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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 80

Le jeudi 22 mars 2007
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 22 mars 2007

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LE MOIS DE SENSIBILISATION AU CANCER COLORECTAL

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, je suis heureux de vous parler aujourd'hui du cancer colorectal.

[Français]

Le cancer colorectal occupe le troisième rang des cancers les plus fréquents au Canada.

[Traduction]

Mars est le Mois de sensibilisation au cancer colorectal. Je profite de l'occasion pour vous informer sur cette maladie qui est mortelle, mais qu'il est tout à fait possible de prévenir.

Le cancer colorectal est la forme de cancer la plus meurtrière après le cancer du poumon. L'an dernier, environ 20 000 Canadiens ont appris qu'ils avaient la maladie et environ 8 500 en sont morts. Ces chiffres sont beaucoup plus élevés que ce qu'ils auraient dû être.

Le cancer colorectal peut très bien être traité s'il est découvert à ses premiers stades et son dépistage est donc d'une importance cruciale. Le cancer colorectal se développe habituellement à partir de polypes à un stade bénin et, lorsqu'il est découvert à ce stade, il peut être complètement guéri.

Il existe plusieurs méthodes de dépistage de la maladie, mais, malheureusement, environ 10 p. 100 de la population seulement les utilise.

Je suis heureux que l'Ontario ait annoncé en janvier qu'elle mettrait en place un programme provincial de dépistage du cancer colorectal. Il s'agit d'un programme à plusieurs niveaux débutant par des tests simples et, évidemment, une coloscopie est nécessaire. Il s'agit d'un examen qui permet de diagnostiquer avec précision le cancer, et les polypes peuvent être enlevés dès qu'ils sont découverts.

(1335)

Comme bien d'autres maladies, le cancer colorectal est étroitement lié à plusieurs facteurs de risques. Les antécédents familiaux sont un facteur important et des antécédents familiaux de cancers du sein, de l'utérus ou des ovaires sont des facteurs majeurs. Les maladies intestinales comme les colites et la maladie de Crohn constituent des risques graves, tout comme des diagnostics antérieurs de polypes. Les personnes chez qui se retrouvent ces facteurs devraient se soumettre à des tests de dépistage afin que la maladie puisse être traitée au moment où elle est curable.

Évidemment, nous voudrions tous faire ce que nous pouvons pour améliorer nos chances et prévenir la croissance des polypes si c'est possible. Il existe de forts éléments de preuve permettant de croire que l'activité physique et un bon régime alimentaire sont des moyens de prévention de la maladie.

Honorables sénateurs, le cancer colorectal peut être vaincu simplement si tout le monde s'informe bien et a recours à la technologie existante.

LE BURTON CUMMINGS THEATRE FOR PERFORMING ARTS

L'honorable Rod. A. A. Zimmer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour saluer une initiative qui a commencé dans les années 1990 et qui a mené à la renaissance de ce qui est une institution culturelle à Winnipeg et un trésor provincial et national, à savoir le Burton Cummings Theatre for Performing Arts.

Ceux qui étaient présents lors de l'inauguration de cet établissement, en 1907, qui s'appelait alors le Walker Theatre, avaient assisté à une présentation de Madame Butterfly, par la New England Opera Company. C'est le maire J.H. Ashdown qui a peut-être le mieux décrit la splendeur de l'édifice, lorsqu'il a déclaré ce qui suit lors de la soirée inaugurale :

Je ne pense pas que l'on puisse trouver où que ce soit dans le monde un théâtre plus grand, plus imposant ou d'une architecture plus contemporaine que ce théâtre.

De son ouverture jusqu'à la Première Guerre mondiale, le Walker Theatre a présenté les plus grandes productions itinérantes d'opéra, de théâtre, de musique, de ballet et de vaudeville, de New York et de Londres. Au cours de la décennie qui a suivi la Grande Guerre, Charlie Chaplin, les frères Marx, Harry Houdini, Louis Armstrong et l'homme qui allait devenir célèbre sous le nom de Bob Hope, se sont tous produits à cet endroit. Dans les années 1920, Winston Churchill a aussi prononcé une allocution au Walker Theatre.

Par ailleurs, on a présenté à cet endroit une pièce qui a fait époque, qui s'intitulait How the Vote Was Won — A Women's Parliament, et qui mettait en vedette Nellie McClung. Cette pièce de 1914 ridiculisait le gouvernement d'une façon tellement brillante que, deux ans plus tard, le gouvernement de Rodman Roblin céda aux pressions et les Manitobaines devinrent les premières femmes au Canada à obtenir le droit de vote. Nous savons tous ce qui a commencé à se produire sur la scène nationale, suite à cet événement historique.

Après avoir été fermé durant un certain temps pendant la Grande Crise, l'édifice est devenu durant plusieurs décennies un cinéma Odeon à un écran. En 1990, il fut acheté par un groupe de personnes qui voulaient redonner son lustre à l'établissement, et les travaux de restauration ont abouti à la réouverture de l'endroit, en 1991. L'édifice a depuis été classé édifice du patrimoine de catégorie un, et site historique provincial et national. En 2002, l'édifice a été rebaptisé en l'honneur de Burton Cummings, citoyen de Winnipeg dont la carrière musicale remarquable est célébrée tant au Canada qu'à l'étranger.

Le 17 février dernier, qui marquait le centième anniversaire de l'inauguration du théâtre, j'ai assisté à un concert-bénéfice au cours duquel Burton Cummings et Randy Bachman nous ont fait écouter des morceaux classiques et endiablés de leur répertoire de musique rock and roll. L'événement a été un franc succès et grâce aux fonds amassés à cette occasion, ainsi qu'à la libération d'hypothèque, le théâtre a maintenant éliminé sa dette de 1,6 million de dollars.

Honorables sénateurs, le projet, entrepris il y a 17 ans afin de faire renaître l'époque glorieuse de ce théâtre patrimonial, est un excellent exemple de la synergie qu'il peut y avoir entre les secteurs public et privé. Je profite de l'occasion pour saluer le dévouement de plusieurs personnes, dont le Walker Theatre Performing Arts Group, Burton Cummings, Randy Bachman, Jack Harper, président du théâtre Burton Cummings, Wayne Jackson, directeur général du conseil d'administration, ainsi que le maire Sam Katz et tous les autres qui, grâce à leur appui, ont permis à ce magnifique théâtre de briller de nouveau. Ce fut une soirée mémorable.

LA CONDITION FÉMININE

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, je vous remercie de me donner l'occasion de terminer la déclaration que j'ai commencée hier au sujet de la Journée internationale de la femme ainsi que le questionnaire amusant rédigé par Jane Ledwell, de l'Île- du-Prince-Édouard.

J'aimerais, si vous me le permettez, demander aux hommes présents de s'imaginer qu'ils sont des femmes. Vous vous préparez pour une sortie excitante. Qu'apportez-vous avec vous? Un joli sac à main, une attitude positive, une démarche sexy, et vous ne vous préoccupez plus de rien? Un pull — parce qu'il ne faut tout de même pas être trop sexy? Un passé marqué par de la violence sexuelle ou même une agression sexuelle? Trois types de contraceptifs? Après tout, c'est à vous de prendre des précautions. Un vaporisateur de poivre, un couvercle pour votre verre au bar et un téléphone cellulaire qui a tous les numéros d'urgence en mémoire?

(1340)

Vous réussissez en politique et vous devenez ministre. De quoi parlent les médias? De votre compétence ou de votre conjoint? De votre apparence? De votre réaction trop émotive ou trop personnelle aux questions? Du temps que vous passez loin de votre famille ou de votre bureau?

Honorables sénateurs, cinq femmes par mois sont tuées par un partenaire intime au Canada et près d'une femme sur dix ayant répondu à un sondage dit avoir été agressée par son conjoint au cours des cinq années précédentes.

Les femmes qui ont reçu leur diplôme d'une université du Nouveau-Brunswick en 1999 et qui travaillaient à temps plein cinq ans plus tard gagnaient 18 p. 100 de moins en moyenne que les hommes de la même promotion. Au Nouveau-Brunswick, 75 p. 100 des femmes dont le plus jeune enfant est âgé de moins de six ans sont sur le marché du travail, mais moins de 20 p. 100 d'entre elles trouvent une place dans une garderie accréditée pour leur enfant. Environ 35 p. 100 des travailleuses enceintes ne bénéficient pas des programmes de maternité et de congé parental du Canada. Lorsque les politiciens nient les inégalités entre les femmes et les hommes, des groupes doivent s'efforcer de prouver que cette réalité existe. Ces groupes ont l'air de ronchonneurs ennuyeux et ils peuvent donner l'impression que nous estimons qu'aucune amélioration n'a eu lieu en 25 ans.

Honorables sénateurs, la Journée internationale de la femme nous rappelle de nous poser la question : sommes-nous vraiment égaux?

LA JOURNÉE MONDIALE DE LA TUBERCULOSE

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'attire l'attention du Sénat sur la Journée mondiale de la tuberculose. Cette journée nous rappelle que, chaque jour, 4 400 personnes meurent de cette maladie. Cela représente près de 2 millions de vies perdues chaque année en raison d'une maladie dont le traitement ne coûte que 20 $.

En tant que coprésidente de l'Association parlementaire Canada- Afrique, je suis particulièrement attristée de remarquer que près du tiers de tous les décès causés par la tuberculose surviennent en Afrique. Dans les pays en développement, la tuberculose fauche souvent les jeunes. En Afrique seulement, plus d'un demi-million de personnes succombent chaque année à cette maladie. Les conséquences sont profondes pour les familles, pour l'économie et pour les chances des enfants de prospérer et de s'épanouir. En 2005, l'ampleur de la catastrophe a incité l'Organisation mondiale de la santé et les ministres de la Santé de l'Afrique à déclarer que la tuberculose constituait une crise.

Une partie de la difficulté en Afrique et ailleurs, c'est que la tuberculose nourrit l'épidémie du sida, et vice versa. La tuberculose est la principale cause de mortalité chez les personnes séropositives dans le monde. Le tiers des plus de 40 millions de personnes atteintes du VIH/sida sont également infectées par la tuberculose. C'est que la tuberculose est une maladie des pauvres. Elle se répand facilement par la seule respiration et cette maladie opportuniste s'attaque aux systèmes immunitaires affaiblis. Pire encore, la tuberculose accélère la progression de l'infection au VIH, de sorte que la maladie s'aggrave plus rapidement.

Malheureusement, la tuberculose continue de faire d'énormes ravages, et ce, malgré le fait que le traitement est abordable. En fait, le plan mondial pour éradiquer la tuberculose élaboré par l'organisme Stop TB Partnership a été universellement approuvé. On évalue que l'aide globale affectée par le Canada au traitement de la tuberculose a sauvé plus d'un demi-million de vies, coûtant environ 200 $ par personne guérie. De plus, la contribution de l'ACDI au fonds mondial pour lutter contre le sida, la tuberculose et le paludisme fait en sorte que 200 millions de personnes bénéficient d'un traitement contre la tuberculose. Le Canada joue un rôle de chef de file dans ce domaine — ce dont tous les Canadiens peuvent être fiers — et il doit continuer de le faire.

Enfin, honorables sénateurs, reconnaissant les répercussions énormes de la tuberculose et la nécessité de prendre des mesures à l'échelle mondiale, on a choisi comme thème de la Journée mondiale de la tuberculose 2007 le slogan suivant : « Tuberculose ici, tuberculose partout ». Ensemble, nous devons tous faire davantage pour éradiquer totalement la tuberculose.

(1345)

LE BUDGET DE 2007

LES MESURES VISANT LES AUTOCHTONES

L'honorable Sandra Lovelace Nicholas : Honorables sénateurs, mardi, un sénateur est intervenu pour dire que Phil Fontaine, le chef de l'Assemblée des Premières Nations, était presque en larmes lorsqu'il a formulé ses commentaires sur le budget et parlé de l'absence de fonds pour les Autochtones. À mon grand désarroi, des sénateurs ont ri. Il n'y a pas de quoi rire. Permettez-moi de vous dire pourquoi, honorables sénateurs. Dans votre langage, vous appelez cela l'empathie. Dans le mien, il n'y a pas de mot de ce genre, car l'empathie va de soi.

Honorables sénateurs, les miens ont ouvert leur cœur aux nouveaux arrivants au Canada. Mes ancêtres leur ont montré à chasser, à pêcher et à survivre aux hivers rigoureux. En échange, ils ont été méprisés et ils le sont encore aujourd'hui.

Nous avons fait beaucoup de chemin, mais le gouvernement nous montre une fois de plus le traitement qu'il réserve aux Premières nations. Le merveilleux budget dont certains vantent les mérites ne mentionne même pas les Premières nations, sans parler des plus pauvres d'entre les pauvres — les femmes autochtones.

Les miens me demandent ce qu'ils peuvent faire. Je leur conseille d'écrire des lettres. Or, ils ne peuvent pas écrire de lettres, car nombre d'entre eux ne savent même pas écrire et les programmes d'alphabétisation ont été supprimés.

Les plus pauvres d'entre les pauvres, les femmes autochtones, me demandent ce qu'elles peuvent faire. Nombre d'entre elles ne savent pas écrire, sans parler du fait qu'elles n'ont pas les moyens de se procurer du papier ou des timbres.

Le budget ne jette même pas un os à ronger aux membres des Premières nations. D'ailleurs, ils ne pourraient même pas ronger un os, car ils sont mal en point parce qu'on a sabré dans les programmes de soins de santé et de soins dentaires.

Honorables sénateurs, les miens se sentent invisibles aux yeux de ce gouvernement. Dans ce grand pays qu'est le nôtre, le gouvernement ne sait pas ce que le mot empathie veut dire lorsqu'il est question des collectivités des Premières nations.

Honorables sénateurs, je vous prie de rendre la dignité aux miens en donnant suite à l'accord de Kelowna.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2007-2008

PRÉSENTATION DU PREMIER RAPPORT INTÉRIMAIRE DU COMITÉ DES FINANCES NATIONALES SUR LE BUDGET DES DÉPENSES

L'honorable Joseph A. Day, président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant :

Le jeudi 22 mars 2007

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a l'honneur de présenter son

TREIZIÈME RAPPORT

Votre Comité, auquel a été référé le Budget des dépenses 2007-2008, a, conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 28 février 2007, examiné ledit budget et présente ici son premier rapport intérimaire.

Respectueusement soumis,

Le président,
JOSEPH A. DAY

(Le texte du rapport figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1197.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Day, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

(1350)

LA LOI SUR LE DIVORCE

PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-252, Loi modifiant la Loi sur le divorce (droit d'accès d'un époux en phase terminale ou dans un état critique).

