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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 11

Le mardi 9 mai 2006
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mardi 9 mai 2006

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LA JOURNÉE MONDIALE DE L'HYPERTENSION

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, le 13 mai est la Journée mondiale de l'hypertension. L'hypertension ou l'hypertension artérielle est un trouble grave qui peut conduire à une insuffisance cardiaque, à un accident vasculaire cérébral, à la confusion, à la démence, à des maladies du rein et, tragiquement, à la mort.

Techniquement, on considère qu'une personne souffre d'hypertension lorsque sa pression artérielle est supérieure à 140 sur 90. Si une personne souffre d'une maladie du rein ou de diabète, le seuil est de 130 sur 80.

La cause de l'hypertension n'est généralement pas connue et on dit souvent que l'hypertension est un « tueur silencieux », car les gens qui en souffrent n'ont la plupart du temps aucun symptôme. Souvent, elle n'est décelée que lorsque des gens qui semblent en parfaite santé subissent des examens pour d'autres troubles de santé.

On estime que cinq millions de Canadiens adultes souffrent de cette maladie et de ce nombre, 43 p. 100 ne le savent même pas et à peine 16 p. 100 reçoivent les traitements appropriés. Ce qui pourrait être particulièrement intéressant pour beaucoup d'entre nous dans cette enceinte, c'est que l'hypertension touche un grand nombre de gens de plus de 60 ans et comme nous le savons, l'âge moyen au Sénat est de 64,7 ans.

Une fois qu'on a déterminé qu'une personne souffre d'hypertension, la prochaine étape est de prendre des mesures pour maîtriser la maladie. Statistiquement, on peut ainsi réduire l'incidence des crises cardiaques de 25 p. 100 environ, celle des accidents vasculaires cérébraux d'environ 40 p. 100 et les cas d'insuffisance cardiaque d'environ 50 p. 100. Le maintien d'un mode de vie sain aidera également à lutter contre cette maladie. La prise de médicaments est essentielle. Les gens doivent apprendre à vérifier leur pression artérielle, mais ils doivent avoir avec eux les médicaments nécessaires pour se traiter afin de réduire leur pression artérielle.

J'encourage les honorables sénateurs à souligner la Journée mondiale de l'hypertension en faisant tout ce qu'ils peuvent pour vérifier s'ils souffrent des effets secondaires de cette grave maladie.

LE JOUR DU RECENSEMENT 2006

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, je voudrais profiter de l'occasion pour vous rappeler que le recensement du Canada de 2006 approche. En fait, le Jour du recensement sera mardi prochain, le 16 mai.

Comme tous ceux qui siègent dans cette enceinte depuis sept ans le savent, le recensement de 2006 marque une occasion spéciale. En effet, on procède à des recensements au Canada depuis 340 ans et ce sera la première fois qu'on demande aux répondants de donner leur consentement à la divulgation des renseignements qu'ils fournissent.

(1410)

Conformément aux dispositions du projet de loi S-18, ces renseignements ne seront pas divulgués avant 2098, soit 92 ans après qu'ils aient été recueillis. Chacun d'entre nous sera mort et enterré à ce moment-là.

Jusqu'à présent, un tel consentement n'était pas nécessaire. Cependant, j'aimerais encourager instamment les honorables sénateurs à accepter que les renseignements qu'ils inscrivent sur les formulaires du recensement soient divulgués. Si vous ne cochez pas la case « oui » sur votre formulaire, vos renseignements ne seront jamais rendus publics.

Pourquoi devriez-vous répondre oui à la question relative au consentement éclairé sur le formulaire? Pour les chercheurs, l'intégralité des données du recensement est de la plus grande importance. Si un grand nombre de personnes répondent par la négative ou ne répondent pas du tout, l'intégrité des données sera compromise, et avec elle leur valeur pour les chercheurs dans les domaines de la généalogie, de la médecine et de l'histoire.

Honorables sénateurs, j'ai quelques questions à vous poser. Aimeriez-vous qu'on se souvienne de vous? Aimeriez-vous que vos descendants puissent retrouver qui vous êtes, qui vous étiez? Aimeriez-vous que des historiens et des chercheurs en sociologie puissent se faire une idée juste de la vie au Canada à notre époque? Aimeriez-vous aider vos descendants à régler des différends juridiques? Voulez-vous vous faire une place dans l'histoire canadienne? Si vous avez répondu oui à au moins une de ces questions, assurez-vous d'une place dans l'histoire du Canada. Le jour du recensement, le 16 mai, faites votre devoir et cochez la case « oui » pour permettre à vos descendants d'accéder en 2098 aux renseignements vous concernant. Veuillez aussi encourager toutes vos connaissances à faire de même.

LA DIVISION FÉMININE DE L'UNION INTERPARLEMENTAIRE

L'honorable Joan Fraser (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, comme certains d'entre vous le savent, mon mandat en tant que présidente de la division féminine de l'Union interparlementaire prend fin cette semaine. J'aimerais donc en profiter pour faire le compte rendu de deux réunions auxquelles j'ai participé en cette qualité.

La première était un séminaire parlementaire régional sur l'élaboration d'un cadre de travail pour la protection des enfants, qui a eu lieu à Hanoi en février. Ce séminaire a été organisé conjointement par l'UIP et l'UNICEF. Des parlementaires de 13 pays y ont participé.

Il a été particulièrement intéressant d'entendre les communications des brillants experts présents, notamment ceux qui ont parlé de la pédopornographie. Je ne savais pas qu'elle était si répandue. Je crois que nous devrons nous attaquer à ce fléau à l'échelle internationale et nationale plus tôt que nous l'aurions pensé. Il a aussi été question du trafic d'enfants, qui prend de l'ampleur.

Nous avons également eu des rencontres avec le ministre vietnamien. Des visites ont été organisées, notamment dans un centre de traitement pour enfants handicapés dont certains patients sont les enfants de parents touchés par l'agent Orange pendant la guerre du Vietnam.

La seconde était une réunion d'une journée à l'occasion de la 50e session de la Commission des Nations Unies sur la condition de la femme, qui a eu lieu au siège social des Nations Unies, à New York, le 1er mars 2006. J'ai présidé cette réunion et madame le sénateur Andreychuk, en sa qualité de déléguée canadienne, y a pris la parole. Il y avait quelque 180 participants provenant de 64 pays à cette réunion. Encore une fois, nous avons entendu des experts de haut niveau et des représentants des Nations Unies. Un accent tout particulier a été mis sur l'institution parlementaire et la contribution des parlementaires dans l'atteinte de l'égalité des sexes, dans le cadre plus général de la participation égale des femmes et des hommes aux processus décisionnels.

Un des principaux mécanismes dont il a été question était le fonctionnement des organismes spécialisés et des comités qui étudient la question de l'égalité des sexes et le statut des femmes dans les parlements. J'attire à nouveau votre attention sur le fait que, à cet égard, le Canada perd du terrain par rapport à d'autres pays.

Au nom de l'Union interparlementaire, j'ai eu l'honneur de faire rapport de cette réunion lors de la 50e session de la Commission de la condition de la femme. Je dois dire, en terminant, que j'estime que servir au sein de l'Union interparlementaire a été un immense privilège pour moi, et, je l'espère, pour le Canada, car il s'agit d'une organisation internationale extraordinaire. Je souhaite beaucoup de succès à cette organisation.

LES PLACES DANS LES GARDERIES ET LES PLACES DANS LES PRISONS

L'honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, je voudrais attirer votre attention sur la création de places, comme le gouvernement l'a annoncé dans le budget qu'il a présenté la semaine dernière. Oui, des places seront créées pour les prisonniers et oui, des places seront créées dans des garderies, mais examinons ces propositions de plus près.

Le mécanisme de création de places en garderie n'est fondé que sur des incitatifs — 250 millions de dollars en crédits d'impôt, et non en espèces, par année, pendant cinq ans, pour créer 125 000 places en garderie. En termes réels, c'est environ 400 millions de dollars pour cinq ans ou, mieux encore, cela représente 3 200 $ par place au titre des dépenses en immobilisations, sans incitatifs pour les coûts de fonctionnement.

Regardons la création de places pour les détenus. Le ministre de la Sécurité publique, Stockwell Day, a annoncé que son ministère dépenserait 245 millions de dollars sur les cinq prochaines années pour créer plus de places dans les prisons fédérales pour accueillir 400 nouveaux détenus. Cela représente 612 000 $ par place au titre des coûts en immobilisations. Il y aura aussi des coûts de fonctionnement annuels de 82 000 $ par détenu, fois 400 détenus, pour un total de 32,8 millions de dollars à perpétuité.

Ce gouvernement conservateur réformiste préfère investir 612 000 $ dans une place dans une prison plutôt que 3 200 $ pour une place en garderie. Voilà la voie dans laquelle les conservateurs réformistes se sont engagés. Est-ce comme cela qu'ils voient l'avenir de la société canadienne? Est-ce là que nous devons investir? Croyez-vous vraiment que le Canada sera un meilleur pays avec un nombre accru de places dans les prisons plutôt qu'un nombre accru de places en garderie? Croyez-vous que l'argent durement gagné des Canadiens devrait être investi dans l'avenir ou dans le passé? De deux choses l'une : ou nous investissons dans l'avenir en créant des places en garderie pour les citoyens respectueux des lois, ou nous investissons dans le passé. Tous les sociologues, criminologues et économistes s'accordent à dire que le Canada doit investir dans l'avenir, qu'il doit investir dans ses enfants. Ce n'est pas ce que fait ce gouvernement conservateur réformiste. Réfléchissons à cette question. Quelle honte de voir notre argent gaspillé de cette façon.

Des voix : Bravo!

LE DÉCÈS DE SOEUR ROSE THERING

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, nos rabbins nous enseignent l'importance de bien choisir les mots. Les mots peuvent tuer, mais ils peuvent aussi guérir.

C'est dans cet esprit que j'interviens pour pleurer la perte, samedi dernier, de sœur Rose Thering, une religieuse catholique romaine de l'ordre de Saint-Dominique et professeure émérite en éducation à la célèbre Université catholique Seton Hall, à South Orange, au New Jersey. Sœur Rose a fait preuve d'un courage et d'un leadership peu banaux. En effet, dans le cadre de ses études, à la fin des années 1950, elle a découvert à son grand étonnement que l'enseignement catholique dispensé à l'élémentaire et au secondaire encourageait l'antisémitisme. Ses études d'avant-garde à cet égard ont profondément inspiré, en 1962, la déclaration Nostra Aetate promulguée lors du Concile Vatican ll. La déclaration se termine ainsi : « Les Juifs ne doivent pas être présentés comme réprouvés par Dieu ni maudits ». Ces paroles ont donné lieu à un renversement des enseignements et des attitudes de l'Église et inauguré une nouvelle ère. Elles ont jeté les bases d'un dialogue renouvelé entre le peuple juif et l'Église catholique et souligné l'urgence de dépasser les préjugés. Le dialogue se poursuit aujourd'hui.

Toutefois, sœur Rose Thering a fait plus. Elle a joué un rôle essentiel, car elle a convaincu l'État du New Jersey de mettre au programme, dans l'ensemble de son système scolaire, un cours sur l'Holocauste. Malheureusement, un tel programme d'études n'existe nulle part au Canada. J'espère que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne se penchera sur cette question lorsqu'il décidera, le cas échéant, d'étudier la déclaration de Washington sur l'antisémitisme, inscrite au Feuilleton. Oui, les mots peuvent tuer, mais ils peuvent aussi guérir : tel est l'enseignement de la regrettée sœur Rose Thering.

[Français]

LA TECHNOLOGIE AU SÉNAT

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, je prends la parole pour soulever un point que je considère important. La semaine dernière et la semaine précédente, il a été question de l'application de la technologie en Chambre. Je me demande si telle retenue de l'application de la technologie ne nous empêche pas d'être de plus en plus efficaces à remplir nos devoirs dans cette enceinte et dans la périphérie.

(1420)

Je me demande ce que nos collègues sénateurs faisaient avant l'utilisation des micros. Criaient-ils? Avaient-ils des cornes pour entendre? Quels instruments utilisaient-ils pour se faire comprendre? Ils avaient compris qu'un instrument technologique comme le micro était utile à la poursuite des activités du Sénat.

Honorables sénateurs, on passe du micro à d'autres technologies dans une ère nouvelle où l'on tend à utiliser les nouvelles technologies de communication afin de maximiser notre efficacité. L'utilisation de ces instruments en Chambre ne nuit pas au débat et ne dérange pas notre attention. Au contraire, nous sommes capables de nous concentrer sur les travaux en cours, au lieu de continuellement sortir de la Chambre. On sait que notre fonction nous demande d'être présents aux comités et ailleurs afin de répondre à de nombreuses exigences.

Je ne fais qu'énoncer une position qui nous empêche d'évaluer toutes ces options technologiques et qui ne nous aide pas. Elle nous empêche de bien évoluer.

Je porte à votre attention que le Sénat d'Afrique du Sud, que je visitais récemment, est en avance technologiquement. Les membres du Sénat ont accès à toutes ces technologies. S'ils peuvent être aussi responsables, dans un pays qui a été tellement troublé, nous pouvons l'être également, dans un pays serein et bien établi.


AFFAIRES COURANTES

LA COMMISSAIRE AUX LANGUES OFFICIELLES

DÉPÔT DU RAPPORT ANNUEL 2005-2006

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 2005-2006 de la commissaire aux langues officielles, conformément à l'article 66 de la Loi sur les langues officielles.

[Traduction]

L'ÉTUDE SUR L'ÉTAT DU SYSTÈME DE SOINS DE SANTÉ

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

L'honorable Michael Kirby : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'informer le Sénat que, conformément à l'ordre de renvoi adopté le 25 avril 2006, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a déposé auprès du greffier du Sénat le 8 mai 2006 son deuxième rapport, qui est le rapport définitif concernant la santé mentale et la maladie mentale. Le rapport est intitulé De l'ombre à la lumière.

(Sur la motion du sénateur Kirby, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2006-2007

PRÉSENTATION DU PREMIER RAPPORT INTÉRIMAIRE DU COMITÉ DES FINANCES NATIONALES SUR LE BUDGET PRINCIPAL DES DÉPENSES

L'honorable Joseph A. Day, président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant :

Le mardi 9 mai 2006

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a l'honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

Votre Comité, auquel a été référé le Budget des dépenses 2006-2007, a, conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 26 avril 2006, examiné ledit Budget et présente ici son premier rapport intérimaire.

Respectueusement soumis,

Le président,
JOSEPH A. DAY

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Comeau, nonobstant l'article 58(1)g) du Règlement, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour plus tard aujourd'hui.)

(Le texte du budget figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 120.)

[Traduction]

(1425)

LOI ANTITERRORISTE

DÉPÔT DU RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIALVISÉ À L'ARTICLE 104 DU RÈGLEMENT

L'honorable David P. Smith : Honorables sénateurs, en vertu de l'article 104 du Règlement, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste, qui porte sur les dépenses que le comité a engagées au cours de la première session de la trente-huitième législature.

(Le texte du rapport figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 113.)

[Français]

LE SÉNAT

AVIS DE MOTION TENDANT À AUTORISER LA TÉLÉDIFFUSION DE LA SANCTION ROYALE

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Qu'il soit permis d'installer des caméras de télévision dans la Chambre du Sénat afin d'enregistrer la cérémonie de la sanction royale le jeudi 11 mai 2006 à 16 h 30, en dérangeant le moins possible ses travaux.

TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS

AVIS DE MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LE TRAFIC DU FRET CONTENEURISÉ

L'honorable Lise Bacon : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à mener une étude et à faire rapport sur le trafic du fret conteneurisé actuel et éventuel manutentionné par

i) les ports à conteneurs de la porte d'entrée du Pacifique

ii) les ports à conteneurs de la côte Est

iii) les ports à conteneurs du Centre du Canada, sur les principaux marchés importateurs et exportateurs desservis par ces ports et sur les politiques actuelles et futures à cet égard.

Que le Comité soumette son rapport final au plus tard le 31 mars 2007.

[Traduction]

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

AVIS DE MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À POURSUIVRE L'ÉTUDE SUR LES SERVICES ET AVANTAGES SOCIAUX, LES ACTIVITÉS COMMÉMORATIVES ET LA CHARTE VISANT LES ANCIENS COMBATTANTS

L'honorable Michael A. Meighen : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense soit autorisé à entreprendre une étude sur :

a) les services et les avantages sociaux offerts aux membres des Forces canadiennes, aux anciens combattants, aux membres des missions de maintien de la paix et à leurs familles en reconnaissance des services rendus au Canada, et vérifier notamment :

  • l'accès à des lits prioritaires pour les anciens combattants dans les hôpitaux communautaires;
  • la disponibilité de centres d'hébergement et de meilleurs soins à domicile;
  • l'uniformisation des services dans tout le Canada;
  • la surveillance et l'agrément des établissements de soins de longue durée;

b) les activités commémoratives organisées par le ministère des Anciens combattants pour rappeler à tous les Canadiens les réalisations et les sacrifices des anciens combattants;

c) la mise en œuvre de la Charte des anciens combattants adoptée récemment;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus durant la première session de la trente-huitième législature soient déférés au Comité;

Que le Comité fasse périodiquement rapport au Sénat, au plus tard le 30 juin 2007.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

LES CONTACTS DU COPRÉSIDENT DE LA CAMPAGNE ÉLECTORALE DU PARTI CONSERVATEUR DU CANADA

L'honorable James S. Cowan : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Jeudi dernier, je lui ai posé une question au sujet d'un article dans l'édition du 6 mars de l'Ottawa Citizen, selon lequel, à titre de coprésident national de la campagne du Parti conservateur durant les dernières élections, il aurait reçu des dons au nom du Parti conservateur de la part de militants du Québec.

(1430)

Malgré le fait que le sénateur Fortier était à ses côtés, madame le leader du gouvernement au Sénat a pris l'initiative de répondre ainsi :

[...] l'article de journal est erroné. Le ministre des Travaux publics n'a rien fait de tel.

J'ai demandé des précisions en ces mots :

Il n'a ni reçu ni sollicité de contributions. Est-ce bien la réponse?

Le sénateur LeBreton : C'est exact.

Imaginez ma surprise, honorables sénateurs, quand, tout de suite après l'ajournement du Sénat, j'ai reçu à mon bureau un appel d'un journaliste de l'Ottawa Citizen qui m'a parlé d'un article ultérieur qu'il avait lui-même écrit le 8 mars, intitulé « Fortier admet avoir reçu des dons pour le Parti conservateur ».

Dans cet article, le sénateur Fortier confirme qu'il avait effectivement accepté des dons en argent pour le parti au cours de la récente campagne électorale.

Madame le leader du gouvernement au Sénat permettra-t-elle au ministre de prendre la parole aujourd'hui pour tirer la situation au clair? Ou, si elle ne veut pas lui permettre de parler pour lui-même, le consultera-t-elle avant de répondre à ma question?

[Français]

L'honorable Michael Fortier (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) : Honorables sénateurs, la question qui a été posée la semaine dernière était : est-ce que le ministre des Travaux publics avait sollicité et reçu des dons au nom du Parti conservateur?

Ma première observation est la suivante : tout le monde le sait ici, solliciter et recevoir des dons pour un parti politique n'est pas illégal. Évidemment, c'est une activité que plusieurs d'entre nous avons entreprise au cours des dernières années.

Toutefois, pour répondre à cette question de façon plus précise, je n'ai pas sollicité et, en ce sens, je n'ai pas reçu de dons. Ce que j'ai dit à un journaliste et ce que je répète en cette Chambre, c'est qu'un donateur, ne sachant pas à qui rendre son don, a contacté mon bureau et mon bureau a simplement « réadressé » son don au bureau du Parti conservateur.

La liste des donateurs du Parti conservateur se trouve sur un site web, comme vous le savez tous. J'inviterais les gens à faire preuve d'un peu plus de sens commun avant d'accuser quelqu'un d'être en conflit d'intérêts.

Je précise encore une fois que je n'ai pas sollicité qui que ce soit durant la dernière campagne électorale et, en ce sens, je n'ai pas reçu de dons suite à une sollicitation, mais qu'un don a été reçu à mon bureau par une personne qui ne savait pas où le transmettre.

LA DÉFENSE NATIONALE

L'ACCÈS DES MÉDIAS LORS DU RAPATRIEMENT DES SOLDATS CANADIENS TUÉS À L'ÉTRANGER

L'honorable Marie-P. Poulin : Honorables sénateurs, hier, devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, le ministre de la Défense a contourné les questions sur les dépenses relatives des Forces armées en invoquant la magie des comptables pour faire de l'ordre dans le fouillis du budget militaire du gouvernement.

De plus, il a esquivé la question sur la position du gouvernement concernant le rapatriement des soldats canadiens tués en service à l'étranger en disant qu'il n'avait pas d'objection à ce que les médias aient de puissantes caméras pour filmer les corps à leur descente de l'avion.

Ce gouvernement, réfractaire aux médias, se rend compte qu'il va à l'encontre de l'opinion publique canadienne. Tente-il maintenant de se sortir de l'erreur en douce et de revenir à la politique du gouvernement précédent?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur de sa question.

Contrairement au gouvernement précédent, notre gouvernement essaie de faire ce qu'il faut, et non ce qui est populaire ou ce qui fait monter sa cote dans les sondages.

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur LeBreton : Le rapatriement de nos soldats tombés en Afghanistan a été couvert par les médias quand une cérémonie s'est tenue en leur honneur au moment où leurs dépouilles quittaient l'Afghanistan. C'est à leur arrivée à Trenton que les médias ont été tenus à l'écart. Le ministre de la Défense nationale tente seulement d'établir une politique qui respecte tout le monde, ceux qui veulent la présence des médias et ceux qui ne la veulent pas.

(1435)

Dans le cas des quatre soldats tués en Afghanistan, les familles ont eu le choix, qui a reçu l'appui du ministère de la Défense nationale, de bénéficier de tous les honneurs militaires et de la présence des médias aux funérailles ou aux cérémonies commémoratives, et c'est la procédure qu'on a suivie. Cette procédure est celle qui convient pour respecter les désirs de toutes les familles, y compris celles qui ne veulent pas de la présence des médias au moment du rapatriement au Canada.

[Français]

Le sénateur Poulin : Honorables sénateurs, les libéraux n'ont pas à recevoir de leçons sur le respect des soldats canadiens morts au combat. Il fut un temps où les militaires tués en service étaient enterrés sur place. C'est sous la direction de mon collègue, le sénateur Roméo Dallaire, alors chef des forces armées, que l'ordre a été donné de rapatrier les corps lorsque c'est possible. Les conservateurs comptent-ils aller à l'encontre de cette politique?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, cette question ne mérite pour ainsi dire aucune réponse; elle est très irrespectueuse envers tous les Canadiens, surtout envers ceux qui servent courageusement notre pays à l'étranger.

Le fait est que les dépouilles des soldats sont maintenant rapatriées pour être ensevelies au Canada. Comme je l'ai dit en réponse à une question précédente du sénateur Dallaire, beaucoup de soldats ont été tués à l'étranger, en Bosnie, et absolument aucun avis de leur retour n'a été donné. Ils ont été ramenés au Canada sans drapeaux, comme je l'ai dit, et sans remerciements.

Le gouvernement tente de respecter les désirs des familles et de rendre hommage d'une manière respectueuse à nos soldats tombés au champ d'honneur. Personne au Sénat ni ailleurs au Parlement ne devrait chercher à politiser une situation aussi malheureuse.

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LA POSSIBILITÉ D'UNE ENTENTE DE LIBRE-ÉCHANGE AVEC LA CORÉE

L'honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Vendredi, le 28 avril, à l'émission politique de Don Newman, le ministre du Commerce international, David Emerson, a indiqué qu'il était en train de négocier une entente de libre-échange avec la Corée du Sud.

Quels sont les pour et les contre si le Canada s'engage dans des discussions de libre-échange avec la Corée?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie madame le sénateur de sa question. Il faudra bien sûr que j'en prenne note. Je consulterai le ministre Emerson, mais il ne serait pas faux de dire que les gouvernements ont toujours recherché à établir des relations commerciales dans le monde entier.

Le sénateur Ringuette : Je dirai tout de suite au leader du gouvernement ce que de telles relations voudront dire. Elles entraîneront l'effondrement de l'industrie navale au Québec et dans le Canada atlantique, de même que la perte d'emplois lucratifs et un affaiblissement de l'économie de cette région. Son gouvernement pourra donc encore affirmer que le Canada atlantique se complaît dans l'échec.

Madame le leader du gouvernement présentera-t-elle à cette assemblée les études d'impact national et régional faites en rapport avec la possibilité d'une entente de libre échange avec la Corée du Sud avant que son gouvernement ne signe une telle entente et n'amorce la dérive des Québécois et des Canadiens de l'Atlantique?

Le sénateur LeBreton : Il faut une certaine audace au sénateur pour poser cette question, puisque l'industrie navale du Nouveau- Brunswick et de Saint-Jean a prospéré sous la tutelle d'un autre gouvernement conservateur pour ensuite s'effondrer lorsque les libéraux sont arrivés au pouvoir. Je prends note de la question sur l'industrie navale. Comme je l'ai dit plus tôt, je tenterai d'obtenir auprès du ministre Emerson des détails au sujet des négociations passées ou à venir avec la Corée du Sud en matière de construction navale.

(1440)

Le sénateur Ringuette : Si j'ai bien entendu, la ministre va déposer au Sénat les études de l'impact national et régional, en ce qui concerne les entretiens en cours.

Le sénateur LeBreton : Je n'ai rien dit de tel. J'ai plutôt dit que je consulterais le ministre Emerson au sujet de l'état des négociations qu'il mène peut-être en ce moment ou pourrait mener à l'avenir. Je n'ai pas dit que je déposerais les études d'impact pour la bonne raison que je ne sais pas s'il y en a.

L'ENVIRONNEMENT

LE BUDGET DE 2006—LES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, David Schindler, scientifique de l'environnement de renom qui travaille à l'Université de l'Alberta, a réagi en ces termes au récent budget du gouvernement : « Supprimer les programmes de réduction des émissions de gaz à effet de serre? Il n'y a aucun qualificatif poli. C'est stupide. » Le nouveau budget vide littéralement de sa substance l'engagement de 10 milliards de dollars que le gouvernement précédent a pris pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il s'agissait du Plan vert. Le gouvernement l'a vidé de sa substance parce qu'il le prétendait inefficace.

Ironie suprême, honorables sénateurs, le gouvernement vante les mérites, sur le plan environnemental, de son crédit d'impôt pour les laissez-passer d'autobus. Or, un document d'information du ministère des Finances signale que l'élimination d'une tonne de dioxyde de carbone par ce moyen coûtera 2 000 $ alors que les mesures prévues dans le Plan vert pouvaient parfois coûter seulement 20 $ la tonne.

Pourquoi le gouvernement trompe-t-il les Canadiens en leur disant que le Plan vert est inefficace, alors qu'il est parfois 100 fois plus efficace que le crédit d'impôt pour les laissez-passer d'autobus qu'il propose pour le remplacer?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je n'ai pas vu le rapport de M. Schindler. Tout ce que je puis répondre à mon honorable collègue, c'est que, à la différence du gouvernement précédent, qui parlait beaucoup des émissions de gaz à effet de serre alors qu'il a laissé ces émissions dépasser de 30 p. 100 ses objectifs, le gouvernement actuel tient à prendre des mesures concrètes qui donneront de vrais résultats au Canada.

Ce matin encore, je lisais un article au sujet d'un programme quelconque du gouvernement précédent, et ce programme ne donnait aucun résultat. On consacrait plus d'argent au dispositif administratif qu'à l'aide à ceux qui doivent s'attaquer à ce grave problème.

Le sénateur Mitchell : Il est curieux que madame le ministre dise avoir lu dans le journal un article sur l'inefficacité des programmes environnementaux du gouvernement précédent, car elle a dit la semaine dernière qu'elle avait en main des rapports et des études qui démontraient leur inefficacité. Étant donné cette contradiction dont nous sommes aujourd'hui témoins au Sénat, madame le leader s'engage-t-elle à déposer au Sénat les études qui ont justifié la décision gouvernementale de saccager le Plan vert de 10 milliards de dollars mis en place par le gouvernement précédent?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je n'ai aucune contradiction à expliquer, mais il m'arrive probablement de me contredire parfois lorsque je dis que je ne lis pas beaucoup de journaux. J'en lis beaucoup. Par contre, je n'ai pas lu le rapport de M. Schindler. C'est la vérité.

Le moment venu, lorsque nous aurons élaboré un plan environnemental raisonnable et applicable qui donnera des résultats aux Canadiens, je me ferai un plaisir de déposer les documents.

Le sénateur Mitchell : Honorables sénateurs, comment la ministre de l'Environnement, qui siège à l'autre endroit, peut-elle jouer le rôle de présidente internationale du processus de Kyoto qui lui échoit cette année alors qu'elle et son gouvernement ont renié clairement les engagements internationaux que nous avons pris dans le Protocole de Kyoto, dont ils ne veulent rien savoir?

Le sénateur LeBreton : Le gouvernement précédent a renié ses engagements en dépassant ses objectifs de 30 p. 100. Si l'honorable sénateur s'inquiète tant de la carrière politique future de la ministre de l'Environnement, il peut toujours l'inviter à comparaître devant un comité du Sénat.

LA JUSTICE

LA RÉMUNÉRATION DES JUGES

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, madame le leader du gouvernement au Sénat voudra peut-être consulter le ministre de la Justice si elle n'a pas les dernières informations en main.

Je m'intéresse aux plans du gouvernement en ce qui concerne la rémunération des juges nommés par les autorités fédérales. Elle se rappellera qu'une commission d'examen de la rémunération des juges a remis son rapport en novembre 2004. Le gouvernement précédent a réagi à ce rapport en présentant le projet de loi C-51, qui est resté en plan au Feuilleton au moment de la dissolution des Chambres, en novembre 2005.

Voici ma question : quelle est la position du gouvernement à ce sujet? Il n'aura pas échappé à l'attention de la ministre que, le jour du discours du Trône, certains des juges de la Cour suprême semblaient amaigris et affamés.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie le sénateur Murray d'avoir posé cette question. Les juges de la Cour suprême suivent probablement les règles du nouveau Guide alimentaire canadien, et ils sont minces parce qu'ils s'alimentent bien.

L'honorable sénateur a tout à fait raison. La commission a remis son rapport en 2004, mais le gouvernement précédent n'a rien fait pendant plus d'un an, puis son projet de loi est resté en plan au Feuilleton. Le gouvernement actuel reconnaît que cette entité indépendante, la Commission d'examen de la rémunération des juges, est tenue par la Constitution de formuler des recommandations sur les salaires des juges.

Le gouvernement est en train d'étudier les recommandations, et nous espérons agir le plus rapidement possible. Au bout du compte, il appartiendra au Parlement de décider d'approuver ou non la proposition présentée par la commission.

[Français]

LES RESSOURCES HUMAINES ET LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL

LE BUDGET DE 2006—L'ÉDUCATION POSTSECONDAIRE

L'honorable Claudette Tardif : Honorables sénateurs, dans son budget, le gouvernement affirme, et je cite :

[...] une bonne éducation est la clé d'un grand avenir pour nos jeunes Canadiens.

Il affirme qu'il est nécessaire de favoriser l'excellence et l'accès à nos collèges et universités. À cette fin, le gouvernement encourage les jeunes à se diriger vers les métiers. Il prend des mesures pour éliminer l'impôt fédéral sur tous les revenus de bourses d'études et il accorde un crédit d'impôt pour les manuels. Ce sont là des efforts louables.

Or, du même coup, il rend l'accès plus facile au Programme canadien de prêts aux étudiants en réduisant la contribution obligatoire des parents.

M. Greg Allain, président de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université, se préoccupe du peu d'aide accordé aux étudiants et aux familles qui sont aux prises avec les coûts accrus des études postsecondaires.

