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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 38e Législature,
Volume 142, Numéro 52

Le mercredi 20 avril 2005
L'honorable Daniel Hays, Président


 

 

LE SÉNAT

Le mercredi 20 avril 2005

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Priére.

DÉCLARATIONS DES SÉNATEURS

RAPPORT DE L'AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

L'honorable Madeleine Plamondon : Honorables sénateurs, j'aimerais porter à votre attention un rapport important de l'Autorité des marchés financiers au Québec en date du 14 avril dernier.

Ce rapport concerne les pratiques commerciales dans le secteur du courtage en assurance de dommage au Québec.

Les constats qui y sont faits confirment ce que plusieurs groupes de consommateurs ont déjà dénoncé : les courtiers, qui devraient être indépendants des grandes sociétés d'assurance, ne le sont pas vraiment. Les courtiers concentrent leurs affaires auprès d'un ou deux principaux assureurs. Certaines pratiques comme les prêts aux cabinets, les liens de propriété et les transferts en bloc ne sont pas de nature à servir les meilleurs intérêts des consommateurs.

Si on regarde les prêts aux cabinets, on voit que les assureurs consentent des prêts aux cabinets avec lequels ils font affaire, des prêts assortis de conditions particulières qui, dans certains cas, se prolongent d'un à cinq ans après le remboursement du prêt à l'assureur. Un cabinet peut être dans l'obligation de fournir à son assureur-prêteur un volume minimum de primes.

Passons maintenant aux liens de propriété. Vingt-trois pour cent des grands cabinets ont déclaré qu'un assureur détenait un lien de propriété avec eux. Un assureur qui détient des actions dans les cabinets occupe, dans plus de 90 p. 100 des cas, la première position relative au volume d'affaires.

Passons maintenant au constat suivant : le transfert en bloc d'un volume d'affaires. Le transfert en bloc consiste, pour un cabinet, à transférer un volume de clientèle d'un assureur à un autre, en échange d'une rémunération additionnelle.

En ce qui concerne les commissions conditionnelles offertes aux cabinets par les assureurs, on bonifie la rémunération de base en fonction d'un objectif de vente de produits de l'assureur. On sent que le tsunami généré par les enquêtes de Eliot Spitzer, procureur général de l'État de New York, fait des vagues au Canada. En 2003, au Québec seulement, il s'est vendu pour 6,7 milliards de dollars en produits d'assurance de dommage, dont 4,2 milliards en assurance des particuliers.

Ces assurances touchent l'assurance des biens et la responsabilité personnelle des individus, notamment en ce qui a trait à leur résidence et à leur automobile.

Les problèmes relevés dans le rapport sont importants.

[Traduction]

Honorables sénateurs, ces pratiques ont une incidence sur les primes des Canadiens et sur leur liberté de choix. Étant donné que l'Autorité des marchés financiers va consulter le secteur de l'assurance et les consommateurs sur les meilleures solutions en matière de réglementation, nous devons être sur le qui-vive.

[Français]

En attendant, les consommateurs se doivent de questionner leur cabinet de courtage afin de découvrir quel est l'éventail réel des compagnies qui leur est offert, et quelle compagnie répond le mieux à leurs besoins particuliers.

Caveat emptor!

Consumer beware!

Consommateur, protège-toi!

LE CODE CRIMINEL

ABROGATION DE L'ARTICLE 43—LA PROTECTION DES ENFANTS

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention aujourd'hui sur une pétition déposée à la Chambre des communes lundi, qui vise à faire abroger l'article 43 du Code criminel.

Voici le texte de cette pétition de 3 000 noms parrainée par le Dr Pierre Mailloux, psychiatre, et M. Jacques Béliveau, que j'aimerais féliciter aujourd'hui pour cette initiative. Ces derniers ont soumis le texte suivant :

Par la présente, nous demandons au premier ministre du Canada de faire abolir l'article 43 du Code criminel canadien qui se lit comme suit :

Tout instituteur, père ou mère, ou toute autre personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable.

Présentement, plus de 150 associations et organismes canadiens œuvrant auprès des enfants appuient l'abolition pure et simple de la défense permettant aux parents et aux enseignants d'infliger une correction physique aux enfants. De plus, le Dr Mailloux, dans une publication intitulée Pour l'amour des enfants — Non aux châtiments corporels!, à la page 52, déclare :

Le problème est qu'il n'est pas nécessaire de frapper souvent un enfant ou encore de le frapper avec force. Les séquelles ne sont pas prévisibles. Si l'enfant a beaucoup de caractère, la petite tape bientôt ne suffira plus. On passera à la fessée, puis on utilisera une règle, une ceinture, un bâton. Jusqu'où êtes-vous prêt à aller? En sera-t-il marqué à vie? Cela s'est vu et plus souvent qu'on ne veut bien l'admettre.

L'article 43 du Code criminel n'a plus sa place au Canada; nous devons respecter la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, que le Canada a signée et ratifiée sans la mettre en œuvre. Quelque 15 pays, surtout de l'Union européenne, ont modifié leurs lois pour respecter leurs obligations en vertu de cette convention. La Suède, en particulier, qui a modifié sa loi en 1979, constate que le taux de délinquance juvénile ainsi que le placement d'enfants ont chuté de façon remarquable en adoptant cette mesure. La situation générale des enfants, toutes allégeances politiques confondues, doit s'améliorer, et cette mesure ne nécessite pas des investissements majeurs.

C'est pourquoi il est important, honorables sénateurs, que le projet de loi S-21 soit adopté dans les meilleurs délais.

(1340)

[Traduction]

MME VIRGINIA REDHEAD

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Avant l'appareillage du NCSM Winnipeg de Victoria, en Colombie- Britannique, à destination du golfe Persique, il y a un peu plus d'une semaine, l'équipage a convié de Winnipeg une invitée très spéciale. En effet Virginia Redhead, une femme de 20 ans dont le courage et la détermination sont remarquables, était présente au départ du navire.

Le NCSM Winnipeg appuie le Firefighters' Burn Fund du Manitoba, qui a fourni environ un million de dollars en matériel à l'unité de soins aux brûlés du centre des sciences de la santé. En février dernier, au moment où les membres de l'équipage du NCSM Winnipeg effectuaient une visite de l'unité de soins aux brûlés, le Firefighters' Burn Fund a invité Virginia à les rencontrer.

Quand elle était encore toute petite, Virginia a été victime d'un incendie qui a brûlé 90 p. 100 de son corps. Elle a perdu les deux mains et a dû subir à mesure qu'elle grandissait des chirurgies et des greffes de peau douloureuses. Elle a vécu à l'unité de soins aux brûlés jusqu'à l'âge de quatre ans et elle y a passé depuis un nombre incalculable d'heures. « Cette aide a beaucoup changé ma vie, » dit Virginia. « Sans cela, je ne saurais pas comment composer avec ma situation. »

M. Gary Macdonald, l'un des fondateurs du fonds pour brûlés, et son épouse Sandy sont de grands amis de Virginia, que Gary qualifie de véritable petite tigresse. Selon Gary, dès leur première rencontre, les marins du NCSM Winnipeg et Virginia se sont pris d'amitié. « Ils l'ont adorée et l'ont traitée comme une personne », dit-il. Ils savaient qu'ils voulaient que cette jeune femme remarquable vienne leur dire au revoir lorsqu'ils appareilleraient pour le Golfe.

Le voyage de Virginia à Victoria, au moment du déploiement, a été à la fois plaisant et empreint d'émotion. Virginia a rencontré le reste de l'équipage du NCSM Winnipeg et a trouvé tous les membres d'équipage extraordinairement accueillants. De retour à Winnipeg, elle s'affaire à terminer sa 12e année et a récemment quitté le foyer familial pour vivre seule. « J'aime me retrouver entre amis et avec ma famille, sortir et avoir du plaisir », dit-elle. Une vraie adolescente, quoi. Virginia a également été monitrice dans un camp pour jeunes brûlés âgés de 5 à 17 ans, qu'elle a elle-même fréquenté quand elle était plus jeune. « Je fais profiter les autres enfants de mon expérience, » dit-elle, « et je les aide à ne pas avoir peur des cicatrices et à regarder à l'intérieur. »

Elle qui a toujours travaillé avec des enfants dit souhaiter continuer dans cette voie. Afin de concrétiser son projet, elle a l'intention de suivre, à compter de l'automne prochain, un cours de services à l'enfance et à la jeunesse, d'une durée de deux ans, au collège communautaire Red River. Mais elle caresse d'autres projets aussi, dont celui de parcourir le monde pour sensibiliser les gens à la situation des brûlés.

Virginia, je vous souhaite bonne chance dans votre voyage. Votre courage est source d'inspiration pour les jeunes qui survivent à des brûlures. C'est aussi une source d'inspiration pour les marins canadiens dans le golfe Persique et pour moi.

L'ACCORD SUR LES PÊCHES ENTRE LA SOCIÉTÉ MASILIIT ET LA COOPÉRATIVE
TORNGAT FISH PRODUCERS

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, hier, le sénateur Adams et moi-même, en présence des sénateurs Comeau, Watt et Sibbeston, avons eu le plaisir d'assister à la signature d'une entente historique entre deux groupes d'Inuits visant la création d'une société de pêche. Masiliit, une nouvelle entreprise de pêche de l'association Nattivak Hunters and Trappers, du Nunavut, et la coopérative Torngat Fish Producers, du Nordlabrador, se sont entendues pour pêcher les 160 tonnes de flétan noir auxquelles la coopérative Torngat a droit en vertu de son quota. Leur prise sera livrée à l'usine de transformation de Makkovik, au Labrador, où seront créés des emplois dont cette collectivité a grandement besoin. Le poisson sera capturé par le Genny and Doug, le nouveau navire de pêche moderne de la société Masiliit, d'une longueur de 100 pieds et à engins fixes. Les 160 tonnes restantes du quota de 330 tonnes de flétan noir de la société Nattivak seront débarquées à Makkovik.

La coopérative autochtone Torngat Fish Producers a été formée en 1980 par des pêcheurs et des travailleurs d'usine de transformation qui appartenaient à six collectivités du Nordlabrador. La coopérative a transformé toute une gamme de produits de la mer, particulièrement depuis qu'elle a été durement frappée par les moratoires sur la pêche de la morue et du saumon. C'est avec succès qu'elle a transformé du crabe, du pétoncle, du flétan noir, de l'omble, du buccin, de l'oursin et du phoque. Ses activités sont en partie financées par ses revenus de commission tirés de son permis de pêche au large, qu'elle détient depuis les années 1970.

Honorables sénateurs, il est paradoxal que des pays ne parviennent pas à décider entre eux qui peut pêcher et selon quels quotas, à l'intérieur et à l'extérieur de la limite de 200 milles des côtes canadiennes, mais que des Inuits du Canada arrivent à mettre en commun leurs ressources, leur capacité de capture et leurs installations de transformation pour le bien de tous. Peut-être pouvons-nous apprendre des Inuits des valeurs auxquelles ils croient depuis des siècles et qui sont essentielles à leur mode de vie : la coopération et le partage.

Avec le sénateur Adams, je félicite l'association Nattivak et la coopérative Torngat du succès qu'elles continuent de connaître pour le compte de leur population.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LA CHINE—LE DROIT DE MANIFESTER

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, au cours des derniers jours, j'ai été heureux de voir que des milliers de Chinois ont manifesté publiquement leur mécontentement au sujet d'injustices et d'atrocités que des soldats japonais auraient commises pendant leur occupation de la Chine. Sans juger du bien-fondé de leur manifestation, je me réjouis du geste collectif de la population chinoise et j'espère qu'il constitue une percée qui permettra aux citoyens de ce pays de protester avec vigueur contre les injustices et les abus.

La question est la suivante : permettra-t-on aux Chinois de protester contre les injustices commises par leur propre gouvernement? La population chinoise s'est déjà élevée collectivement contre son gouvernement par le passé, notamment sur la place Tiananmen en 1989, où des milliers de manifestants en faveur de la réforme démocratique s'étaient rassemblés, tout cela juste pour être ensuite dispersés violemment par le gouvernement militaire chinois, ce qui a causé des milliers de morts.

Je souhaite que, grâce aux actions populaires dont la Chine a été le théâtre récemment, les Chinois parviennent à protester contre le refus du gouvernement de la Chine de respecter les droits et les libertés fondamentaux, responsable qu'il est de la répression brutale des Tibétains, de la persécution de groupes religieux tels que le Falun Gong, de l'oppression des minorités ouïgoures dans la région du Sin-kiang, ainsi que de l'intimidation de Taiwan.

