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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 69

Le mardi 13 février 2007
L'honorable Losier-Cool, Présidente intérimaire


LE SÉNAT

Le mardi 13 février 2007

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LE PROGRAMME NOUVEAUX HORIZONS POUR LES AÎNÉS

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, je prends très au sérieux mes nouvelles responsabilités de secrétaire d'État aux Aînés et, à ce titre, j'ai été très préoccupée mercredi dernier, le 7 février, lorsque le sénateur Chaput a déclaré ce qui suit au cours de la période des questions :

Une rumeur veut que le gouvernement pense à sabrer et supprimer le programme Nouveaux Horizons pour les aînés.

La source de cette prétendue rumeur n'a pas été précisée. Comme je l'ai dit dans ma réponse mercredi dernier, au cours de toutes mes rencontres récentes avec des groupes d'aînés et des personnes âgées, je n'ai jamais entendu de préoccupation liée à l'avenir de ce programme. Les médias n'ont pas remis en cause l'engagement du gouvernement conservateur relativement à ce programme.

Le programme Nouveaux Horizons pour les aînés assure un financement à des centaines de projets communautaires dans tout le pays qui encouragent les aînés à apporter une contribution à leur collectivité par le truchement d'une participation sociale et d'une vie active. Les projets à but non lucratif reçoivent de petites subventions de moins de 25 000 $ pour des initiatives qui enrichissent la vie des personnes âgées en les aidant à partager leurs expériences, à faire du bénévolat au sein de leur collectivité et à améliorer leurs aptitudes à la vie quotidienne.

En 2005-2006, le budget pour les subventions versées dans le cadre du programme Nouveaux Horizons pour les aînés est de 15,6 millions de dollars. Il y a moins d'un mois, le 18 janvier, le ministre Solberg a annoncé un financement dans le cadre de ce programme afin d'aider deux groupes d'aînés au Nouveau-Brunswick et des anciens chez les Métis de la Saskatchewan à transmettre leurs compétences et leur culture aux jeunes.

(1405)

Honorables sénateurs, je ne conteste pas le droit de qui que ce soit ici de poser des questions sur les politiques gouvernementales pendant la période des questions. Toutefois, je crois fermement qu'il incombe à chacun d'entre nous de garder présent à l'esprit le fait que les rumeurs non fondées et les propos alarmistes n'ont pas leur place au Parlement, surtout lorsqu'ils ont une incidence sur nos aînés.

[Français]

L'HONORABLE MARCEL PRUD'HOMME, C.P.

FÉLICITATIONS À L'OCCASION DE SON QUARANTE-TROISIÈME ANNIVERSAIRE DE VIE PARLEMENTAIRE

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, je regrette que la vedette dont j'aimerais parler ait dû s'absenter pour quelques minutes. Je voudrais rendre un hommage particulier aujourd'hui au doyen de notre Parlement, l'honorable Marcel Prud'homme, dont on célébrait le 43e anniversaire de vie parlementaire le samedi 10 février dernier. C'est donc la première occasion qui m'est donnée de le souligner.

Élu député pour la première fois en 1964, âgé d'à peine 30 ans, le sénateur Prud'homme sera réélu par les gens de la circonscription de Saint- Denis à huit reprises, résistant même à la vague conservatrice qui a déferlé sur le Canada en 1984 et 1988.

Nommé au Sénat en 1993, c'est non seulement grâce à sa ténacité, à sa combativité et à sa profonde conviction que le sénateur Prud'homme s'est mérité la palme de la longévité parlementaire, mais aussi — et surtout — grâce à un flair politique que je qualifierais de légendaire, voire d'unique.

Toujours à l'écoute de ses électeurs, le sénateur Prud'homme s'est distingué en particulier en nouant des liens très serrés avec les communautés culturelles et en aidant les immigrants à s'adapter à leur nouvelle vie au Canada.

[Traduction]

En outre, que ce soit à la Chambre des communes ou au Sénat, il a apporté, et continue d'apporter, une contribution importante au débat sur des questions qui lui tiennent particulièrement à cœur, notamment le désarmement, la paix au Moyen-Orient et la diplomatie parlementaire.

[Français]

Orateur fougueux, grand patriote canadien, politicien hors pair, Marcel Prud'homme mérite nos éloges sincères ainsi que notre profond respect puisqu'il est devenu, à titre de doyen, la mémoire institutionnelle de notre Parlement.

[Traduction]

Durer si longtemps dans une profession dont on dit si souvent qu'une semaine correspond à une éternité exige une grande dose de générosité, de vision et de dévouement. Nous félicitons le sénateur Prud'homme et lui offrons nos meilleurs vœux à l'occasion de cet anniversaire très spécial.

[Français]

Puisse sa sagesse, son expérience et ses nombreux talents continuer d'apporter une contribution exceptionnelle aux travaux de cette Chambre et de servir de modèle à tous nos collègues, et en particulier à ceux qui ont eu le plaisir de siéger avec lui à l'autre endroit. Longue vie au sénateur Prud'homme!

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour saluer notre collègue, l'honorable Marcel Prud'homme, qui a célébré samedi, le 10 février dernier, le 43e anniversaire de son élection au Parlement du Canada.

Le sénateur Prud'homme est, à n'en pas douter, un excellent parlementaire qui a fait ses preuves pendant plus de quatre décennies et qui fait honneur au Sénat comme à tout le Parlement.

Je me rappelle que le sénateur Prud'homme, alors que j'étais tout nouveau député en 1984 et que j'en étais à mes débuts sur la Colline du Parlement, fut un des premiers députés à me saluer. Marcel Prud'homme s'assurait que tous les nouveaux députés à cette époque soient les bienvenus sur la Colline du Parlement.

À cette époque, Marcel Prud'homme siégeait au caucus de l'opposition et c'était donc un peu difficile pour moi de concevoir qu'un député siégeant de l'autre côté de la Chambre puisse aussi bien nous considérer. J'ai compris avec les années que Marcel Prud'homme faisait de même avec tous, peu importe le parti politique auquel appartenait le député.

J'offre donc mes félicitations au sénateur Marcel Prud'homme pour une carrière menée au service du pays et le remercie pour tout ce qu'il fait quotidiennement pour les Canadiens et les Canadiennes.

[Traduction]

L'INTERDICTION DE L'USAGE DU TABAC DANS LES LIEUX PUBLICS PARTOUT AU PAYS

L'honorable Mac Harb : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour vous annoncer que les autorités de l'Union européenne comptent interdire l'usage du tabac dans les lieux publics dans ses 27 pays membres. Chaque année, 650 000 Européens meurent de maladies attribuables au tabac, et le commissaire à la Santé de l'UE, Markos Kyprianou, a dit qu'interdire l'usage du tabac dans tous les lieux publics serait extrêmement bénéfique pour la santé de tous.

[Français]

Au Canada, bien que le Sénat ait adopté à l'unanimité une motion exhortant le gouvernement fédéral à protéger les Canadiens en interdisant les aires pour fumeurs dans les lieux de travail fermés relevant de la compétence fédérale, le gouvernement n'a malheureusement encore rien fait.

(1410)

C'est un dossier à caractère non partisan qui demeure sans solution malgré les pressions exercées au Canada comme dans le monde entier pour protéger la santé des travailleurs et respecter l'obligation que nous avons, en vertu des traités internationaux, de leur assurer des lieux de travail sans fumée.

[Traduction]

Honorables sénateurs, je crois que ce problème pourrait se régler rapidement avec la coopération des divers ministères concernés. Il y a un certain nombre de moyens de moderniser notre législation et de purifier l'air que nous respirons. On pourrait notamment modifier le projet de loi sur la qualité de l'air, la Loi sur la santé des non- fumeurs ou le Code canadien du travail, par l'entremise de ce qu'on pourrait appeler l'« amendement Heather Crowe » pour commémorer la campagne publique qu'elle a menée contre la fumée secondaire et sa mort prématurée.

L'Union européenne est résolue à interdire l'usage du tabac dans les lieux publics même si elle doit convaincre 27 gouvernements d'appuyer la mesure. Honorables sénateurs, si nous travaillons ensemble sans sectarisme et dans un esprit de coopération, nous serons certainement capables de faire en sorte que tous les lieux de travail fédéraux soient sans danger pour les Canadiens qui y travaillent.

Je demande au gouvernement fédéral de respecter la volonté des Canadiens et celle du Sénat et de passer à l'action.

SERVICE SOCIAL INTERNATIONAL CANADA

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour ajouter ma voix à celles des sénateurs Dallaire, Munson et Mitchell au sujet de Service social international Canada. SSI Canada est un organisme à but non-lucratif qui assure à l'échelle mondiale des liens avec des organismes de services sociaux. En collaborant avec les ministères fédéraux et provinciaux, SSI élabore et promeut des politiques nationales et internationales sur la protection des enfants, les plus vulnérables de nos concitoyens.

Étant l'un des nombreux défenseurs du travail des organisations sans but lucratif canadiennes, je trouve décourageant d'entendre dire que le travail inestimable que fait SSI Canada est menacé par les compressions budgétaires pratiquées par le nouveau gouvernement du Canada. Comme pour bien des organisations sans but lucratif, la majeure partie du financement de SSI provient de dons. Cependant, ces organisations n'en recueillent pas suffisamment et beaucoup comptent sur le financement gouvernemental pour pouvoir faire leur important travail.

Pour pouvoir remplir son mandat, SSI Canada compte sur la somme de 150 000 $ qu'il reçoit habituellement du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Cependant, en raison des compressions budgétaires de l'automne dernier, SSI ne recevra pas de fonds pour l'an prochain, ce qui signifie que l'organisation pourrait devoir cesser ses activités. Il semble que le nouveau gouvernement du Canada pense que le travail de SSI Canada n'est pas important, mais permettez-moi de ne pas être de cet avis.

J'ai reçu un courriel d'une ancienne collègue au YMCA qui siège actuellement au conseil d'administration de SSI Canada. Elle déclarait que la Société d'aide à l'enfance de Toronto avait fait savoir au conseil d'administration qu'il en coûtait en moyenne 30 600 $ pour s'occuper d'un enfant dont elle avait la charge. En 2005- 2006, SSI Canada a réussi à s'occuper de 435 dossiers souvent complexes dans 65 pays avec un budget d'un peu plus de 300 000 $ seulement, ce qui donne moins de 700 $ par dossier. Cela est possible grâce à des frais généraux réduits au minimum, au travail de bénévoles et à des collectes de fonds. Je félicite les gens de SSI Canada pour leur travail.

De plus, honorables sénateurs, SSI travaille en collaboration avec des groupes comme le Conseil d'Adoption du Canada, la Ligue pour le bien-être de l'enfance du Canada et l'Alliance nationale pour les enfants, pour ne nommer que ceux-là. Comment le travail de ces groupes sera-t-il touché par les compressions budgétaires à SSI Canada? En subiront-ils eux aussi? Je trouve déplorable que des gens ne tiennent aucun compte de ces compressions touchant des programmes de grande valeur que le nouveau gouvernement du Canada semble avoir faites uniquement pour accorder des allégements fiscaux à ses riches amis du Parti conservateur. L'existence de programmes comme SSI Canada et de nombreux programmes d'alphabétisation et de programmes s'adressant aux femmes est menacée.

Honorables sénateurs, qui fournira les services à leur place? Comment pourrons-nous remplacer un service modeste, mais très efficace comme SSI Canada une fois qu'il aura disparu? Qui se battra pour les enfants?

LE DÉCÈS DE SŒUR BERNICE CULLEN

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, l'apport de citoyens de tous les horizons enrichit la société canadienne. La cohésion sociale est renforcée par le sens du service public dont font preuve les personnes qui se dévouent de façon tout à fait désintéressée à ceux qui les entourent. Nombre de ces personnes ont contribué, dans la modestie et la discrétion, à faire de notre pays un meilleur endroit où vivre.

Je voudrais rendre hommage aujourd'hui à la vie d'une de ces personnes remarquables et exceptionnelles. Sœur Bernice Cullen, de la congrégation des sœurs de Sainte-Marthe, s'est éteinte à l'âge de 92 ans, à Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard, au terme d'une longue vie au cours de laquelle elle s'est distinguée au service de sa foi et de son pays. Enseignante, guide spirituel et amie, elle a été, par-dessus tout, la servante dévouée de sa congrégation et de son Dieu.

(1415)

Sœur Bernice a grandi à la campagne, à l'Île-du-Prince-Édouard, et elle était la dernière survivante d'une famille de 11 enfants. Elle est entrée chez les sœurs de Sainte-Marthe et elle a poursuivi ses études à l'Université Saint-Dunstan, à Charlottetown. En 1941, elle est devenue la première femme à avoir jamais obtenu un diplôme de cette université, ce qui témoigne de sa force de caractère et de sa détermination.

Sœur Bernice est ensuite devenue enseignante et une fidèle servante de sa congrégation. Forte de l'appui et des encouragements de sa congrégation, elle a terminé des études de doctorat à Notre- Dame. Après avoir obtenu son diplôme, elle est devenue la première femme à faire partie du département des études religieuses à l'Université Saint-Dunstan, qui a plus tard fusionné avec l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard.

L'Université de l'Île-du-Prince-Édouard lui a décerné le prix des fondateurs, ce qui montre bien le respect et l'admiration qu'elle inspirait à ses collègues et à ses nombreux amis. En lui remettant le prix, on avait souligné son attachement à sa foi et son dévouement envers sa profession.

Pourtant, on se souviendra d'elle surtout pour le charme qu'elle dégageait, son humour lucide et sa sagesse, ainsi que pour sa profonde et constante générosité d'esprit. On peut dire de sœur Cullen qu'elle enrichissait la vie de tous ceux qui la connaissaient. Comme elle le disait vers la fin de sa longue vie au service des autres, sa vocation était au cœur de son être.

Honorables sénateurs, des gens comme sœur Bernice Cullen contribuent remarquablement à façonner notre mode de vie et à améliorer notre qualité de vie. Des gens comme elle font énormément, à leur manière tranquille, pour améliorer le monde qui les entoure, au bénéfice de tous. Son humilité, sa façon de servir ses concitoyens et sa manière d'être au service de sa foi constituent l'héritage que laisse à l'humanité cette personne des plus chaleureuses et douces.

En rendant hommage à sœur Bernice Cullen, je veux aussi exprimer mes plus sincères condoléances à la congrégation de Sainte-Marthe, aux membres de sa grande famille et à ses nombreux amis et collègues. Elle laisse un vide qui ne sera jamais comblé.

LES TERRITOIRES DU NORD-OUEST

LE BAL DE NEIGE—L'ÉQUIPE DE SCULPTURE SUR NEIGE—FÉLICITATIONS AUX RÉCIPIENDAIRES DU PREMIER PRIX

L'honorable Nick G. Sibbeston : Honorables sénateurs, je suis heureux de vous annoncer que l'équipe des Territoires du Nord- Ouest a remporté le premier prix au Concours national de sculpture sur neige qui s'est tenu la fin de semaine dernière dans le cadre du Bal de neige d'Ottawa. Cette équipe de sculpteurs a été choisie par ses pairs comme récipiendaire du prestigieux Prix des artistes.

La sculpture de l'équipe des Territoires du Nord-Ouest, haute de 16 pieds, représente un ours polaire et un chasseur, bras dessus bras dessous, exécutant une danse endiablée dans l'Arctique. À la fois saugrenue et émouvante, cette sculpture qui défie la gravité exprime la joie et la spontanéité ainsi que les liens étroits entre l'homme et la nature, que tous les habitants du Nord ressentent profondément.

L'équipe gagnante était vraiment représentative de la population du Nord. Elle était composée d'Eli Nasogaluak, un Inuvialuit du delta du Mackenzie, de John Sabourin, un Déné de la région du Deh Cho, et de mon fils, Randy Sibbeston, qui est Métis.

Grâce aux températures froides de la semaine dernière, la neige avait la texture idéale pour la réalisation de la sculpture.

Je sais que tous les représentants des quatre coins du pays ont eu du plaisir à réaliser leur sculpture. J'ai trouvé étonnant et excitant de voir les différentes formes se dégager de ces énormes cubes de neige.

La Nouvelle-Écosse a remporté le deuxième prix, la Colombie- Britannique, le troisième, et l'Alberta s'est vu décerner le Prix du public.