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

PROJET DE LOI DE MISE EN ŒUVRE DE L'ACCORD DE KELOWNA

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-292, Loi portant mise en œuvre de l'Accord de Kelowna.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Tardif, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

[Traduction]

LE SÉNAT

AVIS DE MOTION TENDANT À INCITER LE GOUVERNEMENT À ROMPRE SES RELATIONS DIPLOMATIQUES AVEC LE ZIMBABWE

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Sénat demande au gouvernement du Canada de rappeler immédiatement son haut commissaire à Harare et de rompre ses relations diplomatiques jusqu'à nouvel ordre en raison :

a) des violations massives des droits de la personne par le président Robert Mugabe;

b) de l'oppression de la majorité noire et de la minorité blanche de la population du Zimbabwe;

c) de la confiscation de terres détenues légalement;

d) des voies de fait graves et illégales commises à l'encontre du leader de l'opposition du Zimbabwe, Morgan Tsvangirai, et de sa détention tout aussi illégale;

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'inviter à se joindre au Sénat aux fins exposées ci-dessus.

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

AVIS DE MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles soit autorisé à siéger le lundi 26 mars 2007 à 16 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Est-ce que l'honorable sénateur Chaput demande la permission de procéder aujourd'hui sur ce sujet?

Le sénateur Chaput : Plus tard aujourd'hui.

Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

(1355)

[Traduction]

VISITEURS À LA TRIBUNE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer aux avis d'interpellation, j'aimerais vous signaler la présence à la tribune de Son Excellence l'ambassadeur de Cuba, de son épouse et de deux membres de l'Institut cubain d'amitié avec les peuples.

Bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


PÉRIODE DES QUESTIONS

LES TRANSPORTS

LES RAPPORTS DU COMITÉ PERMANENT DE LA SÉCURITÉ NATIONALE ET DE LA DÉFENSE SUR LES AÉROPORTS ET LES PORTS MARITIMES—LA RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, le gouvernement a tenté de faire croire que l'opposition officielle fait preuve de laxisme envers le terrorisme parce qu'elle défend les libertés civiles des Canadiens et qu'elle a proposé une étude exhaustive des dispositions antiterroristes, comme l'a recommandé à l'unanimité notre propre comité sénatorial, dans son rapport.

Une fois de plus, cette semaine, nous avons vu le Sénat accomplir ses devoirs parlementaires et d'enquête pour le plus grand bénéfice de tous les Canadiens en déposant le rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Agira-t-elle selon les recommandations de ce comité, particulièrement en ce qui concerne le transfert de la responsabilité de la sécurité dans nos aéroports à la GRC et l'augmentation du nombre d'agents, afin que nous recevions l'assurance qu'il existe une certaine coordination et des ressources suffisantes pour mener à bien ces tâches importantes?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur de sa question. Le rapport du comité sénatorial sur la sécurité dans les aéroports a été publié mardi, et celui sur les ports maritimes hier. Ces deux rapports sont exhaustifs. Le gouvernement, en particulier le ministre Cannon, à qui ils sont destinés, prendra les recommandations très au sérieux et rédigera une réponse aux points soulevés par le Sénat.

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, je me réjouis du fait que madame le sénateur ait mentionné le ministre Cannon, car le ministre a la responsabilité de veiller à ce que le courrier et le fret transportés par les lignes aériennes soient inspectés.

Le comité a demandé aux représentants d'Air Canada qui inspectait le fret. Ils ont répondu que c'était la Société canadienne des postes qui s'en chargeait. Lorsque le comité a posé la question à la Société canadienne des postes, cette dernière a répondu que c'est Air Canada qui effectuait les inspections. Au bout du compte, comme vous pourrez le lire dans le rapport, ni Air Canada ni la Société canadienne des postes n'inspectaient le fret.

Des enveloppes contenant de l'anthrax ont été envoyées à Washington, ce qui a entraîné la paralysie de près de la moitié du gouvernement. Des collègues législateurs ont été grièvement blessés et il importe que nous recevions l'assurance que le ministre Cannon va s'occuper de cette affaire immédiatement.

Le sénateur LeBreton : Je peux donner au leader de l'opposition l'assurance que le ministre Cannon est saisi de cette question. Comme le président du comité permanent l'a dit hier dans les médias, ces questions étaient en gestation depuis un certain temps. Le ministre Cannon a pris certaines mesures mais, selon le rapport, elles n'ont pas résolu tous les graves problèmes qui se posent.

Le ministre Cannon a clairement précisé hier que le gouvernement a l'intention d'étudier attentivement les recommandations du comité sur la sécurité tant aéroportuaire que portuaire. Le ministre Cannon est une personne sérieuse et réfléchie, et je suis persuadée qu'il prendra ces recommandations très au sérieux.

Le sénateur Hervieux-Payette : J'espère que madame le leader va veiller à ce que le Cabinet s'occupe de cette question très bientôt, car le ministre a maintenant un autre mandat.

(1400)

Les aéroports du Canada comptent plus de 100 000 employés, et 90 millions de passagers y transitent chaque année. Tous les passagers sont contrôlés, y compris tous les sénateurs, avant leur embarquement.

Toutefois, dans l'état actuel des choses, les 100 000 employés des aéroports du Canada ne sont pas contrôlés quotidiennement. Seulement 2 p. 100 d'entre eux le sont. Toute société visée par les questions de sécurité, si elle fait bien son travail, s'assure que les lieux demeurent sûrs — qu'on parle du nettoyage des avions, de la livraison de la nourriture ou du travail sur la piste. Nous parlons de tous les employés qui ont accès aux avions.

Madame le leader du gouvernement pourrait-elle demander au ministre responsable de veiller à ce que ces 100 000 employés qui se promènent librement dans les aéroports soient contrôlés, comme nos collègues l'ont recommandé? Si le ministre n'a pas les fonds nécessaires, peut-on lui conseiller de consacrer une partie de son budget à de telles mesures de sécurité?

Le sénateur LeBreton : Je remercie madame le sénateur de sa question. La sécurité dans les aéroports est certainement préoccupante. Bon nombre d'entre nous ont été soumis à un contrôle sécuritaire rigoureux dans les aéroports. Il nous a parfois fallu enlever nos chaussures et nos vestons. On ne peut pas être pudique et se sentir à l'aise en passant les contrôles de sécurité des aéroports de nos jours.

Je crois que le comité s'est penché sur une question très importante. Je puis assurer aux sénateurs que le ministre Cannon et son personnel sont très préoccupés par le risque de manquements à la sécurité, ainsi que par la perception que de tels manquements existent. Je suis sûre que le rapport du comité amènera les fonctionnaires du ministère des Transports et le ministre lui-même à accorder plus d'attention à cette question.

LE SÉNAT

LE COMITÉ DE LA SÉCURITÉ NATIONALE ET DE LA DÉFENSE—LA REPRÉSENTATION DU CAUCUS DU GOUVERNEMENT

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur ces mêmes rapports.

Les sénateurs qui les ont lus, ou même seulement parcourus des yeux, ont constaté que ce sont en fait des bulletins de notes, qu'ils font référence à des rapports précédents du comité et reviennent sur les mêmes questions qui remontent à plusieurs années en arrière, à l'époque du gouvernement précédent. En toute justice, il faut dire que le comité se montre aussi critique envers l'ancien gouvernement qu'envers celui-ci.

Pour pouvoir faire ce travail, un comité doit avoir une certaine continuité et c'est l'un des comités du Sénat qui peut le faire. Il n'y a pas beaucoup de sénateurs qui peuvent dire, comme moi, qu'ils ont été membres de ce comité depuis sa création. Je me souviens d'avoir participé au vote sur sa création et aux discussions sur sa composition et sur sa constitution.

Le Sénat a établi que le comité serait exceptionnellement formé de neuf membres, et non de 12 ou 15 comme les autres comités permanents.

En consultant le site web du comité ou en lisant les Journaux du Sénat ou les autres publications de la Direction des comités, vous verrez qu'il y a actuellement six sénateurs sur la liste des membres de ce comité. Je parle des derniers changements qui ont été apportés à la liste des membres du comité inscrite dans les Journaux du Sénat du 27 février dernier.

J'aimerais que madame le leader du gouvernement au Sénat puisse nous dire si elle peut confirmer qu'elle, ou une personne mandatée par elle, a fait radier trois sénateurs de la liste des membres du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, la question soulevée par l'honorable sénateur n'a pas été résolue. C'est une question sur laquelle les dirigeants de notre côté se penchent. Je ne crois pas être tenue, en ma capacité de leader du gouvernement au Sénat, de discuter ici au Sénat des affaires internes, tout particulièrement d'affaires non résolues. J'espère que nous arriverons à une entente et que nous pourrons résoudre cette affaire le plus rapidement possible.

(1405)

Le sénateur Banks : Je ne pense pas que le nombre convenable de membres d'un comité est une affaire interne qui ne concerne que le caucus du leader ou mon propre caucus. Je pense que cette question concerne le Sénat. Ce dernier a décidé que le comité est composé de neuf membres. Le comité prévoit ses travaux en fonction d'une certaine continuité au niveau des membres qui le composent. Nous avons du mal en ce moment parce que nous étudions régulièrement ces questions alors que certains membres du comité, dont la participation est utile, sont absents.

J'imagine que c'est une chose si le leader d'un parti convainc les membres de son parti de ne pas participer aux séances d'un comité; c'est une tout autre chose, cependant, si le leader d'un parti ordonne à ses membres de ne pas y participer.

La ministre pourrait-elle nous dire si les trois membres manquants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense ont été convaincus de ne pas participer aux séances ou si on leur a ordonné de ne pas y participer?

Le sénateur LeBreton : Ma réponse est exactement la même que celle que j'ai donnée il y a quelques instants. J'ai lu les comptes rendus et j'ai aussi regardé les délibérations sur CPAC quelques jours après que les séances aient été tenues. Cette question préoccupe les deux côtés, je vous l'accorde. Des discussions sont en cours au sein de notre caucus et parmi nos leaders à propos des façons de résoudre le problème.

Le fait que le comité ne soit composé que de six membres en ce moment est, comme vous le dites, digne d'intérêt; cependant, j'estime qu'il n'est pas nécessaire d'aborder, au Sénat, des questions que nous devons examiner de ce côté-ci, puis en consultation avec les leaders du côté de l'honorable sénateur.

Le sénateur Banks : C'est votre opinion, madame le ministre. Je ne pense pas qu'il soit déplacé de débattre cette question au Sénat étant donné que la composition des comités permanents du Sénat, qui sont créés par une résolution du Sénat, conformément au Règlement du Sénat, concerne bel et bien les sénateurs. Je pense comprendre dans quelles circonstances on peut remplacer les membres d'un comité. Si je ne peux participer à une séance, je suis obligé de trouver un remplaçant. Le processus exige que je trouve une personne qui pourra être présente en tant que membre votant du comité. D'après ce que je comprends du Règlement, l'idée de remplacement laisse supposer que, si une personne donnée est absente, une autre sera là à sa place. Remplacement ne signifie pas retrait.

Dans le cas qui nous occupe, madame le leader du gouvernement admettra-t-elle que l'interprétation qu'elle donne de l'absence de certains sénateurs, s'il s'agit d'une question de discipline, constitue un usage inapproprié de la prérogative du leader de se servir de la composition d'un comité à des fins de discipline, et non pour servir l'intérêt du Sénat?

Le sénateur Mitchell : Bravo! Et celui des Canadiens aussi!

Le sénateur LeBreton : Le sénateur Banks a commencé par dire qu'il n'était pas d'accord, et c'est son droit. À l'instar du sénateur Fortier, le sénateur Banks a droit à son opinion. Je rejette catégoriquement son allégation selon laquelle des considérations liées à la discipline sont intervenues dans la prise de décision.

LES TRANSPORTS

LES RAPPORTS DU COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE LA DÉFENSE ET DE LA SÉCURITÉ SUR LES AÉROPORTS ET LES PORTS MARITIMES—LA RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ

L'honorable Norman K. Atkins : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

La sécurité intéresse tous les Canadiens. Il est indispensable d'assurer la sécurité dans les aéroports, dans les ports et le reste. L'une des recommandations qui sont ressorties des travaux du comité consiste à faire dorénavant assurer la sécurité par le ministère de la Sécurité publique plutôt que par le ministère des Transports.

(1410)

Qu'en pense madame le leader?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, c'est l'une des principales recommandations du comité qui a recueilli le plus d'attention. Je ne crois pas qu'il soit approprié que je fasse des commentaires avant que le gouvernement, les fonctionnaires de Transports Canada et d'autres intervenants aient eu l'occasion d'examiner de manière approfondie toutes les recommandations et les conséquences de celle-ci en particulier. Je ne pense pas être bien placée ni avoir la compétence voulue pour commenter, sauf pour dire que la recommandation intéressera sûrement les fonctionnaires qui œuvrent dans le domaine de la sécurité, qu'il s'agisse de la sécurité aux frontières, dans les ports ou dans les aéroports. Certaines personnes ont peut-être formulé la même recommandation par le passé, mais je ne pense pas que ce soit le cas.

Je prends note de la question au cas où je pourrais ajouter quelque chose. Toutefois, à l'heure actuelle, je ne suis pas en mesure de formuler des observations à propos de la recommandation.

Le sénateur Atkins : Il me semble qu'il serait préférable que les questions de sécurité soient regroupées dans un même cadre. Si la ministre en a l'occasion, à une réunion du Cabinet ou ailleurs, je souhaiterais qu'elle fasse valoir ce point. J'estime que ce serait une modification des responsabilités très utile à faire pour le Cabinet.

Des voix : Bravo!

Le sénateur LeBreton : Il s'agit d'une recommandation profonde et d'une portée considérable et je suis convaincue qu'on l'examinera avec soin.

Je n'ai pas l'intention de formuler de commentaires à ce sujet, mais je suis certaine que la plupart d'entre nous seraient d'accord avec le sénateur pour dire que la sécurité des Canadiens — ce qui comprend nos familles, nos voisins et nos amis — et celle du pays et de ses institutions sont des questions très importantes. Je vais m'assurer de communiquer le point de vue du sénateur à mes collègues — et je sais que celui du comité est bien connu.

[Français]

LE BUDGET DE 2007

LE FINANCEMENT POUR LE PLAN DES LANGUES OFFICIELLES

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le budget de 2007 du gouvernement fédéral, déposé cette semaine, indique qu'il y aura un ajout de 30 millions de dollars sur deux ans pour le Plan des langues officielles. Le budget indique que le plan comprendra de nouveaux programmes pour la culture, les centres communautaires et le domaine parascolaire pour qui, je présume, il s'agira d'activités sportives ou de loisirs à l'extérieur des classes.

Il existait auparavant un programme spécifique appelé Infrastructure qui permettait aux communautés d'obtenir des fonds pour la construction de centres communautaires, par exemple. Ce programme existe-t-il encore ou a-t-il été inclus dans le Plan d'action des langues officielles?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : La ministre a fait plusieurs annonces concernant l'éducation postsecondaire et les langues officielles. On a fait d'autres annonces concernant l'infrastructure.