Se pourrait-il que les événements des derniers jours annoncent un vent de changement sur la Chine? L'esprit de la place Tiananmen est-il en train de surgir de nouveau? Je l'espère. Ou encore se pourrait-il qu'il s'agisse encore d'une mise en scène approuvée par le gouvernement? J'espère que non.

Honorables sénateurs, je préfère garder l'espoir que, bientôt, la lumière de la justice, de la liberté et des droits fondamentaux se répandra de nouveau sur la Chine.

L'ACCORD SUR LES PÊCHES ENTRE LA SOCIÉTÉ MASILIIT ET LA COOPÉRATIVE
TORNGAT FISH PRODUCERS

L'honorable Willie Adams : Honorables sénateurs, j'aimerais me joindre à mon collègue, le sénateur Rompkey, pour la déclaration qu'il vient de faire.

Les invités présentés hier dans cette enceinte étaient à Ottawa pour signer un accord historique entre la nouvelle entreprise de pêches de l'association Nattivak Hunters and Trappers coopérative de Qikiqtarjuaq, la Masiliit Corporation, et la Torngat Fish Producers Cooperative Society de Makkovik, au Labrador.

Les sénateurs Rompkey, Watt, Sibbeston et Comeau, président et membres du Comité des pêches, ont assisté à la cérémonie de signature. Étaient également présents les députés Peter Stoffer, Shawn Murphy, qui est secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, et Geoff Regan. M. Wally Anderson, député à l'Assemblée législative de Terre-Neuve-et-Labrador, qui représente la circonscription de Makkovik, était également venu à Ottawa pour assister à la signature de l'accord.

Mme Signoorie, une ancienne de la communauté inuite, a béni la cérémonie et, plus tard dans mon bureau, a allumé le kudlik, qui symbolise la chaleur et la lumière du foyer inuit. Il y avait des chants gutturaux et des joueurs de tambour âgés de cinq ans, du programme d'aide préscolaire aux Inuits; ces jeunes représentent l'avenir du Nunavut et notre volonté d'administrer nos ressources.

Les honorables sénateurs se rappelleront que le Comité sénatorial des pêches a effectué une étude sur l'industrie de la pêche au Nunavut et au Nunavik à l'automne de 2003. Parmi les recommandations formulées dans son étude, le comité proposait notamment que, dans la planification de l'avenir de l'industrie de la pêche du Nunavut, on envisage la pêche communautaire fondée sur de petits bateaux. Voilà la première recommandation qui sera mise en oeuvre.

C'est un accord historique, en ce sens que ce sera le premier du genre à être conclu dans le Nord et qu'il liera deux organisations inuites composées exclusivement de pêcheurs inuits et d'employés d'usine du Nunavut et du Labrador.

L'accord prévoit que les deux organisations partageront leurs contingents de pêche, qui ont été alloués à chaque communauté dans un but commun. La Nattivak Hunters and Trappers Association a acheté dernièrement un bateau de pêche à engins fixes de 100 pieds, et lorsqu'elle aura pêché le quota de la coopérative Torngat, elle débarquera ses prises à l'usine de traitement de poisson de cette dernière, à Makkovik.

(1350)

Les deux collectivités profiteront de cet accord qui va offrir des emplois qui font cruellement défaut dans les secteurs de la pêche et de la transformation. Honorables sénateurs, j'espère que c'est le premier de nombreux accords qui seront signés.

Il y a trois ans, le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, présidé par le sénateur Comeau, s'est rendu au Nunavut pour étudier l'avenir de la pêche dans cette région. Nous avons parlé aux gens de la collectivité et nous avons formulé des recommandations sur l'avenir de la pêche au Nunavut. L'avenir repose sur la coopération avec les gens du Nunavut qui connaissent bien la pêche dans leur région. Certains Inuits travaillent dans le secteur de la pêche dans cette région depuis 15 ou 20 ans. Je compte sur plus d'emplois et sur une meilleure santé économique pour ces collectivités à l'avenir.


AFFAIRES COURANTES

BANQUES ET COMMERCE

BUDGET—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR LES QUESTIONS CONCERNANT LES CONSOMMATEURS DANS LE SECTEUR DES SERVICES FINANCIERS

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant :

Le mercredi 20 avril 2005

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

NEUVIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat, le mardi 16 novembre 2004, à examiner, pour en faire rapport, les questions concernant les consommateurs dans le secteur des services financiers, demande respectueusement que des fonds lui soient approuvés pour l'exercice 2005-2006.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)(c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JERAHMIEL S. GRAFSTEIN

(Le texte du budget figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à l'annexe A, p. 780.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Grafstein, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE SUR LES CHANGEMENTS DÉMOGRAPHIQUES

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant :

Le mercredi 20 avril 2005

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

DIXIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat, le mardi 23 novembre 2004, à étudier, pour en faire rapport, les changements démographiques qui se produiront au Canada d'ici une vingtaine d'années, demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services de conseillers, techniciens et de tout autre personnel jugé nécessaire aux fins de ses travaux.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)(c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JERAHMIEL S. GRAFSTEIN

(Le texte du budget figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à l'annexe B, p. 786.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Grafstein, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

BUDGET ET AUTORISATION DE SE DÉPLACER—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DU RÉGIME FINANCIER CANADIEN ET INTERNATIONAL

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant :

Le mercredi 20 avril 2005

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

ONZIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat, le mercredi 20 octobre 2004, à examiner, afin d'en faire rapport, la situation actuelle du régime financier canadien et international, demande respectueusement qu'il soit autorisé à voyager à l'extérieur du Canada aux fins de ses travaux.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)(c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JERAHMIEL S. GRAFSTEIN

(Le texte du budget figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à l'annexe C, p. 791.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Grafstein, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DES OBSTACLES AU COMMERCE INTERPROVINCIAL

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant :

Le mercredi 20 avril 2005

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

DOUZIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat, le mardi 23 novembre 2004, à étudier, pour en faire rapport, les obstacles au commerce interprovincial, demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services de conseillers, techniciens et de tout autre personnel jugé nécessaire aux fins de ses travaux.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)(c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JERAHMIEL S. GRAFSTEIN

(Le texte du budget figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à l'annexe D, p. 796.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Grafstein, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DE DIVERSES QUESTIONS RELATIVES À LA PRODUCTIVITÉ

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant :

Le mercredi 20 avril 2005

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son

TREIZIÈME RAPPORT

Votre Comité, qui a été autorisé par le Sénat, le mardi 23 novembre 2004, à examiner, afin d'en faire rapport, diverses questions relatives à la productivité, demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services de conseillers, techniciens et de tout autre personnel jugé nécessaire aux fins de ses travaux.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)(c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JERAHMIEL S. GRAFSTEIN

(Le texte du budget figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, à l'annexe E, p. 801.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Grafstein, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DE LA FRANCOPHONIE

DÉPÔT DU RAPPORT DE LA RÉUNION DE LA COMMISSION POLITIQUE TENUE DU 3 AU 6 MARS 2005

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 23(6) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie concernant sa participation à la réunion de la Commission politique de l'APF qui s'est tenue à Libreville, au Gabon, du 3 au 6 mars 2005.

[Traduction]

LA RECONSTRUCTION DE L'ASIE DU SUD-EST APRÈS LE TSUNAMI

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, conformément à l'article 56 du Règlement, je donne avis que, à la prochaine séance :

J'attirerai l'attention du Sénat sur la visite que j'ai effectuée récemment en Indonésie et les efforts déployés par le Canada pour aider à reconstruire l'Asie du Sud-Est après le terrible tsunami du 26 décembre 2004.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, permission est- elle accordée pour que l'avis de deux jours soit ramené à un seul?

Des voix : D'accord.


PÉRIODE DES QUESTIONS

L'ENVIRONNEMENT

LE PROTOCOLE DE KYOTO—LE PLAN DE MISE EN OEUVRE

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Il s'agit de savoir si on peut faire confiance à Paul Martin dans le dossier des changements climatiques. On lisait dans le Globe and Mail la semaine dernière que, selon le ministre de l'Industrie, David Emerson, le gouvernement devra, pour atteindre les objectifs de Kyoto, acheter des crédits d'émission à des pays qui ont atteint ou dépassé leurs objectifs dans la lutte contre les changements climatiques. Cela comprend des pays dont l'économie s'est effondrée, comme la Russie, ainsi que je l'ai dit plus tôt. Le plan de mise en oeuvre de Kyoto dit ceci :

[...] le Fonds pour le climat achètera des crédits de réduction d'émissions intérieures et, quand l'intérêt national l'exige manifestement, des réductions internationales reconnues en vertu du Protocole de Kyoto.

(1400)

Paul Martin a dit en 2002 que ce n'était pas la voie à emprunter. Il a en effet déclaré à l'autre endroit que nous devons rejeter carrément l'idée d'acheter des crédits d'émission à l'étranger. Il vaut mieux investir notre argent dans une vraie technologie de réduction des émissions au Canada même.

Le ministre des Finances, Ralph Goodale, s'est également prononcé contre l'achat de crédits d'émission en déclarant au Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes en février, il y a à peine deux mois, que, de toute évidence, le Canada n'envisageait pas de faire ce genre de dépense à l'étranger.

Le gouvernement a eu huit ans pour trouver la bonne formule. Pourquoi ce revirement? Comment faire confiance à Paul Martin, qui dit clairement une chose et fait ensuite le contraire?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le plan de mise en oeuvre de l'accord de Kyoto que le gouvernement a proposé a été largement accepté par le milieu des affaires et les environnementalistes. Les méthodes que nous emploierons pour atteindre les objectifs qui nous sont fixés dans le Protocole de Kyoto sont expliquées dans le Projet vert et le plan général.

Quant à la question de savoir si le Canada devra acheter des crédits d'émission pour atteindre ses objectifs, nous ne savons pas encore. Comme je l'ai dit hier en réponse à une question presque identique du sénateur Stratton, ce n'est pas notre moyen préféré. Toutefois, le Canada a des obligations internationales et il n'est que juste d'indiquer aux milieux écologistes et économiques que si nous ne pouvons pas atteindre ces objectifs — ce qui signifie que si nous tous, oeuvrant de concert, les entreprises, les gouvernements et les particuliers, nous ne pouvons pas atteindre ces objectifs — et si le Canada souhaite honorer ses engagements pris à Kyoto, cette solution de rechange existe. Ce n'est pas la solution de rechange préférée du gouvernement.

Le sénateur Stratton : L'honorable leader du gouvernement dit que ce n'est pas sa solution de rechange préférée. Toutefois, l'achat de crédits d'émission correspond en réalité à ce que prévoit le plan, soit « l'un des principaux mécanismes de la lutte du Canada contre les changements climatiques ».

Qu'est-ce que nous dit l'honorable sénateur? Qu'est-ce qui est dans le plan et, à la lumière de ce que j'ai cité, qu'est-ce qui ne l'est pas?

Le sénateur Austin : J'espère que le sénateur Stratton peut faire la distinction entre les priorités et la façon dont nos objectifs seront atteints. J'ai dit hier que nous vivons sur une seule planète. Aucun pays ne peut être propre alors que d'autres pays demeurent en difficulté sur le plan environnemental. Nous vivons sur une seule planète et la question environnementale est un problème qui se pose à la planète tout entière.

Le Canada veut faire sa contribution. Nous voulons la faire dans toute la mesure de nos capacités, en prenant toutes les mesures que nous pouvons prendre sur le plan intérieur. Toutefois, il y a de la pollution qui arrive au Canada de nombreuses régions du monde. Si, par exemple, nous pouvons contribuer à réduire la pollution arrivant au Canada ou circulant autour du monde en provenance d'un pays comme la Chine, en veillant à ce que des mesures soient prises relativement à la gestion mondiale, nous devrons le faire.

Le sénateur Stratton : Il est intéressant de voir la façon dont l'honorable sénateur danse autour de l'affirmation. Le plan affirme et j'insiste à nouveau là-dessus, que c'est l'achat des crédits d'émission « sera l'un des principaux mécanismes de la lutte du Canada contre les changements climatiques ». Si cela ne vous dit pas que ce sera l'un des mécanismes privilégiés, je me demande ce qu'il vous faut.