(1420)

[Français]

AFFAIRES COURANTES

LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE

DÉPÔT DU RAPPORT DE FÉVRIER 2007

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la vérificatrice générale du Canada à la Chambre des communes intitulé Le Point, conformément au paragraphe 7(5) de la Loi sur le vérificateur général.

[Traduction]

PROJET DE LOI NO 2 D'EXÉCUTION DU BUDGET DE 2006

PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Joseph A. Day, président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant :

Le mardi 13 février 2006

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a l'honneur de présenter son

DIXIÈME RAPPORT

Votre Comité, auquel a été déféré le projet de loi C-28, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 2 mai 2006, a, conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 31 janvier 2007, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis,

Le président,
JOSEPH A. DAY

— Honorables sénateurs, le comité fait rapport du projet de loi sans propositions d'amendement, mais avec dissidence.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Di Nino, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

EXAMEN DE LA RÉGLEMENTATION

PRÉSENTATION DU QUATRIÈME RAPPORT DU COMITÉ MIXTE

L'honorable J. Trevor Eyton, coprésident du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation du Sénat et de la Chambre des communes, présente le rapport suivant :

Le mardi 13 février 2007

Le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation a l'honneur de présenter son

QUATRIÈME RAPPORT

(Rapport no 78 — Désaveu)

Aux termes de l'article 19.1(1) de la Loi sur les textes réglementaires, L.R.C. (1985), ch. S-22, modifiée par L.C. (2003), ch. 18, et ayant donné au ministre des Pêches et des Océans l'avis exigé au paragraphe 19.1(2) de cette Loi, le Comité mixte adopte une résolution portant abrogation de l'article 36(2) du Règlement de pêche de l'Ontario de 1989, tel qu'il est promulgué dans le DORS/89-93.

Le texte de la disposition qui serait abrogée figure à l'annexe A du présent rapport. L'annexe B contient l'avis au ministre des Pêches et des Océans exigé par la Loi. Les raisons pour lesquelles le Comité demande le désaveu sont exposées à l'annexe C.

Selon l'article 19.1(5) de la Loi sur les textes réglementaires, la résolution que comporte ce rapport est réputée être adoptée par le Sénat ou la Chambre des communes le quinzième jour de séance suivant la présentation du rapport devant cette Chambre, à moins que, avant ce moment, une motion proposant son rejet n'ait été déposée par un ministre auprès du Président de cette Chambre.

Un exemplaire des Procès-verbaux et témoignages utiles (Fascicule no 8, 1re session, 39e législature) est déposé à la Chambre des communes.

Respectueusement soumis,

Le coprésident,
J. TREVOR EYTON

(Le texte des annexes figure aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1052.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Eyton, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

LE SÉNAT

AVIS DE MOTION PORTANT SUR LA PRÉSENTATION D'EXCUSES OFFICIELLES AUX ANCIENS ÉLÈVES DES PENSIONNATS INDIENS

L'honorable Nick G. Sibbeston : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Sénat présente des excuses officielles à tous les anciens élèves des pensionnats indiens pour les torts causés à leur langue, à leur culture et à leur bien-être, notamment aux élèves qui ont également subi des sévices physiques et sexuels;

Que le Sénat demande à la Chambre des communes et au gouvernement du Canada de présenter des excuses officielles à tous les anciens élèves des pensionnats indiens.

[Français]

LA CRISE AU SEIN DU MONDE CULTUREL CANADIEN

AVIS D'INTERPELLATION

L'honorable Andrée Champagne : Honorables sénateurs, je donne avis que, dans deux jours :

J'attirerai l'attention du Sénat sur la crise qui fait rage dans le monde culturel canadien.


(1425)

PÉRIODE DES QUESTIONS

LA JUSTICE

LE PROCESSUS DE NOMINATION DES JUGES—LA COMPOSITION DU COMITÉ DE SÉLECTION

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Ai-je besoin de rappeler à cette Chambre le principe qui est à la base de toute démocratie, tel que défini par Montesquieu, à savoir la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire?

La raison pour laquelle nous sommes particulièrement perturbés de ce côté-ci de la Chambre est la façon délibérée avec laquelle le gouvernement s'attaque à l'indépendance de la justice.

En effet, ce gouvernement a changé la composition des comités de sélection judiciaire. D'une part, il s'approprie la majorité des sièges, d'autre part, il y impose un responsable des forces policières et enfin, il y nomme des représentants partisans dont le but sera de filtrer les candidats pour que ceux qui seront désignés partagent l'idéologie spécifique du Parti conservateur.

Est-ce que le gouvernement respectera la demande de la juge en chef de la Cour suprême, Beverley McLachlin, qui demandait de préserver la confiance du public dans le processus de nomination et d'éviter sa politisation?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie le sénateur de sa question. Le gouvernement n'a pas à s'excuser d'avoir nommé des personnes compétentes et professionnelles aux comités consultatifs de la magistrature. Comme je l'ai expliqué dans une réponse donnée au Sénat avant le congé des Fêtes, le processus des comités a été mis sur pied par le gouvernement conservateur en 1988. Nous avons entièrement confiance dans les personnes qui siègent à ces comités consultatifs. Le gouvernement continuera de nommer les juges en fonction du mérite et de l'excellence en matière juridique et, pour ce faire, il tiendra compte de l'opinion d'une grande diversité de personnes qui siégeront aux comités consultatifs de la magistrature.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, ce gouvernement qui aime se draper dans l'intégrité, l'éthique et la transparence ne fait que démontrer le contraire. Il se vautre dans la manipulation et la dissimulation, comme le montrent de telles manœuvres qui minent l'esprit de nos institutions et qui sont dénoncées par la plupart des gens qui connaissent notre système.

Le premier ministre, pendant sa campagne électorale, voulait rassurer les Canadiens lorsqu'il déclarait que le système judiciaire et le Sénat allaient servir de contrepoids à son gouvernement. Non seulement ces propos sont infamants pour nos institutions, mais on peut désormais s'attendre à avoir, pour de vrai, une politisation de la magistrature orientée vers l'extrême droite.

Après un an de « nouveau gouvernement », alors que les listes d'éligibilité à la magistrature comptent plus de 1 000 candidats, que le premier ministre essaie de diminuer le rôle du Sénat, madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous indiquer quand le premier ministre va demander à son ministre de la Justice de nommer de nouveaux juges qualifiés pour satisfaire la justice et les justiciables alors que les provinces demandent ces nominations depuis plus d'un an?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, en 2006, notre gouvernement a nommé 54 personnes à la magistrature fédérale en se fondant sur les recommandations du comité consultatif de la magistrature dans chaque province. Bien sûr, ces comités consultatifs ont été créés par le gouvernement précédent. Les nominations sont fondées uniquement sur le mérite. Les liens politiques n'ont aucune incidence sur les recommandations en vue d'une nomination, et les candidats qualifiés ne devraient pas être exclus simplement en raison de leurs liens politiques précédents. Cela est certes le cas de bon nombre de juges qui siègent actuellement à la magistrature et qui ont eu des liens avec plusieurs partis politiques. On ne les accuse jamais de laisser leur allégeance politique empiéter sur leurs fonctions judiciaires.

Dans un discours prononcé à Vancouver le 15 août 2005, l'ancien ministre libéral de la Justice, Irwin Cotler, a dit :

Le fait d'exclure des professionnels excellents et énergiques de la mise en candidature à un poste de juge restreindrait le bassin de candidats à des postes politiques et judiciaires et dissuaderait peut-être leur participation au processus démocratique même.

(1430)

Pour répondre à la question de savoir quand de futurs postes vacants seront comblés, le ministre Nicholson a récemment repris ce portefeuille des mains du ministre Toews. Le ministre Nicholson collabore avec ses homologues provinciaux et avec les comités consultatifs de la magistrature pour veiller à ce que les personnes qu'il présentera au Cabinet soient des personnes qualifiées et compétentes, qui serviront notre magistrature d'une manière exemplaire.

LE LEADER DU GOUVERNEMENT

LES OBSERVATIONS SUR DES SÉNATEURS LIBÉRAUX

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. Mercredi dernier, elle s'est présentée dans le foyer du Sénat avec le leader du gouvernement à la Chambre des communes pour faire des observations désobligeantes à l'endroit de certains sénateurs.

Je crois que c'était la première fois de toute l'histoire du Sénat qu'un titulaire du poste qu'occupe le sénateur l'utilise pour dénigrer le rôle essentiel que joue cet endroit dans notre système parlementaire bicaméral plutôt que pour appuyer le travail qui s'y fait.

Madame le ministre se rend-elle compte qu'en critiquant des « sénateurs libéraux non élus », non seulement elle tente de détruire la réputation de sénateurs libéraux, mais elle déprécie les efforts de tous les sénateurs, peu importe leur allégeance politique? La boue salit autant la personne qui la lance que la personne visée.

Des voix : Bravo!

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur de sa question. J'ai participé à une conférence de presse avec le leader du gouvernement à la Chambre des communes pour faire remarquer que l'étude d'un projet de loi, plus précisément le S-4 qui concerne la durée du mandat des sénateurs, traîne en longueur. Comme je l'ai fait remarquer au cours de cette conférence de presse, le nouveau chef du sénateur, l'honorable Stéphane Dion, appuie le principe fondamental du projet de loi.

Pour ce qui est de mon rôle de leader du gouvernement au Sénat, je n'ai dénigré personne. J'ai simplement fait une déclaration sur ce qui est une évidence pour la plupart des Canadiens; autrement dit, un organisme non élu ne devrait pas contrecarrer la volonté de l'organisme élu qu'est la Chambre des communes, peu importe le sujet. Nous avons présenté ce projet de loi au Sénat parce que nous pensions que le Sénat avait son mot à dire concernant cette importante mesure législative d'une longueur de deux paragraphes.

Honorables sénateurs, je prends mes responsabilités au sérieux. Je crois que nous devons tous reconnaître que le Sénat du Canada a besoin d'un renouveau, d'une réforme. Je n'ai aucune excuse à présenter pour avoir parlé dans l'intérêt des contribuables canadiens.

Le sénateur Milne : Honorables sénateurs, je crois avoir fait remarquer que c'était, à mon avis, la première fois dans l'histoire que se produisait un tel incident.

Des voix : C'est une honte!

Le sénateur Milne : Madame le leader du gouvernement au Sénat a toujours été connue et respectée pour la manière dont elle a défendu un ancien premier ministre. D'ailleurs, madame le ministre a la réputation de se porter à sa défense comme un chien d'attaque. Comment a-t-elle pu se transformer en chien de manchon si docile pour le premier ministre actuel?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, cette question ne mérite même pas de réponse, car peu importe la position que j'adopte au Sénat, que ce soit en mon nom propre ou au nom du gouvernement, j'y crois sincèrement. Je crois que le Sénat a besoin d'une réforme. Je crois que la population canadienne la souhaite. Je ne parlerai pas des « premières fois » au Sénat. Je n'ai pas vérifié s'il y avait un précédent, mais s'il faut discuter des « premières fois » au Sénat, je doute que madame le sénateur Milne soit d'accord.

(1435)

Nous ne voulons pas nous lancer dans des histoires comme celles de sénateurs qui font la grève de la faim sur des bancs et des débats sur la TPS pendant lesquels des gens enterrent un orateur de leurs cris, soufflent dans des sifflets et des mirlitons, et manifestent un mépris absolu pour le Parlement. Selon moi, c'est à ce moment-là que le public a commencé à perdre son respect pour le Sénat.

Le sénateur Cools : Il n'y avait pas de mirlitons!

LA SANTÉ

LA PROPOSITION DE CRÉATION D'UNE COMMISSION NATIONALE DE LA SANTÉ MENTALE

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Pendant la campagne électorale, son parti s'est engagé à créer une commission de la santé publique, comme l'a proposé le Comité sénatorial des affaires sociales, dont j'ai l'honneur de faire partie. Toutefois, le gouvernement conservateur vient de mettre fin à des consultations publiques en direct sur la création de cette commission. Le questionnaire en ligne dit que la consultation vise à amener les Canadiens à exprimer leur avis sur, entre autres choses, « la nécessité de créer une commission de la santé mentale ».

Le fait que le gouvernement ait mis un terme aux consultations veut-il dire qu'il est en train de revoir son engagement de créer une commission de la santé mentale?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie le sénateur de sa question. Comme nous l'avons dit dans notre programme des dernières élections, le gouvernement s'engage à créer une commission de la santé publique. Le gouvernement mène des consultations en ligne pour que le public puisse participer directement.

Je peux donner au sénateur l'assurance que le gouvernement prend très au sérieux la question de la santé mentale. Il connaît les conséquences pour la personne, mais aussi la charge financière que les problèmes de santé mentale représentent pour les familles et la société.

Madame le sénateur ne doit rien déduire de négatif du fait que nous ayons décidé de consulter le public.

Le sénateur Callbeck : Je suis heureuse d'entendre que le gouvernement est toujours déterminé à créer une commission de la santé mentale, car elle sera certainement très utile à de nombreux Canadiens. Des problèmes de santé mentale touchent le cinquième des Canadiens à un moment ou l'autre de leur vie.

En octobre, ici même, le leader du gouvernement au Sénat a dit que le ministre de la Santé avait des entretiens avec les provinces au sujet de la création d'une commission de la santé mentale. Où en sont ces entretiens? Quand pouvons-nous espérer que le ministre de la Santé se prononcera sur la création de cette commission?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, l'automne dernier, lorsque j'ai répondu à cette question, j'ai dit que la création de cette entité avait des conséquences budgétaires importantes et qu'il en serait donc question au cours des consultations budgétaires. Le ministre de la Santé a rencontré tous ses homologues vendredi dernier. Ils ont eu une fructueuse réunion qui a été consacrée à la question des délais d'attente. J'ignore si le ministre Clement a parlé expressément de la création d'une commission de la santé mentale avec ses homologues des provinces. Je vais donc prendre note de cette partie de la question et répondre au sénateur le plus rapidement possible.

[Plus tard]

L'honorable Marilyn Trenholme Counsell : Honorables sénateurs, j'ai écouté attentivement la question du sénateur et la réponse du leader du gouvernement au Sénat. J'ai saisi la même chose, ou peut- être ai-je un problème d'audition, mais je croyais avoir entendu précisément la même chose l'automne dernier, et j'aurais dû intervenir alors. Il me semble que le sénateur qui posait la question parlait de la commission de la santé mentale et je crois avoir entendu, aujourd'hui encore, le leader commettre un lapsus en employant le mot commissaire. Le leader a dit que le gouvernement était déterminé à nommer un commissaire de la santé mentale. Or, un commissaire ne représente qu'un bien petit élément du concept de commission de la santé mentale salué par les Canadiens d'un océan à l'autre.

Madame le leader du gouvernement au Sénat a-t-elle employé le mot commissaire? Dans l'affirmative, était-ce avec l'intention délibérée de réduire la portée de la promesse initiale de créer une commission?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, lorsque madame le sénateur Callbeck a posé la question la première fois, elle a parlé d'une commission de la santé publique. Je me suis alors rendu compte qu'elle parlait d'une commission de la santé mentale. Il se peut que j'aie employé le mot commissaire. De toute évidence, si une commission est créée, il faudra nommer un commissaire.

Je suppose que ce sera la première chose à faire une fois que le ministre Clement aura évalué les besoins et que la création de la commission aura été budgétisée. Je crois bien avoir parlé de la commission en tant qu'entité, mais il se peut que j'aie parlé d'un commissaire, car à plusieurs reprises des gens m'ont recommandé des personnes en qui ils voyaient d'excellents candidats au poste de commissaire de la commission de la santé mentale.

LES RESSOURCES NATURELLES

LE PROGRAMME D'ENCOURAGEMENT POUR LES BÂTIMENTS COMMERCIAUX—L'ANNULATION

L'honorable Tommy Banks : J'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Je suis désolé de ne pas avoir donné de préavis, car la réponse nécessite peut-être un peu de préparation. J'accepterai volontiers une réponse différée.

Je voudrais parler des bâtiments commerciaux. C'est difficile à croire, mais il y a actuellement sur les planches à dessin, au Canada, les plans de nouveaux bâtiments commerciaux d'une valeur de 500 milliards de dollars. Une fois construits, les bâtiments commerciaux sont là pour longtemps et ils ont un rôle important dans l'écologie et l'environnement. La façon dont un bâtiment est construit déterminera sa réaction avec l'environnement pendant fort longtemps.

