autre union, qui est:
a) soit célébrée conformément aux lois de la province où la cérémonie a lieu;
b) soit valide aux termes de la loi du pays étranger où la cérémonie a lieu si le mariage est également considéré valide au Canada aux termes du droit canadien.
Honorables sénateurs, je voudrais faire une brève rétrospective. Si les honorables sénateurs se reportaient à la transcription des délibérations du Sénat du 13 juin 2001 par exemple, ils verraient le discours que j'ai prononcé sur mon projet de loi de l'époque, dans lequel je faisais l'historique de la loi du mariage au Canada et au Royaume-Uni. J'aborderai aujourd'hui la question sous un angle légèrement différent et j'évoquerai certaines des assertions qui sont faites sur la question du mariage.
Je commencerai, honorables sénateurs, par citer le jugement rendu en 1999 par la Cour suprême du Canada dans l'affaire M c. H. Comme les honorables sénateurs le savent, dans cette affaire les contestations constitutionnelles visaient l'article 29 de la Loi sur le droit de la famille de l'Ontario et, en particulier, les dispositions portant sur la pension alimentaire. De toute évidence, cette contestation a été faite par des personnes et des couples homosexuels qui contestaient essentiellement la loi et réclamaient, à titre de conjoints de fait, le droit à la pension alimentaire.
Honorables sénateurs, cette contestation a eu une conséquence curieuse: ces couples ont été traités comme des conjoints. M et H étaient des femmes. Il est intéressant que je parle du mariage, car, jusque-là, le gouvernement, la ministre de la Justice d'alors, Anne McLellan, et l'ancien ministre de la Justice, Allan Rock, disaient que rien de tout cela ne s'appliquerait au mariage ni ne présentait de risque pour le mariage. Tout cela est très intéressant, en ce qui concerne ce couple homosexuel féminin. Il est très curieux que cette disposition particulière de la Loi sur le droit de la famille de l'Ontario ait été contestée. Ce qu'il y a d'intéressant, dans l'histoire de cette disposition au sujet de l'entretien entre conjoints de fait, c'est qu'elle a été adoptée pour protéger les enfants de conjoints de fait. Autrement dit, la disposition a été proposée comme moyen d'encourager les conjoints de fait à se marier et motivée par le fait que beaucoup de femmes vivant en union de fait avaient des enfants. Bien sûr, ce sont les femmes qui donnent naissance aux enfants. Le but du législateur était d'encourager les couples, hommes et femmes, à se marier, de promouvoir le mariage. C'est l'une des choses ahurissantes de la société d'aujourd'hui: tous les principes sont interprétés à contre-sens.
Le premier principe qui a été faussé, selon moi, c'est celui de la notion d'égalité. On en a déduit un droit à l'institution du mariage. Je suis profondément en désaccord.
Je voudrais aujourd'hui parler brièvement de ce que j'appelle les pulsions ou penchantss homoérotiques, mais permettez-moi au préalable de citer le jugement M c. H. Honorables sénateurs, à l'époque, le juge Charles Gonthier, de la Cour suprême du Canada, a exprimé fortement sa dissidence par rapport au jugement majoritaire, qui a été rédigé par le juge Frank Iacobucci. Le juge Gonthier s'est vigoureusement opposé au jugement parce que les thèses présentées et reconnues dans cette affaire allaient ouvrir la porte, de façon très délibérée, à une foule de réclamations sur divers types de relations, dont les relations polygames et bien d'autres. Bien des demandes sur les relations polygames se préparent aux États-Unis; j'ai lu des choses à ce sujet.
Pour justifier sa dissidence, le juge Gonthier, que nous connaissons tous, car nous l'avons rencontré bien des fois lors de réceptions dans les appartements de la présidence, a dit ceci à propos du paragraphe 155:
Manifestement, le présent pourvoi soulève des questions sociales et juridiques fondamentales. En fait, il n'est pas exagéré de dire qu'il constitue en quelque sorte un point tournant. [...] Cependant, je ne puis être d'accord avec eux sur le dispositif ni sur les motifs qui l'étayent. Je crois que la position prise par les juges majoritaires aujourd'hui aura des conséquences d'une portée considérable qui débordent le cadre du présent pourvoi. Les juges majoritaires affirment, au par. 135, qu'il n'est pas nécessaire de se demander si l'obligation constitutionnelle d'élargir la définition du mot «conjoint» pourrait ouvrir la porte à une série d'autres demandes, parce que cela relève «entièrement de la conjecture». Je ne puis être d'accord. La décision des juges majoritaires rend ces autres demandes non seulement prévisibles, mais très vraisemblables.
Le juge Gonthier était en désaccord avec la position adoptée par les juges majoritaires voulant que toute préoccupation quant à ce que l'avenir pourrait apporter à cet égard relevait entièrement de la conjecture. C'est très intéressant. L'opinion du juge Gonthier est très importante, et j'en ai d'ailleurs fait l'éloge à l'époque.
Plus loin, il s'élève encore contre le paragraphe 135 du juge Iacobucci dans lequel ce dernier disait:
Par conséquent, les arguments fondés sur l'extension possible de la définition du mot «conjoint» au-delà des circonstances de la présente affaire relèvent entièrement de la conjecture et ne peuvent justifier la violation des droits constitutionnels des couples de même sexe en l'espèce.
C'est très intéressant, parce qu'on constate maintenant que le juge Gonthier avait tout à fait raison. C'était en 1999. Je pourrais montrer aux sénateurs des lettres de la ministre de la Justice de l'époque, Anne McLellan, qui écrivait à des citoyens de partout au pays pour leur dire essentiellement qu'il ne fallait pas s'inquiéter que les tribunaux n'avaient pas à s'occuper du mariage et que le gouvernement offrait aux couples homosexuels les droits dont ils avaient besoin.
Ce que le juge Iacobucci et les juges majoritaires ont dit qu'ils n'avaient pas besoin d'étudier et qu'ils ont repoussé comme n'étant qu'une simple conjecture, et ce que le juge Gonthier a clairement établi en précisant où la décision majoritaire finirait par mener, est arrivé exactement comme il l'avait prévu.
Au cours des quelques derniers jours, je me suis souvenue du temps où j'étais travailleuse sociale. J'aimerais faire part aujourd'hui du cas d'un homme homosexuel du nom de Everett George Klippert. Je suis persuadée que la plupart des honorables sénateurs n'en ont jamais entendu parler. Il a été condamné sous plusieurs chefs de grossière indécence. J'ai lu cette cause parce que je m'intéressais à ce sujet et à ce genre d'erreur judiciaire.
(1500)
Lorsque je siégeais à la Commission nationale des libérations conditionnelles, j'ai eu l'occasion de lire moi-même ces dossiers. Je ne vais pas divulguer les informations qui y figurent. Ce que je souhaite faire, c'est attirer l'attention des sénateurs, aujourd'hui, sur l'arrêt Klippert de la Cour suprême. La condition et la situation éprouvante de M. Klippert ont constitué un des fondements de la dépénalisation des actes sexuels privés entre adultes consentants. Je me suis dit que le fait d'attirer votre attention là-dessus allait étoffer le compte rendu.
Le 21 décembre 1967, M. Trudeau, qui était alors ministre de la Justice, a fait la déclaration suivante dans un point de presse à la sortie de la Chambre des communes, qui a été rapportée dans le journal télévisé de Radio-Canada:
Prenez cette affaire d'homosexualité. Je crois que l'opinion que nous soutenons, dans ce cas, est que l'État n'a rien à faire dans la chambre à coucher des gens, et je crois que ce qui se fait en privé entre adultes ne concerne pas le Code criminel. Lorsque cela devient public, c'est une autre affaire...
Il existe différentes versions de cette déclaration, parce que c'était un point de presse. Selon une autre version, M. Trudeau aurait ajouté:
...ou lorsque cela concerne des mineurs, c'est une autre affaire...
Je voulais replacer cette question dans son contexte. Ce qui se passe maintenant, c'est que nous ne nous contentons pas d'accepter le principe que M. Trudeau a exposé — et je l'ai appuyé avec passion et zèle. Nous ne nous contentons pas d'avoir notre intimité dans la chambre à coucher et de faire modifier la loi pour qu'elle traduise l'idée que la loi ne devrait pas s'intéresser à ce qui se passe dans les chambres à coucher du pays. Les activistes ont créé un phénomène, une situation dans laquelle la notion initiale de vie privée a été renversée. Ce que nous observons maintenant, c'est que les chambres à coucher du pays ont une place dans l'État.
Honorables sénateurs, M. Trudeau n'a jamais eu, ne serait-ce qu'un instant, l'intention que sa Charte bien-aimée soit utilisée comme instrument ou outil dans ce contexte. À l'époque, M. Trudeau représentait, dans mon esprit, l'icône de la justice.
Deux ans après la déclaration de M. Trudeau et le jugement de la Cour suprême dans l'affaire Klippert, l'honorable John Turner, alors ministre de la Justice, a déclaré ce qui suit à la Chambre des communes, le 23 janvier 1969, à l'occasion de la deuxième lecture du projet de loi C-150, Loi de 1968-1969 modifiant le droit pénal:
Ces modifications enlèvent de l'empire de la loi certains actes sexuels commis dans l'intimité par des adultes consentants.
À cette époque, les adultes étaient des personnes âgées de 21 ans et plus. La modification proposée par M. Turner et le premier ministre Trudeau a été en partie motivée par la triste et terrible affaire d'Everett George Klippert et par le jugement, en 1967, de la Cour suprême dans l'affaire Everett George Klippert c. Sa Majesté la Reine. Klippert, âgé de 39 ans, était originaire de Pine Point, dans les Territoires du Nord-Ouest. Cet homosexuel vivait dans une petite collectivité et était connu de la police, qui lui rendait souvent visite.
Son casier judiciaire faisait état de 18 condamnations pour des accusations de nature semblable. En août 1965, M. Klippert a plaidé coupable à quatre chefs d'accusation d'actes de grossière indécence. Nous devons comprendre que la disposition, telle qu'elle était à l'époque, était rarement invoquée. Pour intenter une poursuite, l'une des parties à ces actes devait porter plainte. M. Klippert se livrait à de tels actes avec des adultes, mais à une occasion, malheureusement, un mineur lui a menti quant à son âge. Mais c'est là une autre histoire.
Nous devons comprendre, honorables sénateurs, que ces événements sont survenus à une époque où, après autant d'accusations, d'épisodes et d'affrontements avec le système judiciaire, un contrevenant semblable était déclaré «délinquant dangereux» en un clin d'œil. Ces dispositions ont été supprimées à l'initiative de MM. Turner et Trudeau.
En tout cas, en août 1965, M. Klippert a plaidé coupable à quatre chefs d'accusation de grossière indécence. Après sa condamnation, la Couronne, non encore satisfaite, a demandé qu'il soit déclaré «délinquant dangereux». C'est ce qu'a conclu le juge Sissons, qui l'a condamné à une peine de détention préventive.
Honorables sénateurs, la détention préventive est une lourde peine. Deux psychiatres ont témoigné que M. Klippert n'avait jamais fait de mal à personne et qu'il n'en ferait vraisemblablement jamais, mais qu'il commettrait vraisemblablement à nouveau la même infraction avec d'autres adultes consentants de sexe masculin. Bref, M. Klippert était un homosexuel et le demeurerait sans doute. Le juge Sissons a déclaré que Klippert était un «délinquant dangereux» parce qu'il était un homosexuel actif.
L'appel que M. Klippert interjeta auprès de la Cour d'appel des Territoires du Nord-Ouest fut rejeté. M. Klippert en appela à la Cour suprême du Canada, qui le débouta aussi. C'est la cause et le jugement qui ont suscité la prise de mesures pour modifier le droit pénal.
Honorables sénateurs, si je sais cela, c'est que j'ai eu la chance de rencontrer celui qui a mené l'étude pour le compte du Bureau du Conseil privé.
Curieusement, dans le jugement de la Cour suprême, il y avait deux juges dissidents, soit le juge en chef J. Cartwright et le juge Emmett Hall, qui ont fait savoir qu'ils auraient autorisé l'appel. Résultat, honorables sénateurs, la loi a été modifiée. On a modifié le Code criminel en s'inspirant de leur jugement dissident. Le juge en chef Cartwright a fourni leurs raisons par écrit, et elles ont motivé en partie la décision politique du gouvernement de décriminaliser les actes sexuels homosexuels entre adultes consentants. Expliquant que M. Klippert n'était ni violent ni dangereux pour personne et qu'il n'avait eu des relations sexuelles qu'avec des adultes consentants — rappelons-nous qu'il s'agissait de la déclaration de délinquant sexuel dangereux — le juge en chef Cartwright a écrit:
Je me réjouis d'en arriver à cette conclusion. C'est avec réticence et regret que je me serais vu dans l'obligation d'imputer au Parlement l'intention de faire que l'expression «délinquant sexuel dangereux» s'applique à un délinquant sexuel qui n'est pas dangereux. [...] Je trouve peu probable que le Parlement ait voulu un tel résultat.
Cette loi n'a pas annulé la peine de M. Klippert. Toutefois, faisant preuve de clémence à son égard, les autorités lui ont accordé une libération conditionnelle deux ans plus tard, en 1971.
Comme je l'ai déjà dit, honorables sénateurs, quand je siégeais à la Commission nationale des libérations conditionnelles, j'ai étudié ce dossier au complet.
Honorables sénateurs, je voudrais revenir à la genèse des modifications apportées au Code criminel. M. Martin parle du déficit démocratique. Eh bien, je pourrais également dire qu'il y a un «déficit de la justice» ou un «déficit moral». Je vais maintenant donner un exemple concret de la pensée sous-jacente aux mesures visant à décriminaliser les actes sexuels entre adultes consentants. Je vais maintenant m'éloigner de ce que je considérerais être le cadre intellectuel ou conceptuel de l'examen a posteriori du droit criminel.
(1510)
Honorable sénateurs, M. Turner, de même que M. Trudeau et la majorité des gens de l'époque, se sont intéressés de près à un rapport qui a été publié en Angleterre en 1957. Il était intitulé «Report of the Committee on Homosexuality Offenses and Prostitution» (Rapport du Comité sur les infractions homosexuelles et la prostitution). Sir John Wolfenden présidait ce comité. Le rapport porte encore son nom. Le rapport Wolfenden est excellent et il faut absolument le lire.
Le ministre de la Justice, John Turner, lorsqu'il a présenté l'amendement au Code criminel le 23 janvier 1969, a cité ce rapport dans son discours de deuxième lecture du projet de loi C-150. Il a dit ce qui suit — en citant directement le rapport Wolfenden. Bien entendu, mon style, ma technique, consiste à citer la source originale car, honorables sénateurs, vous seriez étonnés du nombre de fautes qui sont faites chaque jour. M. Turner dit ce qui suit, reprenant le rapport Wolfenden:
À moins que la société ne n'efforce délibérément, par l'intermédiaire de la loi, d'établir un parallèle entre le crime et le péché, il restera le domaine de la moralité ou de l'immoralité privée qui, disons-le crûment, ne regarde pas la loi. Ce n'est pas excuser ou encourager l'immoralité privée. Au contraire, souligner la nature personnelle et privée de la conduite morale ou immorale, c'est mettre en relief la responsabilité personnelle et privée de l'individu à l'égard de ses propres actions, responsabilité qu'une personne mûre peut porter, sans crainte d'être punie par la loi.
