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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 86

Le mercredi 18 avril 2007
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 18 avril 2007

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LA CONFÉRENCE CANADIENNE ANNUELLE SUR LES DÉLAIS D'ATTENTE

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, les 4 et 5 avril, j'ai assisté à la conférence canadienne sur les délais d'attente dont le thème était Maîtriser les files d'attente. C'était la quatrième conférence annuelle du genre et elle a été très intéressante. En plus de nous informer sur l'expérience pancanadienne, nous avons pu obtenir des renseignements à jour sur ce qui se passe dans les services de santé au Royaume-Uni, en Suède, en Australie et en Nouvelle-Zélande.

J'ai été impressionné de voir que les discussions étaient différentes de celles que nous avons eues lors des trois premières conférences. Auparavant, il y avait beaucoup de discussions sur la question de savoir si nous pourrions fixer et respecter des délais d'attente acceptables pour les traitements médicaux. Cette fois-ci, les discussions ont plutôt porté sur la manière d'y parvenir. Comment des pays progressistes peuvent-ils en apprendre les uns des autres et comment les provinces et les territoires peuvent-ils en apprendre aussi les uns des autres?

(1335)

À la pause du midi, le premier ministre a prononcé une allocation où il a reconnu le travail du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, dont le président était le sénateur Kirby et la vice-présidente le sénateur LeBreton, lorsqu'il avait recommandé l'adoption de délais garantis pour l'obtention des soins.

Le premier ministre a annoncé que toutes les provinces avaient signifié leur participation à l'initiative du gouvernement fédéral et que le ministre Clement avait réussi à s'entendre avec chacune sur une manière de travailler.

Le plus gratifiant de la rencontre a été le fait que des progrès considérables ont été faits sur les garanties de délais, particulièrement depuis que le gouvernement fédéral a pris un engagement envers ces garanties. Plusieurs provinces ont déjà atteint ou dépassé les délais cibles dans les traitements du cancer et des maladies cardiaques. D'énormes progrès ont été faits dans le traitement chirurgical des cataractes et dans les traitements d'orthopédie. Une autre édition de la conférence aura lieu l'an prochain, sous la direction de l'Association médicale canadienne et des neuf autres associations qui parrainent l'événement. Nous attendons avec impatience de constater d'autres progrès encourageants.

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, la Semaine nationale de l'action bénévole a lieu au Canada du 15 au 21 avril. L'événement constitue la célébration annuelle de l'enthousiasme et de l'engagement des bénévoles du Canada. La Semaine nationale de l'action bénévole a été établie en 1943 en hommage à l'apport des femmes durant la Seconde Guerre mondiale. Même si, au fil des années, la célébration a pris de l'ampleur, elle maintient toujours sa vision d'origine, celle de reconnaître les personnes qui, de façon désintéressée, offrent leur temps et leurs services aux autres.

Le thème de cette année, « Les bénévoles font grandir la communauté », nous rappelle une grande vérité. Les bénévoles jouent en effet un rôle essentiel dans nos communautés. Ils enrichissent nos vies et assurent la concrétisation d'un grand nombre de programmes et de services. De fait, environ 12 millions de Canadiens mettent leur temps et leur énergie au service des autres d'une façon ou d'une autre. Pour le Canada dans son ensemble, ces personnes dévouées contribuent chaque année 2 milliards d'heures de bénévolat.

Aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à un groupe tout particulier de bénévoles de ma province. Il y a deux semaines, l'Île-du-Prince- Édouard présentait pour la quatrième année le prix du bénévole de l'Île-du-Prince-Édouard à huit habitants de l'île dont le dévouement est exemplaire. On a présenté des prix individuels à Garnet Buell, de Murray River, Rikki Schock, de South Pinette, Almeda Thibodeau, de Fortune Cove et Gladys Dirani, Judy MacLean et Ken Roper, tous de Charlottetown. Un prix conjoint a également été présenté à Tonya Gray et Shelley Morrison, toutes deux de Charlottetown.

Ces habitants de l'Île-du-Prince-Édouard ont beaucoup donné d'eux-mêmes à leur communauté et à leur province. Je tiens à les féliciter chaleureusement et à les remercier.

Je souhaite également remercier tous les autres bénévoles de l'ensemble du pays de leur engagement, de leur générosité et de leur ardeur au travail. Chaque bénévole apporte quelque chose d'important aux autres. Nous bénéficions tous de l'action des bénévoles.

Honorables sénateurs, je vous prie de vous joindre à moi aujourd'hui pour reconnaître l'ardeur au travail et le dévouement des bénévoles du Canada, leur apport à leur communauté et à leur pays, du fait qu'ils partagent leur temps, leurs talents et leur enthousiasme. Les bénévoles font véritablement grandir la communauté.

LE DÉCÈS DE RONALD J. HANSON

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, le vendredi 23 mars 2007, la ville de Halifax a perdu l'un de ses fils les plus respectés et les plus dévoués, Ronald J. Hanson. Surnommé affectueusement « Butch » par ses proches, il a travaillé durant 33 ans pour Maritime Tel & Tel

avant de prendre sa retraite en 1990. Élu conseiller municipal du Quartier 8 en 1974, il a continué à servir ses électeurs et la ville de façon désintéressée jusqu'en 1999, année où la maladie l'a obligé à donner sa démission.

Au cours de ces 25 dernières années, il a également été adjoint au maire et maire suppléant de sa ville d'origine. Athlète doué, surtout pour le hockey et le baseball, il a en outre été entraîneur d'équipes de hockey mineur. Sa tâche favorite au sein du conseil municipal a sans doute été celle de siéger au comité des directeurs fondateurs du Halifax Metro Centre, où il était l'un des deux seuls conseillers municipaux. Étant lui-même un grand sportif, il comprenait la nécessité et la valeur de ces installations. En tant que conseiller tourné vers l'avenir, il avait prédit les avantages économiques qu'un centre comme celui-là représenterait pour sa ville.

Ron Hanson était un homme de foi qui affichait de solides valeurs familiales et une profonde générosité envers sa collectivité. Lui et son épouse, Sandra, formaient une véritable équipe. Nous offrons nos plus sincères condoléances à Sandra ainsi qu'à leurs enfants, Pam, Krista, Ron, Scott et Shawn, et nous les remercions d'avoir partagé « Butch » avec nous. Ronald Hanson était un camarade de jeunesse, et il manquera à une foule d'amis.

(1340)

L'HONORABLE DR WILBERT J. KEON, O.C.

INTRONISATION AU TEMPLE DE LA RENOMMÉE MÉDICALE CANADIENNE

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à l'un des nôtres. Le 1er mars 2007, le Temple de la renommée médicale canadienne a annoncé l'intronisation de cinq nouveaux lauréats, parmi lesquels figure l'un de nos collègues, Wilbert J. Keon. Il vaut la peine de citer tout ce que le Temple de la renommée avait à dire au sujet du sénateur Keon dans son communiqué. Je cite :

Comme chef de file charismatique, chirurgien, éducateur, chercheur et, plus récemment, sénateur, le Dr Keon est connu tant au Canada qu'à l'étranger pour son travail en cardiologie et en chirurgie cardiaque. Clairement un bâtisseur, le Dr Keon a transformé un rêve méconnu en une magnifique réalité en fondant l'Institut de cardiologie de l'Université d'Ottawa. Dès le début sous sa direction, ce centre de cardiologie hyperspécialisé a consacré 50 p. 100 de ses locaux à la recherche et à des découvertes qui ont contribué à la prévention et au traitement modernes de la coronaropathie. Le Dr Keon a reçu de nombreuses distinctions et il est aussi officier de l'Ordre du Canada (1984).

Je pense que cela résume bien ses réalisations, mais j'aimerais ajouter qu'il existe probablement peu de professionnels plus respectés dans notre société que les médecins et, parmi eux, aucun ne l'est davantage qu'un cardiochirurgien. Même en cette auguste compagnie, le sénateur Keon est depuis longtemps considéré comme l'un des médecins praticiens les plus éminents du monde. Son comportement calme et sobre dissimule le fait que c'est un homme dont les réalisations hors du commun inspirent la plus grande admiration. Il n'est donc pas étonnant qu'on accorde tant de poids à son opinion sur les questions relatives à la santé au Canada. Je demanderais aux sénateurs de se joindre à moi pour féliciter le Dr Keon.

Des voix : Bravo!

LA SASKATCHEWAN

L'UNIVERSITÉ DE LA SASKATCHEWAN—LE PROGRAMME DE GESTION DES RESSOURCES DES AUTOCHTONES

L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, le 28 mars 2007, 23 étudiants du nouveau Programme de gestion des ressources des Autochtones ont reçu leur diplôme dans la salle des facultés de l'Université de la Saskatchewan, où se tenait la cérémonie de collation des grades. Ce programme a été conçu et mis en œuvre par le collège d'agriculture et de ressources biologiques en collaboration avec l'Association nationale des gestionnaires des terres autochtones et grâce à des fonds fournis par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Lors de cette cérémonie, Peter MacKinnon, président de l'Université de la Saskatchewan, a souligné dans son discours que ces étudiants étaient les premiers diplômés du programme et qu'ils étaient également les premiers finissants de l'université cette année, année qui marque le centenaire de l'institution. Il a aussi précisé que le Programme de gestion des ressources des Autochtones est le premier du genre.

Mme Marilyn Poitras, directrice du programme en question, dit que ce dernier attire des étudiants de partout au Canada, sept des dix provinces étant représentées dans la première cohorte de diplômés. Cette année marque l'entrée de l'Université de la Saskatchewan sur la scène internationale comme leader, ayant été le premier établissement à valider cette profession par l'élaboration d'un programme de formation.

(1345)

Le programme permet aux gestionnaires des terres d'acquérir une formation de niveau universitaire afin d'examiner les aspects environnementaux, juridiques et économiques fondamentaux de la gestion des terres et des ressources.

Les diplômés proviennent de divers horizons. On retrouvait parmi ces représentants des Premières nations de partout au pays des personnes commençant leur carrière dans le domaine de la gestion des terres et d'autres qui avaient 30 ans d'expérience. Le programme a posé un défi particulier aux étudiants, car il les obligeait à gérer leurs emplois à temps plein et leurs responsabilités familiales en même temps que les exigences liées à leurs études.

Le Programme de gestion des ressources des Autochtones a été structuré sur le modèle d'un programme de formation de cadres supérieurs. Pour satisfaire aux exigences du programme, les étudiants ont dû se rendre au campus de l'Université de la Saskatchewan à trois occasions distinctes sur une période de huit mois. Chaque séjour sur le campus comportait deux semaines intensives de conférences et de travaux en laboratoire et sur le terrain. À leur retour à la maison, les étudiants avaient à effectuer, chaque fois, huit semaines de travaux de suivi.

Les étudiants qui ont réussi le programme ont reçu un certificat de compétence après l'achèvement des six cours obligatoires. Il y aura du nouveau l'an prochain. En effet, un partenariat avec l'Université Laval permettra d'offrir ce programme en français.

Le Programme de gestion des ressources des Autochtones accorde une reconnaissance à une profession chez les Premières nations qui est tout aussi vieille que l'existence humaine et qui traduit l'importance pour tous les Canadiens des questions liées aux ressources environnementales.

Honorables sénateurs, en guise de conclusion, je vous demanderais de vous joindre à moi pour féliciter les premiers diplômés du Programme de gestion des ressources des Autochtones, ainsi que l'Université de la Saskatchewan, qui est la première à offrir cet important programme donnant droit à un certificat.

LA CHARTE DES DROITS ET LIBERTÉS

LE VINGT-CINQUIÈME ANNIVERSAIRE

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, les Canadiens célébraient hier le vingt-cinquième anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés.

La Charte est un document précieux et une source de fierté pour tous les Canadiens, car elle représente davantage que des mots sur un bout de papier. Ce document vivant a grandi ces 25 dernières années et s'applique maintenant à des segments de la population qui, sinon, seraient peut-être passés au travers des mailles du filet. Il protège nos droits juridiques et démocratiques, ainsi que les droits de nos collectivités linguistiques minoritaires.

Avec l'aide de la Charte, nous avons pu protéger les gais et les lesbiennes du Canada contre la violence et la discrimination et veiller à ce qu'ils aient droit à tous les avantages accordés aux conjoints. Les sikhs ont pu remporter leur bataille pour être autorisés à servir comme membres de la Gendarmerie royale du Canada sans devoir abandonner leurs vêtements religieux. Les collectivités de langue française ont pu se battre pour faire reconnaître leurs droits et elles ont remporté la lutte pour que l'Hôpital Montfort, à Ottawa, continue de desservir ces collectivités.

Or, même au moment où nous songeons aux progrès que nous avons accomplis, cet anniversaire important devrait nous rappeler qu'il reste encore beaucoup à faire. Nous ne saurions tenir la Charte pour acquise. Les Canadiens et le gouvernement canadien doivent demeurer actifs afin que nous puissions accomplir davantage et prévenir l'érosion de nos droits actuels.

Pour que la Charte continue d'évoluer et de croître, le nouveau gouvernement canadien doit continuer de fournir les ressources permettant de la protéger et de la préserver. Le Programme de contestation judiciaire, qui offrait aux Canadiens les ressources nécessaires pour défendre leurs droits constitutionnels devant les tribunaux, constituait un élément important de cette protection, jusqu'à ce que le nouveau gouvernement canadien l'abolisse.

J'exhorte le nouveau gouvernement du Canada à écouter les Canadiens qui veulent toujours faire partie intégrante de notre collectivité, à défendre la Charte canadienne des droits et libertés et à rétablir immédiatement ces programmes. Alors seulement pourrons-nous assurer l'évolution de nos droits et faire en sorte que notre Charte soit plus que des mots sur un bout de papier.

Honorables sénateurs, la Charte est un document porteur d'espoir pour tous les Canadiens. Au lendemain du 11 septembre, les Canadiens savaient que le gouvernement et les autorités ne pourraient pas enfreindre leurs droits. La Charte n'est pas un document du passé qui doit être déposé dans les archives. Il s'agit pour tous les Canadiens d'un symbole d'espoir pour la protection de leurs droits dans l'avenir.


(1350)

AFFAIRES COURANTES

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

PRÉSENTATION DU QUATRIÈME RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Consiglio Di Nino, président du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, présente le rapport suivant :

Le mercredi 18 avril 2007

Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement a l'honneur de présenter son

QUATRIÈME RAPPORT

Conformément au sous-alinéa 86(1)f)(i) du Règlement, le Comité est heureux de présenter le rapport suivant :

1. Dans une décision rendue le 26 octobre 2006 portant sur les exigences applicables aux avis de questions de privilège, le Président relevait trois aspects des procédures du Sénat qui pourraient être clarifiés. Premièrement, il examinait la mesure dans laquelle les avis de questions de privilège présentés oralement et par écrit en vertu de l'article 43 devaient être détaillés et concluait que l'avis devait indiquer clairement l'objet de la question de privilège. Deuxièmement, le Président invitait le Comité à examiner le manque d'uniformité qui semble exister entre l'article 43 et le paragraphe 59(10) du Règlement étant donné que ces deux dispositions portent sur l'avis requis pour les questions de privilège. Troisièmement, le Président invitait le Comité à envisager des moyens de marquer plus clairement le début et la fin des affaires courantes étant donné qu'aux termes du paragraphe 23(1) du Règlement, les questions de privilège ou les rappels au Règlement sont irrecevables à l'étape des affaires courantes ou durant la période des questions.

2. Le 20 mars 2007, le Comité a entendu M. Charles Robert, greffier principal de la Chambre et de la Procédure au Sénat du Canada.

3. Après avoir pris en considération la décision du Président et après avoir examiné la question, le Comité croit que les modifications suivantes devraient être apportées au Règlement du Sénat :

  • En ce qui concerne l'avis écrit que doit donner un sénateur qui veut soulever une question de privilège, le Comité reconnaît que cet avis devrait contenir suffisamment de détails pour que les sénateurs aient une idée de la nature générale de la question qui sera soulevée. Par conséquent, des modifications sont proposées aux paragraphes 43(3), (4) et (7).
  • Aux termes du paragraphe 59(10) du Règlement, une question de privilège peut être soulevée sans préavis. Comme le Président l'a expliqué, ce paragraphe se rattache aux dispositions du Règlement du Sénat d'avant 1991 et aurait dû être revu par suite des modifications adoptées à ce moment-là. Il faudrait conserver l'idée à la source du paragraphe 59(10) du Règlement afin de permettre que les points qui surviennent au cours d'une séance du Sénat puissent être abordés. Néanmoins, le Comité estime qu'il serait bon de déplacer cette disposition, de la rattacher plus directement aux autres dispositions portant sur les questions de privilège et d'indiquer clairement le lien entre ces différentes dispositions. Par conséquent, un nouvel article 43 du Règlement du Sénat est proposé.
  • Dans la décision qu'il a rendue en octobre 2006, le Président déclarait que, conformément au paragraphe 23(1) du Règlement, les rappels au Règlement ou les questions de privilège sont irrecevables à l'étape des affaires courantes ou durant la période des questions. Or, un examen attentif du paragraphe 23(6) du Règlement révèle que les déclarations de sénateurs ne font pas partie, en fait, des affaires courantes. En effet, cette disposition précise que l'appel des affaires courantes suit les déclarations de sénateurs. L'idée, derrière cette disposition du Règlement, est de faire en sorte de ne pas interrompre les travaux du Sénat qui se déroulent au début de la séance à l'intérieur d'une période limitée. Le Comité estime que l'interdiction d'invoquer le Règlement devrait s'appliquer également aux déclarations de sénateurs, et une modification du Règlement à cet égard est proposée.

4. Les modifications proposées entraînent un certain nombre de modifications corrélatives au Règlement du Sénat.

Le Comité recommande que le Règlement du Sénat soit modifié comme suit :

(1) Que le paragraphe 23(1) du Règlement soit remplacé par ce qui suit :

Recevabilité des questions de privilège et des rappels au Règlement

23. (1) Au cours des délibérations du Sénat qui se tiennent avant de passer à l'ordre du jour — y compris les déclarations de sénateurs, les affaires courantes, la période des questions et les réponses différées —, les rappels au Règlement sont irrecevables. Tout rappel au Règlement concernant les délibérations doit être soulevé soit au moment où le Président annonce l'ordre du jour, soit en ce qui concerne un avis donné au cours de l'étude des affaires courantes, au moment où le sujet inscrit à l'ordre du jour est abordé pour examen par le Sénat.

(2) Que les paragraphes 43(3), (4), (7) et (10) soient remplacés par ce qui suit :

Avis écrit

(3) Sous réserve du paragraphe (3.1) ci-dessous, un sénateur qui veut soulever une question de privilège en donne, au moins trois heures avant que le Sénat ne se réunisse, un préavis par écrit au greffier du Sénat identifiant clairement le sujet qui sera soulevé à titre de question de privilège.

Exception — Délibérations en Chambre

(3.1) Dans le cas d'une question de privilège fondée sur des travaux qui se déroulent dans la salle du Sénat au cours d'une séance, un sénateur peut soit la soulever immédiatement sans préavis par écrit, soit en donner un préavis par écrit conformément aux paragraphes (3) et (4).

Avis pour le vendredi

(4) Sauf dans le cas prévu au paragraphe (3) ci-dessus, un sénateur qui désire soulever une question de privilège un vendredi en donne, au plus tard à 18 heures la veille, un préavis par écrit au greffier du Sénat identifiant clairement le sujet qui sera soulevé à titre de question de privilège.

Avis oral

(7) Un sénateur qui a donné préavis selon les paragraphes (3) ou (4) ci-dessus a la parole au cours de la période prévue pour l'étude des « déclarations de sénateurs », afin de donner avis oral de sa question de privilège. Le sénateur identifie alors clairement le sujet qui sera soulevé à titre de question de privilège et indique qu'il est prêt à proposer une motion pour demander au Sénat de répondre à la plainte ou pour soumettre la question au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Étude selon l'ordre de réception des avis

(10) On aborde les questions de privilège dans l'ordre où le greffier du Sénat a reçu les préavis aux termes des paragraphes (3), (3.1) ou (4), selon le cas.

(3) Que le paragraphe 59(10) soit supprimé et que les paragraphes (11) à (18) portent dorénavant les numéros (10) à (17).

Respectueusement soumis,

Le président,
CONSIGLIO DI NINO

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Di Nino, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

PROJET DE LOI DE 2007 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES FERROVIAIRES

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-46, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services ferroviaires, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)f) du Règlement, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

LA RÉVISION DES SONDAGES INTERNES—LA NOMINATION DE DANIEL PAILLÉ

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, M. Fortier. La semaine dernière, le ministre a annoncé qu'il avait autorisé l'utilisation de fonds publics pour faire une chasse aux sorcières dans l'attribution de contrats de sondage par une ancienne administration, un dossier déjà examiné par la vérificatrice générale et dans lequel elle a conclu ne déceler aucun problème.

De plus, il a mandaté M. Daniel Paillé, un ancien ministre séparatiste du gouvernement péquiste, pour mener cette enquête, celui-là même qui œuvrait à défaire notre pays.

Pourrait-il nous expliquer pour quelle raison il juge qu'un ancien ministre du gouvernement qui cherchait à détruire le Canada est qualifié pour mener cette enquête?

L'honorable Michael Fortier (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) : Premièrement, j'aimerais préciser que je ne me rappelle pas avoir annoncé une chasse aux sorcières; c'est madame le sénateur qui le dit. Ce que j'ai annoncé, c'est le maintien d'une promesse électorale faite durant la campagne de 2005-2006. Cette promesse émane du fait que la vérificatrice générale, en 2003, avait fait quelques études d'échantillons de contrats de sondage d'opinion publique qui avaient été octroyés par le gouvernement du Canada. Je l'invite à lire son rapport; elle s'était particulièrement inquiétée de certains des éléments qu'elle avait trouvés.

De façon très transparente, nous avions dit en 2005 et 2006 que, si nous étions élus, nous allions demander à un conseiller indépendant de se pencher sur l'ensemble de l'œuvre — nous sommes remontés jusqu'en 1990 — et c'est exactement ce que nous avons fait.

(1355)

Le sénateur Tardif : Le ministre croit-il réellement que M. Daniel Paillé est qualifié pour mener cette enquête, lui qui a proposé un programme d'investissement au démarrage d'entreprises au Québec qui a coûté 408,2 millions de dollars aux contribuables, et ce en dollars de 2002, alors qu'une seule entreprise sur quatre a survécu?

Le sénateur Fortier : Je sais que, pour le ministre et certains de ses collègues, le fait que M. Paillé n'ait pas une carte de membre du Parti libéral du Canada le disqualifie de quelque nomination que ce soit, automatiquement, comme me le souffle à l'oreille mon collègue. Ce n'est pas le cas. Depuis qu'il est au pouvoir, notre gouvernement a fait beaucoup de nominations qui ne sont absolument pas partisanes. Celle de M. Paillé ne l'est pas. Je vous invite à regarder son curriculum vitae. Il a un profil académique et professionnel impeccable. Je pense que, de notre côté, un consensus se dégage. Nous sommes très heureux d'avoir quelqu'un de la trempe de M. Paillé pour assister le gouvernement dans cette importante tâche.

L'honorable Dennis Dawson : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Il a souligné que M. Paillé était un enquêteur indépendant. Est-il indépendant ou indépendantiste? Serait-ce le même Daniel Paillé qui, dans le quotidien Le Soleil, avant même l'élection de 1994, prévenait les maisons de courtage que son gouvernement ne ferait affaire qu'avec celles qui ne se mêleraient pas du débat référendaire?

Le ministre croit-il vraiment aux qualifications de M. Paillé ou ne fait-il que suivre le vieux dicton qui dit que les ennemis de mes ennemis sont mes amis en lui donnant un million de dollars pour qu'il fasse de la basse politique et une chasse aux sorcières?

Le sénateur Fortier : Honorables sénateurs, corrigeons d'abord les faits. L'enquête n'est pas une chasse aux sorcières. Si des sorcières s'y trouvent, c'est que vous savez des choses que nous ignorons. Je ne sais pas d'où vient le million de dollars qui a été mentionné. Durant la conférence de presse, j'ai été précis en disant que les coûts de l'enquête s'élèveraient bien en deçà d'un million de dollars. La partie qui reviendra à M. Paillé représente une portion des coûts totaux de l'enquête. Il ne faut quand même pas exagérer.

Le sénateur Dawson n'accepte pas le fait que M. Paillé possède les qualifications nécessaires. C'est un des professeurs les plus en vue des Hautes Études Commerciales, mais puisque cette institution n'est pas située à Québec, ce n'est pas important pour lui.

M. Paillé est un homme très bien vu par la communauté des affaires de Montréal. J'invite le sénateur Dawson à sortir de son cercle restreint de Québec et à interroger des gens à l'extérieur de son petit cercle d'amis libéraux fédéraux. Il verra alors que M. Paillé a des amis partout dans la société québécoise, et nous sommes très fiers qu'il ait accepté ce mandat.

Le sénateur Dawson : Je suis surpris qu'après avoir été reconnu par l'Université Laval comme étant l'un des grands diplômés de la région de Québec, le sénateur Fortier soit capable de nier ses origines québécoises avec autant de facilité.

Cela étant dit, est-ce le même Daniel Paillé qui s'était opposé, il y a quelques années, à l'ouverture d'une garderie près de son domicile? Il avait envoyé une lettre, portant l'en-tête de son ministère, à l'administration municipale de Montréal. D'ailleurs il a dû s'en excuser publiquement à l'Assemblée nationale. Si c'est le jugement politique que le ministre cherche, si c'est le genre de monde qu'il cherche, indépendant ou indépendantiste, je dirais qu'il fait preuve d'un jugement politique douteux.

Madame le sénateur Tardif a parlé tout à l'heure des programmes dont 75 p. 100 qui ont été acceptés sont mort-nés dès la première année. Si c'est ce jugement politique qui sort des HEC et si c'est ce à quoi le ministre fait référence, je pense qu'il devrait vérifier s'il n'existe pas un autre Daniel Paillé.

Le sénateur Fortier : Honorables sénateurs, soyons sérieux. Je ne renie pas du tout mes origines, j'en suis très fier. Toutefois, j'invite à nouveau le sénateur Dawson à sortir de sa petite clique de libéraux fédéraux et à porter un jugement plus objectif sur ceux et celles qui n'ont pas nécessairement toujours milité au sein de sa formation. Cela s'applique également à moi et à d'autres de ce côté-ci de la Chambre. On n'a pas demandé à M. Paillé de jeter un regard sur un régime de garderies à travers le Canada. On lui a demandé d'étudier des contrats qui ont été accordés sur une longue période, de 1990 à 2003, et qui touchaient la recherche sur l'opinion publique.

Lorsque j'examine son profil, je constate qu'il est très qualifié. Je vous invite à lire l'éditorial d'André Pratte dans La Presse, qui a confirmé que M. Paillé était très qualifié pour occuper ce poste.