[Traduction]

Dans une lettre publiée dans le numéro de dimanche de l'Edmonton Journal, la présidente de l'association des étudiants de l'Université de l'Alberta, Samantha Power, écrit :

Si le gouvernement s'était plutôt engagé à créer plus de bourses d'études et à faire diminuer le recours aux prêts par les étudiants, nous pourrions louer le budget [...]

Le budget n'a fait que relever le montant maximum que les étudiants peuvent emprunter pour leurs études et permettre à un plus grand nombre d'étudiants de s'endetter.

[Français]

Ma question pour madame le leader du gouvernement au Sénat est la suivante : comment une telle mesure augmente-t-elle l'accès à l'éducation postsecondaire? N'est-ce pas là une mesure qui, au contraire, encourage les étudiants à s'endetter davantage afin de poursuivre leurs études?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie madame le sénateur de sa question. J'espère qu'elle ne laisse pas entendre que les étudiants qui ne fréquentent pas l'université ou le collège ont en quelque sorte moins de valeur que ceux qui le font.

(1450)

Si j'étais l'épouse ou la conjointe d'un col bleu, je trouverais que les efforts déployés par le gouvernement pour affecter de l'argent à des programmes d'apprentissage et de formation dans les métiers sont très louables et méritent d'être soutenus. Toutes les personnes qui obtiennent un diplôme, que ce soit d'une école de formation professionnelle ou d'une université, ont droit à la même considération de notre part.

Je me permets de l'affirmer, étant donné que madame le sénateur Tardif a estimé qu'elle devait faire une déclaration, elle aussi.

Nous mettons en œuvre de nombreuses mesures visant à aider les étudiants de niveau postsecondaire au moyen d'un engagement de 200 millions de dollars sur deux ans en faveur des travaux de recherche et de développement menés dans les universités, et pour aider les collèges et les universités, nous verserons 1 milliard de dollars dans la Fiducie d'infrastructure pour l'enseignement postsecondaire. Nous aiderons directement les étudiants au moyen d'un crédit d'impôt pour manuels.

Le sénateur Mercer : Un manuel gratuit.

Le sénateur LeBreton : Cela vaut mieux qu'aucun manuel gratuit, sénateur Mercer.

Cela s'ajoute à l'allégement fiscal global figurant dans le budget. Nous allons également aider les étudiants des collèges et ceux qui sont inscrits à des programmes d'apprentissage par l'entremise du crédit d'impôt pour la création d'emplois d'apprentis et de la subvention aux apprentis pour les aider à trouver un emploi. Une déduction de 500 $ pour le coût des outils est également prévue.

Je suis fière de dire que les revenus des bourses d'études et de perfectionnement seront entièrement exempts d'impôt, mesure que le Parti conservateur appuie depuis longtemps; cela remonte jusqu'à l'ancien Parti progressiste-conservateur, à l'époque où le sénateur Atkins a à lui seul amené cette ancienne formation politique à adhérer à cette mesure.

Les étudiants qui reçoivent une bourse en vertu de leurs excellents résultats ne seront plus pénalisés du fait de leur succès. En 2006- 2007, le gouvernement du Canada débloquera approximativement 8 milliards de dollars pour l'enseignement postsecondaire, une augmentation de 800 millions de dollars par rapport à l'année précédente. Devinez qui formait le gouvernement l'année précédente?

[Français]

Le sénateur Tardif : Honorables sénateurs, je vais répéter ma question car je crois que madame le leader du gouvernement ne l'a pas réellement comprise étant donné qu'elle a dit plein de choses sans donner une réponse à ma question.

La question est la suivante : les étudiants canadiens devront-ils continuer à s'endetter davantage afin de poursuivre des études universitaires? La question de l'endettement des étudiants existe toujours, madame.

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, il ne fait aucun doute que les étudiants ont du mal à trouver de l'argent. Ma propre famille a même créé un fonds de bourses d'études dans une université d'Ottawa pour aider financièrement les étudiants.

Pour commencer, le nouveau gouvernement a fait beaucoup pour les étudiants et pour les aider à financer leurs études universitaires. Si l'on en juge par les réactions obtenues par suite du dépôt du budget, cette mesure visant à aider les étudiants des universités et des collèges, de même que ceux des programmes d'apprentissage et de métiers, constitue un premier pas prometteur dans ce dossier des plus importants. Je remercie madame le sénateur de sa question.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LE TRAITÉ SUR LE COMMERCE DES ARMES—LES CRITÈRES EN MATIÈRE DE CONTRÔLE DE L'EXPORTATION D'ARMES

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, lorsque la guerre froide s'est terminée, plusieurs producteurs d'armes d'un peu partout au monde ont continué à produire des armes conventionnelles. Graça Machel, l'épouse de Nelson Mandela, a donné l'alarme au sujet des enfants soldats. Elle a soulevé deux statistiques troublantes qui ont été acceptées par les Nations Unies.

Selon la première de ces statistiques, près de deux millions d'enfants soldats ont perdu la vie au cours des cinq dernières années. Selon la seconde, la grande majorité d'entre eux ont été tués avec des armes légères, qui étaient très répandues puisqu'il en existe près de 650 millions dans le monde, souvent distribuées de façon très irresponsable.

Ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Le Canada s'est employé activement à proposer et à avaliser de stricts principes communs favorisant les comportements responsables dans les transferts d'armes légères et de petit calibre. Toutefois, les lignes directrices et les pratiques canadiennes ne sont pas à la hauteur de quelques-unes des nouvelles normes internationales que le Canada s'est engagé à respecter par des accords multilatéraux.

Le Canada a l'obligation politique et légale de respecter pratiquement tous les éléments des principes généraux du traité sur le commerce des armes. Par exemple, le premier principe de ce traité dit ceci : « Tous les transferts d'armes internationaux doivent être autorisés par un État reconnu et doivent être réalisés conformément aux lois et procédures nationales qui doivent contenir, au minimum, les obligations de l'État au regard du droit international. »

Ce principe reprend l'alinéa 11 de l'article 2 du programme d'action des Nations Unies visant à éliminer la prolifération des petites armes. L'engagement d'ordre politique pris par le Canada à l'égard du plan d'action des Nations Unies exige que notre pays puisse contrôler les exportations de petites armes de manière à ce que ces exportations soient conformes à ce principe. De la même manière, les obligations légales du Canada contractées dans les traités qu'il a signés exigent l'adhésion du gouvernement à des critères qui interdisent expressément aux États d'approuver les transferts d'armes. Le gouvernement du Canada adoptera-t-il des critères de contrôle des exportations d'armes conformes à ces obligations en souscrivant pleinement aux principes contenus dans le traité sur le commerce des armes?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie l'honorable sénateur pour sa question, qui porte sur un sujet sérieux. Je prends note de la question pour la transmettre au ministre des Affaires étrangères. Comme le sénateur le sait, le ministre se trouve en Afghanistan à l'heure actuelle. Je tâcherai de fournir une réponse différée contenant tous les détails voulus.

Le sénateur Dallaire : J'aimerais poser une question complémentaire. Nous avons des stocks de mobilisation assez importants. Lorsque les armes légères ne répondent plus aux besoins des Forces canadiennes, nous tâchons de les vendre à des États responsables, à l'instar d'autres pays. C'est ce que nous avons fait dans le passé, en nous appuyant sur l'argument voulant que, puisque c'est l'argent des contribuables qui a servi à payer ces armes, il soit normal d'essayer de les revendre si elles sont encore en bon état. Nous avons comme politique d'essayer de récupérer une partie de l'argent plutôt que de détruire les armes.

L'ONU doit tenir cet été, du 27 juin au 7 juillet, une conférence d'examen. Le gouvernement du Canada mènera-t-il la charge pour que le document final de la conférence fasse état de ces principes généraux régissant le transfert d'armes légères, en application des obligations des États en vertu du droit international?

Le sénateur LeBreton : Cette question est bien posée. J'y lis, outre une question, une forme de conseil. Je me ferai un plaisir de la transmettre au ministre des Affaires étrangères.

LE PROGRAMME D'ÉCHANGE DE PAGES AVEC LA CHAMBRE DES COMMUNES

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer à l'ordre du jour, j'aimerais présenter un page qui nous vient de la Chambre des communes.

[Français]

Louis-Philippe Bordeleau-Carignan, de Bécancour, au Québec, poursuit ses études à l'Université d'Ottawa à la faculté des sciences sociales et sa spécialisation est en études internationales et langues modernes. J'aimerais souhaiter la bienvenue à Louis-Philippe au Sénat.

Des voix : Bravo!


(1500)

ORDRE DU JOUR

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, conformément à l'article 27(1) du Règlement, je donne avis que lorsque nous procéderons aux Affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l'ordre suivant : l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des finances sur le Budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2007; la troisième lecture du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu; la deuxième lecture du projet de loi C-8, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2007; la reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Nolin, appuyée par l'honorable sénateur Andreychuk, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale, le Code criminel, la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le casier judiciaire; et la reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Champagne, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Segal, relative à l'Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la première session de la trente- neuvième législature.

[Traduction]

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2006-2007

ADOPTION DU PREMIER RAPPORT INTÉRIMAIRE DU COMITÉ DES FINANCES NATIONALES SUR LE BUDGET DES DÉPENSES

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport (premier rapport intérimaire) (Budget des dépenses de 2006-2007) du Comité sénatorial permanent des finances nationales, présenté au Sénat plus tôt aujourd'hui.

L'honorable Joseph A. Day propose que le rapport soit adopté.

— Honorables sénateurs, on vous a distribué le rapport cet après- midi. J'aimerais attirer votre attention sur certains des points saillants de ce premier rapport intérimaire, concernant le Budget des dépenses de 2006-2007, dont le Comité sénatorial permanent des finances nationales a eu l'occasion d'entreprendre l'examen à la suite de son renvoi à ce comité.

Honorables sénateurs, nous avons consacré jusqu'ici deux séances à l'examen du Budget des dépenses de 2006-2007. Il s'agit des dépenses que les divers ministères fédéraux prévoient devoir engager pendant l'exercice en cours.

Malheureusement, étant donné les circonstances particulières de la tenue d'élections et de la formation d'un nouveau gouvernement, nous sommes un peu sortis du cycle normal au chapitre des finances. Les chiffres que présente ce que nous appelons parfois le livre bleu sont fondés sur le budget de 2005 déposé par le gouvernement précédent.

C'est après la parution du nouveau budget des dépenses que le nouveau gouvernement a déposé un budget. Il l'a présenté à l'autre endroit le 2 mai dernier, après que ce budget des dépenses a été établi. Ayant cela à l'esprit, les sénateurs comprendront qu'il est un peu difficile pour votre comité de scruter les plans du gouvernement actuel en ce qui concerne le prochain exercice; mais, avec le temps, nous aurons l'occasion de le faire.

Je vais toutefois m'arrêter sur certains des points que nous avons relevés dans ce budget des dépenses. La raison, honorables sénateurs, est qu'il fallait déposer ce budget des dépenses puisque, selon notre Règlement, les crédits sont déterminés en fonction de ce document. Même si le budget des dépenses est imparfait du fait qu'il ne tient pas compte de tous les plans du gouvernement actuel, il renferme une grande partie des dépenses publiques de base, dépenses qu'il faut consentir peu importe le parti qui forme le gouvernement. De ce point de vue-là, nous pouvons étudier un certain nombre de ses éléments.

Notre première réunion a commencé avec deux représentants du Secrétariat du Conseil du Trésor; ils avaient tous deux déjà comparu devant notre comité. C'est ainsi que nous connaissons bien aujourd'hui M. David Moloney et Mme Laura Danagher. Tous les membres du comité tiennent à les remercier sincèrement du travail qu'ils font pour nous aider à étudier ce document assez complexe et à y voir clair dans les dépenses du gouvernement, ministère par ministère.

Le deuxième jour des audiences, nous avons reçu le président du Conseil du Trésor, John Baird. Je crois que c'était la première fois qu'il comparaissait devant un comité parlementaire. Nous avons été heureux qu'il se rende disponible aussi rapidement de telle sorte que nous avons pu rédiger ce rapport.

Ce rapport est important parce qu'il sert de base au projet de loi de crédits dont nous devons entamer la deuxième lecture plus tard cet après-midi. Au Sénat, la tradition veut que nous évitions de renvoyer le projet de loi de crédits au comité sénatorial permanent et que nous passions plutôt de la deuxième lecture à la troisième, en gardant à l'esprit qu'il s'appuie sur le budget des dépenses correspondant. En fait, le document en annexe au projet de loi de crédits figure dans le budget des dépenses et a notamment fait l'objet de notre étude préliminaire.

Honorables sénateurs, je vous rappelle que la partie 1 du budget des dépenses expose le programme des dépenses du gouvernement et que la partie 2 inclut le Budget principal des dépenses. La partie 3 consiste en une série de deux rapports ministériels, dont le premier renferme les rapports sur les plans et les priorités et le deuxième, les rapports ministériels sur le rendement.

Dans un cycle normal, nous aurions déjà maintenant les plans et les priorités des ministères, qui nous aident à définir l'orientation de chaque ministère. Cependant, étant donné les circonstances spéciales — le changement de gouvernement et un nouvel exercice —, l'ordre de la Chambre des communes qui a été adopté à l'autre endroit, et que nous observerons, indique que les rapports sur les plans et les priorités ne seront pas déposés avant l'automne.

Encore une fois, nous aurons un peu de mal à comprendre clairement, comme nous devons le faire, les dépenses publiques qui sont envisagées. Le cycle n'est changé que pour un exercice. Nous devrions avoir repris le cycle normal au cours du prochain exercice. C'est un changement compréhensible et je pense que tous les sénateurs, et certainement ceux qui font partie de notre comité, conviennent qu'il fallait procéder ainsi pour laisser au gouvernement le temps de s'installer.

Le Budget principal des dépenses est depuis longtemps connu sous le nom de livre bleu. Cependant, comme je l'ai souligné, le livre bleu contient aussi d'autres informations. Le Budget principal des dépenses comprend des dépenses budgétaires et des dépenses non budgétaires. Je vais prendre un instant pour expliquer la différence.

Il aura fallu un peu de temps à notre comité pour comprendre clairement ces éléments; mais une fois que nous y sommes parvenus, le Budget principal des dépenses et le Budget supplémentaire des dépenses qui nous ont été soumis par la suite ont été plus faciles à comprendre.

Les dépenses budgétaires incluent le coût du service de la dette, qui sera de l'ordre de 34 milliards de dollars cette année. Imaginez, honorables sénateurs, si nous pouvions éliminer la dette; si, au cours de ces bons exercices où nous avons des excédents, nous pouvions réduire la dette encore plus que nous l'avons fait — plus de 70 milliards de dollars ont été remboursés depuis dix ans. Imaginez si la dette qui se situe aujourd'hui à plus de 470 milliards de dollars était éliminée, ces 34 milliards de dollars pourraient servir à d'autres initiatives gouvernementales.

Honorables sénateurs, même si nous répondons aux nombreuses exigences que le gouvernement doit satisfaire en mettant en œuvre une multitude de nouveaux programmes, nous ne devons jamais oublier que nous avons une énorme dette. On parle de déséquilibre fiscal et des excédents dont jouit le gouvernement, mais il ne faut pas oublier que la dette de chaque province est considérablement inférieure à celle du gouvernement fédéral.

(1510)

Je vais maintenant aborder les chiffres budgétaires et non budgétaires du budget des dépenses. Les chiffres non budgétaires sont les prêts et les avances. Même s'ils modifient les états financiers du gouvernement, ce ne sont pas des dépenses. Les chiffres budgétaires sont des dépenses et appartiennent à deux catégories différentes : les dépenses législatives et les dépenses votées. Le Parlement adopte des lois qui autorisent le gouvernement à dépenser de l'argent. L'approbation législative fait qu'il n'est pas nécessaire de voter des crédits. Cela figurera dans le projet de loi de crédits. Dans ce projet de loi, les rubriques législatives ne sont là que pour l'information des parlementaires. C'est un point important. Si nous n'adoptons pas un projet de loi de crédits, il demeure possible d'effectuer des dépenses législatives car celles-ci ont été autorisées par des lois adoptées antérieurement.

Habituellement, quand on regarde le Budget principal des dépenses, on constate que le montant des dépenses législatives dépasse celui des dépenses votées. Nous accordons tellement de pouvoirs dans les projets de loi que nous adoptons ces temps-ci que le pourcentage est d'environ deux à un. Parmi les rubriques du budget, 64,8 p. 100 appartiennent à la catégorie législative et ne nécessitent donc pas un vote. Les honorables sénateurs peuvent noter la tendance à cet égard.

Les résumés qui figurent dans le Budget principal des dépenses sont utiles, et notamment la compilation des chiffres. Comme je l'ai mentionné, le service de la dette publique, qui s'élève à 34,395 milliards de dollars, est en baisse par rapport aux dernières années parce qu'à mesure que notre PIB augmente, le rapport entre le service de la dette et la production totale de richesse diminue, ce qui est important. Ce rapport baisserait encore plus vite si nous réduisions la dette accumulée. Le montant prévu pour le fonctionnement et les immobilisations est de 47 milliards de dollars, à comparer à 34 milliards pour le service de la dette. Où va le reste? Il y a de nombreux transferts fixes, comme la péréquation à 12 milliards de dollars, le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux à 28 milliards, les prestations aux aînés à 30 milliards, l'assurance-emploi à 15 milliards, les paiements aux sociétés d'État à 5 milliards et d'autres transferts totalisant 26 milliards.

Pour mettre cela en perspective, je dirais que les dépenses de fonctionnement et d'immobilisation paraissent plus petites, tandis que le service de la dette publique semble plus important. Pour le présent exercice, le Budget principal des dépenses totalise 205 milliards de dollars.

Honorables sénateurs, nous avons beaucoup parlé des mandats du gouverneur général. Avec votre permission, j'aborderai la question des mandats spéciaux du gouverneur général lorsque je parlerai du projet de loi de crédits. Un autre livre bleu a été publié au sujet des mandats spéciaux du gouverneur général, qui sont utilisés lorsque le Parlement ne siège pas à cause d'élections. En vertu de l'article 30 de la Loi sur la gestion des finances publiques, le 15 mai est la date d'expiration du dernier mandat spécial dont le gouvernement dispose. Il importe donc que nous adoptions le projet de loi de crédits avant la fin de cette semaine pour que le gouvernement puisse continuer à fonctionner. Plus de 15 milliards de dollars ont été utilisés dans le cadre de mandats spéciaux du gouverneur général au cours de la période de transition qui s'est écoulée entre le déclenchement des élections en novembre 2005 et le retour du Parlement le 3 avril 2006.

Honorables sénateurs, le crédit 5 du Conseil du Trésor est un autre domaine qui a retenu beaucoup d'attention au fil des ans. Je crois que le Comité sénatorial des finances publiques a eu beaucoup de succès à cet égard. Malheureusement, le succès n'est pas aussi important que nous l'avions espéré. Je m'explique. Le crédit 5 représente le montant dont le Conseil du Trésor dispose pour les dépenses imprévues. Le Conseil du Trésor a un fonds dans lequel il peut puiser pour financer temporairement différents ministères qui ont des dépenses imprévues ou pour financer de façon permanente des dépenses qu'il n'a pas été possible de chiffrer d'avance. Ces dépenses ne figurent donc ni dans les projets de loi de crédits ni dans des projets de loi ordinaires.

Aussitôt que possible, dans le prochain projet de loi de crédits, le Conseil du Trésor recevra de nouveau des fonds dont il devra pleinement rendre compte. Le comité a essayé de persuader le Conseil du Trésor de resserrer ce processus. Avec le temps, après des rapports et des questions sur ce qui se faisait à cet égard, le Conseil a indiqué qu'il mettait en œuvre un nouvel ensemble de lignes directrices. Malheureusement, les élections ont été déclenchées et le processus n'a pas été terminé. Le Conseil du Trésor nous a donné l'assurance qu'il suivait les lignes directrices, même si elles n'ont pas été pleinement mises en œuvre. Le gouvernement, le président du Conseil du Trésor et les autres ministres ont l'intention d'appliquer ces lignes directrices. Les membres du comité espèrent recevoir bientôt une confirmation. Nous croyons que nous aurons gain de cause à ce sujet.

Honorables sénateurs, le financement des Jeux olympiques de Vancouver demeure une source de préoccupation. J'aurais été heureux de poursuivre, mais je constate que la vice-présidente du Comité sénatorial des finances nationales va le faire. Je demande respectueusement aux honorables sénateurs d'appuyer ce premier rapport intérimaire du comité.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je suis heureuse de participer au débat sur le premier rapport intérimaire du Comité sénatorial des finances nationales traitant du Budget principal des dépenses 2006-2007. Je voudrais d'abord exprimer mon appréciation à notre président, le sénateur Day, pour son compte rendu complet de l'examen du budget des dépenses au cours des deux réunions du comité. Je suis certaine que tous les honorables sénateurs savent que nous sommes dans une situation assez particulière parce que le processus normal des crédits a été perturbé par les élections et le chevauchement de deux exercices financiers. Comme l'a dit le président du comité, ce rapport a reçu l'appui unanime des membres. Cela vaut la peine d'être dit ici. Je donne mon appui au rapport de la façon la plus publique possible.

Honorables sénateurs, je parlerai brièvement du projet de loi. Il importe de souligner que le budget des dépenses ainsi que le projet de loi de crédits représentent beaucoup d'argent, 205 milliards de dollars. C'est un chiffre qui dépasse de loin la perspective de la plupart des Canadiens. Nous devons comprendre qu'une fois que nous aurons débattu ces mesures législatives au Sénat, elles ne seront pas renvoyées au comité pour faire l'objet d'un autre examen. Le fondement de ces mesures figure dans le budget des dépenses lui- même. Il s'agit d'un projet de loi de crédits provisoires. En même temps, le budget des dépenses continuera d'être examiné par le comité jusqu'à la fin du présent exercice, le 31 mars 2007.

(1520)

En outre, les sénateurs devraient savoir que l'adoption de ce rapport sur le budget des dépenses constitue en fait l'ordre donné à la Chambre d'adopter le projet de loi de crédits en tant que tel. Il y a toujours un certain stress parlementaire quand on présente les deux choses en même temps, côte à côte, en ce sens que l'adoption du rapport devrait avoir lieu avant l'adoption du projet de loi; mieux encore, ce devrait être avant la deuxième lecture du projet de loi.

Honorables sénateurs, je tiens à souligner que nous vivons à une époque où il semble que le langage parlementaire se soit perdu, où la terminologie des crédits ne s'emploie plus. Je suis de ceux qui croient qu'il faut réutiliser ces termes, ces expressions et ces principes afin de préserver ce que je considère comme le grand héritage de la responsabilité ministérielle, à savoir, en définitive, le contrôle que nous pouvons exercer sur le trésor public, sur les dépenses publiques. Si je pouvais prêcher pour ma paroisse, je le ferais certainement.

Le président a aussi parlé d'une victoire concernant ce que nous appelons le crédit 5 du Conseil du Trésor, qui porte sur les éventualités. Le président a sous-estimé le problème que le comité a eu avec le crédit 5 du Conseil du Trésor pendant tant d'années. En fait, j'ai siégé à ce comité à diverses reprises pendant à peu près 20 ans. On lit dans le rapport que le « Comité s'intéresse depuis longtemps à la manière dont on utilise les crédits pour éventualités à partir du crédit 5 du CT ». C'est bien cela. En fait, c'est bien ce que j'ai dit. Toutefois, il est arrivé aux séances du comité que certains sénateurs ont été contrariés par l'utilisation du crédit 5 du Conseil du Trésor. Pendant des années, le comité a fait des recommandations et a plaidé en faveur d'une correction. Cette victoire est plus grande que ce qu'on voit. Par conséquent, je suis disposée à accorder maintenant le bénéfice du doute au Conseil du Trésor pour voir comment cette question évoluera. Je pense que c'est Mme Danagher qui nous a informés que nos recommandations étaient sur le point d'être adoptées, mais qu'en raison de la dissolution du Parlement, tout s'est arrêté et l'adoption a été reportée. Je crois savoir d'après ses observations qu'elle s'attendait à ce que les ministres du Conseil du Trésor — le Conseil du Trésor est en fait un groupe de ministres — adoptent ces lignes directrices comme étant leur modus operandi, leur façon de gérer leurs affaires.

Il faudrait débattre de ces questions de manière plus approfondie afin que les autres sénateurs ne pensent pas que cette information est obscure et énigmatique.

Quoi qu'il en soit, ce fut une victoire — petite ou grande — pour le comité, et je l'en félicite.

Honorables sénateurs, plus tard aujourd'hui, je parlerai des mandats spéciaux du gouverneur général, sujet qui a le plus attiré l'attention durant les travaux de crédits ces derniers mois. C'est un sujet qui m'est très familier, car j'ai siégé en 1989 au comité, alors présidé par le sénateur LeBlanc. Cette étude des mandats spéciaux du gouverneur général demeure à ce jour une lecture très instructive. J'encourage les honorables sénateurs à lire les témoignages et le rapport du comité.

Je demande instamment aux sénateurs d'appuyer ce rapport et de l'adopter en ayant pleinement confiance que, lors des deux réunions que le comité a tenues sous la direction éclairée du président, les membres du comité ont bien examiné le budget des dépenses en vue d'en rendre compte à cette assemblée pour respecter les délais serrés associés au projet de loi de crédits cette année. Nous nous trouvons dans ce que je qualifierais de « circonstances de crédits exceptionnelles ».

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Le sénateur Day : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

LA LOI ÉLECTORALE DU CANADALA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE

L'honorable Consiglio Di Nino propose que le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu, soit lu pour la troisième fois.

— Honorables sénateurs, j'aimerais formuler de brèves observations à l'occasion du débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-4 relativement à l'enregistrement des partis.

Grâce au projet de loi C-4, une mesure législative essentielle, les règles relatives à l'enregistrement des partis de la Loi électorale du Canada resteront en vigueur après le 15 mai 2006. Le projet de loi supprime la disposition de caducité qui avait été incluse dans le projet de loi C-3 pour la remplacer par une disposition prévoyant un examen obligatoire des règles relatives à l'enregistrement des partis par les comités du Sénat et de l'autre endroit dans les deux ans. J'insiste sur le mot « obligatoire ».

Je remercie tous les honorables sénateurs qui ont participé au débat sur cette question. Ils ont travaillé avec diligence. À cet égard, je remercie également les membres du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Le comité a entendu le témoignage du ministre Robert Nicholson, leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre de la réforme démocratique, ainsi que M. Jean-Pierre Kingsley, directeur général des élections. M. Kingsley a rappelé qu'il était important de supprimer la disposition de caducité pour conserver des règles viables relatives à l'enregistrement des partis, et surtout, la capacité d'enregistrer et de radier des partis.

Le ministre a dit clairement que le gouvernement voulait vraiment entendre les recommandations formulées par le comité sénatorial. Le Sénat jouera donc un rôle clé dans ce processus important.

Encore une fois, je remercie tous ceux qui ont fait preuve d'un très grand esprit de collaboration dans ce dossier. Je demande également à tous les honorables sénateurs d'appuyer le projet de loi C-4.

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a été saisi du projet de loi C-4 la semaine dernière. Pendant l'examen du projet de loi par le comité, les honorables sénateurs ont convenu que son adoption était urgente et que l'examen obligatoire prévu par cette mesure législative était souhaitable.

Cependant, les membres du comité ont aussi soulevé un grand nombre de questions relatives aux modifications apportées par le projet de loi C-3 pendant la 38e législature à la Loi électorale du Canada. Si le projet de loi C-4 est adopté, les parlementaires seront chargés d'examiner ces modifications. J'espère qu'ils se réjouiront de cette occasion qui leur sera offerte d'examiner en profondeur les questions soulevées dans le débat sur ce projet de loi. Je suis impatiente de prendre part à ces discussions.

Les sénateurs qui siègent au comité ont aussi compris qu'il est impératif d'adopter le projet de loi C-4 avant que la disposition de caducité contenue dans le projet de loi C-3 n'entre en vigueur. Cependant, la principale préoccupation des membres du comité est que ce dernier doit, dans deux ans, procéder à un examen et en faire rapport, mais le projet de loi C-4 ne précise pas à quel moment une mesure législative reflétant les recommandations formulées par les parlementaires pourrait être présentée. Le projet de loi C-4 laisse une vaste latitude. Que se passera-t-il en l'absence d'une mesure législative? La situation inconstitutionnelle dans la quelle nous nous trouvons persisterait-elle? Devrons-nous attendre encore une fois que la Cour suprême du Canada nous dise de nous mettre à l'œuvre?

Je me demande ce qui se produira une fois que le processus d'examen sera lancé, et comment le gouvernement du jour réagira aux recommandations qui seront formulées par le comité sénatorial et par le comité de l'autre endroit chargés d'examiner les dispositions de la Loi électorale du Canada qui portent sur l'enregistrement des partis politiques. Que fera le gouvernement si les deux comités sont en désaccord?

(1530)

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je prends la parole cet après-midi au sujet du projet de loi C-4 parce que j'ai la forte conviction que les projets de loi qui concernent les lois électorales au Canada revêtent une importance spéciale pour le Sénat.

Cela surprendra peut-être certains sénateurs, étant donné qu'il y a un préjugé sur la Colline selon lequel les parlementaires non élus devraient se tenir loin de tout ce qui concerne les lois électorales. Je crois que c'est une grave erreur. C'est une grave erreur, car la Loi électorale du Canada et le système électoral en général occupent une grande place dans la Constitution. Certains d'entre vous connaissent peut-être David Smith, un professeur émérite en sciences politiques originaire de la Saskatchewan. Dans un livre qui n'a pas encore été publié, il a rédigé un chapitre intéressant sur le système parlementaire canadien. Il affirme que le Parlement est constitué non seulement de la Couronne, du Sénat et de la Chambre, mais aussi des partis politiques et du processus électoral.

Autrement dit, le système électoral fait partie intégrante du Parlement. Comme il est l'une des trois composantes constitutionnelles du Parlement, le Sénat n'a d'autre choix que de s'intéresser au processus électoral. Ce projet de loi porte sur un aspect particulier du processus électoral : le statut de ce que nous appelons les partis mineurs.

Jusqu'en 2003, un parti était mineur s'il présentait moins de 50 candidats. Jusqu'en 2003, les partis qui présentaient moins de 50 candidats n'étaient pas reconnus et n'avaient aucune protection en vertu de la Loi électorale du Canada. Ils n'avaient pas droit aux avantages prévus aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu et ils n'avaient pas accès à de la publicité sur les ondes de la CBC, de Radio-Canada, entre autres choses.

En 2003, la Cour suprême du Canada a donné de l'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés une interprétation conforme au droit des partis mineurs de présenter n'importe quel nombre de candidats dans une élection. Depuis 2003, un parti peut présenter un seul candidat dans une élection, et cela s'est produit en 2006. C'est un changement important dans le déroulement des élections au Canada.

Nous avons demandé au directeur général des élections combien de petits partis ont présenté des candidats aux dernières élections. Il a répondu qu'il y en avait neuf. Le Animal Alliance Environment Voters Party n'a présenté qu'un candidat et le Parti de l'Héritage Chrétien en a présenté 45. Aux dernières élections, neuf partis enregistrés comptaient moins de 50 candidats, et ces partis ont bénéficié de différents articles de la Loi électorale du Canada.

En passant, ce projet de loi avait été proposé au Sénat à l'automne. C'était le projet de loi C-63 du gouvernement de l'époque et il comportait une lacune. Comme certains se rappelleront, il prévoyait la tenue d'un examen par un comité de l'autre endroit, mais pas du Sénat. C'était une grave lacune. J'ai répété à de nombreuses reprises au Sénat que lorsque de tels projets de loi nous sont soumis, nous devons les modifier pour rétablir le statut de nos comités et notre rôle dans l'examen des projets de loi du gouvernement.

