Aller au contenu
Séances précédentes
Séances précédentes
Séances précédentes

Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 38e Législature,
Volume 142, Numéro 57

Le mardi 10 mai 2005
L'honorable Daniel Hays, Président


 

 

LE SÉNAT

Le mardi 10 mai 2005

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LE JOUR COMMÉMORATIF DE L'HOLOCAUSTE

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, le 5 mai, nous avons célébré le Jour commémoratif de l'Holocauste au Canada. Les honorables sénateurs se souviendront du débat houleux qui a mobilisé le Sénat l'an dernier et qui a mené à l'adoption du projet de loi C-459. À la suite de cela, j'ai été, avec le député Richard Marceau, le co-auteur d'un ouvrage intitulé The Passage Through Parliament to Establish Holocaust Memorial Day in Canada, ouvrage expliquant le débat à ceux qui étudient le processus parlementaire.

Honorables sénateurs, que devons-nous faire lorsque nous sommes témoins d'une vague d'antisémitisme déferlant sur le Canada, 60 ans après que l'opinion publique eut été marquée à jamais par la leçon terrible que nous a enseignée l'Holocauste? Du moins, c'est ce que nous pensions.

Il y a à peine deux semaines, dans une école secondaire prestigieuse au coeur de Toronto, des élèves ont extirpé des scènes morbides de l'Holocauste et ont diffusé des messages haineux indécents sur leur site Internet. Des élèves d'un établissement pour filles jumelé à cette école ont répondu, horrifiées, exhortant les auteurs de ces messages à cesser pareilles activités. À leur tour, ces élèves de sexe féminin ont fait l'objet de menaces, et on leur a reproché leurs protestations sur Internet. Les élèves à l'origine de ce méfait ont vite été expulsés.

Il semble toutefois que cela durait depuis des mois. Pourquoi? Pourquoi? Pourquoi? Pourquoi à Toronto, en 2005? Pourquoi au coeur de la classe moyenne de Toronto? Pourquoi dans cette ville tolérante qu'est Toronto? Qu'est-ce qui n'a pas fonctionné? Avons-nous omis de tirer des leçons de l'Holocauste? Avons-nous omis de tirer des leçons de l'histoire? Était-ce simplement, comme l'a mentionné un journaliste, une blague de jeunes en révolte contre le « tabou » de l'Holocauste, ou avons-nous laissé tomber nos enfants, à titre de parents, d'enseignants, d'éducateurs, de citoyens et de dirigeants politiques?

Ceux qui célèbrent la Pâque sont invités à considérer la fuite vers la liberté et l'égalité comme s'ils avaient personnellement vécu cet événement des temps anciens. On nous enseigne à nous souvenir de cette lutte pour la liberté et pour l'égalité comme si c'était un combat qu'avait mené personnellement chaque nouvelle génération, et c'est le cas.

L'an dernier, Elie Wiesel, triste témoin de la Shoah, a fait valoir, à une conférence sur l'antisémitisme à laquelle des parlementaires de 55 pays ont assisté à Berlin, qu'il n'y aurait jamais plus d'holocauste si on montrait aux enfants à aimer plutôt qu'à haïr et à respecter plutôt qu'à dénigrer « l'autre ».

Il est trop facile de proclamer « Jamais plus ». Ces paroles n'ont aucune valeur selon moi et ma génération, si on n'enseigne pas dans toutes les écoles à tous les niveaux, du primaire au postsecondaire, une leçon toute simple mais si complexe, c'est-à-dire que le fait de haïr « l'autre » est contraire à la Charte et contraire à l'essence de l'identité canadienne. Lorsque la haine augmente, la liberté de religion et l'égalité des droits en vertu de la Charte des droits sont affaiblies.

Malheureusement, quand nous n'intégrons pas cette leçon de respect mutuel dans nos systèmes d'éducation, dans notre société civile et dans nos maisons, la haine de « l'autre » demeure un élément acceptable de la réalité canadienne.

Les dirigeants politiques pourraient-ils en faire plus? Le Comité sénatorial des droits de la personne pourrait terminer son étude sur les racines de la haine enfouies au plus profond de la psyché canadienne et examiner comment éliminer la discrimination et la haine irrationnelle du corps politique.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorable sénateur Grafstein, j'ai le regret de vous informer que votre temps de parole est écoulé.

LES RELATIONS CANADA-ÉTATS-UNIS

LE DAKOTA DU NORD—LE DÉTOURNEMENT DES EAUX DU LAC DEVIL'S

L'honorable Janis G. Johnson : Honorables sénateurs, si vous me le permettez, je vais vous informer de la situation du projet de détournement des eaux du lac Devil's. Comme vous le savez, le Dakota du Nord envisage de déverser le trop plein du lac Devil's dans la rivière Sheyenne, affluent de la rivière Rouge qui se déverse dans le lac Winnipeg. Or, l'Agence américaine de protection de l'environnement a indiqué que des parasites nuisibles vivent dans le lac Devil's dont les eaux sont particulièrement salines. Le lac Devil's a été coupé du bassin hydrographique du lac Winnipeg il y a des milliers d'années et personne n'a idée de l'impact que pourrait avoir le fait de relier de nouveau ces deux plans d'eau.

Le lac Winnipeg est un site naturel qui présente un grand intérêt culturel et économique au Manitoba, mais qui est déjà en difficulté. La régulation du niveau d'eau du lac par Manitoba Hydro a contribué à des inondations et à l'érosion des berges. L'été, le déversement d'éléments nutritifs transportés par les eaux d'égout favorise le foisonnement des fleurs d'eau qui étouffent le lac et menacent la ressource halieutique. Ce lac n'a certainement pas besoin de nouveaux agents d'agression, surtout qu'une fois installées, ces espèces envahissantes sont quasiment indélogeables, comme nous l'avons appris, avec les Grands Lacs.

Un important groupe de politiciens et d'environnementalistes, des deux côtés de la frontière, s'affère à bloquer ce projet en attendant qu'il fasse l'objet d'un examen environnemental approprié. Comme le projet du lac Devil's prévoit le transfert d'eau d'un pays à un autre, le différend qu'il soulève tombe évidemment sous le coup du Traité des eaux limitrophes de 1909 et il devrait être tranché par la Commission mixte internationale.

Le premier ministre Martin a soulevé ce problème à plusieurs reprises avec le président Bush, lui demandant que l'affaire soit renvoyée devant la CMI. Le président a tout juste consenti à prendre la question en délibéré. La semaine dernière, le président du Conseil du Trésor, Reg Alcock, a rencontré deux sénateurs démocrates du Dakota du Nord qui, bien qu'ayant pris acte de ses remarques, ne sont pas disposés à retarder le projet.

Plus tôt cette semaine, le premier ministre Doer a rencontré le gouverneur du Wisconsin, Jim Doyle, pour lui faire part de ses préoccupations à propos du projet et a demandé que le Wisconsin lui apporte le même appui que le Minnesota. Le gouvernement du premier ministre Doer fait partie d'une coalition internationale qui prend de l'ampleur et dans laquelle on retrouve déjà les gouvernements de l'Ontario, du Québec, du Canada et du Minnesota, ainsi que la Commission des Grands Lacs, l'Assemblée des Premières Nations et des groupes environnementalistes des deux côtés de la frontière.

La CMI ne peut entendre une affaire que si les deux parties y consentent. Le Dakota du Nord a refusé de porter le différend devant la CMI, en sorte que celui-ci a abouti sur le bureau de la secrétaire d'État, Condoleezza Rice. Elle devrait annoncer sa décision dans quelques semaines.

Depuis le début de ce différend, les membres de la coalition disent compatir avec les résidents du Dakota du Nord qui sont touchés par les inondations, mais qu'il est fort peu probable qu'un tel phénomène se produira cette année et que la CMI aurait donc amplement le temps d'évaluer les risques associés au projet et d'étudier des solutions de remplacement.

Outre le risque environnemental que pose ce projet, nous craignons aussi que l'action unilatérale entreprise par le Dakota du Nord ne constitue un dangereux précédent dans les relations entre nos deux pays. Dans l'avenir, l'eau deviendra une ressource de plus en plus importante et il est donc fondamental que nous fassions appliquer le traité qui sert si bien nos deux pays depuis près d'un siècle. Le Manitoba s'est engagé à se conformer à la décision de la CMI, quelle qu'elle soit.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorable sénateur Johnson, je suis au regret de vous informer que votre temps de parole est écoulé.

(1410)

LA RECONSTRUCTION DE L'ASIE DU SUD-EST APRÈS LE TSUNAMI

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, je prends la parole pour terminer mes observations concernant l'aide du Canada aux victimes du tsunami dans le Sud-Est asiatique. J'aimerais qu'il existe une manière de dire aux Canadiens à quel point leurs généreux dons sont utiles à Aceh. Il importe de comprendre que les résultats ne seront pas immédiats. On ne peut reconstruire de maisons s'il n'y a pas de matériaux, et s'il n'y a ni routes, ni navires, ni quais pour assurer le transport, ni travailleurs pour la construction. Tous ces éléments sont disparus. Les enfants passeront un long moment sans aller à l'école parce que plus de 4 500 écoles ont été détruites et de nombreux enseignants ont disparu. Il faut reconstruire des hôpitaux, les doter en personnel et en fournitures. Il importe dans tout cet effort de solliciter les avis des populations locales et d'en tenir compte.

Des milliers de Canadiens de tous âges ont recueilli des sommes importantes pour venir en aide aux survivants du tsunami. Nous avons ouvert nos coeurs et donné généreusement comme jamais auparavant dans notre histoire récente. J'espère que tous les Canadiens comprennent à quel point l'effort de reconstruction sera titanesque et de longue haleine. Les organisations d'aide à l'étranger qui ont reçu l'argent ne pourront l'utiliser en entier dès maintenant et elles ne seraient d'ailleurs pas bien avisées de le faire. Après l'étape de réponse aux besoins immédiats, celle de la reconstruction sera longue, puisqu'il faudra la planifier et l'exécuter avec grand soin.

Il faut également reconstruire les bases de la société civile et des structures de gouvernement locales. La participation de l'ACDI, qui adopte une approche à long terme, sera utile. Le Canada sera présent à toutes les étapes de la reconstruction, comme il l'a été au cours des 50 dernières années. Nous devons cependant être patients. Il faudra des années avant qu'Aceh atteigne l'autosuffisance dans l'harmonie et la dignité. Ce ne sont pas seulement les structures physiques qui ont été balayées, mais aussi ceux qui les planifiaient, les construisaient et en assuraient le fonctionnement. Ils sont morts, emportés de la terre par d'énormes lames d'eau, comme autant de fétus de paille. Honorables sénateurs, pleurons pour les victimes; pleurons pour l'Indonésie.

LA DISCRIMINATION RACIALE

LE TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE DU QUÉBEC—LE CENTRE MARAÎCHER EUGÈNE GUINOIS

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur ce que le Globe and Mail a décrit comme « l'un des pires cas récents de discrimination manifeste ». L'article se rapporte au Centre maraîcher Eugène Guinois, l'une des plus grandes fermes maraîchères commerciales du Canada, qui est situé à environ 40 minutes au sud-ouest de Montréal. En 2000 et 2001, le centre a employé des centaines de travailleurs noirs pour la cueillette et le conditionnement des légumes. Ces travailleurs journaliers étaient véhiculés en autobus pour aller à la ferme et en revenir, notamment au moment des récoltes. Selon le rapport final du Tribunal des droits de la personne du Québec, les travailleurs noirs ont été victimes de « l'un des pires cas de discrimination raciale de toute l'histoire du Québec ».

Dans son rapport d'une trentaine de pages, la juge Michèle Pauzé s'est dite étonnée, voire scandalisée, par ce qui s'est passé au Centre maraîcher Eugène Guinois. Sa décision commence par la phrase suivante : « Les événements que vous allez lire se sont déroulés ici, au Québec, durant les années 2000 et 2001. »

Durant les audiences, quatre travailleurs ont déclaré que les conditions sur la ferme maraîchère québécoise en cause « ne sembleraient pas incongrues à l'époque de la ségrégation aux États- Unis ». Selon la transcription judiciaire dont le Globe and Mail a obtenu copie, l'une de victimes, Célissa Michel, a déclaré que lui et « environ 100 autres se sont fait ordonner d'utiliser la cafétéria réservée aux Noirs, qui ne comprenait ni chauffage, ni eau courante, ni toilettes fonctionnelles, ni réfrigération et où il manquait de nombreuses autres commodités ». Il a ajouté que les travailleurs noirs avaient été victimes de violence physique et verbale à plusieurs reprises et la cible de graffitis indiquant « voici nos singes » et « les Noirs sont des cochons ». Un témoin, Ronald Champagne, a affirmé que lorsqu'il a essayé de s'asseoir à l'une des tables de pique- nique près de la cafétéria, Denise Guinois, femme du propriétaire du centre, lui a dit que ces tables étaient réservées aux Québécois et l'a dirigé vers les tables près des toilettes. D'après la décision de la juge, « la cafétéria réservée aux Noirs ne renfermait ni lavabo, ni savon, ni eau courante, mais les travailleurs pouvaient utiliser des boyaux d'arrosage à l'extérieur ». Les travailleurs ont dit être restés parce qu'ils ne pouvaient trouver du travail ailleurs.

Honorables sénateurs, c'est une triste journée dans la quête d'égalité de notre pays.

LE YUKON

LES CONTRIBUTIONS À LA SECONDE GUERRE MONDIALE

L'honorable Ione Christensen : Honorables sénateurs, de nos jours, le Yukon semble souvent très loin, mais en 1939, lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté, c'était vraiment un autre monde. Il fallait au minimum dix jours pour se rendre à Vancouver, la seule ville canadienne ayant un lien commercial. Il n'y avait pas de centres de recrutement et, avec une petite population de 2 500 habitants, tous les hommes valides devaient rester dans le Nord pour travailler dans les mines, sur les territoires de piégeage ou dans les postes de traite.

Durant la Première Guerre mondiale, Jo Boyle a mis sur pied sa compagnie de mitrailleuses et George Black a recruté plus de 200 hommes à Dawson City pour aller se battre outre-mer. Avec la même détermination, de 1940 à 1945, de jeunes Yukonais, lorsqu'ils atteignaient l'âge d'enrôlement, prenaient leurs sacs à fourbi et se dirigeaient vers Vancouver pour s'engager. Trois fils de la famille Van Bibber, Dan, Archie et Alex, qui vivaient au bord de la rivière Pelly, ont déployé d'énormes efforts pour s'engager. Ils ont d'abord descendu la rivière Pelly en radeau, pour ensuite remonter le fleuve Yukon en bateau à vapeur jusqu'à Whitehorse avant de poursuivre vers Vancouver. Charlie Isaac, de Dawson, s'est engagé en 1939 et il a servi jusqu'en 1945. On lui a décerné l'Étoile de 1939-1945, l'Étoile d'Italie; l'Étoile France-Allemagne; la Médaille de la Défense et la Médaille canadienne du volontaire avec agrafe.

Âgé de 16 ans, seulement, Jimmy Profeit a quitté Mayo et il est devenu estafette en Afrique et en Italie — une mission dangereuse. Le sergent-chef James Ballentine s'est enrôlé en 1941 et, en novembre de cette année-là, il s'est rendu en Italie. Il a servi avec le Corps royal du génie canadien et il a reçu la Médaille de l'Empire britannique pour avoir dirigé la construction du pont d'assaut Bermingham. Plus tard, en Normandie, alors que les troupes se dirigeaient vers les Pays-Bas, il a attrapé la diphtérie et il a passé les derniers mois de la guerre dans un hôpital britannique avant d'être renvoyé chez lui à l'été de 1945.

Honorables sénateurs, la liste est très longue : Ralph Zaccarelli, John Gould, Roy Butterworth, Jimmy Drugan, Wes Buyck, Percy Dewolfe, Helmer Samuelson, Kip Fisher, Lomer Cyr, Lawrence Seely, Pete Sidney, John Adamson et beaucoup d'autres jeunes Yukonais quittaient alors le Yukon, dans bien des cas pour la première fois, parcourant des milliers de milles pour aller servir leur pays.

J'avais six ans lorsque la guerre a été déclarée, et nous vivions dans la petite collectivité de Fort Selkirk. Nous avions une vieille radio alimentée par une grosse pile hydro-électrique, et je me rappelle très bien avoir entendu les nouvelles venant de Londres, Big Ben carillonnant en arrière-plan. Nous avons tricoté des chaussettes, des gants et des écharpes de laine qu'on envoyait aux soldats. Nous avons recueilli des débris de fer et acheté des timbres d'épargne de guerre. Toutes les nuits, nous écoutions cette radio pour essayer de suivre des batailles auxquelles nos gars du Yukon participaient.

C'était il y a 60 ans, il y a six décennies, et pourtant, dans chacune de ces décennies, de jeunes soldats ont dû risquer leur vie pour apporter la paix à une région du monde — une paix qui, à la fin de tous les combats, est obtenue par des négociations et la signature de traités. Avec l'ouverture récente de notre nouveau Musée de la guerre, qui est vraiment merveilleux, espérons que cela va nous inciter à tirer des leçons de l'histoire.

L'OCCUPATION DE PAYS EUROPÉENS PAR L'UNION SOVIÉTIQUE

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, nous avons tous ensemble célébré le 60e anniversaire de la défaite de la tyrannie nazie. Nous nous sommes en outre souvenus avec fierté des réalisations des Canadiens qui ont fait le sacrifice ultime, de ceux qui sont revenus et qui sont devenus des anciens combattants, et des sacrifices personnels et collectifs qui ont été consentis par leur famille et leurs amis. La tyrannie nazie, qui s'est rendue coupable des horreurs de l'Holocauste, a été renversée, et une grande partie de l'Europe a pu être libérée.

Cependant, nous devons nous souvenir aussi que la fin de la tyrannie nazie a aussi marqué le début d'un demi-siècle d'occupation communiste soviétique qui a privé des millions d'Européens de leurs droits et libertés lorsque le rideau de fer s'est abattu sur l'Europe, la séparant en deux. Des centaines de milliers de personnes ont été systématiquement tuées ou envoyées à une mort presque certaine dans les camps de concentration de Sibérie. D'autres ont été torturées. Des millions ont perdu leur liberté. Les pays baltes, soit l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie, ont été annexés de facto. Des millions d'autres citoyens ont été systématiquement déportés vers d'autres régions de l'Union soviétique, perdant leur identité et leur culture. Tous ces gens-là commencent à peine à se remettre de cette tyrannie. En célébrant l'anniversaire du Jour de la Victoire en Europe, n'oublions pas les millions de personnes pour qui la liberté restera un rêve pendant encore un demi-siècle.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

LES TRAITÉS ENTRÉS EN VIGUEUR POUR LE CANADA EN 2002, 2003 ET 2004

DÉPÔT DE DOCUMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une copie, dans les deux langues officielles, d'un document intitulé « Traités qui sont entrés en vigueur pour le Canada en 2002, 2003 et 2004 ».

(1420)

AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE DES DROITS ANCESTRAUX ET ISSUS DE TRAITÉS EXISTANTS DES PEUPLES AUTOCHTONES

L'honorable Lise Bacon, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelle, présente le rapport suivant :

Le mardi 10 mai 2005

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

SEPTIÈME RAPPORT

Votre Comité, autorisé par le Sénat le mercredi 3 novembre 2004, à examiner, pour en faire rapport, les conséquences de l'inclusion, dans la loi, de dispositions non dérogatoires concernant les droits ancestraux et issus de traités existant des peuples autochtones du Canada aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services de conseillers, techniciens et de tout autre personnel jugé nécessaire aux fins de ses travaux.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)(c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,
LISE BACON

(Le texte du budget figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui à l'annexe A, p. 876.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Bacon, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

BUDGET ET AUTORISATION D'ENGAGER DU PERSONNEL—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR L'ÉTUDE SUR LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA

L'honorable Lise Bacon, présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le mardi 10 mai 2005

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

HUITIÈME RAPPORT

Votre Comité, autorisé par le Sénat le jeudi 2 décembre 2004 à examiner, pour en faire rapport, l'étude demandant de déclarer Ottawa une ville bilingue, demande respectueusement que le comité soit autorisé à retenir les services de conseillers, techniciens et de tout autre personnel jugé nécessaire aux fins de ses travaux.