(1400)

Le sénateur Dawson : Si le ministre aime tant l'île de Montréal, il pourrait peut-être s'y présenter, ou se présenter dans Vaudreuil. Mais le même M. Paillé a quand même été associé à un gouvernement qui faisait la promotion de la souveraineté. La semaine dernière, lorsqu'on le lui a demandé, il n'a pas nié le fait. Le ministre a permis à cet homme de voir nos données stratégiques sur la façon dont le gouvernement fédéral pense que l'on doit traiter des questions contre la volonté d'un ancien parti politique au Québec de faire la souveraineté. Je comprends qu'il veuille attaquer ce qu'il appelle « les libéraux », mais honnêtement, ce n'est pas seulement le Parti libéral qu'il attaque, mais l'institution gouvernementale du Canada. Il donne à nos adversaires accès à des informations qui risquent un jour — il ne sera peut-être plus pour là pour en parler — de nous mettre dans la position où nous devrons combattre des gens qui vont avoir plus d'informations sur nous que nous en aurons sur eux.

Le sénateur Fortier : Je ne partage pas du tout les inquiétudes du sénateur. Je suis surpris par son manque de connaissance de la société québécoise. Il y a eu deux référendums au Québec — deux! J'ai une sœur qui a voté oui à un des référendums. Est-ce que cela veut dire que je ne peux pas lui parler? Que c'est quelqu'un qui ne pourra jamais avoir un mandat du gouvernement fédéral sous prétexte que, lors de l'un des référendums, elle a voté oui? Cinquante pour cent de la population du Québec a voté oui en 1995 et 40 p. 100 en 1981.

Réveillez-vous, sénateur Dawson! La société du Québec n'est pas divisée en fédéralistes et en souverainistes. Elle a beaucoup changé. Malheureusement, le sénateur est resté en arrière avec le vieux train du Parti libéral fédéral et c'est pour cette raison qu'il se maintient dans les bas-fonds aujourd'hui.

[Traduction]

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, le ministre a dit que nous devrions prendre en considération le fait que M. Paillé a probablement beaucoup d'amis à l'extérieur du cercle des libéraux. Nous savons qu'il a des amis. Ce que nous ignorons, c'est à quel point le ministre est son ami.

Étant donné les préoccupations soulevées à propos du conflit d'intérêts dans lequel s'est placé le ministre quand il a accordé le marché à CGI, le ministre pourrait-il confirmer que ce n'est pas en raison d'une relation personnelle, d'une relation professionnelle ou de tout autre genre de relation engendrant un conflit d'intérêts qu'il a voulu engager M. Paillé, dont les compétences sont discutables pour faire un travail qui a déjà été effectué à la perfection par la vérificatrice générale du Canada qui, comme nous le savons, est éminemment compétente?

Le sénateur Fortier : Honorables sénateurs, je confirme que M. Paillé a été choisi pour ses compétences et son profil professionnel. Si l'honorable sénateur avait ne serait-ce que la moitié des compétences de celui-ci, nous aurions peut-être envisagé sa candidature. Malheureusement, ce n'était pas le cas et je n'ai constaté aucune amélioration depuis mon arrivée au Sénat.

Si le sénateur a des allégations à faire au sujet de ma réputation ou de celle de M. Paillé, sur ce projet ou sur CGI, je l'invite à les répéter à l'extérieur de cette enceinte.

Le sénateur Mitchell : Maintenant que le ministre a clairement exprimé des doutes sérieux sur la compétence de la vérificatrice générale du Canada, et comme il a nommé cette personne pour refaire un travail dont la vérificatrice générale s'était très bien acquittée il y a trois ans, le ministre ou le gouvernement est-il en train de dire qu'elle pourrait très bien se retrouver dans la même situation que le directeur général des élections, ou encore le conseiller sénatorial en éthique et le commissaire à l'éthique de la Chambre des communes? Le ministre remet-il en question la compétence de la vérificatrice générale?

Le sénateur Fortier : Pas du tout, honorables sénateurs. En fait, nous lui sommes très reconnaissants d'avoir soulevé cette affaire. Elle a précisé clairement — et j'invite le sénateur à lire les parties de son rapport où il en est question — qu'elle n'avait examiné qu'un échantillon des contrats. Nous avons été clairs pendant la dernière campagne électorale, et nous avons été élus. Nous avons gagné; vous avez perdu. Par conséquent, nous chargeons une personne indépendante d'examiner ces contrats, tous les contrats de ce type conclus à partir de 1990. Si les libéraux qui étaient membres du gouvernement entre 1993 et 2003 n'ont rien à craindre, pourquoi s'exciter comme le sénateur le fait maintenant?

Le sénateur Mitchell : Si la vérificatrice générale a déjà fait le travail de base, ne serait-il pas plus efficace, moins coûteux et plus raisonnable de lui demander de faire une étude plus attentive portant sur une plus longue période? C'est elle l'experte. Elle a la compétence pour ce faire. Le ministre a confiance en elle, et elle n'est ni séparatiste ni incompétente.

Le sénateur Fortier : Je le répète, nous ne disons pas que la vérificatrice générale est incompétente. Nous disons simplement que nous compléterons l'examen qu'elle a fait. Elle a contrôlé un échantillonnage de contrats, mais nous voulons que tous les contrats soient examinés. C'est la différence.

LA JUSTICE

LE TRÈS HONORABLE BRIAN MULRONEY—LES ALLÉGATIONS DE POTS-DE-VIN ET DE COMMISSIONS OCCULTES

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, je pourrais peut-être aider à éclaircir les choses, parce qu'il me semble que les sénateurs Mitchell et Dawson sont tous deux à côté de la plaque.

(1405)

Le sénateur Dawson s'est empressé de souligner que M. Paillé ne voulait pas d'une garderie en face de chez lui. Voilà la raison de cet examen. Ces gens ne veulent pas de garderies au Canada, c'est pourquoi il s'entend si bien avec eux. C'est de là que vient son amitié. On peut faire le lien.

Honorables sénateurs, les propos que j'ai entendus ici aujourd'hui me renversent vraiment. Hier encore, Madame le leader du gouvernement au Sénat a affirmé que la décision de déployer à Terre-Neuve des navires de la Garde côtière canadienne qui sont en Nouvelle-Écosse n'était pas motivée par la politique. Ça me scandalise. Il m'apparaît simplement que le « déjà moins nouveau » gouvernement du Canada n'a aucun député dans la région de Halifax-Dartmouth alors qu'il en compte trois à Terre-Neuve, où les navires seront déployés.

Aujourd'hui, on entend parler de la soi-disant enquête visant le Parti libéral. Le « déjà moins nouveau » gouvernement du Canada utilise les fonds publics pour charger un séparatiste de rouvrir de vieux dossiers. Si ça marche comme un rat, parle comme un rat et sent comme un rat, c'est probablement un rat.

Puisque les conservateurs semblent prêts à relancer de vieux dossiers, je vais faire une proposition à madame le leader : pourquoi ne pas rouvrir l'enquête sur Airbus? Voici ce que je propose au leader du gouvernement au Sénat : puisque les titres de compétence de M. Paillé laissent tant à désirer et sont remis en question par tant de gens, je serais parfaitement disposé à offrir mes services gratuitement afin d'enquêter sur l'affaire Airbus et la participation de l'ancien premier ministre Brian Mulroney. Madame le leader du gouvernement au Sénat convient-elle que ce n'est que juste, vu qu'ils ont tellement envie de revenir sur le passé?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Cette question, tout comme la diatribe du sénateur Mercer, ne mérite même pas une réponse. Comme on le sait, l'affaire à laquelle il fait allusion a fait l'objet d'une enquête complète par la GRC.

Le sénateur Mercer : C'est un vrai réconfort pour madame le leader, non?

Le sénateur LeBreton : Incidemment, cela s'est passé sous un gouvernement dirigé par le parti du sénateur. Le sénateur Mercer parle comme un vrai libéral; il mélange les pommes et les oranges. D'ailleurs, comme le sénateur Fortier l'a dit, et comme je l'ai dit hier, il est question ici d'un engagement que nous avions pris au cours de la campagne électorale. Le rapport de la vérificatrice générale sur ces contrats a soulevé de nombreuses préoccupations. Nous avons donc pris un engagement, et le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux remplit cet engagement en sa qualité de ministre des Travaux publics et en tant que membre du gouvernement.

Le sénateur Mercer : Le ministre des Travaux publics a notamment eu recours au terme « transparence ». Le gouvernement actuel aime bien parler de transparence, puis il jette un voile pour qu'il n'y ait plus de transparence.

Je connais la réponse et je continue à me demander ce qui fait peur au « déjà moins nouveau » gouvernement dans l'affaire Airbus.

Même ce gouvernement, en la personne du ministre Toews, s'est intéressé à l'ouverture d'une enquête ou d'un examen sur le montant du règlement de 2 millions de dollars accordé à M. Mulroney, mais l'initiative a été abandonnée plus tôt cette année. De plus, d'actuels ministres d'État, dont l'incompétent Peter MacKay et le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Chuck Strahl, ont réclamé une enquête sur le traitement de cette affaire. Ils voulaient de la transparence. Ils sont maintenant, eux aussi, silencieux à l'égard de ce dossier.

De quoi les conservateurs ont-ils peur? Malgré les apparences, je n'insinue rien de mal concernant la participation de M. Mulroney. Cependant, il est difficile de ne pas tenir compte de ce que j'ai dit à maintes reprises au Sénat. Maintenant, même Karlheinz Schreiber, le vieux copain du premier ministre Mulroney, intente une poursuite contre lui alléguant n'avoir pas reçu les services escomptés pour les 300 000 $ que M. Schreiber a versés à M. Mulroney.

Puisque les raisons pour lesquelles le gouvernement actuel veut rouvrir de vieux dossiers rejoignent celles qui poussent de nombreux Canadiens et moi-même à nous interroger sur l'affaire Airbus, madame le leader du gouvernement au Sénat conviendrait-elle qu'une enquête permettrait de faire la lumière?

(1410)

Le sénateur LeBreton : Malheureusement, honorables sénateurs, voilà ce à quoi le sénateur Mercer s'abaisse. Le cas qu'il mentionne a fait l'objet d'une enquête. Des lettres ont été versées au dossier. La GRC a écrit à M. Mulroney. Il s'agit d'un document public. Chaque aspect de tout ce qui entourait Airbus a fait l'objet d'une enquête, y compris les travaux réalisés par M. Mulroney après avoir quitté son poste de premier ministre. Comme je l'ai dit en réponse à la question posée par le sénateur Mercer, si Karlheinz Schreiber n'était pas satisfait des travaux, au moins il admet maintenant que la relation d'affaires entre lui et M. Mulroney, après que ce dernier eut quitté son poste de premier ministre, était légitime.

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

L'ATTRIBUTION D'UN MARCHÉ À CGI GROUP INC.—LA POSSIBILITÉ D'UN CONFLIT D'INTÉRÊTS

L'honorable James S. Cowan : Ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Au cours des derniers jours, les médias ont rapporté à de multiples reprises que le ministre allait bientôt attribuer un marché de 400 millions de dollars à CGI, une entreprise dont le ministre est ou a déjà été actionnaire. Le ministre était même considéré comme le principal banquier en placements lorsque son employeur, le Crédit Suisse, a signé un contrat de prise ferme pour l'émission de valeurs mobilières par CGI, ce qui avait permis à l'entreprise d'empocher plus de 330 millions de dollars.

Le nouveau code de conduite pour les acquisitions établi dans la Loi sur la responsabilité présentée par le gouvernement et tant vantée prévoit que les membres du gouvernement doivent éviter toute situation de conflit d'intérêts, qu'elle soit réelle, apparente ou potentielle.

Le ministre nous confirmera-t-il qu'il n'a pas l'intention de violer sa propre règle d'éthique en attribuant le marché avant que l'Agent de l'intégrité de la fonction publique ait eu la possibilité de faire enquête sur ce conflit d'intérêts évident?

L'honorable Michael Fortier (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) : J'aimerais savoir ce qui constitue un conflit d'intérêts évident aux yeux du sénateur. Visiblement, il ne sait rien des conflits d'intérêts et il ne sait pas ce que c'est que d'avoir eu une carrière avant d'arriver ici. Le sénateur fait peut-être de la politicaillerie partisane. Je lui laisse le bénéfice du doute.

J'ai dit clairement que je n'ai pas participé, directement ou indirectement, à l'attribution de ce marché ni de tout autre marché. Si le sénateur est de l'avis contraire, je l'invite à en parler à l'extérieur du Sénat. J'aimerais bien voir cela.

Le sénateur Cowan : Les mots contenus dans votre loi, monsieur le ministre, sont « réel, apparent ou potentiel ». Le ministre est sans doute la seule personne dans tout le pays à ne pas croire qu'en fonction des faits dévoilés dans les médias et des faits reconnus, il y ait au moins un conflit d'intérêts potentiel ou apparent.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Cowan : Le ministre va-t-il confirmer aujourd'hui dans cette Chambre qu'il s'est entièrement conformé à toutes les exigences de divulgation qui le concernent en tant que sénateur et ministre, qu'il n'a pas participé au processus d'attribution de ce contrat et qu'il continuera de s'en tenir à distance?

Le sénateur Fortier : J'ai respecté toutes les règles et tous les règlements en matière de conflit d'intérêts. Je continuerai de gérer le ministère conformément à ces règles et règlements, et je ne me retirerai d'aucun dossier à moins que le commissaire à l'éthique ne me le demande. Quelques semaines après mon assermentation, les ministres ont rencontré le commissaire à l'éthique. Pour ceux d'entre nous qui poursuivaient une carrière avant d'arriver ici, on nous a dit que nous pouvions poursuivre nos activités à la condition de déclarer les actions en notre possession. Les miennes étaient dans un fonds fiduciaire sans droit de regard. Les collègues du sénateur parlaient plus tôt d'une chasse aux sorcières. C'est exactement ce que fait le sénateur. Je n'ai rien à voir avec ces contrats. Ce sont les hauts fonctionnaires qui s'en occupent.

Encore une fois, à moins que vous n'ayez quelque chose à dire à l'effet contraire, j'apprécierais que vous preniez votre sourire et que vous sortiez dire cela en public. Allez-y.

Le sénateur Cowan : On dirait qu'on a touché un point sensible.

Le sénateur Fortier : C'est exact. Allez-y.

Le sénateur Cowan : Vous ne voulez pas être ici. Rentrez chez vous.

Le sénateur Fortier : Allez-y, allez-y.

Le sénateur Bryden : Il ne perd jamais son sang-froid.

LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

LA PROMESSE ÉLECTORALE D'ACCROÎTRE LA PRÉSENCE POLICIÈRE

L'honorable Catherine S. Callbeck : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Pendant la dernière campagne électorale, le gouvernement conservateur s'est engagé à investir dans les forces de maintien de l'ordre de première ligne et, à cette fin, à négocier avec les provinces une entente de partage des coûts pour, et je cite, « ...accroître d'au moins 2 500 le nombre d'agents de police patrouillant dans nos villes et nos collectivités ».

(1415)

Nous voilà aujourd'hui, environ an et demi et deux budgets plus tard, et pourtant le processus officiel de négociation de cette entente fédérale-provinciale n'a même pas été amorcé. En fait, l'Association canadienne des commissions de police, l'Association canadienne des chefs de police et l'Association canadienne des policiers ont toutes dit que le ministre, qu'elles ont essayé de contacter par téléphone, ne les avait même pas rappelées.

Quand le gouvernement va-t-il donner suite à cette promesse électorale?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie madame le sénateur de sa question. Le gouvernement a déjà mis de l'argent de côté, par l'intermédiaire du ministre de la Sécurité publique, pour accroître la présence policière. En ce qui concerne les déclarations auxquelles elle vient de faire allusion, je vais simplement prendre note de sa question.

[Français]

LE CENTRE DES ARMES À FEU—LA RÉGLEMENTATION DES ARMES À FEU

L'honorable Francis Fox : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et a trait au registre des armes à feu. Comme la ministre le sait, jusqu'à récemment, les armes à feu devaient être enregistrées obligatoirement au Registre des armes à feu. Toutefois, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement actuel, on a choisi de ne plus appliquer des parties importantes de la Loi sur le registre des armes à feu. Le gouvernement a décrété, par exemple, une amnistie pour ceux qui enfreignent la Loi sur le registre des armes à feu en n'inscrivant pas leurs armes. Tout récemment, au cours du congé pascal, le gouvernement a décidé de prolonger cette amnistie, ce que l'Association canadienne des policiers est venue dénoncer à Ottawa hier.

Madame le ministre peut-elle nous dire si, à la lumière des événements tragiques récents, le gouvernement serait prêt à reconsidérer cette position qui semble relever d'un certain laxisme dans l'application de la loi?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie le sénateur de sa question. Il est évident que les horribles événements des derniers jours ramènent à l'avant- plan la question des armes à feu et de la sécurité des citoyens.

C'est l'ancien gouvernement conservateur de Brian Mulroney qui a fait adopter la mesure législative de contrôle des armes à feu la plus musclée de l'histoire de notre pays. Les armes à feu utilisées pour commettre ces crimes aux États-Unis sont interdites dans notre pays. Ce sont des armes illégales chez nous. Le registre des armes à feu est en place. La seule question ici concerne les armes d'épaule. Les gens doivent toujours se soumettre à un processus rigoureux pour obtenir des armes à feu au Canada, y compris des armes d'épaule. La question ici concerne le registre des armes d'épaule.

En fait, pour obtenir le type d'armes à feu utilisées dans la tragédie aux États-Unis — sauf dans le cas des tireurs sur cibles, dont le nombre est beaucoup plus restreint —, les gens doivent attendre longtemps et sont soumis à une vérification de leurs antécédents. Dans notre pays, l'amnistie ne s'appliquait qu'au registre des armes d'épaule, armes qui appartiennent principalement aux agriculteurs et aux chasseurs.

[Français]

Le sénateur Fox : Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire. Je voudrais indiquer à la ministre que ma question repose sur des inquiétudes profondes de la société canadienne. Celles-ci sont reflétées non seulement par tous les journaux du pays et tous les éditorialistes, mais également au niveau de la classe politique. Je note par exemple que, dans son communiqué de presse hier, le premier ministre Charest, en traitant de cette terrible tragédie à Virginia Tech, déclarait :

Cet événement d'une violence inouïe rappelle l'importance du resserrement des mesures de sécurité pour les armes à feu.

Je note également que le procureur général de l'Ontario, M. Bryant, chargé de l'application du Code criminel dans sa province, décrie aussi cette décision du gouvernement en disant :

(1420)

[Traduction]

Le gouvernement Harper a choisi le week-end de Pâques pour diffuser l'information concernant le prolongement de la période d'amnistie pour les propriétaires d'armes à feu, comme s'il cachait un œuf de Pâques.

[Français]

J'aimerais que vous fassiez part de ces remarques à vos collègues et que vous leur disiez qu'il est plus important pour la population canadienne de se faire rassurer sur la question du contrôle des armes à feu que de recevoir des condoléances au lendemain d'événements tragiques.

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Bien sûr, « armes de poing » est le mot clé dans la question; ces armes sont interdites au Canada. Notre gouvernement a adopté des lois très strictes pour bannir les armes de poing. Après la tragédie survenue à Montréal, d'autres mesures ont été adoptées pour limiter le nombre de cartouches que peut contenir un chargeur donné. Il va sans dire que nous avons des lois strictes en matière d'armes à feu au Canada.

Malheureusement, des gens que mon honorable collègue a désignés comme les membres de la classe politique, je crois, aiment mêler, d'une part, ce qui concerne nos lois strictes et rigoureuses en matière d'armes à feu et les efforts déployés par notre propre gouvernement pour renforcer les peines infligées aux individus qui commettent des crimes avec des armes à feu et, d'autre part, le dossier des armes d'épaule dont se servent les chasseurs et les agriculteurs. Le gouvernement s'est toutefois engagé à faire en sorte que tous les propriétaires d'armes de poing respectent les lois du Canada. Le budget de 2007 prévoit 14,2 millions de dollars pour assurer un meilleur contrôle des 20 000 nouveaux demandeurs de permis d'armes à feu afin d'empêcher que des armes à feu ne tombent dans de mauvaises mains.

Malheureusement, notre pays a lui aussi connu des tragédies comme celle qui vient de se produire aux États-Unis. En fait, un incident mettant en cause un jeune homme qui avait été dans l'armée est survenu il y plusieurs années ici même à Ottawa, à l'école St. Pius X, sur l'avenue Fisher. Ces événements horribles se produisent. Je ne peux m'imaginer ce que ressentent les parents de ces enfants ou les parents qui ont des enfants à l'université, qui craignent que de tels événements ne se produisent et qui se disent que leurs enfants ne sont pas en sécurité.

Nous savons que les armes utilisées pour commettre ce crime commis aux États-Unis sont interdites au Canada et que pour s'en procurer ou s'en servir ici, il faudrait qu'elles entrent illégalement au pays. Nous nous efforçons de mettre en place des lois rigoureuses pour punir les gens qui commettent un crime avec de telles armes.

En ce qui concerne le registre des armes d'épaule, nous savons que ce registre de 2 milliards de dollars ne fonctionnait pas. Il va sans dire que les armes qui y sont inscrites sont dans une toute autre catégorie que celles qui ont été utilisées pour commettre ce crime horrible.

LES FINANCES

L'EXAMEN DU COÛT DES ACQUISITIONS À L'ÉTRANGER

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Honorables sénateurs, j'ai une question à poser à madame le leader du gouvernement au Sénat. Elle se souviendra que le 21 mars dernier, peu après le dépôt du budget, j'ai signalé que le budget démontrait clairement que le gouvernement n'avait pas saisi l'importance d'abolir les déductions de frais d'intérêts par les sociétés canadiennes et souligné que ces mesures nuisaient à la compétitivité des entreprises canadiennes. Madame le leader m'a répondu qu'elle prenait note de ma question.

C'est avec plaisir que j'ai appris hier par les journaux que le ministre des Finances prenait cette question au sérieux et qu'il réexaminait le dossier. Madame le leader pourrait-elle nous donner l'assurance que le gouvernement prendra rapidement les mesures nécessaires pour corriger ce très important problème économique qui nuit à la compétitivité des entreprises canadiennes et permet aux pays étrangers d'acquérir les sociétés canadiennes au pays?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : J'ai effectivement pris note de la question et je l'ai transmise au ministère des Finances. Comme l'honorable sénateur l'a souligné, le ministre des Finances a promis de revoir ce dossier. Je vais demander quand nous pouvons nous attendre à obtenir une réponse à la question originale et je ferai part ensuite des préoccupations exprimées par le sénateur Grafstein aujourd'hui.

(1425)

[Français]

DÉPÔT DE RÉPONSES À DES QUESTIONS INSCRITES AU FEUILLETON

LES RESSOURCES NATURELLES—L'INDUSTRIE DE L'ASBESTOS

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 20 inscrite au Feuilleton—par le sénateur Spivak.

LA RÉFORME DÉMOCRATIQUE—LES MICROPRÊTS POUR LES FEMMES ENTREPRENEURES

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 29 inscrite au Feuilleton—par le sénateur Callbeck.

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse différée à une question orale du sénateur Dallaire, posée le 27 mars 2007, concernant la Fondation autochtone de guérison.

LES AFFAIRES INDIENNES ET LE NORD CANADIEN

LA CULTURE ET L'APPROCHE GÉNÉRALE DU MINISTÈRE

(Réponse à la question posée le 27 mars 2007 par l'honorable Romeo Antonius Dallaire)

Le gouvernement maintient son engagement à régler de façon durable et équitable la question des séquelles des pensionnats indiens, et reconnaît l'importance de mettre un terme à ce passé tragique pour cheminer vers l'avenir en partenariat avec les Autochtones.

Le gouvernement continue à aller de l'avant, en partenariat avec les communautés autochtones à travers le pays, en vue de la mise en œuvre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens qui a reçue l'approbation finale de la cour le 21 mars 2007. En ce moment, les anciens élèves et leurs familles doivent décider s'ils acceptent les dispositions de la Convention de règlement ou s'ils souhaitent s'y soustraire. Cette entente historique favorisera la guérison et la réconciliation entre les anciens élèves, leurs familles ainsi que tous les Canadiens.

La Fondation autochtone de guérison (FAG) doit recevoir un fonds de dotation de 125 millions de dollars à la date d'entrée en vigueur de la Convention de règlement. Les responsables au Ministère sont à mettre au point des solutions visant à combler cette absence de financement et nous sommes confiants de trouver une solution pour nous assurer que le travail important de la FAG se poursuit à l'approche de l'étape de la mise en œuvre de la Convention de règlement.


ORDRE DU JOUR

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 27(1) du Règlement, j'avise le Sénat que lorsque nous allons procéder aux « Affaires du gouvernement », le Sénat abordera l'ordre du jour dans l'ordre suivant : la motion no 1 inscrite à mon nom, suivie de l'étude à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-46, et ensuite tous les autres points sous la rubrique des « Affaires du gouvernement » dans l'ordre où ils apparaissent au Feuilleton.

LE SÉNAT

ADOPTION DE LA MOTION TENDANT À AUTORISER LE PROLONGEMENT DE LA SÉANCE DE MERCREDI ET À AUTORISER LES COMITÉS À SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis du 17 avril 2007, propose :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat du 6 avril 2006, lorsque le Sénat siégera le mercredi 18 avril 2007, il poursuive ses travaux après 16 heures et qu'il suive la procédure normale d'ajournement conformément au paragraphe 6(1) du Règlement;

Que les comités sénatoriaux devant se réunir le mercredi 18 avril 2007 soient autorisés à siéger même si le Sénat siège, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'aimerais proposer un amendement.

Que la motion soit modifiée au deuxième paragraphe par ce qui suit :

Que le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et le Comité sénatorial permanent des transports et des communications devant se réunir le mercredi 18 avril 2007 soient autorisés à siéger même si le Sénat siège, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion principale?

Des voix : Oui

Des voix : Non

(La motion est adoptée avec dissidence.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, je demande au Président de ne pas tenir compte de l'heure à 18 heures et de suspendre l'application de l'article 13.1 du Règlement.

Son Honneur Président : Honorables sénateurs, la permission est- elle accordée?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(1430)

[Traduction]

PROJET DE LOI DE 2007 SUR LE MAINTIEN DES SERVICES FERROVIAIRES

DEUXIÈME LECTURE

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) propose que le projet de loi C-46 prévoyant la reprise et le maintien des services ferroviaires, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, les lois canadiennes en matière de travail prévoient un juste équilibre entre les droits des parties à la négociation collective, ce qui comprend le recours à la grève et au lock-out. Lorsque les parties ne peuvent en arriver à une entente après un délai raisonnable et que les mesures qu'elles prennent entraînent de graves conséquences sur l'économie, il est de notre devoir d'intervenir. Nous avons maintenant atteint ce point.