En ce qui a trait au financement des centres communautaires — et je présume que madame le sénateur fait référence à ceux qui ont été construits pour l'enseignement des langues officielles — je ne suis pas au courant. Je prends donc note de la question.

(1415)

Les transferts pour les infrastructures se font dans le cadre des programmes nationaux pour les infrastructures, comme le programme de la Porte d'entrée du Pacifique. Je vais essayer de déterminer pour l'honorable sénateur à quels endroits dans le budget sont prévues les sommes pour les programmes de cette nature et je vais lui fournir cette information.

[Français]

LE PATRIMOINE

L'ÉTAT DU PROGRAMME INITIATIVES CULTURELLES

L'honorable Maria Chaput : Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle également nous dire si le programme appelé Initiatives culturelles existe encore?

Par l'entremise de ce programme, il était possible de bénéficier d'une aide financière pour des projets de centres communautaires à caractère culturel ou artistique. Est-ce que le programme fait dorénavant partie des projets de centres communautaires prévus dans le Plan d'action des langues officielles?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, il y a de nombreux programmes communautaires, notamment le programme Nouveaux Horizons pour les aînés, à propos duquel madame le sénateur a posé une question auparavant. Le gouvernement a augmenté le financement accordé à ce programme.

En ce qui concerne les organismes culturels, comme madame le sénateur le sait, la ministre Bev Oda a fait plusieurs annonces. Je serais heureuse de les transmettre à l'honorable sénateur. J'ai entendu avec joie l'ancienne collègue du sénateur, Mme Sheila Copps, saluer les initiatives du gouvernement dans le secteur culturel. Je vais m'efforcer d'obtenir les détails et je les communiquerai au sénateur.

LE BUDGET DE 2007

ENCOURAGEMENT À ACHETER DES VÉHICULES ÉCONERGÉTIQUES

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle concerne le budget de 2007 et ce qui semble être une erreur importante nuisant aux emplois, à la compétitivité et à la productivité dans le secteur de l'automobile de ma province, l'Ontario, ainsi qu'au Québec et dans d'autres provinces.

Les fabricants de pièces d'automobile de l'Amérique du Nord subissent une concurrence féroce et perdent chaque jour des parts de marché. J'ai toujours tenu pour acquis que le budget visait à créer des emplois et à améliorer la compétitivité des entreprises sur le marché. Malheureusement, nous sommes déçus de constater que la disposition du budget de 2007 prévoyant une remise de 1 000 $ pour un véhicule ayant une consommation de carburant de 6,5 l/100km vise seulement une automobile. Ce segment du marché fait l'objet d'une concurrence féroce, et une telle mesure donne un avantage concurrentiel injuste aux entreprises qui ne vendent qu'une seule automobile.

Madame le leader pourrait-elle nous dire ce qu'elle pense de ce problème? Le ministre Cannon a déclaré aux médias que le gouvernement devait commencer quelque part, mais qu'il examinerait cette disposition et suivrait de près ses effets. Cependant, on risque de faire des dégâts dans le secteur de l'automobile et de nuire à la concurrence sur le marché. Le gouvernement serait-il prêt à envisager de modifier sans attendre cette disposition du budget de 2007?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, plusieurs des constructeurs et des voitures figurant sur la liste étaient ceux qui profiteraient de cette mesure incitative. J'habite en Ontario et des membres de ma famille ont gagné leur vie en travaillant dans cette industrie pendant des années. J'estime que c'est un important secteur d'activité non seulement pour les emplois spécialisés qu'il crée, mais aussi pour le travail dans le domaine de l'environnement. L'équilibre entre les deux est difficile à établir. J'ai vu plusieurs voitures fabriquées par des constructeurs ayant des usines au Canada qui seraient admissibles. Nombre d'autres voitures fabriquées par les mêmes constructeurs ne seraient pas admissibles, comme les véhicules très énergivores. La décision devra être prise par les consommateurs lorsqu'ils achèteront une voiture.

(1420)

En ce qui concerne les documents d'information, je prends note de cette partie de la question et je fournirai au sénateur le tableau, que je demanderai au ministre, sur lequel figurent les données exactes de consommation d'essence ainsi que les véhicules admissibles et ceux qui ne le sont pas.

Le sénateur Grafstein : Je pense que la ministre reconnaît que l'industrie aura besoin de temps pour apporter ce changement.

À l'instar de tous mes collègues siégeant de ce côté-ci, je n'ai rien contre le fait de fixer des objectifs de consommation d'essence. Personne ne s'oppose à cela. Les comités ont traité de la question et fait des recommandations. Le problème, c'est de savoir si le parti du sénateur a bien réfléchi à la question.

Franchement, je ne pense pas que le gouvernement et ses conseillers ont réfléchi à la question, notamment en cette époque difficile pour le secteur de l'automobile. Ce secteur est particulièrement important pour l'économie du Québec, de l'Ontario et du reste du pays.

Je demande à la ministre de retourner examiner la question objectivement. En effet, elle doit comprendre que, en raison du délai de mise en production, il faut compter d'un an à trois ans pour apporter des modifications aux véhicules.

Je pense qu'il est important que la ministre réfléchisse sérieusement avant de s'en prendre à une industrie capitale pour l'économie. En effet, en cas d'erreur, il est toujours possible de faire marche arrière pour apporter les changements nécessaires. De ce côté-ci, nous avons l'esprit ouvert. Si le gouvernement corrige ses erreurs, nous ne le critiquerons pas pour cela.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je n'ai pas lu l'article en question. Je sais pourtant que, pendant toute la durée de l'examen du dossier environnemental et des consultations budgétaires, le gouvernement et les ministres responsables ont mené des consultations intensives auprès de l'industrie automobile. Je serais donc portée à croire qu'on a bien réfléchi à la question.

Quoi qu'il en soit, comme cette question préoccupe manifestement l'honorable sénateur et qu'il semble y attacher une grande importance, j'obtiendrai plus de détails et je les communiquerai dans une réponse différée.

LES PROGRAMMES D'EMPLOIS D'ÉTÉ POUR ÉTUDIANTS

L'honorable Marilyn Trenholme Counsell : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

J'ai parcouru le merveilleux document intitulé Viser. C'est un thème merveilleux, un thème très canadien.

Nous pourrions parler des aînés solitaires, surtout des femmes, qui vivent seuls et dire combien ils visent à vivre leur vie et les années qui leur restent dans la dignité. Nous pourrions parler des mères seules qui vivent dans la pauvreté et qui visent un emploi mais qui ne peuvent l'obtenir, faute de places en garderie pour leurs enfants.

Aujourd'hui, j'aimerais parler des étudiants de nos universités. J'ai parcouru attentivement ce merveilleux document à la recherche de renseignements sur le Programme Expérience emploi été 2007. L'expression de ces jeunes visages traduit certainement leurs grandes aspirations. Même si j'ai fouillé le document en profondeur, je n'ai pu y trouver aucune mention du Programme Expérience emploi été 2007 ni de l'initiative Emplois d'été Canada.

Je dois me contenter de ce que j'ai trouvé dans des articles de journaux et des communiqués. Un article en particulier traite de la décision non divulguée du gouvernement conservateur de retrancher 55 millions de dollars du financement des programmes d'emplois d'été pour étudiants. On peut lire, dans ce communiqué du 5 mars 2007, qu'« on ne sait pas clairement si les conservateurs vont rétablir les crédits ».

Nous avons toutefois eu quelques bonnes nouvelles. Je pense notamment à la décision, prise par le gouvernement à l'issue d'une sage réflexion, de rétablir pour un an, à la grandeur du pays, le financement accordé aux organismes voués à l'alphabétisation.

Puisque je ne la repère nulle part — et je suis sûre que d'autres s'intéressent autant que moi à cette question — j'aimerais savoir si la somme de 55 millions de dollars a bel et bien été rétablie dans ce merveilleux budget intitulé Viser.

(1425)

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie madame le sénateur de sa question. Je vais tenter d'y répondre convenablement.

Le programme des emplois d'été est bien en place. Nous l'avons modifié — et je parle de mémoire seulement — afin qu'il se limite aux emplois offerts au sein d'organismes sans but lucratif et de petites entreprises. Sous le régime de l'ancien programme, beaucoup de grandes sociétés comme Wal-Mart étaient subventionnées pour fournir des emplois à des étudiants alors qu'elles n'avaient pas besoin de l'aide du gouvernement.

Ce nouveau programme exhaustif d'emplois d'été a été annoncé avant le dépôt du budget. Je devrai vérifier, mais je crois que son financement provient du budget de 2006. Je vais obtenir des détails.

Madame le sénateur a dû remarquer les sommes prévues dans le budget pour l'enseignement postsecondaire et les commentaires positifs que le gouvernement a reçus de l'Alliance canadienne des associations étudiantes.

Le sénateur Trenholme Counsell : Honorables sénateurs, je crois que le financement a été réduit de 110 millions de dollars à 55 millions de dollars, mais j'espère que ce n'est pas le cas. Il serait utile de connaître les montants exacts.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le temps alloué pour la période des questions est écoulé.

[Français]

DÉPÔT DE LA RÉPONSE À UNE QUESTION INSCRITE AU FEUILLETON

LA RÉFORME DÉMOCRATIQUE—L'ÉQUITÉ SALARIALE AU SEIN DE LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 23 inscrite au Feuilleton—par le sénateur Segal.

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer trois réponses à des questions orales posées par l'honorable sénateur Robichaud, le 5 octobre 2006, concernant les ressources humaines, le développement social et le financement des programmes de l'alphabétisation; par l'honorable sénateur Tardif, le 20 février 2007, concernant la défense nationale, la politique sur les langues officielles; et par l'honorable sénateur Chaput, le 20 février 2007, concernant la défense nationale, la politique sur les langues officielles.

LE CONSEIL DU TRÉSOR

LES COMPRESSIONS DES DÉPENSES AU SECRÉTARIAT NATIONAL À L'ALPHABÉTISATION

(Réponse à la question posée le 5 octobre 2006 par l'honorable Fernand Robichaud)

Le nouveau gouvernement du Canada est déterminé à favoriser l'alphabétisation et à s'assurer que le financement provenant du fédéral soutienne des projets et des activités qui offrent de l'aide concrète à ceux qui veulent améliorer leur niveau d'alphabétisation. Les provinces, territoires, municipalités, employeurs, organisations non- gouvernementales et les familles ont tous un rôle important à jouer pour offrir un soutien à l'alphabétisation.

Le gouvernement a pris d'importantes mesures afin de mieux cibler ses investissements dans différents secteurs, d'optimiser les résultats obtenus et d'assurer une utilisation judicieuse des fonds publics, tout en répondant aux besoins des Canadiens.

Doté d'un budget de 81 millions de dollars sur deux ans (2006-2007 et 2007-2008), le Programme d'apprentissage, d'alphabétisation et d'acquisition des compétences essentielles pour les adultes (PAAACEA) de RHDSC appuiera des activités liées à l'apprentissage et à l'alphabétisation des adultes qui produisent un impact tangible et durable pour les apprenants.

Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de collaborer avec nos organisations partenaires à l'échelle du pays afin d'aider les Canadiens à améliorer leurs compétences en alphabétisation et à se donner ainsi une vie meilleure. Nous espérons que les groupes d'alphabétisation et les organismes communautaires sauront mettre de l'avant des propositions novatrices axées sur les résultats qui pourront véritablement améliorer le sort de nos concitoyens.

En conjuguant nos efforts, nous pourrons progresser sur le chemin de la réussite en pavant la voie à de nouveaux partenariats et à de futurs investissements pour lutter contre les problèmes d'alphabétisation qui affectent nos collectivités.

RHDSC appuie également les efforts d'alphabétisation et d'acquisition des compétences essentielles par l'entremise d'autres mesures, comme l'Initiative sur les compétences essentielles et l'alphabétisation en milieu de travail et le soutien aux conseils sectoriels et à la formation des apprentis.

Le gouvernement fédéral consent aussi d'importants investissements en faveur de l'alphabétisation et de l'acquisition des compétences essentielles à même les budgets d'autres ministères. Par exemple, Citoyenneté et Immigration Canada appuie les activités d'alphabétisation et de formation linguistique des nouveaux arrivants, une étape essentielle à leur intégration à part entière à la population active canadienne.

LA DÉFENSE NATIONALE

LE PLAN STRATÉGIQUE SUR LES LANGUES OFFICIELLES—L'ASSOUPLISSEMENT DES OBJECTIFS

(Réponse à la question posée le 20 février 2007 par l'honorable Claudette Tardif)

Le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes reconnaissent l'importance des langues officielles et s'efforcent d'améliorer leur rendement à ce chapitre.

L'ancienne démarche n'était pas conforme aux exigences prévues dans la Loi sur les langues officielles. Notre nouveau plan viendra régler les problèmes et mythes qu'elle véhiculait.

Le nouveau Modèle de transformation du programme des langues officielles établit la vision stratégique des Forces canadiennes en matière de langues officielles, soit de garantir que les membres des Forces sont dirigés, instruits, administrés et appuyés dans la langue officielle de leur choix, conformément à la Loi sur les langues officielles. Nous avons tenu compte des recommandations de l'ancienne commissaire aux langues officielles et les avons abordées officiellement dans le Modèle de transformation.

La mise en place de ce plan donnera lieu à une nouvelle démarche plus ciblée et équitable qui tient compte de la structure opérationnelle unique et distincte des Forces canadiennes et permettra d'améliorer le respect de la Loi sur les langues officielles par les Forces.

Au sein des Forces canadiennes, chaque unité fonctionne comme une équipe. Le programme révisé des langues officielles tient compte de cette organisation unique ainsi que des besoins des Forces canadiennes en reconnaissant qu'elles gèrent ses effectifs par unité et non par poste comme dans la fonction publique. Cette nouvelle démarche permettra à chaque unité de fournir de façon uniforme des services, de superviser et d'instruire son personnel dans la langue officielle de son choix, conformément à la Loi sur les langues officielles.

En réponse à la question supplémentaire posée par l'honorable sénateur, les Forces canadiennes continuent de maintenir des unités bilingues partout au Canada, notamment en Alberta où il serait tout à fait possible pour un francophone d'Edmonton de travailler en français dans sa propre province.

(Réponse à la question posée le 20 février 2007 par l'honorable Maria Chaput)

Le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes reconnaissent l'importance des langues officielles et s'efforcent d'améliorer leur rendement à ce chapitre.

L'ancienne démarche n'était pas conforme aux exigences prévues dans la Loi sur les langues officielles. Notre nouveau plan viendra régler les problèmes et mythes qu'elle véhiculait.

Récemment, l'ancienne commissaire aux langues officielles a mené deux enquêtes importantes sur l'incidence de la langue sur le recrutement, la nomination et la mutation du personnel unilingue à des postes bilingues au sein des Forces canadiennes ainsi que sur la langue de travail au Quartier général de la Défense nationale.