Le gouvernement au pouvoir a corrigé cette lacune et il mérite des félicitations. Je ne peux m'empêcher de faire une observation quelque peu sarcastique concernant le travail du comité dans l'examen de ce projet de loi la semaine dernière. Aucun sénateur du côté du gouvernement, y compris la présidence, n'était présent pendant les 20 premières minutes de l'examen. J'ai déclaré au comité que cela me semblait inhabituel.

Lorsque la Cour suprême a invalidé des articles de la Loi électorale en 2003 à la demande du Parti communiste, elle s'est fondée sur l'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés qui prévoit ce qui suit :

Tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives fédérales...

— le Sénat n'est pas mentionné —

... ou provinciales.

La Cour suprême n'a pas jugé que le droit de vote était exclusif aux partis politiques. La Cour suprême a décrété que, conformément à cet article de la Charte, les partis politiques ont des droits car ils jouent un rôle essentiel dans le processus électoral. En fait, le juge Lebel, qui était de cet avis, a déclaré que le système des partis politiques était un élément important de notre régime de gouvernement démocratique.

C'est un élément important, car la question des droits des partis mineurs demeure ouverte. La Cour supérieure de l'Ontario est saisie d'une affaire où six petits partis, c'est-à-dire des partis comptant moins de 50 candidats, remettent en question la Loi sur le financement des élections, que nous avons adoptée au cours de la dernière législature. Ces six partis s'opposent aux seuils de 2 p. 100 et de 5 p. 100 ouvrant droit au remboursement des dépenses électorales et au financement, prévu par le nouveau système, à hauteur de 1,75 $ par vote reçu. Les partis qui n'atteignent pas le seuil de 2 p. 100 des votes valides exprimés ou de 5 p. 100 dans les circonscriptions où ils présentent un candidat ne sont pas admissibles à ce financement.

Les partis mineurs se battent toujours en cours pour faire valoir leurs droits. Il est important de garder cela à l'esprit, car le projet de loi C-4 a une portée limitée.

Aux termes du projet de loi C-4, les comités du Sénat et de la Chambre des communes devront examiner « à fond les modifications apportées par la présente loi ».

Les modifications en question font référence au projet de loi C-3, adopté en mai 2004. Il faut s'y reporter pour comprendre ce que le comité sénatorial étudiera. Grosso modo, nous allons nous pencher sur la définition de « parti politique », sur le statut des fonctionnaires électoraux, des agents enregistrés, des vérificateurs et des membres des partis politiques, sur l'enregistrement et la révocation des partis politiques et, bien entendu, sur les modification de la Loi de l'impôt sur le revenu qui touchent les petits partis.

Le projet de loi C-4 attribue au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles un mandat législatif limité, soit l'examen d'un ensemble restreint de questions touchant les partis mineurs. Il est entendu que, si ce projet de loi est adopté rapidement par le Sénat et qu'il reçoit la sanction royale, nous disposerons de deux ans pour procéder à cet examen.

Comme madame le sénateur Cools l'a dit en comité, beaucoup de choses peuvent se produire au cours des deux prochaines années. Il est possible qu'il y ait de nouveau des élections. Le comité qui a entrepris l'étude pourrait être reconstitué. La même chose peut se produire à l'autre endroit et être suivie d'un autre processus électoral.

(1540)

Autrement dit, le projet de loi ne prévoit absolument aucun délai pour l'enregistrement d'un parti minoritaire. Honorables sénateurs, il importe de comprendre cela. J'éprouve toujours certaines réserves quand on nous présente un projet de loi de trois lignes seulement, qu'on nous dit qu'il doit être adopté rapidement et qu'il s'agit simplement d'une question d'intendance qui ne pose aucun problème. Lorsqu'on examine ces trois lignes de plus près, on découvre parfois que les questions qu'elles concernent se rapportent à l'ensemble du processus électoral canadien.

En conclusion, honorables sénateurs, je paraphrase les paroles d'un ami, l'honorable sénateur Murray, qui, dans son excellente Adresse en réponse au discours du Trône, a dit que très souvent les députés, à l'autre endroit, sont censés être concernés par les questions électorales alors que nous, au Sénat, ne le sommes pas.

Par simple curiosité, j'ai vérifié comment les députés ont traité le projet de loi, la semaine dernière. Dans l'édition du jeudi 27 avril, 10 heures, des Journaux de la Chambre des communes, on peut lire ce qui suit :

Du consentement unanime, il est ordonné, — Que le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu, soit réputé lu une deuxième fois et renvoyé à un comité plénier, réputé étudié en comité plénier, réputé avoir fait l'objet d'un rapport sans amendement, réputé adopté à l'étape du rapport et réputé lu une troisième fois et adopté.

Honorables sénateurs, cette procédure a pris en tout 15 secondes.

Comme les honorables sénateurs le savent déjà, j'ai posé ma candidature lors de plusieurs campagnes électorales. En fait, je suis toujours actif dans le processus électoral. Comme l'a dit la Cour suprême, le processus politique est un élément de l'ordre constitutionnel. À titre de sénateurs, nous devons nous préoccuper des droits des partis minoritaires. Il nous incombe de veiller à ce que lorsque nous adoptons une mesure législative, comme le projet de loi C-4, qui concerne les droits des partis minoritaires, nous le fassions en tenant compte des droits de l'ensemble des Canadiens de faire comptabiliser leur vote de la même manière que s'ils avaient voté pour un grand parti national.

Je vais certainement appuyer le projet de loi. Je le répète, il s'agit d'une amélioration par rapport au projet de loi précédent. Il faut approuver cette mesure en étant bien conscient que la question reste ouverte, et que nous n'avons pas dit notre dernier mot sur les droits des partis minoritaires.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, permettez-moi d'ajouter rapidement quelques mots dans ce débat de troisième lecture.

Mon intervention tient plus du plaidoyer et même presque de la supplication. Je demande au gouvernement de ne pas faire encore trop souvent la même chose dans un texte de loi.

Depuis quelque temps, il semble y avoir une mode qui consiste à prévoir dans les projets de loi le renvoi d'une question à un certain comité ou à un autre. J'espère que cette mode passera, comme toutes les modes tendent à le faire.

Madame le sénateur Milne a soulevé un point important. Le projet de loi ne dit rien du cas où les deux Chambres aboutiraient à des conclusions différentes ou contradictoires dans leurs études respectives.

Ce qui importe ici, c'est qu'on n'a accordé aucune attention au fait que, du point de vue constitutionnel, on ne peut confondre une étude commandée par une Chambre et une étude qui répond à un ordre que la Reine en Parlement a donné par voie législative. Ces deux études réalisées par un comité ne se situent pas de la même façon.

J'ai un peu lu sur le sujet. Pas récemment, mais il y a un certain temps. Peut-être pourrions-nous à un moment donné commencer à étudier la question.

Je soutiens, pour un ensemble d'autres raisons, que, une fois que la Reine en Parlement a ordonné par voie législative qu'un comité réalise une étude, les ministres de Sa Majesté sont obligés, dans une grande mesure, d'accepter les conclusions du comité. Mais ce n'est pas là l'objet de mon intervention.

Mon intervention est plutôt une exhortation à la prudence, une exhortation à étudier un peu plus ces importants détails constitutionnels avant de continuer, quelle que soit la raison, à insérer dans les projets de loi ces renvois à des comités. Je crois que ce n'est bon ni pour le comité, ni pour la question à étudier, ni pour le gouvernement.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

L'HONORABLE DANIEL HAYS

LE DÉVOILEMENT D'UN PORTRAIT

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, c'est aujourd'hui un jour très spécial, car ce soir, à 18 heures, dans le Hall d'honneur, nous dévoilerons le portrait du sénateur Hays, ancien Président du Sénat.

Je signale à l'attention des honorables sénateurs la présence à la tribune de Mme Kathy Hays, de membres de la famille Hays, d'amis très proches de la famille Hays, dont Bill Teur, associé gestionnaire de Macleod Dixon, et John Brocke.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada à cette occasion toute particulière.

PROJET DE LOI DE CRÉDITS NO 1 POUR 2006-2007

DEUXIÈME LECTURE

L'honorable Anne C. Cools propose que le projet de loi C-8, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 2007, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, le titre abrégé du projet de loi C-8 est Loi de crédits no 1 pour 2006-2007. Il prévoit des crédits provisoires de 43,5 milliards de dollars pour l'exercice en cours, qui va du 1er avril 2006 au 31 mars 2007. Ce projet de loi a été précédé du Budget principal des dépenses 2006-2007, qui été présenté au Sénat le 25 avril dernier.

Le 26 avril, le Sénat a renvoyé le Budget principal des dépenses pour étude au Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Aujourd'hui, par l'entremise de son président, le sénateur Day, le comité a présenté au Sénat son rapport sur le Budget principal des dépenses.

(1550)

Le gros changement, cette année, c'est que les 43,5 milliards de dollars de crédits provisoires ne représentent pas seulement trois douzièmes ou trois mois, comme c'est le cas habituellement dans le cadre de l'examen des crédits. Le projet de loi C-8 demande plutôt l'équivalent de neuf douzièmes, ou neuf mois, du total des crédits, c'est-à-dire de tous les postes de dépense prévus dans le Budget principal des dépenses de 2006-2007 et inscrits dans les annexes du projet de loi C-8.

Honorables sénateurs, c'est là un point important. Le sénateur Day avait fait allusion à ce qu'il y avait de particulier à l'étude des crédits que nous réalisons actuellement. Nous voulons que ce soit très clair, afin que nous sachions tous ce pour quoi nous votons. Ces 43,5 milliards en crédits provisoires, sur lesquels nous allons voter dans le cadre du processus d'adoption du projet de loi C-8, représentent neuf douzièmes, ou neuf mois, du total des sommes présentées dans le Budget principal des dépenses de 2006-2007 et inscrites dans les annexes du projet de loi C-8.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-8, à l'article 2, demande ainsi l'autorisation du Parlement :

Il peut être prélevé, sur le Trésor, une somme maximale de quarante-trois milliards quatre cent quatre-vingt quatorze millions six cent cinquante-huit mille quatre cent trente dollars et cinquante-neuf cents, pour le paiement des charges et dépenses de l'administration publique fédérale afférentes à la période allant du 1er avril 2006 au 31 mars 2007, et auxquelles il n'est pas pourvu par ailleurs, soit l'ensemble :

a) des neuf douzièmes du total des postes énoncés au Budget des dépenses de l'exercice se terminant le 31 mars 2007, inclus dans les annexes 1.3 et 2................30 619 976 223,75 $

b) des onze douzièmes du total des postes de ce Budget énoncés à l'annexe 1.1..................................6 303 923 163,68 $

c) des dix douzièmes du total des postes de ce Budget énoncés à l'annexe 1.2..................................6 570 759 043,16 $

Honorables sénateurs, il faut que ce soit bien clair. Je veux, par mon intervention, faire en sorte que soient soulignées dans le compte rendu les caractéristiques très particulières du projet de loi de crédits de cette année, et montrer clairement, pour la postérité, que nous avions tous été saisis de cette information et que nous l'avions tous bien comprise.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-8, qui porte sur les crédits provisoires, permettra au gouvernement du Canada de couvrir le coût de ses activités quotidiennes et de payer ses dépenses.

Honorables sénateurs, je vais expliquer ce projet de loi inhabituel, ses demandes inhabituelles et le processus inhabituel d'octroi des crédits qu'il représente. Il va sans dire que la plupart des sénateurs sont conscients du fait que cette année, le processus d'octroi des crédits a été simultanément accéléré, comprimé, retardé et soumis à un échéancier unique, d'abord aux Communes et ensuite ici, au Sénat. Il en est ainsi parce que le processus normal, c'est-à-dire le cycle budgétaire qui est fait de plusieurs périodes de crédits et qui comporte l'étude du budget des dépenses et des projets de loi budgétaires, a été interrompu. Le cycle budgétaire normal a été interrompu quand le Parlement a été dissous le 29 novembre 2005. Cette dissolution et la période électorale qui a suivi ont rendu impossible l'adoption, par les deux Chambres du Parlement, du Budget supplémentaire des dépenses et du projet de loi de crédits.

De surcroît, les élections générales du 23 janvier 2006 ont donné lieu à un changement de gouvernement, l'ancien gouvernement du premier ministre Paul Martin ayant été remplacé par un gouvernement conservateur minoritaire dirigé par le premier ministre Stephen Harper.

Honorables sénateurs, quand le Parlement est dissous, l'octroi de crédits au gouvernement devient une question assez épineuse puisqu'il est nécessaire d'entreprendre le délicat processus qui consiste à obtenir de l'argent, ou des crédits, sans l'autorisation du Parlement; en d'autres mots, sans crédits parlementaires, puisqu'il faut faire appel aux mandats spéciaux du gouverneur général.

Honorables sénateurs, la question des mandats spéciaux préoccupe les parlementaires depuis des générations et a donné lieu à de nombreux débats, à certaines mésententes et parfois même à de l'amertume. La question des mandats spéciaux est au cœur même de l'existence du Parlement en tant que contrôleur des dépenses publiques. Elle est au cœur du système constitutionnel et de l'équilibre entre la prérogative royale relative aux initiatives financières de la Couronne et les pouvoirs et privilèges du Parlement en tant qu'institution représentative. Elle est aussi au cœur du pouvoir très important des représentants d'accorder des crédits, autrement dit le pouvoir du Parlement d'autoriser les dépenses.

L'article 30 de la Loi sur la gestion des finances publiques décrit les conditions relatives à l'utilisation des mandats spéciaux du gouverneur général. Il dit :

(1) Sous réserve du paragraphe (1.1), en l'absence de crédit, le gouverneur en conseil peut, si le Parlement n'est pas en session, depuis la date de la dissolution jusqu'au soixantième jour suivant la date fixée pour le retour des brefs relatifs à l'élection générale qui suit immédiatement la dissolution, par décret, ordonner l'établissement d'un mandat spécial pour la signature du gouverneur général en vue d'autoriser un paiement sur le Trésor, le président du Conseil du Trésor lui remet un rapport attestant de l'absence de tout crédit pouvant autoriser le paiement et le ministre compétent lui remet un rapport attestant l'urgence du paiement et sa nécessité dans l'intérêt public.

Honorables sénateurs, je veux continuer la lecture de l'article 30 de la Loi sur la gestion des finances publiques, mais je veux préciser ici que les dispositions de cet article traduisent de nombreuses préoccupations exprimées au fil des ans par les sénateurs et par les députés.

Je me souviens d'une époque où les sénateurs et les députés étaient très inquiets de voir qu'un gouvernement avait apparemment eu recours à la prorogation avec l'intention de recourir à des mandats spéciaux du Gouverneur général pour pouvoir obtenir des fonds. L'article 30 a une longue histoire.

Quoi qu'il en soit, je continue ma lecture :

(1.1) Le gouverneur en conseil ne peut, pendant les soixante jours mentionnés au paragraphe (1), ordonner l'établissement d'un mandat spécial mentionné à ce paragraphe lorsque le Parlement n'est pas en session l'un ou l'autre de ces jours parce qu'il est prorogé.

Honorables sénateurs, le recours à des mandats spéciaux est exclu pendant une période de prorogation.

Je continue :

(2) Un mandat spécial est considéré, pour l'application de la présente loi, comme un crédit relatif à l'exercice au cours duquel il est établi.

(3) Les mandats visés au présent article sont publiés dans la Gazette du Canada, dans les trente jours de leur établissement; une liste, accompagnée du relevé des montants correspondants, en est déposée par le président du Conseil du Trésor devant la Chambre des communes dans les quinze jours de l'ouverture de la session suivante du Parlement.

(4) Les montants affectés par mandat spécial sont réputés être des avances; ils font partie des montants affectés par la première loi de crédits votée par le Parlement par la suite et ne s'y ajoutent pas.

(1600)

Honorables sénateurs, il est clair, d'après le libellé de l'article 30, que le Parlement souhaitait que le recours aux mandats spéciaux du gouverneur général soit soigneusement circonscrit.

J'ai connu beaucoup de personnes âgées qui avaient servi dans différents parlements du monde. On m'a toujours dit que lorsque des ministres envisageaient de recourir à un mandat spécial du gouverneur général, ils le faisaient avec une grande appréhension parce que les conséquences pouvaient être très graves.

Quoi qu'il en soit, honorables sénateurs, l'article 30, dans sa forme modifiée en 1997 après des années d'efforts et de débats, circonscrit le recours à cet instrument par le gouvernement et en limite l'utilisation aux situations de dissolution, mais jamais en cas de prorogation. Cette disposition est parfaitement claire : on ne peut recourir aux mandats spéciaux que si le Parlement ne siège pas à cause d'une dissolution et du déclenchement d'élections générales. Il ne doit exister aucun autre moyen possible d'obtenir des crédits et les fonds nécessaires doivent être requis d'urgence dans l'intérêt public. Au fil des ans, beaucoup de parlementaires diligents ont soigneusement examiné le recours par le gouvernement aux mandats spéciaux du gouverneur général. Ils avaient compris, comme ils le devaient, le risque d'abus que comportent ces mandats. Les parlementaires ont reconnu la possibilité de tromper le Parlement, ainsi que les conséquences constitutionnelles et politiques pouvant en découler.

C'est une question importante qui a exigé beaucoup de temps et d'attention du comité. De plus, elle constitue l'arrière-plan du processus de crédit inhabituel que nous connaissons actuellement. C'est un processus inhabituel, un projet de loi inhabituel et des circonstances inhabituelles. Je voudrais également dire aux honorables sénateurs que le gouvernement de M. Harper s'est trouvé face à cette situation et a tenté de l'affronter et même de la gérer.

Honorables sénateurs, après la dissolution d'il y a quelques semaines, tant le gouvernement sortant du premier ministre Paul Martin que le gouvernement nouvellement élu du premier ministre Stephen Harper ont utilisé des mandats spéciaux du gouverneur général. Entre la dissolution du 29 novembre 2005 et aujourd'hui, la gouverneure générale, Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean, a délivré quatre mandats spéciaux totalisant 15,6 milliards de dollars. Honorables sénateurs, c'est un montant extraordinaire, un montant énorme. C'est la raison pour laquelle j'ai pris le temps de parler de la loi, de la Constitution et des circonstances. Parrainant le projet de loi, je prends la chose très au sérieux : 15 milliards, c'est un montant que la plupart des gens ne verront jamais. C'est une somme faramineuse, que nous devrions traiter avec la dignité et le respect qu'elle mérite.

Le projet de loi C-8 le reconnaît et aborde la question du recours aux mandats spéciaux. Il demande même aux deux Chambres du Parlement de voter pour en confirmer l'utilisation. Autrement dit, le projet de loi C-8 demande au Sénat et à la Chambre des communes de confirmer ces lois, non pour approuver les montants, mais pour faire état du fait que cela s'est produit et que les deux Chambres en ont pris note.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-8 confirme les mesures prises par le président du Conseil du Trésor du premier ministre Martin entre la dissolution du 29 novembre 2005 et le 21 janvier 2006, de même que les mesures prises par le gouvernement du premier ministre Harper entre le 20 février et le 15 mai 2006. Comme le sénateur Day l'a noté il y a quelques minutes, le 15 mai est la date d'expiration du quatrième et dernier mandat spécial du gouverneur général. C'est une date importante de notre calendrier parlementaire.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-8 répartit les paiements effectués au moyen de ces mandats spéciaux du gouverneur général entre l'exercice 2005-2006 et l'exercice 2006-2007, puis les confirme. À l'article 2.1, il confirme en ces termes le dernier mandat spécial de 11,5 milliards de dollars du gouverneur général :

Est confirmé par le présent article le paiement de la somme de 11 470 229 998,00 $, prélevée sur le Trésor aux fins prévues à l'annexe du mandat spécial signé par le gouverneur général en vertu de l'article 30 de la Loi sur la gestion des finances publiques et du décret du 1er avril 2006 (C.P. 2006-185) publié le 8 avril 2006 dans le Volume 140, no 14 de la partie I de la Gazette du Canada.

Si les honorables sénateurs regardent le projet de loi, ils verront l'annotation suivante dans la marge : « Confirmation du paiement effectué en vertu d'un mandat spécial pour l'année financière 2006- 2007 ». Ces questions sont exposées d'une façon très claire.

Honorables sénateurs, comme je l'ai dit, il y a eu quatre mandats spéciaux du gouverneur général. L'article 2.2 du projet de loi C-8 confirme les trois autres mandats totalisant environ 4 milliards de dollars. Vous noterez que les dispositions du projet de loi mentionnent les dates, les autorisations, le décret du Conseil et la publication dans la Gazette du Canada.

L'article 2.2 confirme donc en ces termes les trois autres mandats spéciaux du gouverneur général totalisant environ 4 milliards de dollars :

Est confirmé par le présent article le paiement de la somme de 4 177 925 813 000 $, prélevée sur le Trésor aux fins prévues à l'annexe des mandats spéciaux signés par le gouverneur général en vertu de l'article 30 de la Loi sur la gestion des finances publiques et des décrets du 20 décembre 2005 (C.P. 2005-2337), du 19 janvier 2006 (C.P. 2006-4) et du 16 février 2006 (C.P. 2006-106) publiés le 21 janvier 2006, le 18 février 2006 et le 18 mars 2006, respectivement, dans le Volume 140, nos 3, 7 et 11 de la partie I de la Gazette du Canada.

Honorables sénateurs, nous vivons maintenant à un moment où le mot Trésor n'est pas vraiment très usité, mais la consolidation de tous les revenus de l'État dans le Trésor, autrefois appelé Fonds du revenu consolidé, a été un grand événement dans l'histoire des finances publiques. Je n'avais pas examiné ces circonstances depuis un certain temps, mais je crois que c'est un processus qui a commencé sous William Pitt, sur avis d'Adam Smith.

(1610)

Honorables sénateurs, tout au long de ce débat, nous avons fait allusion aux « mandats spéciaux du gouverneur général ». Je vais parler très clairement. Chaque fois que le gouvernement entend retirer des fonds du Trésor, il doit obtenir un mandat signé par le gouverneur général à cette fin. Or, les mandats à l'étude sont différents; ce sont des « mandats spéciaux ». En d'autres termes, il y a un autre pouvoir, une autre majesté, pourrait-on dire, en ce qui concerne un retrait du Trésor lorsque le Parlement ne siège pas.

Honorables sénateurs, comme le sénateur Day l'a déclaré, une question très urgente exige notre attention et c'est le fait que le quatrième de ces mandats spéciaux du gouverneur général, soit le plus important et le dernier, vient à échéance le lundi 15 mai 2006, d'où le délai serré et pressant de ce projet de loi de crédits particulier. Le projet de loi C-8, la Loi de crédits no 1 qui est proposée, demande maintenant au Sénat et à la Chambre des confirmer les actions du gouvernement et les sommes d'argent totalisant 15,6 milliards de dollars en vertu de mandats spéciaux du gouverneur général.

Honorables sénateurs, à l'avenir, j'espère que certains d'entre nous étudieront plus à fond l'exercice de ces prérogatives complexes. Par rapport à d'autres pays, le Canada est plus secret en ce qui concerne les activités du Conseil privé et les fonctions du gouverneur général, entre autres. Plusieurs pays du Commonwealth sont beaucoup plus ouverts en ce qui a trait à ce processus. J'ai des amis ailleurs dans le Commonwealth qui s'interrogent à propos de cette culture du secret.

Honorables sénateurs, la dissolution du Parlement, les élections et l'ouverture subséquente de la législature, le 3 avril dernier, ont chevauché les importantes périodes de crédits des deux derniers exercices, soit la fin de l'un et le début de l'autre.

Le 3 mai 2006, au Comité sénatorial permanent des finances nationales, le sénateur Murray a décrit la situation avec justesse en disant :

Les contretemps dans l'actuel cycle des crédits ont ceci d'inhabituel que la dissolution chevauchait partiellement deux exercices.

Honorables sénateurs, comme le sénateur Murray, je vais parler de problèmes. Le processus des crédits, qui faisait déjà l'objet d'un problème, soit la dissolution du Parlement, a fait l'objet d'un autre problème, soit le fait étonnant que la période de dissolution et des élections chevauchaient partiellement deux exercices, c'est-à-dire le dernier mois de l'exercice se terminant en mars 2006 et le premier mois, avril, de l'exercice se terminant en mars 2007. Je suis d'avis qu'à elle seule, cette situation ferait problème pour n'importe quel ministère, Cabinet ou gouvernement. J'ai également l'impression que les gouvernements ne devraient pas s'empresser de recourir à ces mandats trop souvent.

Honorables sénateurs, aux fins de cette fort curieuse étude des crédits que suppose ce budget des dépenses et le projet de loi C-8, et aux fins de clarification, le Conseil du Trésor a fourni au Parlement un document budgétaire intitulé « Rapport sur l'utilisation des mandats spéciaux du gouverneur général pour les exercices financiers se terminant le 31 mars 2006 et le 31 mars 2007 ». Le président du Conseil du Trésor a réagi en partie à la situation en fournissant ces renseignements au Parlement, aux fins d'une meilleure clarification et compréhension. Ce document donne des explications sur ce dossier difficile.

Aussi, le président du Conseil du Trésor a inclus un nouveau tableau dans le Budget principal des dépenses, aussi connu sous le nom de livre bleu, aux pages 1-109 à 1-114. Ce tableau établit un rapprochement entre les crédits et les paiements obtenus au moyen de mandats du gouverneur général tant pour les crédits provisoires que la totalité des crédits.

De plus, le 4 avril 2006, le leader du gouvernement à la Chambre des communes, M. Nicholson, au moyen d'une motion, a demandé aux députés d'accélérer et en même temps de condenser le processus des crédits pour venir à bout des circonstances exceptionnelles créées par la dissolution et son chevauchement de deux exercices.

Honorables sénateurs, je vais lire le premier paragraphe de cette motion. Elle était longue et astreignante. On peut la trouver dans le compte rendu des débats de la Chambre des communes du 4 avril 2006, à la page 11, motion no 2, paragraphe 1, qui stipule :

Nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, le mercredi 3 mai 2006, quinze minutes avant la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement, le Président interrompe les délibérations alors en cours et mette aux voix, sur-le-champ et successivement, sans débat ou amendement, toute question nécessaire à l'expédition de toute affaire relative aux crédits provisoires et à l'adoption, à toutes les étapes, de tout projet de loi s'y rattachant [...]

Cette motion a plusieurs autres paragraphes. Elle prescrit ensuite pour l'étude des crédits par la Chambre des communes les délais suivants, stipulant : premièrement, que le Budget principal des dépenses soit présenté le 25 avril 2006; deuxièmement, que le projet de loi sur les crédits provisoires établis en conséquence soit présenté le 3 mai 2006.

Le sénateur Murray : Non, ce n'est pas « le », mais « au plus tard le ».

Le sénateur Cools : Excusez-moi. Le sénateur a parfaitement raison, la motion dit « au plus tard le ».

Je répète : que le projet de loi sur les crédits provisoires établis en conséquence soit présenté au plus tard le 3 mai 2006; que la présentation du projet de loi subséquent portant sur la totalité des crédits et son processus soient reportés jusqu'à la période des crédits de l'automne, en décembre 2006.

Il s'ensuit de cette décision de la Chambre des communes que ce projet de loi C-8 sur les crédits provisoires a été conçu et rédigé pour illustrer les besoins nets du gouvernement jusqu'en décembre prochain, et couvrirait les besoins opérationnels du 1er avril jusqu'en décembre 2006. Ce serait pour neuf mois sur 12, ou les neuf douzièmes de la totalité des postes figurant dans le Budget principal des dépenses et dans l'annexe au projet de loi C-8.

(1620)

Honorables sénateurs, le projet de loi C-8 prévoit que la partie III des documents budgétaires, soit les plans de dépenses des ministères, qui comprennent les rapports sur les plans et priorités et les rapports ministériels sur le rendement, seront reportés — du moins leur étude et leur présentation — jusqu'à l'automne. Ce délai permettra aux ministres et à leurs ministères de revoir leurs documents de planification et leurs prévisions de dépenses et de les faire correspondre aux plans et priorités du nouveau gouvernement, ceux que le gouvernement a présentés dans son premier budget, le 2 mai 2006.

De plus, grâce à cette motion, le Sénat et les Communes ainsi que leurs comités auront plus tard assez de temps pour étudier comme il se doit le Budget principal des dépenses et en faire rapport à leurs Chambres respectives avant la fin de novembre, au moment où le gouvernement présentera son budget supplémentaire aux Communes. Ce sera la première occasion donnée au gouvernement de proposer aux deux Chambres des prévisions de dépenses à l'image de ses propres plans et priorités détaillés.

Honorables sénateurs, il est compréhensible, important et nécessaire que les sénateurs demeurent inquiets, préoccupés devant l'utilisation des mandats spéciaux du gouverneur général par le gouvernement. Je crois que le principe du « contrôle des deniers publics » exige que nous soyons toujours vigilants, attentifs à l'épineuse question de la conduite du gouvernement, lorsqu'il tâche d'assumer ses obligations financières en période électorale, le Parlement étant dissous, de la conduite du gouvernement qui a recours à ces mandats spéciaux pour puiser dans le Trésor.

Honorables sénateurs, la dissolution qui est à l'origine de ces difficultés a été provoquée par la défaite du gouvernement du premier ministre Paul Martin sur une question de confiance, événement non prévu. La vraie difficulté tient au fait que la dissolution a chevauché deux exercices financiers.

Le principe veut qu'on fasse toujours voter des crédits parlementaires pour faire des paiements sur le Trésor. On lisait ceci dans le troisième rapport du Comité des finances nationales, le 17 mai 1989 :

Le Sénat invite la Chambre des communes à convenir avec lui que sous réserve des Lois constitutionnelles de 1867 à 1982, et à moins qu'il ne soit nécessaire de répondre à des besoins imprévus et urgents dans l'intérêt public, aucun paiement ne peut être autorisé sur le Trésor sans que des crédits n'aient été votés par le Parlement.

J'étais membre du comité qui a rédigé ce rapport. Je croyais dans ce principe alors, et j'y crois toujours.

Honorables sénateurs, le nouveau président du Conseil du Trésor, John Baird, a comparu devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales le 3 mai 2006 pour expliquer et défendre le Budget principal des dépenses de 2006-2007. Il était accompagné de fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor, soit M. David Moloney, secrétaire adjoint du Secteur de la gestion des dépenses, et Mme Laura Danagher, directrice exécutive de la Division des opérations et prévisions de dépenses. M. Moloney et Mme Danagher ont également comparu devant le comité la veille, le 2 mai 2006.

Les sénateurs ont bien accueilli le président John Baird, qui a été très affable. Il y a même eu de beaux échanges humoristiques entre lui et le sénateur Art Eggleton, qui a lui-même été président du Conseil du Trésor.

Le président et les fonctionnaires du secrétariat ont expliqué le Budget principal des dépenses. Tout cela est bien décrit dans le rapport du comité qui a été présenté plus tôt au Sénat.

Honorables sénateurs, le Budget principal des dépenses 2006-2007 correspond aux dépenses que le gouvernement propose pour l'exercice financier. Les dépenses budgétaires totalisent 198,6 milliards de dollars, et les dépenses non budgétaires s'élèvent à 1,1 milliard, ce qui donne en tout 199,2 milliards de dollars. De ce montant, 17 milliards sont des crédits votés, c'est-à-dire approuvés par le Parlement dans les projets de loi sur les crédits provisoires et sur les pleins crédits.

Comme le sénateur Day l'a expliqué, les dépenses législatives représentent les deux autres tiers. Il semble que la proportion soit en train d'évoluer. Notre comité devrait peut-être étudier un jour la question, sénateur Day. Ces dépenses législatives sont d'environ 128 milliards de dollars. Elles ne figurent dans le Budget principal des dépenses qu'à titre d'information, puisque le Parlement les a déjà approuvées par d'autres lois.