Le commerce est à la base même de l'évolution du Canada. L'un des principaux facteurs permettant d'expliquer le succès de notre économie est la capacité de notre pays à assurer le transport des biens et des personnes sur de grandes distances. Nous étions forcés de le faire en raison de notre situation géographique. Le Canada figure parmi les meilleurs au monde à ce chapitre.

C'est cette capacité qui attire les investisseurs ici. Elle aide les entreprises canadiennes à faire fonctionner efficacement leurs usines, leurs ateliers et leurs autres installations de fabrication.

La santé économique de notre pays est encore une fois en péril. La grève des travailleurs du CN a de vastes répercussions sur le pays et sur notre potentiel industriel.

La semaine dernière, la majorité des membres des Travailleurs unis des transports, ou TUT, ont rejeté l'accord offert par leur employeur, le CN. Les travailleurs ont, depuis, recommencé à faire la grève, une grève tournante.

Le gouvernement du Canada doit prendre des mesures pour résoudre ce conflit de travail, et ce, pour de très bonnes raisons. J'aimerais prendre le temps de les expliquer. Je le ferai en mettant en lumière les risques et les effets.

Plus tôt cette année, nous avons constaté directement l'effet dévastateur que peuvent avoir les arrêts de travail dans le secteur des transports, même s'il s'agit seulement de quelques semaines. Au bout de quelques jours, le conflit s'est mis à causer de sérieux préjudices à notre économie. Il a nui aux entreprises et à leur capacité de transporter leurs produits vers les marchés. Il a nui aux consommateurs en réduisant leur accès aux biens courants. Un peu plus, et c'était les déplacements de millions de personnes entre la maison et le travail qui étaient compromis.

En Ontario en particulier, le conflit s'est révélé éprouvant pour toute une gamme de secteurs. Le transport des produits et des biens à l'échelle du pays ne se faisait plus comme avant. Compte tenu de ces facteurs, le différend a aussi représenté un risque pour les travailleurs canadiens. Des gens n'ayant jamais demandé à être mêlés au conflit en ont néanmoins subi les contrecoups, ce qui a nuit à leur capacité de gagner leur vie.

J'aimerais vous donner des exemples des conséquences profondes de la grève partout au pays et vous montrer à quel point ces conséquences pourraient se faire sentir de nouveau si nous n'agissons pas dans les prochains jours.

Dans des usines et des entreprises ontariennes, des travailleurs ont été mis à pied rapidement. Nous parlons ici d'usines de toutes les tailles, tant celles comptant quelques centaines d'employés que celles comptant des milliers de travailleurs. Les entreprises n'avaient pas le choix. Le transport de leurs marchandises ne se faisait pas comme il se devait.

Dans le secteur de l'automobile, on a renvoyé des travailleurs à la maison, car on n'arrivait pas à obtenir les matériaux nécessaires pour assembler les voitures. Ford Canada a fermé son usine d'assemblage de St. Thomas, en Ontario, et les travailleurs ont été assignés à des quarts de travail courts. Les petites entreprises n'ont pas été épargnées. Une usine de panneaux de particules du Nord de l'Ontario a dû fermer temporairement, car elle avait huit wagons porte-rails remplis de produits attendant d'être expédiés. Aucun train n'a assuré le transport de ces marchandises jusqu'à ce que les travailleurs du CN recommencent à travailler.

Pendant ce temps, les fabricants de produits chimiques ont dû réduire leur capacité de production parce qu'ils étaient incapables de livrer leurs produits aux consommateurs. Comme tout le monde, ils n'avaient pas le choix. Ils ont pris des mesures pour protéger leurs entreprises, et avec raison. Les fabricants de produits chimiques ont estimé qu'une prolongation de la grève de 30 jours supplémentaires leur aurait coûté entre 15 et 20 millions de dollars.

Le ministre des Transports a reçu des lettres dans lesquelles un grand nombre d'associations industrielles, notamment les Manufacturiers et Exportateurs du Canada, l'Association canadienne de transport industriel, l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, l'Association des fabricants de pièces d'automobile du Canada et l'Ontario Agri Business Association, exprimaient leur inquiétude et demandaient au gouvernement d'intervenir.

Le nouveau gouvernement du Canada est en train d'obtenir des résultats pour les agriculteurs, les fabricants et bien d'autres industries qui dépendent du système ferroviaire.

Statistique Canada a récemment évalué à près d'un milliard de dollars l'impact des pertes enregistrées en février, sur l'excédent commercial canadien. On peut imaginer ce qu'il aurait été possible de faire avec ce milliard de dollars, l'équivalent de 33 millions de dollars par jour ou de 1,4 million de dollars l'heure. C'est ce qu'ont couté le manque à gagner et les arrêts de travail.

Selon certains articles du Edmonton Sun, les exportations de produits industriels ont régressé de 9 p. 100 et les livraisons de véhicules automobiles de 5,1 p. 100. Le secteur forestier, déjà mis à mal, a connu sa pire baisse mensuelle. La grève de deux semaines, en février, a coûté de 5 millions à 8 millions de dollars aux producteurs céréaliers sous forme d'indemnités nettes de surestaries, c'est-à-dire de frais qu'ils ont dû verser pour leurs retards de chargement.

Dans les ports de Vancouver et de Prince Rupert, plus de 20 navires attendaient et huit d'entre eux ont attendu tellement longtemps les grains de la Commission canadienne du blé qu'il leur en coûte actuellement 300 000 $ par jour en frais de surestaries.

Les membres du syndicat ont rejeté à 80 p. 100 le règlement négocié par leurs propres dirigeants syndicaux. Ces derniers ont par conséquent réclamé des grèves tournantes d'un bout à l'autre du pays. Les syndicats régionaux se sont publiquement prononcés contre la grève et ont décidé de rester au travail à Halifax, London et Sarnia, en Ontario. Le fossé entre les dirigeants syndicaux et les membres du syndicat a nui aux négociations. Sans une mesure législative, l'incertitude minera la confiance des fabricants, des producteurs agricoles, des travailleurs forestiers, ainsi que de nos partenaires commerciaux du monde entier, à l'égard du système ferroviaire canadien.

La Commission canadienne du blé et les producteurs de céréales de la Saskatchewan sont parmi les groupes qui ont réclamé le plus vigoureusement l'adoption rapide du projet de loi C-46. Le sénateur Tkachuk serait heureux de savoir que les producteurs de céréales de la Saskatchewan ont exercé des pressions pour que ce projet de loi soit adopté.

Honorables sénateurs, j'ai partagé avec vous quelques exemples des personnes qui ont été touchées par cette grève et qui continuent de l'être. Ces exemples montrent l'importance cruciale du secteur canadien des transports pour notre économie.

Nous avons appris de la grève que, si nous n'agissons pas rapidement, l'étendue et la portée des répercussions de la pénurie de main-d'œuvre augmentent rapidement. C'est pour cette raison que le gouvernement affirme de nouveau qu'il agira rapidement en vue de protéger l'économie, les travailleurs et les industries du pays. Le gouvernement a travaillé avec les deux parties afin de parvenir à une solution, mais cela s'est soldé par un échec. Le gouvernement n'a donc pas d'autre choix que de faire adopter une loi de retour au travail. Il ne le fait pas avec gaieté de cœur. Le gouvernement tient toujours au processus de négociation collective, mais il veut également faire comprendre au CN et au syndicat qui représente les grévistes que le Canada ne permettra pas que des arrêts de travail portent davantage préjudice à son économie. Pour cette raison, j'exhorte tous les sénateurs à procéder cet après-midi à l'adoption rapide du projet de loi C-46. Je sais que le ministre comparaîtra devant le comité plénier. Nous serons en mesure de lui poser des questions sur les mesures qu'il pourrait prendre à l'avenir. Je recommande que nous procédions aussi rapidement que possible.

(1440)

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, je viens de l'Ouest, et quiconque habite dans l'Ouest, comme moi, sait que cette région s'est développée grâce au chemin de fer. Il nous arrive de temps à autre de détester les propriétaires des chemins de fer, mais nous adorons ceux qui exploitent ce mode de transport. Le sénateur Comeau a fait une description fidèle de la situation.

Le projet de loi C-46 me place devant un choix déchirant, mais je vais l'appuyer. Le choix est déchirant parce que je suis membre de deux syndicats. Je comprends ce que font les syndicats et je sais ce qui se passe lorsqu'on fait obstacle au processus de négociation. Toutefois, le projet de loi n'est pas présenté parce que des obstacles ont entravé ce processus. Il l'est parce que le différend dure depuis longtemps.

Comme le sénateur Comeau l'a dit, le différend semblait sur le point de se régler, en février, lorsque le gouvernement a présenté un projet de loi ordonnant le retour au travail, projet de loi qu'il n'a pas fait promulguer. À la lumière de ce fait, les parties sont arrivées à un projet d'accord, mais malheureusement, les syndiqués l'ont rejeté le 26 mars.

Au Canada, le sénateur Comeau l'a dit également, les services ferroviaires sont essentiels, surtout dans la région où j'habite. Tous préféreraient un accord négocié, mais lorsque cela semble impossible, comme dans le cas présent, et lorsque la catastrophe est imminente, ce qui est le cas, il faut prendre des mesures pour protéger l'économie nationale et les intérêts du Canada.

Pour que tous les sénateurs comprennent la nature du vote, je dirai que le projet de loi C-46 a pour effet de prolonger indéfiniment, jusqu'à ce que certaines choses se produisent, la convention collective qui était en place jusqu'au 31 décembre 2006. Il y aura donc une convention en place, et elle sera prolongée jusqu'à la conclusion d'une nouvelle convention. Le projet de loi interdit les lock-out et les grèves pendant le processus, et il autorise le ministre du Travail à nommer un arbitre pour faciliter l'adoption d'une nouvelle convention. Le projet de loi C-46 prévoit que, si la société ferroviaire et le syndicat parviennent à un nouvel accord avant que l'arbitre ne rende une décision, le mandat de l'arbitre prendra fin.

Le processus d'arbitrage décrit dans le projet de loi est intéressant et très bien accueilli. C'est en Australie que j'ai entendu parler pour la première fois d'un processus similaire. L'arbitre reçoit de chacune des parties — l'employeur et les employés — une enveloppe qui contient leur meilleure offre finale sur les points encore en litige. Il choisit l'une ou l'autre des propositions au sujet de chacun des points sur lesquels il y a encore désaccord. D'après mon expérience en la matière, les arbitres n'aiment pas modifier ces offres finales. Ils préfèrent choisir l'une ou l'autre. Quels sont les effets de cette façon de faire? Alors qu'avant l'arbitrage les deux parties étaient aux antipodes, elles veulent éviter de paraître déraisonnables et avoir la meilleure chance possible que leur propre proposition soit retenue par l'arbitre. Leurs demandes se rapprochent donc, et il arrive même qu'elles se recoupent.

Les conventions imposées ne plaisent à personne, ni aux employeurs, ni aux syndicats, mais il faut tenir compte des intérêts plus importants dont le sénateur Comeau a parlé. Par exemple, en l'absence de convention, un autre syndicat pourrait tenter de s'imposer. Lorsqu'une convention est en vigueur, cela ne peut pas se produire, et le projet de loi C-46 met une convention en place. Dans l'intérêt à long terme des travailleurs, des chemins de fer, de l'agriculture, de l'industrie forestière, des industries extractives, de l'industrie de l'automobile et du Canada, il nous faut, à regret, adopter le projet de loi proposé. J'exhorte les sénateurs à adopter le projet de loi C-46.

L'honorable Leonard J. Gustafson : Honorables sénateurs, j'interviens brièvement pour souligner l'urgence du projet de loi. Les agriculteurs s'apprêtent à faire les semailles, et les produits qu'ils utilisent — les semences, les engrais, entre autres — sont transportés par chemin de fer. Une grève ne pourrait pas tomber plus mal. En outre, le transport du grain est de la plus haute importance. Si les agriculteurs ratent l'expédition de quelques wagons de grain, il leur est difficile de se rattraper ensuite. Il faut maintenir l'acheminement du grain, d'autant plus que, depuis quelques années, les agriculteurs sont aux prises avec d'autres problèmes graves. Ce genre de difficulté semble toujours survenir au moment où l'activité est la plus intense. C'est le cas en ce moment.

Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

ÉTUDE EN COMITÉ PLÉNIER

Son Honneur le Président : Quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je propose que le projet de loi soit renvoyé au comité plénier dès maintenant.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.


(Le Sénat s'ajourne à loisir et se forme en comité plénier sous la présidence de l'honorable Rose-Marie Losier-Cool.)

(1520)

La présidente : Honorables sénateurs, le Sénat se forme maintenant en comité plénier pour l'étude du projet de loi C-46, prévoyant la reprise et le maintien des services ferroviaires.

[Français]

Honorables sénateurs, l'article 83 du Règlement du Sénat énonce ce qui suit :

Lorsque le Sénat se forme en comité plénier, chaque sénateur doit occuper sa place. Un sénateur qui veut prendre la parole se lève et s'adresse au président du comité.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, de déroger à l'article 83?

Des voix : D'accord.

La présidente : La motion est adoptée.

Conformément à l'article 21 du Règlement du Sénat, l'honorable Jean-Pierre Blackburn, ministre du Travail, est escorté jusqu'à un siège du Sénat.

La présidente : Honorables sénateurs, je souhaite la bienvenue au ministre du Travail, l'honorable Jean-Pierre Blackburn, et aux fonctionnaires qui l'accompagnent.

Monsieur le ministre, voulez-vous faire une déclaration préliminaire?

L'honorable Jean-Pierre Blackburn (ministre du Travail) : Madame la présidente, je vous remercie. De mon ministère, M. Don Clark et Mme Ginette Brazeau m'accompagnent aujourd'hui.

Je vous avoue que je ne sais trop si je dois prononcer mon allocution ou si je ne dois pas y aller tout bonnement. J'aimerais préciser dans quel contexte on a déposé le projet de loi C-46 à la Chambre des communes. Il y a un conflit entre deux associations syndicales dont le Syndicat canadien des travailleurs unis des transports qui relève du syndicat américain.

Il y avait eu différentes discussions en cours de route entre les parties qui remontent même à septembre 2006. Nous avons eu des services de conciliation et de médiation. Tout à coup, la grève s'est déclarée et à ce moment, le Canadien National a demandé au Conseil canadien des relations industrielles si effectivement cette grève avait été déclenchée légalement par le syndicat canadien, puisque pour eux, seul le syndicat américain pouvait déclencher ladite grève.

Devant le Conseil canadien des relations industrielles, cela a pris un certain nombre de jours, et lorsqu'est venu le temps de comparaître pour entendre les avocats des parties pour savoir si la grève était légale ou non, le syndicat américain a refusé de reconnaître le représentant du syndicat canadien, un avocat, pour représenter ce syndicat. Le Conseil canadien des relations industrielles a décidé d'accorder cinq jours à l'avocat du syndicat pour se préparer. Pendant ce temps, la grève continue, cinq jours de plus.

En tant que ministre, je suis dans une situation où je dois attendre cette fameuse décision du Conseil canadien des relations industrielles. Pendant ce temps, l'économie canadienne souffre beaucoup. Nous avons des plaintes des fermiers, des producteurs de grain et, dans l'Ouest canadien, entre autres, des ports. Plusieurs bateaux — on parlait de 14 bateaux à ce moment — étaient retenus au port de Vancouver. Les propriétaires de ces bateaux paient des amendes jusqu'à 300 000 $ par jour parce qu'ils ne peuvent pas cueillir leur marchandise et le tout continue ainsi. Voici que le lundi soir, au moment où le Conseil canadien des relations industrielles qui entendait les parties devait rendre une décision, on m'informe qu'il n'est pas certain que la décision sera rendue le soir même. On en est rendu à 13 ou 14 jours. Je décide que nous avions assez attendu cette décision. J'appelle le président du syndicat canadien, suivi du Canadien National, pour les informer que cela a assez duré, qu'on ne peut plus attendre et qu'ils ont quelques heures pour s'entendre, sinon le gouvernement va procéder. Le président du syndicat canadien, avec qui je parlais au téléphone, me dit : « Monsieur le ministre, nous venons d'être congédiés en quelque sorte. » Ils n'étaient plus les représentants du syndicat pour parler au nom des Travailleurs unis des transports. On m'a référé à une autre personne à qui j'ai transmis le même message.

Le lendemain ou le surlendemain, on a déposé notre avis de motion et au moment de déposer le projet de loi C-46 à la Chambre des communes pour la première lecture, dans les minutes qui ont précédé, je recevais une demande de ne pas déposer le projet de loi parce qu'ils étaient sur le point de s'entendre. J'ai refusé, nous devions procéder, cela avait assez duré. Il n'y avait rien qui empêchait les parties de s'entendre ultérieurement même si on déposait notre projet de loi à l'étape de la première lecture. C'est ce qu'on a fait. On l'a déposé et dans les 36 heures qui ont suivi, elles se sont entendues.

En présence de nos médiateurs, une entente a été signée par les parties qui devait être soumise pour ratification par les employés du Canadien National. Suite à cela, les travailleurs ont décidé de retourner au travail. On a beaucoup apprécié ce geste; ils ont décidé de rentrer au travail dans la journée qui a suivi. C'était bien pour notre économie parce que, comme je vous le mentionnais, le Canada ne peut pas fonctionner sans trains. Quand vous avez une grève, peu importe où, aussitôt qu'un endroit ne fonctionne pas, cela a des répercussions partout. On était très heureux que tout cela soit maintenant réglé et nous attendions le fameux vote. À notre surprise ou à notre déception, je ne peux pas dire déception, c'est leur droit, ils ont refusé. Quand même, il y avait un problème par rapport à notre économie puisqu'à nouveau, on parlait de grève rotative. C'était très clair, nous l'avions dit publiquement, on ne jouerait pas avec cela. On ne pouvait pas laisser la situation se détériorer.

Le samedi suivant, les parties ont discuté. On s'est aperçu qu'il n'était pas possible d'arriver à une entente. Les parties étaient tellement loin l'une de l'autre et le conflit entre le syndicat américain et le syndicat canadien jouait. À quel niveau jouait-il? Ce sont les travailleurs qui peuvent le dire.

De là, compte tenu à nouveau des nombreuses requêtes de représentants du secteur portuaire, chimique, pétrolier et forestier, nous nous devions de procéder. C'était comme cela à la grandeur du Canada. Nous recevions des appels et des lettres nous demandant de légiférer parce que les grèves rotatives nuisent. Comme je vous le disais, s'il y a une grève rotative dans un cercle, dans une province, cela n'a pas simplement un impact dans la province mais partout au Canada.

(1530)

C'est là que nous avons déposé cette loi. Je vais vous exposer maintenant ce qu'il y a derrière cela.

Est-ce que le gouvernement est méchant lorsqu'il veut adopter une telle loi ou est-ce qu'il assume ses responsabilités? Pour ma part, j'estime que nous assumons nos responsabilités. À partir du moment où vous, le Sénat, aurez ratifié cette loi, ils devront retourner au travail, sous peine d'amendes, les amendes usuelles dans ce type de situation.

Mais ce qui est intéressant dans notre loi, ce sont deux dimensions. En premier lieu, nous allons nommer un arbitre et l'arbitre dispose de trois mois pour discuter et voir si les parties peuvent arriver à une entente. Si les parties n'arrivent pas à une entente après trois mois, les sections qui auront fait l'objet d'une entente vont prévaloir mais pour les sections pour lesquelles on ne sera pas parvenu à une entente, l'arbitre demandera à la fois au syndicat et au Canadien National de faire des propositions. L'arbitre ne choisira pas un compromis entre les deux mais il choisira l'une ou l'autre, la solution A ou la solution B.

En faisant ainsi, on sait que personne ne souhaite voir passer la solution de l'autre plutôt que la sienne. Nous estimons qu'en raison de l'importance du différend qui oppose les parties, cela va les forcer à trouver une solution à ce conflit entre le Canadien National, l'employeur, et les Travailleurs unis du transport, le syndicat.

En parallèle, il est clairement indiqué dans notre loi, à l'article 13 ou 14, que rien n'empêche les parties de s'entendre. Si elles s'entendent, c'est ce qui prévaut. Mais nous voulions au moins que l'économie canadienne cesse d'être perturbée. On ne peut pas rester dans l'inquiétude. Les entreprises ont besoin de leurs marchandises, les régions éloignées ont besoin de nourriture et des services essentiels, les ports doivent fonctionner.

Savez-vous ce que notre Code du travail, à la partie 1, définit comme services essentiels? C'est lorsque votre vie est menacée ou que la santé du public est menacée. Dans la réalité de tous les jours, le transport ferroviaire est un service essentiel. Cela ne peut pas fonctionner sans trains.

C'est pour cela que nous avons rédigé cette loi et nous intervenons maintenant auprès de vous pour que vous puissiez la ratifier. Je pense qu'elle est sensée et saine.

Pour ma part, je suis en faveur de l'équilibre entre les deux parties et c'est ma responsabilité, comme ministre du Travail, de veiller à ce que chacune des deux parties puisse négocier. Dans ce contexte, lorsqu'on voit que ce n'est pas possible, nous devons assumer nos responsabilités.

Voilà, je suis prêt à répondre à vos questions.

[Traduction]

La présidente : Merci, monsieur le ministre. Si l'un de vos collaborateurs veut ajouter quelque chose ou compléter les réponses, il le peut.

Je prends maintenant ma liste des sénateurs qui souhaitent poser des questions.

Le sénateur Gustafson : Le ministre a-t-il une idée du montant des droits de stationnement pour le secteur agricole?

[Français]

M. Blackburn : Du côté du secteur agricole, on parle de 300 000 $ américains par jour. Mais globalement, du point de vue de l'économie canadienne, selon Statistique Canada, nos exportations ont été réduites d'un milliard de dollars par rapport à ce qu'elles auraient dû être normalement au cours du mois de février. La plus grande partie de cette somme est attribuable à cette grève du Canadien National; un milliard de dollars, voilà ce que cela a coûté à l'économie canadienne.

[Traduction]

Le sénateur Gustafson : Le ministre sait-il quel pourcentage du transport ferroviaire les céréales représentent? Quel pourcentage de la totalité des activités ferroviaires le transport des céréales représente-t-il?

[Français]

M. Blackburn : Sénateur, j'aimerais pouvoir répondre précisément à votre question, mais elle est tellement précise, sur un secteur particulier, que je n'ai pas cette information.

Cependant, je me permets de vous dire que mes collègues de la Chambre des communes m'ont dit à quel point les fermiers étaient heureux que nous adoptions cette loi, ils n'ont cessé de remercier les députés d'avoir assumé leurs responsabilités. Vous avez dû même remarquer que le Parti libéral, qui représente l'opposition officielle, nous a également appuyés.

Je pense que les gens ont bien vu que, dans la mesure où il ne semble pas y avoir de solution à court terme, on ne peut pas laisser notre économie en situation de fragilité. C'est dans ce contexte que nous avons déposé ce projet de loi hier à la Chambre des communes, où le vote s'est fait tard hier soir.

Le sénateur Ringuette : Monsieur le ministre, vous avez indiqué dans vos commentaires d'ouverture que l'arbitre qui sera choisi par votre ministère aura une période de trois mois pour discuter avec les parties.

Par contre, je ne trouve rien dans le projet de loi qui indique cette période de trois mois. Est-ce que vous pourriez m'indiquer où cela se situe?

M. Blackburn : Le paragraphe 11(1) fait état de la période de 90 jours; c'est mentionné :

11. (1) Sous réserve de l'article 13, dans les 90 jours suivant sa nomination ou dans le délai supérieur que peut lui accorder le ministre, l'arbitre

a) détermine les questions qui, à la date précisée pour l'application de l'alinéa 10(1)a), faisaient l'objet d'une entente entre l'employeur et le syndicat;

b) détermine les questions qui, à cette date, faisaient toujours l'objet d'un différend;

c) choisit, pour régler les questions qui font l'objet d'un différend, soit l'offre finale de l'employeur, soit celle du syndicat;

d) rend une décision sur les questions visées au paragraphe et en envoie copie à l'employeur et au syndicat;

e) transmet une copie de sa décision au ministre.

C'est le ministre du Travail qui choisit l'arbitre dans la situation présente. Cependant, nous avons jugé bon de contacter les parties pour vérifier si elles avaient un arbitre ou si elles pouvaient s'entendre sur le choix d'un arbitre. Dans la mesure où elles peuvent arriver à une entente là-dessus, nous serions évidemment réceptifs à ce type de suggestion. Si ce n'est pas possible lundi, nous procéderons immédiatement pour faire en sorte que les choses puissent progresser.

Le sénateur Ringuette : Vous nous confirmez, si je lis bien l'article 11, qu'à l'intérieur des trois mois suivant l'adoption de ce projet de loi et la nomination d'un arbitre, tout le processus de discussion entre les parties des questions qui seront en litige, soumises à l'arbitre par les deux parties, et également la décision de l'arbitre qui composera la nouvelle convention collective des parties, seront conclus?

M. Blackburn : À partir du moment où l'arbitre est nommé, il dispose de cette période de 90 jours, à moins que le ministre décide de prolonger cette période pour des raisons qui, à ce jour, me sont inconnues. Bien entendu, nous souhaitons un accord entre les parties.

Après 90 jours, l'arbitre va demander en quelque sorte quels sont les points sur lesquels les deux parties conviennent. Admettons que 90 p. 100 des points discutés font l'objet d'accords. Pour ce qui est des 10 p. 100 pour lesquels il y a un désaccord, il va demander à l'un et l'autre de faire sa proposition, et il va choisir entre A ou B pour la partie où il subsiste un différend.

Mais là où il y a un accord, c'est accepté.

Le sénateur Ringuette : La réponse du ministre à ma question est- elle que, oui, tout le processus sera conclu dans une période de 90 jours?

(1540)

M. Blackburn : Comme je vous le mentionnais, à partir du moment où l'arbitre est nommé, il y a une période de 90 jours, à moins que le ministre, à sa discrétion, décide de prolonger cette période. Nous le ferions, bien sûr, dans une situation où tout le monde a intérêt à prolonger de quelques jours, mais dans la loi, c'est 90 jours.

[Traduction]

Le sénateur Di Nino : Bienvenue, monsieur le ministre. Vous nous avez donné une indication de la perte de possibilités d'exportation occasionnée par la grève et du coût pour notre économie. Pourriez- vous nous parler des répercussions de la grève sur l'économie dans son ensemble? Peut-être y a-t-il des secteurs particuliers que vous voudriez mentionner, par exemple la base industrielle dans le Sud de l'Ontario, la région d'où je viens.

[Français]

M. Blackburn : J'ai mentionné plus tôt que Statistique Canada a vu que nos exportations, qui se chiffraient normalement à cinq milliards de dollars par mois au cours du mois de février, n'ont été que de quatre milliards de dollars. On estime les pertes à un milliard de dollars au niveau de nos exportations et cela se répartit dans les différents secteurs de notre activité économique, puisque nos exportations sont ainsi comptabilisées à la fin de chaque mois.