Si l'honorable sénateur se soucie tellement de faire passer le message que son gouvernement est respectueux de l'environnement, qu'il sache que le Sénat est actuellement saisi du projet de loi C-15 qui va renforcer les sanctions contre ceux qui polluent l'environnement marin du Canada. Tous les premiers ministres des provinces de l'Atlantique et la majorité écrasante des Canadiens souhaitent que ce projet de loi soit adopté.

L'honorable sénateur peut-il me dire quand nous pouvons nous attendre à ce que ce projet de loi revienne du comité?

Le sénateur Austin : Sénateur Stratton, vous savez comme moi que le comité est maître du projet de loi et que le Sénat attend son rapport.

Le sénateur Stratton : Le leader n'est-il pas d'avis que nous devrions tout faire pour sortir ce projet de loi du comité le plus rapidement possible, avec le spectre des élections qui rôde autour de nous?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je fais confiance au jugement du comité et j'attends son rapport.

L'honorable Leonard J. Gustafson : Je crois comprendre que plusieurs grands pays n'adhèreront pas au plan de Kyoto. Ne serait- il pas plus indiqué d'adopter une approche nationale, comme l'ont fait les Européens et comme les Américains commencent à le faire? Ils ont regroupé l'agriculture, l'environnement et le développement rural en un seul train de mesures. Puisqu'il y a des pays qui n'y participent pas, cette façon de faire permettra peut-être de mieux résoudre une bonne partie des problèmes environnementaux, et elle n'en coûtera pas 10 milliards de dollars.

Le sénateur Austin : Je me demande, sénateur Gustafson, si vous pouvez m'aider en posant une question complémentaire, afin que je comprenne mieux votre première question.

Le sénateur Gustafson : C'est un fait connu que les pays de l'Union européenne ont abordé le dossier environnemental au niveau local, dans leurs propres pays. Ils ont regroupé l'agriculture, l'environnement et le développement rural en un seul train de mesures afin de limiter de façon très efficace les émissions libérées dans l'environnement.

Ne croyez-vous pas qu'il serait possible d'adopter une approche semblable au Canada, qui ne coûterait pas 10 milliards de dollars et qui aurait un effet direct sur l'état de l'environnement au Canada?

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, la proposition du sénateur Gustafson n'est pas très claire. Parle-t-il de regrouper des institutions ou des programmes? Pourrait-il préciser une fois de plus?

Le sénateur Gustafson : Ce programme a donné d'excellents résultats dans les pays de l'Union européenne, en associant l'agriculture et l'environnement. Après tout, qui sont mieux qualifiés pour être responsables de la terre que les agriculteurs? On voit que les Européens se sont engagés dans cette voie et que les Américains commencent à les imiter.

Le sénateur Austin : Je pense que c'est ce que nous faisons. La première phase du Projet vert, le plan pour honorer notre engagement à l'égard du Protocole de Kyoto, exige que nous réduisions notre écart d'émissions de gaz à effet de serre de 270 mégatonnes d'ici 2012. Le Fonds pour le climat, annoncé dans le budget de 2005, a un objectif de 75 à 115 mégatonnes. Ce fonds est axé sur les mécanismes du marché et vise à permettre l'achat de réduction et d'absorption d'émissions. Il s'agira d'acheter des réductions de gaz à effet de serre auprès des agriculteurs, des entreprises, des collectivités, des Canadiens et d'autres innovateurs. D'après ce que je comprends, la série de mesures concerne la collectivité dans son ensemble.

Le sénateur Gustafson : Le gouvernement ne dispose pas de programme destiné à régler, par exemple, le problème des terres ne convenant pas tout à fait à la céréaliculture. Il pourrait mettre en place un programme visant à transformer des terres en sols herbagers ou en autre chose d'inoffensif sur le plan écologique qui profiterait à l'agriculteur de même qu'à toute la population canadienne.

Le sénateur Austin : Je transmettrai ce commentaire au ministre de l'Environnement.

LES TRANSPORTS

LE RAPPORT DU COMITÉ CONSULTATIF FÉDÉRAL CHARGÉ D'EXAMINER LE SERVICE DE TRAVERSIER DE MARINE ATLANTIC

L'honorable Ethel Cochrane : Honorable sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle concerne le comité consultatif fédéral qui a examiné le service de traversier offert par Marine Atlantic entre North Sydney, en Nouvelle-Écosse, et ma province, Terre-Neuve-et-Labrador.

(1410)

Le comité devait soumettre son rapport final au ministre des Transports, Jean Lapierre, le 1er avril. Presque trois semaines se sont écoulées depuis, et les conclusions du rapport n'ont toujours pas été rendues publiques.

Le leader du gouvernement au Sénat aurait-il l'obligeance de se renseigner et de nous faire savoir à quel moment le contenu de ce rapport sera publié?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorable sénateur, je n'y manquerai pas.

Le sénateur Cochrane : Honorables sénateurs, le contenu de ce rapport soulève de vives inquiétudes. Des personnes qui seront touchées dans cette région de ma province communiquent avec moi depuis quelques semaines. Ces gens viennent principalement de milieux ruraux, tout comme ceux qui sont préoccupés par la question dans les autres provinces de l'Atlantique. Toute recommandation que pourra formuler le comité consultatif fédéral, en matière de privatisation, de réduction de personnel et d'impartition, provoquera un climat de grande incertitude. Étant originaire d'une région rurale de Terre-Neuve, je suis certes bien placée pour comprendre toute la gravité de ces trois sujets particuliers.

Si le ministère des Transports est incapable d'arrêter une date ferme pour la publication de son rapport, peut-il au moins nous assurer qu'il sera rendu public aussi rapidement que possible?

Le sénateur Austin : Comme je l'ai dit, je vais m'informer et fournir une réponse à l'honorable sénateur.

LE PREMIER MINISTRE

LE PROGRAMME DE COMMANDITES—LA PARTICIPATION DU PREMIER MINISTRE DANS L'ADJUDICATION DE CONTRATS

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Lundi dernier, M. Warren Kinsella a déclaré devant le Comité permanent des comptes publics des Communes que, à l'époque où il travaillait pour l'ancien ministre des Travaux publics, David Dingwall, il y avait eu un différend concernant un contrat, ajoutant que Paul Martin l'avait appelé chez lui pour lui faire part de son mécontentement concernant ce qui se passait.

À la connaissance du leader du gouvernement au Sénat, le premier ministre a-t-il l'intention de continuer d'affirmer qu'il n'a pas participé à l'attribution de marchés de l'État? Le cas échéant, sommes-nous censés croire qu'il ignorait ce qui se passait dans son propre cabinet?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Comme je l'ai dit hier, le premier ministre a présenté ses preuves devant la Commission Gomery.

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, en somme, les audiences tenues par le Comité des comptes publics lundi nous ont appris que le premier ministre savait que les contrats avaient probablement été arrangés pour privilégier une entreprise en particulier, qu'il était au courant des allégations de conduite douteuse dans l'attribution de contrats à une firme mêlée étroitement à sa campagne à la direction du parti et qu'il avait menacé de démissionner de son poste de ministre des Finances si son principal conseiller devait faire l'objet de mesures disciplinaires dans cette affaire.

Quelle explication le leader du gouvernement peut-il nous donner concernant un témoignage de cette nature, qui n'a pas été entendu devant la Commission Gomery, mais devant le Comité des comptes publics de l'autre endroit?

Le sénateur Austin : Et c'est là que cela devrait rester, honorables sénateurs, jusqu'à ce que le comité publie son rapport.

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, je comprends ce que dit le leader du gouvernement au Sénat, mais les Canadiens d'un bout à l'autre du pays qui posent des questions à bon nombre d'entre nous concernant ce qui se passe, ici, à Ottawa, méritent qu'on leur réponde.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, la meilleure façon de se renseigner sur ce sujet, c'est évidemment d'interroger les intéressés à l'autre endroit. Comme je ne sais rien de cette affaire, je ne puis faire d'observations.

LA SANTÉ

L'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'HÉPATITE C

L'honorable Wilbert J. Keon : J'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Honorables sénateurs, le 22 novembre 2004, le ministre de la Santé a dit que le gouvernement fédéral amorcerait des négociations avec quelque 5 000 victimes du sang contaminé qui ont été initialement exclues du programme d'indemnisation financière, notamment celles qui ont contracté l'hépatite C avant 1986 et après 1990. Cinq mois se sont écoulés depuis ce changement de politique, mais les victimes et leurs familles se demandent toujours quand ils vont recevoir l'indemnisation à laquelle elles ont clairement droit. Le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous dire où en sont les choses?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, les questions qui concernent les victimes de l'hépatite C qui n'ont pas encore été indemnisées, c'est-à-dire celles qui ont été infectées avant 1986 et après 1990, constituent une préoccupation constante du gouvernement, et les négociations entre celui-ci et les avocats de ces victimes se poursuivent très activement.

Comme je l'ai déjà dit dans le passé, les fonds versés aux tribunaux et destinés aux victimes de l'hépatite C qui ont été infectées après que nous eûmes appris — nous s'entend des autorités compétentes — l'existence de sang contaminé et la possibilité que des gens aient été contaminés, ces fonds ont été déposés dans un compte en fiducie au nom de ces victimes et ils sont bien assez élevés pour couvrir les réclamations de ces personnes.

Ce qu'on ne sait pas, c'est s'il y a dans ce compte des fonds que les avocats des victimes infectées entre 1986 et 1990 seraient disposés à remettre aux autres victimes.

Le sénateur Keon : Honorables sénateurs, nous avons appris que le gouvernement fédéral attend jusqu'au mois de juin pour voir s'il y a un excédent dans ce fonds. Cependant, s'il le voulait, le gouvernement pourrait indemniser toutes les victimes de l'hépatite C dès maintenant. Je ne comprends pas très bien comment l'argent serait remis, mais le gouvernement peut certainement indemniser toutes les victimes maintenant, s'il le veut.

Le leader du gouvernement au Sénat peut-il chercher à savoir si le gouvernement envisagerait de procéder de cette façon, étant donné que, comme il le sait, rien n'est certain actuellement pour le gouvernement et que ces victimes risqueraient d'être oubliées à la suite des changements?

Le sénateur Austin : Je vais certainement pousser mes recherches.


MME JILL ANNE JOSEPH

LE GREFFIER AU BUREAU

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer à l'ordre du jour, j'aimerais attirer votre attention sur la présence au Bureau du greffier de Mme Jill Anne Joseph, greffière principale adjointe, et plus particulièrement sur le fait que c'est la première fois qu'elle agit comme greffier au Bureau.

Mme Joseph a débuté sa carrière au Sénat en 1990 et a été nommée greffière principale adjointe en février 2004.

Nous sommes heureux de vous accueillir au Bureau.


ORDRE DU JOUR

PROJET DE LOI NO 2 PORTANT EXÉCUTION DE CERTAINES DISPOSITIONS DU BUDGET DE 2004

DEUXIÈME LECTURE—SUSPENSION DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Moore, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-33, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 23 mars 2004.

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, je suis ravi de participer au débat sur le projet de loi C-33, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 23 mars 2004.

Ce projet de loi a été adopté à la Chambre des communes le 25 février 2005 et modifie diverses lois, dont la Loi sur le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien, la Loi sur la taxe sur les produits et services des premières nations et la Loi de l'impôt sur le revenu.

(1420)

Aujourd'hui, honorables sénateurs, je vais parler d'un seul élément de l'une de ces lois, d'une importante mesure législative du gouvernement, notamment l'article qui traite de la RGAE, soit la règle générale anti-évitement.

Dans le sommaire du projet de loi C-33, le ministère des Finances dit qu'il propose une modification à la RGAÉ pour :

[...] veiller à ce que la règle générale anti-évitement énoncée dans la Loi de l'impôt sur le revenu vise les cas d'abus du Règlement de l'impôt sur le revenu, des conventions fiscales et de toute autre loi fédérale.

Lorsque le ministère des Finances a proposé des modifications à la RGAE pour le budget fédéral du 23 mars 2004, il a déclaré qu'elles avaient pour but de régler le problème de l'interaction entre la RGAE et les conventions fiscales du Canada. Honorables sénateurs, la seule question relative à la RGAE dont je compte parler brièvement aujourd'hui est la doctrine de la rétroactivité.