Honorables sénateurs, le président du Conseil du Trésor, John Baird, a dit clairement que le Budget principal des dépenses dont nous sommes saisis correspond aux décisions du gouvernement précédent. Par contre, le budget des dépenses qui viendra à l'automne reflètera les décisions de son gouvernement. Il ne fait aucun doute que ce processus des crédits particulier et même unique ne vaut que pour 2006. D'ici peu, le cycle normal sera rétabli.

Honorables sénateurs, le processus des crédits et le projet de loi sur les crédits ont été conçus — ce n'est pas un réponse aussi bonne que bon nombre d'entre nous le souhaiteraient — pour s'adapter à une situation unique. C'est la réponse du gouvernement à certaines difficultés qu'il a dû gérer.

Cela dit, honorables sénateurs, je vous exhorte à appuyer le projet de loi C-8, la Loi de crédits no 1 pour 2006-2007.

Pour conclure, honorables sénateurs, je tiens à remercier le président du comité sénatorial, le sénateur Day, de son travail sur ces importantes questions de crédits et de budget de dépenses.

Je remercie également tous les autres membres du comité. Je remarque la présence du sénateur Stratton, mais je remercie tous les autres que je ne vois pas en ce moment. Je remercie plus particulièrement les sénateurs libéraux d'avoir accepté la position du gouvernement, qui a été coincé à cause de la dissolution pour la tenue des élections et du problème difficile du chevauchement de deux exercices financiers.

Je remercie le personnel du comité du travail qu'il a accompli pour le comité. Enfin, honorables sénateurs, je remercie le président du Conseil du Trésor, John Baird, et les fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor, M. David Moloney et Mme Laura Danagher, du travail qu'ils ont fait pour le gouvernement.

Honorables sénateurs, j'ai gardé une dernière observation pour la fin, car je voulais éviter de la mêler à la question des crédits. Je profite de ma première intervention digne de ce nom pour féliciter les nouveaux dirigeants du Sénat, soit les sénateurs LeBreton, Comeau et Stratton, qui ont accédé aux postes de leaders du gouvernement au Sénat.

Et du côté de l'opposition, j'aimerais féliciter les sénateurs Dan Hays, Joan Fraser et Joan Cook pour avoir accédé aux importantes et difficiles fonctions de leaders de l'opposition au Sénat. Je profite également de l'occasion pour remercier les leaders sortants des deux côtés pour leurs efforts et leur labeur, ainsi que pour avoir affronté les vicissitudes de la vie à mesure qu'elles se présentaient à eux.

Je voudrais enfin féliciter le nouveau « grand sénateur ». Au Royaume-Uni, le lord chancelier était connu aussi sous le nom de « grand chancelier », expression qui a disparu. Le Président n'est pas au fauteuil, je le sais, mais je regarde de ce côté dans l'espoir qu'il le sera sous peu. Peu importe. Il s'agit de hautes fonctions, qu'on appelait « hautes et grandes ». L'honorable Noël Kinsella est maintenant le « grand sénateur », et je profite de l'occasion pour l'en féliciter.

J'aimerais également préciser que le sénateur Kinsella est un homme extrêmement doué. Il a un don que j'admire énormément, celui des langues. Le Président du Sénat du Canada, en tant que représentant de la Reine à cette assemblée, est parfois appelé à représenter Sa Majesté à l'étranger.

Je tiens à féliciter le sénateur Kinsella et tous mes collègues du Sénat. Je vous souhaite la meilleure des chances pour l'année qui vient, même lorsque je serai en désaccord avec vous.

(1630)

Cela dit, j'invite tous les honorables sénateurs à adopter le projet de loi C-8.

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, plutôt que de remercier les mêmes personnes, permettez-moi de me joindre à la vice-présidente de notre Comité des finances nationales pour remercier tous ceux qui nous ont aidés à faire avancer ces travaux importants du Sénat. En particulier, je voudrais remercier l'honorable sénateur Cools de l'appui qu'elle m'a apporté, en tant que président, et de tout ce qu'elle a fait à titre de vice-présidente pour que nous puissions mener à bien le travail important de ce comité.

Honorables sénateurs, je voulais passer un certain temps à parler des mandats spéciaux du gouverneur général pour nous aider à comprendre tout ce processus, mais notre honorable collègue l'a fait tellement en profondeur et avec tant de compétence que je pense qu'il est inutile pour moi d'entrer dans les détails. Je suis tout à fait d'accord avec le sénateur Cools lorsqu'elle affirme que les dépenses de 15,6 milliards de dollars sont une question importante sur laquelle on doit se pencher, d'autant plus que de cette somme, 11,5 milliards de dollars seront dépensés au cours de cet exercice. Je le répète, le gouvernement n'aura plus de crédits le 15 mai et ainsi, il est urgent qu'on lui donne des crédits pour poursuivre ses activités après le 15 mai.

Madame le sénateur Cools a signalé qu'il est question de 11,5 milliards de dollars dans ce projet de loi de crédits. Le montant total de 43 milliards de dollars comprend la somme de 11,5 milliards de dollars et permet au gouvernement de tenir jusqu'au 15 mai. On peut voir les mandats spéciaux du gouverneur général pour la période allant du 1er avril au 15 mai comme des crédits provisoires en quelque sorte. Dans le cycle financier normal, nous aurions des crédits provisoires pour le premier jour de l'exercice jusqu'à la fin de juin. Nous aurions ensuite le total des crédits couvrant le reste de la période. À l'automne, nous aurions, au besoin, un budget supplémentaire des dépenses.

Dans ce cas-ci, nous avons eu des mandats spéciaux du gouverneur général et nous avons maintenant ce que nous appelons des crédits provisoires qui nous permettront de tenir en novembre et décembre. Nous débloquerons ensuite la totalité des crédits. Nous savons déjà que nous serons saisis d'un Budget supplémentaire des dépenses (A) important et de crédits supplémentaires élevés à l'automne pour refléter ce que nous avons déjà vu et peut-être d'autres postes contenus dans le budget du 2 mai. Il n'est question dans ce cas-ci que de certains changements de ministères que le gouvernement a annoncés. Des crédits sont transférés d'un ministère à un autre parce que le ministre à la tête de ce ministère a certaines responsabilités. Cela dit, ces documents ne reflètent pas les changements de politique importants du gouvernement.

Durant son examen du Budget principal des dépenses, le comité a étudié la proposition d'annexe au projet de loi de crédits. Dès que j'ai reçu ce projet de loi, le projet de loi C-8, j'ai vérifié si l'annexe figurant à la fin était la même que celle que nous étudions depuis plusieurs semaines dans le cadre de l'examen du budget des dépenses. Je puis vous assurer, honorables sénateurs, que tel est bien le cas.

Voilà qui explique peut-être en partie la raison pour laquelle nous ne passons pas autant de temps à étudier le projet de loi en tant que tel. Le Sénat traite habituellement de la question des crédits en une semaine. Le projet de loi de crédits nous a été transmis jeudi. Il y avait deux jours d'avis pour la deuxième lecture, que nous effectuons aujourd'hui et, présumément, si nous adoptons le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture aujourd'hui, nous passerons à la troisième lecture demain. Ce processus est à comparer au processus normal qui consiste à renvoyer le projet de loi au comité, après quoi ce dernier l'étudie et en fait rapport au Sénat. Or, nous avons déjà étudié le contenu par le biais du Budget principal des dépenses. Je continue de croire qu'il importe de respecter le processus normal.

Honorables sénateurs, j'ai certaines inquiétudes. Madame le sénateur Cools a lu l'ordre adopté à la Chambre des communes, où ce projet de loi a été étudié très rapidement. Les députés n'ont passé que quelques minutes à étudier la dépense de milliards de dollars des contribuables. Il importe que nous consacrions un certain temps à l'examen des dépenses proposées, même si nous n'avons pas vu l'ensemble des projets de dépense dans l'optique du gouvernement actuel. Nous pouvons quand même constater ce que seront en bonne partie des dépenses de base.

Honorables sénateurs, dans un article récent, on cite le chiffre de 200 milliards de dollars, en rapport avec le budget des dépenses. Ce montant englobe tout. Le budget, sans que l'on ne tienne compte des dépenses supplémentaires qui pourront nous être fournies à l'automne, prévoit des dépenses de 223 milliards de dollars. Or, nous votons actuellement en fonction d'une enveloppe de 200 milliards de dollars, par opposition aux 223 millions de dollars annoncés le 2 mai. Il reste un certain travail à faire, mais nous savons d'une façon générale dans quelle direction nous allons.

Durant la discussion avec le président du Conseil du Trésor, nous l'avons interrogé sur le coût des initiatives du nouveau gouvernement en matière de reddition de comptes. On nous a répondu que le budget prévoyait 57 millions de dollars pour le plan fédéral en matière de responsabilisation, et 16 millions de dollars de plus pour des activités de vérification interne.

L'une des promesses que nous souhaitons voir se concrétiser bientôt est la création d'un poste de directeur parlementaire du budget. Le projet de loi C-2, la Loi fédérale sur l'imputabilité, prévoit la création d'un tel poste, lequel relèverait de la Bibliothèque du Parlement. Le titulaire de ce poste est explicitement chargé d'effectuer des analyses se rapportant à l'examen parlementaire des budgets et il travaillera en collaboration avec les comités.

Nous nous inquiétions notamment, et nous nous en sommes plaints, de la vitesse à laquelle cette première étape de l'examen des dépenses gouvernementales était franchie ainsi que du manque de ressources à notre disposition pour bien nous acquitter de cette tâche. Je félicite le gouvernement d'avoir pris une telle initiative, qui aidera nos comités, tant à la Chambre des communes qu'au Sénat, à faire leur travail.

Je crains un peu que ce directeur parlementaire du budget concentre davantage ses efforts sur la Chambre des communes que sur le Sénat, et nous espérons que cette crainte ne se matérialise pas.

Honorables sénateurs, le rôle des mandataires du Parlement est d'aider les parlementaires. La Chambre des communes et le Sénat font leur part pour demander des comptes au gouvernement et à ses ministres, pour comprendre ce qu'ils font et pour leur poser des questions. Pour ce faire, nous avons besoin de ressources. Comme notre comité l'a cependant fait remarquer il y a un certain temps, cela crée un conflit d'intérêts quand le gouvernement établit les budgets et les salaires des parlementaires, des mandataires et des personnes qui sont censées travailler pour les parlementaires et les renseigner pour qu'ils soient en mesure d'exiger des comptes du gouvernement.

(1640)

Dans un effort pour dissiper cette préoccupation, on a créé un comité consultatif. Ce comité, avec des fonds puisés à même les budgets des mandataires du Parlement, a été créé à l'automne. Le président du Conseil du Trésor a dit qu'il continuera d'y faire appel pendant un an.

Le comité consultatif formule des recommandations au président du Conseil du Trésor au sujet des budgets destinés aux divers mandataires du Parlement — le commissaire à l'information, la commissaire aux langues officielles, la vérificatrice générale et tous les groupes et ministères que nous avons créés pour nous aider à accomplir notre travail. Ce comité consultatif conseillera le président du Conseil du Trésor sur ce qu'il jugera approprié.

Le problème, c'est qu'aucun sénateur ne siège à ce comité consultatif. Le Sénat n'en fait pas partie, mais nous sommes ceux qui effectuent la majeure partie de l'analyse préliminaire des dépenses gouvernementales proposées. À l'autre endroit, on accorde beaucoup d'attention aux Comptes publics après-coup — aux montants qui ont été dépensés et à la façon dont ils ont été utilisés. Nous tentons de les examiner avant, et nous avons besoin d'aide à cet égard. Nous devrions faire partie de ce comité consultatif. J'espère que madame le leader du gouvernement au Sénat prendra cette suggestion à cœur. Elle reflète une mentalité selon laquelle il se peut que le talent, la volonté et le désir de sénateurs d'oeuvrer à l'amélioration de l'administration publique ne soient ni reconnus ni appréciés lorsque divers comités et groupes consultatifs débattent certains dossiers.

En fait, un débat à l'égard du NORAD a eu lieu tout récemment à l'autre endroit. Au Sénat, nous avons des gens merveilleux qui s'intéressent de près à un dossier de ce genre et, pourtant, le gouvernement n'a pas jugé bon de demander quelque opinion du Sénat. Je souligne cet aspect en passant, car je constate la même chose en ce qui concerne le comité consultatif du Conseil du Trésor.

Honorables sénateurs, le comité continuera d'examiner les dépenses et les dépenses proposées dans un certain nombre de secteurs différents. Nous cherchons à encourager l'établissement de rapports horizontaux. Comme des fonds provenant de divers ministères sont destinés à un concept ou à une initiative, nous avons demandé la présentation de rapports financiers horizontaux afin que nous puissions être informés du coût global.

C'est votre comité qui s'est rendu compte le premier qu'il y avait des problèmes concernant un certain nombre d'activités dans le passé. Nous voulons continuer à avoir les dépenses bien en mains.

Nous approuvons tous la tenue des Jeux olympiques à Vancouver, mais nous ne voulons pas que la machine à dépenser s'emballe. Voilà pourquoi nous avons demandé des rapports horizontaux. Où donc sont les dépenses?

Par exemple, les coûts d'immobilisations et les coûts hérités des Olympiques de Vancouver ont premièrement été estimés à 310 millions de dollars. Puis, nous avons entendu dire que les coûts avaient augmenté et qu'ils étaient désormais de 497 millions de dollars. Nous nous attendons aujourd'hui à ce qu'une somme additionnelle de 235 millions de dollars soit demandée. Voilà ce qui se passe lorsqu'il n'y a pas de comptabilité horizontale. Nous ne savons pas combien d'argent est consacré à l'immigration ou à la sécurité. Nous espérons que cette nouvelle approche donnera de bons résultats.

Honorables sénateurs, la vice-présidente du Comité sénatorial permanent des finances nationales a donné un aperçu de l'ensemble du projet de loi. Elle a dit que le projet de loi prévoit l'autorisation de dépenses totalisant 43 milliards de dollars qui seront faites, dans la plupart des cas, d'ici novembre ou décembre. Certaines dépenses auront lieu encore plus tard parce que, pour certains ministères, les dépenses ne se répartissent pas également pendant l'exercice. Dans le cas du tourisme par exemple, il peut y avoir davantage de dépenses au cours de l'été. En agriculture, c'est au printemps ou à l'automne que l'on a surtout besoin d'argent. Divers ministères ont demandé davantage d'argent pour 10 ou 11 mois sur 12. Je prévois qu'à l'automne, nous allons voir un projet de loi de crédits demandant d'importantes sommes supplémentaires.

Honorables sénateurs, il est important de garder à l'esprit que cette somme de 43 milliards de dollars comprend les crédits provisoires de 11 milliards de dollars qui ont été accordés au gouvernement jusqu'au 15 mai sous forme de mandats spéciaux du gouverneur général, conformément aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques, pour couvrir la période chevauchant les élections et l'installation du nouveau gouvernement.

Dans l'ensemble, honorables sénateurs, c'est un projet de loi qu'il serait raisonnable pour nous d'appuyer à l'étape de la deuxième lecture. Je crois que d'autres sénateurs voudraient prendre la parole à propos de ce projet de loi. Si nous avons l'occasion d'adopter la motion de deuxième lecture de ce projet de loi aujourd'hui, je pense bien que nous allons passer au débat de troisième lecture dès demain.

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, plus tôt cet après-midi, le sénateur Joyal nous a permis de nous régaler par son récit de l'historique législatif du projet de loi C-4 qui a été adopté à la Chambre des communes après seulement 15 secondes. Je prends la parole maintenant dans le but de fournir à mon tour un compte rendu nécessairement bref du bref historique législatif du projet de loi C-8 à la Chambre des communes.

Le sénateur Cools a décrit l'essentiel des circonstances extraordinaires, sinon uniques, dans lesquelles ce projet de loi de crédits provisoires nous est présenté. La dissolution de la Chambre a entraîné l'arrêt des travaux parlementaires pendant une période chevauchant deux exercices financiers, et il a été nécessaire d'avoir recours à des mandats spéciaux du gouverneur général.

En outre, il était tout à fait compréhensible que la Chambre des communes et le gouvernement adoptent, le 4 avril, une motion visant à garantir que la Chambre des communes ait achevé son examen d'un projet de loi de crédits provisoires avant la fin de la séance du 3 mai. Tout cela ne me pose aucun problème.

Toutefois, le fait d'adopter cette motion le 4 avril a donné à la Chambre des communes un mois pour débattre du projet de loi de crédits provisoires ou pour soulever des questions à son sujet, si quelqu'un le souhaitait. On aurait pu penser qu'une brève affirmation de la surveillance du pouvoir de dépenser, ne serait-ce que pour la forme, aurait été de mise, puisqu'il s'agit ici d'environ 43,5 milliards de dollars de fonds publics — eh bien! non. Ils ont amorcé le débat sur ce projet de loi à 18 h 15 le 3 mai. Ils ont franchi les première, deuxième et troisième lectures en l'espace de quelques secondes. En comité plénier, ils ont approuvé sept articles et quatre annexes, ont adopté le texte en troisième lecture, et puis voilà! Il n'y a eu aucune question de fond, aucun élément présenté à des fins de débat; c'en était fini de l'examen du projet de loi, qui se dirigeait vers le Sénat.

Je me serais attendu à ce que quelqu'un pose une question au sujet du montant de 15 milliards de dollars en mandats du gouverneur général qui avaient été approuvés par le gouvernement Martin sortant et par le nouveau gouvernement Harper après la dissolution. Peut-être, même, quelqu'un aurait-il pu poser une question à propos de l'augmentation de 266 millions de dollars du budget des dépenses du ministère du Patrimoine canadien — dont la plus grande partie était destinée aux Jeux olympiques de Vancouver de 2010. Je pourrais évoquer d'autres exemples. Toutefois, aucune question n'a été posée et il n'y a eu aucun débat sur quoi que ce soit.

Permettez-moi de le répéter : comme nous l'avons vu dans le rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales, que nous avons adopté plus tôt aujourd'hui, toutes ces questions ont été examinées de manière approfondie — compte tenu de l'état actuel des choses — par notre comité en présence, d'abord, de fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor, puis, à l'occasion d'une deuxième réunion, en compagnie de l'honorable président du Conseil du Trésor, M. Baird, présent pour répondre à nos questions. Il y a répondu de façon très satisfaisante. Nous sommes saisis de ce budget des dépenses et nous le garderons à l'étude jusqu'au 31 mars 2007. Nous continuerons de faire le travail que la Chambre des communes semble incapable de faire pour critiquer et examiner les plans de dépense du gouvernement.

(1650)

Je trouve un peu ironique qu'à l'autre endroit les députés aient pris l'initiative de critiquer le Sénat et de se présenter comme étant les vigilants protecteurs du Trésor et de l'intérêt public, alors que le Sénat continue de travailler dans l'ombre pour faire le travail que les Pères de la Confédération avaient prévu pour nous.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Cools, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

LE DISCOURS DU TRÔNE

MOTION D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Champagne, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Segal, relative à l'Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la première session de la trente-neuvième législature.—(8e jour de la reprise du débat)

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, le discours du Trône donne au gouvernement la chance d'établir ses priorités et ses plans pour la session parlementaire qui commence. La déclaration est lue aux parlementaires par Son Excellence la Gouverneure générale afin d'informer les parlementaires sur ce à quoi ils peuvent s'attendre au cours des mois à venir — les initiatives et les priorités qu'on nous demandera de discuter, d'appuyer et finalement d'approuver ou de rejeter.

Certes, le discours du Trône s'inscrit dans la tradition parlementaire, mais il s'adresse à la population du Canada, notamment lorsque c'est la première fois qu'un gouvernement nouvellement élu a l'occasion de parler officiellement aux Canadiens. Les Canadiens veulent savoir non seulement ce que le gouvernement projette de faire durant le mandat qui lui a été accordé, mais encore avoir une idée de la façon dont il entend gouverner, de sa nature et de sa vision pour le Canada. Que sera notre Canada? Que sera notre qualité de vie?

La question qui nous préoccupe d'une façon particulière dans le discours du Trône, et elle a déjà été soulignée par un certain nombre de sénateurs, concerne le plan du gouvernement pour la garde d'enfants ou son plan pour l'absence de choix en matière de garde d'enfants.

En tant que mère ayant éprouvé des difficultés pour faire garder mes deux enfants, et en tant que grand-mère de mon petit-fils, Ayaan, et ex-présidente de la YWCA du Canada, je me préoccupe vivement de cet élément du discours du Trône. Je parlerai aux sénateurs des réalités de ce que représente le fait d'élever des enfants.

Le discours du Trône et le plan budgétaire qui ont été présentés suscitent chez moi de grandes inquiétudes quant à l'avenir de la garde d'enfants au Canada. Quand on parle du développement de nos enfants et des soins qui leur sont prodigués, on doit avoir une approche équilibrée qui accorde des choix individuels et l'égalité des possibilités à tous les Canadiens. Cela ne peut être accompli que dans le contexte d'un programme national intégré et axé sur les besoins, un programme qui assure l'offre et la qualité de services de garde, quelle que soit la situation économique des intéressés. Surtout, une stratégie nationale de garde d'enfants doit susciter une conscience communautaire par laquelle les nouveaux parents estiment jouir du soutien et des choix voulus pour assurer le meilleur départ possible à leurs enfants dans la vie. La garde d'enfants, ce n'est pas seulement prendre soin des enfants durant le jour; c'est aussi le développement de nos enfants et l'avenir des Canadiens qui contribueront à nous soutenir. Il nous incombe d'offrir à nos enfants des services d'apprentissage de la petite enfance pour les préparer au système scolaire structuré.

Une des premières choses que nous devons faire comme pays, c'est oublier l'idée que nos politiques de garde d'enfants devraient consister à chercher une place où caser nos enfants durant la journée jusqu'à ce que nous ayons fini de travailler. Les parents nous diront que la vraie garde d'enfants, c'est s'occuper du développement de l'enfant d'une manière holistique répondant à ses besoins sociaux, émotifs et intellectuels.

Honorables sénateurs, la garde d'enfants peut prendre divers aspects. Il peut s'agir d'une famille vivant dans une réserve; il peut s'agir d'une mère célibataire travaillant la nuit; il peut s'agir d'une famille de Vancouver ayant besoin de deux salaires pour joindre les deux bouts; ou il peut s'agir d'une mère de Toronto qui reste à la maison et qui veut un soutien professionnel de qualité pour assurer le meilleur départ possible de ses enfants dans la vie.

Beaucoup d'orateurs ont parlé de priorités. De toute évidence, le gouvernement a choisi ses priorités, mais il ne doit pas perdre de vue que chacun des 30 millions d'habitants du pays a aussi ses propres priorités. Même si certaines peuvent correspondre à celles du gouvernement, ce ne sera pas le cas de toutes. Le Canada est un pays complexe qui a besoin de politiques complexes bien conçues pour tout le monde, et pas seulement pour de rares élus. Pour développer nos chefs futurs, nous avons besoin d'un programme intégré de garde d'enfants qui constitue une priorité pour le gouvernement, comme c'est le cas pour les Canadiens.

Honorables sénateurs, j'ai conservé une image qui restera à jamais gravée dans mon esprit : celle du ministre des Finances lisant le discours du budget 2006 à l'autre endroit. Il a eu droit à une ovation debout lorsqu'il a annoncé que le gouvernement investirait dans la création de plus de places dans les prisons et dans l'embauche de 1 000 agents de police supplémentaires. Il n'y a pas de doute que la sécurité publique est importante, mais il est encore plus important de veiller à ce que chaque enfant au Canada prenne le meilleur départ possible. En agissant en ce sens, peut-être n'aurons-nous pas besoin d'autant de places en prison à l'avenir.

Honorables sénateurs, nous devons investir dans nos enfants maintenant. Autrement, nous allons devoir continuer à construire plus de prisons à l'avenir. Ce n'est pas le Canada que les Canadiens souhaitent. Par conséquent, il est extraordinairement important que notre stratégie de garde d'enfants comprenne un programme intégré d'éducation préscolaire et de garde d'enfants.

Beaucoup d'honorables sénateurs ont attiré l'attention sur les conclusions d'une récente étude de la YWCA sur l'éducation préscolaire et la garde d'enfants. L'association exhorte les parlementaires à agir pour protéger ce qu'elle appelle « un programme national en plein essor ». Je suis tout à fait d'accord. Voilà pourquoi je suis consternée par ce que j'ai vu dans le discours du Trône et dans le budget 2006. Ce que j'ai vu, ce n'est pas un programme de garde d'enfants, c'est plutôt un programme qui offre aux parents une petite somme pour continuer à se faire la concurrence tandis qu'on maintient le statu quo.

Le projet de la YWCA révèle les difficultés que connaissent actuellement les parents. Ils doivent se battre pour trouver une bonne garderie et doivent souvent attendre très longtemps qu'une place se libère ou sont alors obligés d'accepter des services de garde bien en deçà des normes qu'ils souhaitent pour leurs enfants.

Permettez-moi, honorables sénateurs, de vous faire part de certains des problèmes que les parents doivent affronter. Je crois que cela nous aidera à saisir la réalité et à comprendre les défis que comporte la garde de nos enfants.

Voici l'histoire d'une femme à qui j'ai parlé récemment à Toronto. Je vous cite ses propres paroles :

J'ai commencé ma recherche d'une garderie en octobre 2005 alors que j'étais enceinte de deux mois. On pourrait croire que ce délai était suffisant pour trouver une place. Malheureusement, ce n'était pas le cas. Je suis inscrite sur la liste d'attente de toutes les garderies que j'ai visitées, et certaines de ces listes comportent une attente comprise entre 18 mois et trois ans. La surveillante d'une garderie m'a dit que 80 p. 100 des personnes inscrites sur la liste n'obtiennent pas une place.

(1700)

J'ai demandé à la surveillante à quoi cela servait d'avoir une liste d'attente et de faire payer un droit à ceux qui s'inscrivent. La vraie question est de savoir pourquoi chacune des garderies que j'ai approchées avait une liste d'attente. De toute évidence, le nombre des femmes qui souhaitent recommencer à travailler ou qui sont obligées de le faire est inversement proportionnel au nombre de places qui restent en garderie.

Malheureusement, une allocation de 1 200 $ par an ne réglera pas le problème. Je devrais avoir la possibilité de recommencer à travailler et de pouvoir m'adresser à une garderie de qualité. Sans une place en garderie, je suis privée de cette possibilité.

Les soins de qualité sont une autre affaire. Pourquoi y a-t-il des écarts entre les différents fournisseurs de services de garde d'enfants sur les plans de la qualité des aliments, des programmes d'éducation et des installations? J'ai vu des places extraordinaires et d'autres qui l'étaient beaucoup moins. Je n'enverrai sûrement pas ma fille à un endroit où les soins sont d'une qualité douteuse.

Toutefois, certaines familles n'ont pas ce choix, ce qui est vraiment malheureux.

Honorables sénateurs, une politique intégrée de garde d'enfants doit viser non seulement à donner aux parents le choix, mais aussi à leur donner la possibilité de faire le choix qu'ils souhaitent. Nous devons trouver un certain équilibre entre les besoins de l'individu et la volonté d'établir des normes nationales permettant à tous les Canadiens d'accéder à des programmes de qualité pour l'éducation préscolaire et le développement des enfants.

La politique du gouvernement n'établit pas l'équilibre entre les besoins pressants des individus et le besoin de normes nationales garantissant à tous les enfants les meilleurs soins possibles. Le gouvernement prétend offrir un choix aux parents. En réalité, il leur enlève la possibilité de faire les choix qu'ils veulent pour leurs enfants.

Honorables sénateurs, laisser la garde de nos enfants à la merci du marché ne garantira pas l'adoption de normes nationales et ne permettra pas de créer les places de garderie dont les parents ont désespérément besoin. Encore une fois, le gouvernement ne donne pas un choix aux parents. Au contraire, il leur enlève la possibilité de choisir.

Honorables sénateurs, je crois que nous serons tous d'accord que ce n'est pas là la façon dont nous voulons élever nos enfants. La YWCA, qui constitue le deuxième fournisseur de services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants au Canada, est d'avis qu'il incombe au gouvernement de financer ces services. La YWCA nous demande d'adopter des mesures législatives pour garantir des services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants qui soient d'une grande qualité et accessibles pour tous, indépendamment de la situation socioéconomique. Nous n'avons rien de cela devant nous aujourd'hui.

La YWCA demande de la cohérence dans les services, la création d'incitatifs pour que les provinces et les territoires intègrent leurs systèmes afin de créer un programme sans but lucratif à financement public. Ce n'est pas ce que nous avons devant nous aujourd'hui.

La YWCA recommande que tous les ordres de gouvernement concentrent leurs efforts sur l'élaboration d'une politique publique cohérente qui appuie la formation de professionnels qualifiés en éducation préscolaire et en garde d'enfants. Nous n'avons rien de cela aujourd'hui.

Au lieu d'avoir cela, le gouvernement dénonce les accords conclus avec les provinces. En fait, rien de ce dont nous sommes saisis aujourd'hui ne vise à créer un programme national intégré de garde d'enfants.

Je voudrais encore une fois faire part aux sénateurs d'une histoire personnelle, une histoire qui, pour moi, montre les importantes répercussions que des services de garde de qualité peuvent avoir sur les parents du Canada.

Récemment, une mère de trois enfants professeure de la septième année a fait part de son expérience. Elle a dit que non seulement il avait été important pour le développement de ses propres enfants qu'il y ait eu des éducateurs professionnels de qualité pour l'aider au fil des ans, mais aussi qu'il avait été important pour elle-même de continuer à enseigner à d'autres jeunes Canadiens. Malheureusement, cette maman avait dû lutter pour que ses enfants aient accès aux services de garde qu'elle voulait pour eux. Elle avait dû faire face au manque de places en garderie, surtout dans le cas de son plus jeune fils. Elle a raconté ce qui suit:

Au début de l'automne 2001, nous étions 60e sur la liste d'attente d'une garderie pour l'inscription de septembre 2002. Nous étions désespérés. À un moment donné, nous sommes passés de la 11e place à la 7e place sur la liste d'attente d'un centre excellent. Le temps commençait à presser. Ce devait être en mars ou en avril. C'est alors que nous avons découvert une garderie qui était située à proximité de la maison, dans un environnement calme et agréable, dont le personnel était extraordinaire et où nous étions 3e sur la liste d'attente.

Nous avions presque eu le gros lot, mais pas tout à fait. Je me souviens de ma visite. Je me suis conduite de mon mieux. Je craignais tellement de ne pas faire bonne impression. Ayant téléphoné si souvent pour rappeler que j'existais, je m'étonne encore de la chance que nous avons eue d'obtenir une place. Dès le départ, j'ai su que l'expérience serait bonne. Et elle l'a été.

Mes enfants y ont reçu une attention extraordinaire. J'avais vraiment apprécié nos deux gardiennes. Mais à la garderie, c'était différent. Les éducatrices avaient suivi une formation professionnelle. Non seulement elles connaissaient bien les besoins de développement de mes enfants, mais elles possédaient l'expérience nécessaire pour me rassurer quotidiennement en me disant que je n'étais pas une mauvaise personne du fait que j'avais opté pour une autre occupation en plus de mon rôle de mère.

Peu importait ma décision, certains jours, j'avais les larmes aux yeux en quittant mes bébés, qui pleuraient eux-mêmes à l'occasion — en particulier ma fille, qui avait passé plus de temps avec moi. Je téléphonais à la garderie quelques minutes après m'être mise en route vers l'école pour apprendre que ma fille avait cessé de pleurer dès que j'étais sortie et qu'elle s'amusait à l'ordinateur avec ses « amis ». Et quand elles entendaient les larmes de culpabilité dans ma voix, ces merveilleuses éducatrices approuvaient toujours ma décision d'enseigner — elles ne m'ont jamais donné à croire que je fuyais ma responsabilité de mère.