Dans la seule journée d'hier ou avant-hier, nous avons reçu 70 appels téléphoniques de diverses compagnies nous demandant de légiférer et de ne pas attendre, en plus de nombreuses lettres d'entreprises qui nous sont parvenues.

Je vous donne l'exemple des 14 jours : rappelez-vous Ford, en Ontario, qui a dû couper les quarts de travail parce qu'ils n'avaient pas la marchandise; rappelez-vous les deux mines de potasse, en Saskatchewan, qui avaient dû être fermées; rappelez-vous les 14 bateaux qui étaient immobilisés au port de Vancouver; le secteur de la foresterie qui nous interpellait, même dans ma propre région, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, où on nous demandait d'agir.

Cela s'est donc réparti ainsi un peu partout au pays, parmi les fermiers et les producteurs de grain, entre autres. Les difficultés étaient assez généralisées pour chacune des provinces du Canada. C'est pour cette raison que l'on se demande combien de temps on doit attendre et laisser notre économie mal fonctionner lors des grèves rotatives. Devons-nous attendre cinq jours quand cela va mal? Douze jours? Trente-deux jours? Il faut agir à un moment donné. C'est pour cela qu'on a dit qu'il y a eu 14 jours de grève, cela a fait extrêmement mal, et en plus, nous étions coincés dans ce conflit entre le syndicat américain et son équivalent canadien. C'est ce conflit qui a occasionné des délais de la part du Conseil canadien des relations industrielles; le Conseil a dû entendre les parties avant de rendre une décision.

Toutefois, malgré la loi, il n'y a rien qui empêche, dans une heure, les deux parties de dire qu'elles en sont venues à une entente. La loi est là pour nous assurer qu'il n'y a pas de grève rotative ou autre qui pend sous le nez des différents secteurs de notre industrie et de l'activité économique.

Vous auriez pu le voir hier, par le vote à la Chambre des communes : 195 députés ont voté pour et 71 contre. De plus, nous avons presque établi un record, hier, en adoptant une loi spéciale en aussi peu de temps — même si on a trouvé le processus long à la Chambre des communes. Cela vous donne une idée combien cette loi est bien reçue.

De plus, je porte ceci à votre attention : habituellement, pour les lois spéciales, vous voyez des manifestations à Ottawa demandant au gouvernement de ne pas adopter telle ou telle loi. Cela n'a pas été le cas. Notre Parlement a assez de bon sens pour être capable de dire que, dans l'intérêt de notre pays, on se devait d'agir.

[Traduction]

Le sénateur Di Nino : Ma question complémentaire porte sur un sujet que vous avez abordé. Il s'agit des répercussions de ce genre d'action sur l'économie sur les personnes concernées, sur les gens. Nous avons commencé à voir, et j'aimerais que vous me le confirmiez, des pertes d'emplois dans tous les secteurs de l'économie pouvant être attribuées directement à cette grève. Est- ce juste, monsieur le ministre?

[Français]

M. Blackburn : Non, vous ne vous trompez pas. Entre autres, chez Ford, ici en Ontario, des quarts de travail ont été coupés parce que Ford n'était pas en mesure de recevoir sa marchandise. Si vous fabriquez une automobile et que vous n'avez pas les boulons, vous ne pouvez pas aller plus loin.

Du côté des fermiers, c'était extrêmement grave; du côté de la forêt, on estime à 1 300 les emplois qui ont été perdus. Tout le monde retenait un peu son souffle en se disant que c'était pour se régler demain. À un moment donné, il fallait que cela prenne fin.

C'est le conflit entre les deux syndicats qui a causé ce délai majeur de 14 jours. En 1999, le Code canadien du travail a été revu. Mais en fait, c'est la première fois depuis 1997 que l'on doit adopter une loi spéciale, parce que la partie I du Code canadien du travail fonctionne bien. L'équilibre est présent et il permet aux employeurs d'utiliser des travailleurs de remplacement en cas de grève. Mais cela ne peut pas se faire pour miner la représentativité du syndicat. Et si jamais le syndicat sent que les travailleurs veulent miner sa représentativité, ils peuvent, à ce moment-là, aller devant le Conseil canadien des relations industrielles et la question est immédiatement traitée. Je peux dire que, sur les 19 fois que les gens sont allés devant le Conseil canadien des relations industrielles, les demandes ont été jugées irrecevables 13 fois, trois fois on a dit non et trois causes sont à l'étude devant le Conseil canadien des relations industrielles. La loi fonctionne bien actuellement. Je répète que c'est une question d'équilibre. Si le syndicat est extrêmement fort et peut paralyser l'économie, il faut que cela arrête quelque part parce que l'équilibre est brisé. D'un autre côté, si le patron est omnipotent et trop puissant par rapport au syndicat, l'équilibre est également brisé.

C'est pour cette raison que nous considérons que la loi que nous avons, la partie I du Code canadien du travail, montre un bon équilibre actuellement. Mais malheureusement, il peut arriver des situations comme celle-ci.

En 2004, le Conseil canadien des relations industrielles a dû déterminer si le Canadien National était un service essentiel. Le Conseil canadien des relations industrielles avait répondu par la négative. Lorsqu'on examine la loi, c'est uniquement lorsque la vie d'une personne ou la santé de la population est menacée que cela devient un service essentiel. Le Conseil a jugé que ce n'était pas le cas.

Si le projet de loi C-257 déposé par le Bloc québécois et interdisant les travailleurs de remplacement avait eu force de loi, à partir du 24 février, moment approximatif où les parties se sont entendues pour qu'il y ait un accord de principe, les employés n'auraient pas pu rentrer au travail. Il aurait fallu attendre deux mois que tout le monde ait voté, et une fois le résultat du vote connu, s'il était positif, ils auraient pu rentrer au travail. Pouvez-vous imaginer deux mois sans trains au Canada?

On peut apprécier les principes et les belles orientations, mais il faut évaluer leur impact sur la vie de tous les jours, sur votre vie à tous et sur celle des gens que l'on représente. On est là pour servir les citoyens. Dans notre sagesse, on est là pour faire ce qu'il faut afin de faire fonctionner l'économie pour que les employés puissent recevoir leur salaire. S'ils sont coincés dans un conflit et qu'ils sont impuissants, le Parlement doit agir, et c'est ce qu'il a fait.

(1550)

[Traduction]

Le sénateur Banks : Monsieur le ministre, nous vous voyons de l'autre côté de la barre à l'occasion. Nous sommes heureux de vous voir de ce côté-ci. J'espère que vous direz à vos collègues le plaisir que vous aurez eu à prendre la parole dans un endroit où tout le monde vous écoute, où l'on dispose du temps nécessaire pour poser une question complète et où l'on vous accorde le temps nécessaire pour y répondre. J'espère que cela vous plaît.

Plusieurs amendements ont été apportés au projet de loi hier soir, je crois. À ce que je comprends, l'article 2 a été amendé pour tenir aussi compte de l'entente concernant BC Rail, parce qu'une autre compagnie ferroviaire est visée. Le deuxième amendement apporté à l'article 2 — l'entente telle que rédigée au départ visait les Travailleurs unis des transports — a ajouté ce qui suit :

[...] ou tout autre syndicat accrédité par le Conseil canadien des relations industrielles pour représenter les employés.

Quelles circonstances possibles ont rendu cet amendement nécessaire?

[Français]

M. Blackburn : La question du sénateur Banks est tout à fait appropriée. Lorsque nous rédigeons un projet de loi, on le fait dans le contexte du moment présent et en tenant compte de ce qui arrivera dans le futur.

En rédigeant le projet de loi, nous nous sommes aperçus que BC Rail, une entité subsidiaire du CN, faisait partie de la table de négociations, mais on ne l'avait pas incluse. S'il y avait eu une entente au CN et que BC Rail n'avait pas été partie prenante à l'entente, il aurait pu y avoir un lock-out de leur côté. C'est pourquoi on veut s'assurer qu'ils soient partie prenante à l'entente.

La raison pour laquelle on a exigé la mention « ou tout autre syndicat », c'est pour vous rappeler qu'actuellement les teamsters sont devant le Conseil canadien des relations industrielles et veulent être reconnus comme les porte-parole des Travailleurs unis des transports. Nous ne savons pas encore quelle sera la décision du Conseil canadien des relations industrielles, mais on veut assurer que, quel que soit le syndicat qui représentera les Travailleurs unis des transports, c'est lui qui sera visé par cette loi. C'est dans ce contexte qu'on a prévu cela pour se donner une protection devant cette éventualité.

[Traduction]

Le sénateur Banks : Concernant cette question, monsieur le ministre, j'étais dans l'erreur. Je pensais qu'au Canada, les lois syndicales n'autorisaient pas le maraudage pendant la durée d'une convention collective valide, quand des gens travaillaient en vertu de cette convention. Vous avez dit, je crois, que les Teamsters ont pris des mesures pour être reconnus porte-parole des travailleurs pendant qu'une convention était en vigueur. Est-ce la loi ou vos paroles que je comprends mal?

[Français]

M. Blackburn : Dans le Code canadien du travail, il y a une période de maraudage qui est permise et c'est cette question qui est actuellement devant le Conseil canadien des relations industrielles. Il s'agit de déterminer si les Teamsters pourraient être reconnus comme étant les représentants du syndicat des Travailleurs unis des transports.

Nous ne savons pas quelle sera l'issue de cette question, mais si jamais tel était le cas, ils sont partie prenante au projet de loi C-46. Il faut s'assurer qu'il n'y aura pas de lock-out et de grèves rotatives quelconques par l'un ou l'autre des syndicats. Des amendes de 1 000 $ par jour sont prévues pour un employé. On parle de 50 000 $ par jour pour les dirigeants du syndicat et de 100 000 $ par jour pour le syndicat ou pour la partie patronale.

[Traduction]

L'article 11 du projet de loi décrit le processus d'arbitrage au cours duquel l'arbitre choisit, dans le but de régler les questions qui font toujours l'objet de différends, l'une ou l'autre des offres finales du syndicat et des employés, en l'accompagnant du libellé qui peut être inscrit dans une convention.

L'alinéa d) proposé, après avoir stipulé que l'arbitre choisit l'une ou l'autre de ces offres, prévoit que l'arbitre « rend une décision sur les questions visées [...] »

Est-ce que l'arbitre est tenu d'inscrire le libellé de l'offre qu'il choisit, soit celle du syndicat ou celle de l'employeur, dans l'entente de telle sorte qu'elle en fera partie, ou est-ce que l'arbitre peut modifier la teneur de l'une ou l'autre offre? Selon l'application classique de ce modèle, l'arbitre choisit l'une ou l'autre et ne peut la modifier, ce qui mène souvent à la convergence.

Ce projet de loi autorise-t-il l'arbitre à modifier l'une ou l'autre de ces offres finales?

[Français]

M. Blackburn : La partie dont je suis le plus fier dans cette loi, c'est la fameuse proposition de l'offre finale. Traditionnellement dans un conflit de travail, lorsqu'un arbitre intervient il écoute la partie A et la partie B. Il examine les points sur lesquels les parties s'entendent et lorsqu'à la fin les parties ne s'entendent pas sur certains points, souvent l'arbitre va se positionner au milieu.

Compte tenu de la situation et de l'importance de l'enjeu, je pense que l'offre finale est une très bonne proposition. Je répète la façon dont cela se passe dans les faits. Les parties sont tenues de négocier, elles ont trois mois pour le faire. Elles négocient et s'entendent sur un certain nombre de points qui feront partie de la convention collective.

Concernant les points sur lesquels les parties ne s'entendent pas, l'arbitre va demander aux parties de proposer une offre respective. L'arbitre n'ira pas entre les deux, il ira à A ou à B. S'il décide qu'il prend B, c'est ce qui fera partie de la convention collective, incluant bien sûr les points sur lesquels les parties se sont entendues lors des discussions antérieures. C'est l'offre finale qui forcera tout le monde à trouver une solution parce que chacun craint un peu que ce soit la position de l'autre qui prévale. C'est humain. Nous pensons que cela les incitera à en arriver à une entente, du moins c'est ce que nous souhaitons.

Légiférer n'est vraiment pas le souhait de ce gouvernement ni celui du présent ministre du Travail, mais compte tenu de l'importance de l'enjeu, on n'avait pas le choix. Malgré la loi, les parties peuvent toujours s'entendre.

[Traduction]

Le sénateur Day : J'aimerais d'abord revenir sur la question de l'article 11 parce que je ne comprends pas encore pourquoi l'alinéa 11(1)(d) est nécessaire. Si vous lisez le paragraphe 11(1), dans les 90 jours, l'arbitre, à l'alinéa (b), déterminera les questions et, à l'alinéa (c), fera un choix. Ainsi, tout est résolu : il détermine les questions qui font l'objet d'une entente et celles qui font l'objet d'un différend, et ensuite il effectue un choix entre les deux. Pourquoi ajoute-t-on l'alinéa (d) selon lequel une décision doit être rendue puisque l'arbitre a déjà choisi et déterminé? La réponse est-elle — et peut- être pourriez-vous m'aider à comprendre — que rendre une décision est quelque chose qui est nécessaire en vertu de la législation en vigueur; le fait de rendre une décision diffère de celui de choisir et de déterminer. Pourriez-vous nous éclairer à ce sujet?

[Français]

M. Blackburn : J'aimerais préciser certains points. Les parties discutent et s'entendent sur 90 points sur 100. Pour les dix points en litige, l'arbitre suggère aux parties de faire une proposition et choisit A ou B. Il ne prend pas trois points de A et sept points de B. Une fois qu'il a la proposition devant lui, il rend une décision et m'en fait parvenir une copie. C'est ce qui fera partie de la convention collective qui régira les parties.

(1600)

C'est ce qui est intéressant dans ce projet de loi. D'ailleurs, on l'a déjà fait en 1994, et cela s'est avéré quelque chose de bien.

Le sénateur Day : Monsieur le ministre, une décision a déjà été prise. Si vous voulez voir les autres articles, déterminez les questions et choisissez. Pourquoi rendre une décision après que toutes les décisions ont déjà été prises? C'est ce que je ne comprends pas.

M. Blackburn : Si vous voulez, on va relire cet article. Effectivement, je pense que c'est la pièce maîtresse, en plus des amendes prévues dans ce projet de loi.

11. (1) Sous réserve de l'article 13, dans les quatre-vingt-dix jours suivant sa nomination ou dans le délai supérieur que peut lui accorder le ministre, l'arbitre;

a) détermine les questions qui, à la date précisée pour l'application de l'alinéa 10(1)a), faisaient l'objet d'une entente entre l'employeur et le syndicat;

b) détermine les questions qui, à cette date, faisaient toujours l'objet d'un différend;

Il est au bout de ses 90 jours et il dit : voilà ce sur quoi on ne s'entend pas. Ensuite, il choisit pour régler les questions qui font l'objet d'un différend, soit l'offre finale de l'employeur, soit celle du syndicat. Il décide laquelle il prend.

Le sénateur Day : Il décide entre les deux?

M. Blackburn : C'est cela. Il rend ensuite une décision par écrit.

Le sénateur Day : Il écrit sa décision après?

M. Blackburn : Et il envoie une copie aux parties.

Le sénateur Day : La décision est déjà prise, mais elle sera écrite.

Ma deuxième question concerne les articles 6 et 8 de ce projet de loi. Si je comprends bien l'article 6, les conventions collectives qui existent maintenant seront prolongées jusqu'à ce que l'article 11 et l'arbitre puissent faire une autre convention collective. Alors les conventions collectives qui existent maintenant seront prolongées.

L'article 8 signifie que le ministre nomme un arbitre, mais l'arbitre peut être nommé dans dix jours, deux ans, cinq ans. Il n'y a pas de délai indiqué. Cela veut dire que les conventions collectives qui existent maintenant seront prolongées jusqu'à ce que les 90 jours commencent à l'article 11, après que l'arbitre soit nommé. Pourquoi n'avez-vous pas inclus dans ce projet de loi une date pour nommer un arbitre?

M. Blackburn : Je pense que vous comprendrez que le gouvernement ne peut pas jouer, ce n'est pas un jeu. Nous avons d'ailleurs déjà entamé des discussions pour identifier un arbitre qui pourrait faire l'affaire des deux parties. Si un accord n'est pas conclu pour la nomination de cet arbitre, nous, dès ce lundi, allons procéder pour fixer le choix d'un arbitre qui va amorcer le processus pour un délai de 90 jours.

Entre-temps, la convention collective continue à courir, le temps justement qu'il y ait une entente entre les parties. Il faut bien penser que s'il y avait une grève actuellement, il n'y aurait rien de tout cela. Les employés savent que leur paie va continuer à rentrer, qu'ils vont continuer à travailler, les entreprises savent que leurs matières premières vont arriver chez elles. Ils savent que nous sommes un pays fiable. Ils peuvent penser que la marchandise va être livrée et exportée : le Canada a toujours eu cette reconnaissance à l'échelle internationale.

Dans ce contexte, je rappelle que, dès lundi, la nomination aura lieu et on peut imaginer que si on ne faisait pas cela, sur la place publique, on vivrait de mauvais jours. On ne peut pas jouer à ce jeu.

Le sénateur Day : J'ai une autre petite question. Pour l'accord, est- ce qu'on peut avoir l'assurance de votre part que l'action sera prise dans une période de temps raisonnable pour nommer un arbitre? Ce n'est pas égal. Il n'est pas bon que les syndicats sachent que la convention collective sera prolongée et que le gouvernement ne va pas nommer un arbitre aussitôt que possible.

M. Blackburn : À titre de précision pour tous les représentants de cette assemblée, lorsqu'on veut choisir un arbitre, des fois, on prend une liste de dix personnes. On appelle le premier, il ne veut pas. On appelle le deuxième, il a un conflit d'intérêts, il ne peut pas prendre la cause. Ce n'est pas toujours évident de trouver tout de suite. Déjà, des démarches sont entamées. Des gens ont été identifiés par le gouvernement. Cependant, on a décidé de ne pas bouger immédiatement. On a commencé à regarder parmi un certain nombre d'arbitres et un certain nombre de gens ont été identifiés. De notre côté, cependant, on dit qu'on ne bouge pas, qu'on va aller voir le syndicat et le Canadien National pour vérifier s'ils ont déjà un arbitre qui ferait l'affaire des deux parties. Si tel est le cas, on veut le connaître et collaborer. Je peux vous donner l'assurance que lundi, nous agissons.

Le sénateur Dallaire : Monsieur le ministre, bienvenue dans notre humble demeure. J'espère que vous ne trouvez pas trop tannant de venir dans un endroit dont votre collègue, le ministre des Travaux publics, a dit que les gens qui y travaillent n'ont pas d'envergure. On essaie de remplir notre rôle constitutionnel quand même et nous espérons que votre temps ne sera pas trop perdu dans cet exercice.

Dans le préambule du projet de loi, et suite à l'argumentation que vous avez donnée, je ne retrouve pas le volet de la sécurité nationale. Je vais vous donner deux exemples. Premièrement, nous sommes dans la période d'inondation et on sait qu'à Winnipeg, il y a eu, voilà quelques années, une inondation majeure qui a nécessité un déploiement significatif des membres des forces armées avec beaucoup d'équipements. On a alors utilisé le système ferroviaire d'une façon intensive. La possibilité qu'un tel scénario se présente exigerait nécessairement que les atouts soient là pour répondre à cette urgence.

Deuxièmement, du revers de la médaille, on a des troupes déployées outre-mer. Elles ont besoin de ravitaillement et d'entraînement. De nombreux centres d'entraînement sont dans l'Ouest canadien. Certains équipements, par exemple, les véhicules blindés, ne peuvent être déployés que par le train. Ne serait-ce pas une raison suffisante d'envisager l'ampleur du risque du point de vue de la sécurité nationale et de l'appui aux troupes? Cela justifierait un projet de loi résolu et nous pourrions l'inclure dans l'argumentation.

M. Blackburn : D'abord, je vais faire une remarque sur le Sénat. Lorsque j'étais très jeune, à l'âge de cinq ans, mon grand-père était maire de Chambord, une petite municipalité au Saguenay-Lac Saint-Jean. Lorsque j'arrivais à la maison, il m'appelait M. le ministre. Je ne sais pas ce dont j'avais l'air en termes d'habillement ! Lorsque je fus président du regroupement des centres villes du Québec, j'étais dans la trentaine, les collègues autour de la table m'appelaient M. le sénateur. Je ne sais pas pourquoi, mais être ici aujourd'hui est un honneur et un privilège. J'ai une très belle opinion du Sénat.

Ayant travaillé au dossier constitutionnel avec le sénateur Beaudoin, un monsieur que j'ai adoré puisque j'ai travaillé avec lui au sein de deux comités constitutionnels, je sais combien les sénateurs peuvent travailler, consacrer de nombreuses heures et être très professionnels dans ce qu'ils font. Vous ne m'entendrez pas parler négativement du Sénat, loin de là.

(1610)

Concernant cette grève du Canadien National, il est vrai que quand une grève se prolonge et qu'il y a des grèves rotatives, la question de la sécurité intervient. Qu'on le veuille ou non ce sont des travailleurs de remplacement qui peuvent prendre leur place, cela fait partie du décor. D'où notre décision de penser que, dans chaque secteur de notre activité économique, que ce soit une petite entreprise, une moyenne ou une entreprise plus importante, la petite entreprise a aussi besoin de sa marchandise, elle a besoin de payer ses employés et l'employé a aussi besoin de sa paie pour sa famille. Nous sommes tous liés dans notre économie par le bon fonctionnement de notre système en général. Encore là, je vais remercier les partis d'avoir collaboré sur ce sujet parce qu'ils auraient pu mettre fin au GO Train à Toronto, Imaginez-vous à quel point cela aurait été catastrophique.

Pour moi, le Canadien National, le service ferroviaire, c'est un service essentiel pour le bon fonctionnement économique du Canada, et également pour faire en sorte qu'on serve à la fois l'ensemble des gens qui ont besoin de biens et de marchandises, que ce soit pour nos troupes ou peu importe le secteur de notre activité économique. Il faut être vigilant et en tenir compte. En plus, dans le cas de nos troupes, on voit ce qui se passe en Afghanistan, à quel point ce n'est pas évident chaque jour; quand on sert son pays, il peut arriver des événements malheureux. Vous y avez fait référence vous aussi, et vous avez été témoin d'importants exemples que nous avons vécus auparavant.

Le sénateur Dallaire : Nécessairement, avec les acquisitions d'avions de transport stratégique, notre dépendance à la disponibilité ferroviaire va baisser et on aura un meilleur équilibre. Tout de même, j'aimerais porter à votre attention que, même pendant la Deuxième Guerre mondiale, des débardeurs sont allés en grève et ont causé des ennuis significatifs, même en temps de guerre.

Donc, dans le cadre de votre responsabilité, le volet de la sécurité, de la défense nationale et d'aide aux pouvoirs civils, que ce soit une Crise d'octobre ou des inondations, il faut que ce soit des éléments pondérés et articulés dans la même mesure que les autres éléments de notre société.

M. Blackburn : Sénateurs, comme je vous le mentionnais tout à l'heure, le Canadien National, d'après le Code canadien du travail, n'est pas considéré comme un service essentiel. Cependant, par rapport au fonctionnement de notre pays, je pense que c'est un service essentiel. C'est un service critique pour notre sécurité, pour notre santé, pour nous nourrir et pour continuer à faire des affaires et avoir un pays prospère.

Dans ce contexte, votre argument et votre observation sont tout à fait justifiés et confirment davantage le besoin de cette loi.

[Traduction]

Le sénateur Bryden : Merci, monsieur le ministre, de vous joindre à nous. Est-ce une grève légale?

[Français]

M. Blackburn : Oui, c'est une grève légale.

[Traduction]

Le sénateur Bryden : Si je ne m'abuse, vous avez dit qu'elle a commencé à cause d'un conflit entre les syndicats américains et le syndicat canadien. S'agissait-il d'un conflit de compétences?

[Français]

M. Blackburn : Lorsque la grève a été déclenchée, c'était une décision des représentants du syndicat. Une fois que la grève a été déclenchée par le représentant du syndicat canadien des Travailleurs unis des transports, le Canadien National, l'employeur, a dit au syndicat canadien : vous n'aviez pas le droit de déclencher la grève, seul le président du syndicat américain a ce droit. Il s'est rendu devant le Conseil canadien des relations industrielles pour leur dire : voici ce que nous pensons, nous soumettons cela à votre décision. Les jours ont commencé à passer et au bout de cinq ou six jours, lorsque le Conseil canadien des relations industrielles est venu pour entendre les parties, le syndicat américain a dit qu'il ne reconnaissait pas l'avocat de leur syndicat au Canada pour témoigner devant le Conseil canadien des relations industrielles, et qu'il voulait avoir son propre avocat américain ou peu importe.

C'est là que le Conseil canadien des relations industrielles a accordé un délai de cinq jours additionnels pour permettre au nouvel avocat en question de prendre connaissance de la cause et de se préparer.

Pendant ce temps, le train ne fonctionne pas, l'économie du Canada en mange un coup. On était pris dans cette situation où, à cause du conflit entre les deux syndicats, tout a dégénéré sous cet angle. Mais la grève comme telle était légale et elle a été déclenchée par le syndicat ici au Canada.

[Traduction]

Le sénateur Bryden : En ce qui concerne le Conseil canadien des relations industrielles, la grève a été déclenchée de façon légitime pour pouvoir être considérée légale au Canada. Est-ce exact? Il me semble qu'il y avait conflit entre la charte du syndicat à l'échelle internationale et ce qui s'est passé ici. Avez-vous obtenu une réponse quant à savoir si les travailleurs étaient légalement en grève aux termes de leur propre charte?

[Français]

M. Blackburn : Vous avez raison, telle est mon interprétation. À partir du moment où le syndicat canadien déclenche la grève, il estime qu'il est dans ses droits, qu'il est de son autorité de déclencher la grève parce que tous les mécanismes ont été suivis comme la loi le prévoit. C'est ensuite que le Canadien National a interprété la Charte et a dit : non, le syndicat canadien n'avait pas le droit de déclencher la grève; et il a porté la cause devant le Conseil canadien des relations industrielles qui, lui, devait trancher. Le Conseil a dit que c'était légal, d'ailleurs.

Au bout de dix, 12 jours, le Conseil canadien des relations industrielles a dit que la grève était légale, que la décision du syndicat canadien de déclencher la grève était légale.

[Traduction]

Le sénateur Bryden : S'il n'y avait pas eu cette confusion, auriez- vous laissé la grève se poursuivre pendant 14 jours avant d'intervenir?

[Français]

M. Blackburn : On parle toujours d'hypothèses. Cela aurait dépendu du fait de savoir s'il y avait espoir que les parties s'entendent. C'est toujours cela. Quand on regarde un conflit, on se demande si l'horizon est proche, si c'est une question d'heures, de jours, de semaines ou de mois. Cela change la donne. Je ne peux pas vous répondre de façon précise, mais il est clair qu'il faut que le pays fonctionne. Il faut que les gens aient leur paie, il faut que les entreprises aient leurs biens pour être capables de produire. C'est le fondement même de notre pays.