Conformément au Chapitre 3:06, section 2(1)(c) du Règlement administratif du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

La présidente,
LISE BACON

(Le texte du budget figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui à l'annexe B, p. 881.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Bacon, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

L'ÉTUDE DES QUESTIONS JURIDIQUES RELATIVES AUX BIENS MATRIMONIAUX DANS LES RÉSERVES À LA DISSOLUTION DU MARIAGE OU D'UNE UNION DE FAIT

DÉPÔT DU RAPPORT PROVISOIRE DU COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES DROITS DE LA PERSONNE

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le dix- septième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Il s'agit d'un rapport intérimaire qui traite de sérieuses préoccupations relatives aux biens dans les réserves.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

PROJET DE LOI SUR LES MESURES DE RÉINSERTION ET D'INDEMNISATION DES MILITAIRES ET VÉTÉRANS DES FORCES CANADIENNES

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu'elle a reçu de la Chambre des communes un message accompagné du projet de loi C- 45, Loi prévoyant des services, de l'assistance et des mesures d'indemnisation pour les militaires et vétérans des Forces canadiennes ou à leur égard, et modifiant certaines lois.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, à la prochaine séance du Sénat.

[Traduction]

Son Honneur la Présidente intérimaire : La permission est-elle accordée?

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, au nom de l'opposition de Sa Majesté au Sénat, soit au nom de mes collègues conservateurs, comme les Canadiens et d'autres personnes, un peu partout dans le monde, ont célébré, au cours des derniers jours, le 60e anniversaire du Jour de la Victoire en Europe et que les Canadiens souhaitent rendre hommage à nos héroïques anciens combattants, je suggère que le Sénat accepte que la deuxième lecture de cet important projet de loi concernant les anciens combattants commence plus tard au cours de la séance d'aujourd'hui.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Honorables sénateurs, le sénateur Dallaire est le parrain de ce projet de loi. Il devrait être ici dans quelques minutes. Il sera alors en mesure de présenter le discours à l'étape de la deuxième lecture. Nous sommes prêts à procéder de cette façon.

[Traduction]

Son Honneur la Présidente intérimaire : La permission de commencer la deuxième lecture plus tard aujourd'hui est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

L'honorable John Lynch-Staunton : Honorables sénateurs, je suis tout à fait en faveur de la procédure, tant que nous ne procédons pas de façon trop hâtive. Peut-être que tous les sénateurs pourraient obtenir une copie du projet de loi avant que nous n'entamions la deuxième lecture plus tard aujourd'hui?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Nous ferons des photocopies.

(La motion est adoptée et la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

[Français]

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ

PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Michel Biron présente le projet de loi S-30, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (REÉR et REEE).

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Biron, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance dans deux jours.)

[Traduction]

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Peter A. Stollery : Honorables sénateurs, je demande la permission de présenter une motion maintenant.

Je suis prêt à expliquer la situation, honorables sénateurs. Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères a été avisé de la présence du président de la République du Mali et de quatre de ses ministres demain à 15 heures. Puisque le comité vient d'en être avisé pendant le week-end, je n'ai pas été en mesure d'en aviser le Sénat la semaine dernière. Je demande donc la permission de présenter la motion.

Son Honneur la Présidente intérimaire : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Stollery : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à siéger à 15 h 5 demain, le mercredi 11 mai 2005, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application de l'alinéa 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(1430)

L'honorable Marcel Prud'homme : Le sénateur Stollery a tenté de me joindre, mais j'étais en compagnie de la délégation de parlementaires du Koweït, qui seront justement nos invités demain. Bien que je fasse partie du comité, j'hésite à accorder cette autorisation. Nous finirons par manquer un débat important au Sénat en nous acquittant de nos fonctions pour le comité.

Je voterai cette fois en faveur de la motion, mais j'espère que nous ne serons pas saisis de beaucoup d'autres motions du genre à l'avenir, car nous risquerions de ne pas obtenir le quorum au Sénat.

Si tous les comités reçoivent la permission de siéger, à qui doit-on dire oui et à qui doit-on dire non? Cela rend la vie difficile aux whips. Cela rend la vie difficile aux sénateurs intéressés à certains débats. Un certain nombre de points de l'ordre du jour sont inscrits à mon nom et j'ignore quand je pourrai en débattre.

Je tiens à déclarer que j'appuie cette motion de mauvais gré, et que nous devons faire preuve de plus de discipline à l'égard de ces demandes.

Le sénateur Comeau : Et dans le cas du Comité de la sécurité nationale et de la défense?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER DURANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT

L'honorable Eymard G. Corbin : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité permanent des langues officielles soit autorisé à siéger le lundi 16 mai 2005 de 9 h 30 à 17 h 30 pour étudier une ébauche de rapport.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LES FINANCES

LE PROJET DE LOI NO 2 D'EXÉCUTION DU BUDGET DE 2004—LA CLARIFICATION DE LA RÈGLE GÉNÉRALE ANTI-ÉVITEMENT

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, j'aimerais poser ma question au leader du gouvernement au Sénat. Jeudi après-midi de la semaine dernière, pendant le débat de troisième lecture du projet de loi C-33, le sénateur Murray et moi-même avons fait des interventions sur l'interprétation des articles 52 et 60 du projet de loi, qui portent sur la RGAE. Nous avons demandé que le leader du gouvernement demande au ministre des Finances de donner certaines garanties, sous forme de lettre d'intention ou de circulaire d'information que le ministère publie régulièrement, quant à l'interprétation et à la portée de l'article 52, en particulier en ce qui a trait à son application rétroactive.

Si j'ai bien compris, le leader du gouvernement s'est engagé, à la suite de ces deux interventions, à faire part de nos opinions et de nos préoccupations au ministre des Finances et à faire rapport à la Chambre.

Compte tenu que nous voterons cet après-midi sur le projet de loi C-33 à l'étape de la troisième lecture, le leader du gouvernement est- il en mesure d'informer l'assemblée de la réponse du ministre des Finances à cette demande d'information?

L'honorable Jack Austin (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Joyal de sa question et de l'occasion qui m'est donnée de poursuivre le dialogue que nous avons engagé dans cette enceinte jeudi après-midi.

Après avoir promis à cette assemblée de demander plus d'explications au ministre des Finances, ce dernier m'a écrit la réponse suivante, datée du 10 mai 2005 :

Monsieur le sénateur,

À la suite de l'adoption en troisième lecture du projet de loi C- 33 au Sénat, je profite de l'occasion pour répondre aux préoccupations formulées par des sénateurs au sujet de l'effet de certaines modifications proposées dans le projet de loi, qui influeront sur la Loi de l'impôt sur le revenu et sur la Loi une mise en oeuvre de conventions fiscales.

Comme je l'ai mentionné récemment dans mon témoignage à ce sujet devant le comité, les modifications relatives à la règle générale anti-évitement (RGAE) ne sont envisagées que pour confirmer l'effet des dispositions actuelles de la loi. Je suis heureux de reprendre ce point ici aujourd'hui : ces modifications ne précisent que la nature et non l'effet de la loi et son mode d'application par l'Agence du revenu du Canada.

J'ai également souligné lors de mon témoignage que même si ces changements ont modifié rétroactivement la loi, nous estimons qu'ils respecteraient néanmoins les lignes directrices qui s'y rattachent.

Je constate qu'au moins quelques personnes craignent qu'au niveau pratique l'Agence du revenu du Canada (ARC) tente d'invoquer la règle plus précise pour appliquer la RGAE à l'égard des opérations terminées qu'elle ne considérait pas susceptibles d'être contestées en vertu de la RGAE par le passé. Si tel était le cas, j'entretiendrais également des craintes. Cependant, je tiens à préciser aux sénateurs que je me suis moi-même assuré que l'ARC n'a pas l'intention de modifier ses méthodes actuelles de cotisation à l'égard des conventions fiscales. Bien que l'ARC, de même que le ministère que je chapeaute, aient toujours estimé que les opérations anti- évitement abusives devraient être assujetties à la RGAE, l'ARC ne conteste pas et ne contestera pas chaque opération portant sur une convention fiscale. Les modifications ont simplement pour but de rassurer l'ARC qu'elle est habilitée à contester, comme elle l'a toujours été, les opérations anti- évitement qui se traduisent par un recours abusif au régime fiscal — que ces pratiques portent sur des conventions fiscales du Canada ou sur un autre aspect de notre régime fiscal.

Pour apporter cette précision et rassurer la collectivité fiscale en général, nous avons proposé la diffusion d'une nouvelle circulaire d'information traitant de l'application de la RGAE aux conventions fiscales; l'ARC et les fiscalistes avec lesquels cette question a été abordée appuient cette proposition.

En terminant, j'espère que la présente confirmera que cette mesure a simplement pour but de préciser que les responsables d'opérations anti-évitement abusives ne peuvent se retrancher derrière des conventions fiscales et soutenir qu'ils ne sont pas dans la mire de la RGAE.

Veuillez agréer, monsieur le sénateur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Ralph Goodale

Honorables sénateurs, je crois que le ministre des Finances a donné l'assurance qu'aucune transaction terminée ne serait réexaminée. Si un dossier a été fermé par l'Agence du revenu du Canada, il restera fermé. Le ministre a donné l'assurance qu'il consulterait les fiscalistes au sujet de la publication d'un bulletin d'interprétation.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Le leader du gouvernement au Sénat reconnaîtra-t-il que le Règlement du Sénat interdit d'anticiper sur l'ordre du jour pendant la période des questions?

Le sénateur Austin : J'ai eu l'occasion de poser la même question. On m'a répondu que les précédents confirment le contraire.

[Français]

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter quatre réponses différées à des questions orales posées au Sénat. La première concerne une question orale posée au Sénat le 24 février 2005 par le sénateur Nolin, concernant le budget de 2005, le renouvellement des ententes Canada-communautés.

Les trois autres sont des réponses aux questions orales posées par le sénateur Keon concernant la rencontre avec le secrétaire américain à la Santé et aux Services sociaux; la vente de médicaments d'ordonnance, la gestion du dossier de l'inhibiteur COX2, la disponibilité du bêtabloquant Inderal-La; et l'indemnisation des victimes de l'hépatite C. Ces questions ont été posées respectivement les 8 et 21 mars et le 20 avril 2005.

LES FINANCES

LE BUDGET DE 2005—LE RENOUVELLEMENT DES ENTENTES CANADA-COMMUNAUTÉS

(Réponse à la question posée par l'honorable Pierre Claude Nolin le 24 février 2005)

Le Gouvernement soutient directement le développement et l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire depuis plus de quarante ans. Le ministère du Patrimoine canadien accorde un appui financier aux activités communautaires et culturelles offertes par les organismes des communautés minoritaires afin d'appuyer leur développement, d'assurer leur pérennité à long terme et de renforcer davantage la cohésion sociale au Canada. Il permet de soutenir diverses activités des communautés (représentation, sensibilisation, réseautage, etc.) et de doter ces communautés des infrastructures nécessaires à l'établissement d'espaces de vie dans leur langue, par exemple des centres communautaires, des radios communautaires, des théâtres, et cetera.

Dans les cadre des discussions entourant le renouvellement des ententes Canada-communautés, le ministère du Patrimoine canadien a offert une hausse de 10 p. 100 du financement de programme aux représentants des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il n'a pas été nécessaire d'inclure ces sommes dans le budget de 2005 dans la mesure où elle font partie du Plan d'action pour les langues officielles et qu'elles sont déjàt prévues dans les niveaux de référence ministériels courants.

La ministre du Patrimoine canadien prévoit renouveler les mécanismes de collaboration avec les communautés ce printemps pour les quatre années du cycle de programme (2005-2006 à 2008-2009).

Par ailleurs, le budget de 2005 prévoit 41 millions de dollars supplémentaires sur les trois prochaines années au titre d'un Fonds de soutien des communautés minoritaires de langue officielle qui les aidera à exécuter des initiatives de développement économique, de renforcement des capacités des communautés et de développement des ressources humaines.

Cet investissement prend appui sur le Plan d'action pour les langues officielles du gouvernement, une stratégie de 751 millions de dollars visant à accroître le mieux-être des communautés minoritaires de langue officielle et des citoyens du pays dans des domaines tels l'éducation, les services de santé, la garde des enfants, l'alphabétisation et le développement économique.

LA SANTÉ

LE DISPONIBILITÉ DU BÊTABLOQUANT INDERAL-LA

(Réponse à la question posée par l'honorable Wilbert J. Keon le 8 mars 2005)

Le médicament est un produit vendu sur le marché et, par conséquent, le Programme d'accès spécial de Santé Canada n'est pas vraiment le premier point de contact dans ce cas. Ce médicament est inscrit dans la Base de données sur les produits pharmaceutiques et, jusqu'à présent, le Ministère n'a reçu aucune demande de renseignements. L'entreprise a confirmé que la livraison du médicament « INDERAL LA » avait été différée il y a environ un mois, mais que tout était rentré dans l'ordre depuis. L'entreprise a reçu beaucoup de demandes de renseignements de la part du public, mais l'approvisionnement s'est stabilisé au cours des deux dernières semaines et elle ne prévoit pas d'autres interruptions dans un avenir rapproché.

LA RENCONTRE AVEC LE SECRÉTAIRE AMÉRICAIN À LA SANTÉ ET AUX SERVICES SOCIAUX—LA VENTE DE MÉDICAMENTS D'ORDONNANCE—LA GESTION DU DOSSIER DE L'INHIBITEUR COX-2

(Réponse à la question posée par l'honorable Wilbert J. Keon le 21 mars 2005)

Santé Canada s'efforcera de trouver un équilibre entre l'accélération du processus d'approbation et le contrôle adéquat de l'innocuité des médicaments utilisés dans la réalité. Le budget de 2003 prévoyait un montant de 190 millions de dollars en cinq ans pour améliorer la rapidité du système de réglementation de Santé Canada en ce qui concerne les médicaments pour usage humain. Conformément à la démarche engagée par le gouvernement en ce qui a trait à la réglementation intelligente, le budget de 2005 prévoit une somme additionnelle de 170 millions de dollars en cinq ans pour la mise en oeuvre d'une série de mesures ciblées visant à améliorer l'innocuité et l'efficacité des médicaments et d'autres produits thérapeutiques; les mesures suivantes sont prévues :

  • Renforcement des moyens nécessaires à l'examen des demandes d'essais cliniques et des activités de contrôle et de suivi des effets indésirables.

  • Élaboration et mise en oeuvre de règlements en vue d'améliorer la surveillance de l'innocuité des produits thérapeutiques.

  • Amélioration du contrôle réglementaire et du niveau de conformité des produits thérapeutiques par un accroissement des mesures de contrôle à l'égard de la déclaration des effets indésirables des médicaments par les fabricants, de la recherche sur la sécurité des sujets et l'intégrité des données dans les études cliniques et de la vérification de la conformité postcommercialisation.

  • Mise en oeuvre d'un cadre de réglementation en ce qui concerne l'innocuité, l'efficacité et la qualité du sang, des cellules, des tissus et des organes destinés à la transplantation ou à la transfusion.

Le ministre Dosanjh a déjà indiqué certains des domaines d'activité sur lesquels il faudra se pencher davantage, entre autres, la tenue de registres pour les essais cliniques et leur divulgation, la déclaration obligatoire des effets indésirables et l'homologation conditionnelle.

Santé Canada s'emploie également à élaborer des options relativement à un conseil de surveillance de l'innocuité des médicaments dans le but d'améliorer la franchise et la transparence et favoriser la reddition de comptes à la population. À cet égard, Santé Canada mettra à profit les pratiques exemplaires employés par des organismes de réglementation comparables. Dans le cadre de la mise au point de ces options, Santé Canada prend d'autres mesures afin d'améliorer la transparence, la franchise et la reddition de comptes.

L'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'HÉPATITE C

(Réponse à la question posée par l'honorable Wilbert J. Keon le 20 avril 2005)

Le gouvernement du Canada est sensible au triste sort des Canadiens et des Canadiennes qui ont contracté l'hépatite C après avoir reçu du sang contaminé, et il est conscient du fardeau que cette maladie impose à ces personnes et à leur famille.

Le 22 novembre 2004, le ministre de la Santé a annoncé que toutes les options disponibles seront explorées concernant l'indemnisation des personnes ayant contracté l'hépatite C à la suite de transfusions sanguines avant le 1er janvier 1986 et après le 1er juillet 1990.

Le 20 avril 2005, le ministre de la Santé a réaffirmé l'engagement du gouvernement du Canada face à ces discussions, et il a indiqué que toutes les parties collaborent de bonne foi afin de fournir tous les renseignements nécessaires à l'élaboration d'un cadre d'indemnisation.

Le Ministre a aussi mentionné qu'aucune indemnisation ne peut être versée avant la conclusion de ces discussions et avant que l'information appropriée ne soit disponible.

Les discussions ont commencé immédiatement après l'annonce de novembre et elles se poursuivent depuis. Les plus récentes ont eu lieu le 21 avril 2005.

Toutes les parties ont convenu qu'alors que les discussions sont en cours, le contenu ne serait pas divulgué.

Le gouvernement du Canada oeuvre pour que cette question arrive à un résultat satisfaisant le plus tôt possible.


(1440)

[Traduction]

ORDRE DU JOUR

PROJET DE LOI NO 2 D'EXÉCUTION DU BUDGET DE 2004

TROISIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Dallaire, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-33, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 23 mars 2004;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Murray, C.P., appuyée par l'honorable sénateur McCoy, que le projet de loi C-33 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié :

a) à l'article 52, à la page 66, par substitution, aux lignes 13 à 20, de ce qui suit :

« (4) Les paragraphes (1) à (3) s'appliquent relativement aux opérations conclues après le 22 mars 2004. »;

b) à l'article 53, à la page 66, par substitution, aux ignes 26 à 28, de ce qui suit :

« (2) Le paragraphe (1) s'applique aux années d'imposition et aux exercices commençant après 2004. »;

c) à l'article 60, à la page 73, par substitution, aux lignes 1 à 3, de ce qui suit :

« (2) Le paragraphe (1) s'applique relativement aux opérations conclues après le 22 mars 2004. ».

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, je suis heureux d'intervenir dans ce débat sur le projet de loi C-33. Comme nous savons tous, ce projet de loi contient aussi un amendement à la Loi de l'impôt sur le revenu qui, selon le ministre, vise à préciser la mesure législative adoptée en 1988. Cette soi-disant clarification permettrait de résoudre un malentendu qui semble s'être produit dans la mesure originale, et pourrait permettre au gouvernement du Canada de demander réparation dans les cas où la Couronne serait d'avis que les lois fiscales n'ont pas été respectées par le passé.

Le gouvernement cherche à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu en élargissant la portée de la règle générale anti-évitement, édictée à l'article 245. Comme le sénateur Oliver l'a expliqué de façon si compétente à la Chambre, en vertu du libellé actuel de la loi, la RGAE s'applique uniquement à une transaction faite en invoquant à tort l'ensemble des dispositions de cette loi. Par contre, si le projet de loi est adopté, la RGAE s'appliquera à tout abus dans l'application de la loi, du Règlement de l'impôt sur le revenu, des Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu et de toute convention fiscale bilatérale. Non seulement la portée de la loi serait-elle modifiée, mais en outre les modifications s'appliqueraient depuis l'adoption de la première version de la loi, en 1988, soit 16 ans avant le budget dont il est question.

Honorables sénateurs, le problème que pose la modification que l'on propose ici d'apporter à la Loi de l'impôt sur le revenu, ce n'est pas qu'on veuille apporter une clarification. C'est toujours un objectif louable que de chercher à faciliter la compréhension d'une loi, et à plus forte raison d'une loi fiscale. Cependant, les dispositions du projet de loi concernant la RGAE — les articles 52 et 60 — semblent aller au-delà d'une clarification. Nous risquons ainsi d'autoriser le gouvernement à procéder à une imposition rétroactive des contribuables. Je m'exprime ainsi parce que le ministère des Finances n'a pas encore pris nettement position à ce sujet. Il a eu l'occasion déjà de préciser son intention au sujet de la RGAE, mais il ne l'a pas fait. Aucune décision d'un tribunal n'autorise l'application qu'il entend faire de cette règle. En fait, dans deux affaires, la Cour canadienne de l'impôt a statué que la RGAE ne s'applique pas au Règlement de l'impôt sur le revenu. Il s'agit des affaires Rousseau-Houle et Fredette, qui remontent à 2001. Voici la teneur de décision de la cour dans cette dernière affaire.

Or, il est clair en droit administratif qu'une loi (act en anglais) et un règlement, quoique tous les deux des textes législatifs, sont de nature très différente. Une loi est un texte législatif adopté par le Parlement fédéral ou une assemblée législative provinciale alors qu'un règlement est un texte législatif adopté le plus souvent par un gouvernement (l'exécutif) sous l'autorité d'une loi. À mon avis, comme le paragraphe 245(4) de la Loi ne dit pas « la Loi et le Règlement lus dans leur ensemble », il ne faut pas tenir compte des règles adoptées par le gouvernement dans le Règlement. Si le législateur avait voulu qu'il en soit tenu compte, il l'aurait exprimé clairement au paragraphe 245(4) de la Loi, comme il l'a fait dans plusieurs autres dispositions de la Loi.