Honorables sénateurs, voilà les choix à offrir aux parents canadiens. Nos enfants méritent le meilleur système de garde qui soit. Un proverbe vient du continent africain où je suis née, selon lequel: « Il faut tout un village pour élever un enfant. » C'est justement cet esprit que nous devrions promouvoir quand nous tentons d'élaborer une politique sur la garde d'enfants.

Les parents sont les personnes les plus importantes dans la vie d'un enfant, mais je connais peu de Canadiens qui désirent relever le défi d'élever des enfants sans le soutien d'une communauté aimante d'amis et de parents. Je ne serais pas ici si je n'avais pas pu compter sur l'aide de mes amis et de ma famille pour élever mes enfants. Je sais que mon fils et sa femme voudront élever mon petit-fils, Ayaan, avec le soutien d'une communauté aimante de parents et d'amis. J'espère qu'ils le pourront.

Honorables sénateurs, les noms de mon fils et de sa femme figurent sur une liste d'attente pour une place en garderie.

Le sénateur Stratton : Depuis quand?

Le sénateur Jaffer : Ils ont mis leur nom sur une liste d'attente pour une place en garderie un mois...

Son Honneur le Président : Si madame le sénateur demande la permission de continuer, elle obtiendra peut-être le consentement de l'assemblée.

Le sénateur Comeau : Cinq minutes maximum.

Le sénateur Robichaud : Dix minutes. C'est un bon discours!

Le sénateur Jaffer : Honorables sénateurs, mon fils et sa femme ont inscrit leur nom sur une liste d'attente pour une place en garderie.

Le sénateur Stratton : Depuis quand?

Le sénateur Jaffer : Ils ont inscrit leur nom sur de nombreuses listes d'attente de garderies lorsque ma bru était enceinte d'un mois. Elle aura besoin d'une place en garderie en mai 2007. Huit garderies lui ont dit que ses chances d'avoir une place étaient minces.

Le Canada est un vaste pays multiculturel. Il comprend des gens de toutes les générations et de toutes origines. Nos objectifs sont plus diversifiés et les moyens que nous employons pour les atteindre ont évolué. Les nouveaux parents doivent parfois déménager pour trouver les meilleurs emplois possibles et leurs familles ne sont pas toujours à proximité pour les aider lorsqu'ils mettent un enfant au monde. Par conséquent, les parents doivent savoir qu'il existe un esprit de communauté dans le développement de l'enfant. Ils doivent sentir qu'ils sont aidés de personnes qualifiées et aimantes. Les parents doivent avoir accès à ces ressources. Ils doivent pouvoir élever leur enfant dans un esprit de communauté.

Toute stratégie nationale sur la garde des enfants doit tenir compte de cet aspect. Ce dont nous sommes saisis aujourd'hui est loin de le faire. Le plan annoncé dans le discours du Trône n'établit pas d'équilibre répondant aux besoins des gens. Il ne garantit pas un accès aux places voulues ni le soutien aux parents de l'ensemble du pays. En outre, il n'offre aucune occasion aux enfants de développer l'ensemble de leurs capacités.

(1710)

Les parents dont je vous ai raconté l'histoire aujourd'hui n'auront pas le loisir de choisir parmi ces options en vertu du plan dont nous sommes saisis aujourd'hui. En tant que Canadienne et grand-mère depuis peu, je demande instamment au gouvernement de faire les choix appropriés et de retenir les priorités qui s'imposent pour le bien de nos enfants. En effet, nous pouvons soit payer maintenant ou payer plus tard, mais pour construire de nouvelles cellules carcérales.

Il faut tirer parti des ententes existantes et du consensus qui lie les divers ordres de gouvernement. Nous devons avoir le courage de mettre au point un programme intégré de garderies pouvant satisfaire les besoins individuels, créer des places dans des garderies de qualité suivant des normes intégrées strictes et instaurer un esprit communautaire dans lequel nos enfants sont assurés de prendre le meilleur départ possible dans la vie.

Honorables sénateurs, j'ai gravé dans mon esprit l'image du ministre des Finances lorsqu'il a pris la parole pour annoncer la construction de nouvelles cellules carcérales. Je l'ai vu annoncer qu'il investirait pour embaucher 1 000 agents de police et construire de nouvelles prisons. Il a eu droit à une ovation de la part de son caucus. Honorables sénateurs, je rêve du jour où le ministre des Finances annoncera non seulement un programme de garderies, mais aussi un programme intégré d'éducation préscolaire et de développement des jeunes enfants. Je crois que les deux côtés de la Chambre des communes, de même que tous les sénateurs et les parents de tout le Canada lui feront une ovation ce jour-là, car une telle mesure contribuera à l'établissement d'une communauté saine pour nous tous.

Honorables sénateurs, nous devons au moins cela à nos enfants. Ils ne sont pas seulement des êtres qui nous sont chers. Ils sont également notre avenir. Ils poursuivront la construction de ce grand pays.

L'honorable Jane Cordy : Puis-je poser une question à l'honorable sénateur?

Son Honneur le Président : Il ne reste qu'une minute.

Le sénateur Cordy : Je remercie l'honorable sénateur de son excellent discours. Comme je travaillais tout en élevant mes enfants, j'attache une grande importance à la question des garderies. Je pense également que le prétendu programme de services de garde de ce gouvernement n'est pas un programme de garderies, mais plutôt une nouvelle mouture du programme d'allocations familiales aboli par le gouvernement Mulroney, probablement parce qu'il n'était d'aucune aide pour ceux qui en avaient besoin.

La ministre responsable du dossier de la garde d'enfants a parlé de choix, tout comme madame le sénateur dans son discours aujourd'hui. Je suis d'accord pour dire que les familles à revenu élevé ont le choix. Dans leur cas, une allocation de 100 $ par mois pour rester à la maison peut être avantageuse. Cependant, quel choix une allocation de 100 $ par mois avant impôt laisse-t-elle...

Son Honneur le Président : Le temps supplémentaire alloué est écoulé.

[Français]

L'honorable Daniel Hays (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, je me réjouis de cette occasion de participer à ce débat en réponse au discours du Trône. Comme certains l'ont souligné, c'est la première fois en 13 ans qu'un gouvernement conservateur est en position d'offrir un tel plan d'action. Or, il tarde aux sénateurs de ce côté-ci de la Chambre d'offrir au gouvernement des conseils, commentaires, voire des critiques, dans le but d'assurer qu'il respecte ses engagements, qu'il garde le droit chemin et qu'il tienne compte de l'intérêt, de la volonté et du bien-être de tous les Canadiens.

J'aimerais tout d'abord féliciter madame le sénateur LeBreton pour sa nomination au poste de leader du gouvernement au Sénat. Elle est une collègue accessible, efficace et pour laquelle j'ai beaucoup d'estime. Même si nos rôles exigent souvent que nous croisions le fer, j'ose croire que nous pourrons régler nombre de différends tout en cherchant les compromis et les ententes qui sont dans le meilleur intérêt de tous les Canadiens.

[Traduction]

Je félicite encore une fois le sénateur Comeau et le sénateur Stratton de leur nomination. J'ai travaillé avec eux par le passé et je me réjouis à la perspective de continuer à le faire à l'avenir.

Dans l'intérêt de la grande famille des conservateurs, j'aimerais aussi féliciter mon député, le très honorable Stephen Harper, de sa victoire. C'est la première fois que la circonscription de Calgary- Sud-Ouest est représentée par un premier ministre. Même si je suis tenu d'assumer mon rôle de leader de l'opposition au Sénat, je partage l'admiration que les gens de Calgary éprouvent face à son succès.

J'aimerais également féliciter et remercier les sénateurs qui ont proposé et appuyé l'Adresse en réponse au discours du Trône des discours qu'ils ont prononcés avant les vacances de Pâques. Je les félicite d'avoir lancé le débat sur une note aussi positive. Le sénateur Segal et madame le sénateur Champagne honorent cette Chambre par leur passion, leur éloquence, leur intelligence et leur expérience.

Même si, de ce côté-ci, nous sommes souvent en désaccord avec eux sur des questions de politique, de stratégie et de démarche, nous les tenons néanmoins en haute estime et accordons la plus haute importance à leur contribution. Nous les félicitons du dévouement avec lequel ils s'acquittent de leur charge publique.

Honorables sénateurs, je tiens à remercier mes collègues du caucus libéral de la confiance qu'ils m'ont témoignée en me demandant d'agir à titre de leader de l'opposition. Je suivrai les traces du sénateur Allan MacEachen et du regretté sénateur Royce Frith, qui ont dirigé l'opposition alors que j'étais moi-même sénateur. Ce sont deux des meilleurs parlementaires et des meilleurs libéraux que j'ai eu la chance de côtoyer dans mon travail. Je remercie aussi ceux qui ont dirigé le gouvernement, quand j'en faisais partie, de leur contribution importante et inestimable.

Je suis très touché par la confiance manifestée à mon égard. Je m'efforcerai d'être digne de cette confiance et je m'engage à défendre les valeurs, les idéaux et la philosophie qui nous unissent au sein de notre parti et qui ont contribué à l'édification de notre pays. Par ailleurs, je suis fier d'être associé au Parti libéral, non seulement en raison du leadership exceptionnel que le parti a fourni à notre pays au fil des ans et du fait qu'il s'agit de l'organisation politique qui a connu le plus de succès depuis la Confédération, mais aussi parce que le parti a jeté une bonne partie des bases qui ont fait du Canada une des sociétés les plus progressistes, les plus tolérantes, les plus libres et les plus éclairées au monde. Des soins de santé aux pensions de vieillesse, de l'assurance-emploi à la Loi sur les langues officielles, des prêts étudiants à la Charte des droits et libertés et à la responsabilité financière, le Parti libéral a conçu et appliqué des mesures et des programmes qui font maintenant inextricablement partie du tissu de notre nation.

Le Parti libéral a toujours été le parti de la réforme et du progrès, le parti qui a reconnu le potentiel de notre pays et qui, plus que tout autre, a su le mettre en valeur, le développer et l'encourager. Il demeure le parti de ceux qui visent à éliminer les injustices, à explorer de nouveaux horizons et à créer de nouvelles occasions.

Je salue et je félicite les premiers ministres libéraux que j'ai eu le privilège de servir, c'est-à-dire Pierre Trudeau, John Turner, Jean Chrétien et Paul Martin, pour leur grande contribution.

Même si nous sommes actuellement dans l'opposition, nous demeurons fiers de nos réalisations, convaincus des principes libéraux et inspirés par les idéaux libéraux. Nous continuerons de nous appuyer sur ces éléments dans l'examen des programmes et des projets de loi du nouveau gouvernement quand nous lui rappellerons ses engagements et que nous l'inciterons à passer à l'action tout en lui demandant de rendre des comptes.

[Français]

Le rôle que nous entendons jouer de ce côté-ci de la Chambre, honorables sénateurs, devra viser à maintenir l'équilibre entre notre devoir de s'opposer au gouvernement, de proposer des amendements, et d'offrir des solutions de rechange avec la responsabilité qu'a celui-ci de gouverner.

Au Sénat, la majorité libérale a l'important devoir d'exercer sa fonction sans toutefois fermer les yeux sur la volonté populaire, qui a confié aux conservateurs la pluralité — et non la majorité — des sièges à la Chambre des communes.

Cependant, la minorité conservatrice au Sénat doit tenir compte de la réalité du nombre. Comme l'a si bien dit mon prédécesseur, Allan MacEachen :

Dans notre système, toute assemblée législative fonctionne sur le principe de la majorité, et le Sénat ne fait pas exception.

Tout en évitant la confrontation et son contraire, la complaisance, nous remplirons notre devoir, qui est de protéger l'intérêt et le bien- être de tous les Canadiens avec vigilance et empressement.

(1720)

[Traduction]

Honorables sénateurs, il y a plus d'un mois, le discours du Trône a été prononcé ici même. Il constituait un aperçu des plans du nouveau gouvernement conservateur pour la prochaine législature, des plans axés sur un projet de loi sur la responsabilité, sur la réduction de la TPS, sur une allocation pour la garde d'enfants, sur le durcissement des peines pour les criminels et sur une garantie de délais d'attente pour les patients. De plus, le discours du Trône contenait des références à une réforme parlementaire, à l'unité nationale et au renforcement de notre influence à l'échelle internationale.

Bien que, selon nous, le discours du Trône contienne certaines propositions positives, nous sommes préoccupés par ses nombreuses lacunes et omissions. Mes collègues les ont déjà bien expliquées.

Nous sommes conscients que le gouvernement a entrepris — pour reprendre sa propre expression — de suivre une nouvelle feuille de route, de changer les façons de faire, de défendre le Canada et de prendre ses distances par rapport au gouvernement précédent. Par contre, nous remarquons que sa nouvelle feuille de route ne contient pas beaucoup de mots.

De plus, d'éminents analystes politiques ont fait part de leurs sérieuses réserves à propos des cinq mesures présentées dans le discours du Trône. Certains sont même allés jusqu'à les qualifier de « douteuses sur le plan de la substance ».

Tout au long de la campagne électorale, les Canadiens ont entendu le chef du Parti conservateur dire à quel point le gouvernement et les politiciens devaient être tenus en laisse, être comptables de leurs actes et être soumis à des directives plus strictes en matière d'éthique. Je rappelle à mes collègues d'en face que c'est le gouvernement libéral qui a pris les mesures nécessaires pour veiller à ce que les responsables du scandale des commandites fassent l'objet d'un examen public approfondi et qu'ils subissent les conséquences juridiques de leurs actes.

J'ai remarqué que le premier ministre, dans l'adresse en réponse au discours du Trône, a sans doute été un peu loin lorsqu'il a tenté de rendre tous les libéraux coupables par association pour des gestes commis par un très petit groupe de personnes.

Le moyen que les conservateurs ont choisi pour apporter des changements est un plan en cinq points, un engagement de mettre en œuvre une loi sur la responsabilité donnant des pouvoirs aux mandataires indépendants du Parlement, rendant le gouvernement plus transparent, éliminant le lobbying d'initiés et établissant de meilleures mesures de contrôle du financement des partis politiques. L'objectif global de ce plan est de rétablir la crédibilité du gouvernement et la confiance du public à son égard.

Honorables sénateurs, notre parti appuie nombre des mesures que propose le gouvernement, particulièrement lorsqu'elles visent à améliorer les services aux Canadiens et à améliorer leur confiance à l'égard du gouvernement. Toutefois, nous estimons également que pour gagner la confiance des Canadiens, il est essentiel, dans un premier temps, d'améliorer la responsabilité du gouvernement en assortissant les promesses de mesures concrètes.

Le gouvernement a argumenté avec vigueur à l'égard de certaines questions au cours de la campagne électorale, mais on remarque certaines incohérences entre ce qu'il a prêché et ce qu'il met en pratique. Notons en particulier les engagements du gouvernement à l'égard de l'élection des sénateurs. Soulignons également que la nomination à titre de ministre de la Défense nationale d'un lobbyiste dans le secteur de la défense entre en contradiction avec les déclarations du premier ministre au sujet des lobbyistes, à l'époque où il faisait partie de l'opposition et pendant la campagne électorale.

La section du discours du Trône sur la responsabilité contient une disposition d'intérêt particulier, en l'occurrence la section qui porte sur les engagements d'améliorer l'accès à la Loi sur l'accès à l'information. Pendant la campagne électorale, les conservateurs ont promis de donner au commissaire à l'information le pouvoir légal d'exiger la publication de documents publics, d'élargir son pouvoir à presque toutes les organisations publiques et de veiller à ce que les fonctionnaires créent les dossiers nécessaires pour documenter leurs actes et leurs décisions. Toutefois, dans un rapport spécial déposé le 28 avril, suite à la présentation de la Loi fédérale sur l'imputabilité, le commissaire à l'information, John Reid, a exprimé de sérieuses préoccupations et a dit que depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'accès à l'information, en 1983, aucun gouvernement n'avait mis en avant des propositions aussi rétrogrades et aussi dangereuses. Le commissaire a déclaré que les conservateurs ont tenu un discours différent lorsqu'ils étaient dans l'opposition et pendant la campagne électorale et qu'ils présentent autre chose maintenant qu'ils sont au pouvoir.

Outre la responsabilité, une autre page du discours du Trône et dans le plan en cinq points du gouvernement conservateur est l'engagement de réduire de 1 p. 100 la taxe sur les produits et services. Les sénateurs libéraux estiment qu'il faut alléger le fardeau fiscal. Le gouvernement précédent a pris des mesures sérieuses à ce chapitre, notamment la mise en œuvre d'une réduction d'impôt de 100 milliards de dollars, la plus importante réduction d'impôt de toute l'histoire canadienne, comme l'a souligné le chef de l'opposition à l'autre endroit. Toutefois, nous estimons que de telles réductions doivent reposer sur une saine politique économique.

[Français]

Ainsi, comme l'ont fait savoir des fonctionnaires du ministère des Finances, une réduction de la TPS est le moins efficace des allégements fiscaux, alors qu'une réduction de l'impôt sur le revenu a des effets trois fois plus importants en ce qui a trait à la prospérité et au bien-être des Canadiens.

L'Association canadienne d'études fiscales estime que les réductions d'impôt sur le revenu seront deux fois plus avantageuses pour la classe moyenne que la baisse de la TPS.

Honorables sénateurs, je noterai, à ce stade, que le gouvernement Harper compensera cette réduction de la TPS en éliminant des mesures présentées par le gouvernement précédent, mesures comprenant la hausse de 500 dollars dans l'exonération d'impôt sur le revenu des particuliers.

Le gouvernement annulera également la réduction dans le taux d'imposition sur le revenu des particuliers, mesure qui avait fait passer de 16 à 15 p. 100 le taux d'imposition le plus bas.

Dans le budget, ils ont fixé ce taux à 15,5 p. 100, ce qui a pour effet d'augmenter les impôts.

Par ailleurs, cette réduction de la TPS aura peu d'effet sur notre économie, si ce n'est que de stimuler la consommation, au moment où les économistes s'entendent sur le fait que l'investissement et l'épargne seraient plus bénéfiques. Elle aidera les familles mieux nanties aux dépens de celles qui sont pauvres ou qui gagnent un revenu moyen.

Bref, cette réduction d'impôt ne favorise pas l'intérêt économique de l'ensemble de nos concitoyens. Il s'agit plutôt d'une mesure qui tente de leurrer les Canadiens, une mesure mise sur pied pour respecter une promesse électorale mal conçue, une mesure qui ne relève ni d'une bonne politique sociale ni d'une bonne politique économique.

[Traduction]

L'élément suivant, dans le budget en cinq points du gouvernement conservateur, et peut-être le plus controversé, comme nous avons pu l'entendre aujourd'hui, est la politique sur la garde des enfants, qui prévoit une allocation imposable de 1 200 $ pour chaque enfant de moins de six ans. La nouvelle proposition du gouvernement prévoit aussi des crédits destinés à encourager les entreprises à créer des places en garderie sur les lieux de travail et au sein de la collectivité.

Pour créer ce système, les conservateurs se sont engagés à mettre fin au programme national de garderies que notre gouvernement libéral avait conçu en collaboration avec chacune des dix provinces. Ce programme avait été conçu en fonction d'un consensus national sur l'apprentissage préscolaire et la garde des enfants. On avait établi à cette fin des principes clairs et des objectifs mesurables, et on s'était assuré de la collaboration des gouvernements provinciaux en ce qui a trait au partage des connaissances et des pratiques exemplaires.

Toutefois, les conservateurs considéraient ce programme national comme une intrusion injustifiée dans la vie familiale. Ils ont donc donné avis qu'ils annuleraient les ententes.

Le fait de remettre un chèque de 1 200 $ peut être populaire, mais si l'on examine les chiffres, on se rend compte que ce programme fait bien peu pour assurer des services de garde convenables. Il vaut la peine de répéter ici que le Caledon Institute of Social Policy estime qu'un couple ayant deux revenus et gagnant 36 000 $, soit un revenu à peine supérieur au niveau de la pauvreté, ne conservera que 420 $ des 1 200 $, une fois l'impôt perçu sur ses avantages sociaux. Pour simplifier, disons que son allocation pour la garde des enfants ne représenterait plus que 1,60 $ par jour. Même si l'on prend maintenant le cas d'une famille dont les deux parents travaillent et où le parent ayant le plus petit salaire gagne 40 000 $, à qui il resterait 4 $ par jour, cette somme ne couvre même pas une partie notable du coût des services de garde de qualité.

On faisait remarquer dans le Globe and Mail, le mois dernier, qu'on ne peut qualifier de plan, ni même d'embryon de plan, une allocation représentant entre 1,60 $ et 4 $ par jour par enfant pour un service comme la garde des enfants.

Honorables sénateurs, bien que nous soyons, de notre côté, fondamentalement opposés à la conception qu'a le gouvernement de la garde des enfants, nous apprécions quand même et nous appuyons ses propositions de garanties sur les délais d'attente en vue d'améliorer notre système de soins de santé.

(1730)

De surcroît, nous sommes particulièrement fiers du fait que le gouvernement se soit engagé à maintenir la politique instaurée par le gouvernement précédent et conçue pour faire en sorte que les provinces collaborent dans le but d'établir des garanties relatives aux délais d'attente.

Cela dit, nous sommes toujours très préoccupés par l'engagement du gouvernement à l'égard du principe de l'universalité des soins de santé, et de sa mise en pratique, et nous suivrons le dossier de très près.

Le dernier volet du plan en cinq points du gouvernement porte sur l'ordre public. Honorables sénateurs, nous voulons tous que la sécurité règne dans nos rues et dans nos localités. Le gouvernement propose de s'attaquer au problème en imposant des peines plus sévères, en mettant plus d'agents de police sur le terrain, en imposant plus de conditions à la libération conditionnelle et, nous dit-on, en tenant l'engagement de longue date des réformistes- alliancistes, aujourd'hui devenus le Parti conservateur, d'éliminer le registre des armes à feu, dossier dans lequel les conservateurs ont décidé de ne pas tenir compte des conseils et des souhaits des agents d'application de la loi de l'ensemble du pays.

Cependant, la fixation du gouvernement libéral sur l'ordre public doit être mise en contexte. Les taux de criminalité ont chuté de 12 p. 100 au cours des dix dernières années, phénomène que nous attribuons aux investissements substantiels que le gouvernement a faits dans des programmes comme la Stratégie nationale pour la prévention du crime et la Stratégie emploi jeunesse.

De plus, d'après Statistique Canada, les crimes avec violence ont chuté considérablement entre 2001 et 2004. Les taux de tentative de meurtre, d'agression sexuelle, de vol qualifié et de crime contre les biens ont tous chuté. Il semblerait donc que l'approche du gouvernement en ce qui concerne la réforme du système de justice devra être remaniée quelque peu afin de répondre aux besoins réels des Canadiens. À tout le moins, le nouveau gouvernement devrait peut-être invoquer des raisons plus convaincantes pour justifier les décisions qu'il a prises dans ce dossier.

Honorables sénateurs, outre cinq priorités, le discours du Trône du gouvernement comprend diverses autres feuilles de route portant, entre autres, sur la réforme du Sénat. Cependant, la nouvelle feuille de route du gouvernement relative à la réforme du Sénat est vague et peu détaillée. Elle indique simplement qu'il souhaite faire en sorte que l'institution reflète mieux « les valeurs démocratiques des Canadiens et les besoins des régions du pays ».

Les honorables sénateurs savent tous que le gouvernement conservateur veut que les sénateurs soient élus. Cependant, il n'y a aucun débat sur la manière de faire le changement. Comment le gouvernement s'obligerait-il à n'appeler au Sénat que les personnes dûment élues?

La réforme du Sénat est un sujet controversé depuis le tout début de notre pays. On a beaucoup dit sur la question, les opinions allant de l'abolition pure et simple du Sénat jusqu'au maintien du statu quo. Vingt-huit propositions sérieuses de réforme ont été formulées au cours des 40 dernières années et aucune n'a abouti parce qu'il n'existe de consensus sur aucune parmi les acteurs politiques qui peuvent procéder à cette réforme, au premier chef les premiers ministres fédéraux et provinciaux du Canada qui se sont succédé.

On comprend de mieux en mieux que l'on ne peut pas élire les sénateurs dans un vide. Il nous faut aborder d'autres questions, notamment la possibilité pour des sénateurs élus d'exercer davantage les pouvoirs considérables que la Constitution leur confère. Nous devons aussi comprendre comment les sénateurs seraient élus et discuter de la répartition des sièges entre les provinces et les territoires. En bref, il nous faut comprendre toutes les ramifications du projet.

En tant qu'Albertain, je suis très au fait de la question de la réforme du Sénat et je suis de ceux qui croient que notre institution peut et doit continuer de se moderniser. Cependant, je crois également qu'il sera très difficile de passer des nominations par le premier ministre à des élections par la population ou par les assemblées législatives sans modifier la Constitution.

Je rappelle aux sénateurs que, en 1979, le gouvernement fédéral a renvoyé deux questions à la Cour suprême du Canada, dont une qui visait à savoir si le Parlement avait le pouvoir de modifier unilatéralement la méthode de nomination des sénateurs. Le tribunal a répondu en ces termes qu'il ne l'avait pas :

[...] nous sommes d'avis que, bien que le par. 91(1) [de la Constitution] permette au Parlement d'apporter certains changements à la constitution actuelle du Sénat, il ne lui permet pas d'apporter des modifications qui porteraient atteinte aux caractéristiques fondamentales ou essentielles attribuées au Sénat pour assurer la représentation régionale et provinciale dans le système législatif fédéral [...] Nous sommes d'avis que le Parlement du Canada ne peut en modifier unilatéralement le caractère fondamental et le par. 91(1) ne l'y autorise pas.

L'élection des sénateurs ne peut pas avoir lieu dans un vacuum. Il faudrait envisager et peut-être mettre en œuvre une réforme supplémentaire ou correspondante de la structure de notre institution si cette démarche doit être profitable à notre système politique. Il faudrait également prévoir un mécanisme permettant aux Canadiens de participer directement au débat qui doit avoir lieu au sujet de la proposition du gouvernement. Nous pourrions envisager de renvoyer ce sujet à un comité sénatorial pour qu'il mette à jour les travaux menés en 1992 par le comité Beaudoin- Dobbie, qui a longuement examiné la question; en 1984 par le comité Molgat-Cosgrove, qui s'est penché exclusivement sur cette question; par le comité Goldenberg en 1980; et, en particulier, par le sous-comité Lamontagne, qui a également examiné exclusivement ce sujet.

En outre, au moment où le gouvernement envisage ce projet de réforme, il devrait se rappeler que, dans toute modification fondamentale du Sénat, il faudrait tirer parti des leçons du passé en examinant soigneusement la nature des diverses propositions qui ont été faites, le contexte dans lequel elles ont été faites, et les raisons pour lesquelles elles ont échoué. Le gouvernement doit s'assurer que ces modifications renforcent et complètent nos institutions démocratiques, qu'elles définissent mieux et améliorent le rôle de représentation du Sénat et son efficacité en tant qu'assemblée législative, et qu'elles ne soient pas faites que pour des motivations politiques à court terme.

Honorables sénateurs, je pourrais traiter plus à fond d'autres dossiers, particulièrement ceux qui concernent les Premières nations, l'agriculture, les engagements du Canada à l'étranger, l'environnement, l'obsession du gouvernement à l'égard de la sécurité et d'autres sujets, mais j'aborderai ces questions à d'autres occasions.

Pour le moment, je termine en disant que nous examinerons attentivement le plan en cinq points du gouvernement. Nous avons remarqué des incohérences par rapport aux engagements passés des conservateurs, et nous avons souligné des lacunes. Bien que nous soyons d'accord avec le gouvernement sur plusieurs aspects du discours du Trône, nous avons le devoir de nous opposer aux mesures sur lesquelles nous ne sommes pas d'accord, et c'est ce que nous ferons en cas de nécessité.

Si nous voulons préserver le Parlement en tant qu'institution vivante, si nous voulons garantir les libertés des Canadiens, l'opposition doit s'acquitter de ses fonctions sans crainte et avec détermination, comme l'ont fait les sénateurs d'en face lorsqu'ils siégeaient de ce côté-ci.

Comme le regretté et très honorable John Diefenbaker l'a dit, le devoir de l'opposition est le suivant :

[...] fait respecter et soutient les droits des minorités. Elle doit faire preuve de vigilance pour combattre l'oppression et l'empiètement injuste [...] sur les droits du peuple. Elle doit surveiller toutes les dépenses [...] Elle décèle les erreurs, suggère des modifications, pose des questions et tire les choses au clair; elle éveille, informe et façonne l'opinion du public en lui permettant de s'exprimer et de voter. Elle doit suivre de près le moindre geste du gouvernement pour l'empêcher de court- circuiter la procédure démocratique.

Bref, l'intérêt public exige que les politiques, programmes et actions du gouvernement soient soumis aux rigueurs du doute méthodique, de l'analyse soignée et d'une opposition diligente. Tels sont notre défi et notre responsabilité, et c'est cela que nous entendons faire.

Comme je l'ai expliqué, certes, nous souscrivons à bon nombre des mesures annoncées dans le discours du Trône, mais il n'en comporte pas moins de nombreuses lacunes.

De ce fait, honorables sénateurs, comme cela a été fait à l'autre endroit, je propose l'amendement suivant à l'Adresse en réponse.

[Français]

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Daniel Hays (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, je propose, avec l'appui du sénateur Fraser :

Que la motion soit modifiée par la suppression du point final et par l'ajout de ce qui suit :

« et, quoique cette Chambre prenne bonne note des diverses initiatives mentionnées sommairement dans le discours du Trône, elle attendra avec impatience de voir si les promesses concernant les Autochtones, les nouveaux immigrants, l'amélioration de la sécurité des aînés, la protection de l'environnement et l'aide accrue aux familles agricoles seront tenues rapidement et, étant donné la saine situation financière dont le gouvernement a hérité, la Chambre trouverait injustifiée l'augmentation des impôts ou la diminution des places anticipées pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada. »

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, je suis très heureux de vous faire part de ma réaction au récent discours du Trône.

(1740)

[Traduction]

Permettez-moi aussi de vous adresser mes félicitations, Votre Honneur, à l'occasion de votre nomination. Un mois environ avant qu'une annonce officielle ne soit faite, j'étais dans une église lorsque j'ai entendu dire que vous seriez notre Président. Certes, selon la coutume, il appartient au premier ministre de nommer le président, mais, en l'occurrence, il y a eu intervention divine.

On me permettra aussi de féliciter les leaders des deux côtés du Sénat. Les deux camps disposent d'un excellent leadership et je suis persuadé que nous connaîtrons une session très productive.

Il y a une personne toute spéciale dont je dois toucher mot. J'ai eu le plaisir de parcourir une allée avec une dame à deux reprises dans ma vie. La première fois, c'était avec mon épouse, il y a quelque 45 ans, et la deuxième, c'était en compagnie du sénateur LeBreton, au Sénat. Si je suis un peu partisan, vous comprendrez.

Le besoin de changement que les Canadiens ont exprimé récemment aura bien sûr des répercussions sur l'avenir de notre système de soins de santé. Je suis d'avis qu'il ne faut pas craindre les changements qui pourraient être apportés dans ce domaine. Nous avons devant nous plusieurs occasions de faire fond sur bon nombre d'initiatives encourageantes qui ont pris de l'ampleur depuis une dizaine d'années, depuis que les divers niveaux de gouvernement ont commencé à travailler en collaboration pour tenter de trouver des solutions aux nombreux problèmes qui sévissent dans notre système de soins de santé.

J'aimerais cibler mes remarques sur un engagement particulier contenu dans le discours du Trône, c'est-à-dire la garantie relative au délai d'attente pour les patients. Comme la Gouverneure générale l'a souligné dans son discours, les Canadiens financent, grâce à leurs impôts, des soins de santé qui leur sont souvent prodigués avec du retard. Notre nouveau gouvernement a l'intention de prendre des mesures à cet égard en adoptant cette garantie. Cet engagement a pris naissance ici au Sénat, et nous pouvons tous en être très fiers.