Honorables sénateurs, cela est vraiment important car nous avons vu les fondements pragmatiques, intellectuels et juridiques de ce changement survenu en 1969. Comme le savent les honorables sénateurs, nous tenons ici beaucoup de débats, mais il est rare que des documents de ce genre soient repris ici. Cependant, compte tenu de mon âme d'antiquaire, j'adore les déterrer, surtout que j'ai passé ma vie à les lire et à les étudier.
Honorables sénateurs, je ne comprends pas comment la loi et la situation sociale actuelle ne tiennent plus compte de la notion que la loi ne doit pas intervenir dans la vie sexuelle des gens, que ce soit pour la condamner ou la censurer. Si le principe, c'est que la loi ne doit pas intervenir, je ne comprends pas comment nous sommes passés du principe de non-intervention au principe actuel où la loi doit au contraire intervenir non seulement en ne condamnant pas une forme de vie sexuelle, mais en l'approuvant. C'est de cela qu'il s'agit dans tout ce phénomène du mariage et des prétentions de certaines personnes homoérotiques selon lesquelles l'interdiction qui leur est faite de se marier constitue une violation de leur dignité.
Honorables sénateurs, le mariage n'est pas et n'a jamais été un droit. Le mariage a toujours été un grand privilège relevant de la prérogative de Sa Majesté. Voilà ce qui est curieux avec le mariage et le divorce. Deux personnes ne peuvent se marier ou divorcer elles- mêmes. C'est cela qui est intéressant. L'autre partie, c'est Sa Majesté dans les deux cas. Sa Majesté est la seconde partie dans tous les mariages et tous les divorces. Le problème avec le mariage, c'est qu'une fois qu'il a été prononcé, par un ministre du culte en général, les parties ne peuvent rien faire elles-mêmes pour y mettre fin. Elles doivent faire appel à Sa Majesté. Le mariage est une institution sociale unique et très importante.
Honorables sénateurs, j'aimerais citer certains poètes qui ont parlé de leur homosexualité. Lorsque l'intellect ne me fournit pas de réponses, je trouve souvent utile de me tourner vers les muses, vers les poètes et vers les dramaturges parce qu'ils cristallisent les mots de façon poignante et profonde.
Je citerai d'abord Jean Genet. Pour ceux d'entre vous qui l'auraient oublié, il fut un grand romancier et un grand dramaturge français. Ses pièces s'inscrivent dans le courant littéraire du théâtre de l'absurde et expriment un état d'esprit propre à la période de l'après-Deuxième Guerre mondiale.
Jean Genet a vécu une vie très difficile. Il était orphelin et voleur. Il a passé presque toute sa jeunesse en prison. Découvert par Jean- Paul Sartre, il devint un homme de lettres français. Je trouve intéressant que la pièce qui a attiré l'attention de l'Amérique du Nord s'intitule Les Nègres. Cette pièce fut très célèbre à l'époque.
Edmund White, un écrivain homosexuel, a écrit et publié, en 1993, une biographie de Jean Genet intitulée Jean Genet. Dans cet ouvrage, il rapporte une entrevue accordée par Jean Genet à Madeleine Gobeil en 1964. Edmund White cite Genet:
La pédérastie m'a été imposée comme la couleur de mes yeux, le nombre de mes pieds. Tout gosse, j'ai eu conscience de l'attraction qu'exerçaient sur moi d'autres garçons, je n'ai jamais connu l'attraction des femmes. C'est seulement après avoir pris conscience de cette attraction que j'ai «décidé», «choisi» librement ma pédérastie, au sens sartrien du mot. Autrement dit et plus simplement, il a fallu que je m'en accommode tout en sachant qu'elle était réprouvée par la société.
Honorables sénateurs, plus loin dans sa biographie de Genet, M. White reproduit une lettre non datée de Jean Genet à Jean-Paul Sartre.
(1520)
Dans cette lettre, Genet parle de son homosexualité car il avait engagé un débat intellectuel avec Jean-Paul Sartre sur ce phénomène. Ce passage est très troublant et très bien écrit. Il décrit les tourments que vivait Jean Genet. Genet, cité par White dans cette biographie, écrit ceci:
En tout cas la signification de l'homosexualité c'est celle-ci: un refus de continuer le monde. Ensuite, altérer la sexualité. L'enfant ou l'adolescent qui refuse le monde et se tourne vers son sexe, sachant qu'il est lui-même un homme, par ressentiment contre cette virilité inutilisable va tenter de l'irréaliser, de l'altérer: Il n'y a qu'un moyen, c'est de la pervertir par un comportement pseudo-féminin. Voilà le sens des gestes, des instincts féminins, des travestis. Ce n'est pas, comme on le croit, la nostalgie de l'idée de la femme qu'il aurait pu être qui féminise, c'est le souci amer de railler la virilité...
Signification de l'amour pédérastique: C'est la possession d'un objet (l'aimé) qui n'aura d'autre destin que le destin de l'amant. L'aimé devient l'objet chargé de «représenter» la mort (l'amant) dans la vie. C'est pourquoi je le veux beau. Il a les attributs visibles, quand moi je vis mort. Je le charge de vivre à ma place, apparent. L'aimé ne fait pas que m'aimer, il me «reproduit», mais de cette façon je le stérilise, je le coupe de son destin.
Vous le voyez, ce n'est pas tellement en termes de sexualité que je vous explique la pédale, mais en termes de vie et de mort...
Quant à l'apparition, à certains moments, dans la vie d'un homme normal de la pédérastie, c'est provoqué par une brusque (ou lente) chute vitale. Une fatigue, une peur de vivre: un refus soudain de la responsabilité de vivre.
Honorables sénateurs, Genet contredit la notion voulant que le style de vie homosexuel soit gai. Il dit, en termes très poignants, que c'est un style de mort. J'étais très bien renseignée sur Genet; c'était une idole, mais aujourd'hui beaucoup de gens ont oublié qui il était. Les jeunes ne semblent pas le connaître, mais à son époque, il était parmi les dramaturges les plus célèbres.
Il y a un autre dramaturge. À une époque, je m'intéressais beaucoup à Tennessee Williams et je lisais, entre autres, Un tramway nommé Désir, Le train de l'aube ne s'arrête plus ici. Je veux citer un extrait de la pièce Le confessionnal, écrite en 1970 par Tennessee Williams. Cette pièce traite de l'homosexualité. Les personnages sont un jeune homme, un garçon et d'autres. Ils ne semblent pas avoir de nom. À propos de certaines pratiques homosexuelles, voici ce que Tennessee Williams a écrit dans sa pièce. Le jeune homme dit:
La plupart des expériences homosexuelles sont d'une grossièreté, d'une grossièreté mortelle. Elles sont rapides, cruelles et brutales, et la façon de faire est presque toujours la même. Leur acte d'amour ressemble au pincement d'une aiguille hypodermique à laquelle ils s'accrochent, mais qui perd de plus en plus son intérêt véritable et son effet de surprise.
Honorables sénateurs, à une certaine époque de ma vie, beaucoup de mes amis faisaient du théâtre. J'ai connu beaucoup de dramaturges et d'auteurs. Nous devrions nous pencher sur ces enseignements et essayer d'en comprendre le sens. Il est important de consacrer une période de sa vie à essayer de comprendre la signification des choses. Bon nombre de personnes homosexuelles comptaient parmi mes amis les plus chers. J'aurais presque envie de rendre hommage à l'un d'eux. Il est décédé du sida, mais il était l'un de mes partisans les plus acharnés lorsque j'étais candidate dans Rosedale, et son départ a été une grande perte.
Honorables sénateurs, je donne aujourd'hui la parole aux personnes homosexuelles. Je parlerai du débat qui a cours dans ce pays entre les personnes homosexuelles sur la question du mariage et des contestations judiciaires. Fait intéressant, aucune information ne nous a été communiquée à ce sujet. Nous n'avons jamais tenu de débat sur la question. On ne nous a jamais parlé des besoins des personnes homosexuelles au sujet du mariage. Nous connaissons le point de vue des activistes, mais pas celui des gens ordinaires. La plupart d'entre eux vivent leur vie de tous les jours de façon très ordinaire sans se préoccuper beaucoup de ces questions. Nous l'oublions souvent.
Permettez-moi de parler du débat qui a cours au Canada sur cette question. Je citerai tout d'abord un article paru dans la revue Xtra West, qui est la version, dans l'Ouest, d'un important journal homosexuel, qui se présente parfois comme la voix de la communauté homosexuelle.
Dans un article intitulé «Non, non et non au droit au mariage», paru dans le numéro du 16 septembre 2001 d'Xtra West, l'éditeur en chef, Gareth Kirby, écrit:
J'espère qu'ils perdront la bataille juridique pour l'obtention du droit au mariage.
Là! Je l'ai dit, et je suis heureux de m'être vidé le coeur.
J'espère, j'espère profondément, que les gais et lesbiennes ne seront jamais autorisés au Canada à se marier comme le font les hétérosexuels. Je ne voudrais même pas avoir la possibilité de le faire. Je ne veux pas que vous ayez la possibilité de le faire. Je ne veux pas que ces couples qui ont porté la question devant la Cour suprême du Canada aient gain de cause et puissent se marier.
Non pas parce que ce ne sont pas de bonnes personnes. Non pas parce que je n'admire pas leur courage et leur détermination à défendre ce en quoi elles croient. Je crois cependant que leur argument est faux, contraire à ce que notre mouvement a toujours représenté et que leur démarche causera un préjudice permanent à la culture gaie.
Au cours de l'année qui s'est écoulée, ce journal a fréquemment publié des arguments représentant le point de vue des deux camps sur la question du mariage homosexuel. Dans les derniers numéros, des homosexuels locaux, dont Jane Rule, idole et auteure, se sont clairement prononcés contre la reconnaissance du droit des homosexuels au mariage. Et c'est là, très chers lecteurs, la raison principale pour laquelle j'espère que Egale et les plaideurs homosexuels perdront leur cause: parce que c'est une question de culture.
Dans notre culture, nous n'avons pas créé la même hiérarchie que chez les hétérosexuels. Nous savons que l'amour a de nombreux visages, de nombreux noms, de nombreux âges, qu'il y a de nombreux endroits pour [...], de nombreuses positions pour [...], et cetera.
Nous savons qu'une relation d'une durée de 30 ans n'est pas meilleure qu'une aventure de neuf semaines ou de neuf minutes — elle est différente, mais elle n'est pas meilleure. Les deux types de relation ont une valeur. Nous savons que l'intimité immédiate qui caractérise une merveilleuse fellation de 20 minutes dans le parc Stanley peut être une expérience profonde. Nous savons que, lorsque les partenaires vivent séparés l'un de l'autre, une relation d'une durée de deux ans est incontestablement aussi belle qu'une relation de 30 ans dont les partenaires vivent ensemble. Nous savons que les gens qui sont dans une relation libre peuvent s'aimer mutuellement autant que ceux qui sont dans une relation fondée sur l'exclusivité.
Nous savons qu'il est parfois préférable qu'une relation prenne fin, que c'est extrêmement triste de renoncer à l'amour qu'on a investi dans une relation, et que d'anciens amants peuvent devenir de grands amis. Nous savons que l'on peut devenir plus proche de notre meilleur ami que de l'amant que nous avons depuis 30 ans et qu'on peut lui dire des choses que l'on ne dirait jamais à notre partenaire de vie.
Toutes ces situations font partie du spectre de l'amour. L'amour, dans la culture gaie, c'est un spectre et non une hiérarchie. Telle est notre culture.
Dans la culture hétérosexuelle, l'amour est souvent coincé dans une structure hiérarchique. La cérémonie, le document, la reconnaissance officielle, les avantages fiscaux, les coûts élevés liés à la rupture — tous ces éléments visent à créer une aura autour du mariage qui laisse entendre que cette option est meilleure que les autres.
Le mariage appartient à la culture hétérosexuelle et nous devrions respecter cela. C'est une cérémonie qui vise à unir une femme et un homme (bien que je dirais que le mariage place essentiellement la femme dans une position d'asservissement).
Ce n'est évidemment pas que le mariage fonctionne bien. C'est une institution moralement corrompue...
On prône l'honnêteté mais on vit dans la luxure, avec le résultat que, au bout de quelques années, les gens ont presque toujours des relations sexuelles avec d'autres personnes. Une récente étude sur la santé, financée par le gouvernement fédéral et visant les gais de Vancouver, a révélé que seulement 2 p. 100 d'entre eux étaient dans des relations à long terme.
(1530)
C'est le pourcentage qu'on entend souvent au sujet des relations à long terme, 2 p. 100 ou 1 p. 100.
Une étude semblable réalisée à l'égard des hétérosexuels aurait sûrement révélé un pourcentage de relations à long terme d'environ 80 p. 100 ou plus...
Il est certain que les gais entretiennent des relations fondées sur l'amour. Celles-ci sont toutefois différentes des relations matrimoniales que de nombreux hétérosexuels entretiennent. Nous devrions célébrer cette différence au lieu de faire semblant d'être comme les hétérosexuels.
Au lieu de demander aux tribunaux et au gouvernement de nous emprisonner dans le même carcan dans lequel se trouvent de nombreux hétérosexuels, il vaudrait mieux que nous remarquions les très nombreux hétérosexuels qui apprennent de notre culture, qui rejettent le mariage et qui divorcent...
Les avocats et les politiciens de notre communauté se sont déchaînés dans ce dossier. Il faut les contenir. Personnellement, je ne verserai pas un cent pour faire reconnaître le mariage gai. Le fait que le gouvernement provincial néo-démocrate appuie la reconnaissance du mariage gai ne m'aidera pas à décider pour qui voter lors des prochaines élections. Et j'exhorte les politiciens et les juges de notre pays à ne pas écouter ces gens. Ils ne sont pas représentatifs du genre de relations que nous entretenons. Ils sont déconnectés de l'essence même de notre mouvement — la liberté, pas l'égalité. Nous voulons bâtir un monde meilleur, pas négocier un traitement égal dans le même monde. Nous voulons des relations fondées sur l'amour, pas des relations hiérarchisées.
Honorables sénateurs, ce sont là les paroles de l'éditeur en chef, M. Gareth Kirby.
Le 5 avril 2001, dans le journal Xtra, Tom Yeung a écrit un article au sujet de Jane Rule. Jane Rule est un autre symbole au Canada. Cet article à son sujet s'intitulait: «L'anarchie comme mode de vie: Jane Rule refuse de demander les prestations de survivant». Tom Yeung a écrit au sujet de l'article qu'elle a signé dans le numéro du printemps de BC Bookworld et qui s'intitulait: «La prison hétérosexuelle de la vie de couple». Il explique que Jane Rule y décrit le mariage et les droits reconnus par la common law comme «la prison hétérosexuelle de la vie de couple». Tom Yeung cite Jane Rule:
Au long des années, à partir du moment où nous avons pu vivre sans être assujettis à la loi, nombre d'entre nous ont appris à devenir responsables de nous-mêmes et des autres, pour le meilleur et pour le pire, dans la maladie ou la santé, sans être limités par les contraintes ou le modèle du mariage, mais par des particularités ou des groupements de notre propre invention.