À mon avis, lorsqu'une telle clarification est apportée, il convient que le ministère des Finances fasse appel de cette décision et demande des éclaircissements aux tribunaux, comme tout contribuable serait forcé de le faire. Cependant, le ministère ne s'est pas adressé aux tribunaux et il s'est contenté de qualifier les décisions d'« étonnantes ». Je ne vois pas en quoi, pour le ministère, exprimer sa surprise constitue la bonne façon de réagir, lui qui semble juger que la situation est passablement pressante, puisqu'il présente ce projet de loi.

Le fait qu'aucun appel n'a été interjeté sème la confusion pour ce qui est de savoir si ce projet de loi donne des précisions sur l'utilisation de la RGAE. Si le gouvernement estime que la loi doit être appliquée exactement dans sa forme actuelle et que l'intention était claire dès le début, alors pourquoi ne pas porter la question devant les tribunaux? On est certes porté à croire que les tribunaux continueraient à rendre des décisions à l'encontre du ministère et, par conséquent, de la méthode législative que nous étudions maintenant.

Où en sommes-nous? Encore une fois, nous devons déterminer s'il s'agit d'un cas de rétroactivité. On a discuté de la rétroactivité au Sénat récemment en rapport avec le projet de loi S-18 modifiant la Loi sur le recensement. À ce moment, j'estimais que le gouvernement ne devait pas envisager des changements législatifs rétroactifs, que nous ne sommes nullement autorisés à modifier les lois et à donner à celles-ci une signification différente de celle promise aux citoyens du Canada lors de la promulgation initiale, c'est-à-dire sans une disposition relative aux droits acquis à l'intention des citoyens qui sont maintenant touchés par la nouvelle loi. C'est ma conviction profonde.

De temps à autre nous avons, au Sénat, l'occasion — et je dis « l'occasion » car la prise de décisions difficiles est le privilège des gens qui s'acquittent de nos fonctions — de maintenir des lois du pays. En qualité de législateurs, nous avons la responsabilité de veiller à ce que les solides traditions de notre système juridique ne soient pas négligées ou bafouées et de faire preuve de sagesse en tel cas. Est-ce que les sénateurs croient que nos prédécesseurs auraient agi autrement? Je ne le crois pas.

En fait, il me suffit de rappeler aux sénateurs la soi-disant affaire de l'aéroport Pearson de 1994, dans le cadre de laquelle la loi proposée aurait enlevé aux citoyens canadiens le droit d'être entendus par les tribunaux. Je cite notre estimé collègue, l'honorable sénateur Kirby, au sujet des répercussions du recours à la rétroactivité. Il a dit :

En plus de 30 ans, je n'ai jamais vu le gouvernement appliquer les politiques de façon rétroactive. La pratique a toujours été de garantir les droits acquis si un changement de règles intervient avant que certains cas ne soient réglés. Si on modifie l'emballage des paquets de cigarettes, par exemple, tous les anciens paquets en circulation peuvent toujours être vendus. Tous les précédents dans l'histoire du Canada appuient votre argument concernant la rétroactivité.

Le sénateur Kirby a raison. Nous ne devons jamais compter sur la rétroactivité pour corriger les erreurs législatives du passé. Le régime fiscal du Canada se fonde sur la confiance entre le gouvernement et ses citoyens, une confiance qui s'articule autour de la règle de droit. Les contribuables paient les impôts en fonction de l'interprétation qu'on fait du fonctionnement de la loi. En cas de désaccord, comme cela semble être le cas dans cette affaire, on s'attend à ce qu'une voie de recours existe en vue du règlement du différend. Cette mesure annule le droit de recours juridique pour les personnes qui ont cotisé en vertu de ce régime fiscal au cours des 17 dernières années.

La lettre déposée aujourd'hui n'a rien pour rassurer ces gens. Les droits que leur reconnaît la loi seront bafoués.

Malgré l'existence de décisions allant à l'encontre des affirmations du gouvernement sur la façon dont fonctionnera cette mesure législative, ce projet de loi, s'il est adopté, privera le contribuable du droit d'invoquer ces arguments devant les tribunaux. Les causes en instance ne seront pas jugées à la lumière de la jurisprudence, mais en fonction d'une mesure législative à effet rétroactif. Nous forcerions le contribuable à entamer des poursuites contre son propre gouvernement pour pouvoir préserver le droit de recours que lui garantit notre système de droit.

Voilà, honorables sénateurs, un précédent malheureux. Ce n'est pas ainsi que notre système de gouvernement fonctionne, et ce n'est pas ainsi non plus que notre société civile s'attend à ce qu'il fonctionne. Il est de notre devoir, en tant que sénateurs, de le reconnaître et de protéger les droits des citoyens. Nous ne pouvons pas nous permettre de contourner l'appareil judiciaire de notre gouvernement ni de régir la société de la manière proposée dans ce projet de loi. Si nous prenons les bonnes décisions stratégiques à l'exécutif, si nous rédigeons des lois claires et conformes aux règles établies à l'autre endroit et si les tribunaux donnent à ces lois une interprétation sensée et juste, alors nous permettrons à notre système de gouvernement, fondé sur la primauté du droit, de fonctionner suivant l'intention qu'était celle des Pères de la Confédération. Je ne pense pas que ce soit trop demander.

Mardi dernier, nous avons entendu un ancien parlementaire venu témoigner devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales, l'honorable Marc Lalonde, dire que le projet de loi ne répondait pas aux critères auxquels devraient satisfaire les mesures législatives. Voici ce qu'il a dit :

À mon avis, toute personne sensée qui respecte le principe de la primauté du droit conclurait que la modification présentée devant le Sénat est extrême, qu'elle va au-delà des besoins et que, si l'on examine les arguments du ministère, elle est inutile — et c'est le moins qu'on puisse dire.

Si la modification proposée à la Loi de l'impôt sur le revenu revêt tant d'intérêt, alors pourquoi ne pas l'avoir présentée dans un projet de loi distinct? Pourquoi ne pas en avoir fait une mesure autonome? Pourquoi cette façon sournoise, détournée, de procéder? La réponse qui s'impose, c'est que la loi est faible et contestable. En fait, honorables sénateurs, c'est une mauvaise loi. Il faut être malveillant pour prévoir une mauvaise loi comme celle-là dans un budget, et je reste poli. Pour être exact, j'estime que les bureaucrates et les représentants du gouvernement ont eu tort d'inclure cette mesure législative dans le projet de loi.

Nous sommes tous conscients du fait que nous traversons une période de gouvernement minoritaire. Eh bien, voilà une raison de plus de tenir compte de cette situation précaire dans la préparation des projets de loi devant être examinés par les deux Chambres du Parlement. Ces bureaucrates et représentants du gouvernement tentent de faire du Sénat leur complice dans l'établissement d'une mesure législative régressive. Je refuse de prendre par à cette fourberie législative.

Et je n'ai pas terminé.

(1450)

Madame le sénateur Plamondon a parlé de notre rôle sur la scène internationale au cours des débats sur le projet de loi concernant le recensement. Sur la scène internationale, nous jouissons d'une excellente réputation fondée sur la stabilité de la règle de droit sans rétroactivité. Si nous adoptons ce projet de loi sans amendement, notre réputation en souffrira sûrement. Le projet de loi ne touche pas seulement les citoyens du Canada, mais aussi ceux d'autres pays.

Je ne prône pas la mort de ce projet de loi. Au contraire, nous pouvons le rendre meilleur et plus équitable. Il nous suffirait d'adopter l'amendement du sénateur Murray et d'annuler ainsi l'effet rétroactif de cette mesure. Nous pouvons et nous devons le faire. En adoptant l'amendement qui propose l'entrée en vigueur à compter de la date du budget, soit du 22 mars 2004, nous améliorerons nettement le projet de loi. En toute franchise, c'est ce que nous devons faire.

Honorables sénateurs, il ne faut pas minimiser ce dont il est question en l'occurrence, soit la vérité. Il n'est pas question ici d'une clarification, mais bien d'un autre cas de rétroactivité. Il nous faut invoquer la tradition qui existe au Sénat. Qu'il nous suffise de regarder le passé pour comprendre ce que nous devons faire pour protéger l'avenir. Le passé nous dit que nous ne pouvons pas retourner en arrière et bafouer les droits de citoyens. Je demande aux sénateurs d'avoir le courage d'amender ce projet de loi en appuyant la motion proposée.

Il y a à peine deux jours, le Canada célébrait le Jour de la Victoire en Europe qui a marqué la fin de la Seconde Guerre mondiale. Nous avons remercié nos anciens combattants qui ont consenti l'ultime sacrifice et ceux qui sont rentrés après le combat. Nous apprécions les libertés que ces hommes et ces femmes ont défendues et préservées. Voici pourtant que, pour la deuxième fois en deux mois, nous envisageons l'adoption d'une mesure législative qui retirerait des droits à nos citoyens, le droit à la protection de la vie privée et le droit à la jouissance des garanties procédurales de notre système juridique. Il ne faut pas renoncer à ces libertés pour lesquelles nous avons durement combattu.

Honorables sénateurs, rappelez-vous l'humilité et l'honneur qui vous habitaient lorsque vous avez franchi pour la première fois les portes du Sénat et que vous avez prêté serment. Ce serment faisait de vous l'un des 105 législateurs siégeant au Sénat. Dès lors, vous deveniez membres de la Chambre du second examen objectif, où vous deviez avoir une réflexion indépendante et agir en tant que gardiens des droits des Canadiens. L'intégrité du Sénat passe avant tout. Je vous demande d'y penser au moment de voter sur la motion d'amendement à ce projet de loi.

L'honorable W. David Angus : Honorables sénateurs, je suis d'accord avec le sénateur Moore. Je ne saurais mieux dire. Il a clairement exposé la question.

Je me lève pour appuyer l'amendement sur lequel nous allons devoir nous prononcer. Si le projet de loi C-33 est adopté dans sa forme actuelle, ses dispositions prendront effet le 13 septembre 1988 — oui, honorables sénateurs, il y a presque 17 ans. Ces dispositions nécessitent une attention spéciale étant donné leur caractère rétroactif. C'est pourquoi je suis d'avis qu'il faut appuyer l'amendement du sénateur Murray. Nous pouvons transformer le mauvais projet de loi C-33 en un bon projet de loi.

La règle générale anti-évitement, ou RGAE, confère au gouvernement un extraordinaire pouvoir d'imposition. Elle donne au ministre du Revenu national le pouvoir d'imposer un contribuable même s'il a déjà rempli toutes les exigences applicables de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Un ministre est justifié de recourir à la RGAE quand il peut démontrer que le contribuable a commis un abus en planifiant ses impôts de la manière en question même s'il s'est conformé aux règles de l'impôt sur le revenu. Or, le critère de l'abus est tellement vague que les tribunaux ont mis au point un principe d'interprétation selon lequel la RGAE peut être invoquée seulement si le ministre peut démontrer, à la satisfaction du tribunal, que l'abus allégué est clair et univoque. Cette norme de preuve est presque identique à celle qui existe en droit pénal, où la poursuite doit établir la culpabilité hors de tout doute raisonnable.

Nous parlons d'extraordinaires pouvoirs d'imposition dans une société qui a toujours accordé au contribuable le droit d'organiser ses affaires de façon à minimiser la part de son actif prélevée par le fisc. Ce projet de loi est contraire à ce principe.

C'est précisément cette caractéristique extraordinaire de la RGAE qui nous dicte de bien réfléchir avant d'approuver des modifications rétroactives remontant à 17 ans. En fait, dans son budget de 2004, le ministère des Finances lui-même a présenté ces propositions en précisant clairement qu'elles ne s'appliqueraient pas de façon rétroactive et qu'elles avaient simplement un objet administratif ou de clarification. Je ne suis pas sûr de la distinction à établir à cet égard. Apparemment, le ministère des Finances a pensé qu'il pouvait persuader les législateurs, y compris nous-mêmes, qu'il n'apportait aucun changement de fond à la RGAE prévue dans ces propositions. Or c'est le contraire, honorables sénateurs.

Une clarification qui ne change rien aux dispositions actuelles de la loi? Pourquoi alors le projet de loi C-33 ajouterait-il une centaine de mots à la règle, des mots qui, pour les fiscalistes, auraient dû être là, mais n'y étaient pas? La législation fiscale est déjà assez compliquée sans qu'on veuille y inscrire des dispositions à l'encre invisible.

Les témoignages entendus par le Comité sénatorial permanent des finances nationales ont clairement établi que les changements proposés vont au-delà de la clarification. Il y a une grande controverse sur la question de savoir si la RGAE s'applique dans le cas des conventions fiscales et des règlements.

Il suffit d'examiner le mémoire du comité conjoint de l'Association du Barreau canadien et de l'Institut Canadien des Comptables Agréés pour se rendre compte que de nombreux fiscalistes et universitaires ont écrit des traités savants sur ces questions. Ils ont avancé des arguments aussi puissants que détaillés pour établir que la RGAE ne fonctionne pas comme le voudraient le ministère des Finances et l'Agence du revenu du Canada.

Les tribunaux sont divisés sur ces questions, les jugements rendus appuyant tantôt une thèse tantôt l'autre. De toute évidence, nous avons besoin d'éclaircissements, mais ceux-ci devraient s'appliquer à l'avenir et non rétroactivement depuis 1988, soit 17 ans auparavant.

Le ministre des Finances a semblé changer son fusil d'épaule sur la question de la clarification et de la rétroactivité dans son récent témoignage devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales. Il cherche maintenant à justifier les modifications en disant qu'elles sont conformes aux lignes directrices publiées par le ministère des Finances en 1995 pour indiquer dans quelles circonstances la rétroactivité se justifie.

Je soutiens avec respect que la lettre du ministre des Finances dont le leader du gouvernement au Sénat nous a donné lecture ne change rien au problème posé par le projet de loi C-33.

Pour résumer ces lignes directrices, disons que, selon le ministère des Finances, la rétroactivité se justifie lorsque deux conditions sont simultanément satisfaites. Le premier critère est que la rétroactivité porte sur une politique bien établie du ministère des Finances et de l'ARC. Le second est que la politique soit bien acceptée par les fiscalistes. Compte tenu des témoignages présentés devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales, je soutiens qu'il est évident pour quiconque ne rejette pas délibérément la vérité que les dispositions du projet de loi C-33 ne satisfont à aucun des deux critères.

La position du gouvernement à ce sujet n'a jamais été claire. La rétroactivité dans le domaine de la législation fiscale est particulièrement odieuse parce que les contribuables prennent de très importantes décisions économiques, commerciales et familiales en se basant sur les conseils qu'ils reçoivent — à grand prix, dois-je ajouter — de fiscalistes tels que comptables, avocats, planificateurs financiers et autres conseillers quant aux conséquences fiscales de leurs décisions. Le Parlement du Canada ne devrait pas avoir à approuver les yeux fermés les décisions de bureaucrates qui voudraient que la loi ait un sens différent de celui qu'elle a et ce, à titre rétroactif.

Le sénateur Massicotte a demandé à plusieurs reprises aux fonctionnaires qui ont témoigné devant le comité des finances nationales pourquoi ces changements n'ont pas été faits plus tôt. Pourquoi n'ont-ils pas été fait lorsque d'éminents fiscalistes ont soulevé la question en 1988 et en 1989 ou lorsque ces questions ont commencé à être renvoyées devant les tribunaux au début des années 1990? Pourquoi n'ont-ils pas été fait lorsque la vérificatrice générale a publié son rapport sur la question en 2001?

(1500)

Les fonctionnaires n'ont jamais répondu à ces questions, honorables sénateurs, et, en comité, le sénateur Massicotte n'a jamais obtenu de réponse non plus. Le changement proposé aura un effet sur les causes en instance et, à en juger d'après les témoignages recueillis par le comité, tout indique que le gouvernement a l'intention d'améliorer ses chances de les gagner. Il essaie de couper l'herbe sous les pieds des contribuables et de leurs avocats sur des questions qui, par le passé, ont peut-être été déterminantes dans des décisions de planification fiscale. Ce n'est pas ainsi que l'on agit au Canada, que l'on traite nos compatriotes. Ce n'est pas ainsi que fonctionne notre système. Nous devons laisser aux tribunaux le soin de rendre une décision sur ce qui appartient au passé.

Honorables sénateurs, j'insiste encore sur l'impérieuse nécessité de compter sur un régime fiscal stable. Nous sommes dans une économie mondialisée où les pays se livrent concurrence pour attirer des investissements étrangers. Nous avons besoin d'un régime fiscal qui soit stable, dans lequel les contribuables connaissent leurs droits et puissent recourir normalement aux tribunaux en cas de doute.

Ces questions ne sont pas simples. On m'a signalé que, dans bien des causes que la Cour suprême du Canada a entendues récemment, les tribunaux inférieurs avaient émis des opinions très différentes dans une même affaire à cause de la complexité des questions en litige. Ainsi, il est arrivé à plusieurs reprises que des contribuables perdent devant des tribunaux de première instance pour finalement obtenir gain de cause en Cour suprême. Et cela s'est produit plus d'une fois récemment. C'est pour cette raison que nous devrions laisser ces délicates questions de la RGAE, des conventions fiscales et des règlements qui s'y rapportent aux tribunaux spécialisés, plutôt que d'essayer de les trancher par le biais du projet de loi C-33 qui, s'il était adopté, serait une mauvaise loi, comme l'a indiqué le sénateur Moore.

Les membres de cette honorable chambre ne doivent pas, comme l'a laissé entendre le sénateur Moore, devenir des complices involontaires d'un quarteron de fonctionnaires du ministère des Finances, déchaînés, au zèle intempestif et avides d'aller piger dans la poche du contribuable. Je vous exhorte, chers collègues, à appuyer l'excellent amendement proposé par le sénateur Murray quand nous serons appelés à voter sur cette question, tout à l'heure.

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, j'ai déjà pris la parole au sujet de ce projet de loi en troisième lecture, mais comme je n'ai pas parlé de l'amendement, c'est à ce propos que je m'adresse maintenant à vous.

Honorables sénateurs, je vais profiter de cette occasion pour vous exhorter à réfléchir aux répercussions de l'amendement proposé par mon honorable collègue, le sénateur Murray.

Honorables sénateurs, le sujet de cet amendement n'est pas nouveau. L'honorable sénateur Murray l'a lui-même abordé quand nous avons accueilli le ministre des Finances au comité. Je vais d'ailleurs vous lire ce qu'a déclaré l'honorable Ralph Goodale à cette occasion. Le sénateur Murray lui a demandé pourquoi le changement proposé ne prenait pas effet à compter du budget de 2004. Voici ce que M. Goodale lui a répondu :

Pour la simple raison, sénateur Murray, que si nous faisions ce que vous demandez, d'autres, notamment des avocats et des tribunaux, pourraient conclure que nous voulons apporter un changement. Or, ce n'est pas le cas. La loi est telle quelle depuis 1988. Si nous disons que ce changement n'a d'effet que pour l'avenir, nous donnerions implicitement l'impression que quelque chose a changé entre 1988 et maintenant, ce que nous ne voulons pas. Selon nous, l'état du droit est inchangé.

Cette position est importante, honorables sénateurs, si nous reconnaissons que, si la modification a été touchée au plus tard en 2004 et si, par conséquent, les tribunaux et les avocats ont insisté pour dire que les choses ont changé, qu'en est-il des milliers de contribuables qui ont suivi les conseils donnés par des conseillers fiscaux qui savaient quelle position avait adoptée le gouvernement depuis 1988 et qui respectaient cette position? Qu'en est-il de ces contribuables?

Si nous respectons cette modification, tous ces contribuables seraient désavantagés.

Le point important à souligner dans tout ce débat, honorables sénateurs, a trait aux connaissances dont on disposait au sein de l'industrie. Il importe aux sénateurs de se rappeler qu'il s'agit d'un point plutôt complexe, à savoir la règle générale anti-évitement, particulièrement en ce qui a trait aux traités internationaux et aux règles générales d'évitement qui peuvent s'appliquer aux cas d'interprétation abusive des règles fiscales. Ainsi, il s'agit d'un aspect assez restreint, et les gens qui utilisent cette mesure demandent conseil, et les personnes qui formulent les conseils connaissent la position du gouvernement. Cette information est connue. Par conséquent, honorables sénateurs, je suis convaincu que si cette information était connue pendant cette période, le ministre a raison sur ce point, c'est une clarification de la position. Cette clarification est nécessaires en raison des deux affaires qui ont été soulevées en rapport avec le règlement. Plusieurs témoins nous ont indiqué que la décision rendue était surprenante.