[Traduction]

Le sénateur Bryden : Monsieur le ministre, je n'ai pas grand-chose de plus à ajouter. Comme nous le savons tous, notre système de négociation collective repose sur le principe fondamental de négociations collectives libres. Convenez-vous que les travailleurs ont le droit de faire la grève, c'est-à-dire le droit de refuser de fournir leurs services, et que l'employeur a le droit de faire fonctionner son entreprise? Essentiellement, ce sont les principes fondamentaux.

Le problème que j'essaie de mettre en lumière, c'est que, dans la présente situation, ces droits fondamentaux ont très peu de poids. Quelle est la valeur du droit de grève pour ces employés et quelle est la valeur du droit de lock-out pour l'employeur si, dès que survient une véritable pression financière ou économique, ces droits ne sont pas respectés et que tout le monde fait appel au Parlement?

(1620)

[Français]

M. Blackburn : En vertu du Code canadien du travail, il y a trois façons de procéder lorsqu'il y a un conflit. Il y a d'abord la conciliation, où on nomme un conciliateur qui rencontre les parties et tente de les mener vers une entente.

Lorsque le processus de conciliation ne fonctionne pas, on peut nommer un médiateur qui, une fois nommé, tente de faire en sorte que les parties en arrivent à une entente. Enfin, suite à ce processus, il reste l'arbitrage, qui est une autre possibilité.

Règle générale, le processus fonctionne bien. Je dirais que notre service de médiation performe bien. Récemment, des représentants du Chili sont venus nous rencontrer pour recevoir une formation sur notre système.

Au Canada, les grèves ne durent pas indéfiniment, mais dans le cas présent, le conflit entre les syndicats américains et le syndicat canadien ne contribuait pas à une entente parce que lorsqu'une partie voulait s'entendre, l'autre partie ne voulait pas. Dans un tel cas, on n'arrive à rien. Le conflit entre les parties a fini par «empoisonner» la situation actuelle, d'où la nécessité d'une loi du Parlement.

Je répète qu'il est clairement mentionné dans notre projet de loi que si les parties veulent s'entendre, elles peuvent le faire, et c'est ce que nous souhaitons. Mais à défaut d'une entente, on doit prendre nos responsabilités et nous croyons que l'arbitrage va inciter les choses à progresser plus rapidement.

[Traduction]

Le sénateur Bryden : Quand il y a une grève légale, et cette grève l'était, et que la conciliation et la médiation n'ont pas abouti à un accord, le dernier recours consiste à tenter de forcer la conclusion d'un accord par une grève ou un lock-out.

Dans votre discours et vos réponses, vous avez parlé à maintes reprises du CN — et je suppose que vous parliez aussi du CP — comme étant un service essentiel au Canada. Il y a des mécanismes de règlement des différends pour les services essentiels qui ne comprennent pas la grève ou le lock-out. Par exemple, le dernier mécanisme de règlement des différends pour les pompiers est l'arbitrage obligatoire dans la plupart des cas. Il en va de même pour certains corps de police et services d'intervention d'urgence.

Étant donné que les chemins de fer constituent un service essentiel, sur le plan pécuniaire, ne vaudrait-il pas mieux modifier la législation sur les relations industrielles pour supprimer la disposition sur la grève ou le lock-out et imposer l'arbitrage obligatoire si les parties ne peuvent en venir à une entente par la conciliation ou la médiation? Grâce à une telle modification, les trains pourraient continuer de rouler.

[Français]

M. Blackburn : Le sénateur Bryden soulève une excellente question et un débat de société. Le Code canadien du travail, qui a été modifié en 1999, a fait l'objet de beaucoup de consultations entre les syndicats et les représentants d'entreprises. Par le biais des mécanismes de conciliation, de médiation et d'arbitrage, les parties en sont arrivées à une espèce de consensus en autorisant la grève avec droit d'engager des travailleurs de remplacement. Mais souvent, les parties s'entendent entre elles, sans même avoir recours à des services de conciliation, de médiation ou d'arbitrage.

Le Code canadien du travail juge un service comme étant essentiel lorsqu'il menace la vie ou la santé du public. Dans le cas des services ferroviaires, ce n'est pas le cas et, en 2004, nous avons soumis cette question au Conseil canadien des relations industrielles, qui en a conclu qu'en vertu du Code canadien du travail, on ne pouvait pas qualifier les services ferroviaires comme étant des services essentiels.

À mes yeux, l'économie du pays est fondamentale. Voilà où nous en sommes avec la loi. Nous devons agir dans le contexte actuel.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Bienvenue au Sénat du Canada. Je vous remercie d'être des nôtres. Il est rare qu'un ministre vienne nous rendre visite. Nous nous réjouissons donc vivement de notre venue et nous espérons que vous parlerez à vos collègues du Cabinet du bon travail que nous faisons.

Pour inscrire les choses dans leur contexte, je dirai qu'il y avait cinq hommes dans la famille de mon père, son père et quatre fils. Mon père était le seul qui ne travaillait pas au CN. Tous les autres l'ont fait jusqu'à leur retraite. Je vais tenter de vous expliquer mes liens avec cette entreprise.

De plus, à une certaine époque, j'ai été, pendant quatre ans, adjoint administratif du ministre du Travail de la Nouvelle-Écosse, de sorte que j'ai une certaine connaissance de vos préoccupations. J'ai beaucoup de mal à accepter une loi forçant le retour au travail. Cependant, je vais appuyer cette mesure, et je voudrais poser quelques questions pour expliquer pourquoi je le ferai.

En tant que membre du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, j'ai eu l'occasion de parcourir le pays en vue de la réalisation d'une étude sur la conteneurisation. J'ai rencontré, tant comme membre du comité qu'à titre privé, des gens qui utilisent des conteneurs pour expédier des produits canadiens à l'étranger et importer des produits étrangers. En outre, le comité dans son ensemble a rencontré nombre d'agriculteurs, de manufacturiers et de gens qui gèrent les ports.

Je tiens à féliciter le gouvernement d'avoir donné suite à l'initiative de la porte d'entrée du Pacifique, qui avait été prise par le gouvernement précédent. Il est important pour l'économie du Canada que nous continuions à développer la porte d'entrée du Pacifique. Si j'avais plus de temps, je voudrais bien parler de la porte d'entrée de l'Atlantique, qui a une importance encore plus grande pour moi.

Le problème, c'est que la réputation du port de Vancouver, tout particulièrement, a été mise en doute à plusieurs reprises. Lors d'un voyage d'affaires à Taipei, il y a environ un an, j'ai rencontré un certain nombre de gens d'affaires qui s'inquiétaient de la réputation du port de Vancouver, en raison du nombre important d'interruptions de travail. Cependant, il y a eu par la suite une accalmie jusqu'à récemment.

Il y a quelques semaines, le Comité sénatorial des transports était à Vancouver où il a rencontré des représentants du port de Vancouver et fait une visite des installations. On constatait dans le port une forte congestion. J'invite les honorables sénateurs, la prochaine fois qu'ils entrent à Vancouver par avion, à regarder par le hublot à mesure qu'ils approchent de l'aéroport et à compter les navires qui attendent en rade. Ces navires coûtent des centaines de milliers de dollars aux expéditeurs du fait qu'ils ne peuvent pas accoster au quai pour conteneurs à Vancouver et que le déchargement ne se fait pas assez rapidement. Tout cela concerne le développement de la porte d'entrée du Pacifique.

J'ai lu la mesure législative et je n'y ai rien trouvé qui permettrait de résoudre le problème après son entrée en vigueur.

(1630)

Selon ce qu'on nous a dit, après la première interruption du service, le CN, qui prétendait assurer le service au port de Vancouver, n'a pas ajouté un seul train ou un seul wagon en provenance de l'Est au port de Vancouver pour réduire l'arriéré.

Que va-t-il advenir de la réputation, non seulement du port de Vancouver, mais du Canada, comme pays commerçant, si personne n'a la volonté de maintenir cette réputation, comme on a pu le constater après cette interruption de travail?

Je n'ai entendu personne dire que le CN, à la suite de cette interruption de travail, allait assumer ses obligations et ajouter des trains, augmenter l'offre de service pour atténuer l'arriéré qui prend maintenant des proportions importantes. En ce moment, des navires sont détournés vers des ports américains ou sont mis en attente à Vancouver jusqu'à ce que nous adoptions cette mesure législative.

Y a-t-il dans vos discussions des éléments rassurants qui pourraient me convaincre et convaincre d'autres intervenants de l'industrie que notre réputation ne continuera pas d'être éclaboussée par l'incapacité du CN de résorber les arriérés causés par des interruptions de travail?

[Français]

M. Blackburn : On parle du port de Vancouver et je vais vous lire quelques-unes des données pouvant intéresser les honorables sénateurs.

[Traduction]

Dans les dix jours suivant le début de la grève, à la mi-février, la valeur des marchandises dont le transbordement a été retardé a atteint environ 730 millions de dollars. Selon le port de Vancouver, il faudra encore des semaines pour rattraper ce retard, même si on arrive à régler le conflit rapidement. Transports Canada estime à 146 millions de dollars par jour la valeur des marchandises transitant dans le port de Vancouver. La baisse du produit intérieur brut est estimée à 4,7 millions de dollars par jour, lorsqu'on tient compte des conteneurs, c'est-à-dire notamment 1,5 million de dollars dans le secteur du grain, des moulées et des cultures spéciales, 405 000 dollars par jour dans l'industrie du souffre, 50 000 dollars par jour dans les produits forestiers en vrac. Au cours de la dernière semaine, la situation s'est considérablement agravée. À l'heure actuelle, on souhaite que le gouvernement agisse et fasse adopter la loi.

Personne ne peut dire que le gouvernement actuel ou que le ministre que je suis agissent sans prévenir. J'ai dit publiquement à de nombreuses reprises que le gouvernement interviendrait si les parties n'arrivaient pas à s'entendre. Nous avons tenu parole.

[Français]

Concernant la gestion de cet arriéré, qu'il faudrait davantage de trains et de services pour faire en sorte que les entreprises s'en sortent mieux, je vous dirais que la situation est différente de celle de la mi-février; c'était beaucoup plus difficile à la mi-février que ce l'est présentement. Mais déjà, le CN avait décidé de faire un lock-out. Les choses sont appelées à s'améliorer, je pense qu'ils réalisent que la loi sera adoptée, en principe, si le Sénat accepte d'y donner suite.

Je suis également certain que mon collègue, le ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités, M. Cannon, portera une attention particulière à cette dimension et peut-être même que les parties soulèveront cet aspect lors des négociations.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Merci, monsieur le ministre. Je suis heureux d'avoir pu vous entendre. Certains de nos collègues n'avaient peut- être jamais entendu les statistiques que vous nous avez présentées, mais ce n'est pas le cas de ceux qui sont membres du Comité sénatorial permanent des transports et des communications. Nous sommes conscients de l'importance du problème et de la nécessité de mettre fin à la grève parce que chaque jour de plus met en péril des emplois au Canada, emplois qui ne se trouvent pas seulement dans le secteur de la fabrication et des transports. C'est aussi, par exemple, le gagne-pain des producteurs de légumineuses de la Saskatchewan qui est en jeu. Ils doivent expédier leur production en Extrême-Orient. Chaque heure et chaque jour qui passent, la qualité de cette production se détériore. D'ici à ce qu'elle arrive à destination, en Inde ou en Chine, elle risque d'être complètement impropre à la consommation humaine. Si on arrive à la réchapper, ce sera pour nourrir les animaux uniquement.

Monsieur le ministre, lors des délibérations du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, mes collègues ont fini par se lasser de m'entendre poser la même question à chaque témoin se présentant devant le comité au sujet de l'étude sur le fret conteneurisé. Y a-t-il suffisamment de wagons au service des exportateurs du Canada? À une exception près, tout le monde a répondu qu'il ne semblait pas y avoir assez de wagons et que les wagons existants ne semblaient pas se trouver au bon endroit.

Je viens de la Nouvelle-Écosse. Peter MacKay, un de vos collègues du Cabinet, vient également de la Nouvelle-Écosse. Je me préoccupe de la circonscription de M. MacKay et de certains de ses électeurs. À Trenton, en Nouvelle-Écosse, circonscription de M. MacKay, 350 personnes travaillant dans l'usine de fabrication de wagons ont été informées que celle-ci allait fermer par manque de commandes. D'un autre côté, les gens au Comité des transports me disent qu'il y a une pénurie de wagons. Je me gratte la tête et me demande où est le problème. L'année dernière, plus de 1 000 personnes travaillaient à l'usine. Cette année, au moment où elle s'apprête à fermer, il n'en reste plus que 350 environ.

Des emplois sont en jeu dans chaque province et dans chaque localité du pays.

Monsieur le ministre, je m'inquiète beaucoup du fait que nous parlons de forcer ces gens à retourner au travail et que, lorsqu'ils reprendront le travail, il n'y aura pas assez de wagons aux bons endroits pour transporter les marchandises, en particulier de Vancouver au Canada central, mais encore, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick et de la Saskatchewan vers les ports qui les exportent.

Cette question a-t-elle été abordée au sein de votre ministère ou, comme vous en avez parlé, dans ce projet de loi? Si on force les gens à retourner au travail, mais que rien ne bouge et que l'arriéré des marchandises reste au même endroit pendant des mois, on ne fait que prolonger l'agonie.

La présidente : Si vous voulez poser d'autres questions, vous pourrez le faire au second tour, mais pour l'instant, nous n'avons pas encore terminé le premier tour.

[Français]

M. Blackburn : Je ne suis pas insensible à votre observation puisque le train est fortement utilisé chez nous, dans la région du Saguenay- Lac-Saint-Jean, où est concentré tout le domaine de l'aluminium, avec Alcan, les pâtes et papiers et la foresterie. Il m'est arrivé, à l'occasion, d'entendre ce genre de commentaires. Je peux vous répéter que moi et le ministre Cannon avons déjà échangé sur cette question et je pense qu'il n'y est pas insensible non plus. Je crois que lors de sa comparution au Comité sénatorial permanent des transports et des communications, cette dimension a dû à nouveau être portée à son attention. Vous comprendrez qu'à titre de ministre du Travail, j'ai une autre vocation. Je fais également partie du gouvernement et votre observation est très bien reçue.

Le sénateur Joyal : Bienvenue, monsieur le ministre. J'ai écouté attentivement votre présentation, qui me rappelait des projets de loi antérieurs dont nous avons dû débattre pour voter le retour au travail, par exemple, des débardeurs ou des travailleurs d'autres services publics, comme dans le transport aérien.

J'essayais de déterminer, dans votre présentation, la différence entre ce projet de loi de retour au travail et les projets de loi semblables qui ont été antérieurement présentés au Parlement. Si je comprends bien votre explication, vous faites référence à l'alinéa 11(1)c) du projet de loi, lorsque vous dites que, dans les 90 jours suivant sa nomination, l'arbitre qui sera éventuellement nommé :

(1640)

c) choisit, pour régler les questions qui font l'objet d'un différend, soit l'offre finale de l'employeur, soit celle du syndicat;

Vous avez identifié cet article du projet de loi comme étant différent des projets de loi dont le Parlement a déjà été saisi pour le retour au travail.

Qu'est-ce qui vous amène à faire cette proposition plutôt que de tenter un ultime effort de rapprocher les parties sur les points sur lesquels il y a mésentente? Pourquoi laisser à l'arbitre la décision de dire « c'est à prendre ou à laisser », comme on dit en anglais, « take it or leave it »?

Il me semble que les projets de loi qui provoquent le retour au travail doivent maintenir le processus de négociation plutôt que de choisir entre le blanc ou le noir. Il me semble que l'arbitre peut, dans une certaine mesure, avoir la discrétion de prendre des éléments de la proposition syndicale et des éléments de la proposition patronale, et déterminer ce qui est le plus juste dans son jugement.

Qu'est-ce qui vous amène à vous éloigner de ce format, qui est la méthode habituelle, pour donner plutôt à l'arbitre le pouvoir absolu de choisir l'une ou l'autre?

M. Blackburn : D'une part, rappelons que les parties discutent depuis septembre 2006. On en est rendu à une étape de 19 mois environ. Une bonne partie du différend a trait à la question salariale. Cette question, je pense que c'est intéressant, peut être tranchée plus rapidement et chacune des parties va essayer d'obtenir que ce soit son point de vue qui prévale. Si quelqu'un va trop loin, cela risque de ne pas être retenu. On pense qu'ils vont s'entendre sur beaucoup d'aspects entre eux.

On pense que, pour la plupart des points sur lesquels les parties vont discuter, il sera possible d'arriver à un accord au cours de la période de 90 jours, puisque cela fait déjà un bout de temps qu'elles discutent. D'autre part, comme les parties savent que dans 90 jours l'arbitre va demander sur quoi les parties s'entendent ou non, et qu'elles vont devoir le préciser, cela va les inciter à faire un effort additionnel pour s'entendre, plutôt que ce soit tranché par l'arbitre à la fin du processus.

Nous pensons que c'est ce qui est le plus précieux dans ce projet de loi, cette dimension.

Le sénateur Joyal : Je vous remercie de l'identifier parce que, à ma connaissance, à moins que ma mémoire me serve mal, je ne me souviens pas d'un projet de loi de retour au travail qui contienne une disposition aussi explicite que celle-là sur le choix que l'arbitre doit faire. Je donne un exemple; vous parliez des salaires. À supposer que le syndicat demande une augmentation de 5 p. 100 et que le CN offre 2 p. 100, un arbitre, traditionnellement va être appelé à arbitrer. Il va dire, peut-être, que 3 p. 100 seraient probablement raisonnables. Alors il arbitre, il prend tout cela en considération et il décide. Ce que vous nous proposez est d'une autre nature; vous dites que l'arbitre va choisir 2 p. 100 ou 5 p. 100.

Je me demande si on n'aurait pas avantage à maintenir le processus d'arbitrage qui permet d'équilibrer les rapports entre les parties, car c'est cela qu'on cherche toujours à atteindre dans un projet de loi de retour au travail. Un tel projet de loi est l'exception dans le processus de négociation.

Qu'est-ce qui fait que, dans ce cas particulier, vous estimez que c'est plus juste de donner ce pouvoir à l'arbitre que de lui laisser le choix d'arbitrer?

M. Blackburn : En réponse à votre question, nous n'inventons pas l'offre finale. Cela a été utilisé en 1994, entre autres, au port de Vancouver, dans un conflit avec les débardeurs. À ce moment-là, on a proposé l'offre finale.

D'autre part, je vous dirais : essayons de nous mettre en situation. Ils sont à la fin, l'un veut avoir 5 p. 100 d'augmentation et l'autre veut donner 2 p. 100. L'employeur va peut-être dire : je vais utiliser ce qui semble raisonnable, sans savoir si cela prévaut, pour faire une hypothèse; je devrais peut-être être raisonnable, que de prendre le risque que d'être vu par l'arbitre comme étant déraisonnable et que ce soit l'autre proposition qui prévale. Du côté du syndicat, ils vont se dire aussi que, s'ils vont trop loin, l'arbitre ne prendra pas leur solution et va prendre l'autre. Chaque partie a intérêt à être raisonnable et, de plus, a intérêt à s'entendre avec l'autre plutôt que de laisser l'arbitre décider.

Cela joue sur tous les points de vue et je pense que c'est sain, surtout que cela fait déjà 19 mois qu'ils discutent. Il y a eu beaucoup de travail fait entre les parties, en plus du conflit syndical que nous connaissons et que j'ai précisé un peu plus tôt.

Le sénateur Joyal : Je vois que vos fonctionnaires ont pu trouver dans leurs archives un exemple antérieur; est-ce que, dans le cas du port de Vancouver, la dynamique que vous décrivez a joué? En d'autres mots, est-ce que le fait que les parties soient placées devant un « take it or leave it » les a forcées à s'entendre et a fait en sorte que l'arbitre n'a pas eu à choisir l'offre des patrons plutôt que celle des employés? Est-ce que vous savez comment la résolution du conflit s'est faite?

M. Blackburn : Dans le cas de 1994, l'arbitre a effectivement décidé sur la question des salaires. L'arbitre a tranché.

Le sénateur Joyal : Ce n'est pas pour vous embarrasser, mais pour voir comment la dynamique en pratique peut se produire. Ce que l'on veut, c'est que les parties négocient.

Ce que j'ai appris de la réalité syndicale, c'est qu'on essaie de garder les parties en négociation le plus longtemps possible. Dans le cas de Vancouver, à la fin, si je comprends bien, l'arbitre a choisi entre la proposition du syndicat et la proposition patronale. Savez- vous laquelle il avait choisie à l'époque?

M. Blackburn : Là, vous m'avez. Je n'ai malheureusement pas la réponse. Je ne sais pas s'il a tranché pour A ou pour B. Si on prend la forme traditionnelle, souvent cela perdure et il n'y a pas de délai. Il faut que cela prenne fin à un moment donné. C'est pour cela que la période de 90 jours donne ce temps, à moins d'un prolongement accordé par le ministre pour une raison qui serait considérée à ce moment-là comme valable. Mais dans la période de 90 jours, on pense que les parties vont s'entendre sur la plupart des points et peut-être même aussi sur la question salariale.

Pour votre information également, concernant ce qui avait été proposé dans l'offre refusée à 70,44 p. 100 par rapport aux membres du syndicat, on avait une augmentation de 3 p. 100 de salaire qui entrait en vigueur immédiatement pour un an, et ils avaient un forfait de 1 000 $ et un an de plus pour poursuivre les discussions. Les parties ont décidé de ne pas accepter cette proposition, dans une proportion de 80 p. 100. C'est là qu'on se retrouvait. Si les parties avaient décidé que les employés restaient au travail, qu'ils ne créaient pas de perturbations et qu'on continuait à négocier, notre projet de loi en serait resté à la première lecture.

À partir du moment où les grèves rotatives ont commencé, on ne pouvait pas continuer.

(1650)

[Traduction]

Le sénateur Jaffer : Monsieur le ministre, je vous ai écouté tout l'après-midi. Vos propos m'ont plu, mais une chose me préoccupe. Il est évident qu'on nie des droits aux travailleurs lorsqu'on les oblige à reprendre le travail. Nous sommes dans une situation où il faut assurer que notre économie n'est pas touchée, et ce, au détriment des droits des travailleurs.

Vous avez soutenu avec éloquence que cette grève menace l'économie, et je suis d'accord avec vous. Nombre d'industries et de personnes dépendent du chemin de fer, et des sénateurs ont signalé que des services essentiels dont on aurait besoin en cas d'urgence peuvent être touchés. On a d'ailleurs plusieurs exemples de la manière dont les services essentiels sont touchés.

Toutefois, ce qui me préoccupe, c'est que les membres du syndicat ont aussi des droits et qu'il incombe au gouvernement de veiller à ce que ses efforts en vue de protéger l'économie canadienne ne libèrent d'aucune façon leur employeur de négocier de bonne foi avec eux. Vous me corrigerez si je fais erreur, mais je crois que vous avez refusé de vous engager à modifier la Loi sur les relations industrielles de manière à y inclure les services ferroviaires en tant que services essentiels et que le Conseil canadien des relations industrielles a statué que les services ferroviaires ne sont pas des services essentiels.

Monsieur le ministre, planifiez-vous d'examiner la façon dont le gouvernement réagit face à ce type de grève nationale, que ce soit une grève des services ferroviaires ou au sein du secteur des transports, afin d'assurer que nous serons mieux préparés dans l'avenir à réagir à des conflits de travail de ce genre d'une manière qui ne menace pas notre économie, mais qui ne mine pas non plus les positions des syndicats qui traitent avec des sociétés qui refusent, selon eux, de négocier de bonne foi?

[Français]

M. Blackburn : D'abord, c'est la première fois depuis 1997 que nous devons légiférer pour un retour au travail afin d'assurer un service comme celui-là. Deuxièmement, pour répondre à votre question sur la révision de la partie I du Code canadien du travail, je ne la recommanderais pas à mon gouvernement pour la raison suivante : lorsque nous sommes un gouvernement minoritaire, il est extrêmement difficile d'apporter des changements. La partie I du Code canadien du travail est vaste et, deuxièmement, vous ne pouvez pas juste toucher une partie puis penser que tout le reste marche. En touchant à une section, vous êtes obligés de le réviser, un peu comme un casse-tête. Il n'y a pas qu'une pièce.

Dans les circonstances actuelles, ce n'est pas dans mon mandat et je n'ai pas l'intention, en tant que ministre du Travail, de toucher à ce stade à la partie I du Code canadien du travail. Cependant, on est en train d'étudier la partie III, qui concerne les normes de travail. Un professeur a déposé 172 recommandations pour l'améliorer et on est en période de consultation. Cela est dans le décor mais pas la partie I.

J'ai parlé du projet de loi C-257; les gens pensent qu'avec un projet de loi privé, ils peuvent intercaler quelque chose dans la loi et que cela va marcher. Vous ne pouvez pas toucher une seule partie. C'est comme si on décidait d'enlever une partie dans la loi actuelle, cela ne va pas ainsi. Il faut regarder comment il commence et comment il finit. Il n'est pas dans notre intention de toucher la partie I du Code canadien du travail présentement.

[Traduction]

Le sénateur Jaffer : Monsieur le ministre, je vous sais gré de votre franchise et je vous remercie de nous avoir expliqué les défis auxquels vous êtes confronté et pourquoi vous n'envisagez pas une réforme complète. Je peux comprendre que vous ne cherchiez pas à présenter au Parlement une réforme complète. Mais recherchez-vous des solutions qui feront en sorte que les syndicats ne seront pas touchés dans l'avenir? Recherchez-vous une approche équilibrée tenant compte des droits à la fois des employeurs et des syndicats? Votre ministère se penche-t-il sur un plan qui propose une approche plus équilibrée?

[Français]

M. Blackburn : Permettez-moi de porter à votre connaissance quelques recommandations du rapport Simms, en 1995, au moment où on parlait de réviser le Code canadien du travail. Suivant une vaste révision de la partie I, le rapport recommandait l'interdiction de prohiber le droit de grève et de lock-out et rejetait les suggestions de substituer l'arbitrage à la libre négociation collective dans certaines industries qui peuvent avoir un impact important sur l'intérêt public.

J'ajouterais que le Code canadien du travail fonctionne; il y a un équilibre. La preuve en est que si, depuis 1997, on n'a pas eu à légiférer, c'est parce qu'à chaque conflit ou à la fin d'une convention collective, les parties ont réussi à s'entendre. Elles s'entendent parfois après peu de temps ou plus de temps. À l'occasion, on utilise les services de conciliation, de médiation ou d'arbitrage. Mais il fonctionne.

Je rappelle que lorsqu'est arrivé le cas où des employeurs ont utilisé, suite à une grève, des travailleurs de remplacement, c'est toujours à ce moment-là qu'il y a eu des problèmes. C'est toujours cet aspect qui est critique et qui soulève des craintes.