À la conclusion de ces enquêtes, la commissaire a formulé treize recommandations visant à améliorer le respect de la loi par les Forces canadiennes.

L'ébauche du nouveau Modèle de transformation des langues officielles des Forces canadiennes a tenu compte de toutes les recommandations de l'ancienne commissaire, puis a mis en place dix de ces recommandations.

L'ancienne commissaire a indiqué qu'elle était encouragée par le fait que le nouveau plan respectera la plupart des recommandations de son rapport et qu'elle reconnaît le rôle positif que le nouveau modèle peut jouer dans l'amélioration des Forces canadiennes en ce qui a trait aux langues officielles.

Le nouveau Modèle de transformation des langues officielles est conçu pour guider les Forces canadiennes à améliorer leur conformité à la Loi sur les langues officielles.

La mise en place de ce plan permettra d'assurer le respect de la Loi sur les langues officielles et de favoriser un milieu dans lequel les membres des Forces canadiennes, tant anglophones que francophones, pourront travailler dans la langue officielle de leur choix, conformément à la Loi sur les langues officielles.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE—ADOPTION DE LA MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur Oliver, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi électorale du Canada.

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Robichaud, C.P., que le projet de loi C-16 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 1, à la page 1, par substitution, aux lignes 22 à 24, de ce qui suit :

« revêtant une importance culturelle ou religieuse, avec la tenue d'une élection provinciale ou municipale ou avec la tenue d'un référendum fédéral, provincial ou municipal, le directeur général des élections ».

L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, permettez- moi d'abord de remercier tous les sénateurs qui ont participé au débat. Je tiens particulièrement à féliciter et à remercier le sénateur Joyal de sa contribution.

Nous sommes contre cet amendement, parce que le projet de loi C-16 est suffisamment souple pour qu'on puisse composer avec les situations visées par l'amendement.

L'amendement proposé s'appliquerait aussi dans le cas d'un référendum municipal, ce qui signifie que la tenue d'un référendum dans une seule municipalité du pays pourrait retarder la tenue des élections fédérales.

Honorables sénateurs, le projet de loi a été formulé de manière à laisser au directeur général des élections le maximum de discrétion pour recommander de retarder des élections. Le paragraphe 56.2(1) contient le mot « notamment », ce qui, selon les règles d'interprétation habituelles, signifie que les exemples donnés n'excluent pas d'autres raisons pour retarder les élections.

Le directeur général des élections peut ainsi, à sa discrétion, recommander une nouvelle date, surtout, à mon avis, quand surgissent des situations semblables à celles qui ont été mentionnées. Un référendum provincial, par exemple, est comparable à des élections provinciales.

Honorables sénateurs, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de modifier le projet de loi C-16.

(1430)

Son Honneur le Président : Y a-t-il d'autres interventions? Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur le Président : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur le Président : À mon avis, les non l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés :

Son Honneur le Président : Convoquez les sénateurs. Les whips ont- ils une recommandation à faire au sujet de la sonnerie?

Le sénateur Di Nino : Je serais satisfait d'une sonnerie de cinq minutes, si cela vous convient, ou de 15 minutes.

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, ce n'est pas la première fois dans cette enceinte que je m'oppose à une sonnerie de 15 minutes, quelle que soit la situation, à moins que le vote ait déjà été annoncé à l'avance par le Sénat. Quinze minutes ne suffisent pas pour permettre aux sénateurs qui sont peut-être dans leur bureau de l'édifice Victoria ou ailleurs sur la Colline du Parlement d'arriver ici à temps pour le vote. À mon humble opinion, la sonnerie devrait retentir pendant au moins 30 minutes.

Des voix : D'accord.

Le sénateur Di Nino : Que diriez-vous d'une demi-heure?

Le sénateur Tardif : C'est-à-dire 30 minutes.

Son Honneur le Président : Si un sénateur présente une objection, la durée de la sonnerie est automatiquement fixée à une heure. Toutefois, les whips ont réexaminé la question et se sont entendus sur une demi-heure. Par conséquent, le vote aura lieu à 15 h 1.

La présidence a-t-elle la permission de quitter le fauteuil?

Des voix : D'accord.

Son Honneur le Président : Convoquez les sénateurs.

(1500)

(La motion d'amendement, mise aux voix, est adoptée.)

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams Grafstein
Bacon Hays
Baker Hervieux Payette
Banks Hubley
Biron Joyal
Carstairs Lovelace Nicholas
Chaput Milne
Cook Mitchell
Cools Munson
Corbin Poulin
Cowan Ringuette
Dawson Robichaud
Day Rompkey
Fairbairn Smith
Fox Tardif
Fraser Trenholme Counsell—33
Furey

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Andreychuk LeBreton
Angus Meighen
Atkins Murray
Cochrane Nancy Ruth
Comeau Oliver
Di Nino Prud'homme
Gustafson Segal
Keon Tkachuk—16

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucun.

Son Honneur le Président : Nous reprenons maintenant le débat sur la motion principale, sous sa forme modifiée.

Le sénateur Murray : Honorables sénateurs, je ne souhaite nullement m'attarder sur la mise aux voix qui vient d'avoir lieu ou sur l'amendement au projet de loi que nous venons d'adopter. Je tiens à dire que je m'oppose à ce projet de loi. Je serais heureux de voter pour rejeter ce projet de loi si l'occasion m'en était donnée au Sénat. Je ne crois pas qu'il soit utile de virer sans dessus dessous notre régime de gouvernement responsable. Je ne crois pas qu'il soit utile d'importer en pièces détachées le régime présidentiel pour tenter de bricoler notre régime parlementaire de Westminster. Rien de tout cela, à mon avis, n'est dans l'intérêt de la démocratie parlementaire ou du Canada.

Je reste de glace aux arguments de certains, selon lesquels plusieurs provinces ont adopté ou sont sur le point d'adopter des mesures de même nature. J'estime que notre Parlement, le Parlement du Canada, doit être aux premières lignes dans la défense et le maintien de notre Constitution et de nos conventions constitutionnelles.

Pour la même raison, l'amendement proposé par le sénateur Joyal, que nous venons tout juste d'adopter, ne me persuade en rien de la nécessité de voter pour le projet de loi. Mon honorable collègue, dans son excellent discours d'hier, a dénoncé le projet de loi d'un bout à l'autre, en citant, je crois, cinq raisons pour lesquelles il allait à l'encontre de nos conventions constitutionnelles. Je suis tout à fait d'accord avec lui. Puis il a proposé cet amendement qui, comme je l'ai fait observer, se rapporte à un détail du projet de loi. Le projet de loi est désormais amendé et, si les honorables sénateurs d'en face font preuve de cohérence, après l'avoir amendé, ils voteront pour le renvoyer à la Chambre des communes. Si le gouvernement décide d'accepter cet amendement relativement mineur, alors la partie est jouée. Le projet de loi sera alors adopté et l'entité fédérale canadienne aura des élections à date fixe comme c'est le cas aux États-Unis et dans d'autres régimes de gouvernement. Je suis perplexe de voir l'opposition dénoncer le projet de loi dans son ensemble pour ensuite proposer d'amender l'un de ses éléments.

Pour toutes les raisons que le sénateur Joyal a invoquées hier, et d'autres encore, le projet de loi va à l'encontre de notre tradition constitutionnelle et de notre convention constitutionnelle, et ne devrait tout simplement pas être adopté. Si on m'en donne l'occasion, je voterai en ce sens.

(1510)

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du projet de loi C-16, qui propose la tenue d'élections à date fixe. Les honorables sénateurs savent sans doute que j'ai tendance à me tenir fort occupée. Or, ces jours-ci, je me retrouve dans une situation où on nous propose tant d'initiatives mauvaises que j'ai du mal à choisir celles dont je vais parler ou contre lesquelles je vais m'exprimer. Le projet de loi C-16 figure parmi ces initiatives.

Les sénateurs savent que je viens d'appuyer la motion d'amendement du projet de loi présentée par le sénateur Joyal. J'estime que c'est un progrès, mais pas aussi considérable que je l'aurais souhaité. Il y a des sans patrie. Je suis sans comité. Donc, ma capacité d'influencer les comités a été considérablement restreinte. Des contraintes rigoureuses ont été imposées à mon droit de vote au Sénat, ce qui n'est pas sans m'angoisser. Je ne vais jamais l'accepter. Ce qu'on a fait était mal, reste mal et le sera toujours, à mon avis.

Honorables sénateurs, pour en revenir à ce que je disais, je n'ai pas eu assez de temps pour préparer une intervention dans laquelle je réfuterais un grand nombre des arguments spécieux, sans fondement et ineptes qu'on a fait valoir à propos du projet de loi.

Je voudrais réaffirmer une ou deux choses, dont une que j'ai abordée hier. Le principe qui veut que les élections n'aient pas lieu à date fixe est le fondement de notre régime parlementaire. L'idée — d'autant plus que les votes de défiance remplacent la destitution comme moyen de sévir contre les ministres délinquants —, c'est que jamais dans l'histoire du régime britannique, des hommes ou des femmes n'auront à prendre les armes pour se défaire de dirigeants despotiques et tyranniques. Il y a ce que nous appelons les votes de défiance. C'est ainsi que le centre de gravité du pouvoir, que le gouvernement soit minoritaire ou majoritaire, est déplacé vers le sujet, vers le citoyen. En d'autres termes, le citoyen a le droit constitutionnel à des élections chaque fois qu'il est nécessaire d'écarter ou d'évincer un despote. Les libertariens affectionnent le mot tyran. Ils disent combattre les tyrans.

En dépit des affirmations contraires du sénateur Di Nino, le premier ministre Harper, par cette mesure, n'a renoncé à rien. Il a sacrifié un droit fondamental que les Canadiens possèdent de naissance par leur origine britannique, dans une tradition britannique. Je voudrais ajouter, sénateurs, que l'idée d'élections sans dates fixes a été jusqu'ici l'un des fondements de notre régime.

Les sénateurs ne savent pas grand-chose sur ma personne. Il y a longtemps, en politique, j'ai appris à parler fort peu de moi. Mais je vais dire quelque chose aux sénateurs. Nous descendons de gens de couleur libres et, grandissant dans les Antilles britanniques, j'ai appris à éviter l'obéissance servile. On m'a montré à y résister. Ma famille a joué un rôle dans l'histoire de la Barbade, où elle a travaillé à l'implantation du gouvernement responsable. Mon père s'est présenté aux élections en 1938, honorables sénateurs. À l'époque, le droit de vote était toujours réservé aux propriétaires. Il devait y avoir quelques centaines d'électeurs. Bien entendu, mon père a essuyé la défaite, mais par la suite, d'autres membres de la famille ont réussi.

Hier, j'ai assisté à une célébration soulignant l'abolition de la traite des esclaves, en 1807, dans l'ancien Empire britannique. J'ai souvent cité ici William Wilberforce et j'ai parlé de son rôle dans l'abolition de la traite des esclaves et de l'esclavagisme. Dans ma jeunesse, sénateurs, on m'a appris à respecter, à faire respecter et à imiter des gens comme William Wilberforce, député au Parlement du Royaume-Uni, et, dans la quête d'un régime de gouvernement, à me tourner vers le régime parlementaire. Dans un parlement, dans ce type d'assemblée, il était possible de faire valoir ce qu'on a reçu de son ascendance, son droit de naissance, de défendre très franchement les droits des citoyens. Je ne peux m'empêcher de dire aux sénateurs que, selon moi, ce principe a été violé.

L'une des choses terribles et agaçantes qui me dérangent constamment, ce sont ces initiatives, ces projets de loi, qui se succèdent rapidement, les unes après les autres. Aucune d'elles n'est solidement fondée sur la loi ou la Constitution. Je dirai franchement, sénateurs, qu'on ne nous donne ici aucune explication sur la raison d'être de ces initiatives, sinon pour nous dire des banalités comme : il faut moderniser la Constitution.

Honorable sénateurs, je rejette tout cela comme, au pire, des balivernes et, au mieux, des mesures arbitraires. Je tiens à affirmer mon opposition comme femme noire à qui on a inculqué l'idée que le régime parlementaire est celui qui nous convient. Je m'oppose à ce que fait le gouvernement actuel. Ce qu'il fait est très mauvais, car il transforme le régime en écartant du centre de la Constitution le peuple, les sujets de la reine, pour lui substituer subtilement le premier ministre, dont le poste n'existe même pas dans la loi, dans la Constitution. C'est terrible.

Honorables sénateurs, la plupart des gens savent ce que je pense de ce régime, car c'est ainsi que j'ai été élevée, et je ne parle pas de race. Je voudrais néanmoins lire un passage qui me semble important pour étayer mon point de vue. J'ai entrepris un important travail sur la question — et nous discutons d'élections à date fixe et de toutes sortes de choses qui ne tiennent pas debout. Nous devrions en revenir aux termes vrais, à la loi réelle s'appliquant aux élections. On parlait de droit de vote, de suffrage, d'octroi du droit de vote.

Je me souviens comme si c'était hier d'une journée, je crois que c'était en 1951, où ma mère, chaussée de ses souliers bruns et blancs, est allée voter. Il s'agissait des premières élections au suffrage universel de la Barbade, et notre famille avait contribué à faire évoluer le pays pour qu'il en arrive là. Mon histoire est fort différente de celle de la plupart des sénateurs. Je constate que ce patrimoine disparaît un peu plus chaque jour.

Quoi qu'il en soit, je voulais dire aux sénateurs, à propos du droit de vote, que je me suis assurée de vérifier les termes. Et j'ai toujours trouvé que c'était chez les maîtres, comme Blackstone, qu'il fallait aller chercher cette information. J'ai repéré un passage où il est question du droit de vote, une chose précieuse, que le gouvernement a trafiqué au mépris de la Constitution.

Je cite ici un extrait de la p. 152, chapitre 10, livre 2, volume I, des Commentaires sur les lois d'Angleterre en quatre volumes de sir William Blackstone, dans lequel le juge Sharswood dit ceci :

De plus, les droits étant des privilèges royaux remis entre les mains du sujet, ils ne sont accordés qu'à condition qu'on en fasse bon usage.

Le droit de vote est très précieux. Ce droit accordé par Sa Majesté, qui en a permis l'exercice par les citoyens du pays, les sujets, est quelque chose de vital.

Comme je le disais au sénateur Joyal il y a quelque temps, il fut une époque, jusqu'en 1832, où de nombreux particuliers possédaient et contrôlaient un grand nombre de circonscriptions, et ils déterminaient non seulement qui votait, mais aussi qui serait le représentant. Il y avait un certain duc de Newcastle qui était propriétaire de plusieurs de ces circonscriptions. Vous souvenez- vous des expressions « pocket boroughs » et « rotten boroughs »?