Le sénateur Moore a mentionné ces deux affaires relatives au règlement, en précisant que le règlement ne s'appliquait pas à la règle générale anti-évitement. Une décision a été rendue pour chacune de ces affaires, et le jugement est tombé la même journée, soit le 23 mars 2001, par le même juge. Ainsi, il n'est pas très juste d'avancer qu'il s'agit de « deux affaires ».

Des témoins ont fait valoir que ces deux affaires traitées par le même juge, la même journée, avaient été mises en doute. Le juge Archambault avait rendu une décision controversée sur deux affaires précédentes, ses observations étant contestées car le jugement ne reposait pas sur cette interprétation particulière. L'une de ces affaires était Sa Majesté la reine c. Hypothèques Trustco Canada, et une autre affaire portée devant le tribunal d'appel avait également donné lieu à un renversement de la position du juge Archambault. Les deux affaires faisaient l'objet d'un appel, mais étant donné que le contribuable avait joui d'une décision favorable pour plusieurs autres points, il n'y avait certes aucune garantie que la question serait clarifiée au tribunal d'appel.

En novembre 2003, le gouvernement a retiré l'appel et, en mars 2004, la clarification figurait dans le budget. Honorable sénateurs, il importe que nous tenions compte de ces deux affaires.

Lors de nos audiences devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales, nous avons parlé abondamment de la règle générale anti-évitement. Malheureusement, le débat portait sur la rétroactivité plutôt que sur la clarification. Un témoin qui se présente demande pourquoi on ne parle pas de mesure « rétrospective ». On peut certes employer de nombreux termes différents. Est-ce un fait que cette loi est rétrospective? Certaines personnes avancent qu'elle est rétroactive et que, par conséquent, il faut déclencher un signal d'alarme car, Dieu nous en protège, nous ne pouvons pas avoir de loi rétroactive.

Mon collègue a parlé des anciens combattants. Honorables sénateurs, j'ai participé en parrainant deux lois rétroactives concernant nos anciens combattants. L'une de ces lois était la loi Bruce Henwood, qui revenait des dizaines d'années en arrière afin que la législation s'applique aux personnes blessées en zone de guerre. Sans mesures législatives rétroactives, nous n'aurions pas pu remédier à cette situation clairement injuste. De plus, au sujet du Programme pour l'autonomie des anciens combattants...

(1510)

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Je me rends bien compte que l'heure avance et qu'à 15 h 15, Son Honneur fera sonner le timbre. Il me semble que le sénateur Day a déjà parlé et qu'il dépasse peut-être son temps de parole. Je voudrais donc l'inviter à s'informer pour déterminer si d'autres sénateurs souhaitent prendre la parole, puisque les motions de ce genre sont proposées à l'initiative du gouvernement.

C'est tout à fait régulier. Le sénateur Day a déjà parlé. Sénateur Smith, nous attendons tous ce que vous avez à nous dire de M. Lalonde.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je regrette, sénateur Cools, lorsque le sénateur Day a pris la parole, il a précisé que ses observations portaient sur l'amendement et qu'il avait déjà parlé de la motion principale.

Le sénateur Cools : Honorables sénateurs, il reste encore des questions sans réponse sur lesquelles nous aimerions peut-être avoir des précisions. Par exemple, j'espérais entendre le sénateur Smith dire quelque chose de l'objet du débat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Je regrette, sénateur Cools, ce n'est pas un recours au Règlement.

Sénateur Day, veuillez poursuivre.

Le sénateur Day : Honorables sénateurs, je vous remercie de votre appui et de votre compréhension à ce sujet.

Ce débat a été très compliqué. Il est important que les honorables sénateurs comprennent qu'à l'analyse, la question revient à déterminer si des renseignements suffisants ont été donnés et, par conséquent, si l'on a satisfait au critère d'équité envers le contribuable. C'est là un des critères. Si le projet de loi est considéré comme rétroactif, c'est un des critères.

Au sujet de la rétroactivité, permettez-moi de citer le témoignage de M. Scott Wilkie, qui a comparu devant nous. C'est un fiscaliste expert qui a fait partie du comité conjoint, quoi qu'il n'en fasse plus partie aujourd'hui. Il n'a pas comparu comme membre de ce comité, mais à titre de fiscaliste expert. Il a dit :

Il importe de souligner que les mesures fiscales sont souvent adoptées à titre rétroactif. Honorables sénateurs, vous aurez l'avantage, si les événements s'y prêtent, d'étudier un projet de loi d'une extraordinaire complexité concernant les règles applicables aux sociétés étrangères affiliées. Ce projet de loi renferme des modifications rétroactives que les contribuables réclament depuis 1994.

Il a ensuite ajouté :

Il est très courant, surtout quand ils portent remède à une situation injuste, que les projets de loi fiscaux s'appliquent rétroactivement.

Honorables sénateurs, il est donc courant pour nous d'être saisis de mesures fiscales et d'autres mesures législatives rétroactives ou rétrospectives, selon le terme qu'on préfère, mais les cinq critères recommandés en 1995 par le Comité permanent des comptes publics sont là pour assurer l'équité. Selon l'un de ces critères, le secteur en cause doit être généralement au courant des dispositions. C'est l'argument que j'ai avancé tout à l'heure. Le secteur en cause se compose, dans le cas présent, de contribuables très sophistiqués qui s'occupent de plus en plus de questions internationales. Ces gens étaient au courant depuis le début. Leurs conseillers connaissaient depuis longtemps la position du gouvernement.

Honorables sénateurs, s'il est accepté, cet amendement créerait deux catégories : ceux qui ont suivi les règles avant et depuis 2004. J'exhorte les honorables sénateurs à rejeter l'amendement et à adopter sans modification cet important projet de loi.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Comme il est 15 h 15, conformément à l'ordre adopté par le Sénat le 5 mai 2005, je dois interrompre les délibérations pour mettre aux voix l'amendement de l'honorable sénateur Murray, C.P., au projet de loi C-33. Le vote porte sur l'amendement, qui est ainsi libellé... Suis-je dispensée de la lecture?

Des voix : D'accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien de dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : À mon avis, les non l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés :

Son Honneur la Présidente intérimaire : Conformément à l'ordre adopté le 5 mai, le timbre sonnera pendant 15 minutes. Convoquez les sénateurs.

(1530)

(La motion d'amendement, mise aux voix, est rejetée.)

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus Murray
Atkins Nancy Ruth
Buchanan Oliver
Comeau Plamondon
Cools Prud'homme
Di Nino Rivest
Doody Spivak
Keon St. Germain
Kinsella Stratton
LeBreton Tkachuk—21
Moore

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams Harb
Austin Hubley
Bacon Jaffer
Baker Joyal
Banks Lapointe
Biron Lavigne
Callbeck Léger
Carstairs Losier-Cool
Chaput Maheu
Christensen Mahovlich
Corbin Milne
Cowan Mitchell
Dallaire Pearson
Day Peterson
Dyck Phalen
Eggleton Pitfield
Fairbairn Poulin
Ferretti Barth Robichaud
Finnerty Sibbeston
Fitzpatrick Smith
Fraser Stollery
Furey Tardif
Gill Trenholme
Counsell—47
Grafstein

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuk Lynch-Staunton
De Bané Massicotte
Johnson Ringuette—6

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le vote porte maintenant sur la motion principale.

L'honorable sénateur Day, avec l'appui de l'honorable sénateur Dallaire, propose : Que le projet de loi soit lu une troisième fois maintenant.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Que ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que ceux qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les oui l'emportent.

Le sénateur Kinsella : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet, lu une troisième fois, est adopté avec dissidence.)

(1540)

[Français]

PROJET DE LOI SUR LES MESURES DE RÉINSERTION ET D'INDEMNISATION DES MILITAIRES ET VÉTÉRANS DES FORCES CANADIENNES

DEUXIÈME LECTURE

L'honorable Roméo Antonius Dallaire propose : Que le projet de loi C-45, Loi prévoyant des services, de l'assistance et des mesures d'indemnisation pour les militaires et vétérans des Forces canadiennes ou à leur égard et modifiant certaines lois, soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c'est avec une grande anticipation que je vous parle aujourd'hui du projet de loi C-45, qui propose la modernisation de notre programme d'indemnisation et d'assistance à nos vétérans, dans l'espoir qu'il sera adopté intégralement par cette Chambre.

[Traduction]

On présente le projet de loi C-45 comme constituant une modernisation et, en fait, un nouveau contrat social entre les Canadiens et les anciens combattants d'hier et d'aujourd'hui. On perçoit cette nouvelle proposition, en bout de ligne, comme un moyen de rehausser la capacité opérationnelle des Forces canadiennes à s'acquitter de bon nombre de leurs fonctions très complexes que le gouvernement les somme d'exécuter partout au monde et, ainsi, d'offrir un soutien aux anciens combattants qui ont pris part à ces opérations, qu'il s'agisse d'anciens combattants blessés ou décédés, de même qu'aux familles de ceux-ci qui, à la différence, sans doute, des familles des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée, suivent la mission avec nous car, grâce aux médias, elles peuvent « observer » constamment les opérations ainsi que les répercussions de ces opérations sur le membre de leur famille — conjoint, père, ou autre — qui prend part à ces complexes missions modernes.

Essentiellement, le gouvernement a optimisé les possibilités de la charte des anciens combattants en s'efforçant, au cours des dernières années, de relever les défis d'aujourd'hui et de répondre aux besoins des anciens combattants modernes et de leurs familles, qui souhaitent non seulement une indemnisation mais également une réadaptation en vue d'une réinsertion dans un secteur prospère de la société canadienne. Ainsi, nous nous trouvons aujourd'hui devant une loi quasi révolutionnaire en ce qui concerne les exigences modernes des anciens combattants et de leurs familles.

Certains des éléments de preuve que je tiens à vous proposer ou présenter se résument comme suit. Tout d'abord, Anciens Combattants Canada a observé une augmentation sans précédent du nombre d'anciens combattants qui ont besoin d'un soutien en matière d'indemnisation mais aussi de réadaptation à la société canadienne. De 2001 à 2004, nous avons remarqué une hausse de 58 p. 100 des anciens combattants, qui découlait directement du nombre d'engagements pris et du rythme accéléré des opérations de nos forces armées partout au monde.

Ensuite, bien que les programmes actuels aient réussi à combler les besoins des anciens combattants habituels, il s'agit d'un régime qui risque de perpétuer la souffrance, comme en fait foi le nombre de clients des Forces canadiennes qui se présentent au ministère afin de demander l'augmentation de leurs prestations d'invalidité. Le régime n'arrive tout simplement pas à répondre à la demande.

Nous ne touchons nullement aux mesures d'indemnisation et de soutien de la charte des anciens combattants prévue pour les anciens combattants habituels de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée. Ces régimes demeurent inchangés et vont continuer à offrir un soutien aux anciens combattants des guerres traditionnelles. Toutefois, ces régimes ne répondent pas aux besoins de la nouvelle génération d'anciens combattants, surtout de ceux qui ont servi depuis la guerre de Corée et, plus particulièrement, de ceux de la nouvelle ère de l'après-guerre froide.

Les pensions d'invalidité traditionnelles ont très bien servi nos anciens combattants, surtout quand elles étaient associées à des indemnités de réinstallation complète versées au moment où ils étaient libérés de leurs obligations militaires. Il faut se rappeler que, dans sa version originelle, la charte des anciens combattants a répondu aux besoins de plus d'un million de jeunes Canadiens à leur retour d'outre-mer. Aujourd'hui, nous avons besoin d'une charte qui réponde aux besoins des vétérans de la nouvelle génération afin de les accueillir à leur retour de théâtres opérationnels.

Troisièmement, je voulais vous parler de la nécessité de changer certaines choses. Nombre d'anciens combattants ne parviennent pas à faire la transition entre la vie militaire et la vie civile. Beaucoup continuent de souffrir après leur retour. Ceux qui sont aux prises avec de telles difficultés ont beaucoup de mal à réintégrer la société canadienne, compte tenu du genre de programmes actuellement offerts. Ce faisant, il sera nécessaire de refondre la charte des anciens combattants en fonction de ces nouvelles demandes.

Quatrièmement, les fournisseurs de services sont tellement nombreux que beaucoup d'anciens combattants s'égarent dans les dédales administratifs quand ils essaient d'obtenir des indemnités et un soutien appropriés que l'ancienne charte prévoyait pourtant. Aujourd'hui, comme la demande a changé, les procédures administratives sont décalées par rapport aux besoins et il est devenu quasiment impossible pour certains anciens combattants de faire face aux difficultés auxquelles ils sont confrontés.

Ce sont surtout ceux qui souffrent de dépression ou du syndrome de stress post-traumatique qui ont énormément de difficultés à comprendre la machine administrative et à s'y adapter, celle-ci leur paraissant parfois s'adresser beaucoup plus à des personnes en bonne santé, ce qui les amène à se couper complètement du système.

Cinquièmement, et ce sera mon dernier point, je tiens à signaler qu'il n'existe aujourd'hui aucun soutien pour les familles. Comme je l'ai indiqué, de nos jours, les familles suivent pour ainsi dire les militaires dans leurs missions. À son retour, le vétéran ne se retrouve pas en présence d'une famille qui n'a qu'occasionnellement entendu parler de la nature du conflit, qui n'en a vu que quelques images, parce qu'à cause des médias et de l'immédiateté de l'information, les familles de militaires vivent quotidiennement les missions que remplissent leurs êtres chers. Cela en est au point où les familles aussi sont ébranlées et ont de la difficulté à s'adapter et à accepter le retour d'un ancien combattant qui n'est plus forcément le même que quelques mois auparavant, à cause de l'empreinte laissée par les opérations auxquelles il aura participé.

Depuis 1997, Anciens combattants Canada et Défense nationale, ainsi que votre serviteur, si je puis me nommer, travaillent d'arrache- pied pour essayer de modifier l'ancien programme et mettre en œuvre un nouveau contrat entre les Canadiens et les membres des Forces canadiennes qui, à leur retour d'opérations sont les vétérans d'aujourd'hui. Ce faisant, les dispositions du projet de loi C-45 sont l'aboutissement d'années d'études et de consultations auprès des parties prenantes et des spécialistes du domaine. Ces dispositions reprennent aussi les pratiques exemplaires en vigueur dans d'autres pays qui ont déjà modernisé les services et le régime des prestations pour les anciens combattants. Je pense tout particulièrement à l'Australie, au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Les programmes proposés, qui sont résolument axés sur le bien- être, portent sur les principaux aspects que sont la réadaptation, les soins de santé, les pertes financières, l'aide au placement et les indemnités d'invalidité. Il faut envisager tous ces éléments à long terme, dans le contexte des besoins des anciens combattants et de leurs familles. Il ne doit pas s'agir d'un effort ponctuel mais, au contraire, d'un ensemble de services offerts durant toute la phase de transition à la vie civile. Les anciens combattants ont besoin d'être soutenus pour se réinsérer dans la vie civile; ils ont besoin de programmes de réadaptation, de recyclage et de débouchés d'emploi et, dans le cas de ceux qui sont frappés d'incapacité, il faudra envisager d'appuyer, de former ou d'instruire leurs conjointes pour qu'elles puissent assumer les responsabilités familiales.

Honorables sénateurs, il nous faut un programme de réadaptation qui va nous permettre d'aider les anciens combattants handicapés à participer dans la mesure de leurs moyens à la vie familiale, professionnelle et sociale. Nous devrons leur verser des prestations de maladie qui complèteront l'assurance déjà offerte par la Défense nationale. Ce faisant, ceux qui sont admissibles à ce programme, ceux qui se heurtent aux obstacles caractéristiques de la réintégration à la vie civile, ainsi que leurs familles, bénéficieront d'une assurance-maladie qui sera maintenue après leur libération. Bon nombre passent entre les mailles du filet entre le moment de leur libération des Forces canadiennes jusqu'à ce qu'Anciens Combattants Canada les récupère. C'est pourquoi bon nombre d'entre nous et, plus particulièrement, nos familles ont souffert injustement.

(1550)

Des programmes de recherche d'emploi et de formation à la réintégration seront offerts à tous les membres des Forces canadiennes sur le point d'être libérés. Tous les membres des Forces canadiennes qui servent pendant un an et qui finiront par être libérés sont considérés comme des anciens combattants. À ce titre, ils doivent pouvoir profiter des indemnités offertes dans le cadre de ce programme. Celui-ci sera géré conjointement par Anciens Combattants Canada et la Défense nationale. Il permettra aux anciens combattants et à leur famille de bénéficier de l'autonomie et de la sécurité financière auxquelles ils ont droit.

De même, les dispositions relatives aux pertes de revenus du projet de loi fourniront un filet de sécurité aux militaires qui subissent des pertes financières en raison de leurs besoins en matière de réadaptation liée au service. Elles prévoiront un soutien à court terme pour les militaires en réadaptation et une aide à long terme pour ceux qui ne sont plus capables de travailler.

Un programme d'indemnités d'invalidité permettra de verser une compensation aux anciens combattants des Forces canadiennes pour les pertes autres que financières, par exemple la douleur et la souffrance. Nous proposons que ces indemnités soient versées sous forme de paiements forfaitaires, non imposables, pouvant aller jusqu'à 250 000 $, selon la gravité du handicap global.

Honorables sénateurs, j'ai abordé sommairement les dispositions du projet de loi et les avantages qu'elles prévoient. J'aimerais maintenant parler du processus de consultation. Depuis qu'Anciens Combattants Canada a annoncé, au printemps de 2004, leur intention de promulguer une nouvelle charte des anciens combattants, un groupe de travail sur la modernisation a entrepris une vaste série de consultations auprès des groupes intéressés, y compris les associations nationales d'anciens combattants et les représentants du ministère de la Défense nationale. De plus, on a mis sur pied des groupes de discussion afin de sonder les réactions des membres des Forces canadiennes, des anciens combattants et de leur famille concernant les mesures proposées.

Le Conseil consultatif sur les Forces canadiennes d'Anciens Combattants Canada, créé en l'honneur de M. Peter Neary et de son équipe de l'Université Western Ontario et dont j'ai fait partie pendant plus de quatre ans, a formulé des conseils, mené des consultations et participé aux activités en vue de la définition de bon nombre des mesures proposées. Certains détails ont toutefois surgi au fur et à mesure de l'élaboration du projet de loi.

Les membres des Forces canadiennes et les anciens combattants considèrent non seulement ces mesures comme révolutionnaires, mais également comme un tout nouvel effort visant à régler les problèmes du passé et à faire un pas vers l'avenir. En outre, ce programme servira d'incitatif supplémentaire et offrira davantage de soutien aux hommes et aux femmes qui envisagent de s'enrôler dans les Forces canadiennes et qui devront, ainsi que leur famille, faire des sacrifices lorsqu'ils seront envoyés à l'étranger et, comme dans beaucoup de cas, deviendront invalides comme suite de leur service.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-45, en ce qui concerne la nouvelle charte des anciens combattants, représente le volet humain de notre engagement national, dans ce monde tourmenté dans lequel nous vivons. Il tient compte du fait que le Canada assume un rôle plus important à l'échelle internationale; il veille à ce que l'on soutienne les militaires des Forces canadiennes et à ce que l'on veille sur eux. En appuyant ce nouveau contrat social, non seulement nous répondrons au besoin urgent de maintenir l'efficacité de nos forces et des opérations menées aux quatre coins du monde, mais nous assumerons également nos responsabilités à l'égard de ceux qui, au péril de leur vie, vont en notre nom défendre la paix, la sécurité et les droits de la personne dans des pays lointains. C'est en gardant à l'esprit cette responsabilité, ainsi que la fière tradition du Canada lorsque vient le temps d'honorer ses anciens combattants, que je demande aux honorables sénateurs d'appuyer l'adoption rapide du projet de loi C-45.

L'honorable John Lynch-Staunton : Honorables sénateurs, puis-je poser une ou deux questions au sénateur Dallaire?

Le sénateur Dallaire : Oui.

Le sénateur Lynch-Staunton : Ma première question a trait au Tribunal des anciens combattants (révision et appel), qui a le dernier mot en cas de différend. Ses décisions ne sont pas toujours en faveur des anciens combattants. Au fil des ans, les groupes représentant les anciens combattants ont réclamé un ombudsman, qui aurait davantage une position neutre lorsqu'un différend aboutit à un résultat insatisfaisant devant le Tribunal. Ce serait un autre niveau d'appel. Savez-vous s'il est question d'un ombudsman dans ce projet de charte des anciens combattants?

Le sénateur Dallaire : Au cours des délibérations, on a convenu tacitement de ne pas parler du Tribunal des anciens combattants (révision et appel) ni de ce poste. On pensait que ce tribunal correspondait à ce que les anciens combattants considéraient comme une condition ou une indemnisation légitime, même s'il ne tranche pas toujours en leur faveur. Cependant, comme on l'a reconnu au fil des ans, il y aurait un ensemble exceptionnel de circonstances dans des cas exceptionnels. À notre avis, le Tribunal devrait rester en place. L'idée d'un ombudsman a été proposée, mais on a décidé qu'elle ferait l'objet d'une étude plus tard. D'après notre analyse, le Tribunal devrait rester dans le projet de loi C-45.