La RGAE est entrée en vigueur en 1998 pour donner à l'Agence du revenu du Canada, l'agence, le pouvoir étendu de changer les termes de transactions entièrement conformes aux exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu, mais que l'agence considérerait néanmoins comme des opérations d'évitement. Il est important de noter que la RGAE ne peut être invoquée par l'agence que lorsqu'elle prétend, en l'espèce, que des dispositions particulières de la loi ont été utilisées à mauvais escient, ou qu'il y a eu abus de la loi dans son ensemble.

Le ministère des Finances, dans certains de ses documents et lors de rencontres dans mon bureau, prétend que le gouvernement soutient, depuis la mise en oeuvre de la RGAE, que cette règle s'applique aux conventions fiscales du Canada. Cependant, un grand nombre d'avocats chevronnés, de comptables agréés et d'autres spécialistes et universitaires ont soutenu depuis le début que la RGAE ne s'applique pas aux conventions fiscales du Canada. En effet, en ce qui concerne le Règlement de l'impôt sur le revenu, deux tribunaux de première instance ont déclaré que la RGAÉ n'est pas applicable.

Ces décisions ont surpris le ministère des Finances, en particulier du fait qu'un tribunal ait pu prendre des décisions opposées à ce qu'il avait prévu. Il a donc décidé de modifier et de reformuler complètement la loi. Est-ce qu'il s'agit là de la façon dont nous faisons les choses au Canada, en tentant d'agir de façon rétroactive?

Honorables sénateurs, j'ai eu le privilège de rencontrer deux des architectes de cette modification, M. Leonard Farber, directeur général, Législation, Direction de la politique de l'impôt du ministère des Finances, et M. Brian J. Ernewein, directeur, Division de la législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt, du ministère des Finances. Lorsqu'ils sont venus me rencontrer, ils m'ont expliqué en détail la position du gouvernement, dont je voudrais à nouveau vous faire part maintenant.

Pour éliminer tout doute concernant ces questions, le budget de 2004 a proposé une mesure législative pour clarifier la position de longue date des autorités fiscales canadiennes voulant que la règle générale anti-évitement, ou RGAE, s'applique à un évitement fiscal abusif, qu'il s'agisse de la Loi de l'impôt sur le revenu, du Règlement de l'impôt sur le revenu ou des conventions fiscales conclues par le Canada. Les intéressés m'ont dit qu'il y avait un appui général pour cette modification, mais certains ont contesté l'application de la mesure à des transactions passées. Cependant, ils affirment que la proposition budgétaire reflète le point de vue selon lequel cette mesure « clarifie » les choses et ainsi, elle s'applique de façon appropriée à compter de la mise en place de la RGAE en 1988.

Ceux qui contestent cette mesure prétendent fondamentalement que, lorsqu'il a mis en oeuvre la RGAE en 1988, le Parlement voulait empêcher l'évitement fiscal contraire seulement aux règles prévues dans la Loi de l'impôt sur le revenu, mais pas au Règlement de l'impôt sur le revenu ou aux conventions fiscales. Il est difficile de supposer que cela pourrait avoir été l'intention du Parlement.

M. Farber m'a également dit qu'un certain nombre de cas d'évitement fiscal qui sont contestés aux termes de la RGAE par l'Agence du revenu du Canada, ou ARC, portent sur des stratagèmes comme ceux identifiés par le Bureau du vérificateur général et consistant pour des résidents canadiens à utiliser des fiducies constituées dans des pays signataires de conventions pour faire en sorte que des revenus et des gains ne soient pas assujettis à l'impôt canadien. Dans son rapport de 2001, le Bureau du vérificateur général a identifié 55 cas concernant 800 millions de dollars en gains en capital. Depuis la présentation de ce rapport, l'ARC a relevé environ 150 cas supplémentaires. On m'a dit que d'importantes recettes fiscales sont donc en jeu.

On m'a précisé également que le Comité permanent des comptes publics avait recommandé en 1995 que le gouvernement présente une mesure législative avec effet rétroactif dans les cas appropriés et que le ministère des Finances établisse des critères à suivre dans l'exercice de la prérogative du gouvernement de présenter des mesures fiscales avec effet rétroactif. Honorables sénateurs, je n'ai pas eu encore l'occasion de vérifier ces recommandations, mais on peut espérer que les représentants du ministère nous les soumettront lorsqu'ils comparaîtront devant le comité.

On m'a également dit, en réponse à la recommandation du comité, que le ministère avait déposé auprès du greffier du Sénat une réponse énumérant les critères pertinents devant être examinés à cet égard, que les modifications reflètent l'interprétation de longue date et bien connue de la loi par l'ARC, ce qui dénote un objectif clair et bien connu consistant à empêcher que certains contribuables n'obtiennent des bénéfices exceptionnels, et que ces mesures sont nécessaires pour préserver la stabilité de l'assiette fiscale du gouvernement et pour corriger les dispositions ambiguës ou laissant à désirer qui ne sont pas conformes à l'objet de loi.

À mon avis, ces modifications rétroactives font fi d'une règle d'interprétation juridique bien connue et bien établie qu'applique l'ARC. Le gouvernement ne devrait pas se servir de la rétroactivité pour protéger son assiette fiscale.

Honorable sénateurs, je voulais exposer le cas du gouvernement en détail afin de montrer les deux aspects de la question.

Certains arguments très forts diffèrent sensiblement de la position du ministère fédéral des Finances. Le premier point que j'aimerais soulever a trait à ce que l'on appelle en droit le fardeau de la preuve. Qui a l'obligation d'établir quoi, et quelle obligation incombe au ministère qui établit les lois? De toute évidence, il lui incombe de rédiger les lois de telle manière qu'elles soient suffisamment claires pour que tous comprennent. Il y a une règle d'interprétation bien connue qui dit qu'en cas de doute, l'interprétation doit favoriser le contribuable.

Contrairement à ce qu'affirme le ministère, l'ambiguïté du texte officiel a multiplié les contentieux fiscaux. La Cour d'appel fédérale s'est récemment penchée sur la règle générale anti-évitement et a énoncé « le critère de clarté et de non-ambiguïté ». Selon la cour, l'ARC ne peut invoquer la règle générale anti-évitement que si elle fait la preuve que la transaction ou les transactions ne respectaient pas une politique fiscale qui peut être manifestement démontrée. Aux yeux de la cour, il incombe à l'ARC de satisfaire au critère de la clarté et de la non-ambiguïté.

La Cour suprême du Canada n'a pas encore été saisie d'une cause portant sur la RGAE. Une telle cause a été déposée en mars, mais aucune décision n'a encore été prise. Elle porte sur la norme de clarté et de non-ambiguïté.

Je voudrais également dire quelques mots sur la doctrine de la suprématie. Le Canada a signé des conventions fiscales avec plus de 80 pays. Chacune de ces conventions a été incorporée dans le droit interne canadien au moyen d'une loi du Parlement qui renferme une disposition d'attribution de prépondérance. Cette disposition prévoit que la convention l'emporte sur les lois du Parlement du Canada dans la mesure où il y a incompatibilité entre les deux textes. En particulier, en vertu de la disposition d'attribution de prépondérance, les dispositions d'une convention fiscale priment sur celles de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Par exemple, la disposition d'attribution de prépondérance de la loi mettant en vigueur la convention fiscale entre le Canada et la République tchèque signée en 2001 prévoit ce qui suit :

Les dispositions de la Convention Canada-République tchèque en matière d'impôts sur le revenu l'emportent sur les dispositions incompatibles de toute autre loi ou règle de droit.

A titre exceptionnel, la disposition d'attribution de prépondérance peut être écartée dans quelques rares cas par les dispositions d'une autre loi, soit la Loi de l'impôt sur le revenu...

Son Honneur le Président : Sénateur Oliver, je suis désolé de vous interrompre...

(Le débat est suspendu.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

Son Honneur le Président : Je suis désolé d'interrompre le sénateur Oliver, mais comme il est 14 h 30, conformément à l'ordre adopté au Sénat le 19 avril 2005, je dois interrompre les délibérations pour tenir un vote par assis et debout sur la motion du sénateur Rompkey tendant à la troisième lecture du projet de loi S-18.

Le timbre appelant les sénateurs retentira pendant 15 minutes et le vote se tiendra à 14 h 45.

Convoquez les sénateurs.

(1440)

LA LOI SUR LA STATISTIQUE

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Rompkey, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Losier- Cool, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-18, Loi modifiant la Loi sur la statistique.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

POUR

LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams Lapointe
Austin Lavigne
Bacon Léger
Bryden Losier-Cool
Callbeck Maheu
Carstairs Mahovlich
Chaput Massicotte
Christensen McCoy
Cook Mercer
Corbin Milne
Cordy Mitchell
Cowan Murray
Day Nancy Ruth
Downe Pearson
Dyck Pépin
Eggleton Peterson
Fairbairn Phalen
Ferretti Barth Pitfield
Finnerty Poulin
Furey Poy
Gill Ringuette
Hervieux-Payette Robichaud
Hubley Rompkey
Jaffer Smith
Joyal Tardif—51
Kirby

CONTRE

LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus Lynch-Staunton
Buchanan Moore
Cochrane Nolin
Comeau Oliver
Cools Plamondon
Di Nino Prud'homme
Keon St. Germain
LeBreton Stratton—16

ABSTENTIONS

LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucun

(1450)

PROJET DE LOI NO 2 PORTANT EXÉCUTION DE CERTAINES DISPOSITIONS DU BUDGET DE 2004

DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Moore, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-33, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 23 mars 2004.

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, d'une manière générale, La Loi sur l'interprétation des conventions en matière d'impôts sur le revenu fait en sorte que des termes précis utilisés dans les traités fiscaux soient interprétés selon le sens donné à ces termes dans la Loi de l'impôt sur le revenu, de temps à autre, plutôt qu'uniquement au moment de la signature du traité.

Les lois de mise en œuvre des traités ne tiennent compte que de cette exception. La Loi sur l'interprétation des conventions en matière d'impôts sur le revenu ne vise ni l'interprétation ni l'application de la Règle générale anti-évitement, la RGAE, qui figure à l'article 245 de la Loi de l'impôt sur le revenu, c'est-à-dire que la loi ne prévoit pas que la RGAE puisse s'appliquer pour priver le contribuable d'avantages issus de traités, malgré la disposition d'attribution de prépondérance.

Pendant 16 ans, de 1988 à 2004, on s'est demandé si la règle générale anti-évitement, ou RGAE, pouvait s'appliquer aux non- résidents voulant se prévaloir d'un avantage prévu en vertu d'une convention fiscale, et cette question a suscité beaucoup de controverse. La documentation spécialisée sur la question a été examinée dans un mémoire publié par le comité mixte formé de l'Association du Barreau canadien et de l'Institut canadien des comptables agréés le 19 juillet 2004.

Je dois ajouter que des représentants de l'Association du Barreau canadien tout comme de l'Institut canadien des comptables agréés souhaiteraient comparaître devant le comité afin d'exprimer leur point de vue.

Le mémoire a été préparé en réponse à la proposition budgétaire. On y démontre, de façon concluante, que la plupart des fiscalistes, dont certains ont pris part à l'élaboration de la RGAE, sont d'avis que l'Agence du revenu du Canada ne peut invoquer la RGAE pour contester le droit d'un contribuable non résident aux avantages prévus en vertu d'une convention fiscale si ce contribuable satisfait par ailleurs aux conditions préalables énoncées.

L'Agence du revenu du Canada a adopté la position opposée. Elle ne fait toutefois pas mention de sa position dans la circulaire d'information sur la disposition générale anti-évitement no 88-2 qu'elle a publiée, ni dans son supplément. À mon sens, c'est le moyen tout indiqué qu'aurait dû emprunter l'ARC pour énoncer officiellement sa position sur cette question de première importance.

Jusqu'à présent, la Cour canadienne de l'impôt a rendu une seule décision sur la question de la RGAE et des conventions fiscales. Le jugement, rendu neuf ans après l'adoption de la RGAE, contenaient quelques énoncés en faveur de la position de l'Agence du revenu du Canada, qui ne constituaient néanmoins que ce l'on appelle, dans le langage juridique, des obiter dictum ou remarques incidentes.

En 2004, deux causes qui devaient être entendues devant la Cour canadienne de l'impôt auraient probablement permis de résoudre la controverse. Toutefois, dans les deux cas, l'ARC, a décidé in extremis de régler hors cour. Dans un cas, au cours de l'audience préliminaire, le juge Michael Bonner, de la Cour canadienne de l'impôt, avait affirmé douter grandement que l'ARC, dans sa contestation, puisse invoquer la RGAE pour empêcher un habitant de Malte de bénéficier de la convention fiscale entre le Canada et la République de Malte. J'ai demandé au ministère pourquoi il avait réglé, et je n'ai pas eu de réponse.