Être obligé de retourner à la cage hétérosexuelle de la vie en couple, ce n'est pas un pas en avant mais un pas en arrière, vers une définition des rapports imposée par l'État. Étant donné tout ce que nous avons appris, nous devrions aider nos frères et sœurs hétérosexuels à se libérer de leur prison étatique, non pas nous porter volontaires pour les y rejoindre.
Yeung poursuit:
Dans sa chronique, Rule critique également les activistes — comme Egale Canada et le député Svend Robinson, de la Colombie-Britannique — qui soutenaient la lutte en faveur du mariage homosexuel.
Yeung cite encore Rule en ces termes:
«Je crois vraiment que, lorsque des organisations et des personnes publiques comme Svend interviennent dans ce domaine, ils sont considérés comme des leaders et je suppose qu'ils sont influents», dit Rule. «S'ils disent que cette question est importante, les gens qui n'ont pas d'opinion, ou qui n'ont pas beaucoup réfléchi à la question, ou qui n'ont pas vécu assez longtemps pour se faire une idée, accordent à cela plus d'attention qu'ils ne le devraient.»
Jane Rule est l'auteur de Desert Of The Heart, qui a été porté à l'écran par Hollywood, de The Young In One Another's Arms et de Against The Season, et elle a ouvert la voie, en tant qu'auteure, en abordant des questions lesbiennes depuis les années 1960 et 1970.
Enfin, à cette étape de mon intervention, honorablessénateurs, j'aimerais citer un autre article, paru dans un numéro du 6 septembre 2001 du journal Xtra.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Je suis désolée, honorable sénateur Cools, mais votre temps de parole est écoulé.
Le sénateur Cools: Puis-je terminer cette réflexion, honorables sénateurs?
Son Honneur la Présidente intérimaire: La permission est-elle accordée ?
Une voix: Non.
Le sénateur Cools: Cela m'est égal. Je m'y attendais, et je vois que le sénateur Robichaud est toujours prêt à...
Son Honneur la Présidente intérimaire: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud: Honorables sénateurs, j'aimerais faire un rappel au Règlement. Il va à l'encontre des pratiques de cette Chambre de faire allusion à un sénateur, surtout en ce moment, et de lui prêter de fausses intentions. Par conséquent, je prierais l'honorable sénateur Cools de retirer ses propos.
[Traduction]
Le sénateur Cools: Il n'y a rien de faux, honorables sénateurs. Si vous consultez le compte rendu de nos délibérations, vous constaterez que le sénateur Robichaud s'en prend souvent à moi. En fait, j'ai examiné les comptes rendus pas plus tard qu'hier soir et j'ai relevé quatre exemples dans les dernières semaines.
Non, écoutez, j'ai été élevée par une mère méthodiste. Je m'excuse.
(Sur la motion du sénateur Banks, le débat est ajourné.)
LE CODE CRIMINEL
PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE—MOTION D'AMENDEMENT—REPORT DU VOTE
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l'honorable sénateur LaPierre, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-250, Loi modifiant le Code criminel (propagande haineuse);
Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur St. Germain, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Stratton, que le projet de loi ne soit pas maintenant lu pour la troisième fois, mais qu'il soit modifié, à la page 1, à l'article 1, par substitution, aux lignes 9 et 10, de ce qui suit:
«religion, l'origine ethnique ou le sexe.».
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je suis heureuse d'avoir l'occasion de traiter de l'amendement du sénateur St. Germain.
Honorables sénateurs, aujourd'hui, dans le cadre du débat sur le projet de loi C-250, j'ai pensé adopter une approche différente en partageant avec mes collègues quelques déclarations intéressantes faites notamment devant le comité du Sénat chargé d'étudier le projet de loi C-250. Je voudrais commencer en citant les propos d'un témoin, Mme Dawn Stefanowicz. Son témoignage est éloquent. Elle a dit ceci:
Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole. Je m'appelle Dawn Stefanowicz. Je suis mariée et j'ai deux enfants. J'ai grandi à Toronto durant les années 1960 et 1970, avec un père homosexuel que j'aimais profondément. Mon père est mort du sida, comme un bon nombre de ses partenaires.
Honorables sénateurs, je précise que je lis un extrait des délibérations du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, fascicule 4, page 4:45, au cas où d'autres voudraient le consulter. La dame poursuit:
J'ai vécu avec mon père homosexuel dans un environnement hautement sexualisé. Ma mère et mes deux frères et moi vivions dans cet environnement. J'ai été exposée très tôt à des expériences sexuelles inappropriées, dont la pornographie, les drogues, l'alcool et des actes sexuels indécents. J'ai été témoin du recrutement de mineurs, de voyeurisme, d'exhibitionnisme, de sadomasochisme, de fétichisme et de sexualité en groupe — mon père avec 12 hommes, par exemple. J'ai été exposée à un langage sexuellement explicite. Quand j'avais huit ans, deux des partenaires sexuels de mon père se sont suicidés après que mon père les ait trahis.
Honorables sénateurs, je dois vous dire que cette femme est très gentille, aimable et douce. C'est un témoignage de grande valeur, car elle parle de son enfance et de sa vie dans cette famille. Elle est très sensibilisée.
Les honorables sénateurs doivent se rappeler que j'ai conseillé de nombreuses personnes. J'ai travaillé énormément avec les familles, notamment pour régler des problèmes.
Dawn Stefanowicz poursuit, à la page 4:46:
Ma vie était typique de celles des enfants dans les sous- cultures GLBT. Ce ne sont pas des environnements appropriés pour des enfants. Ce sont des expériences qui m'ont affectée profondément et qui m'ont dérobé mon innocence, ma conscience, ainsi que la capacité à trouver ma voix. Je ne pouvais exprimer mon opposition au style de vie de mon père homosexuel. Aucun de nous n'en était capable.
J'ai connu, pour les avoir vécus, la dissimulation, le délaissement, l'abandon, la manipulation, les sévices et le stress d'une enfance auprès d'un père homosexuel dont les obsessions sexuelles et les compulsions pressantes nous laissaient sans protection, mes frères et moi.
(1540)
Monsieur le président, honorables sénateurs, arrêtez le projet de loi C-250, car il me privera en tant qu'enfant ayant vécu cette situation, de la liberté de parole et d'expression. Je ne pourrai manifester mon opposition à certains comportements sexuels, à une certaine diversité sexuelle et diversité familiale. Je me préoccupe des générations d'enfants qui sont et qui seront exposés à la diversité sexuelle GLBT et à la diversité familiale.
Tous les êtres humains sont créés égaux, mais tous les comportements sexuels ne sont pas égaux. Ce type de comportement sexuel et de mode de vie ne créent pas des environnements sains et sûrs pour des enfants. Si vous adoptez le projet de loi C-250, je ne pourrai pas m'opposer aux nombreuses pratiques sexuelles homosexuelles dangereuses, risquées et mauvaises pour la santé, comme la sodomie, le sexe oral anal, le sadomasochisme et d'autres, ni à leurs conséquences pour la société.
Si vous adoptez le projet de loi C-250, je craindrai d'être poursuivie si je parlais des répercussions nocives et des graves ramifications des pratiques sexuelles homosexuelles. C'est pour cela que je suis contre le projet de loi C-250.
Honorables sénateurs, elle poursuit et dit, par exemple:
Le projet de loi C-250 exclura toutes objections morales et tout préjudice en vertu de l'orientation sexuelle. Sous le couvert du terme non défini d'«orientation sexuelle», le projet de loi protégera des personnes qui pratiquent la pansexualité, les mettant à l'abri de toutes critiques individuelles ou publiques.
C'est intéressant. Elle affirme que le projet de loi C-250 va nuire à l'expression d'opinions morales sur ces questions. En d'autres termes, elle fait allusion à toute opinion selon laquelle certaines pratiques sexuelles sont scandaleuses ou immorales ou encore que des comportements, comme la sodomie ou l'anilingus, sont dangereux et mauvais pour la santé.
Elle continue:
Les partisans du projet de loi C-250 ne définiront pas le terme «orientation sexuelle», disant qu'on l'utilise sans définition dans le droit canadien depuis des années, ce qui est exact. En l'absence de définition, le terme pourra recouvrir toutes les orientations sexuelles. L'orientation sexuelle est un concept fluide, en constante évolution, une pente glissante qui recouvre diverses pratiques pansexuelles légales ou illégales, dans la sphère privée ou publique. D'autre part, nous légitimons des comportements sexuels nocifs et dangereux. La reconnaissance sociale accordée aux GLBT n'est pas une excuse pour ajouter l'orientation sexuelle aux articles du Code criminel portant sur le génocide. Cet ajout ne réduira pas les crimes haineux.
Il est intéressant de noter, honorables sénateurs, qu'elle a déclaré plus tard, durant la période des questions et réponses, tel qu'on peut le lire à la page 4:62:
Je ne déteste absolument pas les gais, les lesbiennes, les bisexuels, les transgenres ou les transsexués. Lorsque j'étais jeune j'ai appris à faire preuve d'ouverture d'esprit, à accepter véritablement et à tolérer différents genres de personnes.
Elle continue ensuite de parler de son père. Dans un autre paragraphe, elle déclare:
Nous entendons un point de vue. C'est un point de vue politique. C'est un petit groupe qui se forme et s'organise. Il ne parle pas au nom des enfants et il ne parle pas au nom de tous les gais, lesbiennes et bisexuels.
J'ai lu très attentivement ce dossier. Les honorables sénateurs se souviendront que j'ai fait beaucoup de travail avec de nombreuses personnes homosexuelles et que j'ai des amis très chers qui sont homosexuels.
J'ai trouvé très touchant le témoignage de Dawn Stefanowicz et d'entendre parler d'enfants élevés dans de telles circonstances.
Honorables sénateurs, j'aimerais proposer un amendement. Cet amendement me vient de mon expérience dans le domaine du travail social et du fait que je comprends très bien les dommages émotifs et psychologiques causés aux êtres humains ainsi que, trop souvent, la maltraitance que l'incompétence mentale entraîne.
MOTION D'AMENDEMENT
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je propose, appuyée par le sénateur St. Germain:
Que la motion d'amendement soit modifiée par adjonction, avant les mots «l'origine ethnique», des mots «une déficience mentale ou physique,».
Honorables sénateurs, je me suis toujours intéressée à la situation des personnes handicapées et atteintes de maladies mentales. Je comprends, par exemple, que pendant la Seconde Guerre mondiale, l'Allemagne hitlérienne a fait de nombreuses tentatives pour exterminer les personnes considérées comme physiquement ou mentalement déficientes. Hitler avait même planifié de produire un modèle spectaculaire de femme germanique en vue de créer la race parfaite et supérieure.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
L'honorable Lowell Murray: Comme les honorables sénateurs le savent certainement, une motion est inscrite à mon nom au Feuilleton concernant la procédure à suivre pour ce projet de loi. Je parlerai de cette motion lorsqu'elle sera appelée. Entre-temps, le sous-amendement que vient de proposer notre amie madame le sénateur Cools me donne l'occasion d'intervenir dans le débat sur le projet de loi proprement dit.
Nous examinons un amendement proposé il y a un certain temps par le sénateur St. Germain qui a exprimé assez clairement son opposition au principe du projet de loi, précisant qu'il se prononcerait contre de toute façon.
Trois sous-amendements successifs ont fait suite à cet amendement et j'estime juste de souligner que tous les trois ont été proposés par des honorables sénateurs qui sont clairement opposés au principe de cette mesure législative. Chaque sous- amendement a fait l'objet d'un débat et d'une demande de vote par assis et levé. Avec la collaboration du whip en chef de l'opposition, le vote par assis et levé a été reporté à la prochaine séance.
Les honorables sénateurs doivent savoir exactement où nous nous situons et où nous nous dirigeons par rapport à ce projet de loi.
(1550)
Cette situation peut durer très longtemps et elle aurait pour résultat — certainement voulu — que le projet de loi ne reviendrait pas au Sénat pour que nous puissions en terminer l'étude dans un délai raisonnable. Quand je parle de délai raisonnable, je fais évidemment allusion à la possibilité, voire à la probabilité d'une dissolution assez rapide du Parlement.
C'est, à mon avis, la stratégie à laquelle nous sommes confrontés. J'en dirai davantage à ce sujet et au sujet de la solution que je propose lorsque je prendrai la parole sur ma motion.
Je tiens cependant à dire — et je m'adresse ici à mes collègues de l'ancien Parti progressiste-conservateur — que la stratégie à laquelle je fais référence ne pourra être efficace qu'avec leur collaboration. Cette stratégie oblige notamment notre confrère, le whip en chef de l'opposition, à retarder de jour en jour le vote sur les sous- amendements qui seront présentés.
Le sénateur Stratton a sa propre opinion du projet de loi. Nous le savons tous. Il l'a clairement expliquée. Je le respecte et je respecte son point de vue. Toutefois, dans un cas semblable, c'est-à-dire celui d'un projet de loi d'initiative parlementaire ou de tout autre genre de projet de loi, d'ailleurs, le whip ne peut agir de façon indépendante dans le processus parlementaire. Il fait partie de la direction de l'opposition. Il est l'une des deux personnes Qui, au Sénat, sont autorisées à reporter la tenue des votes. Je dirai simplement à mes collègues qu'ils devront assumer la pleine responsabilité de ce que deviendra le projet de loi.
Pour ce qui est du fond du projet de loi, je suis le premier à reconnaître que des arguments, fondés sur des principes, ont été et peuvent être invoqués à l'encontre de tout projet de loi concernant la propagande haineuse. La plupart de ces arguments ont été débattus à fond dans les années 1960 avant l'entrée en vigueur des dispositions actuelles du Code criminel. Ces objections tournent souvent autour de la question de la liberté d'expression, et de l'opportunité d'autoriser cette expression, quelque préjudiciable, erronée ou bizarre qu'elle puisse être, au lieu de limiter de quelque façon que ce soit la liberté d'expression.
Le principal argument invoqué contre la mesure législative sur la propagande haineuse tournait également autour de la question de savoir si les dispositions du Code criminel n'étaient pas suffisantes telles qu'elles existaient alors, sans avoir à adopter de nouvelles dispositions.
Comme je le disais, ces objections ont été étudiées de près dans les années 1960, je m'en souviens. Le Parlement, dans sa sagesse, a décidé en 1970 que, tout bien considéré, il devrait y avoir, dans le Code criminel, des dispositions interdisant l'incitation au génocide, à la violence ou à la haine fondée sur la couleur, la race, la religion ou l'origine ethnique. On s'est rendu à ces arguments. Nous avons maintenant, dans le Code criminel, des dispositions qui interdisent la propagande haineuse contre les groupes que j'ai mentionnés.
La question qui se pose à nous est de savoir s'il existe une raison valable pour ne pas inclure l'orientation sexuelle dans cette loi. Il n'y en a aucune. Nous parlons des homosexuels. Nous ne parlons pas des crimes que sont la pédophilie, la polygamie, la bestialité ou autre. Nous parlons des homosexuels. Nous savons de qui nous parlons. Pendant des siècles, les homosexuels ont été l'objet des persécutions les plus féroces.
J'ai trouvé que l'un des moments les plus révélateurs du débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi a été celui où deux de nos collègues, qui ont une connaissance plus directe et plus personnelle des horreurs de l'Holocauste, ont appuyé le projet de loi. L'un d'eux nous a rappelé que les homosexuels avaient été voués à l'extermination par les nazis.