Pendant huit ans, il y a eu au Canada un programme, le Programme d'encouragement pour les bâtiments commerciaux, pour aider ceux qui construisent ces bâtiments à les rendre plus écologiques. Ce programme a été une réussite. Il fournit une aide à la conception et une assistance financière pouvant aller jusqu'à 60 000 $ par immeuble pour rendre ces derniers plus respectueux de l'environnement. Ce programme connaît un énorme succès. Au total, neuf cent bâtiments commerciaux ont été construits, dans pratiquement toutes les villes du pays, depuis son lancement. Les constructeurs donnent de bons exemples de la façon dont il convient de construire des bâtiments commerciaux dans une optique à très long terme. Ces immeubles se caractérisent par une efficacité énergétique nettement plus grande, des coûts d'exploitation beaucoup plus bas et une valeur de revente considérablement plus élevée.

(1440)

Je vous cite un extrait du communiqué de presse de Ressources naturelles Canada, en date du 20 janvier :

L'Office de l'efficacité énergétique de Ressources naturelles Canada encourage la conception et la construction d'installations et de bâtiments éconergétiques neufs dans les secteurs commercial, institutionnel et résidentiel. Le Programme d'encouragement pour les bâtiments commerciaux (PEBC) offre aux organismes admissibles un appui financier pouvant atteindre 60 000 $ [...]

En réduisant les coûts opérationnels, les bâtiments éconergétiques produisent des économies d'énergie récurrentes. De plus, ces bâtiments ont une meilleure valeur de revente et offrent un avantage de location concurrentiel par rapport aux bâtiments ordinaires.

Voilà maintenant que nous apprenons non seulement que tous les fonds du programme ont été affectés, mais qu'on va l'abolir. Quand le leader sera-t-il en mesure de nous donner les raisons pour lesquelles le gouvernement va éliminer un programme dont on a pu démontrer l'efficacité et les effets positifs pour les entreprises et pour l'environnement du Canada?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement au Sénat et secrétaire d'état (Aînés)) : Honorables sénateurs, j'ai vu un reportage à la CBC la semaine dernière à propos du Programme d'encouragement pour les bâtiments commerciaux. On y faisait mention d'un immeuble du secteur ouest d'Ottawa que je connais très bien. La conclusion du reportage était que le gouvernement a décidé de réaffecter les crédits de ce programme aux petites entreprises et aux maisons individuelles. Je prends note de la suggestion et de la première partie de la question portant sur les grandes sociétés et entreprises, mais je sais que le ministre Lunn a annoncé, ou s'apprête à annoncer, un programme qui aidera beaucoup les petites entreprises, qui, soit dit en passant, forment l'épine dorsale de notre pays, et qui aidera aussi les propriétaires de maisons individuelles.

Le sénateur Bank : Honorables sénateurs, madame le leader tiendra-t-elle également compte dans sa réponse du fait que des programmes étaient déjà mis en œuvre pour aider les petites entreprises et pour aider à financer le coût d'achat, de conception et d'amélioration de l'efficacité énergétique des logements privés? Ces programmes existent déjà. Il n'est pas nécessaire d'annuler un programme pour améliorer des programmes existants, mais j'ai hâte d'entendre sa réponse.

(1445)

LES PROGRAMMES D'ÉCONOMIE D'ÉNERGIE POUR AIDER LES CITOYENS À FAIBLE REVENU

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, pour faire suite à la question du sénateur Banks à propos du retour du programme ÉnerGuide créé par les libéraux, ce qu'on ne dit pas est que la partie du programme visant à aider les ménages à faible revenu n'a pas été rétablie. Par conséquent, de nombreuses familles à faible revenu qui auraient pu s'engager sur la voie des économies d'énergie devront s'en abstenir parce qu'elles n'auront pas les moyens de se payer une vérification de leur consommation d'énergie.

Dans cette optique, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Le gouvernement veut-il faire réaliser des économies d'énergie à certains groupes de Canadiens plutôt qu'à d'autres? Le gouvernement s'intéresse-t-il seulement à l'assainissement de l'environnement dans certains quartiers, mais pas dans d'autres?

Je pose la question parce que, pour un observateur externe, bien que le gouvernement actuel se soit engagé à protéger l'environnement au Canada, il semble exclure les Canadiens à faible revenu, qui devront littéralement se débrouiller seuls dans le froid.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, le sénateur Milne devrait réfréner ses ardeurs quand vient le temps de faire peur au monde. Les problèmes environnementaux comme la mauvaise qualité de l'air et de l'eau ou les toxines qui contaminent nos aliments sont également dommageables pour tous les Canadiens, qu'ils soient riches ou pauvres.

J'ai eu connaissance aujourd'hui de l'annonce d'une initiative spéciale concernant le logement par laquelle le gouvernement compte aider les gens à accroître l'efficacité énergétique de leur domicile. Je ne crois pas que nos politiques soient discriminatoires envers qui que ce soit. Je pense que nous prenons la question au sérieux. Tout programme destiné à aider les propriétaires de maison à améliorer l'efficacité énergétique de leur maison s'adressera bien évidemment à tous les propriétaires, qu'ils aient un revenu faible, moyen ou élevé. Je ne vois pas comment le programme pourrait être moins accessible à certains Canadiens qu'à d'autres.

Le sénateur Milne : Honorables sénateurs, j'ignore si je devrais remercier madame le leader du gouvernement au Sénat pour cette réponse parce que je préfère croire que c'est elle qui m'a montré à poser des questions.

Le ministre Lunn a dit qu'il y a plus de 13 millions de maisons et plus de 380 000 immeubles dans notre pays. Ces maisons et immeubles utilisent 30 p. 100 de notre énergie et sont responsables de quelque 30 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre. Malheureusement pour le gouvernement, ces maisons ne sont pas toutes dans Rockcliffe ou Rosedale. Certaines d'entre elles se trouvent dans des quartiers défavorisés où les gens méritent aussi d'avoir la chance d'économiser de l'énergie et de contribuer à la protection de notre environnement.

Il est de plus en plus difficile de croire qu'il y a seulement deux ans, le programme ÉnerGuide a reçu l'appui unanime du Parti conservateur dans un vote à l'autre endroit. Il y a presque 400 jours que le Parti conservateur est arrivé au pouvoir. Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle donner l'assurance aux sénateurs que le gouvernement s'efforcera, durant les 400 jours à venir, d'être plus productif dans la protection de l'environnement et l'aide aux Canadiens à revenu modeste?

(1450)

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je ne parlerai pas du profil démographique de Rosedale ou de Rockcliffe, mais les gens qui appuient le Parti conservateur sont plus susceptibles de faire partie de ce que j'appelle les groupes de discussion Tim Hortons. Au mois de janvier, le gouvernement a annoncé une initiative éco- énergétique de 60 millions de dollars pour les immeubles. Comme je l'ai dit en répondant à d'autres questions, plus de la moitié des coûts liés au programme ÉnerGuide étaient administratifs. Le gouvernement actuel prendra les fonds investis dans ces programmes et les mettra là où ils devraient être : dans les mains des Canadiens qui veulent rénover leur maison ou en construire une nouvelle. De toute évidence, alors que certains Canadiens à revenu modeste habitent dans leur maison, d'autres vivent dans des logements sociaux. Je suis convaincue que le gouvernement fédéral s'emploiera avec tous les ordres de gouvernement et l'industrie à veiller à ce que nos programmes soient accessibles aux Canadiens. Dès que les données seront rendues publiques, je ne doute pas que nous constaterons que plus de Canadiens à revenu modeste ou moyen que d'habitants de Rockcliffe ou de Rosedale ont accès aux programmes.

L'ENVIRONNEMENT

LE PROGRAMME ÉCHANGES SUR LE CLIMAT DU NORD—L'ISSUE DES RÉUNIONS VISANT AU RÉTABLISSEMENT DU FINANCEMENT

L'honorable Nick G. Sibbeston : Honorables sénateurs, la question que je pose au leader du gouvernement au Sénat concerne les réductions du financement offert aux organisations qui luttent contre les changements climatiques dans le Nord. Le problème des changements climatiques revêt une grande importance dans le Nord, car cette région y est très vulnérable. La semaine dernière, l'Ottawa Citizen et le Service du Nord de Radio-Canada nous apprenaient que le gouvernement fédéral avait sabré 320 000 $ dans le financement de l'organisation Échanges sur le climat du Nord, située à Whitehorse, au Yukon. Cette organisation existe depuis 2000. Elle est chargée de fournir des renseignements indépendants crédibles, de favoriser la compréhension commune des enjeux et de promouvoir les mesures de lutte contre les changements climatiques dans le Nord du Canada. Elle a contribué grandement aux recherches scientifiques sur l'Arctique et à la mobilisation des résidants du Nord dans le dossier des changements climatiques.

Le gouvernement du Yukon appuie cette organisation. Le premier ministre Fentie était de passage à Ottawa la semaine dernière pour rencontrer le ministre Baird et ses collègues afin de discuter de l'importance de rétablir le financement de l'organisation. Madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle nous dire si le premier ministre Fentie a réussi à faire rétablir le financement fédéral offert à cette organisation importante qui propose des initiatives liées aux changements climatiques dans le Nord?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, la presse ne l'a pas indiqué clairement, mais le programme Échanges sur le climat du Nord était financé dans le cadre de l'ancien programme Défi d'une tonne.

Je prends note de la question du sénateur sur les résultats de la rencontre du premier ministre Fentie et du ministre Baird.

Dans les dernières semaines, le gouvernement a annoncé un financement de 2 milliards de dollars pour les initiatives écoÉNERGIE touchant les technologies de production d'énergie propre, l'énergie renouvelable et une meilleure utilisation de l'énergie par les Canadiens. Le premier ministre a annoncé la création de l'écoFiducie Canada, qui vise à appuyer les gouvernements des provinces et des territoires. Nous avons entendu la première partie de l'annonce hier. Contrairement à l'approche volontaire inefficace du gouvernement précédent en matière de réduction des émissions, l'approche du gouvernement sera de réglementer les émissions de gaz à effet de serre et la pollution atmosphérique en fixant des objectifs à court, moyen et long termes.


[Français]

ORDRE DU JOUR

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 27(1) du Règlement, j'avise le Sénat que, lorsque nous procéderons aux Affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux en commençant par l'article no 3, sous la rubrique « Projets de loi ». Cet article sera suivi par les autres articles dans l'ordre où ils apparaissent au Feuilleton.

(1455)

[Traduction]

LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1867

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur LeBreton, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Comeau, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 (durée du mandat des sénateurs).

L'honorable George J. Furey : Honorables sénateurs, la présentation du projet de loi S-4 a mis le Sénat dans une situation complexe et délicate. Le projet de loi lui-même est simple, mais il aurait des répercussions d'une grande portée.

Nous savons tous que, en 1979, la Cour suprême du Canada a indiqué au gouvernement qu'il pouvait unilatéralement modifier le Sénat en adoptant une mesure d'ordre administratif. Certains soutiennent que le projet de loi S-4, peut-être en raison de sa simplicité, n'est en fait qu'une mesure d'ordre administratif. À mon avis, il y a quelque chose qui sonne faux dans cet argument à propos du projet de loi S-4. Des gens raisonnables ne l'accepteraient que s'il y avait réellement une analogie avec la modification apportée en 1965 imposant la retraite à l'âge de 75 ans.

Je doute, honorables sénateurs, qu'il soit constructif d'essayer de détourner ce débat en invoquant l'argument spécieux selon lequel il n'y a pas de différence entre une disposition établissant la retraite obligatoire et celle fixant à huit ans la durée du mandat. À mon avis, on banaliserait l'importance de la question à l'étude ici, si l'on s'arrêtait sur les arguments stériles consistant à se demander si huit ans, c'est trop court ou si 12 ans, c'est trop long. Je pense qu'en soi, il n'y a pas une durée du mandat appropriée, parce que là n'est pas la vraie question. La véritable question est de savoir si le Sénat peut s'acquitter de ses fonctions d'une manière efficace avec un mandat de huit ans.

En 1965, l'honorable John Diefenbaker, qui était à l'époque chef de l'opposition, avait expliqué la logique qui sous-tendait la modification concernant l'âge qui était présentée au Sénat. Comparant le Sénat au judiciaire, il avait dit qu'étant donné que les juges étaient assujettis à un mandat comportant un âge limite, les sénateurs devaient l'être également.

On peut pousser ce raisonnement d'un degré et se demander si le judiciaire au Canada considérerait comme simplement « d'ordre administratif » une disposition réduisant la durée du mandat des juges à huit ans. Je suis à peu près certain que le judiciaire regimberait devant une telle proposition. Les sénateurs voudront peut-être consulter le Renvoi relatif aux juges de la Cour provinciale pour se faire une idée du sérieux avec lequel le judiciaire considère la question de l'indépendance, même à l'égard d'une question aussi secondaire que la réduction du salaire des juges dans le cadre de compressions des coûts de l'appareil gouvernemental.

Nombre de sénateurs sont allés au-delà du projet de loi pour tenter de comprendre ses effets. Dans l'immédiat, la question du Sénat élu devient indispensable pour bien comprendre le fonctionnement du projet de loi S-4. Il est faux de soutenir, et on ne devrait pas le tolérer, que le projet de loi S-4 sera adopté ou rejeté selon sa valeur intrinsèque. Dans sa sagesse, le Sénat peut bien décider d'adopter le projet de loi prévoyant l'élection du Sénat et ainsi, par nécessité, inclure le dispositif concomitant sur la limite de la durée du mandat.

Cela ne revient pas à dire que le projet de loi S-4 est inconstitutionnel. Il peut l'être. Je suis d'accord avec le sénateur Joyal; je crois que le projet de loi S-4 est inconstitutionnel. À lui seul, il nuit gravement à l'indépendance du Sénat. Cela seulement le rend inconstitutionnel. Il représente une partie intégrante de la machine électorale. Cela seulement le rend inconstitutionnel.

Je suis convaincu que les sénateurs seraient d'accord pour dire qu'un Sénat élu s'affirmerait davantage et serait plus indépendant. Les élections confèrent une légitimité inhérente et des sénateurs élus auraient peu de difficulté à affirmer leur indépendance dans le cadre d'un mandat de huit ans.

Tel ne serait pas le cas d'un Sénat non élu limité à des mandats de huit ans. Voyons donc ce que disait George Brown, le chef du Parti réformiste des débuts, au sujet des mandats de durée limitée :

[...] mais on a dit que, tout en ne donnant pas à l'exécutif le pouvoir d'augmenter la représentation de la Chambre haute afin de ne pas s'exposer à un conflit, on pourrait limiter la durée du mandat des membres nommés. J'ai été moi-même en faveur de cette proposition. Je pensais qu'il serait bien de pourvoir à un changement plus fréquent dans la composition de la Chambre haute, qui diminuerait le danger de voir cette Chambre composée en grande partie d'honorables membres dont le grand âge pourrait nuire à l'exercice efficace de leur devoirs publics. Cependant, l'objection qu'on faisait à cette proposition était très forte. On disait ceci : « Supposons que vous les nommiez pour neuf ans, quelle sera la conséquence? Pendant les trois ou quatre dernières années de leur service ils auront devant les yeux l'expiration de leur mandat, et se tourneront avec anxiété du côté du gouvernement alors au pouvoir pour obtenir la faveur de se faire nommer de nouveau; la conséquence sera qu'ils se trouveront entièrement sous l'influence de l'exécutif. » On a voulu faire de la Chambre haute un corps parfaitement indépendant, un corps qui serait dans la meilleure position possible pour étudier sans passion les mesures de cette Chambre, et défendre les intérêts publics contre toute tentative de législation hâtive ou entachée d'esprit de parti.

(1500)

Honorables sénateurs, la politique parlementaire est une chose fluide et inexacte. Lorsqu'un premier ministre nouvellement élu déclare que le temps est venu de réformer le Sénat, il convient de le prendre au sérieux. Cela ne veut pas dire que son plan est nécessairement judicieux. Il se peut que son plan implique une succession d'événements que nous ne souhaitons pas revoir au Canada. Il se peut que le plan doive être rejeté, quelles que soient les conséquences.

Le Sénat pourrait très bien refuser d'accepter le projet de loi S-4 pour le seul motif qu'il s'agit d'une mesure législative spécieuse. C'est une mesure législative concernant la mécanique électorale qui ne donne pas tous les détails du processus électoral qu'elle expose. Pour ce seul motif, la mesure pourrait être rejetée.

