Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
3e Session, 40e Législature,
Volume 147, Numéro 63
Le mercredi 3 novembre 2010
L'honorable Noël A. Kinsella, Président
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
LE SÉNAT
Le mercredi 3 novembre 2010
La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.
Prière.
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
La Loi sur la radiodiffusion
L'honorable Marie-P. Poulin : Honorables sénateurs, hier, le mardi 2 novembre, la Société Radio-Canada a lancé le compte à rebours d'un an d'activités pour commémorer le 75e anniversaire de sa fondation en tant que radiodiffuseur public national.
En apprenant cette nouvelle, j'ai tout à coup pris conscience que j'avais eu l'honneur et la joie d'être partie prenante à son développement pendant un tiers de son existence. Il est important pour nous de comprendre l'importance du 2 novembre 1936, jour où la Loi canadienne sur la radiodiffusion est entrée en vigueur. Cela ne faisait que 69 ans que la Confédération avait donné naissance au Canada. À l'époque, une seule station de radio avait été lancée. On commençait ainsi le travail de l'implantation d'un réseau national de communication dans notre immense pays.
Oui, chacun de nous, ici même au Sénat, a accès, dans sa ville, que ce soit à Terre-Neuve-et-Labrador ou en Colombie-Britannique, à une ou plusieurs stations de la Société Radio-Canada ou de la CBC.
Aujourd'hui, la Société Radio-Canada fournit une vaste gamme de services dans les deux langues officielles et, en huit langues autochtones, de même que le sous-titrage codé pour malentendants.
De ces modestes débuts est né l'un des radiodiffuseurs publics les plus importants au monde. Je suis fière d'avoir participé à son essor fulgurant et sans précédent.
La Société Radio-Canada fut et demeure le plus grand conteur d'histoires en diffusant des émissions dans toutes les régions habitées de notre vaste pays. Elle a été le rassembleur national et l'incubateur de notre propre expression culturelle, que ce soit la musique, le divertissement, la littérature, le théâtre, les émissions pour enfants, l'information, l'actualité, les affaires publiques et le sport. Il est vraiment difficile d'imaginer le Canada sans cette société mère qui a donné naissance à une espèce rare de célébrités internationales, que ce soit nos chanteurs, nos comédiens ou nos commentateurs de nouvelles hautement respectés.
Je profite donc de l'occasion pour féliciter tous les intervenants, des débuts de la société à aujourd'hui, pour leurs nombreuses réalisations.
La Colombie-Britannique
L'économie verte
L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, comme c'est le cas pour tant d'autres pays occidentaux, l'économie du Canada est devenue davantage fondée sur le savoir. C'est particulièrement vrai à la lumière de la récession mondiale. Je crois que le Canada doit reconstruire le secteur de son économie qui, en toute honnêteté, a permis la construction de notre pays. Je veux parler de notre secteur des ressources naturelles. Il est temps pour le Canada de tirer parti de son économie du savoir et de la fusionner à ses moteurs économiques traditionnels pour créer l'économie du futur, l'économie verte.
L'industrie verte contribue 15,3 milliards de dollars au produit intérieur brut de ma province, la Colombie-Britannique, et ce montant ne cesse de croître.
Le sénateur Mercer : Il parle du B.C. bud.
Le sénateur St. Germain : La vie personnelle ou les habitudes du sénateur ne m'intéressent pas.
Selon un rapport publié par la Fondation GLOBE, basée à Vancouver, l'économie verte de la Colombie-Britannique pourrait participer au produit intérieur brut de cette province à hauteur de 27,4 milliards de dollars d'ici 2020. Nous n'y parviendrons toutefois pas à moins de nous attaquer à la pénurie de main-d'œuvre dans le domaine des industries vertes. Toujours selon ce rapport, il faudra combler 66 000 postes parmi les industries vertes de la Colombie-Britannique si des mesures ne sont pas prises au cours des neuf prochaines années. Alors que le Canada sort à peine d'une période économique difficile, tous les ordres de gouvernement doivent tenir compte de tels rapports.
L'économie verte sera un élément clé de la future politique financière du Canada. Assurer une bonne gouvernance, c'est prévoir l'avenir en investissant dans aujourd'hui. Il faut une politique publique renouvelée en matière de développement d'une main-d'œuvre verte pour que le Canada puisse récolter les fruits d'une économie verte. L'investissement de fonds publics dans la recherche et le développement verts constitue une décision prudente. Le développement approprié de l'économie verte pourrait bénéficier à l'ensemble des Canadiens.
Pour les membres des Premières nations, qui sont les protecteurs originaux de l'environnement de notre pays, l'économie verte peut servir de catalyseur pour de nouvelles occasions de développement, tant sur le plan de l'éducation que de l'économie. L'économie verte a le potentiel nécessaire pour stimuler l'économie canadienne et grandement améliorer la santé et le bien-être social des Canadiens.
J'encourage tous les sénateurs à accorder une attention spéciale aux rapports comme celui-ci, de la Fondation GLOBE. Il n'y a aucune raison pour que le Canada ne soit pas un chef de file mondial sur le plan de l'économie verte et il serait tout à notre avantage qu'il le soit.
Sénateur Mercer, tenez-vous loin du B.C. bud.
Des voix : Bravo!
Le Diwali
L'honorable Vim Kochhar : Honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention sur le Diwali, la fête des lumières qui est célébrée par plus d'un milliard de personnes en Inde et dans le monde entier. Le Diwali est célébré en Inde de la même manière que Noël est célébré au Canada. La date de cette fête est établie en fonction du calendrier lunaire, de manière à ce qu'elle tombe le jour le plus sombre de l'année. Cette année, ce sera le 5 novembre. La signification de cette fête varie d'une région à l'autre et d'une religion à l'autre, mais la principale signification demeure la même. Elle souligne la victoire du bien sur le mal et la victoire des individus sur leur obscurité spirituelle. En célébrant cette fête de cette manière, nous entrons dans la nouvelle année avec de fortes attentes et une vision positive de l'avenir.
(1340)
De nombreuses légendes sont associées à cette fête, mais essentiellement, ce jour-là, les gens prient Lakshmi, la déesse de la richesse, de la vie, de la prospérité et de la sagesse, ainsi que le dieu Ganesha, celui qui élimine les obstacles et qui est le Seigneur des nouveaux départs.
La fête est également associée au Ramayana, livre qui a été écrit il y a environ 5 000 ans. Ce récit montre comment tenir ses promesses, aimer sa famille et les gens de son entourage et explique que les démons remportent temporairement la victoire, mais finissent par être vaincus. Il nous montre que l'opinion publique peut parfois nous induire en erreur, mais que le fait d'obéir à sa conscience nous mènera toujours à la joie et au bonheur.
Le Diwali nous livre un message d'amour, de richesse et de prospérité, faisant véritablement de la planète un monde meilleur. Que les lumières de Diwali illuminent pour nous tous l'année qui vient.
Visiteurs à la tribune
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de l'honorable Walter McLean, membre du Conseil privé de Sa Majesté, qui accompagne une prestigieuse délégation venant de Namibie.
Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
Le capitalisme en Nouvelle-Écosse
L'honorable Stephen Greene : Honorables sénateurs, lorsque je suis allé chercher mon courrier l'autre jour, j'ai trouvé dans ma boîte aux lettres une brochure provenant de ma députée, à Halifax, qui représente le Nouveau Parti démocratique. D'ordinaire, les brochures de ce genre s'empilent dans une boîte commodément située dans la cuisine. Dieu sait ce qui m'a poussé à feuilleter cette brochure-là. On y trouve, à la page 2, une photo prise à l'occasion d'un grand rassemblement tenu le jour de la fête du Travail à Halifax, et montrant ma députée debout à côté d'une affiche sur laquelle on peut lire « Le capitalisme ne fonctionne pas ».
Quel affreux message à envoyer aux jeunes qui souhaiteraient investir temps, argent et talent pour créer une entreprise. Quel affreux message à envoyer à quiconque, particulier ou entreprise, songe à investir en Nouvelle-Écosse. Je me permets de rappeler à ma députée qu'elle représente une ville qui fait tourner l'économie de la province dans son ensemble, voire celle de toute la région. Que serait Halifax sans des entreprises du secteur privé comme Les Chantiers Maritimes Irving, Nova Scotia Power, Bell Aliant, Clearwater Seafoods, Secunda Marine et Pete's Frootique? Je pourrais continuer longtemps d'énumérer des entreprises, grandes, moyennes et petites, y compris les restaurants que fréquente la députée et les boutiques et magasins où elle fait ses achats. Toutes ces entreprises sans exception sont des entreprises privées exploitées par des particuliers.
Osera-t-elle se poster devant leurs bureaux ou établissements et déclarer que le capitalisme ne fonctionne pas? Si c'est ce qu'elle pense, comment ma députée peut-elle véritablement représenter et mettre en valeur Halifax et ses habitants?
Si, comme elle le prétend, le capitalisme ne fonctionne pas, que propose-t-elle? Le socialisme? J'en doute. Le NPD n'est pas naïf à ce point. Cela m'étonnerait fort que les néo-démocrates ne sachent pas que le socialisme a été jeté à la poubelle de l'histoire, mais ils l'ignorent peut-être.
Ma députée veut peut-être dire que la version néo-démocrate du capitalisme ne fonctionne pas. J'aimerais certainement croire que c'est ce qu'elle veut dire, parce qu'un grand nombre d'éléments pointent dans cette direction en Nouvelle-Écosse. Sous la direction d'un gouvernement néo-démocrate, la Nouvelle-Écosse a les niveaux les plus élevés de TVH, de TPS et de TVP au Canada et la taxe de vente la plus élevée en Amérique du Nord. La Nouvelle-Écosse a également l'un des taux d'imposition sur le revenu les plus élevés au Canada et les taux d'imposition des sociétés en Nouvelle-Écosse seront bientôt le double de ce qu'ils sont dans la province voisine, le Nouveau-Brunswick.
Le gouvernement néo-démocrate ne rend pas la Nouvelle-Écosse intéressante pour les investissements, la croissance économique, l'emploi et les familles. Les capitalistes croient, d'abord et avant tout, que les impôts devraient être bas, l'appareil gouvernemental limité et les budgets équilibrés. Il a été prouvé que cette formule est efficace pour la croissance économique. Pourtant, le gouvernement néo-démocrate de la Nouvelle-Écosse n'a même pas essayé de mettre en œuvre un seul de ces éléments. Le capitalisme ne fonctionne pas? Je souscrirais peut-être à cette opinion si, dans le reste du document, on admettait la réalité, en l'occurrence que le NPD ne permet pas au capitalisme de fonctionner en Nouvelle-Écosse.
Qu'est-ce qui pourrait faire changer la situation en Nouvelle-Écosse? Uniquement le Parti progressiste-conservateur sous la direction de son nouveau chef, Jamie Baillie. Il est important que la députée d'Halifax et ses partisans comprennent que le marché sur lequel repose le capitalisme n'est une invention ni de Wall Street, ni d'Adam Smith, ni de l'Occident en général. Le capitalisme représente le cheval qui tire la charrette du progrès. Le capitalisme existe depuis des milliers d'années et constitue un élément inné de la condition humaine.
Ma députée a pris la parole à la fête du Travail. La veille de la fête du Travail devrait s'appeler Jour du capitalisme, parce que sans capitalistes, il n'y a pas de travail.
Le jour du Souvenir
L'honorable Nicole Eaton : Honorables sénateurs, il y a 93 ans aujourd'hui, plus précisément le 6 novembre 1917, le Corps canadien, sous le commandement du lieutenant-général sir Arthur Currie, a pris Passchendaele. Après avoir remporté un grand succès à la crête de Vimy et à la Cote 70, les Canadiens étaient considérés comme le meilleur corps d'infanterie pour prendre cette localité belge. Par surcroît, la prise de Passchendaele ouvrirait tout le Nord de la Belgique aux Alliés et leur permettrait de gagner du terrain et de capturer les bases de sous-marins allemandes.
Les Alliés avaient subi des pertes extrêmement lourdes et ils n'avaient pas atteint leurs objectifs; ils n'avaient avancé que de quelques kilomètres et le champ de bataille était un véritable bourbier. Currie hésitait à faire participer les Canadiens et avait prédit des pertes de 16 000 hommes. Le Corps canadien a pratiqué sa stratégie d'assaut. Les soldats avanceraient par vagues successives vers le premier objectif, soit la ligne rouge, puis vers le deuxième, la ligne bleue, et, enfin, vers le troisième, la ligne verte.
Quand le barrage d'artillerie des Alliés a commencé, à 5 h 40 le 26 octobre, on a rapporté qu'on avait entendu le bruit jusqu'à Londres. Lors de la bataille de 14 jours, plus de 1,4 million d'obus ont été tirés par le Corps canadien. Peu après le début du barrage, 20 000 Canadiens ont commencé à avancer vers la ligne rouge dans la pluie battante. Le major Robert Massie a écrit ceci :
Ils étaient sortis depuis à peine plus de dix minutes et, déjà, ils étaient trempés et couverts de boue, de la tête aux pieds.
Les Canadiens ont été en mesure d'atteindre la ligne rouge et de la tenir. Le 30 octobre, ils ont commencé à avancer vers la ligne bleue. Ils ont rapidement atteint leur objectif, mais ils ont dû se battre farouchement pendant plusieurs jours pour maintenir leurs gains. Lorsque les renforts sont finalement arrivés, 80 p. 100 des effectifs des 3e et 4e divisions étaient devenus des victimes.
À 6 heures le 6 novembre, le Corps canadien a commencé à avancer vers la ligne verte afin de capturer Passchendaele. À la fin de la journée, les Alliés avaient pris le contrôle de ce qui restait de Passchendaele.
Ce fut une victoire coûteuse. Comme le lieutenant-général Currie l'avait prédit, 15 654 Canadiens perdirent leur vie dans la bataille. On ne retrouva jamais les corps de 1 000 soldats canadiens, enfouis à tout jamais dans la boue.
Le général sir David Watson a affirmé ceci :
Ce n'est guère surprenant que les Canadiens aient acquis à ce moment-là la réputation d'être les meilleures troupes de choc des armées alliées. [...] la supériorité des Canadiens avait été incontestablement démontrée.
Aujourd'hui, comme à l'époque, les membres de nos forces armées sont les meilleurs au monde.
Veuillez vous joindre à moi pour vous souvenir du grand courage dont ces personnes ont fait preuve il y a 93 ans et du grand courage dont font preuve nos forces armées en Afghanistan.