Dix-neuf fois, il y a eu une plainte quand l'employeur a utilisé des travailleurs de remplacement. Sur les 19 fois, au Conseil canadien des relations industrielles, les parties ensemble, 13 fois, ont retiré la plainte après qu'elle eut été déposée; trois fois, on a jugé que c'était non fondé et que cela n'avait pas été fait pour miner la représentativité du syndicat. Trois autres instances sont toujours à l'étude par le Conseil canadien des relations industrielles. Cela veut dire en quelque sorte six fois. Sur l'ensemble des situations qui ont prévalu depuis 1999, cela donne une indication que le Code canadien du travail, tel que prévu dans la partie I, qui a été révisée par le gouvernement précédent, fonctionne.

On peut toujours trouver des situations particulières. Si quelqu'un peut trouver la formule idéale, je suis prêt à l'analyser.

[Traduction]

Le sénateur Gustafson : Honorables sénateurs, ce qui retient notre attention, c'est l'ampleur du défi que représente le transport dans un pays comme le Canada, où il faut entretenir des kilomètres et des kilomètres de voie terrestre. D'après le Western Producer, il y avait à un moment 31 navires dans la baie qui attendaient leur cargaison de céréales. Je veux donc profiter de l'occasion pour remercier le ministre et son gouvernement de leur prompte intervention afin de permettre la reprise du transport. Je pense que je parle non seulement au nom des agriculteurs, mais aussi au nom de toutes les personnes touchées, qui se joignent à moi pour remercier le ministre.

Des voix : Bravo!

[Français]

La présidente : Au nom de tous les sénateurs, je vous remercie de vous être joint à nous aujourd'hui pour nous aider dans nos travaux et je tiens à remercier vos fonctionnaires. Je vous souhaite bonne chance.

M. Blackburn : Madame la présidente, je vous remercie. Pour moi, c'est un baptême de venir vous rencontrer au Sénat, c'est sérieux.

D'ailleurs, j'occupe le siège de mon collègue, le sénateur Fortier, le no 58. Merci à vous tous et j'espère que les informations que j'ai pu vous donner vous aideront à prendre cette décision qui relève maintenant de votre responsabilité.

(1700)

Le sénateur Tardif : Honorables sénateurs, je demande que M. Glen Gower, président de la section 483 des Travailleurs unis des transports, soit invité à comparaître devant le comité plénier.

La présidente : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

La présidente : J'inviterais M. Gower à prendre place.

[Traduction]

Bienvenue au Sénat, monsieur Gower. Je vous invite à faire votre déclaration préliminaire, et les sénateurs vous poseront ensuite des questions.

Glen Gower, président de la section locale 483, Travailleurs unis des transports : Merci. C'est un grand honneur que de me trouver parmi vous. Je vous remercie de m'avoir invité et j'espère pouvoir vous éclairer.

Je suis le président d'une section locale des Travailleurs unis des transports. Je représente environ 250 membres de Toronto. Pendant notre grève, en février, nous avons continué d'entretenir les trains du réseau GO et les trains de Montréal qui desservent les banlieues. Nous savons à quel point ces services sont importants pour l'économie et la population. Nous ne voulons pas perturber la vie des gens, ni l'économie du pays. Lorsque mes membres travaillaient pendant cette période, ils versaient 50 p. 100 de leurs revenus à l'Hôpital pour enfants. Nous avons remis environ 71 000 $ aux enfants malades.

Malheureusement, nous éprouvons actuellement un problème syndical interne. Approximativement 80 p. 100 des membres ont signé des cartes de demande d'adhésion aux Teamsters. Le Conseil canadien des relations industrielles acceptera les observations à ce sujet jusqu'à vendredi, après quoi il déterminera s'il y aura un scrutin ou si nous obtiendrons le droit à l'autodétermination. J'espère que c'est ce qui arrivera. Cela nous permettra alors d'avoir la représentation dont nous avons besoin, et pas nécessairement avec les Teamsters. Nous serons représentés par des personnes dûment élues à cette fin, et non par des personnes qui ont été nommées ou affectées plus ou moins contre leur gré.

Les dirigeants actuels du syndicat ne parlent pas au nom des membres. C'est là notre problème. Nous avons besoin de temps pour tenir un scrutin et pour mettre en place des personnes qui parleront en notre nom, peu importe qui elles seront.

Aucun membre des Travailleurs unis des transports n'est en grève au pays actuellement. Cependant, approximativement 150 membres font l'objet d'un lock-out à Vancouver et à Kamloops et approximativement 20 membres sont dans la même situation à Oakville, en Ontario. Hier, j'ai présenté aux cadres supérieurs du CN un document signé par les 20 membres en lock-out dans lequel ils demandent qu'on les autorise à retourner au travail. Dans ce document, ils déclarent qu'ils n'entreprendront pas d'autres mesures de grève, qu'ils ne prendront pas part à une grève et qu'ils ne respecteront pas les piquets de grève. Le CN n'a pas encore dit à ses travailleurs s'ils pourraient retourner au travail.

Ces gens ne sont pas « en grève », ils sont en lock-out. Ils veulent aller travailler. Les trains circulent, comme ils l'ont toujours fait — même pendant la grève de février. Il est vrai qu'il n'y avait pas de chefs de train ni de serre-freins. Les cadres du CN nous suppléaient. Non, ce n'est pas l'idéal, mais les trains circulaient. Le service ferroviaire n'a pas été interrompu.

Nous avons entendu tout à l'heure des commentaires sur l'entente qui nous a été présentée à la fin de la grève. Il s'agissait simplement d'une prolongation d'un an de la convention en vigueur. Cette entente ne réglait aucun des problèmes. Nos problèmes concernent notre qualité de vie et notre sécurité. Ce sont là les principaux problèmes. Cette grève n'a jamais été motivée par l'argent, contrairement à ce que certains médias ont déclaré!

Voici quelques-uns de nos problèmes, et je ne lirai pas la liste de toutes les exigences. Nos membres qui travaillent à l'extérieur dans la gare de triage, par tous les temps, la nuit comme le jour, ont une pause-repas de 20 minutes, non pas 20 minutes pour s'asseoir et manger, mais 20 minutes à partir du moment où la locomotive s'arrête jusqu'au moment où l'entreprise veut qu'elle reparte. Si les membres prennent une pause plus longue, ils sont pénalisés. J'ai défendu des employés qui ont été punis pour cette faute. Mais, 20 minutes, c'est irréaliste. C'est dangereux. Les membres doivent prendre le temps d'aller à l'intérieur pour se réchauffer, boire un café et manger quelque chose. C'est l'un de nos gros problèmes. Nous voulons plus que 20 minutes. C'est une question de sécurité, de qualité de vie et de temps passé à la maison.

(1710)

J'ai un fils de deux ans. Lorsque je dois travailler sur un train de marchandises, je passe habituellement environ 24 heures loin de la maison, parfois un peu plus, parfois un peu moins. Lorsque je rentre chez moi, je suis fatigué et j'ai besoin de sommeil. Par contre, il faut habituellement que je retourne au travail dans les 24 heures suivant mon retour à la maison. Je suis attendu au travail et je dois être frais et dispos.

Nous voulons conserver nos acquis et peut-être améliorer quelque peu notre sort. Les offres qui nous ont été présentées pendant la période de négociation visaient à nous enlever nos droits, à les diminuer ou à nous obliger à faire des concessions.

J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt hier les délibérations à ce sujet à l'autre endroit. Les discussions ont souvent porté sur la sécurité ferroviaire. Je ne crois pas que les gens qui discutaient étaient conscients que nos négociations collectives portent justement sur des questions de sécurité.

Le chemin de fer est un environnement de travail très difficile. Ici, pas de blessures légères; on perd un membre, voire la vie. Ça ne pardonne pas, surtout si vous êtes fatigué, si vous avez froid ou si vous n'avez pas eu la chance de vous mettre à l'abri des éléments.

Une autre importante source de préoccupation concerne les employés au triage. Ils doivent se tenir debout sur les locomotives et doivent aller et venir dans la cour au milieu de la nuit par un froid glacial. Ils pourraient s'abriter dans le poste de conduite de la locomotive, mais l'entreprise a déterminé que c'était interdit et que les contrevenants seraient réprimandés. Ces employés restent donc debout sur les locomotives, glacés jusqu'aux os. S'ils vont s'abriter à l'intérieur, ils sont réprimandés. Pendant des heures, ces gens vont et viennent dans des conditions climatiques impossibles en ayant peur d'être réprimandés. Un chien traité de cette façon, laissé dehors au froid et au vent, serait sauvé par la Société protectrice des animaux. Du moins, c'est ce que je souhaiterais.

On encourage ce comportement. Ce projet de loi, s'il était adopté, et c'est ce qui semble vouloir se passer... Je n'ai pas peur du projet de loi lui-même, je n'ai pas peur du processus. J'ai peur pour nos prochaines négociations collectives. La prochaine fois que nous devrons négocier, l'entreprise pourra dire qu'elle sait que nous serons forcés par la loi de rentrer au travail, et elle n'aura donc pas besoin de négocier de bonne foi. C'est une véritable source de préoccupation pour moi-même et les membres du syndicat.

Il s'agit de la sécurité du grand public. Malheureusement, pour diverses raisons, il y a eu un grand nombre de déraillements de trains du CN. On s'inquiète du niveau de fatigue des membres — mécaniciens, cheminots et chefs de train — mais on semble vouloir accroître le nombre d'heures qu'ils sont autorisés à travailler. Tous semblent vouloir nous autoriser, ou nous contraindre aux termes de la loi, à travailler plus longtemps et on semble vouloir nous priver de notre droit de nous reposer. Ce n'est profitable pour personne. Ce n'est certainement pas dans l'intérêt de la population. Nous transportons des marchandises dangereuses — de l'acide chlorhydrique, de l'ammoniac — dans les petites et les grandes villes du pays. Nous devons être bien éveillés et vigilants à tout moment. Les choses se passent très rapidement.

Nos membres sont en disponibilité 24 heures par jour, sept jours par semaine, 365 jours par année, sauf lorsqu'ils sont en vacances, évidemment, et aux moments que nous avons négociés. Si un employé rate un appel, un seul appel pour travailler, il est puni. Si l'employé, pour quelque raison que ce soit, est trop fatigué pour aller travailler, tellement fatigué qu'il n'entend pas le téléphone sonner, il reçoit une sanction.

Nos préoccupations concernent la qualité de vie et la sécurité. Le réseau ferroviaire fonctionne à l'heure actuelle. Tous nos membres sont au travail. Personne n'est en grève. Les seuls membres qui ne sont pas au travail sont ceux qui sont visés par le lock-out. Je ne vois pas l'utilité d'une loi de retour au travail ou de maintien des activités à l'heure actuelle.

Je suis reconnaissant d'avoir l'occasion d'être ici. N'hésitez pas à me poser des questions.

Le sénateur Di Nino : Monsieur Gower, je vous remercie de vos observations. Je vous souhaite la bienvenue au Sénat. Je viens de Toronto, alors je suis au courant des choses que vous avez faites, en particulier votre contribution généreuse à l'Hôpital pour enfants.

J'aimerais obtenir une précision. Vous êtes le président de la section 483 des TUT, n'est-ce pas?

M. Gower : Oui, monsieur.

Le sénateur Di Nino : Ce soir, vous allez faire un exposé au comité. Le ferez-vous au nom des TUT?

M. Gower : Oui, monsieur. Je suis ici au nom de ma section et du CG 105, qui représente essentiellement tout ce qui est à l'est de Winnipeg.

Le sénateur Di Nino : Vous n'intervenez pas aujourd'hui uniquement au nom de la section locale 483; comme vous l'avez dit, vous représentez d'autres sections à l'est de la frontière du Manitoba, n'est-ce pas?

M. Gower : Oui. Hier soir, les présidents locaux du comité général ont participé à une conférence téléphonique. Nous avons abordé la question et je suis ici à titre de porte-parole.

Le sénateur Di Nino : Je comprends bien. Je vous poserai peut-être une autre question plus tard. Je voulais simplement que cela figure au compte rendu.

Le sénateur Banks : Bienvenue au Sénat, monsieur Gower. Je vous remercie de votre déclaration. Vous avez affirmé qu'aucun de vos membres n'a débrayé. Si j'ai bien compris, il n'y a pas de piquets de grève, est-ce bien cela?

(1720)

M. Gower : Pour autant que je sache, il n'y a aucun piquet de grève nulle part. Je ne peux pas dire exactement ce qui se passe à Vancouver et à Kamloops, parce que je n'y suis pas allé mais, d'après ce que je sais, aucun piquet de grève n'a été érigé.

Le sénateur Banks : D'après vos informations, est-il vrai que, dans la région que vous représentez, les trains circulent apparemment de façon normale pour quelqu'un de l'extérieur?

M. Gower : Oui, absolument. Je conduis des trains de marchandises entre Belleville, Montréal et Toronto et ces trains circulent aussi normalement qu'à l'habitude. Je connais également les membres à Sarnia et dans le Nord. Les trains circulent normalement là aussi.

Le sénateur Banks : Sauf erreur, les membres de votre syndicat peuvent déclencher une grève légale, cesser le travail, dresser des piquets de grève et empêcher les trains de circuler, n'est-ce pas?

M. Gower : C'est exact. Nous ne sommes toujours pas certains d'être en position de grève, légalement. C'est une autre question. Je le répète, tous les présidents des sections locales membres du CG 105, qui comprend l'Ontario et toutes les provinces à l'est, ont signé un document à l'attention de nos agents internationaux, du président général et du vice-président attestant que nous ne participerons à aucun mouvement de grève si certaines conditions sont remplies, dont le retour à la table de négociation et le déploiement d'efforts concertés pour répondre à nos revendications et à nos préoccupations.

Le sénateur Banks : Ceux que vous représentez ont décidé, selon ce que vous dites, de ne pas faire la grève?

M. Gower : C'est cela. Nous avons tous convenu de ne pas aller en grève, et nous espérons que nous n'aurons pas à y aller du tout, à tout le moins jusqu'à ce que certaines conditions aient été remplies. J'ai une copie de la lettre, mais elle a été rendue publique.

Le sénateur Banks : J'essaie juste de comprendre quel est l'élément déclencheur. Vous n'irez pas en grève jusqu'à ce que quelque chose se passe ou à moins que quelque chose ne se passe, mais quoi? Qu'est-ce qui déclencherait une grève?

M. Gower : Nous avons demandé à notre vice-président, qui occupe actuellement le poste de président général, de retourner à la table de négociation et de tenter d'obtenir une convention collective. S'il ne peut y arriver, nous parlerons à tous les présidents de sections locales et déciderons, ensemble, des mesures à prendre. Il y a d'autres facteurs aussi. Je me ferai un plaisir de vous donner une copie de la lettre.

Le sénateur Banks : Je ne sais pas si c'est conforme au Règlement. C'est à la présidente de prendre cette décision.

Si les négociations reprennent, les salaires feront-ils partie des questions abordées?

M. Gower : On aborde toujours la question des salaires, mais ce n'est pas la question principale. La question des salaires est omniprésente. Beaucoup de membres m'ont dit que si on pouvait régler bon nombre des problèmes de sécurité, ils seraient disposés à renoncer à une augmentation de salaire. La qualité de vie, c'est là la question.

Le sénateur Banks : Que veut dire « CG »?

M. Gower : Comité général.

Le sénateur Jaffer : Merci beaucoup d'avoir comparu devant nous. Je ne sais pas si vous étiez ici quand le ministre avait la parole et si vous avez entendu ses propos.

M. Gower : Oui.

Le sénateur Jaffer : Comme je le lui ai dit, je me préoccupe du maintien de l'équilibre entre les droits des travailleurs syndiqués et ceux des employeurs. Il a répondu que ce genre de situation ne s'est pas présenté depuis 1997 et que les choses fonctionnent relativement bien. Êtes-vous d'accord là-dessus?

M. Gower : J'ai des notes à ce sujet. Merci de me le rappeler.

Je ne sais plus trop quel sénateur a parlé de la conclusion d'une entente dans un délai raisonnable. On nous a donné environ cinq ou six mois cette fois-ci. La dernière fois, il a fallu 18 mois pour parvenir à une convention collective. Qu'est-ce qui constitue un délai raisonnable? Je ne pense pas que nous ayons obtenu un délai raisonnable. La dernière fois, lorsqu'il a fallu 18 mois pour parvenir à une convention collective, nous n'étions pas sous la menace d'une loi de retour au travail. Nous n'étions pas non plus en grève, même si une menace de grève existe toujours, comme c'est le cas en ce moment. Nous sommes rentrés au travail et nous avons donné l'assurance que nous n'arrêterons pas de travailler dans un avenir prévisible.

Vous avez raison. Je crois que nos droits seront compromis si le projet de loi proposé est adopté. Je crois qu'il est inutile pour le moment. Je comprends les inquiétudes de tout le monde pour l'économie, mais même lorsque nous étions en grève, les trains circulaient. Pas tous les trains, mais ils circulaient. Je ne sais pas si cela répond entièrement à votre question.

Le sénateur Jaffer : Je comprends que la tension a augmenté au cours des dernières années. Peut-être cela est-il aussi attribuable à un changement de direction. Est-ce exact que les tensions se sont accrues? Le ministre a déclaré qu'il n'y avait pas eu de grève depuis 1997. Mais je l'ai peut-être mal compris. Est-ce exact? Qu'est-ce qui, selon vous, nous a conduits où nous sommes maintenant?

M. Gower : J'ai cru comprendre qu'il n'y avait pas eu de loi de retour au travail depuis 1997.

Le sénateur Jaffer : C'est exact.

M. Gower : Depuis 1997, nos représentants élus ont réussi à négocier au moins trois conventions collectives.

Le sénateur Jaffer : Vous l'avez peut-être dit, mais pouvez-vous répéter ce qui fait que nous nous retrouvons avec une loi de retour au travail?

M. Gower : Malheureusement, notre syndicat est en proie à un conflit interne. J'ai expliqué qu'il y aurait très bientôt un vote, supervisé par le CCRI, pour l'élection des représentants. Nous en avons bien besoin pour instaurer une certaine harmonie sur les lieux de travail.

Le sénateur Phalen : J'ai quelques questions seulement. J'ai cru comprendre, au début de votre intervention, que vos chefs étaient nommés. Pourquoi et qui les nomme? Avez-vous dit en commençant que vos chefs étaient nommés?

M. Gower : Oui.

Le sénateur Phalen : Ils sont nommés par qui?

M. Gower : Il a été nommé par le président international, quand nos représentants dument élus ont été délogés à l'audience du CCRI à Montréal.

Le sénateur Phalen : Quand vous dites « international », vous parlez des Américains?

M. Gower : Oui, monsieur.

Le sénateur Phalen : De nombreux syndicats de la fonction publique ont recours à l'arbitrage pour régler les différends. Vous avez dit que vous aviez peur de l'arbitrage. Pourriez-vous me dire pourquoi? Avez-vous peur de l'arbitrage en tant que mécanisme de règlement des différends?

M. Gower : Je crois que vous avez peut-être mal compris. J'ai dit que je n'avais pas peur de la loi de retour au travail.

Le sénateur Phalen : Je ne parle pas de la loi de retour au travail. Ce qu'ils recommandent, c'est que l'arbitrage obligatoire soit le mécanisme de règlement des différends.

M. Gower : Je crois que ce que j'ai dit, et qui peut avoir été mal compris, c'est que j'ai peur de ce qui pourrait en découler à l'avenir.

Le sénateur Phalen : Qu'entendez-vous par là?

M. Gower : Je crains qu'à l'avenir le processus de négociation collective soit compromis, parce que la compagnie ou le syndicat, une ou l'autre des parties, pourrait maintenant dire : « Ce n'est pas grave. Qu'avons-nous à perdre? De toute façon on adoptera une loi de retour au travail, et ça se terminera ainsi. »

Le sénateur Phalen : Ce n'est pas ce qu'on nous a expliqué. Il n'y a pas qu'une loi de retour au travail; un arbitre tranchera. Si les parties, sans être trop éloignées, n'arrivent pas à s'entendre, j'imagine qu'elles tenteront d'en arriver à un consensus sur la plupart des points. À un moment donné, un arbitre les rencontrera et rendra une décision finale. Est-ce ce mécanisme qui vous pose problème?

(1730)

M. Gower : Non, je n'ai pas de crainte à cet égard. Ce qui me préoccupe, c'est la motivation de négocier des conventions collectives et de le faire de bonne foi. Je le vois du côté du syndicat. Nous voulons certaines choses. Nous voulons une convention collective et nous voulons utiliser la négociation collective pour y arriver.

Le sénateur Phalen : J'ai été président de plusieurs grands syndicats et beaucoup d'entre eux se servaient de l'arbitrage pour régler les différends. Tout ce qui me préoccupait, c'était le coût. L'arbitrage coûtait très cher et les conseillers juridiques faisaient fortune. Cependant, cette méthode semblait fonctionner.

Au bout du compte, le syndicat avec lequel je travaillais a obtenu les pleins droits de négociation collective en vertu de la loi sur les syndicats de la Nouvelle-Écosse. Néanmoins, il a travaillé pendant des années dans le cadre d'un système d'arbitrage.

Je crois comprendre que vos services seront désignés comme essentiels. N'envisageriez-vous pas de recourir à l'arbitrage pour régler vos différends?

M. Gower : Nous avons actuellement recours à des arbitres dans le processus des griefs. Mais il est vrai que les arbitres coûtent cher, tout comme les avocats. Quoi qu'il en soit, il ne me semble pas que ce soit la meilleure façon de s'entendre sur une convention.

Le sénateur Bryden : Merci de votre présence. Le sénateur Jaffer vous a demandé pourquoi, alors que trois ou quatre conventions ont été négociées depuis 1997, nous en sommes venus à envisager d'adopter une loi de retour au travail et un moyen d'imposer une convention. Sauf erreur, vous avez répondu que c'était à cause d'un problème dans votre syndicat. De quoi s'agit-il?

M. Gower : Certains des dirigeants du syndicat semblent craindre que nous ne soyons victimes de maraudage et que nous ne quittions les Travailleurs unis des transports pour passer chez les Teamsters. L'inquiétude semblait si vive que certains paniquaient et tenaient à nous sortir de la période de maraudage. Je ne crois pas qu'ils aient agi dans notre intérêt supérieur, ni dans l'intérêt supérieur des membres. Je ne suis pas le seul à le penser.

Le sénateur Bryden : La période de maraudage est-elle terminée?

M. Gower : Là encore, cela se discute. Je crois qu'il appartiendrait au Conseil canadien des relations industrielles de le décider.

Le sénateur Bryden : Je me demande pourquoi il faudrait que l'employeur, d'autres employés de cet employeur, ceux qui dépendent de l'employeur et de vos travailleurs pour acheminer des marchandises d'une valeur de milliards de dollars dans notre pays paient les pots cassés, simplement parce que vous éprouvez des difficultés à l'intérieur de votre syndicat. Pourquoi ne pas régler le problème? Ce n'est pas une excuse qui peut être acceptée par la population, et je ne l'accepte pas non plus. Si votre syndicat et vos membres, d'une façon ou d'une autre, ne peuvent gérer des négociations collectives sans finir par recourir à des grèves tournantes qui retardent des wagons et obligent des navires à rester à quai — ce qui coûte 300 000 $ par jour, si on ne nous a pas menti — parce qu'ils ne peuvent être chargés ou déchargés, pourquoi la population canadienne devrait-elle payer le prix?

M. Gower : Vous avez tout à fait raison. Elle ne devrait pas avoir à payer. Nous cherchons à résoudre le problème. Nous demandons l'aide du Conseil canadien des relations industrielles. Malheureusement, les choses ne progressent pas assez vite. Je comprends votre point de vue. Nous avons fait de notre mieux pour épargner la population. Toute grève entraîne certaines conséquences économiques. Pour l'instant, nous ne voulons pas faire la grève. Nous sommes de retour au travail, et nous continuerons de travailler de bonne foi. Nous voulons négocier une convention.

Le sénateur Bryden : Cela vaut-il pour tous ceux qui ont participé à des grèves, peu importe leur allégeance, qu'il s'agisse des Teamsters, de l'ancien syndicat ou du nouveau? Je crois savoir qu'on utilise un système de grèves tournantes, ce qui coûte très cher, car l'employeur ne sait jamais s'il aura le personnel pour faire fonctionner le système un jour donné ou si les employés seront au poste à tel autre endroit pendant deux ou trois jours. Presque n'importe quel employeur finira par dire qu'il en a assez et par interrompre ses activités.

Je n'ai aucune affection particulière pour les employeurs, mais ils doivent livrer la marchandise. Bien des gens qui comptent sur leurs services exercent des pressions. Le grand public est touché. Les ministres et les gouvernements ne proposent pas de gaieté de cœur des lois de retour au travail s'il existe d'autres recours raisonnables. Nous avons pu éviter ce genre d'intervention législative pendant près de 20 ans.

Votre position est difficile à défendre. Parce que votre syndicat d'attache, à Cleveland, ne veut pas céder le contrôle, il peut paralyser presque complètement le transport ferroviaire est-ouest au Canada. Je propose que quelqu'un fasse un coup d'éclat pour débloquer les choses. Tant que cela ne se fera pas, nous, législateurs dont les Canadiens attendent des solutions dans des situations comme celle-ci, ne pouvons refuser d'agir.

Je ne voulais pas vous sermonner.

M. Gower : Je comprends ce que vous dites. Le président local et les membres essaient d'agir dans ce sens. Nous nous sommes engagés à poursuivre les opérations dans la moitié est du Canada, au moins, mais je ne peux parler que de cette région.

Nous nous sommes engagés à continuer de travailler. Nous ne participerons à aucune grève. Nous n'acceptons pas d'ordres de l'étranger. Nous ne croyons pas que ces gens-là sont nos porte- parole.

(1740)

Le sénateur Bryden : Puis-je poser une question de plus? Pourquoi n'y a-t-il personne ici pour représenter la région à l'ouest de la frontière ontarienne? Il y a là une grande partie du Canada au nom de laquelle vous ne pouvez pas parler. Où sont les gens qui nomment vos dirigeants?

M. Gower : Vous voulez savoir où ils sont aujourd'hui?

Le sénateur Bryden : Oui, aujourd'hui. Ce n'est sans doute pas très important pour eux.

M. Gower : Ils sont tous à Cleveland.

Le sénateur Bryden : Vous n'avez pas besoin d'en dire plus.

Le sénateur Tardif : Je voudrais répondre à la question du sénateur Bryden. Lorsqu'on nous a informés que nous recevrions le projet de loi aujourd'hui, il était prévu que seul le ministre témoigne. Notre côté a exercé de fortes pressions pour avoir des témoins représentant la partie syndicale. Il était très tard, la nuit dernière, lorsque nous l'avons appris. Nous avons fait de notre mieux dans le peu de temps dont nous disposions.