La question que je me pose n'est pas tant de savoir si nous devrions inclure la protection contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, mais plutôt pourquoi nous avons mis si longtemps à y songer.
Honorables sénateurs, je retracerai plus tard l'histoire législative du projet de loi, mais pour le moment je voudrais revenir sur une chose qu'a dite madame le sénateur Cools juste avant de proposer son sous-amendement, quand elle a rapporté les propos tenus par une personne qui a comparu devant le comité et qui prétendait qu'elle ne pourrait plus dénoncer l'immoralité de certaines pratiques sexuelles.
Je dirais, ayant moi-même reçu de nombreuses communications au sujet du projet de loi, comme vous tous j'en suis sûr, que je trouve très triste et très troublant d'avoir reçu des courriels, un en particulier qui m'a été envoyé littéralement par des milliers de personnes, affirmant que si le projet de loi était adopté, la Bible serait interdite; que les pères et les mères seraient mis en prison pour avoir mis leurs enfants en garde contre les actes homosexuels, les jugeant immoraux, malsain ou dangereux.
Honorables sénateurs, il est triste que ces honnêtes gens — des croyants, comme beaucoup d'entre nous; des chrétiens pratiquants, comme beaucoup d'entre nous tentons de l'être — aient été induits en erreur et amenés à croire cela. Vous n'avez qu'à prendre connaissance de ces lois dans le Code criminel, puisqu'elles ont été adoptées il y a 35 ans, pour obtenir les réponses. Même les déclarations les plus mesurées de certains chefs religieux, et j'inclus les évêques catholiques romains parmi ceux-ci, me frappent comme étant passablement injustifiées. Elles soulèvent des craintes relatives à la liberté de religion.
Honorables sénateurs, rien dans ce projet de loi, rien dans la loi qu'il modifie et rien dans la jurisprudence relative à cette loi en vigueur depuis 35 ans ne permet de fonder et encore moins de justifier de telles appréhensions. Celles-ci sont tout simplement injustifiées.
Vous pouvez lire ce que dit le juge en chef Brian Dickson sur la norme de preuve qui sera nécessaire pour poursuivre avec succès les auteurs d'infractions à cette loi, une norme de preuve très stricte et très rigoureuse quant à l'intention, c'est-à-dire la volonté de promouvoir, de fomenter la haine, puis sur la définition qu'il donne de la haine. Cette norme de preuve est très contraignante, et il n'est pas étonnant que, après tant d'années, seulement quatre ou six poursuites n'aient été intentées en vertu de cette loi et que seulement une ou deux d'entre elles n'aient été couronnées de succès.
(1600)
Ensuite certains moyens de défense sont prévus dans le projet de loi, que certains ont mentionnés, notamment celui de la prédication de ses propres convictions religieuses sur ces questions et le fait que, pour certaines de ces poursuites, la permission du solliciteur général soit nécessaire. Il n'y a aucune justification, aucun fondement pour le genre de craintes qui ont été formulées dans les courriels que nous avons reçus et pour le genre de déclarations alarmistes qui ont été faites, notamment par le témoin cité par le sénateur Cools dans son intervention.
Nous devrons nous prononcer sur ce projet de loi. C'est aux députés de l'opposition officielle que je dis cela. Je connais la position de M. Harper, le chef de leur parti. Il est contre.
L'honorable Gerry St. Germain: Comment le savez-vous?
Le sénateur Murray: Il a amené chacun de ses députés à s'y opposer lors de la troisième lecture à la Chambre des communes. Voilà sa position.
Le sénateur St. Germain: Le sénateur Murray dénature les faits, et ce n'est pas la première fois.
Le sénateur Murray: Je vous demande bien pardon. À la troisième lecture du projet de loi à la Chambre des communes, M. Harper a, je crois, convaincu tous les députés de son parti qui étaient présents de voter contre. Certains libéraux se sont peut-être joints à lui, pour autant que je sache, de même que certains députés progressistes- conservateurs. Le leader de l'opposition a encore voté contre le projet de loi. Je prévois déjà ma prochaine motion. Ce que je veux dire c'est qu'ils doivent voter. C'est tout ce que je demande pour l'instant. J'espère que nous aurons aussi l'occasion de voter sur ce projet de loi.
Il faut faire un choix. Le parti dont je parle a été très cohérent. Pendant les dix années pendant lesquelles il a siégé à la Chambre des communes, pas une seule fois il n'a appuyé une initiative en faveur des droits des minorités.
Je dis à mes amis qu'ils peuvent choisir cette voie s'ils le désirent ou suivre les traces de chefs précédents, comme Diefenbaker, Stanfield, Clark et Mulroney.
Le sénateur Tkachuk: Mes chefs préférés!
Le sénateur Murray: Aucun d'eux n'a failli à la tâche lorsque la Chambre était saisie d'une question relative aux droits humains. En ce qui concerne ce projet de loi, les sénateurs peuvent emboîter le pas au parti réformiste/allianciste, ou s'aligner su la position des anciens chefs progressistes-conservateurs. J'ai assez confiance que vous saurez prendre la bonne décision.
Des voix: Bravo!
Son Honneur la Présidente intérimaire: J'ai le regret d'informer les honorables sénateurs que le temps de parole du sénateur Murray est écoulé.
Le sénateur Cools: J'invoque le Règlement car j'aimerais contester ce que le sénateur Murray vient de dire au sujet des anciens chefs progressistes-conservateurs.
Des voix: À l'ordre!
Le sénateur Cools: Selon mon interprétation du déroulement de ce...
Le sénateur Joyal: Le temps du sénateur Murray est écoulé. Si une question doit être posée au sénateur Murray, il doit se lever pour demander la permission de la Chambre.
Le sénateur St. Germain: Le sénateur Cools invoque le Règlement.
Le sénateur Cools: J'invoque le Règlement. Le sénateur Murray a cité le nom de John Diefenbaker. Je crois savoir que, dans les années 1960 et au début des années 1970, lorsque ces dispositions du Code criminel ont été adoptées, le très honorable John Diefenbaker s'y est opposé.
Des voix: Oh, oh!
Le sénateur Cools: Oh, arrêtez de siffler.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Des voix: Le vote!
Son Honneur la Présidente intérimaire: L'honorable sénateur Cools propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Tkachuk:
Que la motion d'amendement soit modifiée par adjonction avant les mots «l'origine ethnique» des mots «une déficience mentale ou physique,».
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: À mon avis, les non l'emportent.
Et deux honorables sénateurs s'étant levés:
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quelle sera la durée du timbre?
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, en vertu des paragraphes (1), (2) et (3) de l'article 67 du Règlement, je voudrais que le vote soit reporté à la prochaine séance du Sénat.
L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Aux termes du paragraphe 67(3) du Règlement, lorsque la séance suivante du Sénat est le vendredi, le vote est reporté à la séance d'après. Ce serait donc la semaine prochaine.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Le vote est reporté jusqu'à la prochaine séance après vendredi.
SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE
AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DE PRÉSENTATION DU
RAPPORT FINAL SUR LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE NATIONALE
SUR LA SÉCURITÉ POUR LE CANADA—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kenny, appuyée par l'honorable sénateur Fairbairn, C.P.,
Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 13 février 2004, l'on repousse au 30 septembre 2005, au lieu du 30 juin 2004, la date de présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense sur la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada.—(L'honorable sénateur Lynch-Staunton)
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai parlé avec le sénateur Kenny. Mes observations sur la motion no 73 s'appliqueront également à la motion d'hier du sénateur Day. Je sais que le sénateur Chaput a une motion semblable. Les comités trouvent difficile d'établir des calendriers, à cause de l'incertitude entourant les élections. C'est aussi simple que cela.
Depuis septembre et depuis notre retour, nous travaillons sous la menace du déclenchement d'élections et on nous donne des délais à respecter à cause de la possibilité d'une prorogation ou d'une dissolution qui ne se produit pas. À notre retour après Pâques les rumeurs reprennent de plus belle qu'il n'y aura pas d'élections avant l'automne. Nous sommes alors plus détendus, mais les rumeurs reprennent une fois de plus. Des élections pourraient être déclenchées dans les deux prochaines semaines. Nous sommes tous conditionnés par la possibilité du déclenchement d'élections à n'importe quel moment, ce qui a des répercussions sur notre travail à tous en tant que parlementaires. C'est tout à fait répréhensible. Cela montre à tout le moins la nécessité de mandats fixes. C'était la seule chose que je voulais dire.
Il y a un autre argument voulant que, si nous avions des mandats fixes, si nous connaissions la longueur du mandat qui ne pourrait être modifié, nous pourrions alors établir nos calendriers en conséquence. J'espère que le prochain gouvernement, quel qu'il soit, tirera des leçons de cela et présentera une motion ou un projet de loi à cet égard afin que nous puissions discuter de cette question en profondeur.
Je n'avais pas d'objections. Je voulais connaître l'objet de cette motion et plaider à nouveau en faveur d'une approche plus rationnelle à l'égard de nos travaux. L'une des meilleures façons d'effectuer notre travail est de connaître la durée du mandat de tout gouvernement.
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud: Honorables sénateurs, j'aurais un commentaire sur les propos de l'honorable sénateur Lynch- Staunton.
Je comprends mal qu'une extension au 30 septembre 2005 puisse apporter une plus grande permanence. Une extension au 30 septembre 2005 ferait en sorte que l'on dépasserait l'année pour laquelle le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration accorde normalement les budgets.
Si la date du 31 mars 2005 avait été maintenue, j'aurais sans doute été plus favorable à ce que l'on accorde cette extension. Le leader de l'opposition questionne normalement ces choses de façon sérieuse. Toutefois, à moins que l'on puisse me convaincre qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter, ne devrait-on pas amender cette proposition afin qu'elle se lise plutôt «jusqu'au 31 mars 2005»? Ceci nous mènerait à la fin de l'année pour laquelle le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration accorde normalement les budgets.
Mon honorable collègue voudrait-il commenter ma proposition?
(1610)
Le sénateur Lynch-Staunton: Je n'ai pas à amender la motion car ce n'est pas la mienne. Tout ce que je veux faire, c'est soulever le problème. Je suis d'accord pour dire qu'il est tout à fait farfelu de demander une extension jusqu'à la fin de septembre. Toutefois, j'accepte le raisonnement qui a mené à cette demande. Malheureusement, l'auteur de la proposition n'est pas ici; on pourrait peut-être suspendre la motion et, lorsqu'il sera présent, lui demander s'il accepterait que la date limite soit la fin de l'année financière.
Le sénateur Robichaud: J'aimerais proposer que la suite du débat soit reportée à la prochaine séance du Sénat.
(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné à la prochaine séance.)
[Traduction]
AUTORISATION AU SOUS-COMITÉ DES AFFAIRES DES ANCIENS
COMBATTANTS DE REPORTER LA DATE DE PRÉSENTATION DU RAPPORT FINAL
SURLES PRESTATIONS ET SERVICES OFFERTS AUXANCIENS COMBATTANTS, LES
ACTIVITÉSCOMMÉMORATIVES ET LA CHARTE
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Meighen, appuyée par l'honorable sénateur Biron,
Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 26 février 2004, l'on repousse au 30 septembre 2005, au lieu du 30 juin 2004, la date de présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense sur les prestations et services offerts aux anciens combattants, les activités commémoratives et la charte.—(L'honorable sénateur Lynch-Staunton)
L'honorable Joseph A. Day: Honorables sénateurs, au nom du président du Sous-comité des affaires des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, je suis prêt à accepter la date du 31 mars 2005, comme le propose le sénateur Robichaud.
En ce qui concerne le débat qui vient d'être ajourné, je constate que le sénateur Forrestall, le vice-président de ce comité, est ici et qu'il pourrait être en mesure de donner son consentement également afin que cela puisse être fait.
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, les observations du sénateur Robichaud sont très justes. Le président du comité a été soudainement convoqué à une rencontre avec madame la ministre McLellan pour discuter de questions connexes. Il m'a demandé de répondre le mieux possible aux souhaits du Sénat à cet égard. Si les sénateurs sont d'accord, nous accepterons avec joie la date proposée par le sénateur Robichaud.
Le sénateur Day: Je crois que le sénateur Forrestall nous demande de revenir à l'article no 73, qui vient de faire l'objet d'un ajournement. Pouvons-nous traiter de l'article no 75 et revenir ensuite à l'article no 73?
Son Honneur la Présidente intérimaire: Est-ce d'accord pour que la motion no 75, modifiée, soit adoptée?
Des voix: D'accord.
(La motion modifiée est adoptée.)
[Français]
AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DU RAPPORT FINAL DE L'ÉTUDE SUR LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE NATIONALE SUR LA SÉCURITÉ
Permission ayant été accordée de revenir à la motion no 73 de l'ordre du jour:
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kenny, appuyée par l'honorable sénateur Fairbairn, C.P.,
Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 13 février 2004, l'on repousse au 30 septembre 2005, au lieu du 30 juin 2004, la date de présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense sur la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada.—(L'honorable sénateur Lynch-Staunton)
L'honorable Fernand Robichaud: Honorables sénateurs, je donne mon consentement. J'avais demandé l'ajournement de cette motion afin qu'on revienne à la motion no 73, mais compte tenu des propos du sénateur Forrestall sur la date que j'avais mentionnée, je n'ai plus d'objection maintenant à ce que la question soit posée.
[Traduction]
Son Honneur la Présidente intérimaire: D'accord pour adopter l'article no 73 modifié?
Des voix: D'accord.
(La motion modifiée est adoptée.)
LE SÉNAT
LE CODE CRIMINEL—MOTION VISANT LA DISPOSITION DU PROJET DE LOI C-250—AJOURNEMENT DU DÉBAT
L'honorable Lowell Murray, conformément à l'avis donné le 21 avril 2004, propose:
Que soit adopté un ordre du Sénat que le premier jour de séance suivant l'adoption de la présente motion, à 15 heures, le Président interrompe les délibérations en cours et que toutes les questions nécessaires pour disposer de la troisième lecture du projet de loi C-250, Loi modifiant le Code criminel (propagande haineuse), soient mises aux voix sans autre ajournement, débat ou amendement et que les votes sur ces questions ne soient pas différés;
Que, si un vote par appel nominal est demandé, le timbre d'appel des sénateurs sonne durant quinze minutes, après quoi le Sénat passera au vote sans faire sonner le timbre pour chaque vote.
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement concernant la pertinence de traiter de cette motion à ce moment-ci, puisque cela va à l'encontre de l'ordre que le Sénat vient d'adopter, selon lequel nous avons convenu de reporter le vote sur le sous-amendement du projet de loi C-250 à 17 h 30, mardi. La motion demande qu'un vote semblable soit tenu «le premier jour de séance suivant l'adoption de la présente motion, à 15 heures». Il est possible que la motion soit adoptée aujourd'hui, demain ou lundi. Si c'était le cas, nous aurions deux ordres du Sénat demandant le vote sur le même article.
Puisqu'une décision a déjà été prise concernant la mise aux voix, j'affirme qu'il est absolument impossible de recourir à cette motion pour faire changer l'heure du vote. Par conséquent, je demanderais à Son Honneur de déclarer cette motion irrecevable pour le moment.
Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, nous avons déjà eu ce type de débat, pas nécessairement au sujet de motions d'attribution du temps, mais de motions où l'on faisait valoir que l'une pourrait avoir pour effet d'en remplacer une autre. Cela reste à voir. J'ai donné avis d'une motion qui est parfaitement en règle. Je suppose que, de la même façon, un sénateur aurait pu dire qu'une motion visant à reporter le vote sur le sous-amendement était irrecevable parce qu'elle entrait en conflit celle que j'avais déjà fait inscrire au Feuilleton.
Cela n'a vraiment aucun sens. J'ai présenté une motion dont j'avais donné avis hier. Elle est conforme aux normes et est soumise au Sénat selon les règles. L'argument que l'honorable sénateur a présenté est en grande partie matière à débat, me semble-t-il, et non matière à rappel au Règlement et, à mon avis, on devrait permettre la poursuite du débat.
[Français]
(1620)
L'honorable Fernand Robichaud: Honorables sénateurs, je penche fortement du côté de l'honorable sénateur Murray, qui a présenté la motion conformément au Règlement puisqu'après un jour d'avis, la motion est devant la Chambre et ce, de la façon que le Règlement l'exige.
Je ne vois donc pas comment un rappel au Règlement nous empêcherait de débattre la motion maintenant.
[Traduction]
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, le sénateur John Lynch-Staunton a tout à fait raison: au cours de la délibération précédente sur le projet de loi C-250, le vote a été reporté. C'est maintenant un ordre du Sénat. Je suis certaine que Son Honneur sait pertinemment que c'est un ordre du Sénat car, mardi, conformément à l'ordre adopté, Son Honneur ou la Présidente intérimaire se lèvera et dira que c'est un ordre du Sénat et que, par conséquent, le timbre doit retentir pour qu'un vote puisse avoir lieu.
Donc, ce que les sénateurs Murray et Robichaud font valoir est une nouveauté tout à fait intéressante, et plutôt drôle, en réalité, parce que ce qu'ils disent, d'une manière ou d'une autre, c'est qu'un ordre du Sénat peut être renversé par une simple motion. En réalité, cet ordre est en place. Toute tentative d'abroger cet ordre devra être conforme aux dispositions du Règlement du Sénat relatives à l'abrogation et à l'annulation par le Sénat, ce qui signifie qu'il faudrait le faire après avoir donné un avis. Cet ordre ne peut être abrogé simplement en vertu d'une proposition.
À mon avis, le fait que le Sénat propose un débat sur la motion du sénateur Murray est tout à fait irrecevable et irrégulier, et cela a pour effet de saper l'ordre précédent. Un ordre du Sénat est quelque chose d'extrêmement sérieux et dont on ne se débarrasse pas si facilement. Le sénateur Murray devrait bien le savoir puisqu'il a déjà été leader dans cette Chambre. Je suis toujours étonnée de voir des sénateurs faire ce genre de choses. L'ordre précédent est celui que le Sénat doit suivre en ce moment. C'est ce que le Sénat a ordonné. Il faut donc se conformer à cet ordre.
[Français]
Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, si l'on adoptait la stratégie actuellement employée, cela signifierait que lorsqu'un sénateur présente une motion en bonne et due forme, de façon conforme au Règlement, on ne pourrait jamais entendre la motion qui est présentement déposée devant nous.
La stratégie qui consiste à reporter le vote peut se poursuivre en autant qu'il y ait toujours quelqu'un qui propose un amendement, qui ne l'a pas déjà fait pour un autre amendement. Voilà une façon d'empêcher un honorable sénateur de présenter une motion devant la Chambre du Sénat.
Honorables sénateurs, une motion présentée devant la Chambre n'est pas adoptée automatiquement. Le Sénat doit préalablement adopter la motion. Ce n'est qu'à partir de ce moment qu'il y a une volonté de la Chambre de procéder de telle ou telle façon. Cela ne signifie pas pour autant que tout se fait automatiquement.
Cela signifie qu'il y aura un débat sur la motion et que la Chambre en arrivera elle-même à une décision qu'elle respectera, tout en tenant compte des autres décisions qui ont été prises. Voilà pourquoi je crois qu'on ne devrait pas reporter le débat sur la motion du sénateur Murray.
[Traduction]
L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, si je puis me permettre de dire un mot à propos du fait de ne pas pouvoir parler, je dirai que c'était justement ce que le sénateur vient de faire au sujet du sous-amendement. Il est possible de prendre la parole dans certaines circonstances. Si c'est pour participer au débat sur la motion du sénateur Murray, c'est une chose, mais si c'est pour arriver à une conclusion à son sujet, c'en est une autre et il y a incompatibilité entre les deux.
J'aimerais dire une chose au sénateur Murray à propos de ma position concernant ce projet de loi. Il serait intéressant de remarquer — et je suis sûr qu'il serait d'accord avec moi — que le premier ministre Diefenbaker et le premier ministre Mulroney ont eu le courage de présenter un projet de loi d'initiative ministérielle pour régler cette question. C'est de ce côté-là de la Chambre que la critique devrait venir. Les honorables sénateurs d'en face ne devraient pas nous considérer comme l'ennemi. Ce sont eux l'ennemi. Ce sont eux qui n'ont pas assez de courage pour...
Une voix: À l'ordre!
Son Honneur la Présidente intérimaire: Je suis désolée, mais ce n'est pas un recours au Règlement.
Le sénateur St. Germain: Vous devriez siéger de ce côté-là.
L'honorable Serge Joyal: Honorables sénateurs, je crois que le leader a soulevé là une question très importante, mais j'aimerais lui répondre. Les sénateurs devraient lire attentivement l'article 67(1) du Règlement, et je les exhorte à le faire, s'ils en ont une copie à portée de la main. Il dit ce qui suit:
Lorsqu'on a demandé, en vertu du paragraphe 65(3) du Règlement, un vote par appel nominal sur une motion sujette à débat selon le paragraphe 62(1), l'un ou l'autre whip peut demander qu'on diffère le vote de la façon décrite ci-dessous.
Honorables sénateurs, le texte dit «peut demander». C'est ce qui s'est produit. Le whip en a fait la demande et le vote a été différé. Est-ce que cela signifie que le Sénat, qui est maître des ses propres travaux, ne peut pas en arriver à une décision différente plus tard? C'est ce qu'on croit être l'interprétation littérale, c'est-à-dire qu'une fois qu'on a accédé à cette demande, c'est fini à jamais, tant que le Sénat ne s'est pas penché sur le vote différé. C'est là la nature juridique de la demande de l'honorable whip de l'opposition officielle.
Je suis d'avis que le Règlement du Sénat permet le report de l'un ou l'autre des votes, mais par la suite, le Sénat est toujours maître de ses propres travaux et il peut décider de tenir un vote différent si c'est ce que le Sénat désire. J'estime donc que la motion du sénateur Murray est tout à fait acceptable, parce qu'elle permet au Sénat de prendre une décision différente. Bien sûr, si le Sénat en arrive à une décision qui correspond à ce qui a été demandé par le whip, le Sénat peut alors agir en conséquence. Toutefois, si le Sénat en décide autrement, il reste maître de ses propres travaux durant toute la durée des procédures.
Ainsi, Votre Honneur, à mon humble avis, la motion du sénateur Murray est recevable.
Le sénateur Lynch-Staunton: On ne peut faire indirectement ce qui doit être fait directement.
(1630)
Le Sénat a consenti à la tenue d'un vote sur un sous-amendement à 17 h 30 mardi. En tant que whip du gouvernement, madame le sénateur Losier-Cool a consenti — et nous l'avons appuyée — à ce que le vote ait lieu à 17 h 30 mardi.
Le Bureau peut-il le confirmer? Elle a dit que, comme nous serons vendredi demain, le vote aura lieu mardi.
Son Honneur la Présidente intérimaire: J'ai dit à la séance qui suivra vendredi.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le sénateur Losier-Cool a dit qu'il aurait lieu mardi. C'est important.
Je ne discute pas de la teneur de la motion, sauf pour souligner qu'elle nous demande de voter sur toutes les questions concernant le projet de loi C-250, et non uniquement sur le sous-amendement. Il s'agit d'un vote totalement différent de celui que nous avons consenti à tenir à 17 h 30 mardi.
Je reviens à l'argument fondamental, honorables sénateurs. Un ordre du Sénat a été adopté. Si nous estimons que ce vote devrait avoir lieu à une autre heure et un autre jour, nous devons revenir à cet ordre, consentir à le débattre, puis le modifier en vue de l'améliorer. Cependant, nous ne sommes pas saisis de cette question.
Nous sommes saisis d'une motion d'un sénateur qui dit: «Débarrassons-nous de tout ce qui concerne le projet de loi C- 250, dès que ma motion sera adoptée, à 15 heures, à la prochaine séance.» Cela contrevient à un ordre du Sénat. Il est prématuré d'en discuter.
Je ne discute pas de la pertinence de la motion ou de la question de savoir si elle est recevable ou non. Je le ferai en temps opportun. Je dis qu'elle est prématurée, qu'elle entre en conflit avec un ordre du Sénat et qu'elle devrait être rejetée pour ces motifs.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je voudrais dire que l'expression «maître de ses travaux» ne signifie pas que le Sénat ne doit pas respecter ses propres règles.
Il est intéressant que le sénateur Joyal ait utilisé le terme «Règlement», car c'est précisément de cela qu'il s'agit. C'est un règlement et non une règle. Au début du siècle, le «Règlement» a remplacé les «règles». Le Règlement a un caractère plus permanent.
Honorables sénateurs, ce que je veux dire, c'est que la motion du sénateur Murray est recevable. D'après ce que je comprends, aucun sénateur ne conteste le fait qu'elle a été présentée conformément au préavis exigé. Ce que le sénateur Lynch-Staunton dit, c'est qu'on ne peut étudier cette motion avant le vote de mardi.
J'attire l'attention des honorables sénateurs sur leparagraphe 63(2) du Règlement. On peut peut-être y trouver certains éclaircissements.
Ce que les honorables sénateurs doivent comprendre, c'est que le Règlement et le système qui est en place au Sénat ont été conçus de manière à empêcher qu'une motion ou qu'un ordre soit adopté à 14 heures et qu'un autre groupe de sénateurs décident d'adopter un autre ordre à 16 heures. Autrement dit, le Règlement part du principe que le Sénat ne tolère pas aisément l'incertitude ou l'inconstance. Honorables sénateurs, tout le système est conçu de manière à ce qu'un ordre qui a été adopté ne puisse être modifié par un groupe de sénateur qui se précipitent à l'extérieur pour aller chercher un autre groupe de sénateurs afin de révoquer cet ordre.
Le paragraphe 63(2) du Règlement traite précisément de la situation évoquée par le sénateur Lynch-Staunton. Le paragraphe 63(2) prévoit ceci:
Tout ordre, résolution ou autre décision du Sénat peut être abrogé à cinq jours de préavis, si au moins les deux tiers des sénateurs présents votent en ce sens.
Honorables sénateurs, ce qui se passe ici est très curieux. Ce que les sénateurs Murray et Robichaud demandent à la présidence — et je pense que Son Honneur doit bien comprendre ce qui se passe en l'occurrence —, c'est de passer outre à l'ordre qui a été adopté il y a quelques minutes.
Je pense, Votre Honneur et honorables sénateurs, que si la présidence pouvait, par sa décision, annuler cet ordre du Sénat, elle pourrait alors annuler n'importe quel autre ordre du Sénat.
D'après ce que dit le sénateur Murray, en ce qui concerne, par exemple, le projet de loi sur l'éthique que nous avons étudié il y a quelques semaines, il aurait suffi à quelqu'un de présenter une autre motion après que la première eut été adoptée. Le Sénat résiste. La common law résiste à ce genre de fantaisie.
Je signale que le Président du Sénat n'est pas autorisé à déclarer que l'ordre que nous avons adopté il y a quelques instants est annulé. C'est que qu'on demande à Son Honneur de faire.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Si aucun autre sénateur ne veut intervenir, je quitterai le fauteuil pour quelques instants afin de consulter les greffiers au Bureau. Nous reprendrons la séance à l'appel de la présidence.
(La séance est suspendue.)
(1650)
Le Sénat reprend sa séance.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, le rappel au Règlement du leader de l'opposition concerne le fait que la motion du sénateur Murray est peut-être en conflit avec l'ordre du Sénat établissant la mise aux voix du sous-amendement à la motion d'amendement concernant la troisième lecture du projet deloi C-250.
Il s'agit en fait d'une question hypothétique. Il n'y a pas encore incompatibilité. Cette motion n'a pas été adoptée ni même mise aux voix.
Je fais aussi remarquer que, si une décision est prise aujourd'hui au sujet de la motion du sénateur Murray, elle pourrait être reportée, ce qui éliminerait le conflit prévu.
Tout cela pour dire que, pour le moment, il n'y a pas de recours au Règlement valable.
Le sénateur Murray prendra maintenant la parole pour parler de sa motion.
Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je serai bref. Je reconnais que, ayant parlé avec peu de notes, j'ai anticipé sur le débat sur le sous-amendement et j'ai avancé les arguments que je devrais avancer maintenant. Je ne me répéterai pas.
Toutefois, je tiens à parler des antécédents du projet de loi C-250, car je crois que cela est pertinent compte tenu de ma motion, laquelle vise à garantir que les sénateurs auront l'occasion de voter et de se prononcer sur le projet de loi C-250.
J'ai appris assez récemment, en lisant un document de la bibliothèque, que ce projet de loi a été présenté pour la première fois en juin 1990, cela fait déjà un certain temps. Sous la forme d'un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par le députéSvend Robinson, il portait le numéro C-326. Il a porté, plus récemment, le numéro C-415 lorsqu'il a été présenté au cours de la première session de la 37e législature. Il a été présenté à laChambre des communes le 22 novembre 2001, a franchi l'étape de la deuxième lecture le 29 mai 2002, puis a été envoyé au Comitéde la justice et des droits de la personne. Ensuite, il est mort au Feuilleton au moment de la prorogation de la première sessionde la 37e législature.
Il a de nouveau été présenté, cette fois-ci sous le numéro C-250, au cours de la deuxième session de la 37e législature. Il a été présenté à la Chambre des communes le 24 octobre 2002, a franchi l'étape de la deuxième lecture, puis a été envoyé au Comité de la justice et des droits de la personne. D'après mes calculs, le comité a tenu quatre séances au cours desquelles il a entendu des témoins qui appuyaient le projet de loi et d'autres qui s'y opposaient. Le comité a présenté son rapport le 27 mai 2003. Par la suite, le projet de loi a fait l'objet d'un débat à l'étape du rapport, puis a été adopté à l'étape de la troisième lecture le 17 septembre 2003, d'après mes notes. Il y a eu au moins deux votes dont j'ai ici les résultats. J'ai le nom des députés qui ont voté en faveur du projet de loi et de ceux qui ont voté contre, mais cela n'a de rapport qu'avec une discussion spontanée et imprévue que j'ai eue un peu plus tôt avec le sénateur St. Germain. Je peux lui fournir les détails des votes, si cela l'intéresse, mais je ne prendrai pas le temps de lire tous ces noms.