La garantie relative au délai d'attente pour les patients constitue sans contredit la pièce maitresse des plans du gouvernement conservateur en matière de santé. Les Canadiens ont toujours affirmé que leurs principales préoccupations à l'égard du système de soins de santé avaient trait à la difficulté d'accès aux soins et aux délais d'attente excessifs. Les faits ont donné du poids à leurs craintes. Selon les chiffres fournis par le Fraser Institute, le délai moyen entre le renvoi effectué par un omnipraticien et le traitement par un spécialiste a presque doublé entre 1993 et 2004.

Je voudrais tout d'abord rappeler à mes collègues le bon travail effectué par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, mieux connu comme le « Comité Kirby », qui était dirigé de main de maître par le sénateur Kirby et qui a eu une influence directe sur le programme du gouvernement conservateur prévoyant une garantie dans ce domaine.

En octobre 2002, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a publié un rapport exhaustif intitulé La santé des Canadiens, qui s'est penché sur le rôle du gouvernement fédéral dans le système canadien de soins de santé. Les auteurs du rapport ont en quelque sorte fait preuve de prescience, puisqu'on y affirmait que les listes d'attente et la difficulté d'accès aux soins de santé rendaient le système vulnérable à des contestations judiciaires aux termes de l'article 7 de la Charte des droits et libertés, qui prévoit ce qui suit :

Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.

En juin dernier, la Cour suprême a statué qu'il y a des gens dans notre pays qui ont souffert et même, dans certains cas, qui sont morts parce qu'ils n'avaient pas eu accès à des soins de santé à temps. L'énoncé succinct de la juge en chef, Beverley McLachlin, résume bien le fondement de la décision Chaoulli : « L'accès à une liste d'attente n'est pas l'accès à des soins de santé. »

Comme vous le savez peut-être, lorsque la Cour suprême a invalidé les dispositions de la loi du Québec interdisant à la population d'obtenir des polices d'assurance médicale privée, elle a déclaré que cette interdiction violait l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés et l'article 1 de la Charte québécoise des droits et libertés. Bien que le jugement de la Cour suprême ne s'applique qu'au cas du Québec, il n'est pas difficile d'imaginer les conséquences de ce message au-delà de cette province. Le gouvernement ne devrait pas empêcher des gens qui vivent dans une société ouverte et démocratique comme la nôtre d'obtenir des services de santé à leurs frais si le système public ne leur donne pas accès à ces services en temps opportun.

Bien que les jugements de la Cour suprême aient été utiles à certains égards, l'arrêt Chaoulli laisse planer passablement d'incertitude sur la marche à suivre à partir de là. Les juges n'ont imposé aucune solution et, bien entendu, ils ne devaient pas le faire. Par conséquent, nous assistons dans le pays à un débat incessant sur ce que les gouvernements et les fournisseurs de services devraient faire en réponse au jugement. Une chose est sûre : notre système de santé ne peut pas continuer encore bien longtemps sur la même voie.

Je sais que d'autres personnes ont adopté un point de vue opposé relativement à l'importance de la décision de la Cour suprême, et il y a peut-être de nombreuses personnes au Sénat qui ne sont pas d'accord avec moi. Cependant, je crois fermement que nous sommes loin d'avoir fini d'entendre parler des ramifications de cette décision. Il pourrait même y avoir encore d'autres jugements semblables. Je ne peux pas prévoir avec certitude ce que l'avenir nous réserve, mais je suis convaincu que la décision Chaoulli nous donne l'occasion de faire des changements et que nous devons saisir cette occasion.

Dans son rapport, le Comité des affaires sociales a proposé des mesures qui nous semblaient être principalement de nature administrative pour résoudre le problème des longues listes d'attente. Par notre proposition, nous ne prétendons pas résoudre directement ce problème. Nous pensons plutôt que le rapport pourrait inciter les gouvernements et les fournisseurs de services à résoudre les problèmes sous-jacents dans le système qui se manifestent sous forme de longues listes d'attente. Ce ne sont pas les délais d'attente qui constituent vraiment le problème central. Ces délais ne sont qu'un signe particulièrement évident que le système de santé a besoin d'être réformé.

Aux yeux du comité, l'accès en temps opportun veut dire que le service est offert conformément aux lignes directrices cliniques garantissant que le délai d'attente n'entraînera pas d'effets nocifs sur l'état de santé du patient. Nous jugeons important de donner à l'idée de l'accès en temps opportun une définition précise ne reposant pas sur les craintes et les appréhensions des patients concernant leur bien-être.

Nous avons recommandé une garantie de soins de santé qui aurait pour effet de garantir l'accès en temps opportun à des services de santé de grande qualité. Cette garantie créerait une obligation juridique en vertu de laquelle les gouvernements seraient tenus de fournir des soins aux patients dans des délais dictés par les besoins médicaux. Si les soins n'étaient pas fournis dans les délais prescrits, le gouvernement s'exposerait à devoir payer aux patients ce qu'il leur en coûtera pour obtenir les soins nécessaires ailleurs, que ce soit dans une autre ville, une autre province ou un autre pays.

Ce qui sous-tend cette idée est très simple. En sa qualité de fournisseur monopolistique de soins de santé en vertu du régime d'assurance-maladie, le gouvernement doit accepter les responsabilités connexes. Mentionnons, entre autres, l'obligation de respecter certaines normes de service définies au moyen de délais d'attente maximum.

Je suis heureux de pouvoir dire que l'essence de cette idée a été approuvée par le Parti conservateur du Canada lorsqu'il a fait de la garantie en matière de délais d'attente un élément clé de son programme électoral. En fait, le premier ministre, M. Harper, a fait de cette promesse particulière, pendant la campagne électorale, l'une des cinq grandes priorités du nouveau gouvernement conservateur.

Le gouvernement fédéral a répété cette promesse depuis les élections et il s'est engagé, dans le discours du Trône, à travailler en étroite collaboration avec les provinces et les territoires en vue de mettre cette garantie au point.

Honorables sénateurs, il existe déjà des choses similaires. En effet, le Saskatchewan Surgical Care Network établit les délais d'attente maximum pour tous les patients en attente d'une chirurgie en se fondant sur les lignes directrices en matière de pratique clinique. Les patients sont évalués en fonction d'un ensemble commun de critères, et on leur attribue un indice d'urgence qui permet de les classer selon six niveaux de priorité, à chacun de ces niveaux correspondant un délai d'attente cible pour subir une opération. Ce réseau a été le premier système complet d'envergure provinciale du genre au Canada, et je dirais qu'il s'est révélé fort utile.

L'automne dernier, le gouvernement provincial de la Saskatchewan a annoncé que le nombre de patients en attente d'une opération depuis plus de 18 mois avait diminué du tiers par rapport à l'année précédente. Même si les lignes directrices applicables en Saskatchewan n'ont pas force de loi, cette expérience prouve néanmoins qu'il est possible de réduire ainsi les longues listes d'attente. Le Réseau de soins cardiaques de l'Ontario, au sein duquel j'ai joué un rôle de premier plan, il y a 20 ans, en qualité de président du comité, a connu un égal succès. Le cadre à la base de ces expériences peut se traduire en un engagement juridique dans tout le pays, et c'est exactement ce que la garantie sur les délais d'attente offre.

(1750)

Certains peuvent dire que de fixer des objectifs pour la prestation de soins en temps voulu est tout ce qu'on peut faire de façon réaliste pour s'attaquer au problème des délais d'attente. Cependant, si on ne fait qu'établir des objectifs, on oublie la nécessité de prendre des mesures pour inciter le gouvernement et les fournisseurs de soins à respecter les normes qu'ils établissent. Rien dans l'accord de 2004 des premiers ministres sur le renouvellement des soins de santé ne pourrait apporter autant de changements et une meilleure responsabilisation qu'un engagement juridique qui forcerait les gouvernements à modifier de façon marquée leur système de santé de sorte que les soins soient dispensés dans les délais voulus, sous peine autrement d'en payer le prix. Dans ce cas-ci, les gouvernements devraient supporter le coût nécessaire pour que leurs citoyens reçoivent les services ailleurs. Cette possibilité motiverait grandement les gouvernements à agir.

La garantie sur les délais d'attente est un bon pas en avant. Elle répond à la décision de la Cour suprême dans l'affaire Chaoulli en s'attaquant aux racines du problème des délais d'attente. Elle sert également à protéger notre système tout en respectant les principes de la Loi canadienne sur la santé, ce qui est extrêmement important.

En février, le gouvernement du Québec a répondu à la décision de la Cour suprême. Il a proposé qu'un patient ayant besoin du remplacement d'une hanche ou d'un genou ou d'une chirurgie de la cataracte qui n'a pas été traité dans les six mois soit envoyé dans un établissement public ailleurs dans la province ou dans un établissement privé dans la province. Comme le sénateur Kirby et moi-même l'avons écrit dans une opinion publiée en février, le document de travail du Québec a été la première tentative sérieuse dans notre pays pour donner un contenu pratique et détaillé à la garantie sur les délais d'attente.

Je reconnais que certains ont critiqué les projets du Québec en ce sens que la garantie de la province ne s'appliquerait qu'à un nombre limité d'interventions. Cela pourrait en exaspérer quelques-uns qui croient qu'il faut englober un plus large éventail d'interventions, mais je crois que c'est un premier pas important.

Le Québec n'est pas le seul à proposer des idées. La Colombie- Britannique et l'Alberta ont également indiqué dans les derniers mois qu'elles comprennent leur obligation de fournir à leurs patients les services en temps voulu. On a beaucoup parlé dans les médias des plans de l'Alberta, en particulier, mais il s'agissait en bonne part d'hypothèses, puisque nous ne connaissons pas vraiment les détails à ce stade-ci.

Honorables sénateurs, il n'y a rien à craindre des changements à apporter à notre système de santé. Trop souvent, le changement est vu comme une violation possible des principes de la Loi canadienne sur la santé. Alors que le gouvernement a déclaré que l'existence d'un système de santé efficace nécessitera des innovations, le discours du Trône a également fait savoir aux Canadiens que ces nouvelles approches en matière de prestation des soins se conformeront aux principes de la loi.

Même s'il n'a pas été présenté en grande pompe ou n'a pas fait l'objet d'une grande attention de la part des médias, je suis heureux de dire que le rapport de 2002 du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a grandement contribué à l'évolution du débat sur cette question.

L'attention accrue accordée à la réforme de la santé par un public mieux informé — grâce à notre rapport aussi bien qu'à celui de la Commission Romanow — est incroyablement encourageante. Cet intérêt du public accroît la pression sur ceux qui sont chargés de régler les problèmes et de rendre compte de toute mesure qu'ils prennent.

Allié à l'encouragement du public, le soutien des provinces et des territoires sera essentiel au gouvernement fédéral lorsqu'il mettra en œuvre son plan de garantie. Je ne le soulignerai jamais assez. Le ministre de la Santé, Tony Clement, a dit croire que les provinces sont en faveur de la garantie et que des progrès ont déjà été réalisés dans les discussions. En effet, les discussions sur les points de repère vont bon train. Ce sont des nouvelles encourageantes.

Les sénateurs sont conscients qu'un gouvernement minoritaire présente des défis évidents, quel que soit le parti au pouvoir. J'ai bon espoir que le plan du nouveau gouvernement en matière de santé recueillera de larges appuis au Parlement, et j'estime que ce sont des attentes réalistes. Bien que la version de la garantie aux patients figurant dans la plate-forme conservatrice était légèrement différente — c'est-à-dire la garantie de délai d'attente par rapport à la garantie de soins —, je crois que c'est un très sage premier pas.

Une garantie de délai d'attente pour des opérations et des situations données devrait être réalisable dans des délais raisonnables à l'aide de l'établissement de points de repère. D'ailleurs, les progrès réalisés dans le cas des points de repère ont été encore plus grands que ce qu'on avait espéré. La question plus globale de la garantie de soins pourrait par la suite être examinée de façon progressive une fois que les points de repère auraient été établis. L'avantage que cela représente, c'est l'énorme amélioration de la qualité des soins qui se produira une fois les points de repère établis.

Son Honneur le Président : Le sénateur a-t-il demandé la permission du Sénat pour continuer?

Le sénateur Fraser : Cinq minutes.

Son Honneur le Président : Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Keon : Je remercie les sénateurs de leur indulgence.

Honorables sénateurs, depuis la mise sur pied du Réseau de soins cardiaques de l'Ontario, nous avons constaté une nette amélioration du niveau des soins cardiaques dans cette province.

Les Canadiens s'attendent à ce que les politiciens de tous les niveaux collaborent dans l'intérêt de tous les citoyens, surtout lorsqu'il s'agit de leur assurer un accès en temps opportun au meilleur système de santé possible. Ils veulent que leur gouvernement fournisse des soins de santé efficaces et de qualité dans le cadre d'un régime public et universel, conformément aux principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, permettez-moi de commenter le discours du Trône de notre gouvernement. D'abord, je félicite le sénateur Hays, qui exerce maintenant les fonctions de leader de l'opposition au Sénat. Plus tard aujourd'hui, en hommage au sénateur Hays, on dévoilera son portrait officiel le représentant en tant que Président du Sénat.

Le sénateur Hays est un parlementaire compétent et respecté. Il me tarde de travailler avec lui dans le cadre d'un Sénat qui compte un nombre beaucoup plus élevé de sénateurs de l'opposition, situation singulière, mais pas inhabituelle. J'espère que nous pourrons travailler dans un esprit de coopération et de convivialité.

Les honorables sénateurs ne sont pas sans savoir que le Président du Sénat arrive au quatrième rang de préséance après le gouverneur général, le premier ministre et le juge en chef de la Cour suprême du Canada. Dans notre système parlementaire, aucune autre fonction ne symbolise de normes plus strictes que la fonction de Président du Sénat. Ainsi, le choix du sénateur Kinsella est tout à fait approprié. Le sénateur Kinsella commence un nouveau chapitre d'une carrière déjà brillante. C'est un honneur de travailler avec lui, et je lui souhaite bonne chance.

Je tiens aussi à féliciter mon voisin de pupitre, le sénateur Comeau, qui est le leader adjoint du gouvernement au Sénat, ainsi que le sénateur Stratton, le whip du gouvernement au Sénat. Je sais qu'ils exerceront leurs fonctions de façon compétente et intègre comme ils ont accompli leur travail jusqu'à maintenant au Sénat. En mon nom et au nom du premier ministre, je les remercie sincèrement d'avoir accepté ces fonctions difficiles. Je leur sais gré de leur amitié et de leurs précieux conseils.

Mon collègue qui prend place derrière moi, le sénateur Tkachuk, s'occupe de l'ordre du jour à titre de président de notre caucus au Sénat et de vice-président du caucus conservateur national. Je le remercie du fond du cœur de l'amitié qu'il me témoigne depuis 32 ans de collaboration.

Je désire préciser que je n'ai été escortée que deux fois dans ma vie. Une fois à l'autel par mon mari, l'autre à mon siège par le sénateur Keon, en compagnie du leader du gouvernement au Sénat de l'époque, le sénateur Lowell Murray.

Les sénateurs Champagne et Segal, qui ont proposé et appuyé l'Adresse, sont parmi les derniers venus au Sénat. Je suis certaine que la plupart des sénateurs, sinon tous les sénateurs, seront d'accord pour dire que nous avons déjà infiniment bénéficié de la richesse de leur contribution à notre assemblée et de leurs interventions.

J'aimerais également souhaiter la bienvenue au sénateur Nancy Ruth, qui siège maintenant au Sénat du côté du gouvernement. C'est une recrue formidable pour notre caucus. Elle est déjà entièrement plongée dans les travaux des comités et de notre caucus.

Enfin, je ne saurais passer sous silence la toute dernière personne à faire son entrée au Sénat, le sénateur Michael Fortier, ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, qui exerce ses nouvelles responsabilités avec grande compétence et intégrité. Quelle chance que des gens de ce calibre décident de se mettre au service de la population! Au nom de tous les sénateurs, je souhaite la bienvenue au sénateur Fortier.

Honorables sénateurs, l'adresse en réponse au discours du Trône est une tradition parlementaire précieuse que l'usage a consacrée. Le débat qui l'entoure est très diversifié. La matière est illimitée. Comme nous en avons déjà été témoins, les sénateurs abordent des questions qui concernent leur région, l'ensemble du Canada ou le monde extérieur.

Aujourd'hui, je souhaite utiliser mon temps de parole pour parler des questions couvertes dans le discours du Trône et qui, à mon avis, sont des plus importantes pour les Canadiens. Je vais terminer mes observations par quelques réflexions sur le rôle que le Sénat continuera à jouer dans le cadre de notre régime parlementaire. Je vais expliquer comment j'espère voir fonctionner et évoluer le Sénat au cours de la session et des législatures à venir.

(1800)

Honorables sénateurs, le 23 janvier 2006, les Canadiens ont voté en faveur du changement. Le message que j'ai entendu les Canadiens répéter au cours de la campagne électorale, alors que j'accompagnais personnellement le chef de l'opposition qui est aujourd'hui le premier ministre, c'est qu'ils sont fatigués de l'excès dans l'esprit de parti, de l'enflure verbale des politiciens et des discours sans contenu. Les Canadiens souhaitent que le Parlement fonctionne. Ils souhaitent nous voir travailler de façon éthique, responsable et transparente. Ils veulent être en mesure de respecter leurs institutions parlementaires et leurs représentants au Parlement, qu'il s'agisse de députés de la Chambre des communes ou de sénateurs.

Notre gouvernement conservateur est prêt à relever ce défi et à être l'instrument du changement qu'exigent les Canadiens. Cette nouvelle orientation est bien reflétée par le titre du discours du Trône prononcé par Son Excellence la Gouverneure générale le 4 avril, qui était le suivant : « Une nouvelle feuille de route ».

Les objectifs prioritaires de notre gouvernement sont énoncés dans le discours du Trône pour cette première session de la législature et ils sont limpides. Je dis bien « première session de la législature » étant donné que l'opposition au Sénat et à l'autre endroit semble laisser entendre que tous les méfaits et toutes les actions des 13 dernières années, que nous avons dénoncés au cours de la campagne, devraient pouvoir être corrigés par le premier discours du Trône et au cours de la première session de la législature. Je crois que la plupart des Canadiens sont bien conscients de cet aspect.

Notre gouvernement a amorcé son travail en présentant à l'autre endroit le premier projet de loi du gouvernement, la Loi fédérale sur l'imputabilité. Nous avons ainsi fait ce que nous avions promis. Cette loi permettra au gouvernement d'être plus fort dans ses actions et d'agir dans le respect de nos lois, de nos règles et de nos institutions, et d'assurer un gouvernement plus transparent et responsable.

Je cite le discours du Trône :

De tous les aspects d'un gouvernement responsable, aucun n'est plus important que celui d'avoir la confiance des citoyens. Or, la foi des Canadiens dans les institutions et les pratiques du gouvernement a été ébranlée. Le nouveau gouvernement fait confiance aux Canadiens et aux Canadiennes, et il souhaite que ceux-ci fassent de nouveau confiance au gouvernement. L'heure est à l'imputabilité.

Honorables sénateurs, les Canadiens veulent un gouvernement responsable; c'est ce qu'ils méritent et c'est ce que nous devons leur donner. Le projet de loi C-2 modifiera la façon de faire de la politique et de gouverner au Canada, un changement pour le mieux.

Deuxièmement, le gouvernement a promis un allégement fiscal aux Canadiens et c'est ce qu'il leur offre, à commencer par une réduction de la taxe sur les produits et services. Les Canadiens verront la première baisse, de 7 p. 100 à 6 p. 100, conformément au premier budget du gouvernement présenté le 2 mai. La TPS passera à 5 p. 100 au cours des cinq prochaines années.

Assez ironiquement, lorsque le gouvernement conservateur a voulu instaurer la TPS, les sénateurs libéraux de l'époque ont adopté un comportement que, pour être diplomate, je qualifierai de « contraire aux usages du Sénat » afin d'empêcher la mise en application de la TPS. Voilà qu'aujourd'hui, ils montent aux barricades pour s'opposer à une réduction, même de 1 p. 100. En 1990, Paul Martin a décrit la TPS comme une taxe « régressive et injuste, qui minera l'économie [...] en créant un cauchemar administratif pour les petites entreprises ».

En 1993, Jean Chrétien a qualifié la TPS de « pire taxe de l'histoire du Canada », et je n'ai pas besoin de rappeler à mes collègues d'en face combien de fois le gouvernement Chrétien a promis d'abolir la TPS.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, il est 18 heures. Conformément au paragraphe 13(1) du Règlement, je dois quitter le fauteuil jusqu'à 20 heures, moment où nous reprendrons la séance.

(Le Sénat s'ajourne à loisir.)

(2000)

(Le Sénat reprend sa séance.)

LE DISCOURS DU TRÔNE

ADOPTION DE LA MOTION MODIFIÉE D'ADOPTION DE L'ADRESSE EN RÉPONSE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Champagne, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Segal, relative à l'Adresse à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la première session de la trente-neuvième législature.—(8e jour de la reprise du débat)

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je parlais de la TPS. J'ai terminé en disant que je ne demanderai pas aux sénateurs libéraux ici présents de se rappeler combien de fois leur gouvernement a promis de supprimer la TPS.

L'actuel gouvernement, en l'occurrence le nouveau gouvernement conservateur dirigé par le premier ministre Stephen Harper, réduira la TPS dans le cadre de son plan qui vise à accorder aux Canadiens une réduction générale des impôts. L'actuel gouvernement prendra également des mesures pour accroître la sécurité dans les rues et dans les collectivités. Il commencera par cibler les crimes commis au moyen d'armes à feu, dans les villes et les collectivités. Il suffit de voir ce qui s'est passé la fin de semaine dernière pour se rendre compte de l'ampleur du problème. Les Canadiens ont pu lire dans les journaux qu'un jeune agent de police, père de famille, a été abattu dans son quartier, à Windsor, en Ontario. Ils ont également appris qu'un homme âgé, résidant à Ottawa, a été ligoté et bâillonné lors d'une invasion de son domicile.

Le gouvernement conservateur mettra en place des peines d'emprisonnement obligatoires pour les infractions graves de narcotrafic, pour les infractions commises avec une arme et pour les crimes commis par des individus en libération conditionnelle. En outre, le gouvernement resserrera la sécurité à la frontière, particulièrement dans les ports et les aéroports, et regroupera les services de sécurité qui relèveront dorénavant d'un commissaire à la sécurité nationale.

Davantage de policiers seront formés et affectés à la sécurité de la rue. Cette mesure sera prise suite à des négociations avec les provinces en vue de créer de nouveaux programmes à frais partagés. Le gouvernement affectera de nouveaux fonds aux programmes destinés aux jeunes à risque pour que moins de jeunes Canadiens ne s'engagent dans des activités criminelles. Enfin, le gouvernement fournira un appui véritable aux familles canadiennes dans le cadre d'un plan universel de garde d'enfants.

Honorables sénateurs, on a beaucoup parlé du programme de garderies du gouvernement précédent et, comme nous le savons tous, des ententes n'ont été conclues qu'avec trois provinces. L'engagement financier au titre des garderies valait pour un an seulement alors que le programme devait durer cinq ans. Pendant la campagne électorale, le premier ministre de l'époque a porté la durée du programme à dix ans. Pour savoir jusqu'à quand les libéraux ont attendu pour présenter ce programme de garderies, il suffit d'examiner les propos d'un membre clé du Parti libéral. À ce sujet, je signale que l'agence de presse CanWest rapportait, le 27 mars 2006, que l'homme chargé par les libéraux d'élaborer un plan pour le renouvellement du parti a dit que le programme national de garderies du gouvernement était un « repentir de la dernière heure », que le registre des armes à feu était un « désastre administratif » et que la réaction au scandale des commandites avait été « bizarre ».

La personne que je cite est Tom Axworthy, ancien assistant de Pierre Elliott Trudeau, qui enseigne à l'Université Queen's. Il a également déclaré que la politique de Kyoto du gouvernement précédent étant non seulement difficile à comprendre, mais largement dépourvue de substance.

Notre régime universel de garde d'enfants a deux volets. Nous verserons aux parents 1 200 $ par année par enfant âgé de moins de six ans et nous collaborerons avec les milieux d'affaires et les milieux communautaires par le truchement de notre programme d'investissement communautaire visant la garde d'enfants pour créer chaque année 25 000 nouvelles places en garderie.

(2010)

Honorables sénateurs, lors de mes déplacements durant la campagne électorale, j'ai eu l'occasion de visiter un établissement de garde d'enfants situé dans une grande entreprise de fabrication de plastiques à Bolton, en Ontario, au nord de Toronto. J'ai été fort impressionnée par cette garderie située sur les lieux mêmes du travail des parents. J'ai vu beaucoup de garderies dans ma vie, mais jamais une garderie si bien gérée et si bien équipée. Or, nous visons à développer des garderies qui fonctionnent grâce à la collaboration des milieux d'affaires et des groupes communautaires.

Je sais que certains ont conclu à tort que notre régime allait supprimer des places en garderie créées par le gouvernement précédent. C'est faux. En réalité, le gouvernement actuel ne peut supprimer ce qui n'existe pas encore. Nous sommes convaincus que ce sont les parents qui sont le mieux en mesure de prendre des décisions concernant les besoins de leurs enfants. Ils travaillent fort pour assurer la meilleure vie possible à leurs enfants. Il n'y a pas lieu de les critiquer ou de les regarder de haut pour les décisions qu'ils prennent dans l'intérêt de leur famille. L'ancien ministre du Développement social, Ken Dryden, qui a négocié ces ententes, comme on les appelle, participait, le 18 novembre 2005, avant le déclenchement des élections, à une émission radiophonique à Ottawa au cours de laquelle il a rejeté l'idée d'aider les parents qui choisissent de rester au foyer en les comparant à des parents qui s'efforcent de traiter leurs enfants à la maison au lieu d'aller chez le médecin ou à l'hôpital. Voilà qui est troublant. Le gouvernement de l'époque n'aurait pas dû négliger cet aspect.

Il ne convient pas de regarder de haut ou de critiquer les décisions que prennent les parents dans l'intérêt de leurs enfants. En effet, ce sont en définitive les parents, et non pas les gouvernements, les bureaucraties, les groupes de défense des enfants ou des groupes d'intérêts, qui devraient avoir voix au chapitre. Au total, notre gouvernement investira 3,7 milliards de dollars sur deux ans pour faire en sorte qu'il soit moins coûteux pour les parents d'élever leurs enfants. Pour ce qui est du lien à faire entre la question de la garde des enfants et le discours du Trône, le tout se transforme essentiellement dans le budget 2006 en une allocation annuelle de 1 200 $ par enfant. Voilà ce sur quoi nous devrons voter.

Une de nos priorités, qui est tout aussi importante, est l'engagement pris par le gouvernement de collaborer avec les provinces pour établir une garantie de délai d'attente pour les patients. Les sénateurs se souviendront que cette initiative stratégique se fonde sur une recommandation faite en 2002 par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, présidé par le sénateur Michael Kirby et dont j'avais l'honneur d'être la vice-présidente. Le sénateur Keon a soulevé la question dans le cadre du débat et s'est concentré presque exclusivement sur ce sujet. Il était d'ailleurs parfaitement qualifié pour le faire. Le Comité sénatorial des affaires sociales a conclu que les patients doivent pouvoir compter sur des délais d'attente acceptables sur le plan médical pour les services fournis par le système public. Si les services dont des patients ont besoin ne sont pas offerts dans leur région, ils doivent avoir la possibilité d'être traités dans un autre hôpital, même s'il se trouve dans une autre province.

Je vais citer un extrait de la section 6.5 du rapport final du comité, intitulé La santé des Canadiens — Le rôle du gouvernement fédéral, d'où est tirée la garantie de délai d'attente pour les patients :

[...] il faut faire assumer aux gouvernements la responsabilité de leurs décisions [...] ce sont les vrais responsables du problème des listes d'attente qui doivent en porter le blâme, à savoir, les gouvernements, qui n'ont pas fourni les ressources financières suffisantes [...] il revient aux gouvernements d'assumer le coût des mesures de redressement, c'est-à-dire le traitement des patients dans un autre territoire, d'ici à ce que l'élaboration et la mise en place de systèmes de gestion des listes d'attente se concrétisent.

Délai d'attente pour les patients :

C'est toutefois là une question qui doit être résolue entre les gouvernements et les établissements et médecins faisant partie du système public de soins de santé. Les patients ne devraient pas avoir à subir de conséquences. Leur seul souci devrait être d'obtenir les traitements dont ils ont besoin en temps opportun et d'en faire assumer le coût par l'État. C'est donc, [...] aux gouvernements que devrait incomber, en tant qu'assureurs du patient, la responsabilité de respecter la garantie de soins de santé.

L'annonce faite à cet égard par le chef de l'opposition de l'époque, le premier ministre Harper, à Winnipeg, dans la circonscription de Steven Fletcher, notre porte-parole en matière de santé à l'époque, fut pour moi un des jours les plus gratifiants de la campagne. J'ai pu téléphoner au sénateur Kirby pour lui dire que nous étions sur le point de faire cette annonce. M. Harper croyait qu'il était approprié que le sénateur Kirby, le président du Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie, soit mis au courant de l'annonce imminente.

Les conclusions du Comité des affaires sociales ont été validées par une décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Chaoulli, qui est bien connue. Les Canadiens estiment que leur système de soins de santé est l'un de leurs plus précieux services publics. Dans son discours, le sénateur Hays a eu raison de nommer le système de soins de santé comme l'une des grandes réalisations d'un ancien gouvernement libéral. Je m'empresse toutefois d'ajouter que la Commission royale sur les services de santé, la Commission Hall, établie sous l'ancien premier ministre Diefenbaker, a été un élément précurseur de cette politique. La commission a terminé ses travaux alors que M. Diefenbaker était au pouvoir, mais il a été battu avant d'avoir la chance d'appliquer la politique. La politique a été mise en oeuvre peu après par son successeur.

Notre gouvernement, comme promis, instaurera une garantie sur les délais d'attente, comme l'a proposé le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Nous veillerons à ce que les Canadiens reçoivent les traitements médicaux nécessaires dans des délais dictés par les besoins médicaux, et ce, conformément aux dispositions de la Loi canadienne sur la santé.

Honorables sénateurs, voilà un bref synopsis des cinq premières priorités de notre gouvernement. Ce sont des objectifs ambitieux, audacieux et de grande portée. Je suis emballée et honorée de participer à ce programme et d'offrir aux Canadiens un gouvernement solide, efficace et responsable qui répond à leurs attentes, un gouvernement qu'ils méritent très certainement. Je terminerai aujourd'hui avec quelques mots sur l'avenir du Sénat en tant qu'institution et son rôle constitutionnel au sein d'un gouvernement parlementaire. Depuis la Confédération, le Sénat et le rôle qu'il joue dans notre système fédéral ont fait l'objet de longs débats et de maints examens. Le sénateur Macquarrie m'a déjà donné un livre écrit en 1916 qui parlait d'une réforme approfondie du Sénat. J'ai toujours ce livre. Il est aussi pertinent aujourd'hui qu'à l'époque. Le Sénat facilitait les ententes au moment de la Confédération. Six des 14 jours que les Pères de la Confédération ont passé à la conférence de Québec ont été consacrés au Sénat et à son rôle dans notre système fédéral. Selon l'historien Christopher Moore, auteur du livre How the Fathers Made a Deal, c'est le débat sur le Sénat qui a été le plus long à la Conférence de Charlottetown et qui a presque entraîné la rupture des négociations.