(1520)

L'humanité a progressé et une idée constitutionnelle est apparue : tous les humains devraient pouvoir voter et participer aux affaires de l'État, aux affaires de l'entité politique. Au fil des ans, différents monarques du Royaume-Uni ont élargi sans cesse davantage le droit de vote des citoyens.

Beaucoup de gens disent que les femmes n'ont obtenu le droit de vote au Canada qu'en 1918, mais je crois que ce n'est que dans les années 1870 que le Canada a obtenu le suffrage universel pour les hommes.

Honorables sénateurs, il est très étrange et dangereux de toucher aux anciennes institutions, parce qu'on ne sait pas vraiment ce qu'on cherche à modifier.

Nous verrons le jour — je ne le crois pas trop lointain — où nous regretterons d'avoir laissé adopter ce projet de loi. Les sénateurs le savent lorsque je suis d'accord ou non. Si j'en ai l'occasion aujourd'hui, je serai heureuse de voter contre ce projet de loi, qui constitue une agression sur la personne de chacun des sujets de Sa Majesté. Bien peu de gens semblent s'en soucier, mais on m'a appris, pendant que je grandissais, à défendre ce système. On m'a toujours dit que, quels que soient ses défauts, c'est encore le meilleur système qui ait jamais existé. J'ai donc de la peine de voir qu'on s'y attaque. Qui plus est, les gens qui le font ne veulent même pas nous dire quel est leur ultime objectif. Chaque jour, une autre planche est arrachée.

L'octroi du droit de vote faisait partie de la prérogative royale. Les monarques britanniques avaient l'habitude d'octroyer tel bourg à un tel, ou autre. Jusqu'à récemment, chaque fois qu'un projet de loi touchant la prérogative royale était déposé, je m'empressais de faire valoir la nécessité d'obtenir le consentement royal. J'ai cessé de le faire parce que les gouvernements continuent à faire abstraction de nous. C'est une honte qui retombera sur nous.

Au Sénat, Votre Honneur, vous êtes le représentant de Sa Majesté. Vous êtes l'un des puissants officiers de l'État. Votre poste était censé être aussi élevé, au besoin, que celui du Grand Chancelier, parce que ce pays faisait partie des régions pionnières.

Tout ce que le gouvernement fait est très mal et cela me brise le cœur. Ils peuvent m'éjecter des comités, mais je peux encore voter, et j'ai bien l'intention de le faire si j'en ai l'occasion aujourd'hui.

Honorables sénateurs, le fait que nous permettions que ce système soit ainsi diminué, que nous acceptions de voir tout notre système démantelé pièce par pièce est une vraie malédiction pour nous tous.

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, je trouve ce projet de loi singulièrement répugnant. Il est contraire à notre tradition parlementaire. Il évoque l'américanisation de notre pays et une tradition républicaine qui n'a rien à voir avec notre tradition parlementaire.

Comment en sommes-nous arrivés là? On soutient qu'il s'agit d'un grand exercice démocratique et que les Canadiens connaîtront une plus grande démocratie s'ils savent exactement quel jour ils iront voter. Je ne crois pas du tout que le projet de loi aura ce résultat. Nous vivons dans un pays très démocratique, un pays dans lequel les citoyens décident eux-mêmes, lorsqu'ils entrent dans l'isoloir, de quelle façon ils vont voter et ce, quelle que soit la date. Voilà l'essence de notre système démocratique.

J'ai examiné le projet de loi par rapport à mes responsabilités envers le Sénat. C'est là que le dilemme se pose. Je ne peux pas prétendre qu'il nuit aux régions puisqu'il les traite toutes également. Je ne peux pas soutenir qu'il fait du tort aux minorités car, dans ce projet de loi, tout le monde est sur le même pied. Je ne peux malheureusement pas affirmer qu'il est inconstitutionnel parce que je ne crois pas qu'il le soit. Même s'il est contraire à la pratique, il ne viole pas la Constitution.

Par conséquent, si ce projet de loi fait l'objet d'un vote par appel nominal, je ne voterai pas contre, mais je ne voterai pas pour. Je m'abstiendrai parce qu'il ne m'inspire que du dédain.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, au sujet de ce projet de loi, je partage les préoccupations du sénateur Murray, du sénateur Cools, du sénateur Joyal et de notre ancien leader. Je crois connaître le système américain aussi bien que n'importe qui d'autre ici. De bien des façons, le système américain est digne d'éloges, mais ce n'est pas le cas des élections à date fixe parce qu'elles modifient l'orientation, la sensibilité et les responsabilités dans ce système. Les élections à date fixe font surgir la question de l'argent d'une façon aussi réelle qu'intense.

Je vais passer en revue les différents combats qui se livrent. La Chambre des représentants, Chambre basse des États-Unis, est élue tous les deux ans. En ayant discuté avec de nombreux représentants du Congrès, je peux vous dire qu'ils consacrent près de la moitié de leur temps à l'examen des lois et l'autre moitié à recueillir des fonds pour les élections suivantes.

Les sénateurs ont un mandat de six ans, et un tiers d'entre eux sont élus tous les deux ans. Ils consacrent eux aussi au moins la moitié de leur mandat à des collectes de fonds. Nous avons clairement vu, dans la course à la présidence, que les élections primaires ont avancé d'un cran. Voilà qu'elles ont lieu pendant les deux années qui précèdent la fin du mandat présidentiel. Toutes ces élections qui se succèdent ne rendent pas le système plus sensible ou plus adapté à la volonté populaire.

Par conséquent, quel est le problème d'un mandat de quatre ans? Je n'ai pas entendu un seul argument qui prouve que ce système est meilleur que celui que nous avons. Je ne rejetterai pas l'argument relatif à la convention constitutionnelle. La Cour suprême du Canada a confirmé que ces conventions équivalent à la constitution écrite. Le juge Brian Dickson a causé de la consternation de ce côté- ci en appuyant la pratique de la convention constitutionnelle. Ce n'est pas là un argument minimaliste, c'est plutôt un argument maximaliste. Les conventions sont importantes. Elles font partie de notre démocratie de common law fondée sur la pratique. La pratique des quelque 100 dernières années a été saine, efficace et efficiente.

Le fait pour nous de vouloir maintenant revenir sur notre histoire pour adopter un système d'élections à date fixe tous les quatre ans est contraire à la notion de gouvernement responsable. J'estime qu'un tel changement rendrait les gouvernements irresponsables. Je prétends qu'il nous amènerait à nous concentrer sur le court terme plutôt que sur le long terme. J'affirme qu'il est contraire au bon gouvernement. Je suis d'avis que cette mesure devrait être renvoyée à l'autre endroit. Si l'amendement du sénateur Joyal permet de le faire, avec notre appui, il nous incombera de persuader nos collègues de l'autre endroit que c'est une mauvaise mesure, une mauvaise pratique qui est contraire à la convention et contraire à l'histoire d'un gouvernement responsable qui n'a rien à envier à n'importe quel autre gouvernement du monde.

Je dis toujours qu'il n'y a pas lieu de changer ce qui marche bien.

(1530)

Cela fonctionne. Nous le voyons chaque jour. Nous l'avons vu cette semaine au Québec. Nous l'avons vu en Ontario. Nous l'avons vu ici-même au Sénat. Cela fonctionne. Parfois, cela ne fonctionne pas comme nous, de ce côté-ci, le souhaiterions, ou comme le souhaiteraient mes collègues d'en face, mais le système fonctionne. Les gouvernements exceptionnels qui se sont succédé ont propulsé le Canada hors du Moyen Âge et en ont fait une des principales puissances économiques du monde. Tout cela en grande partie grâce à nos gouvernements.

J'exhorte les représentants du gouvernement au Sénat à écouter ces arguments avec soin. Ce n'est pas une question partisane. Cela touche au cœur de la gouvernance et de la responsabilité gouvernementale. Je crois en un gouvernement responsable. Cette mesure est irresponsable et nous causera de grands soucis si nous devions en être saisis encore une fois.

L'honorable Michael A. Meighen : Le sénateur Grafstein accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Grafstein : Oui.

Le sénateur Meighen : Le sénateur dit qu'il ne faut pas essayer de réparer ce qui marche bien, propos auxquels je me rallie. Le sénateur convient-il que le système du Congrès des États-Unis exige en quelque sorte la tenue d'élections à date fixe? Le sénateur convient-il que le système américain s'effondrerait si les élections n'étaient pas tenues à date fixe? Bien que cela ne s'applique pas dans la même mesure, j'imagine qu'on pourrait soutenir que notre système sans élections à date fixe est meilleur, mais qu'il peut sans doute s'adapter aux élections à date fixe, comme nous le voyons dans les provinces qui ont adopté une telle mesure, bien que, personnellement, je ne sois pas en faveur de cela.

Le sénateur Grafstein : Les Canadiens sont ingénieux. Peu importe le système, nous nous arrangerons pour qu'il fonctionne. À mon avis, cela ne fonctionnerait pas aussi bien que le système actuel. Le système actuel fonctionne bien. Les structures des partis sont en place. Les voix des minorités s'expriment par l'entremise des pouvoirs minoritaires. Elles se font entendre ici, au Sénat. Il y a des sénateurs indépendants et des sénateurs de toutes les allégeances. C'est la même chose à l'autre endroit. Le système fonctionne bien.

Selon moi, le système américain est structuré complètement différemment. Les Américains n'ont pas le choix parce que leur Constitution est rédigée de cette manière. Ici, nous avons le choix. Je félicite toujours madame le sénateur Cools parce que notre collègue fait référence à la common law parlementaire. Nous avons une common law parlementaire et elle lie le Parlement tout comme la Constitution écrite. La common law est une série de mesures qui, après avoir été adoptées au fil du temps, forment une convention. La convention est aussi valide que le droit en vigueur, qu'une loi écrite. Cette convention, qui est intégrée à notre Constitution, est très claire. Notre Constitution, comme l'a souligné le sénateur Joyal, est très claire. Elle interdit qu'une législature se prolonge au-delà de cinq ans. C'est tout. C'est une bonne mesure démocratique. Une législature ne peut pas se prolonger plus qu'il n'est raisonnable. Elle ne peut pas, comme l'affirmait Cromwell, être non désirée et non nécessaire. C'est une bonne mesure.

Cependant, la proposition dont nous sommes saisis n'est pas une bonne mesure. Nous et la Chambre des communes regretterons amèrement le jour où le Parlement adoptera le projet de loi parce que toute la structure des examens, de la responsabilité et de la sensibilité sera jetée aux oubliettes.

Je ne suis pas de ceux qui croient que le premier ministre veut se constituer une West Wing à l'autre endroit. Cependant, je souscris à l'argument voulant que, si on commence à gruger, comme madame le sénateur Cools le dit, les structures du Parlement, avant que l'on s'en rende compte, on l'aura transformé en un système qu'on n'aimera pas. Il sera plus coûteux et moins souple. Nous aurons un gouvernement moins responsable. Nous souscrivons à l'idée d'un gouvernement responsable — paix, ordre et bon gouvernement. Le projet de loi n'est pas responsable.

J'exhorte les sénateurs du côté ministériel à transmettre le message à leur caucus et à leurs dirigeants et à bien réfléchir. Je ne pense pas que la mesure ait été étudiée à fond.

Le sénateur Murray : J'ai une question à poser au sénateur. Que me répondra-t-il si je lui dis que je crains que, si nous adoptons le projet de loi tel qu'amendé et le renvoyons à la Chambre des communes et que le gouvernement décide d'accepter l'amendement, nous ayons une loi apportant une amélioration mineure, mais avec tous les défauts conventionnels et constitutionnels que lui, le sénateur Joyal et d'autres ont relevés? Il doit bien y avoir une autre solution.

Comme je l'ai dit, je suis prêt à voter contre le projet de loi, mais il existe d'autres solutions. J'ignore si le renvoi à six mois conviendrait dans ce cas-ci, mais renvoyer le projet de loi à la Chambre des communes avec un amendement relativement mineur serait prendre un grand risque.

Le sénateur Grafstein : Honorables sénateurs, cela fournirait l'occasion à notre caucus de discuter de nouveau de ce projet de loi. Un grand nombre de ces mesures — et je comprends ce qu'a dit madame le sénateur Cools — ont été présentés au Sénat et à l'autre côté très rapidement. Nous sommes saisis d'un certain nombre de ces mesures. Celles-ci entraînent des répercussions et des changements énormes. Il est difficile pour nous, qui travaillons fort — et chaque sénateur ici travaille fort au sein des comités — d'étudier ces mesures au fur et à mesure qu'elles nous arrivent et de leur consacrer le temps nécessaire, comme le savent le sénateur Joyal et d'autres membres du Comité des affaires juridiques. Je dis cela avec un certain désarroi, parce que ce sont des questions importantes. J'ai toujours eu le sentiment que, lorsque je quitterais le Sénat, celui-ci serait plus fort et meilleur qu'il ne l'était lorsque je suis arrivé. Je crains que si de telles mesures peuvent être adoptées et acceptées de l'autre côté sans qu'on en mesure clairement les répercussions, ce que nous sommes pourtant en mesure de faire, cet endroit ne sera pas meilleur lorsque nous partirons qu'il ne l'était lorsque nous sommes arrivés.

(Sur la motion du sénateur Fraser, le débat est ajourné.)

VISITEURS À LA TRIBUNE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Son Excellence Naser Al Belooshi, ambassadeur du Royaume de Bahreïn au Canada. Il est accompagné de sa femme, Mme Sharifa Benammour.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA
LA LOI SUR LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable W. David Angus propose que le projet de loi C-36, Loi modifiant le Régime de pensions du Canada et la Loi sur la sécurité de la vieillesse, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je suis heureux de participer au débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-36, Loi modifiant le Régime de pensions du Canada et la Loi sur la sécurité de la vieillesse.

Ce projet de loi est une bonne nouvelle, comme l'illustre probablement le fait que les caucus libéral et conservateur à la Chambre et au Comité permanent des ressources humaines ont tous appuyé cette mesure sans réserve et de façon unanime.

Il ne fait aucun doute dans mon esprit que, si les députés du gouvernement et de l'opposition officielle à l'autre endroit ont pu s'entendre à ce point, c'est en grande partie parce qu'ils ont reconnu que le projet de loi C-36 va améliorer sensiblement la vie quotidienne d'un grand nombre de personnes âgées au Canada et de personnes atteintes d'une invalidité de longue durée.

Honorables sénateurs, je soupçonne qu'un bon nombre d'entre vous se demandent souvent, comme moi, de quelle façon sont élaborées les politiques gouvernementales dont nous discutons ici. D'où viennent ces politiques? S'agit-il d'initiatives prises par un nouveau gouvernement ou donnent-elles suite à des projets lancés par le gouvernement précédent? Ces politiques sont-elles pondues par les bureaucrates, ou nous arrivent-elles ici suite à des initiatives prises par des groupes qui sont des intervenants?