Au cours de la deuxième session de la 37e législature, le projet de loi C-250 est arrivé au Sénat le 16 septembre 2003 et, si je me fie à mes notes, a été à l'étape de la deuxième lecture durant huit jours, entre le 24 septembre et le 5 novembre 2003. Le projet de loi est ensuite mort au Feuilleton avec la prorogation de la deuxième session de la 37e législature.
Le projet de loi C-250 a été rétabli au cours de la présente session, qui a commencé le 2 février 2004. Cette mesure est arrivée au Sénat où, selon mes notes, elle a été débattue à neuf occasions en deuxième lecture, entre le 5 février et le 20 février 2004. Elle a franchi l'étape de la deuxième lecture à cette date, puis a été renvoyée au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Selon mes notes, ce comité a tenu cinq réunions au cours desquelles un certain nombre de témoins — dont j'ai les noms ici, mais que je ne vais pas mentionner — sont venus formuler leur appui ou leur opposition au projet de loi. Le comité a fait rapport du projet de loi sans modification le 25 mars. Le débat a commencé le 26 mars et nous en sommes là.
Il ne sert à rien de prêter des intentions. Par contre, il ne sert à rien non plus d'être irréaliste. Nous avons une série de sous- amendements et des reports de vote. À mon avis, il est réaliste de dire que si cette situation persiste, il est possible, et peut-être est-ce l'objectif visé, que le projet de loi ne fasse jamais l'objet d'un vote final au Sénat.
Honorables sénateurs, la motion vise à faire en sorte que l'on en finisse avec cette mesure. Comme je l'ai mentionné, les députés et les partis à l'autre endroit se sont prononcés pour ou contre cette mesure législative. Ils ont pu voter en étant guidés par leurs principes et je demande tout simplement, par cette motion, que l'on garantisse, dans la mesure où nous pouvons le faire, que les honorables sénateurs, qu'ils soient en faveur de cette mesure ou qu'ils s'y opposent, aient eux aussi la possibilité de voter en étant guidés par leurs principes.
Le sénateur Joyal: Je propose que l'on passe au vote.
Le sénateur Cools: On ne peut plus discuter de la motion. C'est ridicule.
Le sénateur Stratton: Qui limite la durée du débat maintenant?
Le sénateur Lynch-Staunton: Vous venez juste de nous dire que nous ne pouvons tenir un vote.
Le sénateur Cools: Le Sénat est un lieu de débat. Il y a des sénateurs qui sont debout pour prendre la parole.
Le sénateur Joyal: La présidence m'avait donné la parole.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Le sénateur Joyal a proposé la tenue du vote. Par conséquent, je pense qu'il a le droit d'être le premier à s'exprimer.
Le sénateur Cools: Votre Honneur, nous étions debout.
Le sénateur Stratton: J'invoque le Règlement. La présidence a donné lecture de sa décision et a clairement affirmé que la motion pouvait faire l'objet d'un débat, mais que la Chambre ne pouvait clore le débat.
Le sénateur Cools: C'est juste. C'est la décision de la présidence.
Le sénateur Stratton: C'était la décision dont lecture nous a été donnée.
Son Honneur la Présidente intérimaire: La motion proposée par le sénateur Joyal peut faire l'objet d'un débat.
(1700)
L'honorable sénateur Joyal, avec l'appui de l'honorable sénateur Maheu, propose que la question soit mise aux voix.
Le sénateur Cools: J'invoque le Règlement.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?
Le sénateur Stratton: Ne peut-elle pas être débattue?
Le sénateur Robichaud: Oui, elle le peut.
Le sénateur Stratton: Peut-elle aussi être reportée?
Son Honneur la Présidente intérimaire: Elle peut être ajournée.
Le sénateur Stratton: La mise aux voix peut-elle être reportée?
Le sénateur Robichaud: Seul le vote peut être reporté.
Le sénateur Stratton: Il ne peut pas y avoir ajournement. La mise aux voix peut-elle être reportée?
Son Honneur la Présidente intérimaire: Une motion non sujette à débat ne peut pas être...
Une voix: Reportée.
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, la présidence a clairement expliqué dans sa décision que, tant qu'il n'y a pas de conclusion à ce débat, autrement dit, tant que la motion n'a pas été adoptée, le débat peut se poursuivre. C'est ce que nous avons fait. Nous avons débattu la motion. Cependant, nous ne pouvons pas adopter la motion parce que cela nous mettrait en conflit avec une motion déjà adoptée — soit celle prévoyant la tenu d'un vote, mardi, à 17 h 30.
Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je ne sais pas si c'était là un rappel au Règlement; je suppose que c'en était un. La présidence elle-même ou quelqu'un d'autre peut relire la décision qui a été rendue.
Si j'ai bien compris, elle a dit que le rappel au Règlement du sénateur Lynch-Staunton était hypothétique, que le débat pouvait continuer et que le vote sur la motion pouvait être reporté. Le sénateur interprète cela comme voulant dire que nous ne pouvons pas mettre fin au débat. Quelqu'un peut relire la décision, mais si j'ai bien compris, elle disait que le vote sur la motion pouvait être reporté. Je crois que c'est probablement le cas de la motion que vient de présenter le sénateur Joyal, en l'occurrence que la motion soit maintenant mise aux voix. Autrement dit, sa motion est sujette à débat. Tous les sénateurs peuvent prendre la parole à ce sujet. Je pourrais moi-même le faire encore. Tout le monde a la chance de parler de la motion, et le vote peut être reporté, si j'ai bien compris.
Nous avons eu une discussion semblable sur une motion il y a quelque temps. J'étais dans l'erreur à ce moment-là, mais je crois que j'ai raison maintenant. On m'a corrigé. Je crois que, dans le cas d'une motion sur la question préalable, il peut y avoir report ou même ajournement.
[Français]
Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, la motion déposée devant nous est discutable. Le débat peut aller de l'avant, et le Règlement est clair sur la façon de procéder. Les sénateurs disposent d'une période de temps fixe pour s'exprimer.
La motion de l'honorable sénateur Murray ne peut pas être amendée ou sous-amendée. Il est permis de débattre cette question. D'ailleurs, on la mettra au vote. Si le vote devait être négatif, la motion du sénateur Murray serait du même coup rayée du Feuilleton.
La procédure est claire. Il peut y avoir débat et chaque sénateur peut s'exprimer sur la motion de l'honorable sénateur Joyal.
Son Honneur la Président intérimaire: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: Non.
[Traduction]
Le sénateur Cools: Votre Honneur...
Des voix: À l'ordre!
Son Honneur la Présidente intérimaire: L'honorable sénateur Stratton a proposé, avec l'appui de l'honorable sénateur LeBreton, que la suite du débat sur cette motion soit ajournée jusqu'à la prochaine séance du Sénat.
Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?
Des voix: Non.
Des voix: Oui.
Le sénateur Cools: Votre Honneur, vous être tenue de suivre le Règlement de cette Chambre. Je voulais intervenir au sujet de la motion du sénateur Murray.
C'est une question sérieuse. Honorables sénateurs, lorsque vous pensez que vous pouvez gagner quelque chose, vous vous montrez magnanimes. Or, dans le présent cas, vous ne l'êtes pas.
J'étais debout, prête à intervenir au sujet de la motion du sénateur Murray, une motion importante dont plusieurs d'entre nous veulent parler, et Son Honneur a décidé de donner la parole au sénateur Joyal d'abord. Il était de votre devoir de demander si certains sénateurs voulaient parler de cette motion. Or, vous ne l'avez pas fait. Pourtant c'est conforme aux pratiques et au Règlement de cette Chambre. Le Président du Sénat a le devoir, lorsqu'une motion est proposée, de jeter un coup d'œil pour s'assurer que les sénateurs désireux d'intervenir puissent le faire. Vous ne l'avez pas fait. Vous avez pris une décision contraire au Règlement et aux pratiques du Sénat. Je dois vous dire que je suis assez scandalisée.
En fait, nombre d'entre nous ici présents avaient le droit de débattre de ce que le sénateur Murray avait à dire. Je sais que j'étais la première debout parce que j'ai vu le sénateur Joyal se lever. Il vous incombait de demander si certains d'entre nous voulaient faire une intervention. Votre Honneur, vous ne pouvez tout simplement pas nier aux sénateurs le droit d'intervenir.
J'ai le droit d'intervenir au sujet de cette motion précise. Je souligne que ce n'est pas la première fois que cela se produit au cours de ce débat particulier. Lorsque la motion a été mise aux voix par le président au fauteuil le jour où le projet de loi a été renvoyé au comité, je me suis levée pour intervenir à l'étape de la deuxième lecture. Il ne m'a pas été permis d'intervenir à l'étape de la deuxième lecture et j'ai été trop délicate pour invoquer le Règlement et condamner le Président.
Votre Honneur, vous ne pouvez pas mettre ces motions aux voix avant d'avoir clarifié la situation. Il ne suffit pas de dire «cela ne change rien que vous parliez de la première motion ou non car vous pouvez parler de la deuxième motion». En fait, la première motion...
Des voix: À l'ordre.
Le sénateur Cools: Assez!
[Français]
Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, il faut bien comprendre: lorsque Son Honneur a donné la parole à l'honorable sénateur Joyal, il a proposé la motion que la question initiale soit maintenant mise aux voix.
Ceci n'empêche personne. Une fois que nous aurons disposé de la motion de l'honorable sénateur Joyal, si la décision est favorable, il suffira ensuite de débattre la motion de l'honorable sénateur Murray. Le débat se poursuivra, et on ne pourra pas demander que la motion de l'honorable sénateur Murray soit amendée. Toutefois, le débat pourra avoir lieu une fois que nous aurons disposé de cette question. Les honorables sénateurs auront alors l'occasion de se prononcer sur la question qui est devant nous et sur celle de l'honorable sénateur Murray.
[Traduction]
Le sénateur Cools: Il ne suffit pas que le sénateur Robichaud dise que ce qui se produit maintenant importe peu parce qu'on pourra prendre la parole plus tard.
En fait, Votre Honneur, vous n'avez pas le pouvoir de nous priver de notre droit de parole. Je voulais parler de cette motion principale maintenant. Vous ne pouvez pas agir ainsi. Cette institution connaît des ratés très très graves.
Elle n'écoute même pas. J'étais debout, Votre Honneur.
Le sénateur Stratton: Je propose l'ajournement du débat.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Stratton, avec l'appui de l'honorable sénateur LeBreton, a proposé que la suite du débat sur la motion soit ajournée à la prochaine séance du Sénat.
Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: À mon avis, les non l'emportent.
Et deux honorables sénateurs s'étant levés:
Son Honneur la Présidente intérimaire: Convoquez les sénateurs. Le timbre retentira pendant une heure. Par conséquent, le vote aura lieu à 18 h 10.
(1810)
Le Sénat reprend sa séance.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Le vote porte sur la motion de l'honorable sénateur Stratton, appuyé par l'honorable sénateur LeBreton: Que la suite du débat sur la question préalable du sénateur Joyal soit ajournée jusqu'à la prochaine séance du Sénat.
(La motion, mise aux voix, est rejetée.)
POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS
Cools | Lynch-Staunton |
Di Nino | St. Germain |
Forrestall | Stratton |
Keon | Tkachuk—8 |
CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS
Atkins | Gauthier |
Biron | Joyal |
Christensen | Léger |
Cook | Maheu |
Corbin | Mahovlich |
Day | Murray |
Fairbairn | Robichaud |
Finnerty | Rompkey—17 |
Furey |
ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS
Aucun.
Le sénateur Robichaud: Honorable sénateurs, j'invoque le Règlement pour apporter une correction. Lorsque j'ai dit, en invoquant le Règlement, qu'il y aurait un débat séparé sur la question préalable puis sur la motion principale, c'était une erreur. Il y a un débat sur la motion, et si la motion du sénateur Joyal est adoptée, nous passerons immédiatement à la question principale.
Je voulais apporter cette précision parce que ce que j'ai dit était erroné.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Par conséquent, conformément à l'article 13 du Règlement, il est maintenant 18 heures passées. Les honorables sénateurs souhaitent-ils que je ne tienne pas compte de l'heure?
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Par conséquent, conformément aux paragraphes 13(1) et (2) du Règlement, je quitte maintenant le fauteuil pour revenir à 20 heures.
(La séance est suspendue.)
(2000)
Le Sénat reprend sa séance.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Reprise du débat.
Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que je prends la parole pour commenter la motion du sénateur Joyal, qui a posé la question préalable: Que la question soit mise aux voix maintenant.
Cette motion a pour effet d'empêcher la présentation d'amendements à la singulière motion de clôture du sénateur Murray. Elle empêche aussi tout autre sénateur de parler de la motion, car elle force la tenue immédiate d'un vote.
La question préalable est une motion qu'on ne doit pas présenter à la légère. Son utilisation au Sénat a été peu fréquente, et il y a de bonnes raisons à cela. Au cours de l'histoire récente, elle n'a été proposée que rarement au Sénat. Le cas le plus récent est survenu le 12 février dernier. Il s'agissait du projet de loi S-7, portant sur la délimitation des circonscriptions électorales, qui, en fin de compte, n'a jamais été mis aux voix, puisque la présidence l'a déclaré irrecevable. En 1999, une motion semblable a été rejetée. Antérieurement, la motion a été proposée en 1912, et elle a été rejetée. Elle a aussi été présentée en 1904, mais il ne semble pas qu'il y ait eu vote.
Compte tenu de ces exemples, j'estime qu'il faut donner aux honorables sénateurs la possibilité de réfléchir aux difficultés de procédure dans lesquelles nous risquons de nous enfoncer maintenant. En conséquence, je propose que le Sénat s'ajourne maintenant.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Stratton propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, que le Sénat s'ajourne maintenant.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
[Français]
Le sénateur Robichaud: Est-ce que la question est posée pour l'ajournement du Sénat ou pour l'ajournement du débat?
[Traduction]
Le sénateur Stratton: La motion propose l'ajournement du Sénat.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui s'opposent à la motion veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: À mon avis, les non l'emportent.
Et deux honorables sénateurs s'étant levés:
Le sénateur Stratton: Le timbre sonnera pendant une heure.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Y a-t-il consentement sur la durée du timbre?
Le sénateur Stratton: Si vous permettez, je propose une durée de 30 minutes.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Y a-t-il consentement pour un timbre de 30 minutes, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Le vote aura lieu à 20 h 35. Convoquez les sénateurs.
(2040)
(La motion, mise aux voix, est rejetée.)
POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS
Cools | St. Germain |
Forrestall | Stratton |
Keon | Tkachuk—7 |
Lynch-Staunton |
CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS
Atkins | Joyal |
Biron | Léger |
Christensen | Maheu |
Cook | Mahovlich |
Corbin | Murray |
Day | Ringuette |
Fairbairn | Robichaud |
Furey | Rompkey—17 |
Gauthier |
ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS
Aucun
Des voix: Le vote!
Le sénateur Robichaud: N'est-ce pas là l'entente?
Son Honneur la Présidente intérimaire: Le vote porte sur la motion...
Le sénateur Lynch-Staunton: Je m'excuse, honorables sénateurs, ai- je manqué quelque chose? Passons-nous au vote ce soir? Que se passe-t-il?
La motion du sénateur Joyal est mise aux voix. Le vote porte sur la pertinence de passer au vote. Si cela devait être accepté, il n'y aurait pas de débat sur la motion principale, ce qui signifie que la motion principale serait immédiatement soumise à un vote. Est-ce bien exact?