Les propositions budgétaires ont pour but de résoudre cette controverse, et le ministère des Finances a déposé le 16 septembre 2004 un avant-projet de loi visant à modifier la RGAE. Dans les mesures budgétaires et l'avant-projet de loi, on propose que les changements soient rétroactifs à 1988. De plus, dans les mesures législatives et l'avant-projet de loi, on précise que les changements visent à « clarifier » l'application de la RGAE.

Honorables sénateurs, certains soutiennent fermement que cette notion de clarification est aussi inexacte que trompeuse. Les changements ont pour but de résoudre une véritable controverse concernant l'application de la RGAE aux conventions fiscales, mais ils ont aussi pour effet de priver les contribuables dont le dossier est en cours d'évaluation, ou devrait l'être sous peu, du droit d'invoquer la possibilité que cette règle ne s'applique pas. Comme suite des changements rétroactifs à la RGAE, cet argument ne sera plus valable. En conséquence, les changements à la RGAE anéantissent les droits des contribuables et font abstraction des principes d'équité et de primauté du droit.

Les honorables sénateurs savent que lorsque l'Agence du revenu du Canada veut énoncer clairement sa position, elle le fait en publiant ce que l'on appelle des circulaires d'information. Néanmoins, aucune circulaire sur la question particulière de la RGAE n'a jamais été publiée.

Pour être certain de m'être bien fait comprendre, je me permets d'exposer de nouveau mes principales préoccupations concernant la rétroactivité. Pendant 17 ans, de 1988 à 2005, on s'est demandé si la RGAE pouvait s'appliquer aux cas des non-résidents voulant se prévaloir d'un avantage prévu en vertu d'une convention fiscale, et cette question a suscité beaucoup de controverse. La plupart des fiscalistes, dont certains ont pris part à l'élaboration de la RGAE, sont d'avis que l'on ne peut invoquer la RGAE pour contester le droit d'un contribuable non résident aux avantages prévus en vertu d'une convention fiscale. L'ARC n'a jamais énoncé clairement sa position sur la question. Elle n'a pas abordé la question dans la circulaire d'information sur la disposition générale anti-évitement no 88-2 ni dans son supplément, qu'elle a publiés en 1988 et en 1990.

Mais ce qui suit est plus important encore : le ministère des Finances est préoccupé parce que faute d'avoir agi en temps utile il n'a peut-être pas réussi à dissiper cette controverse et il essaie maintenant de corriger le tir en donnant un effet rétroactif à l'application de cette règle, soit 1988, au détriment des contribuables canadiens. Il y a peut-être une solution, celle de donner l'effet rétroactif à l'application de cette règle à la date du budget, soit celui de 2004.

Il appartient aux tribunaux de décider si la règle générale anti- évitement s'appliquait dans le cadre d'un traité.

En conclusion, honorables sénateurs, je dirai qu'en tant que disposition d'application pour ainsi dire universelle, la règle générale anti-évitement empiète déjà sur le besoin de certitude qu'ont les contribuables pour planifier leurs affaires. Le fait d'étendre l'application de la règle générale anti-évitement en lui donnant un effet rétroactif de 17 ans, ce qui nous ramènerait à l'année de son adoption, comme le ministère des Finances propose de le faire, constituerait un exercice du pouvoir législatif qui est sans précédent et qui fait fi de la jurisprudence actuelle concernant la règle générale anti-évitement et des principes du droit fiscal canadien.

Honorables sénateurs, des témoins aimeraient être entendus. Je ne suis pas un expert en matière de fiscalité. J'espère que les membres du comité auquel sera renvoyée cette question auront l'occasion d'entendre des experts qui pourront répondre aux questions que je viens de soulever.

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je suivrai l'exemple du sénateur Oliver en déclarant d'emblée que je ne suis pas un avocat spécialisé dans les domaines de la législation fiscale ou de la fiscalité. Ces domaines complexes sont les domaines de prédilection des esprits savants et avertis. Je n'ai pas cette prétention.

Toutefois, je tenterai d'expliquer la façon dont je comprends les dispositions du projet de loi à l'étude. De par sa nature, la rétroactivité est contraire à la justice et à l'équité. C'est un principe de base en droit pénal. Ce qui est licite aujourd'hui ne peut pas rendu illicite demain par une loi du Parlement. En d'autres mots, on ne saurait être inculpé aujourd'hui pour un acte qu'on a fait licitement hier en toute bonne foi et dans le respect de la loi. Cela me semble clair. Ce principe de base de la common law est appliqué tant dans le droit pénal que dans le droit civil. Il fait appel au sens d'équité et de justice.

J'essaie de me tenir au courant des questions fiscales même si je ne participe habituellement pas aux discussions sur ces questions dans cette enceinte. Franchement, lorsque l'Association du Barreau canadien et l'Institut canadien des comptables agréés présentent des arguments convaincants pour dire que nous devrions effectuer un second examen objectif d'une mesure dont nous sommes saisis, je crois que nous devons prendre le temps de réfléchir.

(1500)

Le problème que pose ce projet de loi, c'est qu'il élargit la portée de la règle générale anti-évitement. Si je comprends bien, il élargirait la portée actuelle de cette règle pour qu'elle s'applique non seulement à la Loi de l'impôt sur le revenu, mais aussi au Règlement de l'impôt sur le revenu, aux Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu et à toute convention fiscale bilatérale. Il en élargit la portée. Ce n'est pas comme si nous légiférions de façon rétroactive à l'égard d'une loi seulement. On nous demande de légiférer de façon rétroactive relativement à un vaste éventail d'autres documents ou obligations juridiques qui n'étaient pas prévus à l'origine.

On ne nous demande pas ici de clarifier, mais bien d'élargir, et de le faire de façon rétroactive. À mon avis, nous devons bien réfléchir lorsqu'on nous demande d'agir de la sorte. Il peut y avoir de bonnes raisons, et il y en a, comme je peux le voir dans la législation et les règles administratives du ministère des Finances. Il peut y avoir un contexte où cela est possible. Je n'ai aucun doute à cet égard. J'ai lu certaines des règles administratives financières, et cette possibilité existe. Cependant, lorsque cela se fait, c'est toujours, ou la plupart du temps, en faveur du contribuable, et non pour enrichir le Trésor de façon rétroactive, dans ce cas en remontant 17 ans en arrière, en élargissant la portée des dispositions législatives adoptées à l'origine.

L'autre chose troublante dans tout cela, c'est qu'on nous a dit : « Ne vous en faites pas, ce n'est qu'une question d'ordre administratif. La législation, spécialement la législation fiscale, est très complexe, et nous voulons préciser davantage l'étendue des obligations du contribuable. Nous ne faisons qu'aider le contribuable. »

Honorables sénateurs, ce problème n'est pas nouveau. Le ministère des Finances et Revenu Canada sont au courant de ce problème depuis 1988. J'ai examiné la liste de tous les articles ou commentaires que des spécialistes en matière fiscale ou juridique ont rédigés depuis 1988, expressément sur la question de l'interprétation de la règle anti-évitement. Il y en a 18. De tels articles ont été publiés à peu près chaque année. Il ne s'agit pas d'un nouveau problème qu'on vient soudainement de découvrir et qu'on tente de corriger. Si le ministère des Finances n'a rien fait au sujet de ce problème depuis 18 ans, il ne peut pas invoquer comme excuse le fait qu'il n'était pas au courant du problème.

Le problème a été bien défini dans un article de Lindsay intitulé « The General Anti-avoidance Rule : Points to Consider », publié dans le rapport de la conférence de l'Association canadienne d'études fiscales tenue en 1988. Il a été soulevé de nouveau par Arnold et Wilson, dans un article intitulé « The General Anti- avoidance Rule, Part 3 », publié en 1988 dans la Revue fiscale canadienne. Le problème a aussi été abordé par Tremblay, dans un article intitulé « Permanent Establishment in Canada », publié également par l'Association canadienne d'études fiscales en 1989, et ça se poursuit en 1993, 1994, 1996, 1997, 1998, 1999, et de 2001 à 2004. À maintes occasions, les professionnels qui s'intéressent à ces questions ont fait part de leurs préoccupations et observations à ce sujet. Autrement dit, ce problème n'est pas nouveau. Il remonte à loin.

Que nous demande-t-on de faire? On nous demande de régler des affaires dont la cour est déjà saisie, d'y mettre un terme en privant de leur droit d'appel des gens qui se sont déjà tournés vers la cour. Nous les privons de leur droit d'appel. C'est très grave, honorables sénateurs. Ces gens-là ont un droit constitutionnel garanti par la Charte canadienne des droits. Si l'on empêche quelqu'un de se prévaloir de son recours devant un tribunal, alors que l'affaire est en instance, on crée un grave précédent et c'est un problème de taille.

Nous essayons de mettre un terme à ce que je considère comme un recours normal dont se prévaut un contribuable qui veut obtenir une décision équitable quant à sa responsabilité de payer et, bien entendu, quant à la responsabilité de l'État de prélever l'argent nécessaire pour payer les dépenses publiques. Nous devons arriver à un juste équilibre entre ces intérêts. Nous devons, lorsque nous adoptons des lois fiscales, être équitables envers tout le monde. Nous ne voulons pas que les gens abusent du Trésor, qu'ils le contournent ou qu'ils n'en tiennent pas compte, mais nous voulons aussi être justes envers le contribuable. La plupart des Canadiens paient des impôts, sinon la totalité d'entre eux, par le biais des taxes indirectes et directes, des taxes de vente, de l'impôt sur le revenu et de toutes les autres dispositions qui existent dans les volumineuses lois fiscales, que ce soit aux niveaux provincial, municipal ou fédéral.

Honorables sénateurs, nous devons prendre un temps d'arrêt et réfléchir aux principes qui sont en jeu. Je répète encore une fois que je n'ai pas l'intention de vous parler de toutes les répercussions de ce qu'on nous demande de faire aujourd'hui. Elles sont nombreuses et je ne peux toutes les aborder dans les quelques minutes qui me sont allouées maintenant. Néanmoins, je demande sincèrement que le Comité sénatorial permanent des finances nationales, normalement si bien doté en matière de représentation sénatoriale, convoque des témoins et des experts à cet égard. C'est une question importante qui porte sur des principes fondamentaux de notre régime fiscal. Je comprends fort bien l'incidence globale de la question et je tiens également à éviter les abus et les mauvais usages de notre régime fiscal, mais je soutiens qu'il faut être équitable, dans l'ensemble, lorsqu'on apporte des corrections ou des précisions. On ne peut apporter des corrections ou des précisions sous le prétexte d'être juste envers tout le monde alors que, dans les faits, on alourdit les responsabilités des contribuables, particulièrement lorsqu'il s'agit d'une mesure rétroactive qui les prive de leur droit de porter leur cause devant une instance supérieure. C'est une question assez sérieuse.

J'ose vraiment espérer que le comité entendra le témoignage des experts. J'en ai mentionné quelques-uns plus tôt. Ce sont des représentants du Barreau. J'aimerais mentionner entre autres le président de la Section nationale de droit fiscal de l'Association du Barreau canadien, M. Brian Carr, son représentant et les membres de son comité, et le président du comité sur la fiscalité de l'Institut canadien des comptables agréés, M. Paul Hickey. J'aimerais que le comité entende des représentants des consommateurs.

(1510)

Ce sont des questions complexes, honorables sénateurs, et nous devons nous mettre à la place des contribuables. Si nous voulons que les contribuables respectent leur obligation de déclarer spontanément leur revenu, ils doivent croire que le système est juste et équilibré. Cette confiance est essentielle pour maintenir le genre de système fiscal que nous avons aujourd'hui. Les contribuables ne reçoivent pas d'avis qui les oblige à payer; ils paient d'eux-mêmes. C'est une initiative très importante dans une société libre et démocratique, parce qu'elle repose sur la confiance que le système fonctionnera de façon juste et équitable.

Encore une fois, je demande aux sénateurs des deux côtés de la Chambre qui siégeront au comité qui étudiera ce projet de loi de porter une attention particulière aux principes qui vont au-delà des complexités du système, car ils sont à la base du droit fiscal au Canada. Si notre système a si bien fonctionné jusqu'à présent, c'est parce que ces principes ont été rigoureusement maintenus dans l'amélioration du projet de loi qu'on nous demande d'approuver aujourd'hui.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je tiens à remercier le sénateur Joyal de son intervention.