La Fondation canadienne des champs de bataille
L'honorable Michael Duffy : Honorables sénateurs, j'aimerais donner suite aux remarques de ma collègue, madame le sénateur Eaton. À l'approche du jour du Souvenir, je veux souligner le travail remarquable effectué par la Fondation canadienne des champs de bataille. La fondation veut rappeler aux Canadiens les énormes sacrifices consentis lors de la Seconde Guerre mondiale par les membres de ce que l'on a appelé la plus glorieuse génération.
Les efforts de la fondation ont mené à l'aménagement du Jardin canadien du Souvenir à Caen, en France. Chaque année, un groupe d'étudiants en histoire fait le tour des champs de bataille au mois de juin pour voir ces lieux où des Canadiens ont combattu au prix de leur vie.
Plusieurs d'entre nous ont eu la chance de voir ce lieu consacré à ces soldats, mais pour ceux qui ne l'ont pas vu, j'ai pensé que les sénateurs aimeraient peut-être entendre ce qu'a relaté Keith Spicer, ancien fonctionnaire, qui représentait la fondation lors des cérémonies qui ont eu lieu en France en juin dernier. Il a écrit ceci : « J'ai été quasiment bouleversé par l'intensité et la sincérité du soutien apporté par les Français [au travail de la fondation], par les fonctionnaires, certes, mais aussi par les citoyens ordinaires que j'ai rencontrés. L'attachement de ces gens était profondément touchant. » M. Spicer a également dit qu'ils inculquaient à leurs enfants et petits-enfants leur sentiment de gratitude envers le Canada.
Il a également indiqué que, outre les Français, il a rencontré de nombreux citoyens néerlandais aux cérémonies de commémoration. À l'instar des Français, ils ont une affection particulière pour le Canada en raison des sacrifices consentis par nos prédécesseurs pour libérer leur pays.
(1350)
Demain, au Musée canadien de la guerre, à Ottawa, l'ambassadeur des Pays-Bas au Canada se joindra à Peter Mansbridge et à d'autres Canadiens de marque dans le cadre d'une cérémonie de commémoration. J'invite tous ceux qui le peuvent à assister à cet événement important.
Enfin, ce n'est pas seulement la date du 11 novembre ou le souvenir de la Seconde Guerre mondiale qui suscite des effusions de remerciements chez nos amis européens; ils n'ont pas oublié non plus Passchendaele et la Première Guerre mondiale.
Plusieurs d'entre vous savent peut-être que, tous les jours, au coucher du soleil, à 20 heures, dans la ville d'Ypres, en Belgique, la circulation est arrêtée à la Porte de Menin. Des bénévoles locaux rendent hommage, dans une courte cérémonie, aux 15 000 soldats canadiens et soldats du Commonwealth qui ont donné leur vie pour libérer cette partie de la Belgique durant la Première Guerre mondiale.
Pour ces gens et des millions d'autres Européens, chaque jour est le jour du Souvenir. Voilà pourquoi, selon moi, il est important que, chez nous, nous fassions tout ce que nous pouvons pour aider la Fondation canadienne des champs de bataille à remplir son importante mission, qui est de garder vivant ce chapitre essentiel de notre histoire.
AFFAIRES COURANTES
L'étude de la proposition relative aux frais d'utilisation
L'Industrie—Présentation du cinquième rapport du Comité des banques et du commerce
L'honorable Michael A. Meighen, président du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant :
Le mercredi 3 novembre 2010
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son
CINQUIÈME RAPPORT
Votre comité, auquel a été renvoyé le document « Proposition d'imposition de frais en vertu de la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif » a, conformément à l'ordre de renvoi du lundi 27 septembre 2010, étudié la proposition d'imposition de frais d'utilisation et, conformément à l'article 5 de la Loi sur les frais d'utilisation, recommande son approbation.
Respectueusement soumis,
Le président,
MICHAEL A. MEIGHEN
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?
(Sur la motion du sénateur Meighen, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
[Français]
Projet de loi de soutien de la reprise économique au Canada
Avis de motion tendant à autoriser le comité des finances nationales à étudier la teneur du projet de loi
L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)e) du Règlement, je donne avis que, plus tard aujourd'hui, je proposerai :
Que, conformément à l'article 74(1) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier la teneur du projet de loi C-47, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 4 mars 2010 et mettant en œuvre d'autres mesures, présenté à la Chambre des communes le 30 septembre 2010, avant que ce projet de loi ne soit soumis au Sénat.
Son Honneur le Président : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix : Non.
Le sénateur Comeau : Si les honorables sénateurs d'en face n'accordent pas la permission, je proposerai cette motion à la prochaine séance du Sénat.
Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
Des voix : D'accord.
(Sur la motion du sénateur Comeau, l'étude de la motion est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
[Traduction]
Affaires étrangères et commerce international
Avis de motion portant autorisation d'examiner les faits nouveaux en matière de politique et d'économie au Brésil
L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :
Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les faits nouveaux en matière de politique et d'économie au Brésil et les répercussions sur les politiques et intérêts du Canada dans la région, et d'autres sujets connexes.
Que le comité présente son rapport final au plus tard le 22 décembre 2011, et obtienne tous les pouvoirs nécessaires pour rendre publiques ses constatations jusqu'au 31 mars 2012.
[Français]
PÉRIODE DES QUESTIONS
Les langues officielles
Le rapport de 2009-2010 du commissaire
L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Hier, le commissaire aux langues officielles a déposé le deuxième volume de son rapport annuel de 2009-2010. Concrètement, le commissaire a jugé recevables, en 2009-2010, 1 477 plaintes relatives au non-respect de la Loi sur les langues officielles, dont 876 plaintes contre CBC/ Radio-Canada portant sur les compressions budgétaires à Windsor, en Ontario.
Pour ce qui est du service au public, 451 plaintes furent jugées recevables en 2009-2010, soit le même niveau qu'en 2005-2006.
Quant à l'offre active verbale en personne, selon les observations du commissariat, seulement deux des 16 institutions examinées ont accueilli le public en français et en anglais plus de 60 p. 100 du temps. Seulement deux institutions sur 16. Comment expliquer que l'offre active demeure une pratique si peu courante dans nos institutions fédérales?
Comment expliquer que les Canadiennes et les Canadiens ont encore trop souvent de la difficulté à accéder aux services fédéraux dans la langue officielle de leur choix?
Ne croyez-vous pas qu'une démonstration forte de leadership de votre part permettrait aux institutions fédérales de corriger ces lacunes? Le rapport du commissaire aux langues officielles démontre l'urgence de la situation; il n'y a plus d'excuse.
Ma question est la suivante : est-ce que le gouvernement a l'intention d'intervenir immédiatement pour assurer le plein respect de la Loi sur les langues officielles, avant que nos acquis si difficilement obtenus ne disparaissent?
[Traduction]
L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie madame le sénateur de sa question. Comme elle le sait probablement, le gouvernement est très reconnaissant à M. Graham Fraser, le commissaire aux langues officielles, de son excellent rapport. Nous allons prendre connaissance de toutes les recommandations du commissaire et nous continuerons de travailler avec son bureau.
Nous allons travailler sans tarder avec le commissaire en vue de régler les problèmes — et, comme le sénateur l'a souligné, il y en a. Cependant, j'aimerais attirer l'attention des sénateurs sur la page 8 du rapport. On peut y constater que le nombre de plaintes déposées par des Canadiens en ce qui a trait au service au public dans la langue de son choix est moins élevé qu'à l'époque du précédent gouvernement libéral.
Nous prenons au sérieux nos responsabilités relatives à l'application de la Loi sur les langues officielles du Canada. Je tiens à assurer au sénateur que le gouvernement travaillera extrêmement fort avec le commissaire et les fonctionnaires pour répondre aux préoccupations soulevées.
[Français]
Le sénateur Chaput : J'aimerais également attirer l'attention du leader du gouvernement au Sénat sur le fait que, s'il n'y a pas plus de plaintes maintenant qu'il n'y en avait auparavant, certaines études ont montré que, premièrement, les francophones en milieu minoritaire sont écœurés de déposer des plaintes et qu'ils le font de moins en moins. Deuxièmement, nous ne sommes pas conscients de nos droits, nous ne connaissons pas suffisamment les endroits où nous pouvons recevoir les services en anglais et en français. Lorsque des plaintes sont déposées, on peut se faire dire qu'on n'a pas accès à ces services parce que le bureau n'est pas désigné. Il y a donc une question de fatigue et une question de fardeau de la preuve.
(1400)
Madame le leader ne croit-elle pas qu'il y aurait matière à réflexion et que le gouvernement pourrait se pencher sur cette question?
[Traduction]
Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je m'inscris en faux contre les propos du sénateur voulant que les Forces canadiennes aient jeté l'éponge. Ce n'est pas le cas. Les Forces canadiennes savent à quel point il est important d'appuyer les deux langues officielles. Comme je l'ai déjà dit au sénateur en réponse à d'autres questions, le fait d'accorder au français et à l'anglais une importance égale n'est pas seulement ce qu'il convient de faire, mais c'est aussi une bonne mesure du point de vue opérationnel.
Les Forces canadiennes ont accepté les 20 recommandations contenues dans le rapport du commissaire du 2 juin. Le commissaire a écrit qu'il était satisfait du plan d'action élaboré par le ministère de la Défense nationale pour mettre en œuvre ses recommandations. Le ministère de la Défense nationale s'emploie à donner suite à ces recommandations. Le commissaire aux langues officielles a déclaré qu'il était satisfait du travail réalisé par le ministère de la Défense nationale. À mon avis, il est irresponsable de laisser entendre que les Forces canadiennes ont jeté l'éponge.
Le sénateur Mitchell : Ce n'est pas ce qu'elle a dit.
Le sénateur Poulin : Problème d'interprétation.
[Français]
Le sénateur Chaput : Honorables sénateurs, je m'excuse auprès du leader du gouvernement, mais je n'ai jamais mentionné « the Armed Forces ». Il a dû y avoir une difficulté dans la traduction. Je vérifierai.
L'honorable Jean-Claude Rivest : Honorables sénateurs, je veux poser une question additionnelle. Les rapports du commissaire aux langues officielles, année après année, se ressemblent malheureusement et soulèvent, comme notre collègue, le sénateur Chaput, le souligne, d'énormes lacunes dans l'application de la loi.
Il me semble qu'il serait temps que le gouvernement actuel, et en particulier le premier ministre, M. Harper, renoue avec une tradition initiée par le très honorable Pierre Elliott Trudeau et poursuivie par le très honorable Brian Mulroney. J'aimerais entendre de la part du premier ministre du Canada un engagement ferme, déterminé et résolu à assumer son leadership de premier ministre du Canada pour assurer la bonne application de la Loi sur les langues officielles.
[Traduction]
Le sénateur LeBreton : Tout ce que je puis dire au sénateur, c'est qu'il a très bien entendu. Les actions du premier ministre et du gouvernement montrent que l'engagement du premier ministre à l'égard des langues officielles est ferme; on peut le prouver et on en voit des exemples tous les jours.
L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, au début de 2010, le Canada a accueilli le monde entier à l'occasion des Jeux olympiques et paralympiques de 2010 à Vancouver. La Colombie-Britannique était fière d'être l'hôte de ces événements. Malheureusement, nous avons une tache à notre dossier. Nous avons bien reçu le monde, mais nous avons laissé tomber les Canadiens. Notre dualité linguistique, anglophone et francophone, n'a pas été mise en évidence pendant les jeux. Le Commissariat aux langues officielles a reçu 46 plaintes à propos des Jeux de Vancouver, dont 38 visaient précisément l'absence du français lors de la cérémonie d'ouverture. Après enquête, le commissariat a déterminé que ces 38 plaintes correspondaient à des infractions à la partie VII de la Loi sur les langues officielles, qui est une loi de notre pays.
Avant les jeux, Patrimoine canadien avait négocié avec le Comité organisateur des Jeux de Vancouver une entente qui contenait une disposition sur les langues officielles. Dans son rapport de 2009-2010, le commissaire a déploré le fait que cette disposition n'ait pas été plus explicite à l'égard de la mise en évidence de la dualité linguistique canadienne.
Pourquoi la disposition sur la langue n'était-elle pas plus précise quant à la responsabilité du comité relativement à la dualité linguistique?
Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je me souviens d'avoir abordé ce problème à de nombreuses reprises avant la tenue des Jeux olympiques et paralympiques à Vancouver et aussi, si je ne m'abuse, juste après les jeux.
Comme le savent les sénateurs et comme l'a déclaré le ministre du Patrimoine canadien, la cérémonie d'ouverture relevait de la responsabilité du COVAN et du Comité olympique. Les gens étaient déçus que les deux langues officielles n'aient pas été mises sur un pied d'égalité durant cette cérémonie.
Cela dit, toutes les installations contrôlées directement par le gouvernement fédéral ont reconnu l'autorité de la Loi sur les langues officielles et l'ont respectée. Les sénateurs se rappellent certainement que le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, s'est rendu à Vancouver et a, pendant toute la durée des Jeux olympiques, évalué le respect et la qualité de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles. Les sénateurs se rappelleront également qu'il a donné de très bonnes notes au gouvernement fédéral et qu'il a rapporté que le gouvernement du Canada avait rempli toutes ses obligations à l'égard de cette loi.
Le sénateur Jaffer : Est-ce que, à l'avenir, le gouvernement du ministre veillera à ce que les accords de contribution soient plus explicites pour ce qui est de la dualité linguistique du Canada, notamment la présence et la représentation de nos deux langues officielles?
Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, comme je l'ai déclaré en réponse à toutes les questions qui m'ont été posées aujourd'hui, le gouvernement appuie, met en œuvre et respecte la Loi sur les langues officielles du Canada.
En ce qui concerne la question du sénateur, puisque le Canada n'organisera pas de Jeux olympiques ou d'événement international majeur dans un avenir proche, je ne peux qu'émettre l'hypothèse que l'expérience des Jeux olympiques organisés en février inciterait le gouvernement, si un tel événement se déroulait de nouveau au Canada, à rappeler aux organisateurs de ces comités que nous avons une Loi sur les langues officielles dans ce pays et qu'ils sont tenus de la respecter.
Le sénateur Comeau : Nous espérons que nous formerons toujours le gouvernement lorsque cela se produira.
L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, chaque institution fédérale est tenue de consulter les communautés de langue officielle au sujet de leurs besoins. En fait, cette consultation est une obligation en vertu de la Loi sur les langues officielles. D'après le rapport publié récemment par le commissaire aux langues officielles, certaines institutions n'ont pas consulté tous les membres de ces communautés, alors que d'autres ont tenu des consultations sans toutefois tenir compte de leur point de vue.