Au cours des deux derniers jours, nous avons été témoins d'une habileté procédurale sans précédent dans le cadre d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Je suis persuadé que les compte-rendus antérieurs pourraient démontrer que cela ne s'est jamais produit auparavant. Le sénateur Murray a en effet proposé une motion de clôture. Si le principe de cette clôture devait être accepté, cela signifierait que tout sénateur pourrait, en tout temps, et à l'égard de n'importe quel article à l'ordre du jour, prendre la parole et demander le vote sur une motion à un certain moment.
Le sénateur Murray: Un sénateur doit donner avis du dépôt d'une motion et la déposer.
Le sénateur Lynch-Staunton: Exactement. S'il y a une personne qui ait beaucoup parlé contre la clôture et l'attribution de temps au Sénat, c'est bien le sénateur Murray.
Des voix: Quelle honte.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et tout à coup, pour une raison quelconque, il présente une motion de clôture, ce qui n'est pas la même chose qu'une motion d'attribution de temps. Notre Règlement prévoit l'attribution de temps, qui permet à tout le moins la tenue d'un débat sur la motion d'attribution de temps et, si elle est acceptée, la tenue d'un débat sur la question soumise à l'attribution de temps.
Le sénateur Murray nous demande d'approuver cela sans discussion. Il nous demande de régler tous les articles pertinents à ce projet de loi sans discussion. La motion du sénateur Murray est sans précédent.
Nous devons nous pencher sur cette motion de clôture sans précédent dans le cas d'un projet de loi d'initiative parlementaire qui, si elle était acceptée, établirait un précédent qui pourrait être appliqué à un projet de loi du gouvernement, à une interpellation, à une motion ou à n'importe quoi, et alors, avant même que quiconque puisse demander la parole, le sénateur Joyal a dit: «Je propose la question préalable», coupant ainsi court à toute motion sans précédent.
J'espère que nous sommes assez nombreux ici à avoir à cœur le fonctionnement de cet endroit.
Le sénateur Cools: J'en suis.
Le sénateur Lynch-Staunton: Cela n'a rien à voir avec le projet de loi C-250, à propos duquel une décision sera prise un jour.
Le sénateur Murray peut glousser tant qu'il veut. Je l'ai entendu nous calomnier parce qu'il pense, étant donné que nous sommes maintenant des conservateurs, que nous portons tous une marque qui lui déplaît. J'en discuterai en privé avec lui à un autre moment.
Si le Sénat accepte le principe de la motion du sénateur Murray, nous allons nous engager sur une pente très glissante. Si nous acceptons sa motion — et, encore une fois, cela n'a rien à avoir avec le projet de loi C-250, en ce qui me concerne —, cela signifiera que n'importe quel sénateur peut, à n'importe quel moment, proposer qu'un débat sur un projet de loi, une motion ou quoi que ce soit d'autre prenne fin.
Le sénateur Joyal nous dit alors que nous ne pouvons même pas débattre de sa motion. Je m'insurge contre cela. J'espère que d'autres partagent ma préoccupation.
Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, c'est un débat. J'apprécie les arguments mis de l'avant par le leader de l'opposition.
Pour commencer, bien évidemment, ceci a tout à voir avec le projet de loi C-250. C'est de cela qu'il s'agit. Soyons parfaitement francs à ce sujet, nous sommes en présence d'un affrontement de stratégies, si vous voulez. J'ai déjà décrit — et je ne crois pas devoir la décrire à nouveau parce que les honorables sénateurs en ont été témoins ces derniers jours —, la stratégie adoptée par certains des adversaires du projet de loi C-250. La stratégie était très claire: en proposant une série de sous-amendements à l'amendement qui était déjà à l'étude, puis en reportant les votes sur ces amendements, ils pourraient empêcher la mise aux voix du projet de loi C-250 dans un délai raisonnable.
Au risque de répéter ce que quelqu'un d'autre a dit, je sais que ce qu'ils font est permis par le Règlement du Sénat du Canada. Bien évidemment, c'est conforme au Règlement. Donc, en ce sens, c'est une stratégie parlementaire légitime.
Toutefois, honorables sénateurs, ce n'est pas plus légitime que la stratégie que j'ai adoptée pour essayer de les frustrer et pour essayer de faire en sorte que tous les honorables sénateurs aient l'occasion de voter sur le sort final qui sera réservé au projet de loi C-250.
Le sénateur dit que cette motion est absolument sans précédent. Il est vrai que nos règles, du moins depuis 1991 ou 1992, prévoient l'attribution de temps sur les initiatives ministérielles. Cependant, rien n'empêche un sénateur de prendre la parole, de donner un préavis de 24 heures sur une motion et, lorsque la motion est appelée, d'engager un débat, puis de la mettre aux voix pour savoir quand le Sénat désire examiner l'article. Cela se fait depuis de nombreuses années — avant la nomination du sénateur Cools, et même avant ma nomination. Cela se fait encore. Au début de chaque session du Parlement, lorsqu'il y a un discours du Trône, on présente une motion pour déterminer la date à laquelle le débat sur le discours du Trône aura lieu. On suit la même procédure au sujet du débat sur le budget.
Ma motion est recevable, bien entendu. Elle est tout aussi légitime que la stratégie qu'ont adoptée certains de mes collègues qui voulaient empêcher que le projet de loi fasse l'objet d'un vote. Cela ne fait absolument aucun doute.
(2050)
En ce qui concerne la motion du sénateur Joyal demandant qu'elle soit mise aux voix, cette motion a pour effet d'empêcher que ma motion ne soit modifiée. Bien sûr, le sénateur le sait, et c'était le seul recours que nous avions, car, si cette motion n'avait pas été présentée, nous serions en train d'étudier le mienne, comme nous l'avons fait pour le projet de loi C-250, ainsi que les amendements et les sous-amendements et tout le reste. Quant à la motion proprement dite, à savoir qu'elle soit mise aux voix, elle repose sur une tradition très longue et très honorable au Parlement.
De fait, la motion portant que la question soit maintenant mise aux voix a rendu la Confédération possible dans le Canada-Uni, lors des débats sur les résolutions de Québec qui formaient la base de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. À un moment donné, pendant le débat, sir John A. Macdonald a pris la parole pour proposer la question préalable, ou a amené quelqu'un d'autre à le faire, de façon à ne pas interrompre le débat puisque, une fois la question préalable proposée, tous les parlementaires peuvent prendre la parole, y compris ceux qui l'ont déjà fait sur la motion principale. Il s'est levé pour mettre un terme aux amendements, expliquant aux députés du Canada-Uni que ce qu'il avait négocié était, en fait, un traité avec le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle- Écosse, l'Ontario et le Québec, et qu'il voulait que le Parlement l'adopte ou le rejette. Le Parlement l'a adopté, et ce fut le début du processus législatif qui a mené à la Confédération.
De fait, la motion du sénateur Joyal a de très anciens et honorables antécédents dans l'histoire du Parlement et dans celle du Canada. Aussi, je nie absolument que ma motion soit sans précédent. Elle est tout à fait conforme au Règlement. Tout ce que je veux, c'est donner aux honorables sénateurs la même possibilité que celle qu'ont eue ceux de l'autre endroit, c'est-à-dire tenir un vote final sur le projet de loi C-250.
Le sénateur Lynch-Staunton: Pendant les débats sur la Confédération, la motion n'a pas immédiatement été mise aux voix; elle l'a été après les débats. Par conséquent, l'argument du sénateur Murray est peut-être fondé du point de vue historique, mais il n'est pas approprié.
Permettez-moi de citer un extrait des débats du Sénat du 3 février 1993, à la page 2735, où le sénateur Murray, qui était alors leader du gouvernement, déclare:
La clôture est au Sénat l'ultime recours. En vertu de l'article 39, les deux parties doivent essayer de s'entendre sur le temps qui à telle ou telle étape sera consacré à l'examen d'un projet de loi. Je pense que dans le cas de la plupart des mesures législatives, quand on arrive à une telle entente, cela ne peut que contribuer à l'efficacité de notre assemblée ou de toute autre assemblée parlementaire. Je pense en outre que cela ne peut qu'arranger les honorables sénateurs des deux côtés.
Je suis entièrement d'accord avec lui. Je me demande simplement pourquoi on n'a pas essayé, que je sache en tout cas, de s'entendre avec ceux qui sont fermement opposés à ce projet de loi et utilisent des tactiques procédurales pour maintenir leur position et ceux qui utilisent aussi la procédure en vue de paralyser cet endroit. Je ne comprends pas pourquoi il n'y a pas eu de discussions avec ceux qui ont une position ferme d'un côté ou de l'autre pour que l'on puisse s'entendre. Au train où vont les choses, nous passerons l'éternité sur cet article. Ce qui me trouble, c'est que nous soyons ici ce soir et que nous pourrions y être lundi et mardi à débattre d'une question qui, selon moi, pourrait être résolue si nous avions une approche plus collégiale. C'est déplorable.
L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, je suis très préoccupé par les déclarations du sénateur Murray, qui parle de «manipulation». Il dit clairement que les règles de procédure utilisées respectent tout à fait le Règlement du Sénat et qu'on a agi de la sorte à trois ou quatre occasions. On est loin de l'obstruction systématique que l'on a vue lors du débat sur la TPS. Le sénateur a la mémoire très courte ou il a changé d'affiliation politique pour une nouvelle allégeance.
Le sénateur Murray: Pas moi.
Le sénateur St. Germain: Ne dites pas «pas moi». Il n'y a eu aucune manipulation.
Honorables sénateurs, nous ne serions pas ici — écoutez, vous n'avez jamais été conservateur, sénateur Murray, et vous ne le serez jamais; alors, oubliez ça.
Le sénateur Rompkey: Bon retour au bercail!
Le sénateur St. Germain: Tout ce processus m'inquiète énormément.
Je vois le sénateur Furey qui semble s'amuser là-bas. Il est intervenu, mais je ne suis pas disposé à divulguer ce qui s'est produit à huis clos. Comme l'a signalé le sénateur Cools, mais pas à huis clos, certains tenaient à ce que le comité entende un plus grand nombre de témoins afin de pouvoir bien étudier le projet de loi. Le sénateur Murray s'imagine qu'il s'agit d'un sujet passionnant.
J'ai beaucoup de respect pour le sénateur Joyal, qui a pris position au sujet du projet de loi C-250, et j'espère qu'il respecte mon point de vue comme je respecte le sien.
J'ai toujours eu beaucoup de respect pour ceux qui sont prêts à défendre leurs croyances, même si je ne partage pas toujours leur avis, car je crois que c'est important. C'est la raison d'être du Sénat. Je tiens à ce qu'il comprenne pourquoi il prend telle ou telle position et pourquoi j'adopte une position différente. Nous ne partagerons peut-être jamais le même avis, mais au moins nous avons assez de respect pour écouter les arguments des autres sans toujours chercher à les dénigrer, contrairement au sénateur Murray qui a fustigé le sénateur Lynch-Staunton et d'autres de ses collègues.
Alors, laissez-moi de côté, si vous voulez, parce que j'ai changé d'allégeance pendant quelque temps, mais c'est à cause de gens comme vous que je suis allé voir ce qui se passait ailleurs.
Ce qui est raisonnable est une question d'opinion. Je crois, comme le sénateur Lynch-Staunton, que toute la situation et cette motion crént un précédent très dangereux. Je ne suis pas un spécialiste de la réglementation. Je ne suis pas avocat. Je ne suis qu'un éleveur de poulets qui a sa licence de pilote commercial, mais je peux dire une chose aux honorables sénateurs.
Le sénateur Rompkey: Vous visez haut.
Le sénateur St. Germain: Pour mes poulets.
Quand je regarde la manière dont la clôture nous est présentée dans cette motion, je vois des abus énormes à l'horizon. Je suis sûr que le soleil se lèvera demain comme il s'est levé ce matin, même si cette motion va de l'avant, mais je pense que cela présente un risque énorme. Traditionnellement, quand on invoque la clôture au Sénat, c'est généralement le leader du gouvernement ou le leader adjoint du gouvernement qui l'invoque au sujet d'une mesure législative du gouvernement. Je pense que c'est là la clé.
Quand nous étudions cette mesure législative, nous devons penser à l'avenir. Je crois honnêtement qu'il est très dangereux de s'engager sur une voie excluant toute possibilité de débat ou d'amendement. Cette motion est finale, la guillotine va clore le dossier. C'est ce que le sénateur Murray propose.
Le plus grand critique de la clôture au Sénat, et l'un des plus éloquents, propose maintenant quelque chose qui nuirait à notre institution, aux sénateurs actuels et à venir.
Le sénateur Cools: Je veux répondre au sénateur Murray car nous avons connu le débat sur la TPS. Nous étions dans les camps opposés, je m'en souviens très clairement. Je me souviens du mal que cela a causé à cette institution, et cela durant des années, ainsi qu'au grand respect que le sénateur Murray portait au sénateur MacEachen. Il leur a fallu des années pour enterrer la hache de guerre. Qu'on ne s'y trompe pas, cette manière de faire est mortelle pour des institutions comme la nôtre. J'aimerais contester ce que l'honorable sénateur a dit au sujet de l'usage et de la procédure.
(2100)
Honorables sénateurs, cette motion est déplorable, car elle regroupe deux genres de motions. Il s'agit à la fois d'une motion pour la question préalable, qu'on appelle depuis toujours la motion de clôture, et d'une motion pour l'attribution de temps, à savoir la guillotine.
Premièrement, il est très rare que ces deux motions soient présentées ensemble. Deuxièmement, le sénateur Murray a présenté une motion d'attribution de temps qu'on appelle la motion de guillotine. En tant que simple sénateur, il ne peut pas le faire. Tous les précédents, qu'ils soient tirés de Redlich, de May ou de Campion, montrent que seuls les ministres peuvent présenter une motion de guillotine. Un simple sénateur n'est pas autorisé à le faire. Si les sénateurs du gouvernement voulaient qu'une telle motion soit présentée, ils auraient dû serrer les dents et laisser le leader du gouvernement au Sénat le faire.
J'aimerais également signaler que le sénateur Murray a agi comme si c'était la façon courante de procéder et qu'il ne s'agissait que d'un petit conflit de stratégie. J'ai des nouvelles pour lui. Tout ce que j'ai pu faire est juste et indiqué et il ne peut pas dire que les amendements que nous avons présentés étaient répétitifs. Cela n'a duré que quelques jours. Dans les travaux du Parlement, cette situation n'a pas duré assez longtemps pour qu'on parle d'obstruction.
Ce que je veux dire, c'est que ce sont des procédures si exceptionnelles qu'on ne doit y recourir que rarement et que, lorsqu'on y a recours, habituellement à l'initiative d'un ministre, deux facteurs doivent s'appliquer: l'urgence et l'intérêt public. Il incombe au ministre, le cas échéant, d'expliquer soigneusement qu'il présente une telle motion parce qu'il y a urgence et qu'il est dans l'intérêt public de réagir à cette urgence.
Comme le sénateur Murray a invoqué des antécédents historiques, je le ferai moi aussi. Ces procédures ont toutes été instituées par le premier ministre Gladstone, en Angleterre. La raison d'être de ces procédures, dont certaines ont été éventuellement ajoutées au Règlement, c'est que, lorsque le ministre faisait une telle déclaration, c'était une déclaration de siège, et le Parlement était précipité dans une dictature. Les exemples de pareilles situations sont légion.