Avant de poser ma question, je signalerai que le vice-président et le président du Comité des finances sont tous deux présents aujourd'hui. Peut-être devraient-il s'engager à faire en sorte que ce dossier important et les points importants soulevés par le sénateur Joyal reçoivent l'attention voulue et soient examinés comme il se doit.

Le sénateur Joyal a soulevé deux grandes questions à la fois complexes et importantes. Tout d'abord, le phénomène de la rétroactivité, qui est un ancien principe qui consiste à remonter dans le temps. Selon ce principe, aucun dirigeant ou gouvernement ne devrait tenter d'appliquer des règles rétroactivement en retournant en arrière pour retirer les droits, les obligations et les privilèges des citoyens. Énormément de sources confirment ce principe.

L'honorable sénateur a soulevé une autre question aussi importante et complexe, mais pas nécessairement connexe. Je parle du fait que ce projet de loi semble retirer la compétence des tribunaux tout en supprimant les droits des citoyens.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le temps de parole du sénateur Joyal est écoulé. Demande-t-il la permission de poursuivre?

Le sénateur Joyal : Je sais que d'autres sénateurs veulent s'exprimer, notamment le leader du gouvernement. J'aimerais l'entendre. J'aimerais l'écouter attentivement.

Si madame le sénateur peut poser sa question, je vais essayer de lui répondre.

Le sénateur Cools : Je me demande de quelle façon ces deux aspects distincts sont liés dans le projet de loi? Ce sont deux caractéristiques essentiellement répugnantes. Je ne connais pas très bien le projet de loi, mais maintenant celui-ci m'intéresse beaucoup. Par conséquent, je vais commencer à travailler sur cette mesure. Pourriez-vous fournir une explication?

Peut-être devrais-je attendre et demander au sénateur Austin de nous montrer de quelle façon ces deux principes ou ces deux aspects sont liés, étant donné qu'il est préférable que l'explication soit fournie par un membre du gouvernement.

Le sénateur Joyal : Je préfère effectivement attendre la présentation du sénateur Austin, qui s'y connaît probablement beaucoup mieux que moi dans le domaine de la législation fiscale.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je veux d'abord remercier le sénateur Oliver et le sénateur Joyal de leurs contributions au débat sur le projet de loi C-33, à l'étape de la deuxième lecture. Ils ont soulevé des points qui, de toute évidence, doivent être étudiés par le Comité sénatorial permanent des finances nationales. J'ai cru comprendre, suite à des conversations dans les corridors, que l'on semblait avoir l'impression que le gouvernement souhaitait que le comité fasse rapport du projet de loi ce soir. Ce n'est pas le cas. Le gouvernement aimerait que le projet de loi soit envoyé au comité aujourd'hui. Le ministre des Finances est disponible et il veut traiter de la question de l'anti-évitement et de celle de savoir si cette règle est rétroactive ou non. J'espère que l'occasion en sera fournie au ministre des Finances ce soir parce que, comme les honorables sénateurs le savent, nous ne siégerons pas la semaine prochaine et il serait utile que des questions puissent être posées au ministre, afin que les sénateurs puissent s'en aller étudier de façon appropriée les réponses fournies.

Je tiens à ce qu'il soit absolument clair qu'il y a d'autres témoins, comme par exemple les représentants de l'Association du Barreau canadien et de l'Institut Canadien des Comptables Agréés, qui n'ont aucun intérêt personnel, professionnel ou commercial lié à cette question. Ce sont des spécialistes et ils devraient être entendus. Or, le comité est l'endroit approprié à cette fin. Nous pouvons discuter ici, mais les choses n'avanceront pas si nous n'avons pas les faits et les arguments présentés par ceux qui sont touchés sur le plan professionnel, ainsi que par les représentants du gouvernement et les ministres.

J'aimerais avoir l'appui des honorables sénateurs pour adopter le projet de loi C-33 à l'étape de la deuxième lecture et le renvoyer au Comité sénatorial permanent des finances nationales pour qu'il y fasse l'objet d'un bon examen.

Évidemment, le gouvernement voudrait qu'on soit expéditif dans l'adoption de ce projet de loi, qui découle du budget de 2004, alors que nous arrivera bientôt le projet de loi d'exécution du budget de 2005. Je ne peux pas dire exactement aux honorables sénateurs quel jour exactement nous le recevrons. Il est entre les mains de l'autre chambre.

Il me semble que le principal problème mis en évidence par le débat jusqu'à maintenant est celui de la disposition générale anti- évitement. Cette disposition est-elle rétroactive et peut-on démontrer qu'elle l'est ou qu'elle ne l'est pas? C'est à la fois une question de fait et une question de droit. Nous verrons ce que le comité en dira.

Honorables sénateurs, j'aimerais que vous songiez sérieusement à renvoyer aujourd'hui le projet de loi au comité.

Le sénateur Cools : Sénateur Austin, le Sénat aura bientôt l'occasion de se prononcer à cet égard.

Pour revenir au fond de la question, j'aimerais que l'honorable sénateur nous donne des éclaircissements en bonne et due forme sur la question dont j'ai parlé, à savoir la rétroactivité. La rétroactivité a toujours répugné au Parlement puisque le gouvernement de Sa Majesté ne peut tout simplement pas passer son temps à remettre en question les décisions du gouvernement précédent en remontant dans le temps pour annuler ou altérer des droits existants. Il s'agit d'un principe de droit parlementaire bien connu.

Le sénateur Joyal nous a rappelé expressément ce principe aujourd'hui avec beaucoup d'éloquence, et j'aimerais que l'honorable leader nous en dise davantage sur ce sujet. Le parrain du projet de loi au sein du gouvernement l'a peut-être fait lorsqu'il a pris la parole il y a deux jours.

J'aimerais aussi demander au leader d'expliquer les ramifications de cette disposition dont l'effet rétroactif remonte à 1988, ce qui est assez loin en arrière selon le sénateur Oliver, tout en faisant le lien avec un autre phénomène tout aussi répugnant, à savoir l'élimination de toute possibilité de recours judiciaire pour les citoyens qui se sentent lésés et qui voudraient demander réparation.

Je sais que mon honorable collègue me dira que le projet de loi sera étudié en comité, mais j'estime quand même que nous devrions faire notre possible pour établir et défendre le fait que les questions qui sont soulevées en cette enceinte méritent d'être éclaircies en cette même enceinte. J'estime que c'est la raison d'être de l'ancienne expression « aux fins du compte rendu ».

(1520)

Pourriez-vous m'expliquer cette dualité? Ces deux aspects sont, à mon avis, indésirables, mais comment sont-ils liés dans ce projet de loi? C'est une question importante qu'ont soulevés les honorables sénateurs. Il faudrait que le compte rendu fasse état de la réponse.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, en ce qui concerne la première partie de la question de l'honorable sénateur, on ne peut remettre en question le pouvoir du Parlement d'adopter des lois. Si celui-ci adopte une loi explicitement rétroactive, personne ne peut l'en empêcher. La question relève de la politique publique et c'est pourquoi, étant donné les circonstances, nous en débattons.

Cependant, je ne dis pas que ce problème s'applique au projet de loi C-33. En ce qui concerne celui-ci, et notamment son article portant sur la règle anti-évitement, il s'agit de se pencher sur la preuve, sur les faits et sur la façon dont Revenu Canada s'est occupé de la question pour déterminer si, depuis 1988, le public a effectivement été avisé du changement. Le public auquel je fais référence en l'occurrence est celui des professionnels qui s'occupent des règles fiscales.

Faute de preuves, le comité risque de conclure qu'il s'agit là d'un cas de rétroactivité implicite ou explicite.

Je remercie l'honorable sénateur de sa question mais, comme je l'ai indiqué dans mon intervention de tout à l'heure, c'est une question qu'il conviendrait davantage de soumettre au comité. Le comité pourra alors entendre les différents exposés sur le sujet et tout autre sujet à son gré, puis tirer ses conclusions après avoir examiné la situation.

Honorables sénateurs, je répète que la tribune idéale pour l'examen pour ces questions de fond, c'est le comité même.

Le sénateur Cools : Je remercie le leader de cette réponse. Je me trompe peut-être et, le cas échéant, le leader pourra me corriger. J'ai entendu le leader du gouvernement dire que les travaux de ce comité étaient si importants qu'il était disposé à encourager le comité à examiner à fond la question et à entendre les témoins, qui jouent un rôle crucial et qui sont plus que disposés à venir parler. J'ai également entendu le leader dire qu'il voulait que le projet de loi soit renvoyé au comité dès aujourd'hui, mais qu'il souhait aussi que le comité soumette le dossier et le projet de loi à l'examen minutieux qu'ils méritent largement.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je ne m'attends pas à ce que les audiences s'étalent sur des jours et des semaines. Ce que j'ai dit, c'est que le comité devrait faire comparaître les associations professionnelles telles que l'Association du Barreau canadien et l'Institut canadien des comptables agréés. Si le comité conclut que d'autres parties indépendantes auraient des recommandations à formuler sur la question et qu'il veut les entendre, eh bien, il n'aura aucune objection de ma part.

L'honorable Gerald J. Comeau : Ma question s'adresse au ministre. J'écoutais le ministre expliquer comment, en fait, le Sénat pouvait voter rétroactivement ou voter pour modifier la loi de façon rétroactive — et je peux comprendre d'où cela vient. Néanmoins, je donne suite à l'observation de madame le sénateur Cools, qui a dit trouver cela plutôt répugnant. Je n'ai pas entendu le leader du gouvernement employer le qualificatif « répugnant », mais chaque fois que nous remontons dans le temps pour changer les règles du jeu, cela me répugne.

Nous en sommes maintenant à l'étape du vote de principe. Autrement dit, nous disons au comité que nous approuvons en principe le concept de rétroactivité pour la mesure d'anti-évitement proposée au gouvernement.

Je n'aborderai pas la question de l'anti-évitement : on en laissera le soin au comité. Ce qu'on nous demande de faire ici, c'est de dire si nous appuyons ou non le principe de rétroactivité dans le cas qui nous occupe. C'est justement l'aspect qui me répugne. Cela me fait penser à des gérants d'estrade qui décideraient, le lundi matin, de changer les règles du jeu, et qui pourraient changer les règles de la joute du samedi précédent; il nous faudrait attendre que ces gérants d'estrade viennent nous dire quelles étaient les règles pour la partie déjà jouée. À ce train-là, les partisans auraient tôt fait de se désintéresser du jeu parce que cela n'a pas de bon sens de changer les règles du jeu à tout bout de champ, selon les caprices de cet endroit ou de l'autre endroit.

En tant que parlementaires, nous devons être très circonspects quand il s'agit d'agir rétroactivement et de changer les règles du jeu après coup. C'est ce que nous avons fait cet après-midi avec le projet de loi S-18, en décidant de revenir sur une promesse faite aux Canadiens il y a quelques années déjà. Nous pouvons le faire, et c'est ce que vous avez fait valoir à l'appui du projet de loi S-18. Nous parlons maintenant de règles à effet rétroactif relativement à des dispositions fiscales. Le sénateur Joyal a très bien fait ressortir, tout à l'heure, qu'il y a une question de confiance qui entre en ligne de compte. Pendant combien de temps les Canadiens nous feront-ils confiance, en tant que parlementaires chargés d'adopter des lois, si nous commençons à changer les règles après coup? Il faut être bien conscients de ce risque. Si nous adoptons cette façon extrêmement répugnante d'édicter des lois, nous finirons, au bout du compte, par en payer le prix, comme parlementaires et comme gouvernement.

Le sénateur Austin : Je considère ces observations comme une question, et j'y répondrai de la façon suivante.

On ne pourra pas tirer de conclusion avant que la question et les arguments n'aient été examinés par le comité, qui est le mieux placé pour le faire. Nous ne réglerons pas ici les questions soulevées par les honorables sénateurs. Nous ne pouvons nous permettre de sauter aux conclusions sur quelque projet de loi que ce soit.