Le commissaire croit fermement qu'une démonstration forte de leadership permettrait aux institutions fédérales de corriger les lacunes de ce genre.
Le gouvernement fédéral va-t-il faire en sorte que toutes les institutions fédérales qui ne respectent pas la loi adoptent des mesures positives afin de mettre en place des mécanismes de consultation efficaces et de respecter ainsi leurs obligations?
Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, j'ai répondu à cette question lorsque j'ai répondu à la question du sénateur Chaput.
De toute évidence, le gouvernement prend les rapports du commissaire aux langues officielles au sérieux. Nous allons travailler fort avec son bureau. Nous savons, d'après son rapport, que certains ministères se heurtent à des difficultés qui doivent être réglées; le gouvernement est tout à fait disposé à collaborer avec le commissaire aux langues officielles pour ce faire.
Je voudrais signaler aux sénateurs que le gouvernement a un bon bilan en ce qui concerne le respect de tous les aspects de la Loi sur les langues officielles et, ainsi que je l'ai fait remarquer à la voisine du sénateur, on constate, en lisant la page 8 du rapport, que le nombre de plaintes déposées par les Canadiens relativement aux services offerts dans les langues officielles au public est inférieur à celui qui a été enregistré sous le gouvernement libéral précédent.
Le sénateur Mockler : Ça, c'est du leadership.
Le sénateur Mercer : Hier, j'ai demandé à une personne qui témoignait au nom de la Commission canadienne du tourisme devant le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, dans le cadre de l'étude sur les compagnies aériennes, ce qu'elle pensait du déménagement de la commission d'Ottawa à Vancouver. Vous vous rappellerez que la commission du tourisme a déménagé à Vancouver. Je l'ai questionnée sur le niveau de bilinguisme du personnel. On m'a fait savoir que 50 à 60 p. 100 des postes à Vancouver sont désignés bilingues. Ce qui est le plus intéressant, c'est qu'ils ont parfois du mal à trouver des candidats qui répondent aux normes en matière de bilinguisme à Vancouver.
(1410)
Madame le leader pourrait-elle garantir à cette Chambre que nous respecterons la Loi sur les langues officielles et que nous verrons à ce qu'il y ait des mécanismes en place pour qu'elle soit respectée à 100 p. 100?
Le sénateur LeBreton : Je le répète, honorables sénateurs, la Loi sur les langues officielles est une loi qui vise à assurer que les services offerts par les institutions fédérales sont disponibles dans les deux langues officielles. Il est évident que le gouvernement appuie entièrement la Loi sur les langues officielles.
Comme je l'ai déjà souligné — à quatre reprises au moins —, en cas de problème, le gouvernement travaillera en collaboration avec les divers ministères et organismes pour trouver une solution.
Visiteurs à la tribune
Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de céder la parole au sénateur Pépin, j'aimerais attirer votre attention sur la présence à notre tribune de Son Excellence Mircea Geoana, Président du Sénat de la Roumanie.
Il est accompagné du distingué ambassadeur de la Roumanie au Canada et d'une délégation.
Au nom de tous les sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.
Des voix : Bravo!
[Français]
Les langues officielles
Le rapport de 2009-2010 du commissaire
L'honorable Lucie Pépin : Honorables sénateurs, le commissaire aux langues officielles nous rappelle que trop de Canadiens et de Canadiennes ont encore de la difficulté à obtenir des services fédéraux en français ou en anglais. Trop souvent, les communautés de langues officielles en situation minoritaire ne jouissent pas du soutien dont elles ont besoin pour s'épanouir.
La Loi sur les langues officielles est en vigueur depuis plus de 40 ans. Pourquoi, encore aujourd'hui, les communautés linguistiques minoritaires ne peuvent-elles pas s'attendre à mieux et à obtenir de meilleurs services fédéraux dans la langue de leur choix?
[Traduction]
L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Comme l'a souligné le sénateur, la loi existe depuis 40 ans. Le gouvernement actuel et les gouvernements précédents respectent la Loi sur les langues officielles, qui est une loi du Canada. C'est pourquoi nous avons un commissaire aux langues officielles. Il supervise la mise en œuvre de la loi et veille à ce qu'elle soit correctement appliquée et respectée par toutes les agences et tous les ministères du gouvernement.
Le sénateur demande « Pourquoi? » C'est évidemment une situation où les gouvernements doivent demeurer vigilants. Le commissaire aux langues officielles veille au grain au nom du Parlement, parce qu'il est un mandataire du Parlement. C'est ce qui fait la valeur de son travail. De toute évidence, cette année, il signale des secteurs qui ne sont pas à un niveau adéquat. C'est pourquoi, lorsque le commissaire aux langues officielles présente un tel rapport, le gouvernement l'apprécie. Autrement, nous ne connaîtrions pas la situation.
Je réitère mes remerciements au commissaire aux langues officielles. Nous lui sommes reconnaissants de souligner les aspects que le gouvernement doit améliorer et nous travaillerons soigneusement avec lui et ses fonctionnaires pour nous assurer que la Loi sur les langues officielles est entièrement respectée.
Honorables sénateurs, la situation n'est pas propre à notre gouvernement. En fait, selon la page 8 du rapport du commissaire, le rendement du gouvernement actuel serait supérieur à celui du gouvernement précédent.
L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, il y a un passage du rapport du commissaire aux langues officielles que je trouve particulièrement révélateur et intéressant, surtout après ce que le leader vient de dire au sujet de l'engagement du gouvernement envers les langues officielles, du degré de priorité qu'il y accorde et de l'ardeur que le gouvernement mettra à collaborer avec le commissaire pour régler les problèmes.
Le commissaire déclare ceci :
[...] trop d'institutions fédérales ont de la difficulté à respecter leurs obligations linguistiques en matière de service au public, parce qu'elles négligent de faire le suivi adéquat des plans qu'elles ont conçus ou des ententes qu'elles ont signées ou, encore, parce qu'elles omettent de surveiller les répercussions de leurs actions.
Ces deux éléments exigent une bonne gestion et du leadership. S'il manque l'un ou l'autre, il n'y a pas de suivi adéquat ou il y a omissions. Après cinq ans d'administration conservatrice, il manque une bonne gestion et un leadership.
Comment madame le leader peut-elle dire que son gouvernement est engagé en matière de langues officielles, comme s'il s'agissait là d'un genre d'initiative ou d'une priorité alors qu'elle n'a pas consacré les ressources nécessaires, n'a pas établi les bonnes priorités, ou n'a peut-être pas suffisamment fait preuve de leadership pour atteindre cet objectif prioritaire, alors que le gouvernement a eu cinq ans pour le faire?
Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, nous sommes heureux quand le commissaire aux langues officielles présente des rapports au Parlement et attire l'attention de ce dernier et du gouvernement sur les lacunes à combler. Le sénateur devait avoir les oreilles bouchées.
Le sénateur Mitchell : Si seulement c'était le cas.
Le sénateur LeBreton : Le sénateur semble dire que toutes les plaintes qui ont été présentées l'ont été au cours des cinq dernières années. Cependant, à la page 8 du rapport du commissaire aux langues officielles, on affirme que le nombre de plaintes à propos de la langue dans laquelle les services sont offerts au public est inférieur sous le présent gouvernement à ce qu'il était sous le précédent gouvernement libéral.
Le sénateur Tkachuk : Lisez donc le rapport.
Le sénateur Mitchell : Si le nombre de plaintes a diminué, c'est sans doute parce que les Canadiens ont de moins en moins envie de demander quoi que ce soit au gouvernement parce qu'ils n'obtiennent aucune réponse, aucun service, seulement du « spin », comme on dit en anglais. Le gouvernement ne fournit jamais aucune réponse, ne propose aucune solution, ne réalise aucun progrès, n'a aucune vision et ne fait preuve d'aucun leadership. Pourquoi donc les Canadiens se tourneraient-ils vers lui?
On verra bien combien d'entre eux se tourneront vers lui aux prochaines élections.
Vous avez parlé de mesures ciblées pour régler un problème précis, eh bien en voilà un problème précis et facile à régler. La principale recommandation du commissaire au gouvernement est la suivante :
[...] déposer sans tarder un nouveau projet de loi visant à protéger et maintenir les droits linguistiques du public voyageur et du personnel d'Air Canada, et à assujettir Jazz directement à l'application de la Loi sur les langues officielles.
Cette solution est-elle donc si difficile? Quand la mettrez-vous en oeuvre?
Le sénateur LeBreton : Quand le sénateur parle de « spin », je repense au personnage de dessin animé qui parcourt le désert à la course en soulevant plein de poussière.
Le sénateur Comeau : Le diable de Tasmanie.
Le sénateur LeBreton : Lui-même.
L'obligation de fournir des services bilingues au public et un milieu de travail bilingue à ses employés s'applique à Air Canada en vertu de la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada. Le gouvernement conservateur entend présenter une mesure législative pour donner suite aux recommandations du commissaire qui concernent Air Canada Jazz.
Le sénateur Mitchell : La Gendarmerie royale du Canada a elle aussi été prise à partie parce qu'elle ne faisait à peu près rien — ou si peu — pour régler certains problèmes liés à la langue de travail qui perdurent depuis des années. Je suppose que ce commentaire vaut aussi pour les cinq dernières années, c'est-à-dire depuis que les conservateurs sont au pouvoir.
Madame le ministre peut-elle dire à la population canadienne si son gouvernement va, de concert avec le commissaire aux langues officielles, prendre des mesures pour remédier au fait que la GRC ne réussit pas à offrir les services linguistiques appropriés?
Le sénateur LeBreton : Le sénateur est en train de me demander, à moi qui suis leader du gouvernement au Sénat, de faire le travail du commissaire aux langues officielles.
Le sénateur Comeau : Il a déjà fait ce qu'il avait à faire.
Le sénateur Tardif : Donnez suite à sa recommandation.
Le sénateur LeBreton : J'imagine que le commissaire aux langues officielles, lorsqu'il fait rapport au Parlement de l'ensemble des organismes gouvernementaux, se penche aussi sur ce qui se fait à la Gendarmerie royale du Canada.
La citoyenneté et l'immigration
La divulgation des renseignements personnels des demandeurs de visas
L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, Citoyenneté et Immigration Canada vient de normaliser les formulaires à remplir pour obtenir un visa d'entrée au Canada. Je trouve intéressant que, sur le nouveau formulaire, on demande aux demandeurs s'ils ont déjà fait partie d'une milice, d'un corps policier ou d'une unité de défense et, dans l'affirmative, où était leur port d'attache et quelles étaient leurs responsabilités. Cela me rappelle le type de renseignements qu'on recueillait pendant la guerre froide.
(1420)
En ce qui a trait à la plainte formulée par les Russes, le Canada s'est-il donné un autre cadre, soit le formulaire de demande de visa, pour obtenir des renseignements au sujet de ceux qui sont nos alliés depuis peu?
L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je prends note de la question et je demanderai une réponse aux fonctionnaires du ministère pertinent.
Le sénateur Dallaire : Dans le nouveau formulaire, les demandeurs sont priés d'indiquer s'ils ont été membres d'un parti politique, d'un syndicat ou d'une autre organisation sociale ou professionnelle ou d'une organisation de jeunes.
Puis-je donc tenir pour acquis qu'une personne qui a été membre d'une armée professionnelle ou d'une bande armée, une personne, maintenant adulte, qui a été un enfant soldat, pourrait voir sa demande de visa rejetée pour cette raison?
Le sénateur LeBreton : Le sénateur Dallaire trouve toujours le moyen de revenir à son sujet favori. Je prends note de la question.
Le sénateur Dallaire : J'ajoute que cela soulève une autre question. Si telle est l'interprétation que les employés feront de la demande pour accorder un visa, cela aura-t-il une incidence sur le rapatriement des enfants soldats au Canada? Est-ce que cela aura une incidence sur la décision qu'on aura à prendre dans un an concernant Omar Khadr, après l'année qu'il aura passée en prison?
Des voix : C'est honteux!
Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je viens de dire que le sénateur Dallaire trouve toujours le moyen de revenir à son sujet favori. Je prends note de la question.
[Français]
Réponses différées à des questions orales
L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer trois réponses à des questions orales posées par l'honorable sénateur Chaput, le 28 septembre 2010, concernant l'industrie — le recensement de 2011; par l'honorable sénateur Cordy, le 5 octobre et le 2 novembre 2010, concernant l'industrie — le recensement de 2011; et par l'honorable sénateur Moore, le 5 octobre 2010, concernant l'industrie — le recensement de 2011.
L'industrie
Le recensement de 2011
(Réponse à la question posée le 28 septembre 2010 par l'honorable Maria Chaput)
Les données du recensement obligatoire de 2011 et de l'Enquête nationale auprès des ménages à participation volontaire seront recueillies, traitées, analysées et diffusées de façon indépendante.
Le Recensement de 2011 comporte trois questions sur la langue, et l'Enquête nationale auprès des ménages de 2011 en comprend cinq. Les questions figurant dans le Recensement et l'Enquête portent sur la connaissance des langues officielles, la langue parlée à la maison et la langue maternelle. En outre, l'Enquête nationale auprès des ménages renfermera des questions sur la connaissance de langues non officielles et la langue de travail.
Les trois questions posées dans le cadre du Recensement de 2011 permettront d'obtenir l'information nécessaire pour extraire des renseignements sur la première langue officielle parlée, renseignements requis pour appuyer les politiques et les programmes établis en vertu de la Loi sur les langues officielles. Les données linguistiques, de concert avec les données démographiques du Recensement de 2011, seront diffusées en 2012.
Les données recueilles dans le cadre de l'Enquête nationale auprès des ménages fourniront de l'information supplémentaire sur la situation des divers groupes linguistiques du Canada. Les questions de l'Enquête portent sur la langue, de concert avec celles sur les origines ethnoculturelles, le lieu de naissance et le lieu de travail et avec les autres questions, fourniront de l'information qui pourra servir à analyser la diversité linguistique de la population canadienne.
C'est la première fois que Statistique Canada mènera l'Enquête nationale auprès des ménages. Statistique Canada analysera et diffusera les résultats de l'Enquête en appliquant les mêmes méthodes et approches utilisées pour toutes ses enquêtes. La diffusion des résultats de l'Enquête nationale auprès des ménages devrait avoir lieu tout au long de 2013, bien que le calendrier n'ait pas encore été établi. La gamme de produits sera distincte de celle du Recensement de 2011 et elle sera mise au point après le traitement et l'évaluation des résultants de l'Enquête.