Ayant établi le but réel de la mesure législative, je n'ai maintenant qu'à citer M. le juge La Forest dans le Renvoi relatif aux juges de la Cour provinciale, qui a déclaré :

L'objet est malgré tout pertinent. Comme le juge en chef Dickson l'a fait remarquer dans Beauregard [...] une loi traitant de la rémunération des juges sera suspecte s'il y a « un indice qu'elle a été adoptée dans un but malhonnête ou spécieux ».

Le sénateur Joyal a mentionné la Chambre des lords britannique dans son intervention récente, en nous donnant un bon aperçu de la façon dont Westminster réagit aux changements de notre monde moderne. C'est une référence très utile. À cet égard, je ferai quelques observations sur une élection charnière de l'histoire britannique. Cet exemple nous fournira un nouvel éclairage sur la façon d'aborder et d'examiner le projet de loi S-4.

En 1906, le Parti libéral d'Angleterre, sous la direction de Henry Campbell Bannerman, a remporté les élections par une majorité écrasante et a dû faire face à une Chambre des lords conservatrice. Il a laissé entendre que si les lords empêchaient les libéraux de gouverner, ceux-ci auraient recours à la législation pour restreindre leurs pouvoirs. Les lords ont fait fi de cet avertissement et ont rejeté le budget de Lloyd George. Le gouvernement de H.H. Asquith, qui a succédé à Bannerman, a fait campagne sur la question des lords et sur celle de l'autonomie gouvernementale.

Comme c'est le cas dans nos propres élections, honorables sénateurs, certaines questions dominent parfois des questions ou des éléments essentiels en leur faisant ombrage. En l'occurrence, la campagne électorale a porté davantage sur le libre-échange que sur les lords, la question ayant à peine été mentionnée. Les libéraux sont sortis vainqueurs et ils ont adopté la fameuse Parliament Act de 1910. Cette loi enlevait aux lords le pouvoir de rejeter les projets de loi de finances et leur laissait un simple veto suspensif sur les autres projets de loi.

Le Sénat du Canada n'a jamais agi d'une façon aussi peu réfléchie que les lords britanniques en 1906 et, si cela avait été le cas, la Chambre des communes aurait constaté qu'il ne suffit pas d'élections pour le réformer. Dans notre système de droit, le simple fait que le gouvernement souhaite une chose n'est pas et n'a jamais été suffisant pour qu'il l'obtienne. Il doit y avoir une entente entre les intervenants. Il est primordial de noter que le Sénat a été créé pour représenter les régions de notre vaste pays et qu'il faut obtenir l'accord de ces dernières pour adopter des réformes fondamentales.

Honorables sénateurs, selon moi, personne ici ne craint le changement. Personne non plus ne s'opposerait au progrès ou à la volonté affirmée de la population canadienne. Cependant, je crois que nous partageons unanimement l'avis que toute réforme ou amélioration devrait, d'une part, survenir à l'issue d'un débat sérieux et délibéré et, d'autre part, satisfaire aux exigences rigoureuses de la rectitude constitutionnelle. Le contraire nous mènerait tout droit aux abysses du chaos politique.

Tous les sénateurs ont été témoins d'événements constitutionnels qui ont fait intervenir le Sénat au cours de la dernière génération. Aucun d'eux n'a débouché sur une réforme du Sénat. Dans les discussions sur les événements de cette nature survenus entre 1979 et 1992, il est souvent question de « l'échec de la réforme du Sénat ». Cette expression s'est également frayé un chemin dans les discussions sur le projet de loi S-4.

Honorables sénateurs, il existe des éléments fondamentaux entourant les événements constitutionnels concernant le Sénat ces 28 dernières années. En 1979, le premier ministre de l'époque a demandé à la Cour suprême si le gouvernement pouvait modifier la composition du Sénat, en confiant la moitié des nominations aux provinces ou, sinon, s'il pouvait l'abolir. La Cour suprême a répondu que non.

Les gouvernements fédéral et provinciaux ont passé les trois années suivantes à modifier la Constitution et ils ont laissé le Sénat tranquille. Peu après, l'accord de Charlottetown devait changer radicalement le Sénat en préconisant l'égalité et la tenue d'élections.

Honorables sénateurs, je m'arrêterai quelques instants sur ce que Stephen Harper, qui était à l'époque directeur des politiques du Parti réformiste, a déclaré au sujet de cet accord. Après mûre réflexion, Stephen Harper a insisté pour s'opposer à l'accord car « ce n'était pas une entente ». Cinquante points, plusieurs concernant la réforme du Sénat, devaient être réglés, y compris des points qui nécessitaient de modifier la Constitution.

Stephen Harper a fait valoir que l'accord de Charlottetown était « pire que le statu quo ». Il a dit ce qui suit :

Notre Constitution n'est peut-être pas parfaite, mais cela n'est pas une raison pour la remplacer par quelque chose de non défini et se lancer dans des négociations constitutionnelles pour des années à venir. Voilà exactement ce dont les Canadiens ne veulent pas [...]

[...] les Canadiens nous disent clairement qu'ils ne sont pas en faveur d'autres négociations constitutionnelles actuellement [...] Il vous faudra renoncer à vos projets constitutionnels de prédilection, car la population...

— selon les paroles mêmes de Stephen Harper —

... en a ras-le-bol de cette question.

Honorables sénateurs, qu'est-ce qui a changé depuis? Au cours des deux dernières élections, je n'ai constaté aucune envie, de la part de nos chefs, de rouvrir la Constitution. Ce qui est plus important, il ne m'a pas semblé que Stephen Harper avait changé sa position de 1992 quant au manque d'envie de rouvrir la Constitution. Tout ce que M. Harper a dit au sujet de l'accord de Charlottetown s'applique aujourd'hui au projet de loi S-4. Il ne s'agit pas d'une réforme complète et isolée. On a dit qu'il s'agissait d'une première étape pour l'établissement d'un appareil électoral. Il faudra sans aucun doute modifier la Constitution pour établir l'appareil électoral, pourtant le projet de loi S-4 est présenté sans aucune indication que la Constitution sera modifiée pour mener à bien la réforme complète.

Honorables sénateurs, pour placer le projet de loi S-4 dans son contexte, il est aussi utile de revenir sur ce que pensaient les Pères de la Confédération à cet égard avant 1867. Il est important de bien saisir l'intention première des Pères de la Confédération au sujet du Sénat avant d'y apporter des changements. Notre pays a été fondé selon leur intention et, bien que cela n'exclue pas la modernisation de notre institution, nous devons étudier en profondeur la seule entente relative au Sénat qui ait obtenu un appui national.

Le caractère non électif du Sénat était un des éléments les plus soigneusement établis pendant les conférences de Charlottetown, de Québec et de Londres qui ont mené à la Constitution. Comme bien d'autres aspects du Canada qui ont survécu à l'épreuve du temps, cet élément a fait l'objet de la même réflexion de la part des Pères de la Confédération que celle à laquelle nous nous livrons aujourd'hui. Je ne veux pas dire que leur intention doit être le mot d'ordre, mais nous devons être prudents avant de tout simplement remplacer notre Constitution par une autre. C'est exactement ce que le premier ministre Harper avait déclaré lors des débats de Charlottetown en 1992.

Selon l'historien G.P. Browne, le lieutenant-gouverneur de l'Île- du-Prince-Édouard a expliqué au secrétaire de la colonie britannique, le 26 septembre 1864, les paroles de Galt, Cartier et Brown. Voici ce qu'il a déclaré :

[...] les discussions dans le cadre de la conférence ont été tenues pour la plupart de façon informelle. Deux sujets ont été débattus en profondeur : les nominations des magistrats et la composition et le mode d'élection du Sénat. Il est apparu généralement souhaitable que les membres de cet organe soient nommés à vie par la Couronne et, sauf une exception, tous ont rejeté de façon décisive le principe d'un Sénat élu [...]

Le mode de nomination est beaucoup moins important que la possession à vie d'un siège, qui favorise la liberté de pensée, de parole et d'action, comme j'ai souvent eu l'occasion de l'observer. C'est dans cette indépendance relative que réside l'utilité principale du conseil législatif.

Le 11 octobre 1864, sir John A. Macdonald a déclaré ce qui suit :

[...] en ce qui a trait au mode de nominations à la Chambre haute, certains sont en faveur de l'élection, mais davantage penchent pour la nomination par la Couronne. Je vais garder

l'esprit ouvert à cet égard comme s'il s'agissait d'une toute nouvelle question pour moi. À l'heure actuelle, j'opte pour la nomination par la Couronne. Bien que je n'admette pas que l'application du principe d'une assemblée élue ait été un échec au Canada, je crois que nous devrions revenir au modèle original.

(1510)

Au cours de ce débat, plusieurs idées semblables à celle du premier ministre Harper ont été avancées à la conférence. Par exemple, M. Coles, de l'Île-du-Prince-Édouard, a suggéré que l'assemblée législative provinciale nomme les sénateurs tous les huit ans. Le lendemain, la motion initiale de sir John A. Macdonald a été adoptée à l'unanimité.

La conférence de Québec s'est terminée le 27 octobre 1864 avec l'adoption de résolutions qui, en gros, forment l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Toutefois, au cours des trois années qui ont suivi, la Grande-Bretagne a tenté à plusieurs reprises de modifier le Sénat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sénateur Furey, demandez- vous plus de temps? Votre temps de parole est écoulé.

Le sénateur Furey : Pourrais-je avoir cinq minutes de plus, s'il vous plaît?

Son Honneur la Présidente intérimaire : La permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Furey : Le 3 décembre 1864, le secrétaire aux colonies britanniques a écrit au Gouverneur général du Canada pour lui dire entre autres ceci :

[...] la constitution du conseil législatif est la deuxième question que le gouvernement de Sa Majesté estime devoir être réexaminée [...] Ils apprécient les considérations qui ont amené les participants à la conférence à établir le mode par lequel cette institution si importante pour la législature, ... Mais Sa Majesté estime nécessaire de réexaminer l'idée de nommer les membres à vie [...]

Le gouvernement britannique n'approuvait pas l'idée du Canada de nommer les sénateurs à vie. Il a fait part de sa désapprobation aux délégués qui, entre-temps, étaient retournés dans leurs assemblées législatives respectives pour défendre les résolutions de 1864.

Le 24 juillet 1866, Sa Majesté avait plus à dire au sujet du conseil législatif. Dans une lettre à lord Carnarvon, le Gouverneur général Monck dit notamment :

[...] s'oppose au fait que le conseil législatif soit composé de membres nommés à vie et dont le nombre est fixe.

La Conférence de Londres a débuté en Angleterre le 4 décembre 1866. Il est clair que le gouvernement britannique exerçait des pressions sur les délégués afin qu'ils règlent la question de la durée du mandat des sénateurs.

Comme on pourrait se l'imaginer, les délégués s'intéressèrent principalement à la question qui avait été jugée problématique par la Couronne. Afin d'illustrer la teneur du débat qui s'ensuivit, j'aimerais citer sir Archibald, de la Nouvelle-Écosse, qui a dit :

[...] cela constitue le fondement de notre formule, dont l'esprit est que chaque province soit représentée, par divisions, au conseil législatif. Il se peut que la Chambre haute et la Chambre des communes soient en désaccord. L'utilité de celle- là sera de parfois faire obstruction à celle-ci.

Au terme de la conférence, la veille de Noël 1866, les délégués ont soumis leurs résolutions révisées.

Présentée le 2 février 1867, la troisième ébauche de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique prévoyait que le mandat des sénateurs serait à vie.

Honorables sénateurs, je suis conscient du caractère quelque peu ennuyeux et prétentieux de ce discours, et je reconnais que pour certains, ce n'est qu'un vain retour sur le passé. Cependant, cet exercice est nécessaire pour une raison importante : le Sénat n'est pas le produit arbitraire et antidémocratique de l'esprit d'une poignée d'hommes irréfléchis et anachroniques du XIXe siècle. La durée du mandat des sénateurs est le fruit d'un raisonnement minutieux et explicite. On avait explicitement proposé un mandat de neuf ans, et cette proposition a été explicitement écartée.

Le Sénat se retrouve maintenant avec le projet de loi S-4, qui reflète la ferme volonté du premier ministre et du gouvernement conservateur, et cette mesure doit recevoir l'attention qui lui est due. Toutefois, il me semble que ce projet de loi comporte des lacunes. La création du pays a été caractérisée par un long dialogue entre ses régions constitutives, au cours duquel la possibilité de prévoir une durée de mandat de huit ans pour les sénateurs a été étudiée et clairement rejetée. Les diverses tentatives de réforme du Sénat au XXe siècle ne sont pas parvenues à susciter un appui national et, ce qui est plus important, c'est que ces tentatives ont eu des effets négatifs sur la stabilité du pays. Les décisions des juges laissent entendre qu'une telle limite serait rejetée par la magistrature. Elles laissent aussi entendre qu'une législation spécieuse serait invalide. Les longs débats réfléchis de Galt, Tilly, Langevin, Cartier, Brown et Macdonald, pour n'en nommer que quelques-uns, vont aussi dans ce sens.

Honorables sénateurs, le projet de loi S-4 n'est pas une mesure législative ordinaire et, compte tenu de son importance historique, il ne semble pas refléter une ferme volonté du pays d'apporter ce changement historique. Je ne m'opposerais pas à un tel changement s'il reflétait manifestement la volonté délibérée du pays, mais en l'occurrence j'exhorte les honorables sénateurs à attendre que ce soit le cas avant d'appuyer le projet de loi S-4.

À titre de législateur non élu, je n'estime pas avoir la compétence voulue pour trouver à redire à la volonté du premier ministre d'avoir un Sénat élu. Si telle est la volonté du pays au terme d'un débat sérieux et éclairé, cela va se faire. Toutefois, on ne peut faire fi des intentions très claires des fondateurs de notre grand pays simplement en adoptant une mesure législative douteuse.

Walter Bagehot est un célèbre journaliste et rédacteur anglais du XIXe siècle. Il a été l'un des premiers rédacteurs en chef de la revue The Economist, et il a écrit un livre intitulé The English Constitution. Christopher Moore, auteur du récent livre canadien 1867 : How the Fathers Made a Deal, a dit de Bagehot qu'il a manifesté un intérêt spécial et soutenu à l'égard de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, en 1867. Soit dit en passant, M. Bagehot craignait que le Sénat canadien ne crée une impasse permanente avec la Chambre des communes.

Néanmoins, c'est M. Bagehot qui a correctement évalué la réalité d'un gouvernement parlementaire moderne en Grande-Bretagne et au Canada, et c'est à la lumière des remarques qu'il a formulées et que je cite ici qu'il nous faut être prêts à protéger le Sénat :

[...] le plus dangereux de tous les sinistres intérêts est celui du pouvoir exécutif, parce que c'est le plus puissant. Il est tout à fait possible — cela s'est produit et cela va encore se produire — que le Cabinet, qui est très puissant aux Communes, impose à la nation des mesures mineures que celle-ci n'aime pas, mais qu'elle ne comprend pas assez bien pour les interdire. Par conséquent, si on peut trouver un tribunal de révision au sein duquel le pouvoir exécutif, quoique puissant, l'est quand même moins, le gouvernement ne s'en portera que mieux et la Chambre de retardement préviendra les cas mineurs de tyrannie parlementaire, même si elle ne préviendra pas ou n'empêchera guère ...

[...] c'est presque comme dire que la Chambre des lords est indépendante. Elle ne pourrait être puissante ni exister sans être indépendante. Les lords sont, à plusieurs points de vue, plus indépendants que les Communes. Leur jugement n'est peut-être pas toujours bon, mais il leur appartient.

Honorables sénateurs, il me semble qu'en tenant compte de ces points, la meilleure approche pour le Sénat consiste à rejeter purement et simplement le projet de loi S-4.

L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, j'hésitais à prendre part au débat sur la deuxième lecture du projet de loi S-4, modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 (durée du mandat des sénateurs). Après avoir écouté le sénateur McCoy, je ressens le besoin de me prononcer.