Le sénateur Lynch-Staunton : Ma deuxième question se rapporte directement au projet de loi, en particulier à l'article 9. Un ancien combattant qui est aux prises avec un problème de santé physique ou mentale dispose d'un délai de 120 jours à compter du jour de sa libération pour demander des services de réadaptation. Le ministre peut, à sa discrétion, l'autoriser à présenter sa demande même si le délai est écoulé. Il est possible qu'un ancien combattant ne se rende pas compte en moins de 120 jours que son problème le rend admissible à ces services. Pourquoi un délai si court? Pourquoi ne pas prévoir un délai de six mois ou d'un an, parce que le problème est parfois apparent, senti ou connu longtemps après que l'ancien combattant est rentré chez lui et libéré. Pourquoi le délai de présentation de la demande n'est-il que de 120 jours?

Le sénateur Dallaire : Des craintes ont été exprimées concernant les tenants et les aboutissants du projet de loi. Avec votre permission, honorables sénateurs, je préfèrerais transmettre la question du sénateur au comité si le projet de loi allait lui être renvoyé . De cette façon, je pourrais répondre avec plus de certitude.

Le sénateur Lynch-Staunton : Honorables sénateurs, j'ignorais que le projet de loi serait renvoyé au comité. Si cela devait être le cas, il serait certainement plus pertinent de poser ces questions au comité. Je suis d'accord pour procéder ainsi.

L'honorable Terry Stratton (leader adjoint de l'opposition) : Le sénateur accepterait-il une autre question?

Le sénateur Dallaire : Oui.

Le sénateur Stratton : Le projet de loi C-45 vise-t-il tous les anciens combattants ou une catégorie en particulier?

Le sénateur Dallaire : Honorables sénateurs, comme il est indiqué, la charte proposée répondrait aux besoins de tous les anciens combattants. Ce faisant, l'indemnisation et tous les programmes établis à l'intention des anciens combattants traditionnels, ceux de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée, ne sont pas modifiés par ce processus. Tous les droits et les privilèges établis dans le passé continueront de répondre à leurs besoins comme l'indiquent nos travaux. Nous avons veillé à ce que les anciens combattants traditionnels ne pensent pas que ce qu'ils attendent et ce qu'ils connaissent depuis des années serait modifié de quelque façon par ce processus.

Le sénateur Stratton : À titre d'ancien combattant, le sénateur va-t- il bénéficier des dispositions de ce projet de loi?

Le sénateur Dallaire : Oui, je vais en bénéficier. Tous les anciens combattants des Forces canadiennes d'après la Seconde Guerre mondiale, à l'exception de ceux de la guerre de Corée, bénéficieraient de ce projet de loi s'ils avaient besoin d'indemnisation, de réadaptation, de formation, entre autres. Le projet de loi s'adresse à tous les membres des Forces canadiennes reconnus comme anciens combattants.

[Français]

L'honorable Madeleine Plamondon : Honorables sénateurs, j'aimerais connaître la définition du terme « conjoint de fait ». On parle d'une personne vivant avec le militaire ou le vétéran dans une relation conjugale depuis au moins un an. Une personne qui n'entrerait en relation conjugale qu'un an après que le vétéran soit revenu aurait-elle droit à une compensation, et quelle en serait la nature? Qu'advient-il de la personne qui n'aurait été en relation conjugale que durant un an?

Le sénateur Dallaire : Ce projet de loi exigera d'Anciens Combattants Canada une révision de grande envergure de ses politiques qui prendra presque un an. La personne qui n'entrerait en relation conjugale qu'un an après aurait droit aux mêmes compensations qu'une épouse. De plus, si le vétéran est blessé au point de ne plus être en mesure de subvenir aux besoins familiaux, le conjoint aurait droit à tout le soutien possible dans la poursuite de ses études menant à une carrière ou dans la recherche d'un emploi lui permettant de subvenir aux besoins familiaux.

Le sénateur Plamondon : Qu'en est-il pour les couples de même sexe?

(1600)

Le sénateur Dallaire : Selon la loi, on suit justement les définitions classiques déjà établies.

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, si ma mémoire est fidèle, dans le livre rouge du gouvernement, en 1993, on avait promis que toute cette question de conjoints ou de partenaires de même sexe serait réexaminée. Il y avait même une disposition — j'en ai parlé à certains députés — qui avait suscité beaucoup d'intérêt. Aucun parti politique ne semble vouloir s'intéresser à cette question.

Lorsqu'un nouveau projet de loi est présenté, il serait peut-être temps de réexaminer toute la question qui a été littéralement mise de côté. Je comprends que des gens sont des « common law partners ». Je comprends le mariage traditionnel, le mariage entre personnes de même sexe. Certains partenaires de même sexe veulent se marier. Je suis fondamentalement conservateur sur le mariage traditionnel.

Toutefois, une fois de plus, nous ne nous sommes pas penchés sur la question des frères et sœurs, frères et frères ou sœurs et sœurs — ils sont nombreux au Sénat — qui prennent soin l'un de l'autre. Le mot « partenaire » n'a jamais été défini. Il était censé l'être en 1993. Mme Robillard, à titre de présidente du Conseil du Trésor, avait même promis : « Ne vous inquiétez pas, honorables sénateurs, un comité spécial du ministère de la Justice s'occupera de cette importante question. » Je me demande si le temps n'est pas venu de se pencher sur cette question; je vous soumets la question bien respectueusement, avec toute l'amitié que je vous porte. Est-ce qu'il sera bientôt possible d'étendre cette définition et pas seulement dans ce débat? Ce débat fait sourire mon collègue, le sénateur Angus, et plusieurs autres. Il est peut-être nouveau pour certains mais il touche des milliers de gens qui prennent soin l'un de l'autre.

Je reviens donc à ma première définition de base. Il y a une définition plus vaste qui parle des enfants, comme le pacte français. Dans mon cas, ce serait ma sœur. Tous connaissent ma situation familiale. Nous prenons soin l'un de l'autre depuis 70 et 75 ans. En fait, rien n'est prévu pour ces gens-là. Pour les veufs et les veuves qui prennent soin l'un de l'autre, il n'y a rien. On fait tout un débat sur la définition du mariage entre conjoints de même sexe et on a oublié les autres.

Est-ce que vous auriez une suggestion à faire avant que nous allions en comité? Le temps n'est-il pas venu d'étudier cette question qui touche de nombreuses personnes? Y a-t-il lieu d'y réfléchir bientôt? Sénateur Eggleton, vous avez été à la Défense nationale. Si vous voulez faire un débat, levez-vous, je vais vous écouter avec beaucoup de respect si j'en suis encore capable.

Je parle maintenant au sénateur Dallaire. N'y a-t-il pas là une occasion d'examiner ce problème, quitte à adopter ce projet de loi assez rapidement pour ensuite revenir à cette question?

Le sénateur Dallaire : Je dois dire que vous avez élaboré un scénario qui n'est pas à négliger, mais dans le contexte dans lequel on se trouve, cette question pourrait être traitée en comité pour avoir une perspective plus spécifique aux besoins des anciens combattants.

Le sénateur Prud'homme : Les vétérans ont des soeurs aussi!

[Traduction]

L'honorable Noël A. Kinsella (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, s'il n'y a pas d'autres questions au sénateur Dallaire, je voudrais prendre la parole pour appuyer le principe du projet de loi. Ce faisant, je voudrais aussi saluer notre nouveau collègue, le sénateur Dallaire. J'ai eu le plaisir, dans les deux derniers jours, d'être présent pendant qu'il était honoré par l'une de nos universités du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Dallaire a des talents très particuliers qui lui permettront de beaucoup contribuer aux travaux du Sénat. De plus, compte tenu de ses antécédents d'ancien combattant, c'est un excellent porte-parole de nos vétérans. Nous en avons la preuve après avoir écouté ses arguments en faveur du projet de loi.

Je voudrais cependant lui conseiller, parce qu'il pourrait profiter lui-même de certaines des dispositions de cette mesure législative, de s'abstenir lorsque viendra le moment de voter et ce, pour un certain nombre de raisons. L'opposition appuie le projet de loi et, comme les sénateurs assez nombreux du côté du gouvernement, il n'y a pas de doute qu'il sera adopté. Par conséquent, si le sénateur décide de s'abstenir, nous en comprendrons tous les raisons.

Honorables sénateurs, nous sommes tous très conscients de la contribution des membres des Forces canadiennes et de ceux qui deviendront des anciens combattants lorsqu'ils seront arrivés au terme de leur période de service dans les Forces canadiennes. Nous sommes toujours heureux d'examiner ici des projets de loi qui traitent de questions concrètes et pratiques.

Le projet de loi C-45 comporte des lacunes. Avec mes collègues d'en face, je suis sûr que nous essaierons d'y remédier. Toutefois, en ce moment, nous appuyons le projet de loi tel quel. De plus, compte tenu de la situation qui règne à l'autre endroit, nous sommes très désireux de voir le Sénat examiner le projet de loi aussi soigneusement qu'il a le devoir de le faire, mais aussi rapidement que possible.

Honorables sénateurs, la charte des anciens combattants qui est actuellement en vigueur a été élaborée après la Seconde Guerre mondiale. Elle ne répond donc plus aux besoins et aux réalités des anciens combattants d'aujourd'hui. Même si le projet de loi C-45 vise à corriger beaucoup des problèmes que connaissent maintenant les anciens combattants, il ne va pas assez loin. Je crois que c'est ce que diront les témoins qui comparaîtront devant le comité, surtout s'ils appartiennent à la communauté des anciens combattants.

Le projet de loi pourrait, à l'avenir, susciter des problèmes dont les honorables sénateurs devraient être conscients. Cinq programmes distincts devront être administrés par Anciens Combattants Canada : les prestations de maladie, l'aide au placement, les allocations pour perte de revenus, les indemnités d'invalidité et les indemnités de décès.

À titre d'ancien administrateur public, je ne peux m'empêcher de poser la question suivante : les rouages administratifs nécessaires sont-ils actuellement en place à Anciens Combattants Canada?

(1610)

Le ministère a-t-il les moyens de prendre toutes les dispositions nécessaires pour offrir ces services dès l'adoption du projet de loi? Le gouvernement a-t-il fait preuve de diligence pour ce qui est de la planification de la mise en oeuvre de cette mesure législative?

Le projet de loi prévoit des équipes de gestion des cas à un point de contact. En ce moment, les anciens combattants doivent appeler un numéro sans frais et attendre une réponse de leur gestionnaire de cas. Si vous interrogez les anciens combattants, ils vous diront qu'on peut attendre plusieurs jours.

Nous avons donc des préoccupations au sujet des délais d'accès aux services mentionnés dans le projet de loi. Le paragraphe 9(2), à la page 7, parle de 120 jours. Toutefois, on a l'impression que ce n'est pas tant un droit qu'un privilège accordé à la discrétion du ministre.

Le délai de 120 jours peut ne pas être applicable dans bien des cas, à cause de la nature de la maladie ou de l'état dû au service militaire. En effet, un état peut ne se manifester que très longtemps après le retour au Canada. Que va-t-on dire à ces gens-là quand ils communiqueront avec le ministère des Anciens Combattants? Va- t-on leur interdire l'accès à ces services nécessaires uniquement parce qu'ils auront laissé s'écouler le délai de 120 jours? Je le répète, à la façon dont cet article est rédigé, le « pouvoir discrétionnaire » du ministre n'implique pas un droit.

L'admissibilité aux prestations des veufs ou des veuves qui ont des enfants, par rapport à ceux qui n'en ont pas, pose également problème. D'après ce que j'ai cru comprendre, la loi actuelle prévoit qu'un conjoint survivant avec des enfants a droit à 100 p. 100 des prestations ou plus exactement, à 60 p. 100 puisque 40 p. 100 vont aux enfants. Il demeure que cette personne doit continuer d'élever et de faire vivre les enfants à partir d'un montant réduit. Nous aurons peut-être l'occasion de demander aux témoins qui comparaîtront devant le comité de nous expliquer la raison d'être de cette disposition du projet de loi.

En outre, si la relation conjugale a moins d'un an, le conjoint survivant n'a pas droit aux prestations. J'entretiens de sérieuses réserves au sujet de cette mesure et de son bien-fondé.

Il est un aspect du projet de loi que certains trouveront cruel, je veux parler du fait que les conjoints et les membres de familles d'anciens combattants qui se sont suicidés ne sont pas, non plus, admissibles à des prestations. Cette disposition est extraordinaire. Madame le sénateur LeBreton et ses collègues du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, de la science et de la technologie, qui se livrent à une étude poussée de la santé mentale au Canada, ont entendu énormément de témoignages sur les questions de santé mentale entourant la tragédie du suicide. Il y a donc lieu de s'inquiéter que ce projet de loi décrète que les survivants d'un militaire qui s'est suicidé ne peuvent prétendre à des prestations. Nous aimerions que le ministère et la ministre nous disent quelle logique ils ont appliquée, en matière de politique gouvernementale, pour cette mesure.

Le milieu des anciens combattants réclame un ombudsman pour les vétérans. Notre Chambre connaît bien le rôle, la nature et les fonctions d'un ombudsman. Son rôle est de protéger la personne — dans ce cas un ancien combattant — contre la mauvaise administration de lois d'intérêt public.

À la lecture des rapports de différents ombudsmans, il faut bien constater que la mauvaise administration et la victimisation, que les bureaux d'ombudsmans servent à corriger, ne sont pas intentionnelles. La demande de création d'un service d'ombudsman pour les anciens combattants, demande émanant des vétérans, est parfaitement fondée, et j'aurais aimé que le projet de loi prévoie ce poste, mais tel ne fut pas le cas. Nos anciens combattants méritent de bénéficier des services d'une personne qui veille à leurs intérêts quand ils estiment que l'appareil bureaucratique les a laissés tomber.

À la façon dont les vétérans voient la chose, l'ombudsman pourrait jouer un rôle déterminant en surveillant les situations litigieuses et en aidant les anciens combattants qui pensent que personne ne les écoute. C'est une lapalissade que de dire qu'ils ont beaucoup sacrifié pour leur pays. Ce projet de loi représente un tout petit retour d'ascenseur que nous pouvons leur donner.

Honorables sénateurs, il est évident que nous allons appuyer ce projet de loi. Nous aimerions que la ministre, ses fonctionnaires et des représentants du milieu des anciens combattants viennent témoigner devant le comité pour l'aider dans son étude du projet de loi. C'est avec plaisir que j'apporte mon appui à ce projet de loi, en deuxième lecture.

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, l'honorable leader de l'opposition me permettra-t-il de poser une question?

Le sénateur Kinsella : Oui.

Le sénateur Joyal : J'ai été intrigué par ce qu'a dit notre honorable collègue dans ses remarques liminaires, à savoir que le sénateur Dallaire ferait mieux de ne pas voter sur ce projet de loi à cause d'un possible conflit d'intérêts.

Comme le sait le sénateur Kinsella, le Comité du Règlement s'est réuni à huis clos. Je crois, d'ailleurs, qu'il a lui-même assisté à nombre de ces réunions. Dans le cas d'une mesure — en l'espèce, du projet de loi C-45 —d'application générale pour toute une catégorie de personnes — dans ce cas les anciens combattants —, l'avantage dont pourrait bénéficier un individu est conféré par une loi du Parlement qui n'a donc rien à voir avec une décision personnelle. Dans une telle situation, on ne peut considérer que la mesure favorise l'intérêt d'un sénateur.

L'autre exemple qui vient immédiatement à l'esprit est celui du sénateur qui est agriculteur ou pêcheur au moment où le Sénat est saisis d'un projet de loi dont l'objet est d'améliorer les programmes qui s'adressent au secteur des pêches ou de l'agriculture. Le sénateur en question pourra, certes, bénéficier des dispositions du projet de loi une fois que celui-ci aura été adopté, mais pas différemment de n'importe quel autre agriculteur qui se prévaudra des programmes visés.

(1620)

C'est une bonne question, et nous pourrons l'examiner lorsque le comité présentera son rapport. J'avais pourtant l'impression, lorsque nous avons discuté de ces questions plus tôt, que l'on ne considérerait pas que le sénateur, dans ce contexte, défendrait ses propres intérêts et qu'il pourrait prendre part au débat et voter. Je pense que le comité a tenté d'établir une distinction entre une situation d'intérêt déclaré, la participation à un débat et une situation dans laquelle un projet de loi favoriserait un sénateur en particulier.

Le sénateur Kinsella est-il d'accord avec moi pour dire que ce n'est pas la situation dans laquelle un sénateur qui est justement un ancien combattant se trouverait, par rapport à ce projet de loi — une situation où il devrait déclarer un intérêt personnel et s'abstenir de voter?

Le sénateur Kinsella : Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur d'avoir posé la question, parce que le compte rendu sera maintenant un peu plus clair à ce sujet. Dernièrement, nous avons été appelés à examiner une mesure législative portant sur les allocations destinées aux lieutenants-gouverneurs, et le Sénat a souvent la chance de compter, parmi ses membres, d'anciens lieutenants-gouverneurs.

Je suis d'accord avec toutes les observations présentées par le sénateur. Je sais tout cela, mais la population en général ne le sait pas. J'ai soulevé la question en raison de l'admiration que je voue à notre collègue. On pourrait dire que non seulement le sénateur Dallaire est un ancien combattant, mais qu'il est en plus l'un des plus valeureux de nos anciens combattants, puis demander à quel titre il peut être autorisé à voter sur cette question. Manifestement, il a tous les droits de le faire, pour toutes les raisons techniques citées par le sénateur Joyal. Cependant, pour éviter ce problème, j'ai soulevé la question avec une intention bienveillante, sachant que certaines personnes ont tendance à dire certaines choses sur les sénateurs.

Le sénateur Prud'homme : Laissez-les faire.

Le sénateur Kinsella : Je suis d'accord avec le sénateur Joyal.

L'honorable Norman K. Atkins : Honorables sénateurs, je présume que le sénateur Kinsella sait que les militaires ont leur propre ombudsman. D'après lui, conviendrait-il davantage d'élargir le champ de responsabilités de l'ombudsman militaire pour lui confier les dossiers des anciens combattants au lieu d'établir un autre niveau de bureaucratie?

Le sénateur Kinsella : Je remercie le sénateur Atkins pour cette question. Si l'expérience du bureau de l'ombudsman des Forces canadiennes avait été stimulante et positive, je serais peut-être ouvert à l'idée d'ajouter d'autres responsabilités à celles de l'ombudsman militaire. Cependant, comme le savent déjà tous les honorables sénateurs, l'expérience a comporté certaines difficultés.

Toutefois, plus précisément, le rôle de l'ombudsman des anciens combattants consiste à se pencher sur la relation entre ces derniers, le gouvernement du Canada et les programmes votés par le Parlement qui leur sont destinés. C'est un domaine tout autre, et ces programmes portent sur des questions essentiellement différentes. L'ombudsman des Forces canadiennes s'occupe de questions relevant d'une toute autre sphère d'activités. La solution ne serait pas si coûteuse, et ce bureau pourrait être très efficace. Je pense qu'il devrait y avoir un bureau d'ombudsman distinct au ministère des Anciens combattants.

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à l'honorable sénateur concernant la proposition présentée par l'ombudsman des Forces canadiennes lui-même concernant l'élargissement de son rôle. L'honorable sénateur savait-il que la Légion royale canadienne s'était fermement opposée à la proposition concernant la désignation d'un ombudsman, estimant qu'elle remplit déjà ce rôle?

Le sénateur Kinsella : Non, je ne savais pas, mais je suis heureux d'apprendre que la Légion partage mon point de vue.

Son Honneur le Président : Puisqu' aucun autre sénateur ne veut prendre la parole, les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Dallaire, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales.)

PROJET DE LOI SUR LA SEMAINE NATIONALE DU DON DE SANG

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Lorna Milne propose : Que le projet de loi S-29, Loi instituant la Semaine nationale du don de sang, soit lu une deuxième fois. — (L'honorable sénateur Mercer)

— Honorables sénateurs, je suis ravie de parler aujourd'hui du projet de loi S-29, Loi instituant la Semaine nationale du don de sang, à l'étape de la deuxième lecture. Je présente ce projet de loi au nom des sénateurs Cochrane et Mercer, ainsi que de plusieurs députés représentant tous les partis politiques.