(Réponse aux questions posées le 5 octobre et le 2 novembre 2010 par l'honorable Jane Cordy)
La taille de l'échantillon pour le questionnaire complet et obligatoire du Recensement de 2011 était d'environ 2,9 millions de logements. L'Enquête nationale auprès des ménages, qui est volontaire, a remplacé le questionnaire complet et obligatoire du recensement et sera envoyée à quelque 4,5 millions de logements, soit 1,6 million de logements de plus. Le gouvernement affecte 5 millions de dollars de fonds supplémentaires à Statistique Canada pour les frais accrus d'impression et d'envoi par la poste causés par l'augmentation de la taille de l'échantillon. Tous les autres frais d'élaboration et de mise en œuvre de l'Enquête nationale auprès des ménages sont couverts à même le budget approuvé du recensement.
(Réponse à la question posée le 5 octobre 2010 par l'honorable Wilfred P. Moore)
Les agents recenseurs qui ont travaillé au Recensement de 2006 ont été payés à la pièce, c'est-à-dire par formule, pendant les premières semaines de la collecte sur le terrain. Les taux par formule ont été établis pour correspondre au taux horaire de 11,88 $. Le paiement est passé à un taux horaire une fois que la charge de travail sur le terrain a diminué et qu'il est devenu moins avantageux de rémunérer par formule. Le Bureau du vérificateur général a fait observer que le mode de paiement par formule était lourd, difficile à comprendre et pourrait expliquer en partie les difficultés de recrutement de Statistique Canada dans bien des parties du pays en 2006. Le BVG a recommandé que de nouvelles méthodes de rémunération soient envisagées pour 2011. Statistique Canada paiera tout le travail de dénombrement sur le terrain au taux horaire pour le Recensement de 2011 et l'Enquête nationale auprès des ménages. Le taux horaire des agents recenseurs sera de 14,72 $ l'heure.
[Traduction]
ORDRE DU JOUR
La Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz
La Loi sur
les poids et mesures
Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat
L'honorable Stephen Greene propose que le projet de loi C-14, Loi modifiant la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz et la Loi sur les poids et mesures, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-14, dont le titre abrégé est Loi sur l'équité à la pompe. Ce projet de loi modifierait la Loi sur les poids et mesures et la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz afin de protéger les Canadiens contre les mesures inexactes.
Les transactions commerciales, les innombrables échanges entre acheteurs et vendeurs qui sont conclus chaque jour, dans notre pays, se font sur la base de la confiance. Le vendeur vend la quantité convenue à un prix juste; l'acheteur paie le prix convenu en temps opportun.
Les Canadiens d'un bout à l'autre du pays réclament depuis un certain temps une loi plus sévère pour garantir l'équité des pratiques commerciales des industries qui mesurent ou pèsent les produits qu'elles vendent.
Je rappelle à mes collègues que beaucoup de Canadiens se demandent s'ils obtiennent la quantité qu'ils ont payée quand ils achètent des produits selon une quantité mesurée. Les normes du gouvernement fédéral en matière de mesure ont été vertement critiquées dans les médias, en 2008, quand plusieurs organes d'information, y compris l'Ottawa Citizen, ont révélé que les Canadiens ne recevaient pas toujours la quantité d'essence pour laquelle ils avaient payé.
Bien souvent, les consommateurs ne peuvent pas savoir si l'appareil de mesure fonctionne correctement tant que la quantité distribuée n'est pas fortement erronée. Ils n'ont aucun moyen de vérifier eux-mêmes l'exactitude des appareils de mesure. Par exemple, si l'appareil distribue une quantité moindre que celle qui est affichée, qui le saura? Qui obligera le détaillant, alors qu'il ignore lui-même l'existence du problème, à faire réparer l'appareil défectueux? Le projet de loi C-14 établit les éléments de base pour le règlement de tels problèmes.
Grâce à cette mesure, les détaillants pourront se faire une réputation qui contribuera beaucoup à rétablir la confiance des consommateurs canadiens. Les gens sauront qu'ils reçoivent exactement, chaque fois, la quantité pour laquelle ils paient. Avec la présentation du projet de loi C-14, l'objectif du gouvernement est clair : s'assurer que les pompes à essence et les autres appareils de mesure sont exacts et que, par conséquent, les Canadiens reçoivent la quantité qu'ils paient.
Plus précisément, le projet de loi donne force de loi à trois modifications précises qui ont été soigneusement conçues pour protéger les consommateurs et uniformiser les règles du jeu pour les entreprises. Premièrement, le projet de loi instaure des inspections obligatoires, à intervalles réguliers, pour mesurer la précision des appareils de mesure utilisés par les détaillants. Deuxièmement, le projet de loi confère au ministre de l'Industrie l'autorité de désigner des personnes ne faisant pas partie de l'administration publique fédérale pour procéder à l'inspection des appareils de mesure. Troisièmement, le projet de loi prévoit également des pénalités plus sévères qui pourront être imposées en vertu de la Loi sur les poids et mesures et de la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz. En outre, il établit un nouveau système progressif de pénalités.
Depuis des années, un grand nombre de pays, y compris la France et l'Allemagne, ainsi que la plupart des États américains, ont prévu des dispositions relatives aux inspections obligatoires à intervalles réguliers dans leurs lois en matière de poids et mesure. Le Canada tire de l'arrière à ce chapitre. Il est temps qu'une loi de modernisation comme la Loi sur l'équité à la pompe aligne l'approche du Canada en matière de mesures des produits destinés à la vente au détail sur les normes internationales dans ce domaine.
En établissant des inspections obligatoires à intervalles réguliers, le projet de loi C-14 représente un grand pas en avant. Les inspections devront dorénavant être effectuées à des intervalles de un à cinq ans, selon l'industrie et le type d'appareil de mesure.
En vertu du projet de loi C-14, les inspections obligatoires à intervalles réguliers seront introduites dans huit secteurs : la vente d'essence au détail et dans l'industrie pétrolière en aval, l'industrie laitière, la vente au détail des aliments, la pêche, les forêts, les mines, les céréales et les produits de grande culture. D'autres secteurs pourraient être ajoutés à cette liste à l'avenir, selon les résultats des consultations en cours avec les intervenants.
La mise en place d'inspections obligatoires à intervalles réguliers des appareils de mesure contribue à régler un aspect critique du problème des mesures, à savoir les détaillants qui négligent l'entretien de leur équipement de mesure et qui, par conséquent, exigent un prix injuste des clients pour les biens qu'ils achètent.
L'important, c'est que Mesures Canada n'aura pas à effectuer les inspections obligatoires. Le projet de loi autorise en effet des entreprises spécialement formées du secteur privé à se charger de cette tâche au nom du gouvernement. Par contre, Mesures Canada surveillera et évaluera ces entreprises chaque année pour faire en sorte qu'elles fassent leur travail correctement. Dans le cas contraire, leur autorisation sera révoquée.
Une fois que les fournisseurs de services auront été désignés, les détaillants pourront les embaucher chaque fois qu'ils auront besoin de leurs services. Grâce à cette mesure, combinée aux inspections obligatoires, il y aura dorénavant beaucoup plus d'inspections qu'il n'y en a aujourd'hui en vertu des lois actuelles. Un nombre accru d'inspections aura pour effet de faire augmenter la précision des mesures sur le marché.
Les fournisseurs de services autorisés pourront également procéder à l'entretien et à la réparation des appareils de mesure au moment des inspections. Ainsi, les petites entreprises constateront qu'elles pourront dorénavant faire d'une pierre deux coups, en s'assurant que leur équipement fonctionnera de façon optimale en tout temps.
Le projet de loi C-14 remédie à d'autres faiblesses des lois actuelles, notamment par l'augmentation des amendes et la mise en place d'un nouveau régime progressif de pénalités administratives pécuniaires.
Les peines imposées par les tribunaux pour les diverses infractions énumérées dans la Loi sur les poids et mesures et dans la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz passeront de 1 000 $ à 10 000 $, dans le cas d'infractions mineures, et de 5 000 $ à 25 000 $, dans le cas d'infractions majeures. Le projet de loi établit également une nouvelle amende de 50 000 $ pour les récidivistes.
Pour imposer des amendes en vertu des deux lois actuelles, le gouvernement fédéral doit poursuivre en justice les contrevenants présumés. Toutefois, lancer un processus aussi complexe que les procédures criminelles et imposer des peines aussi sévères que des poursuites judiciaires n'est pas toujours la façon la plus appropriée de traiter les contrevenants. Certaines infractions devraient entraîner des peines moins sévères. C'est logique. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle des pénalités ont été prévues.
Le projet de loi C-14 donne aux autorités fédérales la possibilité de pénaliser les contrevenants sans intenter contre eux des poursuites criminelles. Le projet de loi prévoit l'imposition rapide d'une sanction, au besoin, mais il reconnaît que certaines infractions relatives à la mesure de l'essence sont relativement mineures et peuvent avoir été commises par inadvertance.
Ainsi, le projet de loi C-14 offre ce qu'on appelle une approche graduée de l'application, ce qui signifie que la peine est toujours établie en fonction de l'infraction. Les Canadiens croient à une justice équilibrée et cette mesure législative reflète cette philosophie. En effet, la Loi sur l'équité à la pompe aborde la question de l'application de la loi dans un esprit d'équité et d'incitation constructive plutôt que de traiter tous les contrevenants comme des criminels endurcis.
(1430)
De toute évidence, honorables sénateurs, à mesure que le prix des produits de base augmente, il devient de plus en plus nécessaire que les consommateurs canadiens fassent davantage confiance aux transactions fondées sur la mesure. Cette nécessité a fortement motivé la présentation du projet de loi C-14, mais celui-ci a également été rédigé en tenant bien compte des besoins d'autres intervenants.
À vrai dire, on avait commencé à s'attaquer à ce problème bien avant la couverture médiatique négative de 2008. Mesures Canada avait entrepris depuis longtemps des consultations auprès des intervenants, dont des exploitants d'entreprises et des groupes de consommateurs, sur un vaste éventail de projets de réforme. Une révision législative de la Loi sur les poids et mesures et de la Loi sur l'inspection de l'électricité et du gaz avait été annoncée dans le Rapport sur les plans et les priorités 2006-2007 d'Industrie Canada.
Il est ressorti des consultations menées auprès des intervenants que les détaillants peuvent également être pénalisés par l'inexactitude des mesures, que ce soit par suite d'erreurs de bonne foi de leur part ou de calculs délibérés de la part de concurrents. Ces consultations ont donné lieu à la recommandation d'instaurer des inspections obligatoires à intervalles réguliers.
Les entreprises savent que la meilleure façon de garder la confiance des consommateurs est de soumettre leurs appareils et instruments de mesure à des inspections régulières. De plus, parce qu'elles connaissent précisément les quantités vendues, elles ont moins de problèmes d'inventaire, ce qui leur permet de simplifier leurs pratiques commerciales et d'économiser temps et argent. Cette mesure législative procure des avantages tangibles aux entreprises, notamment aux exploitants de petites entreprises.
Le projet de loi C-14 répond à un besoin d'équité tant pour les consommateurs que pour les détaillants. Il favorisera des méthodes équitables et des transactions équitables pour les entreprises et les consommateurs partout au pays qui vendent ou achètent des biens en fonction de la mesure.
Ce projet de loi marque un pas dans la bonne direction en vue de garantir aux Canadiens qu'ils peuvent être certains qu'ils en ont bien pour leur argent. Je prie instamment les sénateurs de défendre les intérêts des Canadiens et de réfléchir au bien-fondé du projet de loi C-14.
Je vous remercie, honorables sénateurs, de m'avoir permis de m'exprimer au sujet de ce projet de loi.
(Sur la motion du sénateur Tardif, le débat est ajourné.)
Projet de loi sur la Journée nationale du service
Deuxième lecture—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Wallin, appuyée par l'honorable sénateur Marshall, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-209, Loi instituant une Journée nationale du service pour honorer le courage et les sacrifices des Canadiens face au terrorisme, notamment lors des événements du 11 septembre 2001.
L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, j'interviens pour parler du projet de loi S-209, Loi instituant une Journée nationale du service pour honorer le courage et les sacrifices des Canadiens face au terrorisme, notamment lors des événements du 11 septembre 2001.
J'apprécie à sa juste valeur le projet de loi S-209, les intentions, les émotions et le sens du respect qui le sous-tendent. Je sais qu'il trouve son origine dans un monde que le madame sénateur Wallin connaît bien et qui a fait d'elle ce qu'elle est. C'est un monde où on respecte le patriotisme et les services rendus à la nation, des services rendus au nom de quelque chose de plus grand que soi. C'est un monde qui respecte les sacrifices au nom du bien commun. C'est un monde où on respecte l'héroïsme et le sens du sacrifice — sacrifices physiques ou autres — encore une fois consentis au nom du bien commun et au nom de notre pays.
Il ressort de tout cela un amour profond de ce pays, et je respecte le sénateur Wallin pour avoir su trouver sa place dans cette enceinte, au Sénat et dans ce monde.
Ce sont toutes de bonnes valeurs, en particulier si on y croit avec sincérité et humilité, et je ne doute absolument pas qu'elles aient présidé à l'élaboration du projet de loi.
Le processus me pose un problème en ce sens que l'idée d'instituer des journées est de moins en moins souvent appropriée. C'est en vogue et de plus en plus fréquent. On institue souvent des journées sans véritable contexte et sans se pencher sur les conditions que les individus et les organisations doivent respecter pour être reconnus de cette manière ou d'une autre.
Nous savons tous que l'Ordre du Canada n'est pas remis sur la base d'une mesure législative. Aucun sénateur ne peut présenter un projet de loi d'initiative parlementaire et dire qu'une certaine personne devrait recevoir l'Ordre du Canada. La Médaille de la bravoure militaire n'est pas remise à une personne simplement parce qu'un commandant a pris la décision arbitraire qu'il devait en être ainsi. Nous ne nommons pas non plus les juges sur la base d'une mesure législative ou d'une décision arbitraire. Nous respectons certains paramètres. Nous ne dédions pas un parc commémoratif en l'honneur d'un éminent citoyen ou d'un héros sans suivre un processus bien établi. Nous ne nommons pas des édifices en l'honneur de citoyens très investis dans notre société en présentant des mesures législatives.
Dans chacun de ces cas de figure, nous respectons une marche à suivre rigoureuse, fondée sur des paramètres et des critères précis et administrée par des groupes objectifs habilités à prendre la décision. Pourquoi ce genre de processus n'existe-t-il pas pour décider qui devrait être honoré par une journée spéciale?
Je ne suis pas opposé à l'institution de cette journée. Je ressens, comme tous les autres sénateurs, le profond sentiment de perte et de frustration que nous avons ressenti ce jour-là. Nous avons vu, dans les yeux des familles canadiennes qui ont perdu des êtres chers, qu'il est nécessaire de reconnaître cette journée inoubliable d'une façon particulière, en instituant une journée nationale ou d'une autre façon.