(1540)

Comment ce projet de loi a-t-il vu le jour? Je crois que sa genèse est intéressante. Le projet de loi C-36, dont nous sommes saisis aujourd'hui, est le fruit de plusieurs des aspects que je viens de mentionner. Il a évolué pour remédier à un problème que les aînés handicapés ont soulevé auprès du ministère des Ressources humaines et du Développement social, des politiciens fédéraux et provinciaux et des leaders des territoires.

Il s'inscrit dans une réforme en plusieurs étapes qui a débuté avec l'ancien gouvernement libéral. Le nouveau gouvernement conservateur avait également promis cette réforme aux Canadiens, pendant la dernière campagne électorale, pour veiller à ce que le travail soit mené à bien. Honorables sénateurs, nous sommes maintenant saisis du projet de loi C-36. Il vise à améliorer l'administration et la transparence du Régime de pensions du Canada, des pensions d'invalidité, du Supplément de revenu garanti et de la Sécurité de la vieillesse.

Les régimes publics de pension du Canada sont une source de fierté pour tous les Canadiens. Notre régime public de pensions est un des plus généreux et des plus stables au monde. Je crois que le projet de loi C-36 ne changera rien à cela, honorables sénateurs.

Pendant près d'un demi-siècle, le programme de Sécurité de la vieillesse a offert des prestations mensuelles aux aînés, uniquement en fonction de leurs années de résidence au Canada. Depuis 1966, le Régime de pensions du Canada a contribué à assurer la sécurité du revenu de retraite de nos aînés, de leur conjoint survivant, de leurs enfants à charge et des personnes handicapées.

Le régime de revenu de retraite du Canada offre trois filets de sécurité, les pensions publiques et privées répondant chacune à un objectif précis. Le programme de Sécurité de la vieillesse constitue le premier filet et il offre aux Canadiens un niveau de revenu de base au moment de la retraite. Le Canada est presque unique, en ce sens qu'il est un leader parmi d'autres pays, car il offre une rente viagère de base, et la seule condition est de résider au Canada. L'admissibilité aux prestations de sécurité de la vieillesse ne repose pas sur le travail ou la citoyenneté, mais sur la résidence au Canada.

Honorables sénateurs, cette pension est utile, par exemple, pour les personnes ayant un handicap permanent qui n'ont peut-être jamais pu faire partie de la population active canadienne, mais qui peuvent toujours recevoir leur propre rente viagère.

Le deuxième filet est le Régime de pensions du Canada. Les employés et les travailleurs autonomes contribuent au RPC. Au Québec, il s'agit du RRQ. Si quelqu'un travaille au Canada, il verse des cotisations au RPC et il en touchera des prestations de retraite. La Sécurité de la vieillesse et le Régime de pensions du Canada constituent ensemble le régime public de retraite du Canada. Les retraites privées, avec les régimes enregistrés d'épargne-retraite et les fonds enregistrés de revenu de retraite, forment le troisième filet de notre système de retraite.

Prenons le cas évoqué l'autre jour par le sénateur Baker, celui de sa tante Susie. Comme elle appartient à une famille à revenu moyen, elle peut compter recevoir 1 200 $ par mois de la SV et du RPC. Toutefois, tante Susie veut peut-être avoir des revenus plus élevés à la retraite. Elle a donc placé de l'argent dans des REER. À sa retraite, elle peut compter sur les régimes publics du Canada, mais elle pourra aussi retirer un revenu supplémentaire de ces placements.

Les programmes publics constituent le fondement de la sécurité de revenu des personnes âgées. Ils assurent un revenu de base à tous les aînés et un supplément de revenu à ceux qui en ont besoin pour atteindre un certain minimum et qui n'ont pas de régime de retraite privé, pas de REER, pas d'autres revenus de placement. Aux Canadiens qui n'ont rien d'autre que le régime public, les dispositions du projet de loi C-36 donnent l'assurance de pouvoir continuer de faire confiance au Régime de pensions du Canada et au programme de sécurité de la vieillesse. Ils pourront compter sur ces régimes lorsqu'ils prendront leur retraite. Le projet de loi leur permettra de suivre de plus près l'évolution de leurs cotisations et de planifier leur avenir.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-36 reconnaît que, même si les programmes que sont le RPC, l'assurance-invalidité et la SV sont très sûrs, ils doivent continuer à évoluer et à s'adapter aux besoins en mutation des Canadiens, et surtout des aînés. La SV et le RPC en place aujourd'hui sont la plus importante dépense du gouvernement du Canada. Chaque année, des prestations de plus de 54 milliards de dollars sont versées aux aînés. Compte tenu de l'évolution démographique prévue au cours des 15 prochaines années — et je songe à ce propos au rapport récent du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, qui a étudié le problème imminent qu'est cette bombe à retardement et tiré la sonnette d'alarme —, ce chiffre augmentera inévitablement et à un rythme effarant.

Les Canadiens âgés ont aujourd'hui une force considérable chez nous. Ils ont beaucoup d'influence. Le gouvernement comprend que les aînés sont en meilleure santé, plus à l'aise et plus au fait de la technologie qu'il y a ne fût-ce que dix ans. Ils demandent à être entendus, et ils le méritent. Le nouveau gouvernement est à l'écoute. Les modifications proposées dans le projet de loi C-36 reflètent ce que des milliers de Canadiens ont dit aux députés et sénateurs de tous les partis, ainsi qu'au ministère des Ressources humaines et du Développement social. Par des lettres et des courriels et en participant à des consultations en bonne et due forme, les aînés ont demandé un meilleur accès à l'information sur leurs prestations.

Le projet de loi C-36 aidera à moderniser et à simplifier le versement des prestations du RPC, de la SV et du Supplément de revenu garanti. Il permettra aux aînés de voir où en sont leurs cotisations. Aux termes de la loi actuelle, ils ne reçoivent qu'un état par année. Désormais, ils auront de multiples possibilités d'obtenir un état de compte, notamment par Internet. Le projet de loi améliorera pour tous les Canadiens l'accès aux prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada.

Honorables sénateurs, permettez-moi un instant de signaler plus spécialement deux des nouvelles mesures. Dans un cas, il s'agit de modifications proposées au Supplément de revenu garanti. Dans l'autre, de modifications aux prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada.

Honorables sénateurs, l'une des modifications les plus importantes proposées dans le projet de loi est la disposition qui permettra aux aînés à faible revenu de demander les prestations du SRG une seule fois dans toute leur vie. Une fois la demande initiale faite, l'information fiscale fournie par l'Agence du revenu du Canada déterminera l'accès à ces prestations. L'aîné n'aura plus à faire de demande, peu importe les fluctuations de son revenu. Honorables sénateurs, il s'agit là d'une amélioration extraordinaire. Les aînés la réclament depuis quelques années. Cette mesure répondra en grande partie à leurs préoccupations.

Des députés ont exprimé la crainte que le gouvernement ne prenne prétexte de cette modification pour laisser aux aînés la tâche de faire la demande initiale. Il n'en sera rien. Le nouveau gouvernement comprend qu'il est difficile de joindre certaines personnes âgées. Le ministère des Ressources humaines et du Développement social tend la main aux membres les plus vulnérables de notre société et fait en sorte qu'ils soient au courant des prestations qui leur sont offertes. Il fera des efforts considérables pour retrouver les aînés qui ne font pas de déclaration de revenus et les inciter à demander le SRG.

Une deuxième modification clé qui figure dans le projet de loi facilitera l'admissibilité aux prestations d'invalidité pour les cotisants à long terme du RPC. Actuellement, il faut avoir cotisé au RPC pendant quatre des six dernières années pour avoir droit aux prestations d'invalidité, même si le cotisant a participé au régime pendant la majeure partie de sa vie. Grâce à la modification proposée dans le projet de loi C-36, ceux qui ont cotisé au régime pendant 25 ans ou plus devront avoir participé au RPC pendant trois des six dernières années pour avoir droit aux prestations, qui seront maintenues tant que les critères médicaux seront respectés. Cette modification exigeait le consentement de sept provinces ou territoires représentant au moins 50 p. 100 de la population, et elle fera toute une différence pour ceux qui ne peuvent continuer à travailler à cause de la maladie ou d'une invalidité.

Honorables sénateurs, c'est en songeant aux Canadiens pris individuellement qu'on a conçu ces modifications. Elles sont solides sur le plan actuariel et reflètent les recommandations formulées par les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux des Finances. Elles tiennent compte également des observations formulées récemment par la vérificatrice générale du Canada. De plus, elles correspondent à l'opinion de beaucoup de Canadiens. Il faut penser par ailleurs que le projet de loi C-36 améliore un régime de pensions qui est déjà reconnu dans le monde entier comme un excellent régime.

(1550)

Honorables sénateurs, nous avons un régime de pensions de vieillesse et d'invalidité qui fait l'envie de beaucoup d'autres pays. Nous sommes redevables aux gouvernements précédents qui ont fait de nous l'un des rares pays du G8 à avoir modifié leur programme de pensions gouvernementales de manière à en assurer la viabilité. Si nous voulons demeurer un chef de file de la communauté mondiale, la viabilité est maintenant un facteur critique de notre planification.

Je suis heureux de pouvoir dire aux sénateurs que l'actuaire en chef a récemment fait un examen complet de notre régime gouvernemental de pensions, y compris des mesures proposées dans le projet de loi C-36. L'actuaire en chef a conclu que notre régime est solide sur le plan actuariel, et que même avec les changements proposés, il continuera de soutenir les générations futures de Canadiens. C'est bien sûr essentiel, étant donné notre situation démographique, dont j'ai déjà parlé.

Aujourd'hui, environ 12 p. 100 des Canadiens sont des personnes âgées. D'ici 25 ans au plus, ce pourcentage aura doublé. Un Canadien sur quatre sera alors une personne âgée. Les Canadiens comptent sur nous pour veiller à ce que ce solide régime de pensions demeure en place à long terme.

Nous devons aussi nous assurer que toutes nos personnes âgées reçoivent rapidement et efficacement les prestations auxquelles elles ont droit. J'ai entendu de nombreuses personnes âgées me dire à quel point elles sont fières d'avoir plus de 65 ans, de vivre au Canada et de profiter de la SV et du RPC, et même de pouvoir vérifier sur Internet à quoi elles ont droit en vertu de ces régimes. Ces personnes âgées font des achats en ligne, font leurs opérations bancaires en ligne et, oui, honorables sénateurs, elles aimeraient pouvoir réclamer leurs prestations du RPC en ligne. Nous voulons que cela se réalise.

Le projet de loi C-36 leur permettra de vérifier en ligne l'état de leurs cotisations et, éventuellement, de présenter ainsi leur demande de prestations. Les personnes âgées et celles qui approchent de l'âge de la retraite veulent utiliser Internet, quand c'est utile, tout autant que les jeunes Canadiens. Le programme de Sécurité de la vieillesse et le Régime de pensions du Canada sont les pierres d'assise de la sécurité du revenu pour les Canadiens à la retraite. Nous voulons que ces régimes soient mieux administrés, rationalisés, simplifiés et plus conviviaux pour les Canadiens désireux de présenter une demande ou de vérifier l'état de leurs prestations. Nous devons aussi rendre le régime plus équitable et plus transparent, et simplifier le mode de distribution des prestations.

J'affirme que le projet de loi C-36 atteindra ces objectifs. Il existe généralement des moyens de rendre un bon système encore meilleur, mais nous devons par la même occasion faire preuve de diligence afin de ne pas bouleverser l'équilibre fiscal qui fait la force du système de revenu de retraite canadien.

C'est pourquoi je demande à tous les sénateurs d'appuyer le projet de loi C-36 et de l'examiner et de l'étudier au comité comme il le mérite afin que les aînés canadiens puissent bénéficier le plus rapidement possible des modifications qui y sont proposées.

(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)

[Français]

PROJET DE LOI SUR LES SOURCES D'EAU POTABLE

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Joyal, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-208, Loi exigeant que le ministre de l'Environnement crée, en collaboration avec les provinces, une agence habilitée à définir et à protéger les bassins hydrographiques du Canada qui seront les sources d'eau potable des générations futures.—(L'honorable sénateur Comeau)

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'aimerais dire quelques mots sur cet important projet de loi et je crois que je ne suis pas le seul. Cependant, n'ayant pas mes notes de préparation avec moi, je propose l'ajournement de ce débat pour le moment.

(Sur la motion sur sénateur Comeau, le débat est ajourné.)

[Traduction]

PROJET DE LOI DE MISE EN ŒUVRE DU PROTOCOLE DE KYOTO

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Mitchell, appuyée par l'honorable sénateur Trenholme Counsell, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C- 288, Loi visant à assurer le respect des engagements du Canada en matière de changements climatiques en vertu du Protocole de Kyoto.—(L'honorable sénateur Oliver)

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, le projet de loi C-288 permet de s'assurer que le Canada respectera ses obligations concernant les changements climatiques en vertu du Protocole de Kyoto. Il s'agit là d'un repentir de dernière minute du Parti libéral du Canada. Le projet de loi C-288 est une tentative visant à reprendre le temps perdu, une énorme manipulation et une tromperie délibérée. Les libéraux ont fait tout cela à leurs amis. Ils se pavanent en se disant défenseurs de l'environnement et, bien entendu, amis des pauvres, des mères et des bébés, quand ils ont besoin d'eux. Ils répètent à qui veut les entendre que, s'ils sont réélus, ils feront toutes les choses qu'ils avaient promis de faire mais qu'ils n'avaient jamais réalisées. Pas surprenant qu'ils soient de si ardents défenseurs de la libération conditionnelle.

Ensuite, il y a l'accord de Kyoto, évidemment. C'est un accord intéressant qui vise à nous protéger contre les émissions de CO2 qui, nous dit-on, cause l'effet de serre qui réchauffe la planète. Combiné au méthane produit par les vaches et à la vapeur d'eau, ce gaz réchauffe notre planète. L'accord, faisant preuve d'indulgence envers les vaches et ne tenant pas compte de la vapeur d'eau, porte principalement sur le CO2, et 169 pays l'ont signé.

Cependant, les plus grands pollueurs — la Russie, la Chine et l'Inde — n'ont pas été tenus de se conformer à l'accord et seuls 35 des 169 pays signataires ont fixé des cibles obligatoires. L'argument pour cela est le suivant : si, pour des raisons idéologiques ou autres, vous n'êtes pas encore industrialisés, vous pouvez maintenant le devenir. Comme vous n'avez rien appris, bien sûr, vous pouvez répéter les mêmes erreurs que nous avons faites; alors polluez et émettez tout le CO2 que vous voulez. De notre côté, nous en émettrons aussi et nous achèterons des crédits de pollution afin de pouvoir polluer autant que vous. Tant que ces crédits coûtent moins cher que les mesures de réduction des émissions, nous continuerons de les acheter.