D'après ce que le sénateur McCoy a dit, il est clair qu'à l'origine les sénateurs devaient protéger les minorités, les régions moins densément peuplées et la population francophone contre la tyrannie de la majorité anglophone du centre du Canada. Je crois que si le Sénat doit faire l'objet d'une véritable réforme, il faudrait l'organiser de sorte qu'il protège les intérêts des quatre groupes désignés : les femmes, les personnes handicapées, les Autochtones et les minorités visibles. Un Sénat réformé devrait être à leur écoute, tenir compte de leurs opinions et compter des membres de ces quatre groupes dans la même proportion que dans la population en général.

En mars 2005, le premier ministre de l'époque, Paul Martin, a appelé neuf citoyens canadiens au Sénat. À ma très grande surprise, j'étais du nombre. J'ai reçu un appel téléphonique inattendu du cabinet du premier ministre. J'ignorais comment j'avais pu être pressentie pour cette fonction. Les seuls détails que j'ai pu trouver au sujet du processus de sélection des sénateurs, c'est qu'un candidat doit être âgé d'au moins 30 ans, qu'il doit habiter et continuer d'habiter dans sa province de résidence, qu'il doit posséder des biens immobiliers d'une valeur de 4 000 $ et qu'il doit avoir à son actif des réalisations publiques.

À la réception donnée pour nous, les nouveaux sénateurs, nous avons entendu des discours où on nous disait à quel point le Canada était un pays merveilleux. C'était très bien. Je suis fière d'être Canadienne. Il y a beaucoup de choses dont les Canadiens peuvent être fiers. Notre pays croit aux libertés fondamentales et à l'égalité des citoyens et il a adopté des lois qui le confirment.

D'une part, je sais que c'est vrai, mais, d'autre part, je sais que certains d'entre nous n'en sont pas aussi convaincus. Lorsque je regarde les lois fédérales et les répercussions qu'elles ont eues sur ma famille et sur d'autres personnes comme moi, je constate que les idéaux de notre pays et les événements qui surviennent dans nos vies ne correspondent pas nécessairement. Il existe un décalage politique et cognitif.

Par exemple, les Autochtones du Canada n'ont pas obtenu le droit de vote avant 1920 au palier fédéral. Ensuite, ils ne pouvaient voter que s'ils acceptaient l'émancipation, c'est-à-dire s'ils acceptaient de renoncer à leur statut juridique d'« Indien » tel que défini par la Loi sur les Indiens. Ce n'est que 40 ans plus tard, soit en 1960, que les Indiens ont pu voter sans perdre leur statut d'Indien.

Honorables sénateurs, pouvez-vous imaginer ce que cela signifie dans la vie de tous les jours? Dans ma famille, cela signifie que ma mère n'a pas eu le droit de voter en tant qu'Indienne inscrite avant 1960. Elle avait 40 ans lorsqu'elle a pu voter pour la première fois. Cela signifie aussi que j'avais 15 ans et que j'étais en 9e année lorsqu'elle a eu le droit de voter. Pouvez-vous vous imaginer être en 9e année et avoir un parent né au Canada, mais qui n'a pas le droit de voter? Cela semble incroyable.

(1520)

Mon père, qui était un Canadien d'origine chinoise, n'a eu le droit de voter aux élections fédérales qu'en 1947. Il était un immigrant et ma mère était une Canadienne autochtone, pour ainsi dire, et, comme Indienne, comme Autochtone, elle n'a obtenu le droit de vote que 13 ans plus tard, en 1960.

À bien y réfléchir, je peux comprendre pourquoi on ne parlait pas de politique à table le soir. Mes parents n'étaient pas traités comme de vrais citoyens canadiens. Pendant la majeure partie de leur vie, ils n'ont pas eu le droit de vote. Ils ont été privés de leurs droits pendant presque toute leur vie au Canada. Néanmoins, voici que je suis sénateur à Ottawa.

Il n'y a qu'au Canada que quelqu'un comme moi, dont les parents étaient plongés dans une pauvreté désespérée, dont les parents ont été traités comme des citoyens de second ordre pendant la majeure partie de leur vie, dont les parents n'avaient pas étudié ou presque pas, il n'y a qu'au Canada, dis-je, que la fille de ces parents a pu progresser grâce à de bonnes études, à un travail acharné et au travail communautaire et, d'une façon ou une autre, être appelée au Sénat.

D'aucuns diront que le mode de sélection des sénateurs est faussé. Dans mon cas au moins, cela a marché. Il est vrai que je ne suis pas objective.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Dyck : Toutefois, cela n'a marché que parce que le premier ministre a apparemment choisi consciemment d'appeler quelqu'un qui n'entrait pas dans le moule habituel, quelqu'un qui n'était pas un homme et qui n'était pas un avocat anglo-saxon ou un ancien homme politique.

Lorsque j'ai été appelée au Sénat, on m'a dit que j'avais le choix. Je pouvais siéger comme sénateur libéral ou indépendant. Des choix différents ont été proposés à d'autres parmi nous, ou on leur a imposé le parti auquel ils devaient se rallier. Dans mon cas, après avoir discuté avec le bureau du greffier, je me suis fait dire que je pouvais décider de siéger comme membre de n'importe quel parti politique. J'ai opté pour le NPD.

J'ai été nommée si rapidement que je n'ai pas pu me renseigner sur les fonctions de sénateur ni sur ce que supposait le fait de siéger comme sénateur néo-démocrate. Je n'ai pas eu le temps. Je devais accepter ou décliner l'invitation immédiatement. J'ai demandé à réfléchir jusqu'au lendemain. On m'a priée de ne parler de l'invitation à personne. J'ai accepté. Je n'ai pas parlé à qui que ce soit de l'offre, sinon à mon chien qui, je le savais, ne répéterait rien aux journalistes.

À mon grand désarroi, le journal local a publié la manchette « Le NPD rejette Dyck ». Malheureusement, M. Layton a semblé penser que M. Martin m'avait délibérément nommée comme sénateur néo- démocrate au lieu de me donner le choix. Par la suite, de nombreux députés néo-démocrates de la Saskatchewan, dont le premier ministre Lorne Calvert et le ministre Pat Atkinson, sont intervenus en ma faveur, mais en vain. Je n'ai pas pu assister aux réunions du caucus néo-démocrate fédéral, bien que les femmes néo- démocrates m'invitent aux réunions de leur caucus et que je participe à ces réunions.

On m'a même incitée à refuser la nomination ou à siéger comme indépendante. Aucune de ces deux possibilités ne m'a semblé raisonnable ni juste, même si j'ai changé ma désignation en celle de sénateur néo-démocrate indépendant, ce qui traduit la situation avec plus d'exactitude.

Comment pouvais-je refuser une nomination au Sénat? Ma nomination transcende ma seule situation personnelle ou la politique officielle du NPD sur le Sénat. Je ne pouvais refuser, car cette nomination me donnait l'occasion d'exprimer les préoccupations d'autres personnes comme moi. Je suis membre d'une Première nation. Je suis une Canadienne d'origine chinoise de première génération. Je ne pouvais pas refuser aux autres Canadiens qui ont les mêmes origines que moi la possibilité de se dire qu'ils sont, eux aussi, dignes de siéger au Sénat. À mes yeux, la question est bien plus importante que toute politique de parti fondée sur la théorie plutôt que sur la réalité que vivent les minoritaires.

Je vous ai raconté mon histoire pour illustrer le manque de clarté du processus de sélection des sénateurs et le pouvoir que le premier ministre exerce à cet égard. Même notre premier ministre actuel, Stephen Harper, a usé seul de son pouvoir, sans recourir à des élections consultatives, pour nommer un sénateur.

Chose intéressante, lorsque les médias parlent du Sénat ces jours- ci, ils utilisent souvent l'expression « dominé par les libéraux » avec une connotation négative. Dans ce contexte, il est clair que le dépôt du projet de loi S-4 ici plutôt qu'à l'autre endroit constituait une tactique intéressante, qui plaçait essentiellement tous les sénateurs — et peut-être davantage les sénateurs libéraux — dans un cercle vicieux : nous serons critiqués, que nous votions en faveur du projet de loi ou contre. Si nous votons en faveur du projet de loi, on pourra dire que nous convenons que les sénateurs deviennent en quelque sorte stagnants s'ils restent ici plus de huit ans. On pourra également nous taxer d'hypocrisie si nous choisissons de conserver notre mandat à plus long terme, tout en limitant celui des sénateurs nouvellement nommés. En même temps, si nous votons contre le projet de loi, nous pourrions être critiqués pour avoir tenté d'empêcher l'adoption de cette mesure législative pour des raisons strictement partisanes, même s'il peut y avoir des raisons parfaitement légitimes de ne pas l'adopter. Quoi que nous fassions, nous serons toujours perdants.

Le projet de loi S-4, destiné à ramener à huit ans la durée du mandat des futurs sénateurs, constitue apparemment la première mesure que prend le gouvernement conservateur minoritaire en vue de la réforme du Sénat. Toutefois, le projet de loi semble viser davantage à améliorer le rendement des sénateurs qu'à renforcer le rôle ou les fonctions du Sénat.

On a affirmé que la réduction de la durée du mandat des sénateurs accélérera le roulement au Sénat, ce qui devrait assurer le renouvellement des idées dans l'institution. Je conviens volontiers qu'il est bon de voir arriver des gens avec de nouvelles idées. En même temps, il est également bon de pouvoir bénéficier de la sagesse de nos aînés, qui ont acquis ici leurs connaissances et leur expérience en bien plus de huit ans.

La réduction de la durée du mandat des sénateurs est-elle le meilleur moyen d'avoir de nouvelles idées? Je n'y crois pas vraiment. Est-il possible pour le premier ministre de réaliser seul la réforme du Sénat, c'est-à-dire de réorganiser la composition de cette institution sans recourir à des mesures législatives quelconques, simplement en choisissant différemment les genres de personnes à y nommer?

Comme d'autres sénateurs l'ont dit, le premier ministre a le pouvoir de nommer n'importe qui au Sénat. Nous devrions peut- être discuter de la question de savoir si le premier ministre devrait être tenu de se conformer à cet égard à un ensemble minimum de critères. Il conviendrait peut-être de définir des paramètres et de les rendre publics pour aider le premier ministre à choisir les nouveaux sénateurs.

Par exemple, si le premier ministre devait chercher à assurer la parité pour les quatre groupes désignés, c'est-à-dire les femmes, les personnes handicapées, les minorités visibles et les Autochtones, il susciterait bien plus de diversité dans les idées et l'expérience du Sénat qu'en réduisant simplement la durée du mandat des sénateurs.

Lorsque j'ai été appelée au Sénat, j'ai été étonnée d'apprendre que près de 30 p. 100 des sénateurs sont des femmes. J'ai aussi eu une agréable surprise en constatant que le Sénat comptait à ce moment- là cinq membres autochtones.

La plus grande représentation des femmes au Sénat, par rapport à l'autre endroit, semble découler d'un choix délibéré d'anciens premiers ministres qui, comme Jean Chrétien, ont nommé au Sénat des nombres à peu près égaux d'hommes et de femmes. Au moment où j'ai été appelée, Paul Martin avait également choisi des nombres à peu près égaux de sénateurs des deux sexes. Notre groupe du printemps 2005 comptait en effet quatre femmes et cinq hommes.

Toutefois, pourquoi la représentation des femmes ou des minorités au Sénat devrait-elle dépendre exclusivement de la bonne volonté ou de l'humeur du premier ministre? Dans une démocratie moderne, la représentation proportionnelle des femmes et des minorités ne devrait-elle pas constituer l'un des critères de sélection des sénateurs auxquels le premier ministre doit se conformer?

En conclusion, je ne crois pas que le projet de loi S-4 soit nécessaire pour revitaliser le Sénat. On parviendrait plus facilement à cet objectif en établissant des critères de sélection des sénateurs auxquels le premier ministre aurait à se conformer et qui lui imposeraient d'assurer la parité pour les quatre groupes désignés — femmes, personnes handicapées, Autochtones et minorités visibles — plutôt qu'en réduisant simplement la durée du mandat des sénateurs.

L'honorable Lorna Milne : Je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Le sénateur Milne, avec l'appui du sénateur Gill, propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire : À mon avis, les oui l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés :

Son Honneur la Présidente intérimaire : Sommes-nous d'accord pour que la sonnerie retentisse pendant 30 minutes? La sonnerie retentira donc pendant 30 minutes. Convoquez les sénateurs.

(1600)

(La motion est adoptée et le débat est ajourné.)

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Atkins Furey
Austin Gill
Bacon Goldstein
Baker Grafstein
Banks Hays
Biron Hervieux-Payette
Bryden Joyal
Callbeck Mahovlich
Carstairs Milne
Chaput Mitchell
Cook Moore
Corbin Munson
Cordy Pépin
Cowan Peterson
Dallaire Phalen
Dawson Poulin
De Bané Ringuette
Downe Robichaud
Dyck Smith
Eggleton Spivak
Fairbairn Stollery
Fitzpatrick Tardif
Fox Trenholme Counsell—47
Fraser

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuk LeBreton
Angus Meighen
Champagne Nancy Ruth
Comeau Nolin
Di Nino Segal
Eyton St. Germain
Gustafson Stratton—15
Johnson

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Cools Prud'homme—2

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable J. Trevor Eyton propose que le projet de loi C-26, Loi modifiant le Code criminel (taux d'intérêt criminel), soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-26, Loi modifiant le Code criminel (taux d'intérêt criminel).

Le projet de loi C-26 propose des modifications au Code criminel qui assureront une meilleure protection des consommateurs canadiens qui en sont venus à utiliser régulièrement les services des sociétés de prêt sur salaire. Cette industrie existe au Canada depuis un peu plus de dix ans, mais il n'y avait jusqu'à maintenant aucun cadre de réglementation particulier à ce genre d'entreprise. Le projet de loi C-26 contribuera à corriger cette lacune. J'exhorte tous les sénateurs à se joindre à moi pour adopter rapidement cet important projet de loi.

L'industrie canadienne du prêt sur salaire soulève des préoccupations depuis un certain temps. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, les médias et les groupes de consommateurs se sont tous penchés sur la meilleure manière de répondre aux préoccupations légitimes liées à cette industrie, notamment ses pratiques discutables pour le recouvrement des créances, les frais élevés associés aux prêts et les lacunes dans la divulgation des modalités contractuelles.

Honorables sénateurs, tout le monde s'entend, au Canada, pour dire qu'il faut veiller à ce que les consommateurs bénéficient d'une protection adéquate en matière de prêts sur salaire. Le projet de loi C-26 assurera cette protection, et je suis heureux de faire savoir que cette mesure a été conçue à la lumière de consultations entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, et notamment avec la collaboration des ministres responsables des questions de consommation.

Les prêts sur salaire et l'industrie du prêt sur salaire en sont venus à occuper un créneau important dans les villes et villages du Canada. Pour le meilleur et pour le pire, les petits prêts à court terme offerts par les prêteurs sur salaire sont devenus une solution courante pour les gens à court d'argent.

Les gens recourent à ces services substituts pour diverses raisons, mais une chose est claire, ils empruntent énormément. Selon des estimations, les consommateurs empruntent annuellement 1,7 milliard de dollars auprès de plus de 1 300 sociétés de prêt sur salaire en activité dans toutes les provinces et territoires, sauf au Québec, qui a pris la décision de ne pas délivrer de permis aux établissements assortissant leurs prêts de taux d'intérêt annuels de plus de 35 p. 100. Cette décision a empêché l'implantation, dans cette province, du secteur du prêt sur salaire, qui est en plein essor dans les territoires et dans toutes les autres provinces. Force est de constater que cette industrie est solidement implantée au Canada et qu'elle continue sur sa lancée. Il est donc important de faire en sorte que les consommateurs qui recourent aux services des prêteurs sur salaire soient à l'abri de l'exploitation.

Qu'est-ce qu'un prêt sur salaire? En gros, c'est un petit prêt, d'un montant de 300 $ en moyenne, souvent garanti par le chèque de paie de l'emprunteur. Toutefois, le chèque de paie n'est pas la seule garantie offerte en contrepartie pour ce type de prêt. On ne demande parfois qu'une preuve de revenu stable tel que le revenu de pension, par exemple. Par ailleurs, ces prêts sont habituellement assortis d'une courte période de remboursement, souvent une période de dix jours ou alors une période se terminant lorsque l'emprunteur touchera son prochain chèque.