Toutefois, je sais que nous en sommes rendus à un point où il est beaucoup trop arbitraire de choisir une journée, et nous tournons en rond. Nous devrions prendre un peu de recul et tenter de trouver une façon de choisir ces journées de façon structurée, professionnelle et objective.
Si nous commençons à accorder une journée à un groupe ou à un autre, sans trop connaître le contexte et la structure dans laquelle cette décision a été prise, et sans un processus objectif, et je n'insinue rien de tel ici, nous risquons de diminuer d'autres groupes qui ont déjà été reconnus de la même façon. Ce n'est guère mieux si l'honneur n'est pas accordé à un groupe de même valeur, bien que je sois certain que ce groupe le soit. Nous pourrions oublier des groupes qui mériteraient le même honneur et qui n'auraient pas eu assez de chance pour trouver un des 105 sénateurs pour défendre leur cause et faire valoir que leur dossier méritait d'être présenté à notre institution pour qu'ils soient investis d'un tel honneur.
Nous devons prendre un peu de recul et évaluer comment nous pouvons attribuer ces journées de façon juste pour tous les groupes. L'héroïsme, le sacrifice, le respect du pays et le service à une cause plus grande que soi se produisent chaque jour au Canada. Peut-être pas de la façon prévue dans ce projet de loi, mais cela se produit de bien des façons. Je voudrais être certain que, lorsque nous conférons à un groupe l'honneur de lui réserver une journée, nous ne délaissons pas d'autres groupes en même temps et que nous considérons toutes les possibilités pour accorder de tels honneurs d'une façon équilibrée et objective.
(1440)
L'honorable Hugh Segal : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?
Le sénateur Mitchell : Oui.
Le sénateur Segal : En lisant le texte de la proposition dont nous sommes saisis, je n'avais pas l'impression que nous accordions une reconnaissance à un groupe en particulier. J'avais plutôt l'impression, et vous me corrigerez si j'ai tort, que l'objectif de cette mesure législative était de rendre hommage à tous ceux qui voulaient offrir appui et aide à ceux qui avaient souffert dans le cadre de leur travail bénévole, de leur service ou de l'aide qu'ils ont offerte aux autres.
On parlait d'une grande communauté qui réunissait tout le monde, des pompiers volontaires aux membres des Forces armées canadiennes, en passant par les milliers de simples citoyens qui se sont présentés un peu partout au Canada pour donner du sang et pour venir en aide à nos voisins menacés.
Je n'ai pas eu l'impression que c'était aussi étroit que le sénateur l'a involontairement donné à entendre par son discours.
C'est lui qui a l'impression que la proposition est restrictive parce que je ne pense pas l'avoir entendu dire que, en l'absence d'un processus bureaucratique précis, nous ne devrions pas adopter le projet de loi. Je l'ai entendu dire qu'il préférerait un processus plus englobant, un processus un peu mieux élaboré et plus explicite, ce que je comprends, mais je ne pense pas l'avoir entendu dire que nous devrions faire marche arrière.
Le sénateur Mitchell : Je suis désolé, honorables sénateurs, je ne me suis pas exprimé clairement. Je ne pense pas que nous devrions aller de l'avant tant que nous n'aurons pas un meilleur processus ou tant que nous n'aurons pas au moins un moyen de répondre aux questions soulevées.
Si le sénateur a pour argument — un argument qu'il présente très bien d'ailleurs — que c'est un projet large et non pas étroit, alors ce qu'il affirme est un critère très important dans le débat et dans le processus de détermination du caractère général ou étroit de la mesure. S'agit-il d'une personne? Est-il préférable que ce soit 10 000 personnes? Son intervention entraîne justement la question que je pose et je préciserais cela dans le mandat que nous donnerions à un groupe, peu importe sa forme, pour que les décisions en soient améliorées.
Pour répondre plus précisément à la question, je dirai que le sommaire du projet de loi est très précis. On y mentionne le terrorisme et le 11 septembre. Cependant, on n'y parle pas de la liste des personnes à qui nous rendrions hommage, du moins dans ces cas-là. Peut-être mentionnerions-nous ces gens dans des discours prononcés le 11 septembre à partir de maintenant jusqu'à la fin des temps.
Bref, je vous remercie de préciser un critère applicable à une reconnaissance de cette nature, soit son caractère large plutôt qu'étroit. C'est quelque chose dont il est important de tenir compte. Nous devons avoir de tels critères, sans quoi nous pourrions exclure des groupes qui ne devraient pas être exclus et nous devrions avoir un groupe qui s'assure que tous ceux qui méritent la reconnaissance voulue l'obtiennent. Actuellement, tout est laissé au hasard. Il pourrait y avoir beaucoup de gens et de groupes qui devraient être reconnus. C'est purement laissé au hasard. Un sénateur peut tomber sur un groupe par hasard et décider de l'inclure, mais qu'en est-il de tous ceux qui ne croisent pas de sénateurs et dont la cause, le besoin ou le mérite devrait être reconnu, mais n'est jamais soulevé ici?
L'honorable Pamela Wallin : Le sénateur accepterait-il que je lui pose moi aussi une question?
Le sénateur Mitchell : Certainement.
Le sénateur Wallin : C'est la troisième fois que ce projet de loi est présenté au Sénat. Chaque fois, les sénateurs d'en face ont soulevé des questions donnant à penser qu'ils ne comprennent pas le projet de loi. Par conséquent, je demanderais au sénateur de tâcher d'agir vite pour que ce projet de loi puisse être renvoyé à un comité, où il sera étudié, puisque c'est ce que le sénateur semble demander, que le projet de loi soit examiné et étudié.
Le sénateur Mitchell : La décision ne m'appartient pas. Les leaders de cette Chambre sont censés discuter de la question. Je crois qu'ils en ont discuté et il semble que madame le sénateur en ait discuté avec le leader de son parti à la Chambre, car elle s'enflamme à propos de cette mesure, à juste titre, d'ailleurs.
Si le projet de loi a été reporté à trois reprises, c'est en raison de la prorogation. Voilà pourquoi.
Le sénateur Wallin : Le sénateur accepterait-il de répondre à une autre question?
Le sénateur Mitchell semble dire qu'il y a un désir et un besoin de mieux comprendre la mesure et il croit qu'un débat plus approfondi s'impose pour qu'on puisse mieux la comprendre. Dans ce cas, puis-je lui demander de parler à son leader, de lui proposer que le projet de loi soit renvoyé à un comité? Lorsque la question a été soulevée par le passé, il y a eu ajournement du débat.
Le sénateur Mitchell : J'ai l'impression qu'il est peut-être très frustrant de tenter d'obtenir la parole du côté du sénateur, notamment à cause de son leader. Je le constate souvent. C'est ce que je constate en ce qui concerne certains de mes projets de loi, lorsque des sénateurs disent qu'ils n'ont pas encore eu la permission de prendre la parole. De ce côté-ci du Sénat, nous n'avons pas à attendre qu'on nous donne la permission de prendre la parole.
Si madame le sénateur veut que les choses bougent, elle devrait parler aux dirigeants de son côté et leur demander de faire bouger les choses. Ne me demandez pas de prendre la décision. Ce n'est pas à moi de le faire. C'est à elle, et c'est à lui qu'il appartient de le faire.
L'honorable Joseph A. Day : Le sénateur accepterait-il de répondre à une autre question?
Le sénateur Mitchell : Oui.
Le sénateur Day : Le projet de loi propose de souligner les efforts des civils et des militaires du Canada dans la lutte contre le terrorisme. Au début de la guerre en Afghanistan, toutes les activités contre lesquelles nous luttions étaient des activités terroristes, mais, étant donné que le général McChrystal, et, partant, l'OTAN, a qualifié depuis, les activités de contre-insurrectionnelles, est-ce que ceux qui luttent contre l'insurrection, tant les civils que les militaires, sont inclus? Est-ce que le sénateur a pensé à cela en lisant le mot « terrorisme »?
Le sénateur Mitchell : Je n'avais pas songé à cette importante distinction, même si elle peut paraître subtile aux yeux du public. Encore une fois, c'est exactement le genre de détail qu'il faut examiner.
Le processus d'examen en vue de l'octroi de l'Ordre du Canada est très détaillé, élaboré et minutieux. Il ne suffit pas de quelques heures de débat au Sénat ou à la Chambre des communes pour qu'une personne reçoive tout d'un coup l'Ordre du Canada. Cette médaille revêt une très grande importance, tant pour ce qu'elle représente que pour sa valeur et l'honneur qui l'accompagne. Nous ne devons pas décerner des médailles à l'aveuglette, conférant ainsi des honneurs dont la valeur sera amoindrie par le fait que nos critères de sélection ne sont pas suffisants et que notre approche n'est pas assez rigoureuse.
L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Le sénateur accepterait-il de répondre à une autre question?
Il y a quelques minutes, je n'ai pu m'empêcher d'entendre le sénateur dire que, de ce côté-ci du Sénat, le leader adjoint avait droit de regard sur ce que les sénateurs pouvaient dire ou non. Il sait peut-être quelque chose que j'ignore au sujet de ce côté-ci du Sénat, contrairement à ce qui se passe probablement en face. Cela ne vise apparemment pas notre distingué collègue, qui semble avoir un don pour les mots. Cela me rappelle cet adage : c'est un homme de peu de mots, mais qui intervient souvent.
Contrairement sans doute aux sénateurs d'en face, ceux de ce côté-ci peuvent parler quand ils le souhaitent. Ils n'ont pas besoin de me demander la permission.
Le sénateur Mitchell : Je vais répondre au leader adjoint, même s'il ne s'agit pas d'une véritable question. Le sénateur a dit, en parlant de moi : « Il sait peut-être quelque chose que j'ignore. » En effet, je sais quelque chose qu'il ignore. Il devrait s'adresser aux sénateurs d'arrière-ban parce que bon nombre d'entre eux lui diront que cela leur pose problème.
(Sur la motion du sénateur Peterson, le débat est ajourné.)
Projet de loi de reconnaissance et d'indemnisation des Canadiens d'origine italienne
Deuxième lecture—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Fraser, appuyée par l'honorable sénateur Rompkey, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-302, Loi visant à reconnaître les injustices commises à l'égard des personnes d'origine italienne en raison de leur désignation comme « sujets d'un pays ennemi » et de leur internement durant la Seconde Guerre mondiale, à prévoir une indemnisation et à promouvoir l'enseignement de l'histoire italo-canadienne.
L'honorable Consiglio Di Nino : Honorables sénateurs, le débat sur cet article est ajourné au nom du sénateur Comeau. J'ai parlé avec lui. J'espère que tous les sénateurs accepteront que je parle. Le débat demeurera ensuite ajourné à son nom. Par ailleurs, à titre de porte-parole en ce qui concerne le projet de loi, je demanderais qu'on m'accorde le temps de parole maximal de 45 minutes.
D'accord?
Des voix : D'accord.
(1450)
Le sénateur Di Nino : Il y a 70 ans, le 10 juin 1940 pour être exact, le gouvernement du Canada déclarait de nombreux Canadiens d'origine italienne « étrangers ennemis » et ordonnait leur internement. Le projet de loi C-302 porte sur cette mesure, dont les conséquences soulèvent encore l'ire de la communauté italienne. L'impact a duré des décennies et touché non seulement les personnes internées, mais également leur famille, leurs amis, leurs collègues et leurs voisins. L'étiquette d'« étranger ennemi » et ses conséquences ont détruit un nombre insoupçonné de vies et ont eu un impact croissant pendant des décennies. Plusieurs personnes ont changé de nom. Certaines ont déménagé dans une autre collectivité ou un autre pays, mais la plupart ont dû accepter leur souffrance. L'étiquette d'« étranger ennemi » et son impact ont perduré dans la société pendant plus d'une génération. Les immigrants de pays perçus comme étant « dans l'autre camp » faisaient l'objet de mauvais traitements, de discrimination et parfois de persécution sans pitié. Je le sais. J'étais l'un de ces « étrangers ennemis »; je suis arrivé avec mes parents au Quai 21 à Halifax le 21 août 1951, six ans à peine après l'arrêt des hostilités. Je porte un grand intérêt à la question des mesures réparatoires depuis des décennies.
J'ai été profondément insulté par la présentation du projet de loi C-302 par un député libéral à l'autre endroit, et, pour être en mesure de vous transmettre ce message de façon appropriée, je dois divulguer certains renseignements sur mon passé, certains dont je n'ai jamais parlé en public, notamment au sujet de mes expériences en tant que jeune immigrant au Canada en 1951.
[Français]
J'avais 13 ans lorsque nous sommes arrivés au Canada. L'impact du décret prononcé par le premier ministre William Lyon Mackenzie King, le 10 juin 1940, ordonnant l'internement d'un certain nombre de Canadiens d'origine italienne déclarés « étrangers ennemis », était encore fortement ressenti. Beaucoup d'autres Canadiens d'origine italienne ont fait l'objet d'enquêtes, ont dû se soumettre à la dactyloscopie et ont figuré dans une liste de surveillance. Tous les Canadiens d'origine italienne, qu'ils soient citoyens ou non, faisaient l'objet de soupçons, et cela a continué pendant des décennies, voire des générations.
Après la Seconde Guerre mondiale, le Canada avait besoin de travailleurs et avait invité les Européens à émigrer dans cette partie du Nouveau Monde. En arrivant au Canada, la plupart de ces personnes ont plutôt fait face à l'hostilité, à la discrimination et au racisme, et ont constaté que les portes de la soi-disant « communauté canadienne » ne s'ouvraient pas pour elles. Les immigrants occupaient des emplois au bas de l'échelle. Cette situation n'a pas beaucoup changé. Ce qui était le plus difficile à accepter pour moi était le rejet des immigrants, notamment les nouveaux arrivants en provenance de « pays ennemis », par la société en général. À mon arrivée, l'esprit des années 1940, avec la déclaration publique d'« étranger ennemi », était toujours bien vivant.
Voilà le Canada que nous avons découvert. En plus d'occuper les emplois les plus désagréables, dangereux et sales, nous devions composer avec le fait que la plupart des Canadiens ne voulaient pas de nous. Nous avons enduré cela et créé notre propre environnement socioculturel. Avec le recul, j'ai vu cela comme un rite de passage. Mais les enfants devaient aller à l'école, où ils subissaient de façon marquée les insultes habituellement réservées aux enfants différents. Les enfants ne faisaient que suivre l'exemple donné par la collectivité et celui qu'ils trouvaient à la maison.