Sénateur Comeau, vous êtes un législateur chevronné et vous savez que l'approbation de principe concerne de nombreux éléments de ce projet de loi et que les comités sont habilités à proposer des amendements. Le cas échéant, il n'existe aucune règle selon laquelle l'approbation de principe empêche tout changement. En fait, c'est précisément le contraire, comme le sait pertinemment l'honorable sénateur. Comme le veut la pratique parlementaire, nous pouvons aller de l'avant avec les principes du projet de loi, mais nous devons aussi voir comment l'assemblée législative est invitée à appliquer ces principes.

Rien n'empêche le comité de faire ce qu'il juge à propos.

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, j'aimerais faire quelques observations au sujet du projet de loi. Je puis le faire aujourd'hui ou demain. Je n'accepterai pas, cependant, que le projet de loi soit renvoyé, puis examiné par le comité trois heures plus tard. Il s'agit d'une requête extraordinaire. Le fait que le ministre souhaite que nous passions à la deuxième lecture du projet de loi et le renvoyions au comité aujourd'hui est une chose. Si le Sénat souhaite le faire, il pourra évidemment le faire et je ne m'y opposerai pas. Ce à quoi je m'objecte, cependant, c'est que le comité entame ses délibérations sur le projet de loi dès ce soir. Ce n'est pas acceptable. Cette pratique est réservée aux situations urgentes et exceptionnelles, ce qui n'est pas le cas ici.

Je ferai remarquer au ministre et au Sénat que nous avons étudié le projet de loi à un rythme passablement lent. Je ne me souviens pas précisément à quelle date il nous a été renvoyé, mais il s'est écoulé beaucoup de temps avant le début du débat de deuxième lecture. Il n'y a donc pas urgence.

Je suis prêt à exposer mon point de vue dès aujourd'hui, si le Sénat le désire, sinon je peux attendre à demain. Je donne avis que je m'oppose à ce que nous dérogions au Règlement pour permettre au comité d'entamer l'étude du projet de loi ce soir. Que le Sénat siège ou non la semaine prochaine, et cette question semble entrer en ligne de compte, le comité pourra toujours tenir séance et il disposera même de plus de temps, la semaine prochaine, pour entendre les représentants du ministère des Finances et d'autres personnes de l'extérieur du gouvernement désireuses de comparaître.

(1530)

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je n'ai rien à redire aux propos du sénateur Murray, mais j'ai effectivement dit que le ministre des Finances serait disponible ce soir pour répondre à la principale préoccupation du président du comité, le sénateur Oliver, ainsi qu'au sénateur Joyal et peut-être à d'autres sénateurs. J'ignore quand le ministre des Finances sera à nouveau disponible. Je n'éprouve aucun souci à ce sujet. J'aimerais que le projet de loi soit renvoyé au comité dès ce soir, et aussi que le ministre des Finances soit entendu. Comme je l'ai mentionné, le comité pourrait alors décider de la poursuite de ses travaux.

Son Honneur le Président : Avant que je n'aie plus l'occasion de le faire, honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune de notre ancien collègue, l'honorable Bill Kelly. Je lui souhaite la bienvenue à son retour dans cette enceinte.

Le sénateur Murray : Honorables sénateurs, il me serait impossible d'ajouter à l'énoncé de faits que nous a fourni le sénateur Oliver en ouvrant le débat au nom de l'opposition officielle, ou encore de faire un meilleur énonce de principe que celui du sénateur Joyal, alors je n'essaierai pas. Je souhaite rappeler certains faits aux sénateurs, puis leur demander de réfléchir à certaines questions.

Il y a presque deux ans jour pour jour, au printemps 2003, le Sénat avait été saisi d'un projet de loi d'exécution du budget pour l'exercice en cause. Il comportait également une disposition rétroactive.

À cette occasion, un groupe de contribuables — des commissions scolaires, principalement du Québec, dans mon souvenir — avaient réclamé auprès des tribunaux de se faire rembourser la TPS qu'ils avaient versée pour le transport d'écoliers. Je crois me rappeler que le transport avait été confié à contrat, c'était la raison du litige. Un deuxième groupe de contribuables qui envisageaient de recourir aux tribunaux avaient convenus avec la Couronne de « consentir à jugement », autrement dit de se plier à la décision que rendraient les tribunaux au premier groupe.

Les tribunaux ont rendu un décision favorable au premier groupe de contribuables, les commissions scolaires, après quoi le ministre des Finances, dans un geste d'une mauvaise foi inqualifiable, contraire à l'entente intervenue, avait recouru à une mesure législative rétroactive afin que les contribuables du second groupe n'obtiennent pas de remboursement, même s'ils se trouvaient dans la même situation.

Nous en avons débattu au Sénat. Des gens tels que Roger Tassé, un ancien sous-ministre de la Justice, et Marc Lalonde, ancien ministre des Finances et de la Justice, ont comparu devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales. Je reconnais d'emblée que ces deux personnes ont agi de façon professionnelle et au nom de leurs clients, mais ce ne sont pas des gens du genre à mettre leur réputation à jeu et à dire ce qu'ils ont dit au sujet de la violation de la primauté du droit à moins qu'ils n'en soient absolument convaincus. Simon Potter, le président de l'Association du Barreau canadien, et d'autres sont venus témoigner devant le comité pour protester contre ce qui se faisait.

Un témoin expert a mentionné un autre exemple qui s'était produit deux ans auparavant. Son opinion sur la législation rétroactive était que nous faisions fi de la procédure.

Enfin, nos vieux amis, le sénateur Beaudoin et le sénateur Bolduc, sont intervenus. Le sénateur Moore, je dois dire, a plaidé contre la législation rétroactive, mais elle a tout de même été adoptée.

L'une des choses que nous devons craindre, selon moi, dans de tels cas est que, dès qu'un précédent de cet ordre est établi, le ministère et le gouvernement ne se font pas prier pour revenir à la charge une deuxième et une troisième fois, en se fondant sur ce précédent. C'est ce qui se produit dans le cas qui nous occupe.

Le leader du gouvernement au Sénat affirme qu'il y a lieu de se demander si le projet de loi a un effet rétroactif. Or, le projet de loi dit ceci :

La définition de « traité fiscal », au paragraphe 248(1) de la même loi, est réputée, pour l'application de l'article 245 de la même loi, être entrée en vigueur le 13 septembre 1988.

Si ce n'est pas rétroactif, qu'est-ce que c'est? Un peu plus loin, on lit encore ceci :

Les paragraphes (1) à (3) s'appliquent relativement aux opérations conclues après le 12 septembre 1988.

On ne peut que conclure qu'il s'agit d'un projet de loi rétroactif.

Je crois que le sénateur Oliver et le sénateur Joyal nous l'ont dit, mais, je le répète, dans deux causes entendues par les tribunaux, il a été déclaré que la règle générale anti-évitement ne s'applique pas aux règlements promulgués en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Cela peut surprendre — et surprend — le profane que je suis, mais ce sont des décisions rendues par des tribunaux. Si la règle générale anti-évitement ne s'applique pas à ces règlements, comment peut-on croire qu'elle s'appliquera à des traités fiscaux qui ont primauté sur la Loi de l'impôt sur le revenu?

Honorables sénateurs, je m'oppose avec véhémence à ce que le gouvernement essaie de corriger une situation en faisant quelque chose qu'il croit qu'il aurait dû faire en 1988.

Nous pouvons entendre le témoignage sur les principes — pour peu qu'il en ait — du ministre des Finances, des fonctionnaires et d'autres personnes. Je remercie le parrain du projet de loi d'avoir organisé quelques séances d'information privées. Je crois que l'opposition officielle, quelques parlementaires intéressés, ont eu une séance d'information privée animée par des fonctionnaires du ministère des Finances, tout comme quelques partisans du gouvernement et quelques sénateurs indépendants, dont moi- même, qui sommes intéressés par la question.

Honorables sénateurs, je veux prendre quelques minutes pour réfléchir à la question et à ceci : le sénateur Joyal a fait une allusion intrigante à la Charte des droits et libertés. Je dois dire que, après avoir lu la disposition du projet de loi et avoir entendu les interventions à ce sujet, le profane que je suis se demande si la Charte n'entre pas en jeu et si la question de la primauté de la règle de droit au Canada n'est pas aussi en cause.

Je n'arrive pas à comprendre comment une telle disposition a pu être produite par le cabinet du ministre.

Le sénateur Cools : En effet.

Le sénateur Murray : Les honorables sénateurs savent que notre système est basé sur l'application régulière de la loi : il y a des automatismes régulateurs dans le système ministériel lorsque des initiatives législatives sont présentées. Le Bureau du Conseil privé, le Conseil du Trésor et diverses autres agences centrales ont également un rôle à jouer à cet égard. Le ministère de la Justice, en particulier, est l'un de ces automatismes régulateurs. Ces fonctionnaires ont l'obligation législative et, évidemment, constitutionnelle, d'examiner les questions et les initiatives dans le contexte de la Charte et, en fait, même dans le contexte de la Déclaration des droits, dite de Diefenbaker.

Je n'arrive pas à croire que les fonctionnaires du ministère de la Justice et, bien entendu, le ministre lui-même, pourraient, tout en respectant les obligations de leur profession, ne pas s'opposer à une telle disposition dans un avant-projet de loi comme celui-ci. Je ne peux croire qu'ils ne diraient pas : « Oh! Rétroactif jusqu'à 17 ans? Ce n'est pas ainsi que les choses se passent dans un pays qui respecte la primauté du droit. »

Nous ne saurons jamais ce qui est arrivé au Cabinet, si une objection a été soulevée, et laquelle. Je ne veux pas penser qu'aucune objection n'a été soulevée. Je finis par conclure que l'objection a simplement été rejetée et même, pire, que le ministère de Finances est hors de tout contrôle. Il n'y a pas d'autre conclusion dans un cas comme celui-ci.

Le projet de loi arrive au bout de la procédure ministérielle et est envoyé à la Chambre des communes. C'est là une deuxième chance d'y changer quelque chose. Le projet de loi est ensuite renvoyé à un comité. J'ai ici un compte rendu, mais je ne vais pas lasser les sénateurs avec les détails, car tous peuvent le consulter à loisir.

(1540)

M. Monte Solberg, porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances, a soulevé la question avec les fonctionnaires. Il a lu le texte, s'est rendu compte que la mesure était rétroactive et a posé quelques questions. Les fonctionnaires lui ont affirmé qu'il ne s'agissait que d'éclaircissements. Toutefois, même à première vue, il ne s'agit pas simplement d'éclaircissements. Si M. Solberg avait eu l'occasion ou s'il avait voulu pousser la question plus loin, cela aurait pu être établi. De toute façon, personne d'autre n'a soulevé la question devant le comité ou à la Chambre des communes. Le projet de loi a été adopté rapidement à l'autre endroit et le Sénat en a maintenant été saisi. C'est notre dernière chance d'empêcher un grave abus de pouvoir. Si le Sénat n'a pas été créé pour agir dans des circonstances de ce genre, je ne vois vraiment pas à quoi il devait servir.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, le sénateur Murray se demande ce que les fonctionnaires du ministère de la Justice, le ministre des Finances et ses collaborateurs ont à dire à ce sujet. Le sénateur Murray, qui est membre du Comité sénatorial des finances, a fait un discours qui serait extraordinaire si nous en étions à la troisième lecture du projet de loi. Toutefois, il est quelque peu étonnant de constater qu'il a déjà une opinion si marquée dès l'étape de la deuxième lecture, avant l'audition des témoignages en comité sur le projet de loi.

Honorables sénateurs, il fait partie de nos pratiques fiscales que le ministère publie des bulletins d'interprétation pour donner des instructions sur la façon d'interpréter certaines dispositions fiscales. La question est la suivante : quel avis le ministère du Revenu national a-t-il donné aux contribuables relativement à cette règle anti-évitement?

J'ai dit que ces questions doivent être débattues comme il convient en comité, où les sénateurs peuvent entendre des témoignages présentés par des gens bien informés sur le sujet en question, ce qui les aide à étudier le projet de loi. Je demande au sénateur Murray s'il est disposé à ce que cette question soit renvoyée au comité afin d'entendre le ministre des Finances exposer le point de vue du gouvernement, ou du moins son point de vue comme ministre des Finances, ce soir?