Comme les honorables sénateurs le savent, les Pères de la Confédération ont fini par en arriver à un compromis satisfaisant pour tous. Le Canada aurait un Sénat nommé, qui serait chargé de vérifier les travaux des élus à la Chambre basse afin de protéger les minorités, tout en représentant les intérêts régionaux et particuliers.

À l'heure actuelle, le Sénat est un lieu de grande diversité. Nous comptons parmi nous des agriculteurs, des médecins, des avocats et même un cardiochirurgien. Nous comptons également parmi nous des constitutionnalistes et des généraux décorés, ainsi que les banquiers et d'ardents défenseurs des minorités raciales, des droits des consommateurs et des arts. Environ 33 p. 100 des sénateurs sont des femmes, et 7 sièges sont vacants. Les Canadiens placent systématiquement la réforme du Sénat en haut de l'ordre de priorités lorsqu'il s'agit de réformer nos institutions démocratiques. Un sondage mené par Environics en mars 2003 a révélé que 73 p. 100 des Canadiens estiment que la réforme du Sénat devrait occuper une place très importante ou moyennement importante dans les futurs débats constitutionnels.

En 2004, dans une étude menée pour le compte de l'Institut Fraser, intitulée Challenges in Senate Reform : Conflicts of Interest, Unintended Consequences, New Possibilities, Gordon Gibson a écrit :

Nous avons hérité de la conception constitutionnelle du Sénat que les Pères de la Confédération avaient en tête : un équivalent canadien de la Chambre des lords, qui a été matière à négociation lors des pourparlers en vue du premier accord confédéral, un lieu d'apparat et de cérémonie et, éventuellement, d'autorité. Si le Sénat est devenu un lieu propice à la partisannerie et dépourvu de réels pouvoirs, c'est à cause des lacunes du processus de nomination.

(2020)

Honorables sénateurs, je crois qu'il est juste d'affirmer que le processus de nomination des sénateurs explique en grande partie l'insatisfaction des Canadiens à l'égard du Sénat tel qu'il existe aujourd'hui. Ils se demandent comment, en 2006, il est encore possible qu'un organe législatif soit mis en place sans la participation du public qu'il prétend servir. En ce début du XXIe siècle, le gouvernement fera en sorte que les personnes qui veulent siéger au Parlement de notre État démocratique détiennent un mandat des Canadiens.

Honorables sénateurs, les gouvernements libéraux précédents parlaient sans arrêt de mettre un terme au déficit démocratique dans notre pays, mais ils n'ont jamais rien fait. Les premiers ministres libéraux précédents ont parlé de réformer le Sénat, mais aucun n'est passé à l'action. Nous devons agir maintenant. Le moment est venu d'entreprendre la modernisation de la Chambre haute.

Comme le gouvernement l'a indiqué dans le discours du Trône, il prendra les mesures nécessaires pour faire en sorte que le Sénat reflète davantage les valeurs démocratiques des Canadiens et les besoins des différentes régions du Canada. Le gouvernement s'engage à réformer le Sénat selon un processus en deux étapes.

Tout d'abord, nous allons entreprendre une réforme du Sénat en créant un processus national pour l'élection des sénateurs dans toutes les provinces et tous les territoires à temps pour les prochaines élections générales au niveau fédéral et ensuite, nous consulterons les provinces et les Canadiens pour obtenir un consensus sur d'autres réformes pour faire du Sénat une assemblée élue démocratiquement, indépendante et efficace qui représente équitablement toutes les régions.

Honorables sénateurs, voici ce qu'a déclaré le premier ministre dans le National Post le 2 mars de cette année. Il a déclaré que notre gouvernement :

[...] n'a pas fixé de délais, mais c'est une chose à laquelle je voudrais m'attaquer le plus tôt possible. Je m'attends à ce que dès les prochaines élections fédérales, nous ayons un processus d'élection des sénateurs. Le premier ministre peut choisir de créer un processus électoral et il peut choisir de le faire au niveau fédéral, surtout si nous devions tenir des élections au Sénat en même temps que les élections fédérales. Et même si je voudrais obtenir la coopération des provinces, si notre gouvernement choisit de tenir des élections au Sénat, c'est une chose que nous croyons pouvoir faire au niveau fédéral.

Honorables sénateurs, notre gouvernement continue de consulter les provinces pour obtenir leurs points de vue. Cependant, le premier ministre est prêt à aller de l'avant et à jouer un rôle de chef de file en l'absence d'un consensus — et les Canadiens méritent un premier ministre qui a ces qualités.

Au cours de la 39e législature, notre gouvernement commencera à travailler sur la réforme du Sénat et sur l'élection des sénateurs. Des changements s'en viennent et ils sont nécessaires au moment où nous réévaluons notre démocratie en ce XXIe siècle. À titre de sénateurs, nous ne devrions pas craindre ces réformes. Notre institution maintiendra l'intégrité constitutionnelle qu'elle a toujours eue à titre de Chambre de réflexion. Nous continuerons d'être une Chambre marquée par une grande diversité, comme je l'ai dit plus tôt. Nous continuerons de participer au débat sur les décisions difficiles en matière de politique publique qui touchent les Canadiens et nous poursuivrons nos immenses efforts aux comités.

Honorables sénateurs, comme je l'ai mentionné quelques fois dans ce discours, j'ai eu le privilège de voyager avec le premier ministre au cours de la campagne électorale. La question de la réforme du Sénat a été soulevée partout au Canada. Elle ne préoccupe pas simplement l'Ouest ou l'Est. Elle touche toutes les régions. Comme je l'ai dit à mes collègues de ce côté-ci, et à certains sénateurs d'en face lorsque j'ai discuté de la question avec eux, certains des applaudissements les plus nourris sont survenus lorsque le premier ministre, qui était alors le chef du parti, a parlé de la nécessité d'une réforme du Sénat. Il nous incombe donc à tous de reconnaître que dans le monde réel, dans le pays, les gens veulent une réforme du Sénat.

Honorables sénateurs, pendant les semaines et les mois qui vont suivre, je m'attends à ce que tous les sénateurs participent à un débat animé sur les questions que j'ai mentionnées ici aujourd'hui. Bien d'autres questions seront soulevées au cours de cette 39e législature. Je m'attends à ce que le ton du débat soit caractéristique de la collégialité qui a marqué les débats dans cette enceinte depuis la Confédération. Il est arrivé à quelques occasions regrettables que ce ne soit pas tout à fait le cas, mais en général les débats du Sénat sont collégiaux.

Je rassure tout de suite l'honorable leader de l'opposition et les sénateurs d'en face, de même que ceux de ce côté-ci. Je vais collaborer avec tous les sénateurs en essayant de les impliquer, indistinctement de leur allégeance politique, pour faire en sorte que la 39e législature soit efficace et efficiente au service de tous les Canadiens.

Bon nombre de mes collègues d'en face m'ont dit qu'ils ont l'intention d'être responsables pendant l'examen des questions dont nous sommes saisis, d'un côté en respectant le rôle constitutionnel du Sénat et de l'autre en tenant compte des opinions exprimées par les députés élus de l'autre endroit et, bien entendu, les souhaits des électeurs.

Cela étant dit, pendant cette législature, je serai attentive et ouverte à toutes les suggestions constructives que les sénateurs pourront me soumettre dans l'esprit de second examen objectif qui a animé et défini le Sénat depuis la Confédération. Les deux Chambres du Parlement ne fonctionnent efficacement que dans un climat d'opposition énergique et constructive. Il n'est pas toujours possible de s'entendre sur toutes les questions, et mon expérience me dit que ce ne sera pas le cas, mais je pense tout de même qu'il est possible de promouvoir la dignité dans cette enceinte et de coopérer au service des Canadiens. N'oublions pas que les gouvernements ont toujours existé pour servir la population. C'est exactement ce que notre gouvernement va s'efforcer de faire et rien de moins.

En tant que leader du gouvernement au Sénat, je ne perdrai jamais de vue l'intérêt supérieur que nous nous efforçons d'atteindre en définitive et je pense que tous ceux qui sont ici réunis partagent cette volonté.

Enfin, je remercie et félicite Son Excellence pour son discours du Trône.

[Français]

L'honorable Michael Fortier (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) : Honorables sénateurs, je suis très heureux de prendre la parole ce soir au cours du débat sur le discours du Trône pour prononcer, comme vous le savez, mon premier discours en cette Chambre.

J'aimerais tout d'abord dire que j'ai été très honoré, en février dernier, lorsque le premier ministre Harper m'a demandé de faire partie de son Cabinet en qualité de ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, et de ministre responsable de la grande région de Montréal. Afin d'être responsable devant le Parlement, le premier ministre m'a nommé au Sénat.

Honorables sénateurs, comme vous le savez, je me porterai candidat à la Chambre des communes lors des prochaines élections. Mes fonctions actuelles prendront donc fin lorsque ces élections seront déclenchées. Je serai, bien entendu, très triste de quitter le Sénat.

Le discours du Trône confirme les priorités que le premier ministre a exposées pendant la campagne électorale, priorités qu'il a réitérées plusieurs fois depuis la formation de son gouvernement en février dernier. Ces priorités ne sont une surprise pour personne. Nous avons pris des engagements envers les Canadiens et les Canadiennes, et nous avons l'intention de les remplir. Nos priorités sont claires et méritent, encore une fois aujourd'hui, d'être répétées.

[Traduction]

Nous nous sommes engagés à assainir le gouvernement. Le discours du Trône a établi que la première mesure législative présentée par notre gouvernement serait la loi sur la responsabilité. Nous avons agi. En effet, le projet de loi C-2 a été présenté le 11 avril et il me tarde que l'on tienne un débat dynamique et éclairé sur cette mesure au Sénat. De toute évidence, je serai un fier partisan de ce projet de loi.

La question de la responsabilité est particulièrement importante pour moi en tant que ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, compte tenu du rôle central que joue mon ministère dans la passation de marchés. Je reprendrai cette question dans quelques minutes.

Le discours du Trône a aussi souligné notre engagement à l'égard de la réduction de la TPS, première étape dans la voie de la réduction des impôts pour les Canadiens qui travaillent fort. Le budget du ministre des Finances a confirmé notre détermination à l'égard de la réduction de la TPS. Grâce à cette réduction et à d'autres réductions d'impôt annoncées dans le budget, les consommateurs canadiens, sans égard à leur âge ou à leur revenu, auront plus d'argent dans leurs goussets, ce qui stimulera les dépenses. Je peux assurer aux sénateurs qu'il ne s'agit là que d'une première étape. L'allégement du fardeau fiscal des Canadiens continuera d'être un engagement de notre gouvernement.

Les sénateurs voudront assurément appuyer les efforts faits par le gouvernement en vue de protéger les familles et les collectivités canadiennes. Il s'agit de renforcer le système de justice, la troisième priorité énoncée dans le discours du Trône. Cette question me touche particulièrement du fait que je suis marié et père de cinq enfants. Nous voulons tous que nos enfants et nos petits-enfants grandissent dans des collectivités paisibles comme celles où nous avons grandi, et comme celle où j'ai grandi, à Québec. Nous voulons que l'on reconnaisse le Canada comme un pays qui traite ses citoyens équitablement en vertu de la loi et non pas comme un pays trop tolérant envers la criminalité qui traite mieux les criminels que les victimes.

En tant que parent, j'appuie fermement la décision du premier ministre de permettre aux parents canadiens de faire leurs propres choix en matière de garde d'enfants. Je reconnais être légèrement en conflit d'intérêts, car deux de mes enfants ont moins de six ans. En plus de confirmer l'engagement du gouvernement à donner un soutien financier aux parents pour leurs enfants d'âge préscolaire, le discours du Trône indique l'intention du gouvernement d'investir pour créer 125 000 nouvelles places en garderie au cours des cinq prochaines années, en accordant des crédits d'impôt aux employeurs et en offrant un appui semblable aux associations sans but lucratif.

(2030)

Notre cinquième, mais non moins importante, priorité est d'offrir aux Canadiens les soins de santé dont ils ont besoin au moment où ils en ont besoin. Nous sommes très fiers, comme pays, de notre système de soins de santé universel, mais, pendant longtemps, le gouvernement n'a pas joint le geste à la parole pour réduire les délais d'attente et pour corriger d'autres problèmes du système de soins de santé. Le gouvernement actuel prendra des mesures. Il réglera le déséquilibre fiscal et établira une garantie de délai d'attente pour les patients, de concert avec les provinces.

Honorables sénateurs, bien que le discours du Trône ait confirmé que nous allions nous concentrer sur ces priorités, nous allons aussi agir dans d'autres dossiers. Nous créerons de l'emploi et favoriserons la croissance de l'économie canadienne. Nous investirons dans la recherche et le développement et nous soutiendrons les industries traditionnelles du Canada. Nous renforcerons la sécurité aux frontières du Canada et nous investirons massivement dans le domaine militaire. Le gouvernement accroîtra l'aide offerte aux étudiants et aux familles. Nous améliorerons l'infrastructure nationale, nous assainirons l'environnement et nous offrirons aux Autochtones de vraies possibilités d'améliorer leur qualité de vie et celle de leurs collectivités.

[Français]

La lecture du discours du Trône était une étape importante pour notre gouvernement, mais maintenant nous devons nous mettre à l'œuvre pour remplir les promesses que nous avons faites à la population canadienne. Mon ministère aura un rôle important à jouer à cet égard.

En tant que receveur général du Canada, mon ministère jouera un rôle important à l'appui de la Prestation universelle pour la garde d'enfants en effectuant des paiements mensuels aux familles admissibles.

Mais c'est dans la responsabilité et la transparence accrues que mon ministère sera en première ligne. C'est pourquoi j'éprouve un vif intérêt pour la Loi fédérale sur l'imputabilité. Cette loi aura une incidence positive et profonde sur mon ministère.

Honorables sénateurs, le premier ministre a promis aux citoyens canadiens un plan détaillé et crédible pour assainir le gouvernement. Cette loi renferme des dispositions visant à réformer le financement des partis politiques fédéraux en introduisant plusieurs nouvelles restrictions et en prolongeant la période de poursuite pour les infractions à la Loi électorale du Canada. Par ailleurs — et heureusement —, les contributions secrètes aux candidats seront interdites.

La loi renforcera aussi les mesures restrictives concernant le lobbying et fera du directeur des lobbyistes un haut fonctionnaire indépendant du Parlement ayant le mandat et les ressources nécessaires pour enquêter sur les violations présumées.

Le Bureau du vérificateur général recevra des ressources supplémentaires et aura un mandat élargi dans le cadre de la loi. De nouvelles sanctions du Code criminel seront créées pour la fraude touchant le mauvais usage des fonds des contribuables.

La loi renforcera aussi le rôle du commissaire à l'éthique, qui aura le pouvoir d'imposer une sanction aux transgresseurs de la loi et d'accepter de mener des enquêtes concernant les plaintes du public et non seulement celles des politiciens.

Les hauts fonctionnaires du Parlement ne seront plus simplement désignés par le premier ministre, ils seront plutôt nommés en consultation avec tous les partis politiques.

Les dénonciateurs seront vraiment protégés et les activités de vérification et de responsabilisation seront renforcées dans les ministères.

Un bureau indépendant, qui fera partie intégrante de la Bibliothèque du Parlement, sera mis sur pied pour informer directement le Parlement de la situation des finances du pays et des tendances relatives à l'économie nationale.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Le sénateur Fortier : Deux éléments de la Loi fédérale sur l'imputabilité intéressent particulièrement mon ministère. Le premier a trait au nettoyage des contrats fédéraux. En tant que principal responsable des achats pour les ministères et organismes fédéraux, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, TPSGC, négocie des milliers de contrats chaque année. Il joue un rôle essentiel dans les activités du gouvernement. Malheureusement, le processus contractuel a fait l'objet de problèmes très publicisés. Mon objectif est de remédier à la situation prochainement. La Loi fédérale sur l'imputabilité nous permet de nommer un vérificateur de l'approvisionnement qui veillera à ce que tous les achats soient équitables, ouverts et transparents. Il aura le mandat d'examiner les pratiques d'approvisionnement du gouvernement, de recommander des améliorations et de traiter les plaintes des fournisseurs, ce qui comprend la gestion d'un mécanisme de règlement extrajudiciaire des différends abordable et rapide. Le vérificateur présentera un rapport annuel au ministre sur ses activités et le rapport sera déposé au Parlement.

Nous allons aussi promouvoir l'équité, l'ouverture et la transparence du processus d'appel d'offres en mettant en place un code de conduite pour les achats, code qui visera tant les fournisseurs que la fonction publique.

Honorables sénateurs, il y a quelques semaines, j'ai annoncé la mise sur pied de six nouveaux bureaux de petites et moyennes entreprises, des PME. Ces bureaux aideront les PME qui veulent devenir fournisseurs de l'État à tenter d'obtenir des marchés publics en réduisant les obstacles à la concurrence et en faisant la promotion d'un processus d'acquisition juste, ouvert et transparent.

La loi prévoit des réformes importantes au niveau de la gestion des sondages et de la publicité. Parmi les changements proposés, le gouvernement sera obligé de publier automatiquement les sondages d'opinion publique dans les six mois suivant la fin du projet. Il sera interdit de présenter des rapports oraux seulement. Un conseiller indépendant sera nommé pour une période de six mois et il sera chargé d'examiner et d'évaluer les pratiques du gouvernement relatives à la passation de marchés de recherche sur l'opinion publique qui ont été soulevées dans le chapitre 5 du rapport de novembre 2003 de la vérificatrice générale et d'en faire rapport. Cette personne, qui relèvera directement de moi en ma qualité de ministre des Travaux publics, devra formuler des recommandations sur la nécessité de prendre d'autres mesures et fournir des conseils sur l'utilisation future de telles recherches par le gouvernement.

[Français]

Laissez-moi vous dire, honorables sénateurs, que ces changements ne veulent pas dire que les fonctionnaires qui gèrent les contrats du gouvernement ainsi que la publicité et la recherche sur l'opinion publique ne font pas bien leur travail. J'ai entièrement confiance dans le professionnalisme et les compétences des employés de mon ministère. Comme l'a clairement laissé entendre la Commission Gomery, les problèmes du passé, qui ont terni la réputation du ministère, étaient d'origine politique.

L'initiative liée à la transformation des affaires, qui est en cours au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, montre que les gestionnaires et les employés du ministère ont seulement un objectif, celui de servir les intérêts du public de la meilleure façon possible en prenant les bonnes décisions d'affaires au nom des Canadiens et des Canadiennes.

Par exemple, des représentants de mon ministère travaillent à l'élaboration d'une stratégie de gestion de locaux qui soit la plus efficiente, la plus efficace et la plus économique pour le gouvernement du Canada — travail que j'appuie de tout cœur et que je continuerai d'appuyer tant et aussi longtemps que je serai ministre.

J'ai aussi appuyé la réforme des acquisitions qui est en cours dans mon ministère. Chaque année, comme plusieurs d'entre vous le savent, le gouvernement du Canada acquiert pour plus de 20 milliards de dollars de biens et de services, dont une grande partie est achetée par Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. En optimisant le pouvoir d'achat du gouvernement dans son ensemble, nous obtiendrons un meilleur rapport qualité-prix pour les Canadiens et les Canadiennes.

Honorables sénateurs, nous ferons tout cela en veillant à ce que les petites et moyennes entreprises aient accès aux marchés de l'État. Ces entreprises sont la pierre angulaire de notre économie et la principale source d'emplois.

En terminant, permettez-moi de vous demander d'appuyer le discours du Trône. Les Canadiens et les Canadiennes ont donné au gouvernement Harper un mandat pour mettre en œuvre ces priorités, et nous devons tous faire de notre mieux pour y arriver.

(2040)

L'honorable Francis Fox : Honorables sénateurs, j'aimerais féliciter le sénateur Fortier pour son premier discours. C'est un discours de grande substance. J'aimerais lui poser une question au sujet de ses responsabilités.

Le sénateur Fortier se souviendra sans doute que, pour assurer une plus grande équité dans la répartition des emplois et des édifices gouvernementaux dans la région de la capitale nationale, particulièrement du côté de Hull-Gatineau, le gouvernement libéral, en 1980, et je crois les gouvernements subséquents, avaient établi une règle selon laquelle on tenterait d'arriver à une proportion de 75/25 en termes de répartition d'emplois et d'édifices gouvernementaux.

Le ministre peut-il nous dire s'il a l'intention de poursuivre cette politique et, si possible, d'améliorer cette proportion de 75/25?

Le sénateur Fortier : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. La question est tout à fait pertinente puisque, comme le souligne l'honorable sénateur, cette politique de répartition du portefeuille immobilier de l'État dans la région de la capitale nationale de 75/25 existe.

Au moment où je suis arrivé en fonction, les sénateurs noteront que j'ai hérité d'une proportion de 77/23. Je compte donc faire de mon mieux pour le ramener à cet objectif de 75/25 avec lequel je suis d'accord. Toutefois, il faut comprendre que, pour déplacer ces seuls points de pourcentage, on parle de plusieurs centaines de milliers de pieds carrés qui doivent transiter d'un côté à l'autre de la rivière, à moins que l'on fasse construire de nouveaux immeubles à Gatineau. Ces solutions sont donc présentement à l'étude dans mon ministère et j'espère qu'à la fin de mon passage aux Travaux publics j'aurai réussi à rétrécir l'écart qui existe à l'heure actuelle.

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, je suis ici par devoir et par plaisir pour entendre le premier discours du nouveau ministre. Vous vous souviendrez, le 25 novembre 2005, lors de son discours d'adieu, l'honorable sénateur Austin avait dit qu'il était pour manquer la période des questions de ce côté-ci.

J'ai alors pris la parole en mon nom, puisque je ne pouvais le faire au nom des dix sénateurs non alignés de l'époque, et j'avais dit : « Pas trop vite. Vous savez, l'arrogance, c'est dangereux et vous pourriez vous retrouver de ce côté-ci. » J'ai prononcé ces paroles le 25 novembre. J'avais déjà annoncé comment je voterais et tout le monde sait que, pour la première fois de ma vie, j'ai voté pour le Parti conservateur lors des dernières élections.

J'appuierai même avec plaisir monsieur le ministre, qui nous a dit qu'il sera candidat aux prochaines élections. J'irai vous appuyer lorsque vous vous présenterez aux prochaines élections si vous me le demandez.

Cela dit, je n'ai pas le plaisir de connaître l'honorable sénateur Fortier, et vous n'avez sans doute pas le plaisir de me connaître non plus. C'est la première fois que je m'adresse à vous, devant tout le monde, comme j'aime bien le faire.

Il existe une tendance que je n'aime pas au sein du nouveau gouvernement, c'est cette façon de déléguer à d'autres la responsabilité de nommer tous les gens aux conseils d'administration et à la Cour suprême. Cette tendance me déplaît. Je pense que nous devrions pouvoir blâmer quelqu'un directement. Et celui qui, en démocratie, doit être blâmé directement, c'est le Cabinet, le premier ministre ou le ministre qui fait ou non une bonne ou une mauvaise nomination.

Je dois dire, honorables sénateurs, que je suis très mal à l'aise, après 42 ans au Parlement, de voir cette nouvelle tendance de vouloir déléguer ainsi. En anglais, on emploierait l'expression suivante.

[Traduction]

« Pass the buck to a committee to appoint people », ou déléguer à un comité le soin de faire les nominations. Je veux quelqu'un qui soit directement responsable des nominations. Les seuls qui peuvent rendre des comptes aux Canadiens sont les personnes élues, comme le ministre, le premier ministre et les autres membres du Cabinet.

Je tiens à dire officiellement que cette nouvelle tendance que nous avons adoptée et qui consiste à déléguer ces responsabilités à un comité de citoyens ou à tout autre comité me rend très mal à l'aise. Ces gens ne m'ont pas consulté. Je n'ai pas voté pour que des citoyens choisissent nos juges.

Si le ministre de la Justice fait une mauvaise nomination, il en subira alors les conséquences. Si le premier ministre et son Cabinet font une mauvaise nomination, nous devrions alors pouvoir prendre des mesures à cet égard.

Le ministre aurait-il la gentillesse de nous dire ce qu'il en pense?

[Français]

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai le regret d'annoncer au sénateur que son temps de parole de 15 minutes est écoulé. L'honorable sénateur demande-t-il la permission au Sénat de poursuivre pour cinq minutes supplémentaires?

Le sénateur Fortier : Je ne demande que quelques minutes supplémentaires. Je vous remercie, honorable sénateur, de votre question-commentaire. Dans mon discours, j'ai fait référence à ce qu'on appelle le « vérificateur aux approvisionnements». Je vous dirai que cette nomination est essentielle, surtout pour ceux qui savent à quel point le ministère des Travaux publics est vaste. Ses responsabilités sont très importantes puisqu'il gère des milliards de dollars provenant essentiellement des impôts des Canadiens et des Canadiennes.

Il était essentiel à mes yeux, aux yeux du premier ministre et à ceux du Cabinet d'avoir quelqu'un au sein de Travaux publics qui puisse avoir un peu plus de recul, une personne qui puisse permettre à ceux et celles qui travaillent dans ce ministère tous les jours d'avoir une meilleure perspective des règles qui s'appliquent à l'heure actuelle.

Je vous dirai candidement, et ce ne sera une surprise pour personne, que certaines de ces règles sont beaucoup trop compliquées. La situation devient donc difficile pour plusieurs fournisseurs, et surtout pour les plus petits qui n'ont pas les moyens d'avoir à leur emploi des personnes qui puissent apprivoiser le ministère des Travaux publics. Ces personnes sont donc, malheureusement, aux prises avec un carcan administratif qu'elles trouvent très compliqué.

J'espére que le vérificateur aux approvisionnements pourra nous guider sur l'établissement de règles plus simples, plus limpides et plus claires qui, au fil des ans, vont rendre la question de l'approvisionnement beaucoup plus facile tant pour l'État, qui est un client, que pour les fournisseurs.

Je comprends votre question. Toutefois, en ce qui a trait au vérificateur aux approvisionnements, je crois qu'il était nécessaire que nous nommions une tierce partie, puisque cette personne devra être en quelque sorte l'ombudsman au sein de Travaux publics afin de s'assurer que l'on respecte les objectifs que je viens d'énoncer.

L'honorable Dennis Dawson : Honorables sénateurs, j'aimerais tout d'abord féliciter l'honorable sénateur pour sa nomination tant au Cabinet qu'au Sénat. Je suis toujours fier d'accueillir en cette auguste Chambre une personne de la région de Québec, et un ministre de la région de Montréal.

Puisque le leader du gouvernement au Sénat a fait l'éloge de l'élection des sénateurs, j'aimerais poser au ministre la question suivante : comment se fait-il que vous nous annonciez ce soir que vous allez vous présenter non pas pour vous faire élire comme sénateur mais plutôt dans l'autre Chambre? Je ne doute pas que l'idée soit sans doute bonne, même si elle comportera certaines difficultés.

Contrairement à l'honorable sénateur Prud'homme, je ne vous garantis pas mon appui. Toutefois, si l'idée est si bonne, je vous assure que si vous vous présentez dans une élection sénatoriale, on reconnaîtra que vous suivez la logique de votre gouvernement.

Le sénateur Fortier : Je remercie l'honorable sénateur, un concitoyen pour qui j'ai eu beaucoup d'admiration lorsque j'étais plus jeune alors qu'il était député de la circonscription de Louis- Hébert. Je le regardais d'ailleurs, quand j'étais au primaire, et je trouvais qu'il faisait un très bon travail à la Chambre des communes. Cependant, je lui ferai remarquer que lui-même s'était présenté pour un siège à l'autre Chambre.

Pour répondre à sa question, qui est très pertinente, je dirai que c'est un choix que j'ai fait librement. Après des discussions avec le premier ministre du Canada, je lui ai dit que je voulais me présenter à la Chambre des communes. Ce n'est pas parce que je n'ai pas de respect pour la Chambre haute, mais ce choix est personnel. Je suis persuadé que lorsque les amendements ou les nouvelles mesures s'appliqueront à cette Chambre, plusieurs personnes de grande qualité voudront se présenter à la Chambre haute.

[Traduction]

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, je voudrais à mon tour remercier le sénateur de son long discours.

Veuillez m'excuser; j'ai manqué les premiers moments. J'ai été retenu à une autre réunion.

(2050)

J'ai été enchanté d'entendre que l'actuel gouvernement peut penser, marcher et mâcher du chewing-gum en même temps. Il n'y a pas que les cinq priorités; il existe un programme d'action plus large. J'ai été enchanté d'entendre cela et les sujets que le ministre a abordés. Toutefois, une chose a suscité ma curiosité et il pourrait peut-être nous en dire plus brièvement, à savoir sur l'objectif du gouvernement de sécuriser la frontière ou d'une frontière sûre. Le ministre pourrait-il nous dire ce que le gouvernement entend par sécurisation de la frontière ou existence d'une frontière sûre?

Le sénateur Fortier : Comme le sénateur le sait, le ministre Day a tenu avec ses interlocuteurs américains plusieurs réunions consacrées à la discussion de la problématique de la sécurité de l'Amérique du Nord. Notre gouvernement — et cela figurait aussi dans notre plate-forme — voulait que nos agents aux postes frontaliers soient armés, l'objectif étant de mieux les protéger.

Mon allusion à la sécurisation des frontières renvoyait au fait que M. Day a tenu ces discussions avec son homologue des États-Unis et au fait que nous tentons d'équiper comme il convient nos agents à la frontière de façon à ce qu'ils puissent faire leur travail et, ce faisant, se sentir en sécurité.

Son Honneur le Président : Je crains que le temps de parole supplémentaire de l'honorable sénateur Fortier ne soit écoulé également.

Honorables sénateurs, à moins que je ne voie d'autres honorables sénateurs se lever, il m'incombe maintenant de mettre la motion aux voix.

Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Conformément à l'ordre adopté le 26 avril voulant que les délibérations à l'ordre du jour pour la reprise du débat sur la motion relative à l'Adresse en réponse au discours du Trône, prononcé par Son Excellence la Gouverneure générale devant les deux Chambres du Parlement, se terminent le huitième jour de séance où l'ordre aura été débattu, et puisqu'aucun autre sénateur ne souhaite prendre la parole, j'ai le devoir de faire savoir au Sénat que le débat est maintenant terminé.

Le vote porte maintenant sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Hays, appuyée par l'honorable sénateur Fraser, portant que la motion soit modifiée par la suppression du point final et par l'ajout de ce qui suit :

[...] et, quoique cette Chambre prenne bonne note des diverses initiatives mentionnées sommairement dans le Discours du Trône, elle attendra avec impatience de voir si les promesses concernant les Autochtones, les nouveaux immigrants, l'amélioration de la sécurité des aînés, la protection de l'environnement et l'aide accrue aux familles agricoles seront tenues rapidement et, étant donné la saine situation financière dont le gouvernement a hérité, la Chambre trouverait injustifiée l'augmentation des impôts ou la diminution des places anticipées pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

(La motion d'amendement est adoptée.)

Son Honneur le Président : Le vote porte maintenant sur la motion modifiée, proposée par l'honorable sénateur Champagne et appuyée par l'honorable sénateur Segal.

Honorables sénateurs, puis-je me dispenser d'en donner lecture?

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion modifiée?

(La motion modifiée est adoptée, et l'Adresse en réponse au discours du Trône est adoptée.)

(Sur la motion de l'honorable sénateur Comeau, il est ordonné que l'Adresse modifiée soit grossoyée et présentée à Son Excellence la Gouverneure générale par Son Honneur le Président.)

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DÉCLARATION D'INTÉRÊT PRIVÉ

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant que nous passions au prochain article, je vous informe que le sénateur Di Nino a fait une déclaration d'intérêt privé au sujet du projet de loi S- 211 et que, conformément à l'article 32.1 du Règlement, la déclaration sera consignée dans les Journaux du Sénat.

PROJET DE LOI SUR LA JOURNÉE NATIONALE DE LA PHILANTHROPIE

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein propose que le projet de loi S- 204, instituant la Journée nationale de la philanthropie, soit lu pour la deuxième fois.