[Traduction]
Ma première expérience de ce genre de rejet est survenue quelques jours après notre arrivée à Toronto. Alors que je marchais dans la rue avec un garçon italien qui était au Canada depuis environ un an et qui comprenait l'anglais, nous sommes soudainement arrivés face à face avec une femme tourmentée qui poussait des hurlements. Elle nous aurait sans doute attaqués si nous ne nous étions pas enfuis. Une fois en sûreté, mon ami m'a expliqué que la femme nous avait traités de « meurtriers ». Elle nous avait accusés d'avoir tué son fils. Nous avons appris plus tard que son fils, un soldat canadien, était mort en participant à la campagne d'Italie. Bien des années ont passé avant que je finisse par comprendre la douleur de cette mère blessée. Bien que les sentiments de cette mère soient compréhensibles, un grand nombre d'incidents que j'ai vécus pendant mes premières années au Canada ne peuvent être interprétés autrement que comme des manifestations de pure xénophobie.
Une semaine ou deux après notre arrivée au Canada, j'ai commencé l'école, mais, comme je ne connaissais pas un mot d'anglais, j'ai été placé dans une classe de troisième année, avec des enfants beaucoup plus jeunes que moi. Même à cet âge, les sentiments à l'égard des « sujets d'un pays ennemi » étaient marqués. L'intimidation, la provocation et les insultes dont je faisais constamment l'objet m'ont rendu la vie très difficile, comme c'était aussi le cas pour toutes les personnes déplacées, les « DPs », comme on disait. En général, les enseignants fermaient les yeux.
L'année suivante, ma famille a déménagé à Parkdale, l'un des quartiers les plus durs de Toronto. À l'époque, comme c'est encore le cas aujourd'hui, c'était le point d'arrivée des nouveaux immigrants. On estime que, sur les 110 000 personnes vivant dans le secteur de Parkdale, 40 p. 100 ou plus sont des immigrants. Bien que la situation soit différente de ce qu'elle était à mon époque, les nouveaux arrivants doivent eux aussi surmonter bien des difficultés. J'étais en huitième année et je fréquentais une nouvelle école avec un grand nombre de « personnes déplacées » venant pour la plupart de la Pologne, de l'Ukraine et des pays baltes. Ces garçons sont devenus mes amis et, bien sûr, mes « frères d'armes ». Nous étions plus âgés. L'intimidation, la provocation et les insultes tournaient donc le plus souvent en batailles du genre de celles que se livrent les gangs de rue. La directrice de l'école, une religieuse qui m'avait surnommé « Con », du fait que mon nom, Consiglio, était difficile à prononcer, était une dure à cuire. En passant, ce sobriquet me colle toujours à la peau et c'est la faute de cette religieuse. En fait, elle était admirable. Elle ne tolérait aucune violence. Par conséquent, les affrontements avaient lieu après les heures de classe, mais ils devenaient de plus en plus graves. Aucune « personne déplacée » n'aurait osé s'aventurer bien loin en solitaire. Les résultats étaient prévisibles et caractérisés par de grandes souffrances physiques.
Nous, les « personnes déplacées », avons alors décidé de former une équipe de baseball, non pas parce que nous raffolions particulièrement de ce sport, mais plutôt parce que nous pouvions utiliser les bâtons comme des armes. Nos parents n'étaient généralement pas au courant de nos problèmes tant qu'ils n'avaient pas à soigner des dents ou des nez cassés ou même des blessures plus graves. Ils étaient trop occupés à assurer leur survie. Après mure réflexion, ce qui me dérange le plus, c'est que la police n'intervenait pas. En fait, la police faisait souvent partie du problème.
Chers collègues, cela se déroulait entre 1951 et 1953. Nous savions tous que la société en général ne voulait pas nous fréquenter. Nous n'étions pas acceptés. Cela avait un effet très nocif sur nos jeunes esprits. Nous étions confinés à nos propres amitiés et limités à nos propres ressources; nous avons été plusieurs à nous éloigner du droit chemin, où nous avons été accueillis à bras ouverts par les autres jeunes marginaux. N'eût été un événement qui a changé le cours de mon existence, j'aurais probablement choisi la voie du crime, comme l'ont fait certains de mes amis.
Après une fin de semaine plutôt difficile, je suis retourné à la maison, où ma mère et mon père étaient extrêmement inquiets et furieux. Ils ignoraient totalement où j'étais depuis plus de deux jours. Ils avaient une bonne idée de la direction que ma vie était en train de prendre, et, après une dispute chargée d'émotion, mon père, qui était l'homme le plus doux que j'aie jamais connu, m'a dit avec autorité, et avec les larmes aux yeux : « Si tu es pour salir mon nom, commence par le changer. » Même à 16 ans, je pouvais constater toute la peine qui les habitait.
(1500)
Honorables sénateurs, ce jour-là a marqué le début de ma nouvelle vie.
Je dois également mentionner que mon père avait été conscrit pour combattre dans la Seconde Guerre mondiale quelques mois après ma naissance, et qu'il est revenu seulement quand j'avais 10 ans puisqu'il a passé plusieurs années comme prisonnier de guerre en Afrique du Nord. Lui et moi — son fils unique — avons donc eu beaucoup de mal à apprendre à nous connaître, surtout durant ces années difficiles.
[Français]
Honorables sénateurs, je vous épargnerai les nombreuses autres expériences que j'ai vécues pendant cette période, mais je crois que j'ai su vous donner une bonne idée de la situation. Je partage ces souvenirs douloureux avec vous puisqu'ils nous rappellent que la discrimination et la marginalisation n'ont pas leur place dans la société canadienne. Les coûts sociaux sont immenses.
Comme je l'ai mentionné en cette Chambre le 9 juin 2010, la guerre est une folie qui amène des gens parfaitement sains d'esprit à poser des gestes inhumains. Un des exemples les plus draconiens et fâcheux a été la déclaration visant à discriminer certains groupes de Canadiens, dont la communauté italienne, et de les désigner « étrangers ennemis ». Je fais partie des innombrables personnes qui ont été grandement affectées par cette mesure, laquelle a fort probablement amené plusieurs personnes, surtout des jeunes, à vivre en marge de la société. Malheureusement, bien que le contexte soit différent, cette situation se produit encore aujourd'hui.
[Traduction]
Cela m'amène au projet de loi C-302. J'ai mentionné que j'étais profondément perturbé par la présentation de ce projet de loi. Avant d'expliquer ma prise de position plus en détail, je crois qu'il serait utile d'examiner la question.
Il y a 70 ans, le premier ministre William Lyon Mackenzie King a ordonné l'internement des Canadiens d'origine italienne, qui étaient déclarés « étrangers ennemis ». Depuis ce temps, 12 gouvernements se sont succédé; sept libéraux et cinq conservateurs. Je crois qu'au total, les libéraux ont gouverné le Canada pendant environ 50 des 70 dernières années.
Au cours de ces nombreuses années, la prise de position des gouvernements libéraux a toujours été de nier et de refuser. Je vais vous résumer brièvement la situation.
Les gouvernements sont restés assez muets à ce sujet jusqu'au milieu des années 1960. Ensuite, la question de l'internement a commencé à être débattue, notamment grâce au soutien inébranlable de la communauté des Canadiens italiens, mais a rapidement été balayée sous le tapis par le gouvernement Trudeau, qui avait remporté une victoire écrasante aux élections de 1968. Je rappelle que de nombreux députés libéraux avaient été élus grâce au vote de la communauté des Canadiens italiens, et certains étaient même d'origine italienne, mais sur cette question... le silence plat.
Comme le mentionnait le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Jason Kenney, devant le Comité permanent du patrimoine canadien de l'autre Chambre, le jeudi 26 novembre 2009 :
Le premier ministre Trudeau, de 1968 à 1984, a adopté la position selon laquelle le passé était le passé, et que nous ne devions en aucune façon nous occuper de questions liées à la reconnaissance ou à la réparation historique pour des incidents tels que les mesures de restriction d'immigration ou l'internement, en temps de guerre, des Italo-Canadiens, mais aussi des Japonais et des Canadiens originaires de l'Empire austro-hongrois. Il s'est totalement opposé à de tels efforts.
Cette attitude a prévalu tout au long des mandats de l'administration Trudeau.
[Français]
Le premier ministre libéral suivant fut M. Jean Chrétien, qui a occupé ces fonctions de 1993 à 2003. Le 8 juin 1993, M. Chrétien, à titre de chef de l'opposition officielle, a envoyé une lettre à M. Thor Bardyn, président du Congrès des Ukrainiens canadiens, au sujet des mesures réparatrices pour les internements survenus pendant la Première Guerre mondiale. En voici un passage. Il a dit ceci :
Le parti libéral comprend votre préoccupation. Comme vous le savez, nous appuyons vos efforts visant à obtenir des mesures réparatrices pour l'internement et la perte de libertés dont ont été victimes les Ukrainiens canadiens [...]
Nous pouvons affirmer que nous continuerons de surveiller étroitement la situation et que nous essaierons de voir à ce que le gouvernement respecte sa promesse [...]
Le premier ministre Chrétien n'a pas respecté sa promesse.
Voici un autre exemple de la façon dont la question a été abordée par les administrations libérales de Jean Chrétien et de Paul Martin. Le mercredi 14 décembre 1994, l'honorable Sheila Finestone, secrétaire d'État au Multiculturalisme et à la Situation de la femme a déclaré ceci :
Monsieur le président, je viens de déposer la lettre que j'ai fait parvenir aux groupes suivants : le Conseil national des Canadiens chinois, le Congrès germano-canadien, le Congrès juif canadien, l'Association nationale des Canadiens d'origine indienne, le Congrès national des Italo-Canadiens, le Comité des Ukrainiens canadiens et la Canadian Ukrainian Civil Liberties Association.
Cette lettre fait connaître la décision du gouvernement du Canada au sujet des réparations. Cette décision n'a pas été facile et a fait l'objet de longues discussions, mais elle reflète l'engagement du gouvernement à bâtir une société plus juste et plus équitable [...]
Dans le but de panser les blessures causées par les agissements de gouvernements antérieurs, six communautés culturelles ont demandé des réparations et des compensations totalisant des centaines de millions dollars.
[...] le gouvernement ne versera pas de compensations financières.
Je me permets, honorables sénateurs, d'ajouter qu'ils n'ont pas non plus présenté d'excuses!
[Traduction]
Je me suis intéressé plus particulièrement à la façon dont les membres de l'autre endroit d'origine italienne ont parlé de cette question à la table du Cabinet. Voici ce que j'ai trouvé :
L'honorable Sergio Marchi, qui est né en Argentine de parents italiens et qui est arrivé au Canada à un jeune âge, a été ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration de juin 1994 à janvier 1996. Mis à part sa critique à l'endroit des excuses présentées par le premier ministre Brian Mulroney en 1990, il n'a jamais, pendant sa carrière de ministre ou à tout autre moment au cours de sa carrière parlementaire, levé le petit doigt, du moins publiquement, pour faire valoir qu'il faudrait présenter des excuses ou offrir des mesures réparatoires aux personnes ayant été internées.
L'honorable Joe Volpe, qui est également d'origine italienne, et qui a été élu pour la première fois en 1988 et réélu six fois, a été ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration de janvier 2005 à février 2006. Voulez-vous savoir ce qu'il a fait pour favoriser des excuses ou des mesures réparatoires pour les Canadiens d'origine italienne qui ont été internés?
Le sénateur Comeau : Absolument rien.
Le sénateur Di Nino : C'est bien cela, absolument rien!
Le sénateur Comeau : Logique.
Le sénateur Di Nino : Il semble toutefois qu'il appuie maintenant ce projet de loi, comme, je crois tous les députés libéraux.
L'honorable Maria Minna a été secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, puis ministre du Développement international. L'honorable Judy Sgro a aussi été ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Ce sont de bonnes amies, en passant. Quels progrès ont été réalisés sous leur direction dans ce dossier pendant qu'elles œuvraient au sein du Cabinet?
Le sénateur Comeau : Aucun.
Le sénateur Di Nino : Rien. Silence.
Le sénateur Tardif : Faites quelque chose maintenant.
Le sénateur Munson : Qu'a fait Brian Mulroney?
(1510)
Le sénateur Di Nino : J'y viens dans un instant.
En septembre 1997, lors de la campagne électorale, le premier ministre Jean Chrétien s'est rendu à un rassemblement à la Villa Colombo à Toronto, où il était attendu par des manifestants déguisés en personnes internées pour exprimer clairement leur réprobation à l'égard de la promesse non tenue de M. Chrétien relativement aux mesures réparatoires.
Honorables sénateurs, on remarque une tendance marquée dans ce dossier : un déni et un refus systématiques. Cette tendance n'était pas limitée à la question de l'internement des Canadiens d'origine italienne, elle se remarquait également dans de nombreux autres dossiers de griefs d'un certain nombre d'autres communautés, dont les communautés autochtones. Permettez-moi de citer un article de M. Angelo Persichilli, paru dans le Toronto Star en janvier 2010. Au sujet de la question des personnes internées, il mentionne ce qui suit :
La question est tombée dans l'oubli pendant près de 30 ans, mais elle a refait surface pendant les années 1970 lorsque certains dirigeants de la communauté des Canadiens d'origine italienne ont commencé à parler d'excuses et d'une compensation financière en guise de réparation. [...] Le premier ministre Pierre Trudeau, un autre libéral, a mentionné que le dossier était clos. Il a déclaré devant la Chambre des communes qu'il n'estimait pas approprié « d'essayer de réécrire l'histoire de cette façon ».
[...]
À ce moment-là, tandis que les libéraux étaient dans l'opposition, nous avons assisté à leur première volte-face. Ils ont critiqué le gouvernement Mulroney, en mentionnant que l'offre de celui-ci était insuffisante. « Nous voulons des excuses au Parlement, et non dans une salle de réception », avait mentionné le député libéral Sergio Marchi. Marchi était également intervenu à Ottawa en demandant au gouvernement conservateur de régler cette « injustice » « de façon urgente et efficace » et de verser une compensation financière en guise de réparation, comme il l'avait fait pour les Canadiens japonais.
Le sénateur Comeau : Cette attitude est typique des libéraux.
Le sénateur Di Nino :
Les libéraux sont restés sur cette position pendant toute la période où ils ont été au pouvoir. En 1997, ils ont déclaré que le dossier était clos.
C'est la fin de la citation.