Comme nous le savons, les Américains et les Australiens ont dit qu'ils n'étaient pas intéressés, mais pas le Canada. Sous la gouverne des libéraux, le Canada est devenu un pays signataire. Bien évidemment, les libéraux n'avaient pas la moindre intention de respecter leurs engagements. En signant l'accord, ils ont pu bien paraître auprès des environnementalistes sans avoir à se soumettre à des obligations.

Selon moi, quand on fait une promesse à quelqu'un, à nos alliés ou à nos amis, on devrait avoir l'intention de la tenir. Les libéraux, eux, ont choisi d'être trompeurs. C'était là le premier plan des libéraux sur les changements climatiques. Nous verrons qu'ils ont adopté d'autres plans par la suite, mais le premier consistait à tromper.

(1600)

Eddie Goldenberg, qui a été chef de cabinet de l'ancien premier ministre Jean Chrétien, a récemment reconnu que le gouvernement libéral avait ratifié le Protocole de Kyoto tout en sachant que le Canada n'était pas prêt à prendre les difficiles mesures nécessaires pour combattre les changements climatiques et qu'il aurait probablement manqué son objectif de réduction des émissions. Il a ajouté que le gouvernement ne savait même pas à l'époque ce qu'il y avait à faire.

En août dernier, il y a donc moins d'un an, Stéphane Dion a dit au Globe and Mail que les libéraux avaient accepté les objectifs de Kyoto parce qu'ils étaient supérieurs à ceux que les États-Unis s'étaient fixés, et non parce qu'ils avaient un sens réel. D'après Dion, Jean Chrétien voulait simplement faire mieux que les Américains.

D'autres faits indiquent que les libéraux n'avaient nullement l'intention d'atteindre les objectifs de Kyoto. Ce mois-ci, l'ancienne ministre libérale de l'Environnement, Christine Stewart, a déclaré que les libéraux n'avaient fait que peu de cas des changements climatiques et n'avaient pas agi pendant dix ans. Elle a admis que les raisons étaient purement et simplement politiques. Le projet de loi C-288 n'est rien de moins que la preuve définitive qu'ils se livrent encore à des manœuvres politiques en prenant prétexte de l'environnement.

Les observations formulées en février par Mme Stewart ont été suivies de celles de David Anderson, ministre libéral de l'Environnement pendant cinq ans. M. Anderson a déclaré que Paul Martin lui a retiré son portefeuille, non parce qu'il n'avait pas fait son travail au sujet de Kyoto, mais, bien au contraire, parce qu'il y consacrait trop d'efforts.

D'après M. Anderson, Stéphane Dion a été choisi pour le remplacer parce qu'il se souciait beaucoup moins que lui de Kyoto. À titre de ministre des Affaires intergouvernementales, Stéphane Dion se souciait plus d'apaiser les provinces, dont la plupart étaient opposées à Kyoto, comme nous le savons tous. Il a ajouté que la nomination de Dion constituait un message indiquant à ces provinces que l'action fédérale serait moins énergique.

Voilà en quoi le plan libéral a toujours consisté : ne dresser aucun plan, mais parler très fort de la réalisation des objectifs, sans avoir vraiment l'intention de les atteindre. Par conséquent, lorsque notre ancienne ministre de l'Environnement, Rona Ambrose, a assisté à des réunions en Europe et a dit, honnêtement pour une fois, que le Canada ne serait pas en mesure d'honorer ses engagements en vertu du Protocole de Kyoto, le sénateur Mitchell et d'autres l'ont ridiculisée, en disant qu'elle ne faisait pas preuve de leadership dans le dossier de l'environnement.

Le sénateur Mitchell devait savoir ce qu'Eddie Goldenberg savait, que la signature du protocole n'était qu'une ruse et une cruelle plaisanterie faite sur le dos des Canadiens. Lorsque M. Dion était ministre de l'Environnement, il savait certainement que les objectifs de Kyoto ne seraient pas atteints. Les libéraux en ont certainement discuté dans leur caucus. Ou bien était-ce un secret du cabinet du premier ministre? Oh, Garth Turner, où donc êtes-vous quand nous avons besoin de vous? Les libéraux d'ici doivent des excuses à Rona Ambrose. Vous avez le droit de ne pas être d'accord avec elle, mais elle n'a été rien de moins qu'honnête. Son successeur, M. Baird, a continué d'être honnête et réaliste au sujet des défis que nous affrontons. Le budget de 2007 déposé cette semaine à l'autre endroit en témoigne. Il contient une foule de mesures visant l'environnement. Je n'en citerai que quelques-unes. Le budget affecte 1,5 milliard de dollars à l'écoFiducie Canada pour la qualité de l'air et les changements climatiques, qui financera de grands projets environnementaux de concert avec les provinces et les territoires. Il contient aussi l'engagement de prendre des mesures supplémentaires à l'appui des nouvelles technologies d'énergie propre, comme la capture et le stockage du carbone. Le budget prévoit en outre l'élimination progressive, d'ici 2015, de l'amortissement accéléré des investissements généraux dans les sables bitumineux.

Le budget de 2007 comprend également des mesures favorisant des transports propres, y compris 2 milliards de dollars supplémentaires sur sept ans pour appuyer la production de carburants renouvelables, dont 1,5 milliard pour encourager la production de biocarburants, tels que l'éthanol et le biodiésel, et 500 millions de dollars pour permettre à Technologies du développement durable Canada d'investir avec le secteur privé dans de grandes installations de production des carburants renouvelables de la prochaine génération. Le budget présente une structure d'incitatifs de promotion des véhicules éconergétiques qui permettra d'accorder des remises allant jusqu'à 2 000 $ à l'achat d'un véhicule neuf à grand rendement énergétique et d'imposer des prélèvements sur les véhicules énergivores neufs. Il prévoit en outre 36 millions de dollars sur deux ans pour les programmes de retrait de la route des vieux véhicules et il étend le crédit d'impôt pour le coût des laissez-passer de transport en commun aux produits innovateurs comme les cartes de passage électroniques et les laissez- passer hebdomadaires utilisés de façon continue.

Honorables sénateurs, tout cela et bien plus figure dans le budget de cette année. Le sénateur Mitchell dit, comme il l'a fait il y a quelques semaines, que les changements climatiques constituent l'un des défis les plus importants, sinon le plus important, auquel le pays doit faire face depuis 50 ans. Eh bien, voyons ce que les libéraux disaient à ce sujet aux dernières élections. Commençons en Alberta, province du sénateur Mitchell. Les honorables sénateurs seront intéressés d'apprendre que dans la section « Made in Alberta » de la plate-forme libérale de la dernière campagne électorale, le mot « Kyoto » est totalement absent. On n'y trouve aucune mention de Kyoto, pas même dans le chapitre sur l'environnement. Qu'en est-il du reste de la plate-forme? Les libéraux ont continué à se vanter de leurs réalisations environnementales, mais ont oublié de mentionner le fait que les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 27 p. 100 par rapport au niveau de base de 1990 pendant qu'ils étaient au gouvernement. Les libéraux seront heureux d'apprendre qu'au sud de la frontière, les émissions américaines de gaz à effet de serre n'ont augmenté que de 15,8 p. 100 pendant à peu près la même période.

Et en 2004? J'ai rapidement parcouru la plate-forme électorale libérale de cette année-là. Le mot « Kyoto » figure une seule fois dans un document de 58 pages. Ce n'est que vers la fin du texte qu'on mentionne, en passant, que le gouvernement libéral a ratifié le Protocole de Kyoto. Voilà l'urgence avec laquelle les libéraux traitaient la plus grande menace que le pays a connue depuis 50 ans.

Mais, honorables sénateurs, les libéraux avaient des plans. Oui, ils avaient des plans. Ils en avaient même beaucoup. Toutes leurs réalisations consistent en plans. Il y a le Plan d'action 2000, qui a été suivi par le Plan du Canada sur les changements climatiques en 2002, lui-même suivi en avril 2005 par Aller de l'avant pour contrer les changements climatiques, plus connu sous le nom de Plan vert, qui consistait en une ambitieuse stratégie de réduction des gaz à effet de serre, élaboré pendant que ces émissions continuaient à augmenter.

Heureusement, je n'ai pas eu à fouiller moi-même dans tous ces plans parce que la commissaire à l'environnement avait fait pour moi la plus grande partie du travail. Dans son rapport sur les réalisations environnementales libérales, publié en septembre dernier, elle présente un petit tableau récapitulatif des différents plans libéraux. Elle dit du Plan d'action 2000 qu'il s'agit d'une série de mesures visant des secteurs clés tels que le pétrole et le gaz, l'électricité thermique, les transports et les bâtiments, qui produisent ensemble plus de 90 p. 100 des émissions canadiennes.

Elle décrit ensuite le Plan du Canada sur les changements climatiques publié en 2002. Il était temps de passer à un nouveau plan, à la phase 2. Ce plan consistait en une approche en trois étapes visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 240 millions de tonnes. La première étape comprenait des mesures déjà en cours visant une réduction de 80 millions de tonnes. La deuxième prévoyait une autre réduction de 100 millions de tonnes grâce à des mesures couvrant sept secteurs clés. La troisième présentait des mesures futures concernant les 60 millions de tonnes restantes.

Maintenant que les libéraux avaient le champ libre, il était temps de passer à la troisième phase, le Projet vert. N'oublions pas qu'il ne s'est rien passé pendant tout ce temps. Le Projet vert était une approche axée sur le changement à long terme dans une perspective de croissance économique.

On respectait les engagements pris dans le cadre du Protocole de Kyoto — fin du chapitre. Sous le règne libéral, les émissions n'ont pas été réduites de 575 millions de tonnes, elles ont plutôt augmenté. En effet, en 2004, elles avaient augmenté de 27 p. 100 par rapport au niveau de 1990. Elles dépassaient de 35 p. 100 les cibles que le gouvernement s'était fixées dans le cadre du Protocole de Kyoto. De tous les pays qui avaient adhéré au Protocole de Kyoto, le Canada était un de ceux où les émissions avaient le plus augmenté. Pour reprendre la célèbre réplique de Michael Ignatieff, « Stéphane, nous n'y sommes pas parvenus ». Tout ce qu'ils ont fait, c'est une publicité à la télé pour le Défi d'une tonne.

Pourtant, les libéraux avaient d'autres plans. Permettez-moi de lire une citation que j'ai prise sur le site électoral des libéraux, sous la rubrique traitant des objectifs du Protocole de Kyoto :

Nous faisons face au changement climatique en favorisant la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) ainsi que le développement de technologies environnementales. Nous poursuivons sur la lancée des mesures fiscales existantes pour encourager les entreprises canadiennes à investir davantage dans la production d'énergie efficiente et renouvelable. Ensemble, ces efforts nous permettront de respecter les engagements que nous avons pris en vertu du Protocole de Kyoto en contribuant à réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 270 mégatonnes.

Promouvoir, encourager, aider. Je me demande si telles étaient les mesures timides auxquelles ils pensaient lorsqu'ils ont voté en faveur du projet de loi C-288. J'en doute, mais c'est exactement le type d'engagements insipides qu'ils ont pris lors de la dernière campagne électorale — sans parler de leur feuille de route sur l'environnement.

Jetons un coup d'œil à cette feuille de route — celle dont le sénateur Mitchell parle en termes on ne peut plus élogieux. Ma perspective n'est pas aussi claire et radieuse, bien évidemment. Je crains, pour ainsi dire, que ce ne soit qu'une chose de plus que les libéraux voudraient bien imputer aux changements climatiques.

(1610)

Permettez-moi de rappeler ce que le sénateur Mitchell a déclaré dans son intervention sur ce projet de loi. Tout d'abord, il s'est vigoureusement inscrit en faux contre l'idée largement répandue voulant que les libéraux ont eu 13 ans pour faire quelque chose, mais n'ont rien fait. Il a fait une correction, soulignant qu'il ne s'était écoulé que huit ans. Kyoto n'a été approuvé qu'en 1997 et n'a été ratifié qu'en 2005. Donc, il ne leur a fallu que huit ans pour ne rien faire.

Il y a diverses observations que je pourrais formuler ici. Il est certain, par exemple, que les changements climatiques ont commencé avant Kyoto. Les libéraux ont besoin d'une permission internationale avant de s'attaquer, et permettez-moi de reprendre les termes même du sénateur Mitchell, au « problème le plus important ou [à] l'un des plus importants qui se soient posés au Canada au cours des 50 dernières années ».

Ces années où il ne s'est rien fait sous la gouverne des libéraux n'ont pas été des années gaspillées, a-t-il dit. Le Plan vert libéral, le Projet vert dont on a parlé plus tôt, représentait une énorme initiative stratégique, et il a fallu déployer de grands efforts pour le structurer comme il convient.

Allez dire cela à la commissaire à l'environnement, qui a vu d'un autre œil ce soi-disant grand effort des libéraux. Je cite :

Le Canada a adopté le Protocole de Kyoto en 1997. Nous nous attendions à ce que le gouvernement fédéral ait effectué des analyses économiques, sociales et environnementales, ainsi que des analyses de risques afin d'appuyer sa décision de signer le Protocole de Kyoto...

Dommage que madame le sénateur Ringuette ne soit pas présente. Je poursuis :

... avant d'adopter ce que le gouvernement du Canada considère maintenant comme la cible de réduction des émissions la plus exigeante de toutes celles des pays signataires de Kyoto. En ce qui concerne cette cible, nous avons constaté que l'analyse économique n'était pas très avancée et que le gouvernement était incapable de démontrer qu'il avait fait des analyses détaillées sur le plan social, environnemental ou des risques.

Pas étonnant que tous ces plans antérieurs n'aient pas abouti. Et pourtant, le résultat final de ce « grand effort » qui, selon le parrain de ce projet de loi, s'est étalé sur près de sept ans, plus huit mois sous la direction de Stéphane Dion, fut le Projet vert, le plan pour l'avenir qu'ils n'ont jamais eu l'occasion de mettre en œuvre.

Je crois qu'il vaut la peine d'examiner le Projet vert d'un peu plus près parce que ces dispositions diffèrent passablement de celles que l'on retrouve dans le projet de loi C-288.

Le Projet vert propose un partenariat entre les divers niveaux de gouvernement fédéral, provinciaux et municipaux, alors que le projet de loi C-288 fait peu de place à ce genre de partenariat. Il impose une obligation légale au gouvernement fédéral et l'enjoint de respecter ses obligations aux termes de l'article 3, paragraphe 1, du Protocole de Kyoto et de mettre au point un plan à cet égard dans les 60 jours suivant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi et au plus tard le 31 mai.

Qu'a-t-on fait de la période de temps prévue pour la consultation auprès des autres ordres de gouvernement que les libéraux avaient considérée comme essentielle dans le Projet vert? Où cela est-il prévu dans le projet de loi C-288?