— Les honorables sénateurs se souviendront que ce projet de loi a été présenté sous le titre de projet de loi S-46, le 3 novembre 2005, et qu'il est mort au Feuilleton. Je propose maintenant que le projet de loi S-204, qui est identique, et qui institue la Journée nationale de la philanthropie, soit lu pour la deuxième fois.

Honorables sénateurs, je tâcherai d'être bref; vous avez entendu cet argument auparavant. Je crois que les sénateurs des deux côtés partagent mes sentiments.

La Journée nationale de la philanthropie est le 15 novembre de chaque année et elle est consacrée spécialement aux personnes qui sont actives dans le milieu philanthropique. Des activités liées à la Journée nationale de la philanthropie se déroulent déjà dans toutes les provinces et toutes les régions du Canada, et des milliers de personnes y participent. Cette journée a été lancée au niveau local et elle continue de prendre de l'ampleur chaque année, car elle est menée par des organisations caritatives et des organismes comme l'Association of Fundraising Professionals.

Le Canada deviendrait un chef de file mondial si le Parlement reconnaissait officiellement la Journée nationale de la philanthropie. Le Parlement peut exercer une énorme influence sur le comportement de la population. L'institution d'une journée reconnue par le Parlement enverrait un puissant message à tous les Canadiens, à savoir que les dons de charité et le bénévolat sont primordiaux pour notre société et constituent un élément crucial de tous les aspects de la vie au Canada. Cette journée offrirait une tribune permettant à tous les organismes de charité et à tous les bénévoles du pays de se réunir dans nos villages et dans nos petites et grandes villes pour raconter leurs histoires et célébrer leurs succès, grands et petits.

Il est un fait que célébrer ces succès et cerner le besoin constant d'une aide est un des moyens les plus efficaces pour inspirer d'autres personnes à donner d'elles-mêmes et à offrir leurs ressources. Par exemple, il y a une histoire remarquable, celle de Terry Fox, célébrée dans un monument situé près de la Colline du Parlement, pour montrer l'effet que les actions d'une personne peuvent avoir sur le désir de la population de soutenir de grandes et bonnes causes.

La reconnaissance de cette journée par le Parlement est importante pour plusieurs raisons, mais je n'en décrirai brièvement que quatre.

(2100)

Tout d'abord, cela stimule les dons. Le soutien du secteur caritatif doit provenir de différentes sources. Le financement gouvernemental direct reste la source première et essentielle de financement de la plupart des organisations. Cependant, à une époque où les budgets rétrécissent et où les besoins augmentent, la philanthropie devient de plus en plus un élément important de la solution.

Deuxièmement, cela consolide les collectivités et la société civile. Donner encourage une plus grande participation des citoyens et un plus grand respect de la société civile. Lorsque les gens donnent, ils investissent une partie d'eux-mêmes dans leur collectivité et jettent des bases pour l'avenir de notre société. Simplement parce qu'ils oeuvrent pour un même but, donner peut rapprocher des gens qui, normalement, n'auraient aucun contact entre eux.

Troisièmement, la reconnaissance d'une telle journée renforcerait le partenariat croissant entre le gouvernement fédéral et le secteur bénévole. En 2000, le gouvernement fédéral a lancé un partenariat avec le secteur bénévole et a dégagé 94 millions de dollars pour l'administration de l'Initiative du secteur bénévole. Cette initiative a débouché sur la présentation conjointe par le gouvernement et le secteur bénévole de recommandations qui ont notamment abouti à la plus vaste réforme réglementaire du secteur caritatif depuis plus d'une génération.

Enfin, la reconnaissance de la Journée nationale de la philanthropie est une question populaire qui échappe à tout esprit de parti, ce qu'appuie fortement la population canadienne par ses déclarations et ses actions. Selon des études, 90 p. 100 des Canadiens croient que le secteur sans but lucratif devient de plus en plus important pour tous les Canadiens, dans tous les segments de la société. En outre, 59 p. 100 des Canadiens croient que les organisations sans but lucratif servent en première ligne dans des centaines de secteurs allant des services sociaux aux soins de santé en passant par l'environnement et les arts.

Honorables sénateurs, au Canada nous pouvons faire des choix. Les Canadiens peuvent passer leur temps et dépenser leur argent d'innombrables manières, mais, pour les bénévoles et les donateurs, la philanthropie n'est pas uniquement un choix de plus, c'est une déclaration sur le sens véritable de leur vie. Tous les sénateurs que je connais consacrent bénévolement du temps à de nombreuses oeuvres de bienfaisance. Nous savons de quoi il est question lorsque nous donnons notre appui au projet de loi.

Déjà, le nombre de Canadiens qui en viennent à compter sur des programmes et des services fournis par des organisations sans but lucratif augmente. Le secteur bénévole a fait une marque indélébile sur l'ensemble de la société canadienne. Il y a 81 000 organisations sans but lucratif enregistrées au Canada et, selon Statistique Canada, elles reçoivent environ 10 millions de dollars en dons chaque année, mais le secteur bénévole s'étend bien au-delà des programmes et services philanthropiques.

D'après la récente étude intitulée Force vitale de la collectivité : faits saillants de l'Enquête nationale auprès des organismes à but non lucratif et bénévoles, en 2003, le secteur a enregistré des recettes de 112 milliards de dollars et employait plus de 2 millions de personnes. De plus, ces organismes font appel à 2 milliards d'heures de bénévolat tous les ans, ce qui équivaut à 1 million d'emplois à temps plein. Tous les Canadien sont touchés par le travail des bénévoles d'une façon ou d'une autre. Comme je l'ai déjà mentionné, tous les sénateurs ont des liens étroits avec le secteur du bénévolat de leur région.

Le secteur à but non lucratif a une incidence sur la santé de l'économie. Sa contribution économique dépasse celle de nombreuses industries importantes au Canada et, d'après Statistique Canada, en 1999, elle constituait 6,8 p. 100 du produit intérieur brut. La part du PIB attribuable au secteur à but non lucratif est 11 fois supérieure à celle de l'industrie de l'automobile et plus de 4 fois supérieure à celle du secteur agricole.

La Journée nationale de la philanthropie jouit de l'appui de nombreux organismes bénévoles, y compris Imagine Canada, le Philanthropic Voluntary Sector Forum, l'Association canadienne des professionnels en dons qualifiés et l'Association du Barreau canadien, qui représente des milliers d'organismes à but non lucratif au Canada.

Une fois de plus, honorables sénateurs, je vous encourage à reconnaître officiellement ce jour spécial en adoptant ce projet de loi. Ne devrions-nous pas réserver un jour par année pour souligner les efforts du secteur à but non lucratif, de tous les Canadiens et de tous les organismes canadiens, et les appuyer?

Honorables sénateurs, la question suivante est au coeur de toutes les religions et elle est éternelle : est-il plus louable de donner que de recevoir? La Journée nationale de la philanthropie est la réponse affirmative et enthousiaste du Parlement à cette question. J'encourage les honorables sénateurs à adopter ce projet de loi le plus rapidement possible, car il représente un geste magnifique du Parlement en hommage aux Canadiens qui oeuvrent dans le secteur du bénévolat. Peut-être qu'avec l'assentiment des deux côtés, nous pourrions renvoyer ce projet de loi à un comité plénier étant donné que son essence est non partisane. Nous pourrions ainsi en accélérer l'adoption.

(Sur la motion du sénateur Champagne, le débat est ajourné.)

PEUPLES AUTOCHTONES

AUTORISATION AU COMITÉ DE POURSUIVRE L'ÉTUDE SUR LA PARTICIPATION DES PEUPLES ET ENTREPRISES AUTOCHTONES AUX ACTIVITÉS DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

L'honorable Gerry St. Germain, conformément à l'avis donné le 2 mai 2006, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, soit autorisé en conformité avec l'article 86(1)q) du Règlement, à étudier, afin d'en faire rapport, la participation des peuples et entreprises autochtones aux activités de développement économique au Canada. En particulier, que le Comité soit autorisé à analyser les éléments propices à leur succès et les obstacles à leur réalisation dans tous les secteurs de l'économie, notamment mais sans s'y limiter, les projets industriels de grande envergure comme les pipe-lines, l'exploitation des ressources non renouvelables comme le pétrole, le gaz et les ressources minières, l'exploitation des ressources renouvelables, le tourisme, les services aux entreprises et les domaines connexes;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus durant la première session de la trente-huitième législature soient renvoyés au Comité;

Que le Comité fasse périodiquement rapport au Sénat, mais au plus tard le 30 juin 2007 et qu'il conserve jusqu'au 1er septembre 2007 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

L'honorable Joan Fraser (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, avant de voter, je me demande si l'honorable sénateur ne pourrait pas donner au Sénat quelques explications sur ce qu'implique cet ordre de renvoi.

Le sénateur St. Germain : Honorables sénateurs, cette étude a été commencée sous le gouvernement précédent par le comité que présidait le sénateur Sibbeston, avec moi comme vice-président. Elle cherche à déterminer pourquoi certaines collectivités autochtones connaissent un bon développement économique alors que ce n'est pas le cas pour d'autres. Nous essayons de découvrir la recette qui fait la formidable réussite économique des Premières nations de Westbank ou d'Osoyoos, pour en nommer deux qui se trouvent dans ma province, ou encore des bandes de Musqueam et de Squamish. Tout près d'elles, des nations autochtones ont énormément de difficulté à assurer simplement leur subsistance quotidienne. Voilà les raisons pour lesquelles nous avons entrepris l'étude.

(2110)

Une bonne partie de l'étude, plus de la moitié en fait, a été réalisée. Nous voudrions terminer l'étude parce que nous découvrons des choses frappantes. L'une d'elles, c'est que la gouvernance, la capacité de s'auto-administrer, de maîtriser leur destinée et de se séparer de la direction paternaliste du MAINC est devenue vraiment essentielle. Ce sont là certaines des choses que nous découvrons. Nous souhaitons continuer cet exercice, et nous demandons au Sénat de nous soutenir pour que nous puissions poursuivre cette étude.

L'honorable Serge Joyal : Puis-je poser une question au sénateur?

Le sénateur St. Germain : Oui.

Le sénateur Joyal : Je ne m'oppose absolument pas au mandat, sénateur St. Germain, mais en réponse à la question posée par le sénateur Fraser, vous avez dit que, à votre avis, vous aviez déjà réalisé la moitié du travail. En lisant la motion, j'ai remarqué que vous demandiez un mandat ne dépassant pas le 30 juin, ce qui est dans plus d'un an. Vous prendra-t-il autant de temps pour terminer la seconde partie de ce que vous voulez faire?

Le sénateur Prud'homme : Absolument!

Le sénateur St. Germain : Je vous remercie de votre question, sénateur Joyal. J'espère que cela ne sera pas le cas, mais il se peut qu'il faille autant de temps. À titre d'information pour les sénateurs, nous allons rencontrer le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien cette semaine. Un sénateur libéral a déjà rencontré le ministre en privé pour discuter du mandat que nous voulons parce qu'il nous reste à étudier des revendications territoriales ayant des effets considérables pour notre nation. Caledonia en est un exemple.

Nous voulions disposer d'assez d'argent dans l'éventualité où nous devions agir autrement. Il se peut que nous devions nous adresser au Sénat pour une autre question qui serait imminente et requerrait son attention. Les revendications territoriales en sont une. Comme vous le savez, le règlement de revendications territoriales tarde à se produire. Il faut 20 à 30 ans pour que ces revendications territoriales parviennent à un règlement, ce qui entraîne des coûts juridiques horriblement élevés, sans parler de tout le temps qu'il faut y consacrer et des générations d'Autochtones qui sont perdues à cause de cela.

J'attends avec impatience l'examen du ministère. Ce dernier dispose d'un budget de 6,1 milliards de dollars et, dans le passé, il importait peu qui formait le gouvernement. Que celui-ci soit libéral ou conservateur, la situation est la même pour les peuples autochtones. Nous ne pouvons leur fournir de l'eau potable propre et sûre. Cela n'a rien de bien difficile à comprendre. Il y a des problèmes qui, je le crois fermement, requièrent une attention immédiate.

Ce que nous sommes en train de faire est confirmé par d'autres études sur les questions autochtones qui ont été menées au Sud de la frontière, notamment sur la gouvernance. Nous ne voulons pas prendre de risques, au cas où nous aurions à reporter une partie de cette étude pour aborder une question autochtone plus fondamentale. C'est pourquoi nous avons demandé ce temps.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Mon intérêt a été éveillé en passant en revue le mandat du sénateur St. Germain. J'essaie d'examiner la question de l'eau potable sur les terres autochtones depuis cinq ans en ne recevant que très peu d'appuis dans cette enceinte. Dans le cadre de son mandat, le sénateur St. Germain a-t-il l'intention d'étudier le problème et de tenir le gouvernement responsable de son échec en matière d'approvisionnement en eau potable des communautés autochtones?

Le sénateur St. Germain : Je remercie également le sénateur Grafstein de sa question. Ce volet fera partie de mon mandat. J'ai l'intention de déterminer la raison pour laquelle le ministère ne peut desservir les parties intéressées convenablement. L'eau est primordiale. J'étais ici lorsque vous avez soulevé cette question dans le passé et vous méritez des félicitations pour votre travail. La question de l'eau sera certainement au centre de notre enquête. Il se peut que ce soit l'une des raisons pour lesquelles nous entreprenons cette démarche. Je ne veux pas parler au nom du comité car je dois d'abord le consulter. Toutefois, je parle actuellement au nom du sénateur St. Germain, qui s'intéresse aux questions autochtones depuis très longtemps. J'ai parlé au sénateur Gill et au sénateur Segal et ils ont manifesté un intérêt considérable.

Si nous n'abordons pas ces problèmes d'un angle différent, nous n'obtiendrons jamais plus que ce que nous avons toujours obtenu. Je pense qu'il est temps de suivre l'exemple du sénateur, notamment sur la question de l'eau.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, je pense que le sénateur Grafstein n'a parlé que des eaux potables. Je veux tout de même lui rendre hommage puisque son projet de loi ne vise pas seulement les Autochtones.

Si j'ai bien compris le projet de loi S-208, on veut que l'environnement soit pour tout le monde car ce ne sont pas seulement les Premières nations qui ont des problèmes d'eau potable. Je pense avoir bien compris que le projet de loi S-208 a une portée générale et ne vise pas les Autochtones en particulier.

Je reconnais avec l'honorable sénateur qu'il y un plus grand problème en ce qui concerne les Premières nations et je lui souhaite bonne chance. Je compte être présent lorsqu'il en discutera.

[Traduction]

Le sénateur St. Germain : Le sénateur l'a dit clairement, mais je pense que le sénateur Grafstein ne l'a pas précisé. Il a parlé des questions autochtones, mais il a aussi dit que c'est l'eau potable qui le préoccupe...

[Français]

L'eau potable est pour tous les Canadiens et pas seulement pour les Autochtones.

[Traduction]

Le sénateur Grafstein : Honorables sénateurs, il s'agit d'exiger un traitement de l'eau potable de qualité pour tous, dans toutes les régions.

Le sénateur Prud'homme : C'est ce que je disais.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

AUTORISATION AU COMITÉ DE POURSUIVRE L'ÉTUDE SUR LES QUESTIONS CONCERNANT L'AFRIQUE

L'honorable Hugh Segal, conformément à l'avis du 4 mai 2006, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à étudier, en vue d'en faire rapport, les défis en matière de développement et de sécurité auxquels fait face l'Afrique; la réponse de la communauté internationale en vue de promouvoir le développement et la stabilité politique de ce continent; la politique étrangère du Canada envers l'Afrique; ainsi que d'autres sujets connexes;

Que les documents et les témoignages recueillis à ce sujet au cours de la première session de la trente-huitième législature soient renvoyés au comité;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 31 octobre 2006; et que le Comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenu dans son rapport final et ce jusqu'au 30 novembre 2006.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

L'honorable Joan Fraser (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, pouvons-nous avoir une brève explication de ce dont il s'agit?

Le sénateur Segal : Je remercie madame le sénateur Fraser de sa question. L'élément qu'on trouve au no 56 du Feuilleton concernant l'Afrique prévoit la poursuite d'une énorme quantité de travail accomplie par le comité du Sénat sous la distinguée présidence du sénateur Stollery et la coprésidence du sénateur Di Nino.

Le comité a effectué un travail exhaustif en rencontrant des Africains et des spécialistes de l'Afrique et en effectuant des voyages en Afrique. Le comité s'est rendu en Éthiopie, en République démocratique du Congo, au Nigeria et au Mali. Il a rencontré, entre autres, le président de la Commission de l'Union africaine, le premier ministre du Mali et de l'Éthiopie, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, la CEDEAO, et d'autres dirigeants.

Le comité a aussi rencontré des représentants des Nations Unies et de diverses organisations qui s'intéressent à l'Afrique. Il n'a pas pu terminer ses travaux en raison de la dissolution de la dernière législature. Il espère obtenir un ordre de renvoi du Sénat afin de poursuivre ses activités et de présenter un rapport le plus rapidement possible, rapport assorti de recommandations constructives reflétant le partenariat que nous avons avec nos concitoyens de la planète qui, comme le sénateur Dallaire l'a signalé à maintes reprises, traversent une période de souffrance. En tant que Canadiens et membres de ce comité, nous avons demandé un ordre de renvoi afin de poursuivre nos travaux et d'appuyer les efforts que d'autres ont faits avant mon arrivée au Sénat.

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au sénateur Segal.

[Français]

Le sénateur Dallaire : Honorables sénateurs, je n'ai pu consulter qu'un volet du travail fait par le passé et cela concerne la sécurité et la stabilité de la région. Je pense, en particulier, au fait qu'il y a tellement de pays en implosion, souvent à cause d'abus ou par manque de disponibilité de troupes militaires responsables provenant de gouvernements démocratiques.

[Traduction]

Il y a aussi la force africaine d'intervention, que quelques pays ont appuyée. Au Darfour, elle est intervenue avant les Nations Unies, bien qu'elle ait de cinq à dix années de retard.

Le sénateur Stratton : Venez-en à votre question.

Le sénateur Dallaire : Examinera-t-on de façon particulière la question de la sécurité pour ce qui est de donner à l'Afrique la capacité d'intervenir de premier chef lors de crises qui se transforment souvent en désastres humanitaires?

Le sénateur Segal : Je remercie le sénateur Dallaire de sa question. Je signale que dans les fonctions qu'il exerçait avant de devenir sénateur, il a comparu et témoigné devant le comité. J'ai eu le privilège de lire son témoignage et de m'en inspirer. Rien ne me permet de croire que mes collègues du comité souhaiteraient exclure la question de la sécurité, je ne voudrais certainement pas exclure cette question, et les recommandations ou les idées dont nous pourrions saisir le Sénat lorsque nous aurons terminé nos travaux.

Le sénateur Stratton : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

AUTORISATION AU COMITÉ D'ÉTUDIER LES QUESTIONS SE RAPPORTANT AUX RELATIONS ÉTRANGÈRES EN GÉNÉRAL

L'honorable Hugh Segal, conformément à l'avis donné le 4 mai 2006, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, en conformité avec l'article 86(1)h) du Règlement, soit autorisé à étudier les questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant aux relations étrangères en général;

Que le Comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 31 mars 2008.

Son Honneur la Présidente intérimaire : L'honorable sénateur Segal, avec l'appui de l'honorable sénateur Di Nino, propose que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères... Puis-je me dispenser de lire le texte de la motion?

L'honorable Joan Fraser (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, je n'ai jamais vu un ordre de renvoi libellé aussi vaguement depuis que je siège ici. Comme je l'ai déjà dit, à moitié sérieusement, au sujet d'un autre ordre de renvoi, il pourrait en théorie englober les voyages interplanétaires.

Le président du comité pourrait-il nous expliquer ce qu'il a l'intention de faire avec un tel ordre de renvoi?

L'honorable Terry Stratton : Honorables sénateurs, si je puis me permettre de faire une suggestion, je crois que ce projet d'étude devrait être renvoyé au Comité de la régie interne pour l'élaboration d'un budget. Si le projet sort trop de l'ordinaire, nous devrons faire les vérifications et les ajustements nécessaires, comme ce sera le cas de l'étude sur l'environnement proposée par le sénateur Bank.

Le sénateur Fraser : J'ai énormément de respect pour le travail du Comité de la régie interne. Cependant, puisqu'il s'agit d'un ordre de renvoi sur lequel le Sénat est appelé à se prononcer, j'estime que le Sénat a droit à une explication. Le Comité de la régie interne pourra ensuite faire son travail de raffinement avec toute la rigueur qu'on lui connaît.

Le sénateur Segal : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Fraser de sa question.

Cet ordre de renvoi particulier et la demande y afférente visent à ce que le comité puisse, lorsque ce sera possible, ici à Ottawa, recevoir des délégations et des dignitaires étrangers qui souhaitent rencontrer officiellement les membres du comité. Le comité s'est principalement concentré sur ses responsabilités législatives et particulières, notamment à l'égard de l'Afrique, et on me dit qu'il se sert très judicieusement et avec énormément de retenue de cet ordre de renvoi. L'objectif n'est pas d'en arriver à une motion générale, mais plutôt de réagir intelligemment et diplomatiquement à des demandes et à des questions imprévues.

Comme les honorables sénateurs le savent probablement, dans le passé, cet ordre de renvoi a permis au comité — c'est d'ailleurs le même ordre de renvoi qui a été donné dans le passé — de rencontrer, d'une part, un groupe de femmes irakiennes lors d'une visite organisée par le ministère des Affaires étrangères dans le cadre d'un programme de deux semaines sur les droits de la personne et l'égalité des sexes à Ottawa, et, d'autre part, de rencontrer l'ambassadeur ukrainien pour discuter de l'élection présidentielle de décembre 2004. En faisant cette demande au Sénat, je ne présume absolument pas de ce que le Comité de la régie interne décidera de faire à l'égard de notre budget lorsqu'il sera présenté en temps et lieu.

Le sénateur Fraser : Je remercie le sénateur Segal de sa réponse et je note avec grand intérêt qu'il a mentionné des délibérations tenues ici à Ottawa relativement à cet ordre de renvoi. Cela m'a fait plaisir.

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, la lecture de l'alinéa 86(1)h) du Règlement du Sénat, m'amène à me demander si, sans aucune mauvaise intention, nous ne nous écartons pas des règles qui régissent le mandat des différents comités permanents du Sénat. Permettez-moi de paraphraser une telle motion concernant n'importe quel comité permanent du Sénat, par exemple, que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, conformément au paragraphe 86(1), soit autorisé à examiner toute question pouvant être soulevée de temps à autre concernant les affaires juridiques et constitutionnelles du Canada. Tout comité pourrait demander un mandat aussi vaste et faire ce que bon lui semble.

Je poursuis avec l'exemple que je viens de donner concernant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Les membres du comité ont reçu, deux fois de suite de cette Chambre, le mandat d'étudier la disposition de non- dérogation en ce qui concerne les peuples autochtones. Je vois que mon collègue et ami, le sénateur St. Germain, s'intéresse à la question. Nous ne pouvons poursuivre cette étude à moins de demander au Sénat, au moyen d'une motion, le mandat nécessaire pour nous habiliter à étudier cette question précise.

Je me demande si nous n'aurions pas dû présenter une motion comportant le même libellé que celle dont nous discutons actuellement, afin que n'importe quel comité puisse décider, proprio motu, d'étudier ce qui lui semble bon. Je ne suis pas opposé à ce que des visiteurs étrangers viennent au Canada ou à ce que le président d'un pays rencontre des sénateurs. Je serais le dernier à voter contre leur présence dans notre pays.

Cependant, sans le vouloir peut-être, nous ne respectons pas le fond du mandat des comités permanents. Nous pourrions modifier le mandat de n'importe quel comité pour le rendre conforme au libellé vague de cette motion et nous aurions alors un mandat tout à fait différent pour les comités du Sénat.

Ce n'était pas l'intention initiale de donner aux comités un mandat aussi large. Le seul qui a un mandat de ce genre est le Comité de la régie interne et son existence est garantie dans la Loi sur le Parlement du Canada.

C'est la raison pour laquelle je pense que certains pourraient hésiter à accepter la motion sans comprendre ce qui pourrait arriver à tous les autres comités.

Ainsi, le sénateur Corbin a une motion portant sur les langues autochtones. Nous l'avons étudiée et le sénateur Di Nino faisait partie du sous-comité, tout comme moi. Si nous soumettons à ce comité quoi que ce soit qui se rapporte au Sénat, n'importe quel comité pourra agir comme bon lui semble. Si cette disposition se retrouve dans le Règlement du Sénat, c'est parce que le Sénat souhaite savoir ce que les comités font pour que les sénateurs sachent à quoi s'attendre des comités. Il ne s'agit pas de contrôler les comités, mais de veiller à ce que les sénateurs puissent participer à leurs travaux.

Le sénateur Stratton : Le vote, s'il vous plaît.

Le sénateur Joyal : L'honorable sénateur a-t-il envisagé cet élément lorsqu'il a présenté sa motion?

Le sénateur Segal : Je tiens à remercier l'honorable sénateur de sa question et de ses précisions au sujet de l'alinéa 86(1)h) du Règlement. Je tromperais tous les sénateurs si je donnais la moindre impression d'avoir examiné en profondeur les conséquences plus larges de cela.

Un tel ordre de renvoi a déjà été utilisé pour ce comité au Sénat et on me dit — c'est d'ailleurs ce que j'ai constaté, d'après les comptes rendus du comité — que celui-ci s'en est servi en faisant preuve d'une grande discipline, de façon responsable et précise. Je l'ai donc soumis à l'attention des sénateurs afin que nous puissions agir avec la même autorité dans l'avenir, comme cela avait été le cas par le passé, avec toutes les limites proposées par le sénateur Fraser. C'est dans cet esprit que la question a été soumise.

Il se peut fort bien que l'on doive charger le Comité du Règlement de se pencher de façon plus approfondie sur l'application de l'alinéa 86(1)h) et sur le risque d'établir sans le vouloir des mandats plus vastes que ce que le Sénat voudrait établir sans cadre de référence. Je n'ai pas d'objection à cet égard.

Je demande aux honorables sénateurs de permettre au comité de continuer ses travaux, car nous commençons à recevoir des demandes de dignitaires étrangers qui aimeraient comparaître devant le comité. Je voudrais m'assurer que nous disposons de l'ordre de renvoi approprié du Sénat afin que ces visites puissent avoir lieu au moment jugé opportun par le comité.

(2130)

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, je constate qu'on lit « s'il y a motion à cet effet » à l'alinéa 86(1)h) du Règlement. De toute évidence, on s'adresse à nous pour étudier ces questions et examiner le pouvoir que demande le comité.

J'ai eu le privilège de siéger au Comité de la régie interne et au sous-comité des budgets et j'ai entendu des présidents de comité demander pourquoi, puisque le Sénat leur avait donné un mandat, le Comité de la régie interne voudrait réduire leurs dépenses?

Je crois que le sénateur Segal pourrait régler le problème en limitant sa motion à ce qu'il a déclaré, à savoir à des études qui se feraient ici, à Ottawa, où des délégations seraient reçues de temps à autre, comme pourrait le demander le comité.

Le sénateur Segal : À part peut-être pour une conférence du Commonwealth en Afrique, je ne m'attends pas à ce qu'on demande au Comité de la régie interne des fonds outre ce qui a déjà été accepté par le Sénat, pour des déplacements.

Pour ce qui est du mandat général et du besoin de réaliser des études à l'extérieur d'Ottawa, comme le sénateur Fraser a eu la gentillesse de le confirmer, nous présenterions une demande précise au Comité de la régie interne — je suis heureux de le préciser ici — si mes collègues du comité le jugeaient opportun. Nous n'irions certainement pas jusqu'à supposer que la mention de l'Afrique nous confère des pouvoirs au-delà de ce qui est prévu ou du mandat général du comité.

L'honorable Marcel Prud'homme : Honorables sénateurs, j'ai attendu neuf ans pour faire partie du Comité des affaires étrangères pour toutes sortes de raisons que je préfère ne pas mentionner aujourd'hui. J'ai abouti au Comité des banques, où je ne connaissais rien, ce qui fait que je n'ai pas voulu y rester. J'ai voté contre la fusion des banques et je suis heureux de voir que le nouveau gouvernement y est opposé, pour l'instant du moins.

Je suis retourné au Comité des affaires étrangères, où j'ai été très actif dans le dossier de l'Afrique. Grâce à la générosité de certaines personnes, je suis membre à part entière du Comité de la régie interne.

Je compatirais avec les honorables sénateurs si d'autres tentaient d'imposer des limites à leurs demandes. Par exemple, sans vouloir manquer de respect à quiconque, le Comité de la sécurité nationale a demandé une somme d'argent importante. Si un comité reçoit un ordre de renvoi, il devrait disposer des sommes nécessaires pour faire son travail; si les honorables sénateurs ne souhaitent pas qu'un comité ait un mandat, ils ne devraient pas lui en confier un. Le sénateur est un président très compétent pour qui j'ai beaucoup d'estime. Je le lui ai déjà dit en privé et je le déclare maintenant publiquement. J'ai la plus haute estime pour sa vivacité d'esprit, son intelligence, son savoir-faire et sa diplomatie. Je pense qu'il fera du très bon travail en tant que président du Comité des affaires étrangères. Cependant, nous ne pouvons le nommer président de je ne sais quel comité qui a le mandat de faire je ne sais quoi.

Le comité que préside le sénateur s'est vu confier un mandat par le gouvernement précédent et il ne fait que poursuivre sur sa lancée. Jusqu'à maintenant, le sénateur a fait du très bon travail. C'est pour des raisons de santé que je n'ai pas accompagné les sénateurs en Afrique. J'ai pris la décision de ne pas y aller pour qu'il soit plus facile de choisir des participants.

Tout ce que je demande, c'est que le sénateur et ses collègues travaillent avec un peu plus de passion. Je propose que, une fois de temps en temps, le comité aille au-delà de son mandat et qu'un comité spécial soit constitué comme nous le faisions dans l'ancien temps avec la Chambre des communes et le Sénat, sous la très habile présidence du sénateur van Roggen, un bon libéral dont j'occupe le bureau avec beaucoup de respect. Le sénateur van Roggen était un merveilleux président du Comité des affaires étrangères. C'était un libéral de Vancouver.

J'espère que le sénateur obtiendra ce qu'il demande. On ne devrait pas imposer de limites au financement de son comité alors qu'aucune limite n'est imposée à d'autres.

MODIFICATION DE LA MOTION

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, je me demande s'il y a pas une faute de frappe dans le Feuilleton des avis. Sous l'article no 57, il est indiqué que le comité fasse rapport au Sénat au plus tard le 31 mars 2008. C'est dans deux ans. Ne devrait- on pas plutôt lire à la fin du prochain exercice financier, soit 2007?

L'honorable Hugh Segal : Je ne crois pas qu'on ait délibérément indiqué l'année 2008, si ce n'est pour obtenir le mandat nécessaire pour accomplir notre travail. Si les honorables sénateurs préfèrent 2007, je n'y verrais pas d'inconvénient.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le sénateur Segal propose l'adoption de cette motion...

Le sénateur Moore : Modifiée?

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le sénateur propose-t-il une modification?

Le sénateur Segal : Si on y substitue l'année 2007, je n'y vois aucun inconvénient.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, êtes- vous d'accord pour que la date soit modifiée à 2007?

Des voix : D'accord.

L'honorable John G. Bryden : En tant que membre de ce comité et du comité directeur, je n'y vois aucune objection.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Est-ce d'accord pour que nous modifiions le renvoi conformément au Règlement?

Des voix : D'accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, êtes- vous d'accord pour que la motion modifiée soit adoptée?

Des voix : D'accord.

(La motion modifiée est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 10 mai 2006, à 13 h 30.)


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