Il est assez facile d'être admissible à ce type de prêt. En effet, une personne n'a qu'à fournir un chèque postdaté ou une autorisation de prélèvement automatique ainsi qu'une preuve de revenu. Le chèque postdaté couvrira le remboursement du prêt, soit le principal, les intérêts courus et les frais afférents.

Somme toute, le scénario semble simple et relativement anonyme à l'emprunteur. En fait, c'est ce qui pousse autant de gens à se tourner vers ces services substituts. Malheureusement, d'aucuns adoptent le prêt sur salaire par nécessité, afin de pouvoir régler leurs factures et joindre les deux bouts entre deux chèques de paie. Peu importe les raisons qui les poussent à contracter ce type d'emprunt, les consommateurs canadiens sont en droit de s'attendre à ce que leurs gouvernements adoptent les lois nécessaires pour les protéger. Notre gouvernement est déterminé à répondre à ces attentes et, ce faisant, à améliorer la qualité de vie de nos citoyens.

(1610)

Le projet de loi C-26 modifie le Code criminel et assure aux provinces et territoires la souplesse nécessaire pour adopter des mesures législatives afin de réglementer l'industrie du prêt sur salaire dans leur champ de compétence. Ils pourront le faire de la façon qu'ils jugent la plus appropriée, en fonction des besoins de leurs consommateurs. Cela peut prendre la forme d'un régime d'exemption des dispositions de l'article 347 du Code criminel relatif au taux d'intérêt criminel.

Certains pourraient soutenir que ce n'est pas un moyen approprié de protéger ceux qui recourent aux services des prêteurs sur salaire et qu'il vaudrait mieux que le gouvernement fédéral établisse un régime national pour contrôler le coût de ces prêts. D'autres pourraient penser que le gouvernement fédéral n'a pas à intervenir dans les affaires des provinces et des territoires. Permettez-moi de dire que l'approche proposée dans le projet de loi C-26 assure un équilibre approprié entre les besoins de toutes les administrations et reconnaît que les provinces et les territoires sont les mieux placés pour mettre en œuvre des mesures de protection des consommateurs face à l'industrie du prêt sur salaire. Permettez-moi en outre d'ajouter que toutes les administrations s'entendent sur la nécessité de soustraire les prêteurs légitimes sur salaire à l'application de l'article 347 du Code criminel, comme le propose le projet de loi C- 26.

L'article 347 rend coupable d'une infraction criminelle quiconque conclut une convention ou une entente pour percevoir des intérêts à un taux annuel supérieur à 60 p. 100. L'article 347 a été ajouté à notre Code criminel pour combattre le crime organisé et s'attaquer à son rôle particulier dans le domaine du prêt usuraire. Cette disposition n'avait pas pour objet de réglementer des opérations commerciales autrement légitimes. Toutefois, malgré son objet déclaré, l'article 347 a été interprété comme s'appliquant à la plupart des prêts au Canada.

Honorables sénateurs, l'article 347 n'est pas le mécanisme qui convient pour assurer la protection des consommateurs. Nous ne sommes pas les seuls à être de cet avis. Les nombreuses administrations qui se sont prononcées à cet égard ont jugé que cette disposition ne constitue pas un moyen de protection des consommateurs. Par exemple, le Centre pour la défense de l'intérêt public a déclaré que les dispositions relatives au taux d'intérêt criminel constituent en fait un obstacle à une réglementation provinciale efficace de l'industrie du prêt sur salaire. Pour cette raison et pour d'autres déjà mentionnées, les modifications envisagées dans le projet de loi C-26 sont importantes et devraient entraîner une plus grande protection des consommateurs.

Le projet de loi C-26 propose d'ajouter au Code criminel un nouvel article 347.1 soustrayant les prêteurs sur salaire à l'application de l'article 347 dans des circonstances précises. Ce faisant, le projet de loi ouvre la voie aux provinces et aux territoires pour qu'ils puissent réglementer cette industrie.

Compte tenu du fait que le prêt sur salaire porte généralement sur une somme modeste prêtée à court terme, le projet de loi C-26 définit ainsi le prêt sur salaire :

Opération par laquelle une somme d'argent est prêtée en échange d'un chèque postdaté, d'une autorisation de prélèvement automatique ou de paiement futur de même nature et à l'égard de laquelle ne sont fournis aucun cautionnement ni autre sûreté sur des biens ou autorisation pour découvert de compte; sont toutefois exclus les prêts sur gage ou sur marge, les lignes de crédit et les cartes de crédit.

Il ressort de cette définition que le projet de loi vise particulièrement l'industrie du prêt sur salaire puisque l'exemption proposée ne s'appliquera ni aux prêteurs sur gages ni à d'autres formes de prêts, comme les lignes de crédit. Cela se justifie parce que les considérations administratives liées à ces autres formes de crédit sont très différentes.

Le projet de loi C-26 limite en outre les conventions de prêt en exemptant les prêts sur salaire de 1 500 $ ou moins accordés pour des périodes n'excédant pas 62 jours. Encore une fois, ces paramètres reflétant le scénario caractéristique du prêt sur salaire ont été définis en consultation avec les provinces et les territoires. Ces limites assureront une certaine flexibilité aux emprunteurs, aux prêteurs et aux autorités provinciales de réglementation tout en respectant la nature même du prêt sur salaire, soit un montant modeste prêté à court terme.

Le projet de loi C-26 comporte d'autres conditions à remplir avant que l'exemption de l'article 347 du Code criminel ne prenne effet. En particulier, le prêteur sur salaire doit être titulaire d'une licence ou être autrement autorisé par les lois de la province ou du territoire à conclure des conventions de prêt sur salaire. Cette exigence se rattache au but ultime du projet de loi, qui est de réglementer efficacement l'industrie du prêt sur salaire au Canada. Les provinces et les territoires seront également tenus de mettre en place des mesures de protection des consommateurs applicables à cette industrie. Bien sûr, le contenu précis de ces mesures sera essentiellement laissé à la discrétion des autorités provinciales et territoriales compétentes. Ce fait, honorables sénateurs, témoigne du caractère innovateur des modifications proposées.

Le projet de loi C-26 reconnaît que les provinces et les territoires sont les mieux placés pour déterminer les éléments nécessaires à une protection efficace des consommateurs dans leur champ de compétence. Ils seront donc libres de réviser, selon leurs besoins, leurs mesures législatives existantes, de façon à les compléter. Dans bien des cas, cela prendra la forme de modifications apportées aux lois existantes de protection des consommateurs, qui ont été adoptées en vertu des pouvoirs constitutionnels des provinces et des territoires en matière de propriété et de droits civils. C'est en effet le cas de la Nouvelle-Écosse et du Manitoba, qui ont modifié leurs lois de protection des consommateurs pour tenir compte de l'industrie du prêt sur salaire. Les deux provinces attendent maintenant l'adoption du projet de loi C-26.

Pour donner effet à l'exemption de l'article 347, le projet de loi C- 26 exige aussi que le régime provincial de protection des consommateurs impose une limite sur le coût total de l'emprunt. Cela est très important, car les consommateurs seront ainsi protégés contre les taux d'intérêt usuraires et profiteront d'exigences de divulgation claires. Ainsi, ils sauront exactement combien l'emprunt leur coûte, ce qui leur permettra en définitive de prendre des décisions plus éclairées tout en assurant un environnement opportun, transparent et concurrentiel. La définition des limites est également laissée aux provinces et aux territoires, qui sont les mieux placés pour fixer les plafonds nécessaires compte tenu des lois existantes et des circonstances locales.

La dernière exigence prévue par le projet de loi C-26 pour l'application de l'exemption est que le gouvernement fédéral doit désigner la province ou le territoire où le prêteur sur salaire exerce son activité. Il s'agit d'un processus simple. Il suffira à cette fin que la province écrive au ministre fédéral de la Justice et démontre qu'elle a des mesures législatives assurant la protection de ceux qui sollicitent des prêts sur salaire et limitant le coût total de l'emprunt ainsi qu'un régime assurant la transparence et le caractère concurrentiel du marché.

Si, sur la recommandation du ministre fédéral de l'Industrie, le ministre de la Justice est convaincu que la province satisfait aux exigences, il recommande au gouverneur en conseil d'accorder l'exemption. Il convient de noter que, en vertu du projet de loi C-26, cette désignation peut être annulée si la province ou le territoire le demande ou ne satisfait plus aux exigences.

Il importe de signaler que le projet de loi C-26 ne s'appliquera pas aux institutions financières sous réglementation fédérale, comme les banques. Celles-ci relèvent de la compétence fédérale en vertu de la Constitution et sont régies par de nombreuses mesures législatives fédérales.

Honorables sénateurs, le Canada est un pays vaste et diversifié dont les citoyens ont des besoins différents selon l'endroit où ils vivent. Il importe donc que nos systèmes juridiques soient adaptés à ces besoins. Même si tous nos consommateurs doivent bénéficier d'une protection efficace, la nature exacte de cette protection dépend des circonstances particulières de chaque province et territoire.

Je crois que l'approche proposée dans le projet de loi C-26 est sensée, répond aux besoins de l'ensemble des provinces et territoires et satisfait aux considérations constitutionnelles pertinentes. De plus, elle témoigne de l'engagement de notre gouvernement à collaborer avec les provinces et les territoires pour trouver des solutions aux problèmes d'intérêt commun. Ultimement, cela assurera une meilleure protection aux consommateurs canadiens.

En terminant, j'exhorte tous les honorables sénateurs à appuyer cet important projet de loi. Il aidera les consommateurs partout au Canada en permettant aux provinces et aux territoires d'adopter les mesures législatives qui leur conviennent afin de protéger les utilisateurs de l'industrie du prêt sur salaire. Je crois que le projet de loi C-26 constitue une solution rationnelle et pragmatique à un problème qui, nous en convenons tous, exige une attention immédiate.

(Sur la motion du sénateur Callbeck, le débat est ajourné.)

(1620)

PROJET DE LOI SUR LA JOURNÉE NATIONALE DE LA PHILANTHROPIE

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Joyal, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-204, Loi instituant la Journée nationale de la philanthropie. —(L'honorable sénateur Comeau)

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, comme nombre de nos collègues sénateurs, sinon tous, le savent, j'en suis certain, la philanthropie est fort utile et avantageuse pour notre pays. Je suis certain que nombreux sont les sénateurs qui ont participé à des campagnes de financement pour des œuvres de charité ou pour des organisations sans but lucratif.

Il y a maintenant 15 jours que cet article a été mis à l'étude. Compte tenu de l'importance que revêt la philanthropie, j'aimerais prendre la parole au sujet du projet de loi S-204, mais je n'ai pas préparé de discours pour aujourd'hui. Je souhaite, par conséquent, demander l'ajournement de cet article à mon nom pour ce qu'il me reste des 15 minutes qui m'étaient allouées.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1867

RAPPORT DU COMITÉ SÉNATORIAL SPÉCIAL—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Hays, appuyée par l'honorable sénateur Fraser, tendant à l'adoption du deuxième rapport du Comité sénatorial spécial sur la réforme du Sénat (motion de modifier la Constitution du Canada (la représentation des provinces de l'Ouest au Sénat), sans amendement, mais avec des observations), présenté au Sénat le 26 octobre 2006;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Tkachuk, appuyée par l'honorable sénateur Campbell, que le deuxième rapport du Comité sénatorial spécial sur la réforme du Sénat ne soit pas adopté maintenant, mais que la motion pour modifier la Constitution du Canada (représentation des provinces de l'Ouest au Sénat), soit modifiée comme suit :

a) par substitution, au troisième paragraphe de la motion, des mots « la Colombie-Britannique devienne une division distincte représentée par douze sénateurs » par ce qui suit :

« la Colombie-Britannique devienne une division distincte représentée par vingt-quatre sénateurs »;

b) par substitution, à l'article 1 de l'annexe de la motion, à l'article 21, des mots « se composera de cent dix-sept membres » par ce qui suit :

« se composera de cent vingt-neuf membres »;

c) par substitution, à l'article 1 de l'annexe de la motion, à l'article 22, des mots « la Colombie-Britannique par douze sénateurs » par ce qui suit :

« la Colombie-Britannique par vingt-quatre sénateurs »;

d) par suppression, à l'article 2 de l'annexe de la motion, à l'article 27, des mots « ou, dans le cas de la Colombie- Britannique, tant que la représentation de celle-ci ne sera pas revenue au nombre fixe de douze sénateurs »;

e) par substitution, à l'article 2 de l'annexe de la motion, à l'article 28, des mots « excéder cent vingt-sept » par ce qui suit :

« excéder cent trente-neuf ».—(L'honorable sénateur Nolin)

L'honorable Pierre Claude Nolin : Honorables sénateurs, il me fait plaisir de participer au débat portant sur la motion des honorables sénateurs Murray et Austin et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Tkachuk.

Dans un premier temps, il s'agit de situer le contenu de cette motion principale. Pour ceux qui l'auraient oublié ou qui voudraient que l'on rafraîchisse un peu leur mémoire, la motion propose un amendement constitutionnel.

Cet amendement vise à augmenter le nombre total de sénateurs de 12. Cette augmentation de la nouvelle représentation serait divisée de la façon suivante : la province de la Colombie-Britannique aurait une représentation accrue de six sénateurs, ce qui porterait sa représentation totale à 12 sénateurs; la province de l'Alberta compterait quatre sénateurs de plus, ce qui porterait sa représentation à dix sénateurs; et enfin, pour les provinces de la Saskatchewan et du Manitoba, chacune d'elle verrait son nombre de sénateurs augmenter d'un sénateur, ce qui porterait leur représentation respective à sept sénateurs.

Un amendement corollaire est provoqué par l'existence de l'article 26 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui permet au gouverneur en conseil d'augmenter de quatre ou de huit le nombre de sénateurs. La proposition corollaire prévue dans la motion du sénateur Murray vise à porter ce nombre à cinq ou à dix sénateurs, afin de permettre une redistribution paritaire dans chacune des régions sénatoriales. Cette motion vise donc à doter le Sénat d'une représentation régionale accrue par la création d'une cinquième région.

Le comité qui a examiné cette question s'est aussi penché sur la formule d'amendement nécessaire afin de mettre en œuvre cet amendement. Il s'agit de la formule d'amendement prévue à l'article 38 de la Loi constitutionnelle de 1982, formule qui prévoit que pour qu'un tel amendement soit mis en vigueur, en plus du consentement du Sénat et de la Chambre des communes, il faut aussi le consentement des assemblées législatives des deux tiers des provinces du Canada et représentant au moins 50 p. 100 de la population du Canada.

C'est ce que nous appelons communément la formule 7/50 puisqu'il y a dix provinces canadiennes. Je crois vous avoir résumé la motion principale.

Dans le cas de la motion d'amendement, elle vise à doubler ce nombre. Je porterai mon attention sur l'analyse de la motion principale. Il s'agit donc d'établir deux régions dans une section du Canada où il n'y en a qu'une actuellement.

Je tiens d'abord à remercier les honorables sénateurs concernés pour le travail qu'ils ont consacré à l'examen de cette question. À la fin de mes remarques, je ferai une recommandation qui, je pense, aura l'heur de leur plaire.

On doit reconnaître, comme ils le font dans leur rapport, que, depuis plus de 30 ans, tous les projets de réforme, toutes les discussions, tous les documents qui ont été signés, toutes les analyses sérieuses qui ont servi à étudier la réforme du Sénat ont toutes et tous parlé de l'augmentation de la représentation des provinces de l'Ouest.

C'est un thème récurrent et il ne l'est pas par caprice. C'est la réalité. Depuis 1971, la Colombie-Britannique veut être considérée comme une région et pas seulement aux fins du calcul de la représentation sénatoriale. L'histoire subséquente nous a démontré que sa volonté va beaucoup plus loin. Elle réclame cette spécificité afin de devenir ce que le rapport identifie comme « la région canadienne du Pacifique ».

Le rapport énumère une série d'éléments qui font de la Colombie- Britannique une région distincte, à part entière, de l'ensemble de l'Ouest canadien géographique, très distincte dans sa composition.

Je pense qu'il faut aviser tous les sénateurs qui ont étudié ce rapport, et ceux qui ne l'ont pas examiné, qu'aucun témoin expert n'a soulevé d'inquiétudes majeures quant à la création de cette cinquième région. Je pense que c'est important de le dire.

Certains ont soulevé des préoccupations mais, dans l'ensemble, tous les témoins experts entendus par le comité n'ont pas soulevé d'inquiétudes majeures quant à la création de cette cinquième région qui serait la province de la Colombie-Britannique.