[Français]
Ce qui nous amène au chef suivant du Parti libéral, M. Paul Martin, qui a visité les communautés italiennes de Montréal et de Toronto pour faire des annonces au sujet de la reconnaissance de l'internement des Canadiens d'origine italienne pendant la Seconde Guerre mondiale. Comme l'a mentionné Agata De Santis, dans le numéro 7 de la revue Accenti, dans un article intitulé « Compensation versée aux Canadiens italiens pour les injustices subies pendant la guerre : À qui ira l'argent? » :
Le 12 novembre 2005, le premier ministre Paul Martin se trouvait dans une tente aménagée dans un parc de l'est de Montréal, entouré de ses ministres et de membres éminents de la communauté italienne de Montréal, pour annoncer une entente de principe historique.
[...] La compensation — un montant initial de 2,5 millions de dollars — n'est toutefois pas destinée aux personnes qui ont été internées (en fait, la plupart sont décédées) ou à leur famille, mais plutôt à la communauté des Canadiens italiens dans son ensemble. En outre, la compensation ne sera pas accompagnée d'excuses officielles à la Chambre des communes, ce qui laisse certains membres de la communauté plutôt amers.
L'argent servira à financer des projets visant à souligner l'impact historique des internements et à sensibiliser le public à cette question, ainsi qu'à célébrer la contribution des Italiens au Canada.
[...] L'entente de principe est en plein cela, une entente qui, en principe, devrait fonctionner. La prochaine étape sera la mise au point de l'entente, ce qui englobera les modalités du programme, les lignes directrices et les exigences en matière d'admissibilité pour les projets, ainsi qu'une structure détaillée établissant la manière exacte dont les projets seront supervisés.
[...] L'argent est versé dans le cadre du Programme de reconnaissance, et de commémoration et d'éducation du gouvernement fédéral. Il s'agit d'une initiative triennale de 25 millions de dollars annoncée dans le budget en février 2005. Administré par la Direction générale du multiculturalisme et des droits de la personne, Patrimoine canadien, le programme a été créé pour reconnaître que les mesures de guerre du gouvernement fédéral et ses restrictions imposées en matière d'immigration ont porté préjudice à de nombreux groupes ethnoculturels, notamment les Italiens.
Dans l'article de janvier 2010 d'Angelo Persichilli susmentionné, celui-ci écrit ce qui suit :
Je ne veux même pas parler de la mascarade déployée par Paul Martin lorsque, quelques semaines avant l'élection fédérale de 2006 que les libéraux allaient perdre selon toute vraisemblance, il a essayé d'acheter des votes en acceptant de verser de l'argent et de présenter des excuses.
Honorables sénateurs, même si le chef actuel du Parti libéral, Michael Ignatieff, a, par le passé, rédigé de nombreux écrits sur les droits de la personne, notamment à titre de directeur du Carr Center for Human Rights Policy à l'Université Harvard, je n'ai pas réussi à connaître sa position officielle sur la question des mesures réparatrices et des excuses.
[Traduction]
Laissez-moi maintenant vous présenter le bilan du Parti conservateur à cet égard. Le contraste est frappant.
En 1984, le ministre du Multiculturalisme, M. Jack Murta, a annoncé que le gouvernement présenterait des excuses officielles aux Canadiens d'origine japonaise. Il a été remplacé dans ses fonctions ministérielles par M. Gerry Weiner, qui a conclu les négociations en vue d'un règlement global. Le 22 septembre 1988, le premier ministre Brian Mulroney reconnaissait le tort qui avait été causé aux Canadiens d'origine japonaise en temps de guerre.
Le 4 novembre 1990, dans un discours prononcé devant d'importantes organisations italo-canadiennes, notamment le Congrès national des Italo-Canadiens, devant des gens qui avaient été internés et des membres de leurs familles et des centaines d'autres intéressés, le premier ministre Brian Mulroney, au nom du gouvernement du Canada, a demandé pardon à ceux qui avaient souffert en raison du décret du 10 juin 1940.
Je vais rapporter les propos du premier ministre Mulroney, mais permettez-moi d'abord d'illustrer la définition du mot « leadership ». Quelques semaines avant l'annonce prévue, le premier ministre Mulroney m'a téléphoné pour discuter de l'événement. J'ai rapidement compris qu'on exerçait sur lui de fortes pressions pour qu'il annule cette cérémonie. En fait, il me l'avait même dit.
Après une longue discussion, il m'a dit : « Con, donnez-moi une bonne raison de le faire. » Je lui ai répondu : « Monsieur le premier ministre, nous devrions le faire parce que c'est la chose à faire, en toute honnêteté. » Après quelques secondes de silence, il a dit : « Vous avez raison, et nous allons le faire. » Il a raccroché et c'est ce que nous avons fait. Voilà ce qu'est le leadership.
Le 4 novembre 1990, il déclarait ceci à la communauté :
Ce qui est arrivé à de nombreux Canadiens d'origine italienne est profondément offensant, car cela va à l'encontre des notions fondamentales du respect de la dignité humaine et de la présomption d'innocence. Ces actes d'une injustice flagrante ont été infligés arbitrairement non seulement aux personnes présentant des risques pour la sécurité de l'État, mais aussi à des gens dont le seul crime était d'être d'ascendance italienne. En fait, une grande partie des arrestations furent faites sous le prétexte de l'appartenance à des organisations italo-canadiennes, semblables en bien des points à celles qui sont représentées ici aujourd'hui. Aucune des 700 personnes arrêtées n'a vu d'accusations portées contre elle et aucune poursuite judiciaire n'a été intentée. C'était souvent, purement et simplement, un acte fondé sur des préjugés — orchestré et commis en vertu d'une loi, mais néanmoins un acte discriminatoire.
Ce genre de comportement n'était pas acceptable alors, ne l'est pas aujourd'hui et ne le sera jamais dans une nation civilisée qui est censée promouvoir la primauté du droit. Au nom du gouvernement et du peuple canadien, je présente des excuses sincères et sans réserve pour les torts infligés à nos concitoyens canadiens d'origine italienne pendant la Seconde Guerre mondiale.
J'assistais à ce discours en compagnie d'Annamarie Castrilli, qui était à l'époque présidente du Congrès national des Italo-Canadiens et qui avait grandement contribué aux démarches pour obtenir ces excuses. À mes côtés se trouvaient également Mme Mila Mulroney et le professeur Julius Molinaro, de l'Université de Toronto, qui avait été interné, ainsi que son épouse. Les propos du premier ministre ont déclenché des applaudissements d'émotion et de joie dans la salle. Tout le monde avait la larme à l'œil, y compris à notre table. Le gouvernement venait de soulager d'un poids énorme les personnes qui avaient été pénalisées par une loi injuste et oppressive.
(1520)
Voici un extrait d'un article de Tom Philip, publié en décembre 1990 sur le site InfoUkes des Canadiens d'origine ukrainienne et qui s'intitule « Hantés par l'histoire : Les Canadiens d'origine ukrainienne, italienne et chinoise réclament réparation pour le traitement injuste que le gouvernement fédéral leur a réservé dans le passé » :
Après des années d'inaction, on a pu voir au cours des dernières semaines un changement notable dans l'attitude du gouvernement à l'égard du redressement des torts historiques. À l'occasion d'une conférence à Toronto, en novembre, le premier ministre Mulroney a présenté des excuses sincères à nos concitoyens d'origine italienne pour l'internement des leurs pendant la Seconde Guerre mondiale. Il y a deux semaines, M. Weiner a rencontré des représentants du Conseil national des Canadiens chinois qui réclame une indemnisation de 23 millions de dollars pour la taxe d'entrée que devaient payer les immigrants chinois pour entrer au Canada à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Le 13 novembre, le premier ministre a rencontré à Edmonton le président du Conseil ukrainien du Canada, Dmytro Cipywnyk, et d'autres membres de la communauté ukrainienne.
Honorables sénateurs, je vous prie de noter qu'on voit poindre une nouvelle tendance à l'horizon. Après 13 années de déni et de rejet de la part des gouvernements libéraux qui se sont succédé jusqu'en 2006, une nouvelle ère a commencé.
[Français]
Le 22 juin 2006, le premier ministre Stephen Harper a présenté des excuses officielles à la communauté des Canadiens d'origine chinoise pour la taxe d'entrée injustifiable et l'exclusion draconienne des immigrants chinois au Canada.
Le 9 mai 2008, la Loi sur l'indemnisation des Canadiens d'origine ukrainienne a été promulguée. Le gouvernement Harper a débloqué 10 millions de dollars pour créer l'Ukrainian-Canadian Foundation, dont le mandat consiste à sensibiliser la population à l'internement des personnes d'origine ukrainienne pendant la Première Guerre mondiale ainsi qu'à marquer ce souvenir.
Le 11 juin 2008, le premier ministre Stephen Harper a présenté des excuses, au nom du gouvernement du Canada et de tous les Canadiens, aux Autochtones pour le rôle joué par le gouvernement du Canada dans le système des pensionnats indiens. Je cite :
Le gouvernement du Canada présente ses excuses les plus sincères aux peuples autochtones du Canada pour avoir si profondément manqué à son devoir envers eux, et leur demande pardon.
Le 19 mars 2009, au nom du ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme, M. Jason Kenney, j'ai eu le privilège de dévoiler les noms des membres du Comité consultatif de la communauté italo-canadienne qui œuvreront dans le cadre du Programme de reconnaissance historique pour les communautés.
Ce groupe donne des conseils sur le mérite des projets de la communauté des Canadiens italiens admissibles au Programme de reconnaissance historique qui visent à sensibiliser la population aux mesures prises en temps de guerre et aux restrictions imposées en matière d'immigration au Canada par le passé, et à marquer ce souvenir.
Le Programme de reconnaissance historique pour les communautés, créé par le premier ministre Stephen Harper et son gouvernement en 2006, est un programme de subventions et de contributions destiné aux projets commémoratifs et éducatifs communautaires liés aux mesures prises en temps de guerre et aux restrictions imposées en matière d'immigration au Canada. Un montant de 5 millions de dollars, soit le double de la promesse électorale du premier ministre Martin, est à la disposition de la communauté des Canadiens italiens pour élaborer des projets comme des monuments, du matériel commémoratif et éducatif et des expositions.
Le Programme de reconnaissance historique pour les communautés créé par notre gouvernement marque la première fois dans l'histoire du Canada où un gouvernement débloque une somme pour commémorer ce souvenir.
[Traduction]
Des gouvernements conservateurs sont aussi à l'origine de la création de la Fondation canadienne des relations raciales dotée d'une enveloppe de 25 millions de dollars par le gouvernement Mulroney. La loi établissant la fondation a reçu la sanction royale le 1er février 1991 Le financement du Musée canadien des droits de la personne de Winnipeg, au Manitoba, et la création du Musée canadien de l'immigration au Quai 21, situé à Halifax, en Nouvelle-Écosse, où ma famille et moi sommes arrivés au Canada il y a bien des années sont devenus une réalité sous le gouvernement Harper.
C'est sous les gouvernements conservateurs dirigés de 1984 à 1993 par le premier ministre Brian Mulroney, et depuis 2006 par le premier ministre Stephen Harper, que nous avons reconnu les torts causés et présenté nos excuses au nom du gouvernement fédéral et des Canadiens aux Autochtones et aux Canadiens d'origine chinoise, italienne, japonaise et ukrainienne. Les sénateurs perçoivent-ils une tendance différente? Les gouvernements libéraux nient les faits, alors que les gouvernements conservateurs agissent.
Je m'oppose fermement au projet de loi C-302 d'initiative parlementaire, car je le trouve insultant non seulement pour moi, mais aussi pour tous les internés de toutes les origines, leurs familles et leurs communautés. Cela m'exaspère que les membres des gouvernements libéraux précédents — qui prétendent maintenant avoir soutenu ces mesures — n'aient pas eu la volonté ni le courage de se pencher sur ces questions, sauf lors des campagnes électorales ou pour dénoncer les gouvernements conservateurs qui prenaient des mesures à cet égard.
Le sénateur Tkachuk : C'est typique de leur part.
Le sénateur Di Nino : Ce projet de loi constitue une insulte pour moi, car si les libéraux avaient eu du courage, ils auraient pu — en fait, ils auraient dû — agir lorsqu'ils étaient au pouvoir. Ils ont eu de multiples occasions de le faire au cours des années 1960 et 1970, au début des années 1980 et pendant les 13 années qui se sont écoulées entre 1993 et 2006. Au lieu de cela, nous n'avons eu droit qu'à des critiques. Ils présentent maintenant ce projet de loi inutile et motivé par des raisons politiques, qui ne fait que rappeler de terribles souvenirs à tous ceux d'entre nous qui ont dû essuyer les humiliations et les conséquences du décret du 10 juin 1940. Ce projet de loi est de la pure hypocrisie politique.
Honorables sénateurs, les principaux objectifs de ce projet de loi ont déjà été atteints. Le premier ministre Brian Mulroney a en effet présenté les excuses du gouvernement aux Italo-Canadiens le 4 novembre 1990, et de manière éloquente. Le gouvernement conservateur du premier ministre Stephen Harper a quant à lui créé le Programme de reconnaissance historique pour les communautés, dans le cadre duquel 5 millions de dollars ont servi à sensibiliser les Canadiens aux conséquences de ce décret tragique qui a été pris il y a maintenant 70 ans.
Cela n'a pourtant pas empêché M. Ignatieff de répéter que nous n'avions rien fait. Il me semble qu'il nous chante toujours le même refrain. En tout cas, honorables sénateurs, je suis certain d'une chose : les libéraux n'ont plus l'autorité morale qu'il faut pour régler cette question.
Que faire à partir de là? Je comprends que certains collègues aimeraient participer au débat à l'étape de la deuxième lecture. Libre à eux de le faire, après quoi nous pourrons décider de ce qu'il adviendra du projet de loi.
Honorables sénateurs, je m'en voudrais de conclure mon intervention sans dire un bon mot sur mon pays, le Canada. Personne ne nie que les immigrants qui sont arrivés au Canada après la Seconde Guerre mondiale — et qui ne venaient pas de France ou du Royaume-Uni — ont eu la vie dure durant au moins une décennie ou deux. Mais ce problème n'était pas propre au contexte canadien. C'était partout pareil, et dans tous les pays du monde, les habitants considéraient les étrangers comme des ennemis et les associaient irrémédiablement aux terres où leurs fils, leurs pères et, oui, leurs filles et leurs mères avaient péri ou avaient souffert physiquement ou psychologiquement.