Que dire des répercussions que cela entraînera sur l'économie? Permettez-moi de citer le Projet vert :

Le gouvernement du Canada a la ferme intention d'apporter les changements nécessaires à long terme pour réduire les émissions de GES tout en assurant une croissance économique soutenue. Nous sommes d'avis que cette transformation nous permettra d'atteindre notre cible de Kyoto, tout en assurant la productivité et la croissance de notre économie.

Alors que le Projet vert permettait aux libéraux de tenir compte des facteurs économiques à l'égard du respect des objectifs de Kyoto, le projet de loi C-288 ne prévoit rien de tel. Il ne tient pas compte des répercussions économiques liées à l'atteinte des objectifs de Kyoto à cette étape-ci. Pourtant, nous savons combien dévastatrices ces répercussions pourraient être pour l'économie canadienne.

Ce projet de loi ne laisse aucune flexibilité au gouvernement conservateur à cet égard, alors que le Projet vert reconnaissait explicitement la nécessité d'une telle flexibilité. Permettez-moi de lire un autre passage de ce document :

Nous atteindrons notre cible de Kyoto si nous prenons en compte que le défi ainsi lancé au Canada est fonction de nombreuses variables, comme la croissance économique et les prix de l'énergie, qu'il est possible d'estimer, mais impossible de prévoir avec certitude... Nous mobiliserons en outre les provinces et les territoires, les peuples autochtones, les municipalités, l'industrie, les organisations non gouvernementales et tous les Canadiens dans la mise en œuvre de ce nouveau plan de façon à maximiser les chances de réussite et à tenir compte à la fois de l'apport du public, des leçons apprises et des résultats obtenus.

Honorables sénateurs, le Projet vert ne renferme aucun engagement à l'égard des objectifs à court terme du Protocole de Kyoto aussi impérieux que ceux qui sont prévus dans le projet de loi C-288. Il n'oblige le Parti libéral à rien d'autre qu'à mobiliser les Canadiens dans un effort national en vue de permettre au Canada de respecter à court terme ses engagements à l'égard du Protocole de Kyoto.

J'ai rarement vu quelque chose rédigé d'une manière aussi obscure; c'est très différent de l'article 7 du projet de loi C-288, qui exigerait que le gouverneur en conseil, dans les 180 jours suivant l'entrée en vigueur de la loi et en tout temps par la suite, veille à ce que le Canada honore pleinement les engagements qu'il a pris en vertu de l'article 3, paragraphe 1, du Protocole de Kyoto. Aucun des rivaux de M. Dion dans la course à la direction du Parti libéral n'a osé prendre des engagements aussi rigoureux relativement au Protocole de Kyoto.

Gerard Kennedy a déclaré que le gouvernement devait réaffirmer ses objectifs en vertu du Protocole de Kyoto ou de tout autre traité ultérieur en matière de changements climatiques. La dernière partie de sa proposition m'apparaît un peu insouciante, mais cela n'est pas du tout un engagement obligatoire.

M. Dion lui-même, pendant la course à la direction du Parti libéral, a compromis le projet de loi C-288 à l'avance. Dans son programme, dans la section sur le Protocole de Kyoto, il affirmait ceci : si les mesures proposées dans cet énoncé de politique entraient en vigueur d'ici au début 2007, le Canada pourrait atteindre ses objectifs de Kyoto pour la période se terminant en 2012.

Eh bien, étant donné que le projet de loi n'a pas encore été renvoyé à un comité sénatorial et qu'il donne au gouvernement 60 jours après l'entrée en vigueur de la loi pour dresser un plan et 180 jours pour le mettre en œuvre, je me pose la question suivante : comment les partisans de ce projet de loi peuvent-ils espérer que le gouvernement conservateur accomplisse ce que le chef libéral a reconnu ne pas pouvoir faire s'il ne commençait pas dès le début de 2007?

M. Dion a également écrit dans son énoncé de politique qu'une année d'inactivité de plus rendrait pratiquement impossible l'atteinte des objectifs à temps. Or, le projet de loi C-288 nous oblige à respecter ces engagements quoi qu'il arrive.

Parlons de l'homme que le sénateur Mitchell appuyait dans la course à la direction, Michael Ignatieff. Durant la course, M. Ignatieff a fait vive impression lorsqu'il a parlé d'une taxe sur les émissions carboniques qui, j'en suis sûr, recueille l'appui du sénateur Mitchell. M. Ignatieff a également déclaré qu'il fallait continuer à souscrire au Protocole de Kyoto, mais il n'a formulé aucun engagement pour atteindre les objectifs à court terme. Il a plutôt soutenu qu'il fallait mettre en œuvre de bonnes politiques environnementales graduellement en suivant le rythme normal des nouveaux investissements.

Je suis convaincu que le sénateur Smith serait d'accord.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-288 imposerait au gouvernement un programme que les libéraux eux-mêmes ne pourraient pas respecter, des objectifs qu'ils ont admis qu'ils ne pourraient pas respecter. Même le nouveau chef du parti, Stéphane Dion, dernier ministre libéral de l'Environnement, l'a admis. J'aimerais citer un article paru dans le National Post le 1er juillet 2006. Cet article s'intitulait : « Dion affirme qu'on ne peut pas atteindre les objectifs ». L'article déclarait que Stéphane Dion avait reconnu qu'un futur gouvernement libéral ne serait pas en mesure de remplir ses engagements en vertu du Protocole de Kyoto consistant à réduire les émissions de gaz à effet de serre en deçà des niveaux de 1990. Selon l'article, M. Dion aurait déclaré ceci :

En 2008, je continuerai d'appuyer le Protocole de Kyoto, mais je dirai au monde que je ne crois pas que le Canada puisse atteindre ses objectifs. Tout le monde parle constamment des objectifs, mais il s'agit de bien plus que de simples objectifs. Il s'agit de changer l'économie. Il faut accroître la productivité des ressources, l'efficacité énergétique, alors que nous savons que l'énergie sera la cause de la prochaine crise économique dans le monde.

M. Dion s'est trompé seulement sur un point. En 2008, il ne sera pas en mesure d'appuyer le Protocole de Kyoto.

Les libéraux font beaucoup de tapage autour de la réalisation des objectifs de Kyoto depuis qu'ils n'ont ni le pouvoir ni la responsabilité de les atteindre et depuis qu'ils savent que c'est quelqu'un d'autre, et non eux, qui devra payer le prix rattaché à ces objectifs inatteignables de l'aveu même de leur chef.

Honorables sénateurs, compte tenu du bilan libéral dans le domaine environnemental, le projet de loi C-288 est l'un des plus hypocrites et des plus cyniques que j'ai vus de toute ma carrière de sénateur. Ce projet de loi a pour but d'obliger le gouvernement à adopter des mesures déraisonnables, inacceptables et anticonstitutionnelles pour que le Canada puisse atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre qui lui ont été fixés dans le Protocole de Kyoto, objectifs qui prévoient une réduction de 6 p. 100 d'ici 2012 par rapport aux émissions de 1990 et qui, selon le chef libéral, sont inatteignables. Comme je l'ai dit tout à l'heure, ces objectifs ont été établis pour couper l'herbe sous le pied des Américains.

(1620)

Voilà qui n'est pas vraiment étonnant, compte tenu du penchant des libéraux pour l'antiaméricanisme primaire. Mais, c'est un bien mauvais point de départ pour élaborer une politique environnementale judicieuse, à moins bien entendu qu'on n'ait aucunement l'intention de mettre en œuvre cette politique comme le prévoyaient exactement les libéraux, ce qui est de plus en plus évident. Les libéraux veulent maintenant forcer la main du gouvernement pour qu'il fasse ce qu'ils ne feraient pas eux-mêmes. La situation s'est même détériorée pendant que les libéraux étaient au pouvoir. Avec ce mauvais projet de loi, ils veulent maintenant nous obliger à faire le travail.

Je ne nie pas l'existence des changements climatiques, mais comme l'ont fait remarquer l'an dernier 60 scientifiques du monde entier, tous des experts des changements climatiques, des phénomènes naturels causent constamment de tels changements. Il demeure impossible de distinguer les effets de l'activité humaine des autres effets. Voilà pour le prétendu consensus international sur les changements climatiques.

Aspect encore plus important, certains scientifiques ne souscrivent pas au rapport récent dont on a fait si grand cas du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat de l'ONU, le GIEC. De fait, il s'agissait du résumé du rapport et un autre rapport sera présenté à l'automne. Ce rapport n'a apparemment pas réglé toutes les divergences.

Prenons le cas de Mario Molina, prix Nobel de science qui, il y a 30 ans, a participé à la découverte du lien entre la pollution et l'amincissement de la couche d'ozone. Quelle a donc été sa découverte la plus récente? Il a constaté que ce n'était pas le réchauffement climatique qui expliquait l'augmentation récente en nombre et en intensité des tempêtes sur la côte Ouest, mais plutôt les particules de suie dans l'atmosphère, qui proviennent d'usines en Chine et en Inde, ces mêmes pays qui ne sont pas tenus de respecter le Protocole de Kyoto.

L'idée même d'un projet de loi d'initiative parlementaire qui oblige le gouvernement à mettre en œuvre un programme coûteux comme celui qui est proposé va tout à fait à l'encontre de la notion de gouvernement responsable. J'invite tous les sénateurs à voter contre ce projet de loi et contre tout autre projet de loi du même genre. J'aimerais proposer un amendement, du fait que ce projet de loi est si inhabituel et si douteux sur le plan constitutionnel.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable David Tkachuk : Par conséquent, honorables sénateurs, je propose, avec l'appui de l'honorable sénateur Comeau :

Que le projet de loi C-288 ne soit pas maintenant lu pour la deuxième fois, mais que la teneur du projet de loi soit renvoyée simultanément au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et au Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles;

Que les comités fassent rapport au plus tard le 31 décembre 2007;

Que l'ordre pour la reprise du débat sur la motion portant deuxième lecture du projet de loi n'apparaisse pas au Feuilleton et au Feuilleton des Avis jusqu'à ce que les deux comités aient fait rapport sur la teneur du projet de loi.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, je vais prendre en délibéré l'amendement que le sénateur Tkachuk vient tout juste de proposer. Je dois me dire tout aussi sceptique concernant cet amendement que je l'ai été plus tôt aujourd'hui au sujet de l'amendement à un autre projet de loi qu'a proposé le sénateur Joyal, et ce pour la même raison.

Mon honorable collègue, le sénateur Tkachuk, après avoir dénoncé sans ménagement le projet de loi, au lieu d'annoncer tout simplement son intention et celle de ses collègues de voter contre le projet de loi, a proposé de faire étudier la teneur du projet de loi par non pas un, mais deux comités.

J'aimerais faire valoir, à propos du projet de loi dans son ensemble, un point qui va dans le sens de ce que j'ai déclaré plus tôt aujourd'hui, lorsque je me suis opposé à un autre projet de loi. Cela va tout à fait à l'encontre de notre système de gouvernement responsable. Je veux préciser ma pensée sur ce point et en saisir le Sénat. Je vais cependant proposer l'ajournement du débat parce qu'il est tard, même s'il n'est pas encore l'heure d'aller me coucher.

(Sur la motion du sénateur Murray, le débat est ajourné.)

(1630)

LE SÉNAT ÉLU

LE MODÈLE PROPOSÉ—INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Hays, attirant l'attention du Sénat sur la question de l'élaboration d'un modèle de Sénat élu moderne, telle que soulevée dans le premier rapport du Comité sénatorial spécial sur la réforme du Sénat.—(L'honorable sénateur Tkachuk)

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, cette interpellation en est au quinzième jour, et il m'est impossible d'y rendre justice maintenant. J'ai relu les observations savantes et réfléchies faites par le sénateur Hays au moment où il a saisi le Sénat de cette interpellation, et j'estime qu'il est important pour nous de discuter de la question non seulement parce qu'il y a, comme nous le savons, un projet de loi à la Chambre des communes qui préconise l'élection des sénateurs, sans oser l'appeler ainsi, mais encore parce que, comme nous le savons aussi, le Sénat participe depuis quelques mois déjà à l'étude de deux mesures qui modifieraient de façon marquée la nature du Sénat. Plus j'étudie ces propositions, plus je me rends compte à quel point il est important pour nous tous d'examiner quels seraient les effets des changements proposés à l'institution du Sénat que nous chérissons tous, dans la mesure où nous pouvons les prévoir.

J'ai assisté ce matin à une séance du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles durant laquelle un expert, parlant de la Chambre des lords, a fait remarquer que personne ne comprend mieux la Chambre des lords que les lords eux-mêmes. Je pense que c'est encore plus vrai pour le Sénat. Si nous n'étudions pas ces questions de la manière la plus réfléchie possible, je me demande bien qui pourra le faire.

Honorables sénateurs, je propose l'ajournement du débat pour le reste de mon temps de parole.

(Sur la motion du sénateur Fraser, le débat est ajourné.)

[Français]

L'AJOURNEMENT

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement :

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose :

Que, lorsque le Sénat s'ajournera le jeudi 22 mars 2007, il demeure ajourné jusqu'au lundi 26 mars 2007, à 18 heures.

Son Honneur le Président suppléant : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

ÉNERGIE, ENVIRONNEMENT ET RESSOURCES NATURELLES

AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DE PRÉSENTATION DE SON RAPPORT FINAL SUR L'EXAMEN DE LA LOI CANADIENNE SUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT

L'honorable Tommy Banks, conformément à l'avis du 20 mars 2007, propose :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 27 septembre 2006, la date pour la présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles sur l'examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999, chap. 33) conformément à l'article 343(1) de ladite loi soit reportée du 31 mars 2007 au 31 octobre 2007.

— Honorables sénateurs, la motion inscrite à mon nom n'a pas besoin d'explication. Elle concerne le temps qui nous sera nécessaire pour compléter le travail important qui nous a été confié.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

AGRICULTURE ET FORÊTS

AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DU DÉPÔT DE SON RAPPORT FINAL SUR L'ÉTAT ACTUEL ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE L'AGRICULTURE ET DES FORÊTS

L'honorable Joyce Fairbairn, conformément à l'avis du 21 mars 2007, propose :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 26 avril 2006, la date pour la présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts sur l'état actuel et les perspectives d'avenir de l'agriculture et des forêts au Canada soit reportée du 31 mars 2007 au 31 mars 2008.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DE LA PRÉSENTATION DE SON RAPPORT FINAL SUR LA PAUVRETÉ RURALE

L'honorable Joyce Fairbairn, conformément à l'avis du 21 mars 2007, propose :

Que, par dérogation à l'ordre adopté par le Sénat le 16 mai 2006, la date pour la présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts sur la pauvreté rurale au Canada soit reportée du 30 avril 2007 au 31 décembre 2007.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

[Français]

LANGUES OFFICIELLES

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Maria Chaput, conformément à l'avis du 22 mars 2007, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles soit autorisé à siéger à 16 heures, le lundi 26 mars 2007, même si le Sénat siège à ce moment-là et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au lundi 26 mars 2007, à 18 heures.)


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