Plus tôt cette année, les deux organismes canadiens de collecte de sang, la Société canadienne du sang et Héma-Québec, ont demandé aux parlementaires de les aider à présenter ce dossier. Ce projet de loi permettrait au gouvernement fédéral de désigner la deuxième semaine de juin Semaine nationale du don de sang, en vue de soutenir les efforts déployés toute l'année pour recruter des donneurs de sang, qui constituent la pierre angulaire de notre système national d'approvisionnement en sang.

L'Organisation mondiale de la Santé a déclaré le deuxième mardi de juin de chaque année Journée mondiale du don de sang. Cette journée de célébration vise à honorer et à remercier les personnes qui donnent du sang bénévolement. Ce projet de loi offrira aux Canadiens une occasion de participer aux célébrations de l'OMS et de remercier les donneurs qui contribuent de façon altruiste, sans aucune rémunération, à assurer la santé de leurs concitoyens.

(1630)

Les sénateurs conviendront que cette cause mérite l'appui du Sénat du Canada.

Les nouvelles agences du sang, Héma-Québec et la Société canadienne du sang, de concert avec Santé Canada — l'organisme de réglementation — ainsi que les provinces et les territoires — les bailleurs de fonds — aident à conforter un système d'approvisionnement en sang dont nous pouvons tous être vraiment fiers, un système qui compte parmi les plus sûrs dans le monde.

Ce système doit approvisionner nos hôpitaux en sang, en plasma, en plaquettes, en moelle osseuse et en divers produits qui sont nécessaires pas seulement pour garder les gens en vie, mais aussi pour améliorer la qualité de leur vie.

Ce système doit voir à ce que chaque unité collectée soit soumise à des tests poussés afin de garantir qu'elle est la plus sûre possible pour les patients. Ce système doit toujours être à la fine pointe de la recherche et de la technologie.

Ce système doit être capable de faire front rapidement et efficacement à des menaces en matière de sécurité, par exemple, de mettre en oeuvre un test pour le virus du Nil dans les huit mois suivant la découverte que ce virus pourrait être transmis par le sang.

Honorables sénateurs, les agences du sang agissent en se fondant sur le principe selon lequel la sécurité est primordiale, parce qu'elles savent l'importance de chaque unité de sang. Chaque unité donne jusqu'à trois différents produits qui sont utilisés de diverses façons pour traiter les malades, soit ceux qui souffrent d'un traumatisme, ceux qui subissent une chimiothérapie en cas de cancer, les hémophiles ayant régulièrement besoin de transfusions ou ceux qui subissent une greffe. Voilà seulement quelques-unes des raisons pour lesquelles les agences du sang ont besoin de notre appui.

Une autre raison est une petite fille qui se nomme Olivia. À l'âge de trois ans et demi, on lui a diagnostiqué un cancer. Au cours de la chimiothérapie et de la radiothérapie, elle a reçu 25 unités de produits sanguins. Sans ces produits, elle ne serait pas la fillette de 11 ans heureuse et en bonne santé qu'elle est aujourd'hui.

Une autre raison est Tom, qui a besoin d'une transfusion toutes les sept semaines pour avoir les globules rouges que son corps ne produit pas. Il n'existe aucun remède à la forme rare d'anémie dont il est atteint. Il aura donc besoin de ces transfusions jusqu'à la fin de ses jours.

Que feraient les gens comme Tom ou Olivia si d'autres ne donnaient pas le sang dont ils ont désespérément besoin?

Ce ne sont là que quelques exemples qui montrent à quel point le système d'approvisionnement en sang peut faire la différence. Je sais qu'il y a des milliers d'autres cas un peu partout au Canada, où des vies ont été sauvées grâce aux efforts de ceux qui se préoccupent du sort de personnes qu'ils n'ont jamais rencontrées. Ceux-là sont les donneurs de sang du Canada, les héros de tous les jours au Canada.

Ces histoires personnelles font comprendre pourquoi nous avons besoin d'un système sûr d'approvisionnement en sang. C'est pour cela que j'ai été si heureuse lorsque le sénateur Mercer m'a demandé aujourd'hui de parler de l'effort consenti par tous les partis en faveur de la désignation d'une Semaine nationale du don de sang.

Je remercie nos collègues, qui ont également accepté de travailler afin que ce projet de loi soit adopté le plus rapidement possible. À l'approche de la Journée mondiale du don de sang, le 14 juin, je suis encouragée de voir que nous pouvons tous collaborer à une cause commune, une cause qui modifiera la vie de presque tous les Canadiens à un moment ou à un autre.

(Sur la motion du sénateur Stratton, le débat est ajourné.)

LE GENERAL SYNOD OF THE ANGLICAN CHURCH OF CANADA

PROJET DE LOI PRIVÉ VISANT À MODIFIER LA LOI CONSTITUTIVE—TROISIÈME LECTURE

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein propose : Que le projet de loi S- 25, Loi modifiant la Loi constituant en corporation « The General Synod of the Aglican Church of Canada », soit lu une troisième fois.

— Honorables sénateurs, le projet de loi S-25 étend les pouvoirs de l'Église anglicane du Canada établis il y a plus de 50 ans. Le General Synod, qui est l'assemblée nationale de l'Église anglicane du Canada, a été constitué en personne morale par une loi du Parlement en 1921. La loi a été modifiée en 1951, en partie pour permettre au synode de faire des investissements, mais sous réserve de certaines restrictions énoncées à l'article 6A de la loi. L'Église souhaite maintenant voir retirer par ce projet de loi les restrictions en matière d'investissement, restrictions prenant la forme d'une liste légale qui était souvent utilisée dans les projets de loi à l'époque de la loi de 1951, époque où l'inflation était nulle et où les faibles taux de rendement représentaient des recettes suffisantes pour les bénéficiaires des fiducies.

Cependant, ce concept a été presque universellement remplacé au Canada par la règle de l'investisseur prudent. Cette règle dit qu'un fiduciaire doit, dans le choix de ses placements, faire ce qu'un investisseur prudent ferait. Lorsque le Parlement a revu les lois régissant les institutions financières en 1991, il a inclus dans la Loi sur les banques, la Loi sur les compagnies d'assurance et la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt une disposition permettant à ces institutions d'adopter les politiques de placement qu'un investisseur prudent adopterait pour éviter tout risque indu tout en obtenant un rendement raisonnable. Comme le recommandait la Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada, l'Ontario a adopté la règle de l'investisseur prudent avec la Loi sur les fiduciaires de 1990.

Toutefois, l'Église anglicane du Canada est encore tenue de se limiter à l'ancienne liste légale des placements admissibles. De ce fait, elle doit modifier sa loi constitutive pour pouvoir faire des investissements conformes aux règles modernes s'appliquant aux placements de fonds en fiducie.

L'article 6A de la loi modifiée se lit dorénavant comme suit :

Le Synode peut aussi placer et remployer une partie de ses fonds, y compris les fonds détenus en fiducie, dans tout investissement qu'il estime indiqué.

Les sénateurs se rappellent sans doute que le Sénat s'est penché sur le projet de loi S-15, Loi modifiant la Loi constituant en personne morale l'évêque des régions arctiques pour l'Église anglicane au Canada, qui était parrainé par le sénateur Meighen, en face. Cette mesure législative portait sur les pouvoirs d'investissement limités du diocèse de l'Arctique de l'Église anglicane, et le Sénat a accepté le même amendement qui est proposé aujourd'hui pour le General Synod.

Honorables sénateurs, je vous demande de permettre au General Synod de l'Église anglicane d'investir ses fonds conformément aux règles modernes.

Je tiens à remercier le sénateur Plamondon d'avoir fait une observation qui a été notée dans notre rapport. Pour plus de sûreté, le Comité permanent des banques et du commerce a précisé que les investissements faits au nom de l'Église seront faits conformément à la règle de l'investisseur prudent, comme il se doit. Comme le savent les honorables sénateurs, la Loi sur les fiduciaires comprend la règle de l'investisseur prudent. Nous voulons faire en sorte que ceux qui investissent au nom de l'Église le fassent sagement et sans courir de risques, comme l'a recommandé le comité.

Espérons que nous adopterons éventuellement un projet de loi semblable au projet de loi S-30, la Loi modifiant la Loi sur les corporations canadiennes, qu'a présenté notre collègue le sénateur Atkins et qui est mort au comité — de manière que de tels amendements puissent être apportés en vertu des dispositions relatives aux corporations à but non lucratif de la Loi sur les corporations canadiennes et que les sénateurs n'aient plus à perdre de temps à traiter de ce genre d'amendement.

J'encourage les honorables sénateurs à appuyer le projet de loi S- 25.

Son Honneur le Président : Comme je ne vois aucun honorable sénateur se lever, je demande si les honorables sénateurs sont prêts à se prononcer.

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

ADOPTION DU DIXIÈME RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du dixième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration (budgets de certains comités), présenté au Sénat le 5 mai 2005.—(L'honorable sénateur Furey)

L'honorable George J. Furey propose : Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

(1640)

[Français]

LA RECONSTRUCTION DE L'ASIE DU SUD-EST APRÈS LE TSUNAMI

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Milne, attirant l'attention du Sénat sur la visite qu'elle a effectuée récemment en Indonésie et les efforts déployés par le Canada pour aider à reconstruire l'Asie du Sud-Est après le terrible tsunami du 26 décembre 2004.—(L'honorable sénateur Plamondon)

L'honorable Madeleine Plamondon : Honorables sénateurs, récemment, j'ai visité l'Indonésie à l'invitation de Son Honneur le Président Hays. La visite visait à reconnaître les gains significatifs de l'Indonésie en ce qui concerne la démocratie. Les objectifs de la visite étaient de mettre en lumière l'engagement du Canada à long terme, suite au tsunami, de promouvoir l'amitié et le dialogue avec les membres du gouvernement indonésien, de reconnaître les gains du développement démocratique dans une société pluraliste, d'appuyer les efforts déployés par le gouvernement actuel pour respecter les droits humains, de nourrir un dialogue essentiel avec des communautés islamiques modérées, de promouvoir la coopération afin de contrer le terrorisme et d'encourager l'adoption de lois et règlements qui protègent et encouragent le commerce et l'investissement.

Honorables sénateurs, madame le sénateur Lorna Milne, a parlé éloquemment et de façon exhaustive du profil géopolitique de l'Indonésie et de la visite de la délégation. Je ne répéterai pas ses propos que j'épouse entièrement, car les statistiques y étaient toutes mentionnées.

J'aimerais vous livrer quelques impressions et appréhensions. Je veux mentionner la corruption, la désolation devant le désastre sans précédent du tsunami, la solidarité devant l'insécurité et un contexte de pauvreté qui peut servir de catapulte au terrorisme.

En ce qui a trait à la corruption, les efforts du gouvernement devront être continus pendant au moins dix ans pour venir à bout du climat dans lequel baignent les Indonésiens. Un Américain marié à une Indonésienne voulait amener la gardienne de ses enfants en voyage aux États-Unis. Le voyage était prévu et il s'avérait que la gardienne n'avait aucune pièce d'identité. Facile, me dira-t-il, avec 50 $ U.S., on peut avoir le passeport, les pièces d'identité et tout ce qu'il faut pour passer de l'Indonésie aux États-Unis, et ce, dans une semaine.

Un Canadien rencontré lors de ce voyage me disait que c'est même un handicap de ne pas verser de pots-de-vin pour transiger car d'autres le font et obtiennent des contrats. La nouvelle démocratie mettra-t-elle tout le monde qui commerce en Indonésie sur un même pied?

J'aimerais vous parler de la désolation qui touche les résidents de Aceh. Au sujet d'un bateau de 13 000 tonnes planté par la vague à 2 kilomètres de la rive, au milieu de terres déblayées, mais qui gardent des plaies qui sont loin d'être refermées, un Indonésien me disait : « Ce n'est rien comparé au lendemain du tsunami. Sur le bateau que vous voyez, des corps étaient accrochés et partout où votre regard se posait, débris et corps s'entremêlaient. »

Beaucoup d'enfants sont parmi les victimes. La première vague s'étant retirée rapidement, d'après un résident, les enfants, voyant les poissons s'échouer, sont accourus pour les ramasser avant d'être engloutis par la deuxième vague.

J'ai parlé avec un membre de l'université islamique qui était à Jakarta le 26 décembre alors que la délégation allait remettre un chèque de 50 000 $. Sa famille était censée le rencontrer à l'aéroport d'Aceh. Quand il est arrivé à Aceh, il avait perdu sa femme, ses enfants, sa maison. Aucun membre de sa famille n'a été retrouvé. La mer les a gardés, tout comme des milliers d'autres.

Je n'ai pu m'empêcher de pleurer lors d'une rencontre quand on a fait état des statistiques parce que les statistiques avaient des visages, des milliers de visages.

Les Indonésiens doivent être félicités pour leur esprit de solidarité. Plusieurs survivants ont été recueillis par des membres éloignés de leur famille, donnant ainsi une sécurité affective essentielle que bien d'autres n'auront pas.

Ce ne sont pas les édifices qui seront difficiles à reconstruire. Ce sont les vies. La solidarité mondiale et les organismes, avec des installations sommaires, ont réussi à éviter une épidémie qui aurait pu faire autant de victimes que le tsunami. Ils méritent toute notre admiration et notre reconnaissance.

J'ai vu un clown faire rire des enfants par ses mimes, des enfants qui en avaient grand besoin. Des groupes, par des températures de plus de 30 degrés, fournissent de l'eau potable et des vivres. Il faut dire que l'eau salée de la deuxième vague a recouvert une terre qui est devenue aride tant qu'elle ne sera pas traitée; c'est la même chose pour les puits qui ont été contaminées par l'eau salée de la mer.

J'ai brièvement participé à la distribution alimentaire. Il n'y n'avait pas d'autres contenants que des sacs verts en plastique pour distribuer de l'huile, du riz, des conserves de poissons. Tout était compté et les gens font la queue sous un soleil de plomb pour y accéder. Qu'arrivera-t-il lorsque les organismes seront partis et que l'opinion mondiale aura tiédi?

Quant à la menace terroriste, elle est omniprésente. Les automobiles qui entrent sur le terrain de l'hôtel sont passées aux détecteurs de mines chaque fois. Avant d'accéder au hall de l'hôtel, vous devez passer par les mêmes mesures de sécurité que dans un aéroport.

L'Indonésie est un pays où la moitié des gens sont très pauvres, c'est-à-dire qu'ils vivent avec moins de deux dollars par jour. À cause du tsunami, toute l'aide est dirigée vers Aceh. Les images ont frappé l'esprit et de nombreux fonds sont disponibles pour Aceh. Mais le reste des Indonésiens pauvres qui sont témoins de toute cette aide à laquelle ils n'ont pas accès vont certainement y voir une injustice. Cela peut devenir un terreau fertile pour le terrorisme.

Même si on nous dit qu'il n'y aurait que 2 000 terroristes sur une population de 238 millions, un archipel de 18 000 îles ne peut facilement être sécurisé. Il pourrait devenir facile de mobiliser des gens qui ont faim, qui ne voient pas la lumière au bout du tunnel, tandis qu'un petit groupe reçoit une aide très ciblée.

Heureusement le Canada s'est engagé à plus long terme. Il doit donner sa pleine participation afin de réduire la pauvreté non seulement dans les régions affectées par le tsunami, parce que ce n'est pas seulement un geste charitable, c'est une mesure antiterroriste.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)

LE SÉNAT

MOTION TENDANT À EXHORTER LE GOUVERNEMENT À RÉDUIRE CERTAINS REVENUS ET À APPLIQUER UNE PARTIE DE LA TAXE SUR LES BIENS ET SERVICES À LA RÉDUCTION DE LA DETTE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kinsella, appuyée par l'honorable sénateur Stratton,

Que le Sénat exhorte le gouvernement à réduire l'impôt sur le revenu des particuliers pour les contribuables à faible ou à moyen revenu;

Que le Sénat exhorte le gouvernement à arrêter de percevoir des sommes en trop auprès des Canadiens et à réduire les cotisations d'assurance-emploi de manière que les recettes annuelles de ce programme cessent d'être considérablement plus élevées que les dépenses de programmes annuelles;

Que le Sénat exhorte le gouvernement, dans chaque budget à partir de maintenant, à fixer un montant pour la réduction de la dette équivalant à au moins les deux septièmes des recettes nettes que l'on prévoit recueillir au moyen de la taxe sur les produits et services; et

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'inviter à se joindre au Sénat aux fins exposées ci- dessus.—(L'honorable sénateur Rompkey, C.P.)

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Honorables sénateurs, on m'a informé que notre honorable collègue, le leader du gouvernement au Sénat, aimerait s'exprimer sur cette motion du sénateur Kinsella. Je propose alors que la suite du débat soit reportée à la prochaine séance du Sénat.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, le débat est ajourné.)

(1650)

LA CONFÉRENCE SUR LES DROITS DES FEMMES

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool, ayant donné avis le 21 avril 2005 :

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur les Objectifs du millénaire pour le développement, et plus particulièrement sur l'Objectif numéro 3, qui vise à promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes.

— Honorables sénateurs, j'aimerais parler aujourd'hui de ce beau projet lancé par près de 200 pays membres des Nations Unies quand ils ont adopté, en 2000, la Déclaration du millénaire. Cette déclaration est assortie de huit objectifs pour le développement, visant à permettre aux pays du Sud de prendre leur juste place sur l'échiquier international. Voici un bref résumé de ces huit objectifs qui ont pour date butoir l'année 2015.

Le premier objectif vise à réduire de moitié le pourcentage de la population mondiale souffrant d'extrême pauvreté et de la faim.

Le deuxième objectif vise l'accès universel à l'éducation primaire.

Le troisième objectif vise à promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes. Cet objectif vise surtout l'égalité dans le savoir et le pouvoir.

Le quatrième objectif vise à réduire des deux tiers la mortalité chez les enfants âgés de cinq ans et moins.

Le cinquième objectif vise à réduire des trois quarts la mortalité maternelle. Les objectifs 4 et 5 du millénaire étaient le thème de la Journée mondiale de la santé 2005, le 7 avril dernier. J'ai d'ailleurs souligné, à cette occasion, le travail qu'il reste à accomplir au Canada pour nos propres mères et nos enfants.

Le sixième objectif vise à arrêter la progression du VIH-sida, du paludisme et d'autres pandémies majeures, et à commencer à inverser les tendances statistiques actuelles de ces pandémies.

Le septième objectif vise le développement durable et l'arrêt de la perte actuelle des ressources environnementales. Cet objectif vise aussi à réduire de moitié le pourcentage de la population qui n'a pas accès à de l'eau potable ni à des services d'assainissement de base.

Le huitième et dernier objectif est le plus vaste, car il vise à mettre en place un partenariat mondial pour le développement, axé sur de nombreux critères de gouvernance, de multilatéralisme et de droits humains.

Ces huit objectifs sont admirables, mais il n'est pas garanti qu'ils seront atteints d'ici 2015 et ce pour plusieurs raisons. La plus pertinente, en ce qui concerne le rôle du Canada, demeure le fait que notre pays contribue moins de 0,3 p. 100 de son PIB à l'aide internationale, alors qu'il devrait en contribuer un minimum de 0,7 p. 100.

J'aimerais maintenant vous parler plus particulièrement du troisième objectif. Cet objectif vise principalement l'accès égal des filles et des femmes au savoir et au pouvoir.

À la mi-avril, je me suis rendue à Paris, à l'invitation du Sénat français et du Mouvement français pour le planning familial, où j'ai participé à une conférence très enrichissante sur les droits des femmes, la santé sexuelle et le développement. En plus de se pencher sur les bienfaits d'un meilleur planning familial, la conférence a notamment traité du lien entre les droits des femmes et le développement durable, du besoin d'autonomiser les femmes par l'éducation pour contrôler la mortalité infantile et maternelle, de l'accès des filles à l'éducation et de l'importance d'une bonne éducation sexuelle et reproductive. Comme vous l'avez constaté, ces sujets sont visés dans les Objectifs du millénaire.

La conférence s'est conclue sur une discussion très animée au sujet de la place des femmes sur le marché du travail, compte tenu des nombreux enjeux tels les garderies, l'égalité professionnelle, l'équité salariale et la double vie des mères travailleuses. La socio- démographe Nathalie Bajos a très bien résumé le débat en disant que le principal obstacle à la pleine réalisation du potentiel des femmes est leur manque d'accès au savoir, à la connaissance et à l'éducation, bref, le troisième objectif des Objectifs du millénaire.

Permettez-moi maintenant de vous offrir un bref tour d'horizon international. La Banque mondiale a un site web sur les Objectifs du millénaire. Je vous invite à le consulter.

En moyenne, on compte un cinquième plus de garçons que de filles dans les écoles primaires et secondaires des pays les plus pauvres. Les filles sont à égalité avec les garçons en Amérique centrale, en Asie centrale et orientale et dans les Caraïbes. Toutefois, les filles sont très nettement désavantagées dans tous les autres pays en développement.