Le sénateur Murray : Honorables sénateurs, il ne faudrait pas donner à ce projet de loi un caractère d'urgence qui justifierait que moi, ou toute autre personne, consente à une deuxième lecture maintenant de façon à ce qu'on puisse renvoyer le projet de loi au comité ce soir. Ce type d'urgence n'existe pas. Nous pouvons prendre des dispositions avec le ministre et avec le comité. Le comité s'est montré extrêmement coopératif sous la présidence du sénateur Oliver pour ce qui est du calendrier de comparution des témoins. Je ne m'oppose aucunement à ce que ce projet de loi soit renvoyé au comité, si c'est ce que le Sénat souhaite faire. J'ai dit ce que j'avais à dire à la deuxième lecture et je ne suis pas disposé à donner mon consentement pour que le comité se rencontre dans environ deux heures pour commencer ses délibérations. Ce n'est pas la bonne façon de faire et ce type d'urgence n'existe pas.

Le sénateur Cools : Honorables sénateurs, cette situation est de plus en plus déconcertante. J'avais cru comprendre que le sénateur Austin voulait que la question soit mise aux voix aujourd'hui et que le vote porte sur le renvoi du projet de loi au comité. Le sénateur Austin agit de façon exceptionnelle en demandant que le projet de loi soit renvoyé au Comité des finances ce soir pour qu'il entende le témoignage du ministre. Honorables sénateurs, cette proposition ne peut pas être présentée au Sénat dans le cadre du mécanisme auquel le sénateur Austin tente de recourir. Il faudrait que le sénateur Austin présente une autre motion — une directive au comité, je crois — pour que le comité soit autorisé à siéger ce soir afin d'entendre le ministre des Finances. Le Sénat agit d'une manière étrange et inopportune.

À mon avis, les propositions présentées dans le projet de loi sont extrêmement discutables et fort contestables. Je suis disposée à accepter que le projet de loi soit renvoyé au comité pour qu'il puisse tenir une audience approfondie et appropriée. Cependant, je ne comprends ni la condition qui est imposée à ce renvoi ni la procédure employée pour ce faire. Honorables sénateurs, dans cette Chambre, des motions et des ententes ne sont pas le fruit d'une demande à brûle-pourpoint du leader du gouvernement au Sénat. Y a-t-il quelque chose que je ne comprends pas? Le leader du gouvernement au Sénat compte-t-il présenter une autre motion portant que le comité entende le ministre ce soir? S'il en a l'intention, il devrait le dire clairement pour que le Sénat comprenne vraiment la proposition qui lui est présentée.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, je n'ai pas l'intention de proposer une motion voulant que le comité siège ce soir. Il est normal au Sénat d'envisager des solutions qui facilitent la procédure. Je n'ai jamais l'intention de proposer une telle motion, sénateur Cools, car il appartient aux comités de décider de leur procédure.

Le sénateur Cools : Il vaudrait peut-être mieux laisser cette décision au comité.

Le sénateur Austin : C'est tout à fait exact.

Le sénateur Cools : Du même coup, puisque l'honorable sénateur demande aux sénateurs de permettre le vote ce soir, il devrait peut- être s'engager à ne pas chercher à influencer d'autres sénateurs de son côté. On ne peut demander au Parlement d'agir sans définir clairement ce qu'on lui demande de faire. Le Sénat doit toujours savoir sur quoi il vote. Je croyais que l'honorable sénateur avait demandé de bonne foi que le projet de loi soit renvoyé au comité aujourd'hui. Le renvoi n'aurait peut-être pas dû être assorti de conditions. De nombreux sénateurs souhaitent intervenir au sujet de ce projet de loi mais seraient peut-être disposés à attendre un autre moment. Ils ne souhaitent pas que le ministre, en parlant du projet de loi ce soir devant le comité, leur coupe l'herbe sous les pieds. Il faut mettre quelques heures à se préparer à une rencontre fructueuse avec un ministre. Je crois savoir que les ministres sont habituellement disposés à comparaître et à faire preuve de souplesse dans leur horaire lorsqu'il s'agit d'une mesure dont ils ont pris l'initiative.

On semble s'entendre sur le renvoi du projet de loi au comité mais je ne suis pas certaine qu'il y ait accord pour que le ministre comparaisse ce soir devant le comité.

Le sénateur Lynch-Staunton : Laissons au comité le soin de décider.

Le sénateur Cools : Nous savons bien ce que « Laissons au comité le soin de décider » veut dire dans les circonstances. J'aimerais que ce soit clair. Beaucoup trouveront que c'est de peu de chose, mais c'est tout de même important. L'honorable sénateur pourrait-il préciser sa pensée?

Des voix : Le vote!

(1550)

Son Honneur le Président : Pour clarifier, madame le sénateur Cools parlait du projet de loi. J'aperçois le sénateur Austin qui se lève.

Le sénateur Austin : Honorables sénateurs, si le comité souhaite se réunir ce soir, il le fera. De même, s'il ne souhaite pas se réunir, il ne le fera pas. Il appartient au comité de décider s'il tiendra une réunion se soir.

RECOURS AU RÈGLEMENT

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Le comité se réunit de toute façon pour l'étude article par article du projet de loi C-30. Toutefois, conformément au Règlement, le comité ne peut examiner un projet de loi qui lui a été renvoyé qu'après un délai de 24 heures.

L'honorable John Lynch-Staunton : Quelle est cette règle?

Le sénateur Murray : Nous avons une telle règle, n'est-ce pas? Êtes- vous en train de me dire que sans la permission...

L'honorable Anne C. Cools : C'est un usage.

Le sénateur Lynch-Staunton : Des projets de loi ont été renvoyés en moins d'une demi-heure à des comités.

Le sénateur Murray : Des projets de loi ont été renvoyés en moins d'une demi-heure à des comités avec la permission du Sénat.

Le sénateur Lynch-Staunton : Non.

Le sénateur Murray : Je reconnais mon erreur. Si vous pensez pouvoir renvoyer ce projet de loi au comité pour que celui-ci en commence l'étude ce soir, allez-y! Toutefois, si la permission du Sénat est requise, je ne donnerai pas cette permission.

Le sénateur Lynch-Staunton : Il n'y a pas de telle règle.

Son Honneur le Président : Madame le sénateur Cools a la parole. Le sénateur Cools se levait.

Le sénateur Cools : Je pourrais invoquer le Règlement pour exprimer mon désarroi devant la possibilité que le ministre comparaisse devant le comité ce soir, mais je voulais montrer mon esprit coopératif. Les sénateurs connaissent bien mon esprit coopératif. C'est une question très importante. Ceux d'entre nous qui sont prêts à ce que le projet de loi soit renvoyé au comité devraient bien savoir que le comité ne s'empressera pas d'entendre le ministre ce soir car nous aimerions avoir un peu de temps pour nous préparer de façon adéquate à entendre le ministre.

J'aperçois le président et le vice-président du comité. Les deux pourraient peut-être s'engager à ce que le comité procède avec l'ordre du jour établi et attende une autre journée avant d'entendre le témoignage du ministre des Finances, de manière à laisser à plusieurs d'entre nous le temps de se préparer de façon adéquate à entendre un ministre de Sa Majesté.

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Nous commençons sérieusement à divaguer.

Le sénateur Cools : Pas du tout.

Le sénateur Stratton : Le comité a décidé de se réunir ce soir, et aussi de rencontrer le ministre des Finances. De quoi parlons-nous? Sa décision est prise.

Le sénateur Cools : Comment le comité a-t-il pu déjà avoir décidé de rencontrer le ministre des Finances pour discuter de ce projet de loi quand ce dernier ne lui a pas encore été renvoyé? En d'autres mots, le comité n'a aucune connaissance du projet de loi. Peut-être que son président ou quelqu'un d'autre devrait expliquer ce concept, parce que ce n'est pas ainsi que devraient fonctionner les comités.

Des voix : Le vote!

Le sénateur Murray : Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement puisque j'apprends à l'instant que le comité a déjà décidé de se réunir pour entendre le ministre des Finances. C'est ce que nous apprend le leader adjoint de l'opposition.

En règle générale, le comité se réunit les mardis matin et les mercredis soir. On m'a avisé, tout comme l'ont été les autres membres du comité, que ce dernier se réunirait ce soir et on m'a fourni l'ordre du jour. D'après celui-ci, on y fera l'étude article par article du projet de loi C-30. Il n'est indiqué nulle part dans cet ordre du jour que le comité commencera son étude du projet de loi C-33 par l'audition du ministre des Finances, bien évidemment, puisque ce projet de loi n'a pas encore été lu une deuxième fois. Qu'on me corrige si j'ai tort, mais j'estime qu'il serait très anormal d'ajouter le projet de loi C-33 à l'ordre du jour quelques heures avant la réunion du comité.

Le sénateur Cools : Peut-être pourrions-nous savoir comment le comité en est venu à prendre cette décision. J'en fais moi-même partie et je ne me souviens pas qu'on ait débattu de la question au comité.

Le sénateur Bacon : Demandez à son président.

Le sénateur Cools : Le président et le vice-président se taisent.

Son Honneur le Président : Le sénateur Murray a invoqué le Règlement et je suis prêt à me prononcer. D'autres honorables sénateurs souhaitent-ils ajouter quelque chose à propos du recours au Règlement du sénateur Murray?

Il existe des règles bien établies pour définir les relations du Sénat avec ses comités. Les comités sont maîtres de leurs travaux. À moins que le Sénat n'adopte un ordre adressé à un comité, celui-ci décide de la conduite de ses affaires. Voilà la réponse à la question qui se dégage des discussions que j'ai entendues. C'est en particulier la réponse aux interrogations du sénateur Murray.

Je ne sais pas si cela peut être utile, mais je vous cite un extrait de la 6e édition de la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, à la page 230, au paragraphe 760.3) :

Le président de la Chambre a plus d'une fois expliqué qu'il n'avait pas compétence pour statuer en matière de procédure des comités, ceux-ci étant et devant être parfaitement libres de mener leurs délibérations à leur guise.

La partie de la phrase qui mentionne le Président est peut-être moins importante, mais je crois qu'on peut dire, en réponse au rappel au Règlement, que les comités sont « parfaitement libres de mener leurs délibérations à leur guise ».

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Puisqu'aucun sénateur ne se lève pour prendre la parole, voici la motion :

L'honorable sénateur Day, avec l'appui de l'honorable sénateur Moore, propose que le projet de loi C-33 soit lu une deuxième fois. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Cools : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, je propose que le projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

L'honorable Anne C. Cools : Avec dissidence.

(Sur la motion du sénateur Day, le projet de loi est renvoyé avec dissidence au Comité sénatorial permanent des finances nationales.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Ayant reçu une convocation à une séance de comité pour traiter d'une question précise, à savoir l'étude article par article du projet de loi C-30, puis-je demander si son président peut nous dire, quelques heures avant la réunion du comité, si le projet de loi C-33 est maintenant ajouté à l'ordre du jour? Si oui, pourquoi?

Son Honneur le Président : Il ne s'agit pas selon moi d'un recours au Règlement, mais plutôt d'une demande d'information, ce que nous faisons de temps à autre.

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Je m'apprêtais à m'opposer à ce que ce point fasse l'objet d'un recours au Règlement. Son Honneur vient tout juste de déclarer que les travaux du comité sont les travaux du comité, et non les travaux de cette Chambre. Cette intervention ne peut donc pas être un recours au Règlement. Il revient au président du comité de traiter toute demande d'information.

Son Honneur le Président : Si le président du comité souhaite prendre la parole, ce serait le moment de le faire.

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, à titre de président, je me suis déjà prononcé là-dessus. Le sénateur Stratton peut donner l'information au Sénat.

Son Honneur le Président : C'est exact; j'ai entendu les observations en question.

Comme il ne nous reste plus beaucoup de temps, peut-être devrions-nous considérer qu'il est 16 heures?

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, nous pourrions peut-être nous occuper de la motion no 1?

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils d'accord pour que nous traitions la motion no 1 avant de voir l'heure?

Des voix : D'accord.

AUTORISATION À CERTAINS COMITÉS PERMANENTS DE SIÉGER PENDANT LES AJOURNEMENTS DU SÉNAT

L'honorable Bill Rompkey (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis du 19 avril 2005, propose :

Que, conformément au paragraphe 95(3) du Règlement, les Comités sénatoriaux permanents des droits de la personne, des langues officielles, et de la sécurité nationale et de la défense soient autorisés, pour le reste de la présente session, à se réunir le lundi précédant immédiatement un mardi où le Sénat doit siéger, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, comme il est 16 heures, conformément à l'ordre adopté le 2 novembre 2004, je déclare le Sénat ajourné.

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 21 avril 2005, à 13 h 30.)


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