J'aimerais maintenant parler d'un élément important; le comité a retenu un concept que j'appellerais le « concept de l'équilibre pragmatique ». On entend souvent parler de l'« équilibre régional », de la « parité », du compromis de 1915, où les quatre divisions sénatoriales ont été constituées ou reconnues.

(1630)

Le comité doit être félicité pour avoir exploré et conservé ce principe de l'équilibre pragmatique. Je voudrais vous citer un passage du rapport. À la page 13, on dit :

[...] la représentation au Sénat constitue un équilibre propre au Canada qui tient compte de la taille de la population, de l'étendue géographique, de l'identité politique et des intérêts communs, sans la rigidité qui accompagnerait une formule de répartition des sièges appliquée rigoureusement. Le concept de « région » demeure utile dans cet équilibre puisque c'est un moyen de reconnaître les besoins différents sur le plan de la représentation conjugués aux concentrations importantes de la population et au poids économique, tout en n'excluant pas la possibilité de répondre à d'autres besoins, comme le prouve l'attribution de sièges aux trois territoires.

Nous devons conserver dans notre analyse la raison pour laquelle le comité a retenu ce concept d'équilibre pragmatique qui nous permet d'éliminer avec rigueur cet équilibre parfait pour nous concentrer sur beaucoup plus de pragmatisme dans l'objectif d'une meilleure représentation dans la deuxième Chambre du Parlement du Canada.

Le comité en vient à la conclusion — et j'abonde dans le même sens — qu'il faut reconnaître la Colombie-Britannique en tant que cinquième région et que cette reconnaissance doit être évaluée conjointement avec celle des provinces des Prairies et distinctement. Encore une fois, le comité a su retenir le concept d'équilibre pragmatique.

Il faut aussi applaudir les membres du comité pour la justesse de leur analyse comparative des provinces qui reconnaît l'existence de provinces dites intermédiaires. Je voudrais vous citer aussi un passage du rapport, à la page 13, qui dit ceci :

La reconnaissance de deux régions dans l'Ouest vient du fait que la croissance démographique, particulièrement en Alberta et en Colombie-Britannique, en a fait des provinces intermédiaires dans la fédération canadienne. En tant que provinces moins populeuses, comparativement au Québec et à l'Ontario, elles doivent encore avoir une représentation plus élevée mais, simultanément, la population et le poids économique de l'Alberta et de la Colombie-Britannique à l'heure actuelle exigent une représentation supérieure à celle des provinces du Canada Atlantique. Pris individuellement, le caractère distinctif sur le plan démographique et économique de la Colombie-Britannique justifie amplement qu'elle devienne une région, comme l'a reconnu le Parlement au milieu des années 1990 (dans la loi concernant la ratification avec l'appui des régions dont il est question dans la section « Contexte »).

Compte tenu du temps qui m'est alloué, nous pourrons débattre un autre jour de la reconnaissance nécessaire ou non des cinq régions pour permettre l'adoption de la motion proposée. Il faut abonder dans le sens de la proposition suggérée par le comité et manifestée dans la motion du sénateur Murray.

Vous aurez compris que mon commentaire ne s'arrête pas là. En passant, je ne suis pas en accord avec la proposition d'amendement du sénateur Tkachuk. Elle triche, malheureusement, avec ce principe d'équilibre pragmatique retenu par le comité que nous devons garder en tête.

L'amendement suggéré par le sénateur Tkachuk ne respecte pas cet équilibre pragmatique. Le nombre proposé par le sous- amendement est trop élevé et nous ne pouvons pas qualifier cette proposition d'équilibrée. C'est pourquoi je préfère la proposition principale du sénateur Murray.

Dans tout ce débat, nous devons voir cette motion d'amendement comme l'une des composantes d'un débat beaucoup plus large qui touche à la réforme de notre institution. Chaque fois que nous parlons de la réforme de notre institution et surtout lorsque les experts ou même les supposés experts en parlent, un mot revient continuellement, et ce n'est pas celui auquel vous pensez. Ce n'est ni « élection » ni « égalité », car le mot qui revient continuellement à la lecture du rapport est « efficace ». Nous devons nous attarder à ce mot parce que c'est celui qui l'emporte de loin lorsqu'on analyse la réforme de notre institution.

J'ai trois réflexions. Une première en tant que Québécois. Certains d'entre vous se demanderont comment il se fait qu'un Québécois ayant 24 sièges protégés au Sénat, à parité avec l'Ontario, sièges qui ont été le fruit d'un compromis historique en 1864, — le sénateur Furey y a fait référence lors d'un autre débat — puisse mettre de côté sa position traditionnelle pour accepter d'examiner une petite réforme visant à donner le statut de région à la Colombie- Britannique et à procéder à une augmentation conséquente de sa représentation.

Le Québec a pris acte des débats qui ont eu lieu au début des années 1990. Comme le disait le ministre Pelletier lors de son témoignage devant le comité, le Québec ne peut rester bêtement retranché dans ses positions en n'acceptant de participer à aucun débat qui vise à améliorer l'efficacité de l'institution. Ceux qui pensent que le Québec est statique dans ce débat devraient réexaminer leurs positions. Le Québec a décidé de prendre une position beaucoup plus active et évoluée dans ce débat.

Lorsque le Québec a négocié, de haute lutte avec l'Ontario, le compromis de 1864 sur la création du Sénat du Canada, vous aurez compris que le Québec était un bastion catholique et canadien- français.

Malheureusement, c'est tout le temps qui m'est alloué. Je vous demande cinq minutes de plus.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'accorder cinq minutes supplémentaires au sénateur Nolin?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Nolin : Mais le Québec n'était pas le seul endroit où il y avait des Canadiens français. La reconnaissance de ce fait historique doit aussi être gardée en tête lorsque le Québec décide de participer sérieusement à l'évolution de notre fédération. Le Québec doit — et c'est pourquoi il l'accepte — examiner l'ensemble des possibilités d'évolution de notre Parlement pour en faire un Parlement beaucoup plus efficace et respectueux des aspirations de tous les Canadiens, pas seulement des Québécois et pas uniquement des Québécois qui pensent que, parce que nous étions un bastion canadien-français catholique à l'époque, un peu plus morcelé aujourd'hui, c'est la fin du monde.

(1640)

Les Québécois d'aujourd'hui reconnaissent — et le ministre Pelletier nous l'a répété — qu'il existe au Canada un million de francophones qui ne sont pas des Québécois. C'est pourquoi nous devons tenter de trouver des solutions pour améliorer notre Parlement, rendant possible cette réalité.

Je pense que la recherche de cette efficacité n'est pas uniquement externe. Ceux qui pensent que toute solution doit passer par un amendement constitutionnel font erreur. Plusieurs de ces réformes peuvent se faire à l'interne. Si nous prenions le temps d'examiner tout ce que nous pouvons faire à l'interne pour améliorer l'efficacité de notre institution, nous serions surpris. Le sénateur Banks y faisait référence la semaine dernière lorsqu'il parlait de ces caucus régionaux, indépendants des partis politiques, regroupant des collègues d'une même région élaborant ou réfléchissant ensemble sur des projets concernant leur région.

Avant de conclure, j'aimerais qu'on réfléchisse à la création d'un comité permanent du Sénat — pas un comité ad hoc ou temporaire, mais un comité permanent — qui verrait à examiner l'état des connaissances canadiennes en ce qui concerne le Sénat, l'évolution de l'opinion publique, l'évolution des options offertes. Pourquoi? Pour mettre en jeu ceux qui utilisent l'argument que c'est une proposition parcellaire, morcelée, que l'on ne peut pas examiner une modification parce qu'on ne peut pas l'isoler et que la réforme du Sénat est tellement complexe que cela doit être fait en un bloc. Lorsque nous allons voter là-dessus, nous devrons voter sur un bloc et ne pas isoler les réformes. La politique, ce n'est pas cela, je crois que la politique, c'est l'art du possible.

Cela étant dit, je pense que nous devrions avoir, dans notre institution, un groupe de sénateurs ayant la responsabilité de glaner ces informations et de nous les offrir lorsque le besoin s'en fera sentir. Je pense que nous aurions intérêt à investir temps et argent pour mettre en place ce comité qui rechercherait rigueur et efficacité.

L'honorable Daniel Hays : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Nolin pour son discours, qui a démontré l'esprit du Canada comme en 1867, surtout pour un discours d'un sénateur du Québec. Je n'ai donc pas de question, je voulais tout simplement le remercier.

[Traduction]

J'apprécie vos commentaires concernant le rapport du comité. Je pense que le comité a fait du bon travail.

[Français]

Je suis sensible au concept d'équilibre pragmatique et d'efficacité, qui est l'esprit des propos du sénateur Nolin.

(Sur la motion du sénateur Ringuette, le débat est ajourné.)

[Traduction]

L'ÉTUDE SUR LA PAUVRETÉ RURALE

RAPPORT INTÉRIMAIRE DU COMITÉ DE L'AGRICULTURE ET DES FORÊTS—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport (intérimaire) du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, intitulé Comprendre l'exode : lutte contre la pauvreté, déposé au Sénat le 13 décembre 2006.—(L'honorable sénateur Fairbairn, P.C.)

L'honorable Joyce Fairbairn : J'ai le plaisir, honorables sénateurs, de vous parler un peu du travail qu'accomplit le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Comme les sénateurs le savent, notre comité est au beau milieu d'une vaste étude sur la pauvreté rurale. À notre connaissance, c'est la première fois que l'accent est mis sur ce sujet dans l'une ou l'autre des deux Chambres du Parlement. C'est à partir des nombreux témoignages entendus l'automne dernier que nous avons rédigé notre rapport intérimaire, qui a été déposé au Sénat le 13 décembre 2006 et qui, au dire de tous, a réellement touché un point sensible partout au Canada. Les Canadiens en prennent note et nous le disent. Je pense que, même si le rapport a été rendu public juste avant Noël, tous les membres du comité ont été submergés d'appels de la part des médias, entre autres, qui voulaient en savoir davantage sur nos travaux.

Honorables sénateurs, il se passe quelque chose dans les régions rurales du Canada et il est temps de s'y arrêter. D'ailleurs, pendant trop longtemps, la situation lamentable du Canada rural, celle des pauvres vivant dans nos régions rurales en particulier, est restée méconnue. Mais ce n'est plus le cas, honorables sénateurs. Nous ne fermons pas les yeux sur cette question au Sénat. Nous poursuivons d'ailleurs nos audiences ici, à Ottawa. Au cours des prochains mois, nous allons nous rendre dans toutes les provinces pour rencontrer les Canadiens des régions rurales dans leurs collectivités, sur leurs lieux de travail et même dans leurs foyers. Nous espérons visiter aussi les territoires du Nord avant de présenter un rapport final. Nous entreprenons nos déplacements lundi prochain. Commençant par Corner Brook, à Terre-Neuve-et-Labrador, nous irons ensuite en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick puis à Prince George, en Colombie-Britannique, avant de parcourir les Prairies. Nous avons aussi hâte de mettre les sénateurs au courant de nos constatations. Nous reviendrons périodiquement à Ottawa pour tenir des audiences au Québec et en Ontario.

Pour le moment, je voudrais attirer l'attention sur certains des principaux thèmes de notre rapport intérimaire. La première chose à dire concernant les pauvres de nos régions rurales, c'est que, à certains égards, ils sont invisibles. Ils sont invisibles parce qu'ils ne tendent pas la main. Ils ne se regroupent pas dans les centres-villes. Ils font rarement la queue devant les refuges pour sans-abri parce que, à quelques exceptions près, ces refuges n'existent pas en milieu rural. Ils sont invisibles. Comme des témoins nous l'ont dit la semaine dernière, les pauvres ne fréquentent les banques d'alimentation que le soir, à la noirceur, quand il est impossible de les identifier. Ils se plaignent rarement de leur sort parce que ce n'est pas comme cela que l'on agit au Canada rural. En fait, la pauvreté au Canada est plus répandue dans les régions rurales que dans les régions urbaines et c'est dans les régions rurales, et non dans les régions urbaines, qu'ouvrent maintenant la plupart des nouvelles banques d'alimentation.

Même ces statistiques, toutefois, ne donnent pas toute la mesure du problème. Les statistiques le font rarement. Les familles en difficulté dans les régions finissent souvent par se rendre dans les villes, chassées de leurs collectivités par l'absence de possibilités économiques, et se retrouvent soudain sans le soutien familial et social qui est si important dans la vie de chaque jour. Au moins une partie de la pauvreté urbaine est, en un sens, de la pauvreté rurale.

Cet exode fait ressortir un problème généralisé, soit celui du Canada rural qui perd ses habitants. Statistique Canada signale que, pour la toute première fois, la population rurale du Canada a chuté entre 1996 et 2001. Les Canadiens des régions rurales, et en particulier les jeunes, s'en vont vers les villes en quête de meilleures perspectives économiques, de possibilités de s'instruire et d'un niveau de vie décent.

(1650)

Qui peut les blâmer? Les coups durs se succèdent dans le secteur agricole : encéphalopathie spongiforme bovine, sécheresse, appréciation du dollar canadien, représailles commerciales. Qui peut les blâmer? Le secteur forestier perd des emplois à un rythme sans précédent, ce qui menace la survie de plus de 300 localités rurales qui dépendent des emplois de ce secteur. Qui peut blâmer les ruraux, et notamment les jeunes, alors que, où qu'ils se tournent, les médias, en grande partie urbains, montrent la vie trépidante des villes et ne s'arrêtent pas à l'importance, à la productivité, à l'histoire de la terre et des gens et des localités qui en vivent?

La semaine dernière encore, le Conference Board du Canada a publié une nouvelle étude dans laquelle il dit que le Canada doit se voir d'abord et avant tout comme un pays urbain. Il soutient qu'une forte croissance dans les villes centres — Toronto, Montréal, Vancouver, Halifax, Winnipeg, Regina, Saskatoon, Calgary et Edmonton — est tout ce qu'il faut pour assurer la prospérité de toutes les régions de notre pays.

Ce scénario convient peut-être fort bien à certaines régions, mais que deviennent Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau- Brunswick et même la Nouvelle-Écosse, autant de provinces privées des villes centres de la partie urbaine du Canada? Quelle place reste- t-il pour une localité comme Kapuskasing, en Ontario, qui est située à 850 kilomètres de Toronto, ou encore pour Keg River, en Alberta, qui se trouve à environ 700 kilomètres d'Edmonton?

Honorables sénateurs, à bien des égards, la situation du Canada rural est difficile, mais je manquerais à mon devoir si je ne vous disais pas aujourd'hui que tout n'est pas sombre. Malgré les graves difficultés à surmonter, il y a toute raison d'espérer dans l'avenir du Canada rural.

D'abord, le Canada rural devient de plus en plus attrayant pour les fabricants, attirés par le faible coût de l'immobilier et la présence d'une main-d'œuvre qualifiée. Tout le monde sait, par exemple, que les membres des familles agricoles comptent parmi les meilleurs travailleurs au Canada. Malgré l'exode des jeunes, le Canada rural profite d'un afflux composé surtout de jeunes familles et de baby- boomers qui sont au bord de la retraite et souhaitent tourner le dos aux tensions de la ville.

Enfin, les ruraux ont maintes fois donné la preuve de leur résilience, de leur attitude progressiste. Ils ont une impressionnante réserve de talents et de compétences et ils ont une éthique du travail. Ils attendent l'occasion de montrer au monde de quoi ils sont capables. Nos déplacements feront ressortir cet optimisme. Certes, le comité se rendra à des endroits où il rencontrera des gens qui ont du mal à s'en tirer, mais il croit également qu'il est important de visiter des localités et de parler avec des gens qui ont réussi, peut-être avec un peu d'aide, à retourner la situation et qui ont pu compter sur leur propre expérience et leurs compétences.

La plupart des propositions de politique qui sont écartées dans notre rapport provisoire, Comprendre l'exode : lutte contre la pauvreté rurale, sont des formes d'aide au Canada rural qui sont imposées d'en haut. Cette approche n'est plus acceptable, pour peu qu'elle l'ait jamais été. Les gouvernements doivent plutôt aider les ruraux à tabler sur leurs forces et leurs atouts, que nous avons cernés.