[Traduction]

Pourtant, en sachant lire et écrire, ces filles et les femmes qu'elles seront demain pourront subvenir à leurs besoins. Elles pourront s'adresser directement aux autorités et aux gens qui les gouvernent. Elles pourront s'instruire encore davantage.

L'alphabétisation permet aux femmes de se prendre en main. Elle accroît leur productivité. Elle aplanit les inégalités entre les sexes. Elle permet de mieux gérer les grossesses et favorise la santé de la mère. Enfin, une mère instruite pourra mieux jouer son rôle et permettra à ses enfants de commencer leur vie du bon pied. Au rythme actuel, toutefois, l'objectif numéro trois ne sera pas atteint avant l'an 2015, parce que cette année-là, seulement 88 p. 100 des femmes de 15 à 24 ans devraient savoir lire et écrire.

Heureusement, au Canada, les filles atteignent et même dépassent le degré de scolarisation des garçons, si on en croit les indices de 2003. Selon ces indices, 83 p. 100 des jeunes Canadiennes terminent leurs études secondaires, comparativement à 73 p. 100 des garçons. De plus, il y a actuellement plus de femmes que d'hommes à l'université, dans les programmes de formation professionnelle ou de transition et dans les collèges d'enseignement technique. Cette domination est aussi manifeste dans le nombre de diplômés universitaires, parmi lesquels on trouve davantage de femmes que d'hommes, quels que soient la province et le niveau, sauf dans le cas des études supérieures.

Même lorsqu'on étend la comparaison aux personnes âgées de 25 à 64 ans, les femmes sont plus instruites dans l'ensemble. Les hommes sont plus nombreux uniquement parmi les diplômés des programmes de formation professionnelle.

Toutefois, il faut mettre un bémol à ces statistiques réconfortantes, car les immigrantes, elles, ne suivent pas tout à fait cette tendance. Même si elles sont plus nombreuses que les immigrants à avoir terminé des études secondaires ou universitaires, ces derniers sont plus nombreux qu'elles dans les universités et les programmes de formation professionnelle.

[Français]

Quittons maintenant le Canada pour retourner à l'étranger, dans ces pays en développement où la femme a encore trop peu de savoir pour pouvoir égaler l'homme et contribuer à la vie sociale, économique, culturelle ou politique de son pays.

La Banque mondiale nous apprend que les femmes des pays en développement, même si elles participent à divers secteurs de l'économie, n'ont pas un poids assez lourd dans l'économie dite monétaire, là où il y a des salaires. Ce qui revient à dire que les femmes travaillent, mais sans salaire.

De plus, les personnes qui doivent travailler de façon productive, mais sans liberté, sans équité ni dignité humaine, sont, plus souvent qu'autrement, des femmes. Je ne parle pas ici du secteur agricole, mais plutôt du travail forcé, du quasi-esclavagisme, comme dans ces fameux ateliers clandestins, de métiers sous-rémunérés ou même de prostitution.

L'éducation, le savoir et la connaissance, voilà une bonne partie de la solution à cette inégalité de la femme dans ces pays. Je parle non seulement de connaissances scolaires, académiques ou techniques, mais aussi de connaissances médicales et sexuelles.

Vous conviendrez qu'il ne sert à rien pour une femme de décrocher un diplôme universitaire si elle doit passer le reste de sa vie enceinte, à changer des couches, ou si elle doit mourir de complications reliées à la grossesse, d'un accouchement ou du sida que son mari lui aura transmis en refusant de mettre un condom.

Pour pleinement accéder au savoir, la femme doit pouvoir jouir d'un contrôle complet et constant de son corps. C'est le rôle de l'éducation sexuelle et reproductive que tous les pays donateurs appuient financièrement et moralement, exception faite de nos voisins du Sud et de certains pays musulmans.

Quelle solution existe-t-il pour aider les femmes à avoir un accès égal au savoir? La principale solution, de notre point de vue canadien, est l'aide internationale au développement. Nous devons absolument réfléchir et donner suite à la question de cette contribution minimum de 0,7 p. 100 du PIB. Le Sud a besoin de notre appui financier pour, entre autres, envoyer des agents de projets, du matériel informatique, des livres scolaires, des vêtements, de la nourriture, des condoms et des médicaments. Au Canada, plusieurs ONG travaillent à cette fin. Ces organisations coordonnent le tout à l'aide de partenaires ou de la population locale dans les pays en développement.

(1700)

Notre gouvernement coordonne et finance des projets. Il souhaite faire cadeau aux pays les plus pauvres des dettes qui lui sont dues. Il y a même de prestigieux organismes internationaux, comme le Fonds des Nations Unies pour la population et le développement, mais cela coûte cher, très cher. Pourtant, pour chacun de nous individuellement, cela représente bien peu de sous. Tout est question de perspective.

Pensons-y : si notre pays et tous les autres, considérés comme développés ou riches, faisaient plus financièrement, quel impact énorme cela aurait-il sur les femmes des pays du Sud? Une fois ces femmes en santé et éduquées, pensons à l'importance qu'elles pourraient avoir dans la société, l'économie et la politique de leur pays. Prenons le temps de vraiment y réfléchir.

J'en profite ici pour vous parler du pouvoir politique. Ce domaine représente le summum des objectifs d'autonomisation que peuvent avoir les femmes. Au début du mois de mars, j'ai dirigé la délégation canadienne de l'Union interparlementaire à une conférence aux Nations Unies, à New York, qui s'est penchée sur les progrès accomplis dix ans après la Conférence de Beijing sur la femme. L'Union interparlementaire a surtout étudié le rôle politique de la femme dans le monde. Les statistiques que je vais vous citer proviennent de cette conférence.

Je vous rappelle que les femmes représentent 52 p. 100 de la population de la planète. Toutefois, comptons-nous pour 52 p. 100 des dirigeants politiques de nos pays? Bien sûr que non. De peine et de misère, tous les pays, sauf trois, ont fini par accorder aux femmes le droit de vote et le droit de se porter candidates. Regardons le résultat : en 2003, grosso modo, les femmes de la Terre ne représentaient que 15 p. 100 des parlementaires. Toutefois, il y a eu du progrès puisque les femmes ne représentaient que 9 p. 100 des parlementaires en 1987. Calculons : si la tendance se maintient, à raison d'une augmentation de 6 p. 100 tous les 15 ans, nous devrons attendre 2095 avant d'avoir autant de femmes parlementaires que d'hommes. J'espère que mes arrière-petits-enfants verront cela. Heureusement, au Canada, nous avons une bonne longueur d'avance : 21 p. 100 de nos députés et 36 p. 100 de nos sénateurs sont des femmes.

Comment augmenter la représentation des femmes au sein des parlements des pays du Sud? Nous en revenons toujours aux trois mêmes solutions : garantir des quotas de femmes parmi les candidats, réserver un certain nombre de sièges des législatures aux femmes, et changer les mentalités sur les deux fronts. Au plan social, il faut que les hommes et les femmes finissent par comprendre et accepter que les femmes sont les égales des hommes.

Il y a des pays où ce changement fondamental prendra beaucoup de temps. Il faudra persévérer. À l'échelle parlementaire, il faut que les assemblées législative deviennent plus attirantes pour les femmes, avec moins d'agressivité dans les débats, un meilleur respect des hommes pour leurs collègues féminines et de meilleures conditions de travail en termes d'horaires et de charges de travail.

En bout de ligne, cependant, le fait d'avoir plus de femmes parlementaires n'est pas en soi une fin, mais plutôt un moyen. C'est le moyen qui permettra à ces femmes d'encourager les débats sur des enjeux sociaux comme la pauvreté, la faim, la maladie ou la mortalité infantile ou maternelle, et bien d'autres. Tous ces enjeux sont visés dans les Objectifs du millénaire.

Si l'objectif numéro 3, celui de l'égalité des sexes et de l'autonomisation des femmes, est atteint, logiquement, les sept autres objectifs suivront automatiquement. Je crois fermement que la femme est le meilleur outil du développement international et qu'elle est la clé de son succès. C'est mon opinion. Qu'en pensez- vous?

(Sur la motion du sénateur Fraser, le débat est ajourné.)

[Traduction]

LA PROVINCE DE L'ALBERTA

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Grant Mitchell, ayant donné avis le 3 mai 2005 :

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur la province de l'Alberta et sur le rôle qu'elle joue au Canada.

— Honorables sénateurs, c'est avec humilité et gratitude que je prononce aujourd'hui mon premier discours au Sénat. Je me sens particulièrement chanceux d'être ici, au service du Canada et de l'Alberta. Le Sénat est un endroit spécial au sein d'une institution très spéciale de notre pays. J'ai toujours eu une haute impression de la valeur et de la contribution du Sénat au Canada et de ce qu'il deviendra un jour. J'en vois de mes propres yeux l'engagement, le dévouement et le travail. J'ai maintenant une beaucoup plus haute idée de la place du Sénat au Canada. Après avoir observé certains sénateurs en comité et ici, dans cette salle, je me rends compte que les nouveaux sénateurs ont beaucoup à faire pour prouver leur valeur. J'espère que je serai à la hauteur de mes fonctions de sénateur et que je m'acquitterai avec compétence des responsabilités inhérentes aux fonctions auxquelles on m'a fait l'honneur de m'appeler.

Comme le veut la tradition à l'Assemblée législative de l'Alberta, le premier discours d'un député s'adresse aux électeurs de sa circonscription. J'ai cru comprendre que ce n'était pas une règle stricte au Sénat, mais j'estime qu'il ne serait pas déplacé de parler d'une région, en ce qui me concerne, de l'Alberta. Je me propose donc aujourd'hui de parler aux honorables sénateurs de certaines caractéristiques de cet endroit merveilleux.

Lorsque j'ai commencé à réfléchir à mon discours, j'ai constaté que je ne trouvais que des lieux communs, et c'est parce qu'il y a tant de choses magnifiques à dire au sujet de l'Alberta que les lieux communs peuvent si bien décrire la majeure partie de ces choses. J'énumérerai certains de ces lieux communs que vous avez probablement déjà entendus. Certes, vous pouvez vous les représenter si vous êtes déjà allés là-bas et vous reconnaîtrez immédiatement que ces choses sont vraies. L'Alberta est riche en ressources naturelles — énergie, minéraux, agriculture et foresterie — qui sont toutes extrêmement importantes et cruciales dans la vie de la province. Cependant, l'Alberta est aussi riche de sa population, composée de gens intelligents et travailleurs, solidaires de leurs voisins, généreux, énergiques et animés de l'esprit d'entreprise. Ces gens ne sont pas axés seulement sur les affaires, pour lesquelles nous sommes reconnus, mais également sur le travail communautaire et l'entraide.

Honorables sénateurs, en réunissant tous ces éléments, on en arrive à une économie exceptionnelle, peut-être sans précédent. L'Alberta est l'un des endroits les plus riches de la planète. Son économie est axée sur l'énergie, l'agriculture, les mines, etc. De plus, elle est progressivement diversifiée en vue de l'établissement d'une base plus solide dans les secteurs de la fabrication, de l'innovation et des technologies. Non seulement l'Alberta a une présence économique, mais elle est à la fine pointe de l'avenir économique.

Les Albertains n'ont pas dilapidé leurs grandes richesses et leur bonne fortune. La province est extrêmement attachée au multiculturalisme, aux arts, à l'éducation, secteurs dans lesquels elle a fait beaucoup de bien non seulement pour elle-même, mais pour tout le Canada. L'Alberta a extraordinairement contribué à la prospérité de notre pays de bien des façons. Elle a sûrement contribué dans le cadre du programme de péréquation. Beaucoup d'entre nous ont sont fiers du fait que la province a été capable de le faire.

Et tout cela se situe dans un cadre d'une beauté sans pareille. Si vous avez vu les montagnes, les rivières, les plaines et les agglomérations de l'Alberta, vous savez que c'est un endroit de toute beauté, un endroit extraordinaire à visiter et où il fait bon vivre et élever ses enfants. J'ai eu la chance de pouvoir le faire.

(1710)

À bien des égards, les Albertains sont des gens qui ont bénéficié de la bénédiction divine d'une façon unique au monde. L'Alberta a profité de l'abondance dans le passé et profitera d'une abondance encore plus grande à l'avenir. C'est peut-être la seule démocratie de la planète qui possède des ressources énergétiques de calibre mondial. Elle dispose des ressources du Moyen-Orient, mais a la chance d'être une démocratie. Imaginez ce que cela signifie dans un monde restructuré comme il l'a été après le 11 septembre. Imaginez ce que cela signifie pour l'avenir économique de l'Alberta et du Canada. Le Canada a besoin de l'Alberta. Je soutiens aussi que l'Alberta a besoin du Canada.

Je ne veux pas du tout dire par là qu'aucune amélioration n'est possible. Bien sûr que si. Nous avons généralement adopté une approche conservatrice de la politique publique, ce qui signifie que nous pourrions améliorer les programmes sociaux, notre engagement envers l'éducation et les soins de santé publics, par opposition aux soins de santé privés. Toutefois, pour la plupart des Albertains, notre province est un lieu de rêve, un endroit remarquable par son histoire et par ses réalisations dans le monde. Tous ceux qui y vivent ont une chance inouïe.

Malheureusement, cette vision de l'Alberta n'est pas toujours celle que le reste du Canada connaît. En fait, les Canadiens entendent souvent la direction politique du gouvernement de l'Alberta ainsi que l'opposition à l'autre endroit dire que les Albertains sont mécontents du Canada. Il existe une perception selon laquelle les Albertains sont malheureux de faire partie de ce pays, et il y en a qui disent qu'ils vivraient mieux sans le reste du Canada. Ce sentiment s'exprime dans ce qu'on appelle parfois la « politique de l'aliénation » ou du « pare-feu ». Comme Albertain, je tiens à vous dire que j'en ai assez de cette politique. Je crois que le Canada mérite beaucoup mieux.

La politique de l'aliénation sert à obtenir des avantages politiques mesquins, étroits et souvent égoïstes, qui diminuent le rôle de leadership que l'Alberta peut jouer et joue effectivement dans le reste du pays. Les politiciens peuvent en user sans tenir compte de ses effets sur la force et l'unité de notre grand pays.

La politique de l'aliénation s'exprime dans un certain nombre de questions très ordinaires. Nous en entendons parler très souvent dans différentes régions du pays. J'aborderai quelques-unes de ces questions qui m'intéressent particulièrement pour établir qu'en fait, la politique de l'aliénation présente un autre aspect. Il y a des Canadiens en Alberta. Beaucoup d'Albertains sont passionnément attachés à leur pays et rejettent toutes ces questions qui découlent de la politique de l'aliénation.

Je classe ces critiques en trois catégories : premièrement, le mécontentement à l'égard des institutions démocratiques canadiennes; deuxièmement, le mécontentement à l'égard de la Charte des droits; troisièmement, en général, une ambivalence à l'égard de la place de l'Alberta au sein du Canada et une ambivalence au sujet du Québec, à savoir s'il restera ou non au sein du Canada.

La réforme du Sénat est une question délicate, car cette réforme est grandement souhaitée en Alberta. Je crois qu'il y a place pour une réforme du Sénat. Le point que je veux faire valoir comporte deux volets. Premièrement, comme je l'ai déjà dit, le Sénat a apporté une contribution énorme à ce pays. Son rôle est de représenter les droits régionaux des minorités en permettant un second examen objectif. Une réforme précipitée du Sénat risquerait d'exacerber le problème que la réforme a justement pour but de régler. Si nous commençons à élire les sénateurs à la pièce, nous nous rendrons compte que le Sénat finira par se retrouver en position d'exercer un énorme pouvoir.

Comme nous le savons tous, le Sénat dispose d'énormes pouvoirs. Nous pouvons paralyser presque n'importe quelle initiative venant de l'autre endroit. Ces pouvoirs ont été mis en sourdine parce que les sénateurs ont compris qu'ils n'étaient pas élus et qu'ils ont été discrets dans l'exercice de leurs pouvoirs.

Si les sénateurs étaient élus, je crois que cela pourrait changer et qu'il serait possible de consacrer de nouveaux pouvoirs qui aggraveraient au lieu d'améliorer les questions qui préoccupent les gens relativement au déséquilibre régional. Si nous commençons à élire les sénateurs avant d'atteindre l'objectif d'une représentation régionale équitable, nous n'aurons pas cet autre atout. Lorsque des politiciens auront été élus pour occuper ces fonctions, il deviendra beaucoup plus difficile de changer le nombre de sénateurs et de modifier leurs pouvoirs.

Nos institutions judiciaires sont un autre domaine qui soulève souvent les critiques à l'égard de ce pays. Nous continuons d'entendre répéter que les lois sont imposées par les juges. Je crois que les institutions judiciaires canadiennes font l'envie du reste du monde. Elles comptent parmi les institutions les plus équitables et les plus justes du monde entier. Nous sommes également très chanceux de pouvoir compter sur les plus grands juristes au monde pour siéger dans nos tribunaux et administrer notre système de justice. Je ne veux rien entendre de plus à ce sujet. Je crois que c'est un prétexte pour dire : « Nous ne pouvons obtenir les réponses que nous attendons, alors nous pourrions peut-être nous plaindre de quelque chose qui pourrait changer pour obtenir ce que nous voulons. » L'ironie, c'est que ceux-là même qui disent ne pas vouloir que les juges fassent les lois sont en train de politiser l'appareil judiciaire du simple fait qu'ils prétendent que les juges font les lois.

Puis, finalement, on critique nos institutions parlementaires. Certains affirment que le Parlement est dysfonctionnel et que le système américain pourrait être meilleur. J'aimerais rappeler aux sénateurs que le système parlementaire est l'une des formes de gouvernement les plus efficaces, si ce n'est la plus efficace, dans toute l'histoire des gouvernements. Il a duré plus longtemps que toute autre forme de gouvernement existant. Son succès est attribuable au fait qu'il tient compte de certaines des plus importantes caractéristiques de la condition humaine. Les gens doivent pouvoir exprimer leur désaccord. Ils doivent savoir que les opinions divergentes seront prises en compte. Le processus parlementaire a institutionnalisé ce principe grâce au rôle de l'opposition.

Pour être efficace, un système gouvernemental doit aussi pouvoir en arriver à des consensus. Les consensus sont à la base même du Parlement. Nous avons des caucus qui servent à créer des consensus. Nous tenons au Sénat des débats qui servent à créer des consensus. Nous avons des comités qui tiennent des débats et créent des consensus. Et bien qu'ils soient souvent discrédités, il y a également des partis politiques qui créent des consensus.

Les partis politiques font partie de notre système et ils constituent une partie très importante de notre processus parlementaire parce qu'ils permettent de présenter diverses idées. Ils permettent de présenter certaines idées politiques complexes de façon à permettre aux gens de faire des choix et de prendre des décisions. Certains affirment que les partis restreignent ce que les représentants peuvent faire et que les chefs de parti dirigent d'une certaine façon les activités de leurs membres. J'ai été chef de caucus et j'ai travaillé avec deux chefs d'un caucus élu. Il est très difficile pour un chef de dire à ses députés ce qu'ils doivent faire. Les députés peuvent toujours quitter le caucus s'ils croient devoir défendre une idée. Ce qui est curieux, c'est que lorsqu'il leur arrive de le faire et qu'ils se présentent ensuite à titre d'indépendants, ils ne sont pas réélus, ce qui en dit long sur l'engagement des Canadiens à l'égard des partis politiques.

(1720)

La Charte des droits est un autre domaine d'aliénation en politique. Nous avons vu ce document critiqué de tellement de façons à tellement de moments différents. Tout récemment, en Alberta, on l'a critiqué dans le contexte des mariages gais et on a soulevé à diverses occasions la possibilité de recourir à la disposition de dérogation.

Soit dit entre nous, je ne peux qu'imaginer ce que cela doit représenter d'avoir 16 ans et d'être homosexuel dans un contexte comme celui-là. Le fait de se sentir tellement différent et si loin de la majorité doit être dévastateur pour ces jeunes.

Toutefois, les vues des Albertains sur le mariage gai ne sont pas monolithiques. Je vois une autre opinion. C'est absolument une question de valeurs. Je sais que les deux camps croient sincèrement à des valeurs importantes et avec une grande passion. D'un côté, il y a ceux qui sont opposés au mariage gai, qui disent que le mariage traditionnel est un mariage entre un homme et une femme, et c'est évidemment une opinion légitime à laquelle ils croient profondément. Toutefois, il y a d'autres valeurs qui sont au moins tout aussi fortes, notamment : est-ce que tous les Canadiens ne devraient pas être considérés égaux devant la loi?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Mitchell, votre temps de parole est écoulé. Demandez-vous l'autorisation de poursuivre?