M. Gower : Et c'est ce que vous avez pu faire de mieux?

Le sénateur Tardif : Nous vous sommes reconnaissants d'être venu. Merci.

Le sénateur Nolin : Dois-je comprendre que vous étiez ici à Ottawa hier, en train d'écouter le débat à la Chambre des communes?

M. Gower : Non, j'étais à Toronto pour essayer d'amener nos membres d'Oakville à reprendre le travail. J'ai écouté le débat à Toronto, puis je suis venu en voiture aujourd'hui.

Le sénateur Joyal : Je suppose que vous avez eu l'occasion de lire le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.

M. Gower : J'en ai reçu un exemplaire il y a un moment. Je n'en avais pas auparavant. J'ai cependant eu le temps de le parcourir.

Le sénateur Joyal : Ma question porte sur l'article 11, à la page 4 du projet de loi. Si j'ai bien compris cette disposition, elle donne aux parties 90 jours pour présenter à l'arbitre deux listes, l'une contenant les points sur lesquels elles se sont entendues et l'autre, les points de désaccord. Elles doivent également présenter chacune leur offre finale concernant les points de désaccord. D'après l'alinéa 11c), l'arbitre choisit soit l'offre finale du syndicat, soit celle de l'employeur pour régler les points de désaccord.

Le ministre nous a expliqué que ce système, qui permet à l'arbitre de choisir l'une ou l'autre des deux offres finales, amènera les parties à améliorer dans la mesure du possible leur offre finale pour quelle ait le plus de chances d'être retenue par l'arbitre. Dans certains cas, l'arbitre peut décider, après avoir étudié les deux offres finales, de choisir une position intermédiaire.

Vous nous avez dit que les principales questions en jeu dans le différend actuel sont liées à la sécurité.

M. Gower : Oui.

Le sénateur Joyal : Si c'est le principal point de désaccord qui empêche la signature d'une convention collective, comment l'arbitre peut-il faire un choix entre les deux offres finales? La sécurité n'est pas une question qui se tranche facilement d'un côté ou de l'autre. Il faut faire preuve de jugement. Il est probable que l'équilibre se situe entre les deux positions.

M. Gower : Oui.

Le sénateur Joyal : Ne craignez-vous pas qu'il soit difficile d'en arriver à une proposition visant à mettre fin au différend dans les circonstances présentes?

M. Gower : Oui, mais si le projet de loi est adopté — comme il semble devoir l'être —, j'espère que nous aurons des représentants élus qui s'en occuperont pour nous. Ils devraient être en mesure de négocier d'une façon appropriée avec la société dans l'intérêt des membres. Nous ne souhaitons pas que la décision soit laissée à un arbitre au terme du délai de 90 jours. J'espère sincèrement que cela n'arrivera pas.

Le sénateur Joyal : Croyez-vous que la période de 90 jours soit suffisante pour permettre aux représentants mandatés de négocier en votre nom?

M. Gower : Si j'avais eu la possibilité de modifier le projet de loi, cette période se situerait après la décision, quelle qu'elle soit, du CCRI. Il y aurait un vote sur la représentation qui nous rattacherait à un autre syndicat ou nous laisserait dans la même situation, une fois que cela serait déterminé.

Le sénateur Joyal : N'est-ce pas l'un des arguments clés d'établir une période de 90 jours dans laquelle il faut s'entendre, comme l'ont dit plus tôt les sénateurs Bryden, Banks et Gustafson? D'après ce que je sais des conventions collectives, il me semble qu'une période de 90 jours est suffisante pour faire aboutir le processus en cours. Vous l'avez dit vous-même, il y a environ six mois.

M. Gower : Oui, une période de trois mois est probablement suffisante pour faire aboutir ce processus, mais il faudrait que la décision et le vote sur la représentation se situent avant cette période.

Le sénateur Joyal : Par ailleurs, il faut tenir compte du fait que le projet de loi fixe ce délai à 90 jours. Le conseil devra en tenir compte en se prononçant dans la période prévue.

M. Gower : Je l'espère bien.

Le sénateur Joyal : Autrement dit, il serait utile pour vous d'obtenir une décision finale. Est-ce exact?

M. Gower : C'est possible. La décision pourrait nous nuire. Cela dépend de ceux qui la prendront.

Le sénateur Joyal : Il faut en outre que les représentants du syndicat prennent une décision pour que le processus de négociation puisse commencer normalement comme vous l'espérez. Voilà pourquoi il y a des décisions et des délais qui sont prévus parce qu'on ne peut pas laisser traîner cette affaire, compte tenu de ses répercussions sur l'ensemble de l'économie canadienne.

M. Gower : Je ne me suis peut-être pas exprimé assez clairement. Je m'en excuse. Si tous les arguments doivent être présentés au CCRI d'ici vendredi, il est probable que le conseil rendra sa décision dans la semaine. S'il décide d'autoriser un vote sur la représentation, il faudra prévoir un délai, comme vous le savez certainement. Il pourrait s'agir de deux semaines, d'un mois ou de six semaines. Pendant cette période, il ne conviendrait pas de laisser quelqu'un négocier en notre nom. Voilà pourquoi je dis que nous avons besoin de connaître la décision avant d'entreprendre ce processus.

Le sénateur Joyal : Par ailleurs, le projet de loi, s'il est adopté, imposera d'agir dans les plus courts délais pour que la négociation collective puisse aboutir dans la période prévue de 90 jours.

(1750)

M. Gower : C'est exact, mais nous ignorons pour le moment qui négociera en notre nom.

Le sénateur Joyal : Je comprends que, en un sens, vous êtes aux prises avec le dilemme de l'œuf ou de la poule; c'est pourquoi nous sommes tous ici pour tenter de trouver une solution et de nous assurer d'être aussi équitables que possible, tant pour les employés que pour les Canadiens qui subissent les conséquences de la situation dans laquelle se trouvent le syndicat et l'employeur. Il est très difficile de déterminer qui négociera en votre nom.

M. Gower : Je sais que cette lettre que je tiens à la main ne suffira pas à convaincre les Canadiens que nous ne ferons jamais la grève — que nous ne la ferons probablement pas à une date ultérieure. L'amendement que j'aimerais beaucoup qu'on apporte au projet de loi, c'est une disposition prévoyant que le délai commence après que la décision sur la représentation aura été rendue; je voudrais également qu'entre-temps on maintienne le statu quo — pas nécessairement le statu quo, mais la convention collective actuelle ou celle qui vient d'arriver à échéance. Les conditions de cette convention collective demeureraient en vigueur jusqu'à ce que la décision sur la représentation ait été rendue.

Le sénateur Bryden : Le sénateur Joyal a soulevé un point excellent, en ce sens qu'un délai de 90 jours permet d'exercer des pressions sur l'organisme qui prend une décision afin qu'il tente d'accéder à votre demande le plus rapidement possible. Malheureusement, ce conseil est quasi judiciaire, de sorte qu'il ne nous appartient pas de nous en mêler. Cependant, votre organisation pourrait presser le ministère du Travail de faire avancer les choses dans ce dossier.

Nous devons également garder à l'esprit le fait que le projet de loi prévoyant le retour au travail entrera essentiellement en vigueur 24 heures après la proclamation qui aura probablement lieu cet après- midi. Pendant cette période, vous êtes toujours au travail, il est interdit à l'employeur d'empêcher les gens de travailler et il n'y a plus de lock-out.

Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, je vous signale qu'il y a aussi une disposition dont le ministre a parlé cet après-midi en vertu de laquelle le gouvernement peut également, selon les circonstances, prolonger le délai de 90 jours prévu. Par conséquent, s'il vous faut un mois de plus que le délai de 90 jours pour vous entendre, vous pourriez demander une prolongation du délai. Le paragraphe 11(1) prévoit cette possibilité.

D'ici là, en ce qui nous concerne, si vous avez l'intention de faire la grève, la première disposition exécutoire du projet de loi stipule que personne ne peut faire la grève et que personne ne peut imposer de lock-out, que tout contrevenant devra payer l'amende, et ainsi de suite. Une telle disposition est très utile dans la situation où vous vous trouvez, au moment où vous essayez de faire preuve de cohérence. Cependant, faites-le le plus rapidement possible. Il est aussi difficile pour nous d'agir ainsi qu'il est difficile pour vous de le subir.

M. Gower : Je vous remercie. Ce qui m'inquiète toutefois, c'est que les dirigeants actuels ne représentent pas nécessairement leurs membres. Même en essayant de faire preuve de tact, je dirais qu'on peut se poser des questions sur leurs intentions. Si nous avions pu attendre une décision représentationnelle avant que tout cela ne se produise, il aurait été possible d'éviter ce cirque douteux. Voilà ce qui me préoccupe.

Le sénateur Banks : J'ai quelques questions à poser. Vous avez dit que les représentants des travailleurs ferroviaires, au sens générique, à l'ouest de Winnipeg, sont à Cleveland. Participent-ils à des réunions dans cette ville ou est-ce qu'ils y habitent?

M. Gower : J'ai peut-être mal compris. Nos représentants syndicaux, c'est-à-dire notre directeur législatif et nos vice- présidents, qui sont actuellement nos présidents généraux, sont nos hauts dirigeants — au moins ils en ont le titre — au Canada. En ce moment, ils sont tous à Cleveland.

Le sénateur Banks : Qu'est-ce qu'ils y font?

M. Gower : Ils tiennent une audience au sujet du président général dûment élu. C'est là une partie de notre problème. C'est pourquoi nous avons besoin d'une décision représentationnelle avant de bouger.

Le sénateur Banks : Quelle que soit notre décision, j'espère qu'en partant vous comprendrez que la question que vous soulevez au sujet des problèmes internes du syndicat et des travailleurs est une question distincte qui n'est pas de notre ressort.

M. Gower : Je comprends.

Le sénateur Banks : En ce qui nous concerne, nous sommes saisis d'un projet de loi qui tient compte de la situation actuelle, indépendamment de problèmes potentiels lorsqu'il s'agit de savoir qui représente qui du point de vue des travailleurs. Je présume que c'est le genre de problème dont peut se charger le CCRI.

M. Gower : Oui, sénateur.

Le sénateur Banks : La coïncidence de ces deux éléments est malheureuse. Toutefois, veuillez comprendre que nous devons nous prononcer sur le projet de loi dont nous sommes saisis, lequel prend en compte, comme cela a été dit, les pertes qu'a subies l'économie canadienne pendant un certain temps en février et les pertes qui ont commencé à se produire en ce moment même. Les secteurs d'activité autres que le secteur ferroviaire ont étudié la situation et ils ont déclaré que c'est trop dangereux de continuer de produire autant que nous produisons, compte tenu de la livraison juste-à-temps et de considérations de cette nature. Je sais que vous connaissez cela beaucoup mieux que moi, mais ça, c'est autre chose.

Je veux poser une question hypothétique, en revenant à l'article 11 et à la teneur de l'alinéa 11(1)(c) à la page 4. Je déduis de vos propos qu'une personne raisonnable et soucieuse de la sécurité ferait valoir que certaines des demandes faites par l'employeur dans cette affaire sont déraisonnables et ne devraient pas être mises en place, car elles compromettraient la sécurité du public et des travailleurs.

Selon la méthode figurant dans ce projet de loi, et le sénateur Joyal l'a décrite, un arbitre va rendre des décisions dans les cas où il n'y a pas d'accord. Pour poursuivre mon hypothèse, disons que cela en est un exemple. Supposons que le temps d'immobilisation est une question qui n'est pas résolue au terme de la période de 90 jours, que l'entreprise ferroviaire veut un temps d'immobilisation plus court et que les travailleurs veulent soit un temps d'immobilisation plus long, soit conserver le temps d'immobilisation actuel.

Je crois que la plupart d'entre nous comptent sur le fait qu'un arbitre, qui ouvre les deux enveloppes et qui doit choisir l'une des deux sans modification, va en regarder une et dire : « Cela est déraisonnable », puis regarder l'autre et dire : « Cela est moins déraisonnable », et choisir celle-là. Le processus a été conçu pour fonctionner de cette façon-là. Le processus est conçu de telle sorte que dans les cas où les parties n'ont pas réussi à s'entendre à la toute dernière minute, les positions présentées dans l'enveloppe par l'employeur et par les travailleurs deviennent soudainement beaucoup plus raisonnables pour les parties en cause qui pourraient craindre que l'arbitre les rejette s'il les considère déraisonnables.

(1800)

Cela vous inspire-t-il une certaine confiance en ce qui a trait à la résolution de situations de ce genre?

M. Gower : Dans certains cas oui. En réfléchissant à certains de ces cas toutefois, je suis persuadé que je pourrais vous présenter quelques scénarios dans lesquels je pourrais vous convaincre qu'une position est raisonnable, alors que ce n'est pas le cas, sur des points comme les heures de service, les périodes de repos, les règlements et les congés notamment.

Un arbitre pourrait accorder la possibilité de maintenir les options actuelles, qui prévoient le droit de demander une période de repos après dix heures et de prendre jusqu'à 24 heures à la gare d'attache, mais la société veut voir disparaître toutes ces dispositions relatives au repos. C'est l'une de ses préoccupations. Elle veut voir les autres dispositions disparaître pour que le règlement sur les heures de travail soit mis en vigueur.

Comme vous le savez peut-être, le règlement sur les heures de travail constitue essentiellement une norme minimale. Je ne voudrais pas avoir à respecter quotidiennement ces règles. Toutefois, je pourrais présenter la chose de façon assez positive.

Le sénateur Banks : Je vous remercie de votre réponse. Je me console en présumant que l'arbitre devrait être une personne bien informée qui sera en mesure de faire la part des choses. J'espère que ce sera le cas.

M. Gower : Je l'espère également. Merci.

Le président : Je n'ai pas d'autres intervenants sur les listes.

Monsieur Gower, au nom de tous mes collègues, je tiens à vous remercier d'être venu ici aujourd'hui pour nous aider dans ce dossier.

M. Gower : Je vous remercie beaucoup de m'avoir reçu. C'est un honneur pour moi et je l'apprécie.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord pour que nous procédions à l'étude article par article du projet de loi C-46, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services ferroviaires?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'étude du titre est-elle adoptée?

Des voix : Adoptée.

[Traduction]

La présidente : L'étude de l'article 1, le titre abrégé, est-elle reportée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 2 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente: L'article 3 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

[Français]

La présidente : L'article 4 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La présidente : L'article 5 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La présidente : L'article 6 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

[Traduction]

La présidente : L'article 7 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 8 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 9 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 10 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

[Français]

La présidente : L'article 11 est-il adopté?

Des voix : Avec dissidence.

La présidente : L'article 12 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 13 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 14 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 15 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 16 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

[Traduction]

La présidente : L'article 17 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 18 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 19 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

[Français]

La présidente : L'article 20 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 21 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 1, le titre abrégé est-il adopté?

Des voix : D'accord.

[Traduction]

La présidente : Le titre est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : Dois-je faire rapport du projet de loi sans propositions d'amendement?

Des voix : D'accord.


[Français]

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le Sénat reprend sa séance.

RAPPORT DU COMITÉ PLÉNIER

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, le comité plénier, auquel a été renvoyé le projet de loi C-46, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services ferroviaires, a examiné ledit projet de loi et m'a chargée d'en faire rapport au Sénat sans amendement.

TROISIÈME LECTURE

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand ce projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois?

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 28(1)b) du Règlement, je propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois maintenant.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la permission est- elle accordée?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Comeau : Honorables sénateurs, je propose que nous procédions immédiatement à la troisième lecture du projet de loi.

Son Honneur le Président : L'honorable sénateur Comeau propose, avec appui de l'honorable sénateur Di Nino, que le projet de loi soit lu pour la troisième fois maintenant. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

[Traduction]

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je serai bref également. Je veux revenir sur la question que j'ai posée au ministre et au témoin à propos de l'alinéa 11(1)c) du projet de loi. Je veux revenir là-dessus à l'étape de la troisième lecture, parce qu'il s'agit d'une disposition importante en raison des répercussions qu'elle aura à l'avenir sur les mesures législatives de retour au travail.

Comme on nous l'a dit en comité, il est parfois facile de choisir entre deux offres, surtout lorsqu'il est question d'argent. D'autres sujets de discorde entre le syndicat et le patronat peuvent faire l'objet d'arbitrage sans porter nécessairement sur des questions monétaires. Comme un témoin le mentionnait, pour certaines questions, comme celles ayant trait à la sécurité, il y a deux propositions et c'est parfois le juste milieu entre les deux qui correspond à la meilleure solution. Voilà pourquoi on a recours à l'arbitrage. L'arbitrage repose sur le discernement d'une personne d'expérience. Par contre, quand il suffit d'ouvrir l'enveloppe A puis l'enveloppe B, on ne peut pas parler vraiment d'arbitrage. Il s'agit simplement, à mon avis, de la divulgation des offres. Ce n'est pas de l'arbitrage dans le vrai sens du terme. Dans le cadre de la négociation collective, il faut que le principe de l'arbitrage soit respecté.

Évidemment, ce projet de loi comprend une proposition déjà faite dans le passé, comme l'a dit le ministre, à savoir lors de la grève des débardeurs du port de Vancouver en 1994, mais les arguments du témoin ont du bon. Il ne fait aucun doute, selon moi, que, lorsque vient le temps de régler un conflit de la nature du conflit actuel, les résultats de l'arbitrage ont quand même de l'importance. Il faut en tenir compte, car si une loi semblable doit encore être adoptée un jour, et j'espère que ça n'arrivera pas bientôt, nous devrons peut-être alors tenir compte de l'arbitrage pour que le règlement soit équitable. Nous devrons pouvoir dire que nous nous sommes appuyés sur la décision de l'arbitre, compte tenu de sa capacité à réconcilier les points de vue en présence, dans l'intérêt de l'employeur, des employés et du public en général, qui doivent généralement subir les conséquences d'un tel conflit.

Voilà essentiellement tout ce que j'avais à dire. Je remercie les sénateurs pour leur attention.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

[Français]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, je propose que le greffier du Sénat soit autorisé à payer les frais de déplacement et d'hébergement raisonnables pour le témoin qui a comparu devant le comité plénier plus tôt aujourd'hui, selon les lignes directrices du Sénat concernant les frais de déplacement des témoins.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(1810)

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je demande au Sénat la permission d'avancer à l'examen du projet de loi C-293, inscrit au Feuilleton sous la rubrique « Projets de loi d'intérêt public des communes »; et ensuite, la motion no 169, inscrite au Feuilleton des avis au nom de l'honorable sénateur Kenny.

PROJET DE LOI SUR LA RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE D'AIDE AU DÉVELOPPEMENT

DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Roméo Antonius Dallaire propose que le projet de loi C-293, Loi concernant l'aide au développement officielle fournie à l'étranger, soit lu pour la deuxième fois.

Honorables sénateurs, il est tard, mais l'occasion se présente et je considère essentiel de poursuivre et d'avancer sur ce dossier.

[Traduction]

J'aimerais attirer l'attention du Sénat sur la présence dans la tribune de représentants très solides et très dévoués à la cause d'une ONG, le Conseil canadien pour la coopération internationale, qui a organisé la campagne Abolissons la pauvreté et qui représente plus de 100 ONG appartenant au secteur bénévole canadien ainsi que les milliers de bénévoles canadiens qui y travaillent. Merci d'être demeurés avec nous.

Honorables sénateurs, je suis heureux aujourd'hui d'amorcer au Sénat le débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C- 293, Loi concernant l'aide au développement officielle fournie à l'étranger.

Ce projet de loi vise à accroître la cohésion, la transparence et les obligations de rendre compte dans le domaine de l'aide que nous accordons aux pays en voie de développement. Le Parlement est invité à légiférer pour qu'en matière d'aide publique au développement, le Canada soit tenu de rendre des comptes comme il se doit au Comité d'aide au développement de l'OCDE. L'aide publique au développement constitue seulement une fraction de l'enveloppe budgétaire de l'aide accordée par le Canada à d'autres pays. Le mandat législatif que vise à établir ce projet de loi aurait pour effet de garantir l'utilisation de l'aide publique au développement accordée par le Canada exclusivement dans le but de réduire la pauvreté.

Le projet de loi C-293 définit l'aide publique au développement selon la définition du Comité d'aide au développement de l'OCDE, mais en incluant des éléments typiquement canadiens. Voici comment elle est définie dans le projet de loi C-293 :

[...] qui est administrée dans le but premier de promouvoir le développement économique et le bien-être des pays en développement, qui est accordée à des conditions de faveur, qui comporte un élément de subvention d'au moins 25 p. 100 et qui satisfait aux exigences énoncées à l'article 4;

b) soit qui est fournie en vue d'alléger les effets d'une catastrophe naturelle ou d'origine humaine ou de toute autre situation d'urgence survenant à l'étranger.

L'article 4 du projet de loi établit les trois critères que l'aide au développement officielle fournie par le Canada devrait respecter. L'ADO du Canada ne devrait être fournie aux pays en développement que si le ministre compétent est d'avis qu'elle :

a) contribue à la réduction de la pauvreté;

b) tient compte des points de vue des pauvres;

c) est compatible avec les normes internationales en matière de droits de la personne. »

Cette opinion devrait également refléter celle des organisations sociales.

Le principal objectif de ce projet de loi est de faire en sorte que l'aide au développement officielle du Canada soit versée exclusivement à ceux qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire ceux qui vivent dans la pauvreté, et qu'elle ne serve pas à satisfaire les intérêts nationaux des donateurs.

Permettez-moi d'expliquer aux sénateurs la raison d'être de ce projet de loi. Depuis 2001, les intérêts nationaux des pays développés, y compris du Canada, ont joué un rôle de plus en plus grand dans l'attribution de l'ADO. Depuis les attaques terroristes du 11 septembre 2001, plusieurs pays développés ont eu tendance à utiliser leur ADO à d'autres fins que celles qui étaient prévues initialement, c'est-à-dire la réduction de la pauvreté et l'atteinte des objectifs du Millénaire pour le développement. Très souvent, l'argent était versé aux pays en développement dans le but de financer la guerre contre le terrorisme ou pour les volets militaire et de sécurité civile des opérations de maintien de la paix. Autrement dit, l'ADO sert plus les intérêts des pays donateurs que ceux des pays pauvres.

Certains pays, dont le Canada, ont gonflé leurs statistiques relatives à l'ADO en y ajoutant, par exemple, l'argent versé par l'OCDE aux projets de paix et de sécurité. Dans le livre intitulé The Reality of Aid 2006, on indique que, entre 2001 et 2004, environ 28 p. 100 des augmentations de l'aide étrangère versée par le Canada ont visé l'Afghanistan et l'Irak. En 2004, le Canada n'a consacré que 0,27 p. 100 de son revenu national brut à l'ADO, soit environ 3,4 milliards de dollars canadiens.

En 2006-2007, environ 4,6 milliards de dollars ont été consacrés à l'ADO, soit 0,33 p. 100 de notre RNB. Le plus récent budget laisse présager à peu près la même chose pour 2007-2008; aucune augmentation notable. Nous nous attendons à ce que l'ADO se chiffre à environ 4,6 milliards de dollars, soit 0,32 p. 100 du RNB. Cela ne correspond même pas à la moitié de l'objectif de 0,7 p. 100 établi par les Nations Unies et adopté à l'échelle mondiale.

[Français]

Enfin, notre aide au développement officielle est souvent comptabilisée depuis une même enveloppe budgétaire, ce qui pose un problème lorsque vient le temps de parler d'efficacité de notre aide. Au lieu de différencier les fonds consacrés à la réduction de la pauvreté de ceux consacrés à des projets de sécurité, de stabilisation et de reconstruction, l'ACDI les a souvent inclus tous ensemble dans le calcul et le rapport d'aide officielle au développement que l'on soumet chaque année au Comité d'aide au développement de l'OCDE, et ce même si, en principe, cette aide ne devrait pas se retrouver dans le calcul, selon les critères de l'OCDE.

Cette pratique est monnaie courante dans plusieurs autres pays, notamment les Pays-Bas, l'Australie et les États-Unis. Ils y rapportent souvent toute leur aide internationale comme aide officielle au développement, ce qui leur permet d'améliorer leurs statistiques envers l'OCDE et leur image en tant que pays donateur.

Est-ce juste et honnête, honorables sénateurs, de comptabiliser du financement pour la sécurisation d'un pays depuis une enveloppe qui vise en tout premier lieu l'élimination de la pauvreté? Est-ce qu'améliorer la sécurité d'un pays contribue nécessairement ou même directement à réduire la pauvreté dans ce même pays? Certains diront que sécurité et développement sont intrinsèquement liés, mais ce n'est certes pas l'objectif de l'aide qui est envoyée dans un but de rétablir la sécurité. L'objectif est un objectif de sécurité et non pas de réduction de pauvreté. Ne mélangeons pas les deux éléments; qu'ils soient complémentaires, oui, mais pas nécessairement dans la même enveloppe.

Soyons clairs, ce projet de loi n'est pas contre l'aide octroyée aux États fragiles et en déroute pour le rétablissement de la paix et de la sécurité. Au contraire, le projet de loi stipule que l'argent devrait venir de deux enveloppes budgétaires bien distinctes. Il nous faut baliser le calcul de l'aide officielle au développement si nous voulons une aide qui sera efficace et qui aura un réel impact, une continuité et la capacité de soutenir l'effort pour plus de quelques années.

Ce projet de loi ajoute que non seulement l'aide officielle au développement doit être balisée, mais elle doit également être redevable devant nos institutions démocratiques.

(1820)

Le Parlement doit pouvoir avoir accès à ce que notre ministère de la Coopération internationale comptabilise comme aide au développement au comité de l'OCDE. Ce que ce projet de loi a donc l'intention de faire, honorables sénateurs, c'est de rendre par un mandat légiféré la pratique de calcul et de rapport de l'aide officielle au développement plus transparente et responsable aux yeux de tous, particulièrement aux yeux des parlementaires et des organisations de la société civile, élément que le gouvernement a nécessairement énoncé dans son désir de prendre le pouvoir et qu'il a mis en pratique avec le projet de loi C-2.

Ce projet de loi spécifie que le ministre compétent devrait présenter un rapport à la Chambre des communes et au Sénat. De fait, le rapport du comité d'aide au développement nous apprenait, en 2002, que l'ACDI, depuis l'année 1995-1996, ne produit plus de rapports annuels à l'intention du public. L'ACDI ne prépare que des rapports au Parlement sur des plans et priorités et des rapports ministériels sur les rendements qui sont souvent difficiles à comprendre pour le public et qui ne spécifient pas nécessairement des statistiques d'aide au développement claires et bien définies.

Nous avons donc du chemin à faire, selon l'OCDE, pour rendre notre aide plus transparente. L'ACDI est devenue une agence qui n'est plus imputable et responsable. Elle se doit de le devenir et d'avoir un mandat clair et transparent. En adoptant ce projet de loi, beaucoup devra changer dans les pratiques internes mais ceci nous assurera que nous aurons l'honnêteté, la transparence et la responsabilité en matière d'aide au développement et donc nous aurons la capacité de suivre l'évolution de ce processus de développement.