Les cyniques peuvent fort bien dire, et ils ne s'en sont pas privés : à quoi bon? Pourquoi ne pas les laisser se débrouiller avec leurs problèmes? Pour reprendre les propos de l'un de nos témoins, nous nous intéressons à la question parce que, en fin de compte, c'est une affaire de citoyenneté. Nous nous en soucions également parce que la société urbaine a besoin du Canada rural, et pas seulement des produits agricoles, des minéraux, de l'eau, des arbres et de la beauté de la nature, mais aussi des ruraux eux-mêmes, de leur culture et des promesses dont ils sont porteurs.

Je tiens à remercier tous les membres du comité. Je remercie plus particulièrement le sénateur Segal, car il a soulevé cette question peu après son arrivée parmi nous comme sénateur. Il s'agit d'un excellent comité, honorables sénateurs. Il faut remercier tous ses membres des efforts qu'ils continuent de déployer pour réaliser cette étude. Nous avons hâte de faire rapport de nos recommandations.

Enfin, j'adresse des remerciements spéciaux à mon coprésident, le sénateur Gustafson. Nous siégeons au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts depuis bien plus longtemps que nous ne voudrions l'admettre. Il a été pour moi un ange tutélaire : il est agriculteur. Il est un véritable agriculteur, il se préoccupe de tout ce secteur d'activité, il a un riche bagage de connaissances et il se préoccupe de l'évolution de l'agriculture.

Ensemble, forts de l'encouragement de notre collègue, nous essayons d'atteindre notre objectif dans ce qui est l'une des études les plus importantes que le Sénat ait entreprises depuis longtemps.

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, je tiens à prendre la parole pour appuyer ma collègue, madame le sénateur Fairbairn, distinguée présidente du comité, et dire que, même s'il y a une majorité et une minorité, il se dégage au comité un solide consensus pour reconnaître l'importance de l'enjeu, sans égard aux allégeances politiques.

Je voudrais dire un mot au sujet d'un appel téléphonique que j'ai reçu, parmi les nombreux appels que les sénateurs du comité ont reçus après la publication du dernier rapport. L'appel venait d'une journaliste qui appelait d'Allemagne pour une revue nationale allemande. Elle était renversée d'apprendre que le Canada est essentiellement un pays urbain, avec un taux d'urbanisation de 94 ou 95 p. 100. L'Australie et le Canada sont les deux pays les plus urbanisés au monde. L'impression des Allemands, qui était également la sienne, est que le Canada est un pays de champs de blé, qui a une énorme capacité de production agricole et de grandes localités agricoles qui nourrissent l'Amérique du Nord et le monde.

J'ai dû la détromper, mais pas à propos de la productivité de notre agriculture, de son efficacité ou de la qualité de ce qui s'y fait. J'ai dû lui dire que, malheureusement, de grandes régions du Canada se dépeuplent parce que les conditions propices à une bonne qualité de vie et aux bonnes perspectives économiques se dégradent rapidement.

Je lui ai donné quelques chiffres, et elle a été vraiment étonnée. Lorsque je lui ai dit que, en fait, l'Allemagne était un pays plus agricole, avec une densité rurale supérieure à celle du Canada, elle a été renversée. C'est la dure réalité. Je tiens à appuyer le rapport, que nous approuvons tous indifféremment de notre parti, et à souligner le travail de notre présidente, qui a été exceptionnel, et l'engagement avec lequel nous nous efforçons tous de répondre à la question centrale.

(1700)

Dans notre pays, nous faisons des investissements stratégiques dans de nombreux domaines importants. Nous le faisons dans la construction navale. Il serait peut-être plus économique de faire construire les coques en Corée, mais nous estimons que le Canada doit avoir une industrie de la construction navale. Nous achetons le plus possible notre matériel militaire au Canada, que ce soit meilleur marché ou non de l'acheter à l'étranger. Lorsque nos travailleurs de l'automobile sont au chômage, nous avons un programme d'emploi spécial auquel participent le gouvernement et les fabricants pour aider à garder les travailleurs en place en attendant la reprise. Nous faisons aussi des investissements stratégiques dans l'aérospatiale. Les questions fondamentales qui sous-tendent le travail de ce comité alors que nous recueillons les données pertinentes et entendons des témoignages personnels sont les suivantes : la société est-elle disposée à faire un investissement stratégique misant sur l'importance de nos localités rurales? Si oui, comment y arriver le mieux et le plus efficacement possible en mettant à profit les forces des secteurs public et privé, conformément à la tradition canadienne? Autrement, aurons-nous le courage de dire aux Canadiens des régions rurales que nous ne sommes pas leurs alliés et qu'ils ne peuvent pas compter sur nous? Voilà les questions fondamentales auxquelles le comité cherche des réponses. J'aimerais appuyer la motion tendant à l'adoption du rapport dont nous sommes saisis.

(Sur la motion du sénateur Cowan, au nom du sénateur Callbeck, le débat est ajourné.)

[Français]

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COMMERCE INTERNATIONAL

AUTORISATION AU COMITÉ D'ÉTUDIER L'EFFICACITÉ DE LA PROMOTION CANADIENNE DE LA DÉMOCRATIE À L'ÉTRANGER

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Tkachuk, au nom de l'honorable sénateur Segal, appuyée par l'honorable sénateur Stratton,

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à étudier, en vue d'en faire rapport, l'efficacité de la promotion canadienne de la démocratie à l'étranger; le rôle du Parlement du Canada dans ce contexte;

Que le Comité présente son rapport final au plus tard le 31 décembre 2007; et que le Comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion des résultats de son étude contenu dans son rapport final jusqu'au 31 mars 2008;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Corbin, appuyée par l'honorable sénateur Day, que la motion soit modifiée par l'ajout des mots « Que le Comité soit autorisé à voyager à l'extérieur du Canada aux fins de son étude; » après le premier paragraphe.—(L'honorable sénateur Comeau)

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) propose que la motion soit adoptée.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion d'amendement de l'honorable sénateur Corbin?

Des voix : D'accord.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion modifiée?

Des voix : D'accord.

(La motion modifiée est adoptée.)

[Traduction]

LA SITUATION DE L'ALPHABÉTISME

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Fairbairn, C.P., attirant l'attention du Sénat sur

la situation de l'alphabétisme au Canada, ce qui donnera à tous les sénateurs présents dans cette enceinte l'occasion de parler de cette question qui, dans notre pays, est souvent oubliée.—(L'honorable sénateur LeBreton, C.P.)

L'honorable Francis William Mahovlich : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet d'une question vitale et d'envergure. Malgré son importance, cependant, il s'agit malheureusement d'une question qui est souvent mise en veilleuse par notre société trop occupée. Je parle de l'alphabétisme au Canada. Cette question a été traitée par de nombreux sénateurs, qui sont tous passionnés par l'importance de l'alphabétisme. L'alphabétisme concerne chaque habitant du pays, qu'il s'agisse de lire une histoire à ses enfants, de lire et de comprendre la posologie d'un médicament ou de trouver un emploi pour payer les factures. L'alphabétisme est une question que nous ne pouvons pas nous permettre de continuer à occulter.

Toutefois, comme tous les sénateurs le savent, c'est précisément ce qu'a fait le gouvernement fédéral le 25 septembre 2006 en réduisant de 17,7 millions de dollars sur deux ans le financement des organisations d'alphabétisation. Ces réductions ont entraîné la fermeture, partout dans le pays, de nombreux organismes nécessaires qui aidaient les Canadiens dans ce domaine. Bien des organismes ont en effet fermé leurs portes, dont le réseau d'alphabétisation de la Saskatchewan, la coalition d'alphabétisation du Yukon, le projet familial et communautaire de développement de l'alphabétisation des Territoires du Nord- Ouest et la coalition d'alphabétisation de Terre-Neuve et sa ligne d'information. Les services de ces organismes ne sont donc plus offerts à ceux qui en ont le plus besoin. À part la fermeture de ces importants organismes d'alphabétisation, la viabilité future de nombreux autres programmes est incertaine. Bien sûr, cela est très troublant puisque tant de Canadiens ont besoin de ces services.

En fait, 42 p. 100 des Canadiens en âge de travailler ont des capacités de lecture et d'écriture inférieures à la norme internationale. Honorables sénateurs, dans un pays aussi développé et privilégié que le Canada, c'est inacceptable. Et ce qui l'est encore plus, honorables sénateurs, c'est qu'au lieu de concentrer ses efforts sur l'augmentation des niveaux d'alphabétisation, le gouvernement est en train de couper le financement des programmes. À un moment où tant de Canadiens se débattent face au problème de l'alphabétisation, pourquoi le gouvernement n'en fait-il pas davantage?

Honorables sénateurs, fait peut-être aussi inquiétant, des niveaux d'alphabétisation peu élevés touchent plus durement certaines des populations les plus vulnérables du Canada. En général, ceux qui viennent de familles pauvres ou qui vivent dans la pauvreté tendent à avoir un niveau d'alphabétisation moindre. Pour ces gens, c'est un obstacle de plus qui leur donne moins de choix au chapitre de l'emploi et, par conséquent, un revenu inférieur. En moyenne, les personnes qui ont des problèmes d'alphabétisation ne gagnent que les deux tiers du revenu des autres adultes. Cela les place dans un cercle vicieux duquel il leur sera encore plus difficile de se sortir par suite des récentes réductions du financement des programmes d'alphabétisation.

Malgré le caractère négatif de ces compressions, je crois qu'il y a encore de l'espoir parce que beaucoup de gens dans ce grand pays travaillent infatigablement dans ce domaine. Bien sûr, nous avons ici même une très grande championne de la cause. Je tiens à vous en remercier sincèrement, madame le sénateur Fairbairn. De plus, représentant la province d'Ontario au Sénat, je ne saurais passer sous silence les efforts déployés par notre lieutenant-gouverneur, l'honorable James K. Bartleman. Il a travaillé très fort pour mettre en évidence l'importance de l'alphabétisation en Ontario, et surtout dans le Nord de la province. Le lieutenant-gouverneur Bartleman a grandi dans une famille pauvre et a appris à lire dans les bandes dessinées qu'il ramassait au dépotoir local. Il sait donc d'expérience que l'éducation et l'alphabétisation jouent un rôle très important quand il s'agit de rompre le cycle de la pauvreté.

Le lieutenant-gouverneur Bartleman a beaucoup fait, surtout dans les collectivités autochtones du Nord de l'Ontario, pour apporter des changements positifs à la situation que connaissent tant de gens. En 2004, il a lancé la campagne de collecte de livres du lieutenant-gouverneur, dans le cadre de laquelle les Ontariens ont été invités à faire don de livres destinés aux bibliothèques des collectivités autochtones du Nord de l'Ontario. La campagne avait pour but de recueillir 60 000 livres, mais elle a permis d'en ramasser 1,2 million. Elle a eu tant de succès qu'une autre campagne a été lancée en janvier dernier et a permis de recueillir 500 000 autres livres. Ces ouvrages aideront beaucoup les habitants de ma région, dans le Nord de la province. D'ailleurs, la campagne de collecte de livres n'est qu'une parmi quatre initiatives d'alphabétisation parrainées par le lieutenant-gouverneur Bartleman.

En effet, il a mis sur pied un programme destiné à établir des liens entre les écoles autochtones et non autochtones de l'Ontario. Ce programme, qui a si bien réussi que le Nunavut l'a adopté, permet aux étudiants d'établir des liens épistolaires et de participer à des échanges. Les deux autres initiatives comprennent un club de lecture pour les jeunes Autochtones et des camps d'alphabétisation organisés pendant l'été dans le Nord-Ouest de l'Ontario. Ces programmes constituent un moyen remarquable de rapprocher les cultures autochtones et non autochtones et de favoriser la compréhension mutuelle.

Ce sont de merveilleuses initiatives dont je félicite chaudement le lieutenant-gouverneur Bartleman. Même si la participation du public à ces programmes a été considérable, une question aussi importante que l'alphabétisation mérite la participation active du gouvernement.

Pendant que je grandissais à Timmins, en Ontario, mes parents ont eu la possibilité de choisir entre deux options me concernant : je pouvais jouer au hockey et étudier au St. Michael's College de Toronto, ou bien faire partie d'une équipe à St. Catharines et avoir une exploitation agricole. Mes parents ont compris que le plus important, pour moi, était de faire des études. Ils savaient que l'éducation m'assurerait le meilleur avenir possible. Je leur suis reconnaissant de leur choix.

Les programmes d'alphabétisation sont importants et ne devraient pas être tenus pour acquis. Des millions de Canadiens en ont besoin partout dans le pays. J'exhorte donc le gouvernement fédéral à rétablir le financement des organisations d'alphabétisation et à investir dans notre avenir et dans les Canadiens. Je vous remercie, honorables sénateurs.

(Sur la motion du sénateur Comeau, au nom du sénateur LeBreton, le débat est ajourné.)

(1710)

LE SÉNAT

MOTION EXHORTANT LA POURSUITE DU DIALOGUE ENTRE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE ET LE DALAÏ-LAMA—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur Andreychuk :

Que le Sénat encourage le gouvernement de la République populaire de Chine et le Dalaï-lama, nonobstant leurs différends à l'égard de la relation historique entre le Tibet et la Chine, de poursuivre leurs discussions d'une manière prospective qui mènera à des solutions pragmatiques respectant le cadre constitutionnel chinois et l'intégrité territoriale de la Chine tout en répondant aux aspirations du peuple tibétain, à savoir l'unification et la véritable autonomie du Tibet.—(L'honorable sénateur Munson )

L'honorable Jim Munson : Honorables sénateurs, je prends brièvement la parole aujourd'hui pour appuyer la motion du sénateur Di Nino. Pendant les cinq années où j'ai été journaliste en Chine, j'ai été témoin de nombreuses violations des droits de la personne, particulièrement à l'égard du Tibet. J'ai personnellement vu à plusieurs occasions des moines tibétains être roués de coups et j'ai entendu leurs récits de répression. J'ai même eu l'occasion de séjourner brièvement dans une prison chinoise — plus d'une — et j'ai été forcé à une occasion en particulier de remettre des enregistrements de scènes auxquelles j'avais assisté. La police chinoise n'a obtenu que des bandes vierges. J'ai pu faire sortir clandestinement les vraies images de ce qui se passait au Tibet à cette époque-là.

Cela se passait il y a près de 20 ans. Depuis, certains progrès ont été accomplis, mais ils sont négligeables. Aujourd'hui, il est plus que temps que la Chine reconnaisse les aspirations du peuple tibétain. Un dialogue entre le gouvernement de la République populaire de Chine et le dalaï-lama constitue une étape prometteuse en vue de sortir de cette impasse déjà ancienne.

Honorables sénateurs, c'est à l'échelle internationale que les pressions doivent s'exercer, car en Chine même, les organisations qui agissent en faveur du renforcement des droits de la personne sont réprimées et dissoutes. La Chine ne permet pas l'existence d'organismes nationaux de défense des droits de la personne et le gouvernement bloque les interventions des organisations internationales actives dans ce domaine.

Le Canada a un rôle à jouer. Il a de l'influence et nous pouvons contribuer à ce que la Chine et le Tibet concluent un accord sur l'autonomie du Tibet.

Je suis heureux d'appuyer la motion du sénateur Di Nino et j'espère que bon nombre de mes estimés collègues feront de même.

(Sur la motion du sénateur Munson, au nom du sénateur Jaffer, le débat est ajourné.)

PEUPLES AUTOCHTONES

AUTORISATION AU COMITÉ DE RECEVOIR, AUX FINS DE L'ÉTUDE ACTUELLE DU PROJET DE LOI S-216, DES DOCUMENTS PRODUITS AU COURS DE LA TRENTE-HUITIÈME LÉGISLATURE DANS LE CADRE DE SON ÉTUDE DU PROJET DE LOI S-16

L'honorable Gerry St. Germain, conformément à l'avis du 6 février 2007, propose :

Que les documents reçus, les témoignages entendus et les travaux accomplis par le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones au cours de la première session de la trente-huitième législature pendant son étude sur l'objet du projet de loi S-16, Loi prévoyant la reconnaissance par la Couronne de l'autonomie gouvernementale des premières nations du Canada, soient renvoyés audit Comité pour son étude sur le projet de loi S-216, Loi prévoyant la reconnaissance par la Couronne de l'autonomie gouvernementale des premières nations du Canada.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 14 février 2007, à 13 h 30.)


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