Le sénateur Mitchell : Oui. Puis-je avoir quelques minutes de plus?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Mitchell : Merci, honorables sénateurs.

D'un autre côté, il y a la valeur voulant que tous les Canadiens soient égaux devant la loi, il y a la valeur voulant que le mariage soit la réalisation de l'amour dans un engagement pour la vie, et il y a la valeur voulant que le gouvernement devrait intervenir le moins possible dans la vie des gens, particulièrement dans leur vie privée.

Posons-nous la question : pourquoi une de ces valeurs devrait-elle en éclipser une autre? Je crois qu'il est possible d'avoir les deux dans certains contextes. Dans le contexte religieux, les Églises craignent d'être contraintes à marier des gens qu'elles ne devraient pas marier, selon elles. Les Églises ne seront pas forcées de faire cela. Si on devait les forcer à le faire, l'Église catholique aurait depuis longtemps été contrainte à ordonner des femmes prêtres. Cela n'est pas le cas et cela n'arrivera pas. D'un autre côté, l'Église est bien heureuse d'avoir des personnes à qui dire qui elles peuvent et ne peuvent pas marier, et je vois là une contradiction fondamentale. Je crois que le mariage gai est la bonne voie à suivre et je crois que le projet de loi actuellement à l'étude à l'autre endroit devrait être adopté.

Troisièmement, il y a la perception du Québec. Il y a des dirigeants qui, même s'ils ne le disent pas toujours explicitement, sont ambivalents au sujet de l'unité de notre pays et de la place du Québec dans celui-ci. Je tiens vraiment à parler de cela. Je pense que le Québec fait du Canada un pays très spécial. Il nous différencie des États-Unis d'Amérique et nous fait accorder à la culture une importance que très peu de pays lui accordent. Vu l'importance que nous accordons aux questions culturelles et linguistiques en raison de la présence du Québec au sein de notre fédération, notre pays est devenu multiculturel. Il y a très peu d'endroits dans le monde où l'on peut bénéficier de son patrimoine culturel comme au Canada. Si les sénateurs reconnaissent comme moi que la culture est un élément essentiel de l'être humain, ils seront d'accord pour dire que le Québec est un cadeau extraordinaire pour les Canadiens.

La Loi sur la clarté a expliqué, à juste titre, je pense, ce à quoi pouvait s'attendre le Québec advenant sa séparation du Canada. Ce qu'elle n'a pas expliqué suffisamment au reste du Canada et aux Québécois, c'est ce qu'il adviendra de ce qui restera de notre pays si le Québec se sépare. Il ne s'agira pas simplement de 90 p. 100 de ce que notre pays était. Les sénateurs peuvent-ils s'imaginer ce qui arriverait à notre dollar? Je pense que sa valeur chuterait. Les sénateurs peuvent-ils s'imaginer ce qui arriverait aux marchés financiers face à l'incertitude provoquée par ce genre de restructuration? Je pense qu'ils chuteraient. Les sénateurs peuvent- ils s'imaginer ce qui arriverait aux marchés boursiers qui, en général, abhorrent l'incertitude? Notre situation économique n'aurait rien d'enviable si le Québec quittait le Canada.

Or, ce n'est que de l'argent, et cela ne revêt qu'une importance minime, comparativement à ce que nous perdrions en réalité. À mon avis, nous perdrions une grande part de notre esprit. Les Canadiens sont un peuple exceptionnel, et c'est en partie en raison de nos merveilleuses traditions, de la grandeur de notre pays et de tout ce qu'il a connu. Si nous perdons une partie de notre pays importante comme le Québec, nous perdrons une partie très importante de notre âme. Je crois que beaucoup d'entre nous auront dans le cœur un vide aussi grand que le Québec.

Il y a environ 31 ans, lorsque j'étais un jeune homme, je suis venu sur la Colline du Parlement pour assister à une réunion. C'était au cours d'une magnifique soirée d'hiver, où le temps était froid et clair. J'ai aperçu cet édifice et la tour de la Paix. Je n'oublierai jamais l'impression que j'ai alors ressentie. La pureté, la propreté et la bonté de ce pays se reflétaient dans la magnificence de cet édifice et de ce qui l'entourait ce soir-là.

Encore aujourd'hui, j'estime que le Canada est un pays exceptionnellement bon, un phare pour les populations du monde entier. Ces populations nous émulent et nous admirent pour la façon dont nous traitons les autres, pour la façon dont nous avons allié les droits des minorités et les droits collectifs, pour la façon dont nous avons exalté la culture et le multiculturalisme, pour notre façon d'agir avec décence et de dignité, et pour la façon dont nous avons créé un système judiciaire qui repose sur l'équité et la justice.

Pourquoi quiconque voudrait-il mettre cela en péril? Le moment est mal choisi pour faire preuve d'ambivalence ou d'incertitude à propos de notre pays. Il est temps de croire passionnément en notre pays et de le défendre farouchement. J'estime que le Canada a besoin d'être nourri et protégé par tous ceux qui comprennent quel don remarquable il représente pour nous, les Canadiens, et pour les populations du monde entier.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, au nom du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Peter A. Stollery : Honorables sénateurs, pourrais-je demander au Sénat de bien vouloir autoriser le Comité permanent des affaires étrangères à siéger? Nos témoins et les membres du comité attendent. Si le Sénat nous y autorisait, nous pourrions tenir notre réunion. Je fais appel à l'indulgence du Sénat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

L'UNION INTERPARLEMENTAIRE

INTERPELLATION—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Joan Fraser, ayant donné avis le 4 mai 2005 :

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur les travaux de l'UIP.

[Français]

— Honorables sénateurs, je voudrais prendre quelques instants pour vous parler d'une organisation dont nous avons tous entendu parler, mais que beaucoup d'entre nous ne comprennent pas très bien, l'Union interparlementaire.

[Traduction]

L'Union interparlementaire est l'organisation mondiale des parlements d'États souverains, la plus ancienne et la plus grande organisation interparlementaire dans le monde. Elle existe depuis 1889 et elle compte 140 pays membres. Les États-Unis n'en font pas partie, ce qui est très dommage, mais nous ne relâchons pas nos efforts afin de les convaincre de revenir. L'Union interparlementaire permet au Canada de jouer un plus grand rôle qu'il ne pourrait peut-être pas jouer autrement.

Certains sénateurs se rappellent de la mauvaise réputation qu'avait l'UIP, que l'on taxait tout au plus de club de voyages. De toute évidence, l'appartenance à l'UIP exige des déplacements étant donné que les pays membres sont disséminés aux quatre coins de la planète et qu'ils veulent tous avoir l'honneur d'être un jour l'hôte d'une conférence de l'Union interparlementaire. À part les assemblées annuelles, qui se tiennent toujours à Genève, où se trouve le siège de l'UIP, les conférences ont lieu dans des endroits allant de La Havane à Manille en passant par Marrakech. La prochaine conférence aura lieu à Nairobi en 2006. D'autres groupes interparlementaires ont aussi des membres disséminés sur la planète.

Ce qui rend l'UIP unique, c'est que ses membres n'appartiennent à aucun club géopolitique comme le Commonwealth ou les pays de l'Amérique latine, qui ont tous les deux des organisations parlementaires très utiles.

(1730)

Les membres de ces organisations sont liés par l'expérience et par des intérêts communs. La seule chose que les membres de l'UIP aient en commun, c'est qu'ils font tous partie de parlements fonctionnels. Lorsque nous rencontrons nos collègues, nous devons apprendre à les connaître et à travailler avec des gens qui ont une expérience différente de la nôtre, des besoins et des priorités différents. C'est l'expérience la plus enrichissante qu'on puisse imaginer.

L'UIP est également une tribune pour l'édification de la paix. Ainsi, depuis quelques années, elle offre à d'importants parlementaires israéliens et palestiniens un cadre de rencontre où ils peuvent discuter et négocier en privé. La nouvelle Assemblée des parlementaires de la Méditerranée a été créée sous les auspices de l'UIP.

Étant donné le caractère mondial de l'UIP, ce n'est pas un hasard si cette organisation s'est principalement intéressée, ces dernières années, au renforcement de ses relations avec les Nations Unies. Comme beaucoup parmi vous le savent, nous avons obtenu, chose rare, le statut d'observateur à l'ONU. La majeure partie de notre travail est un complément des activités des Nations Unies. Les débats de nos conférences semi-annuelles portent souvent sur des sujets dont les Nations Unies sont saisies, et les documents et autres résolutions de l'UIP sont diffusés à l'ONU.

L'UIP possède et exerce le droit de parole à l'ONU. Elle possède un bureau à New York et tient une réunion annuelle de parlementaires aux Nations Unies.

En outre, l'UIP collabore étroitement avec les Nations Unies dans de nombreux domaines. Certains, parmi vous, savent que la seconde Conférence des présidents des parlements nationaux se tiendra à New York, en septembre prochain, et je crois que notre propre Président y participera. Peu d'entre nous sont au courant des autres activités conjointes de l'UIP.

Par exemple, des projets entrepris conjointement avec le Programme des Nations Unies pour le développement aident au renforcement des parlements dans de nombreux pays qui sortent de conflits, du Timor-Leste à l'Afghanistan et, bientôt, l'Irak. Des efforts sont actuellement déployés, conjointement avec ONUSIDA, afin d'obtenir des fonds pour la création d'un nouveau comité, au siège de l'UIP, afin de renforcer la capacité des parlements de lutter contre le sida. Des conférences sur les réfugiés ont récemment été organisées en Espagne et en Afrique, conjointement avec le Haut- commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Une initiative majeure a été lancée, avec l'aide de l'Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche, en vue de renforcer la capacité d'action des parlements partout dans le monde.

Avec l'aide de diverses institutions spécialisées des Nations Unies, l'UIP produit également toute une variété de guides à l'intention des parlementaires. Les récents titres portent sur les droits de la personne, la protection de l'enfance, l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, l'UNESCO, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et la budgétisation adaptée aux besoins des femmes. Elle procède actuellement à la mise à jour du guide du droit et des usages internationaux sur la tenue d'élections libres et équitables, ainsi qu'au lancement d'un important projet de mise au point d'indicateurs de démocratie.

L'Union interparlementaire organise des réunions régionales portant sur des sujets allant du règlement des conflits aux droits des peuples autochtones. Elle réunit des parlementaires afin de préparer les grandes rencontres internationales telles que la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, ou CNUCED. Elle a récemment fourni des observateurs pour les élections palestiniennes et, malgré un très bref préavis, pour la participation des Irakiens expatriés aux élections en Irak.

L'ONU n'est pas la seule organisation avec laquelle collabore étroitement l'UIP. Par exemple, l'UIP et le Parlement européen ont travaillé de concert à la tenue de conférences parlementaires afin d'assurer la très nécessaire participation des parlementaires aux réunions de l'Organisation mondiale du commerce, ou OMC. L'UIP et la Commission européenne sont engagées dans un immense projet de démocratie pour bâtir la capacité des assemblées législatives fédérale et étatique du Nigeria. Avec le Centre pour le contrôle démocratique des forces armées (CDFA) à Genève, l'UIP a publié un manuel sur la surveillance parlementaire de la section sécurité, sujet qui nous intéresse tous.

On aura conclu de tout cela que les droits de la personne sont au cœur des préoccupations de l'UIP. Cela n'est nulle part ailleurs plus évident que dans le travail infatigable de son Comité des droits de l'homme des parlementaires, au sein duquel siège madame le sénateur Carstairs. Ce comité assume une lourde charge de travail. Ses travaux sont remarquables et la lecture de ses rapports est essentielle à quiconque s'intéresse à ces questions. Je vous renvoie notamment au rapport dévastateur que le comité a fait paraître l'an dernier sur la situation des parlementaires au Zimbabwe.

Cependant, il ne s'agit pas seulement de produire des rapports. Le comité intervient. Par exemple, l'an dernier il a incité les parlements de l'Indonésie et de la Mongolie à passer à l'action après le meurtre de deux parlementaires.

Une autre précieuse organisation est l'Association des secrétaires généraux des parlements, qui réunit les greffiers au Bureau et d'autres membres du personnel parlementaire afin de renforcer leur expertise. Nos propres greffiers au Bureau peuvent attester de l'utilité de ces réunions.

Il y a encore beaucoup plus. Mais dans le court laps de temps qui me reste, je voudrais centrer l'attention sur les efforts de l'UIP pour faire progresser les droits des femmes. Comme la plupart des organisations politiques, l'UIP a quelque peu tardé à accorder la priorité aux questions féminines. La première femme à siéger au comité exécutif a été élue en 1987, mais nous avons fait plus que rattraper le temps perdu. À ce que je sache, les femmes jouent aujourd'hui un rôle plus important dans cette organisation qu'elles ne le font dans n'importe quel groupe interparlementaire.

Une réunion d'une journée des femmes parlementaires est organisée chaque printemps avant l'assemblée principale de l'UIP; des femmes de tous les continents rendent compte des résultats de leur travail dans les délibérations de leurs groupes géopolitiques respectifs. Lors de cette réunion, les femmes discutent aussi des thèmes débattus à l'assemblée et proposent des amendements aux résolutions ou les enrichissent.

Un comité de coordination de la Réunion des femmes parlementaires se réunit aux assemblées du printemps et de l'automne, planifie la réunion du printemps et donne des renseignements aux titulaires de postes clés, telles que les rédactrices de rapports et de résolutions. Ce comité organise également des sessions de dialogue hommes-femmes lors des assemblées sur des sujets qui intéressent particulièrement les femmes. Ces sessions, qui mettent en évidence des spécialistes reconnus du monde entier, comptent parmi les événements les plus stimulants des conférences.

Je souligne que les réunions des femmes ne sont pas qu'un événement secondaire. La présidente du comité de coordination est membre d'office du comité exécutif de l'UIP. De plus, le groupe de partenariat hommes-femmes, qui est un sous-comité du comité exécutif, intervient régulièrement dans les questions féminines. C'est ce groupe qui a proposé le changement révolutionnaire qui consistait à augmenter le nombre des femmes parlementaires à tous les niveaux de l'UIP en 2003.

C'est cette année-là que le règlement de l'UIP a été modifié afin de pénaliser les pays qui envoient des délégués d'un seul sexe à trois assemblées de suite. À la troisième assemblée, leur délégation est réduite d'un membre et ils perdent deux de leurs dix votes de base. En outre, trois des quinze membres du comité exécutif, en plus de la présidente du comité de coordination, doivent être des femmes. Les pays où les femmes n'ont pas le droit de voter ni de se présenter aux élections ne peuvent être représentés au comité exécutif. Les résultats sont probants.

À l'occasion de la conférence de Berlin, tenue à l'automne 1999, il y a cinq ans et demi de cela, 27 p. 100 des pays participants avaient envoyé des délégations entièrement masculines. Le mois dernier, à Manille, ce pourcentage avait diminué pour passer à 10 p. 100, et 27 p. 100 des délégués étaient alors des femmes. Le groupe de partenariat entre hommes et femmes s'est donné le mandat de rencontrer les pays qui continuent d'envoyer des délégations ne comptant aucune femme. Ces réunions peuvent en fait être très intéressantes.

L'UIP compte une petite division de femmes parlementaires qui travaille étroitement avec l'ONU et les parlements. Par exemple, comme nous l'a rappelé madame le sénateur Losier-Cool, l'UIP a convoqué une réunion spécialisée de parlementaires à New York ce printemps, que j'ai par ailleurs eu la chance de présider, dans le cadre de la conférence Beijing, 10 ans après.

Cette division compile des données sur la place des femmes au sein des parlements. Il s'agit, en fait, de la seule source pour ces données. Personne ne travaille comme nous le faisons. La division organise à l'intention des parlementaires des séminaires régionaux sur divers thèmes, par exemple sur des analyses comparatives entre les sexes ou sur le rite de l'excision.

La division collabore étroitement avec l'UNICEF et planifie une série de projets sur un vaste éventail de sujets, de la traite des enfants aux budgets prévoyant des mesures pour venir en aide aux enfants. L'UIP est également en train de mettre sur pied un comité spécial responsable des questions relatives à la protection de l'enfance qui assurerait la liaison entre l'UIP, l'UNICEF et les autres organisations de l'ONU.

Le plus étonnant dans tout cela, en quelque sorte, c'est le minuscule budget dont dispose l'UIP pour fonctionner, soit l'équivalent d'environ 10 millions de dollars canadiens par année, à quoi s'ajoute un autre million provenant d'autres sources, par exemple de la Commission européenne

Dans ce contexte, je tiens à souligner que l'un des projets les plus innovateurs proposés depuis des années vient de notre collègue, le sénateur Oliver, qui est vice-président du groupe canadien de l'UIP. En effet, il dirige actuellement un projet visant la création d'une fondation mondiale pour la démocratie, dont l'objectif est d'obtenir un financement stable et important pour les travaux de l'UIP. Ce faisant, le sénateur Oliver perpétue la longue tradition du Canada pour le rôle important que celui-ci a toujours joué auprès de l'UIP.

Bon nombre de sénateurs sont au courant du nombre d'années de travail que le sénateur Prud'homme a consacrées à l'UIP. Parmi nos anciens collègues, j'aimerais nommer le sénateur Peter Bosa, qui a dirigé pendant longtemps le Groupe canadien, madame le sénateur Joan Neiman, qui a contribué à la mise sur pied du Comité des droits de l'homme des parlementaires, de même que madame le sénateur Sheila Finestone, qui comptait parmi les fondatrices de la Réunion des femmes parlementaires. Et j'ai déjà parlé du rôle de madame le sénateur Carstairs auprès du Comité des droits de l'homme.

Pour ma part, j'ai l'honneur de présider le comité de coordination de la Réunion des femmes parlementaires, ce qui signifie que je siège au comité exécutif. Pour ceux qui seraient tentés de penser que les sénateurs font tout le travail, j'ajouterai que, à Manille, notre collègue de l'autre endroit, Paddy Torsney, a été choisie comme prochaine présidente du groupe géopolitique des Douze Plus, qui est universellement reconnu comme étant le groupe le plus influent au sein de l'UIP et que le sénateur Bosa a déjà présidé. Mme Torsney est actuellement présidente du groupe canadien, et son élection est tout un honneur pour le Canada

(1740)

Honorables sénateurs, j'espère que cette brève description de l'UIP a aidé à dissiper ce qui pouvait rester de l'impression que cette organisation n'est qu'un club de voyages. L'UIP est en fait une organisation où vous devez être prêt à travailler très fort si vous voulez en faire partie. C'est également une organisation qui offre d'incroyables possibilités d'apprentissage et d'action, une organisation dont le Canada peut être fier d'être membre.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, au nom du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

BANQUES ET COMMERCE

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein, conformément à l'avis donné le 5 mai 2005, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce soit autorisé à siéger à 15 h 30, le mercredi 11 mai 2005, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint suppléant du gouvernement) : Honorables sénateurs, je pose habituellement une question lorsqu'on propose une telle motion pour connaître quelle raison motive la motion qui est devant nous.

[Traduction]

Le sénateur Grafstein : Honorables sénateurs, demain, nous commençons une expérience unique en matière d'audiences sénatoriales : nous tiendrons une table ronde de deux jours pour accueillir des experts en productivité et en concurrence. Cette table ronde a été recommandée par le comité à l'unanimité. Pour ce faire, nous avons besoin de temps supplémentaire. Nous sommes à court de temps parce que nous invitons des experts mercredi et jeudi. Ils sont 15 ou 20 en tout. Il sera impossible de les faire tous passer dans les blocs de deux heures dont nous disposons mercredi après-midi et jeudi matin. Il nous faudra au moins une demi-heure en plus.

Le problème est que nous siégeons de 16 heures à 18 heures. Nos collègues de l'autre côté sont pressés de se rendre à d'autres comités. À 18 heures précises, nous devons quitter la salle. La seule façon d'accomplir notre objectif de façon rentable est de demander l'indulgence du Sénat pour cette table ronde.

J'aimerais faire remarquer aux honorables sénateurs que c'est la première fois que notre comité invite le public à participer à une table ronde. Le déroulement des travaux sera diffusé sur Internet et nous permettrons au public de participer au fur et à mesure qu'ils entendent les témoignages. Ces derniers seront télévisés. Ils seront diffusés en différé. Ils seront diffusés en direct sur Internet et le public canadien pourra participer directement. Toute l'information que nous obtenons, dont les réactions aux témoignages des experts, sera sélectionnée par le comité et fera partie de notre recommandation finale. Nous essayons une nouvelle approche. Elle est d'ailleurs rentable, honorables sénateurs. Au total, l'entreprise nous coûtera environ 6 000 $. Nous avons besoin de votre aide pour disposer de cette demi-heure supplémentaire.

Le sénateur Robichaud : Le vote!

Son Honneur le Président : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 11 mai 2005, à 13 h 30.)


Haut de page