Le sénateur Murray ne peut pas faire cela parce que, si ce qu'il dit est vrai, n'importe lequel d'entre nous pourrait recourir au même mécanisme et présenter une telle motion. Certes, il croyait bien que sa motion serait adoptée à cause du soutien libéral. C'est une motion dangereuse. C'est une motion qui me trouble et qui m'effraie. Si nous n'y prenons pas garde, nous nous retrouverons dans une situation où n'importe quel simple sénateur pourrait présenter une motion semblable à n'importe quel moment.
Le sénateur Murray compte sur les futilités entourant la question de savoir si elle a été proposée avec un préavis raisonnable. C'est déraisonnable. Un tel outil n'est pas à la disposition d'un simple député. J'espère que la suite des événements le montrera clairement. J'ai examiné les documents et les deux sont incompréhensibles.
Le sénateur Murray semble trouver la chose amusante.
Le sénateur Murray: Je crois qu'«incompréhensible» est un terme un peu fort.
Le sénateur Cools: Lorsque les gens sont ici depuis longtemps, il arrive parfois qu'ils deviennent tellement désabusés qu'ils oublient les gens ordinaires qui ont de la difficulté à gagner leur vie, qui vivotent de chèque de paye en chèque de paye. Nous devons faire preuve d'un peu de sensibilité et d'humilité. Nous en bénéficierons tous. Il ne faut pas se surprendre que le Sénat ne soit pas tenu en haute estime.
Des voix: Le vote!
Le sénateur Lynch-Staunton: Nous passerons au vote. Soyez patients. J'aurais aimé savoir pourquoi le sénateur Joyal voulait passer au vote avant de tenir un débat sur la motion du sénateur Murray. Cela n'a rien à voir avec l'objet de la motion; il s'agit de notre manière de procéder. Le sénateur Murray a présenté une motion que nous n'avons jamais vue auparavant — dans mon cas du moins. Avant que nous puissions en discuter, le sénateur Joyal a demandé le vote, ce qui signifie que nous ne pouvons plus discuter d'amendements qui pourraient améliorer ou modifier sa motion.
Je considère cela comme un outrage au Sénat. Je considère cela comme un affront à notre capacité de débattre de questions essentielles. Il est ici question de procédure. Il ne s'agit plus du projet de loi C-250, mais bien d'un moyen de torpiller le débat en permettant à n'importe qui de présenter n'importe quand une motion qui, en pratique, limite le débat. Le gouvernement n'est autorisé à faire cela que lorsque les discussions avec l'opposition n'ont pas abouti, uniquement dans le cas d'une mesure législative d'initiative ministérielle, uniquement en permettant que l'on débatte de la motion d'attribution du temps et uniquement en accordant un minimum de six heures sur la question de l'attribution du temps.
Le sénateur Murray: Dans ce cas-ci, c'est beaucoup plus, et le débat peut être ajourné.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non, non. Évidemment, il peut être ajourné. Nous pourrions l'ajourner jusqu'à la semaine prochaine, mais ce n'est pas lié à une question de temps, de fatigue ou au fait qu'il est 21 heures. La question est de savoir si nous tenons à nous engager dans cette voie. Je presse le sénateur Joyal de retirer sa motion demandant que nous nous prononcions sur la question et à nous permettre de débattre de la motion pour que nous puissions proposer des amendements. S'il ne le fait pas, nous nous verrons, dans les faits, imposer un double bâillon, ce qui, à mes yeux, constitue un outrage au Sénat.
Le sénateur Joyal: Honorables sénateurs, je vais répondre à la question du leader de l'opposition, comme il m'a invité à le faire. Les honorables sénateurs savent que je respecte éminemment les fonctions que l'honorable sénateur assume et le rôle du parti de l'opposition dans le cadre des débats. Sans l'opposition, il n'y a pas de débat. Selon un principe qui a été établi il y a longtemps, en 1937, dans la fameuse affaire du juge en chef Duff, et qui constitue une pierre angulaire de notre Constitution et de son préambule, une constitution semblable à celle du Royaume-Uni est essentiellement fondée sur le débat et, pour qu'il y ait débat, il doit y avoir divergence de vues. Il doit y avoir des arguments, des assertions contraires, des contre-preuves et des réponses. C'est de pareil débat que naît finalement le consensus. C'est la pierre angulaire de la démocratie parlementaire.
Ces derniers mois, j'ai suivi l'évolution du projet de loi. Comme le sénateur Murray l'a mentionné, cette mesure législative n'est pas nouvelle; elle reprend en fait un projet de loi présenté précédemment.
J'ai écouté très attentivement madame le sénateur Cools et je la prierais de me laisser présenter mes arguments.
Le sénateur Cools: J'écoute le sénateur Joyal attentivement.
Le sénateur Joyal: Ce projet de loi reprend une autre mesure législative qui avait été présentée précédemment. À ma connaissance, 17 sénateurs sont intervenus lors du débat en deuxième lecture du projet de loi précédent. Ils ont discuté de ses avantages et de ses inconvénients. J'ai écouté attentivement tous les arguments avancés et j'ai essayé de déterminer s'ils étaient fondés, notamment ceux qui étaient liés à la Charte des droits, un aspect fondamental pour un projet de loi comme celui-ci.
J'ai écouté les 17 interventions. Évidemment, le projet de loi est mort au Feuilleton parce que la session a été prorogée. Il a alors été présenté de nouveau, et j'ai écouté les arguments avancés par les sénateurs des deux côtés de cette Chambre. Certains sénateurs ont simplement repris leurs arguments précédents, mais d'autres en ont présenté de nouveaux et je les ai écoutés attentivement.
Le projet de loi a ensuite été renvoyé à un comité sous la présidence du sénateur Furey. Au sein du comité, nous avons entendu plus de témoins opposés au projet de loi qu'en faveur de celui-ci. Je suis persuadé que les différents arguments contre le projet de loi ont été équitablement présentés.
(2110)
Le sénateur Cools a énoncé une partie de ces considérations lors d'une intervention précédente, plus tôt cet après-midi. J'ai essayé de me convaincre que ce projet de loi avait fait l'objet d'un débat suffisant et qu'il était temps de le renvoyer à cette Chambre car, ici, nous représentons un plus vaste éventail d'opinions puisque ceux qui ne sont pas membres du comité peuvent exposer leur point de vue sur le projet de loi.
Bien entendu, j'ai vu — et je ne porte pas de jugement sur la question — des amendements, puis des sous-amendements et encore plus de sous-amendements être présentés au Sénat, puis le report de votes. Je n'ai rien dit lorsque des votes ont été reportés. C'est permis par le Règlement. Si c'est le cas, qu'il en soit ainsi, tant que le Règlement n'aura pas été modifié. Les deux côtés du Sénat peuvent demander le report. Cependant, à un moment donné, on commence à reconnaître, dans le climat politique général, la possibilité d'élections. Nous savons tous, sans aucun doute, que, lorsque des élections sont déclenchées, tout ce qui figure au Feuilleton est perdu, ainsi que toutes les heures et tous les efforts investis dans l'étude et la compréhension des questions.
Je croyais que nous avions eu l'occasion de débattre de ce projet de loi. Toutefois, le temps file, jour après jour. Nous pouvons aller de l'avant, mais si des élections sont déclenchées la semaine prochaine, le projet de loi mourra au Feuilleton.
Même s'il est d'initiative parlementaire, il n'en demeure pas moins que c'est une mesure législative. Elle a été adoptée dans l'autre endroit. En outre, il se trouve que j'en accepte le contenu et que j'en reconnais le mérite. Il arrive parfois que le leader du gouvernement me demande de parrainer un projet de loi. Si, au terme de la lecture du projet de loi en question, j'ai certaines réserves en ce qui a trait à son mérite, je refuse d'en être le parrain. Or, j'ai lu ce projet de loi et j'en appuie le principe et la nature.
Je serais le dernier, sénateur Lynch-Staunton, à éviter les débats dans cette enceinte. En fait, si quelqu'un consulte les Journaux du Sénat, il constatera que lorsque la clôture a été imposée, je suis intervenu moi aussi et j'ai fait connaître ma position à l'égard d'une telle mesure.
J'ai eu l'impression que les tactiques étaient employées en toute bonne foi, et conformément aux règles, et que nous ne serions jamais acculés à devoir nous prononcer dès maintenant sur le projet de loi. Cependant, le sentiment général est que ce projet de loi risque de mourir malgré tous les efforts consentis par tous les sénateurs qui ont pris la parole à ce sujet, et il y en a eu plus de 20. Je crois qu'il est maintenant temps de voter à l'égard de ce projet de loi.
Je reconnais qu'en poussant les règles à leur extrême limite, celles- ci pourraient avoir une incidence sur notre façon de travailler. Mon honorable collègue a absolument raison. Il vaut toujours mieux parvenir à un accord, négocier un règlement. Comme le disent les victimes, même un mauvais règlement vaut mieux que tout procès ou tout jugement. Je comprends et j'approuve ce sentiment.
Je me demande si, ce soir, nous aurions été en position de négocier quoi que ce soit si nous n'avions pas atteint le point où nous en sommes maintenant. Je ne veux pas une réponse à mon interrogation. Je pose simplement la question.
J'ai le plus grand respect pour la façon dont le sénateur Lynch- Staunton accomplit sa tâche et exerce ses fonctions à titre de leader de l'opposition au Sénat. Cependant, étant donné ma conviction à l'égard de ce projet de loi, je crois que le temps est venu de demander aux honorables sénateurs de se prononcer à son sujet.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Lynch-Staunton: Je respecte cette position. Je tiens à dire clairement que c'est à dessein que je n'ai pas pris position relativement au projet de loi, parce que si je l'avais fait, on aurait pu croire que c'était la position de notre caucus. Notre caucus reconnaît que les projets de loi d'initiative parlementaire ne sont pas visés par la discipline de parti et que les gens peuvent voter comme ils le souhaitent. Je le ferai en temps utile. Je me suis délibérément abstenu de voter sur le projet de loi C-250 afin de ne pas être perçu comme exprimant un point de vue qui n'est pas partagé par mes collègues.
Cela dit, je veux vous faire part de ma préoccupation à l'égard de la motion du sénateur Murray et de celle du sénateur Joyal, que je trouve brutales et inutiles. Si elles sont acceptées, elles créeront un précédent. Ce n'est pas ainsi que notre assemblée fonctionne. On ne peut avoir un sénateur qui se lève et qui dit: «J'en ai assez de votre débat; le jour qui suivra l'adoption de cette motion, nous voterons sur celle-ci à 15 heures.» Nous n'avons jamais agi de la sorte, sauf au terme de discussions difficiles et lorsqu'il était vraiment impossible de parvenir à s'entendre.
Dans ce cas-ci, on n'a fait aucun effort en ce sens. C'est mon objection. Jusqu'à maintenant, aucun effort n'a été fait pour discuter avec ceux qui ont un point de vue bien arrêté relativement à ce projet de loi et qui soulèvent des objections liées à la procédure. Aucun effort n'a été fait pour discuter avec ces personnes. Suis-je naïf, ou ai-je des principes trop rigides? Une telle approche serait meilleure que celle que les sénateurs Murray et Joyal nous proposent ce soir.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, ma perception ne correspond pas à la situation décrite par le sénateur Joyal. Par exemple, on était tellement pressé d'envoyer le projet de loi au comité que l'on ne m'a pas permis de prendre la parole au cours du débat à l'étape de la deuxième lecture. Cette situation m'a beaucoup contrariée. On ne nous a pas permis de nous exprimer librement.
(2120)
En outre, quand le projet de loi a été étudié par le comité, je n'ai pu inviter les témoins que je voulais entendre. J'ai eu l'impression de le comité ne voulait pas entendre des témoins.
Honorables sénateurs, un autre facteur qui n'a jamais été examiné, est le fait que ce projet de loi n'a jamais été représenté à la Chambre des communes. Il a été rétabli d'une manière ponctuelle en parlant du principe qu'un ordre de la Chambre peut faire abstraction de la prorogation aussi bien que de la nécessité des trois lectures. Ce projet de loi n'a pas été lu trois fois à la Chambre des communes, honorables sénateurs.
Ce projet de loi fourmille de problèmes et d'irrégularités, et je crois sincèrement que les sénateurs peuvent se traiter les uns et les autres avec respect et parvenir à une entente. Mon impression, et je le dis aux sénateurs Joyal et Furey, c'est que personne ne voulait parler du projet de loi C-250 avec moi.
De plus, l'étude de ce projet de loi s'est toujours déroulée comme s'il s'agissait d'un projet de loi du gouvernement. Il n'est jamais arrivé par le passé que des sénateurs ministériels siègent à une heure pareille pour faire avancer l'étude d'un projet de loi d'initiative parlementaire.
J'ai écouté le sénateur Joyal attentivement. Il répétait sans cesse: «Je pensais», ou «J'en suis venu à la conclusion que nous devrions lui faire franchir l'étape du comité.» J'ignore à quand remonte la dernière fois où un sénateur est intervenu et a dit qu'il pouvait prendre des décisions sur la durée exacte de l'étude d'un projet de loi. Seul le gouvernement a ce pouvoir. Aucun sénateur ne peut le faire à titre personnel. Seul un ministre peut enclencher cette procédure.
Je tiens à ce que les honorables sénateurs sachent que, à mon avis, tout ce processus a été plutôt mal mené par moments, fort peu satisfaisant et même, selon moi, contraire aux usages du Sénat.
Son Honneur la Présidente intérimaire: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote!
Son Honneur la Présidente intérimaire: L'honorable sénateur Joyal propose, avec l'appui du sénateur Maheu: Que la motion de l'honorable sénateur Murray sur le projet de loi C-250 soit maintenant mise aux voix. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: À mon avis, les oui l'emportent.
Et deux honorables sénateurs s'étant levés:
Son Honneur la Présidente intérimaire: Convoquez les sénateurs.
Le sénateur Stratton: Je voudrais proposer le report du vote jusqu'à 17 h 30, à la prochaine séance du Sénat qui devrait avoir lieu, je crois, mardi prochain, selon ce qui a été convenu.
L'honorable Shirley Maheu: La séance après vendredi conviendra aux sénateurs du gouvernement.
Le sénateur Rompkey: Un autre vote est déjà prévu pour 17 h 30.
Le sénateur Robichaud: On tiendra les votes dans l'ordre.
Le sénateur Stratton: On tiendra les votes dans l'ordre, l'un après l'autre, à 17 h 30 mardi.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Le sénateur Maheu a reporté le vote à la prochaine séance après vendredi.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est ce que prévoit le Règlement.
Le sénateur Stratton: Nous avions une entente. Je croyais que nous allions voter sur le sous-amendement mardi prochain à 17 h 30. Par conséquent, si nous nous entendons pour voter sur les motions dans l'ordre, nous voterons mardi à 17 h 30 et aurons alors l'occasion de nous prononcer sur le sous-amendement.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
L'AJOURNEMENT
Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:
L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:
Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au mardi 27 avril 2004, à 14 heures.
Son Honneur la Présidente intérimaire: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
(Le Sénat s'ajourne au mardi 27 avril 2004, à 14 heures.)