Mais le temps a fait son œuvre, et lorsque les Canadiens ont fini par comprendre que la douleur qu'ils ressentaient était partagée et que ceux qui arrivaient au Canada y venaient pour chercher la paix, pour refaire leur vie et pour trouver une nouvelle prospérité commune, la douleur, la haine et la peur ont commencé à s'estomper. Pour la plupart, les Canadiens d'adoption ont adopté les coutumes et les habitudes culturelles de leurs voisins et sont devenus leurs amis. Nous sommes tous devenus des Canadiens. Le résultat, honorables sénateurs, est le Canada que nous habitons aujourd'hui et qui fait l'envie du reste du monde : une terre de tolérance, de prospérité et de paix. Notre pays n'est pas synonyme de perfection, mais quand on le compare à la plupart des autres pays, c'est celui qui s'en approche le plus. Nous y sommes parvenus tous ensemble, et le Canada que nous connaissons et que nous aimons est à l'image de chacun d'entre nous. Je suis fier de mes origines, mais je suis aussi un Canadien convaincu, et chanceux de l'être.
(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)
(1530)
L'importance des sables pétrolifères du Canada
Interpellation—Suite du débat
L'ordre du jour appelle :
Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Eaton, attirant l'attention du Sénat sur les avantages des sables bitumineux du Canada.
L'honorable Linda Frum : Honorables sénateurs, mardi dernier, les bulletins de nouvelles de la CBC et de CTV ont présenté, avant toute autre chose, un reportage sur l'atterrissage de 230 canards dans un bassin de décantation de résidus de sables pétrolifères, près de Fort McMurray.
À quelques kilomètres de là, un petit avion transportant des ouvriers des champs de sables pétrolifères s'était écrasé à l'atterrissage. Une personne était morte et neuf autres avaient été blessées. Cette tragédie n'a pas fait la une. Elle n'a même pas été traitée comme une nouvelle importante. L'important, c'était les oiseaux. Ces canards étaient si importants qu'ils ont même relégué Omar Khadr au second plan des bulletins de nouvelles canadiens.
Après des années de suspense, Omar Khadr avait admis être un membre d'Al-Qaïda, un terroriste et un meurtrier. Il sera probablement de retour au Canada l'an prochain, mais les canards ont été jugés plus importants sur le plan médiatique. Cela est très révélateur de la perception des sables pétrolifères. Le sens moral des détracteurs des sables pétrolifères est faussé.
Ne vous méprenez pas. Il est bien entendu regrettable que des canards meurent par accident en atterrissant sur un site industriel. Cela représente une perte. Cela n'aurait toutefois pas dû constituer la principale nouvelle du jour au pays. Ce n'est pas cet événement qui a constitué le plus grand échec moral dans le monde mardi dernier.
Il y a deux ans, 1 600 canards sont morts après avoir atterri dans des bassins de décantation. Syncrude avait alors été poursuivie au criminel et avait écopé d'une amende de 3 millions de dollars. En comparaison, le violeur et meurtrier en série Russell Williams a dû payer un grand total de 8 800 $ aux familles de ses victimes. Cela représente 100 $ par crime. L'amende imposée à Syncrude représente 2 200 $ par canard. Quelque chose ne tourne pas rond.
Nous devrions nous soucier de l'environnement et de la faune. L'éthique humaine se mesure notamment au respect que l'on porte à la vie végétale et animale, mais un effet pervers se produit lorsqu'on se soucie davantage de la faune et de la flore que des êtres humains.
En se concentrant comme ils le font sur de rares incidents mineurs mettant en cause des oiseaux dans les sables pétrolifères au lieu de se concentrer sur les ravages écologiques de grande envergure qui sont causés systématiquement dans les pays de l'OPEP ou sur les violations terriblement courantes des droits de la personne dans ces pays, les détracteurs de l'exploitation des sables pétrolifères ne se comportent plus de manière éthique. C'est comme si un policier fermait les yeux sur un vol à main armée pour aller donner une contravention pour traversée illégale à un piéton.
Outre les canards, on invoque aussi les gaz à effet de serre. L'une des principales objections à l'exploitation des sables pétrolifères est le fait que leur empreinte carbone est légèrement supérieure à certaines autres sources de pétrole, mais pas toutes. La production du pétrole extrait des sables pétrolifères canadiens nécessite moins de carbone que celle du pétrole lourd du Venezuela ou de la Californie et moins encore que celle du pétrole du Nigeria ou d'Irak, et ce, à cause de tout le gaz naturel que ces pays font brûler en torche.
Quiconque souscrit à la théorie du réchauffement de la planète causé par l'homme devrait vouloir que le pétrole à teneur élevée en carbone produit au Venezuela, en Californie ou ailleurs soit remplacé par du pétrole à teneur moins élevée en carbone provenant des sables pétrolifères du Canada. Même cela ne donne qu'une idée partielle de l'équation.
Les sables pétrolifères dans leur ensemble émettent environ 30 mégatonnes de dioxyde de carbone chaque année, ce qui correspond à environ 5 p. 100 des émissions canadiennes totales. Aux États-Unis, il y a des centrales au charbon qui émettent 25 mégatonnes par année, et je pense notamment à la centrale Scherer à Juliette en Géorgie. Il ne s'agit là que d'une seule centrale, mais à elle seule, cette grande centrale arrive à peine à s'inscrire dans les 20 centrales au charbon les plus polluantes au monde.
Le pays qui émet le plus de dioxyde de carbone au monde, et de loin, c'est la Chine, qui compte une demi-douzaine de centrales au charbon plus grosses que celle de la Géorgie. La Chine construit deux ou trois nouvelles centrales au charbon par semaine.
Même si nous arrêtions entièrement l'exploitation des sables pétrolifères, mettant ainsi des centaines de milliers de Canadiens au chômage dans le but de réduire la production de dioxyde de carbone, moins d'une semaine plus tard, la Chine compenserait rapidement toute réduction de CO2 ainsi obtenue. C'est ce que les Chinois font sciemment. Les feux souterrains de charbon en Chine produisent 360 mégatonnes de dioxyde de carbone par année. Cela ne correspond qu'à ce qui a brûlé par accident. C'est l'équivalent de la production mensuelle de tous nos sables pétrolifères, mais ce n'est pas encore tout.
Si nous cessions complètement l'exploitation de nos sables pétrolifères, comme Greenpeace et les autres activistes voudraient que nous le fassions, ce pétrole serait remplacé par ce que pompent les autres pays de l'OPEP, des pays qui ont des bilans encore plus noirs en matière d'environnement. C'est l'envers de la devise des environnementalistes qui dit : « Aux problèmes mondiaux, des solutions locales. »
Les critiques des sables pétrolifères se livrent à une forme d'impérialisme de la pollution; ils préféreraient que les effets secondaires de la production de cette forme d'énergie surviennent dans le tiers monde plutôt qu'ici au Canada, même si nous réussissons bien mieux ici à atténuer la pollution. Ce n'est pas ce que l'on pourrait appeler un point de vue bien éclairé.
Je mentionne cela parce que très peu de critiques des sables pétrolifères le font. Ils préfèrent dénoncer une livre de CO2 produite au Canada plutôt qu'une tonne produite en Chine. Ce n'est pas véritablement la défense de l'environnement, ou bien c'est pour se faire du capital politique, ou bien c'est pour amasser des fonds.
N'allez cependant pas croire que j'accepte le statu quo sur le plan environnemental au Canada. Comme tout le monde au Sénat, j'espère que les sables pétrolifères et toutes les industries canadiennes continueront sans relâche de mettre au point de nouvelles techniques et de nouvelles manières de faire des affaires en devenant plus propres chaque année. Je sais que beaucoup des nouvelles techniques d'exploitation des sables pétrolifères, particulièrement les techniques souterraines in situ n'ont pas besoin de bassins de décantation et utilisent de l'eau non potable recyclée plutôt que l'eau des rivières. C'est un signe très encourageant de ce qui s'en vient.
D'autres techniques qui n'utilisent pas du tout d'eau sont mises à l'essai, comme le processus THAI de Petrobank, qui utilise à la fois des puits verticaux et horizontaux. C'est aussi un processus souterrain où le bitume est brûlé au moyen d'air comprimé et le pétrole liquéfié pour être extrait sans eau et sans vapeur.
Le processus THAI, qui n'utilise pas de mines à ciel ouvert, pas de bassins de décantation et pas d'eau, devrait être le rêve de tout environnementaliste, mais paradoxalement des lobbyistes dénonçant les sables pétrolifères ont été consternés par ces avancées technologiques parce qu'ils perdront les photos de mines à ciel ouvert, qui sont leur meilleur outil pour amasser des fonds.
Honorables sénateurs, lorsque les groupes de militants se mettent ensemble contre des entreprises occidentales libérales et donnent carte blanche aux dictateurs du monde, on peut obtenir des résultats pervers.
Souvenons-nous l'exemple de Talisman Energy. Il y a environ 10 ans, Talisman Energy a adhéré à un consortium qui extrayait du pétrole au Soudan. Talisman était la seule entreprise libérale et respectueuse des droits de la personne du groupe. L'entreprise a rapidement dépensé des millions de dollars pour monter des hôpitaux et des écoles et creuser de nouveaux puits artésiens. Elle a même donné des centaines de prothèses à des enfants soudanais mutilés par des mines terrestres. Talisman ne faisait pas que pomper du pétrole, elle fournissait des services sociaux et apportait un peu du Canada au Soudan.
Puisque le Soudan est un pays qui abuse des droits de la personne, Talisman a subi des pressions visant à l'en faire sortir. Des manifestants ciblaient Talisman et l'entreprise a même été menacée de sanctions et de poursuites. Le prix des actions de Talisman a commencé à chuter en raison de sa situation politique. Finalement, Talisman a cédé à la pression et est sortie du Soudan en vendant ses parts à la société pétrolière nationale de l'Inde.
Qu'est-il arrivé? La seule entreprise libérale au Soudan qui avait une conscience sociale est partie. Cette société en avait assez de subir de la pression, mais le pétrole n'a pas cessé de couler. Tout simplement, un pays qui fait fi des droits de la personne a acheté les parts de Talisman. Talisman est partie, les hôpitaux et les écoles ont disparu et le Soudan, loin de s'améliorer, a foulé aux pieds le concept des droits de la personne, tuant 300 000 de ses propres citoyens au Darfour.
Les ONG avaient toutes les raisons de s'inquiéter à propos du Soudan. La situation au Darfour leur a donné raison. Toutefois, protester contre le gouvernement du Soudan était difficile. S'en prendre aux autres sociétés pétrolières du Soudan l'était aussi. Elles ont donc attaqué la proie facile, la seule société pétrolière qui avait à cœur de défendre les valeurs occidentales et sa réputation libérale.
Où sont toutes les ONG qui ont chassé Talisman du Soudan? Elles ont trouvé un meilleur terrain de chasse. Elles s'en prennent maintenant aux sables pétrolifères. Nous sommes les prochains sur leur liste. S'il n'en tenait qu'à elles, elles arrêteraient l'exploitation de sables pétrolifères. Vous n'avez qu'à leur demander. Tout comme Talisman a été immédiatement remplacée par une société pétrolière pour qui les droits de la personne importaient peu, le pétrole extrait des sables pétrolifères serait remplacé par celui que produisent des pays qui n'ont rien à faire des droits de la personne, des pays comme l'Arabie saoudite et l'Iran.
(1540)
Comme le sénateur Eaton l'a fait valoir, les Canadiens sont modestes et humbles de nature. Nous sommes donc accueillants et tolérants envers les autres. Il arrive toutefois que cette même qualité nous rende vulnérables face à ceux qui sont prompts à en profiter. Des groupes d'activistes radicaux, dont la plupart sont financés par des lobbyistes étrangers, abusent de notre bonne foi pour s'attaquer injustement aux sables pétrolifères, donnant du même coup une chance de plus aux pires délinquants du monde. Trop souvent, en tant que pays, nous avons laissé nos détracteurs avoir le dessus avec leur discours moralisateur.
Il est temps de faire revivre cette grandeur morale. Tous les Canadiens, dans toutes les provinces, peuvent être très fiers de la façon dont nos sables pétrolifères sont exploités, non seulement au plan environnemental, mais aussi au plan du respect des peuples autochtones et des autres minorités de même qu'au plan du juste salaire. Il va sans dire qu'en tant que nation pacifique, le Canada a une bien meilleure réputation au plan moral que ce n'est le cas des bellicistes de l'OPEP. On devrait cesser de laisser jouer à Greenpeace et à d'autres groupes le rôle d'autorité morale pour dénoncer notre conduite alors qu'ils ignorent la conduite de l'OPEP.
Nous devrions établir clairement que contrairement à la société Talisman qui a été évincée du Soudan, nous ne nous laisserons pas évincer du secteur pétrolier pour laisser notre place à des concurrents qui font fi de l'éthique. Nous sommes Canadiens. Nous avons le sens de l'autocritique et du perfectionnement et nous sommes très patients, même à l'égard de ceux qui soulignent nos faiblesses. Toutefois, la patience a ses limites. La limite, c'est le tollé général qui a fait suite à la mort accidentelle de 230 canards par rapport au silence habituel devant les atrocités commises par les membres de l'OPEP.
À l'heure actuelle, l'OPEP est présidée par la République islamique d'Iran, ce pays qui fabrique des bombes nucléaires, qui s'en prend aux dissidents démocratiques, qui exporte le terrorisme et l'antisémitisme. Sur l'ordre des autorités en Iran, on a battu ou tué plus de 230 opposants au régime lors des dernières élections, qui étaient truquées. Pourquoi ne pas parler de cela plutôt que de parler de 230 canards?
Au nom des sénateurs de tous les partis et de toutes les provinces, je suis heureuse de me joindre au sénateur Eaton pour dire qu'il n'y a aucune raison d'avoir honte du pétrole du Canada. En fait, le pétrole canadien — celui extrait des sables pétrolifères — est le pétrole le plus éthique du monde.
(Sur la motion du sénateur Segal, le débat est ajourné.)
droits de la personne
Autorisation au comité d'examiner le rôle que peut jouer le gouvernement pour encourager la promotion et la protection des droits des femmes en Afghanistan
L'honorable Nancy Ruth, conformément à l'avis du 2 novembre 2010, propose :
Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, le rôle que le gouvernement du Canada peut jouer pour encourager la promotion et la protection des droits des femmes en Afghanistan quand le Canada aura mis fin à ses opérations de combat en 2011; et
Que le Comité présente son rapport final au Sénat au plus tard le 16 décembre 2010 et qu'il conserve tous les pouvoirs nécessaires pour publier ses conclusions pendant 180 jours suivant le dépôt du rapport final.
L'honorable Suzanne Fortin-Duplessis (Son Honneur la Présidente suppléante) : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
(La motion est adoptée.)
(Le Sénat s'ajourne au jeudi 4 novembre 2010, à 13 h 30.)