J'aimerais vous parler des antécédents et du contexte historiques de ce projet de loi. Ce n'est pas la première fois, honorables sénateurs, que de telles recommandations sont faites devant notre Parlement. Dès 1987, il y a 20 ans, des comités au Parlement de même que le vérificateur général se sont penchés sur l'aide canadienne allouée aux pays en développement et le rôle de l'ACDI. Tous ces rapports étaient clairs. L'objectif de réduction de pauvreté devenait et ce, dès 1987, de plus en plus brouillé par des objectifs de politique étrangère et ces rapports réclamant plus de clarté dans notre mandat d'aide publique au développement se faisaient de moins en moins disponibles et identifiables.

Laissez-moi vous donner quelques exemples : en 1987, le Comité des affaires étrangères de la Chambre des communes publie un rapport sur l'aide publique au développement au Canada, mieux connu comme étant le rapport Winegard, car il était présidé par le député Winegard du Parti progressiste-conservateur. Ce rapport recommandait d'élaborer une charte de développement qui formerait le squelette d'un mandat législatif de l'aide au développement. Cette charte devait contenir les principes suivants : la finalité de l'aide au développement est de devenir une aide dans des pays et auprès des gens les plus défavorisés du globe; les objectifs de développement devraient toujours avoir priorité sur les objectifs de politique étrangère.

Je vous reporte maintenant en 1994, au rapport du Comité parlementaire mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère canadienne. J'aimerais souligner ici la participation à ce comité des honorables sénateurs Andreychuk, Carney et Comeau. Ils se souviendront que le rapport recommandait une fois de plus une législation exposant en détail des principes de base afin de guider l'aide publique au développement et de clarifier le mandat de l'ACDI.

L'année suivante, en 1995, il y eut la réponse du gouvernement au rapport du Comité des affaires étrangères de 1994 par les ministres André Ouellet et Roy MacLaren. Le gouvernement franchit une première étape cruciale en formulant un mandat à l'égard de l'aide au développement dans sa politique : Le Canada dans le monde.

Cette politique stipulait clairement que l'objectif de l'aide publique au développement du Canada, et je cite :

[...] est de soutenir le développement viable des pays en développement pour la réduction de la pauvreté.

Je vous ramène en 1998, au rapport du vérificateur général sur l'ACDI. Il encourage le ministère à mieux rapporter les répercussions possibles de son activité car les rapports étant soumis à des périodes différentes, il est difficile de voir ce qui a réellement été fait au cours de l'année. Il en résulte donc un manque de clarté dans la méthode de vérification parlementaire.

Je reviens en 2002, au Rapport du Comité d'aide au développement de l'OCDE. Ce rapport est particulièrement critique à l'égard du Canada. Je cite :

La réduction de la pauvreté n'est pas nécessairement traitée en tant qu'objectif déterminant.

Les six priorités de l'ACDI n'ont pas de liens clairs avec la réduction de la pauvreté. Selon les données du système de notification des pays créanciers de l'APD en 2000, l'ACDI publiait que 26 p. 100 seulement de ses projets assignables sectoriels en montants totaux avaient la réduction de la pauvreté pour objectif principal, à peine le quart. À cet effet, le comité de l'OCDE recommandait au Canada en 2002 que, pour faire de la réduction de la pauvreté un objectif déterminant :

Il devra intégrer dans toute l'agence, accompagnée d'un message plus clair du mandat de l'ACDI, un plus grand dynamisme et un système de surveillance plus rigoureux.

Il citait aussi le Royaume-Uni comme étant un modèle auquel le Canada devrait s'attarder pour créer une législation visant la réduction de la pauvreté. On parle de 2002. Il faudra attendre toutefois jusqu'au dernier Parlement, soit en 2005, pour voir émerger un appui multipartite en faveur d'une telle législation.

Il faut dire qu'on n'avance pas vite. Cet appui multipartite se traduit en premier lieu dans une lettre ouverte envoyée au premier ministre de l'époque, le très honorable Paul Martin, le 17 février 2005. Cette lettre, rédigée par le Bloc québécois, le Nouveau Parti démocratique, le Parti conservateur, avec M. Harper à sa tête, exhortait le gouvernement de l'heure à mettre en place un cadre législatif qui établirait la réduction de la pauvreté comme finalité de l'aide au développement.

[Traduction]

Plus précisément, si je puis me le permettre, voici ce qu'on lit dans cette lettre :

La loi devrait comporter une déclaration d'intention sans équivoque selon laquelle les programmes d'aide du Canada seront réalisés avec pour but premier de réduire la pauvreté. Les éléments clés d'un mandat inscrit dans la loi doivent être accompagnés de mécanismes de contrôle : reddition de comptes et présentation de rapports au Parlement, ainsi que transparence accrue. Une telle mesure législative accroîtrait l'efficacité de l'aide canadienne et assurerait un meilleur soutien de la population à l'égard de cette œuvre importante.

Honorables sénateurs, c'est exactement ce que fait le projet de loi C-293. Il s'appuie sur ce large consensus entre plusieurs partis et inscrit dans la législation des mesures qui répondent à ces demandes.

Je reviens encore une fois en arrière. À la suite de cette lettre, la Chambre des communes adoptait à l'unanimité, le 28 juin 2005, une motion qui demandait au gouvernement du Canada de déposer un projet de loi « faisant de la réduction de la pauvreté la priorité de l'aide publique au développement du Canada [...] et de veiller à ce que l'aide soit dispensée en respectant [...] les personnes qui vivent dans la pauvreté ».

Nous progressons un peu trop lentement, mais nous sommes constants dans cette entreprise. D'autres initiatives parlementaires semblables ont aussi été présentées par des députés des partis d'opposition au cours de la législature actuelle et de la précédente. La députée néo-démocrate Bev Desjarlais a présenté le projet de loi C-446 le 16 novembre 2005, mais celui-ci est malheureusement mort au Feuilleton quand les élections générales ont été déclenchées.

(1830)

Le député conservateur Daryl Kramp a présenté le projet de loi C- 204 le 6 avril 2006, mais celui-ci n'est pas allé plus loin que la première lecture.

Mme Alexa McDonough, l'ancien chef du NPD, a présenté pour sa part le projet de loi C-243 le 1er mai 2006. Il est mort au Feuilleton après la première lecture.

Seul le député libéral John McKay a pu obtenir l'appui des chefs de l'opposition et faire adopter une mesure semblable, le projet de loi C-293. Par conséquent, honorables sénateurs, ce projet de loi n'est pas une mesure du Parti libéral, mais un projet de loi de tous les partis. On le constate en rétrospective. Le parti conservateur, et M. Harper lui-même, ainsi que tous les autres partis politiques, réclamaient cette mesure à la dernière législature. Le projet de loi est marqué par la constance avec laquelle on a réclamé un moyen d'assurer que l'aide publique au développement vise la réduction de la pauvreté.

Le projet de loi C-293 correspond au programme de 2006 du Parti conservateur par lequel ce dernier s'est engagé à rendre « le Parlement responsable de la supervision efficace de l'application de la politique étrangère canadienne. » C'est exactement ce que vise le projet de loi C-293. En intégrant à une loi le mandat en matière d'aide au développement officielle, on assurera une meilleure reddition de comptes, une meilleure surveillance et une meilleure information du Parlement concernant les dépenses du Canada en matière d'aide au développement, ce qui permettra de mieux cibler de telles dépenses, sans trop accroître la paperasse, espérons-le.

De plus, dans leur rapport récent sur l'Afrique, déposé en février 2007, nos collègues du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international ont formulé des recommandations analogues concernant l'ACDI et l'efficacité de notre aide au développement. Permettez-moi de les citer :

Si l'on conserve l'agence, on doit lui confier un mandat législatif autonome énonçant des objectifs clairs permettant au Parlement du Canada d'évaluer son rendement.

Honorables sénateurs, nous constatons de la part des deux Chambres une extraordinaire unanimité à l'égard de ce projet de loi ou de cette orientation visant à assujettir notre aide à l'étranger à un mandat bien défini.

Honorables sénateurs, dans la mesure où le rapport Winegard de 1987 est le premier document qui a invité notre gouvernement à se pencher sur l'affectation de l'aide aux pays en voie de développement, nous pouvons affirmer que ce projet de loi est fondé sur 20 années de réflexion et de discussion — et n'est donc pas le fruit d'une génération spontanée — concernant l'importance d'un mandat clair en matière d'aide au développement qui favoriserait concrètement la réduction de la pauvreté : un mandat nettement axé sur la réduction de la pauvreté. Sans clarté du mandat et de l'objectif, il n'est pas vraiment possible de rendre des comptes au sujet des dépenses d'aide au développement. Le risque d'éparpillement est grand, comme nous avons trop souvent pu le constater. C'est la raison pour laquelle le projet de loi C-293 est tellement nécessaire.

Il existe des lois de ce genre dans d'autres pays. Le Royaume- Unis, la Suède, la Suisse, l'Espagne, le Luxembourg, le Danemark et la Belgique ont adopté des mesures législatives qui limitent l'aide au développement officielle aux objectifs de réduction de la pauvreté et qui la distinguent d'autres enveloppes d'aide étrangère, qu'elles visent par exemple des fins de paix et de sécurité, ou même des intérêts commerciaux ou d'autres intérêts du pays donateur. Le projet de loi C-293 s'inspire de ces modèles.

En 2002, le Royaume-Uni a adopté la International Development Assistance Act. Cette loi a fait de la réduction de la pauvreté l'objectif central du programme d'aide au développement. On visait ainsi à empêcher à l'avenir le gouvernement de détourner — le terme est fort — des ressources d'aide au développement officielle à d'autres fins et de garantir —terme tout aussi fort — que l'aide liée soit exclue dans l'affectation d'aide au développement officielle.

En Suisse et en Espagne, une loi semblable est en vigueur depuis 1976 et 1998 respectivement. Le grand objectif de cette loi est l'éradication de la pauvreté.

La Suède offre un modèle très intéressant; elle est allée très loin dans sa loi et continue de progresser. En 2000, ce pays a adopté un projet de loi plaçant la réduction de la pauvreté au cœur de toutes les politiques gouvernementales. La Suède a une politique et une orientation déterminantes. Elle fait du développement international un objectif principal plutôt que d'y allouer les miettes qu'il reste une fois toutes les responsabilités financières assumées. Alors que les lois en vigueur au Royaume-Uni et dans d'autres pays stipulent que la réduction de la pauvreté est le but principal de l'aide publique au développement, la loi suédoise stipule que toutes les activités gouvernementales prennent en compte le point de vue des démunis. C'est une loi innovatrice qui fait que la Suède ne voit plus le développement international, particulièrement la diminution de la pauvreté, comme un objectif secondaire dont on s'occupe avec les quelques sous qu'il reste, mais qu'elle en fait un principe prioritaire en tant que pays.

Le Royaume-Uni offre aussi un bon exemple, je dirais même un exemple formidable, qui montre la force d'une telle loi. Par rapport au Canada, à l'Australie, voire aux Pays-Bas, qui disent consacrer à l'aide au développement international un pour cent de leur revenu national brut, le Royaume-Uni n'a pas détourné massivement l'aide publique au développement en faveur de l'Irak et de l'Afghanistan au cours des cinq dernières années. Nous connaissons l'ampleur de l'intervention du Royaume-Uni en Irak. Au Royaume-Uni, la Loi sur l'aide publique au développement n'a pas empêché le Parlement de fournir une aide militaire et humanitaire à l'Irak ou même à l'Afghanistan. Toutefois, la loi en vigueur au Royaume-Uni stipule clairement que l'aide ne provient pas de l'enveloppe de l'aide publique au développement.

En revanche, l'Australie, qui n'a pas de mandat prescrit par la loi à cet égard, aurait consacré depuis 1997 la plupart de ses ressources d'aide publique au développement à des intérêts de sécurité nationale. En 2005, l'OCDE a constaté que le programme d'aide de l'Australie avait « laissé tomber les pays du Sud » et que l'aide était de plus en plus utilisée comme un outil de politique étrangère interventionniste.

Il en va de même des Pays-Bas. Nombre d'ONG ont dénoncé le fait que la plupart des ressources d'aide publique au développement des Pays-Bas servaient à des interventions de sécurité armée plutôt qu'à la réduction de la pauvreté.

J'ignore s'il l'on peut parler de pacifisme dans le contexte du développement international, mais il semble certainement y avoir une incohérence fondamentale au point de vue de la politique étrangère entre le recours ou le recours potentiel à la force à des fins de sécurité et la façon de reconstruire, de bâtir un pays ou de le sortir de la pauvreté.

Le Canada ne veut pas faire l'objet de telles critiques, mais c'est directement ce vers quoi nous nous dirigeons. En adoptant une mesure législative axée sur la réduction de la pauvreté, le Canada préservera une démarcation claire entre ses intérêts en matière de sécurité nationale et ceux des pauvres. Le projet de loi C-293 contribuera à garantir que les fonds destinés à l'aide publique au développement ne seront pas dépensés pour réaliser n'importe quel objectif de politique étrangère à la mode et qu'ils serviront à aider les plus pauvres de la planète. Le Canada doit jouer un rôle de premier plan pour promouvoir ces approches innovatrices et responsables aux côtés de certains pays européens qui ont déjà démontré un leadership transparent à cet égard. Nous devrions participer à cet échange paradigmatique dans la prestation d'aide au développement.

[Français]

Il doit être précisé toutefois que le projet de loi n'a pas fait l'unanimité lorsqu'il a été présenté au Parlement en mai 2006. Des réticences ont été exprimées par certains témoins qui ont comparu devant le Comité des affaires étrangères de la Chambre des communes.

Permettez-moi de vous présenter brièvement la principale préoccupation qui a été maintes fois répétée par plusieurs et d'y répondre, car cette dernière a contribué à entretenir un préjugé sur ce que fera ce projet de loi et ce qu'il ne fera pas.

(1840)

[Traduction]

La principale inquiétude qui a été exprimée par les députés ministériels et par les représentants du MAECI qui ont comparu devant le comité de la Chambre des communes, c'est que le projet de loi pourrait restreindre la capacité du Canada à faire valoir ses intérêts nationaux et faire ombrage aux initiatives de paix et de sécurité telles que le Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction du MAECI, qui obtient environ 100 millions de dollars par année et qui ne sait toujours pas quoi en faire.

En réalité, le projet de loi C-293 ne restreindra aucunement les dépenses gouvernementales. Toutes les activités et les programmes du MAECI et de l'ACDI en matière de sécurité humaine — un terme qui semble être en voie de disparaître — de paix et de sécurité, et tout le financement destiné aux activités de base des organisations multilatérales — qui provient généralement de l'enveloppe de l'aide étrangère — continueront d'exister à moins que le premier ministre n'en décide autrement dans les budgets à venir.

Aux termes du projet de loi C-293, l'aide publique au développement, qui ne représente qu'une partie des fonds destinés à l'aide étrangère, ira exclusivement financer les projets et activités visant la réduction de la pauvreté. Le projet de loi cible l'aide offerte au lieu de puiser tous les fonds dans la même enveloppe budgétaire. Il n'a pas été présenté dans l'intention de mettre fin au financement actuel des projets d'intérêt national. Est-ce que la réduction de la pauvreté dans le monde est principalement un objectif d'intérêt national ou est-elle en réalité une question humanitaire à laquelle devraient s'engager les pays développés?

Pourquoi devrions-nous adopter le projet de loi? Je le dis franchement : nous devrions l'adopter avant tout parce que le Canada devrait encourager d'autres pays à adopter des lois semblables en menant par l'exemple — une dimension intéressante en ce qui nous concerne. Nous pouvons une fois de plus jouer un rôle de leader dans les efforts humanitaires internationaux et en ce qui concerne l'établissement et la consolidation de la paix dans beaucoup de pays qui sont en train d'imploser. Nous pourrions même éviter des catastrophes.

Le Canada ne devrait pas être le dernier pays à adopter une telle mesure. Cela fait 20 ans que le Parlement reconnaît le bien-fondé d'un tel projet de loi, mais les gouvernements successifs, bleus et rouges, n'ont fait preuve d'aucun leadership. Tâchons d'être en tête de file de ce changement majeur dans la façon d'acheminer l'aide publique au développement.

Le projet de loi C-293 jouit de l'appui unanime des chefs des partis d'opposition; même le Parti conservateur l'appuyait pendant la dernière législature. Il est le fruit de plus de deux ans d'une mûre réflexion et de discussions qui ont eu lieu au cours des deux dernières législatures. Nous avons eu amplement la chance d'amender le projet de loi et de le rendre viable. Ce dernier est appuyé par la population et beaucoup d'organisations de la société civile, y compris le Conseil canadien pour la coopération internationale, composé de plus de 100 organismes canadiens du secteur bénévole ou ONG. D'ailleurs, une pétition présentée à la Chambre des communes le 22 mars 2007 par Ingénieurs sans Frontières a cimenté l'intérêt du Canada pour une telle loi. Cette pétition portait la signature de 11 713 vaillants ingénieurs canadiens. Les pétitionnaires demandaient au Parlement de « légiférer pour garantir que l'aide canadienne au développement dans son ensemble contribue à la réduction de la pauvreté, tienne compte des perspectives des pauvres et soit conforme aux obligations du Canada en matière de droits de la personne. »

De surcroît, le projet de loi C-293 jouit de l'appui d'un mouvement mondial lancé en 2005 pour mettre fin à la pauvreté dans le monde. Plus de 230 000 Canadiens et plus de 700 ONG ont signé la pétition visant à éradiquer la pauvreté, qui demande instamment au Parlement canadien d'améliorer et d'accroître l'aide et d'adopter une loi qui fera en sorte que l'éradication de la pauvreté soit le seul objectif de l'aide étrangère canadienne. Tout cela sans parler des 23 millions de personnes dans le monde qui veulent que les pays riches et développés éradiquent la pauvreté.

Le projet de loi C-293 est à un tournant. Le Parlement, des organisations de la société civile et des milliers de Canadiens exigeaient une telle mesure législative. Le projet de loi comporte une perspective internationale qui cadre bien avec ce que les pays développés devraient faire. Plusieurs rapports se sont penchés sur la question au cours des 20 dernières années. Nul besoin d'enquêter davantage. De nombreux travaux ont été réalisés et les deux Chambres s'entendent quant aux objectifs à atteindre. On nous a renvoyé ce projet de loi pour que nous réalisions un second examen objectif et pour que nous donnions notre approbation, mais ce second examen a déjà été fait.

En conclusion, honorables sénateurs, j'aimerais citer Jeffrey Sachs, conseiller spécial du secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, et ancien directeur du projet du Millénaire des Nations Unies :

On ne cesse de parler d'aide au développement et de se demander si les riches font assez pour aider les pauvres. Or, tout cela concerne moins de 1 p. 100 du revenu des pays riches. L'effort qu'on demande aux pays riches de fournir est si infime qu'en faire moins reviendrait à annoncer effrontément à une grande partie de la population : « Vous ne comptez pas ».

Honorables sénateurs, ceci est un appel à l'action. Quelqu'un a pris les devants et voilà qu'on nous passe le flambeau. Montrons aux pays en développement que nous nous soucions d'eux et que le Canada a l'intention de leur offrir une aide accrue et améliorée pour qu'ils puissent se sortir du piège de la pauvreté qui les maintiendra dans des conditions inhumaines. Provoquons le changement notable qui s'impose en matière d'aide au développement pour nous attaquer aux causes profondes de la pauvreté, de l'instabilité et, ultimement, de l'implosion des pays, ainsi que des violations massives des droits de la personne et même des génocides.

La pauvreté n'est pas systématique. Les pays riches l'ont parfois créée et ils ont tiré parti de celle des autres. Par le passé, les puissances européennes ont pillé de nombreuses colonies. Il nous appartient de renverser la vapeur. Ce faisant, nous devons nous attaquer à la source des problèmes au lieu d'avoir recours à des solutions d'urgence comme nous le faisons depuis plusieurs décennies, solutions qui ne donnent pas beaucoup de résultats positifs. Comme l'indique le rapport du Sénat sur l'Afrique, depuis 1960, le monde a investi environ 568 milliards de dollars dans l'aide au développement en Afrique et relativement peu de choses ont changé.

En date de 2007, 1,2 milliard de personnes vivent dans une pauvreté abjecte; plus de 800 millions de personnes vont au lit le ventre vide; 50 000 personnes meurent tous les jours de causes liées à la pauvreté qui sont entièrement évitables; et, chaque année, 17 millions de personnes meurent de maladies qui sont guérissables.

Tous les êtres humains sont-ils semblables? Tous les êtres humains sont-ils importants ou considérons-nous que nous sommes plus importants que les autres, au point où nous ne sommes même pas capables d'allouer ne serait-ce que 0,7 p. 100 de notre revenu national brut en vue d'aider presque la moitié de la population mondiale?

On doit vraiment réévaluer la façon d'allouer l'aide publique au développement et à quoi elle est destinée, comme on le dit si bien dans le rapport du Sénat sur l'Afrique. On y affirme ce qui suit :

[...] l'aide au développement doit changer radicalement et [...] il faut étudier attentivement l'efficacité, l'efficience et les résultats [...]

Le projet de loi C-293 est un premier pas dans cette direction. C'est une étape cruciale si nous voulons réellement abolir la pauvreté et si nous désirons vraiment accroître l'efficacité de notre aide sur le terrain et la reddition des comptes en la matière.

En outre, en 2000, 189 pays, y compris le Canada, se sont engagés à atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement d'ici 2015. Le premier de ces objectifs consiste à réduire l'extrême pauvreté et la faim. Plus particulièrement, nous, les pays développés, les pays riches du monde, nous sommes engagés à réduire de moitié la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour.

(1850)

Au rythme actuel, et avec la méthode actuelle d'établissement des priorités, le développement international est une activité marginale qui, en plus, se fait de façon éparpillée sur toute la planète, comme je l'ai déjà dit, sans cohérence et sans transparence. Si nous n'adoptons pas le projet de loi, le Canada sera incapable de respecter son engagement. La crédibilité du Canada souffre de plus en plus, particulièrement dans les pays en développement, qui voient le Canada comme un exemple, une référence, comme un pays où la population croit aux droits de la personne et au droit à la sécurité et au droit à la vie, comme un pays qui n'est pas seulement pour les riches, mais pour tout le monde. Pour la première fois, nous pouvons adopter une loi qui concrétise notre engagement et, pour la première fois, nous avons le soutien populaire pour le faire.

Honorables sénateurs, j'espère que le projet de loi ne restera pas trop longtemps au Sénat. En fait, j'aimerais qu'il soit adopté rapidement et, si je puis dire, qu'il passe par la voie rapide.

Une tâche attend le gouvernement du Canada : il s'agit de sauver la vie de millions d'enfants, de femmes et de personnes âgées dans de nombreux pays sous-développés, pauvres et sous-financés. Pour donner un exemple, seulement depuis que j'ai commencé mon discours, il y a probablement des milliers de gens dans le monde qui sont morts en raison de notre inaction ou parce que notre aide ne parvient pas aux plus pauvres de la planète. Le temps file. Des gens meurent. Il ne s'agit pas d'une mesure désespérée. Au contraire, le projet de loi à l'étude offre de l'espoir, de l'optimisme et, au bout du compte, il peut aider à éradiquer la pauvreté. Si nous voulons véritablement mettre notre égoïsme de côté, il permettra d'éviter que des nations implosent et connaissent un échec catastrophique. Nous, sénateurs, devons surmonter nos divergences de vues et adopter cet important projet de loi le plus rapidement possible.

[Français]

Honorables sénateurs, au cours des multiples voyages que chacun d'entre nous a effectués à travers le monde, nous avons tous, un jour ou l'autre, mis un nom ou un visage sur la pauvreté. Je vous implore, honorables sénateurs, de penser à cet enfant, à cette femme ou à ce village, lorsque viendra le temps d'adopter ce projet de loi. Il nous faut agir maintenant et nous donner pour mission de convaincre d'autres pays développés d'emboîter le pas vis-à-vis cet objectif du millénaire.

Je vous laisse sur les paroles d'une personne qui continue de symboliser la lutte pour l'égalité et la fin de la ségrégation entre les Noirs et les Blancs, entre les riches et les pauvres. Son nom est Nelson Mandela.

[Traduction]

En ce nouveau siècle, bon nombre des pays les plus pauvres demeurent prisonniers, esclaves et enchaînés. Ils sont emmurés dans la prison de la pauvreté. Le temps est venu de les libérer. À l'instar de l'esclavage et de l'apartheid contre lesquels nous nous sommes battus, la pauvreté n'est pas naturelle. Elle est engendrée par l'homme, mais grâce aux efforts d'autres êtres humains, elle peut être vaincue et éradiquée.

[Français]

Peut ce que veut. Allons-y!

(Sur la motion du sénateur Keon, au nom du sénateur Segal, le débat est ajourné.)

LA SANCTION ROYALE

Son Honneur la Présidente intérimaire informe le Sénat qu'elle a reçu la communication suivante :

RIDEAU HALL

Le mercredi 18 avril 2007

Monsieur le Président,

J'ai l'honneur de vous aviser que l'honorable Michaëlle Jean, Gouverneure générale du Canada, a octroyé la sanction royale par déclaration écrite au projet de loi mentionné à l'annexe de la présente lettre le 18 avril 2007 à 18 h 37.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.

Le sous-secrétaire, politique, programme et protocole,
Curtis Barlow

L'honorable
        Président du Sénat
        Ottawa

Projet de loi ayant reçu la sanction royale le mercredi 18 avril 2007 :

Loi prévoyant la reprise et le maintien des services ferroviaires (Projet de loi C-46, Chapitre 8, 2007)

[Traduction]

SÉCURITÉ NATIONALE ET DÉFENSE

AUTORISATION AU COMITÉ DE REPORTER LA DATE DU DÉPÔT DE SON RAPPORT FINAL SUR L'ÉTUDE DE LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ NATIONALE

L'honorable Colin Kenny, conformément à l'avis du 17 avril 2007, propose :

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le jeudi 27 avril 2006, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, qui a été autorisé à examiner, pour en faire rapport, la politique de sécurité nationale du Canada, soit habilité à faire rapport au plus tard le 31 mars 2008;

Que le Comité conserve jusqu'au 31 mai 2008 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.

— Honorables sénateurs, la séance a été longue, mais je tiens à remercier les sénateurs Comeau et Tardif d'avoir fait en sorte que cette question soit inscrite à l'ordre du jour. Je propose l'adoption de la motion inscrite à mon nom.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée avec dissidence.)

[Français]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je crois qu'il y a consensus pour que tous les points qui restent au Feuilleton et au Feuilleton des avis soient reportés et gardés dans le même ordre.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Les honorables sénateurs sont-ils d'accord?

Des voix : D'accord.

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 19 avril 2007, à 13 h 30.)


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